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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 10 juin 1996

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA DÉCLARATION CANADIENNE DES DROITS

    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 3532

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI DE 1996 VISANT À AMÉLIORER LA LÉGISLATION PÉNALE

    Projet de loi C-17. Motion de deuxième lecture 3536
    Report du vote sur la motion 3545

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-27. Motion de deuxième lecture 3545
    Mme Gagnon (Québec) 3547

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LA SEMAINE DU PORTUGAL

L'HYDROGÈNE

LE SÉNAT

LE REGRETTÉ GRAND CHEF HARRY ALLEN

LE CONCOURS DE RÉDACTION D'UN ESSAI SUR L'UNITÉ NATIONALE

LA SEMAINE NATIONALE DE LA FONCTION PUBLIQUE

SCARBOROUGH

LES CENTRES D'EMPLOI

    M. Leroux (Shefford) 3554

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

LES PRIX DU CARBURANT

LA SEMAINE NATIONALE DE LA FONCTION PUBLIQUE

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

L'UNITÉ CANADIENNE

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

LES RELATIONS FÉDÉRALES-PROVINCIALES

L'UNITÉ NATIONALE

QUESTIONS ORALES

LES RÉFÉRENDUMS

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3557
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3557

L'UNITÉ NATIONALE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3558
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3558
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3558

LA FISCALITÉ

    Mme Stewart (Brant) 3559

L'ASSURANCE-EMPLOI

LA FISCALITÉ

    Mme Stewart (Brant) 3560

LE CODE CRIMINEL

LE DRAPEAU CANADIEN

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 3561
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 3561

LE TOURISME

LES AÎNÉS

LE SIDA

    Mme Dalphond-Guiral 3562

L'IMMIGRATION

LA PETITE ENTREPRISE

    Mme Brown (Oakville-Milton) 3563

LE RENFLOUAGE DU IRVING WHALE

LES PÊCHES

LES GARDERIES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 3564

L'ORGANISATION POUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE

LES LANGUES OFFICIELLES

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

AFFAIRES AUTOCHTONES ET DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

LA LOI MARITIME DU CANADA

    Projet de loi C-44. Adoption des motions portantprésentation et première lecture 3565

LA LOI SUR LA MÉDAILLE POUR SERVICE VOLONTAIRE CANADIEN DEMAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES

    Projet de loi C-300. Adoption des motions de présentationet de première lecture 3566

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE PROJET DE LOI 205

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA CONSTITUTION

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'EUTHANASIE

LE PROJET DE LOI C-205

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE CODE CRIMINEL

LA FISCALITÉ

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

L'UNITÉ NATIONALE

LES AFFAIRES DES ANCIENS COMBATTANTS

LES PRIX DU CARBURANT

LA MARINE MARCHANDE

LES DROITS DE LA PERSONNE

L'AVORTEMENT

LES DROITS DE LA PERSONNE

QUESTIONS AU FEUILLETON

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRE DE DÉPÔT DE DOCUMENTS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-27. Reprise de l'étude de la motion dedeuxième lecture 3569
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 3569
    M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead) 3573
    Mme Gagnon (Québec) 3574
    Mme Gagnon (Québec) 3577
    Mme Gagnon (Québec) 3580
    Mme Gagnon (Québec) 3583
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loiet renvoi à un comité 3589

LA LOI SUR LES OCÉANS

    Projet de loi C-26. L'étape du rapport 3589

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

    Le président suppléant (M. Kilger) 3589

MOTIONS D'AMENDEMENT

    Motions nos 2, 3 et 4 3590
    Report du vote sur la motion no 1 3598
    Motions nos 5, 22, 38, 42, 43, 49, 57 à 64, 72, 74, 75,89, 90 et 91 3598
    Motions nos 47, 48, 51, 52 3600
    Le président suppléant (M. Kilger) 3604
    Report du vote sur la motion no 5 3604
    Motions nos 7, 11, 12, 13, 15, 16 et 31 3605
    M. Leblanc (Longueuil) 3609
    Report du vote sur la motion no 7 3610
    Report du vote sur la motion no 11 3610
    Report du vote sur la motion no 12 3610
    Report du vote sur la motion no 15 3611
    Report du vote sur la motion no 31 3611
    Motions nos 8, 9, 14, 17 à 21, 23, 32 et 34 3611
    Motions nos 33 et 35 3611
    Report du vote sur la motion no 8 3617
    Report du vote sur la motion no 9 3618
    Report du vote sur la motion no 18 3618
    Report du vote sur la motion no 20 3618
    Report du vote sur la motion no 21 3618
    Report du vote sur la motion no 23 3618
    Report du vote sur la motion no 32 3618
    Report du vote sur la motion no 33 3619
    Report du vote sur la motion no 34 3619
    Report du vote sur la motion no 35 3619
    Motions nos 24 à 27, 39 et 66 3619
    Report du vote sur la motion no 24 3622
    Report du vote sur la notion no 25 3622
    Report du vote sur la motion no 39 3622
    Report du vote sur la motion no 66 3622
    Motions nos 28 et 30 3622
    Report du vote sur la motion no 28 3626

3527


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 10 juin 1996


La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA DÉCLARATION CANADIENNE DES DROITS

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.) propose:

Que, de l'avis de cette Chambre, le gouvernement devrait renforcer la protection des droits à la propriété individuelle par une modification à la Déclaration canadienne des droits, qui devrait se lire comme suit:
«1.Sous réserve des limites raisonnables prescrites par la loi dans une société libre et démocratique, chaque individu a le droit de jouir de ses biens personnels et de ses biens immobiliers, ainsi que de ne pas en être privé, à moins que
a) la décision en ait été prise à l'issue d'un procès équitable et conforme aux principes fondamentaux de la justice;
b) la personne ne reçoive une juste compensation pour cette privation, le montant de cette compensation devant être fixé de façon impartiale et versé à la personne dans un délai raisonnable après qu'elle ait été privée de sa propriété.
2. Toute personne dont les droits stipulés au paragraphe 1 ont été lésés peut faire appel au tribunal compétent afin d'obtenir la réparation que celui-ci considère appropriée et juste dans les circonstances.»
-Monsieur le Président, je suis heureux de présenter ma motion d'initiative parlementaire dont l'étude est inscrite pour la première heure de nos travaux aujourd'hui.

L'objet de ma motion est très simple. Il s'agit de renforcer et de protéger les droits de propriété des individus. La motion M-205 se lit comme suit:

Que, de l'avis de cette Chambre, le gouvernement devrait renforcer la protection des droits à la propriété individuelle par une modification à la Déclaration canadienne des droits, qui devrait se lire comme suit:
«1. Sous réserve des limites raisonnables prescrites par la loi dans une société libre et démocratique, chaque individu a le droit de jouir de ses biens personnels et de ses biens immobiliers, ainsi que de ne pas en être privé, à moins que
a) la décision en ait été prise à l'issue d'un procès équitable et conforme aux principes fondamentaux de la justice;
b) la personne ne reçoive une juste compensation pour cette privation, le montant de cette compensation devant être fixé de façon impartiale et versé à la personne dans un délai raisonnable après qu'elle ait été privée de sa propriété.
2. Toute personne dont les droits stipulés au paragraphe 1 ont été lésés peut faire appel au tribunal compétent afin d'obtenir la réparation que celui-ci considère appropriée et juste dans les circonstances.»
En résumé, la motion demande au gouvernement de modifier la Déclaration canadienne des droits pour y ajouter deux articles. Le premier conférerait aux Canadiens les droits à la propriété, à moins qu'un individu ait été entendu équitablement, selon les principes de la justice fondamentale. Le deuxième accorderait à chaque propriétaire lésé une réparation juste dans un délai raisonnable.

Les Canadiens sont chanceux parce qu'ils jouissent d'une abondance de droits. Un grand nombre de ces droits sont garantis dans la Constitution. En effet, la Constitution protège les droits linguistiques, les droits des autochtones et les droits des femmes, mais pas les droits à la propriété.

L'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés prévoit que chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne, et il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale. Il est clair que la vie, la liberté et la sécurité de la personne sont des valeurs fondamentales pour tous les Canadiens; cependant, la protection des droits de propriété individuels revêtent aussi beaucoup d'importance aux yeux des Canadiens. Cette protection nous touche tous et elle est à la base de nos lois et de notre société.

Les Canadiens croient en une société libre et démocratique. Ils croient aussi à la justice fondamentale et au besoin d'équité. Ce sont les valeurs qui unissent les Canadiens. La plupart d'entre nous considérons que le droit à la propriété fait aussi partie des droits fondamentaux au Canada. Pourtant, le droit à la propriété est une valeur qui n'est pas protégée.

La protection de ce droit est une garantie importante de liberté et elle doit être assurée pour que le gouvernement n'empiète pas sur ce droit de façon indue et sans verser une réparation. Il n'y a tout simplement rien qui justifie le gouvernement de se sentir libre d'exproprier des biens privés sans verser une réparation juste et équitable en temps opportun. Pourtant, pas la moindre disposition de la loi constitutionnelle canadienne ne prévoit la privation du droit de propriété selon une procédure équitable de manière à verser une réparation au propriétaire lésé. Rien ne garantit un traitement équitable par les magistrats ou les fonctionnaires qui exercent un


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pouvoir sur les individus ou les sociétés. La motion M-205 comblerait ces lacunes.

Dans le passé, on a souvent tenté de s'attaquer aux problèmes concernant le droit à la propriété. En 1960, John Diefenbaker a présenté et fait adopter la Déclaration canadienne des droits. La déclaration des droits inclut les droits à la propriété, mais la garantie de la protection n'est au mieux que marginale.

L'alinéa 1a) de la Déclaration canadienne des droits énonce: «Le droit de l'individu à la vie, à la liberté, à la sécurité de la personne ainsi qu'à la jouissance de ses biens, et le droit de ne s'en voir privé que par l'application régulière de la loi.» De même, l'alinéa 2e) stipule que nulle loi fédérale ne doit s'interpréter ni s'appliquer comme privant une personne du droit à une audition impartiale de sa cause, selon les principes de justice fondamentale, pour la définition de ses droits et obligations. Bref, la Déclaration canadienne des droits n'assure qu'une protection très marginale aux droits à la propriété.

Je parle de deux documents: la Déclaration canadienne des droits et la Charte canadienne des droits et des libertés. Les députés devraient prêter attention à celui dont je parle, car chacun d'eux a une application différente en droit.

Rien ne garantit qu'une propriété privée ne sera pas enlevée à un particulier pour servir à des fins publiques et aucune disposition n'oblige l'État à payer une juste compensation quand il exproprie une propriété. Sans droits à l'application régulière de la loi et à une juste compensation, les droits à la propriété individuelle sont complètement dénués de sens.

On a fait également des tentatives pour consacrer les droits à la propriété dans la charte des droits et des libertés. Le premier ministre Trudeau a plaidé vigoureusement et à maintes reprises en faveur de l'inclusion des droits à la propriété dans la charte des droits et des libertés. En 1968, lorsqu'il était ministre de la Justice, M. Trudeau a présenté une charte canadienne des droits de la personne qui incluait la protection des droits à la propriété. L'année suivante, à titre de premier ministre, M. Trudeau a écrit que la charte devrait protéger le droit de l'individu à la jouissance de ses biens. Puis, en 1978, le projet de loi de M. Trudeau sur la réforme constitutionnelle incluait une disposition réitérant fondamentalement la même protection que celle qu'il avait recommandée dix ans plus tôt. En 1980, M. Trudeau a tenté d'inclure dans le projet de charte une disposition concernant les droits à la propriété.

(1110)

De plus, notre premier ministre actuel, qui était alors ministre de la Justice, a soutenu les efforts de M. Trudeau en vue d'inclure les droits à la propriété dans la charte des droits et libertés. Voici comment le premier ministre décrivait les droits à la propriété: «Une valeur centrale de notre société et un élément essentiel de la charte. Un droit que tous les Canadiens devraient avoir, peu importe où ils habitent au Canada.» J'espère que le premier ministre s'en tiendra à ce qu'il a dit et appuiera entièrement la motion.

Finalement, en 1981, Pierre Trudeau a fait une dernière tentative pour inclure les droits à la propriété dans la Charte canadienne des droits et des libertés. Au bout du compte, après 13 longues années de vains efforts, les droits de propriété ont été écartés de la charte, et ils ont été refusés aux Canadiens au moment du rapatriement de la Constitution, en 1982.

Mais l'affaire ne s'arrête pas là. En 1988, la Chambre s'est prononcée avec une majorité écrasante en faveur d'une motion voulant que la Loi constitutionnelle de 1982 soit modifiée de façon à reconnaître le droit à la jouissance de la propriété et le droit de ne pas en être privé, sinon dans le respect des principes de la justice fondamentale et de la tradition des consultations fédérales-provinciales normales. La motion a été adoptée par 108 voix contre 16. Par la suite, il a également été proposé d'ajouter les droits de propriété dans une version révisée de la charte, en 1992.

Le gouvernement a proposé de modifier la charte pour garantir les droits de propriété et veiller à ce que les Canadiens puissent posséder et conserver des biens et ne pas se les faire enlever, sinon par application régulière de la loi et avec une indemnisation équitable. Une fois de plus, il y a eu déni de justice, car les droits à la propriété ont été retirés de l'accord de Charlottetown malgré les voeux de nombreux Canadiens. Nous savons tous que cet accord a ensuite été rejeté.

Tous ces efforts en vue de garantir les droits de propriété dans la charte ont échoué. La raison de cet échec, c'est que les droits de propriété sont considérés par beaucoup comme une responsabilité des provinces. Les lois régissant la propriété relèvent du droit civil et donc de la compétence des gouvernements provinciaux.

Plusieurs provinces se sont opposées à ce que la charte garantisse ces droits, estimant qu'il s'agissait d'un empiétement sur leurs compétences. La Saskatchewan, le Nouveau-Brunswick et l'Île-du-Prince-Édouard se sont opposés à toute intrusion fédérale dans la compétence provinciale sur les biens et le droit civil, compétence qui leur a été réservée par la Loi constitutionnelle de 1867. Ces provinces craignaient que leur pouvoir décisionnel s'en trouve réduit et que le coût de la compensation juste et équitable à verser aux individus touchés ne vienne entraver ou limiter leur pouvoir décisionnel. Je parle ici de la charte, tandis que mon projet de loi vise à modifier la Déclaration des droits.

Des provinces comme l'Île-du-Prince-Édouard s'inquiétaient du fait que, si elles étaient obligées de verser une indemnité à certains individus pour construire une route sur leur propriété, aménager un parc municipal, agrandir un édifice ou même construire un casino, comme ce fut le cas en Ontario, le coût de la compensation juste à verser aux propriétaires touchés pourrait réduire leurs projets.

L'avantage, avec la motion M-205, c'est qu'elle contourne les difficultés relatives à l'ingérence du gouvernement fédéral et aux secteurs de compétence interprovinciale, puisqu'elle ne s'applique qu'aux lois fédérales et aux activités du gouvernement central. Elle ne lie que le gouvernement fédéral et l'oblige à verser une compensation juste, équitable et raisonnable en échange de biens personnels. Comme la motion vise à modifier la Déclaration canadienne des droits, par opposition à la Charte, elle ne s'applique qu'aux lois


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fédérales et les secteurs de compétence provinciale ne sont pas remis en question.

Toutefois, la plupart des provinces appuient la reconnaissance des droits à la propriété dans la charte. Ainsi, la Colombie-Britannique, l'Ontario et le Nouveau-Brunswick ont adopté des résolutions appuyant l'inclusion des droits à la propriété dans la charte.

Selon un sondage Gallup réalisé en 1987, les Canadiens étaient, à 87 p. 100, en faveur d'une meilleure protection des droits à la propriété. Les Canadiens estiment que posséder et jouir de biens de toutes sortes est un droit fondamental qui devrait être consacré dans la charte. Ce sondage nous apprenait également que les Canadiens considéraient les droits à la propriété tout aussi importants que le droit à la vie, la liberté et la sécurité de la population.

Je suis convaincu que, si nous effectuions un sondage aujourd'hui, la population du Canada se prononcerait aussi fortement en faveur de la protection garantie des droits à la propriété qu'il y a neuf ans. Ces dernières années, les Canadiens se sont sensibilisés plus que jamais à la protection de leurs droits.

De plus, de nombreuses organisations nationales ont prôné une meilleure protection des droits à la propriété. Elles comprennent l'Association du Barreau canadien, la Chambre de commerce du Canada et l'Association canadienne de l'immeuble, pour n'en nommer que quelques-unes.

(1115)

En outre, la Déclaration universelle des droits de l'homme, de l'ONU, que le Canada a signée en 1948, l'oblige à défendre les droits à la propriété. L'article 17 prévoit ceci: «Toute personne, aussi bien seule qu'en collectivité, a droit à la propriété. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété».

Tout bon gouvernement doit manifestement protéger les droits à la propriété. Si les Canadiens sont traités équitablement conformément aux principes de la justice fondamentale et reçoivent une juste compensation pour la propriété qu'on leur prend dans l'intérêt de tous, ils bénéficieront alors du respect et de la dignité qui sont essentiels à tout bon gouvernement.

Un certain nombre d'autres pays démocratiques, dont les États-Unis, l'Allemagne, l'Italie et la Finlande, ont déjà adopté leur loi visant à protéger les droits à la propriété. Par exemple, le 5e amendement, qui a été apporté à la Constitution américaine en 1791, empêche le gouvernement fédéral de priver qui que ce soit de sa vie, de sa liberté ou de sa propriété sans procédure équitable. Il prévoit aussi qu'aucune propriété privée ne peut être confisquée à des fins publiques sans une juste compensation. Le 14e amendement, qui a été adopté en 1868, a étendu ces restrictions aux gouvernements des États.

Le Canada est l'un des nombreux pays qui comptent un fort pourcentage de propriétaires de terres ou de maisons. Et pourtant, c'est le seul des pays industrialisés à ne pas offrir la moindre protection constitutionnelle au droit de propriété. Il est temps que les Canadiens reçoivent la protection convenue, il y a près de 50 ans, à l'ONU. Chaque Canadien doit pouvoir acquérir et garder sa propriété et celle-ci ne saurait être confisquée sans procédure équitable ni juste compensation.

Le droit de propriété n'est pas qu'une abstraction à débattre à la Chambre. Pour beaucoup de Canadiens des régions rurales, cela signifie qu'on garde l'exploitation agricole familiale. Lorsque le gouvernement procède à des expropriations, les propriétaires visés doivent avoir le droit d'être indemnisés au juste cours du marché.

La motion no 205 vise à assurer aux Canadiens que leur propriété est à eux et à eux seulement. Elle vise à leur accorder la protection légitime de leur propriété. À l'heure actuelle, seule la common law protège ce droit. Toutefois, celle-ci peut être remplacée en tout temps par une loi écrite. Le gouvernement peut facilement adopter une loi exigeant que certaines terres ou habitations ou certains biens soient cédés à l'État sans qu'aucune indemnité ne soit versée. Le propriétaire d'un tel bien n'aurait alors aucun recours si le gouvernement décidait de le lui enlever.

Toute loi valide peut dire expressément qu'aucune indemnité n'est payable en cas d'expropriation, et ce n'est pas acceptable. Rien dans la Constitution ne garantit une indemnisation, et le pouvoir du gouvernement dans ce domaine est absolument illimité. Actuellement, les droits de l'individu sont secondaires par rapport aux pouvoirs de l'État et c'est inacceptable.

Sans les garanties prévues dans ma motion, la loi donne aux gouvernements le droit d'adopter des dispositions législatives qui enlèvent à quelqu'un ses biens personnels sans qu'il reçoive une indemnité en retour. La protection fondamentale des droits à la propriété et de contrat doit avoir préséance sur les pouvoirs du gouvernement. Les lois fédérales ne doivent pas supplanter les droits à la propriété individuelle. Il ne faut pas que le gouvernement puisse s'accaparer de biens individuels sans verser une juste indemnité.

Dans les cas où un individu doit renoncer à ses biens, la motion à l'étude garantirait que ces biens ne puissent lui être enlevés autrement qu'en conformité avec les principes de la justice fondamentale.

J'espère que les provinces se chargeront, dans les secteurs qui relèvent de leur compétence, de garantir aux Canadiens vivant à l'intérieur de leur frontières, les droits et libertés que je propose d'offrir au niveau fédéral. Je puis donner aux Canadiens l'assurance que cette motion renforcera la protection des droits à la propriété individuelle.

La motion no 205 ne diminuera pas les droits que les Canadiens ont déjà et n'empêchera pas le gouvernement de s'acquitter de ses fonctions, dans l'intérêt commun du pays. Le gouvernement est censé servir la population. Trop souvent, c'est le contraire qui se produit et c'est la population qui est placée dans la situation où elle


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doit être au service du gouvernement. La motion que je propose redresse ce tort et assure la protection des droits individuels.

(1120)

Le gouvernement a la capacité de protéger les gens, mais il arrive souvent qu'il n'ait pas la volonté de le faire. Il est grand temps que le gouvernement donne un coup de barre et qu'il fasse passer les Canadiens d'abord.

Le droit à la propriété fournit l'une de ces sauvegardes contre la concentration du pouvoir au sein du gouvernement, de quelque ordre soit-il. Le gouvernement doit défendre les droits des gens, et ne pas les leur enlever.

La motion no 205 n'aurait pas pour effet de protéger les particuliers de l'expropriation. Toutefois, elle garantirait que l'expropriation se fasse d'une manière juste et équitable. Elle empêcherait le gouvernement de décider arbitrairement de la compensation à verser, s'il en est.

Ma motion simplifierait la mise en oeuvre de la protection du droit de propriété. Elle conférerait des droits aux Canadiens et les protégerait sans qu'il soit nécessaire de modifier la Constitution. Pour modifier la Charte des droits et libertés, il faut l'appui des deux tiers des provinces et 50 p. 100 de la population, ce qui est clairement difficile à faire. Toutefois, en modifiant la Déclaration canadienne des droits, cela pourrait être fait ici même à la Chambre.

Comme nous l'avons dit dans le passé, tous les partis croient au droit de propriété et tiennent à ce qu'il soit respecté. Tous les partis à la Chambre appuient ce droit. Les Canadiens estiment plus que jamais que ce droit doit être protégé.

Bref, le droit de propriété individuel est une liberté fondamentale qu'il faut protéger. Ce n'est pas une question partisane, mais une question de justice fondamentale. J'espère que les députés représenteront le point de vue de leurs électeurs quand ils voteront en faveur de cette motion et du droit de propriété.

M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat sur la motion du député de Comox-Alberni.

Le député propose de modifier les dispositions sur les droits de propriété contenues dans la Déclaration canadienne des droits. L'article 1 de la Déclaration canadienne des droits reconnaît le droit de l'individu à la vie, à la liberté, à la sécurité de la personne ainsi qu'à la jouissance de ses biens, et le droit de ne s'en voir privé que par l'application régulière de la loi.

Le droit de propriété est donc déjà protégé dans la Déclaration canadienne des droits. Il est également protégé, au palier fédéral, par diverses lois et par la common law. Il convient de se rappeler, à mon sens, que la Déclaration canadienne des droits ne s'applique qu'au palier fédéral, tandis que la Charte canadienne des droits et libertés s'applique à tous les paliers de gouvernement.

Il faut également souligner que la Constitution confie aux provinces une bonne part de la responsabilité de la réglementation concernant la propriété. En fait, le paragraphe 92(13) de la Loi constitutionnelle porte que les provinces détiennent le pouvoir exclusif d'adopter des lois concernant la propriété et les droits civils sur leur territoire.

Cela ne veut pas dire que le gouvernement ne peut pas légiférer en matière de propriété, mais plutôt, que son pouvoir est limité à cet égard. Les lois fédérales ne régissant pas l'aliénation des biens. Cependant, il existe des lois garantissant aux citoyens un traitement équitable, c'est-à-dire des lois garantissant des procédures et des compensations justes.

En outre, il existe en common law d'innombrables garanties visant les droits de propriété. Ces droits constituent un élément fondamental de notre système juridique et ils sont reconnus de bien des manières dans nos lois.

Par exemple, la common law prévoit le versement de compensations lorsqu'une personne est privée de la jouissance de ses biens. En général, les droits de propriété des Canadiens moyens sont très bien protégés par les lois fédérales et la common law, notamment par la Déclaration canadienne des droits. J'oserais dire que c'est également le cas au palier provincial.

(1125)

À l'appui de la motion, le député de Comox-Alberni a mentionné que, en protégeant les droits à la propriété, on se trouverait à protéger la ferme familiale et le domicile des Canadiens, mais ce sont clairement là des secteurs qui seraient réglementés par la législation provinciale, comme c'est le cas actuellement.

Toute cette protection des droits à la propriété reflète la valeur que nous, les Canadiens, attachons à ces droits. Le droit de posséder des choses, une maison, une voiture ou d'autres biens est essentiel à notre mode de vie. Le droit d'utiliser nos biens et d'en disposer est aussi fondamental, même si nous reconnaissons qu'il a des limites, point sur lequel je reviendrai plus tard.

Les droits à la propriété sont enracinés dans notre système judiciaire. En fait, l'un des fondements de ce système est le droit de posséder des biens et d'en disposer. Les lois adoptées par le Parlement et la jurisprudence sont remplis d'exemples de règles concernant la propriété et l'utilisation de biens. Par exemple, nos lois concernant les biens immobiliers, qu'il s'agisse de terres ou d'immeubles, renferment de nombreuses règles protégeant à la fois les acheteurs et les vendeurs. Dans la plupart des provinces, ces règles ont été intégrées aux lois qui régissent l'achat et la vente des biens.

Lorsque je considère le vaste éventail de lois et de précédents judiciaires qui protègent les droits à la propriété, il n'est pas clair pour moi qu'il soit nécessaire d'ajouter d'autres mesures de protection dans la Déclaration canadienne des droits. En tenant compte de


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cela, il est important de réfléchir à ce que la modification proposée ferait en réalité.

Elle distinguerait les droits à la propriété de tous les autres droits dans la Déclaration canadienne des droits pour leur assurer une protection spéciale. La modification vise seulement les droits à la propriété et pas les autres droits protégés dans la Déclaration canadienne des droits. Je ne comprends pas pourquoi nous voudrions faire cela, pourquoi nous voudrions une protection spéciale pour certains droits et pas pour d'autres qui sont aussi essentiels à la vie au Canada.

La modification proposée établirait une hiérarchie des droits dans la Déclaration canadienne des droits, ce qui, à mon avis, ne convient pas. Tous les droits protégés dans la Déclaration canadienne des droits sont d'une importance égale.

La Déclaration canadienne des droits est très importante sur le plan historique. Elle représente l'une des premières étapes vers la consécration des droits dans la Constitution. Un peu plus de 20 ans après l'adoption de la Déclaration canadienne des droits, nous avons assuré la protection constitutionnelle des droits en adoptant la Charte canadienne des droits et libertés. Depuis ce temps, nous avons consacré nos énergies sur cette charte.

À mon avis, nous ne devrions pas modifier la Déclaration canadienne des droits. Si nous le faisions, nous ouvririons la porte à toutes sortes d'autres modifications. Nous avons passé beaucoup de temps à débattre la Charte canadienne des droits et libertés. Nous avons jugé bon de l'adopter, et je ne pense pas qu'il faille se laisser entraîner à nouveau dans ce genre de débats.

La charte a eu et continuera d'avoir une forte influence sur la société canadienne. Il faut continuer à axer nos énergies sur elle et sur sa mise en application.

J'ai déjà expliqué que le droit de posséder et de se débarrasser de biens n'est pas un droit illimité. J'ai signalé également qu'il existe de nombreuses lois réglementant la propriété et l'utilisation des biens dans la société canadienne. Les règlements municipaux, la législation environnementale, la législation réglementant la constitution et le fonctionnement des sociétés à responsabilité limitée, la législation réglementant le partage des biens familiaux, la législation successorale, la législation sur les sûretés immobilières ne sont que quelques exemples parmi les innombrables lois et règlements qui touchent la propriété et l'usage des biens.

Il est difficile de trouver des lois qui ne touchent pas d'une façon ou d'une autre la propriété. Par conséquent, il nous incombe de réfléchir soigneusement aux conséquences d'une modification de la protection des droits à la propriété dans un document général sur les droits de la personne.

(1130)

Les États-Unis ont une grande expérience dans ce domaine. Les premières expériences américaines n'étaient pas très bonnes. On a invoqué les droits constitutionnels à la propriété pour empêcher l'adoption de lois utiles sur le plan social, comme des lois réglementant les heures de travail.

Par la suite, les tribunaux ont adopté une attitude plus éclairée. Malgré tout, les tentatives qui ont été faites pour réglementer l'environnement, le commerce d'oiseaux menacés d'extinction et l'utilisation des terres ont donné lieu à des contestations judiciaires fondées sur les droits à la propriété et sur la déclaration des droits américaine. Cette sorte de disposition générale compliquait la réglementation de toute une série de secteurs où le bien public est en cause et où c'est nécessaire.

Un autre problème que le contexte et l'expérience des Américains nous permettent de discerner est que les tribunaux américains ont élargi la notion de biens pour l'appliquer à des choses que l'on ne concevait pas au moment où les droits à la propriété ont été adoptés.

Il me semble que les permis et licences ainsi que les emplois à la fonction publique sont interprétés comme des formes de biens auxquels s'appliquent les dispositions de la U.S. Bill of Rights. Les tribunaux canadiens ont démontré qu'ils interpréteront les dispositions de la charte et les autres lois et règlements concernant les droits de la personne à leur propre façon.

C'est évident, à en juger d'après les nombreux jugements rendus par des tribunaux de toutes les régions du pays en ce qui concerne l'application de la Charte des droits et libertés au Code criminel et à d'autres lois. Il est manifeste que les tribunaux canadiens ont adopté une attitude typiquement canadienne à l'égard de la charte et de la législation concernant les droits fondamentaux de la personne.

Cependant, les modifications proposées laisseraient une incertitude en ce qui concerne le sens des droits de propriété tels que proposés par le député de Comox-Alberni et leurs répercussions sur un vaste éventail de lois qui visent la propriété d'une façon ou de l'autre.

Il existe, au niveau fédéral, des lois concernant l'environnement, l'utilisation des terres, la création et l'exploitation de sociétés, la propriété et la cession d'actions, des lois sur les banques, sur la faillite et sur le droit d'auteur.

