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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 6 mai 1996

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-203. Motion visant à la deuxièmelecture 2335
    Mme Gagnon (Québec) 2340

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

PROJET DE LOI C-12-MOTION D'ATTRIBUTION DE TEMPS

    Adoption de la motion par 113 voix contre 55 2342
    Adoption de la motion 2343

REPRISE DE L'ÉTUDE À L'ÉTAPE DU RAPPORT

    M. Chrétien (Frontenac) 2344
    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 2345

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

GIBBARD FURNITURE SHOPS

L'EMPLOI

LE PARTI LIBÉRAL

L'INDUSTRIE PÉTROLIÈRE ET GAZIÈRE

    M. Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing) 2354

CYRIL O'REILLY

LE SECTEUR FORESTIER

    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 2354

L'ENVIRONNEMENT

LA SUPER EXPO-SCIENCES BELL

TARGET TOP GUN

L'ASSOCIATION CANADIENNE DES SOCIÉTÉS FRATERNELLES

L'UNIVERSITÉ QUEEN'S

LA FORMATION PROFESSIONNELLE

HOMMAGE À LISE BISSONNETTE

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 2356

LES PÊCHES

LES PRIX DE L'ESSENCE

LA SEMAINE DE LA PROTECTION CIVILE

LES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES

QUESTIONS ORALES

LES RÉFÉRENDUMS

LE PARTI LIBÉRAL

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2359
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2359
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2359

LE SUPPLÉMENT DU REVENU GARANTI

LE PARTI LIBÉRAL

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2360
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2360

L'IMMIGRATION

    Mme Gagnon (Québec) 2361
    Mme Gagnon (Québec) 2361

L'AGRICULTURE

LE LIBERIA

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2362
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2362

L'OMBUDSMAN DES BANQUES

    M. Martin (LaSalle-Émard) 2362

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

    M. Martin (LaSalle-Émard) 2363
    M. Martin (LaSalle-Émard) 2363

LA CONVENTION FISCALE CANADO-AMÉRICAINE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 2363
    M. Martin (LaSalle-Émard) 2363

LES PRISONS

L'AÉROPORT INTERNATIONAL DE VANCOUVER

LE COMMERCE INTERNATIONAL

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 2365

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

LE PRIX DE L'ESSENCE

LE RECENSEMENT DE 1996

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE DÉPUTÉ DE NORTH VANCOUVER

QUESTION DE PRIVILÈGE

QUESTIONS AU FEUILLETON-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA FISCALITÉ

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'ENVIRONNEMENT

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

    Projet de loi C-12. Reprise de l'étude à l'étapedu rapport 2368
    Report du vote sur la motion 2385
    Report du vote sur la motion 2386
    M. Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing) 2386

2335


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 6 mai 1996


La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

LE CODE CRIMINEL

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ) propose: Que le projet de loi C-203, Loi modifiant le Code criminel (organisation criminelle), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, permettez-moi, d'entrée de jeu, de signifier qu'il s'agit non seulement de modifier le Code criminel, comme vous l'avez mentionné, mais de doter le Code criminel des principales dispositions qui permettraient au Canada d'avoir un outil indispensable pour lutter contre le crime organisé qui s'appellerait une loi antigang.

Permettez-moi de référer à ce qui m'a motivé à présenter un projet de loi comme celui-là. Vous vous rappellerez qu'au mois d'août dernier, au début août, avait lieu dans le comté d'Hochelaga-Maisonneuve que je représente ici à la Chambre des communes, un attentat à la voiture piégée des suites duquel est décédé un enfant de 11 ans, Daniel Desrochers, qui a eu l'infortune dans la vie de se trouver à la mauvaise place au mauvais moment.

L'attentat à la voiture piégée, on va s'en rappeler, a été la démonstration la plus éloquente, la plus perverse et la plus détestable de ce qui peut arriver dans une société quand on n'a pas les outils qu'il faut pour lutter contre le crime organisé. Je vous rappelle que ceci s'est produit dans le contexte de luttes fratricides auxquelles se livraient les Hell's Angels et les Rock Machine.

Commençons par le début, et j'espère que les pages m'amèneront un peu d'eau parce que je ne tiendrai pas 20 minutes, pour être franc avec vous. On parle aujourd'hui du crime organisé. Le crime organisé est une réalité qui concerne l'ensemble des villes au Canada. Je vous ai référé à un exemple du comté d'Hochelaga-Maisonneuve, mais la menace que font peser le crime organisé, le monde interlope et la mafia est aussi vraie pour Toronto, York, Vancouver et Halifax que pour l'ensemble des grandes villes du Canada.

Le crime organisé est une réalité omniprésente. Rappelons-nous comment opère le crime organisé. Ce ne sont pas toutes les sociétés qui sont aux prises avec le crime organisé. Il y a certaines conditions pour que le crime organisé puisse proliférer. La première de ces conditions, c'est qu'on doit être en présence d'un milieu riche, un milieu où le monde interlope peut faire des bénéfices. Nous devons être en présence d'une société ouverte où les axes de communications permettront au monde interlope de communiquer avec tous les continents. Ce n'est pas pour rien, encore une fois, je le répète, que la mafia, le monde interlope et le crime organisé, c'est surtout le lot des grandes villes.

Quand je pense à l'exemple de Montréal, avec son port, ses routes, ses autoroutes, ses aéroports, on comprend qu'il y a une facilité hors du commun pour le monde interlope d'être en liaison avec les grands continents et d'avoir des réseaux extrêmement accessibles. Ça prend également une société libre de dictature, une société où il y a des droits. Donc, ça prend une société où il y a un État de droits, des chartes, où on confère des droits égaux à tous les individus. C'est dans une société extrêmement bureaucratisée que, généralement, le monde interlope a le plus de facilité à s'implanter.

Cela étant dit, nous avons tous présent à l'esprit l'attentat à la voiture piégée à la suite duquel est décédé le jeune Daniel Desrochers. Je peux facilement prévoir et prédire, pour être en contact avec l'Association des chefs de police du Canada, qu'il y a d'autres points chauds dans d'autres villes au Canada, particulièrement en Ontario. J'espère que les députés de l'Ontario voteront en faveur de ce projet de loi, parce que plus tard, je solliciterai votre consentement pour qu'il puisse faire l'objet d'un vote. Soyons clairs, si nous ne prenons pas des mesures pour lutter contre le crime organisé, on se prépare des lendemains extrêmement troubles.

Que se passe-t-il? Le crime organisé opère par phase. On commence par contrôler un territoire. Une fois qu'on contrôle le territoire, ce qui se fait par la peur et l'intimidation, il y a une deuxième phase, le blanchiment d'argent. Au Canada, pour l'an dernier, on estime que le blanchiment d'argent a totalisé 20 milliards de dollars, ce qui signifie qu'il y a toute une économie parallèle qui se met en place et cela nous donne une idée de l'importance du crime organisé au Canada.

Donc, le crime organisé opère par phase. Il s'implante dans des villes ou dans des régions où il y a des facilités de communications. Il prend le contrôle d'un territoire, et ensuite, on assiste à des activités de blanchiment d'argent. Dans une troisième phase, cela donne lieu à de l'investissement dans des activités légales et illégales. Je vous disais que pour le Canada, c'est à hauteur de 20 milliards qu'est estimée l'activité de blanchiment d'argent telle qu'évaluée par les services policiers de ce pays.

(1110)

Le crime organisé, non seulement blanchit l'argent, mais il l'investit dans des activités très spécifiques. Dans le cas de Montréal, je me suis laissé dire par les milieux concernés, par les gens qui ont étudié et qui connaissent la réalité du monde interlope, qu'à l'instant où on se parle, les activités d'investissement sont surtout


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dans le domaine de la restauration et dans celui de la construction qui sont deux domaines de prédilection pour le monde interlope.

Que se passe-t-il? Quelle est la réalité? Donnons quelques chiffres qui m'ont été rapportés par celui qui est sans doute la personne la plus en autorité, la personne connaissant le mieux les activités des bandes criminalisées, et je parle bien sûr de M. Sangollo du service de police de la Communauté urbaine de Montréal, le responsable des enquêtes et de la criminalité organisée.

M. Sangollo nous disait qu'au Canada, les saisies de stupéfiants représentent entre 1,5 et 4 milliards de dollars. On nous rappelle que la police saisit à peu près 10 p. 100 de ce qui se trafique au Canada. Cela vous donne une idée de l'ampleur de ce phénomène.

Je rappelais tantôt que 20 milliards de dollars sont investis annuellement au Canada par le monde interlope dans des activités licites et illicites. Quand on parle d'investissements, c'est là qu'on comprend qu'il y a une interconnexion, il y a une interface entre le monde interlope et le monde légal. S'il y a 20 milliards d'investis en argent illégal et légal, c'est donc qu'il y a des comptables, c'est qu'il y a des avocats, il y a des gens en autorité qui permettent la réalisation de ces activités. Il y a même certaines personnes qui pensent que nous avons des gens de la classe politique qui facilitent ce genre d'activités, mais vous comprendrez qu'il ne m'appartient pas de les identifier. Je laisserai aux gens qui en ont l'autorité le soin de le faire.

Le monde interlope est lié à un contrôle de territoire, est lié à un blanchiment d'argent et est lié à des investissements dans des activités légales et illégales. Vous le comprenez, on parle de la réalité du monde des stupéfiants qui est le commerce, qui est la façon dont le monde interlope s'enrichit le plus facilement.

Je peux peut-être vous donner d'autres exemples. On dit que 75 à 80 p. 100 du trafic des stupéfiants dans les bars au Québec est contrôlé par le crime organisé; 75 à 80 p. 100, ce n'est pas rien. Il y a 90 p. 100 de la cocaïne et du haschich saisis au Canada depuis 1988 qui étaient d'abord destinés au réseau criminel du Québec. Montréal, dont on rappelait qu'il y a des aéroports, des routes transcontinentales, un système ferroviaire efficace, Montréal a sur son territoire les têtes dirigeantes de la mafia.

Dans ce contexte, il est très important que, comme parlementaires, nous prenions nos responsabilités. Je n'ose même pas penser que ce gouvernement ne me donnera pas son appui pour déclarer que ce projet de loi peut faire l'objet d'un vote, et non seulement déclarer qu'il peut faire l'objet d'un vote, mais faire en sorte qu'un véritable débat s'engage ici même au Parlement. Est-ce que nous n'avons pas la responsabilité de faire en sorte que Daniel Desrochers, décédé au mois d'août dernier des suites d'un attentat à la voiture piégée dans mon quartier, ne soit pas mort en vain? Et pour qu'il ne soit pas mort en vain, nous avons la responsabilité d'agir.

La première façon d'agir, c'est de prendre nos responsabilités comme parlementaires. Prendre nos responsabilités comme parlementaires, c'est proposer de modifier le Code criminel pour y inclure les principales dispositions d'une loi antigang.

Je ne dis pas que ce que je propose est parfait, je ne dis pas que c'est le fin mot. S'il y a un parlementaire dans cette Chambre qui décide, d'une manière ou d'une autre, que ce soit un ministériel ou un député de l'opposition, de bonifier le projet de loi, toute espèce de suggestion intelligente, de quelle couleur qu'elle soit, sera la bienvenue.

(1115)

Mais nous avons essayé, et j'ai essayé, de présenter une contribution de ce que pourrait être la grande configuration, de la forme que pourrait prendre une loi antigang.

Je propose quatre choses, et j'ai passé pas mal de temps à consulter des avocats, des criminalistes et des gens qui sont familiers avec le droit criminel. La première chose que je propose, c'est qu'on donne la définition suivante d'une organisation criminelle: «Tout groupe d'individus qui s'adonnent à des activités qui les mettent en conflit sérieux avec la société et les forces de l'ordre.» Et j'insiste sur le fait «qui les mettent en conflit sérieux». Ces groupes, s'ils ont en leur sein cinq individus qui ont, par le passé, commis des infractions de criminalité organisée, cela permettra à la magistrature de considérer qu'on est en présence d'une organisation criminelle.

Les infractions de criminalité organisée existent dans le Code criminel depuis 1987. Il s'agit du vol, du recel, de l'usage de faux et de l'abus. Il y a une trentaine d'infractions qui existent déjà.

Ce qui n'existe pas, c'est une définition de ce qu'est une organisation criminelle. Le mérite du projet de loi est de permettre à la magistrature d'utiliser trois présomptions à partir desquelles il sera possible, pour les avocats de la défense, pour le ministère public, de traduire les têtes dirigeantes devant les tribunaux. Le grand paradoxe auquel on fait face, c'est que les têtes dirigeantes du crime organisé, à Montréal comme ailleurs, sont connues des forces policières, mais on n'est pas capable de les traduire devant les tribunaux parce que, tel que le Code criminel existe, ils doivent être pris en flagrant délit d'exécution. On sait très bien que ceux qui ont posé la bombe qui a provoqué le décès du jeune Daniel Desrochers, ne sont évidemment pas les mêmes que ceux qui ont planifié l'exécution de cet attentat.

On en est, dans la lutte contre le crime organisé, à tenter de se donner des moyens pour traduire devant les tribunaux les têtes dirigeantes. Pour ce faire, sur le plan du droit, mon projet de loi, en plus de définir ce qu'est une organisation criminelle, propose trois présomptions. La première présomption: un individu qui fréquente une organisation criminelle sera réputé en vivre. Cela m'apparaît très clair. On peut faire le lien avec la prostitution.

Présentement, dans le Code criminel, un individu qui côtoie, sur une base régulière, des prostituées est réputé vivre de la prostitution. Alors, la première présomption à partir de laquelle il serait possible de traduire les têtes dirigeantes du crime organisé devant les tribunaux serait la présomption qu'à partir du moment où un individu fréquente les organisations criminelles, il est réputé en vivre.

La deuxième présomption, non moins importante, dit qu'un individu qui fréquente les lieux apparentés à la criminalité organisée est réputé vivre des produits d'une organisation criminelle.

Et la troisième présomption à partir de laquelle il sera possible pour le ministère public de traduire les têtes dirigeantes devant les tribunaux, on va dire qu'un individu dont le revenu, dont le patri-


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moine, entre le moment de l'infraction et le moment où il sera traduit devant les tribunaux, aura augmenté démesurément, sera réputé vivre des produits d'une organisation criminelle. Ce n'est pas normal qu'un individu qui valait 10 000 $ à la sécurité du revenu, qui était connu comme étant un prestataire d'aide sociale par les autorités policières, trois semaines, trois mois ou un an après, ait une fortune personnelle évaluée à trois millions. Vous n'allez quand même pas me convaincre que cet individu a gagné trois fois à Loto-Québec; ce n'est pas de ça dont on parle. Ce dont on parle, c'est la façon illicite dont les individus s'enrichissent.

Alors, à partir d'une définition qui se tient juridiquement de ce qu'est une organisation criminelle, on va créer une nouvelle offense dans le droit criminel, une nouvelle infraction, celle de vivre des produits d'une organisation criminelle, et on va donner à la magistrature trois présomptions à partir desquelles il sera possible de traduire les têtes dirigeantes du crime organisé devant les tribunaux.

Ces présomptions existant, cela ne veut pas dire qu'elles ne pourront pas être renversées par les avocats de la défense; cela ne voudra pas dire que les principes de justice naturelle ne s'appliqueront pas, mais cela veut dire qu'il appartiendra à l'individu de démontrer, par exemple, la façon dont il s'est enrichi.

(1120)

Une autre disposition de ce projet de loi qui est demandée depuis de nombreuses années par les autorités constabulaires pour lutter contre le crime organisé, c'est cette nécessité que les gens qui sont incarcérés purgent les trois quarts de leur peine. Il n'y aura pas de remise de peine si ce projet de loi est adopté et il n'y aura pas d'accessibilité à la libération conditionnelle avant que les individus, une fois la sanction administrée, aient purgé les trois quarts de leur peine. Pourquoi est-il nécessaire de maintenir les trois quarts d'une peine ferme pour les individus? C'est parce que c'est ainsi que les réseaux se démantèlent et qu'on interrompt la chaîne de commandement dans le crime organisé et dans le monde interlope.

Je termine en disant une chose qui n'est pas anodine concernant mon projet de loi. Ça m'a pris évidemment beaucoup de consultations, j'ai hésité à le faire, mais je pense que si nous voulons être saisis d'un projet de loi qui se tienne, qui a tout son mérite sur le plan juridique, j'ai prévu l'utilisation de la clause dérogatoire, le notwithstanding clause comme disent les Anglais, c'est-à-dire l'article 33 de la Loi constitutionnelle de 1982. Pourquoi ai-je choisi d'y recourir? C'est parce que je sais bien que si ce projet de loi était adopté et qu'il faisait suite à une contestation judiciaire par l'un ou l'autre des tribunaux de droit commun de ce pays, on pourrait y voir une limitation à la liberté d'association, à la liberté d'expression, et à l'article 7 portant sur les garanties juridiques de la Charte, qui est la présomption d'innocence.

Je suis convaincu que nous représentons tous des gens dans différentes circonscriptions qui accepteraient très bien que ce Parlement prenne ses responsabilités, et qu'il les prenne à ce point que pour lutter efficacement contre le crime organisé, il est possible que nous devions restreindre certaines libertés, restreindre la portée de la Charte.

Vous savez que j'ai déposé une pétition de 65 000 noms en février dernier, qui a circulé à travers le Québec, de gens qui demandent l'adoption d'une loi antigang. Je n'ai rencontré personne qui m'ait dit: «Oui, mais vous savez, il est important qu'on permette que les gens les plus criminalisés de notre société circulent parce que nous avons une Charte». Ce n'est pas le but d'une Charte. Je suis convaincu que mes concitoyens dans Hochelaga-Maisonneuve, comme l'ensemble des Canadiens et des Québécois, sont prêts à voir restreindre une portion de liberté au nom de l'intérêt supérieur qu'est la lutte au crime organisé.

C'est pour ce faire que j'ai prévu, dans mon projet de loi, un recours à la clause «nonobstant» qui n'a pas été utilisée souvent, c'est vrai. Pour dire la vérité-je suis convaincu que l'un ou l'autre des ministériels va le rappeler-la clause «nonobstant» n'a jamais été utilisée par le Parlement canadien. Elle a été utilisée par deux provinces: le Québec, entre 1982 et 1985 et en 1989 suite au jugement Brown, et la Saskatchewan, dans un cas de conflit de relations de travail. Si le législateur a prévu l'utilisation possible de la clause «nonobstant», c'est parce qu'on sait bien qu'il y a certaines circonstances, et je pense que la menace que fait peser la criminalité organisée à travers ces pays que sont le Québec et le Canada est à ce point importante que nous avons la responsabilité comme parlementaires de dire qu'il n'y aura pas de loi antigang possible s'il n'y a pas un article dérogatoire.

Nous ne pouvons pas accepter que ce qui s'est produit dans Hochelaga-Maisonneuve et à Montréal se produise dans d'autres villes. Je sollicite le consentement pour que vous puissiez vérifier si ce projet de loi pourrait faire l'objet d'un vote et que non seulement il puisse faire l'objet d'un vote, mais qu'il puisse faire l'objet de deux autres heures de débat, parce que la situation est à ce point grave que les parlementaires vont partager mon diagnostic.

(1125)

Le vice-président: Excusez-moi, j'ai mal compris ce que l'honorable député a dit. Chers collègues, le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le vice-président: Puisque j'ai entendu des non, et comme le député le sait, c'est refusé.

M. Lefebvre: Monsieur le Président, je pense que les oui étaient plus forts que les non.

Le vice-président: Mon collègue a absolument raison, mais malheureusement, s'il y a un seul non et que la Présidence est capable de l'entendre, c'est refusé. Ce n'est pas une question de quantité ou de volume.

M. Ménard: Monsieur le Président, on prend évidemment note de la lâcheté des ministériels sur les dossiers le moindrement controversés. Les Canadiens jugeront à ce moment-là leur gouvernement. Mais est-ce qu'on pourrait au moins vérifier s'il y a consentement pour que le projet de loi soit renvoyé au Comité de la


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justice et des questions juridiques, sans qu'il fasse l'objet d'un vote?

Le vice-président: Comme le député peut faire n'importe quoi s'il obtient le consentement unanime de la Chambre, les députés sont-ils prêts, de façon unanime, à renvoyer le projet de loi au Comité de la justice et des questions juridiques, tel que proposé par le député?

Des voix: Oui.

Le vice-président: Je n'entends pas de non. Est-ce que quelqu'un dit non?

Une voix: Non.

Le vice-président: Voilà, c'est fait. J'accorde maintenant la parole à l'honorable secrétaire parlementaire du ministre de la Justice.

[Traduction]

M. Kirkby: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je me suis prononcé contre l'adoption de la motion par la Chambre, alors que vous avez dit ne pas avoir entendu une seule réponse négative.

Le vice-président: Je prends bonne note du non. Le secrétaire parlementaire s'est identifié comme l'auteur de cette réponse négative. S'il le juge à propos, c'est son droit. Il peut maintenant intervenir dans le débat.

M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat d'aujourd'hui sur le projet de loi C-203 qu'a présenté le député d'Hochelaga-Maisonneuve.

Le projet de loi vise à modifier le Code criminel à l'égard des organisations criminelles. En particulier, il ajouterait une nouvelle partie au code. Il créerait une nouvelle infraction, à savoir vivre entièrement ou en partie des produits provenant d'une organisation criminelle, qui serait assortie d'une peine maximale de 10 ans d'emprisonnement. De plus, il retiendrait deux présomptions à l'égard des personnes qui pourraient faire partie d'une organisation criminelle.

Le projet de loi s'inspire abondamment des dispositions de la partie XXII.2 du Code criminel qui traite des produits de la criminalité et les modifie en vue d'étendre leur champ d'application au patrimoine des organisations criminelles.

Par ailleurs, le projet de loi oblige les tribunaux à ordonner que le délinquant reconnu coupable d'avoir commis cette infraction purge les trois quarts de sa peine.

Le projet de loi reconnaît que certaines de ces dispositions peuvent être en contradiction avec la charte et c'est ainsi qu'il cite le paragraphe 33(1) de la Charte canadienne des droits de la personne en mentionnant que le projet de loi déroge à certains droits et libertés garantis par la charte.

Les problèmes liés aux organisations criminelles sont difficiles et complexes. D'aucuns ont soutenu que notre Code criminel ne met pas à la disposition des services de l'ordre les outils dont ils ont besoin pour lutter contre les organisations criminelles. Selon certains, le taux de succès relativement peu élevé que nous enregistrons lors des enquêtes et des poursuites visant les dirigeants d'organisations criminelles serait la preuve que nos lois sont insuffisantes. En toute logique, il faudrait donc changer nos lois. Or, vu la portée de certaines des solutions proposées, il appartient à leur auteur de lever certaines inquiétudes qui en découlent.

Au cours de quelques minutes qui suivent, j'aimerais toucher un mot sur la manière dont ce dossier est traité aux États-Unis, et notamment sur une loi américaine dont le Canada pourrait s'inspirer. Je me reporte, bien entendu, aux dispositions dites Racketeer Influenced and Corrupt Organizations, ou RICO comme on les appelle, sur les organisations corrompues et impliquées dans des rackets.

(1130)

Les dispositions RICO de la loi dite Organized Crime Control Act de 1970 représentent la tentative faite par le Congrès des États-Unis pour contrôler la croissance du crime organisé aux États-Unis.

En réponse au rapport de la commission du président sur l'application de la loi et l'administration de la justice, la commission Katzenbach, le Congrès a adopté ce qui est devenu le Title IX de l'Organized Crime Control Act de 1970. En adoptant les dispositions RICO, le Congrès a mis en place le cadre juridique grâce auquel il espérait se débarrasser du cancer que constitue le crime organisé dans la société américaine. Ce faisant, le Congrès a mis l'accent sur l'infiltration criminelle d'entreprises légitimes. Il s'est basé sur l'appareil juridique en place pour s'attaquer à d'autres problèmes criminels comme le jeu et la prostitution. Pour lutter contre le cancer que constitue l'infiltration des entreprises, le Congrès a proposé de s'en prendre au crime organisé en l'attaquant directement, en le forçant à se retirer de ces entreprises et en l'empêchant d'y revenir.

Le problème fondamental en ce qui concerne la rédaction de ces dispositions était de trouver une méthode constitutionnelle grâce à laquelle on pourrait définir le crime organisé. On a choisi délibérément de ne pas rendre illégale et de façon explicite l'appartenance à des groupes criminels organisés, comme la Mafia, car on savait qu'il pourrait être difficile, sur le plan constitutionnel, de faire de l'appartenance à une organisation un crime et de définir ce qui constituait un syndicat du crime organisé. Plutôt, pour garantir la constitutionnalité de ces dispositions, le Congrès a rendu surtout illégal le fait de se livrer à une suite d'activités de racket contre une entreprise.

Incapable de définir ce qu'étaient les syndicats du crime organisé et d'interdire ensuite toute appartenance à ces groupes, le Congrès s'en est remis à une définition opérationnelle du crime organisé et il a essayé de s'attaquer aux organisations criminelles en s'en prenant à leurs activités. Ainsi, les dispositions RICO visent un large éventail d'activités criminelles, mais pas la simple appartenance à une


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organisation qu'on ne peut définir qu'en termes vagues, si cette définition peut être utile en quoi que ce soit. Elles interdisent les activités d'un groupe, mais non l'appartenance à ce groupe.

La première version de ces dispositions s'appliquaient à toute personne qui investissait délibérément des revenus non déclarés, quelle que soit la source de ce revenu ou la situation criminelle de l'investisseur. Dans la version finale, cependant, les dispositions RICO ne se limitent pas à l'appartenance, définie par la loi, à la Mafia. Ce qui était nouveau à ce moment-là dans ces dispositions, ce n'était pas les peines d'amende ou d'emprisonnement, mais bien l'article donnant au gouvernement des États-Unis le pouvoir de confisquer tous les avoirs illicites ou tous les profits tirés d'une entreprise infiltrée par des criminels.

L'objectif avoué de l'Organized Crime Control Act de 1970, dont font partie les dispositions RICO, est de faire disparaître le crime organisé en établissant de nouvelles interdictions pénales, en prévoyant des sanctions plus sévères et de nouveaux recours. Pour réaliser cet objectif général, le Congrès a établi un cadre législatif élaboré interdisant tout un éventail d'activités de racket.

Le premier article des dispositions RICO contient les définitions. En particulier, la définition d'activité de racket s'éloigne de façon marquée des lois criminelles typiques, car elle renferme des activités considérées comme criminelles de tout temps, comme le meurtre, le trafic de stupéfiants et le jeu, ainsi que des activités comme l'extorsion, la fraude postale ou informatique et les fraudes en valeurs mobilières. N'importe laquelle des infractions énumérées dans cette définition peut conduire à des accusations criminelles aux termes des dispositions RICO.

De façon aussi large, on considère qu'il y a suite d'activités de racket lorsqu'on est en présence d'au moins deux activités de ce genre, la dernière étant séparée de dix ans au plus de celle qui la précède, sans compter les périodes d'emprisonnement possibles.

Le deuxième article des dispositions RICO établit la liste des crimes qui découlent de la participation à une suite d'activités de racket. L'alinéa 1962a) interdit l'acquisition d'un intérêt dans une entreprise légitime par le biais d'un investissement d'argent obtenu dans le cadre d'une activité de racket. L'alinéa 1962b) interdit l'acquisition d'une entreprise légitime par des actes de racket. L'alinéa 1962c), la disposition la plus utilisée, interdit l'exploitation d'une entreprise en utilisant des activités de racket. L'alinéa 1962d) interdit la conspiration pour commettre l'une des infractions prévues à l'article 1962.

(1135)

La loi sur les RICO interdit, entre autres choses, l'installation d'une entreprise dans un contexte d'activités de racket. Ces mots ont fait dire au juge Scalia de la Cour suprême des États-Unis, dans une décision de 1989:

Que la plus haute cour du pays soit incapable de tirer de cette loi autre chose qu'une maigre indication augure mal pour le jour où on présentera une contestation constitutionnelle.
Ceux qui connaissent l'histoire de la loi sur les RICO sauront qu'elle était destinée à arrêter l'infiltration des resquilleurs dans les organisations légitimes. Le Canada a choisi d'intervenir au niveau des profits du crime pour obtenir le même résultat, c'est-à-dire empêcher que le crime ne soit profitable.

Ceux qui connaissent le fonctionnement de la loi américaine sauront que l'État doit prouver qu'il y a au moins deux actes confirmés constituant une structure d'activités de racket, ces actes confirmés étant, à toutes fins utiles, d'autres infractions codifiées, avant de pouvoir recourir à la loi sur les RICO.

Le vice-président: Le temps accordé au député est terminé.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, ce projet de loi présenté par mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve essaie de résoudre un très grave problème qui se pose au Canada. Je tiens à dire au départ que nous appuyons les efforts du député et nous souscrivons à son projet de loi.

Comme mon vis-à-vis vient de le dire, de très graves questions sont en jeu dans le cas présent. Comme le député d'Hochelaga-Maisonneuve l'a reconnu très franchement, il y a des intérêts tout à fait opposés dont on doit tenir compte lorsqu'on adopte la mesure qu'il propose. Il ne cache pas que ce n'est pas une mesure qu'il entreprend à la légère ni que les Canadiens devraient accepter facilement. Ce qu'il prétend, et il a au moins mon appui, c'est que la situation est suffisamment grave pour justifier des mesures sévères, que nos législateurs devraient appuyer.

Le crime organisé est, au Canada, un très grave problème qui prend de plus en plus d'ampleur, malheureusement. Beaucoup de gens au Canada ignorent au juste l'ampleur du problème.

Je me suis entretenue, le week-end dernier, avec un homme qui travaille pour les services de renseignement d'un corps policier au Canada et il m'a dit certaines choses qui étaient bouleversantes et inquiétantes, qui avaient vraiment de quoi faire peur. Je lui ai demandé pourquoi personne n'était au courant de cela. Je ne l'étais pas. Pourquoi en va-t-il de même des Canadiens? C'est leur pays, c'est leur sécurité, c'est leur avenir qui sont en jeu. Pour quelles raisons n'avons-nous pas une meilleure idée des problèmes qui se posent au Canada? À son avis, et ce n'était là qu'une opinion personnelle, on a le sentiment que personne ne sait au juste comment résoudre ce problème et qu'il est donc préférable de ne pas essayer d'y faire face et de reconnaître son existence, car nous serions alors forcés d'agir.

Il est très important que les députés n'alarment pas la population inutilement. Il est essentiel que les députés s'occupent des graves problèmes nationaux de façon très discrète, modérée et équilibrée.

Lorsque notre pays est confronté à de graves problèmes, il n'est plus acceptable de simplement les cacher ou d'en faire fi. Je félicite le député d'Hochelaga-Maisonneuve qui reconnaît que non seulement dans sa région du pays, mais dans d'autres régions du pays, on est confronté à une situation grave à laquelle il faut carrément faire face. Ensemble nous devons réfléchir afin de trouver des solutions


2340

et d'élaborer des stratégies de nature à contenir le phénomène, voire à l'atténuer.

(1140)

Comme l'a fait observer à juste titre le député, ce n'est peut-être pas la meilleure ou la seule solution au problème, mais il ne s'agit pas moins d'une solution. Il est certain que le ministère de la Justice et le ministre de la Justice n'ont pas su trouver mieux jusqu'ici.

Il y a quelque chose qui m'inquiète beaucoup dans le fait que le représentant du gouvernement qui vient de prendre la parole ne dispose d'aucune autre solution, ne propose rien qui vaille pour s'attaquer à ce problème très grave et refuse même d'autoriser le renvoi du projet de loi au comité de justice de la Chambre des communes. Le gouvernement veut simplement tuer le projet de loi en ne présentant aucune solution et en refusant de s'attaquer à un problème qui est très grave. Nous n'avons pas interrogé et écouté de témoins ni obtenu les opinions d'expert sur ce projet de loi d'initiative parlementaire comme nous l'aurions souhaité.

Le député s'est montré très raisonnable en offrant à la Chambre l'occasion de se pencher sur ses propositions. Cela aurait très vraisemblablement débouché, le député l'a admis en toute franchise, sur des propositions améliorées, plus efficaces, et à tout le moins la question aurait ainsi été abordée.

Or, le gouvernement libéral essaie de faire oublier l'affaire, refusant même de discuter des mesures à prendre pour contenir ce phénomène très grave. Je trouve cela tout à fait inacceptable de la part d'un député qui a reçu pour mandat de défendre les intérêts des Canadiens et de régler les grands dossiers de l'heure.

Le projet de loi que parraine le député a pour objet d'inscrire une nouvelle infraction au Code Criminel, afin d'interdire à quiconque de vivre des profits d'actes criminels. La mesure vise en particulier les membres d'organisations criminelles, dont les bandes de motards, la mafia, la mafia russe et les bandes asiatiques. Malheureusement, comme l'administration de la justice au Canada manque de rigueur et de moyens, ces organisations se développent sans contrôle. D'ailleurs, en présentant ce projet de loi, le député a déclaré que, comme d'autres, il s'inquiétait de l'influence grandissante de ces organisations au Canada.

Le projet de loi vise aussi ceux qui s'associent aux organisations criminelles et se rendent ainsi coupables par association. Comme les députés le savent, la Charte canadienne des droits et libertés protège la liberté d'association. C'est un droit très important dans une démocratie et le traiter à la légère reviendrait à exposer notre société à de graves dangers. La protection de la liberté d'association est clairement et indéniablement dans l'intérêt des Canadiens.

La semaine dernière, un des collègues du député a présenté un projet de loi visant à modifier les procédures de nos tribunaux, afin d'assurer la protection de témoins dans des causes d'agressions sexuelles et d'agressions avec violence. Je me suis opposée à cette mesure, parce que j'étais d'avis que le tort qu'elle causerait aux principes du droit jurisprudentiel qui sont dans l'intérêt public n'était pas justifié.

Il faut étudier ces questions avec beaucoup de prudence. On ne s'entend pas sur l'équilibre à établir entre les droits et les besoins de la société. Étant convaincue du sérieux de la situation, je crois que nous pourrions et devrions examiner soigneusement les mesures proposées par le député qui parraine le projet de loi.

(1145)

De toute évidence, les procédures prescrites par le Code criminel sont insuffisantes. Par exemple, les techniques de blanchiment d'argent deviennent de plus en plus perfectionnées. Il est fort difficile pour les agents d'exécution de la loi de faire leur travail et de venir à bout des activités criminelles et de leurs résultats.

Étant donné la misère qui en découle, nous ne pouvons pas accepter les activités de ces organisations criminelles. Tous les Canadiens devraient s'acharner contre elles.

Comme le député l'a dit, les activités de ces organisations criminelles sont un problème très grave et leurs conséquences sur divers éléments de notre société, sur les jeunes, les familles et les collectivités, ainsi que sur la sécurité publique en général, sont énormes, et il faut réagir. Il faut s'attaquer au problème de front.

Je suis convaincue qu'il est préférable de s'attaquer aux problèmes lorsqu'ils sont de taille modeste plutôt que d'attendre qu'ils prennent les proportions d'une vraie crise. Nous devrions examiner sérieusement ce problème. Les propositions qui nous sont soumises ne sont peut-être qu'un élément de la solution, mais nous devons assurément les étudier.

Le 18 août 1995, le ministre de la Justice aurait déclaré, selon un article du Sun de Toronto: «Nous ne devons pas présumer que c'est en adoptant encore une autre loi fédérale que nous allons résoudre le problème.» Le 29 mars 1995, dans des déclarations qui ont été reproduites par la Gazette de Montréal, il a dit que le gouvenement fédéral envisagerait de modifier le Code criminel pour lutter contre les motards, mais il n'a rien fait.

Que faut-il penser? Le ministre de la Justice doit faire preuve de leardership. En tout cas, lorsque des députés prennent des initiatives, nous ne devons surtout pas refuser d'écouter leurs propositions et d'en discuter. Cela m'indigne. Je suis en profond désaccord avec les députés libéraux qui ont refusé le consentement unanime pour que ce projet soit étudié au Comité de la justice.

Je crois que c'est une chose que nous devrions. . .

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, la ville de Québec, que j'ai l'honneur de représenter en cette Chambre, est connue mondialement comme le siège de la culture française en Amérique du Nord. Elle est également réputée pour son


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magnifique site, son vieux quartier, sa vie culturelle et touristique, son accueil chaleureux. Une capitale tranquille, quoi.

Par ailleurs, la ville de Montréal est connue comme une des grandes métropoles en Amérique du Nord. À ce titre, il va de soi que, malheureusement, elle connaisse un certain niveau de criminalité habituel aux métropoles. Quand on vit à l'extérieur de Montréal, on est conscients de ce fait et on sait qu'il est un peu inévitable.

Voilà cependant que la ville soit-disant tranquille, la ville de Québec, commence à éprouver certains problèmes de la métropole. Le plus frappant est sûrement celui de la criminalité organisée qui se manifeste encore bien sûr de façon sporadique, mais évidente. Une fois passé le choc, on commence à comprendre un peu mieux les problèmes vécus par nos concitoyens et concitoyennes de Mont-réal.

En effet, la guerre des motards reprend de plus belle dans la région de Québec, et plus particulièrement la semaine dernière, dans le quartier Saint-Roch. Les gens ont peur et se demandent quelle ampleur cette rivalité prendra. C'est pourquoi je trouve important d'intervenir aujourd'hui dans le débat entourant le projet de loi présenté par mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, projet de loi portant sur les organisations criminelles.

Je dois avouer que la lecture du dossier s'est avérée fort instructive. Ce que le dossier nous apprend, c'est que le Québec détient le douteux titre de siège du crime organisé pour l'ensemble du Canada. En effet, surtout au niveau du trafic de la drogue, la quasi-totalité de la cocaïne et du haschisch saisis au Canada l'est au Québec. Cela ne veut pas dire que c'est la population montréalaise qui consomme le tout, c'est juste que Montréal est le port d'entrée, la plaque tournante du trafic. Cela indique donc que les réseaux criminels y ont pignon sur rue et sont très bien organisés.

(1150)

J'ai aussi appris que certaines conditions sont nécessaires pour qu'un tel réseau criminel puisse opérer. Ainsi, pour que les organisations criminelles fleurissent, il faut un milieu riche qui permet aux criminels de faire des bénéfices. Il faut aussi un milieu ouvert, donc relié aux autres régions, pays et continents. On sait que Montréal est reliée aux autres régions par un système de transport bien développé, que ce soit aussi bien au niveau routier, ferroviaire et aérien que naval. De plus, à cause de l'étendue du territoire, le contrôle strict est très difficile pour les autorités. Il faut également un milieu libre, sans oppression ni dictature, ce qui, évidemment, est le cas de notre société québécoise.

Enfin, selon les experts en la matière, afin que le crime organisé puisse se développer, il faut un milieu bureaucratisé où les services de justice et de sécurité sont régis par des règles strictes et complexes. On n'a qu'à penser à toute la protection constitutionnelle dont jouissent les accusés dans notre système pénal pour constater que cette condition est facilement remplie au Québec.

Ainsi donc, les conditions sont remplies pour que le Québec, via sa métropole, détienne le douteux titre de siège de crime organisé. Que faire alors? Les autorités policières font, année après année, le triste constat que le crime organisé est en hausse, qu'il se porte très bien merci et même qu'il prend de plus en plus d'expansion. Face à cette situation, les autorités qui voient leurs maigres ressources étirées de plus en plus crient au secours depuis belle lurette.

Or, le projet de loi de mon collègue d'Hochelaga-Maisonneuve tente d'apporter une solution à ce problème. En effet, son objectif est de prévoir des mesures qui permettraient de condamner toute personne qui vit des produits de la criminalité organisée. Pourquoi une telle mesure? Pourquoi cette mesure est-elle nécessaire, alors que le Code criminel contient autant d'articles, autant d'infractions?

La réponse est simple, c'est que la triste constatation que doivent faire les corps policiers est à l'effet que, bien concrètement, ce sont les plus petits, dans l'échelle de ces organisations, qui se font pincer et non pas les têtes dirigeantes. Les chefs, eux, sont protégés par un mur de respectabilité, de légitimité, qui les met longtemps à l'abri des poursuites, puisqu'ils ne se font pas prendre la main dans le sac, selon une expression bien de chez nous.

Or, avec les nouveaux outils proposés par mon collègue, les policiers pourraient faire condamner les têtes dirigeantes en faisant la preuve qu'ils vivent des produits de la criminalité. Or, avec ces nouveaux outils, les policiers pourraient faire condamner les têtes dirigeantes en faisant la preuve qu'ils vivent des produits de cette criminalité.

Cette preuve s'établirait en deux temps. D'abord, si une personne vit ou se trouve régulièrement en compagnie d'un membre reconnu d'une organisation criminelle ou si elle fréquente un lieu habituel de rencontre d'une organisation criminelle, ou si la valeur de ses biens a augmenté de façon injustifiable depuis qu'elle fréquente une organisation criminelle, elle serait alors présumée faire partie de l'organisation criminelle en question.

Une fois cette présomption établie, elle pourrait être accusée de vivre des produits de la criminalité. Une condamnation entraînerait une peine d'emprisonnement maximale de 10 ans. De plus, les biens obtenus à même les produits d'activités criminelles seraient confisqués par la même Couronne. Voilà qui donnerait des outils aux autorités judiciaires pour lutter contre ces organisations et attaquer le problème à sa source.

Je crois qu'il incombe à chacun et à chacune d'entre nous de nous sensibiliser à cette dure réalité qu'est la prolifération des organisations criminelles. Personne n'est à l'abri, que nous vivions à Mont-réal même dans la ville de Québec, et la ville de Québec n'en est pas non plus à l'abri.

C'est dans la définition même du crime organisé qu'on trouve la raison de cette fragilité. Les experts sont d'accord pour la définir ainsi: «une perpétuelle conspiration criminelle dans le but de faire des bénéfices et acquérir plus de pouvoir en utilisant la peur et la corruption».