D'une façon ou de l'autre, toutes ces lois sont en rapport avec la propriété et l'utilisation des biens. Chacune correspond à un intérêt public important. Je m'inquiète des répercussions qu'une disposition générale concernant les droits de la propriété pourrait avoir sur ces lois. Je crains que des lois socialement importantes ne soient contestées en justice. Les questions concernant la conception et le fonctionnement de ces lois devraient être soumises au Parlement.

Je suis conscient que la motion repose sur de bonnes intentions. À l'instar du député de Comox-Alberni, je suis convaincu de l'importance des droits de propriété dans notre société et dans notre système juridique.

Toutefois, j'estime que nos lois et notre common law ont plus que ce qu'il faut pour protéger les droits de la propriété. C'est pourquoi, je ne crois pas nécessaire d'apporter les modifications proposées à la Déclaration canadienne des droits. Je suis plutôt préoccupé par les répercussions qu'auraient ces modifications.

À la lumière de l'expérience américaine, nous ne savons pas comment elles seraient interprétées. Nous ferions beaucoup mieux


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de continuer de compter sur les garanties que la loi actuelle offre déjà aux droits de propriété.

Pour les raisons que j'ai invoquées, notamment la crainte d'une interprétation très générale ou vague d'une déclaration de droits par les tribunaux, ou pour les autres raisons que j'ai mentionnées, je ne puis accorder mon appui à cette motion, bien que j'approuve l'intention sur laquelle elle repose et les droits de propriété en général.

[Français]

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir sur cette motion qui a été présentée par le député de Comox-Alberni sur le droit de propriété et qui, essentiellement, demande l'inclusion de ce droit dans la Charte canadienne des droits et libertés.

(1135)

Avant d'intervenir sur le fond, laissez-moi vous dire que je suis un peu étonné de voir que nos collègues du Parti réformiste ramènent pour la deuxième fois ce débat en cette Chambre, non pas que le débat sur le droit de propriété ou le droit de propriété en lui-même ne soient pas importants, au contraire. J'y reviendrai. Cela démontre un peu les priorités de ce parti qui se dit de la réforme, priorités qui font en sorte que l'on nie le droit aux individus d'être ce qu'ils sont, c'est-à-dire Noirs ou homosexuels, comme on a pu le constater lors du débat du projet de loi C-33.

La négation de ce droit aurait comme conséquence, par exemple, pour certains individus reconnus comme étant gais ou lesbiennes l'impossibilité de travailler ou la perte de leur emploi. Par contre, si jamais ce Noir ou ce gai parvient à travailler sans que personne ne connaisse son état et qu'il possède une propriété, nos amis du Parti réformiste vont déchirer leur chemise pour faire en sorte que ce droit à la propriété lui soit reconnu et défendu envers et contre tous. Alors, cela me rend un peu perplexe par rapport aux priorités que ce parti peut avoir.

Cela étant dit, bien sûr que le droit de propriété dont il est fait mention dans la motion est un droit important, reconnu depuis des siècles dans notre société. Il est à la base même du fonctionnement de notre société dans plusieurs domaines, si on se réfère entre autres à la taxation foncière ou au droit de vote au niveau scolaire rattaché au droit de propriété, droit qui est reconnu, balisé par les lois des législatures provinciales, encore là depuis des décennies. Mais, il faut se poser des questions avant de poser ce geste d'inclure ce droit dans la Charte des droits et libertés. Il faut connaître les véritables intentions, les motifs qui pourraient nous amener à procéder de cette façon.

Si on inclut le droit de propriété dans la Charte des droits et que ce droit devient immuable, ce n'est pas un progrès pour notre société, mais plutôt un recul. Cela voudrait donc dire qu'on reviendrait un peu à l'esprit qui régnait au siècle passé, qui faisait en sorte que le droit de propriété pouvait être invoqué pour empêcher tout progrès social ou les progrès de la majorité d'un groupe ou d'une population.

Je suis convaincu que ce droit à la propriété a été réclamé à plusieurs reprises par les riches propriétaires terriens d'Amérique du Sud ou d'ailleurs dans le monde qui, dans certains pays au nombre de trois ou quatre, possédaient à peu près la majorité des terres. J'imagine que lorsque les populations de ces pays, de ces régions, se sont soulevées contre cet état de fait, ces propriétaires ont, au nom du droit de propriété, argumenté qu'il leur fallait garder ces propriétés en leur possession et donc diminuer tout progrès social pour ces groupes de personnes.

J'ai mentionné, ainsi qu'un collègue du Parti libéral, que le droit à la propriété est un droit important, fondamental qui doit être préservé et qui est préservé par nos lois actuelles.

(1140)

Par exemple, en fait je vous citerai deux exemples, si on parle de l'expropriation, nos lois provinciales prévoient un mécanisme pour baliser l'expropriation. Ce mécanisme oblige le le gouvernement à aviser les personnes expropriées suffisamment longtemps d'avance pour leur permettre de faire valoir leurs droits, c'est-à-dire avoir une évaluation juste et équitable de leur propriété, décision pouvant être contestée devant les tribunaux, et obtenir ensuite une juste compensation. Ce sont exactement les motifs que l'on retrouve dans la motion du député de Comox-Alberni. Tout cela se fait déjà, tout cela existe.

Je n'ai pas vu dans mon comté ou au Québec de manifestations dans les rues ou dans les autobus de personnes qui demandaient que l'on donne plus de vigueur au droit de propriété.

Comme j'ai mentionné au début de mon intervention, opposer ou comparer le droit de propriété à d'autres droits fondamentaux inscrits dans la Charte canadienne des droits et libertés, tels que le droit à la liberté de conscience, de religion, d'opinion, d'expression, d'association, le droit de vote, le droit à la vie, le droit à l'égalité qui sont des droits ayant pour objet de préserver l'identité des personnes, n'est pas vraiment valable.

Quelle identité le droit à la propriété en lui-même donne-t-il à une personne? Est-ce le fait d'avoir une propriété ou est-ce la valeur de la propriété qui donne de la valeur à l'identité de la personne? Je pense qu'il faut faire une distinction entre ces droits fondamentaux.

J'aimerais également souligner que dans le passé, et notre collègue réformiste l'a fait remarquer, cette idée d'introduire le droit de propriété dans la Charte canadienne des droits et libertés ou dans une charte des droits et libertés a été soulevée à plusieurs occasions. En 1968, l'ex-premier ministre du Canada, M. Pierre Elliott Trudeau, en avait fait son projet. C'est revenu sur le tapis en 1978 quand une motion, que l'on retrouvait à l'époque dans le projet de loi C-60, a été rejetée.

Également, en 1980, le gouvernement fédéral avait voulu introduire une nouvelle garantie quant au droit de propriété. Encore là, plusieurs objections ont été manifestées, objections qui sont toujours à propos aujourd'hui. Je pense bien sûr à l'opposition des provinces. En fait, toutes les provinces s'opposent à l'idée d'inclure dans la Charte des droits et libertés ce droit à la propriété, puisque


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cela viendrait limiter d'une façon importante leur pouvoir de légiférer en cette matière.

Par exemple, dans le domaine de l'environnement, comment un gouvernement provincial pourrait-il légiférer dans le domaine de l'environnement si le droit à la propriété est enchâssé dans la Constitution? Cela viendrait compliquer énormément la possibilité provinciale d'agir en ce domaine. Je pense que des complications constitutionnelles, des complications administratives, des complications de négociations fédérales-provinciales, on en a suffisamment. Le Parti réformiste dénonce cette situation régulièrement, alors, je ne vois pas l'opportunité ou la nécessité d'en rajouter par l'adoption d'une telle motion.

L'inclusion du droit de propriété dans la Charte des droits pourrait aussi avoir des conséquences énormes dans le domaine de la législation sur le mariage. On l'avait soulevé lors du débat en cette Chambre, il y a deux ans.

(1145)

Qu'arriverait-il, par exemple, lors d'un divorce, si l'homme allait en cour pour faire valoir son droit à la propriété, allant à l'encontre de la loi du Québec sur le patrimoine qui stipule que, lors d'une séparation, les biens doivent êtres divisés également entre l'homme et la femme? Il y a plusieurs applications d'une telle disposition qui serait de nature à nuire considérablement au fonctionnement actuel de notre société.

Voilà, en résumé, les motifs pour lesquels, il y a deux ans, l'opposition officielle s'était opposée à la motion qui avait alors été présentée devant cette Chambre, et voilà également les motifs pour lesquels, encore aujourd'hui, nous allons voter contre cette motion.

[Traduction]

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, nous sommes ici aujourd'hui pour examiner et, idéalement, pour appuyer et adopter la motion no 205 concernant les droits à la propriété individuelle.

Ce n'est pas un sujet nouveau mais, étant donné que cela fait depuis 1968 au moins que les parlementaires et d'autres au Canada essaient de modifier la Déclaration canadienne des droits ou la Charte canadienne des droits et libertés pour y inclure une disposition sur les droits à la propriété, le temps est peut-être venu de le faire.

Si je trouve difficile de marcher sur les traces de Pierre Trudeau, je ne vois aucune difficulté à appuyer une modification logique de la déclaration des droits pour prévoir une meilleure protection des droits à la propriété individuelle.

Logiquement, je ne vois aucune raison de ne pas appuyer la motion. C'est une question qui, tout simplement, transcende les politiques partisanes. L'histoire qui se cache derrière cette motion montre que c'est une question non partisane et apolitique.

Dans l'état actuel des choses, le droit d'une personne de posséder et d'utiliser un bien ainsi que de jouir de ce bien est bien peu protégé. Le peu de protection accordé à ce droit se trouve dans la Déclaration canadienne des droits, le document historique deM. Diefenbaker.

La beauté de cette motion est qu'elle ne menace ni les provinces ni les groupes d'intérêts qui sont contre le fait d'inclure les droits à la propriété dans la Charte canadienne des droits et libertés parce que ce serait là, estiment-ils, une occasion s'ingérer dans des domaines relevant exclusivement de la compétence des provinces. En modifiant la Déclaration canadienne des droits, on évite ce problème et on apaise ainsi les préoccupations des provinces.

Il est temps de reparler de cette question, jusqu'ici laissée en veilleuse, d'apaiser les craintes de certains, notamment du Nouveau Parti Démocratique qui peut extrapoler quand il n'y a pas lieu, de ne plus se dérober et de donner aux Canadiens une protection fondamentale.

Pierre Trudeau a essayé plusieurs fois d'inclure les droits à la propriété d'abord dans la Déclaration canadienne des droits, puis dans le projet de charte des droits dela personne et, enfin, dans un projet de loi sur la réforme constitutionnelle. Ces tentatives ont été suivies, en 1987, par la présentation à la Chambre des communes, par le député conservateur John Reimer, d'une motion sur les droits à la propriété qui a été appuyée à la majorité par 108 voix contre 16.

En 1982, une résolution sur les droits à la propriété a été adoptée par l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique. Une autre résolution a reçu un soutien très similaire à l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick, en 1983, et à l'Assemblée législative de l'Ontario en 1986.

En 1987, l'Association canadienne de l'immeuble a fait faire un sondage dont les résultats ont révélé que 81 p. 100 des Canadiens estimaient que les droits à la propriété étaient passablement ou très importants. Dans un document de suivi publié en 1991, l'association a demandé que l'on modifie la charte pour inclure les droits à la propriété.

(1150)

La lacune flagrante de la Déclaration des droits, et plus encore de la Charte, c'est l'absence de reconnaissance du droit à la propriété. Si l'on pense au cinquième amendement de la constitution américaine, qui consacre le principe du respect des garanties procédurales et du dédommagement en cas d,atteinte à la propriété privée, nous sommes arriérés au Canada, et tristement inconscients de ce droit fondamental. Bien des observateurs, dont des constitutionnalistes et des magistrats, ne comprennent pas pourquoi nous privons ainsi les Canadiens d'un droit fondamental.

Si nos préoccupations sont engendrées par l'absence de définition du droit à la propriété, il suffit d'ouvrir le dictionnaire du droit canadien pour trouver la définition qui convienne. Ce dictionnaire établit deux formes de propriété: d'une part, les biens immeubles, terres, habitations ou droits portant sur tout bâtiment érigé sur les terres; et d'autre part, les biens meubles, marchandises, objets, effets personnels, etc.


3534

Dans l'état actuel des choses, le gouvernement jouit de pouvoirs législatifs illimités lui permettant de prendre possession de la propriété privée sans indemnisation. Il peut intervenir arbitrairement pour exproprier des particuliers sans leur verser la moindre indemnisation. Dans un pays comme le Canada, c'est passablement inquiétant.

On en a subi les conséquences deux fois, récemment. Ce fut le cas plus précisément avec le projet de loi C-22, devenu maintenant le projet de loi C-28, ou la débâcle de l'aéroport Pearson, et avec le projet de loi C-68 sur les armes à feu. Ce sont deux situations où l'on a foulé aux pieds le droit à la propriété et qui n'auraient jamais pu se produire si nous avions adopté la modification pour consacrer ce droit.

C'est un droit inhérent de chacun de pouvoir jouir de ses biens meubles et immeubles et nul ne peut être privé de cette jouissance sans se voir accorder une audition impartiale et un dédommagement équitable. C'est loin d'être une idée radicale, et si ces deux conditions ne sont pas respectées, ce n'est pas exagéré de prévoir la possibilité d'un recours en justice.

Ce serait une protection contre la tyrannie que peut engendrer la concentration des pouvoirs gouvernementaux. Il existe une interdépendance fondamentale entre les droits et libertés individuels et le droit de l'individu à la propriété. Le droit à la propriété est la pierre angulaire de toute société civilisée. Il découle de la notion qu'on est maître de soi et du fruit de son travail.

Cette motion enrichira la société canadienne. Elle protégera les libertés individuelles ainsi que l'environnement. Les gens protègent le milieu qui les entourent, ce qui leur appartient. Les gouvernements doivent considérer le capital politique qu'ils gagnent à protéger l'environnement et, ainsi, les biens personnels. Il semble tellement injuste de priver les Canadiens de ce principe de base dans la vie. Ne permettons pas que cette occasion nous échappe une fois de plus.

C'est une question tellement fondamentale qu'il est difficile de ne pas se répéter dans un débat sur cette question. Ceux qui sont opposés à ce que l'on légifère le droit à la propriété extrapolent divers scénarios déraisonnables pour prouver qu'ils ont raison. La question critique est de définir la propriété d'une façon pratique et utilisable.

Le cinquième amendement à la Constitution des États-Unis protège la propriété privée. Après 200 ans, on peut dire que, dans ce pays-là, la définition a résisté à l'épreuve du temps.

Le Canada a l'occasion de définir la propriété privée dans un contexte canadien, afin que nous ayons les mêmes normes de protection de la propriété privée que les autres démocraties occidentales. Il n'y a rien dans le droit constitutionnel canadien qui exige que la saisie obligatoire d'une propriété suive une procédure juste et qu'elle soit accompagnée d'une juste indemnisation du propriétaire.

Cette motion aurait pour effet d'étendre le droit à la propriété privée aux personnes morales, comme les sociétés. Pour le gouvernement fédéral, cela signifierait que pour l'adoption d'une mesure législative comme celle de l'aéroport Pearson, dont l'effet est d'annuler les contrats et les ententes sans indemnisation, il faudrait une majorité des deux tiers à la Chambre des communes. L'effet net, c'est que le gouvernement libéral n'aurait pas pu faire adopter un projet de loi comme celui de Pearson sans l'appui des autres partis. C'est donc une disposition éclairée sur une question fondamentale.

(1155)

En résumé, je voudrais citer quelques mots qui ont été prononcés en octobre 1995 à l'Association canadienne de l'immeuble. D'ailleurs, monsieur le Président, vous reconnaîtrez peut-être ces propos, puisqu'ils sont de vous. Le député d'Edmont-Sud-Est disait:

Dans les pays où ces droits sont faibles ou inexistants, le pouvoir arbitraire et les privilèges spéciaux de l'élite sont accrus, tandis que le pouvoir de l'homme de la rue est diminué. Sans la protection de la loi, le citoyen moyen est sans pouvoirs face à un État qui existe seulement pour se perpétuer et se renforcer, ainsi que servir son élite.
En Union soviétique, par exemple, l'individu ne peut jamais dire à l'État ou à ses fonctionnaires: «Ceci est à moi et vous ne pouvez pas me l'enlever.» Le principe du droit et la justice fondamentale ne sont qu'un rêve pour les habitants de l'URSS.
Évidemment, les choses ont changé depuis cette déclaration, mais je pense que le principe reste essentiel. Et c'est la raison pour laquelle le Parti réformiste a soulevé cette question plus d'une fois.

M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir parler de cette motion. Le député de Comox-Alberni a proposé une motion qui demande une plus grande protection des droits à la propriété individuelle, par modification de la Déclaration canadienne des droits. Nous devons reconnaître que la Déclaration canadienne des droits fait partie de l'engagement de longue date du Canada envers la protection des droits de la personne.

La Déclaration canadienne des droits protège déjà les droits des personnes à la propriété. Le Canada s'est engagé dans un mouvement de protection des droits de la personne parce qu'il voulait veiller à ce que des atrocités comme celles commises à l'égard de millions de Juifs, de membres de minorités ethniques, de dissidents politiques, de déficients intellectuels et physiques et d'homosexuels ne se produisent pas au Canada.

Des gens ont été privés de leurs droits à la propriété, confinés dans des ghettos, emprisonnés, détenus dans des camps de travail et assassinés par les nazis. Ces événements terribles ont eu un impact profond sur la conscience sociale de tous les peuples, et sur celle des Canadiens en particulier. Ils ont incité les Nations Unies à rédiger la Déclaration universelle des droits de l'homme et le Parlement canadien de l'époque à rédiger la Déclaration canadienne des droits.

Cette déclaration est une loi de nature quasi constitutionnelle. Bon nombre des dispositions qu'elle renferme ont été remplacées par des dispositions précises de la Charte canadienne des droits et libertés. Étant donné que la Charte ne contient aucune disposition se rapportant aux droits à la propriété, on peut donc conclure que cette disposition de la Déclaration canadienne des droits demeure en vigueur et protège les droits à la propriété.


3535

La Déclaration canadienne des droits stipule que:

Il est par les présentes reconnu et déclaré que les droits de l'homme et les libertés fondamentales ci-après énoncés ont existé et continueront à exister pour tout individu au Canada quels que soient sa race, son origine nationale, sa couleur, sa religion ou son sexe:
a) le droit de l'individu à la vie, à la liberté, à la sécurité de la personne ainsi qu'à la jouissance de ses biens, et le droit de ne s'en voir privé que par l'application régulière de la loi;
On peut donc dire que cette disposition assure la protection que le député demande. Une personne ne peut être privée de ses droits à la propriété, sauf par l'application régulière de la loi. Nous devons nous rappeler que la Déclaration canadienne des droits ne s'applique qu'aux lois fédérales. Contrairement à la charte, elle ne s'applique pas aux lois provinciales.

Outre la protection des droits à la propriété assurée dans la Déclaration canadienne des droits, nous avons adopté des lois fort complexes qui réglementent et protègent la propriété et la jouissance de la propriété. Par exemple, les lois sur les immeubles et les biens personnels réglementent l'acquisition et l'utilisation de tous les genres de propriété. Ces lois protègent les individus contre la fraude et autres erreurs pouvant entraîner des pertes matérielles.

Au fil des ans, la définition de ce qu'est la propriété et la protection du droit de jouir de son bien ont évolué. La Loi fédérale sur le divorce et la législation familiale provinciale et territoriale font en sorte que les femmes reçoivent leur juste part des biens et des avoirs du ménage, peu importe qui en a titre légal.

(1200)

Le mot «propriété» revêt de nombreuses acceptions. Aux États-Unis, le droit de jouissance garanti par la Constitution s'applique également à la permanence des postes universitaires, au permis de conduire et au prestations d'invalidité. Je crains qu'une définition plus détaillée du droit de propriété n'ait une incidence sur les avantages sociaux et sur la division des avoirs en vertu de la Loi sur le divorce.

Bien entendu, comme tous les autres droits, le droit de jouir de ses biens est soumis à certaines restrictions. Il est limité par les lois qui régissent l'utilisation des biens dans l'intérêt du public. La législation concernant l'utilisation des sols, la planification et le zonage peut imposer des limites quant au genre de bâtiment pouvant être construit sur un terrain résidentiel. La législation environnementale réglemente tout, de l'élimination des déchets dangereux à l'enlèvement des arbres. Certaines lois réglementent les transactions et l'actionnariat relativement aux sociétés à responsabilité limitée. D'autres lois réglementent les faillites et le régime de propriété des terrains appartenant à des non-Canadiens, et la liste ne s'arrête pas là.

Toutes ces lois imposent des limites véritables au régime de propriété et à la jouissance des biens, et personnes ne met en doute qu'elles soient nécessaires. Nous devons garder à l'esprit ces restrictions du droit de jouissance lorsque nous envisageons de modifier la Charte canadienne des droits et libertés.

La notion de propriété ne se limite pas aux biens immobiliers. Étant donné l'acception très large qu'on peut donner aux biens immobiliers et aux biens personnels, il faut faire très attention quand on envisage de modifier le régime de protection du droit de propriété au moyen d'un document quasi constitutionnel.

Nous savons que l'expérience des Américains n'a pas toujours été des plus heureuses en ce qui concerne le droit de propriété et la Constitution. On remarquera également que les groupes de défense des femmes ont un certain nombre de réserves à l'égard de la constitutionnalisation du droit de propriété. La notion qu'un homme est maître chez lui est un concept troublant pour beaucoup de femmes qui se sont vu refuser leur juste part des avoirs familiaux. Il y a quelques années à peine, une femme s'est vu refuser une part de la ferme familiale où elle avait travaillé pendant de nombreuses années.

Nous avons dépassé ce stade en accordant une protection légale aux femmes. Néanmoins, nous vivons dans une société complexe, où les intérêts sont nombreux et les droits, concurrents. Du partage du foyer conjugal aux règlements en matière d'environnement et de zonage, force nous est de reconnaître que les droits ne sont pas absolus.

En terminant, j'estime qu'au Canada les droits de propriété sont bien protégés par la charte des droits, par les autres lois et par le common law. Le gouvernement doit relever des défis autrement plus urgents que celui de protéger davantage les droits de propriété.

Le gouvernement s'est fixé comme objectif de protéger notre filet de sécurité sociale, et cela comprend le renouvellement de notre régime de santé, tout en réduisant le déficit. Il s'efforce créer des possibilités pour les jeunes, qui sont notre avenir. Nous sommes préoccupés par les obstacles auxquels doivent faire face les autochtones et les personnes handicapées. Concentrons-nous sur ces besoins plus urgents.

Soit, les droits de propriété sont importants, mais j'estime qu'ils sont assez bien protégés par les lois qui sont actuellement en vigueur, et notamment la Charte canadienne des droits. Je ne saurais souscrire à cette motion.

Le vice-président: Si un député du Parti réformiste désire poursuivre, il reste une minute.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je sais qu'il ne reste qu'une minute. Il est difficile de seulement résumer la discussion qui a eu lieu jusqu'ici aujourd'hui.

L'insertion des droits de propriété fait l'objet d'une controverse au sein du Parti réformiste depuis qu'il existe. Nous estimons que les Canadiens ont le droit de posséder des biens et d'en jouir paisiblement. C'est une des raisons pour lesquelles beaucoup de gens ont demandé aux rédacteurs de l'accord de Charlottetown de bien vouloir examiner les droits des honnêtes citoyens de jouir et de faire usage de leurs biens sans en être privés, sinon dans le respect de l'application régulière de la loi.

Les députés devraient considérer que cela signifie non seulement être maître dans sa maison, mais également propriétaire de cette

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dernière. Cela signifie avoir le droit de jouir de ses biens, qu'il s'agisse d'une maison ou d'un chalet, et d'en être propriétaire.

Les gens tiennent pour acquis les droits de propriété au Canada. Ils présument que ces droits leur appartiennent. Cependant, cette motion veillera à ce que ces droits soient légalement protégés.

[Français]

Le vice-président: La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorités au Feuilleton.

______________________________________________


3536

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1205)

[Traduction]

LOI DE 1996 VISANT À AMÉLIORER
LA LÉGISLATION PÉNALE

L'hon. Ralph E. Goodale (au nom du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) propose: Que le projet de loi C-17, Loi modifiant le Code criminel et certaines lois, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé au Comité permanent de la justice et des questions juridiques.

M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de présenter la motion de deuxième lecture du projet de loi C-17.

Le projet de loi a déjà été présenté en tant que projet de loi C-118, le 14 décembre 1995. À ce moment, on avait fait remarquer que la mesure complétait une série de réformes importantes au droit pénal commencées en juin 1994, au moyen de la présentation d'une mesure du même genre, le projet de loi C-42. La majeure partie de ce dernier, aujourd'hui la Loi de 1994 modifiant la législation pénale, est entrée en vigueur le 15 février 1995 et le reste, le 1er avril 1995.

Dans le passé, on présentait régulièrement des projets de loi renfermant des modifications d'ordre général au Code criminel. Toutefois, pendant le débat sur le projet de loi C-42, on a souligné que la dernière mesure du genre datait de 1985. Le député de London-Ouest de l'époque s'est engagé, au nom de la ministre de la Justice d'alors, à reprendre l'habitude de présenter périodiquement des mises à jour des lois pénales. Le projet de loi C-17 donne suite à cet engagement.

Le projet de loi C-42 avait été bien accueilli et, plus tôt ce mois-ci, à la conférence annuelle des ministres de la Justice du gouvernement fédéral, des provinces et des territoires, les homologues du ministre de la Justice lui ont demandé de présenter un projet de loi qui continue la mise à jour entreprise avec le projet de loi C-42.

S'il est adopté, le projet de loi dont nous sommes actuellement saisis sera connu sous le nom de Loi de 1996 visant à améliorer la législation pénale. Il porte surtout sur le Code criminel, mais renferme aussi des modifications à la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur la défense nationale, la Loi sur l'administration des biens saisis et la Loi sur la Cour suprême.

Dans le sommaire, on indique qu'on a pris soin d'obtenir la participation de ceux qui possèdent le mieux la connaissance théorique et pratique de notre système de justice pénale. Le projet de loi donne suite aux propositions faites par la Section du droit criminel de la Conférence sur l'harmonisation des lois au Canada, l'ancienne Commission de réforme du droit du Canada, de nombreux juges des tribunaux provinciaux et fédéraux, des avocats, l'Association canadienne des chefs de police, l'Association canadienne des policiers, des policiers qui sont sur la première ligne et des fonctionnaires des ministères de la Justice fédéral et provinciaux.

Il y a également des modifications qui ont été suggérées par d'autres sources. Par exemple, dans une lettre au ministre de la Justice, Enfants Retour Canada a fait remarquer qu'on ne peut obtenir l'autorisation de faire de l'écoute électronique à l'égard de certaines infractions d'enlèvement. Le projet de loi C-17 modifiera donc les définitions de «infraction» à l'article 183 du Code criminel afin d'inclure ces infractions d'enlèvement. Le recours à l'écoute électronique deviendra alors possible.

La Fédération canadienne des municipalités a adopté une résolution visant à faciliter aux policiers la tâche de réprimer l'infraction consistant à flâner dans un endroit public au point de gêner les personnes qui s'y trouvent. Le projet de loi C-17 modifiera donc le paragraphe 175(2) du Code criminel afin de rendre plus facile aux policiers d'apporter la preuve concernant les individus flânant dans les endroits public au point de gêner les personnes qui s'y trouvent.

L'Association des banquiers canadiens a écrit au ministre de la Justice pour lui faire part de ses inquiétudes à propos du nombre croissant de délits informatiques commis au moyen de cartes de crédit et d'ordinateurs. Le Bureau d'assurance du Canada, de même que les milieux policiers canadiens, ont fait remarquer que les passagers des automobiles prises sans le consentement du propriétaire ne pouvaient pas être accusés de se balader dans une voiture volée, d'après le libellé actuel du Code criminel.

Nous apprécions que des citoyens intéressés nous exposent les problèmes qu'ils ont identifiés dans notre droit pénal, et nous sommes heureux de pouvoir remédier à certains de ces problèmes au moyen de ce projet de loi. Remédier aux problèmes signalés par les professionnels de la justice pénale et par le public canadien ne peut qu'accroître la confiance publique dans notre système de justice pénale. Cela constitue d'ailleurs un des principaux objectifs de la mesure à l'étude et du gouvernement.

Avec le projet de loi C-17, nous cherchons également à rendre l'application des dispositions du Code criminel plus économique et plus efficace, à faire respecter les jugements des tribunaux, à combler les lacunes décelées dans le Code criminel, à profiter des progrès des communications informatiques et de la technologie vidéo, à améliorer les procédures judiciaires et à assurer une plus grande équité aux participants au processus judiciaire.

(1210)

Je suis convaincu que les modifications proposées nous donneront un système de justice pénale plus économique, sans rien enlever à son équité fondamentale. Il est particulièrement important de moderniser et de rationaliser notre droit pénal en ces temps d'austé-


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rité budgétaire. Nous sommes tous appelés à faire plus avec moins. Il faut pour cela allouer judicieusement les maigres ressources judiciaires. Cela exige que les ressources disponibles soient consacrées uniquement aux procédures qui servent à des fins utiles.

Nous devons faire notre possible pour alléger les pressions qui s'exercent sur les budgets de la justice. Cela vaut non seulement pour les coûts que les services de police, les procureurs et les tribunaux doivent assumer, mais également pour les frais juridiques de la défense contre les accusations au criminel, que ces coûts soient à la charge des accusés ou de l'assistance judiciaire.

En bref, nous voulons avoir un système de justice pénal plus petit et dont les efforts sont mieux canalisés. Les améliorations proposées dans ce projet de loi nous feront franchir un grand pas dans cette voie.

L'une des manières d'améliorer l'efficacité et l'efficience du Code criminel est de moderniser certaines procédures au tribunal ou en dehors de la salle d'audience. À titre d'exemple, un agent de la paix qui a remis un avis ou signifié un document à un accusé ou à un témoin doit trouver un commissaire à l'assermentation pour signer un affidavit. La seule autre solution, encore moins souhaitable, est de témoigner devant le tribunal pour attester que la procédure a été suivie. Cette étape est nécessaire même si l'exécution de la procédure n'est presque jamais contestée.

Par la modification proposée à l'article 2 du projet de loi, l'agent de la paix pourra établir par une simple déclaration qu'il a signé le document ou remis l'avis. Une province estime que cette simple modification permettrait d'économiser un demi-million de dollars. Plus important encore, la police consacrera moins de ses maigres ressources aux tribunaux et plus à la sécurité de nos foyers et de nos rues.

D'autres modifications visent à tirer profit de la technologie moderne. Par exemple, un plus grand nombre de procédures judiciaires pourront se dérouler par vidéoconférence. Les parties des enquêtes préliminaires et des procès qui traitent de l'audition en vue du cautionnement ou qui ne font pas appel à des témoignages pourront se dérouler par télévision en circuit fermé entre le tribunal et le lieu où l'accusé est détenu.

Le projet de loi C-17 vise également à améliorer les procédures judiciaires. Les interruptions constantes des procès pour régler des questions de procédures peuvent entraver la présentation cohérente de la preuve. À notre époque de télédiffusion des audiences et de chaînes d'information continue, la plupart d'entre nous savent ce que sont les à-côtés. Nous savons à quel point il peut être exaspérant de faire sortir le jury pour que les avocats puissent discuter avec le juge.

Les modifications au projet de loi C-17 encourageront les avocats à régler un plus grand nombre de questions pendant des conférences préparatoires. Ainsi, l'article 73 propose une modification au paragraphe 625(1) du Code criminel afin d'autoriser le juge à tenir une conférence pour régler des questions qu'il vaut mieux trancher avant le début des procédures, afin que l'audience puisse se dérouler de manière équitable et rapide, et pour prendre des dispositions au sujet de ces décisions.

Quelles peuvent-être ces questions? Cette modification fait écho à une recommandation faite par l'ancienne Commission de réforme du droit du Canada, dans une étude consacrée aux délais raisonnables à respecter dans la tenue des procès. Selon l'étude, les conférences préparatoires au procès permettraient au tribunal de prendre la situation en mains dès que possible et favoriseraient très nettement la tenue des procès dans un délai raisonnable.

Toujours selon cette étude, de nombreuses questions pourraient être résolues avant le début du procès. On pourrait déterminer si l'accusé ou le poursuivant a l'intention de soulever des questions pouvant faire l'objet de motions préalables à l'instruction et prendre les arrangements nécessaires pour examiner ces motions; on pourrait déterminer si l'une des parties a l'intention de soulever des questions généralement examinées en l'absence du jury et prendre les arrangements nécessaires pour entendre les arguments et résoudre ces questions; on pourrait déterminer si un exposé conjoint des faits est possible ou si l'une des parties est prête à faire des aveux. Voilà des exemples de questions qui, si elles étaient résolues dès que possible, pourraient accélérer les procédures.

(1215)

Une autre des modifications proposées par la Commission de réforme du droit autoriserait explicitement le juge de première instance à discuter avec la poursuite et la défense de questions qui devraient être expliquées au jury et des instructions qui devraient être fournies aux jurés pour les aider dans leurs délibérations. La Commission de réforme du droit a fait remarquer que rien n'empêche actuellement les juges d'agir ainsi, mais que ce n'est pas pratique courante.

On donne trois raisons pour cette modification. Premièrement, elle permettrait aux avocats d'informer pleinement le juge de leurs opinions sur les points de fait et de droit. Deuxièmement, elle permettrait aux avocats de préparer leur argumentation en fonction des principes juridiques qui seraient expliqués au jury. Enfin, la troisième et probablement la plus importante raison: cette modification réduirait les objections formulées par les avocats quant à l'accusation portée, ce qui aurait pour effet de réduire les objections soulevées en première instance ou en appel. Cela accélérerait la tendance actuelle qui consiste à élaborer des instructions types pour les jurys, ce qui, de l'avis de plusieurs, contribuerait à réduire le nombre d'appels accueillis.

Le projet de loi C-17 renferme une autre modification visant les procès par jury, qui tendent à devenir plus longs et plus complexes. Si, pendant un procès, un juré ne peut continuer à siéger parce qu'il est souffrant ou pour toute autre raison, le code prévoit que le procès peut se poursuivre tant qu'il reste au moins dix jurés.

Qu'advient-il lorsqu'un juré devient souffrant ou ne peut plus assister aux travaux pour toute autre raison, et ce, avant même le début du procès, c'est-à-dire avant que le jury n'ait commencé à entendre la preuve? À l'heure actuelle, la seule solution est de mettre fin aux procédures et de tenir un autre procès ou de poursuivre les procédures en espérant que les autres jurés tiendront le coup. Ce projet de loi constitue une bonne solution de rechange. Elle


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permettra de remplacer un juré tant que le jury n'aura pas commencé à entendre la preuve.

Le projet de loi C-42 visait à améliorer l'efficacité au moyen de la technologie. Ce projet de loi continue dans la même veine. J'ai déjà mentionné que les dispositions qui vont élargir l'utilisation de la télévision en circuit fermé ou de toute autre technologie similaire, conformément à d'autres modifications proposées, vont tirer profit de la technologie moderne en facilitant l'obtention de mandats par téléphone ou par télécopieur. Les agents de la paix pourront aussi déposer des dénonciations par télécopieur, et la télécopie de la citation à comparaître, du mandat ou de l'assignation sera admissible au même titre que l'original.

D'autres modifications de ce genre sont prévues. En collaboration avec les fonctionnaires provinciaux, mes fonctionnaires examinent les modifications qui sont nécessaires pour permettre que les dossiers soient traités autant que possible à l'extérieur des salles d'audiences, et pour permettre que les procédures connexes soient exécutées de façon moins laborieuse.

Un certain nombre de propositions contenues dans le projet de loi C-17 concernent l'arrestation et la libération avant procès et d'autres questions touchant aux pratiques et méthodes policières. Elles permettront aux forces policières de mieux utiliser nos ressources policières et judiciaires de plus en plus maigres. Par exemple, les forces policières auront le droit de libérer un détenu à certaines conditions dans les cas de possession d'armes à feu, d'alcoolisme ou de toxicomanie, et de faire rapport. À l'heure actuelle, lorsque les forces policières l'estiment nécessaire, un accusé peut être gardé à vue jusqu'à ce qu'une audience devant le juge de paix puisse être organisée. Toutefois, le procureur et l'avocat de la défense s'entendent souvent sur des conditions et le juge confirme seulement les conditions acceptées par l'accusé.

En outre, le projet de loi C-42 permettait de libérer un accusé qui était disposé à respecter certaines autres conditions. Ces modifications ont réduit le nombre de détentions inutiles avant procès pour bien des accusés. Les forces policières peuvent consacrer plus de temps à prévenir la criminalité ou à détecter les criminels plutôt qu'à attendre dans les corridors des tribunaux ou les lieux d'arrêt des postes de police.

Les dépens et les frais de l'assistance judiciaire ont aussi été réduits. Toutefois, on a constaté que les dispositions du projet de loi C-42 ne sont pas invoquées aussi souvent qu'elles le pourraient en l'absence des trois conditions qui sont proposées.

Un autre changement qui va mener à un système de justice criminelle plus efficace, plus efficient et moins coûteux vise les procédures de jugement de certains délits.

À l'heure actuelle, la séquestration, l'introduction par effraction dans une maison non habitée, l'entrée illégitime dans une maison habitée, la fabrication de faux et l'emploi d'un document contrefait sont classés parmi les infractions punissables exclusivement par voie d'acte d'accusation. Cela signifie que, indépendamment de la gravité de l'infraction ou des circonstances entourant celle-ci, l'affaire sera jugée devant une cour supérieure. Cela signifie qu'une enquête préliminaire aura lieu. Cela signifie qu'un policier devra comparaître, non seulement au procès, mais aussi à l'enquête préliminaire. Cela obligera les témoins à comparaître deux fois. Par conséquent, le temps et les dépenses qu'exigent ces infractions sont souvent tout à fait démesurés par rapport à la gravité de l'infraction.

(1220)

Ainsi, la fabrication de faux pourrait ne concerner qu'un chèque de 50 $. Malgré cela, pour trouver l'individu coupable, le système permet la tenue d'une enquête préliminaire, avec tout ce que cela exige de la police et des témoins. La police dit qu'elle dépense d'énormes ressources pour le traitement d'infractions mineures. Or, comme elle doit affecter judicieusement ses ressources, il lui arrive souvent de ne pas donner suite à ce genre d'infractions.

Pour ce type d'infraction, le projet de loi C-17 donnerait à la Couronne le choix entre un procès devant un tribunal de première instance, une procédure sommaire ou une mise en accusation. Avec les modifications proposées, la Couronne pourrait choisir une façon de procéder qui corresponde davantage à la peine probable. On pourra ainsi saisir les cours provinciales d'un plus grand nombre d'affaires et décongestionner les instances supérieures. Les témoins, notamment les victimes, n'auront à témoigner qu'une fois. Le temps nécessaire pour traiter ces affaires devrait diminuer, ce qui est important pour respecter les exigences de la Charte des droits et libertés relatives à la tenue d'un procès dans un délai raisonnable.

La plupart du temps, les peines infligées pour ce genre d'infractions s'apparentent tout à fait à celles prévues pour les infractions punissables par procédure sommaire. Ainsi, 18 mois sont imposés pour séquestration, et six mois, pour les autres infractions. Même si la peine maximale d'emprisonnement prévue pour les infractions relatives à l'usage de faux passera de 14 à 10 ans, nous ne pensons pas que les modifications proposées entraîneront une réduction des peines infligées pour ces infractions. Si la loi prévoit des peines maximales qui correspondent davantage aux peines réellement imposées, nous pensons que la population respectera plus le système de justice, car elle aura moins l'impression que les personnes trouvées coupables s'en tirent à bon compte en se voyant infliger une peine nettement moindre que la peine maximale prévue.

Un certain nombre de modifications proposées concernent les perquisitions et les saisies. Avec la Charte canadienne des droits et libertés, les tribunaux examinent de plus en plus souvent la conduite du personnel chargé d'appliquer la loi durant les enquêtes liées à des infractions. L'aspect qui retient peut-être le plus l'attention concerne les perquisitions et les saisies. Souvent, un verdict de culpabilité ou d'acquittement dépendra de ce que le tribunal estimera recevable ou non une preuve saisie lors d'une perquisition. La Charte garantit que chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.

En proposant les modifications énoncées dans le projet de loi C-17, nous cherchons à faire en sorte que la police puisse faire son travail d'une manière qui soit conforme à la Charte. Il est notamment proposé de modifier les dispositions applicables aux biens saisis en vertu d'un mandat, d'une loi ou de la common law. Les propositions visent à réduire le fardeau administratif imposé aux autorités de police et aux personnes dont des biens ont fait l'objet d'une saisie.


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D'autres propositions prévoient qu'on pourra obtenir des mandats de perquisition pour systèmes informatiques. Ces dispositions sont calquées sur des dispositions d'autres lois qui traitent spécifiquement des perquisitions relatives aux ordinateurs.

Comme il a été dit plus tôt, d'autres propositions rendraient possible l'obtention de mandats par télécopieur ou par téléphone.

D'autres propositions codifient les circonstances dans lesquelles la police et d'autres organismes exerçant des fonctions prévues par la loi peuvent faire une perquisition et saisir des biens sans mandat. Par exemple, en cas de circonstances clairement pressantes, des preuves d'activité criminelle au vu et au su de la police et d'autres organismes dans l'exercice de leurs fonctions de maintien de l'ordre pourraient également faire l'objet d'une perquisition et d'une saisie en vertu du Code criminel.

S'il devient nécessaire d'exécuter un mandat de perquisition la nuit, un juge de paix pourrait l'autoriser uniquement s'il a la conviction qu'il y a des motifs raisonnables de le faire. Le juge aurait également le pouvoir d'autoriser la vente ou la destruction de biens périssables ou d'autres biens se dépréciant rapidement.

(1225)

Enfin, un mandat pourrait être décerné pour obtenir les empreintes des mains, des doigts, des pieds ou des dents d'une personne ou de toute empreinte de son corps si les critères généralement exigés pour l'obtention d'un mandat de perquisition sont respectés et si la délivrance du mandat servirait au mieux l'administration de la justice. Cette disposition remplit le vide entre le mandat relatif aux preuves tangibles et le mandat relatif à l'ADN prévu dans le projet de loi C-104, qui a été adopté durant la session précédente.

Ce projet de loi a, de toute évidence, de vastes effets. Il couvre en fait plus de questions que celles que j'ai pu aborder aujourd'hui. Les 140 articles et plus du projet de loi renferment de nombreuses dispositions qui sont techniques et susceptibles de passer inaperçues dans le cadre du présent débat. Mais, tout comme celles que j'ai exposées, ces dispositions visent à améliorer l'administration de la justice pénale au Canada et à accroître la confiance du public dans notre droit pénal.

Ce projet de loi jouit de larges appuis dans les provinces et les territoires, au sein de l'Association canadienne des chefs de police et de l'Association canadienne des policiers. Il met en oeuvre les recommandations portées à l'attention du ministre de la Justice par nombre de groupes disparates de Canadiens formés, notamment, de juges, de dirigeants d'organismes chargés de la garde d'enfants, la Conférence sur l'uniformisation des lois au Canada.

Par conséquent, j'exhorte tous les partis à la Chambre à appuyer le projet de loi C-17, qui vise à améliorer l'administration de la justice pénale au Canada.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, d'emblée, je vais faire mentir tous ceux qui disent que l'opposition est là uniquement pour critiquer et détruire des projets de loi du gouvernement parce que, dans l'ensemble, l'opposition officielle est d'accord avec les modifications apportées dans le projet de loi C-17.

Effectivement, ce projet de loi modifie le Code criminel et plusieurs lois connexes, telles que la Loi sur la preuve, la Loi sur les douanes, la Loi sur l'accise, la Loi sur les aliments et drogues, la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères, la Loi sur les stupéfiants, la Loi sur la défense nationale, la Loi sur l'administration des biens saisis et la Loi sur la Cour suprême. Comme on peut le voir, c'est un projet de loi extrêmement large, un projet de loi qui amène de l'air frais dans plusieurs lois ci-haut mentionnées.

Les modifications proposées vont d'une correction mineure à la création de nouvelles infractions, notamment en matière d'usage frauduleux de cartes de crédit ou l'obtention frauduleuse de services d'ordinateur. Elles complètement la mise à jour du Code criminel entreprise par le projet de loi C-42, sanctionné le 15 décembre 1994.

D'autres mesures visent à moderniser l'appareil judiciaire en généralisant, à certaines conditions, l'emploi des moyens modernes de communication, tels que la télévision en circuit fermé, le téléphone et le télécopieur. Ou encore, elles contribueront à réduire les coûts de la justice et à accroître l'efficacité des tribunaux en évitant, par exemple, le déplacement de prisonniers ou en facilitant l'obtention de mandats de perquisition.

De même, ce projet de loi, comme je le disais antérieurement, crée de nouvelles infractions mixtes ou hybrides, c'est-à-dire qui peuvent être poursuivies par procédure sommaire ou par acte d'accusation. Ces nouvelles infractions mixtes sont l'introduction par effraction dans un endroit autre qu'une maison d'habitation, la séquestration, la présence illégale dans une maison d'habitation, la fabrication de faux ou usage de faux. Cette mesure aura pour effet d'éliminer la nécessité d'obtenir une enquête préliminaire avant la tenue d'un procès lorsque le substitut du procureur général aura choisi de poursuivre par procédure sommaire. Elle entraînera une économie substantielle de temps et d'argent, notamment en frais d'aide juridique. Les délais avant la tenue du procès seront également réduits.

Je pense que ce sont des mesures modificatives qui feront plaisir à tous les contribuables canadiens et québécois, puisque, c'est évident, plus les procédures sont longues plus ça coûte cher. À cet égard, ce projet de loi a comme but de rétrécir et de réduire ces délais.

Également, les poursuites par acte d'accusation seront réservées aux crimes les plus graves, suivant la décision prise par le procureur de la Couronne. De cette manière, les procès devant juge et jury seront moins fréquents, les procédures seront moins longues lorsqu'il s'agit de causes jugées de moindre gravité.

(1230)

Certaines propositions soulèvent toutefois des questions. Immédiatement, je dois dire que ce ne sont pas des critiques qui mettent en péril notre appui à ce projet de loi, mais qui soulèvent chez nous certaines questions très légitimes. En effet, il est proposé de modifier le Code criminel concernant l'infraction de conduite avec les


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facultés affaiblies pour rendre plus difficile une défense visant à contester les résultats obtenus par les tests d'ivressomètre.

Dorénavant, si l'amendement est approuvé par cette Chambre, la défense devra faire une preuve tendant à démontrer que l'alcoolimie de l'accusé, au moment où l'infraction aurait été commise, ne dépassait pas 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang. Donc, il y a un renversement de preuve de ce que nous connaissons jusqu'à maintenant. Cette modification ferait peser sur l'accusé la charge de prouver son innocence. Cette position soulève des questions au regard de la Charte canadienne des droits et libertés. Dans son effort pour lutter contre la conduite avec un taux d'alcool dans le sang de plus de 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang, est-ce que le ministre ne risque pas d'obtenir la condamnation d'innocents?

Il peut être impossible pour un accusé d'établir que son taux d'alcool, lors de son interception, était moindre que 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang, avec les conséquences qu'une telle condamnation entraîne, soit la perte de son permis de conduire pour un an dans la plupart des provinces. Encore là, je me pose la question: est-il justifié d'apporter un tel amendement?

Certainement que cette disposition sera contestée devant les tribunaux, et ce, jusqu'à la Cour suprême, parce que les conséquences sont extrêmement graves. On a qu'à voir la quantité de procès et la quantité de contestations judiciaires de cette disposition. Si le passé est garant de l'avenir, il est évident qu'il y aura des causes, devant les tribunaux de première instance, qui iront jusqu'à la Cour suprême pour faire préciser cette disposition de ce projet de loi, s'il est adopté tel quel, naturellement. Soyez assuré qu'on suivra avec un très grand intérêt l'issue judiciaire, s'il y a lieu, de cet amendement.

Une autre disposition proposée aura pour effet d'entraîner la détention d'un plus grand nombre de personnes. Le tribunal pourra ordonner la détention d'un prévenu pour la durée des procédures pour des motifs additionnels. Il sera dorénavant justifié de détenir un prévenu pour une juste cause, lorsque la détention est nécessaire, pour ne pas miner la confiance du public envers l'administration de la justice. Actuellement, la détention, en attendant la fin des procédures, ne peut avoir lieu que pour assurer la présence de l'accusé devant le tribunal et pour la protection ou la sécurité du public. Au moment où on veut garder le moins possible de gens dans les prisons, je me pose encore une question: est-il indiqué d'ajouter ces motifs additionnels?

De plus, c'est à, nous, députés, à déterminer les motifs qui justifient une détention. L'expression, dans le projet de loi, «juste cause», tout comme l'expression «intérêt public», ouvre la porte à l'interprétation des tribunaux, à une certaine incertitude qui ne sera dissipée, encore une fois, que lorsque la Cour suprême aura précisé le contenu de cette expression. Alors pourquoi, étant donné que nous avons ce projet de loi devant nous, ne pas mettre davantage de balises pour restreindre l'interprétation et toucher l'objectif qu'on veut bien toucher par ce projet de loi?

Également, une autre modification proposée donnera aux forces policières des moyens additionnels pour découvrir l'auteur d'un crime. Il s'agit de la possibilité d'obtenir un mandat autorisant un agent de la paix à obtenir les empreintes des mains, des doigts, des pieds ou des dents d'une personne ou toute autre empreinte de son corps, naturellement, à certaines conditions.

Déjà, la loi permet le prélèvement d'une substance corporelle d'une personne pour analyse génétique. Ces dispositions peuvent également permettre à une personne de démontrer son innocence. Je pense que c'est une modification qui peut jouer autant pour la personne qui poursuit que pour l'accusé qui veut prouver, justement, son innocence.

Nous suggérons de compléter cette disposition en permettant de photographier une personne ou une partie de son corps. Cette mesure donnerait la possibilité de confirmer ou d'infirmer certaines informations, telles que la présence de tatouages ou de caractéristiques particulières. Récemment, et je suis sûr que mes collègues s'en souviendront, dans une cause d'agression sexuelle, des enfants prétendaient que leur agresseur avait des marques sur le corps.

(1235)

Une façon bien simple de vérifier si les enfants disaient la vérité aurait été d'obtenir un mandat permettant de photographier une partie du corps de l'accusé. De cette façon, on aurait vérifié le bien-fondé des allégations des jeunes, ce qui pourrait aider autant la Couronne, comme je l'ai dit tantôt, que l'accusé, si jamais si l'information avancée s'avérait fausse dans l'exemple d'agression sexuelle que je vous cite.

De plus, une autre modification apportée par ce projet de loi vise à faciliter la preuve d'une participation au blanchiment de l'argent provenant de la criminalité. Sur ce, je dois dire immédiatement que c'est un pas en avant. Nous, de l'opposition, avions réclamé et réclamons encore toute une modification ou, enfin, un durcissement à cet égard compte tenu que plusieurs pays considèrent le Canada comme le paradis du blanchiment d'argent. Je pense que cette modification est un pas en avant, mais qu'il faudra, dans un avenir ultérieur, se pencher très sérieusement sur cette question afin que le Canada perde ce titre peu enviable de paradis du blanchiment de l'argent venant de la criminalité.

Dans l'immédiat, compte tenu du projet de loi C-17 que nous avons devant nous, nous suggérons d'ajouter à la liste des façons de participer au blanchiment de l'argent le fait pour une personne d'accepter que soit déposée dans un compte lui appartenant une somme d'argent, sachant ou croyant que cet argent provient d'une infraction désignée.

Plusieurs personnes ont en effet reçu ces derniers temps une lettre leur demandant d'accepter que certaines sommes d'argent soient déposées dans leur compte de banque. Encore là, c'est de l'actualité. On voyait ça dans L'Actualité il y a quelques mois. Ceux qui ont accepté ont vu par la suite leur compte se faire vider au complet. C'est sûr qu'il y a eu un petit peu d'aveuglement volontaire d'accepter de l'argent de l'étranger, dont on ignore l'origine, sous prétexte de faire des profits éventuellement. Mais cela a finalement joué contre eux puisque le fraudeur, celui qui avait déposé de l'argent dans leur compte de banque, l'a, par la suite, retiré, ainsi que tout le contenu du compte de banque. Il peut s'agir de moyens utilisés pour camoufler et blanchir des sommes provenant du crime et encore là, je pense qu'il faudrait prévoir ou ajouter ce motif-là dans le projet de loi C-17.


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D'autres dispositions viennent compléter celles existantes en matière de falsification de cartes de crédit et d'obtention frauduleuse des services d'ordinateur. Ainsi, la possession ou l'utilisation d'un mot de passe qui permettrait l'obtention non autorisée de services d'ordinateur serait désormais criminalisée. Il faut bien vivre selon notre temps et je pense que le Code criminel avait grand besoin de se faire actualiser, légalement parlant, et de mettre le Code au diapason des nouvelles techniques, dont entre autres les services d'ordinateur.

Par ailleurs, ce projet de loi, compte tenu qu'il y a beaucoup de modifications, beaucoup de points où le projet de loi C-17 modifie les lois déjà en vigueur, c'est sûr que je ne peux pas toutes les reprendre dans le temps qui m'est alloué, mais je veux quand même souligner les principaux points présentement.

Si ce projet de loi est adopté, d'autres modifications permettront aux agents de la paix de remettre en liberté des personnes arrêtées avec ou sans mandat d'arrestation en leur imposant des conditions telles que de s'abstenir de posséder une arme à feu, se présenter au moment indiqué dans une promesse à un agent de la paix ou encore, à une autre personne désignée et s'abstenir de consommer de l'alcool ou d'autres substances intoxicantes. Ces conditions s'ajouteraient à celles que les agents de la paix peuvent déjà imposer. Cette mesure permettra de remettre en liberté plus rapidement des personnes qui, normalement, devaient être conduites devant un juge de paix dans un délai de 24 heures, mais qui, souvent, devaient passer la fin de semaine en prison dans les districts où les juges de paix et les procureurs de la Couronne ne sont pas disponibles facilement les fins de semaine.

Je pense que c'est une équité que nous allons obtenir en région, compte tenu que la circonscription de Berthier-Montcalm en est une région, et compte tenu que moi-même, avant d'être député, je pratiquais le droit, que j'ai vu certaines choses et que je sais qu'en région, on est quelquefois défavorisés. Alors, le projet de loi C-17, au niveau des comparutions de fins de semaine, vient corriger une lacune que, présentement, les régions subissent.

Ces pouvoirs accrus des agents de la paix devraient presque éliminer la nécessité pour les juges de paix et les procureurs de la Couronne de tenir des séances de comparution les fins de semaine pour libérer des gens lorsque l'imposition de ces conditions usuelles suffit à la protection du public.

(1240)

Bien entendu, cette mesure sera grandement appréciée des justiciables, mais également de tous les contribuables parce qu'en bout de ligne, c'est eux qui paient les honoraires et les frais de tout l'appareil judiciaire.

Une des bonnes modifications de ce projet de loi permettrait le témoignage d'un expert par le dépôt de son rapport accompagné d'un affidavit ou d'une déclaration solennelle. Cette exception à la règle qui interdit le témoignage écrit saura certainement plaire aux témoins experts qui ont un horaire chargé ou qui sont appelés à témoigner à deux endroits au même moment.

Cela plaira aussi certainement aux contribuables, compte tenu du fait que souvent, un témoin expert est invité à témoigner tel jour, à telle heure au palais de justice, mais pour des raisons que seuls les initiés connaissent, le procès soit remis. L'expert doit donc revenir et la facture s'en trouve augmentée. Avec cette modification, l'expert pourra déposer son rapport avec un affidavit et cela économisera temps et argent.

Enfin, une disposition qui sera appréciée des accusés qui font défaut de comparaître aux temps et lieu indiqués dans une sommation pour l'application de la Loi sur l'identification des criminels. Dorénavant, le juge de paix pourra émettre un mandat indiquant une période pendant laquelle l'exécution est suspendue pour permettre à l'accusé de comparaître volontairement devant un juge, lui évitant ainsi d'être arrêté et détenu jusqu'à sa comparution devant un juge de paix.

Nous suggérons que cette nouvelle mesure s'applique également lorsqu'un prévenu fait défaut de comparaître devant le tribunal à une étape ou l'autre des procédures. Actuellement, les tribunaux prennent le mandat en délibéré lorsque l'absence de l'accusé semble s'expliquer ou qu'il pourrait y remédier rapidement. Mais la légalité de cette mesure de prendre le mandat en délibéré est discutable et comporte l'inconvénient que seul le juge qui a pris le mandat en délibéré peut prendre finalement la décision.

Donc, dans l'ensemble, vous aurez compris que l'opposition officielle appuie le projet de loi C-17 qui est présentement à l'étude. Mais sur quelques points, qui ne sont pas majeurs, nous avons des inquiétudes. Je pense que dans ce projet de loi, le gouvernement a fait preuve d'ouverture d'esprit, qu'il a écouté ceux qui disaient que le Code criminel devait être modernisé.

Étant donné qu'on a les deux mains dedans, comme on dit en québécois, les deux mains dans le Code criminel, on pourrait peut-être éclaircir les points soulevés pour empêcher toute interprétation trop large des expressions, entre autres, pour prévenir que des accusés portent leur cause devant les tribunaux supérieurs et même jusqu'à la Cour suprême relativement à l'atteinte à la Charte canadienne des droits dont j'ai parlé tantôt. Pour tous ces motifs, l'opposition officielle appuiera le projet de loi à cette étape.

[Traduction]

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens dans le débat sur le projet de loi C-17, auquel je dois m'opposer. Ce projet de loi vise à apporter des mises à jour et des améliorations, qui ont déjà trop tardées, à l'administration des lois. Le Parti réformiste appuie les dispositions du projet de loi en ce sens.

L'efficacité des agents de la paix et des tribunaux serait accrue par certaines des modifications prévues dans le projet de loi C-17. L'article 2 du projet de loi, qui modifie les paragraphe 4(6) et 4(7) du Code criminel, permettrait à un agent de la paix de déclarer solennellement qu'il a signifié un avis sans nécessiter le recours aux services d'un juge de paix ou d'un notaire. Cette modification accroîtra l'efficacité des agents de la paix et réduira la charge de travail des juges de paix, qui pourront alors consacrer plus de temps à des tâches plus utiles.

De plus, le paragraphe 145(5) et d'autres dispositions connexes du Code criminel seront modifiés pour permettre à tout agent de la paix de relâcher un accusé qui a fait une promesse de comparaître. Actuellement, seul l'agent responsable peut le faire. La modification accroît l'efficacité des forces policières puisqu'il ne sera plus


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nécessaire de faire appel à l'agent responsable pour remplir une formalité toute simple.

(1245)

Les députés réformistes appuient les modifications visant à rendre le travail des policiers et des tribunaux plus efficace. Nous appuyons aussi les dispositions du projet de loi qui renforcent la législation sur les profits tirés du crime en faisant en sorte que les criminels ne puissent pas conserver ces profits, mais il nous est impossible d'appuyer le projet de loi C-17.

Nous ne l'appuyons pas parce que nous sommes farouchement opposés à la partie qui réduit les peines pour certaines infractions. Le ministre de la Justice a jugé nécessaire d'insérer de telles dispositions dans un projet de loi autrement acceptable. Selon moi, c'est très regrettable.

Nous nous opposons au projet de loi C-17 parce que l'indulgence des libéraux expose les Canadiens à des risques. Le Parti réformiste n'acceptera rien de moins qu'un système judiciaire qui fait passer le châtiment des criminels et la protection des citoyens respectueux des lois, et de leurs biens, devant toutes les autres considérations.

Le ministre de la Justice n'a pas expliqué tout à fait clairement aux Canadiens toutes les répercussions du projet de loi C-17. Il a insisté sur les qualités du projet de loi en annonçant qu'il modernisait les lois et rationalisait certaines formalités des tribunaux, mais il n'a rien dit sur la réduction des peines pour certaines infractions très graves.