(1155)

Voilà pourquoi tout le monde est vulnérable. Quand une organisation utilise la peur et la corruption, elle peut acquérir une portée quasi illimitée. Chacun et chacune d'entre nous se sent insécure à la seule pensée d'être victime de pressions ou de menaces de criminels.

Actuellement, c'est la région de Montréal qui est la proie de ces criminels. Les indices sont à l'effet que d'autres régions, comme la mienne, pourraient bientôt, si ce n'est déjà fait, tomber aux mains

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de ces organisations. Il faut donc donner à nos autorités policières et judiciaires les pouvoirs nécessaires pour combattre ce fléau, bien sûr dans le respect des droits fondamentaux de tous et chacun. C'est ce que le projet de loi de mon collègue tente de faire et j'invite les députés de cette Chambre à l'appuyer dans cette démarche.

Le vice-président: Comme il n'y a plus de député qui désire prendre la parole, peut-on dire qu'il est maintenant midi?

Des voix: D'accord.

______________________________________________


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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

PROJET DE LOI C-12-MOTION D'ATTRIBUTION DE TEMPS

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je propose:

Que relativement au projet de loi C-12, Loi concernant l'assurance-emploi au Canada, au plus huit autres heures soient accordées aux délibérations à l'étape du rapport et de la deuxième lecture et un jour de séance soit accordé aux délibérations à l'étape de la troisième lecture; et qu'à l'expiration du temps attribué à l'étape du rapport, tel qu'indiqué dans cette motion, et que 15 minutes avant l'expiration du temps prévu pour les affaires émanant du gouvernement au cours du jour de séance attribué pour l'étude de l'étape de la troisième lecture de ce projet de loi, toute délibération devant la Chambre soit interrompue, s'il y a lieu, aux fins de cet ordre, et par la suite, toute question nécessaire pour disposer de l'étape à l'étude à ce moment soit mise aux voix immédiatement et successivement, sans plus ample débat ni amendement.
Des voix: Honte!

M. Chrétien (Frontenac): C'est encore la loi du bâillon. Ça n'a pas de bon sens! Une loi aussi importante.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui appuient la motion veulent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 53)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Anderson
Assadourian
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Bakopanos
Barnes
Beaumier
Bélair
Bélanger
Bertrand
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brushett
Bryden
Byrne
Caccia
Calder
Cannis
Catterall
Clancy
Cohen
Comuzzi
Cowling
Crawford
Culbert
Cullen
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dion
Discepola
Duhamel
Dupuy
Easter
English
Fewchuk
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gerrard
Godfrey
Goodale
Graham
Harb
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Jackson
Jordan
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Loney
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Maloney
Marleau
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McWhinney
Milliken
Minna
Mitchell
Murray
Nault
O'Reilly
Payne
Peric
Peters
Peterson
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Reed
Regan
Richardson
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robillard
Rock
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Serré
Shepherd
Sheridan
Simmons
Speller
St. Denis
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Thalheimer
Torsney
Ur
Valeri
Vanclief
Verran
Wells
Whelan
Young-113

CONTRE

Députés
Ablonczy
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Bachand
Bellehumeur
Benoit
Bernier (Gaspé)
Brien
Chrétien (Frontenac)
Cummins
Dalphond-Guiral
de Jong
de Savoye
Debien
Dubé


2343

Duceppe
Epp
Fillion
Forseth
Frazer
Gagnon (Québec)
Gauthier
Gilmour
Godin
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hoeppner
Lalonde
Landry
Langlois
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lefebvre
Loubier
Marchand
McClelland (Edmonton Southwest/Sud-Ouest)
Mercier
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Nunez
Picard (Drummond)
Rocheleau
Sauvageau
Schmidt
Scott (Skeena)
Silye
Solomon
Strahl
Thompson
Tremblay (Lac-Saint-Jean)
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Williams -55

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Arseneault
Bélisle
Bergeron
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bethel
Bevilacqua
Campbell
Canuel
Caron
Chan
Cohen
Collins
Daviault
Deshaies
Dumas
Eggleton
Guay
Hickey
Irwin
Jacob
Laurin
Leblanc (Longueuil)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
MacAulay
Marchi
Murphy
Pagtakhan
Paradis
Paré
Proud
St-Laurent
Terrana
Tremblay (Rosemont)
Venne
Walker

Le vice-président: Je déclare la motion adoptée.

(La motion est adoptée.)

(1240)

REPRISE DE L'ÉTUDE À L'ÉTAPE DU RAPPORT

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 3 mai 1996, du projet de loi C-12, Loi concernant l'assurance-emploi au Canada, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement; ainsi que des motions du groupe no 3.

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux de m'exprimer aujourd'hui sur le projet de loi qui est devant nous. Je pense que le Bloc québécois a démontré beaucoup de cohérence depuis le début et ce qu'il demande, c'est le retrait pur et simple du projet de loi et qu'on recommence l'exercice de consultation sur une nouvelle base.

On a tous notre passé, et avant de devenir député, je travaillais à titre de syndicaliste à la CSN. Si on regarde les processus de consultation dans cette Chambre et ce qui se passe dans les centrales démocratiques des travailleurs, c'est souvent le jour et la nuit, parce que ce qu'on constate, c'est que lorsqu'il y a des projets de loi, souvent, on essaie de faire venir des groupes spécifiques qui viennent vendre notre idée.

Cette consultation s'est peut-être distinguée de la façon suivante, c'est que beaucoup de groupes sont venus, mais le gouvernement s'est bouché les oreilles lorsqu'on passait des messages qu'il ne voulait pas entendre et s'est ouvert les oreilles lorsqu'on passait des messages qu'il voulait entendre.

Le projet de loi qui se trouve devant nous a beaucoup de défauts, le principal étant sûrement qu'il faudrait refaire une consultation sur la base d'une plus grande ouverture et d'une plus grande écoute à l'égard de ceux qui sont victimes de ce projet de loi.

Il y a beaucoup de choses dont je veux discuter. Je sais que je ne dispose que de dix minutes, alors je me suis pris quelques notes pour essayer de me concentrer sur les principaux aspects qui, à mon point de vue, devraient être revus, entre autres, sur la politique de la main-d'oeuvre et de la formation professionnelle.

À cet égard, pour avoir été à la CSN, il y a déjà très longtemps que les centrales syndicales, les employeurs, tous les groupes communautaires, les groupes de défense des assistés sociaux, les groupes de défense de chômeurs demandent qu'on rapatrie tout ce qui a trait à la formation de la main-d'oeuvre. Quand je dis rapatrier, c'est ramener au Québec une structure à laquelle nous sommes déjà sensibilisés, parce que les centres de Travail Québec ont aussi des programmes de formation.

Je n'arrête pas de recevoir à mon bureau des commettants qui viennent me dire: «Monsieur Bachand, on ne sait plus à qui s'adresser pour ce qui est de la formation de la main-d'oeuvre, parce qu'il y a à peu près une cinquantaine de programmes du côté fédéral et une cinquantaine de programmes du côté provincial.» Forcément, pour ce qui est de la formation de la main-d'oeuvre, de la formation professionnelle, il y a un immense consensus au Québec et on s'explique mal que le gouvernement veuille toujours insister pour demeurer dans ce champ de compétence.

J'ai également regardé rapidement l'ensemble de la réforme, et je m'y suis penché peut-être un peu plus du côté des chiffres. C'est très négatif, parce qu'inéquitable, à notre point de vue. C'est inéquitable, parce que, dépendamment naturellement des régions, les gens habitant certaines régions doivent travailler, pour être admisssibles, de 12 à 15 semaines à raison de 15 heures par semaine. Auparavant, il y avait une fourchette d'environ 180 à 300 heures à laquelle les gens devaient se qualifier par être admissibles à l'assurance-chômage. Maintenant, ça passera de 12 à 20 semaines de 35 heures, soit de 420 à 700 heures.

(1245)

On comprend que dans des régions où il y a un peu plus d'emplois, on va exiger que les gens restent au travail un peu plus longtemps. Il n'en demeure pas moins qu'on double le nombre de d'heures nécessaires pour être admissible à l'assurance-chômage. Le ministre des Finances, qui est ici avec nous, doit être très heureux de la mesure présentée par son collègue. Elle viendra gonfler sa caisse, déjà très gonflée et elle continuera de se gonfler et il tentera probablement de réduire le déficit avec cela.

Naturellement, ce sont les chômeurs et les assistés sociaux qui paieront parce dans le contexte actuel, qui est tout le contraire de


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l'engagement pris par les libéraux qui disaient jobs, jobs, jobs, emplois, emplois, emplois, après être chômeur, on devient assisté social. On entend souvent les ministres fédéraux nous répondre qu'ils ont créé des milliers d'emplois depuis qu'ils sont au pouvoir; ce qu'ils ne disent pas, c'est qu'il y a aussi eu des pertes d'emplois. Quand on regarde le passif et l'actif, on se rend compte qu'il y a moins d'emplois maintenant qu'au moment de la prise de pouvoir de ce gouvernement. C'est pour cela que le ministre nous présente une réforme qui, encore une fois, pénalisera les plus démunis.

On pourrait aussi parler des nouveaux arrivants. Quand je parle de nouveaux arrivants, je parle de ceux qui arrivent sur le marché du travail. Tout le monde se rappelle sa première journée au travail. On est très heureux de revenir chez nous avec un chèque de paie et de se dire qu'enfin, on participe au travail global de la société et qu'on est reconnu comme un travailleur. Il y a beaucoup de jeunes, entre autres, des étudiants, qui occupent des emplois dans la restauration et souvent, au salaire minimum. Maintenant, ils devront cotiser au régime et devront travailler 910 heures pour être admissibles. Quand vous travaillez dans un McDonald, la fin de semaine, et que vous faites 10 heures par fin de semaine, ça prend du temps pour accumuler 910 heures. Donc, cette réforme est inéquitable aussi pour les nouveaux arrivants.

Cette réforme est aussi régressive parce qu'elle cause énormément de distorsion. Tout ce que le projet de loi va chercher, c'est de l'argent. Mais en contrepartie, il introduit beaucoup de négativisme, et je viens d'en décrire une partie. Mais le fait que le plafond assurable passe de 42 000 $ à 39 000 $ signifie que la personne gagnant au-delà de 39 000 $ ne versera plus de cotisations au régime. À ce moment-là, il y a des employeurs qui vont dire que plutôt que d'embaucher un autre employé, il vaut mieux faire faire des heures supplémentaires puisqu'après 39 000 $, ni l'employé ni l'employeur ne paie de cotisations. C'est donc une mesure créatrice de non-emploi.

À l'heure actuelle, la société s'interroge sur le partage du travail. Quand on veut favoriser la création d'emplois pour que plus de gens travaillent, c'est exactement le genre de mesure qu'il ne faut pas mettre en oeuvre parce que les employeurs et les employés profiteront de l'occasion pour faire des heures supplémentaires et éviter de payer de l'assurance-chômage, puisque qu'après 39 000 $, ils ne cotiseront plus.

C'est aussi une mesure créatrice de pauvreté, parce que non seulement on dira à des gens qu'il y a moins de travail, mais leurs prestations seront réduites. Le raccourcissement de la période de prestations fera en sorte que des gens se retrouveront sur l'assistance sociale. La mesure mise en place en 1994 nous a permis de voir les impacts sur l'assistance sociale au Québec. Il y a eu une hausse substantielle de prestataires d'aide sociale et cela, ce sont les provinces qui paient, ce n'est pas le gouvernement fédéral.

Le gouvernement invoquera qu'il fait des transferts pour les programmes d'assistance sociale, mais on sait que ces transferts diminuent continuellement. Entre-temps, c'est le contribuable québécois, avec ses impôts du Québec, qui paie pour le retrait du gouvernement fédéral de ces champs de juridiction. La réforme de 1994 prévoyait 2,4 milliards de coupures au Canada, dont 735 millions pour le Québec. Avec cette nouvelle mesure, c'est 600 millions supplémentaires de moins pour le Québec, donc un manque à gagner. Alors, depuis 1994, on aura perdu environ 1,3 milliard de dollars pour les chômeurs.

Dans des régions dévastées par le chômage, l'impact est épouvantable. C'est encore de l'argent fédéral de moins qui circule et les gens se retrouvent à l'assistance sociale, comme je l'ai expliqué.

(1250)

Je disais également tout à l'heure que le ministre des Finances devait être très heureux, mais le ministre de l'Industrie aussi est heureux.

Si on regarde la tâche et la philosophie supplémentaires d'un gouvernement qui est redistributeur de richesses, le ministre de l'Industrie, que fait-il actuellement? Il se promène et il va dire aux entreprises comme Bell ou aux institutions financières: «Vous ne devriez pas faire de mises à pied. Vous devriez faire attention. La façon de répartir la richesse, pour vous, c'est de faire travailler des gens et de les garder au travail.»

Le ministre est bien moins pressé de légiférer sur ces cas-là, par exemple, où les banques ont fait 5 milliards de profit, où Bell Canada a fait 2 ou 3 milliards de profit, en continuant de mettre des gens à pied. Le gouvernement est bien plus rapide sur la gâchette pour tirer sur les démunis, sur ceux qui sont sans emploi actuellement et qui sont désespérés.

On vient de voir que le gouvernement est vite aussi pour conclure des débats. Nous, on parle au nom des 1,4 million de chômeurs canadiens, dont 414 000 au Québec. On va se charger de renseigner ces gens et de leur dire: «On ne nous a pas donné le temps de vous défendre.» Qui défend ces gens-là, ici, sinon le Bloc québécois? Et on ne défend pas juste les Québécois dans ces mesures, on défend aussi les Canadiens. Et on vient de dire aux Canadiens et aux Québécois: «On ne vous permettra pas de vous exprimer plus longtemps parce qu'on veut faire adopter notre projet de loi et qu'on va finalement imposer une mesure d'attribution de temps qui va empêcher les gens qui sont nos directeurs de conscience, de parler.» C'est ce qu'on devrait être, les directeurs de conscience du gouvernement, et on nous empêche de le faire.

Alors, il nous fera plaisir de les renseigner pour leur démontrer à quel type de gouvernement ils ont affaire.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, c'est avec un vif plaisir que j'interviens ce midi sur le projet de loi C-12, projet de loi qui, soit dit en passant, nous empêche d'intervenir, comme l'opposition officielle l'aurait souhaité, en vertu du vote que vous venez d'autoriser pour bâillonner l'opposition qui a à coeur la défense des plus démunis de la société canadienne.

Tout d'abord, le projet de loi C-12 vise à changer le nom d'«assurance-chômage» en celui d'«assurance-emploi», comme si c'était un déshonneur de bénéficier de l'assurance-chômage. Alors dorénavant, l'appellation sera l'assurance-emploi.

Un député du gouvernement libéral avec qui je discutais essayait de me gagner à sa cause en m'expliquant que l'assurance-emploi devrait fonctionner sur le même principe que l'assurance automobi-


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le, en ce sens que, si vous avez un accident d'automobile, ça va, deux accidents, ça va moins bien, et au troisième, vous verrez vos primes d'assurance automobile augmenter, puisque vous êtes un cas à risque. Alors, ce même député fédéral voulait me convaincre que le travailleur saisonnier devait bénéficier des prestations d'assurance-chômage pour vivre. Or, comme, par exemple, le travailleur dans le domaine des sapins de Noël, le bûcheron, le pêcheur doit bénéficier de l'assurance-chômage année après année, il serait un mauvais client pour la compagnie d'assurance; donc, il faut soit augmenter ses primes ou encore diminuer ses prestations.

Imaginez-vous pour un instant que vous êtes malade, faible, cancéreux même; pour vous remercier de votre maladie, on augmente vos primes d'assurance-maladie, peu importe si vous avez les moyens de payer. Ou encore, on dirait: «T'es malade, on va moins te soigner.» Oui, comme vous allez le faire avec l'assurance-emploi. Vous allez pénaliser les chômeurs dits fréquents. C'est une aberration.

Ce qui est pire encore, c'est que vous allez dégager cette année plus de 5 milliards de dollars en surplus. Ces cinq milliards de dollars, vous allez principalement les chercher dans les poches des travailleurs. Vous allez faire cela de plusieurs façons, notamment en augmentant le nombre de semaines travaillées.

(1255)

Vous allez me dire que je n'ai rien compris, que ce ne sont plus les semaines assurables qu'on regarde, mais plutôt les heures. Mais dans votre calcul-il s'agit bien entendu du calcul du gouvernement-une semaine, c'est 35 heures, mais on compte toutes les heures. Donc, le bûcheron qui est très valeureux, très travailleur, pourrait faire 10 semaines à raison de 84 heures par semaine, bien sûr. Avec 10 semaines de 84 heures, il deviendrait admissible après 10 semaines, parce que cela lui donnerait 840 heures, supposant que ce n'est pas sa première occasion de toucher les prestations d'assurance-emploi. Ce travailleur serait admissible, parce qu'on diviserait 840 par 35 et on dépasserait les 20 ou 22 semaines, selon le cas.

Je prends l'exemple de Mme Blouin, de la rue Saint-Nazaire à Thetford-Mines qui travaille au magasin d'alimentation Cooprix. En moyenne, elle fait entre 15 et 24 heures par semaine. Cette dame, puisque dans la région de Chaudière-Appalaches le taux de chômage est de 8 p. 100, aura beaucoup de difficulté à être admissible aux prestations d'assurance-chômage.

Dans le projet de loi C-12, si je prends la région Chaudière-Appalaches, avec un taux de 8 p. 100 de chômage, il faudrait que cette dame travaille 18 semaines de 35 heures. Si je fais la multiplication, cela me donne 630 heures. La dame en question fait des semaines très courtes, elle aimerait bien faire 35 heures, mais il n'y a pas d'emploi.

D'ailleurs, je voudrais vous rappeler que dans différentes régions, lorsqu'on calcule le pourcentage de sans-emploi, c'est parfois tortueux, je ne dirais pas que c'est truqué, mais parfois tortueux. Il est quand même étrange de constater que dans la région Chaudière-Appalaches, le taux de chômage ne soit que de 8 p. 100, donc il a diminué de 2 p. 100 depuis trois ans, c'est vrai, sauf que le taux des prestataires d'aide sociale a augmenté de 4 p. 100.

On a là le principe des vases communicants. On enlève ces personnes des listes de l'assurance-chômage pour les inclure dans celles de l'aide sociale. Le gouvernement fédéral, à toutes fins utiles, en 1940, s'est imposé dans un champ de compétence provinciale, s'est arrogé le pouvoir, malgré l'objection de Maurice Duplessis, d'entrer dans un champ qui n'était pas de sa compétence. Aujourd'hui, pour rentabiliser ce champ-là, il transfère les plus démunis dans un champ de compétence provinciale, soit l'aide sociale. Vous admettrez comme moi que le truc de changer le titre, le nom de l'assurance-chômage en assurance-emploi est vicieux et tortueux.

Le Bloc québécois aurait souhaité qu'on retire le droit aux prestations aux personnes qui quittent volontairement leur emploi. Dans le projet de loi, les personnes qui quitteraient volontairement leur emploi éprouveraient de sérieuses difficultés à obtenir leurs prestations d'assurance-emploi, d'assurance-chômage. C'est drôle de voir comment les gens du Parti libéral changent.

(1300)

Le Parti libéral, en 1990, lorsqu'il occupait les banquettes de l'opposition, s'était opposé avec beaucoup de vigueur, avec acharnement, à ce que le gouvernement conservateur du temps pénalise les travailleurs qui quittent volontairement leur emploi. Vous savez comme moi ce qui arrive dans certaines usines. On lisait encore dans La Presse, il y deux semaines, que des patrons abusent littéralement de leurs employés. Ceux-ci, avant de crever à l'ouvrage ou de faire une dépression, doivent souvent quitter leur emploi. Sur l'avis de cessation d'emploi, c'est indiqué que l'employé a quitté volontairement. Certains employeurs-pas tous, heureusement-abusent et abuseront davantage de leurs employés.

Le député de Malpèque n'était pas, heureusement pour lui, député de la Chambre des communes en 1990. Mais s'il avait été de ce clan libéral en 1990, je pense bien qu'il aurait agi de la même façon. Lorsque les libéraux étaient dans l'opposition, ce n'était pas bon. Il fallait proscrire cette règle où il pourrait y avoir abus. Aujourd'hui, alors qu'ils sont au pouvoir, ils en profitent pour encore une fois s'en prendre aux plus démunis.

Un autre point que je trouve quand même déplorable, c'est que tous les salaires supérieurs à 39 000 $ ne sont plus assurables. En contrepartie, on va abaisser le maximum de prestations que les travailleurs pourraient éventuellement recevoir. Étant donné que le temps est déjà épuisé, je voudrais lancer un appel, notamment à ce gouvernement et au ministre des Finances, pour qu'ils essaient de regarder d'autres avenues, d'autres alternatives, avant de vouloir abaisser leur déficit sur le dos des plus démunis.

J'invite, par votre entremise, monsieur le Président, le ministre des Finances à enregistrer tous ses bateaux au Canada et à payer un peu plus d'impôt, parce qu'il est capable d'en payer. Je l'invite également, lorsqu'il achètera de nouveaux bateaux, de les acheter au Canada et non en Asie, par exemple. Cela créerait de l'emploi.

[Traduction]

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir participer au débat sur le projet de loi concernant l'assurance-emploi, car ce sujet a dominé la majeure partie des discussions depuis 18 mois.


2346

Le système a bien fonctionné dans une large mesure. À l'occasion d'un examen de la sécurité sociale, un comité parlementaire a parcouru le pays pour discuter de nos programmes sociaux et de la façon dont nous pourrions les réorganiser. Je serais le premier à admettre qu'on n'a pas pris toutes les mesures que les gens nous ont demandé de prendre, mais je puis certes dire, à titre de membre du comité, que nous avons écouté ce que les gens avaient à dire et que leurs interventions ont eu un impact.

Le ministre a présenté un projet de loi à la suite de cet examen. Bien que la mesure à l'étude constitue un bon départ sur la voie de la réforme, elle n'en comporte pas moins quelques imperfections. Au lieu de s'en tenir obstinément au projet de loi tel que présenté, le gouvernement a non seulement accepté des amendements importants, mais les a réellement encouragés.

Cela démontre que le système peut fonctionner et que les projets de loi peuvent être sensiblement améliorés dans l'intérêt des Canadiens et, plus précisément en l'occurrence, dans celui des travailleurs saisonniers de toutes les parties du Canada et notamment de la région de l'Atlantique.

Nous avons vu apporter trois amendements importants touchant la règle dite d'intensité, l'interruption d'emploi et le dénominateur. Je voudrais parler plus précisément des avantages que procure le projet de loi, de sorte que ceux qui participent au débat comprennent ce qu'ils nous empêcheraient de faire s'ils réussissaient à faire avorter le projet de loi.

(1305)

Plus précisément, avec le passage des semaines aux heures comme mesure d'admissibilité, si quelqu'un fait 70 heures de travail pendant une semaine, situation que beaucoup de gens de la région de l'Atlantique connaissent très bien, il obtient la valeur de deux semaines de travail grâce à ce changement, alors qu'il n'obtient que la valeur d'une semaine aux termes de la loi actuelle. Grâce à cette modification en effet, 70 heures de travail en une semaine lui vaudront deux semaines de travail à toutes fins utiles. Cela veut dire que beaucoup de travailleurs de mon coin de pays pourront se prévaloir du régime d'assurance-chômage plus facilement que ce n'était le cas depuis de nombreuses années. Il s'agit certes de la première fois depuis six ou sept ans que le régime est plus accessible et non moins.

Comme on met l'accent sur les heures plutôt que sur les semaines, la période d'admissibilité aux prestations sera plus longue, car elle sera fondée sur les heures travaillées. Si le nombre de semaines de travail est limité, en vertu du régime actuel, une semaine, qu'elle compte 15 ou 75 heures de travail, équivaut simplement à une semaine. En vertu du nouveau régime, chaque heure comptera. En moyenne, dans le Canada atlantique, la période d'admissibilité aux prestations sera prolongée de deux semaines. C'est très important.

Enfin, nous permettons à un plus grand nombre de personnes qui font actuellement partie du bassin de main-d'oeuvre et qui bénéficient régulièrement du régime d'avoir plus facilement accès à un programme de redistribution du revenu d'envergure nationale.

Il y a des députés du troisième parti qui sont très négatifs, et c'est un euphémisme, au sujet des aspects sociaux du régime d'assurance-chômage. Il est important d'accepter et de comprendre la portée d'un aspect très réel et capital de l'assurance-emploi: dans certaines localités et industries au Canada, il y a des gens qui peuvent travailler pendant une certaine période tous les ans, mais pas toute l'année, et qui ne peuvent gagner suffisamment durant cette période pour subvenir aux besoins de leur famille toute l'année durant. C'est là une façon très efficace de résoudre le problème.

Je reconnais que les deux premiers budgets du gouvernement avaient pour effet de rendre l'assurance-chômage, qui deviendra prochainement l'assurance-emploi, plus difficile à obtenir. Cependant, l'amendement proposé aura l'effet contraire et rendra le régime plus accessible. C'est très important pour les gens qui travaillent dans les industries saisonnières, en particulier dans le Canada atlantique, mais aussi partout dans notre pays. Cela constitue en soi une raison suffisante pour féliciter le gouvernement d'avoir apporté cet amendement.

Il y a aussi le supplément prévu pour les faibles revenus. Les familles dont le revenu est inférieur à 26 000 $ verront leurs prestations augmenter jusqu'à concurrence de 13 p. 100. Cela est conforme aux objectifs sociaux du régime d'assurance-emploi. C'est une excellente nouvelle, notamment pour ceux qui, durant une partie de l'année, ne peuvent gagner suffisamment d'argent pour subvenir aux besoins d'une famille. Tous ceux qui ont à coeur le bien-être des familles dont le revenu est inférieur à 26 000 $ devraient se réjouir de cette mesure.

Tous ceux qui étaient limités à 14 heures de travail par semaine parce que leur employeur ne voulait pas payer de cotisations bénéficieront maintenant de l'assujettissement dès la première heure de travail. Je reconnais volontiers qu'il sera plus difficile pour ceux qui demandent des prestations pour la première fois d'accéder au régime. Cependant, s'ils travaillaient avant 14 heures par semaine ou moins, ils n'y avaient absolument pas accès.

(1310)

En raison de la réorganisation des prestations d'assurance-emploi ou des aspects du programme non liés au revenu, nombre de gens ayant touché de l'assurance-chômage depuis trois ans, ou cinq ans s'ils ont reçu des prestation de maternité ou de maladie, auront accès aux prestations d'assurance-emploi et du fond d'investissement dans les ressources humaines.

Cela signifie que toutes ces personnes dont nous avons entendu parler et qui étaient admissibles à l'assurance-chômage auront maintenant droit aux prestations lorsque leurs prestations de remplacement du revenu seront épuisées. C'est un progrès majeur. Nous avons tous connu des gens qui ont été exclus de l'assurance-chômage à la fin de leurs prestations de remplacement du revenu.

L'aspect suivant est très controversé. C'est pourquoi je voudrais en parler et dire que les nouveaux-venus sur le marché du travail auront plus de difficulté que par le passé. Cela été souvent porté à mon attention. Nous devons nous en occuper. Nous devons amélio-


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rer le projet de loi à cet égard. Nous devons reconnaître les forces et les faiblesses du régime.

De façon générale, il importe que les Canadiens parlent de la situation où les jeunes quittent l'école pour aller travailler dans des usines et où leur seul soutien plus tard sera un programme social comme l'assurance-chômage. Je ne veux pas cela pour mes enfants. Je ne veux pas que mes enfants aillent travailler pour une entreprise qui, selon toute vraisemblance, ne survivra pas longtemps.

Mes enfants n'auront alors que l'assurance-chômage comme moyen de subsistance. Je reconnais notre obligation envers les gens qui touchent maintenant de l'assurance-chômage. Cependant, je me demande si l'on doit faire en sorte que d'autres aient recours à ces programmes plus tard. Je reconnais notre responsabilité qui consiste à remplacer les perspectives d'emploi par d'autres possibilités pour les jeunes, mais je me demande si je puis souscrire à un objectif visant à attirer des gens dans un système où l'assurance-chômage serait un moyen de subsistance dans l'avenir.

Je crois fermement que le système doit être changé et amélioré. Quand le projet de loi a été présenté, nombre d'entre nous étaient très préoccupés par ses lacunes. Après avoir bien examiné la question, nous avons pu influer sur le libellé final, dont je suis très satisfait. Je voudrais remercier le ministre et ses collègues qui se sont joints à moi pendant le processus.

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): J'ai écouté attentivement mon collègue d'en face et j'aurais cru que, à la suite des consultations des différents groupes et organismes qui se sont présentés devant le Comité permanent du Développement des ressources humaines, mon collègue aurait tenté de faire changer son gouvernement d'attitude par rapport à cette réforme.

Ce projet de réforme, tel qu'il nous est présenté-et je suis certain que mon collègue l'admettra-est fondé sur des hypothèses très contestables. D'abord, et ça vient du gouvernement, on nous dit que les prestataires abusent du régime. C'est complètement faux. Quand il n'y a pas d'emploi nulle part, quand on n'a pas réussi à remplir la promesse de son programme électoral, celle de la création d'emplois, c'est très difficile de demander aux gens de travailler. Donc, il ne faut pas se surprendre de voir que le nombre de chômeurs a été en croissance continuelle depuis l'élection de 1993.

Une autre hypothèse sur laquelle est basé ce projet de loi, c'est qu'on nous dit qu'il y a des emplois de disponibles.

(1315)

Oui, des emplois de disponibles, mais on voudrait bien savoir où et on voudrait bien savoir pour qui et de quelle façon on pourrait les combler.

Lorsque nous ne sommes pas maîtres de notre formation professionnelle, on peut se poser des questions à savoir pourquoi des emplois sont disponibles, parce qu'on va donner de la formation dans des domaines là où on n'en a pas besoin. Donc, par le fait même, il se crée des carences dans certains milieux, dans certains métiers, qui font qu'il n'y a pas de preneur. Est-ce que c'est la faute des travailleurs? Non. Moi, je dis non, que ce n'est pas la faute des travailleurs. C'est la faute du gouvernement fédéral qui ne réussit pas à s'entendre avec les provinces pour leur laisser le champ libre dans le domaine de la formation.

La formation appartient à ceux qui sont les plus près des gens. On est trop loin ici pour savoir exactement ce qui se passe dans ma région. Laissons donc aux gens de la région le soin de décider de la sorte de formation que nous allons offrir à nos gens. Donc laissons aux provinces le soin de s'en occuper. Nous allons éviter, par le fait même, des dépenses inutiles.

Donc ce projet de loi n'est pas axé sur le véritable défi des programmes sociaux. Le défi des programmes sociaux, il y a une seule chose pour le régler, c'est la création d'emplois, et on n'a pas réussi à en faire. Des jobs, des jobs, des jobs, tels que promis, on n'en a pas; on n'en a pas créé non plus.

M. Milliken: On en a créé, oui.

M. Fillion: On n'en a pas créé, on a fait des chômeurs.

M. Milliken: Ah non, nous en avons créé.

M. Fillion: Certainement. Ça réveille certaines personnes lorsqu'elles se font dire ça. C'est sûr que c'est choquant; c'est énervant de se se faire rappeler qu'une de leurs promesses, la promesse principale qui les a portés au pouvoir, était celle de créer des emplois, alors qu'ils n'en ont pas créé. C'est sûr que c'est difficile à accepter.

Je me demande sérieusement de quelle façon on va dire à ce gouvernement de comprendre que la majorité des citoyens et citoyennes du Canada ne veut pas de cette réforme. Quels moyens va-t-on prendre? Partout où l'on passe, on se fait dire que cette réforme est inéquitable, injuste et inefficace. Ce sont des termes qu'on entend régulièrement.

C'est une réforme qui va appauvrir davantage les citoyens. Et qui se dirige vers cette pauvreté? Des jeunes surtout, des femmes, des exclus. Donc c'est toujours le même cercle vicieux auquel on aura à faire face, c'est-à-dire un petit projet quelque part, un petit travail, assurance-chômage, aide sociale, ainsi de suite, et on ne pourra pas se sortir de ce cercle vicieux.

Cette réforme détruit actuellement des outils collectifs qu'on avait pu construire ici. Et cet outil collectif s'était formé à partir de consensus sociaux; les gens acceptaient de pouvoir partager certaines richesses. Aujourd'hui, on se fout de ce grand principe. On va jusqu'à se servir du surplus de la Caisse de l'assurance-chômage non pas pour créer des emplois mais pour justement diminuer le déficit. Alors que ces sommes d'argent seraient mieux utilisées, plus profitables si elles servaient à créer des emplois. D'autant plus que le gouvernement, lui, ne participe plus à cette caisse. Donc elle appartient aux travailleurs, aux travailleuses et aux employeurs.

On n'a pas le droit de mettre la maison dans cette caisse, alors qu'elle appartient à ceux qui la paient. Si on veut y mettre la main, ça ne devrait pas être pour effacer un déficit mais bien pour tenter d'améliorer le sort des travailleurs et des travailleuses.

Samedi passé, j'étais dans mon comté. J'ai marché avec des dirigeants syndicaux, des prêtres, des personnes âgées, des jeunes,


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des représentants de chambres de commerce, des élus municipaux, également des propriétaires d'entreprise, des femmes, des hommes qui sont remplis de bon sens. Ils marchaient avec moi pour dire au gouvernement qu'ils ne voulaient pas de la réforme de l'assurance-chômage.

(1320)

Encore une fois, on a manifesté. Je n'ai pas vu, lors de cette manifestation, des activistes, parce qu'on dit que toutes ces manifestations sont organisées par des gens grassement payés pour le faire. Je n'ai pas vu ça. Ça a été organisé par des groupes sociaux, des groupes humanitaires, des groupes communautaires, des gens bien ordinaires.

Par contre, à cette marche, je n'ai pas vu de représentants du Parti libéral du Canada. Non. Il n'y en avait pas pour répondre aux questions que les gens se posaient. Mais ce que j'ai vu, ce sont des gens ordinaires, des gens qui veulent s'en sortir, des gens pour qui la réorganisation du travail est importante, mais pas de la façon dont on le fait là, avec ce projet de loi.

Il y a également des gens d'une petite municipalité de mon comté qui ont saisi l'occasion pour venir me présenter une pétition. Il s'agit des citoyens de Ferland-et-Boilleau, dans le comté de Chicoutimi. C'est une municipalité de plus ou moins 680 personnes. Plus des trois quart de ces personnes ont signé cette pétition. Malheureusement, je sais que cette semaine nous aurons à voter sur ce projet de loi, et je n'aurai peut-être pas le temps de faire accepter cette pétition par le greffier pour pouvoir la déposer. Donc, je parle en leur nom. Ils m'ont dit simplement: «Demandez au gouvernement de renoncer à la réforme de l'assurance-chômage.»

Ces gens d'une petite municipalité sont des gens honnêtes, des travailleurs honnêtes qui, pour une bonne partie d'entre eux, n'ont pas la chance, comme on dit par chez nous, d'avoir une job à l'année. On n'a pas cette chance-là dans ce milieu. Pourquoi? Parce qu'ils vivent en majorité du travail forestier, d'autres un peu du tourisme. Donc, si vous comprenez bien, il s'agit ici de travailleurs saisonniers, et on sait ce que le projet apporte à ces travailleurs. Ils savent très bien, ils l'ont compris, eux, que cette réforme créera, chez plusieurs d'entre eux, des futurs assistés sociaux. À ce moment-là, les assistés sociaux deviendront non pas à la charge du gouvernement fédéral, mais à la charge du gouvernement de chacune des provinces.

C'est une autre façon de vouloir pelleter dans la cour de son voisin un déficit, une dette qui augmente continuellement. Des travailleurs saisonniers, il y en a un peu partout à travers le pays. Encore une fois, ce sont eux qui seront les plus pénalisés par cette réforme. Pourquoi? Parce que le travail à l'année, et je le répète, du travail permanent, ça n'existe plus. Il n'y en a pas, et cette réforme ne tient pas compte de cette réalité.

Il est bien certain qu'en ce qui concerne les travailleurs saisonniers, il y en a d'autres types: les gens qui travaillent en forêt, ceux de l'industrie du tourisme et ceux de la construction également, parce que la construction au Canada, on ne peut pas dire qu'elle se porte très bien. Notre parc immobilier me fait penser à notre parc de taxis un peu partout qu'on rencontre ici dans les alentours, il s'en va chez le diable.

Ça veut dire que les maisons perdent de la valeur parce qu'on n'a plus les moyens de les réparer et, par le fait même, il y a une espèce de phénomène qui se traduit sur les municipalités, parce qu'elles doivent baisser leur évaluation et ainsi de suite. Donc on ne peut pas dire que le domaine de la construction se porte très bien. Ce sont également des gens qui font partie des travailleurs saisonniers.

(1325)

Puisque vous me faites signe que mon temps s'achève, je vais terminer. On me demandait également, samedi, de faire quelque chose. On me disait: «Faites en sorte que le gouvernement n'adopte pas cette réforme.» C'est difficile pour moi de faire cette promesse. Quand je fais des promesses, j'essaie de les tenir.

Il reste quelques heures avant de voter sur cette réforme, que les gens d'en face repensent un peu à tout ce qui s'est passé depuis l'année et demie ou les deux ans où on parle de cette réforme et qu'ils voient que des gens dépendront de l'aide sociale à cause de cela. Qu'ils révisent un peu leur position.

Au nom de tous ces gens, et au nom de tous les travailleurs qui ne sont pas tous des buveurs de bière. . .

Le vice-président: Malheureusement le temps de parole du député est écoulé. Je donne la parole à l'honorable député de Saint-Boniface.

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole au sujet de ce projet de loi. Nous sommes en train de créer des emplois pour les jeunes et je partagerai quelques faits avec mes collègues.

[Traduction]

Je vous donne quelques faits sur les nouvelles possibilités offertes aux jeunes. On évalue à 39 000 le nombre de jeunes Canadiens qui ne sont actuellement pas admissibles à l'assurance-emploi et qui le deviendront une fois la nouvelle loi adoptée. Nous augmentons les fonds destinés aux jeunes de 22 p. 100, les faisant passer de 193 millions de dollars qu'ils éatient l'an dernier à 236 millions cette année, ce qui n'est pas négligeable.

Les partenariats avec les provinces et les entreprises créés dans le cadre de l'initiative Équipe Canada donneront aux jeunes la possibilité d'acquérir des compétences solides et immédiatement utilisables au travail. Nous reconnaissons les difficultés auxquelles se heurtent beaucoup de jeunes et d'étudiants. C'est pourquoi le gouvernement du Canada doublera les fonds consacrés aux emplois d'été pour étudiants en 1996.

Une fois le projet de loi adopté, chaque heure travaillée par un jeune sera une heure assurable. La semaine était souvent une mauvaise base de calcul du temps consacré au travail, surtout dans le cas des travailleurs à temps partiel et des travailleurs ayant plus d'un emploi. Au Canada, quatre travailleurs à temps partiel sur dix sont des jeunes de moins de 25 ans. Avec l'assurance-emploi, la totalité du temps passé au travail sera assurée.

L'assurance-emploi protégera le revenu d'un plus grand nombre de jeunes, s'ils travaillent un nombre suffisant d'heures. Le système de calcul basé sur les heures éliminera la limite des 15 heures à laquelle se heurtaient les travailleurs à temps partiel, ce qui inclut beaucoup de jeunes. Les jeunes qui commencent en occupant plusieurs petits emplois pour acquérir de l'expérience profiteront du changement.


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En outre, avec l'assurance-emploi, beaucoup de jeunes paieront des cotisations plus justes. Environ 625 000 jeunes se verront rembourser leurs cotisations parce qu'ils gagnent 2 000 $ ou moins dans l'année. Cela représente près de la moitié du 1,3 million des jeunes qui recevront une remise.

Le nouveau système aura peu de répercussions sur les étudiants. Par exemple, un étudiant qui travaille 14 heures par semaine à 7 $ l'heure paiera moins de 3 $ par semaine de cotisations. En revanche, son travail sera assuré, ce qui est quand même assez important.

Beaucoup de jeunes acquerront une expérience utile grâce aux prestations d'emploi effectif de l'assurance-emploi. Le gouvernement prendra 800 millions de dollars des économies que rapportera l'assurance-emploi pour les investir chaque année dans des programmes qui ont prouvé qu'ils aidaient les Canadiens à retrouver un emploi. Plusieurs outils de l'assurance-emploi aideront à redonner du travail aux jeunes sans-emploi.

Des subventions salariales ciblées aideront les jeunes à trouver un emploi et à acquérir l'expérience dont ils ont besoin pour rehausser leur curriculum vitae et se qualifier pour les emplois de la nouvelle économie.

Les partenariats de création d'emplois amèneront le gouvernement et les groupes communautaires à s'unir pour donner aux jeunes chômeurs des possibilités d'emploi leur permettant d'acquérir des compétences solides, nouvelles et en demande sur le marché du travail.

Ce ne sont là que quelques exemples des mesures.

[Français]

Et je continue. Vous n'êtes pas sans savoir que tout le monde n'a pas besoin de prestation d'emploi pour trouver un nouveau travail. Le Service national de placement aidera les jeunes à trouver du travail dans les industries nouvelles et naissantes et à se former en vue des emplois du XXe siècle.

(1330)

À l'heure actuelle, deux millions de Canadiens, dont de nombreux jeunes, ont recours à l'information et aux services de conseillers dans leur recherche d'emploi. Un système renforcé et automatisé d'information sur le marché de l'emploi indiquera aux jeunes où il y a des emplois disponibles.

Le personnel de Développement des ressources humaines Canada aidera aussi les jeunes à être plus efficaces dans leur recherche d'emploi grâce à des services nouveaux, notamment des séances d'information de groupes conçues pour accélérer le plus possible leur retour dans la population active.