Le Parti réformiste appuie les changements administratifs contenus dans le projet de loi C-17, mais je m'en voudrais de ne pas affirmer que ce projet de loi reste nébuleux et contradictoire pour la grande majorité des Canadiens parce qu'il fera très peu pour accroître leur sécurité, celle de leurs enfants et celle de leurs biens.

Les Canadiens craignent beaucoup pour leur sécurité personnelle et pour celle de leurs familles. Les changements administratifs ne feront rien pour protéger les Canadiens des meurtriers, des violeurs et des autres criminels sadiques qui errent dans nos rues et pénètrent dans nos maisons.

Le projet de loi C-17 n'empêchera pas le tueur d'enfants Clifford Olson de demander une libération anticipée. Seul un projet de loi abrogeant l'article 745 du Code criminel garderait Olson à sa place, derrière les barreaux, mais le ministre ne propose aucun projet de loi du genre.

Le projet de loi C-17 n'empêchera pas Robert Noyes d'agresser sexuellement un autre enfant. L'ancien enseignant d'Ashcroft a admis avoir abusé sexuellement de plus de 60 enfants. En tant que criminel dangereux, il a été condamné à l'emprisonnement pour une période indéfinie pour 19 infractions à caractère sexuel, et voilà que le système de justice lui rend sa liberté. La Commission nationale des libérations conditionnelles a accordé à Noyes la permission de sortir sous surveillance et, si tout se passe bien, il sera admissible dans neuf mois aux sorties sans surveillance, puis à la semi-liberté. Seul un projet de loi comme celui proposé par ma collègue de Surrey-White Rock-Langley-Sud, exigeant l'examen des délinquants sexuels par deux psychiatres, verra à ce que les criminels de ce genre restent derrière les barreaux, là où ils devraient être.

Le projet de loi C-17 n'apaisera pas les craintes qu'ont les parents que leurs enfants soient enlevés, agressés sexuellement ou tués dans les rues de nos villes. Dans le communiqué de presse qu'il a publié lors de la présentation de ce projet de loi, le ministre de la Justice a dit que ces modifications montrent que le gouvernement fait des progrès dans ses efforts en vue des rendre nos rues et nos foyers plus sûrs. C'est absolument ridicule. Ce n'est simplement pas vrai. Comment se trouve-t-on à rendre les rues et les foyers plus sûrs en réduisant les peines pour des crimes tels que la séquestration de personnes et le fait de se trouver illégalement chez ces personnes? Je ne vois simplement pas comment.

Les Canadiens veulent une réforme du système de justice. Ils veulent des mesures législatives qui accroîtront vraiment la sécurité publique. Ils veulent des mesures législatives qui envoient un message clair aux criminels, qui leur font comprendre que, s'ils commettent un crime, ils devront purger leur peine. Les Canadiens veulent des mesures législatives de ce genre dans l'espoir qu'elles dissuaderont les voleurs impitoyables d'entrer dans leurs foyers et d'en violer le caractère sacré. Les Canadiens veulent un projet de loi abrogeant l'article 745 du Code criminel. Ils veulent que le ministre de la Justice vote en faveur des victimes et des droits des victimes. Ils ne veulent pas un ministre qui protège les droits des criminels au détriment des citoyens pacifiques et respectueux des lois.

L'an dernier, le ministre a voté contre le projet de loi d'initiative parlementaire C-26, qui aurait enlevé aux personnes reconnues coupables de meurtre au premier degré le droit à une audience d'admissibilité à la libération conditionnelle après avoir purgé seulement 15 ans d'une peine d'emprisonnement à perpétuité. Les Canadiens ne tiennent pas à ce que le ministre donne cette soi-disant lueur d'espoir aux meurtriers. Ils veulent que ceux-ci restent derrière les barreaux pour un minimum de 25 ans, comme le prévoyait la loi à l'origine et pas pour 15 ou 20 ans. La très forte majorité des Canadiens veulent que les meurtriers restent sous les verrous pendant la totalité de leur peine d'emprisonnement à vie.

(1250)

Quelle valeur le ministre de la Justice, le premier ministre et le gouvernement libéral attribuent-ils à une vie humaine? Est-ce 15 ans seulement? C'est ce qu'ils disent aux Canadiens. Ils racontent aux Canadiens que leurs lois renforcent la sécurité publique. Il n'y a rien de plus faux.

Le 12 août, le jour où Clifford Olson aura le droit de demander une audience d'admissibilité à la libération conditionnelle, approche à grands pas et le ministre n'a toujours pas présenté de projet de loi privant ce tueur d'enfants en série du droit de faire appel après n'avoir purgé que 15 ans d'une peine d'emprisonnement à vie. Et c'est cela que le ministre de la Justice appelle faire preuve de fermeté envers la criminalité! Et c'est cela qu'il appelle accroître la sécurité à l'extérieur et au foyer!

Olson n'est pas le seul meurtrier à avoir une lueur d'espoir de sortir de prison avant d'avoir purgé la totalité de sa peine. Le 10 juillet, Ralph Ernest Malcolm Power aura le droit de faire une demande de libération conditionnelle anticipée sur sa condamnation pour meurtre au premier degré. En 1981, M. Power, un ex-détenu


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âgé de 28 ans qui était en liberté surveillée, a réduit en bouillie avec un marteau le visage d'une jeune fille de 20 ans, Sheryl Gardner. Il a avoué qu'il essayait de l'assommer un petit peu pour pouvoir la violer. Power s'est fait prendre et arrêter pour le meurtre de Sheryl après avoir essayé de tuer une autre femme.

Le ministre de la Justice aurait dû présenter un projet de loi qui garderait Clifford Olson, Ralph Power et bien d'autres meurtriers sous les verrous. Pourquoi n'écoute-t-il pas les victimes de violence et l'Association canadienne des policiers? Pourquoi le ministre n'a-t-il pas abrogé l'article 45 du Code criminel? Il devrait d'abord s'occuper de la criminalité, puis des questions d'ordre administratif, et pas l'inverse.

À la suite des crimes horribles perpétrés contre Leslie Mahaffy et Kristen French, la peine capitale est redevenue une question d'actualité pour les Canadiens. Il y a de plus en plus d'indices que si les Canadiens avaient l'occasion de se prononcer sur la peine capitale dans le cadre d'un référendum dont le résultat devrait être obligatoirement respecté, initiative appuyée par le Parti réformiste, ils décideraient de condamner à mort nos meurtriers les plus cruels et les plus sadiques comme Paul Bernardo et Clifford Olson. Le gouvernement libéral refuse d'accorder ce droit et de donner cette occasion aux Canadiens.

Les Canadiens veulent également que le ministre de la Justice présente un projet de loi concernant les contrevenants dangereux. Ils veulent que le ministre mette fin à la libération d'office. Les Canadiens veulent que le ministre mette fin à la libération automatique des prisonniers qui ont servi les deux tiers de leur peine même lorsqu'il y a lieu de croire que ces individus récidiveront. Melanie Carpenter, qui a été enlevée, violée et assassinée, est l'une des plus récentes victimes de ce genre de pensée et de mentalité à la libérale.

Le ministre a promis de déposer un projet de loi omnibus incluant ces deux initiatives qui relèveraient sensiblement le niveau de sécurité publique, mais il reste à voir ce que contiendra le projet de loi. Depuis un an, les seules mesures proposées sont le projet de loi C-2 et le projet de loi C-42 qui modifient la Loi sur les juges, le projet de loi C-9 qui a rétabli la Commission du droit du Canada et le projet de loi C-17, présentement à l'étude.

Le projet de loi C-27, que nous appuyons parce qu'il concerne la prostitution chez les enfants et le harcèlement criminel, aurait dû passer avant tous ces projets de loi. Le seul mérite des projets de loi C-2, C-42, C-9 et C-17 est de faciliter un peu les choses aux personnes qui oeuvrent dans le système judiciaire, mais ils n'accroissent pas la sécurité des Canadiens.

En fait, le projet de loi C-17 donne aux Canadiens des raisons supplémentaires de s'inquiéter du problème de violation de domicile parce que le gouvernement libéral a réduit, par le biais de ce projet de loi, les peines applicables à cette infraction régie par le Code criminel. Le projet de loi C-17 réduit les peines maximales et fait d'actes criminels des infractions mixtes.

Cette modification autorise et encourage les juges à considérer ces infractions comme moins graves et, de ce fait, justifie des peines moins sévères, notamment l'imposition d'amendes. Bien qu'elles soient pour la plupart non violentes, à l'exception de la séquestration, ces infractions donnent néanmoins lieu à des violations de domicile et à la fabrication de faux qui risquent de priver les citoyens les plus vulnérables, les personnes âgées, d'avoirs financiers précieux.

(1255)

Selon Statistique Canada, en 1994, les introductions par effraction représentaient 15 p. 100 de toutes les infractions au Code criminel, alors que les infractions contre les biens représentaient 25 p. 100 des infractions criminelles. Quatre-vingt-un pour cent des introductions par effraction faisaient intervenir l'usage de la force. Dans 71 p. 100 des cas, des biens ont été endommagés et dans 81 p. 100 des cas, il y a eu vol de biens.

Au lieu de se montrer inquiet et outré par ces chiffres, le gouvernement libéral vient nous dire que ces infractions méritent des peines moins sévères. Le projet de loi C-17 fera en sorte que ces infractions, qui portent atteinte à la sécurité financière et à la tranquillité d'esprit des citoyens canadiens, seront punies moins sévèrement.

Depuis le début de son mandat et à l'insu des Canadiens, le gouvernement libéral a lentement adopté cette approche, à laquelle nous nous opposons non seulement parce qu'elle n'a pas été approuvée par la population, mais parce qu'elle risque fort d'entraîner une aggravation de la criminalité au lieu de réduire le nombre d'actes criminels, comme le souhaitent mon parti et la plupart des Canadiens.

Un changement aussi important de notre façon de punir, ou devrais-je plutôt dire, pour être politiquement correct, de la façon dont nous tenons les criminels responsables de leurs actes, devrait être examiné et approuvé par la population. Le projet de loi C-41, adopté il y a un an, contenait des dispositions prévoyant des mesures autres que l'incarcération. Toutefois, ces dispositions ont été éclipsées par celles qui portaient sur les crimes motivés par la haine, qui accordaient une protection accrue à un groupe de citoyens, notamment les personnes caractérisées par leur orientation sexuelle.

Si on leur posait la question, je crois que très peu de Canadiens sauraient que le gouvernement libéral a fait en sorte que de nombreux criminels, dont les délinquants sexuels et autres délinquants violents, puissent faire du travail communautaire au lieu d'aller en prison.

Il est très regrettable que les Canadiens n'aient pas été informés de toute la portée du projet de loi C-41, que l'Association canadienne des policiers a décrit de la façon suivante: «À quelques exceptions près, le projet de loi C-41 est une mesure difficile, compliquée, qui comporte des contradictions internes et facilite le double jeu, mais ce projet de loi est surtout complètement superflu pour quiconque connaît la common law pratiquée au Canada et veut l'utiliser.»

Les représentants de la police ont ajouté ce qui suit: «Bien qu'il vise à codifier les grands principes de détermination de peine, éliminant ainsi la discrétion fondamentale des juges, le projet de loi conférerait par ailleurs de nouveaux pouvoirs discrétionnaires très étendus à de nombreuses personnes à l'intérieur du système judiciaire. Ce que tous ces nouveaux pouvoirs ont de commun, c'est qu'ils sont tous au profit du délinquant dont les actes criminels sont désormais sanctionnés par des peines en milieu ouvert.


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«Alors que la réforme de la détermination de la peine exige des mesures de protection, ce projet de loi n'offre que platitudes; alors qu'elle exige de la clarté, ce projet de loi n'est que confusion et hypocrisie. Cela aura presque à coup sûr pour conséquence de faire grimper le budget déjà extrêmement élevé de la justice pénale.»

Cette remarque a été faite devant le comité permanent chargé d'examiner le projet de loi C-41. Je n'aurais pu mieux résumer ce projet de loi libéral sur la justice, la mentalité libérale ou la pensée libérale reflétée encore une fois dans le projet de loi C-17. Est-il de meilleurs termes que ceux de l'Association canadienne des policiers, une autorité vers laquelle s'est volontiers tourné le ministre de la Justice pour ajouter une certaine crédibilité à son projet de loi sur l'enregistrement des armes à feu.

L'article 717 du projet de loi C-41, proposé par les libéraux en réaction à l'entassement dans les prisons, est la disposition la plus contestée du projet de loi. Au lieu d'essayer de réduire ou de prévenir la criminalité en s'attaquant aux causes, comme le Parti réformiste a demandé au gouvernement de le faire, les libéraux ont décidé de laisser aller les prisonniers, ainsi que s'en sont faits l'écho l'ancien responsable du Service correctionnel du Canada, M. John Edwards, et le chef de la Commission nationale des libérations conditionnelles, M. Willie Gibbs.

Nous ne nous serions pas opposés de façon aussi véhémente à cet article du projet de loi C-41 si le gouvernement avait précisé les infractions pouvant faire l'objet d'autres mesures. Nous aurions pu appuyer le recours à d'autres mesures dans le cas de certains crimes non violents de façon à réduire les coûts liés aux procédures judiciaires et à l'incarcération. Cependant, aucune mesure de ce type ne figure dans le projet de loi C-41.

L'Association canadienne des policiers et les Victimes de violence ont recommandé que l'article 717 soit modifié de façon à restreindre l'accessibilité au programme aux personnes qui ont commis des infractions moins graves et aux délinquants dont c'est la première infraction. Compte tenu des opinions exprimées par ces témoins, le Parti réformiste a, durant l'examen article par article de ce projet de loi, présenté un amendement visant à restreindre le recours à d'autres mesures à des crimes non violents. Notre amendement a été rejeté par la majorité libérale qui compose ce comité.

(1300)

Les policiers du Canada emploient de tels moyens depuis des années. La Charte canadienne des droits et libertés prévient les policiers de ne pas abuser de leurs pouvoirs discrétionnaires quand ils ont affaire à un contrevenant.

Craignant de violer les droits des criminels, les policiers se bornent souvent à suivre les règles établies quand ils arrêtent et accusent un contrevenant pour finalement obtenir qu'il soit reconnu coupable, alors qu'autrefois, s'ils arrêtaient quelqu'un ayant commis une infraction mineure, ils pouvaient traiter la question de façon informelle, leur servant un avertissement clair et les menaçant d'une accusation en règle la prochaine fois, en cas de récidive.

Je suis d'accord avec l'Association canadienne des policiers. Nous ne pouvons limiter les pouvoirs discrétionnaires des policiers dans ce domaine en créant une bureaucratie coûteuse et inutile, comme le propose le projet de loi C-41, qui pourrait aboutir à la remise en liberté de délinquants violents parce qu'on a employé une solution de rechange à l'incarcération.

Nous ne pouvons réduire les peines prévues pour infractions criminelles comme le propose le ministre de la Justice dans le projet de loi C-17 et dire en même temps aux Canadiens que nous nous attaquons fermement à la criminalité.

Je veux porter à l'attention de la Chambre les articles du projet de loi C-17 qui font que le Parti réformiste ne peut appuyer cette mesure. C'est une toute petite partie du projet de loi, qui pourrait être appuyé par ailleurs.

Les mesures législatives actuelles portant sur la séquestration d'un être humain prévoient que cette infraction est passible d'une peine maximale de 10 ans, ce qui en fait une infraction très grave. Si le projet de loi C-17 est adopté sans amendement, la gravité de cette infraction sera grandement réduite, même si la peine maximale sera toujours de 10 ans. Cette infraction pourrait dorénavant être sujette à options de procédure, soit mise en accusation ou procédure sommaire.

Cela signifie que, advenant une déclaration de culpabilité par procédure sommaire, la peine prévue pourrait être réduite à un maximum de 18 mois ou à une simple amende d'un maximum de 2 000 $. Les criminels qui ont séquestré une femme enceinte de neuf mois en Colombie-Britannique pourraient être condamnés à une simple amende en vertu de cet amendement.

Cette modification rendra-t-elle nos rues et nos localités moins dangereuses? Je ne vois pas comment. Cet amendement proposé au Code criminel signale clairement aux tribunaux que ce genre d'infraction doit être traité moins sévèrement qu'on le fait habituellement.

Les libéraux diront peut-être que c'est la Couronne qui décide de procéder par mise en accusation ou par procédure sommaire. Admettons, mais les tribunaux seront certainement influencés par cette tendance à la baisse dans l'imposition des peines.

L'alinéa 348(1)e) du Code criminel concernant l'entrée par effraction dans des endroits autres que des habitations sera également modifié pour rendre cette infraction sujette à options. La peine maximale sera réduite de 14 à 10 ans sur acte d'accusation. Non seulement cela, mais l'infraction pourra être punissable sur déclaration sommaire de culpabilité et la peine maximale sera alors 18 mois d'emprisonnement ou une amende. Quel genre de message une telle mesure transmet-elle à la société et aux criminels de notre pays?

La présence illégale dans une maison d'habitation est une infraction en vertu du paragraphe 349(1) du Code criminel. La disposition a aussi été remplacée par une procédure double prévoyant soit une peine d'emprisonnement maximale de 10 ans, soit la punition sur déclaration sommaire de culpabilité avec une peine maximale de 18 mois ou une amende.

À l'heure actuelle, la présence illégale dans une maison d'habitation est une infraction punissable sur acte d'accusation, qui entraîne une peine maximale de 10 ans d'emprisonnement. Ce paragraphe du projet de loi propose donc un autre allégement de peine, ce qui est tout à fait contraire à la déclaration du ministre de la Justice, qui a affirmé être plus sévère à l'égard des criminels.

De même, les infractions, qui sont prévues aux paragraphes 367 et 368(1) du code et qui concernent les faux et l'emploi de documents contrefaits, deviendront des infractions assujetties à la double procédure et donneront lieu soit à l'emprisonnement pour une période maximale de 10 ans, soit à la punition sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire alors qu'à l'heure actuelle, ces


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infractions entraînent une condamnation sur acte d'accusation et une période d'emprisonnement pouvant atteindre 14 ans. Voilà un autre exemple de tendance à la tolérance dans la détermination de la peine. La punition pour des crimes graves est allégée et ceux qui s'attaquent à d'innocentes victimes ne manqueront pas de le constater.

Le taux de criminalité augmente au Canada, surtout celui des crimes violents. Les craintes augmentent quant à la sécurité des personnes, les coûts de l'administration de la justice et de l'hébergement des prisonniers grimpent et de plus, la dette croissante limite grandement les dépenses. La tâche du ministre fédéral de la Justice, qui doit s'attaquer à tous ces problèmes simultanément, sera difficile, mais pas insurmontable.

Le projet de loi C-17 ne fait pas partie de la solution pour le moment. Il ne contribue absolument pas à la lutte contre l'augmentation de la criminalité, ni contre les causes de la criminalité.

S'il est adopté sans amendements, le projet de loi C-17 ne fera pas baisser, mais plutôt augmenter le taux de criminalité et n'améliorera pas la sécurité de la population, bien au contraire.

Le projet de loi C-17 est la preuve vivante que le ministre de la Justice ne sait pas-et je le dis respectueusement-ne sait pas ce qu'il fait. D'une part, il déclare qu'il combattra plus férocement le crime et qu'il améliorera la sécurité dans nos rues et nos maisons et, d'autre part, il rend la vie plus facile aux criminels en réduisant les peines. Je ne peux que m'opposer au projet de loi C-17.

(1305)

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Le vote est reporté à 17 h 30 demain.

* * *

LE CODE CRIMINEL

L'hon. Douglas Peters (au nom du ministre de la Justice) propose: Que le projet de loi C-27, Loi modifiant le Code criminel (prostitution chez les enfants, tourisme sexuel impliquant des enfants, harcèlement criminel et mutilation d'organes génitaux féminins), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole pour commenter le projet de loi C-27.

Ce projet de loi, qui remplace le projet de loi C-119, mort au Feuilleton lors de la prorogation de la dernière session, comprend des dispositions concernant le tourisme sexuel impliquant des enfants.

La violence faite au femmes et aux enfants continue à inquiéter le gouvernement. C'est pourquoi nous proposons les modifications contenues dans le projet de loi C-27, qui porte sur la prostitution chez les enfants, sur le harcèlement criminel et sur la mutilation des organes génitaux féminins.

Lors du neuvième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, qui a eu lieu au Caire en 1995, les États membres ont été priés d'adopter des mesures efficaces contre les pratiques mettant en danger la vie des femmes et des enfants.

En 1993, la Déclaration des Nations unies sur l'élimination de la violence faite aux femmes et la plate-forme d'action en prévision de la Conférence internationale sur les femmes tenue en 1995 reconnaissent que la violence faite aux femmes lèse les droits de la personne et les libertés fondamentales des femmes.

Le Canada a ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant. Ce projet de loi nous aidera à tenir l'engagement que nous avons pris, aux termes de la convention, de protéger les enfants contre toutes formes d'exploitation sexuelle et de pratiques sexuelles illégales. Cela inclut la prostitution des enfants, tant au Canada qu'à l'étranger.

Les améliorations proposées dans le projet de loi C-27 constituent la première étape de la réaction du fédéral aux consultations mixtes fédérales, provinciales et territoriales sur la prostitution. Bien que les consultations ne soient pas terminées, il devient de plus en plus urgent de prendre des mesures pour lutter contre la prostitution des enfants, à savoir toute personne de moins de 18 ans.

Le nombre croissant de jeunes qui se prostituent est alarmant. La plupart des adultes qui s'adonnent à la prostitution avouent avoir commencé jeunes. Tant les professionnels que les travailleurs du sexe estiment que l'âge moyen où on entre sur le marché est 14 ans. Il y a des cas où des enfants n'ayant que 8 ou 9 ans ont été exploités de la sorte.

Il y a eu d'amples consultations sur le sujet de la prostitution. Le sentiment général, c'est que la prostitution des enfants est une chose dont il faut s'occuper de façon urgente.

(1310)

Le préambule du projet de loi C-27 parle, en particulier, de la vulnérabilité des enfants et de la nécessité de les protéger. Il dit également qu'il est répréhensible d'impliquer des jeunes dans des activités liées à la prostitution ou que l'exploitation des enfants doit


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être traitée avec le plus grand sérieux, notamment lorsqu'il s'agit de déterminer la peine infligée aux coupables de ces crimes.

Les changements proposés dans le projet de loi sont destinés à protéger les enfants des prédateurs adultes à la recherche de services sexuels de la part d'enfants ou qui cherchent à exploiter de jeunes protitués pour en tirer des gains. Ils faciliteraient l'arrestation des clients des jeunes prostitués en modifiant une disposition du Code criminel de façon à rendre illégale toute tentative de procurer les services sexuels d'une personne que le délinquant soupçonne fortement d'avoir moins de 18 ans. La présomption d'évidence a été proposée pour faciliter la preuve de ce soupçon.

Un des principaux points mentionnés pendant les consultations a été que les méthodes traditionnelles utilisées par la police ne sont pas appropriées pour faire appliquer les dispositions actuelles du Code criminel et que ces dispositions n'ont guère permis à la police de traduire en justice les clients et les proxénètes.

Ces dispositions ne fonctionnent que lorsqu'une personne prostituée témoigne contre un proxénète, mais, dans la plupart des cas, les enfants qui se prostituent ne souhaitent pas témoigner contre leur proxénète.

Dans l'ensemble, le Code criminel ne peut être appliqué que lorsque le client est pris en flagrant délit d'obtention de services sexuels de la part d'une jeune personne. Les modifications proposées au libellé des articles pertinents et l'ajout d'une présomption aideraient beaucoup l'application de ces dispositions. Une nouvelle infraction grave a été créée, celle de vivre des produits de la prostitution d'une personne mineure. Elle comporte une peine minimale de cinq ans. Elle pourrait également être utilisée contre ceux qui, pour leur profit et tout en vivant des produits de la prostitution d'une personne mineure, font usage de violence et d'intimidation dans le cadre d'activités liées à la prostitution.

À notre avis, la société devrait dénoncer un tel crime dans les termes les plus vigoureux et dire clairement que la société ne saurait tolérer ce genre de crime, en imposant une peine appropriée à la gravité de l'infraction. La protection du public et le dégoût que soulève une telle conduite sembleraient exiger qu'une peine minimale dans le système correctionnel relève du contrôle de la loi, plutôt que de la justice ou de l'administration.

Certains croient que la prostitution est un crime qui ne fait pas de victimes, que les jeunes qui se prostituent font tous le trottoir par choix. Cette perception découle peut-être en partie du fait que seules certaines activités liées à la prostitution, et pas tout le phénomène de la prostitution, sont considérées comme faisant partie de la criminalité. Or, cette perception est erronée.

Il faut clairement faire comprendre que la société désapprouve la prostitution infantile. L'établissement d'une peine minimale obligatoire ferait clairement comprendre aux intéressés que, si procurer des jeunes n'est jamais acceptable, comme en font foi les peines sévères que prévoit déjà le Code criminel dans ces cas, procurer des jeunes en pareilles circonstances est encore moins tolérable et mérite des peines sévères.

L'établissement d'une infraction passible d'une peine plus importante est bien dans l'esprit de l'engagement du livre rouge, où il était question d'imposer des peines plus sévères aux proxénètes. Des dispositions particulières visant à faciliter le témoignage de jeunes plaignants devant les tribunaux vont inciter les jeunes prostitués à témoigner contre ceux qui les exploitent. C'est ainsi qu'ils pourront témoigner devant un écran et qu'il leur sera également possible de témoigner dans des conditions moins intimidantes que celles qu'impose un témoignage dans une salle d'audience. C'est ainsi qu'un enregistrement magnétoscopique sera admissible en preuve et que l'on pourra assister au témoignage par télévision en circuit fermé. Sous ce rapport, les jeunes prostitués bénéficient de la même protection que les autres enfants qui sont victimes d'exploitation sexuelle.

Le projet de loi propose le recours plus fréquent à des dispositifs tels qu'un écran, la télévision à circuit fermé ou l'enregistrement admissible comme preuve dans le cas de jeunes victimes de pornographie infantile ou d'agression.

(1315)

Le projet de loi C-27 propose d'autoriser les tribunaux à rendre des ordonnances interdisant de publier ou de diffuser l'identité d'un plaignant ou d'un témoin dans une affaire de prostitution. Cette mesure encouragera les prostitués, notamment les jeunes, à témoigner dans pareils cas.

Outre les modifications législatives contenues dans le projet de loi C-27, le gouvernement met en oeuvre des mesures visant à sensibiliser davantage ceux qui oeuvrent dans le domaine de la justice à l'exploitation et à la victimisation qui découlent de la prostitution. Ces mesures sont nombreuses et variées: élaborer des modèles de formation à l'intention des policiers, des procureurs, des juges, des travailleurs sociaux qui oeuvrent auprès de jeunes prostitués; encourager les provinces et les territoires à créer de solides liens entre la police, l'État et les responsables du bien-être à l'enfance afin de traiter les cas de prostitution impliquant des enfants; en collaboration avec les provinces, mettre au point un guide d'application de la loi à l'usage des policiers et des procureurs; encourager les autorités provinciales à affecter des ressources à la lutte contre la prostitution infantile et à l'application des dispositions du Code criminel en visant plus particulièrement les proxénètes et les clients de jeunes prostitués.

De plus, le projet de loi C-27 va dans le sens de l'engagement que le gouvernement a formulé dans le discours du Trône de février, nommément de faire de la protection des droits des enfants une priorité nationale.

Ce projet de loi propose d'apporter d'autres modifications au Code criminel afin d'autoriser la poursuite pénale, au Canada, de citoyens canadiens et de résidants permanents qui se rendent à l'étranger pour se livrer à l'exploitation sexuelle d'enfants pour de l'argent et d'autres fins. Seuls un engagement et une collaboration à l'échelle internationale peuvent mettre fin à cette pratique, qu'on appelle parfois tourisme sexuel. Le projet de loi C-27 reconnaît cet engagement et envoie un message très fort à la communauté internationale au sujet de l'intolérance du Canada envers de telles pratiques. Fort de cet engagement, le Canada se joindra à 11 autres pays: la Suède, la Norvège, le Danemark, la Finlande, l'Islande, la Belgique, la France, l'Allemagne, l'Australie, la Nouvelle-Zélande


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et les États-Unis, qui ont déjà adopté des mesures législatives analogues.

Le gouvernement fédéral s'est fermement engagé à s'attaquer au grave problème de violence faite aux femmes et aux enfants. Le projet de loi C-27 propose de renforcer les dispositions actuelles du Code criminel interdisant le harcèlement criminel ou avec menaces. Ces modifications serviront à mieux protéger contre une telle conduite les femmes et les enfants, qui sont les principales victimes du harcèlement criminel.

Ces propositions répondent également à un engagement que le ministre de la Justice a pris antérieurement en réaction aux recommandations formulées par les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux chargés de la justice et par d'autres collaborateurs au sein du système de justice pénale.

Le projet de loi C-27 prévoit qu'une personne qui tue sa victime après l'avoir harcelée est coupable de meurtre au premier degré si elle avait l'intention de faire craindre à la victime pour sa sécurité ou celle d'autres personnes, par exemple, ses enfants, indépendamment du fait que le meurtre ait été prémédité.

Un meurtre au premier degré est passible d'une peine obligatoire d'emprisonnement à perpétuité, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans. Cette modification indique clairement qu'un meurtre commis pendant le harcèlement de la victime constitue un crime très grave et sera considéré comme tel.

Le projet de loi C-27 prévoit également qu'un tribunal considère comme étant une circonstance aggravante, aux fins de la détermination de la peine, le fait qu'une personne condamnée pour harcèlement criminel ait contrevenu à une injonction ou à une ordonnance de bonne conduite.

Une autre proposition faite dans le projet de loi concerne la mutilation d'organes génitaux féminins, qui consiste à exciser ou à mutiler les organes génitaux de bébés ou d'enfants de sexe féminin. Cette pratique risque de causer des problèmes de santé graves et irréversibles. Le ministère de la Justice, de concert avec Santé Canada, Situation de la femme, Patrimoine canadien et Citoyenneté et Immigration Canada, collabore actuellement à l'élaboration de documents de sensibilisation et d'information publiques sur la mutilation d'organes génitaux féminins sur les plans juridique, sanitaire et culturel.

Le gouvernement estime toujours que le Code criminel interdit la mutilation d'organes génitaux féminins. Nous proposons néanmoins une modification visant à clarifier cette interdiction pour qu'il soit bien clair que les lois canadiennes n'autoriseront aucune forme de mutilation d'organes génitaux féminins. Je crois que cette clarification, outre nos efforts de collaboration pour éduquer et informer la population, jouera un rôle important pour protéger les jeunes Canadiennes contre la pratique consistant à mutiler les organes génitaux.

(1320)

Enfin, le projet de loi C-27 renferme de légères modifications aux dispositions portant sur des infractions relatives à la prostitution, afin de supprimer des expressions archaïques telles que «maison de rendez-vous» ou «personne reconnue de mauvaises moeurs».

Comme je l'ai dit, les jeunes Canadiens sont une richesse. Nous manifestons un esprit de leadership en nous attaquant à plusieurs questions où les jeunes sont particulièrement vulnérables, soit la prostitution chez les enfants, le tourisme sexuel impliquant des enfants et la mutilation d'organes génitaux féminins. Il est important de faire savoir que notre société désapprouve catégoriquement le mauvais traitement et l'exploitation des jeunes ainsi que la prostitution les impliquant. Les jeunes méritent notre respect et notre protection.

Le projet de loi C-27 traite aussi de l'importante question du harcèlement criminel. Les victimes sont généralement des femmes et des enfants. Il faut les protéger. Le projet de loi est important pour tous les Canadiens. Il est conforme aux idéaux de la société canadienne, qui ne tolère pas le recours à la violence contre des femmes et des enfants. Le projet de loi C-27 aidera à réduire le problème des mauvais traitements et de la violence infligés à des femmes et à des enfants.

D'une façon particulière, je voudrais louer les efforts des ministres des Affaires étrangères et de la Justice. Ils ont travaillé très fort à cette fin et sont tous deux intervenus, de façon ferme, précise et efficace, pour protéger les membres les plus vulnérables de notre société.

Je sollicite l'appui de la Chambre pour que ce projet de loi soit rapidement adopté.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, le projet de loi C-27 comporte plusieurs volets, soit les mutilations génitales féminines, le harcèlement criminel, le tourisme sexuel avec des enfants, le témoignage d'enfants et le proxénétisme.

J'aborderai d'abord le volet du tourisme sexuel, suivi de celui sur les mutilations génitales féminines. Ce sont deux problématiques avec lesquelles je me sens particulièrement concernée, ayant été l'initiatrice de projets de loi portant sur ces deux sujets. Je terminerai ensuite mon exposé en discutant des trois autres aspects du projet de loi.

Tout d'abord, pour aborder le tourisme sexuel, je vais commencer en vous relatant une histoire, telle qu'elle a été rapportée dans la revue Reader's Digest en novembre 1993.

En 1992, près de la frontière thaïlandaise, une jeune fille de 14 ans marche vers les rizières où travaillent ses parents. Soudain, un camion s'arrête devant elle et le chauffeur la force à monter à bord. Elle se retrouvera séquestrée dans un bordel de Bangkok où on la viole dix fois par jour. Lorsqu'elle crie, elle est battue. On vient de lui voler sa jeunesse.

Dans un autre pays, sur une plage du Sri Lanka, des hommes venus de Londres, Stuttgart ou San Francisco, se dorent au soleil. Non loin d'eux, de jeunes Ceylanais sont allongés sur le sable. Un Allemand d'âge mur accoste un garçon de dix ans. Il lui demande son nom et, sans autre formalité, l'enjoint de l'accompagner à son hôtel. C'est ainsi que l'on contribue à l'économie du pays, dit-on.

Voilà seulement deux des centaines de cas rapportés par les journalistes et intervenants et intervenantes qui se sont penchés sur


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le tourisme sexuel. Ces deux exemples reflètent bien l'odieuse réalité qui se cache derrière l'exploitation sexuelle d'enfants.

Comme je viens de le dire, il s'agit d'une odieuse réalité car on est ici en présence d'un des comportements les plus répréhensibles d'êtres humains, l'exploitation et la victimisation d'enfants à des fins de rétribution sexuelle.

Ce qui rajoute au caractère odieux du tourisme sexuel, c'est que les enfants qu'on victimise ainsi sont des enfants déjà défavorisés par la vie. Ce sont des enfants pauvres, provenant de pays en développement où les besoins de base des citoyens ne sont pas toujours comblés, loin de là.

Au nom du sacro-saint dollar, on kidnappe ces enfants, on les enferme dans des bordels, on les bat, on les humilie et on les met continuellement en position d'attraper les pires maladies et, éventuellement, d'en mourir au début de la vingtaine, à l'âge où nos enfants commencent leur vie d'adulte remplie de promesses. C'est l'élément «local» de l'opération.

(1325)

De l'autre côté, il y a le client. Ce client vient d'un pays riche et lui-même est à l'aise financièrement. Il se paie des vacances dans des pays exotiques avec, comme point culminant ou comme seule fin, l'achat de services sexuels d'enfants.

Il ne faut pas s'y méprendre, ce client sait très bien qu'il commet un acte criminel. Il sait très bien que, s'il s'adonnait à cette pratique dans son propre pays, il risquerait d'atterrir rapidement en prison pour plusieurs années. D'ailleurs, les journaux, pas plus tard que ce matin, rapportaient une sentence d'emprisonnement de trois ans imposée à un Ontarien reconnu coupable d'avoir eu des relations sexuelles avec des enfants âgés entre 9 et 14 ans.

Ce n'est pas parce que cela se fait ailleurs que cela ne nous concerne pas. Comme je le disais, le client sait pertinemment bien qu'il s'agit d'un des comportements les moins tolérés par sa société. Pourquoi donc se sentir si à l'aise d'aller profiter d'enfants à l'étranger?

Certains de ces pédophiles homosexuels proclament éprouver un grand amour pour leur victime, amour qui serait, à leur dire, réciproque. Ils proclament également que nos lois sont prohibitives et devraient reconnaître la possibilité de relations prétendument affectueuses entre des adultes et des enfants.

Je vous rappelle que ces enfants n'ont souvent que 10 ans et, dans certains cas, moins de 10 ans. Cet argument est absolument fallacieux. Comment peut-on penser qu'un enfant qui est forcé de se prostituer avec des étrangers, à un rythme quotidien parfois effarant, puisse éprouver quelque forme d'affection que ce soit envers ses agresseurs? On n'a même pas à répondre à la question tant elle est évidente.

Un autre argument invoqué par ces touristes est la différence culturelle. Ils prétendent que dans les pays où ils vont acheter les services d'enfants, la mentalité est différente, que ces jeunes enfants sont des enfants de l'amour, ils prétendent que la morale sexuelle est autre, que les relations sexuelles entre enfants et adultes sont perçues différemment parce qu'elles font partie des moeurs. Foutaise!

On n'a qu'à écouter les témoignages de ces pauvres enfants pour savoir qu'il s'agit là à tout le moins d'une propagande trompeuse, au pire, d'une justification complètement abusive des agressions commises envers des victimes sans défense et complètement à la merci de leurs tortionnaires.

De plus, comment ces mêmes personnes pourraient-elles expliquer le fait que les lois dans ces pays étrangers interdisent elles aussi la prostitution juvénile? Les lois d'un pays ne sont-elles pas censées refléter la morale de ce peuple?

Bien qu'il semble vrai que, dans certains pays, les lois portant sur la prostitution infantile ne soient pas appliquées avec toute la rigueur possible, il ne faut pas écarter comme explication la corruption engendrée par la pauvreté. Il ne s'agit nullement de morale sexuelle différente.

Notre société n'accepte pas qu'on achète les services sexuels d'enfants, qu'ils viennent d'ici ou d'ailleurs. Notre société n'accepte pas qu'on kidnappe des enfants, qu'on les maltraite pour que certains adultes, en mal de sensations fortes, puissent se payer du bon temps. Cette pratique va à l'encontre des droits reconnus partout aux enfants, que ce soit à l'échelle nationale ou internationale. Le droit de l'enfant à la sécurité, à la santé, à la vie est sacré. Toutes nos lois visent à les protéger. Notre Code criminel, nos chartes, nos lois sur la protection des enfants n'ont qu'un but: assurer à tous les enfants une vie sécuritaire, à l'abri de toute exploitation et de mauvais traitements. Peu importent les belles paroles des touristes sexuels, leur comportement dégradant viole les droits de base de leurs victimes. Ils sont inacceptables; ils sont criminels.

Cela nous amène au projet de loi C-27 qui contient une disposition qui facilite l'arrestation et la poursuite des clients d'enfants impliqués dans la prostitution au Canada et à l'étranger.

(1330)

Il s'agit de droit nouveau à cause de la portée extra-territoriale conférée au Code criminel. Avec cette nouvelle législation, les autorités pourront dorénavant poursuivre ici un ressortissant canadien qui aurait acheté à l'étranger les services sexuels d'un enfant.

Je suis très heureuse de cette initiative du gouvernement. J'en suis d'autant plus heureuse que c'est un sujet qui me préoccupe beaucoup et qui faisait l'objet d'un projet de loi d'initiative parlementaire que j'avais déposé en cette Chambre, il y a plus d'un an. Suite à ce dépôt, j'ai été contactée par des organismes et des personnes qui m'ont remerciée et encouragée à continuer à contribuer à la protection d'enfants sans défense.

Je ne peux qu'être heureuse de pouvoir, comme parlementaire, contribuer un tant soit peu à cette cause à laquelle oeuvrent inlassablement, sur le terrain, de nombreuses personnes qui ont à coeur la défense des enfants et qui, dans certains cas, mettent leur propre vie


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en danger. Je remercie donc le ministre de la Justice d'avoir reconnu l'importance de légiférer à ce sujet.

J'ai cependant certains commentaires à émettre sur la forme que prend l'intervention du ministre dans ce dossier. En effet, je constate qu'il manque, à mon avis, deux éléments importants dans le projet de loi. Il s'agit de la portée de la législation en termes de qualité et du rôle qu'elle joue dans la commission du crime. Je m'explique.

Tout d'abord, le projet de loi C-27 ne permet de poursuivre que les citoyens canadiens et les immigrants reçus. Je pense que cette catégorie est trop restreinte et j'entends soumettre au ministre, lors de l'étude en comité, qu'il élargisse les catégories de personnes susceptibles d'être poursuivies. Je pense qu'il est important que toute personne, quel que fut son statut légal au Canada, soit sujette à des poursuites si elle se rend coupable de l'acte criminel. Or, je considère qu'à cet égard, le projet de loi actuel est trop limitatif.

Ensuite, je pense que, outre les clients, les personnes et compagnies de toutes sortes qui sont directement ou indirectement impliqués dans ce genre de tourisme sexuel doivent être visées spécifiquement par la législation. Ainsi, la loi devrait explicitement interdire aux agences de voyage et aux transporteurs de participer ou de faire la promotion de ce commerce.

Il me semble que la culpabilité des promoteurs et transporteurs doit être reconnue puisqu'à des fins purement lucratives, ces personnes profitent du tourisme sexuel et l'encourage. Voilà donc un autre projet de modification sur laquelle nous devrons nous pencher.

J'aimerais passer au deuxième volet du projet de loi C-27, celui qui porte sur les mutilations génitales féminines. Tout comme pour le tourisme sexuel, il me fait plaisir de constater que le ministre de la Justice a jugé bon d'intervenir pour modifier le Code criminel, afin de nommer et interdire la pratique de mutilations génitales féminines.

Les deux sujets ont en commun de nier aux enfants le droit à la sécurité de la personne et, dans certains cas, à la vie. Ils revêtent donc une grande importance. C'est en septembre 1994 que je déposais, en première lecture, un projet de loi visant à interdire la pratique des mutilations génitales féminines et à poursuivre les personnes qui y participaient. Ce projet de loi est d'ailleurs rendu en comité pour étude.

Mon projet de loi a retenu l'attention d'un grand nombre de personnes et d'organismes, aussi bien au Québec qu'au Canada. J'ai pu alors constater le sérieux avec lequel des groupes d'interve-nantes et d'intervenants dans le domaine social et de la santé et des groupes de lutte à la violence faite aux femmes se sont réunis pour étudier la problématique et tenter d'y apporter des solutions.

Comme pour le tourisme sexuel impliquant des enfants, il existe un consensus aussi bien, au niveau international qu'au niveau national et régional, et c'est que les mutilations génitales doivent être éradiquées. Les mutilations vont à l'encontre des droits des femmes à la vie et à la sécurité de la personne et de ce fait, ne peuvent être tolérées.

J'ai d'abord élaboré longuement sur ce sujet en Chambre. Nous sommes maintenant rendus à une autre étape: celle de l'action. Une fois le consensus établi, il reste à solutionner le comment.

(1335)

Il est un autre élément que j'ai constaté avec soulagement, et c'est l'atmosphère de respect et de sensibilité qui entoure les débats sur ce sujet. Toutes les conversations que j'ai eues, toutes les discussions auxquelles j'ai assisté, toutes les études que j'ai lues étaient imprégnées d'un profond respect des personnes, aussi bien les victimes que leur entourage. Le consensus existe à l'effet du besoin de faire cesser la pratique, mais les moyens élaborés pour y arriver sont très respectueux des personnes.

C'est ainsi qu'on parle beaucoup d'éducation des membres des communautés concernées. On parle beaucoup de la distinction à faire entre le respect d'une pratique culturelle et le respect des droits de base de la personne. Je crois que nous sommes sur la bonne voie et je suis convaincue que ce n'est pas en dénigrant les personnes qu'on peut les inciter à délaisser certains comportements.

Cependant, même si l'éducation et l'information constituent les éléments de base de la lutte aux mutilations génitales, il n'en demeure pas moins que la loi doit prévoir des sanctions pour les personnes qui continuent sciemment à perpétuer une pratique qui va à l'encontre des droits de la personne. C'est pourquoi l'initiative du ministre rejoint mes préoccupations et celles des autres personnes interpellées par les mutilations.

Je salue cette initiative, même si, ici encore, je crois qu'elle comporte certaines lacunes. Avant de les aborder, je veux cependant insister sur l'importance d'un objectif commun. Je sais que nous le partageons et que ceci facilitera l'adoption de la meilleure législation possible.

Au chapitre des lacunes, j'aimerais d'abord m'arrêter sur la forme que le ministre a préféré conférer à l'interdiction des mutilations génitales féminines. En effet, contrairement à mon projet de loi, qui prévoyait une nouvelle infraction, le projet de loi C-27 ne fait que préciser que les mutilations génitales féminines constituent des voies de fait graves.

On ne fait, somme toute, que préciser une définition. Je crois que cette façon de faire ne permet pas d'atteindre l'objectif. Mes lectures et conversations m'ont appris que les membres des communautés où on pratique encore les mutilations ne sont pas du tout conscients qu'ils participent à une mutilation au sens des voies de fait graves. En fait, la plupart en seraient offusqués.

Donc, puisque dans l'esprit de ces gens, l'opération ne constitue qu'une pratique culturelle, nécessaire de surcroît, il faut, à mon avis, la dissocier des voies de fait graves habituelles. Il faut insérer au Code criminel une disposition portant uniquement sur les mutilations génitales féminines, afin de faire prendre conscience aux gens que cette pratique bien précise est illégale.

J'ai constaté une autre lacune au chapitre des personnes visées par le projet de loi C-27. En effet, l'interdiction qu'elle comporte ne s'adresse qu'aux personnes qui pratiquent l'opération. C'est un


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premier pas essentiel. Cependant, comme je l'ai déjà exprimé à plusieurs reprises, je pense qu'il est aussi important, pour atteindre l'objectif visé, soit l'éradication de la pratique, que toutes les personnes impliquées soient poursuivies, qu'il s'agisse d'un membre de la famille qui donne l'autorisation, d'une personne qui organiserait le transport de la victime vers le pays d'origine ou le transport de la sage-femme vers le Canada, d'une personne qui mettrait, par exemple, des parents en contact avec une autre personne qui pratiquerait l'opération.

Pourquoi poursuivre toute les personnes impliquées? Puisqu'il s'agit d'une pratique culturelle, il est de la première importance que les membres de la communauté concernée se sentent interpellés par la loi. Il faut, pour éradiquer une pratique, que tous les acteurs se sentent responsables. Il faut qu'ils sachent que, comme tout autre acte jugé criminel, toute forme de participation à la commission de l'acte est punissable. Ainsi, si chaque acteur est conscient que son rôle contribue à la commission d'un acte criminel, les risques que l'opération réussisse en sont diminués d'autant.

S'il manque un maillon à la chaîne, celle-ci risque de se briser et c'est ce que nous voulons. Nous voulons que la chaîne se brise pour que l'intégrité physique des femmes et des fillettes, soit respectée.

(1340)

Or, comme les mutilations génitales requièrent, par définition, une victime habituellement toute jeune, il va de soi qu'une personne en autorité accorde son autorisation. On dit qu'il y a à peu près six millions de femmes qui sont excisées chaque année. Il va également de soi que la personne qui pratique l'opération a été recrutée par quelqu'un. Il appert également que dans bien des cas, l'enfant est amenée à l'extérieur du pays pour y subir l'opération.

Elle ne s'y rend pas seule. Si une de ces personnes ne remplissait pas son rôle, l'opération n'aurait pas lieu. Il est donc important de préciser, dans un texte de loi, que ces personnes commettent un acte criminel en jouant leur rôle. Il est important que ces personnes sachent qu'elles seront punies. C'est en bouclant la boucle, selon une expression de chez nous, que la pratique cessera.

De même, puisqu'on sait que l'opération sur des ressortissantes canadiennes est souvent pratiquée à l'extérieur du pays, je suggère au ministre de conférer, comme il l'a fait dans le cas du tourisme sexuel impliquant des enfants, une portée extra-territoriale à l'article portant sur les mutilations génitales féminines. Ceci permettrait la poursuite au Canada des personnes qui emmènent une enfant à l'étranger ou qui organisent son transport pour qu'elle y subisse l'opération. Cette portée extra-territoriale permettrait d'éviter que des personnes continuent de contourner la loi et protégerait plus efficacement les enfants, objectif, je le répète, visé par la loi.

Troisièmement, j'aimerais remettre en question l'exception prévue pour les interventions chirurgicales soi-disant «nécessaires». Mes échanges avec un représentant des gynécologues-obstétriciens du Canada et les prises de position des associations de médecins m'ont convaincue qu'une telle exception n'était nullement nécessaire et qu'au contraire, elle risquait d'avoir un effet contraire au but visé par la loi.

En effet, je me demande si une telle exception n'ouvrirait pas la porte à la pratique d'intervention sous la justification qu'elles sont nécessaires pour la santé d'une femme. D'après les informations que j'ai reçues, les médecins n'ont nullement besoin d'un texte de loi pour savoir quand un acte médical est nécessaire. Or, puisque les médecins ne reconnaissent pas les mutilations génitales féminines comme un acte médical, il n'est nul besoin de les prévoir dans un texte de loi. Je crois donc que cette exception devrait être éliminée.

Enfin, je désire discuter de la possibilité prévue au projet de loi C-27 qu'une personne adulte consente à subir une forme de mutilation génitale. Je rejette cette possibilité avec la plus grande vigueur parce qu'elle va complètement à l'encontre, je le répète, de l'objectif visé, qui est l'éradication des mutilations génitales féminines.

Au nom de quel principe peut-on déclarer, dans un texte de loi, qu'une personne peut consentir à se faire mutiler? Comment peut-on imaginer éradiquer une pratique culturelle vieille de plusieurs siècles et grandement répandue dans certaines cultures en permettant qu'elle soit pratiquée sur une personne adulte? Comment peut-on ignorer que les pressions familiales et sociales risquent d'être telles que des femmes consentiront à l'opération dès qu'elles auront atteint l'âge de 18 ans, soit l'âge de la majorité?

Je n'accepte pas qu'on puisse protéger des femmes avant leur majorité et qu'on les laisse ensuite sans protection. Les mutilations génitales féminines, tout comme l'exploitation sexuelle d'enfants, doivent cesser. Il me fera plaisir de travailler de concert avec le ministre de la Justice pour arriver à adopter la meilleure législation possible quant à ces deux aspects du projet de loi du gouvernement.

On sait que le projet de loi C-27 couvre d'autres sujets d'importance pour la protection des femmes et des enfants. J'aimerais m'y arrêter brièvement, bien que je sache que d'autres de mes collègues les analyseront plus en profondeur. Le harcèlement criminel est somme toute une infraction assez récente dans l'histoire de notre droit criminel. En effet, ce n'est qu'en 1991 que le gouvernement se rendait enfin aux arguments des femmes qui réclamaient depuis longtemps qu'on les protège contre le harcèlement criminel.

(1345)

Le harcèlement criminel est une forme insidieuse de violence contre les femmes. Il est une manifestation d'une attitude de certains hommes qui éprouvent envers leur conjointe un sentiment de possession jalousive. Ce sentiment se traduit par des actions bien précises: espionnage des moindres faits et gestes de la victime, menaces, intimidation.

Une personne victime de harcèlement criminel n'est pas libre et ne se sent jamais en sécurité. Toute sa vie, et souvent celle d'autres personnes de son entourage, est affectée de façon importante par les comportements du harceleur et les craintes qu'ils suscitent.


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Il faut croire que les femmes n'ont pas fini cette bataille, puisque l'appareil judiciaire n'a guère répondu à l'intervention législative de 1991. Voilà pourquoi aujourd'hui, nous retrouvons, dans le projet de loi C-27, une nouvelle disposition qui vise à donner des dents aux dispositions déjà en place. Nous sommes d'accord.

L'élimination de la violence faite aux femmes doit être prise au sérieux par tous les intervenants et intervenantes, qu'ils soient policiers, procureurs de la Couronne ou juges. Combien de femmes assassinées par un ex-conjoint avaient été, bien avant et jusqu'à leur mort, harcelées par leur futur assassin? Combien de femmes ont lancé en vain des appels au secours qui sont restés lettre morte jusqu'au geste fatal?

Le Bloc québécois appuie vigoureusement toute mesure susceptible de protéger la vie des femmes et de les mettre à l'abri de la violence la plus pernicieuse, celle provenant d'un conjoint ou d'un ex-conjoint.

Le projet de loi C-27 s'attaque aussi à un autre phénomène criminel: le proxénétisme impliquant des jeunes. Encore une fois, il s'agit d'adultes qui exploitent, à des fins lucratives ou sexuelles, des enfants. En fait, les proxénètes pratiquent une forme moderne d'esclavage de leurs victimes, esclavage qui est, encore aujourd'hui, dénoncé par le Bureau international du travail. D'après les données fournies par cet organisme, plusieurs dizaines de millions d'enfants sont esclaves, dont un grand nombre dans l'industrie du sexe. C'est ce qu'on pouvait lire dans les journaux, ce matin.

Comme on le sait, les proxénètes, en plus d'exploiter leurs victimes, font fréquemment usage de violence envers elles. C'est un enfer dont les jeunes prostitués, garçons et filles, ont une difficulté énorme à se sortir. Dans les cas où ils réussissent, ils doivent prendre des années pour recoller les pièces de leur vie.

Léon Bernier et Jean Trépanier, deux recherchistes québécois qui se sont penchés sur la prostitution chez les mineurs, ont dressé la liste des problèmes causés par la prostitution. On retrouve les maladies transmises sexuellement, des difficultés d'ordre émotif ou social, la violence, l'implication dans la délinquance et la consommation de drogues.

Le Bloc québécois est d'accord avec l'augmentation de la peine imposée aux proxénètes qui utilisent la violence et vivent des profits de l'exploitation de jeunes.

En ce qui concerne la mesure portant sur les agents provocateurs, nous croyons cependant qu'il y aurait peut-être lieu d'en approfondir l'étude, dans le contexte où il n'est pas nécessairement du rôle de l'État de piéger ses citoyens et citoyennes. Nous encourageons donc le ministre à poursuivre ses réflexions sur ce sujet.

En dernier lieu, je veux apporter au ministre de la Justice l'appui du Bloc québécois aux dispositions qui faciliteront le témoignage des jeunes prostitués contre leur proxénète. En permettant que des mesures spéciales soient étendues aux témoignages des jeunes victimes de violence ou de proxénétisme et aux témoignages des témoins de moins de 18 ans dans ces causes, l'État vise à diminuer le taux de proxénétisme en obtenant la condamnation des personnes qui se rendent coupables, à mon avis, d'un des crimes les plus répréhensibles: l'exploitation d'enfants.

Une société qui se respecte et qui veut survivre protège ses enfants. Nous appuierons toute mesure qui sous-tend cet objectif et qui respecte les droits fondamentaux des personnes.

(1350)

[Traduction]

M. Paul Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de parler aujourd'hui du projet de loi C-27. Il s'agit d'un des rares cas où le ministre de la Justice a élaboré une mesure législative qui aille un tant soit peu dans la bonne direction.

Si l'on examine les mesures qui émanent depuis quelques années du ministère de la Justice, on constate que la plupart ont été inspirées par la sensiblerie des libéraux. On pourrait dire qu'ils n'avaient aucun sens de l'orientation ni aucune volonté de donner la priorité à la sécurité publique. Ces mesures ne reflétaient certainement pas les valeurs canadiennes dominantes.

Avec le projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les jeunes contrevenants, le ministre était trop indulgent et semblait accorder plus de droits au délinquant qu'à la victime. Le ministre tenait avec ce projet de loi une occasion d'abaisser l'âge limite, comme le réclamaient la majorité des Canadiens, mais il n'a pas touché aux dispositions concernant l'âge, sans doute pour ne pas déplaire aux coeurs sensibles. Nous avons maintenant d'avantage d'étude en comité.

Avec le projet de loi C-68, Loi concernant les armes à feu et certaines autres armes, le ministre n'a pas réussi à démontrer qu'une interdiction des armes à feu mettrait fin à la criminalité. Le temps nous dira à quel point cette mesure n'a rien fait pour faire diminuer les crimes avec violence commis à l'aide d'armes à feu. Ce sera l'héritage du ministre: il nous aura coûté cher en perturbation et aura peu contribué à accroître la sécurité publique.

Les projets de loi C-41 et C-33, deux mesures qui ont fait entrer l'expression «orientation sexuelle» dans le Code criminel et dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, prouvent que le ministre est tout à fait favorable à l'octroi d'un statut spécial à certaines catégories de personnes au lieu d'assurer une égale protection à tous.

Je parle du bilan du ministre dans le contexte de la mesure à l'étude. Les mesures qu'il a fait adopter suffiraient peut-être à elles seules à saper le système judiciaire canadien. Où allons-nous? Quand je rentre dans ma circonscription, j'entends souvent mes électeurs me recommander de ne pas laisser passer au ministre de la Justice son indulgence à l'égard de la criminalité.

Les gens ont généralement peur dans leur collectivité. Ils trouvent inquiétant de voir que les criminels semblent avoir plus de droits que le citoyen moyen. Ils trouvent inquiétant de constater que des articles du Code criminel, comme l'article 745, donnent aux tueurs en série comme Clifford Olson au moins une lueur d'espoir d'être libérés avant d'avoir purgé leur sentence.

À propos plus précisément du projet de loi à l'étude aujourd'hui, le gouvernement aurait pu abroger l'article 745, mais il ne l'a pas fait. Ce projet de loi mineur en matière de justice pénale se signale davantage par ce qu'on n'y trouve pas et qu'on aurait dû y trouver, que par ce qu'on y trouve.


3552

Beaucoup de Canadiens ont écrit au ministre et ont présenté d'innombrables pétitions demandant l'abrogation de l'article 745, mais rien n'a encore été fait parce que les coeurs sensibles, minoritaires, appuient peut-être le Parti libéral. Les libéraux savent qu'ils sont liés à un groupe d'intérêts. Par conséquent, pour des raisons de commodité et de manipulation politiques, on continue de mettre en danger la sécurité des Canadiens.

Je crois que nous avons le droit à mieux de notre ministre de la Justice. Après tout, il est le ministre de la Justice de l'ensemble du pays. Nous attendons de lui un train de mesures pour protéger la société. Nous attendons de lui qu'il représente les simples citoyens et non des intérêts particuliers.

Le ministre prétend respecter les simples citoyens, sauf que, presque toujours, les projets de loi qu'il nous propose démentent cette affirmation. Étant donné tout ce qui manque dans le projet de loi, il y a lieu de se demander qui a l'oreille du ministre de la Justice. Certainement pas le simple citoyen.

Je viens effectivement de dire «presque toujours». Dans ma circonscription, New Westminster-Burnaby, la prostitution est un problème grave, comme c'est d'ailleurs le cas dans presque toutes les grandes villes canadiennes. Les prostituées se rassemblent pendant un certain temps dans un quartier, jusqu'à ce qu'un groupe de citoyens les chasse. Mais elles ne partent pas vraiment. Elles s'ins-tallent simplement de l'autre côté de la voie ferrée ou dans un autre quartier.

Le projet de loi C-27 marque un progrès et respecte certains des voeux de la base, mais il ne va pas assez loin, comme c'est généralement le cas. Comme dans la plupart des projets de loi des libéraux, on répugne à imposer des peines plus sévères. Mais c'est pourtant ce que souhaitent les simples citoyens.

Parallèlement aux programmes d'aide, il nous faut des contrôles si nous voulons que ces programmes soient efficaces. C'est une question d'équilibre, et il faut avoir le courage d'agir. Le projet de loi traite la prostitution comme un problème, mais il ne va pas assez loin.

En septembre 1994, le militant Neil Douglas de New Westmins-ter a réuni un groupe de voisins qui en avaient assez de trouver sans cesse dans leur quartier des préservatifs et des seringues qui avaient été utilisés. Ils en avaient assez aussi des actes indécents qui se passaient au beau milieu de la rue. Ce groupe a lancé une campagne pour empêcher que les clients ne viennent dans leur quartier à la recherche de prostituées. Toute la nuit, des vigiles ont patrouillé les secteurs fréquentés par les prostituées en vue de faire honte aux clients et la campagne a fonctionné. Cette action concertée des habitants de la ville, que notre climat juridique n'a certes pas favorisée, s'est heurtée à un problème. Lorsque le groupe de New Westminster chasse les prostituées de son secteur, celles-ci passent dans la ville voisine, ma ville, Burnaby. Puis, un groupe de surveillance de Burnaby entreprend une action similaire, qui chasse les prostituées vers New Westminster. Cela ne finit plus.