Investir dans le jeunesse, voilà une priorité absolue de ce gouvernement et c'est un élément essentiel de notre stratégie pour l'emploi. Le taux de chômage des jeunes oscille, en ce moment, autour de 16 p. 100. C'est une fois et demie la moyenne nationale. Bien des jeunes fréquentent l'école et dépendent de leur travail d'été, ou d'un emploi plus régulier, pour financer leurs études et acquérir une expérience de travail dont ils ont absolument besoin.

Le gouvernement reconnaît la situation difficile dans laquelle se trouve les jeunes. C'est pourquoi il a lancé plusieurs initiatives destinées à répondre à leurs préoccupations. Nous reconnaissons que le diplôme d'études postsecondaires est en passe de devenir un facteur essentiel de la stabilité d'emploi. Le budget affecte une somme supplémentaire de 165 millions de dollars sur trois ans pour aider les étudiants et leur famille à faire face au coût croissant des études.

Pour donner un coup de pouce aux jeunes, nous élargissons l'admissibilité à l'allocation de frais de garde d'enfants afin d'aider un plus grand nombre de jeunes parents qui travaillent le soir ou qui retournent aux études.

Des modalités plus souples de remboursement des prêts aux étudiants apporteront aussi un peu de répit aux jeunes. Il sera plus facile pour les jeunes diplômés de rembourser leurs prêts après avoir intégré le marché du travail. Toutes ces mesures montrent bien la priorité absolue que nous accordons à aider nos jeunes à se faire un place dans un marché de plus en plus concurrentiel et dur.

Je viens de partager avec mes collègues un nombre de faits dont l'opposition discute très peu, même qu'elle n'a pas du tout mentionné. L'opposition s'est fait comme devoir d'attaquer le projet de loi. J'accepte que c'est un rôle essentiel dans une démocratie telle que la nôtre. J'aurais aussi voulu que l'opposition mette sur la table des idées concrètes et précises avec les coûts qu'elles entraîneraient afin d'essayer d'améliorer ce projet de loi. On ne veut pas que des critiques, nous voulons des solutions.

[Traduction]

Comme je le disais, je partage avec mes collègues un certain nombre de faits importants concernant cette mesure législative. Ce sont des faits. Si les députés de l'opposition souhaitent les critiquer, ils peuvent le faire. Je serais très heureux de répondre à leurs arguments.

Je trouve surprenant qu'ils n'aient pas souligné les éléments intéressants en même temps que ce qu'ils jugent potentiellement défavorable. Nous aurions ainsi un tableau plus équilibré de la réalité.

C'est malheureux qu'on ne nous ait pas précisé d'éventuelles solutions aux faiblesses qu'on reproche à cette mesure. L'opposition aurait ainsi non seulement amélioré le dialogue, le débat, l'échange, la discussion, mais peut-être même aussi la mesure législative.

Cela étant dit, j'aimerais que, dans l'esprit de l'idéal démocratique de la Chambre des communes, on examine aussi les points intéressants du projet de loi, quelle que soit notre allégeance politique, il faut le dire. Puis, nous pourrions nous pencher sur ce qui peut être amélioré et faire des suggestions dans cette optique.

[Français]

Je termine avec ces quelques propos.

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le Président, d'entrée de jeu, étant donné que l'opposition officielle a été interpellée par le député de Saint-Boniface, je me vois dans l'obli-


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gation de lui répondre. Le député de Saint-Boniface vient d'une très belle région où la francophonie a pris son expansion et est toujours présente, mais elle ne peut jouir d'un journal quotidien francophone parce qu'on offre qu'un hebdomadaire francophone.

J'ai déjà eu la chance de discuter de cet aspect avec le député de Saint-Boniface, mais depuis environ un an la situation n'a pas changé.

(1335)

Le député, qui parle très bien d'éducation dans les trois quarts de son discours, vient d'une province qui bafoue les droits scolaires francophones, et ce, depuis à peu près le début du siècle. Je vois mal son intérêt soudain, son intérêt apparent, sur le plan de l'éducation, de l'importance et de la pertinence de la jeunesse.

Si jamais ce même député veut lui donner toute son attention, qu'il lise de façon attentive la Constitution, et probablement qu'à sa grande surprise il se rendra compte que l'éducation et la formation sont deux domaines de juridiction provinciale. Ce ne sont pas les méchants séparatistes qui l'avouent, c'est malheureusement ou heureusement, tout dépendant du côté de la Chambre où on se place, écrit de facto et textuellement dans la Constitution. C'est ce qu'on tente de faire respecter.

Lorsqu'on nous dit qu'on fait seulement notre rôle de critiquer et non pas notre rôle d'amener des aspects positifs, je rappellerais à l'honorable député qui nous a questionnés sur cet aspect qu'environ 75 p. 100 des mémoires déposés lors du Comité du Développement des ressources humaines vont à l'encontre du projet de loi C-12. Ce qu'on fait en tant que représentants de la population, c'est qu'on représente notre population et on dit que ce projet de loi, comme mon collègue de Chicoutimi l'a dit tantôt, est inacceptable pour celle-ci.

En terminant, pour répondre à ces questions, si le projet de loi C-12 est si intéressant pour les jeunes, comment-moi aussi je terminerai mes réponses en lui posant une question-peut-on accepter que, si le projet de loi est adopté, pour une première demande, un jeune doit travailler maintenant trois fois plus que dans le système actuel, soit 910 heures? Juste ce critère-là définit à lui seul tout le non-sens du projet de loi C-12 pour les jeunes. S'il a la chance de nous répondre lui aussi à un moment donné sur cet aspect, je lui demanderais comment il interprète les 910 heures ou le fait de tripler le nombre d'heures de travail requis pour les jeunes ou les femmes qui en sont à leur première demande. Voilà donc quelques réponses et une question pour mon collègue de Saint-Boniface.

Avant de commencer mon discours comme tel, je voudrais féliciter particulièrement deux députés-il y en a sûrement eu d'autres en fin de semaine-que je connais très bien dont un a eu un coup de soleil dans cette marche, le député de Chicoutimi qui a réussi, avec les gens du milieu, à amener plus de 1 000 personnes à manifester contre le projet de loi C-12 et le député de Témiscamingue qui a amené, lui aussi, un grand nombre de personnes de son comté pour décrier et démontrer leur mécontentement face au projet de loi. Je crois que dans tous les comtés et dans toutes les régions, les gens ont su démontrer leur insatisfaction face à ce projet de loi.

Mais la meilleure façon d'éviter tous les problèmes du projet de loi C-12, c'est toujours la création d'emplois. Mais ce n'est pas le gouvernement qui l'assure, la création d'emplois. On a vu aussi sur cet aspect l'inefficacité du gouvernement en place présentement.

Dans mon comté, j'ai deux organismes qui créent des emplois. Étant donné qu'on parle d'assurance-chômage, d'assurance-emploi et d'emplois, je veux souligner le travail exceptionnel de deux organismes. Je vais commencer par le premier qui est la Société de développement économique de la Rive-Nord présidé par M. Raymond Gervais.

Cette société de développement économique qui regroupe les municipalités de la MRC de l'Assomption fait un travail exceptionnel. Avec les intervenants, avec les hommes et les femmes d'affaires du milieu, cette société de développement économique cherche à attirer des entreprises dans notre milieu et réussit plus souvent qu'à son tour et a un résultat de création d'emplois assez intéressant, je tiens à le souligner ici.

Il y a aussi la Société de développement économique des Moulins, qui forme l'autre partie de mon comté, c'est-à-dire la MRC des Moulins, à l'exception de la ville de Mascouche où la présidente, Mme Lise Brouillette, fait un travail exceptionnel pour attirer des entreprises, pour le maintien des entreprises et pour l'aide à la création et au maintien d'emplois dans le secteur. Je crois que nous devons dire chapeau à la Société de développement économique de la rive nord, ainsi qu'à la Société de développement économique des Moulins.

(1340)

Voilà deux organismes qui, sur le terrain, travaillent quotidiennement à la création d'emplois. Lors de ma dernière intervention sur le projet de loi C-12, je vous ai parlé, monsieur le président, et j'ai souligné cette aberration à mes collègues libéraux, concernant le Centre d'emploi de Terrebonne.

Je tiens à vous rappeler, pour ceux et celles qui l'ont peut-être oublié ou qui ne l'ont pas entendu, que le Centre d'emploi de Terrebonne, dans la fameuse réaffectation des centres d'emploi, réaffectation faite à peu près comme le dossier constitutionnel, c'est-à-dire dans la plus pure improvisation, s'est fait demandé, exigé, ordonné un déménagement pour respect des normes, dans une belle bâtisse flambant neuve louée par le gouvernement fédéral pour un bail de dix ans.

Avant l'ouverture officielle, pas quelques mois après, le directeur du centre d'emploi recevait une belle lettre dans laquelle on lui disait d'aviser son personnel que dans quelques mois, un an ou peut-être deux, on allait devoir les couper d'une centaine d'employés à peut-être une dizaine ou une quinzaine.

Voilà quelque chose de bon pour miner le climat de travail. Voilà quelque chose de bon pour dynamiser, oui, des gens qui sont là pour aider les jeunes, les femmes et les gens en général à la recherche d'un emploi. Ceux-là même qu'on devrait encourager à garder le moral pour aider ces gens à trouver des emplois, on mine leur moral


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en leur envoyant une lettre avant de couper le ruban leur annonçant qu'ils fermeront et déménageront. On ne sait pas quand, on ne sait pas où, mais qu'ils ne s'en fassent pas.

Pour les propriétaires de maison, pour les enfants qui vont à l'école et pour les gens du milieu, ce coup-là, ils ne l'acceptent pas, et moi, en tant député, je ne l'accepte pas non plus. C'est pour ça que chaque fois qu'on va parler d'assurance-chômage et que je pourrai le dire en cette Chambre jamais nous n'accepterons cette décision concernant le centre d'emploi de Terrebonne.

Maintenant, pour ce qui est du projet de loi comme tel, comme je l'ai dit tantôt en réponse au collègue de Saint-Boniface, s'il se vante tant que ça d'avoir mis sur pied, contrairement à ce qu'il disait quand il était dans l'opposition, un système qui va vraiment à l'encontre de la population, comment peut-il accepter et dire à la population qu'il a été à l'encontre de 75 p. 100 des mémoires présentés au comité des ressources humaines? À peu près 75 p. 100 des mémoires déposés exprimaient de sérieuses réserves et des doutes ou exigeaient tout simplement le retrait du projet de loi C-12.

Même les chercheurs embauchés par le ministère lui-même pour effectuer des évaluations de la réforme ont exprimé de sérieuses réserves. Je vais vous en nommer un. Il s'appelle Marc Van Audenrode. Il disait ceci et je cite: «S'il est facile de se faire une idée de ce que sera l'impact d'une modification précise apportée à un aspect d'un système quelconque, il est quasiment impossible de se faire une idée de ce que seront les conséquences d'une réforme aussi profonde que celle proposée. J'aurais pu, comme de nombreux autres économistes, vous fournir une estimation très précise de ce que je pense être les conséquences d'une réduction de la durée des prestations ou du taux de remplacement. Je suis incapable de vous donner ne serait-ce qu'une indication de ce que seraient les conséquences de la réforme proposée et je pense honnêtement qu'aucun économiste ne peut le faire.» Probablement que mon collègue de Saint-Boniface vient d'obtenir un diplôme en économie parce qu'il nous a donné toutes les statistiques comme quoi c'était très bon de couper l'aide aux jeunes et aux femmes et de leur demander d'accumuler trois fois plus d'heures pour être admissibles au programme d'assurance-chômage.

Je voudrais justement citer des extraits de mémoires qui ont été déposés. «Le système à deux vitesses que crée le projet de loi va à l'encontre de la Charte canadienne des droits et libertés parce qu'il a un effet discriminatoire envers les femmes et les jeunes. Le gouvernement blâme ceux qui sont soumis aux décisions de l'argent.» Cette citation est du Syndicat de la fonction publique du Québec. Dans un autre mémoire qui a été déposé, on peut y lire: «Les avantages potentiels de l'adoption d'un régime axé sur le nombre d'heures sont travaillées sont annulés par la très grande hausse du nombre d'heures que les personnes qui deviennent ou redeviennent membres de la population active, ou les autres, doivent accumuler pour avoir droit aux prestations. Un nombre disproportionné de femmes et de jeunes font partie de la catégorie des personnes qui deviennent ou redeviennent membres de la population active.» Ça, c'est de la Fédération des femmes du Québec.

(1345)

Toujours du Québec, vous me direz, je vais vous en trouver une autre qui vient du Syndicat canadien de la fonction publique. «Les prestations seront réduites par la combinaison de certaines propositions: cette réduction n'est pas justifiée, sur le plan tant économique que moral. Les propositions auront des répercussions particulières sur les femmes qui gagnent moins d'argent que les hommes en général et dont les prestations d'assurance-chômage seront bien inférieures à celles des hommes.» Je vous rappelle que ça vient du Syndicat canadien de la fonction publique.

Je vais vous lire une dernière, j'en ai plusieurs, qui vient de la Fédération du travail de Terre-Neuve et du Labrador. «L'utilisation du revenu familial pour déterminer l'admissibilité [au supplément familial] exerce une discrimination contre les femmes. On s'oppose à la dilution de l'assurance-chômage par l'ajout d'une forme de soutien du revenu s'apparentant à l'aide sociale; si la mesure est adoptée, elle ne devrait pas avoir pour effet de nuire davantage à l'indépendance des femmes.» Voilà quelques citations, et il y en a plusieurs, démontrant que les gens en général, et non seulement au Québec, qui sont mêlés de près ou de loin à ce projet de loi s'y opposent très majoritairement. Les libéraux, du temps où ils étaient dans l'opposition, s'y opposaient aussi très majoritairement. C'est ce qui est le plus surprenant.

Maintenant, il faut dire que, pour ce qui est de la formation professionnelle, cette question ne devrait même pas se poser. Au Québec, il y a unanimité, consensus, sur le fait que tout le monde se dit la même chose, que la formation professionnelle devrait revenir au Québec. Cela fait l'unanimité. Même Ghislain Dufault, qu'on peut citer en exemple, est d'accord avec l'idée de se retirer, ce qui serait beaucoup plus simple.

En conclusion, le ministre nous parle des fraudeurs. Mais on en a, nous aussi, des statistiques sur les fraudeurs. On nous dit que ce projet de loi éliminera ou atténuera le nombre de fraudeurs. Le pourcentage du montant perçu par les fraudeurs en rapport avec eux qui perçoivent de l'assurance-chômage est de 0,0068 p. 100. Si on veut faire payer tout le monde pour moins de 1 p. 100, nous sommes contre.

[Traduction]

M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, les députés bloquistes ont fait, à de nombreuses reprises au cours du débat, de sombres prévisions au sujet des répercussions du projet de loi C-12.

Les députés bloquistes n'ont pas caché leur aversion pour cette mesure législative. Il est cependant regrettable que le Bloc ait laissé ses aspirations indépendantistes teintées d'idéologie l'emporter sur une interprétation réaliste du projet de loi.

Il apparaît très clair que les députés bloquistes ont été incapables de donner leur appui à des propositions de changement visant à améliorer le programme fédéral pour aider davantage de Canadiens à conserver leurs emplois et pour créer jusqu'à 100 000 emplois tant au Québec qu'ailleurs au Canada. Ils auraient ainsi reconnu qu'il est possible d'améliorer le système canadien dans l'intérêt de tous les Québécois et de tous les Canadiens.

Les bloquistes n'ont pas examiné le projet de loi sur le fond. Ils se contentent de faire des déclarations outrancières qui n'ont que peu ou rien à voir avec le véritable contenu du projet de loi, des déclarations auxquelles nous devons répondre pour que tous les


2352

Canadiens, y compris les Québécois, comprennent la véritable nature de ce projet de loi très progressiste et nécessaire.

Ainsi, la députée de Mercier a déclaré que la diminution des revenus, qui tomberont à 900 millions de dollars en raison de la réduction du maximum de la rémunération assurable, sera compensée par ceux qui «ne paient pas de cotisations d'assurance-chômage à l'heure actuelle». Le député de Louis-Hébert a déclaré: «Le fait d'obliger les travailleurs à temps partiel, les étudiants et autres à cotiser à la caisse d'assurance-chômage rapportera 900 millions de dollars, mais que ce qui rend cette mesure si envahissante est qu'elle permettra au gouvernement de donner l'argent aux travailleurs plus fortunés.»

Qu'en est-il en réalité? Sur les 500 000 travailleurs dont la rémunération sera assurée pour la première fois, 76 p. 100, ou 380 000 d'entre eux, obtiendront le remboursement de leurs cotisations. Les autres 120 000 nouveaux cotisants paieront 14 millions de dollars en tout et auront droit à des prestations en cas de chômage.

(1350)

Ce n'est pas tout. Quelque 920 000 travailleurs à faible revenu qui cotisent actuellement recevront environ 30 millions de dollars en remboursement de leurs cotisations. De plus, alors qu'un nombre accru de travailleurs à temps partiel seront assurés par le régime d'assurance-emploi, la proportion de ceux qui cotiseront sera moindre. Ils paieront collectivement 6 millions de moins qu'à l'heure actuelle.

Le résultat le plus marquant de l'assujettissement de la première heure de travail aux cotisations sera un relèvement du montant maximum hebdomadaire. Cela signifie que pour la première fois, les travailleurs ayant des revenus hebdomadaires plus élevés paieront leur juste part.

Qui plus est, 350 000 demandeurs à faible revenu et chefs de famille auront maintenant droit à un supplément qui porterait leurs prestations jusqu'à 80 p. 100 de leurs gains hebdomadaires au lieu du taux courant de 55 p. 100. En moyenne, cette mesure augmentera les prestations de ce groupe de quelque 12 p. 100. De plus, la règle d'intensité qui réduit un peu les prestations des utilisateurs à répétition ne s'appliquera pas à eux. De même, les gens pourront gagner jusqu'à 50 $ par semaine, pendant qu'ils sont prestataires, sans voir leurs prestations réduites.

Les faits sont tout le contraire de ce que disent les députés du Bloc. Les travailleurs à faible revenu ne financent pas la réduction du MRA. Au contraire, en vertu de cette mesure législative, la situation des travailleurs à faible revenu sera améliorée.

La député de Mercier prétend qu'en réduisant le MRA, le gouvernement fait un cadeau aux grandes sociétés et aux travailleurs gagnant entre 39 000 $ et 42 000 $ par année. Tout d'abord, en ramenant le MRA à 39 000 $ on fait qu'il sera environ 17 p. 100 au-dessus du salaire moyen en l'an 2000. Si l'on n'avait rien fait, il aurait été environ 47 p. 100 au-dessus de cette moyenne.

Même si certains salariés à haut revenu et leurs employeurs paieront un peu moins de cotisations, environ 150 $ par an, cela signifie aussi que les travailleurs à haut revenu toucheront moins de prestations, presque 2 340 $ de moins. Comme la Chambre peut le voir, ce que dit la députée de Mercier et la réalité, sont deux choses bien différentes. On peut difficilement ranger cela dans la catégorie des cadeaux aux travailleurs à haut revenu.

Je voudrais exposer un autre point à la Chambre. Le député de Beauport-Montmorency-Orléans prétend que les femmes ne seront pas en mesure de répondre aux exigences, car il faudra qu'elles travaillent 910 heures par année. Tout d'abord, les 910 heures pour avoir droit aux prestations d'assurance-emploi ne s'appliquent que la première année sur le marché du travail, c'est-à-dire à une personne qui entre ou revient sur le marché du travail et qui doit établir une appartenance raisonnable au marché du travail avant d'être admissible aux prestations. Dès la seconde année, pourvu que la personne ait eu au moins 490 heures de travail dans la première, l'exigence n'est que le nombre variable d'heures, lequel est compris entre 420 et 700. Cette exigence ne se répète pas année après année comme le prétendent les députés d'en face.

La raison de ce changement est évidente. En effet, si les exigences au départ étaient faibles, cela encouragerait les jeunes à accepter des emplois temporaires instables, plutôt que de terminer leurs études. Le message que l'on envoie aux jeunes est clair: Ne quitter pas l'école en espérant travailler à salaire réduit pendant quelques mois pour profiter ensuite des prestations d'assurance-emploi. Il faut travailler plus longtemps pour être admissible et les nouvelles règles exigeront également que l'on se consacre plus activement à la recherche d'un travail.

Les députés d'en face devraient savoir aussi qu'il y a des dispositions spéciales pour les femmes qui reviennent sur le marché du travail. Elles seront admissibles aux nouvelles mesures de réemploi pendant une période pouvant atteindre cinq ans après leur départ du marché du travail, au lieu de la période maximale de trois ans accordée aux prestataires ordinaires.

Le député d'Ahuntsic prétend que la réforme constitue une attaque contre les travailleurs saisonniers. Cet aspect de la question me tient à coeur, comme elle intéresse de nombreux députés et certainement les travailleurs à temps partiel. Le député déclare que les conditions d'admissibilité ont été resserrées. Il omet de dire que près de 90 000 personnes seront admissibles aux prestations d'assurance-emploi alors que, si elles perdaient leur travail aujourd'hui, ces mêmes personnes n'auraient pas droit aux prestations d'assurance-chômage. On compte, parmi ces gens, 45 000 travailleurs saisonniers dont les heures de travail sont très longues pendant un nombre de semaines insuffisant pour leur donner droit aux prestations et environ 45 000 travailleurs à temps partiel et détenteurs d'emplois multiples, dont une partie seulement des semaines de travail sont assurées à l'heure actuelle.

(1355)

Le député devrait aussi savoir que les amendements présentés au comité relativement aux problèmes des interruptions d'emploi et du revenu des travailleurs occupant des emplois saisonniers, ainsi que la nouvelle règle d'établissement de la moyenne, aideront grandement les travailleurs des industries saisonnières en leur accordant une période plus longue pour obtenir l'admissibilité aux prestations.

2353

Si l'on tient compte des faits, et non des déclarations des députés d'en face, il est bien évident que ce projet de loi est excellent et qu'il aidera un très grand nombre de personnes.

Je veux profiter de cette occasion pour rétablir les faits quant à la partie II du projet de loi C-12. La députée de Mercier a critiqué le projet de loi C-12 parce qu'il n'aidera pas les chômeurs à retrouver du travail selon elle. Elle a déclaré: «Nous soutenons, et nous avons toute l'argumentation à l'appui, que ce projet de loi non seulement n'assure pas un emploi, non seulement ne favorise pas la création d'emplois, mais qu'il est anti-emploi.» C'est faux, et je veux mettre les choses au point.

L'assurance-emploi est un système de plein emploi. Il offre le cadre nécessaire pour mettre en oeuvre des mesures pratiques, qui ont fait leur preuve et qui aideront les Canadiens à retrouver du travail rapidement et à le conserver. Sur les deux milliards de dollars d'économies réalisées grâce à l'assurance-emploi, on va réinvestir 800 millions de dollars, ou 40 p. 100, dans des mesures actives d'aide au réemploi. Cela viendra s'ajouter au 1,9 milliard de dollars que le gouvernement consacre déjà à cette question. On va donc affecter 2,7 milliards de dollars au problème du chômage structurel.

Parmi les mesures actives destinées à aider les Canadiens à retrouver rapidement du travail, il y a les subventions salariales, les suppléments de revenu, l'aide au travail indépendant, l'acquisition de compétences, les partenariats en matière d'emploi avec les collectivités, ainsi que les prêts et les subventions. Ces mesures vont aider jusqu'à 400 000 Canadiens à trouver ou à retrouver du travail. En plus de cela, on met en place un fonds transitoire de création d'emplois de 300 millions de dollars pour stimuler la création d'emplois dans les régions à fort taux de chômage.

Même si tout prouve que le gouvernement fédéral travaille étroitement avec les provinces pour mieux coordonner les programmes d'aide aux chômeurs canadiens, notre collègue du Québec prétend encore que ce sont les provinces qui financent l'assurance-chômage et que c'est le gouvernement fédéral qui leur dicte le type de programmes et de mesures qu'on doit mettre en oeuvre pour aider ceux qui ne peuvent se trouver un emploi. Cette affirmation est fausse pour deux raisons. Tout d'abord, ce ne sont pas les provinces, mais bien les employeurs et les employés qui financent le programme grâce à leurs cotisations. Ensuite, le projet de loi établit un cadre de nouvelles ententes fédérales-provinciales sur le marché du travail destinées à éliminer les dédoublements et les chevauchements.

Le projet de loi permet un éventail de méthodes souples d'application des mesures d'emploi. Je veux que nos vis-à-vis se rendent compte que les gens du Québec ne vont pas se laisser tromper par leurs belles paroles. Ce sont les faits qui les intéressent. Or, je les ai présentés à la Chambre. Je souhaiterais que nos vis-à-vis prennent le temps de lire le projet de loi.

Le Président: Comme il est 2 heures, nous passons maintenant aux déclarations de députés.


2353

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

GIBBARD FURNITURE SHOPS

M. Larry McCormick (Hastings-Frontenac-Lennox and Addington, Lib.): Monsieur le Président, j'invite mes collègues à joindre leurs voix à la mienne pour souhaiter encore beaucoup de succès au plus vieux fabricant de meubles au Canada, Gibbard Furniture Shops, de Napanee. Cette entreprise conçoit et fabrique certains de plus beaux meubles au monde.

On peut trouver des meubles Gibbard à l'étranger, dans des maisons privées et dans plus de 70 de nos ambassades. Plus récemment, Gibbard a pénétré le marché japonais où l'on apprécie grandement le travail très soigné et le bois de qualité de ses meubles. Bruce McPherson père me dit que les Japonais s'intéressent particulièrement aux robustes meubles en merisier que l'on fabrique dans leur atelier historique à Napanee.

Fondée en 1835 par John Gibbard, la compagnie célèbre ses 160 ans d'existence. Au cours des ans, quatre générations de Gibbard et, depuis 1940, deux générations de la famille McPherson l'ont dirigée.

Félicitations à tous ces gens, à leurs prédécesseurs et à leurs employés dévoués qui ont permis à l'entreprise de se tailler cette réputation enviable. Tous ensemble souhaitons encore beaucoup de succès aux ateliers de meubles Gibbard au cours du prochain millénaire.

* * *

[Français]

L'EMPLOI

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, pour pallier l'inefficacité du gouvernement fédéral à remettre les gens sans emploi au travail, des citoyens du comté de Québec-Est se sont regroupés pour former Solidarité-emploi Laurentien, organisme sans but lucratif, trait d'union entre les chômeurs et les employeurs de la région de Québec.

En deux ans, Solidarité-emploi a permis à plus de 500 personnes de la région de se procurer un emploi. Devant un tel succès, nous félicitons les organisateurs, dont Suzanne Lessard, la présidente, et nous les encourageons à poursuivre leur magnifique travail.

Une question se pose, cependant. Le gouvernement ne devrait-il pas les soutenir adéquatement et leur assurer les ressources devenues indispensables à leur bon fonctionnement? Il semble que non.

Malgré toutes les approches, le ministre refuse de les recevoir. Or, en dépit de l'inefficacité du gouvernement fédéral libéral face à l'emploi, voici qu'une initiative local réussit de manière extraordinaire.

Félicitations à Solidarité-emploi Laurentien.


2354

[Traduction]

LE PARTI LIBÉRAL

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, lorsque les libéraux étaient en quête de votes aux dernières élections, le premier ministre a déclaré: «Il n'est pas une seule promesse que j'ai faite que je ne saurais tenir». Ce fut sa première erreur.

Il y a eu ensuite la TPS. Le ministre des Finances s'est déjà excusé de ne pas avoir tenu cette promesse. La vice-première ministre a démissionné parce que la promesse n'a pas été honorée. Or, le premier ministre n'en continue pas moins d'essayer de se sortir d'une situation embarrassante aux frais des contribuables. Il s'agit là d'une erreur très grave.

Et que dire de la promesse selon laquelle notre filet de sécurité sociale ne serait jamais touché, d'aucune façon. Or, voilà que les libéraux font volte-face et annoncent de grandes réformes du Régime de pensions du Canada et de l'assurance-chômage. Ils ont fait savoir que 25 p. 100 des personnes âgées verront leurs prestations réduites de 10 p. 100. Les domaines de la santé et de l'éducation ont été durement frappés par les coupes sombres que les libéraux ont opérées dans les paiements de transfert aux provinces. Quant à la promesse des libéraux de restaurer l'intégrité au sein des institutions parlementaires, on sait maintenant de quoi elle est faite.

Quand nous commettons des erreurs, nous l'admettons et nous prenons les mesures correctrices qui s'imposent. Quand les libéraux commettent des erreurs, ils en rejettent la responsabilité sur la force majeure.

* * *

L'INDUSTRIE PÉTROLIÈRE ET GAZIÈRE

M. Chris Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing, NPD): Monsieur le Président, le gouvernement a demandé à maintes reprises aux Canadiens de toutes les régions de faire des sacrifices pour aider à relancer l'économie du pays. Des familles ont dû réduire leurs attentes et des collectivités ont été obligées de faire plus avec moins.

En revanche, chez les grandes pétrolières, les affaires marchent très bien. En 1994, ces sociétés ont reçu plus de 743 millions de dollars en subventions fédérales directes et 2,1 milliards en allégements fiscaux. Les bénéfices de la Compagnie pétrolière impériale vont tripler cette année, tandis que les Canadiens paient des prix records pour l'essence.

Un gouvernement responsable agirait pour protéger ses citoyens contre cette cupidité éhontée qui étouffe l'économie, mais rien n'a encore été fait.

Étant l'absence de leadership de la part du gouvernement, les néo-démocrates se joignent aux consommateurs de leurs collectivités pour boycotter, à compter d'aujourd'hui, la Compagnie pétrolière impériale, qui exploite les stations-service ESSO. Je tiens à féliciter tous ceux qui prennent la tête de ce mouvement des consommateurs et tous ceux qui y participent. Lorsque ESSO réagira, les consommateurs en feront autant.

En s'en prenant aux recettes de ce géant, les consommateurs et les citoyens feront preuve du leadership que le gouvernement fédéral. . .

Le Président: La députée de St. John's-Ouest.

* * *

CYRIL O'REILLY

Mme Jean Payne (St. John's-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je me lève aujourd'hui pour féliciter M. Cyril O'Reilly, qui enseigne à l'école élémentaire St. Edward, de Placentia, Terre-Neuve. M. O'Reilly a récemment reçu le prix du premier ministre de 1995 pour l'excellence dans l'enseignement des sciences, de la technologie et des mathématiques.

Grâce à Cyril O'Reilly et ses élèves de septième et de huitième années de l'école St. Edward, Placentia, à Terre-Neuve, est une ville plus propre. Depuis 1990, M. O'Reilly fait preuve d'un grand esprit d'initiative en faisant participer l'école et la collectivité à divers programmes de recyclage. Par exemple, dans le cadre d'une campagne d'élimination des déchets, en 1995, les élèves ont pris connaissance des problèmes que représentaient les déchets pour la ville et des solutions possibles. C'est grâce à leur enthousiasme que St. Edward a remporté le prix de la province pour la jeunesse et l'environnement, en 1994-1995.

Toutes nos félicitations, monsieur O'Reilly, pour votre esprit d'initiative et pour une récompense bien méritée.

* * *

[Français]

LE SECTEUR FORESTIER

M. Patrick Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, Lib.): Monsieur le Président, je désire souligner aux députés de cette Chambre que nous célébrons présentement la Semaine nationale de l'arbre et des forêts. L'importance des forêts et des emplois qui en découlent est primordiale pour ma circonscription.

En plus d'être un lieu de loisirs et de détente, les forêts jouent un rôle de premier ordre pour l'économie du Canada et représentent une source d'emplois directs et indirects pour plus de 850 000 Canadiens et Canadiennes.

Le secteur forestier canadien génère des activités de plus de 49 milliards de dollars annuellement. De ce montant, plus de 22 milliards de dollars contribuent positivement à la balance commerciale du pays.

Permettez-moi de féliciter toutes les personnes qui oeuvrent de près ou de loin dans les activités liées à la forêt. Grâce à elles, nous bénéficions de cette importante ressource qu'est la forêt.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, j'estime que les parlementaires canadiens doivent souligner de façon toute spéciale le sens de leadership dont


2355

fait preuve notre pays en matière de protection et de promotion de l'environnement.

En 1992, le Canada a été l'un des premiers pays industrialisés à ratifier la Convention des Nations Unies en matière de biodiversité. Plus tard, les gouvernements fédéral et provinciaux ont travaillé en partenariat en vue d'élaborer une stratégie canadienne en biodiversité. Voilà un bel exemple de collaboration fédérale-provinciale qui illustre le bon fonctionnement du fédéralisme canadien.

(1405)

Enfin, soulignons toute la fierté que nous avons, comme Canadiens et Canadiennes, d'avoir vu Montréal choisie comme hôte du Secrétariat permanent, le 13 novembre 1995, lors de la seconde réunion de la Convention des membres de la Convention sur la diversité biologique.

Pour nous, l'ouverture de ce secrétariat constitue une preuve concrète de toute l'importance accordée par le Canada dans la perspective des défis environnementaux à l'échelle mondiale.

* * *

LA SUPER EXPO-SCIENCES BELL

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, récemment se déroulait à Trois-Rivières la finale québécoise de la Super Expo-sciences Bell. Cette exposition regroupait près de 150 jeunes scientifiques en provenance de toutes les régions du Québec qui ont réalisé quelque 95 projets de vulgarisation et d'expérimentation, le tout bien encadré par leur conseil régional de loisir scientifique respectif.

Nous voulons aujourd'hui rendre hommage au Conseil de développement du loisir scientifique du Québec, de même qu'au Conseil du loisir scientifique de la Mauricie-Bois-Francs-Drummond qui, en collaboration avec l'Université du Québec à Trois-Rivières, ont assuré le succès de cet événement.

Félicitations au commanditaire principal, la société Bell, et à ses employés bénévoles, aux nombreux partenaires et commanditaires, aux membres du comité organisateur, aux nombreux bénévoles de toutes les régions du Québec et, bien sûr, à tous les jeunes scientifiques qui ont participé à cette exposition, prélude à la finale canadienne et à la finale internationale qui aura lieu en Afrique du Sud, en 1997.

* * *

[Traduction]

TARGET: TOP GUN

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, le 2 mai dernier, j'ai assisté à un dîner à Grand Centre, en Alberta, en l'honneur d'une délégation de l'OTAN. Cette délégation doit étudier la possibilité d'accorder au Canada un contrat de 20 ans pour la formation des pilotes de l'OTAN. L'autre soumissionnaire est le Texas, mais nous sommes convaincus que notre programme est nettement supérieur à celui des Américains.

Les trois collectivités de Cold Lake, Grand Centre et 4 Wing Cold Lake ont mis sur pied un projet intitulé Target: Top Gun. La délégation, composée de représentants du gouvernement et de l'industrie, se penche sur les avantages militaires et financiers que procurerait la formation donnée au Canada. La ville de 4 Wing Cold Lake possède les installations de formation qui comptent parmi les meilleures au monde.

La soirée que les responsables du projet avait organisée était un excellent exemple de l'hospitalité typique des gens de l'Ouest. Des élèves avaient décoré l'endroit avec les drapeaux des pays membres de l'OTAN, qui avaient été faits à la main. Les invités ont eu droit à un dîner splendide de boeuf de l'Alberta. Toute la réception était marquée au sceau de l'unité et de l'appui.

Je remercie Gary Blanchard, président du comité du projet, et les membres du comité qui ont fait un excellent travail de promotion pour nos installations. Félicitations, Target: Top Gun!

* * *

L'ASSOCIATION CANADIENNE DES SOCIÉTÉS FRATERNELLES

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de souhaiter la bienvenue à la Société canadienne des sociétés fraternelles qui tient son assemblée annuelle à Ottawa cette semaine.

L'Association célèbre 105 années de service aux Canadiens. Ses 22 organismes membres sans but lucratif représentent 400 000 Canadiens et leurs familles.

Les sociétés fraternelles distribuent des centaines de milliers de dollars en subventions, en bourses d'études, en programmes éducatifs et en aide à la collecte de fonds, au bénéfice de personnes de tous les âges et de tous les milieux. Partout au Canada, des bénévoles donnent d'innombrables heures de leur temps à nos collectivités. Les sociétés fraternelles canadiennes tendent la main à tous les Canadiens.

J'exhorte mes collègues à la Chambre à réserver un peu de leur temps pour les délégués venant de leur circonscription qui se trouvent à Ottawa cette semaine et souhaitent les rencontrer.

* * *

L'UNIVERSITÉ QUEEN'S

M. Peter Milliken (Kingston et les Îles, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais signaler à la Chambre un des programmes d'enseignement les plus innovateurs aujourd'hui, le programme de maîtrise en administration de l'université Queen's en matière de sciences et de technologie, qui tient son cours inaugural aujourd'hui à Kingston.

Avec la mise en oeuvre de ce programme, Queen's a établi un nouveau modèle d'excellence pour l'enseignement commercial au Canada. En privatisant son MBA, Queen's dépensera pour ses programmes deux fois plus par étudiant que les autres établissements.

De même, comme le programme est concentré en une année, il en coûtera moins cher aux étudiants pour obtenir leur MBA. Par ailleurs, Queen's prêtera jusqu'à 30 000 $ aux emprunteurs admis-


2356

sibles, une somme qu'ils n'auront pas à rembourser avant d'obtenir un emploi payant au moins 50 000 $ par année.

Queen's mettra ce programme en oeuvre à l'aide de la technologie d'enseignement la plus avancée du monde. Des installations toutes neuves édifiées sur le campus de Queen's à Kingston se comparent favorablement à celles des meilleures écoles de commerce dans le monde.

J'espère que tous les députés voudront se joindre à moi pour féliciter MM. Ken Wong et Tom Anger ainsi que Mme Margot Northey, doyen de l'École de commerce de Queen's, de la façon innovatrice avec laquelle ils répondent aux besoins en éducation au Canada.

* * *

[Français]

LA FORMATION PROFESSIONNELLE

M. Nick Discepola (Vaudreuil): Monsieur le Président, en fin de semaine dernière se déroulaient, à Montréal, les Olympiades canadiennes de la formation professionnelle et technique. En plus d'insister sur l'importance pour les jeunes d'acquérir une solide formation professionnelle, il importe de saluer et de remercier les participants et participantes, les organisateurs et organisatrices qui ont réalisé un travail de qualité dans le cadre de la tenue de ces olympiades.

(1410)

De ce succès, pas de doute; les participants ont su démontré une détermination et une ténacité qui leur seront utiles pour affronter les défis d'une société en constante évolution dans tous les secteurs d'activité.

Aussi, importe-t-il d'encourager ces formes d'engagement concernant l'avenir de nos jeunes afin que la société d'aujourd'hui puisse poser d'autres gestes concrets en vue d'assurer une qualité de vie pour l'ensemble des citoyens et citoyennes partout au Canada.

* * *

HOMMAGE À LISE BISSONNETTE

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, au cours de la fin de semaine, Mme Lise Bissonnette, directrice du quotidien Le Devoir, a été intronisée au Panthéon du journalisme canadien. C'est, pour cette grande journaliste, un honneur et une reconnaissance bien mérités.

En effet, tout au cours de sa carrière, Mme Bisonnette a fait preuve d'un grand sens de la recherche et de rigueur dans ses interprétations, qualités essentielles à l'exercice du métier de journaliste.

De plus, nous ne pouvons passer sous silence ce qui constitue, à nos yeux, un grand exploit, celui d'assurer la durée et l'indépendance au quotidien Le Devoir dans un contexte souvent et encore difficile. Ce tour de force démontre la puissance de la volonté qui anime cette femme pour qui nous avons beaucoup de respect et d'admiration.

Le Devoir est un outil essentiel à la démocratie québécoise. Nous félicitons Mme Bissonnette pour son excellent travail et nous souhaitons longue vie au quotidien Le Devoir.

* * *

[Traduction]

LES PÊCHES

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, l'objectif déclaré du ministre des Pêches, dans son plan de relance de la pêche commerciale du saumon en Colombie-Britannique, est de réduire la taille de la flotte de 50 p. 100. Cette mesure n'améliorera en rien la rentabilité de la pêche si, au même moment, on réduit les prises de moitié. Or, c'est justement ce qui se passe.

Par exemple, l'été dernier, la part détenue par les autochtones dans les prises commerciales sur le Fraser, dans le cadre de la stratégie des pêches autochtones, a dépassé le cap des 50 p. 100. Comme les Nisga'a obtiendront bientôt par traité la garantie de 27 p. 100 de la production de la rivière Nass et qu'au moins deux autres bandes de la Nass n'ont pas encore conclu d'entente, la proportion garantie aux autochtones sur ce cours d'eau dépassera facilement 50 p. 100 des prises. Des concessions de la même ampleur seront accordées tout le long de la côte, au fur et à mesure que seront conclus plus d'une quarantaine de traités.

Il est évident que la réduction de la flotte par moitié, dans le cadre du plan du ministre, n'a été imposée que parce qu'une plus forte proportion de la ressource est accordée aux entreprises de pêche strictement autochtones en vertu de traités et d'autres ententes conclues avec les autochtones sur la pêche.

* * *

LES PRIX DE L'ESSENCE

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville, Lib. ind.): Monsieur le Président, il y a trois semaines, j'ai pris la parole à la Chambre pour dénoncer les prix outranciers que demandent les sociétés pétrolières. Il y a longtemps que ces sociétés se concertent pour fixer les prix et escroquer les Canadiens qui travaillent avec acharnement.

Divers groupes et particuliers ont proposé de boycotter ces sociétés. J'ai aussi demandé au gouvernement de légiférer pour mettre un terme aux tactiques de fixation des prix. Jusqu'à maintenant, rien n'a été fait, et les multinationales continuent d'empocher les bénéfices.

J'ai une solution à proposer pour régler le problème. Si le gouvernement échangeait des surplus de blé canadien contre du pétrole iraquien, je puis donner à la Chambre l'assurance qu'il contribuerait grandement à procurer des aliments et des fournitures médicales à des milliers d'enfants et de femmes malades en Iraq et qu'il aiderait, par la même occasion, quelque 30 millions de Canadiens en ramenant le prix de l'essence à 45c. le litre.