(1355)

Les gens sont mécontents et on les comprend. Malheureusement, faute de ressources policières et d'un climat juridique convenable, les gens doivent prendre des mesures eux-mêmes. C'est là que toute l'affaire devient beaucoup plus grave. C'est pourquoi le Code criminel doit être modifié en fonction des besoins de la société.

En mars dernier, j'ai présenté un projet de loi d'initiative parlementaire, le C-248, qui vise à modifier l'article 213 du Code criminel. À l'heure actuelle, est coupable d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire quiconque, dans un endroit soit public soit situé à la vue du public et dans le but de se livrer à la prostitution, soit arrête ou tente d'arrêter un véhicule à moteur, soit gêne la circulation des piétons ou des véhicules, soit arrête une personne ou communique avec elle.

Comme ma localité est confrontée à ce problème, c'est à elle que j'ai demandé des suggestions de solutions. Une suggestion qui est revenue maintes fois est d'alourdir les peines. C'est ce que je propose dans mon projet de loi d'initiative parlementaire. Quiconque communiquerait avec une personne dans le but de se livrer à la prostitution serait coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de dix ans ou d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

Cela donnerait aux juges une plus grande marge de manoeuvre puisqu'ils ne seraient pas obligés de s'en tenir à l'infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Cela permettrait une plus grande souplesse dans le jugement du délit et donnerait aux forces policières un plus grand pouvoir discrétionnaire pour arrêter et identifier les personnes.

En mars 1995, un document de consultation a été rédigé par le groupe de travail sur la prostitution établi, en 1992, par les sous-ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de la justice. Dans son rapport, ce groupe propose exactement ce que je propose dans le projet de loi C-248, à savoir que l'article 213 du Code criminel prévoit une double procédure ou une infraction mixte.

Le comité qui a fait une telle suggestion a donné les raisons suivantes.

Cette option donnerait à la couronne le choix de procéder par déclaration sommaire de culpabilité ou par voie d'acte d'accusation si les prostitués ou les clients sont arrêtés aux termes de l'article 213. Si la couronne choisit de procéder par voie d'acte d'accusation, la peine maximale pourrait être plus sévère et les empreintes digitales des accusés, de même que leur photo, pourraient être prises au moment de l'arrestation, ce qui aiderait les forces policières et les tribunaux à faire respecter la loi en réduisant au minimum l'utilisation de fausses pièces d'identité, surtout par des récidivistes.
On pourrait aider les prostitués, et surtout les jeunes et les fugueurs ainsi identifiés, à quitter le monde de la prostitution. Cette option pourrait aussi aider les programmes visant à enrayer la prostitution de rue, puisque, pour être efficaces, les responsables de ces programmes doivent connaître l'identité des travailleurs du sexe.
Le 27 novembre 1989, le surintendant Jim Clark, du Bureau de la moralité de la police de la communauté urbaine de Toronto, a déclaré devant le Comité permanent de la justice de la Chambre des communes: «Le fait de pouvoir prendre les empreintes digitales et la photo des suspects aiderait les policiers à identifier les fugueurs âgés de 13 à 15 ans qui viennent de l'extérieur de la ville et qui

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s'adonnent à la prostitution et permettrait de régler l'arriéré de mandats d'arrestation contre les prostitués qui ont pu jusqu'à maintenant utiliser de fausses pièces d'identité en toute impunité.»

Il existe seulement deux façons pour les policiers de prendre les empreintes digitales des prostitués accusés de sollicitation.

Le Président: Le député pourra poursuivre son discours après la période des questions. Comme il est 14 heures, la Chambre procédera maintenant aux déclarations de députés.

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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LA SEMAINE DU PORTUGAL

M. Tony Ianno (Trinity-Spadina, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine, d'un océan à l'autre, les Canadiens d'origine portugaise célèbrent la Semaine du Portugal, une occasion de festivités et de réjouissances.

Le point saillant de cette semaine est aujourd'hui, le 10 juin, jour de la Fête nationale des Portugais, qui souligne les nombreuses réalisations de la communauté canado-portugaise. Ce jour revêt aussi une importance historique puisqu'il correspond à l'anniversaire de la mort du grand poète portugais Luis Vaz de Camoes.

Dans ma circonscription, celle de Trinity-Spadina, les festivités de cette semaine sont organisées par l'Alliance des associations et clubs portugais de l'Ontario. Parmi les événements prévus, mentionnons un tournoi de soccer, une exposition d'art, un défilé et de nombreux concerts mettant en vedette des artistes portugais de renommée internationale.

En ce jour de célébration, je rends hommage aux Canadiens d'origine portugaise de ma circonscription pour leur apport à la vie culturelle de Toronto et du Canada.

* * *

[Français]

L'HYDROGÈNE

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, récemment avait lieu à l'Université du Québec à Trois-Rivières, l'inauguration du nouveau pavillon de l'Institut de recherche sur l'hydrogène.

Fruit d'un investissement de six millions de dollars, il vise à développer la recherche dans le domaine de la sécurité, du stockage et du transport de l'hydrogène, carburant qui constitue, avec l'électricité, l'énergie de l'avenir. Cet Institut contribue de façon remarquable à faire du Québec un des pionniers mondial en énergie propre.

Enfin, je voudrais souligner de façon particulière le travail colossal effectué par l'instigateur et directeur de l'Institut, M. Tapan K. Bose, professeur et chercheur émérite qui a présidé, en 1994, l'Association canadienne de l'hydrogène et, en 1995, l'Interna-tional Standard Organization dans ce même secteur.

[Traduction]

LE SÉNAT

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, plus d'un mois s'est écoulé depuis que les députés ont envoyé à l'autre endroit un message demandant que le président du Bureau de régie interne du Sénat comparaisse devant le Comité permanent des opérations gouvernementales afin de rendre compte des dépenses du Sénat, mais ce dernier ne nous a pas répondu.

Comment une institution publique qui n'est pas élue et qui n'a pas de comptes à rendre peut-elle refuser de justifier ses dépenses à la population? C'est tout simplement inacceptable. S'il est impossible de justifier des dépenses de 40 millions de dollars, il faudrait peut-être ramener celles-ci à des niveaux plus raisonnables. Une réduction de 10 millions de dollars, qui ramènerait les dépenses à 30 millions, serait peut-être plus indiquée.

Les Canadiens ne peuvent tout simplement pas continuer de signer un chèque en blanc au Sénat. Le moment est venu que le Sénat respecte les principes de la démocratie moderne, à savoir l'obligation de rendre compte et la justification des dépenses aux contribuables.

Le sénateur Kenny a dit à des journalistes qu'il est disposé à témoigner devant le comité. Eh bien, M. Kenny, le moment est venu de le faire!

* * *

LE REGRETTÉ GRAND CHEF HARRY ALLEN

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, c'est avec une grande tristesse que je prends la parole aujourd'hui pour signaler à la Chambre le décès de Harry Allen, le grand chef du Conseil des premières nations du Yukon.

M. Allen a beaucoup donné à sa collectivité et aux peuples autochtones de tout le Canada. Il a servi à titre de président du Conseil des Indiens du Yukon de 1975 à 1985. Il a également été vice-chef régional de l'Assemblée des premières nations pour le Nord et, en cette qualité, il a servi les peuples autochtones d'un bout à l'autre du pays avec une grande intégrité. En août 1995, il a été élu grand chef du Conseil des premières nations du Yukon.

Il était membre de la bande de Champagne et de Aishiak. Son foyer traditionnel était Klukshu. Il était un grand chef de file pour nous tous dans le Yukon et partout ailleurs au Canada.

Je ne doute pas que tous les habitants du Yukon et tous les députés se joindront à moi pour rendre hommage au vrai leader et grand esprit qu'était le grand chef Harry Allen.

* * *

LE CONCOURS DE RÉDACTION D'UN ESSAI SUR L'UNITÉ NATIONALE

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, récemment, j'ai organisé un concours de rédaction d'un essai sur l'unité nationale auprès des étudiants de ma circonscription. Le concours a été un franc succès, comme en témoignent le grand nombre de participants, la qualité des essais et la ferveur que ceux-ci véhiculaient.


3554

Après un examen des essais par trois juges bénévoles, une étudiante de 13 ans, Angela Hood, de l'école secondaire du district de Listowel, a été déclarée gagnante. Angela se trouve justement à notre tribune aujourd'hui. Dans son essai, Angela a clairement montré qu'elle comprenait l'esprit de solidarité qui est nécessaire au maintien d'un Canada fort et uni.

Nous avons bien des raisons d'être fiers d'être Canadiens. Le Canada est un modèle universel d'ouverture, de tolérance et de générosité. L'histoire de notre succès doit être racontée à tous les pays du monde. Comme ils l'ont écrit dans leurs essais, les étudiants de ma circonscription espèrent que le Canada restera fort, prospère et, plus encore, uni.

* * *

LA SEMAINE NATIONALE
DE LA FONCTION PUBLIQUE

M. Ovid L. Jackson (Bruce-Grey, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir annoncer que nous entamons la Semaine nationale de la fonction publique. Chaque année, à ce temps-ci, nous reconnaissons le dévouement des femmes et des hommes qui travaillent dans la fonction publique canadienne et nous sensibilisons les Canadiens au large éventail de services de haute qualité qu'ils reçoivent du gouvernement fédéral.

La fonction publique canadienne est reconnue comme étant l'une des meilleures au monde. Le Canada peut compter sur une fonction publique professionnelle impartiale pour aider le gouvernement à administrer efficacement et à soutenir l'économie nationale en pleine croissance.

Je crois que la Semaine nationale de la fonction publique serait, pour les députés, une excellente occasion de visiter les bureaux du gouvernement ici, dans la région de la capitale nationale, et dans leurs circonscriptions respectives pour remercier en personne les fonctionnaires fédéraux pour le bon travail qu'ils font.

* * *

(1405)

[Traduction]

SCARBOROUGH

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, au nom des électeurs de Scarborough-Centre, je tiens à féliciter la ville de Scarborough à l'occasion de son 200e anniversaire.

En tant que citoyens de Scarborough, nous sommes très fiers de notre patrimoine et de notre ville. Les origines de la ville remontent au XVIIIe siècle. En 1793, Elizabeth Simcoe, femme du premier lieutenant-gouverneur du Haut-Canada, a baptisé la ville en lui donnant le même nom qu'une ville d'Angleterre. Six ans plus tard, en 1799, David et Mary Thompson sont devenus les premiers colons européens à Scarborough. Aujourd'hui, en 1996, nous formons une communauté diversifiée et dynamique de plus d'un demi-million d'habitants.

Les fêtes du bicentenaire ont commencé en janvier de cette année et se poursuivront jusqu'en décembre. Par ailleurs, la semaine du 10 au 16 juin a été déclarée la semaine de Scarborough.

La ville de Scarborough a apporté une contribution inestimable à la culture sociale, économique et politique, de même qu'au développement de notre pays. Aujourd'hui, Scarborough représente la somme de ses citoyens et le fruit d'une riche histoire s'étendant sur 200 ans.

* * *

[Français]

LES CENTRES D'EMPLOI

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, dans un article du journal La Voix de l'est du 28 mai dernier, en référence à la réforme de l'assurance-chômage, le député de Brome-Missisquoi déclarait que le nombre d'employés demeurant en poste au Centre d'emploi de Cowansville a été établi en prenant en compte l'étendue du territoire desservi plutôt que la taille de la population, critère habituellement retenu.

Comment se fait-il qu'avec une population deux fois supérieure à celle de la région de Cowansville le Centre d'emploi de Granby aura proportionnellement deux fois moins d'employés pour desservir ses contribuables?

Je voudrais que le ministre du Développement des ressources humaines explique à la population de Shefford de quelle façon il s'y est pris pour établir le nombre d'employés demeurant en poste au Centre d'emploi de Cowansville comparativement à celui de Granby.

Je voudrais que le ministre explique à la population de Shefford pourquoi il a transgressé les règles d'équité pour les contribuables en sacrifiant le Centre d'emploi de Granby au détriment de celui de Cowansville, si ce n'est parce que le député de Brome-Missisquoi est libéral comme lui.

* * *

[Traduction]

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, au cours des derniers jours, le Parti réformiste a examiné ses politiques, en a élaboré de nouvelles et a montré qu'il était un parti fort et uni. Aucun autre parti n'a examiné les problèmes auxquels notre pays est confronté dans une tribune aussi ouverte et honnête. Aucun autre parti n'a le courage de remettre en question des idées surannées, la perspicacité d'établir des objectifs clairs ni l'originalité de proposer des initiatives et un leadership audacieux pour l'avenir.

Fort de la confiance de ses membres et convaincu que sa vision le mènera à la victoire au cours des prochaines élections, le Parti


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réformiste est revivifié et il est prêt à essayer d'atteindre ses objectifs pour le bien du Canada et de tous les Canadiens.

Je tiens à remercier les organisateurs, les bénévoles et les délégués qui ont consacré leur temps et leurs efforts à l'assemblée de Vancouver. Le Parti réformiste est fier de ses membres et il reconnaît sa responsabilité de porte-parole de ceux-ci ainsi que des Canadiens qui ont les mêmes opinions. Sans eux, le succès retentissant de l'assemblée et notre parti ne seraient pas possibles.

* * *

LES PRIX DU CARBURANT

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville, Lib. ind.): Monsieur le Président, l'augmentation constante du prix de l'essence et les taux d'intérêt élevés sur les cartes de crédit sont deux questions qui préoccupent beaucoup les Canadiens. À maintes occasions, j'ai exhorté ici même le gouvernement d'intervenir pour les millions de Canadiens qui se font arnaquer par les institutions bancaires et par les sociétés pétrolières.

Je n'accepte pas l'explication fournie par les pétrolières pour justifier cette arnaque manifeste et je n'arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement ne fait pas preuve d'autorité. Si les Canadiens sont furieux de devoir payer 60c. le litre, les Québécois devraient être furibonds de devoir payer 67c.

Ce que veulent les Canadiens, ce n'est pas une nouvelle enquête, mais l'instauration d'une commission permanente ayant non seulement pour mission de faire enquête sur les prix exorbitants, mais aussi le pouvoir de ramener les prix à leur niveau antérieur. Si le gouvernement est vraiment intéressé à accorder un certain répit aux Canadiens dans ce domaine, je lui suggère de conclure une association commerciale avec le gouvernement de l'Iraq. Il pourrait échanger son pétrole contre des denrées alimentaires pour les milliers de petits innocents. . .

Le Président: La députée de Nepean.

* * *

LA SEMAINE NATIONALE
DE LA FONCTION PUBLIQUE

Mme Beryl Gaffney (Nepean, Lib.): Monsieur le Président, nous rendons hommage aux fonctionnaires fédéraux du Canada en cette Semaine nationale de la fonction publique. Il est important que les Canadiens soient au courant des précieux services que leur rend la fonction publique et de la reconnaissance annuelle des employés qui ont un rendement exemplaire ou qui font des suggestions méritoires. Cette récompense est la plus importante forme d'hommage officiel.

Je tiens tout particulièrement à mentionner deux fonctionnaires de Nepean qui ont accompli un travail exceptionnel, soit Christopher J. Cuddy, du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, et Carri-Ann Candusso, du ministère des Transports. Ils font tous deux partie d'un groupe de fonctionnaires choisis pour recevoir cet après-midi un prix d'excellence des mains du président du Conseil du Trésor. J'offre mes félicitations à ces deux fonctionnaires ainsi qu'à tous les lauréats.

(1410)

Puissions-nous continuer de témoigner notre reconnaissance et notre fierté à l'égard des membres de la fonction publique du Canada, en souhaitant qu'elle continue de croître et demeure fidèle à sa tradition d'excellence.

* * *

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, j'ai constaté avec plaisir en fin de semaine que le tiers parti a décidé d'opter pour l'égalité de tous les Canadiens. Les réformistes ont dit de belles choses, mais les paroles doivent être suivies d'actes concrets. Voyons donc ce qu'ont fait les réformistes.

Quelques minutes après l'adoption de la résolution en faveur de l'égalité, les réformistes ont applaudi un député qui déclarait que l'opinion qu'il a émise, voulant que les membres de minorités soient relégués à l'arrière-botuique, était conforme à la résolution. Quel genre d'égalité est-ce là?

Des participants à la même assemblée se sont prononcés en faveur de l'abolition ou de la modification de la Charte des droits. Voilà ce qu'est l'égalité. C'est par pur opportunisme politique que le tiers parti a choisi de modifier plutôt que d'abolir la Charte. La plupart des électeurs canadiens voient dans la Charte des droits et libertés, qu'ils approuvent, un moyen de protéger les droits de tous les Canadiens.

Les réformistes parlent d'unité nationale et critiquent les séparatistes, mais ils ne veulent pas moins émasculer le gouvernement fédéral.

Je crois que le moment est venu pour le Parti réformiste de retourner à l'école.

* * *

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.): Monsieur le Président, le Parti réformiste a essayé cette fin de semaine de se faire un nouveau visage, mais c'est davantage un peu de maquillage pour déguiser l'ancien. Les Canadiens ne s'y laisseront pas prendre. Les réformistes disent que leur vision est celle d'un nouveau Canada pour le XXIe siècle. En réalité, c'est un retour à un Canada du XIXe siècle. C'est une vision ancienne parée d'un langage codé.

Les réformistes parlent de maintenir notre système de santé mais le système qu'ils ont en tête est un système à deux niveaux. Ils se concentrent sur la personnalisation des programmes sociaux, mais ce n'est qu'un langage codé pour démanteler ces programmes et revenir à la loi du plus fort. Pour eux, l'égalité consiste à utiliser la bonne langue et à éviter les attaques des médias. L'égalité réformiste, c'est l'égalité de la jungle.

Éliminer la TPS signifie l'incorporer dans une nouvelle TVF. Ils proposent de réduire les impôts. Cela semble séduisant et c'est pourquoi ils le font. Ils n'ont pas dit aux Canadiens comment ils ont l'intention d'éliminer le déficit, de réduire les impôts, de créer des emplois et d'établir un système d'impôt uniforme, tout cela en trois

3556

ans. Et pendant ce temps, ils prétendent suivre le chemin de l'honnêteté et de l'intégrité.

Le Parti réformiste a fait part de son plan de chercher à plaire aux électeurs sous un nouveau maquillage.

Le Président: Le député de Québec-Est.

* * *

[Français]

L'UNITÉ CANADIENNE

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, les auditeurs de CJMF-Québec ont décerné le prix Bolo à la ministre du Patrimoine pour sa généreuse distribution de drapeaux canadiens à la population québécoise.

En effet, la semaine dernière, le ministère du Patrimoine, en mal de liquider l'unifolié au Québec, a consenti à envoyer, à un seul individu, 20 000 drapeaux canadiens pour distribuer dans les garderies et 6 000 pour pavoiser le long du Saint-Laurent, de Trois-Rivières à Gaspé.

Alors que le Canada traverse actuellement une crise majeure, le gouvernement fédéral préfère enterrer cette crise sous des tonnes d'unifoliés et gaspiller ainsi, en propagande, plus de 7 millions de dollars de l'argent des contribuables.

Pendant ce temps, le gouvernement fédéral coupe 7 millions de dollars dans le projet Tokamak de Varennes, compromettant ainsi des centaines d'emplois et d'importantes retombées économiques pour le Québec.

Ce que le Québec veut, ce dont les Québécois ont besoin, ce ne sont pas des drapeaux et des cerfs-volants, mais des emplois et du développement.

* * *

[Traduction]

LE PARTI RÉFORMISTE DU CANADA

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, venus de toutes les régions du Canada pour un rassemblement à Vancouver la semaine dernière, les réformistes ont réaffirmé leur engagement à l'égard des questions vraiment importantes pour les Canadiens.

Nous avons parlé de la nécessité de veiller à la sécurité et de revitaliser l'économie. Nous avons parlé de l'importance de l'unité nationale. Nous avons réitéré l'importance de la famille, de la création d'emplois et de l'amélioration des perspectives d'emploi, de l'accès raisonnable aux soins de santé et aux programmes sociaux de base, et de la capacité de planifier en vue de la retraite.

Nous avons parlé de la nécessité pour les Canadiens d'avoir un système de justice qui les fasse se sentir en sécurité. Nous avons tendu la main à nos voisins au Québec et réaffirmé la nécessité d'un pays fort et uni.

Nous ne nous sommes pas arrêtés aux paroles. Nous avons adopté des politiques qui reflètent ce en quoi les Canadiens croient vraiment, des résolutions qui seront mises en oeuvre par un gouvernement réformiste, le prochain gouvernement du Canada.

(1415)

[Français]

LES RELATIONS FÉDÉRALES-PROVINCIALES

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier, les premiers ministres du Québec et du Canada se sont rencontrés à Québec pour une séance de travail.

Cette rencontre, qui avait été malheureusement annulée quelques semaines plus tôt par le premier ministre du Québec, a permis de faire progresser plusieurs dossiers importants pour les deux gouvernements.

Originalement prévue pour être brève, la rencontre, qui s'est échelonnée sur une période de deux heures, a permis, une fois de plus, de faire la preuve qu'il est possible d'établir un climat de saine collaboration entre le gouvernement du Québec et celui du Canada.

Au sortir de cette rencontre, il n'y avait eu que des gagnants, et ce sont les citoyens et les citoyennes du Québec et du Canada qui pourront enfin profiter des retombées positives découlant des projets conjoints qui ont été discutés.

* * *

L'UNITÉ NATIONALE

M. Geoff Regan (Halifax-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, hier, plusieurs milliers de personnes se sont réunies sur la colline parlementaire, afin de venir manifester leur attachement au Canada.

Notre gouvernement n'était pas impliqué dans l'organisation de cette manifestation. Nous reconnaissons et saluons positivement toute manifestation qui vise à permettre aux Canadiens et Canadiennes de tout le pays de témoigner leur amour de leur pays.

Certains journaux nous présentent ce matin une photo représentant des gestes déplorables qui ont été posés à l'occasion de la manifestation, hier. Nous les désapprouvons.

La question de l'unité nationale ne se réglera pas par les insultes et la moquerie, et c'est heureusement ce que la très grande majorité des participants à la manifestion d'hier ont su démontrer.

______________________________________________


3556

QUESTIONS ORALES

[Français]

LES RÉFÉRENDUMS

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Justice déclarait qu'à l'instar de la cause Bertrand, il envisageait d'intervenir dans la cause Libman qui sera entendue en Cour suprême du Canada et qui vise à déclarer invalides les articles de la Loi québécoise sur les consultations populaires qui touchent à la limitation des dépenses de chaque camp et la création de comités référendaires.


3557

Est-ce que le ministre de la Justice pourrait nous confirmer si oui ou non le gouvernement a l'intention d'intervenir aux côtés deM. Libman et qu'est-ce qui motive son intervention?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il est prématuré de nous prononcer sur cette question. Naturellement, la constitutionnalité d'une loi est toujours un sujet digne d'intérêt.

Pour l'instant, bien que l'appelant ait eu l'autorisation d'interjeter appel, la cour doit encore formuler les questions constitutionnelles qu'elle examinera. Lorsqu'elle l'aura fait, nous les étudierons pour voir s'il existe une façon dont le procureur général du Canada puisse aider le tribunal à trancher les problèmes constitutionnels qui se poseront.

[Français]

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le ministre de la Justice veut confirmer que son intention réelle, en intervenant dans la cause Libman, parce qu'on sait qu'il souhaite le faire, est de prendre la défense des députés libéraux et des membres de son organisation qui sont accusés par le Directeur général des élections du Québec d'avoir fait des dépenses illégales pour le grand ralliement du non à Montréal, lors de la campagne référendaire au Québec?

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, là n'est pas la question. Nous avons commencé à suivre l'évolution de cette affaire devant les tribunaux longtemps avant que cette question ne soit soulevée. Nous nous intéressons à l'attention que la Cour suprême du Canada, le plus haut tribunal du pays, portera aux questions de constitutionnalité.

Je signale, pour l'information du député et de la Chambre, que le gouvernement n'a pas encore décidé s'il interviendra. Nous prendrons notre décision une fois que la cour aura formulé les questions pertinentes et que nous aurons eu la possibilité de les étudier à la lumière des questions que la cour examinera.

[Français]

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre de la Justice peut-il expliquer qu'après la tentative du gouvernement de modifier les règles de la démocratie au Québec, après s'être allié à Guy Bertrand pour empêcher les Québécois de se prononcer à nouveau sur leur avenir, après avoir exprimé son intention de décider de la question référendaire, le gouvernement veut maintenant s'associer à Robert Libman et s'attaquer à la Loi référendaire québécoise, un outil démocratique que le Québec s'est donné et qu'il ne veut pas voir touché par l'intervention du fédéral?

(1420)

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, premièrement, je voudrais souligner qu'aucune décision n'a encore été prise concernant la cause de M. Libman. Comme je l'ai dit, nous attendons à l'heure actuelle les questions précisées par la Cour suprême du Canada.

Concernant la cause de M. Bertrand, je voudrais aussi dire que nous ne nous sommes pas impliqués dans cette cause parce que nous désirions appuyer M. Bertrand. Nous sommes intervenus dans cette cause en raison de la position prise par le procureur général du Québec. Quand le procureur général du Québec a dit clairement que le processus de l'accession à la souveraineté du Québec était un processus avec lequel ni la Constitution ni les cours du Canada n'avaient rien à voir, c'était nécessaire pour le procureur général du Canada de participer pour répondre à cette proposition. Cette proposition est fausse.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, dans le cas Libman, on ne parle même pas de la Constitution, on parle de la Loi référendaire du Québec. C'est assez incroyable ce que le ministre de la Justice nous dit.

Je demande au premier ministre s'il se rend compte que depuis des mois, son gouvernement et lui et son ministre de la Justice s'acharnent à relancer la question constitutionnelle en sautant sur toutes les occasions qui leur sont offertes pour frapper de plein fouet la démocratie québécoise et pour attaquer constamment la démarche démocratique des Québécois vers la souveraineté.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout ce qu'on souhaite, c'est qu'il y ait au Canada respect de la démocratie. Il y a eu deux référendums et le Canada a gagné deux fois. On n'est pas intéressés à ce que ça continue. C'est le Bloc québécois et les séparatistes du Québec qui veulent continuer, alors que la majorité de la population québécoise et canadienne en a assez.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, si le premier ministre ne veut pas continuer, je vous dirai qu'il a de la difficulté à se retenir, cependant, parce que dans le cas Bertrand, dans le cas Libman, trouver des alliés de même au Québec, d'ailleurs, il faut le faire.

Le premier ministre pourrait-il admettre qu'au fond, s'il envisage d'intervenir dans le cas Libman, c'est qu'il souhaite la création de plus d'un comité référendaire profédéraliste, peut-être parce qu'il ne fait plus confiance à ses alliés fédéralistes québécois tel Daniel Johnson, et parce qu'il veut que disparaissent les barrières limitant la quantité de millions que ses alliés financiers, dont certains jouissent de fiducies familiales, sont prêts à déverser au Québec comme ils l'ont fait lors du dernier référendum avec le rallye à Montréal?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il y a toutes sortes d'accusations dans cette question qui ne sont pas fondées dans les faits. Quant à nous, nous avons respecté toutes les lois en cause. Mais je pense que le fait que certains Canadiens aient décidé d'aller à Montréal-dans le pays le


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plus libre au monde qui permet d'avoir des députés séparatistes au Parlement du Canada-que des députés et d'autres citoyens du Canada veuillent bien aller dire aux Québécois qu'ils doivent rester au Canada, c'est le respect de la liberté de parole tel qu'enchâssé dans la Charte des droits du Canada.

La première charte a été faite en France pour le respect du droit de parole de tous les citoyens. J'espère que les gens du Bloc et du Parti québécois respecteront la liberté de parole de tous les Canadiens quant à l'avenir de leur pays.

* * *

[Traduction]

L'UNITÉ NATIONALE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, le week-end dernier, des milliers de Canadiens passionnés se sont rassemblés pour réclamer des mesures en faveur de l'unité canadienne. Ils veulent que le gouvernement fédéral règle la question de l'unité avant qu'une autre crise ne survienne. Ils veulent et méritent autre chose que des belles promesses de la part du premier ministre.

Ce que les Canadiens attendent des ministériels, c'est qu'ils montrent une certaine volonté de changer, même si cela briserait leur coeur de libéraux d'avoir un plus petit rôle fédéral à jouer au sein d'un pays décentralisé, mais uni. Les gens se rendent compte que le statu quo ne fonctionne pas et veulent recommencer à neuf.

Après le référendum de l'an dernier, le premier ministre a formé un comité du Cabinet chargé de trouver des réponses au problème de l'unité nationale. Ce comité de l'unité nationale se réunit-il encore? Quand présentera-t-il son rapport pour que les Canadiens puissent en prendre connaissance?

(1425)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de voir que le Parti réformiste s'intéresse enfin à l'avenir du Canada. Lorsque j'ai pris la parole à la Chambre pour dire à tout le monde qu'une majorité d'une voix ne suffisait pas pour détruire un pays, je me souviens très bien que les députés du Parti réformiste s'étaient rangés du côté du Bloc québécois sur ce point.

J'espère que le Parti réformiste se réveillera un jour et lira le discours du Trône, dans lequel le programme pour l'unité nationale est très clairement énoncé. Une grande partie de ce programme sera réalisée après la rencontre des premiers ministres, qui aura lieu jeudi et vendredi de la semaine prochaine.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement n'a rien fait pour assurer aux Canadiens qu'il a les solutions nécessaires pour voir à ce que notre beau pays reste uni.

Il a vanté l'équipe de rêve de l'unité nationale, mais la moitié de cette équipe reste sur le banc et l'autre moitié est silencieuse. Il a dit que le statut de société distincte réglerait le problème, mais cela a été rejeté à maintes reprises. Maintenant, d'après les sondages, il semble que plus de Québécois que jamais pensent que la séparation du Québec est chose possible. Le gouvernement n'a ni plan ni équipe. Les 10 000 patriotes qui étaient ici durant le week-end ont supplié le premier ministre d'enfin faire preuve de leadership.

Le ministre de l'unité a dit que ce serait l'anarchie si les séparatistes gagnaient un autre référendum.