Nous pourrions sauver la vie d'enfants innocents en Iraq et stimuler notre économie. Tout le monde serait gagnant.

2357

LA SEMAINE DE LA PROTECTION CIVILE

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, la Semaine de la protection civile se déroule du 6 au 12 mai au Canada. En instituant cette semaine, le gouvernement fédéral, par l'entremise de Protection civile Canada, veut se joindre aux provinces et aux territoires, dans un effort national pour sensibiliser davantage la population à la nécessité de se préparer à toutes sortes de situations d'urgence.

Chaque année, certaines de nos localités vivent des situations d'urgence d'une vaste portée et des désastres d'envergure locale. Les inondations, les incendies de forêt, les déversements de produits toxiques, les tempêtes de neige, les tornades et les accidents industriels ne sont que quelques-unes des catastrophes d'origine naturelle ou humaine qui peuvent menacer des vies, des biens, l'environnement et l'économie locale. Même s'il y a peu de choses que les Canadiens puissent faire pour éviter pareilles catastrophes, tous devraient être prêts à y faire face.

J'invite donc tous les députés et tous les Canadiens à participer à la Semaine de la protection civile en prenant le temps de se renseigner sur les mesures à prendre pour assurer leur protection et celle de leur famille et pour aider leur collectivité pendant et après un désastre.

* * *

(1415)

[Français]

LES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, ce matin, à Cumberland, en Ontario, dans ma circonscription, j'ai eu le plaisir de remettre un octroi provenant de Patrimoine Canada au Théâtre des Lutins pour l'achat d'un édifice.

Le Théâtre des Lutins célèbre cette année son 25e anniversaire et il est bien connu auprès de la communauté franco-ontarienne pour ses pièces axées sur les jeunes. L'organisme logera maintenant un centre des arts à Cumberland pour l'enfance et la jeunesse et y tiendra aussi un festival annuel.

M. Fillion: Patroneux.

M. Boudria: Je note que les députés du Bloc protestent l'aide aux francophones.

L'octroi est digne de mention car notre gouvernement, et plus particulièrement l'honorable Sheila Copps, ont su reconnaître le Théâtre comme étant un groupe qui se consacre totalement à la jeunesse francophone de l'Ontario.

[Traduction]

Je remercie donc Sheila et j'attends avec impatience l'occasion de la revoir prochainement à la Chambre des communes.

[Français]

À ma collègue, Sheila Copps, qui s'est dévouée particulièrement pour les communautés francophones, je dis: «À bientôt, Sheila.»


2357

QUESTIONS ORALES

[Français]

LES RÉFÉRENDUMS

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier constitutionnel, le premier ministre se réfugie derrière la démarche du Québec pour justifier l'intervention possible du gouvernement fédéral dans la cause Bertrand qui vise à nier aux Québécois le droit fondamental de décider démocratiquement eux-mêmes de leur avenir.

Ma question s'adresse au ministre des Affaires intergouvernementales. Comment le gouvernement fédéral peut-il se placer ainsi en situation de chantage face au gouvernement du Québec, en rendant sa non-participation à la cause Bertrand conditionnelle au fait que le Québec renonce à défendre le droit fondamental des Québécois à décider par eux-mêmes de leur avenir?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à la Chambre la semaine dernière, le litige dont le tribunal est saisi a capté l'intérêt à cause de la position prise par le gouvernement du Québec. Selon cette position, ni les tribunaux ni la Constitution ne peuvent influer sur la déclaration de souveraineté par le Québec. Cette affirmation est, évidemment, profondément erronée.

C'est seulement la question de savoir si le procureur général fédéral peut aider le tribunal à se pencher sur cette question qui a attiré notre attention. Nous examinons notre position en matière d'intervention. Aucune décision n'a encore été prise, mais c'est la raison pour laquelle nous l'étudions.

[Français]

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre lui-même, en point de presse cet avant-midi, déclarait que ce serait beaucoup plus facile pour le gouvernement fédéral de ne pas intervenir dans le dossier, si tant est que le gouvernement du Québec acceptait de ne pas défendre le droit des Québécois à décider eux-mêmes de leur avenir. C'est le premier ministre qui l'a dit cet avant-midi même à Montréal.

Je demande au ministre de la Justice pourquoi le fédéral se place-t-il maintenant en situation de chantage-il n'y a pas d'autre mot-face au gouvernement du Québec, alors que dans les faits, le fédéral a toujours reconnu implicitement le droit des Québécois à décider eux-mêmes de leur avenir en participant aux deux référendums précédents et en s'engageant à en reconnaître le résultat?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le processus par lequel la population d'une province ou d'un pays s'exprime au moyen d'un référendum n'est pas nouveau.


2358

Naturellement, l'opinion de la population, lorsqu'elle est exprimée par voie de référendum, est importante. Personne ne le conteste et personne n'a le droit de contester le droit de la population du Québec de s'exprimer sur une telle question.

Ce qui a attiré l'attention du gouvernement national, c'est que le gouvernement du Québec, dans le litige où est soulevée la légalité de l'avant-projet de loi et du projet de loi no 1, a adopté la position selon laquelle ni la Constitution ni les tribunaux n'ont de rôle pertinent à jouer quant à la suite des choses ni à la déclaration de souveraineté par la province de Québec. C'est une question très fondamentale.

Comme je l'ai dit à la Chambre, nous sommes en train d'étudier la question de savoir si nous pouvons aider les tribunaux sur ces points de droit. C'est pourquoi nous songeons à intervenir dans ce cas-là. Cela n'a rien à voir avec le chantaeg. C'est une question liée aux principes fondamentaux du droit et de la primauté du droit. C'est ce que nous sommes en train d'étudier.

(1420)

[Français]

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, en voulant participer à la contestation en justice du droit inaliénable des Québécois à décider de leur avenir, est-ce que le gouvernement fédéral n'est pas en train de se placer dans une position intenable en voulant placer, en quelque sorte, une interprétation juridique devant la démocratie et le choix d'un peuple?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous ne sommes pas d'avis que la démocratie et la primauté du droit sont des concepts incompatibles; l'une est garantie par l'application de l'autre.

La position du gouvernement du Québec dans l'affaire Bertrand touche à d'importants aspects de la primauté du droit. Il se peut que, après avoir étudié la question, nous décidions de ne pas intervenir. Il se peut que nous en venions à la conclusion que la question est si évidente qu'il ne soit pas nécessaire que nous aidions le tribunal. Il se peut également que nous attendions la décision du tribunal de première instance pour déterminer si notre intervention pourrait être plus utile en appel. Toutes ces questions doivent faire l'objet d'un examen.

Entre temps, nous évaluons la situation et j'espère être en mesure, d'ici quelques jours, de dire comment nous avons décidé de procéder.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral se réfugie derrière une recherche de la légalité pour justifier son intervention dans la cause Bertrand qui vise à nier le droit des Québécois à décider démocratiquement de leur avenir. Pourtant, il faut se le rappeler, le fédéral a participé activement aux deux référendums québécois.

Étant donné que nous avons un ministre des Affaires gouvernementales, que le gouvernement s'est payé le luxe d'en avoir un et qu'il soit ici, ma question s'adresse au ministre des Affaires intergouvernementales.

Comment le ministre des Affaires intergouvernementales justifie-t-il que jamais le gouvernement fédéral n'a tenté de contester avant aujourd'hui la légalité des deux référendums tenus au Québec?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, les référendums au Canada, et comme aussi dans le Livre blanc sur les consultations populaires au Québec, sont consultatifs. Quand le gouvernement du Canada participe à un référendum, c'est parce qu'il veut donner son point de vue lors de cette consultation. C'est ce que le gouvernement du Canada a fait lors des deux référendums en question.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales admettrait-il qu'en autant que son gouvernement croyait gagner les référendums, il n'en a jamais contesté la légalité, mais que maintenant qu'il a le dos collé au mur, qu'il sait qu'il va perdre le prochain référendum, il tente par tous les moyens d'empêcher les Québécois et les Québécoises de se prononcer sur leur avenir? C'est ça, l'explication.

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada n'avait aucune raison de considérer comme illégaux des référendums consultatifs, puisque c'est la loi qu'un référendum doit être consultatif.

Mais puisque l'honorable député cherche à ce point à trouver des contradictions, il les trouvera dans l'interprétation de la victoire et de la défaite, lors du dernier référendum, par le leader du camp du oui de l'époque, M. Jacques Parizeau, qui, dans la défaite, nous dit: «À la prochaine, et la prochaine sera dans pas très longtemps. Nous aurons notre revanche», mais qui, dans la victoire, nous dit: «Tournons la page, c'est fait, c'est pour toujours.» Voilà la contradiction.

* * *

[Traduction]

LE PARTI LIBÉRAL

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, au cours de la dernière campagne électorale, le premier ministre a dit aux Canadiens qu'il tiendrait toutes ses promesses électorales.

Une fois le scrutin dépouillé, toutefois, le premier ministre a changé son fusil d'épaule et a dit ceci: «Il arrive parfois, en cours de mandat, qu'on ne soit pas en mesure de tenir parole. Il faut avoir une certaine souplesse.» C'est toute une volte-face!


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Qui les Canadiens doivent-ils croire, le premier ministre qui a dit au cours de la campagne électorale qu'il tiendrait toutes ses promesses, ou le cabinet du premier ministre qui dit que toutes ses promesses ne seront pas tenues?

(1425)

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, d'abord, je tiens à souhaiter au chef du tiers parti un bon retour au Parlement. Un certain nombre d'événements intéressants se sont manifestement produits pendant son absence. Il est le bienvenu et il est désormais en mesure de. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Tous les députés s'abstiendront, j'en suis sûr, de signaler la présence ou l'absence de quelque député que ce soit.

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Monsieur le Président, je suis seulement très heureux que le chef du tiers parti soit ici présent. Je me réjouis vraiment. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: La réponse, s'il vous plaît.

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Monsieur le Président, lorsque les députés réformistes se sont fait élire, ils ont clairement promis aux Canadiens une nouvelle façon de faire de la politique. Et pourtant, les déclarations que bien des réformistes font ici depuis deux ans et demi sont parmi les plus inélégantes, les plus inopportunes et les plus inacceptables qu'on ait jamais entendues à la Chambre, et encore je suis généreux.

S'il y a une promesse qui a été violée, c'est bien celle du chef et des députés du Parti réformiste, à tel point qu'ils ont insulté la Chambre avec le langage qu'ils ont employé et les déclarations qu'ils ont faites.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens ne se laisseront pas distraire de la question de l'heure et la question de l'heure concerne l'intégrité du gouvernement.

Dans l'opposition, les libéraux ont dénoncé l'ALENA. Une fois au pouvoir, ils l'ont appuyé. Dans l'opposition, ils ont qualifié de sacré le budget de la Société Radio-Canada. Une fois au pouvoir, ils l'ont réduit de 377 millions de dollars. Dans l'opposition, les libéraux voulaient supprimer la TPS. Une fois au pouvoir, ils la dissimulent et l'harmonisent. Dans l'opposition, les libéraux ont démoli toutes les mesures que les conservateurs ont pu présenter. Une fois au pouvoir, ils les déguisent et les reprennent à leur compte.

Quand les Canadiens devraient-ils croire les libéraux, lorsque, en tant que parti de l'opposition, ils dénonçaient toutes les mesures conservatrices, ou lorsque, comme gouvernement, ils adoptent ces mêmes mesures?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le chef du tiers parti demande ce qu'il faut croire.

Il y a un mois environ, par exemple, la députée de Surrey-White Rock-South Langley faisait ici et à l'extérieur de la Chambre les plus folles allégations concernant l'existence de taupes dans les services du renseignement de sécurité. Aujourd'hui, la même députée nie complètement avoir jamais fait de pareilles allégations.

Lorsqu'il s'agit de véracité et d'intégrité, le chef du Parti réformiste n'a de leçon à donner à aucun député ni à aucun Canadien. Les députés réformistes font constamment preuve d'un manque total de respect pour quelque forme d'intégrité que ce soit.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le ministre peut crier et pester tant qu'il veut, le problème n'en demeure pas moins un d'intégrité gouvernementale pour les Canadiens et ceux-ci ne s'en laisseront pas distraire.

Au cours de la dernière campagne électorale, le premier ministre a promis de rétablir l'honnêteté et l'intégrité de nos institutions. Il a dit que les promesses du livre rouge seraient tenues.

Le gouvernement a tenu moins de 25 p. 100 des promesses qu'il a faites dans le livre rouge. Et voici que le premier ministre dit qu'il n'est pas réaliste de s'attendre à ce que les autres soient tenues.

Le premier ministre a dit aussi, la semaine dernière, qu'il ne fallait pas s'engager par écrit à tenir ses promesses. Qu'on me corrige si je me trompe, mais la signature du premier ministre ne figure-t-elle pas à la première page du livre rouge?

En ne tenant pas ses promesses électorales, le gouvernement est-il en train de dire que la signature du premier ministre ne vaut pas le livre rouge dans lequel elle figure?

(1430)

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, au cours de la campagne électorale, le chef du tiers parti a promis très clairement aux Canadiens que son parti serait synonyme de justice et d'équité pour tous les Canadiens. Et pourtant, nous avons vu très souvent des membres de son caucus violer complètement cet engagement.

Quand le député et son parti affirmeront-ils très clairement aux Canadiens et à la Chambre leur foi dans le respect des droits de la personne au Canada? Vont-ils s'en tenir à la déclaration du député réformiste de Kootenay-Est, qui a dit que rien ne sera fait pour corriger la situation?

* * *

[Français]

LE SUPPLÉMENT DU REVENU GARANTI

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Alors que des milliers de demandes de Supplément de revenu garanti sont bloquées dans les bureaux du ministère en raison de problèmes informatiques, nous apprenons aujourd'hui que le propre frère du ministre aurait bénéficié de l'intervention directe du cabi-


2360

net du ministre afin de recevoir plus rapidement son chèque de Supplément de revenu garanti.

Le ministre reconnaît-il, tel qu'il a été déclaré aujourd'hui, que son propre cabinet est intervenu en faveur de son frère et que, par cette intervention, celui-ci a bénéficié d'un traitement privilégié?

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de regret que je tiens à informer la Chambre que je n'ai pas de frère vivant.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, cette déclaration a été faite par la présidente du syndicat qui le tenait de bonne source.

Des voix: Oh, oh!

Mme Lalonde: Quand le ministre s'engagera-t-il à ce qu'une date précise permette aux gens qui sont privés, comme l'aurait été son frère s'il en avait eu un, de cette différence entre 395 $ et 865 $?

Des voix: Oh, oh!

[Traduction]

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, en réponse à une question, j'ai déclaré à la Chambre des communes que la situation était sérieuse. Beaucoup de gens attendent et beaucoup ont reçu des renseignements erronés sur leur situation. Il ne sert à rien de les rendre encore plus inquiets. Ils ont déjà suffisamment de problèmes.

J'ai aussi précisé que nous ferions tout notre possible pour corriger la situation. Je suis constamment informé de ce qui se passe. Nous avons appelé des gens. Il y avait du personnel au bureau même en fin de semaine dernière pour que tous les gens touchés soient avisés, soit par téléphone, soit par écrit, selon ce qui convient le mieux.

Comme je l'ai dit la semaine dernière, ce genre d'erreur est inexcusable. Nous avons déterminé que les problèmes étaient attribuables à des ratés du nouveau système que le ministère a implanté. Cela est inacceptable aux yeux des gens qui subissent des inconvénients. Nous ferons tout en notre pouvoir pour régler les problèmes le plus rapidement possible parce que nous comprenons toutes les répercussions qu'ils peuvent avoir sur les gens.

* * *

LE PARTI LIBÉRAL

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, la TPS, un financement stable pour Radio-Canada, un programme national de garderies, des modifications à l'ALENA, aucune réduction des prestations de sécurité de la vieillesse et un examen parlementaire des nominations teintées de favoritisme: ce sont toutes là des promesses que les libéraux avaient faites lorsqu'ils essayaient de se faire élire et qu'ils n'ont pas tenues une fois arrivés au pouvoir.

Les ministériels croient-ils encore que le premier ministre était sincère lorsqu'il a dit, durant la dernière campagne électorale, qu'il n'y avait pas une seule promesse qu'il ne tiendrait pas? Oui ou non.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je sais qu'il faut beaucoup de temps à la députée pour assimiler les réponses que nous lui donnons.

La députée a certainement eu l'occasion de consulter la page 20 du livre rouge et de constater que le ministre des Finances et le gouvernement ont bel et bien tenu la promesse que nous avons faite de remplacer la TPS par une taxe différente. C'est très clair.

(1435)

Quant aux autres promesses, le fait est que, selon les dernières estimations, nous avons respecté bien au-delà de 60 p. 100 des engagements que nous avons pris dans le livre rouge. Comme nous n'en sommes qu'à la moitié de notre mandat, il me semble que nous sommes en avance à ce chapitre.

Je peux assurer à la députée que, quand arrivera le moment des prochaines élections, nous serons en mesure de dire que nous avons respecté tous les engagements que nous avons pris dans le livre rouge. Je sais qu'elle sera heureuse d'apporter le livre rouge avec elle, avec tous les engagements qu'il contient, lorsqu'elle se présentera au bureau de l'assurance-chômage pour faire une demande après les prochaines élections.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, si le ministre des Finances a vraiment tenu sa promesse, je voudrais bien savoir pourquoi alors il a dit dans sa conférence de presse: «Nous avons commis une erreur.» Cette remarque semble incongrue.

Les promesses que le gouvernement a essayé de tenir ont coûté cher aux Canadiens: 1 milliard de dollars pour harmoniser la TPS, 2 milliards de dollars pour annuler le contrat des hélicoptères EH-101 et pour remplacer ces hélicoptères par d'autres appareils, et près de 1 milliard de dollars pour privatiser l'aéroport Pearson, et ce sont toutes là des politiques du gouvernement conservateur précédent. Le gouvernement actuel a déjà dépensé 4 milliards de dollars pour essayer de tenir quelques promesses faites dans le livre rouge, et le total continue de grimper.

Combien le gouvernement est-il disposé à dépenser pour cacher le fait que le livre rouge ne veut plus rien dire?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, la députée choisit ses exemples de façon très sélective. La réalité est que les changements majeurs apportés à la TPS feront économiser beaucoup d'argent aux petites entreprises. La taxe harmonisée réduira les frais d'administration.

L'annulation du contrat de l'aéroport Pearson a permis aux consommateurs et aux contribuables canadiens d'économiser des millions de dollars que le gouvernement précédent était prêt à dépenser. Quant à l'annulation du contrat des hélicoptères de style Cadillac, nous avons été capables d'obtenir un bien meilleur marché pour les Canadiens.

Il me semble que la capacité d'obtenir un bon marché pour les contribuables est l'apanage d'un bon gouvernement.


2361

[Français]

L'IMMIGRATION

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de l'Immigration.

Samedi dernier, le journal La Presse confirmait que le gouvernement fédéral a monté une opération d'une ampleur exceptionnelle dans le but d'accorder, avant le 20 octobre dernier, leur certificat de citoyenneté au maximum possible d'immigrants reçus. Pourtant le 16 octobre dernier, le ministre de l'Immigration déclarait, en réponse à une question du Bloc québécois, et je cite: «La façon dont nous traitons les demandes de citoyenneté au Québec n'est pas différente de la façon dont nous agissons avant toute les élections provinciales.»

Compte tenu que les appréhensions de l'opposition sont maintenant confirmées, comment la ministre explique-t-elle qu'il s'agissait d'une opération de routine? Le gouvernement tentait-il de nous cacher cette information?

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ministre du Patrimoine canadien par intérim, Lib.): Monsieur le Président, soyons clairs sur les faits. S'agissait-il d'un coup monté, tel que l'a titré un très grand quotidien au Québec, coup monté, au sens usuel du terme? Habituellement, quand nous utilisons ce langage «coup monté», on fait référence à fraude, à illégalité. Est-ce que la citoyenneté a été accordée à des personnes de façon illégale? La réponse est non.

Toutes les personnes qui ont reçu leur certificat de citoyenneté avaient droit de recevoir leur certificat et avaient droit de vote. Est-ce que mon prédécesseur, qui est aujourd'hui le ministre de l'Environnement, a nié que le ministère faisait un effort particulier pour livrer ces certificats de citoyenneté? Non.

Il a dit en cette Chambre, le 16 octobre, que nous procédions à livrer les certificats de citoyenneté dans ce cas-là comme dans toute autre élection qui se passait au gouvernement. Voici les faits.

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, on sait que dans ce dossier, on a fait une opération sans précédent, qu'on a mis les bouchées doubles et qu'on ne chômait pas, même les jours fériés.

Est-ce que la ministre pourrait affirmer aujourd'hui, de son siège, que l'opération qui a été tenue à la veille du référendum au Québec était exactement de même nature que celle qui a été réalisée en Ontario l'an dernier, ou encore celle qui est actuellement en cours en Colombie-Britannique?

(1440)

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ministre du Patrimoine canadien par intérim, Lib.): Monsieur le Président, vous me permettrez de ne pas être d'accord avec le député de Frontenac qui parle de fraude en la circonstance.

Je répète, encore une fois, qu'il s'agit ici de citoyens qui avaient droit de recevoir leur citoyenneté canadienne. Au mois de novembre 1995, il y avait 20 000 arriérés de cas, en Colombie-Britannique, de personnes attendant pour recevoir leur certificat de citoyenneté. Aujourd'hui, 16 500 personnes ont reçu ce certificat.

Est-ce qu'au Québec, il y a eu un effort particulier? Oui, et mon prédécesseur l'a dit très clairement.

Une voix: Pourquoi?

Mme Robillard: D'autant plus que la nouvelle Loi électorale du Québec obligeait à montrer une preuve de citoyenneté canadienne. Le ministère a reçu énormément de pression des citoyens pour avoir en main leur certificat de citoyenneté.

Encore une fois, ces personnes ont voté en toute légalité et elles sont des citoyens canadiens.

* * *

[Traduction]

L'AGRICULTURE

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le 9 juin 1993, à l'époque où il était le chef de l'opposition, le premier ministre a rencontré des leaders agricoles et leur a dit: «Un gouvernement libéral tiendra un plébiscite auprès des producteurs au sujet de la commercialisation de l'orge.» Le premier ministre respectera-t-il cet engagement et tiendra-t-il ce plébiscite?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le député sait fort bien qu'il ne décrit pas avec exactitude ce qui s'est dit au cours de cette réunion.

Si j'ai bonne mémoire, le premier ministre a dit ce jour-là quelque chose dans le genre: «Aucun changement fondamental ne sera apporté à la Commission canadienne du blé ou même envisagé avant que les producteurs ne soient consultés.»

Si le député se souvient bien, le gouvernement précédent s'apprêtait à l'époque à modifier radicalement la Commission canadienne du blé sans en avoir le pouvoir légal.

Nous avons mis sur pied un processus de consultation, par l'entremise du groupe sur la commercialisation du grain de l'Ouest, qui devrait bientôt terminer ses travaux. Je devrais recevoir son rapport d'ici la fin du mois de juin. Dès que nous pourrons examiner et analyser ce rapport, nous aurons un document plus détaillé et plus réfléchi sur lequel fonder nos décisions ultérieures.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, on voit des choses bien étranges en politique.

Immédiatement après les élections, le 13 novembre, au cours de sa rencontre annuelle avec les représentants des Manitoba Pool Elevators, le ministre de l'Agriculture a déclaré au sujet des plébiscites: «C'est la meilleure façon de déterminer les préférences des agriculteurs.» Le ministre en est-il toujours convaincu ou n'était-ce que des belles paroles?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait savoir, à la lumière d'autres réponses que j'ai fournies à la Cham-


2362

bre, que je n'ai pas écarté la possibilité de tenir un plébiscite en temps opportun.

J'ai déjà mentionné au député, tant à la Chambre qu'à l'extérieur, que les plébiscites du genre de celui qu'il propose peuvent semer la discorde et aggraver le problème au lieu de le régler.

* * *

[Français]

LE LIBERIA

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Des milliers de Libériens s'entassaient hier dans un cargo afin de fuir le chaos qui sévit à Monrovia, et les différentes factions rivales poursuivaient toujours leurs combats. La guerre civile au Liberia a atteint des niveaux de violence inégalés et continue de faire de nombreuses victimes. Rappelons que depuis 1989, plus de 150 000 personnes ont été tuées dans cette guerre civile.

Le ministre peut-il faire le point sur la situation qui prévaut au Liberia et nous indiquer si les pourparlers de paix, prévus pour demain et mercredi à Accra, au Ghana, doivent toujours avoir lieu?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, comme la députée l'a dit à juste titre, la situation au Libéria est passée de grave à extrêmement grave. L'éclatement de nouveaux troubles en fin de semaine a détruit l'espoir de voir un règlement du conflit.

(1445)

Les Nations Unies ont été saisies de la question. Des Casques bleus sont encore présents dans cette région et tentent de rétablir l'ordre. La seule chose que nous puissions faire pour l'instant est d'apporter nos encouragements et notre espoir de voir des négociations s'engager.

Étant donné la gravité des troubles et le nombre de factions rivales en présence, notre seul espoir réside dans les initiatives des Nations Unies. Nous espérons que des mesures seront prises pour permettre la reprise des négociations d'ici deux ou trois jours.

[Français]

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, le ministre a mentionné qu'il soutiendrait tous les efforts des États-Unis afin de résoudre cette grave crise au Liberia.

J'aimerais poser la question complémentaire suivante au ministre. Quel est le rôle exact que le gouvernement canadien entend jouer afin de faciliter les efforts de paix et les négociations diplomatiques en cours visant à instaurer un cessez-le-feu durable?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement canadien n'intervient pas directement dans cette situation. D'autres parties, dont les Nations Unies, ont pris cette initiative.

Je pourrais parler des efforts déployés par mon collègue, le ministre de la Coopération internationale. Nous avons offert des fonds d'aide au développement démocratique à l'intention des pays d'Afrique occidentale qui sont disposés à soutenir les institutions démocratiques nécessaires à l'amélioration du gouvernement. Nous entendons continuer d'offrir cette aide en vue de favoriser un cessez-le-feu ou un règlement du conflit.

Mon collègue est disposé à examiner la façon dont nous pourrions accorder notre aide au développement démocratique à ce pays pour l'aider à reconstruire ses institutions.

* * *

L'OMBUDSMAN DES BANQUES

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a entrepris depuis 30 mois d'examiner les relations des banques avec les petites entreprises et les Canadiens.

Le ministre des Finances pourrait-il donner à la Chambre les dernières nouvelles au sujet de la nomination d'un ombudsman des banques qui serait chargé de s'assurer que les Canadiens soient traités équitablement?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait, au cours des douze derniers mois, toutes les banques ont nommé leur propre ombudsman. Il y en a un par banque.

Toutefois, depuis sa nomination ce matin-même, M. Michael Lauber est devenu le premier ombudsman des banques du Canada chargé de contrôler l'ensemble du système. L'objectif précis de l'ombudsman des banques est de s'assurer que les banques s'acquittent de leurs responsabilités envers la petite entreprise.

M. Lauber, qui n'est pas un banquier, présentera au gouvernement et à la population canadienne un rapport public trimestriel sur ses activités. Nous sommes certainement très heureux de cette initiative des banques.

Je profite de l'occasion pour féliciter les députés de tous les partis qui ont siégé au Comité de l'industrie. L'intérêt et l'attention constante qu'ils ont manifestés pour ce projet comptent pour beaucoup dans la nomination de l'ombudsman des banques.

* * *

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, le livre rouge promettait des emplois, des emplois, des emplois. Les libéraux ont aussi promis, à la Chambre, qu'ils appuieraient les aînés et protégeraient leurs prestations. Cependant, un rapport du propre ministère du ministre des Finances révèle que leur proposition de réforme du Régime de pensions du Canada fera disparaître des milliers d'emplois.


2363

Le ministre des Finances a-t-il l'intention de maintenir les prestations aux aînés ou d'augmenter les charges sociales, faisant ainsi disparaître des milliers d'emplois?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, en collaboration avec les provinces, le gouvernement a créé la commission qui parcourt actuellement le pays pour examiner la situation du RPC, justement dans le but de régler avant tout la question de la survie du RPC. Comment pourra-t-on maintenir le RPC? Le gouvernement appuie fermement le RPC, tout comme les provinces d'ailleurs.

Cependant, au même moment, nous devons faire face à des problèmes très réels, parce qu'ils ont été négligés au cours de la dernière décennie. Il se pourrait que les cotisations grimpent. Il se pourrait que les prestations soient modifiées.

Le gouvernement a affirmé très clairement qu'il n'accepterait pas les recommandations du Parti réformiste, qui mèneraient éventuellement à l'éviscération du Régime de pensions du Canada.

(1450)

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, nous faisons des progrès. Il est maintenant reconnu que les prestations vont baisser et que les cotisations vont augmenter.

Ce mois-ci, 150 000 jeunes Canadiens obtiendront leur diplôme universitaire. Ces jeunes Canadiens bien instruits, travailleurs et motivés, vont constater que leurs emplois sont menacés parce que le gouvernement va augmenter les charges sociales.

Je veux savoir quelle promesse le gouvernement compte briser. Choisira-t-il de ne pas créer les emplois promis aux jeunes Canadiens ou de renoncer à son engagement envers les aînés? Essentiellement, la situation se résumera à cela.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député peut bien croire qu'il a arraché un aveu incroyable au gouvernement.

Il y a déjà plusieurs mois, lors de la conférence des ministres des finances du Canada et des provinces, le gouvernement avait déjà dit clairement que les cotisations devraient augmenter et qu'il faudrait peut-être modifier les prestations.

Il se pourrait que le député vienne juste de parvenir à cette conclusion, mais la plupart des Canadiens ont déjà fait ce constat lorsque l'actuaire en chef a émis son rapport sur le RPC il y a quelque temps.

Pour ce qui concerne les emplois, si les députés examinent un peu ce qui se passe au Canada à l'heure actuelle, ils constateront qu'au cours des trois derniers mois, près de 135 000 nouveaux emplois ont été créés. Depuis l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement, plus de 500 000 emplois ont été créés.

Nous créons des emplois dans la nouvelle économie. Nous créons des emplois pour les jeunes. Nous créons des emplois permanents. Les statistiques le démontrent.

[Français]

LA CONVENTION FISCALE CANADO-AMÉRICAINE

M. François Langlois (Bellechasse, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Le 29 mars dernier, le ministre des Finances reconnaissait en Chambre que la nouvelle convention fiscale canado-américaine était inéquitable envers les Canadiens et Québécois qui touchaient des pensions américaines et qu'il n'était pas d'accord avec la façon de faire des Américains. Par ailleurs, il ne fait rien pour aider ses concitoyens.

Le ministre des Finances peut-il rendre compte à la Chambre des discussions à ce propos qu'il a eues avec son homologue américain, M. Rubin, en dévoilant notamment les différentes options offertes par ce gouvernement pour le règlement de la question des pensions américaines?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la question du député est très pertinente. Il faut dire que le problème existe dans une nouvelle interprétation de la législation américaine.

Comme le député vient de le souligner, j'ai rencontré M. Rubin, à Washington, il y a environ deux semaines. Nous avons discuté longuement du sujet. Nous n'avons pas encore trouvé de solution, mais les Américains, parce que la solution est entre leurs mains, sont en train d'y travailler.

M. François Langlois (Bellechasse, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre, lui, compensera-t-il les pensionnés canadiens et québécois qui paient pour les conventions fiscales inéquitables signées par leur propre gouvernement?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le problème se trouve dans la législation américaine. Le gouvernement canadien est certainement très soucieux du problème et il n'y a pas de doute que d'énormes injustices ont été commises envers des Canadiens. Nous allons continuer d'y travailler, mais il faut dire que le gouvernement canadien n'est pas dans une position pour compenser tous les Canadiens affectés par des changements à des lois de l'extérieur.

Cela étant dit, je pense, comme je l'ai dit au tout début, que la question est très pertinente et nous continuons de travailler sur le problème.

* * *

[Traduction]

LES PRISONS

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, depuis son ouverture, il y a cinq mois, la prison des femmes d'Edmonton n'est qu'une série de désastres.

Un quart des prisonnières se sont échappées. Il y a eu un suicide et plusieurs tentatives de suicide. Plusieurs détenues et plusieurs gardes ont été victimes d'agression. Et la liste ne s'arrête pas là.


2364

Pourquoi le gouvernement a-t-il construit un chalet au lieu d'une prison? Quand fera-t-il passer la sécurité des Edmontoniens avant le confort des détenus? Fermez cet établissement.

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme cela a été annoncé à la Chambre, le solliciteur général du Canada a pris des mesures immédiates pour assurer la sécurité des personnes habitant dans le voisinage de l'institution, transférant une vingtaine de détenues dans des établissements provinciaux.

Nous avons revu le dispositif de sécurité en place dans l'établissement. Nous avons annoncé des mesures concrètes pour renforcer la sécurité, y compris l'érection d'une clôture et l'installation de caméras de surveillance. Nous prenons les mesures nécessaires pour remédier à la situation. Cela va prendre de six à huit semaines.

(1455)

Entre temps, nous revoyons le dispositif de sécurité. Qui plus est, nous étudions la question de savoir si les délinquantes posant un risque moyen ou élevé devraient être réintégrées dans cet établissement. La question est à l'étude et nous ferons en sorte qu'il y soit donné suite comme il se doit.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, trouver une solution au problème n'intéresse pas le gouvernement, pas plus qu'il ne s'intéresse au concept de châtiment et de dissuasion. Si tel était le cas, il ne construirait pas de chalets comme celui d'Edmonton. Il construirait de vraies prisons dont les détenus dangereux ne pourraient s'échapper.

La prison d'Edmonton est un échec. Lorsqu'un quart des détenues s'échappent, il n'y a pas grand espoir. Le gouvernement va-t-il la vendre à la chaîne Holiday Inn-je suis sûr qu'elle saura quoi en faire-et construire une prison qui garantira la sécurité des Edmontoniens?

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le Parti réformiste donne une fausse impression aux Canadiens lorsqu'il prétend que les détenus ont la vie facile.

J'aimerais citer un article récemment paru dans le Sun d'Ottawa qui dit ceci: «Il est clair que le Parti réformiste ne dit pas la vérité lorsqu'il prétend que les détenus se la coulent douce.» On peut lire plus loin: «Service correctionnel Canada mérite des félicitations pour avoir réussi le tour de force de réduire le budget de l'administration centrale de 15 p. 100 au lieu de s'en prendre aux gardiens qui ont déjà la tâche bien lourde.» Et l'article se termine sur ces mots: «La réalité, c'est que, au Canada, la perception selon laquelle les détenus ont la vie facile, est tout simplement erronée dans la majorité des cas. Il y aura toujours des histoires d'horreurs, bien sûr. Mais il est important de reconnaître que nos prisons sont bien gérées et que le gouvernement n'est pas permissif.»

Je suis tout à fait d'accord.

L'AÉROPORT INTERNATIONAL DE VANCOUVER

M. Harbance Singh Dhaliwal (Vancouver-Sud, Lib.): Monsieur le Président, l'aéroport international de Vancouver a récemment ouvert sa nouvelle aérogare qui recevra les passagers en provenance de l'étranger et des millions de personnes. Cette aérogare est spacieuse, claire et efficace et tous les gens de Vancouver sont fiers de cette addition à leur ville.

Les bâtiments ont non seulement besoin d'être beaux sur le plan architectural, ils doivent aussi être fonctionnels et opérer efficacement.

Je voudrais demander au secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national quelles mesures les Douanes ont prises pour servir les utilisateurs de cette nouvelle aérogare.

Mme Sue Barnes (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, depuis l'accord sur l'ouverture de l'espace aérien, Vancouver est un endroit stratégique qui pourrait devenir une des principales portes d'entrée en Amérique du Nord pour les voyageurs en provenance des pays de la région du Pacifique. Revenu Canada a bien planifié pour l'augmentation du trafic international.

La nouvelle aérogare, qui a le plus grand hall douanier au Canada, a des installations modernes, un personnel accru, ainsi que des installations primaires et secondaires.

On peut maintenant traiter efficacement 2 400 passagers à l'heure, soit une augmentation de 40 p. 100. C'est une bonne chose non seulement pour les voyageurs et les Canadiens, mais aussi pour l'économie de Vancouver, de la province de Colombie-Britannique et du reste du Canada.

* * *

[Français]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le Président, le 1er novembre dernier, le ministre du Commerce international de l'époque affirmait en Chambre que divers détails concernant le futur accord de libre-échange Canada-Israël n'étaient pas encore réglés, notamment en ce qui a trait aux produits manufacturés, dont les vêtements et spécialement les maillots de bain et la lingerie.

Ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Puisque les Israéliens bénéficient d'un libre accès au marché européen du textile, et ce, contrairement à nos entreprises, le ministre et son gouvernement s'engagent-ils à ce que des mesures soient prises pour préparer cette industrie canadienne au libre-échange avec ses concurrents israéliens?


2365

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je vais certainement faire part des inquiétudes du député à mon collègue, le ministre du Commerce international.

Je voudrais profiter de l'occasion pour faire remarquer que le lancement des discussions sur un accord de libre-échange avec Israël et une offre similaire à d'autres grands pays du Moyen-Orient peuvent contribuer de façon importante au développement économique et à la stabilisation de la région. Je pense que ce serait une contribution majeure à la recherche d'une solution pacifique dans la région. Par conséquent, c'est quelque chose que nous allons poursuivre.

Je vais certainement transmettre les inquiétudes du député au ministre et je peux lui garantir qu'il obtiendra une réponse.

* * *

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement a été élu avec le mandat de créer un maximum d'emplois. C'est une promesse que le premier ministre a faite maintes et maintes fois. Prenons Terre-Neuve, une région du Canada qui a grand besoin d'emplois. Terre-Neuve a perdu 11 000 emplois à plein temps au cours des trois premiers mois de 1996.

(1500)

Comment le premier ministre concilie-t-il cette énorme perte d'emplois à Terre-Neuve et sa promesse électorale?

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, la députée sait que des emplois ont été créés dans de nombreuses parties du pays.

En ce moment, à Terre-Neuve et au Labrador, il n'y a pas de doute qu'il y a un grave problème, d'autant plus que le projet Hibernia est en phase de contraction. Il n'y a pas de doute que cela aura des conséquences pour l'emploi à Terre-Neuve.

Sur la côte est, on souffre également du moratoire sur la pêche à la morue. C'est un énorme défi pour le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador et c'en est un également pour le gouvernement du Canada.

Ceux qui croient en l'avenir de Terre-Neuve et du Labrador peuvent espérer un développement important dans la baie de Voisey qui ofrira des emplois pour remplacer les emplois traditionnels qu'il y avait dans cette province.

Je suis heureux de voir que la députée s'inquiète de ce qui se passe à Terre-Neuve et au Labrador. J'espère que son parti appuiera les mesures que nous allons présenter pour essayer d'aider ces gens dans le besoin.

LE PRIX DE L'ESSENCE

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre suppléant.

Au cours de ces 40 derniers jours, sans raison valable, le prix de l'essence a grimpé de huit à dix cents le litre au Canada. Aux États-Unis, même si les augmentations du prix de l'essence ont été infiniment moindres, le président Clinton a cru bon d'intervenir en ordonnant une enquête sur les pratiques de fixation des prix afin de protéger les Américains.

Le gouvernement va-t-il intervenir pour protéger les Canadiens contre le prix exorbitant de l'essence ou bien les Canadiens doivent-ils attendre que se produise une autre force majeure pour que le gouvernement se décide à prendre leur défense?

M. Morris Bodnar (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député le sait, la Loi sur la concurrence s'applique en l'occurrence. Le gouvernement veille à ce que les prix ne soient pas fixés en violation des dispositions de la Loi sur la concurrence.

Le député sait également que le comité de l'industrie a été très actif et que demain il entendra à ce sujet le directeur du Bureau de la politique de la concurrence.

Enfin, le député devrait savoir que le dossier des prix, notamment celui de l'essence, ne relève pas nécessairement du gouvernement fédéral. Il devrait peut-être chercher la solution du côté du gouvernement de sa province.

* * *

LE RECENSEMENT DE 1996

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris, Lib.): Monsieur le Président, à la Conférence mondiale des Nations Unies sur les femmes qui s'est tenue à Beijing, on a reconnu qu'on devait tenir compte, dans l'élaboration des politiques socio-économiques, du travail non rémunéré qui est en majeure partie effectué par des femmes. Pour la première fois, le recensement de 1996 comprendra une question sur le travail non rémunéré.

La secrétaire d'État responsable de la Situation de la femme pourrait-elle préciser à la Chambre pourquoi le gouvernement veut obtenir ces renseignements?

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, le Canada est reconnu dans le monde entier comme un chef de file pour ce qui est de mesurer et d'évaluer le travail non rémunéré. On a décidé, à Beijing, de renforcer cet engagement et on s'est entendu pour que tous les autres pays membres des Nations Unies examinent plus attentivement la quantité de travail non rémunéré effectué par les femmes, ce qui comprend l'éducation des enfants et les travaux ménagers.


2366

Il est intéressant de constater que, en 1961, Statistique Canada a évalué le travail non rémunéré à 14 milliards de dollars et que, en 1992, ce montant était passé à 234 milliards de dollars. Grâce au recensement, nous serons en mesure d'obtenir des statistiques sur les petites régions et de rejoindre tous les foyers pour que nous puissions utiliser ces renseignements, à l'avenir, dans l'établissement de notre politique et dans le cadre de nos travaux de planification.

* * *

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE DÉPUTÉ DE NORTH VANCOUVER

Mme Jean Augustine (Etobicoke-Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, je soulève la question de privilège, car je crois que le député de North Vancouver a décrit mes actions de façon injuste et inexacte à la Chambre, comme en témoignent les pages 2276 et 2277 du hansard du 2 mai 1996.

Je n'ai jamais entendu à la Chambre de députés être désignés par leur circonscription et leur couleur.

(1505)

En parlant des observations faites par le député de Nanaïmo-Cowichan, le député de North Vancouver a dit que j'étais noire et que j'étais visiblement très en colère. Il a ajouté que je criais très fort et que je semblais hostile.

Je n'ai pas crié très fort. Je n'ai absolument pas eu l'occasion de parler avec le député pour lui faire part de mon hostilité. Je me suis dirigée vers un député qui, selon moi, voudrait se dissocier de la coupure de presse qui circulait et je lui ai demandé s'il en avait pris connaissance. J'ai ensuite retraversé la Chambre. Si quelqu'un a crié très fort, ce sont plutôt les réformistes.

Le Président: Chère collègue, je constate que le député de North Vancouver n'est pas parmi nous. Vous l'avez nommé dans la formulation de la question de privilège. Je me demande si nous pourrions reporter l'examen de cette question jusqu'à ce que le député de North Vancouver soit parmi nous. Seriez-vous d'accord avec cela?

Mme Augustine: Oui, monsieur le Président.

* * *

QUESTION DE PRIVILÈGE

QUESTIONS AU FEUILLETON-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Le 24 avril 1996, le député de St-Albert a soulevé la question de privilège au sujet des questions qu'il avait fait inscrire au Feuilleton.

Je remercie le député de son argumentation bien étayée de même que le leader adjoint du gouvernement à la Chambre et le whip en chef du gouvernement de leur contribution au débat.

Dans son argumentation, le député a expliqué que, le 1er décembre 1994, au cours de la dernière session, il avait fait inscrire une question au Feuilleton. Au moment de la prorogation, le 2 février 1996, il n'avait pas encore obtenu de réponse à sa question.

Le 12 mars 1996, peu après le début de la session en cours, le député a de nouveau fait inscrire la même question, cette fois-ci scindée en deux questions et, en vertu de l'alinéa 39(5)a), il a demandé au gouvernement d'y répondre dans les 45 jours.

Dans sa présentation, le député a soutenu que le gouvernement avait eu presque deux ans pour répondre à ses questions, mais ne l'avait pas fait.

[Français]

Je me permets de rappeler à la Chambre que la prorogation a pour effet de purger le Feuilleton et, en conséquence, d'annuler toutes les demandes de renseignement dont font l'objet les questions qui y sont inscrites. En d'autres termes, les députés qui veulent maintenir leurs demandes de renseignement au gouvernement doivent présenter à nouveau leurs questions pour qu'elles soient prises en considération dans la nouvelle session. Je me permets aussi de souligner que l'article du Règlement dit seulement qu'un député, et je cite, «peut» demander au gouvernement de répondre à une question en particulier dans les quarante-cinq jours. Il ne s'agit pas alors d'un ordre de la Chambre. Cependant, le gouvernement doit, de toute manière, faire des efforts pour répondre à la question selon l'esprit de la règle.

[Traduction]

Au moment de soulever la question de privilège, le 24 avril 1996, le député n'avait pas attendu que le délai de 45 jours soit écoulé. Si, après 45 jours, la question du député n'a pas reçu de réponse, l'alinéa 39(5)b) lui fournit un mécanisme en vertu duquel il peut aborder le même sujet à la Chambre au moment des délibérations sur la motion d'ajournement.

(1510)

Ce qui préoccupait surtout le député, c'était moins le retard à répondre à ses questions que les commentaires qu'aurait fait un collaborateur non identifié du cabinet du leader du gouvernement à la Chambre. Selon un article de presse du 21 avril cité par le député, un collaborateur du cabinet du leader du gouvernement à la Chambre aurait dit que la demande était exorbitante et que le gouvernement n'avait pas l'intention de demander à des fonctionnaires de mettre leurs tâches de côté pour répondre à ces questions.

Le député a soutenu que ces commentaires manifestaient une attitude méprisante envers le Parlement et il a souligné que, si le gouvernement n'avait pas l'intention de répondre à ces questions, il était, lui, gêné dans l'exercice de ses fonctions. Il s'agit d'un sujet très grave.

[Français]

Comme le soulignait madame le Président Sauvé dans une décision rendue le 16 décembre 1980, à la page 5797 des Débats, si on a délibérément réfusé de répondre aux questions d'un député et si on

2367

peut prouver que cela l'a empêché de faire son travail parlementaire, il pourrait y avoir matière à une question de privilège à première vue.

[Traduction]

Dans leurs interventions, le leader adjoint du gouvernement à la Chambre et le whip en chef du gouvernement ont expliqué que les questions posées par le député étaient, par leur nature, compliquées et détaillées, mais l'ont assuré qu'on était en train de préparer des réponses qui lui seraient communiquées lorsqu'elles seraient prêtes.

Vu la réponse fournie par le leader adjoint du gouvernement à la Chambre, il est très difficile de croire aux remarques qu'aurait prétendument faites une personne identifiée du cabinet du leader du gouvernement à la Chambre. Ainsi, je ne puis conclure que le député a été gêné dans l'exercice de ses fonctions et, en conséquence, il n'y a pas matière à soulever la question de privilège.

Permettez-moi de faire remarquer aux députés et aux fonctionnaires que le ministre a dit qu'on était en train de préparer des réponses. Les questions écrites formulées par les députés constituent pour eux des outils importants. Elles servent à demander des renseignements et aident à exiger des comptes du gouvernement. C'est précisément pour cette raison que les membres du gouvernement sont responsables devant la Chambre de tout le travail entourant la préparation des réponses à ces questions.

[Français]

Je remercie tous les honorables députés de leurs interventions.

______________________________________________


2367

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Ovid L. Jackson (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de déposer, au nom du gouvernement, quelques réponses à des pétitions.

* * *

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition. Les pétitionnaires estiment que les privilèges accordés aux couples hétérosexuels ne devraient pas l'être également aux couples de même sexe. Ils sont également d'avis que l'expression non définie «orientation sexuelle» contenue dans le projet de loi concernant les droits de la personne risquerait de leur accorder ces privilèges.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir de présenter une pétition signée par 49 de mes électeurs. Les pétitionnaires demandent au Parlement de n'adopter aucun projet de loi qui conférerait le statut de famille à des partenaires de même sexe ou qui leur accorderait des prestations de conjoint. Ils lui demandent en outre de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière qui tendrait à laisser entendre que la société approuve les relations entre personnes de même sexe, ou l'homosexualité, et de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

(1515)

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter.

La première vient de Saskatoon. Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que diriger un foyer et prendre soin des enfants d'âge préscolaire est une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société. Ils ajoutent que la Loi de l'impôt sur le revenu exerce une discrimination contre les familles qui choisissent de s'occuper, à la maison, d'enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, de malades chroniques et de gens âgés.

Les pétitionnaires demandent donc humblement au Parlement de poursuivre des initiatives visant à supprimer cette discrimination contre les familles qui décident de s'occuper de ces personnes.

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition vient de Sarnia, en Ontario. Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcoolisées risque de nuire à la santé ou d'affaiblir les facultés d'une personne et ils font remarquer qu'on peut prévenir le syndrome d'alcoolisme foetal et diverses malformations congénitales liées à la consommation de boissons alcoolisées en évitant la consommation de boissons alcoolisées durant la grossesse.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement de promulguer une loi exigeant que des étiquettes de mise en garde soient apposées sur tous les contenants de boissons alcoolisées, afin de renseigner la population en général et les femmes enceintes en particulier sur les risques associés à la consommation de boissons alcoolisées.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une pétition signée par 28 de mes électeurs. Se fondant sur l'enseignement de la Bible, les pétitionnaires demandent d'interdire l'homosexualité. Ils prient humblement la Chambre de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne dans le but de reconnaître ou d'autoriser l'expression «orientation sexuelle».

Mme Maria Minna (Beaches-Woodbine, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une pétition signée par des habitants de ma circonscription et de partout au Canada. Les pétitionnaires sont de diverses confessions religieuses. Ils demandent au Parlement de modifier la

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Loi canadienne sur les droits de la personne afin d'interdire la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions. Dans la première, les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur ce qui suit. Dans toutes les régions canadiennes, des lesbiennes, des gais et des bisexuels sont quotidiennement victimes d'actes de discrimination. Cette discrimination est inacceptable dans un pays connu pour son engagement envers les droits de la personne, l'égalité et la dignité pour tous.

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de modifier au plus tôt la Loi canadienne sur les droits de la personne, afin d'interdire la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et de prendre toutes les mesures nécessaires pour reconnaître pleinement l'égalité des relations entre personnes d'un même sexe dans la loi fédérale.

Monsieur le Président, la seconde pétition que j'ai à présenter vient elle aussi d'habitants de la circonscription de Peterborough, qui s'inquiètent des répercussions que les modifications que l'on propose d'apporter à la loi sur les droits de la personne pourraient avoir pour la famille.

Ils demandent donc au Parlement de s'abstenir d'adopter quelque mesure que ce soit ayant pour effet d'accorder la situation de famille ou des prestations de conjoint aux partenaires de même sexe. Ils demandent en outre au Parlement de ne pas modifier le Code des droits de la personne, ni la Loi canadienne sur les droits de la personne ni la Charte canadienne des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe.

[Français]

L'ENVIRONNEMENT

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de déposer une pétition contre le projet de dragage du quai no 2 de Sorel, avec rejet en eau libre de sédiments et de boue contaminés sur les berges de l'île Saint-Ignace-de-Loyola. Environ 400 personnes de la région des îles de Berthier ont signé cette pétition.

Ces gens sont carrément contre ce projet; ils disent que c'est un projet qui déplace les problèmes de la rive sud vers la rive nord. Ils demandent au gouvernement d'être respectueux de la qualité de la faune et de la flore du milieu et, si le projet doit avoir lieu, ils exigent le dépôt terrestre de ces sédiments contaminés. Il ne faut pas tout simplement déplacer le problème, peut-être dans un autre comté fédéral.

* * *

[Traduction]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Ovid L. Jackson (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.


2368

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-12, Loi concernant l'assurance-emploi au Canada, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement; ainsi que du groupe de motions no 3.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de pouvoir parler sur ce projet de loi, car on ne sera pas nombreux à pouvoir le faire, le gouvernement ayant décidé de nous limiter dans nos interventions, comme il l'a d'ailleurs fait en comité. Il nous limite sur le temps, il nous bâillonne. À l'étape de l'étude en comité, c'est ce qu'il a fait; il fait la même chose à l'étape du rapport en Chambre.

(1520)

Donc, au cours de ces neuf ou dix minutes dont je dispose pour m'exprimer, je voudrais souligner un certain nombre de points qui m'apparaissent être très mal envisagés par le gouvernement dans ce projet de loi. Cependant, vous me permettrez dans un premier temps de féliciter les 250 ou 300 personnes de mon comté, de la région, devrais-je dire, qui sont venues, samedi, manifester leur mécontentement par rapport à la réforme de l'assurance-chômage, qu'on appelle maintenant assurance-emploi, et dire à ce gouvernement qu'il n'était pas dans la bonne voie et qu'il devrait reprendre son travail à zéro.

Évidemment, ces gens s'en prennent au fait que, par toutes sortes de techniques, le gouvernement récupérera cinq milliards de dollars dans la Caisse de l'assurance-chômage et l'utilisera pour réduire le déficit un peu de façon artificielle. Il utilisera les surplus de la Caisse de l'assurance-chômage et viendra finalement détourner ces fonds et récupérer cinq milliards de dollars. Ce n'est ni plus ni moins qu'un hold-up gouvernemental dans la Caisse de l'assurance-chômage. C'est à cela qu'on assiste et les députés libéraux, tour à tour, se lèvent, eux, pour appuyer ce projet de loi. Évidemment, les gens s'en prennent à ces techniques de manipulation.

Ces cotisations des employés et des employeurs-et ce gouvernement ne contribuent pas à la Caisse de l'assurance-chômage, je tiens à le rappeler-donc, les contributions des employés et des employeurs sont gérées par une loi définie par le Parlement, et les gens auraient aimé avoir leur mot à dire pour qu'on définisse l'avenir du programme d'assurance-chômage dans son ensemble, un peu comme le Québec est en train de le faire par le biais de son sommet socio-économique où on s'entend tout d'abord sur des objectifs et ensuite, on essaie de s'entendre sur des modalités.

Cela aurait été souhaitable, mais le gouvernement a fait toutes sortes de présumées consultations pour en arriver finalement à accréditer ses thèses et faire croire que c'est ce qui venait de la population. Ce n'est pas ce que j'ai entendu comme message samedi dernier dans mon comté et ce n'est pas ce que les gens ont entendu dans la plupart des comtés du Québec. Il y a eu des manifestations à plusieurs endroits à cet égard.


2369

Donc, on a manqué une belle chance, parce que cela fait plusieurs fois, en quelques années, que le gouvernement modifie le régime d'assurance-chômage, d'en arriver finalement à un consensus où on définit ce que sont les grands objectifs. Par exemple, est-ce qu'on doit utiliser des fonds d'assurance-chômage pour stimuler la création d'emplois ou si c'est simplement un vrai régime d'assurance? Il y avait là un débat sain à faire, mais actuellement, l'objectif venait du ministère des Finances et était le suivant: «Faites-le comme vous voulez, mais assurez-vous qu'il y ait un surplus de cinq milliards qu'on pourra récupérer année après année.» Donc, le Fonds consolidé récupère cela et on donne l'illusion d'avoir réduit le déficit de cette façon.

Mais une chose a choqué plusieurs personnes, et j'ai eu la chance de prendre la parole et de le leur expliquer samedi. Une des raisons fondamentales pour laquelle je m'oppose à ce projet de loi, c'est alors qu'on arrive vers les années 2000 et qu'on discute de nouvelles façons de partager le marché du travail, on en arrive avec une loi qui aura comme conséquence le contraire, qui favorisera les gens à faire davantage d'heures supplémentaires, qui incitera les employeurs à faire faire davantage d'heures supplémentaires, plutôt que d'embaucher de nouveaux employés, donc d'avoir davantage de gens sur le marché du travail.

À l'heure même où on a un taux de chômage très élevé, qu'on voit, sur le plan social, qu'il y a un écart qui s'accentue entre les plus riches et les plus démunis de notre société, il y a là matière à réflexion.

Je vous donne une explication plus technique de la raison pour laquelle cela va arriver d'avoir réduit le maximum assurable. Avant, c'était 42 000 $, et là, on diminue à 39 000 $. Cela fera en sorte que lorsqu'un individu aura dépassé ou on verra qu'il dépassera le maximum assurable, l'employé et l'employeur ne paieront plus de cotisations d'assurance-chômage. Donc, vous êtes dans la peau d'un employeur et vous dites: «Là, j'ai du travail à faire faire, qu'est-ce que je fais? Je peux prendre un employé qui est déjà là, lui faire faire davantage d'heures et, en plus, je ne paierai plus de cotisations sur ses nouvelles heures.» Ou vous avez le choix d'embaucher un nouvel employé. Mais si vous faites cela, vous avez encore des charges sociales supplémentaires et vous paierez des cotisations d'assurance-chômage.

Donc, le réflexe facile, et pour éviter toute la paperasse bureaucratique qu'on impose déjà aux entreprises, les employeurs se disent: «Voilà, on fera faire encore plus d'heures supplémentaires à nos employés.» C'est un cercle vicieux, davantage d'heures, davantage de fatigue, davantage d'accidents de travail et tout le reste. Cela va complètement en sens contraire des tendances qui devraient se dessiner devant nous et qui nous conduiront vers les années 2000.

(1525)

Il y a là un sérieux problème et il n'y a rien dans cette réforme qui fait que, dans ce nouveau régime, où on passe à des heures assurables plutôt qu'à des semaines, on va partager davantage le marché du travail.

Un autre point, sans aller à fond sur la question de la formation de la main-d'oeuvre, on maintient le fouillis total qui existe à l'heure actuelle en faisant valoir qu'on envisagera peut-être, à un moment donné, de céder le champ de la formation au gouvernement du Québec, qu'on en discutera.

Pendant ce temps-là, le ministère remplace des programmes supposément de transition mais qu'on planifie sur trois ans tellement on n'est pas confiant d'arriver véritablement à s'entendre avec le gouvernement du Québec pour lui céder la formation de la main-d'oeuvre.

Bref, le gouvernement aurait eu l'occasion dans sa réforme de donner ce dont nos collègues d'en face nous parlent souvent, une réforme administrative. Ils pouvaient prêcher par l'exemple, au-delà du discours, et dans cette loi s'assurer que la gestion des mesures actives d'emploi et la Caisse de l'assurance-chômage auraient pu, dans le cas du Québec, être cédées au gouvernement du Québec.

Mais, encore une fois, de la parole aux actes, il semble y avoir un fossé considérable. Cela rend les gens un peu cyniques par rapport à la politique. Quand on additionne ça à tous les engagements et les promesses non tenues, ça fait un cocktail où la confiance en prend pour son rhume. Monsieur le Président, je vois que vous êtes en accord avec moi sur ce point.

Un dernier point, c'est qu'on a un problème qui se dresse encore à la fin des années 1990, qui arrive dans beaucoup d'endroits et auquel on n'échappe pas, dans notre région comme ailleurs. Très souvent, il existe des entreprises qui sont en place depuis longtemps. Donc, dans certains secteurs d'activités économiques, il y a des changements majeurs qui sont accélérés par l'arrivée du libre-échange. On sait qu'il y a des secteurs, je pense entre autres au textile ainsi qu'à d'autres secteurs d'activités économiques, dans lesquels on n'était pas extrêmement compétitifs, exception de certains sous-secteurs, ce qui fait en sorte qu'il y a des mises à pied massives d'emplois et des restructurations de grandes entreprises. Il y a là des individus qui travaillaient depuis 15, 20 ou 25 ans, qui se retrouvent dans la quarantaine ou la cinquantaine et qui ont occupé pendant plusieurs années un même emploi. Souvent, ils se retrouvent face à une fermeture d'usine et sans beaucoup d'avenir devant eux. Ils sont des gens extrêmement inquiets. Pourtant, ils ont encore plusieurs bonnes années actives sur le marché du travail à donner et quand on sait tous les impacts que cela a sur le reste, le travail fait partie de nos modes de vie. On a raté là aussi une occasion de regarder dans les modifications comment on pourrait adapter un régime d'assurance-emploi, comme on voudrait l'appeler et le rendre dans les faits, à cette nouvelle réalité.

Il faut se souvenir que quand on a vendu l'idée du libre-échange, et j'étais un de ceux qui y croyaient et qui y croient toujours, on a dit qu'il fallait mettre en place des mécanismes de transition. Des mécanismes de transition, ce n'est pas seulement pour soutenir les entreprises, mais aussi pour soutenir les individus. Là, on fait face à un vide où on n'a absolument rien fait depuis quelques années et on se retrouve avec des drames humains considérables.

Donc, pourquoi ne pas avoir prévu, par exemple, des périodes d'assurance-chômage plus longues, avoir cédé la formation de la main-d'oeuvre à des provinces qui, elles, avec davantage de moyens, auraient pu offrir des programmes de formation plus longs, plus adaptés? Ce n'est pas vrai que, du jour au lendemain, on se recycle du secteur des textiles au secteur de l'informatique. Il y a là, comme je le disais tantôt, un écart considérable. Donc, rien dans ce secteur-là.


2370

Il manque beaucoup de choses dans ce projet de loi. La dernière minute qui me reste me ramène à ce qu'était l'objectif réel de cette réforme. Couper pour permettre au ministre des Finances d'aller chercher cinq milliards de dollars ou adapter nos programmes sociaux à la réalité des années 2000? Si tel était le cas, ce n'est pas ce genre de projet de loi qu'on aurait devant nous. Là, c'est un projet de loi comptable avec un seul objectif qui est de réduire de façon temporaire le déficit en utilisant la Caisse de l'assurance-chômage et de ne pas envisager d'adapter cette loi à la nouvelle réalité du marché du travail.

Je rappelle en terminant que c'est l'argent des employés et des employeurs. Il faut toujours le rappeler parce que les gens ont souvent l'impression que le gouvernement met de l'argent là-dedans. Depuis 1990, il ne met plus un sou dans cette caisse et il utilise maintenant les fonds d'assurance-chômage, les gère et c'est devenu une taxe à l'emploi.

C'est inacceptable que, dans une réforme comme celle-là, on n'ait pas inclus et fait participer davantage et de façon réelle ceux et celles qui fournissent les sommes d'argent qui vont dans ce régime. C'est pour cela qu'il y avait 250 personnes dans la rue samedi en Abitibi-Témiscamingue, qu'il y en a eu plusieurs dans d'autres endroits au Québec et que les gens vont continuer à manifester leur désaccord, parce qu'ils ne croient pas que le gouvernement est capable, comme dans beaucoup d'autres domaines, de s'adapter à la réalité des années 2000.

(1530)

[Traduction]

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'appuyer le projet de loi C-12, Loi sur l'assurance-emploi.

Le projet de régime d'assurance-emploi est le fruit de plus de deux années de consultations auprès des Canadiens. Je crois que la mesure à l'étude aidera les Canadiens à retourner sur le marché du travail. Elle va renforcer les incitations au travail, assurer l'équité et aider les travailleurs à s'adapter aux changements économiques.

Aujourd'hui, je concentrerai mes observations sur les répercussions que le projet de loi aura pour les femmes appartenant à la population active et pour les travailleurs saisonniers.

L'argument que les femmes seront pénalisées par les modifications à l'assurance-emploi est devenu un refrain habituel chez les députés de l'opposition. Mais n'en croyez rien. L'un des deux principaux objectifs du nouveau régime sera de le rendre plus ouvert que l'ancien.

La loi sur l'assurance-emploi reconnaît l'importance de la participation des femmes au sein de la population active. Les femmes représentent près de 70 p. 100 des travailleurs à temps partiel au Canada. Beaucoup de ces femmes ne sont pas assurées pour avoir droit aux prestations d'assurance-chômage ou de maternité. Seules les femmes travaillant pour un employeur 15 heures par semaine durant 20 semaines sont assurées pour recevoir des prestations d'assurance-chômage et de maternité. Beaucoup de femmes occupent deux ou trois emplois à temps partiel qui, conjugués, ne leur donnent pas droit aux prestations, bien qu'elles travaillent peut-être 30 ou 40 heures par semaine ou davantage.

En vertu du nouveau régime, cependant, 270 000 Canadiennes travaillant moins de 15 heures par semaine à un emploi ou occupant plusieurs emplois à la fois auront enfin droit aux prestations d'assurance-chômage ou de maternité.

L'assurance-emploi donne aux femmes la possibilité d'accroître le nombre de leurs heures de travail en supprimant cette barrière invisible qu'est le seuil de 15 heures. Dans le cadre du régime d'assurance-chômage, de nombreux employeurs limitaient les travailleurs à temps partiel, et particulièrement les femmes, à moins de 15 heures par semaine pour éviter de payer des cotisations. Dans le cadre du nouveau régime d'assurance-emploi, chaque heure de travail est comptabilisée. Ainsi, les hommes et les femmes qui ont plusieurs emplois seront entièrement assurés s'ils doivent prendre des congés de maladie, de maternité ou de paternité ou s'ils perdent l'un de leurs emplois pour une raison quelconque.

L'assurance-emploi garantit également le remboursement des cotisations à ceux qui gagnent 2 000 $ ou moins par année. À elle seule, cette initiative profitera à 1,3 million de jeunes Canadiens. Grâce au régime horaire, tous les travailleurs sont traités équitablement et ceux qui occupent des emplois non typiques peuvent participer au régime.

Mieux encore, les travailleurs saisonniers bénéficieront aussi du régime horaire. À l'heure actuelle, qu'une personne travaille 15 heures ou 50 heures par semaine, cela n'a pas d'importance, le résultat est le même. Le régime horaire donne une meilleure mesure de l'effort fourni et, par conséquent, incite les travailleurs saisonniers à demeurer actifs aussi longtemps que possible.

Prenons, à titre d'exemple, les travailleurs des secteurs de la pêche et des forêts qui font de longues heures lorsqu'ils ont du travail. Dans le cadre du régime actuel, ces gens ne sont pas encouragés à faire plus d'heures que le nombre minimal d'heures requis. Plus souvent qu'autrement, les gens que je rencontre à mon bureau me disent: «J'ai travaillé 14 heures et je croyais ainsi me rendre admissible. J'ai appris que les exigences avaient changé ce mois-ci et que j'ai besoin de 15 heures de travail, parce que le niveau d'emploi et le nombre d'emplois disponibles sont un peu plus élevés.» Ces gens ont tenté de déjouer le système pour qu'il satisfasse à leurs besoins. Ce ne sera plus acceptable. Plus le travailleur fera d'heures, plus facilement il deviendra admissible au régime.

Il ne faut pas oublier que 96 p. 100 des prestataires actuels continueront d'être admissibles aux prestations. De plus, tous les prestataires repartiront sur une bonne base le 1er juillet 1996, c'est-à-dire qu'aucun d'entre eux ne sera pénalisé pour avoir déjà réclamé des prestations d'assurance-chômage.

On a proposé récemment trois amendements au projet de loi afin d'accorder un traitement plus équitable aux Canadiens de la région atlantique et aux travailleurs saisonniers. Le premier amendement tend à apaiser les craintes au sujet des périodes d'inactivité ou des interruptions d'emploi. L'amendement permettra aux prestataires de revenir 26 semaines en arrière pour déterminer le nombre minimal de semaines travaillées calculé à partir du dénominateur s'appliquant à leur région. Les prestataires pourront alors ne pas tenir compte des semaines où ils n'ont rien gagné et ne retenir que celles où ils avaient réellement un emploi. À lui seul, cet amendement


2371

procurera 246 millions de dollars à certaines régions où il est plus difficile de trouver du travail et où il y a davantage de travail saisonnier, cette somme devant être répartie équitablement d'un océan à l'autre.

(1535)

Le deuxième amendement modifie le diviseur servant à calculer ces prestations hebdomadaires. Cet amendement sera aussi avantageux pour les régions durement touchées par le chômage et entraînera l'octroi de 95 millions de dollars supplémentaires aux régions les plus dans le besoin.

Le troisième amendement concerne les Canadiens de l'Atlantique et vise la règle de l'intensité. Il exemptera les familles à faible revenu, celles dont le revenu annuel est inférieur à 26 000 $. Les prestataires qui voient leur prestation amputée parce qu'ils travaillent se verront accorder un crédit par rapport à la règle de l'intensité.

Le nouveau projet de loi comporte d'autres avantages: le supplément de revenu familial, les subventions salariales, le programme d'aide au travail indépendant, les prêts et les subventions de perfectionnement ainsi que les suppléments de rémunération. De plus, une aide pour les services de garde sera offerte aux femmes touchant des prestations d'emploi.

Le projet de loi encourage le travail, les plus longues périodes d'emploi et le versement d'une rémunération juste et équitable dans le cadre du régime. En réalité, il entraînera la création d'emplois pour les Canadiens. Le gouvernement a promis de créer des emplois pour eux, et le projet de loi à l'étude s'inscrit dans cet engagement.

Depuis plus de deux ans, j'organise des assemblées municipales. J'ai discuté avec des dirigeants syndicaux de la Nouvelle-Écosse et avec leurs membres. Je me suis rendue dans des localités rurales et côtières de ma circonscription pour connaître l'opinion des travailleurs saisonniers. Certains d'entre eux m'ont dit que, puisque le régime existait, ils s'en sont prévalus et que certains en ont peut-être même abusé.

Un pêcheur m'a dit ceci: «Je gagne de 40 000 $ à 50 000 $ par année comme pêcheur de homard, et ma femme m'aide; nous sommes donc tous les deux admissibles aux prestations. Aussi, durant les mois d'hiver, après une saison de pêche du homard qui dure deux mois et qui est aussi lucrative, nous nous prévalons du régime d'assurance-chômage et nous avons un revenu stable pendant toute l'année. J'ai honte de vous dire cela, car le jeune qui est pompiste et qui gagne 5,15 $ l'heure doit travailler 52 semaines par année. Ce jeune me subventionne; lui, il reçoit le salaire minimum, et moi, je gagne 50 000 $ en tant que pêcheur autonome, sans compter les prestations d'assurance-chômage que je touche.

J'ai honte de le dire, mais le régime est ainsi fait et j'ai continué de m'en prévaloir. Je me réjouis des correctifs que vous apportez pour enrayer les iniquités; les jeunes, les femmes et ceux qui n'ont pas eu autant de chance auront ainsi l'impression que le régime est juste et qu'ils peuvent en bénéficier.»

Les électeurs de ma circonscription souhaitent l'adoption du projet de loi. Ils ont participé aux discussions et au débat à ce sujet. Je félicite le ministre de son sens de l'équité et de sa détermination, ainsi que les membres du comité d'avoir été à l'écoute; nous avons en effet proposé des amendements et écouté les gens, notamment ceux des régions qui comptent davantage de travailleurs saisonniers et où le taux de chômage est plus élevé.

Le projet de loi est attendu depuis longtemps, et nous avons passé trop de temps, soit près de deux ans, à en discuter. C'est sans hésitation que j'invite tous les députés à l'appuyer et à l'adopter le plus rapidement possible.

[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux d'avoir, encore aujourd'hui, l'occasion de prendre la parole sur le projet de loi C-12, plus spécifiquement sur la motion no 4 qui vise à biffer au complet l'article 2 de ce projet de loi. Cet article renferme un bon nombre de définitions dont le contenu nous donne un éclairage nouveau sur les intentions et la face cachée de la lune quant au style de gouvernement que nous avons.

Petit gestionnaire qu'il est, le gouvernement entend prendre de grands moyens pour mettre de l'ordre. On sent tous les préjugés véhiculés par ce gouvernement face aux gens mal pris, qui viennent de perdre leur emploi. On entend utiliser dorénavant des affidavits, c'est inscrit dans les définitions du projet de loi: «L'affidavit souscrit sous serment ou par affirmation solennelle devant un comissaire ou une autre personne autorisée à recevoir les affidavits.»

(1540)

Voilà l'esprit en vertu duquel a été inspiré ce projet de loi qui est éminemment détestable. Aussi, cela nous informe sur les moyens qu'entend prendre le gouvernement pour faire entendre raison à ceux qui veulent se prévaloir de ce pourquoi ils ont payé, car on a payé pour ça, l'assurance-chômage, quand on a l'intention, au paragraphe 2(3) de prendre des moyens de communication modernes, et je vais vous lire ce paragraphe:

(3) Dans la présente loi et ses règlements, tout document ou autre forme de communication peut être établi sous forme électronique. La mention d'un formulaire, d'un registre, d'un livre, d'un avis, d'une demande, d'une sommation, d'une décision ou de tout autre document comprend sa version sous forme électronique.
Pour ceux qui ont écouté la période des questions orales, on voit ce que cela donne, les moyens électroniques. On le voit aujourd'hui avec les problèmes au niveau du Supplément de revenu garanti. On sait que le gouvernement s'en vient avec des «pitonneuses» un peu partout. On sait que le gouvernement s'en vient avec des infocentres. Nous, dans la région de la Mauricie, on en sait quelque chose, et le Québec au complet.

Le premier ministre, dans sa grande sagesse, a décidé d'implanter chez lui, dans son comté, comme par hasard, un infocentre privant les autres régions qui avaient déjà ce service, si service il y a, pour mieux concentrer cela dans son comté. Et cela nous amène,


2372

vous l'aurez compris, à parler de la restructuration qui est sous-entendue, sur le plan administratif, des services du ministère du Développement des ressources humaines.

Il faut comprendre que lorsqu'on parle de forme électronique comme cela, c'est le ministère du Développement des ressources humaines qui est en cause. On sait combien c'est personnalisé comme contact, entre la machine et l'individu. On sait combien ce n'est pas rodé. On a eu de l'information de première main à l'intérieur du ministère comme quoi ces patentes-là, ces «pitonneuses-là» ne sont pas rodées. On va imposer cela à la population, à ceux qui sont dans une situation de vulnérabilité, à des gens qui viennent de perdre leur emploi, qui peuvent être débalancés sur le plan personnel et qui auront à transiger avec ce genre de machines infernales qui ne sont pas rodées.

Conséquemment, cela nous amène à parler de restructuration, du beau dossier du Centre d'emploi de Trois-Rivières-Shawinigan. La ville de Trois-Rivières, capitale régionale de la Mauricie, auparavant, comme c'est dans la nature des choses, avait sur son territoire le centre régional couvrant toute la région. Sous la bonne pensée et la bonne direction du premier ministre, celui-ci aurait décidé de changer cela, et c'est le sens des questions que j'ai posées au ministre, questions inscrites au Feuilleton, au sujet desquelles on attend encore une réponse. Il y a quatre questions que je vais vous résumer rapidement.

Est-ce qu'il y a eu recommandation de la part des fonctionnaires, fonctionnaires qui sont libres de penser, fonctionnaires qui n'ont pas de parti pris, est-ce qu'il y a eu une recommandation faite au ministre quant à la localisation de ce nouveau centre régional? Oui ou non? C'est ce qu'on veut savoir.

S'il y a eu recommandation, est-ce qu'il y aurait eu intervention de la part du bureau du premier ministre ou du Conseil privé pour infléchir la recommandation et la décision qui auraient dû être normalement prises par le ministère à la suite de cette recommandation?

Est-ce qu'il y a eu des études comparatives quant à l'opportunité d'installer à Shawinigan plutôt qu'à Trois-Rivières ce centre régional de gestion? Est-ce qu'il y a eu une sorte d'étude d'impact, une espèce d'étude de coût face au fait qu'on déménage de Trois-Rivières à Shawinigan? Est-ce qu'on a tenu compte des frais de déménagement, d'installation, d'aménagement à Shawinigan, plus précisément à Shawinigan-Sud, alors qu'il n'y a même pas de transport en commun entre Shawinigan et Shawinigan-Sud, pour votre information, et face aux impacts de libérer des locaux qui sont déjà loués par le gouvernement fédéral jusqu'en 1999, selon nos sources, et qui seront libres, jusqu'à nouvel ordre, compte tenu du dégraissement de l'État, selon nos informations? C'est à ce genre de phénomène que nous apprivoise tranquillement ce ministère monstreux du Développement des ressources humaines qui veut se moderniser.

Je vous avouerai que plus on analyse ce projet de loi, plus il m'apparaît personnellement détestable. Et il est détestable parce qu'il fait en sorte que les victimes deviennent coupables. J'en prends pour preuve un petit extrait des notes explicatives, dans le sommaire, à la page 1a, où on dit: «On obtient ainsi un régime qui tient davantage compte des diverses formules de travail que l'on trouve sur le marché du travail actuel.»

(1545)

Au lieu de parler des diverses formules de travail, ce dont il faudrait parler, c'est de la précarité du marché du travail actuellement. La vraie réalité du travail, c'est le chômage. On fait semblant d'améliorer la situation en présentant un projet de loi qui fera en sorte que les victimes deviennent des coupables et où il y a une atmosphère qui découle, malheureusement, de tout un courant idéologique-il ne faut pas se le cacher, au contraire, il faut se le dire-un courant qui s'appelle le néo-libéralisme où on culpabilise de plus en plus les individus en appelant ça la responsabilisation de l'individu.

Les riches sont de plus en plus riches, les pauvres sont de plus en plus pauvres, la classe moyenne est remise en question par ce genre de mesure éminemment moderne, éminemment généreuse qui s'appelait l'assurance-chômage où on remet en question, lentement mais sûrement, les concepts fondamentaux de notre fonctionnement collectif.

J'en prends pour preuve de la gravité de la situation les propos que tenait récemment-et que je fais miens-le ministre de l'Industrie du Canada. Je suis personnellement très bien placé pour en parler parce que dans ma carrière, j'ai travaillé auprès d'entreprises en difficulté, en difficulté telle qu'elles devaient songer à faire des licenciements collectifs. À l'époque, au nom du gouvernement du Québec, j'intervenais, avec un comité de main-d'oeuvre, pour faire en sorte de trouver les éléments du malaise, de bien identifier le problème et de concevoir un plan de redressement, le tout afin de sauver des emplois.

À quoi assistons-nous en ce moment? À un phénomène tout à fait nouveau, tout à fait scandaleux, tout à fait immoral, à mon avis, celui où, dans le même mois, on peut imaginer une grande entreprise-prenons un secteur industriel comme tel, les banques, on pourrait parler des pétrolières, des forestières, de l'automobile, etc.-annoncer des profits faramineux, des profits exorbitants et dans le même mois, annoncer, sans aucune gêne, le licenciement de X milliers de travailleurs pour des raisons de rationalité, de concurrence étrangère. On invoque toutes sortes de bonnes raisons à l'interne, mais indéfendables et qu'il faut dénoncer au plan social et collectif. À la limite, si cette situation n'est pas corrigée, elle pourra amener des malaises socio-économiques évidents. Il est grand temps qu'il y ait en ce pays un débat qui fera en sorte que la moralité publique reprenne ses droits en cette matière.

[Traduction]

L'hon. Ethel Blondin-Andrew (secrétaire d'État (Formation et Jeunesse), Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir l'occasion de faire des observations sur le projet de loi C-12. Ce projet de loi progressif aura pour effet l'établissement d'un régime d'assurance-emploi de beaucoup amélioré, plus moderne, plus équilibré et fondamentalement plus efficace et plus équitable.

De plus, l'établissement du régime d'assurance-emploi constitue une importante mesure pour la création d'emplois et la croissance économique. Le régime d'assurance-emploi ne fera pas que fournir


2373

un soutien de revenu aux chômeurs, mais il servira de puissant outil pour les remettre au travail. Il créera un équilibre.

En ma qualité de secrétaire d'État responsable de la Jeunesse, je me réjouis particulièrement des effets du projet de loi C-12 sur la jeunesse du pays. Dans le discours du Trône, la priorité que le gouvernement accorde aux jeunes est clairement énoncée et le budget est venu concrétiser cette priorité.

Les jeunes ont tout un défi à relever dans l'économie d'aujourd'hui, et nombre d'entre eux sont dans une situation apparemment sans issue. Sans expérience, ils ne peuvent obtenir un emploi, et s'ils n'ont pas d'emploi ils ne peuvent acquérir de l'expérience. Il y a une fois et demie de chômeurs de plus chez les jeunes de moins de 25 par rapport à la moyenne nationale.

(1550)

Nous reconnaissons qu'il y a beaucoup à faire. Je crois qu'il vaut la peine de répéter les mots du premier ministre: «Par-dessus tout, nous voulons que les jeunes Canadiens contribuent activement à l'économie. Ils veulent des emplois. Ils méritent d'avoir un emploi. Les jeunes veulent espérer en l'avenir et ne pas le craindre. Et il nous incombe à nous tous de leur donner espoir et de leur ouvrir des perspectives.»

Conformément à cette vision, le gouvernement a formé un groupe de travail ministériel sur la jeunesse qui a commencé à consulter les Canadiens sur les problèmes auxquels les jeunes doivent faire face en faisant la transition entre l'école et le travail. Le rapport du groupe de travail constituera la base de la stratégie fédérale sur la jeunesse, qui sera annoncée cet automne.

Le groupe de travail assistera à des assemblées publiques qui seront présidées par les députés et sénateurs locaux et qui se tiendront d'un bout à l'autre du pays. Les députés solliciteront le point de vue des jeunes, des organismes de services à la jeunesse, des représentants des entreprises et d'autres intéressés.

J'ai le plaisir d'annoncer qu'une de ces assemblées se tiendra bientôt dans ma propre ville natale, Yellowknife. J'invite tous les députés à s'intéresser activement à ces très importantes discussions. Il y va de la prospérité et de la compétitivité futures du Canada que les jeunes aient un accès ferme au marché du travail.

Entre temps, nous aurons un régime d'assurance-emploi qui sera d'un grand secours aux jeunes. Le projet de loi renferme des dispositions spécialement destinées aux jeunes. Les nouvelles dispositions sur l'assurance-emploi que comporte le projet de loi C-12 sont non seulement justes et équilibrées, elles sont particulièrement bénéfiques aux jeunes.

L'un des problèmes du régime d'assurance-chômage actuel, c'est qu'il mesure le travail en fonction du nombre de semaines. La semaine est souvent une mauvaise base de calcul du temps consacré au travail, surtout dans le cas des travailleurs à temps partiel et des travailleurs ayant plus d'un emploi. Grâce à l'adoption de l'heure comme base de calcul, ce qui est prévu dans le projet de loi C-12, les gains des travailleurs à temps partiel sont assurés. Au Canada, quatre travailleurs à temps partiel sur dix sont des jeunes de moins de 25 ans.

Sous le régime d'assurance-chômage, les employeurs ont eu tendance à limiter le travail à temps partiel à moins de 15 heures par semaine par travailleur pour ne pas avoir à payer de cotisations d'assurance-chômage. Ainsi, les travailleurs travaillaient moins longtemps et, en plus, leurs gains n'étaient pas assurés. L'assurance-emploi élimine le piège des emplois de 15 heures puisque toutes les heures seront maintenant comptées. Un plus grand nombre de jeunes qui entrent sur le marché du travail après leurs études et doivent accepter plusieurs petits emplois pour gagner leur vie verront maintenant leurs gains assurés.

De plus, l'assurance-emploi réduit le risque de voir les jeunes devenir dépendants de l'assurance-emploi. Beaucoup de jeunes entrent sur le marché du travail et finissent par toucher des prestations d'assurance-chômage avant d'avoir terminé leurs études. Ils s'embarquent dans un cycle devenu par trop familier, c'est-à-dire qu'ils travaillent pendant de courtes périodes, puis touchent des prestations d'assurance-chômage. Le projet de loi C-12 dissuadera ce genre de comportement. En fait, il encouragera les jeunes à terminer leurs études plutôt qu'à abandonner l'école pour accepter des emplois peu sûrs et non assurés.

Le resserrement des normes d'admissibilité à l'assurance-chômage incitera les jeunes à garder leurs emplois plus longtemps. De telles mesures ont été recommandées dans deux récents rapports du gouvernement. Le rapport du Comité permanent des ressources humaines recommandait d'allonger les périodes d'attente avant le versement des prestations pour encourager les jeunes travailleurs à garder leurs emplois plus longtemps et pour améliorer leurs perspectives d'avancement. Le groupe de travail sur le travail saisonnier et l'assurance-chômage recommandait pour sa part d'imposer des normes d'admissibilité plus rigoureuse aux jeunes.