Quel est le plan du gouvernement pour empêcher que cela ne se produise et quand l'annoncera-t-il afin que les Canadiens puissent avoir l'assurance que leur gouvernement a la situation de l'unité nationale bien en main?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tous les gens qui sont venus sur la colline du Parlement hier seront très ravis lorsque le Parti réformiste décidera d'appuyer le bilinguisme au Canada. Ces gens venaient de Montréal, de Québec, du Pontiac et d'autres endroits. Beaucoup d'entre eux étaient des anglophones du Québec qui sont en faveur de la politique du bilinguisme au Canada, que le Parti réformiste a toujours rejeté.

Il y a un instant, le député a parlé de société distincte. Encore une fois, la contribution du Parti réformiste a été de voter contre la société distincte. J'espère que ce parti se réveillera un jour. Cependant, si nous attendions d'avoir l'appui du Parti réformiste pour régler le problème du Canada, nous n'aurions pas de solution. Je suppose que nous devrons régler ce problème en dépit du Parti réformiste.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, si au moins le premier ministre avait un plan. Le gouvernement tire tellement de l'arrière sur cette question qu'il croit qu'il est maître de la situation, mais il s'est fait dépasser par les Canadiens.

La vérité, c'est que le gouvernement s'attarde aux notions de société distincte et de veto constitutionnel, des notions qui sont devenues dépassées il y a 30 ans. Les Canadiens savent que le rajustement des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les provinces est une considération majeure qui aidera à garder notre pays uni. Le problème, ce n'est pas les Québécois, ni les régions. Le problème, c'est le gouvernement fédéral.

Comme les provinces ont refusé de rencontrer le premier ministre pour discuter de changements constitutionnels, le gouvernement fédéral agira-t-il maintenant et promettra-t-il de redonner aux provinces les secteurs de compétence qui leur reviennent aux termes de la Constitution?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député a une copie du discours du Trône sur son pupitre. Tout ce qu'il a demandé se trouve dans les discours du Trône.

Le ministre du Développement des ressources humaines, par exemple, a pris des mesures concernant la question de la gestion de la main-d'oeuvre. Dans le discours du Trône, nous avons des propositions aux provinces dans bien des domaines. Nous espérons rééquilibrer la fédération. Nous voulons clarifier les secteurs de compétence. Nous voulons éliminer les dédoublements. Le Parti


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réformiste est en retard de quatre mois sur cette question, et probablement en retard de 40 ans sur tout le reste.

* * *

[Français]

LA FISCALITÉ

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, la ministre du Revenu a tenté de faire croire qu'en suspendant l'émission de nouvelles décisions anticipées similaires au cas des fiducies familiales de deux milliards transférés aux États-Unis en franchise d'impôt, elle bouchait l'énorme trou fiscal dénoncé par le vérificateur général. Or, rien n'est plus inexact. La décision rendue par Revenu Canada en décembre 1991 est toujours en vigueur, elle est un précédent et tout le monde peut s'en servir pour échapper au fisc.

Ma question s'adresse au premier ministre: reconnaît-il que l'inaction de sa ministre du Revenu et le refus de son gouvernement d'enquêter sur ce scandale laisse grande ouverte l'échappatoire qui peut toujours être utilisée par les propriétaires de fiducies familiales ou par n'importe quel millionnaire?

(1430)

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, le député a entièrement tort. Le gouvernement a fait quelque chose. Nous avons demandé directement au Comité des finances de donner son avis au ministre et de lui fournir de l'information sur cette question.

Franchement, le comité travaille à un rythme effarant, rencontrant des témoins dans tout le pays sur ce très important élément de la Loi de l'impôt sur le revenu, et nous avons vraiment hâte de prendre connaissance de ses recommandations.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement refuse de faire toute la lumière sur le cas de 1991, c'est pour ça qu'il cherche à noyer le poisson au Comité permanent des finances. C'est ce qui arrive.

Alors qu'on fait face à l'un des pires scandales financiers, le premier ministre reste assis. Je lui demande quels intérêts il protège au Canada, ceux de la famille Thomson, ceux de la famille Bronfman, les Irving, la famille Desmarais, ou toutes ces réponses?

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Revenu national): Monsieur le président, le député semble dire qu'il n'est pas d'accord avec le processus démocratique, qu'il ne veut pas participer au processus démocratique. Je crois savoir qu'il a, à plusieurs reprises, quitté la salle où se réunissait le comité que nous avons chargé d'examiner sérieusement la Loi de l'impôt sur le revenu et de nous fournir de l'information utile et complète.

Je lui demande de retourner au comité, d'écouter les témoins et de nous offrir les meilleurs conseils possibles au nom des Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

* * *

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Le 27 mars, le ministre disait que les surplus des cotisations d'assurance-emploi doivent avoir une limite supérieure. Le fait est que le surplus est maintenant estimé à 5 milliard, pour cette année seulement. La majorité des gestionnaires de fonds de pension canadiens disaient récemment que les charges sociales étaient la raison pour laquelle la création d'emplois stagne dans ce pays.

Est-ce que le ministre pourrait nous dire quand tout cela s'arrêtera et quand les charges sociales au titre de l'assurance-emploi seront réduites, afin de ne pas détruire les emplois.

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Finances et moi-même, nous avons déjà dit un certain nombre de fois que nous savons que, du fait d'une série de circonstances, nous allons avoir un surplus dans le compte de l'assurance-emploi.

Mon collègue doit savoir qu'il y a un an, ou deux ans, ou trois ans, c'était tout à fait l'inverse. La dernière chose que veut le député c'est voir se répéter une situation où, en période de récession, alors que le chômage est déjà élevé, nous devions augmenter les cotisations.

Nous essayons de nous assurer que nous fixons un maximum au surplus de la caisse d'assurance-emploi qui soit en relation avec les tendances historiques de cette caisse. Nous surveillerons cela très étroitement.

Je suis sûr que nous serons en mesure de satisfaire le député tout en nous assurant que nous avons une réserve dans la caisse et que nous pourrons nous attaquer à la question des taxes sur les salaires, y compris les cotisations d'assurance-emploi.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Dans ce cas, monsieur le Président, je suppose que le ministre voudrait essayer de faire en sorte que les fonds d'assurance-emploi s'auto-finance et ait une base actuarielle saine. Si, dans le passé, nous avions eu une base actuarielle saine, nous n'aurions pas eu à exiger autant cette fois-ci. C'est cela le problème principal du programme d'assurance-emploi. Ce devrait être une assurance.

Le ministre sait que le chômage chronique et le sous-emploi de la jeunesse canadienne sont vraiment une honte nationale. Les jeunes perdent le respect d'eux-mêmes et l'espoir, et ils sont incapables de participer au bien commun et à notre avenir commun.

Si les taxes sur le salaire, telles que les cotisations à l'assurance-emploi et les primes du Régime de pension du Canada, touchent les


3560

moins bien rémunérés et les plus vulnérables d'abord, pourquoi le gouvernement continue-t-il à dépendre autant des taxes sur les salaires pour ses recettes?

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il est difficile de jouer sur deux tableaux. Si nous devons avoir une caisse d'assurance-emploi qui subvient à ses besoins-ce qui est le cas, parce que lorsque la caisse est en déficit, le gouvernement se doit de couvrir ce déficit, mais le gouvernement et les contribuables sont remboursés lorsque la Caisse d'assurance-chômage récupère. Cela a été le cas cette année, lorsque le déficit a été éliminé et que nous sommes passés à une position de surplus.

(1435)

Malheureusement, ni les actuaires ni le gouvernement ni le secteur privé, ni les syndicats d'ailleurs, ne peuvent prédire exactement les besoins de la caisse d'assurance-emploi, car cela dépend de la situation qui prévaut dans l'économie à un moment donné.

La seule chose que nous pouvons faire c'est essayer d'être prudents. Je comprends le point de vue du député en ce qui concerne les surplus. Nous devons faire attention de ne pas aller au-delà d'un niveau raisonnable.

Je ne pense pas, comme je l'ai indiqué dans ma réponse à la première question, que le député ou qui que ce soit d'autre aimerait nous voir revenir à une situation où, en cas de récession, en plus d'avoir des besoins considérables en matière d'assurance-emploi, le gouvernement devrait augmenter les cotisations pour essayer de réduire le déficit.

Il est toujours difficile de trouver un juste équilibre, mais comme d'habitude, nous essayons de faire de notre mieux.

* * *

[Français]

LA FISCALITÉ

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Le gouvernement libéral a un comportement scandaleux dans le dossier des fiducies familiales, un comportement qui va même jusqu'à museler le Comité des comptes publics pour empêcher que l'on sache comment les familles riches évitent de payer de l'impôt. Pendant ce temps, les principaux fonctionnaires impliqués dans le dossier sont toujours en poste.

Alors que des centaines de millions de dollars sont en jeu et que la population attend une action rapide comment le premier ministre, qui se cache derrière la ministre du Revenu, peut-il justifier que son gouvernement cautionne par son inaction les fuites de capitaux en franchise d'impôt?

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de résumer ce que nous avons fait.

Dès que nous avons reçu le rapport du vérificateur général, nous avons, le jour même, transmis ses observations aux comités de ce Parlement, qui regroupent des députés représentant les Canadiens, afin qu'ils examinent des aspects très importants de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Si j'ai bien compris, le Comité permanent des finances étudiera ces aspects de la Loi de l'impôt sur le revenu. Il a été convenu que le Comité permanent des comptes publics commencerait à étudier d'autres volets de la question, comme il le faudra surement, dès le retour du Parlement après le congé d'été.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, alors que le vérificateur général a dit que d'autres cas pouvaient se produire, alors que le sous-ministre du Revenu a confirmé les propos du vérificateur général, alors que la ministre du Revenu a failli à la tâche par des mesures inefficaces, pourquoi le gouvernement refuse-t-il de faire toute la lumière sur les deux milliards de fiducies familiales transférés en franchise d'impôt en 1991 et sur les autres cas qui ont pu suivre?

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, comme le fait remarquer le député, il s'agit de quelque chose qui s'est passé en 1991. Elle est donc antérieure à l'arrivée au pouvoir de notre gouvernement, mais nous prenons des mesures directes et majeures à cet égard.

Le député lui-même présidait le comité des comptes publics lorsque la décision a été prise quant à l'ordre d'examen, par le comité des finances et le comité des comptes publics, des questions soulevées par le vérificateur général.

* * *

LE CODE CRIMINEL

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Justice n'a toujours rien fait pour éliminer l'article 745 du Code criminel, lequel permet aux criminels coupables de meurtre au premier degré de faire appel après n'avoir servi que 15 ans de leur peine de prison à vie. Depuis que les réformistes sont arrivés ici, ils demandent que cet article soit abrogé.

Le ministre va-t-il présenter une mesure législative abolissant cet article du Code criminel?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme le sait le député, j'ai répondu à maintes reprises à ses questions et à celles de ses collègues, disant que je ne pensais pas qu'il convenait d'abroger l'article 745.

J'ai également dit que j'étais convaincu qu'on pouvait apporter des changements à l'article 745 pour régler certains problèmes bien réels que pose cet article, et certaines des questions qui se posent. Nous avons consulté et écouté toutes sortes de gens, non seulement mon collègue-dont je connais l'opinion à ce sujet-mais aussi des juges, des procureurs, des avocats de la défense, des victimes et des


3561

groupes de défense des droits des victimes, et nous analysons leurs commentaires.

Le gouvernement est sur le point de présenter des mesures qui renforceront et amélioreront l'article 745 du Code criminel. J'espère qu'à ce moment-là nous pourrons compter sur l'appui du député et de son parti.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, il est encourageant d'apprendre que le ministre va passer à l'action sur ce sujet des plus important.

Le ministre peut-il assurer à la Chambre que l'adoption de la mesure législative à laquelle il a fait allusion ne sera pas une demi-mesure, contrairement à tant de ses projets de loi, et qu'elle sera présentée à temps pour empêcher Clifford Olson d'en appeler de sa libération conditionnelle le 12 août prochain?

(1440)

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord pour savoir ce qui constitue une demi-mesure il faut d'abord savoir quels sont les extrêmes. Je ne pense pas que nous prendrons la position du député sur ces questions comme point de référence en ce qui concerne son parti.

Je ne me baserai pas sur un cas précis, ni sur un crime ou sur un contrevenant particulier, car nous ne légiférons pas en fonction de cas individuels. Ce n'est pas la politique du gouvernement. Ce qui nous intéresse, c'est un processus intègre qui puisse servir les intérêts des Canadiens et assurer la sécurité publique. À cet égard, nous avons l'intention de proposer des modifications à l'article 745 qui renforceront et amélioreront le processus.

Nous allons passer rapidement à l'action à cet égard et j'espère pouvoir alors compter sur l'appui du député.

* * *

[Français]

LE DRAPEAU CANADIEN

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine canadien par intérim.

Dans la panique du gouvernement fédéral à la suite du dernier référendum au Québec, une vaste opération de propagande a été lancée pour inonder le pays de drapeaux canadiens, y compris le Québec. Au moment où le gouvernement fédéral a le devoir d'administrer convenablement l'argent des contribuables, il le gaspille de façon contradictoire et irresponsable.

Comment la ministre du Patrimoine peut-elle expliquer que, dans la folie furieuse du gouvernement fédéral de vouloir inonder le Québec d'unifoliés canadiens, un simple citoyen puisse réussir à obtenir jusqu'à 26 000 drapeaux?

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ministre du Patrimoine canadien par intérim, Lib.): Monsieur le Président, il est très clair que l'ancienne ministre du Patrimoine canadien a lancé une campagne pour que, le 15 février 1997, flottent, au Canada, un million de drapeaux. Pourquoi pas, monsieur le Président? Pourquoi ne pas être fiers de notre appartenance à ce grand pays qu'est le Canada?

Il est très clair que nous encourageons chacun des citoyens à faire flotter ce drapeau et que, dans la campagne qui est en cours, un drapeau est donné à chaque foyer. Il n'est pas question d'en donner 20 000 à la même maison.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, la ministre du Patrimoine ne trouve-t-elle pas indécent que, pendant que sa collègue des Ressources naturelles, faute d'argent dit-elle, est obligée de couper 7,2 millions dans le projet Tokamak, un projet de recherche créateur d'emplois au Québec, son ministère à elle gaspille plus de 7 millions de façon inconsidérée pour acheter des cerfs-volants et des drapeaux?

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ministre du Patrimoine canadien par intérim, Lib.): Monsieur le Président, je ne trouve nullement indécent que des commanditaires du secteur privé appuient cette campagne de drapeaux et participent financièrement pour que justement on atteigne notre objectif de un million l'an prochain.

* * *

[Traduction]

LE TOURISME

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre du Revenu national.

Les touristes en provenance des États-Unis contribuent fortement à la croissance économique du Canada, notamment de la circonscription de Guelph-Wellington. La ministre peut-elle me dire quelles mesures elle prend pour améliorer, faciliter et encourager la venue des touristes américains au Canada?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement comprend effectivement l'importance du tourisme et des voyages d'affaires pour notre économie. À Revenu Canada, nous cherchons constamment des moyens d'accélérer le processus pour faciliter la venue au Canada des voyageurs à faible risque, sans pour autant nuire à notre engagement de garantir la sécurité de nos foyers et de nos villes.

Je suis heureuse d'annoncer que, la semaine dernière, nous avons mis sur pied deux nouveaux programmes: CAN-PASS, pour les avions et les bateaux privés, qui offrira aux voyageurs à faible risque les avantages d'un permis approuvé au préalable et d'un système de déclaration par téléphone, pour faciliter le passage à la douane et à l'immigration, sans nuire à la sécurité de nos collectivités.

(1445)

Revenu Canada est déterminé à rationaliser le passage des frontières. Ce sont des programmes comme ceux-là qui veilleront à ce que nous atteignions cet objectif.


3562

LES AÎNÉS

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances a déclaré que le gouvernement entend soutenir nos aînés. Or, dans son budget, il a fait connaître son intention d'exiger des personnes âgées à revenu moyen un taux d'impôt 20 p. 100 supérieur à celui réclamé des millionnaires et des milliardaires de ce pays.

Le ministre du Développement des ressources humaines peut-il nous dire si soutenir les aînés signifie les imposer jusqu'à les saigner?

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il est très regrettable que le député ne prête pas attention au processus qui a actuellement cours au pays. Un groupe de gens, dont un député qui a présidé les audiences, se sont réunis avec des collègues provinciaux et divers intervenants pour discuter de l'avenir du régime de pensions du Canada.

Le député a laissé entendre que le gouvernement cherche à pressurer davantage un groupe qu'un autre. Le but du régime de pensions du Canada est de bénéficier à tout le monde.

Nous savons bien comment le Parti réformiste s'y prendrait pour pressurer les personnes âgées. Il chercherait à se débarrasser de tous les régimes de pensions et forcerait les gens à contribuer à des REER obligatoires. Voilà ce qui s'appelle pressurer.

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'impression que le ministre n'a pas lu le budget qu'a déposé le ministre des Finances. Le budget prévoit qu'en plus de l'impôt normal, les personnes âgées à revenu moyen devront verser 20 p. 100 de plus au titre de la disposition dite de récupération. Cela représente 20 p. 100 de plus que demande le gouvernement.

J'aimerais savoir comment le gouvernement peut croire qu'en s'attaquant aux personnes âgées, elles qui ont bâti ce pays, il va résoudre la crise des pensions que traverse ce groupe d'âge.

L'hon. Douglas Young (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le député a une façon bien à lui d'aborder une situation où il s'agit de récupérer en impôt une somme que doit une personne aynt un certain revenu.

Il est très difficile de récupérer des pensions de vieillesse auprès des personnes âgées sans toucher à ceux qui sont les plus nantis. Je suis sûr que le député, fort de la sagesse que lui-même et son parti ont manifesté au cours de ce week-end, sauront trouver un moyen de faire même cela.

* * *

[Français]

LE SIDA

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

À l'occasion de la XIe Conférence internationale sur le sida, à Vancouver, du 7 au 12 juillet prochain, plus de 5 000 communications scientifiques seront présentées. Pour la communauté scientifique internationale, l'avancement de la connaissance et de la recherche permet d'envisager de faire du sida, non plus une maladie mortelle, mais une maladie chronique. La réalité de la recherche au Canada est cependant passablement plus noire.

Le premier ministre peut-il confirmer les allégations du Conseil de recherche médicale du Canada à l'effet qu'il n'y a présentement plus un sou de disponible pour la recherche fondamentale sur le sida au Canada?

[Traduction]

L'hon. David Dingwall (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je crois avoir bien compris la question de la députée. Or, le gouvernement contribue pleinement au financement lié à la question du sida, tant pour l'exercice de 1996-1997 que celui de 1997-1998.

Nous procédons actuellement à des consultations poussées auprès de divers groupes d'intéressés, en particulier dans le domaine de la recherche.

Plus tard dans la journée, je dois participer, avec des spécialistes venant de partout au Canada, à une table ronde où il sera question du Conseil de recherche médicale et de son rôle concernant, entre autres, le financement de la recherche sur diverses maladies.

J'assure à la députée que, dans la mesure où les ressources sont disponibles, le gouvernement fera en sorte que tous ces organismes obtiennent les fonds dont ils ont besoin pour faire avancer la recherche.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, je ne crois pas que le Conseil de recherche médicale soit tout à fait dans les vapeurs.

Est-ce que le ministre ne trouve pas cette situation honteuse et qu'entend-il faire pour la corriger, sachant que le Canada se classe au troisième rang des pays du G-7 pour le taux d'infection au VIH, mais qu'il est hélas bon dernier pour l'effort de recherche sur le VIH?

[Traduction]

L'hon. David Dingwall (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, la députée se laisse emporter par ses paroles. Au Canada, jusqu'à maintenant, nous pouvons nous vanter de bien gérer les fonds disponibles pour nous attaquer au problème du sida.

(1450)

Si la députée demande s'il est possible ou nécessaire d'obtenir plus d'argent, je serai le premier à lui dire oui, mais nous devons établir un équilibre en ce qui concerne les fonds disponibles.

J'espère que, par suite des consultations que nous effectuerons auprès de divers groupes qui s'intéressent au dossier du sida, nous


3563

pourrons avoir des fonds additionnels et un effort plus concerté pour trouver des cures et des mesures de prévention efficaces.

* * *

L'IMMIGRATION

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, il a été révélé que le ministre de l'Immigration avait octroyé l'an dernier plus de 1 500 permis d'entrée spéciaux à de dangereux criminels. Des violeurs, des présumés terroristes, des meurtriers et des individus coupables de conduite en état d'ébriété, à qui on avait d'abord refusé l'entrée au Canada ou dont on avait ordonné l'expulsion, vivent maintenant ici avec la bénédiction personnelle du ministre.

Des agents d'immigration de première ligne avaient déconseillé d'admettre des criminels au Canada, mais le ministre précédent de l'Immigration a refusé de les écouter.

Quelles assurances la ministre donnera-t-elle aux Canadiens qu'on cessera de violer la loi et qu'on refusera aux criminels l'entrée au Canada?

[Français]

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ministre du Patrimoine canadien par intérim, Lib.): Monsieur le Président, cette question n'est pas nouvelle, comme vous le savez, parce qu'à chaque année le ministre de la Citoyeneté et de l'Immigration se doit de déposer un rapport annuel ici au Parlement concernant les permis ministériels issus.

J'aimerais signaler que depuis 1990 il y a eu une diminution de 73 p. 100 des permis ministériels issus par les différents fonctionnaires de l'Immigration et qu'à chaque fois qu'ils sont émis c'est à la suite d'une étude de cas très sérieuse, individuelle et ils le sont pour différentes raisons.

Par exemple, ça peut être pour des raisons strictement techniques, des raisons médicales ou à l'effet qu'une personne a déjà commis un acte répréhensible il y a plusieurs années, mais on a l'assurance que cette personne n'en commettra pas au Canada. En somme, d'année en année, nous avons été plus restrictifs et il est très clair qu'à chaque fois qu'une décision est prise, elle l'est pour des raisons d'ordre humanitaire.

[Traduction]

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens veulent avoir leur mot à dire dans la politique d'immigration. Or, ils constatent que la nouvelle ministre a elle aussi la tête enfoncée dans le sable et que la politique d'immigration est conçue et inspirée par des intérêts spéciaux.

En plus des 1 500 permis d'entrée spéciaux accordés à des criminels, 44 permis ont été octroyés à des gens qui avaient auparavant été expulsés, 10 autres l'ont été à des individus soupçonnés de terrorisme et 395 autres l'ont été à des personnes qui présentaient un danger pour la santé d'autrui.

En émettant ces permis, le ministre a violé l'article 19 de la Loi sur l'immigration. Pourquoi le ministre a-t-il violé la Loi sur l'immigration, mettant ainsi en danger la sécurité intérieure et la santé publique des Canadiens?

[Français]

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ministre du Patrimoine canadien par intérim, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je le répète, ces permis sont émis sur une base temporaire et ils le sont pour des raisons humanitaires. Je me demande qui joue la politique de l'autruche, alors que des députés du Parti réformiste demandent par écrit presque à toutes les semaines qu'on admette des gens.

J'en ai des exemples ici. La députée de Beaver River, le député d'Okanagan, on nous demande d'admettre des gens au Canada qui ne sont pas admissibles selon la loi. Mais au Canada, nous sommes très humains, nous sommes très accueillants, à l'inverse de ce que dit le député du Parti réformiste.

* * *

[Traduction]

LA PETITE ENTREPRISE

Mme Bonnie Brown (Oakville-Milton, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Pour accéder à une demande du Comité permanent de l'industrie, l'Association des banquiers canadiens vient de produire un rapport sur les relations entre les banques et les PME.

Comment ce rapport va-t-il aider notre gouvernement à faire en sorte que les PME reçoivent les services financiers dont elles ont besoin pour s'épanouir, croître et créer de nouveaux emplois?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, depuis les élections, le gouvernement a constaté que les PME étaient le secteur de l'économie où se situe la majeure partie du potentiel de création d'emplois. Nous avons jugé très important d'essayer de résoudre les problèmes que les PME nous ont signalés. Le financement vient sans doute au sommet de la liste de ces problèmes.

(1455)

Les chefs de PME ont dit et répété qu'ils devaient avoir accès à des ressources financières non seulement auprès des gouvernements, mais aussi, plus particulièrement, des banques à charte canadiennes. Le Comité de l'industrie a demandé à l'Association des banquiers canadiens de produire une étude de base qui nous permettra de comprendre exactement où en sont les relations entre les banques et cette clientèle, et de commencer à appliquer des politiques qui, à l'avenir, garantiront aux PME canadiennes les capitaux dont elles ont besoin, sous forme d'emprunts ou de capital-actions, afin de créer les emplois que les Canadiens cherchent.


3564

[Français]

LE RENFLOUAGE DU IRVING WHALE

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Environnement.

La prise 2 de l'opération renflouage de l'Irving Whale est maintenant amorcée. S'il devait se produire un déversement, il serait essentiel que l'entrepreneur ait pris des assurances appropriées pour couvrir le coût des dommages à l'environnement. Or, à la page 43 du dernier rapport d'évaluation environnementale, daté de mars 1996, on pouvait lire, et je cite: «Il convient de noter qu'à l'heure actuelle, la police d'assurance de l'entrepreneur exclut les BPC.»

Le ministre peut-il nous donner la garantie que les nouveaux contrats d'assurance ont été révisés et qu'ils comprennent maintenant les BPC et, dans l'affirmative, peut-il les déposer devant cette Chambre dans les plus brefs délais afin de rassurer la population?

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, la grande majorité de la population canadienne a réclamé le renflouage de l'Irving Whale, parce que c'est l'option qui présente le moins de risques. Il faut bien préciser que des risques sont associés à chacune des options possibles.

Le Québec et son ministre de l'Environnement ont donné le feu vert pour le renflouage de l'Irving Whale. On a effectué quatre évaluations techniques approfondies comprenant le point de vue de la population. Ce matin, un tribunal a autorisé et approuvé le renflouage de l'Irving Whale.

Nous prenons toutes les précautions possibles. Je demande l'appui du parti de la députée.

* * *

LES PÊCHES

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, en guise de protestation, des filets seront jetés à l'eau, mercredi matin, si le ministre n'intervient pas pour mettre fin à la pêche fondée sur des considérations raciales dans le passage Alberni. Le ministre ne devrait pas se surprendre de voir les pêcheurs organiser d'autres manifestations, s'il envisage de régir de façon similaire la pêche sur le fleuve Fraser plus tard, cet été.

Le ministre admettra-t-il qu'une industrie de la pêche fondée sur des considérations raciales ne peut mener qu'à la confrontation et acceptera-t-il d'abolir cette mesure?

M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le député n'est pas sans savoir que, la semaine dernière, la Cour fédérale du Canada a conclu que les activités dont certains se plaignaient ne nuisent aucunement à la pêche commerciale. Le député est sûrement au courant, puisque l'injonction qu'il avait demandée lui a été refusée.

Les activités dont il est question s'inscrivent dans le cadre de la stratégie de la pêche autochtone, laquelle est une obligation imposée au gouvernement du Canada par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982.

Les prises autorisées sont minimes, moins de 10 p. 100 du total prévu, et l'accord intervenu prévoit que tout le produit net de la vente du poisson doit servir à financer les projets conjoints de gestion de la pêche approuvés par le ministère et les premières nations.

* * *

LES GARDERIES

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Des femmes des dix provinces et des deux territoires ont entrepris une marche contre la pauvreté et exigent d'une seule voix que le gouvernement libéral tienne sa promesse d'offrir un programme national de garderie.

Nous avons vu en fin de semaine que les fonds fédéraux consacrés aux services de garderie selon l'engagement original ont été réduits de plus de 100 p. 100. Le ministre des Finances a dit qu'il ne hausserait pas l'impôt des sociétés pour aider à financer des programmes comme le programme de garderie.

Pourquoi le gouvernement trouve-t-il plus important de plaire aux sociétés que d'assurer le bien-être des enfants du Canada?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avions un programme et nous avons soumis une proposition aux provinces. Il était bien clair qu'il s'agissait d'un programme à frais partagés. Nous en avons discuté avec les provinces, mais celles-ci n'ont pas voulu participer à un programme élargi de garderie.

Comme cela relève de la compétence provinciale et qu'il était écrit que ce devait être un programme mixte, et que les provinces n'ont pas voulu y participer, nous avons respecté leur champ de compétence et ne sommes pas intervenus. Nous avons respecté le partage des responsabilités constitutionnelles entre le Canada et les provinces.

* * *

(1500)

L'ORGANISATION POUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Le gouvernement fédéral a tenu, le 7 juin, un forum sur la faim dans le monde et la sécurité de l'approvisionnement alimentaire auquel ont participé des groupes de tout le Canada. Par suite de ces discussions, le ministre envisage-t-il des changements pour que le Canada puisse aider davantage à nourrir les affamés du monde?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, l'Organisation

3565

des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture est en train d'organiser un sommet mondial de l'alimentation, qui aura lieu à Rome, en novembre prochain.

Les préparatifs de ce sommet ont débuté l'an dernier ici même, au Canada, lorsque nous avons célébré le 50e anniversaire de la FAO, qui a été créée en 1945 à Québec.

Le Canada est en train de rédiger un mémoire présentant l'opinion des Canadiens. Le 7 juin, des représentants des secteurs agricole, forestier et des pêches et des représentants des provinces ont été consultés sur ce document.

Le Canada entend être dûment représenté au sommet de l'alimentation de Rome, car nous prenons très au sérieux notre responsabilité internationale de soulager la faim dans le monde.

* * *

LES LANGUES OFFICIELLES

M. Bob Ringma (Nanaïmo-Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, dans le rapport du Conseil du Trésor sur les langues officielles, il est dit que les anglophones détiennent 5 p. 100 des emplois du gouvernement fédéral au Québec et que ce chiffre est encore insatisfaisant.

Dans le rapport de Patrimoine Canada, il n'est pas fait mention de cette situation et il est révélé que le gouvernement actuel accepte une politique d'utilisation du français seulement au Québec, ce qui est discriminatoire envers les anglophones, tout en imposant le bilinguisme dans le reste du Canada.

Que fera la ministre du Patrimoine pour accroître la représentation des anglophones dans les emplois du gouvernement fédéral au Québec?

[Français]

L'hon. Lucienne Robillard (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et ministre du Patrimoine canadien par intérim, Lib.): Monsieur le Président, je pense qu'il faut être clair dans les responsabilités des différents ordres de gouvernement. Ce gouvernement est responsable d'aider les minorités dans les deux langues officielles à l'échelle du pays. Donc on aide de façon substantielle les francophones qui sont en situation de minorité, de même que les anglophones au Québec.