Par ailleurs, le montant des cotisations à l'assurance-emploi aura des répercussions minimales sur les jeunes. Un étudiant qui travaille 14 heures par semaine à 7 $ l'heure paiera moins de 3 $ par semaine en cotisations. Ses heures de travail seront maintenant assurées, ce qui l'aidera à répondre aux normes d'admissibilité lorsqu'il commencera à travailler à temps plein. En outre, environ 625 000 jeunes recevront un remboursement de leurs cotisations, soit 49 p. 100 de tous ceux qui reçoivent une remise. Du nombre total de jeunes qui reçoivent une remise, 400 000 seront des étudiants à temps plein.

(1555)

Du côté des prestations, même si les prestations totales versées sous le régime de l'assurance-emploi seront un peu moindres que sous le régime d'assurance-chômage, les prestations versées aux jeunes d'ici 2001-2002 diminueront de 6 p. 100, ce qui est considérablement inférieur à la diminution globale de 9 p. 100 qui avait été prévue.

Les jeunes bénéficieront aussi des prestations d'emploi versées sous le régime d'assurance-emploi. Plusieurs de ces outils aideront les jeunes à retourner au travail. Par exemple, les subventions salariales aideront les jeunes admissibles aux prestations d'assurance-emploi à acquérir l'expérience nécessaire pour avoir accès à des emplois plus stables ou permanents.

Comme certaines des autres mesures que j'ai mentionnées plus tôt, le projet de loi C-12 appuie fermement une des principales priorités de notre gouvernement, soit le programme de croissance et de création d'emplois. Un élément clé de cette stratégie est notre investissement dans les jeunes Canadiens.


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Il y a déjà des mesures en place pour répondre aux besoins des jeunes: Service jeunesse Canada, Jeunes stagiaires Canada, le programme d'emplois d'été pour étudiants, le programme canadien de prêts aux étudiants, et les mesures appuyant l'éducation proposées dans le dernier budget, y compris des incitatifs à l'épargne et des stimulants fiscaux. Les parents seuls qui sont aux études ont aussi de l'aide en ce qui concerne la garde des enfants.

Les mesures appuyant l'éducation offrent une aide fiscale additionnelle de 165 millions de dollars aux étudiants et à leurs familles. Le crédit d'impôt pour étudiant passe de 80 $ à 100 $ par mois, une augmentation de 25 p. 100. Il y a aussi une augmentation de 25 p. 100 de la limite du transfert des frais de scolarité et des crédits d'impôt pour études aux membres de la famille qui soutiennent les étudiants.

On a aussi augmenté la limite des cotisations à un régime enregistré d'épargne-études pour encourager les gens à économiser à cette fin. Les parents seuls à faible revenu qui sont aux études reçoivent de l'aide sous forme de déductions des frais de garde d'enfants. Le budget prévoyait aussi d'autres mesures immédiates, notamment une augmentation des fonds affectés au programme d'emplois d'été pour étudiants, qui passeront de 60 millions à 120 millions de dollars.

Le programme de croissance et de création d'emplois du gouvernement va bon train. Plus de 600 000 emplois ont été créés depuis 1993, et le chômage a baissé de deux points de pourcentage. Grâce à notre stratégie axée sur les jeunes, nous serons capables de faire en sorte que les jeunes Canadiens participent pleinement à la croissance économique.

J'ai eu l'occasion de rencontrer beaucoup de groupes. Hier après-midi, j'ai rencontré des membres de l'Ordre des élans, des membres d'autres organismes communautaires, un agent de la GRC et d'autres citoyens intéressés. Bien qu'ils viennent de milieux différents, ces gens s'intéressent tous au bien-être de nos jeunes, à leur avenir ainsi qu'aux investissements que nous faisons à cet égard en tant que familles et en tant que leaders.

Nous nous sommes réunis pour discuter des moyens d'assurer un meilleur avenir et une meilleure qualité de vie aux jeunes de nos collectivités. Ce désir n'est pas propre à ma circonscription; c'est quelque chose que nous partageons tous en tant que députés. Les collectivités prennent d'autres initiatives, et le gouvernement est là pour les aider. Il fournit les outils législatifs, les ressources.

Nous avons été capables d'encourager la population à faire preuve de leadership et à assumer cette responsabilité. Certains députés d'en face ont dit que, d'une certaine façon, ce projet de loi s'adressait aux victimes. Ce n'est pas vraiment que les gens sont des victimes, mais plutôt qu'ils devraient assumer la responsabilité de leur avenir. Si on encourage les jeunes, ils n'auront pas peur d'assumer cette responsabilité.

Il y a beaucoup de jeunes qui travaillent, qui apprennent et qui se préparent un avenir plus prometteur. Ils ont besoin de notre aide.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole à nouveau sur le projet de loi C-12. J'aurais cependant préféré me prononcer sur un projet de loi qui s'attaquerait vraiment aux problèmes de chômage qui frappent partout au Canada et au Québec, un projet qui aurait comporté des mesures concrètes pour relancer l'emploi et ainsi redonner espoir aux milliers de gens qui tentent désespérément d'entrer ou de retourner sur le marché de travail.

(1600)

Permettez-moi de vous dire que je suis toujours un peu surprise, depuis le temps qu'on débat de cette réforme, d'entendre les collègues de l'autre côté de cette Chambre vanter les mérites de cette réforme, alors que toute la population à travers le Québec et le Canada manifeste tous les jours pour dénoncer les effets pervers de cette réforme.

Alors permettez-moi de dire que je ne comprends pas ces députés, qui représentent la population, les commettants de leur circonscription. Ces gens doivent aussi aller voir leur député pour dire: «Ça n'a pas de bon sens ce qu'on est en train de nous faire. C'est une réforme créatrice de pauvreté.»

Il n'y a aucune mesure concrète de création d'emplois dans cette réforme de l'assurance-chômage. En plus, on va chercher des milliards de dollars, au nom d'un bon gouvernement, et après, dans le prochain budget, on se pétera les bretelles en disant: «On a été un bon gouvernement, on a abaissé le déficit de tant.» Mais on l'a fait en allant chercher de l'argent dans les poches des pauvres gens.

Franchement, j'aimerais avertir la population, quand elle entend les députés du gouvernement dire des choses tout à fait aberrantes, dire que cette réforme est vraiment ce qu'on a de mieux à l'heure actuelle, qu'on a vraiment fait une réforme. Je ne pense pas qu'on ait fait une bonne réforme. On est en train de créer la pauvreté. Cette réforme est inéquitable, régressive, anti-emploi et créatrice de pauvreté.

J'aimerais expliquer aux gens qui nous regardent comment ce projet de loi pénalise les chômeurs et pénalise ceux qui sont sans emploi, et particulièrement les jeunes et les femmes. Les conditions d'admissibilité sont durcies. Avant, pour accéder au régime, on pouvait travailler de 12 à 15 semaines de 15 heures, selon les régions, on pouvait travailler 15 semaines de 15 heures. Ça veut dire que ça représentait à peu près de 180 à 300 heures par année. Les gens qui accumulaient 180 ou 300 heures, dépendant des régions, pouvaient recevoir un chèque de prestations.

Maintenant, c'est de 12 à 20 semaines de 35 heures, ce qui veut dire de 420 heures à 720 heures. Il faut que vous ayez travaillé, tout dépendant des régions, de 420 à 700 heures, soit plus du double. Les nouveaux arrivants, ceux qui arriveront sur le marché du travail, voient tripler le nombre d'heures nécessaires, ce qui veut dire que cela leur prendra 910 heures pour être admissibles au régime. Cela veut dire qu'ils ne seront jamais capables d'accumuler 910 heures,


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il n'y a pas d'emplois. On n'en a pas créé. On n'a pas mis de mesures en place. On a tapé sur la tête des pauvres chômeurs.

Dans cette mesure, dans cette réforme, ce qui est encore plus aberrant, c'est qu'encore une fois ce sont les femmes, à cause de leur statut précaire, et les jeunes qui feront les frais de cette mauvaise réforme. Pourquoi? Une étude d'impact effectuée par le gouvernement fédéral-il faut le faire-évalue que les individus les plus touchés seraient ceux dont le revenu annuel est inférieur à 25 000 $. Or, tout le monde sait que ce sont les femmes et les jeunes qui gagnent moins. Les femmes gagnent encore 70 p. 100 du salaire des hommes. Ce sont encore les femmes, ce n'est pas un secret pour personne, qui vont perdre dans cette situation, avec cette réforme.

En deuxième lieu, on nous dit que les critères d'admissibilité seraient resserrés. L'admissibilité serait déterminée par le total d'heures travaillées durant une période, plutôt que par le nombre de semaines travaillées. En plus, les cotisations au régime débuteraient dès la première heure du travail. Cela veut dire qu'un jeune étudiant qui travaille dans un restaurant «fast food», pour ne pas les nommer, que l'on embauche souvent pour à peu près six, sept, huit, neuf, dix heures de travail, lui, aussitôt qu'il commence à travailler sa première heure, il doit cotiser à la Caisse de l'assurance-chômage. Jamais, pendant toute sa situation d'étudiant, il n'aura la possibilité de retirer un seul sou. Pourtant, il a cotisé.

(1605)

On va aller chercher son argent, ses cotisations, pour puiser-on ne dit pas voler-afin d'abaisser le déficit. C'est vraiment du détournement de fonds. Ensuite, on dit que cette année, on a doublé les fonds pour les étudiants, dans les projets carrière-jeunesse et qu'on peut vraiment aider les étudiants. C'est de la poudre aux yeux, parce que dès la première heure qu'ils vont travailler, ils vont payer de l'assurance-chômage et ils n'en verront jamais la couleur.

Le projet de loi C-12 aura donc pour effet de diminuer de façon importante le nombre de personnes admissibles aux prestations. De plus, même si elles ne sont pas admissibles, comme je vous en ai fait la démonstration plus tôt, elles devraient quand même cotiser au régime et donc s'appauvrir davantage. Le projet de loi est aussi inacceptable parce qu'on prévoit tenir compte du revenu du conjoint pour déterminer si une personne a droit au supplément. Ça, c'est le bout!

On va aller calculer la prestation de chômage en fonction du revenu, alors qu'on sait que les femmes ont toujours gagné moins cher que les hommes. Si les deux se retrouvent au chômage, c'est monsieur qui va recevoir la prestation parce qu'il aura gagné plus cher et madame va être obligée, encore une fois, de quémander pour pouvoir s'acheter une paire de bas. C'est inacceptable et c'est une politique qui ramène les femmes 50 ans en arrière. C'est tout à fait discriminatoire. Je ne peux pas comprendre que les femmes députées de cette Chambre ne se soient pas élevées contre cette mesure. C'est épouvantable et c'est aberrant. Il n'y a pas une femme, quand elle comprend cet article du projet de loi, cette réforme en ce qui concerne la pénalisation qu'elles devront subir, qui ne s'élèvera pas contre cette mesure.

Enfin, dans ce projet de loi, on voudrait réduire le nombre maximum de semaines de prestations, ce qui entraînerait inévitablement un passage plus rapide à l'aide sociale. Vous savez, il n'y a que 55 p. 100 des gens qui sont sans emploi ou qui vont perdre leur emploi qui vont pouvoir obtenir des prestations. Les autres, où vont-ils aller? À l'aide sociale. C'est ce qu'on appelle «pelleter le déficit dans la cour des provinces». Ce sont les provinces qui vont avoir encore à ramasser les pots cassés.

Faut-il également souligner le maintien des chevauchements et des dédoublements qui ne favorisent pas le développement d'une politique efficace de développement de l'emploi ni l'employabilité des gens et des femmes?

On sait qu'au Québec, il y a unanimité sur la mise en place d'une politique de développement de l'emploi. Ce dont on parle va créer un drame partout au Canada et au Québec, puisque le ministre du Développement des ressources humaines, avec la douce complicité du ministre des Finances, a décidé qu'il fallait réformer le régime d'assurance-chômage. On n'a jamais été contre ça, faire une réforme, moderniser le régime, faire en sorte que les sommes qui y sont investies le soient dans le meilleur intérêt des travailleurs. C'est ce qu'on préconisait.

Puisque vous me signalez qu'il ne me reste plus qu'une minute, je vais donc conclure. Il y a eu des manifestations partout et il y en aura encore, parce que les gens qui sont victimes et qui comprennent ce que le gouvernement est en train de faire ne peuvent accepter et ne peuvent comprendre.

Comment peut-on comprendre, quand on a un revenu de 10 000 $, 12 000 $ ou 15 000 $ par année, peut-être moins, que le gouvernement fédéral veuille s'attaquer à ces gens-là pour leur demander de payer sa mauvaise gestion? Quand on est réduit à vivre de ressources maigres, c'est-à-dire de celles que nous donne un régime comme le régime d'assurance-chômage, comment peut-on accepter, dans la sérénité, que le gouvernement vienne nous couper des bénéfices quand la caisse est excédentaire?

Je peux vous dire, en terminant, que ce gouvernement, aux prochaines élections, aura à répondre de ses gestes.

(1610)

[Traduction]

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-12.

En tant que membre du Comité du développement des ressources humaines, j'ai participé aux audiences d'examen du projet de loi qui se sont tenues sur une période de cinq semaines ce printemps. Quelque 79 groupes et particuliers sont venus témoigner et le comité a également examiné de nombreux mémoires.

Lorsque le projet de loi a été déposé à la fin de 1995, ma première réaction a été de m'y opposer parce que les réductions importantes qu'il proposait d'apporter au régime d'assurance-chômage me semblaient injustes et injustifiées. Pendant sept ans, soit de 1984 à 1991, j'ai été le porte-parole de l'opposition libérale en matière d'emploi et que pendant cette période j'ai sévèrement critiqué, avec l'appui de mon parti, des réductions semblables proposées par le gouvernement conservateur.


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En outre, pendant la campagne électorale de 1993, le Parti libéral n'a fait nulle mention, dans le livre rouge ou ailleurs, de réductions de l'assurance-chômage. Bien au contraire, nous avons condamné les conservateurs pour les coups qu'ils ont portés à l'assurance-chômage et d'autres programmes sociaux.

Malgré mon opposition initiale, j'ai décidé de participer de façon objective aux travaux du comité, d'écouter les arguments favorables et défavorables au projet de loi et de décider ensuite si j'allais m'opposer au projet de loi ou l'appuyer, en totalité ou en partie.

J'ai trouvé encourageante l'attitude du ministre lorsqu'il a déclaré qu'il accepterait, dans certaines limites, des propositions d'amendement qui auraient pour effet d'améliorer le projet de loi. Il a tenu parole, et je l'en félicite. Je pense, en particulier, aux amendements proposés par les députés de Fredericton-York-Sunbury et de Halifax-Ouest, qui visent à modifier la méthode de calcul des prestations, ce qui aura pour effet d'atténuer sensiblement les réductions de prestations prévues dans le projet de loi initial. La députée d'Etobicoke-Lakeshore a également proposé des amendements visant à soustraire les familles à faible revenu à l'application de la règle de l'intensité.

Le projet de loi initial aurait réduit le programme d'assurance-chômage de 2 milliards de dollars. Les amendements proposés par mes collègues permettront de réduire ces compressions d'environ 400 millions de dollars. Tout bien pesé, le comité a accompli du bon travail. Il a fait de son mieux compte tenu du contexte financier. Là est le problème, justement.

L'une des dispositions du budget de 1995 réduisait de 10 p. 100 le programme d'assurance-chômage. Malgré la bonne volonté du comité et les amendements qu'il a présentés, le projet de loi prévoit toujours des coupes importantes aux prestations d'assurance-chômage à une époque où un grand nombre de Canadiens sont en chômage.

J'ai décidé de participer au comité pour écouter honnêtement les arguments des deux côtés. Plus j'écoutais les témoignages présentés, plus je devenais convaincu que, dans l'ensemble, ce projet de loi était mal pensé.

C'est vrai que le projet de loi présente des améliorations, comme le calcul de l'admissibilité et du montant des prestations sur la base des heures de travail. En vertu de la loi actuelle, une personne doit travailler au moins 15 heures par semaine pour être admissible, ce qui a pour conséquence que beaucoup d'employeurs engagent des travailleurs à temps partiel pour moins de 15 heures par semaine, évitant ainsi de verser des cotisations. En vertu de ce projet de loi, toutes les heures de travail seront considérées pour déterminer l'admissibilité. Ainsi, les travailleurs à temps partiel auront plus de chances d'être déclarés admissibles. C'est certainement une amélioration.

Il y a d'autres améliorations, mais, dans l'ensemble, quand on fait la somme des améliorations et des coupes, cette mesure a pour effet d'assurer un moins grand nombre de personnes et de réduire les prestations par rapport au système actuel.

En raison des compressions effectuées par les conservateurs avant 1993 et par les libéraux depuis 1993, le pourcentage de chômeurs protégés par l'assurance-chômage est passé de 87 p. 100 en 1990 à quelque 50 ou 52 p. 100 aujourd'hui. Malheureusement, ce projet de loi fera encore empirer la situation. En outre, même avec les amendements présentés par mes collègues, les prestations resteront plus faibles pour la plupart des prestataires.

(1615)

Mes principales préoccupations au sujet de ce projet de loi sont les suivantes. Premièrement, bien que l'adoption d'un système horaire soit une bonne chose en soi, le nombre d'heures de travail exigé pour devenir admissible est trop élevé, pour les prestations tant normales que spéciales. Ce sera donc plus difficile pour les travailleurs de devenir admissibles en vertu de cette mesure qu'avec la loi actuelle. Certains travailleurs à temps partiel y gagneront en vertu de ces nouvelles règles, mais de nombreux travailleurs y perdront et ne réussiront pas à se qualifier.

Ma deuxième préoccupation, c'est que les prestations seront réduites pour les trois quarts des bénéficiaires en raison de trois dispositions du projet de loi. D'abord, la nouvelle méthode de calcul des gains assurables et des prestations selon la règle du dénominateur leur en donne moins, malgré les améliorations apportées par mes collègues. Ensuite, la règle de l'intensité réduit les prestations pour ceux qui sont obligés de présenter des demandes à répétition-et je dis bien obligés. Je pense aux travailleurs saisonniers et à ceux qui ont des emplois temporaires. Enfin, une disposition du projet de loi vise à réduire le plafond de la rémunération assurable de 448 $ à 413 $ par semaine. C'est le maximum.

Ma troisième préoccupation, c'est que le projet de loi réduit la durée des prestations, c'est-à-dire que les prestations seront versées durant 45 semaines au lieu de 50. Par conséquent, le nombre de chômeurs ne recevant pas de prestations augmentera. Actuellement, les chômeurs peuvent recevoir des prestations durant 50 semaines, mais cette période sera réduite à 45 semaines.

Ceux qui appuient ce projet de loi ont tendance à penser que ces mesures qui limitent l'assujettissment et vont réduire les prestations et la durée des prestations forceront les travailleurs au chômage à retourner au travail. Cela suppose au départ qu'il existe du travail, ce qui n'est certainement pas le cas partout, et que les travailleurs préfèrent être au chômage. Là encore, il n'y a rien qui prouve que ce soit vrai. Je dirais qu'un grand nombre de chômeurs veulent travailler. Il y en a certains qui ne veulent pas et qui préfèrent dépendre de l'assistance sociale ou du chômage, mais c'est certainement un très petit nombre.

Ces mesures pourraient également forcer les chômeurs à accepter des emplois plus mal rémunérés. Avec l'augmentation de la croissance économique, comme on le disait dans le budget de cette année et celui de l'an dernier, on ne fait qu'élargir l'écart entre les riches et les pauvres. Pourquoi devrions-nous forcer les gens à accepter des emplois plus mal rémunérés si la croissance économique est effectivement en hausse? Ce n'est pas de la justice économique.

Une autre inquiétude que j'ai au sujet de ce projet de loi, c'est qu'il accorde un plus grand pourcentage des fonds de la caisse de l'assurance-chômage à la formation et aux mesures de soutien de l'emploi. Je suis tout à fait d'accord que ces mesures sont essentiel-


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les, mais, jusqu'à tout récemment, elles étaient payées par le Trésor et non par la caisse d'assurance-chômage.

Le gouvernement a observé que cette année la caisse d'assurance-chômage aurait un surplus d'environ 5 milliards de dollars et il a décidé de prendre une partie de cet argent pour payer la formation qui était auparavant payée par le Trésor. Dans le budget de l'an dernier, le gouvernement avait décidé de réduire d'environ 2 milliards de dollars le régime d'assurance-chômage et de réaffecter 800 millions de dollars à la formation et à l'emploi, en même temps qu'il réduirait les fonds de formation venant du Trésor. En fait, le gouvernement résout ses problèmes de déficit en réduisant les dépenses de formation qui étaient payées par le Trésor et prend l'argent dans la caisse d'assurance-chômage.

Je rappelle à la Chambre que la caisse d'assurance-chômage est financée par les cotisations sur les salaires versées par les employeurs et les employés. Ce ne sont pas tous les Canadiens qui cotisent à cette caisse. L'objectif original et principal de la caisse était de soutenir financièrement les chômeurs pendant qu'ils étaient temporairement sans travail. Il s'agissait d'aider les chômeurs à payer leurs factures, à payer leur loyer, à payer leur nourriture et à garder leurs enfants à l'école. C'était le but essentiel de l'assurance-chômage.

La formation, comme l'éducation, a toujours été payée par l'ensemble des contribuables parce que, à long terme, c'est pour le bien de tout le monde. Il n'y a pas que les parents et les élèves qui paient pour l'enseignement primaire et secondaire. Pourquoi la formation devrait-elle être payée seulement par les travailleurs et les employeurs?

(1620)

En outre, le système proposé prive ceux qui ne sont pas admissibles à l'assurance-chômage des possibilités de formation et d'emploi. Les immigrants et les mères au foyer qui décident de retourner sur le marché du travail ne seront pas admissibles à la formation et aux avantages découlant d'un emploi du fait qu'ils n'ont jamais été prestataires.

En conclusion, j'appuierais toute mesure visant à corriger les abus et à encourager le retour au travail. Cependant, à mon avis, ce projet de loi punit autant les innocents que les coupables. J'appuierai les amendements du gouvernement qui amélioreront le projet de loi et j'appuierai également les autres amendements qui l'amélioreront. Par contre, je voterai contre les parties du projet de loi qui réduisent l'assujettissement et les prestations.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, je pense que je m'en voudrais de ne pas commencer mon discours en disant qu'il y en a au moins un du gouvernement qui a compris, dans l'analyse de ce projet de loi. Comme par hasard, c'est un québécois. Je le félicite encore davantage. Il y a au moins un des libéraux québécois qui a compris. Ce que le député a dit, c'est exactement ce que nous entendons dans les manifestations, c'est exactement ce que nous entendons dans nos comtés respectifs.

C'est un projet de loi qui, oui à certains égards il y a des améliorations, mais qui somme toute est un méchant projet de loi, un projet de loi contre lequel il faut voter. Félicitations au député de Notre-Dame-de-Grâce qui s'est levé en cette Chambre.

Des voix: Bravo!

M. Bellehumeur: Un autre point qui me touche un peu, dans toute cette analyse et dans tout ce dossier de l'assurance-chômage, c'est lorsqu'on limite ou qu'on tente de limiter mon droit à prendre la parole et à défendre mon point de vue. Je pense que dans ce projet de loi on l'a fait à maintes reprises. On l'a fait au tout début en sautant la deuxième lecture pour permettre aux députés d'interroger des gens, d'être en comité, de travailler le dossier, de faire des recommandations, etc. C'est une façon de faire dont l'objectif était de valoriser le travail des députés. Qu'est-ce que le gouvernement a fait, rendu en comité? Il a mis un bâillon pour qu'on ne travaille pas sur ce projet de loi, ce qui est inadmissible.

C'est sûr, le gouvernement ne voulait pas entendre des gens comme le député de Notre-Dame-de-Grâce venir dire chaque fois qu'il y avait des auditions que c'est un méchant projet de loi pour telle ou telle raison, avec des cas très précis. C'est évident que le gouvernement ne voulait pas entendre cela.

Il ne voulait pas non plus entendre les députés du Bloc québécois se faire les porte-parole des choses que nous entendons dans nos comtés pour dire que c'est un projet de loi qui n'avantage pas les femmes, qui n'avantage pas les jeunes, qui matraque les chômeurs. Le gouvernement ne voulait pas le faire, ce qui fait qu'il a mis un bâillon, comme il met un bâillon également aujourd'hui à l'étape du rapport parce que le gouvernement ne veut pas entendre l'opposition. Il se ferme les oreilles.

L'objectif est très précis. L'objectif est de se faire de l'argent sur le dos des chômeurs. C'est cela l'objectif. Alors on comprend pourquoi le gouvernement agit de cette façon.

Vous savez, cela me fait rire d'entendre le gouvernement et le ministre nous dire: «Ces modifications sont de bonnes modifications. Ce ne sera plus de l'assurance-chômage, ce sera de l'assurance-emploi.» Lorsqu'on regarde les résultats, on devrait appeler cela l'assurance-misère parce que la seule assurance qu'on a avec ce projet de loi c'est que les chômeurs vont avoir de la misère, c'est garanti. C'est garanti à bien des égards.

Je me suis interrogé à savoir quel était l'objectif de ce projet de loi. Avec les beaux discours qu'on a entendus, tous les jours où on parle de cette réforme, est-ce que c'est de créer de l'emploi? Je pense que c'est clair, des spécialistes sont venus en comité pour dire que c'était des mesures anti-emploi. Il n'y a rien dans ce projet de loi qui puisse créer de l'emploi. Donc ce n'est pas ça.

Soulager les chômeurs? Vouloir le bien des chômeurs? C'est peut-être vrai parce qu'ils les prennent le bien des chômeurs, mais dans leurs poches. À part de ça, soulager les chômeurs? D'après les manifestations, les mémoires, c'est clair, ce n'est pas ça. Améliorer la qualité de vie des femmes et des jeunes? Non plus, ça aussi c'est clair, même le député de Notre-Dame-de-Grâce, un bon libéral, vient de le dire en cette Chambre que ce n'était pas l'objectif, que ce n'était pas vrai.


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(1625)

Comme je ne suis pas tellement vieux, je me suis préoccupé de la situation des femmes, mais davantage de celle des jeunes pour savoir si c'était un projet de loi qui pouvait les aider. Eh bien non. Au niveau du calcul, au niveau des cotisations, il n'y a rien pour favoriser les jeunes.

Alors pourquoi cette réforme? C'est facile à comprendre quand on connaît l'état des finances du gouvernement et la méthode de calculer du ministre des Finances. L'objectif est de prendre cinq milliards et de les mettre dans la poche du gouvernement fédéral pour payer la dette. C'est assez pénible de voir que le gouvernement n'a qu'une seule façon de réduire le déficit, c'est de le faire sur le dos des plus démunis. C'est désolant pour un parti qui se disait très proche de la population, très social-démocrate. C'est très décevant de voir que jusqu'à maintenant les seules récupérations d'argent que le gouvernement a faites, c'est sur le dos du pauvre monde.

Le gouvernement agit à l'encontre de la pratique de Robin des bois. On dépouille les pauvres pour avoir une marge de manoeuvre qui favorise les riches. C'est ça la réforme de l'assurance-chômage. Il me semble que je n'ai pas vu ça dans le livre rouge, que je n'ai pas vu, durant la campagne électorale, que le gouvernement allait matraquer les chômeurs de cette façon, les prendre à la gorge, figure de style fréquemment utilisée par les libéraux. Il me semble que je n'ai pas vu ça.

Pour y arriver le gouvernement nous présente un bon projet de loi, C-12. Regardez-en l'épaisseur, et il voudrait qu'on l'adopte de façon très rapide. Il contient plus de 100 articles, et on ne parlera pas du nombre de paragraphes. Il y a beaucoup de modifications. Pour y arriver, on ne partira pas tellement loin, on va aller à l'article 2, qui fait partie de ce que nous étudions aujourd'hui. Le gouvernement donne une série de définitions et d'interprétations. Des choses aussi simples qu'un affidavit. Le gouvernement a senti le besoin de définir ce qu'était un affidavit. Tant qu'à mêler le monde, on va le mêler pour de bon. Tout le monde sait ce qu'est un affidavit, mais le gouvernement l'a défini.

On définit également ce qu'est un arrêt de rémunération, un conflit collectif, des documents. Il y a toute une série de définitions qui ont comme objectif, peut-être le seul point positif de ces définitions, sera de faire vivre des avocats. Étant donné que je suis avocat, je parlerai peut-être pour eux. Les avocats utiliseront toutes ces définitions pour étirer comme ils le voudront, mais il y a l'autre côté de la médaille, c'est que les fonctionnaires vont utiliser ces définitions-là pas nécessairement pour avantager les chômeurs, c'est évident.

On interprétera ça de façon à rétrécir davantage l'admissibilité à l'assurance-chômage. On ne peut pas être pour ça, nous de l'opposition officielle. C'est pour ça qu'on est contre et qu'on veut qu'on biffe l'article 2. De toute façon, lorsque le législateur parle, il ne parle pas pour rien dire. Alors s'il donne une série de définitions, c'est qu'il faudra les interpréter.

Le dernier point est encore plus important, c'est lorsque le gouvernement nous dit que c'est une réforme qui aidera les gens, les chômeurs sur le plan de l'employabilité. Il y a un article qui, encore là, est contraire aux prétentions du gouvernement, c'est noir sur blanc, c'est lorsqu'on parle des programmes pour augmenter l'employabilité des prestataires.

La décision du fonctionnaire à savoir si un chômeur ou un chômeuse sera ou non admissible à un cours ne pourra faire l'objet d'un appel. C'est ça le projet de loi. Le fonctionnaire rendra une décision et le chômeur ou la chômeuse ne pourra pas en appeler. Si on regarde les faits, aujourd'hui, on réalise que 75 p. 100 des appels donnent raison aux chômeurs et aux chômeuses.

Pourquoi pensez-vous que le gouvernement a senti le besoin de mettre ça dans le projet de loi? Simplement parce que des directives précises seront données à ces fonctionnaires pour tordre davantage, pour serrer la vis encore davantage afin d'arriver à l'objectif du gouvernement qui est d'obtenir cinq milliards de dollars. C'est clair.

(1630)

Lorsque le ministre dit qu'il proposera telle ou telle modification pour améliorer son projet de loi, c'est de la foutaise, parce qu'en bout de ligne, l'objectif de cinq milliards demeure. Réduisons les cinq milliards et parlons peut-être seulement de un milliard et là, les modifications voudront peut-être dire quelque chose. Mais ce qu'on enlève à M. X pour le donner à M. Y, ça change quoi en bout de ligne?

Les cinq milliards de dollars sont quand même dans la poche du ministre pour diminuer artificiellement et sur le dos des chômeurs le déficit canadien. C'est ça, le prix à payer pour avoir des gens qui se foutent un peu des chômeurs et des chômeuses.

[Traduction]

M. Paul DeVillers (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je me réjouis de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui de me prononcer sur cette importante restructuration de notre régime d'assurance-chômage.

[Français]

Je félicite mes collègues qui siègent au comité parlementaire et qui ont travaillé sur ce problème complexe. Il s'agit d'une modernisation du système d'assurance-chômage qui date des années 1970. Étant donné que de plus en plus, les Canadiens sont affectés par des changements économiques rapides et que les budgets sociaux du gouvernement sont déjà étirés à la limite, nul ne peut nier la nécessité de ce changement.

J'aimerais aborder trois points lors de ce discours, tels le calcul des heures admissibles, l'effet sur les petites entreprises et l'application de ce régime pour des personnes touchant un revenu élevé.

Premièrement, ce projet de loi constitue, à mon avis, un changement fondamental en ce qui a trait à l'admissibilité au système. L'admissibilité sera dorénavant fondée sur les heures et non les semaines. Sur le marché du travail d'aujourd'hui, un système fondé


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sur des semaines de travail crée des inégalités. Pour un grand nombre de travailleurs, une semaine ne signifie plus 40 heures du lundi au vendredi.

En établissant l'admissibilité des chômeurs et des chômeuses d'après les heures de travail, le gouvernement veut faire en sorte que chaque heure travaillée compte. De cette façon, il serait avantageux de travailler plus longtemps quand il y aura du travail disponible. Le nouveau système tient compte du fait que le monde du travail a changé et que des millions de gens ont maintenant des schémas de travail qui ne correspondent plus aux normes classiques de semaines de travail. Ils méritent la même protection que leurs citoyens occupant des emplois réguliers en cas de perte d'emploi.

Le nouveau système est beaucoup plus équitable envers les personnes qui travaillent à temps partiel ou dans les industries saisonnières. Par exemple, celles qui travaillent moins de 15 heures par semaine seront dorénavant assurables. En vertu du système d'assurance-emploi, 90 000 personnes occupant des emplois à temps partiel ou des emplois saisonniers auront dorénavant droit aux prestations. Beaucoup y auront droit plus tôt et plus longtemps et pourront assurer une plus grande partie de leur revenu qu'auparavant.

En deuxième lieu, j'aimerais traiter de ce projet de loi dans le contexte de la croissance économique. L'objectif du gouvernement est d'instaurer un climat propice aux affaires, qui suscite la croissance économique et la création d'emplois. C'est là le principal objectif de notre stratégie d'emploi.

Cet objectif se réalise de plusieurs façons, mais je ne traiterai que de deux. Premièrement, la réduction du maximum de rémunération assurable fera mieux correspondre la rémunération assurable aux salaires canadiens que ne le fait le présent régime.

Cette diminution réduira les conséquences des charges sociales sur les emplois en augmentant les revenus aussi bien des employeurs que des employés. Cette réduction fera baisser de façon considérable les cotisations des employeurs et des employés des secteurs où le revenu est élevé.

(1635)

Deuxièmement, un volet d'assurance-emploi constituera un important programme d'aide aux petites entreprises. Vous serez d'accord avec moi que les petites entreprises représentent un secteur vital du renouvellement économique canadien.

Le programme d'aide aux petites entreprises réduit l'impact de toute augmentation des cotisations. Nous visons les entreprises comptant moins de 25 employés qui paieront des cotisations inférieures à 30 000 $ en 1996. Toute augmentation de 500 $ ou plus des cotisations, à partir de l'année de base 1996, donnera droit à un rabais partiel à l'employeur. Ces entreprises pourront obtenir un remboursement de l'ordre de 50 p. 100 de toute augmentation des cotisations pour l'année 1997 et une réduction de 25 p. 100 pour l'année 1998. Ce programme de deux ans commencera en janvier 1997 pour coïncider avec l'entrée en vigueur de la politique recouvrant le premier dollar gagné et le calcul annuel du maximum de la rémunération assurable. Les employeurs dont les cotisations de 1996 sont inférieures à 25 000 $ auront droit à un rabais annuel maximum de 5 000 $. Ceux dont les cotisations sont entre 25 000 $ et 30 000 $ verront leur rabais maximum diminué dollar pour dollar.

Finalement, j'aimerais traiter de l'application de ce régime pour les personnes touchant un revenu élevé. Quelques-uns de mes commettants ont soulevé le fait que, sous le régime actuel, il est possible de travailler quelques mois de l'année et de recevoir des prestations d'assurance-chômage pour le reste de l'année, et ainsi obtenir un revenu annuel plus élevé, et ce, d'année en année. En effet, cette caractéristique inéquitable a été soulevée par plusieurs Canadiens et Canadiennes durant les consultations menant à ce projet de loi.

L'assurance-emploi comportera des dispositions de récupération plus sévères. Ainsi, les prestataires qui auront reçu plus de 20 semaines de prestations au cours des cinq dernières années et dont le revenu est supérieur à 39 000 $ devront rembourser une partie plus importante de leurs prestations d'assurance qu'ils ne le font actuellement. Ces personnes pourraient être tenues de rembourser jusqu'à 50 p. 100 des prestations reçues.

Les personnes gagnant un revenu élevé qui contribuent au régime continueront d'avoir accès à des prestations raisonnables lorsqu'une perte d'emploi imprévue se produit. Par contre, les particuliers qui gagnent un revenu supérieur à la moyenne en ne travaillant qu'une partie de l'année ne pourront plus augmenter leur revenu en percevant d'importants montants de prestations d'assurance-emploi année après année.

En guise de conclusion, je suis d'avis que ce projet de loi représente une modernisation nécessaire au système d'assurance-chômage. Le système affirme la valeur du travail car, en vertu de ce système, chaque heure travaillée compte. Ainsi, le régime assurera la protection de 97 p. 100 de la population active. Ce système sera plus équitable et équilibré. Il comprend une récupération des prestations qui garantira que les personnes à revenu élevé touchant des prestations à maintes reprises ne bénéficieront plus du régime de manière inéquitable. Finalement, le passage à l'assurance-emploi se fera progressivement afin que les petites entreprises disposent du temps nécessaire pour s'adapter aux changements. Ce projet de loi représente un compromis entre nos contraintes budgétaires et notre désir de contrer les effets néfastes des pertes d'emploi imprévues.

M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Monsieur le président, à l'instar de mes confrères, je dois, moi aussi, déclarer que c'est un mauvais projet de loi.

(1640)

Je voudrais féliciter le député de Notre-Dame-de-Grâce, le seul député du gouvernement qui semble avoir compris quelque chose et qui a vraiment le courage de se présenter dans cette Chambre et de donner son opinion franche.

Ce projet de loi sur l'assurance-emploi au Canada, à l'étape du rapport, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dénoncer, est une véritable injustice. Il est inéquitable, régressif, anti-emploi et créateur de pauvreté. Jamais aucun gouvernement n'a autant remis en question le filet de sécurité essentiel aux citoyens. L'assurance-emploi, pour ne pas dire l'assurance-misère, sera une assurance qu'il y


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aura moins de soutien pour les sans-emploi qui seront laissés de plus en plus à eux-mêmes pour survivre.

Avec un surplus de 5,5 milliards, avec un taux de chômage dans certaines régions dépassant les 20 p. 100, je ne peux croire que ce projet de loi porte le nom d'assurance-emploi.

Un point qui me touche particulièrement est celui qui remonte à la dernière réforme de l'assurance-chômage. Je me souviens que les libéraux, alors dans l'opposition, avaient déchiré leur chemise lorsque le gouvernement de l'époque avait fait en sorte que les travailleurs qui quittaient volontairement un emploi ou qui étaient congédiés se voyaient exclus du régime d'assurance-chômage.

Or, que fait l'actuel projet de loi? Absolument rien. Le gouvernement ne rétablit pas l'injustice pourtant dénoncée à hauts cris lorsqu'il était dans l'opposition. L'article 33 du projet de loi reprend ce principe. Il rend inadmissibles les prestataires qui perdent leur emploi volontairement ou prétendument par inconduite.

Le gouvernement a-t-il pensé aux prestataires qui cumulent des emplois? Nous sommes pourtant devant un nouveau régime qui comptera chaque heure d'emploi accumulée. Trois heures chez McDonald, quatre heures chez Harvey's, une fin de semaine au Loblaws; voilà comment les travailleurs à faible revenu pourront, selon le gouvernement, se bâtir une admissibilité à l'assurance-emploi.

Mais que se passe-t-il si un travailleur qui cumule des emplois précaires choisit d'en quitter un volontairement pour ajuster son horaire et son travail? Ce départ volontaire sera-t-il noté à son dossier? Deviendra-t-il inadmissible à l'assurance-emploi?

Ce n'est qu'un petit exemple qui démontre bien les faiblesses de cette réforme. Il y a toutes sortes de faiblesses. Les conditions d'admissibilité sont durcies. Avant ce projet de loi, on pouvait accéder au régime après avoir travaillé de 12 à 15 semaines de 15 heures, équivalant à 180 ou 300 heures, selon le cas. Après ce projet de loi, il faudra entre 420 et 700 heures travaillées pour devenir admissible, ce qui équivaut de 12 à 20 semaines de 35 heures. Les nouveaux arrivants sur le marché du travail se voient, quant à eux, tripler le nombre d'heures nécessaires.

Il y aura dorénavant deux classes de chômeurs: les chômeurs ordinaires et les chômeurs fréquents. Ceux qui auront déjà reçu des prestations verront ce taux de prestations passer de 55 à 50 p. 100, soit 1 p. 100 par tranche de 20 semaines de prestations déjà reçues. Cette mesure revient à dire que l'on devra travailler plus longtemps pour recevoir moins de prestations et pendant moins longtemps.

Ce projet de loi est aussi une mesure régressive parce qu'il n'y aura qu'un seul taux de cotisation, un taux fixe pour tous les travailleurs, et la rémunération assurable est plafonnée à 39 000 $ au lieu de 42 380 $ actuellement.

(1645)

Je vais vous donner un exemple des conséquences de cette mesure. Un travailleur qui gagne 39 000 $ ou moins paie 2,95 p. 100 de son salaire en cotisations. Un travailleur qui gagne plus de 39 000 $ par année arrêtera de payer des cotisations dès que le seuil sera atteint. Plus le travailleur gagnera de l'argent, plus son pourcentage de cotisations diminuera.

Le projet de loi sur l'assurance-emploi est aussi une mesure anti-emploi. En effet, la réduction de 5c. des taux de cotisation, passant de 3 $ à 2,95 $ pour les travailleurs ainsi que le plafonnement du maximum des gains assurables à 39 000 $ est un cadeau aux entreprises à haute intensité de capital aux dépens des entreprises à haute intensité de main-d'oeuvre, essentiellement les PME créatrices d'emplois. Cette mesure encourage les heures supplémentaires chez les hauts salariés.

Voilà une motion qui fait extrêmement mal aux travailleurs. Alors qu'on diminue la charge des hauts salariés, on augmente celle des travailleurs qui gagnent le moins. Comme je viens de la dire, on donne simplement aux hauts salariés l'occasion de faire des heures supplémentaires ce qui, automatiquement, éliminera des emplois.

Non seulement la réforme incite à faire des heures supplémentaires, mais en plus, elle encourage l'occupation de deux ou de plusieurs emplois. Alors que le mot d'ordre est de réduire les semaines de travail afin de favoriser la création d'emplois, le projet de loi C-12 va complètement à l'envers du courant.

Enfin, ce projet de loi sera créateur de pauvreté. Les nouvelles mesures, en abaissant le taux de prestation, en taxant les travailleurs dès la première heure, en fixant des critères d'admissibilité plus sévères, tout en rendant certaines clientèles inadmissibles, contribueront à un transfert accru de la clientèle de l'assurance-chômage vers l'aide sociale.

Ce projet de loi touche tout le monde: les jeunes, les femmes, les immigrants, les nouveaux venus dans le dégime, les régions, les prestations familiales, l'admissibilité et le calcul des prestations, les travailleurs saisonniers, les travailleurs autonomes, les personnes handicapées. En un mot, ce projet de loi est à l'image de ce gouvernement, il touche à tout et ne règle rien.

[Traduction]

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre part au débat à l'étape du rapport sur la Loi concernant l'assurance-emploi, le projet de loi C-12, qui aura sans aucun doute un effet positif sur toutes les collectivités du Canada, y compris la circonscription de Lambtom-Middlesex que je représente.

Il faut le souligner d'emblée, la Loi concernant l'assurance-chômage n'a pas été réformée depuis 25 ans. La révolution technologique qui s'est étendue à toute l'économie entre-temps a contribué à refaçonner, réorganiser et redessiner nos emplois.

Soyons clairs. Changement technologique n'est pas nécessairement synonyme de perte d'emplois. Il y aura toujours des emplois, mais ils seront différents, ils seront parfois exercés dans des lieux différents et exigeront souvent des aptitudes différentes. Le fait est que, à l'heure actuelle, les gens changent d'emplois plus souvent, non seulement en franchissant les divers paliers de la société ou de l'industrie, mais également en optant pour de nouveaux secteurs, alors que des industries toutes entières se transforment et que de nouvelles surgissent.


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Ce renouveau économique présente des aspects positifs. Il a suscité de nouvelles possibilités, stimulé la croissance et créé des emplois, soit plus de 600 000 depuis l'élection du gouvernement, il y a deux ans et demi. À une économie novatrice doivent correspondre des politiques sociales novatrices, et je crois fermement que c'est ce en quoi consiste le projet de loi C-12.

Aujourd'hui, j'aimerais toucher un mot des deux grands changements structurels qu'opère ce projet de loi. Le premier changement consiste à se fonder non plus sur les semaines, mais sur les heures de travail pour établir l'admissibilité aux prestations d'assurance-chômage. Le deuxième changement, c'est la règle de l'intensité qui aura pour effet de réduire progessivement le taux des prestations en fonction du montant qu'on aura touché au cours des cinq années antérieures. J'appuie fortement ces deux innovations. Chacune d'elles est une solution unique à notre situation canadienne unique relativement aux problèmes majeurs qu'affronte actuellement notre régime d'assurance-chômage.

(1650)

La première de ces mesures, le système fondé sur les heures comme moyen d'établir l'admissibilité aux prestations, est une disposition depuis longtemps attendue qui influera grandement sur l'assujettissement au programme dans les années à venir. Notre programme actuel prive du droit aux prestations d'assurance-chômage les personnes qui ont un emploi comportant moins de15 heures de travail par semaine. Pour de multiples raisons, le nombre des travailleurs à temps partiel est à la hausse. Cependant, alors que le travail à temps partiel continue de prendre de l'expansion, la part de tous les emplois dans notre économie visés par l'assurance-chômage ou l'assurance-emploi continuera également de baisser.

Au Canada et dans d'autres pays industrialisés, les programmes d'assurance-chômage sont en place depuis suffisamment longtemps que la plupart d'entre nous en sont venus à tenir pour acquises leurs fonctions importantes en matière de stabilisation économique. Par exemple, lorsqu'un pays est frappé par la récession, les personnes mises à pied doivent réduire leurs dépenses bien davantage si elles sont inadmissibles à des prestations d'assurance-chômage. En plus des torts que ces gens et leur famille subissent, la baisse marquée des dépenses se traduit par une chute des ventes et d'autres licenciements.

Cette situation où des licenciements conduisent à une baisse des ventes qui entraîne elle-même d'autres licenciements peut finir par aboutir à une grave crise économique. Je crois que c'est tout aussi possible à l'heure actuelle que dans les années 30 en l'absence de puissants stabilisateurs économiques comme notre programme d'assurance-chômage qui relève le niveau de vie des personnes assurées. Ainsi, la valeur des programmes d'assurance-chômage ou d'assurance-emploi en tant que stabilisateur automatique dépend de la plus grande protection possible.

Le passage proposé d'un système basé sur les semaines de travail à un système fondé sur les heures de travail, va, selon moi, remédier à l'érosion de notre actuel programme d'assurance-chômage, qui est attribuable au nombre croissant d'emplois à temps partiel dont les titulaires sont inadmissibles à l'assurance-chômage aux termes des règles actuelles. Cela va, sans aucun doute, aider à maintenir le rôle important de stabilisateur économique de ce programme.

Cette modification va conduire à un traitement plus équitable pour les employés à temps partiel par rapport aux employés à temps plein. C'est de plus en plus important dans une économie où un nombre croissant de gens ne peuvent que se trouver du travail à temps partiel même s'ils travaillent peut-être, en fait, à temps plein, si on tient compte de toutes leurs heures de travail et tous leurs divers emplois.

Avant de parler de la règle de l'intensité proposée dans le projet de loi C-12, il convient de signaler qu'à compter de 1971, lorsqu'on a apporté des modifications à la Loi sur l'assurance-chômage, on est passé peu à peu d'un programme d'assurance sociale à un système de transferts de revenu caractérisé par un mélange maladroit de paiements de péréquation aux régions et de transferts d'assistance sociale, qui convenait mal dans le cadre d'un programme d'assurance sociale. Je suis persuadée que la règle de l'intensité aidera à refaire de l'assurance-chômage ou de l'assurance-emploi un véritable programme d'assurance sociale.

J'utilise le terme assurance sociale pour parler d'un programme qui couvre contre certains risques, les cotisants en recevant pour leur argent. On ne peut parler de véritable assurance lorsqu'on établit des comptes destinés à faire face à certaines situations, qu'on peut, en fin de compte, utiliser à d'autres fins si les événements assurés ne se produisent pas ou lorsque les cotisations ne servent pas entièrement à couvrir les pertes subies par une personne qui sont attribuables à des risques assurés.

On peut parler d'une véritable assurance lorsque ceux qui sont couverts peuvent, s'ils ont la malchance d'être victimes d'événements assurés, qu'il s'agisse d'un incendie, d'un vol ou de chômage, retirer plus que ce qu'ils ont versé, selon certaines règles établies. D'un autre côté, ceux qui ont la chance de ne jamais subir les événements assurés doivent se satisfaire du fait qu'ils ont joui d'une certaine tranquillité d'esprit sachant qu'ils étaient assurés.

Tous les véritables programmes d'assurance prévoient une certaine fixation de taux particuliers, un ajustement des cotisations en fonction des risques. Fondamentalement, il y a deux formes de fixation de taux particuliers dans la plupart des régimes d'assurance. Ceux qui appartiennent à des groupes à risque plus élevé doivent verser des cotisations supérieures pour la même couverture, comme c'est chose courante dans le domaine de l'assurance-automobile, ou se contenter d'une protection inférieure pour la même prime.

La règle de l'intensité proposée dans le projet de loi C-12 adopte la dernière méthode. Ainsi, on va réduire graduellement le taux de prestations de tous les prestataires qui ont touché plus de 20 semaines de prestations régulières dans les cinq années précédentes. Le taux va baisser de 1 p. 100 pour chaque tranche de 20 semaines de prestations. On a fixé le plancher à 50 p. 100 de la rémunération assurable.

Le taux maximum de prestations aux termes du projet de loi C-12 sera de 55 p. 100 de la rémunération assurable. Je crois que c'est plus qu'équitable. C'est comparable au mode de fixation des taux particuliers qu'on retrouve dans n'importe quel véritable régime d'assurance. Il convient également de mentionner que dans le cadre du programme d'assurance-emploi, tout le monde recommencera à zéro. On ne tiendra pas compte des prestations d'assurance-chômage versées avant le 1er juillet 1996.


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(1655)

Le programme actuel ne prévoit pas un calcul en fonction des ressources et il n'est pas financé par des recettes fiscales générales. Il est entièrement financé grâce aux cotisations de ceux qu'il protège et de leurs employeurs. Pourtant, comme le taux de cotisation n'est pas fondé sur les antécédents, il ne s'agit pas vraiment d'un programme d'assurance. En réalité, tous ceux qui sont protégés versent une cotisation fondée sur le même barème.

Ceux qui risquent davantage de devenir chômeurs, parce qu'ils habitent des régions où le taux de chômage est élevé, reçoivent plus, mais ne sont pas moins protégés. Ces gens deviennent admissibles à des prestations d'assurance-chômage avec moins de semaines de rémunération assurable et peuvent continuer à toucher des prestations pendant un plus grand nombre de semaines.

À l'heure actuelle, le programme d'assurance-chômage ne fait pas appel à un calcul fondé sur les ressources ni sur les antécédents. La règle d'intensité y remédie en fixant quelques taux particuliers.

Plutôt que d'exclure une grande partie des travailleurs saisonniers, comme ceux de l'industrie de la construction, comme c'était le cas avant les modifications apportées en 1971 au programme d'assurance-chômage, le projet de loi C-12 prévoit la protection de travailleurs qui risquent fort de devenir chômeurs. Cependant, leur protection diminuerait en fonction des demandes faites au cours des cinq années antérieures. Ainsi, une vaste protection serait maintenue sans que les coûts du programme augmentent de façon excessive.

Je suis convaincue que la règle d'intensité réussirait à modifier le système actuel pour en faire un vrai programme d'assurance plus équitable. Bien sûr, un grand nombre de ceux qui occupent des emplois temporaires ne peuvent vraiment pas trouver d'autres emplois.

Les Canadiens ont montré à maintes reprises qu'ils étaient prêts à faire des sacrifices personnels pour assurer une aide financière aux plus démunis. C'est pourquoi le projet de loi C-12 renferme des dispositions à cet égard. Pendant jusqu'à trois ans, ceux qui auront épuisé leurs prestations auront accès à des prestations d'emploi, telles que des subventions salariales, des suppléments de rémunération, des incitatifs au travail autonome et des prêts aux fins de formation.

Les spécialistes ont examiné tous les aspects de fonctionnement de l'ancien système d'assurance-chômage. Ils savent que ce système peut modifier le comportement des employeurs et des employés de diverses façons que les Canadiens n'acceptent plus de nos jours. Le projet de loi C-12 est une bonne mesure législative qui s'attaque aux défauts de notre système.

Après 25 ans de statu quo, il est temps que les Canadiens aient un système d'assurance-emploi qui reflète mieux les réalités des années 1990 et au-delà.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le président, encore une fois, c'est un triste moment dans la vie d'un député d'avoir à se lever en cette Chambre pour prendre la parole sur un projet de loi qui aura un effet aussi dévastateur sur la vie de nos concitoyens. On l'a dit à nombre de reprises, il nous faut encore le répéter aujourd'hui, aujourd'hui est un jour triste. Les gens ne connaissent pas encore assez les conséquences et c'est ce qui me surprend. C'est un outil de stabilisation économique, l'assurance-chômage. On va l'appeler par son nom. C'est quelque chose de nécessaire et d'utile pour la majorité des circonscriptions. Je pense que ce n'est pas pour rien qu'elle fut inventée au Canada.

Comment faire pour que les gens comprennent? Comment faire pour s'assurer que les députés d'en face comprennent lorsque viendra le temps de voter ces motions, cette loi? Comment faire pour s'assurer que les gens comprendront toute l'importance qui est en jeu? La députée d'en face, pour avoir pris quelques bribes de son discours sur ce groupe de motions, parlait d'un programme qui n'avait pas été changé depuis 25 ans. Je peux peut-être être d'accord avec certains points, on aurait peut-être dû commencer à changer certaines choses. Cependant, de changer d'une façon unilatérale et de la façon dont ça s'en va, c'est juste en faveur des coffres du gouvernement que cette réforme va s'appliquer. Comment ne pas s'étonner que l'opposition crie? Comment ne pas s'étonner que certaines circonscriptions, qui ont à vivre avec un problème plus grave de chômage crient? Il ne faut s'étonner que ces gens crient.

(1700)

Comment se fait-il qu'ici, dans cette Chambre des communes, dans ce Parlement-nous avons pourtant en face de nous des gens instruits-on soit incapables de leur faire comprendre cela?

J'ai peine à croire et je n'ai pas hâte de voir l'incidence que tout cela aura. Nous avons l'assurance-chômage telle qu'existe présentement, et nous avons les problèmes. J'aimerais qu'on me le redise, mais où voit-on dans ce projet de loi que les gens seront vraiment assurés d'avoir un emploi? Ce n'est qu'un jeu de mots. On n'a fait que du maquillage afin d'introduire les mesures pour réduire les sommes versées aux prestataires et la durée pendant laquelle elles leur seront versées.

Comme on l'a dit, tout le monde sera touché. Je viens d'un comté éloigné, la Gaspésie. En passant, je pense que c'est la plus belle partie du Québec et du Canada, le plus beau comté. Il n'y a pas que les gens qui vivent de la mer et de la forêt qui seront touchés par cela, les gens qui travaillent dans le domaine de la construction, qu'ils soient à Montréal ou à Toronto, vivent aussi une certaine fluctuation dans leur domaine du travail, et ils seront gravement touchés par cela.

Je peux vous donner un exemple à ce sujet. Une personne qui travaillera dans le domaine de la construction, avec ce nouveau projet de loi, tentera de grouper le plus possible ses heures ou ses semaines de travail dans un temps donné, parce que si elle ne fait pas attention à cela, le montant des prestations qu'elle recevra lorsqu'elle ne sera pas au travail, c'est-à-dire lorsqu'elle sera sur l'assurance-chômage, ou l'assurance-emploi, sera réduit.

Cela aura pour incidence que les gens ne voudront travailler que dans les périodes où cela fera leur affaire, mais pas nécessairement lorsque le client en aura besoin. Un client peut avoir besoin de faire


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réparer une poignée de porte un samedi matin à Montréal, mais oh! malheur, on est au mois de février et ça ferait plus l'affaire du type s'il pouvait arranger la poignée de porte au mois de mai, parce que cela pourrait être additionné aux heures de travail qu'il effectuera durant l'été. C'est juste pour donner un exemple.

Je sais que ce groupe de motions en parlent et n'en parlent pas. J'essaie de voir où, dans les définitions, on y fait référence. Mais la définition à savoir comment les heures seront comptées-quand il s'agira, par exemple, des pêcheurs-cela sera fait par règlement. C'est juste pour vous dire que c'est non transparent comme processus à l'heure actuelle. Il est compréhensible que l'opposition veuille avoir le plus de temps possible pour en discuter et que la population aussi veuille avoir le plus de temps possible pour l'étudier.

Je voulais vous donner des exemples en ce qui concerne les pêcheurs, les travailleurs autonomes ou les bûcherons. Dans la loi actuelle, on parle d'un calcul en termes de nombre de semaines. Les gens par chez nous sont habitués à arriver avec un volume de travail quantifiable. Tu peux le toucher. Un bac de poisson, ce n'est pas un nombre d'heures, mais c'est à partir de cela que tu fais ta paye et c'est avec ça que tu vas aller réclamer tes prestations à la fin de l'année. Le bûcheron a bûché une corde, dix cordes, vingt cordes de bois; c'est tangible, encore une fois, on peut le toucher. Comment tout cela se traduira-t-il en termes d'heures, quand ça arrivera?

Dans les définitions, dans les règlements actuels, on ne traite pas de cela. On dit que ça s'en vient. Ça s'en vient assez vite que ça va nous passer sur le corps et on ne l'aura pas vu venir. Les gens sont en droit-parce que c'est leur vie à eux qui sera affectée-de connaître les tenants et aboutissants, comment tout cela sera comptabilisé.

Madame la Présidente, je sais que vous provenez vous aussi d'une région où les gens travaillent en forêt. Vous savez que les gens travaillent fort. Mais je ne les vois pas souvent se promener avec un calepin et dire: «Hey, boss, j'ai fait une heure dans cette «bunch».» Non. Ils vont dire: «J'ai coupé tant de volume de bois.» Est-ce qu'il va y avoir des effets de conversion? Comment tout cela va-t-il se calculer? Je ne le sais pas. La grande majorité des gens ne le savent pas.

(1705)

Mais ce qu'ils commencent à comprendre, ce sont les impacts de telles coupures. On nous indique tout de suite qu'il y aura un diviseur qui aura pour effet de diminuer la valeur des prestations. En quoi cela est-il bon pour les concitoyens de se faire plumer ainsi?

Je me serais attendu d'un projet de loi d'une aussi grande importance qu'il aille chercher le partenariat, la collaboration du public. On leur dit en partant: «Vous allez obtenir des prestations de chômage pour moins longtemps; votre prestation va être moins élevée; et si vous y avez recours un peu trop souvent, vous allez vous faire taper sur la tête et vous aurez une autre pénalité.»

Tous ces phénomènes ne nous laissent pas grand-place, ne nous laissent pas grand coeur à l'ouvrage pour essayer de modifier ce projet de loi. C'est pourquoi, avec le groupe de motions à l'étude, on voudrait recommencer tous les projets de définition qui sont là-dedans. Il n'y a rien qui cherche à sécuriser les gens. Il n'y a rien là-dedans qui cherche à dépeindre ce qui pourrait se passer pour eux, ce qui pourrait les protéger. Non. Tout va à sens unique, c'est-à-dire dans la poche du gouvernement.

Les gens, quand ils se promènent, quand ils ont fini de travailler, quand ils ont besoin d'aller acheter quelque chose, ils ne peuvent pas se virer de bord et aller piger dans la poche de quelqu'un, eux. Ils ont travaillé, ils ont appris à apprivoiser le manque d'emploi qu'il y a chez eux, ils ont appris à arrondir leurs fins de mois avec le système d'assurance-chômage et du jour au lendemain, on voudrait tout changer et leur faire croire qu'en plus, ce sera bon pour eux, alors qu'en partant, on sait qu'ils vont recevoir moins. Je ne peux comprendre.

Je l'ai mentionné la semaine dernière, j'ai retrouvé la citation et j'aimerais vous en faire part encore. La personne que j'avais en face de moi auparavant, l'ex-ministre des Pêches, M. Tobin, est sorti de son silence la semaine dernière. Le 1er mai, il a fait une déclaration. Il disait au premier ministre «plus de compressions, s'il vous plaît». Il est très poli, mais il lui a quand même demandé de ne plus faire de compressions. Il disait ceci: «Nous avons encaissé une part disproportionnée des coûts en raison de notre dépendance disproportionnée aux paiements de transfert fédéraux, mais là, nous avons atteint notre limite.» Le meilleur ami du premier ministre avertit son ami, pendant qu'ils sont encores amis: «Assez, c'est assez!» Nous sommes durement touchés parce qu'on manque d'emplois et en plus, on va pénaliser les gens qui sont victimes de ce manque d'emploi?

La seule chose que je peux déplorer à ce sujet, c'est pourquoi a-t-il fallu attendre le départ du député de Humber-Sainte-Barbe-Baie Verte? Pourquoi a-t-il fallu attendre qu'il quitte la vie parlementaire à Ottawa pour revenir dans des termes beaucoup plus compréhensibles? Là, il est premier ministre de sa province, il voit le fléau du manque d'emploi affliger sa population et il dit: «Ce n'est pas correct, ce qui est en train de se passer à Ottawa.»

Mais il n'est plus ici. Est-ce que je vais attendre qu'il y ait d'autres gens qui partent pour avouer cette chose-là? Le mal va être fait. On nous a imposé une motion d'attribution de temps. Chez nous, cela veut dire le bâillon. Que les gens à la maison ne s'y trompent pas, ça veut dire le bâillon. On nous oblige à nous contenir, à ne pas discuter plus longtemps d'un projet qui va toucher aussi profondément la société canadienne et québécoise.

On nous dit: «Yvan, tais-toi, tu as assez parlé.» Alors que les gens qui avaient le pouvoir de parler, maintenant qu'ils ne sont plus dans cette Chambre, ils disent: «Ce n'est pas correct ce qu'on est en train de faire. Assez, c'est assez!»

J'espère qu'il y aura des collègues d'en face qui vont se lever, qui n'attendront pas leur départ de la vie parlementaire à Ottawa et qui vont dire au très honorable premier ministre: «Nous ne pouvons aller de l'avant avec cette réforme. Nous nous devons de trouver un partenariat avec l'opposition, avec les groupes d'associations et nous devons rebâtir ce système dans la confiance, dans la dignité.» Présentement, avec les prémisses qui sont sur la table, le gouvernement ne fait que se servir.


2384

Sur cette base-là, je ne pourrai accorder mon appui à cette loi et je vais encore me lever en cette Chambre, aussitôt que les autres motions le permettront, pour faire part de mon objection.

(1710)

[Traduction]

M. Larry McCormick (Hastings-Frontenac-Lennox and Addington, Lib.): Madame la Présidente, je suis très heureux de pouvoir de nouveau commenter le projet de loi C-12, qui instaure un nouveau système d'emploi au Canada.

J'ai eu grand honte du comportement que certains de mes collègues d'en face ont adopté au cours des audiences du Comité du développement des ressources humaines. Pendant deux ans et demi, nous avons parcouru le pays et écouté plus d'un millier de personnes et de groupes. Nous étions là, et le projet de loi reflète une grande partie des points de vue que nous avons entendus.

Je me souviens de mon passage en Alberta. Bien sûr, nous étions peut-être un peu fatigués à la fin de journées de 12 à 15 heures. Nous avons eu aussi des témoignages impromptus: des témoins pouvaient comparaître à l'improviste devant le comité. Nous, libéraux, étions disposés à écouter.

Des témoins avaient les larmes aux yeux. Il n'y avait pas de journalistes sur place. Ces témoins n'essayaient d'impressionner personne. Ils demandaient de l'aide.

Demain, on déposera en Ontario un budget réformiste. Ce budget proposé par l'équipe de Toronto s'attaquera, tout comme on l'a fait en Alberta, à ceux qui travaillent, ou à ceux qui pensaient avoir du travail.

M. Mills (Red Deer): L'Alberta est fière d'avoir un budget équilibré.

M. McCormick: Il y a beaucoup de fierté en Alberta, oui, mais j'ai des voisins en Ontario. J'ai des amis en Alberta qui ont enseigné pendant cinq ou six ans. Ils se sont dévoués entièrement à leur travail. Aujourd'hui, ils ne sont plus là. Nous ne faisons rien pour les enfants, nous n'investissons pas dans notre avenir. Ces méthodes réformistes sont une honte. Dieu merci, nous avons un gouvernement libéral, un gouvernement qui va donner aux gens le moyen de se débrouiller.

La partie II du projet de loi prévoit de nombreuses prestations destinées à aider les gens. L'ancien ministre du DRH venait de la région de Winnipeg. Je me souviens qu'au sein du comité certains de mes collègues libéraux m'ont lancé des regards désapprobateurs et que des députés réformistes m'ont applaudi quand j'ai dit que certains abusaient du régime.

Finalement, voici ce que j'ai dit à l'ancien ministre: «À mon humble avis, si vous voulez faire accepter notre projet à la population, il faudrait au moins reconnaître qu'il y a des abus.» Le ministre l'a maintenant reconnu.

En enrayant les abus, nous pourrons réorienter les sommes ainsi économisées au profit de ceux qui veulent s'aider. Dans toutes les provinces canadiennes, 45 p. 100 des laissés pour compte-il y en a-sont nos amis et nos voisins. Si ces personnes ont travaillé un jour au cours des trois dernières années, si elles ont un poste d'attache, cinq jours après la naissance d'un enfant, elles peuvent maintenant bénéficier d'une des cinq mesures de soutien prévues à la partie II.

Il y a les subventions salariales sélectives. Il ne s'agit simplement d'emplois subventionnés, mais de formation en cours d'emploi qui fera une différence dans leur vie. Cela encourage les gens. Le gouvernement n'imposera pas de compressions au hasard, contrairement à ce que le gouvernement de l'Ontario fera demain.

Il y a des programmes sélectifs de supplément de rémunération et d'aide au travail indépendant. Comme j'ai été un petit entrepreneur, j'ai assisté à certains cours offerts par le MDRH parce que je ne sais pas combien de temps je vais occuper mon emploi actuel.

J'ai vu des personnes qui participaient aux cours en vue de lancer leur propre entreprise. Cela a fait une différence. Les statistiques révèlent que celui qui lance son entreprise emploie habituellement une autre personne. Nous devons donner aux gens la chance de s'aider eux-mêmes.

Il y aura aussi des partenariats en matière de création d'emplois ainsi que des prêts et subventions de perfectionnement. Je dis aux députés d'en face que les provinces pourront effectivement prendre les décisions qui s'imposent.

J'ai entendu bien des personnes dire à tort que le fonds de réserve servira à payer une partie du déficit. Comme nous le savons tous, la loi ne le permet pas. À long terme, cela ne fera aucune différence en ce qui concerne le déficit. Ce fonds est un élément essentiel du projet de loi.

(1715)

L'autre jour, le ministère nous a présenté un tableau montrant les frais d'intérêt cumulatif. Plus de un milliard de dollars ont été prélevés dans la caisse de l'assurance-chômage pour rembourser des déficits entre 1991 et 1995. En comparaison, il a fallu prélever plus de deux fois ce montant, soit 2,3 milliards de dollars, après la récession précédente, au début des années 1980. Il est tout à fait logique d'avoir un coussin pour être prêts à affronter une nouvelle récession, s'il y en avait une, et cela créera des emplois.

Nous avions entendu de nombreux témoins. Je veux en citer un parmi les 85 derniers que nous avons entendus. Mme le professeur Alice Nakamura, de la faculté des sciences commerciales de l'Université de l'Alberta, a beaucoup travaillé au projet de loi:

J'ai consacré beaucoup de temps et d'efforts aux travaux du groupe d'étude sur la réforme Axworthy, sur la sécurité sociale. Beaucoup de gens de mon entourage m'ont dit que j'étais folle de faire cela. «Regarde ce qui est arrivé aux tentatives précédentes de réforme», m'ont-ils dit. Je savais de quoi ils parlaient.
Cette femme a consacré temps et efforts aux travaux de la commission royale MacDonald sur les perspectives de développement du Canada. Son témoignage continuait ainsi:


2385

On m'a dit que les différents partis politiques des provinces ne voudraient pas laisser passer l'occasion de jouer de petits jeux partisans, comme c'est invariablement le cas lorsque l'on tente de réformer l'assurance-chômage.
Vous avez fait mentir tous ceux qui m'ont dit que cette réforme était une perte de temps. Le projet de loi C-12 règle beaucoup de problèmes graves de notre régime d'assurance-chômage actuel, il s'appuie sur les meilleurs rapports de recherche disponibles sur le fonctionnement de notre marché du travail et de nos programmes sociaux. Et c'est un projet de loi qui tient sérieusement compte des problèmes de transition réel des travailleurs. Il instaure un juste équilibre entre le désespoir de gens qui ne peuvent pas trouver assez de travail et dont les prestations d'assurance-chômage sont devenues la source de revenu et le désespoir des analystes économiques, qui reconnaissent la menace qui pèse sur notre régime actuel d'assurance-chômage, sur notre économie et sur nos emplois futurs.
Les perspectives de ces sans-emploi sont minces, mais maintenant, beaucoup reprendront espoir. Comme nous le rappelle le professeur, les prochaines générations regarderont les efforts que nous faisons avec une profonde admiration et beaucoup de gratitude.

Beaucoup de gens, provenant de partout au Canada, sont venus témoigner devant le comité. Nous avons entendu des représentants des syndicats. Ils se sont plaints. Ils ont déclaré que nous nous trompions sur beaucoup d'aspects et que nous allions trop loin. Nous avons entendu des représentants d'autres groupes sociaux qui eux, ont déclaré que nous n'allions pas assez loin. Voilà un excellent projet de loi libéral qui prouve que nous avons écouté la population et que nous nous préoccupons de sa situation. Nous ne nous occupons pas seulement de la population d'une province.

Ce ne serait pas juste pour mon collègue. Je tiens à dire que les députés bloquistes qui font partie de notre comité depuis deux ans et demi ont participé activement à ses travaux. Je les ai vus écouter avec intérêt jusque tard en soirée des témoins des dix provinces, des deux territoires et de l'Arctique de l'est.

Il y a aussi un tiers parti à la Chambre. Je n'irai pas jusqu'à dire que les députés de ce parti n'étaient pas présents aux audiences. Je ne crois pas cependant qu'il soit louable, lorsqu'on participe à des audiences à la grandeur du pays, d'y être pendant une heure ou deux chaque jour et d'aller ensuite faire campagne dans les rues et tenir des conférences de presse. Une telle attitude est très honteuse.

Fort de mon expérience de la petite entreprise, j'ai pris le temps d'examiner le projet de loi. Il s'agit d'une bonne mesure. J'ai parcouru beaucoup de chemin en fin de semaine dernière. J'ai parlé à beaucoup de monde, notamment des gens de la petite entreprise, au sujet de la TPS. J'aurais voulu que nous allions plus loin au sujet de cette taxe, mais comme le disait le ministre des Finances, si nous commettons une erreur et que cela nous fait perdre de l'argent, nous ne pourrons par réduire le déficit de façon aussi constante que maintenant.

Les taux d'intérêt canadiens constituent une véritable aubaine à l'heure actuelle et ils nous permettent de créer des emplois. La faiblesse des taux d'intérêt redonne espoir au marché. Des amis me disaient qu'ils ne voudraient pas avoir d'entreprise parce qu'il y a trop de paperasse.

Une fois que M. Harris aura déposé son budget de réforme demain, je suis sûr qu'il commencera à réfléchir aux bons moyens d'aider sa province. Dans le cas de la TPS, l'harmonisation de cette taxe permettra de réduire la paperasse de moitié.

(1720)

Ce projet de loi fait beaucoup pour les petites entreprises. Le relevé d'emploi, ce formulaire d'une page dont je parlais l'autre jour, est accompagné d'un manuel d'instruction de 30 pages sur la manière de remplir le formulaire. Désormais, ce ne sera plus nécessaire. Il sera remplacé par des relevés simples sur lesquels le contenu des feuilles de paye courante pourra être inscrit et comptabilisé pour les fins de rapport. Cela constitue un progrès important.

Il n'est pas étonnant que le projet de loi ait reçu l'appui des chambres de commerce et de nombreux groupes d'entreprises de partout au Canada. Encore une fois, il est regrettable que les députés des partis d'opposition se fassent un devoir de faire de la désinformation à ce sujet. J'aurais voulu que, pour une fois, le deuxième parti et surtout le tiers parti appuient une mesure législative qui est bonne pour notre pays et ses habitants et qu'ils donnent une chance à ces derniers.

Par ce projet de loi nous donnons aux gens un moyen de s'aider eux-mêmes. Que pouvons-nous faire de plus? Les gens veulent faire partie de la population active. Ils veulent sentir qu'ils contribuent au bien-être de leur pays. Ce projet de loi concernant l'assurance-emploi le leur permettra.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le vote porte sur la motion no 4. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

Le prochaine mise aux voix porte sur la motion no 201. Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.


2386

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

Nous entamons maintenant le débat sur le groupe de motionsno 4.

[Traduction]

M. Nault: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Le groupe no 3 comporte trois autres amendements que vous n'avez pas mis aux voix, soit les motions nos 5, 6 et 200.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): En raison de la manière dont les motions ont été groupées, nous ne pouvons pas voter sur ces amendements parce que la motion no 4 n'a pas été mise aux voix.

Nous passons maintenant au débat sur le groupe no 4 composé des motions nos 7 et 8.

[Français]

M. Chris Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing, NPD) propose:

Motion no 7
Qu'on modifie le projet de loi C-12 par suppression de l'article 3.
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ) propose:

Motion no 8
Qu'on modifie le projet de loi C-12, à l'article 3, par substitution, aux lignes 12 à 44, page 4, et lignes 1 à 3, page 5, de ce qui suit:
«7. Le paragraphe 26(8) de la Loi sur l'assurance-chômage est abrogé.»
-Madame la Présidente, nous avons entendu beaucoup de discours de la part des députés d'en face qui, après avoir été d'accord pour nous limiter le temps, ont décidé de répondre à nos arguments parce qu'ils voient à quel point ce projet de loi est indéfendable quand on l'explique.

(1725)

Je viens d'entendre que ce projet de loi aide les gens à s'aider. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre! La Partie II prévoit des prestations d'emploi dans cinq programmes, oui. Ce que ne disent pas les collègues d'en face, c'est qu'il n'y aura, sur cinq ans, que 200 millions de dollars de nouvel argent et que ces dispositions visent principalement à faire payer par la Caisse de l'assurance-chômage des programmes d'employabilité qui sont déjà aujourd'hui payés par le Fonds consolidé du Trésor. Alors, c'est absolument inacceptable d'entendre une telle interprétation. Ce n'est pas conforme à la vérité des faits.

La vérité des faits, c'est que le compte d'assurance-chômage va payer pour des activités d'employabilité qui sont actuellement payées par le Fonds consolidé du Trésor et cela va faire une économie de plus et cela fera diminuer le déficit. Oui, des sommes vont être détournées de la Caisse de l'assurance-chômage vers les prestations d'emploi, mais ce n'est pas en supplément de ce qui se fait maintenant, c'est en remplacement. Il n'y aura que 200 millions de dollars de nouvel argent, pigés aussi dans la Caisse de l'assurance-chômage.

Quand on dit que ce projet de loi va aider les gens à s'aider, il ne faut pas raconter de telles choses aux gens. Il faut ajouter, en plus, que dans la situation actuelle, personne n'a droit que ce soit à la formation ou au programmes dits d'employabilité, parce qu'il n'y a aucun recours possible sur le fait qu'on vous refuse ou non un cours qui est disponible, qui est donné dans le cadre des programmes de formation. On peut refuser de vous aider à vous aider et vous n'avez même pas le droit minimum d'appel prévu dans la loi.

Or, de ce droit d'appel, les juges arbitres et des juges de la cour d'appel fédérale disent que c'est un recours extrêmement inefficace. Par exemple, la juge arbitre Reed dit: «En fait, les juges arbitres ne voient sans aucun doute qu'un nombre infime de ces erreurs, parce que la plupart des prestataires ne porteront jamais plainte devant un conseil arbitral, encore moins devant un juge arbitre.» Ce qui est difficile à accepter cependant, c'est que ce sont les prestataires qui supportent le poids des erreurs de la commission.

Or, dans ce cas au moins, les prestataires ont la possibilité d'avoir un recours, que la juge dit être inefficace parce que les juges et les cours arbitrales ne peuvent renverser la décision et faire qu'ils ne peuvent que demander à la commission de revoir sa décision, mais au moins, ils peuvent faire revoir justement cette décision. Même si c'est un recours minimal, les gens qui veulent avoir des cours de formation n'ont même pas ce recours minimum. C'est la nature de l'amendement que nous avons fait au projet de loi à l'étude. Il n'est pas question de se faire dire qu'il faudrait faire des amendements à cette loi moderne. Ce n'est pas une loi moderne. C'est une loi qui vise à exclure davantage de monde des prestations, qui vise à exclure davantage de gens et un député d'en face, le député de Notre-Dame-de-Grâce, l'a reconnu. Non, ce n'est pas un projet de loi qui vise à faire en sorte que plus de personnes aient accès à l'assurance-chômage.

Quand on dit que 90 000 personnes de plus seront couvertes, qu'est-ce que ça veut dire? Cela veut dire que la seule chose dont ces personnes vont être certaines, c'est qu'elles vont payer des cotisations. C'est la seule chose dont elles seront assurées.

(1730)

J'ai entendu dire aussi que ce projet de loi favorisait les PME, les petites et moyennes entreprises, qui, on le sait, sont plus créatrices d'emplois. Là aussi, il ne faut pas avoir lu et cherché à comprendre le projet pour dire cela, parce qu'au contraire, les petites et moyennes entreprises sont celles qui passent à la caisse, et j'oserais dire en québécois qui passent au «cash», et c'est au sens propre, alors que les grandes entreprises se voient donner un cadeau, parce qu'elles ont un cadeau de cotisations complètes pour leurs travailleurs de 39 000 $ à 42 400 $. Il y a un cadeau aux travailleurs qui, actuellement, paient des cotisations jusqu'à 42 400 $. Désormais, ça s'arrêtera à 39 000 $. C'est absurde, c'est insensé.


2387

Qui paie ce cadeau? Justement, les travailleurs de zéro à 15 heures qui, actuellement, ne paient pas de cotisations, qui n'ont pas accès non plus à l'assurance-chômage, c'est vrai, et leurs entreprises qui ne paient pas de cotisations pour eux, c'est vrai. Mais là, les entreprises vont payer des cotisations, les travailleurs vont payer des cotisations, mais le problème, c'est que la plupart d'entre eux n'auront pas accès vraiment à l'assurance-chômage.

Si le gouvernement avait voulu rendre accessible l'assurance-chômage, les prestations, une aide pour les travailleurs de zéro à 15 heures, il n'aurait pas triplé les conditions d'accès pour les gens qui reviennent sur le marché du travail et plus que doublé pour les gens qui sont déjà sur le marché du travail. On profite du système des heures, en prétextant qu'on couvrira plus de gens, pour en réalité couper l'accessibilité. Alors oui, on va les faire payer. C'est la seule assurance qu'ils ont, mais profiter d'un pont entre deux emplois, non. Là, c'est autre chose.

Il y a une tendance dans cette loi qui est extrêmement inquiétante aussi, parce qu'en fait les gens qui travaillent de zéro à 15 heures seront incités à occuper deux emplois. D'ailleurs, tout le monde est incité à occuper deux emplois. Alors que d'une façon générale, dans le monde, on cherche à faire en sorte de limiter la semaine de travail, de la réduire, de faire en sorte que les travailleurs partagent le travail, ce projet de loi incite au double emploi, récompense le double emploi, récompense les heures supplémentaires.

Mais je veux ajouter quelque chose, et ça, ça sera dramatique pour plein de gens. Il faut savoir que quand quelqu'un occupe deux emplois et qu'il a derrière lui des semaines d'emploi assurables, si cette personne quitte un des deux emplois, elle perd immédiatement toutes les semaines d'emploi assurables accumulées jusque-là, même si elle était sur le point ou même si elle avait parfaitement droit à des prestations d'assurance-chômage.

Elle quitte volontairement un seul emploi et elle perd ses conditions d'admissibilité sur les deux. Elle doit recommencer à zéro. En 1990 et en 1993, les libéraux ont déchiré leur linge parce que les conservateurs ont imposé l'exclusion totale des bénéfices pour quelqu'un qui quitte volontairement son travail.

Aujourd'hui que font-ils? Non seulement ils endossent ce qu'ils ont vitupéré, ce qu'ils ont dénoncé, mais ils en remettent, puisque désormais quelqu'un qui a deux emplois, quelqu'un qui voudrait se conformer aux exigences doublées de ce projet de loi, s'il quitte un des deux emplois parce qu'il n'est plus capable, s'il quitte un des deux emplois parce que, quelle que soit la raison, sauf celles qui sont comprises dans le texte, quand c'est un départ volontaire-puis on sait que le fardeau appartient à ces travailleurs et travailleuses-à ce moment-là, il perd toutes ses semaines d'emploi assurables. C'est un vrai scandale. Je m'arrête là, mais vous comprenez que l'abondance de mon coeur continuerait longtemps.

(1735)

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Madame la Présidente, la responsabilité des députés de cette Chambre de répondre aux vrais besoins des Canadiens et des Canadiennes est une chose que tout député devrait prendre très au sérieux.

Pendant la campagne électorale, les électeurs nous ont fait prendre conscience des grands besoins, de la misère, de la souffrance de l'individu qui se retrouve face à une situation où les paies n'entrent plus dans un foyer. Pour nous, les députés de cette Chambre, qui avons participé à des débats politiques au niveau local, nous connaissons très bien la souffrance. Pour cette raison, il est très important que tous les députés de cette Chambre prennent au sérieux l'amélioration proposée pour le destin de ces individus.

J'ai été membre du Comité du développement des ressources humaines où on discute de ce sujet depuis très longtemps. Je veux féliciter les membres de ce comité pour tout le travail qu'ils ont accompli, surtout ceux qui ont apporté des suggestions. D'après le ton des propos des députés de l'opposition, c'est presque intégrer la misère d'un peuple à une situation politique qui n'a rien à voir avec ça.

C'est tragique et c'est regrettable que des personnes aient tellement à coeur leur avenir politique qu'elles mettent en jeu le destin des personnes qui connaissent de sérieuses difficultés.

[Traduction]

Si l'on a renvoyé le projet de loi C-12 au comité après la première lecture, c'était pour donner une chance réelle de trouver des améliorations réalisables sans manquer aux objectifs du projet de loi. Le comité a fait un excellent travail. Il s'est attaché à un élément particulier, soit les conséquences pour les travailleurs des localités qui dépendent d'industries saisonnières.

Le ministre et les membres du comité ont constaté les nombreux avantages que présentaient pour ces travailleurs saisonniers le passage à un calcul basé sur les heures plutôt que sur les semaines, le recours à des moyens comme le supplément de revenu familial pour mieux aider les travailleurs à faible revenu ayant une famille à faire vivre, ainsi qu'une gamme de mesures innovatrices. À elles seules, ces mesures permettront à 45 000 personnes de recevoir des prestations auxquelles elles n'avaient pas droit en vertu de l'ancien régime, et 270 000 travailleurs auront ainsi des prestations accrues. Bon nombre d'entre eux travaillent dans des industries saisonnières.

Les membres du comité ont aussi cerné trois enjeux qui sont au coeur des préoccupations exprimées par beaucoup de Canadiens au sujet de ce pas de géant que nous nous préparons à faire: le traitement des interruptions de rémunération, le calcul des prestations selon la moyenne et l'impact de la règle de l'intensité pour les personnes à faible revenu. Ils ont écouté, ils ont cherché des solutions et ils ont trouvé des idées réalisables qui amélioreront l'équité de ce nouveau programme pour les travailleurs des industries saisonnières.

Dorénavant, les gens pourront déclarer les revenus gagnés au cours d'une période de 26 semaines avant de présenter une demande aux fins du calcul du revenu moyen pour la détermination des prestations d'assurance-emploi. Cela fera augmenter les prestations d'environ 246 millions de dollars, et la plus grande partie de cette somme ira aux travailleurs saisonniers.

On ajoutera deux semaines à la période requise localement pour être admissible aux prestations, aux fins du calcul de la moyenne. Cela fera augmenter les prestations de quelque 95 millions de


2388

dollars pour les travailleurs des industries saisonnières, dans les régions où le taux de chômage est élevé.

La règle de l'intensité ne s'appliquera pas aux personnes qui reçoivent le supplément de revenu familial. Les autres travailleurs qui peuvent trouver du travail d'appoint tandis qu'ils touchent des prestations pourront également accumuler des crédits qui réduiront également l'impact de la règle de l'intensité. Ces mesures augmenteront les prestations d'environ 24 millions de dollars pour les travailleurs à faible revenu.

Les députés ministériels ont écouté les travailleurs saisonniers et ont répondu à leurs préoccupations en apportant des modifications justes et équilibrées qui assureront une application encore plus efficace de cette nouvelle loi.

La réforme de l'assurance-emploi n'est pas une mesure définitive. C'est un processus continu qui permet des rajustements en fonction des réactions. Nous évaluerons les répercussions du système pour les gens. Nous ne nous contenterons pas de vérifier s'ils s'adaptent ou non au système.

Le gouvernement utilisera une série de mesures objectives pour contrôler les répercussions de la nouvelle loi sur les personnes, les employeurs et les collectivités. Il contrôlera le rendement de l'économie et du marché du travail. Il surveillera la façon dont les travailleurs, les employeurs, les industries et les collectivités s'adapteront.

(1740)

Une douzaine de localités du Canada seront choisies pour une étude en profondeur. Elles représenteront différents types de marchés de travail. Certaines seront des grandes villes, d'autres des plus petites. Certaines seront des économies rurales et d,autres, des économies saisonnières.

La commission de l'assurance-emploi surveillera et évaluera de quelle façon les particuliers, les collectivités et l'économie seront touchés par les changements et quel type de rajustement ils devront faire. La commission fera un rapport annuel au Parlement. Le processus de surveillance évaluera dans quelle mesure les particuliers trouvent du travail supplémentaire en vertu du nouveau système et combien d'employeurs fournissent plus de travail. Le ministre du Développement des ressources humaines a déclaré au comité et aux Canadiens que si le projet de loi ne fonctionne pas comme on le prévoyait, on prendrait les mesures correctrices nécessaires.

Cette surveillance permettra de faire une évaluation de la façon dont le nouveau système d'assurance-emploi modifiera le comportement des particuliers, des employeurs et des collectivités. Par exemple, nous savons qu'en vertu de l'ancien système, certaines personnes refusaient parfois un travail qui était disponible, parce qu'en vertu des règles existantes on peut perdre de l'argent, si l'on doit demander de nouveau de l'assurance-chômage après avoir travaillé à un salaire inférieur à celui que l'on avait auparavant. Nous pensons que le nouveau système corrige ces problèmes. Il fera en sorte que le travail soit rémunérateur.

Le ministère nous a donné beaucoup de renseignements de recherche qui laissent entendre que le projet de loi atteindra ses objectifs. Toutefois, la surveillance permettra de s'assurer que ce que nous espérons du projet de loi C-12 se produira effectivement. Il nous permettra également de comparer nos prévisions aux résultats.

En terminant, je voudrais féliciter et remercier les membres du comité qui ont contribué à faire du projet de loi ce qu'il est aujourd'hui. Ce projet de loi aurait pu être présenté à la Chambre plus tôt si le gouvernement avait eu la collaboration de l'opposition.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Madame la Présidente, les amendements à l'étude aujourd'hui reposent sur le mandat qui sera donné à la Commission d'assurance-chômage.

On retrouve là-dedans tout l'esprit de cette loi. C'est pour ça que nous demandons qu'elle soit modifiée. Je vais vous lire rapidement quelques lignes qui donnent très bien l'esprit dans lequel le gouvernement veut que les choses se fassent. On dit:

3(1) La Commission observe et évalue la façon dont les personnes, les collectivités et l'économie s'adaptent aux changements apportés par la présente loi [. . .]
On fait des citoyens des espèces de cobayes. «On va regarder de quelle façon vous allez vivre avec cela mais nous, comme gouvernement, on ne s'impose aucune obligation. On ne prend rien comme responsabilité.» C'est tout l'esprit de la loi qui est dans le mandat donné à la Commission. «Laissez-nous votre bien, on va s'en occuper. C'est vous les employeurs, les employés qui le financez, vous financez à 100 p. 100, mais ce n'est pas grave, on met toutes les obligations de votre côté, nous comme gouvernement on ne prend aucun engagement.» Cela aurait été un très bel endroit pour retrouver un engagement du gouvernement pour dire si les mesures ont vraiment de l'effet sur l'emploi.

Est-ce qu'effectivement la réforme de l'assurance-chômage, dans un an, deux ans, trois ans, aura vraiment porté son nom et permis que les gens aient plus facilement des emplois? Il n'y a aucune obligation de ce type, nulle part dans l'article. Tout ce qu'on fait c'est vérifier comment les gens vont s'adapter. C'est vraiment l'approche bureaucratique. On va prendre des mesures punitives, on va aller voir si les gens réagissent aux mesures punitives et dans un an on pourra dire qu'il y a plus de fraudeurs qu'avant parce qu'on aura encore compliqué la loi pour qu'il y ait encore plus de fraudeurs.

C'est d'une logique qui nous mène à l'absurde parce que la Caisse de l'assurance-chômage est financée à 100 p. 100 par les employeurs et les employés. Eux devraient avoir leur mot à dire là-dedans. Dans cette loi on devrait retrouver quelque chose sur l'emploi. Quand on demande à la Commission de faire rapport au ministre, de faire un rapport annuel de son évaluation et des rapports supplémentaires que le ministre peut lui demander, est-ce qu'il n'aurait pas été normal de dire, ailleurs dans le projet de loi, que le gouvernement va s'imposer des objectifs en ce qui a trait à la lutte au chômage, qu'il va s'imposer des objectifs en ce qui a trait à l'utilisation de la population active, de faire que les gens aient le plus possible d'emplois et la commission fera rapport sur l'efficacité de ces mesures?


2389

Non, ce qu'on retrouve là c'est plutôt comment on aura réussi à suivre les gens. On dit entre autres et je vous donne un exemple: «La façon dont les prestations et autres formes d'aide sont utilisées par les employés et les employeurs, leur effet sur l'obligation des prestataires d'être disponibles au travail et de faire des recherches d'emploi.»

(1745)

Toute la loi repose sur le principe que les gens sont volontairement des fraudeurs. Dans notre société, ce fut prouvé, on a les statistiques, seuls 4 p. 100 des trois millions de personnes ayant utilisé l'assurance-chômage l'an passé ont fait l'objet de fraudes. Regardons dans notre société pour voir si tous les autres projets de loi sur toutes les autres formes de fonctionnement, sur la question de l'impôt par exemple, il n'y a pas plus de 4 p. 100 de fraude. Est-ce que c'est normal de proposer une loi pour aller, de façon délibérée, exagérée, imposer à l'ensemble des travailleurs des règles qui concernent plus particulièrement 4 p. 100 des gens? Est-ce qu'on n'aurait pas pu soumettre une loi qui soit dans une autre logique?

La première place où on aurait eu intérêt à le faire, c'est de définir que la commission puisse donner une voix au chapitre aux employeurs, aux employés, à ceux qui sont touchés par la loi, bref, à tous ceux qui vivent avec la loi. Quand on dit que «la commission évalue la façon dont les personnes, les collectivités et l'économie s'adaptent aux changements apportés», pourquoi n'aurait-on pas inversé le fardeau de la preuve en disant que les gens vont pouvoir venir témoigner et dire comment ils vivent cette réalité?

Aujourd'hui, quand on entend des témoignages comme à la manifestation de Rivière-du-Loup où une jeune femme est venue nous dire que son frère et son conjoint se sont suicidés suite au manque d'emploi et à l'insécurité créée par la réforme de l'assurance-chômage, je pense qu'on a des questions à se poser. On n'est pas juste là pour gérer des millions et des milliards de dollars. On est là aussi pour créer des systèmes qui permettent aux gens d'être le plus heureux possible dans leur vie, d'avoir la chance de gagner leur vie avec un salaire décent pour faire vivre leur famille. Cela fait partie des objectifs qu'on doit avoir comme gouvernement. On n'est pas que des comptables. On est aussi des gens qui doivent s'assurer que les lois permettent le développement des personnes.

Dans ce sens, je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur un nouvel aspect qu'on est en train de passer tranquillement dans la loi. On a décidé que les gens qui refuseraient un programme de formation n'auraient plus droit d'appel. Pensons par exemple à des jeunes qui sont allés à l'école, qui ont réussi à compléter leur cours, qui se trouvent un premier emploi et qui se ramassent devant des situations impossibles. Il n'y a plus d'emplois disponibles dans le domaine dans lequel ils ont été formés. Ils doivent décider s'ils vont accepter un autre programme de formation, s'il va y en avoir de disponibles sur leur territoire ou s'ils vont être obligés d'aller plus loin, et ce qu'on va leur offrir. Si la personne refuse, elle a une pénalité automatique et ce, sans droit d'appel.

On sait que dans une loi complexe comme celle-là, il y a beaucoup de décisions qui sont interprétées différemment d'un fonctionnaire à l'autre, pas parce que le fonctionnaire n'est pas compétent, pas parce qu'il ne connaît pas suffisamment ce dont il parle, mais parce qu'il peut y avoir plusieurs interprétations différentes. Le travailleur de 45 ou 50 ans qui vient d'être mis à pied à cause d'un changement technologique et à qui on offre une formation dans un domaine qu'il ne connaît pas vraiment se fera dire par un conseiller que cette formation lui sera adéquate parce qu'il y aura possiblement un emploi en bout de ligne.

Un travailleur de 45, 50 ou 55 ans qui vient de perdre un emploi et qui, finalement, a besoin de l'assurance-chômage, n'a peut-être pas besoin d'une formation pointue, mais plutôt d'une formation qui lui permettra de faire face au marché du travail, de voir ce qui s'en vient devant lui et quels choix il aura à faire. On lui dira: «Bon, tu as travaillé tout le temps dans le domaine de la construction, mais le domaine dans lequel il y aura de l'emploi disponible à l'avenir, c'est le tourisme; alors, il faudrait que tu ailles suivre un cours de 52 semaines en tourisme.» Cette personne, qui n'a pas nécessairement été dans ce secteur, qui se fait dire ça et qui pense qu'elle n'a pas nécessairement tout ce qu'elle faut pour aller là-dedans, qu'elle aimerait mieux y penser un peu plus longuement pour regarder s'il n'y a pas d'autres programmes ou autre chose qui l'intéresse plus, va se ramasser devant une situation où elle n'aura pas le droit de dire non.

C'est de plus en plus l'État directeur qui va bouger les personnes comme si elles étaient des pions sur un jeu d'échec pour, par exemple, compléter un cours de formation. Si nous, dans nos bureaux de député, on n'a pas entendu parler que ça prenait une quinzième personne pour compléter un groupe afin que le cours puisse être donné, est-ce que le conseiller, à ce moment-là, ne pourrait pas se trouver dans une situation où, vu qu'il n'y a que 14 personnes pour faire démarrer le cours, même si le quinzième n'est pas ajusté tout à fait en termes de formation avec ce qu'il devrait faire selon ses capacités, mais pour pouvoir démarrer le cours, pour que les 14 autres aient leur formation, le conseiller l'oriente de ce côté-là?

(1750)

D'après la loi, la personne n'aura pas le choix d'aller ailleurs car, si elle refuse, elle sera pénalisée sans qu'il n'y ait de droit d'appel. On aura d'autres personnes qui viendront cogner à notre porte à cause d'une législation qui n'aura pas permis de régler ce genre de situation.

Dans l'article 3, quand on dit que

La Commission observe et évalue la façon dont les personnes, les collectivités et l'économie s'adaptent aux changement apportés par la présente loi aux programmes. . .
cela veut dire que la Commission aura beaucoup de choses à surveiller. Il y a beaucoup d'aspects humains. Il y a beaucoup de variables dans ce projet de loi. Il aura des effets secondaires importants et beaucoup d'effets imprévisibles.

Ne prenons que le changement pour passer d'un système qui calcule en nombre de semaines à un système qui calcule en nombre d'heures. Est-ce que ce changement sera bon? Est-ce qu'il permettra réellement à plus de gens d'être admissibles, comme le prétend le gouvernement? N'y a-t-il pas d'effets secondaires qui, par exemple, à cause de l'exigence de 910 heures pour les nouveaux arrivants, à cause du nombre d'heures accru comparativement à l'ancien système, vont pousser les gens de façon systématique vers l'aide sociale?


2390

N'y aura-t-il pas une pression accrue sur les paiements de transfert? Est-ce que ça ne mènera pas, de plus en plus, vers une situation absurde où on aura un Régime d'assurance-chômage qui accumule des surplus, mais qui forme de moins en moins les prestataires et qui donne de moins en moins de services à ceux qui en ont besoin?

Ce n'est pas avec le mandat confié à la Commission dans l'article 3 qu'on va parvenir aux résultats escomptés. Pour le faire, il faut trouver une façon pour que le Parlement soit saisi directement des rapports de la Commission pour être certain d'évaluer le fond de la question.

On n'a qu'à se souvenir des nombreuses études qui ont été faites, on parle de 26 études sur la question de l'employabilité des travailleurs saisonniers. On est allé les chercher goutte à gautte. Le gouvernement a mis sur la table les études qui l'intéressaient, mais il y en a plusieurs qu'on n'a jamais eues.

En conclusion, il sera très important de s'assurer que la Commission ait un mandat clair et qui ne soit pas qu'une photo des effets financiers de la réforme, mais une évaluation réelle des impacts de la l'emploi. C'est pour ça qu'on invite le gouvernement à accepter l'amendement qu'on propose.

[Traduction]

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Madame la Présidente, à propos des motions présentées dans ce groupement, j'ai prêté une oreille très attentive, tout comme je l'ai fait l'autre jour, au discours de la porte-parole du Bloc en matière de développement des ressources humaines. J'espérais que les députés d'en face feraient valoir quelques arguments sensés en faveur des amendements qu'ils proposent à cette partie du projet de loi. Malheureusement, leurs arguments faisaient défaut.

Nous sommes des gens sensés de ce côté-ci de la Chambre. Nous écoutons les arguments sensés. Comme je l'ai mentionné l'autre jour, nous avons été sensibles aux arguments raisonnables qui ont été présentés au comité et des modifications majeures ont été apportées au projet de loi. Plusieurs problèmes ont été réglés. Le projet de loi a été grandement amélioré et répond beaucoup mieux aux besoins des travailleurs saisonniers et des régions.

Dans son intervention, la députée de Mercier a dit que le droit aux prestations était amputé. Je voudrais rappeler certains chiffres que d'autres et moi avons cités l'autre jour. Le fait est qu'un plus grand nombre de travailleurs à temps partiel bénéficieront du régime: ce sont 500 000 travailleurs de plus qui verront leurs gains d'emploi assurés. Les 45 000 travailleurs saisonniers qui n'avaient pas droit à des prestations d'assurance-chômage, même s'ils payaient des cotisations, pourront désormais obtenir l'assurance-emploi. Le régime fondé sur les heures est bénéfique. Selon le régime actuel, dans les régions où le taux de chômage est élevé, on a beau travailler 45 heures par semaine, on ne devient pas admissible aux prestations d'assurance-chômage, même au bout de neuf semaines de travail consécutives.

Ce projet de loi vise vraiment à accroître le droit aux prestations des personnes qui accéderont au système. Je tiens à ce que la députée de Mercier le comprenne bien.

(1755)

Ce qui m'a enquiquiné le plus, c'est l'argument que la députée a avancé en prétendant que le projet de loi était un cadeau aux grandes entreprises. Tous ceux et celles qui ont siégé au comité, dont des députés d'en face, se rappellent sans doute les propos des grandes sociétés, de la Chambre de commerce du Canada, etc. Ces sociétés n'ont sûrement pas considéré ce projet de loi comme un cadeau. Leurs préoccupations, c'était que le régime comportait peut-être trop d'avantages pour les moins bien nantis et les industries saisonnières.

Penchons-nous un instant sur le maximum de rémunération assurable dont la députée a parlé l'autre jour. On réduit le maximum de rémunération assurable pour que cette rémunération corresponde davantage à la moyenne des salaires dans l'industrie. C'est tout à fait sensé. Lorsque le régime d'assurance-chômage est entré en vigueur pour la première fois, la rémunération assurable maximale était au niveau du salaire moyen dans l'industrie, mais elle l'a dépassé au fil des ans. Il faut la ramener au niveau pertinent. C'est exactement ce que fait ce projet de loi.

On procède graduellement, de façon équilibrée, pour que les gens ne soient pas indûment touchés. En limitant cette rémunération à 39 000 $, elle tombera alors à environ 17 p. 100 du salaire moyen en l'an 2000, au lieu d'être d'environ 47 p. 100 supérieure.

Les gens de ma région ne peuvent comprendre que certains ne puissent vivre avec plus ou légèrement plus de 40 000 $ par année et qu'ils aient besoin de prestations d'assurance-chômage à ce niveau.

Le projet de loi essaie de remédier à cette situation et de mieux équilibrer le système. Il est vrai que certains Canadiens à revenu élevé et leurs employeurs verseront des cotisations moindres, mais cela entraînera également des économies importantes, étant donné que ces travailleurs recevront beaucoup moins sous forme de prestations.

Il faut se rappeler qu'en réduisant les prestations aux échelons les plus élevés, on parvient à un meilleur équilibre dans le système. Les gens qui ont besoin du régime dans les industries régionales peuvent continuer d'en profiter. Je perçois cela comme une amélioration importante que les gens me réclament.

Je déteste accuser les bloquistes de faire diversion dans le cadre de ce débat, mais je dois le faire. Ils disent qu'il n'y aura pas d'appel pour les programmes de formation. Ils essaient de rejeter le projet de loi en fonction de cela. Qu'on me permette une question: Existe-t-il un processus d'appel aux termes du système actuel, qu'ils semblent accepter sans critiquer? Non.

Examinons la question de plus près. Le mécanisme d'appel qui est en place pour ceux qui demandent des prestations d'assurance-emploi en vertu de la partie I est un processus formel qui garantit que les règles inscrites dans la loi concernant le fonds d'assurance-emploi sont respectées et que les travailleurs reçoivent vraiment les prestations auxquelles ils ont droit. Cela est prévu à la partie I.

Il existe un processus d'appel à ce niveau et je m'oppose aux propos alarmistes voulant qu'il n'y ait pas de processus d'appel. Il est prévu à la partie I.

La partie II est essentiellement différente. Elle est fondée non pas sur l'admissibilité d'un individu, mais sur une structure de prestations et de mesures qui peuvent s'appliquer avec discrétion et


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jugement, selon les priorités et les besoins locaux et régionaux. Les décisions sont prises, non pas en se fondant sur des critères objectifs assujettis à des règles et des règlements stricts, mais en se fiant à des lignes directrices et des stratégies élaborées de manière à s'adapter aux conditions du marché du travail et aux besoins de la main-d'oeuvre locale.

Des individus, des groupes et des employeurs, entre autres, peuvent bénéficier des ressources du programme. Il ne serait ni approprié ni pratique d'appliquer un processus d'appel formel à une telle structure. Cela ne fait pas partie du système actuel. C'est ce que je considère absolument renversant. Je n'ai jamais entendu une plainte de ce genre concernant le système actuel.

(1800)

Étant donné la structure fiscale, il est impossible de répondre aux attentes de chaque groupe et de chaque individu. Avec flexibilité et discrétion, les responsables locaux doivent garantir que les décisions sont justes, équitables et transparentes, et s'inscrivent dans un processus global de planification stratégique. Les responsables doivent rendre compte des résultats, notamment de la participation des groupes prioritaires.

Je souligne que je tenais à traiter ces trois points, parce que je suis d'avis que les gens d'en face ont tenu des propos étranges et alarmistes.

Enfin, sauf erreur, l'orateur précédent a parlé d'un passage de 0 à 15 heures, comme si le fait de tenir compte des heures posait problème. Cette question a déjà fait l'objet d'un débat. Je rappelle au député qu'en passant à un système fondé sur les heures, nous apportons une amélioration importante.

Nous éviterons ainsi le piège des 15 heures qui touche surtout les femmes et, dans une grande mesure, les travailleurs de la restauration rapide. Le nouveau système protégera ceux qui occupent plusieurs emplois, puisque désormais, ils auront droit à des prestations, s'ils en ont besoin. Nous espérons que ce ne sera pas nécessaire, car nous déployons beaucoup d'efforts du côté de l'emploi. Cependant, le fait de tenir compte des heures aidera à étendre la protection du système à ceux qui en auront besoin. Dans une large mesure, l'aide ira aux femmes qui ne sont pas admissibles actuellement. C'est une amélioration.

Les gens d'en face devraient, au moins une fois dans ce débat, reconnaître les améliorations qui sont apportées.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Madame la Présidente, j'apprécie le discours de mon collègue de Malpèque, parce qu'il me stimule. Après une mesure bâillon, on est parfois portés à bâiller et à s'endormir, mais, lui, il nous permet vraiment de réagir, parce que pour quelqu'un qui était déçu des arguments qu'il avait entendus, franchement, ses contre-arguments sont encore de plus piètre qualité. On va s'y attarder quelque peu.

Premièrement, je fais partie du Comité du développement des ressources humaines depuis l'élection du Parti libéral avec la députée de Mercier, de même que mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup, les trois derniers à prendre la parole. Ça fait deux ans et demi qu'on a fait la tournée à travers le pays et le député de Malpèque dit avoir bien entendu les arguments lors de la dernière phase, c'est-à-dire lors de l'étude du projet de loi comme tel depuis qu'il a été déposé. Sauf que, par exemple, lorsque nous demandons de supprimer l'article 3, c'est qu'on trouve que le rôle de la commission n'est pas mieux que ce qu'il était avant, et c'est pour cela qu'on propose de supprimer l'article 3.

Pourquoi? Voici le premier argument concernant l'article 3. Que dit-on à cet article?

(1) La Commission observe et évalue la façon dont les personnes, les collectivités et l'économie s'adaptent [. . .]
Nous voulions connaître l'impact réel et pas la façon, parce que c'est ça l'hypothèse. Le postulat de base du projet de réforme présenté par le ministre du Développement des ressources humaines, c'est qu'on veut que les personnes s'adaptent aux coupures, et la commission évaluera de quelle façon elles s'adaptent aux coupures. Mais nous aurions voulu voir l'impact réel de ces coupures sur l'économie régionale, sur l'économie locale. Ce n'est pas ce que fera la commission.

Le député dit aussi qu'il est déçu de nos amendements. Pour informer ce député en particulier et d'autres, l'opposition, au stade des rapports, ne peut pas présenter en Chambre des amendements qui provoquent des changements financiers. C'est-à-dire que, dans les règles parlementaires actuelles, ces amendements, pour être acceptés, doivent obligatoirement être présentés par la partie gouvernementale.

(1805)

La meilleure preuve est que trois députés ont présenté des amendements en comité, je me souviens de leur nom, mais pas de leur circonscription. On avait trois amendements. Comme cela portait sur des changements d'ordre financier, ces amendements n'ont pu être présentés dans le cadre de l'étude article par article, mais bien par la Chambre et soumis par le gouvernement.

Il faut faire attention avant de faire des critiques sur la façon dont l'opposition se comporte. Il faut aussi être au courant des règles. L'opposition s'y conforme. C'est pour cela que nous n'avons pas présenté d'amendement qui amènerait des changements d'ordre financier. Si on en avait eu la possibilité, il est bien certain que nous en aurions présenté beaucoup. Par exemple, sur les deux milliards de coupures visés par la réforme, on aurait fait en sorte que cela aurait eu un impact zéro, c'est-à-dire qu'il n'y ait pas eu de coupure de deux milliards. Malheureusement, le Parti libéral n'a pas compris cela.

Ensuite, il y a la conséquence de baisser le plafond des gains assurables. Il y a quand même des personnes qui sont touchées par les 900 millions de cadeau, autant les employés que les entreprises, parce que la différence entre 42 430 $ et 39 000 $, cela fait un manque à gagner de 900 millions pour le gouvernement. Là-dessus,


2392

il faut dire que le groupe ciblé bénéficiait quand même, par le passé, de 200 millions de prestations à l'assurance-chômage.

Pendant le reste de mon intervention, je vais plutôt m'attarder sur un aspect important effleuré par le député. Au sujet des droits d'appel, on dit que la Partie II qui concerne les services d'emploi, c'est une partie collective, ce n'est pas une partie individuelle. Je pense que c'est méconnaître le problème. C'est quand même des prestataires d'assurance-chômage qui vont être visés, ce sont des individus.

Je vais vous donner un exemple de ce qui existe actuellement dans les services d'emploi. D'ailleurs, nous de l'opposition, on l'a déploré. On en a parlé longuement en comité et le député était là, je pense. On disait que dans le programme ATI, le programme pour aider les gens à établir des entreprises, actuellement, il n'y a aucun droit d'appel. Je vais prendre un exemple concret dans mon comté.

Il y a deux centres d'emploi dans mon comté, deux centres qui administrent ce programme actuellement, qui est d'ailleurs remis dans le nouveau projet de loi, sous la même forme. On a changé le nom, mais c'est essentiellement le même programme. Dans le passé, deux individus qui se connaissaient ont décidé de créer une entreprise ensemble. L'un se présente à un centre d'emploi, l'autre se présente à l'autre endroit pour lui-même, parce que c'est sur une base individuelle, bien qu'ils voulaient fonder une entreprise ensemble. L'un voit sa demande acceptée, pour l'autre, c'est refusé. Ce dernier signalant cela à son agent du service d'emploi s'est vu répondre-son ami ayant été accepté: «C'est bien de valeur, cette décision est sans appel pour cette partie de programme.»

Quand le député de Malpèque dit que c'est un aspect collectif et ainsi de suite, ce sont des travailleurs qui, après avoir subi une coupure de leur emploi, s'adressent au bureau d'assurance-chômage pour bénéficier de leurs prestations. Après une recherche d'emploi, ils en viennent à la conclusion que c'est devenu difficile pour des raisons d'âge ou autres. Il leur vient à l'idée de créer une entreprise, ils se font un plan d'affaires et cela leur permet de prolonger leurs prestations d'emploi.

C'est alors soumis à l'examen d'un fonctionnaire ou d'un comité, mais là, c'est sans appel. Dans ce cas précis dans mon comté, les gens ne pouvaient même pas se faire entendre. C'est seulement au niveau de l'agent et la décision était prise en comité sans que la personne ne puisse faire valoir ses arguments aux membres du comité.

S'il y a une chose à laquelle je tiens comme Québécois, mais aussi que je souhaite à tous les Canadiens et à toutes les Canadiennes, c'est que dans l'ensemble des programmes gouvernementaux, on ne soit pas soumis au jugement d'une seule personne, ou même d'un comité sans qu'on puisse exercer un droit d'appel. Je pense que nier ce droit d'appel à la Partie II, ce n'est pas faire acte d'une volonté pour les citoyens et citoyennes d'améliorer le système.

(1810)

Pourquoi les procédures d'appel sont-elles importantes? Actuellement, d'après des groupes d'action-chômage, quand une cause va en arbitrage, trois décisions sur quatre sont favorables au prestataire. Je veux réaffirmer quelque chose qu'on ne dira jamais assez: tout ce projet de loi vise à faire la chasse aux fraudeurs. Comme le disait le ministre du Développement des ressources humaines au comité l'autre jour: «C'est épouvantable.»

Les chiffres que l'opposition a demandés et obtenus nous disent qu'en 1991-1992 130 000 personnes avaient été reconnues coupables de fraudes à l'assurance-chômage au Canada, mais qu'en 1995-1996 c'était 116 000. Donc, une diminution de 14 000. Ce n'est pas un problème qui s'accentue, c'est quelque chose qui diminue. D'où vient le postulat de base de la nouvelle réforme de l'assurance-chômage? Ce n'est pas justifié par ça.

Comparons maintenant les montants sur le recouvrement des sommes. Sur les 272 millions recouvrés en 1995-1996, donc l'année dernière, seulement 93 millions sont le fait de fraudes individuelles. Les 179 autres millions étaient dus à des erreurs de bonne foi de la part des prestataires ou du ministère du Développement des ressources humaines. Des erreurs.

Pendant qu'il en est encore temps, j'invite les députés à transformer l'esprit de la réforme pour en faire non pas une chasse aux pseudofraudeurs, aux fraudeurs potentiels, mais une chasse à l'élimination des erreurs et des retards.

Je prends comme exemple le fameux supplément de revenu garanti des pensions de vieillesse. On a récemment vu que, deux années de suite, encore cette année, il y a eu des retards. Vendredi, le ministre s'est excusé des problèmes causés. Pourtant, on réduit le nombre de centres d'emploi et on augmente le nombre de guichets automatiques.

Je dis que l'objectif devrait être d'éliminer les erreurs, d'améliorer le système pour qu'il n'y ait plus d'erreurs pour que des gens ne soient pas pénalisés. Je pense aussi qu'on devrait revenir cinq ou six ans en arrière pour corriger les erreurs commises par le ministère du Développement des ressources humaines trois fois sur quatre et effectuer des remboursements.

[Traduction]

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais moi aussi dire quelques mots au sujet du projet de loi C-12.

Je tiens à l'appuyer, comme je l'ai déjà fait à la Chambre, parce que le temps me paraît venu de modifier la loi. L'ancien système ne fonctionne pas bien, il n'accomplit pas ce qu'il devait faire et il n'est tout simplement pas satisfaisant. Le système a déjà rempli assez bien ses objectifs au fil des années, mais il a fini avec le temps par ne plus faire l'affaire et il a maintenant besoin d'un changement structurel fondamental. Je ne suis évidemment pas le seul à le penser. On nous dit que quatre Canadiens sur cinq croient que le système actuel ne fonctionne plus très bien et a besoin d'une réforme.

Le projet de loi, initialement présentée en décembre par l'actuel ministre des Affaires étrangères, devait répondre aux demandes de quatre Canadiens sur cinq qui souhaitent qu'on apporte un change-

2393

ment structurel au système. Il vise également à le rendre plus pratique, plus économique, plus moderne et plus fonctionnel.

Je voudrais parler plus particulièrement des répercussions des modifications pour les travailleurs saisonniers, car je suis fier de représenter la circonscription de Burin-Saint-Georges. On y trouve un certain nombre d'industries à caractère saisonnier, par exemple l'exploitation forestière, la pêche, l'exploitation minière et le bâtiment. La grande majorité de mes électeurs gagnent leur vie dans des secteurs de travail saisonnier.

Le recul de l'industrie de la pêche n'a évidemment pas amélioré la situation. Quand j'ai commencé à siéger au Parlement, j'avais l'habitude d'intervenir à la Chambre pour me vanter de ce que ma circonscription avait le même taux de chômage que l'Alberta à l'époque, soit environ 4 p. 100. La catastrophe du poisson de fond a, bien sûr, changé complètement la situation. Le taux de chômage dans la circonscription de Burin-Saint-Georges est plus élevé que n'importe où au Canada. Il s'élève à 35 p. 100, dans la mesure où on peut l'évaluer réellement. Les députés comprendront donc pourquoi je tiens surtout à parler aujourd'hui des répercussions que le projet de loi aura pour les travailleurs saisonniers.

(1815)

Je crois que ces travailleurs seront nombreux à trouver que le nouveau régime d'assurance-emploi représente une grande amélioration par rapport à l'ancien. L'une des modifications les plus importantes a trait à la nouvelle façon de calculer l'admissibilité aux prestations en fonction des heures de travail, et non des semaines, comme le faisait l'ancienne méthode arbitraire. Beaucoup de travailleurs des secteurs saisonniers travaillent de longues heures quand il y a du travail, bien plus longues que la semaine normale de travail de 35 à 40 heures par semaine. Dans ces secteurs, les travailleurs font souvent beaucoup plus que 40 heures, quand il y a du travail.

Un plus grand nombre de travailleurs des industries saisonnières seront admissibles. Certains deviendront admissibles plus tôt, à cause de ces longues heures. Voilà quelques avantages que présente le projet de loi.

Cette seule modification permettra à 45 000 travailleurs saisonniers maintenant exclus de toucher des prestations. Il y aura trois semaines de prestations de plus pour 270 000 autres travailleurs dans les secteurs de la construction, des pêches et de l'exploitation forestière. Ils peuvent tous travailler plus de 50 heures par semaine. Ces heures de travail ne leur ont jamais été créditées dans l'ancien régime. Elles le seront maintenant, puisque l'admissibilité est fonction des heures.

Le nouveau régime sera avantageux pour les travailleurs à d'autres égards. Mais les avantages du régime sont assez bien connus, et je me dois d'insister sur certaines préoccupations que le projet de loi nous a inspirées, à mes électeurs et à moi.

Si bon qu'ait été le projet de loi, il n'a jamais été coulé dans le béton, comme le disait l'ancien ministre. Je tiens à souligner les efforts que le nouveau ministre a déployés pour réussir à améliorer ce qui était déjà une bonne mesure, mais qui nécessitait quelques rajustements. Grâce aux amendements que le ministre appuie et que nous étudierons au cours des prochains jours, il s'agit maintenant d'un projet de loi bien meilleur que celui qui a été présenté en décembre.

Par exemple, la règle de l'intensité me préoccupait beaucoup. Cette règle pénalisait ceux qui, sans qu'ils y soient pour rien, ne peuvent trouver assez de travail suivi et doivent donc toucher des prestations plus souvent que les travailleurs d'autres régions. J'ai tout de suite senti que cette règle n'était pas juste. Je crois toujours qu'elle n'est pas juste.

Les modifications proposées vont en grande partie la corriger, surtout pour les personnes qui touchent moins de 26 000 $. Toutefois, je maintiens que le principe est mauvais. Je ne peux pas appuyer un principe voulant que deux personnes qui accomplissent le même travail au même rythme ne bénéficient pas du même taux des prestations. Cela me pose un problème depuis le départ. Je n'appuyais pas ce principe au départ et je ne l'appuie toujours pas.

Ce que j'approuve, ce sont les progrès extraordinaires qui ont été accomplis pour répondre aux besoins des travailleurs à faible revenu, à savoir ceux qui gagnent moins de 26 000 $. Je n'entrerai pas ici dans le détail, car les députés sont au courant des progrès énormes qui ont été accomplis pour améliorer la situation des travailleurs à faible revenu.

J'avais des réserves au sujet de la méthode dite du calcul par dénominateur et je suis ravi de constater que les amendements règlent le problème. Mes électeurs et moi-même estimons depuis le début que leurs prestations devraient être fondées sur le nombre de semaine où ils ont travaillé et non sur quelque dénominateur arbitraire établissant le nombre de semaines où ils n'ont pas travaillé, par exemple.

(1820)

J'avais des réserves au sujet des règles d'admissibilité des nouveaux bénéficiaires et de la récupération des prestations. Je crois que ces questions sont désormais expliquées et qu'elles sont comprises par les personnes qui sont directement visées.

Cela aura des répercussions avantageuses pour les travailleurs saisonniers de ma circonscription et de Terre-Neuve. Cela aura une incidence positive. Ces travailleurs seront à bien des égards en meilleure situation qu'avant. Il y a des groupes de gens qui risquent d'être pénalisés, mais les amendements qui seront proposés à la Chambre corrigeront en grande partie la situation. C'est pourquoi j'ai le grand plaisir d'appuyer les principes et le contenu du projet de loi.

Toutefois, je le répète et je n'en démordrai pas, je ne peux pas appuyer le principe selon lequel voulant qu'on verse des prestations différentes à des gens qui les gagnent au même rythme sous prétexte qu'ils ont eu recours au système d'emploi plus souvent au cours des cinq années antérieures. Je ne m'attarderai pas là-dessus. Je crois que tout le monde à la Chambre comme à l'extérieur de la Chambre connaît mon opinion sur cette question.

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Le ministre du Développement des ressources humaines et le comité permanent ont beaucoup de mérite pour les améliorations qu'ils ont apportées à la loi initiale. Il en résulte un projet de loi nettement amélioré dont bénéficieront mes électeurs et d'autres Canadiens de tout le pays.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole concernant le groupe de motions no 4 apportées au projet de loi. Naturellement, je suis d'accord avec les propositions et les amendements soumis par le Bloc québécois concernant la Commission de l'assurance-chômage.

J'ai été arbitre à l'assurance-chômage pendant huit ans, à Mont-réal, et ce dont la commission a besoin, c'est de vrais pouvoirs, d'avoir un véritable système d'appel, tant au niveau du conseil arbitral qu'au niveau du juge arbitre et également au niveau de la cour d'appel fédérale.

Le conseil arbitral est composé de trois personnes: un représentant des employés qui est nommé par les syndicats, un représentant des employeurs qui est nommé par les associations patronales et un président du conseil arbitral. Ce président est nommé par le gouvernement, c'est-à-dire par le ministre du Développement des ressources humaines, et c'est du patronage qu'on fait dans la nomination du président du conseil arbitral.

Si le projet de loi avait contenu des modifications pour mettre fin au système de patronage, je n'aurais aucune objection à l'appuyer, mais il n'y a rien de cela dans ce projet de loi. Il n'y a rien non plus, par exemple, pour raccourcir les délais. On sait que si on n'est pas satisfait d'une décision du conseil arbitral, il faut porter la décision en appel devant le juge arbitre et ça prend deux ans, trois ans, il faut avoir un avocat, et ce sont des juges d'Ottawa qui se promènent un peu partout pour entendre ces dossiers.

(1825)

On aurait dû prévoir des mesures efficaces pour avoir un véritable système d'appel pour les gens qui ne sont pas satisfaits des décisions rendues par les fonctionnaires. Il y a beaucoup de gens qui ne sont pas satisfaits des décisions parce qu'il y a parfois beaucoup d'arbitraire dans les décisions prises par les employés de la commission. Ils les prennent à la légère, sans avoir rencontré les prestataires, sans les avoir entendus. Il y a des erreurs de droit ou de faits. Alors, pour toutes ces raisons, je pense qu'on ne peut pas accepter l'article 4 du projet de loi tel quel.

Je profite de l'occasion pour déplorer et pour condamner, une fois de plus, le bâillon imposé par le gouvernement sur ce projet de loi qui est capital. Le bâillon imposé au niveau du Comité du développement des ressources humaines et ici même en Chambre, alors qu'on est presque à la fin du débat, n'est pas démocratique. Un gouvernement ne peut pas empêcher la liberté d'expression. Un gouvernement ne peut pas, n'a pas le droit de réduire l'opposition au silence, surtout lorsqu'il s'agit d'un projet de loi capital comme le projet de loi C-12.

Je n'ai pas vu, depuis 1935, depuis la première loi sur l'assurance-chômage, de changements aussi dramatiques. Ce système était nécessaire, est nécessaire et demeurera nécessaire pour les travailleurs et il existe dans tous les pays y compris dans les pays en développement. Je condamne ce manque de démocratie au sein du Parlement. Il y a beaucoup de gens qui veulent s'exprimer et ils ne peuvent par le faire parce que le gouvernement limite arbitrairement le temps.

Je m'oppose de toute façon à cette réforme parce qu'elle est inéquitable et régressive. Je tiens, une fois de plus, à manifester ma solidarité avec les chômeurs. Moi, je suis ici depuis 22 ans, j'ai toujours travaillé, je n'ai jamais eu recours à l'assurance-chômage, mais j'ai connu, comme arbitre, au conseil arbitral, des centaines de drames humains, des gens qui venaient devant nous et dont le seul revenu était l'assurance-chômage.

Ils sont déjà pénalisés parce qu'ils ont été congédiés, licenciés, mis à pied par leur employeur, parfois après 25 ou 30 ans, et ils ne pourront plus se retrouver un emploi parce que pour les gens de 45 ans et plus, c'est tellement difficile de trouver un autre travail. Ces gens ont été pénalisés en étant licenciés et ils le sont encore et ils le sont encore davantage aujourd'hui par ce projet de loi, et particulièrement, comme on l'a déjà dit, les femmes, les travailleurs saisonniers, les immigrants.

C'est un projet de loi qui est créateur de pauvreté. Au niveau des immigrants, c'est mon dossier, depuis 1980, le taux de pauvreté parmi les immigrants est beaucoup plus élevé que le taux de pauvreté parmi les gens nés ici. Par exemple, en 1994, pour l'ensemble des familles dont le chef de famille est un immigrant, le taux de pauvreté était de 17,8 p. 100 et celui de l'ensemble des immigrants seuls de 42,9. Les taux équivalents pour les gens nés ici étaient de 12,6 p. 100 pour les familles et de 36 p. 100 pour le groupe des personnes seules. Vous voyez qu'il y a déjà une différence assez remarquable entre les Canadiens nés ici et les immigrants. Ce projet de loi va aggraver leur situation.

Je termine en vous disant que l'ensemble du Bloc québécois et moi-même exigeons le retrait immédiat du projet de loi C-12.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Comme il est 18 h 30, la Chambre ajourne jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 30.)