Par ailleurs, les mécanismes d'emploi au palier provincial relèvent strictement de cet ordre de gouvernement et non pas du gouvernement du Canada.

* * *

[Traduction]

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune d'un groupe de Boursiers du Commonwealth dirigés par Robert Doyle, député de Malvern, à Victoria, en Australie.

Des voix: Bravo!

______________________________________________


3565

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à cinq pétitions.

* * *

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

AFFAIRES AUTOCHTONES ET DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le deuxième rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord sur l'éducation des autochtones, intitulé Le partage des connaissances: La voie du succès et de l'égalité des chances en éducation.

J'aimerais aussi profiter de cette occasion pour remercier tous ceux qui ont participé de près ou de loin à l'élaboration de ce rapport.

(1505)

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le 4 juin 1996, un projet de loi au nom du ministre des Transports a été mis en avis incluant une recommandation royale. Lorsque l'entrée concernant ce projet de loi est parue au Feuilleton des Avis du 5 juin 1996, la recommandation royale n'y a pas été jointe.

Cette erreur a été répétée lorsque l'entrée a été transférée au Feuilleton d'aujourd'hui. Une copie de la recommandation royale est disponible au Bureau. Je regrette tout inconvénient que cela aurait pu causer aux honorables députés.

* * *

LA LOI MARITIME DU CANADA

L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-44, Loi favorisant la compétitivité du réseau portuaire canadien par une rationalisation de sa gestion, prévoyant la création des administrations portuaires et l'alinéation de certains ports, régissant la commercialisation de la Voie maritime du Saint-Laurent et des traversiers et des questions connexes liées au commerce et au transport maritime, modifiant la Loi sur le pilotage et abrogeant et modifiant certaines loi en conséquence.


3566

-Madame la Présidente, j'aimerais dire à la Chambre que j'ai l'intention de proposer le renvoi de ce projet de loi à un comité avant l'étape de la deuxième lecture conformément au paragraphe 73(1) du Règlement.

(La motion est réputée adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

* * *

[Traduction]

LA LOI SUR LA MÉDAILLE POUR SERVICE VOLONTAIRE CANADIEN DE MAINTIEN DE LA PAIX DES NATIONS UNIES

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-300, Loi régissant la création d'une médaille et d'une agrafe du service volontaire canadien de maintien de la paix des Nations Unies et leur attribution aux Canadiens ayant servi dans une mission de paix des Nations Unies.

-Madame la Présidente, ce projet de loi porte sur la création d'une médaille et d'une agrafe du service volontaire canadien de maintien de la paix des Nations Unies et leur attribution aux Canadiens ayant servi dans une mission de paix des Nations Unies.

Ce projet de loi vise à combler une lacune. Les Nations Unies décernent maintenant une médaille à des Canadiens qui ont servi dans des activités de maintien de la paix. Par la suite, le gouverneur général déclare que cette médaille des Nations Unies est une décoration canadienne.

Toutefois, nombre de nos gardiens de la paix ne considèrent pas cette médaille comme une décoration proprement canadienne et souhaitent que ces services soient reconnus par une décoration vraiment canadienne.

Ce projet de loi prévoit aussi la création d'une agrafe qui servirait de reconnaissance visuelle du grand honneur conféré au Canada par nos gardiens de la paix quand ceux-ci ont obtenu le prix Nobel de la paix le 30 septembre 1988.

Ce projet de loi prévoit que l'agrafe serait fixée sur la médaille comme preuve de l'obtention de cet honneur.

Tous les Canadiens devraient, à bon droit, être fiers de notre contribution au maintien de la paix. Il est des plus appropriés de créer une décoration canadienne pour cette contribution à la fierté nationale.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

(1510)

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de présenter trois pétitions qui ont été signées par environ 75 électeurs de ma circonscription.

Les pétitionnaires veulent exprimer leur opposition au projet de loi C-33, qui modifie la Loi canadienne sur les droits de la personne.

LE PROJET DE LOI 205

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir de déposer une pétition au nom d'électeurs de ma circonscription qui demandent au Parlement d'adopter le projet de loi C-205 qui a été présenté par le député de Scarborough-Ouest et qui, en gros, interdirait à une personne trouvée coupable d'un crime de profiter financièrement de ce crime. J'appuie entièrement cette pétition.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Lyle Vanclief (Prince Edward-Hastings, Lib.): Madame la Présidente, j'ai à présenter un certain nombre de pétitions qui ont trait à la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de s'opposer à toute modification de la Loi canadienne sur les droits de la personne ou de toute autre mesure législative fédérale qui prévoirait l'inclusion de l'expression «orientation sexuelle».

LA CONSTITUTION

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Madame la Présidente, j'ai le plaisir de présenter une pétition signée par 71 électeurs de ma circonscription. Malheureusement, elle date un peu. Elle concerne la clause 17 et les modifications au système scolaire de Terre-Neuve. Je suis néanmoins heureux de la présenter au nom de ces électeurs, car ils se préoccupent des droits des minorités dans cette province.

Les pétitionnaires prient le Parlement de ne pas modifier la Constitution comme l'a demandé le gouvernement de Terre-Neuve et de renvoyer le problème de la réforme du système d'éducation de cette province au gouvernement de Terre-Neuve afin qu'il le règle autrement que par le biais de la Constitution.

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Madame la Présidente, j'ai le plaisir de présenter trois pétitions, dont deux qui concernent la Loi canadienne sur les droits de la personne; l'une a été signée par 44 personnes, l'autre, par 50.

L'EUTHANASIE

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Madame la Présidente, la troisième pétition que j'ai le plaisir de déposer concerne la question de l'euthanasie et elle a été signée par 51 personnes.

LE PROJET DE LOI C-205

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe, Lib.): Madame la Présidente, j'ai trois pétitions à présenter.

La première est signée par 43 électeurs de Clarksburg, de Thornbury et des environs. Les pétitionnaires exhortent le Parlement du Canada à adopter le projet de loi C-205, pour empêcher les criminels de tirer des profits de la vente de leur histoire à des fins de publication.


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LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe, Lib.): Madame la Présidente, la deuxième série de pétitions est signée par environ 250 habitants de Collingwood et des environs. Les pétitionnaires exhortent le Parlement du Canada à ne pas inclure l'orientation sexuelle dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

* * *

LE CODE CRIMINEL

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de présenter une pétition signée par plusieurs centaines d'habitants de ma circonscription.

Les pétitionnaires sont très préoccupés par les sentences imposées aux conducteurs ivres qui causent la mort. Ils prient le Parlement de modifier immédiatement le Code criminel afin d'imposer une sentence minimale de 7 ans et maximale de 14 ans à toute personne reconnue coupable d'avoir conduit en état d'ébriété et d'avoir causé la mort, comme il est proposé dans le projet de loi C-201 d'initiative parlementaire, présenté par le député de Prince George-Bulkley Valley.

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, conformément à l'article 36 du Règlement, je veux présenter deux pétitions qui ont circulé au Canada. La première provient de Yellowknife, dans les Territoires du Nord-Ouest.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la tenue d'une maison familiale et le soin à la maison des enfants d'âge préscolaire constituent une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur par la société.

Les pétitionnaires prient donc humblement le Parlement d'éliminer la discrimination fiscale contre les familles qui décident de s'occuper à la maison des enfants d'âge préscolaire, des personnes handicapées, des malades chroniques et des personnes âgées.

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, la deuxième pétition vient de Coburg, en Ontario.

Les pétitionnaires voudraient attirer l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcoolisées peut causer des problèmes de santé ou affaiblir les facultés d'une personne. Le syndrome d'alcoolisme foetal ainsi que d'autres malformations congénitales peuvent être entièrement évités en supprimant la consommation d'alcool pendant la grossesse.

À ces causes, les pétitionnaires demandent qu'il plaise au Parlement de légiférer pour exiger que des étiquettes d'avertissement soient placées sur les contenants de boissons alcoolisées afin de mettre les femmes enceintes ainsi que d'autres personnes en garde contre les risques liés à la consommation d'alcool.

(1515)

L'UNITÉ NATIONALE

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Madame la Présidente, conformément à l'article 36 du Règlement, je désire présenter une pétition que l'on a fait circuler dans toute la région de l'Outaouais. Cette pétition a été signée par 1 500 Canadiens.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de faire le nécessaire pour que leurs biens et leur territoire restent au sein de la Confédération canadienne et de mettre le gouvernement Péquiste au courant de ses intentions à ce sujet avant une déclaration unilatérale d'indépendance ou le prochain référendum sur la séparation.

LES AFFAIRES DES ANCIENS COMBATTANTS

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Madame la Présidente, j'ai deux pétitions à présenter.

La première porte sur la signature de 75 habitants de la Colombie-Britannique. Ils demandent au Parlement d'examiner l'opportunité d'accorder aux anciens combattants qui faisaient partie de la marine marchande pendant la guerre des prestations ou indemnités analogues à celles qui sont accordées aux anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale qui étaient membres des forces armées.

LES PRIX DU CARBURANT

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Madame la Présidente, la deuxième pétition porte la signature de 203 habitants de la Colombie-Britannique qui demandent au Parlement de ne pas augmenter la taxe d'accise fédérale sur l'essence et d'envisager sérieusement de consacrer ses recettes actuelles à la réfection du réseau routier national qui est en train de se désagréger.

[Français]

LA MARINE MARCHANDE

M. Dan McTeague (Ontario, Lib.): Madame la présidente, j'ai l'honneur de présenter une pétition.

[Traduction]

Cette pétition vient de littéralement plusieurs centaines de personnes qui faisaient partie de la marine marchande pendant la Seconde Guerre mondiale.

Ces pétitionnaires demandent qu'il plaise au Parlement d'examiner l'opportunité d'accorder aux anciens combattants qui faisaient partie de la marine marchande pendant la guerre des prestations ou indemnités analogues à celles qui sont versées aux anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale qui étaient membres des forces armées.

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.): Madame la Présidente, je désire présenter trois pétitions. La première demande au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière qui tendrait à laisser entendre que la société approuve les


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relations entre personnes de même sexe. Cette pétition est signée par des habitants de la Colombie-Britannique et de l'Ontario.

L'AVORTEMENT

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.): Madame la Présidente, les deux dernières pétitions sont signées par des habitants de l'Ontario. L'une vient de Toronto et de ses environs et l'autre provient de diverses régions de la province.

Les pétitionnaires demandent que le Parlement donne son appui à la motion no 91 d'initiative parlementaire qui propose de tenir, aux prochaines élections, un référendum national exécutoire pour demander aux Canadiens s'ils veulent que le gouvernement fédéral finance l'avortement sur demande.

Je suis heureuse de présenter ces pétitions.

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.): Madame la Présidente, je désire déposer trois pétitions signées par des électeurs de Lambton-Middlesex.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de n'adopter aucun projet de loi qui conférerait le statut de famille à des partenaires de même sexe ou qui leur accorderait des prestations de conjoint. Ils lui demandent en outre de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière qui tendrait à laisser entendre que la société approuve les relations entre personnes de même sexe, ou l'homosexualité.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Madame la Présidente, conformément à l'article 36 du Règlement, je présente une pétition signée par 105 résidents de la métropolitaine de Vancouver, qui demandent au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés pour y inclure les personnes de même sexe.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, nous répondons aujourd'hui à la question no 19.

[Texte]

Question no 19-M. Bellehumeur:

Lors des cinq dernières années, existait-il, au sein du Conseil privé ou au ministère du Solliciteur général du Canada ou ailleurs au gouvernement du Canada, une cellule de coordination des mesures d'urgence; si oui, qui en sont ou qui en étaient les membres, le budget alloué, la date des rencontres, la nature des discussions à chacune des rencontres; a-t-elle oui ou non fait des scénarios pour des situations d'urgence et, si oui, quels sont-ils?
M. Rey D. Pagtakhan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): En vertu de la Loi sur la protection civile de 1988 tous les ministres de la Couronne sont responsables de la protection civile dans leur secteur de compétence. Tous les ministères fédéraux ont d'ailleurs des capacités en la matière comme l'exige la Loi sur les mesures d'urgence, également adoptée en 1988. Le ministre responsable de la Protection civile, le ministre de la Défense nationale coordonne toutes les activités. Protection civile Canada (PCC) est l'instance de l'administration publique fédérale chargée d'aider le ministre à s'acquitter de ses responsabilités dans ce domaine.

PCC a existé sous une forme ou une autre depuis 1939. Dernièrement, et avant 1992, selon la Loi sur la protection civile, elle constituait une direction générale distincte du gouvernement dirigée par un administrateur général rendant directement compte au ministre responsable. Après le budget de 1992, la Loi sur la protection civile a été modifiée pour que PCC soit intégrée au ministère de la Défense nationale et elle est maintenant une division du groupe du sous-chef d'état-major au quartier général de la Défense nationale.

PCC exécute la Loi sur les mesures d'urgence. Celle-ci décrit les différents types d'urgence (les sinistres, l'état d'urgence, l'état de crise internationale et l'état de guerre) coordonnés par la Division au nom du gouvernement fédéral, ainsi que les rôles du Cabinet et du Parlement. Elle couvre donc toute une série de situations allant, par exemple, de l'acheminement de secours aux victimes d'inondations à la situation de guerre, et c'est à PCC de veiller à ce qu'on ait entrepris d'élaborer tous les plans d'urgence possibles. Pour ce faire, elle travaille en étroite collaboration avec les ministères et organismes fédéraux, ainsi qu'avec les autorités provinciales.

PCC remplit son rôle de coordination de plusieurs façons, soit directement avec des ministères fédéraux et par l'intermédiaire de comités interministériels. Le principal est le Comité consultatif sur la protection civile composé de sous-ministres adjoints et présidé par le sous-chef d'état-major. Il assure un suivi du plan de travail annuel des différents groupes fédéraux, donne des conseils et informe au besoin le ministre responsable.

Dotée d'un budget annuel d'environ 15,5 millions de dollars (1996-1997), PCC est une petite organisation comptant 89 employés à plein temps. En plus de son bureau au quartier général à Ottawa, PCC administre le Collège de la Protection civile Canada à Arnprior (Ontario), ainsi que de petits bureaux régionaux dans chaque capitale provinciale, afin d'assurer une liaison avec les organisations provinciales de protection civile.

À l'appui de la Loi sur la protection civile, il y a la «Politique fédérale en cas d'urgence» qui a été révisée en 1995. Elle énumère les tâches de certains ministères et, lorsqu'il y a lieu, désigne l'instance fédérale «responsable» de tel ou tel type d'urgence. Par exemple, Solliciteur général Canada est responsable du Plan national de lutte contre le terrorisme; Santé Canada, du Plan d'intervention fédéral en cas d'urgence nucléaire et, PCC, du Plan national de soutien en cas de tremblement de terre. Le gouvernement fédéral applique en fait un large éventail de plans d'urgence pouvant viser un ou plusieurs secteurs. PCC tient la liste de tous ces plans et, dans

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le cas du dernier, coordonne l'organisation d'exercices périodiques pour en évaluer l'efficacité.

Pour donner suite au Plan national de lutte contre le terrorisme, le Solliciteur général est le ministre responsable en cas d'incidents terroristes au Canada. À titre de ministre de la Gendarmerie royale du Canada et du Service canadien du renseignement de sécurité, il (en fait, son secrétariat) veille à l'application efficace du Plan, lequel indique comment le gouvernement répondra à un incident (gestion de celui-ci, communications et rôle des gouvernements locaux et provinciaux). Les responsables du Plan doivent veiller à ce que le gouvernement réagisse de façon coordonnée et cohérente.

De même, avec des groupes de coordination nationaux, les ministères des Affaires étrangères et du Commerce international répondent à des incidents survenant à l'étranger et touchant des citoyens ou des intérêts canadiens.

[Traduction]

M. Zed: Madame la Présidente, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

* * *

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRE DE DÉPÔT DE DOCUMENTS

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, si la question no 2 pouvait être transformée en ordre de dépôt de document, ce document serait déposé immédiatement.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

[Texte]

Question no 2-M. Breitkreuz (Yorkton-Melville)

Au cours de chacune des cinq dernières années civiles, quel a été le nombre des demandes que les détenus fédéraux ont opposées au gouvernement du Canada en raison de blessures ou de préjudice subis pendant qu'ils étaient sous la garde du gouvernement dans un pénitencier fédéral, a) combien de ces réclamations ont été réglées ou retirées ou sont en instance et b) quel était le montant original demandé et le montant dont il a été convenu dans chaque cas réglé?
(Le document est déposé.)

[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Madame la présidente, j'invoque le Règlement. Je voudrais porter à votre attention, pour une troisième fois, que j'ai fait inscrire au Feuilleton des Avis, le 11 mars dernier, c'est-à-dire il y a trois mois, quatre questions: les questions nos 20, 21, 22 et 23, où on demande, dans l'esprit du Règlement, qu'une réponse soit donnée dans les 45 jours. Ça va faire trois mois demain.

Ce sont des questions qui portent sur la localisation du Centre régional de gestion du développement des ressources humaines à Shawinigan plutôt qu'à Trois-Rivières, alors qu'actuellement il est à Trois-Rivières. Ce sont des questions qui sont posées dans l'intérêt public, et dans l'intérêt de la population du comté de Trois-Rivières et de toute la région.

Ces questions viennent d'un député qui a le droit d'interpeller l'exécutif comme le veulent nos règles, l'exécutif ayant le devoir de répondre à ce genre de questions qui sont posées dans l'intérêt public.

(1520)

Donc je compte sur vous, madame la Présidente, pour faire les représentations qui s'imposent auprès de l'exécutif pour qu'on réponde adéquatement, honnêtement et rapidement à ces questions.

______________________________________________


3569

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-27, Loi modifiant le Code criminel (prostitution chez les enfants, tourisme sexuel impliquant des enfants, harcèlement criminel et mutilation d'organes génitaux féminins), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je crois qu'il y a consentement unanime pour que je parle à la place du député de New Westminster-Burnaby. Il reprendra son intervention après.

Il y a aujourd'hui des visiteurs étrangers en ville et je voudrais dire quelques mots au sujet du projet de loi que nous parrainons. Le député et les autres députés ont convenu de faire preuve de courtoisie.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Y a-t-il le consentement unanime?

Des voix: D'accord.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Madame la Présidente, permettez-moi de répéter, à l'intention en particulier du député de New Westminster-Burnaby et d'autres de mes collègues, que j'apprécie grandement qu'on me permette de prendre la parole pour souligner l'importance de projet de loi. Je veux dire quelques mots sur certains éléments des amen-


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dements présentés au projet de loi C-27, au sujet de l'exploitation sexuelle d'enfants à l'étranger.

Les députés se souviendront que, lors du discours du Trône, nous avons pris l'engagement, en tant que gouvernement, d'essayer d'obtenir un consensus international concernant l'exploitation des enfants dans le domaine général du travail, des normes et des droits.

L'un des aspects les plus tragiques et pervers de tout le problème, c'est que l'industrie du tourisme sexuel est florissante et croissante à l'étranger. Des exploitants de l'industrie touristique organisent divers voyages et excursions qui permettent à des gens d'aller s'adonner à l'exploitation sexuelle de jeunes enfants en pays étranger.

Cette situation suscite beaucoup de préoccupations depuis la signature de la Convention relative aux droits de l'enfant. Je crois que 185 pays environ ont officiellement signé la convention, mais on n'a encore rien fait pour trouver une solution vraiment au point à ce problème, à l'échelle internationale.

Cependant, un certain nombre de pays ont pris des mesures pour donner une plus grande portée à leur propre législation. Ainsi, les États participants peuvent prendre des mesures contre leurs propres résidents ou ressortissants, lorsqu'ils commettent une telle infraction.

Je suis sûr que les amendements présentés aujourd'hui constituent l'un des messages les plus fermes que nous pussions envoyer au monde pour montrer toute la puissance du système de justice pénale du Canada auprès de nos propres citoyens, quand il s'agit d'interdire l'exploitation sexuelle d'enfants.

On a d'innombrables indices que les infractions de ce genre sont de plus en plus courantes. Revenu national a constaté qu'il y a des citoyens canadiens qui vont à l'étranger pour s'adonner à l'exploitation sexuelle d'enfants dans d'autres pays. Les gouvernements du Sri Lanka et des Philippines ont rapporté des cas d'arrestation de Canadiens pour de telles infractions. Des enquêtes à l'étranger ont permis d'identifier des Canadiens qui étaient membres de réseaux internationaux de pédophiles. Il est donc, selon nous, très important que le Canada assume une part des responsabilités dans ce genre de problème.

[Français]

L'adoption d'une législation qui fera du tourisme sexuel impliquant des enfants un acte criminel exprime un message clair de non-tolérance et de condamnation de cette activité.

Le Canada n'est pas seul dans ses efforts. En effet, la communauté internationale est solidaire à l'adoption d'un tel projet de loi.

Il existe également des précédents importants. Je pense ici, à la Convention des Nations Unies sur le droit des enfants qui a été ratifiée par le Canada; je pense au travail commencé par la communauté internationale, tel que celui entrepris par la Commission des droits de la personne, et finalement je pense aux quelque 10 nations qui ont déjà adopté ces législations.

[Traduction]

Certaines critiques, certains commentaires ont questionné notamment l'efficacité de telles mesures. Il est évident que nous sommes en terrain inexploré.

D'autres pays, par exemple l'Australie et la Nouvelle-Zélande, ont déjà adopté une loi semblable, comme l'ont fait les États-Unis et plusieurs pays européens. Grâce à la technologie moderne, comme la conférence vidéo et l'enregistrement, il est possible de recueillir des témoignages à l'étranger et de les utiliser sans trop de difficultés devant nos tribunaux. Nous avons découvert que certaines poursuites ont déjà eu lieu.

(1525)

Ce qui importe, c'est l'effet dissuasif de cette mesure, c'est de savoir qu'il y a une loi et qu'il est possible de poursuivre les coupables. Dans bon nombre de pays en développement, le système judiciaire n'a pas le même impact et il ne transmet pas, comme le nôtre, un message clair signalant que ces gestes sont interdits, qu'il ne faut pas les commettre et qu'ils entraînent une punition. La loi elle-même ne protège pas seulement les enfants, elle établit aussi des normes et impose une plus grande participation.

Le Canada a l'intention de participer activement à la Conférence sur l'exploitation sexuelle commerciale qui aura lieu en Suède à la fin de l'été. Cette rencontre internationale réunira, pour la première fois, des représentants des gouvernements, des organismes onusiens, des services de police, de diverses institutions d'enseignement et de l'industrie du tourisme, ainsi que des professionnels de la santé, qui étudieront ensemble la possibilité d'appliquer de telles mesures non seulement de façon unilatérale, pays par pays, mais aussi multilatéralement, avec l'appui d'une convention internationale adoptée par tous les pays.

En adoptant ce projet de loi maintenant, nous espérons pouvoir intervenir à cette conférence en Suède et dire que nous, Canadiens, faisons partie de l'avant-garde qui veut prendre de véritables moyens, adopter une position ferme contre l'une des formes d'exploitations la plus vénale et la plus perverse, soit l'exploitation d'enfants sans défense, qui vivent dans des situations désespérées et dans des circonstances désastreuses.

Je remercie à nouveau la Chambre de sa courtoisie et de son indulgence. J'espère pouvoir dire que les Canadiens auront la chance de montrer au monde entier qu'ils sont prêts à faire de véritables efforts pour essayer de protéger les enfants de toutes les régions de la planète.

M. Paul Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Madame la Présidente, il est agréable d'entendre le ministre faire des commentaires dans le domaine de la justice, ce qu'il ne fait que trop rarement.

La rumeur veut qu'il soit l'un des membres du Cabinet qui s'oppose à ce que l'on rende le Code criminel plus strict. Je suis heureux d'apprendre qu'il appuie un certain activisme relativement au Code criminel. Même lorsque les résultats ne sont pas certains, nous pouvons nous permettre d'être entreprenants en la matière. Les encouragements sont de mise.

Pour ce qui est de la teneur du projet de loi dont est saisie la Chambre, le ministre de la Justice sait que j'ai présenté un projet de


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loi d'initiative parlementaire. Je pense qu'il conviendra que, en punissant de peines plus sévères les infractions décrites à l'article 213 du Code, on rendrait plus efficace la lutte contre l'industrie du sexe.

Le ministre hésite. Je lui conseillerais de parler à son collègue, le ministre du Commerce international. En 1989, alors que le ministre était maire de Toronto, il a comparu devant le Comité permanent de la Justice.

Il serait intéressant, pour sa gouverne, qu'il lise la déposition de l'ancien maire concernant l'article 213. Voici ce qu'il avait à dire: «J'appuie ces modifications ainsi que les recommandations faites par nos services de police pour aider à reprendre le contrôle de nos rues, à savoir que l'on fasse de cette infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité une infraction mixte accompagnée de l'obligation de photographier les individus arrêtés et de prendre leurs empreintes digitales. C'est important quand on a affaire à des fugueurs qui peuvent changer de nom et d'identité ou à des gens qui essaient d'échapper à la justice; en outre, cela relèverait exclusivement des tribunaux provinciaux.»

Il y a un consensus certain parmi les procureurs généraux des provinces pour que l'infraction décrite à l'article 213 devienne une infraction hybride. Je serais tout à fait disposé à retirer mon projet de loi, si le ministre consentait à ajouter un tel amendement au projet de loi C-27 à l'étape de l'étude en comité, puisque cela a un rapport direct avec le contenu de la mesure législative.

Le ministre et les autres députés de la Chambre devraient comprendre que les réformistes ne sont pas ici uniquement dans le but de s'opposer sans arrêt aux lois du gouvernement. Au contraire, nous sommes ici pour formuler des critiques constructives et des propositions valables.

J'espère que le ministre prendra mon offre très au sérieux, non seulement pour mon bien ou le sien, mais également pour le bien de localités canadiennes comme la mienne, New Westminster-Burnaby, et la sienne, Etobicoke-Centre. En somme, créons le climat législatif qu'il faut et nous aurons tôt fait de constater les avantages que présentent des villes plus sûres.

En 1991-1992, le Centre canadien de la statistique juridique a effectué des recherches en Ontario et en Alberta sur le type de peines infligées dans les affaires de prostitution.

En Ontario, on a constaté que 44 p. 100 des accusations portées contre les femmes, surtout relativement à la prostitution, se soldaient par une peine d'emprisonnement suivie d'une période de probation dans 26 p. 100 des cas, d'une amende dans 22 p. 100 des cas et d'une absolution inconditionnelle dans 8 p. 100 des cas. La durée moyenne des peines d'emprisonnement infligées n'était que de dix jours. Quant aux amendes, elles s'élevaient en moyenne à seulement 150 $.

(1530)

En Alberta, une amende constituait la peine la plus fréquemment infligée aux femmes, des prostituées pour la plupart. En effet, les accusations portées contre des femmes se soldaient par une amende dans 66 p. 100 des cas, par une peine d'emprisonnement dans 19 p. 100 des cas, par une période de probation dans 15 p. 100 des cas et, enfin, par une absolution inconditionnelle dans 2 p. 100 des cas. La durée moyenne des peines d'emprisonnement n'était que de 30 jours. Quant aux amendes, elles s'élevaient en moyenne à environ 200 $.

Un seul coup d'oeil sur ces statistiques suffit à nous faire comprendre que les peines infligées dans les affaires de prostitution sont trop faibles. L'industrie du sexe est florissante. Le Code criminel a besoin d'être renforcé. Voilà des années que les réformistes chantent cela au ministre. Je suis heureux de constater qu'il a enfin écouté et qu'il est au moins disposé à adopter des mesures législatives au lieu d'examiner continuellement la question.

Je tiens à féliciter le ministre pour les modifications qu'il a apportées au paragraphe 212(4). Le paragraphe dit maintenant: «Est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de cinq ans quiconque, en quelque endroit que ce soit, obtient ou tente d'obtenir, moyennant rétribution, les services sexuels d'une personne qui est âgée de moins de dix-huit ans ou qu'il croit telle.»

Les prostitués de moins de 18 ans posent un réel problème. Dans le rapport très connu du comité Badgley, qui a été rendu public en 1984 et qui portait sur les infractions sexuelles commises contre des enfants et des adolescents, on a constaté qu'environ la moitié des prostitués qui ont été interviewés ont commencé à exercer leur métier avant l'âge de 16 ans. En outre, près de 96 p. 100 des personnes interrogées ont dit être devenus prostitués avant l'âge de 18 ans.

C'est la facilité avec laquelle les jeunes de la rue peuvent accéder à la prostitution qui les incite à s'y livrer. Lorsqu'on demande aux prostitués de décrire la vie dans la rue, leurs commentaires sont toujours négatifs. En fait, je parie que, si la plupart d'entre eux pouvaient recommencer leur vie, ils ne choisiraient pas le commerce du sexe.

J. Lowman, de la faculté de criminologie de l'Université Simon Fraser, a découvert que la plupart des prostitués conseillent aux jeunes de ne pas entrer dans ce métier. Il a découvert que bon nombre d'entre eux se tournent vers la prostitution et continuent de s'y livrer pour la seule et unique raison qu'elle leur rapporte de l'argent. Si ce n'était pas le cas, il est difficile de comprendre pourquoi tant de prostitués continuent d'exercer ce métier, étant donné les commentaires si négatifs qu'ils font à son égard. Lorsqu'ils commencent à vivre dans la rue, le piège de la prostitution s'ouvre tout grand devant eux. Commence alors la descente aux enfers, et il est très difficile de trouver les moyens de s'en sortir.

Il y a quelques années, un journaliste local de ma circonscription a fait un reportage sur la prostitution. En effectuant sa recherche, il a abordé une prostituée qui lui a dit: «Je n'ai pas l'âge légal. Ne prenez pas ma photo. Si vous publiez ma photo dans votre journal, mes parents vous poursuivront en justice.» J'ai trouvé cela plutôt intéressant. Elle se livre à un acte illicite et menace de poursuivre le journaliste s'il prend sa photo pour l'utiliser dans son reportage. Je présume que, à 17 ans, elle connaît mieux le système de justice que la plupart des gens ne le connaîtront jamais.


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On pourrait en dire autant de la Loi sur les jeunes contrevenants. Le garçon de 11 ans qui vole constamment des voitures sait parfaitement que la police ne pourra pas l'appréhender tant qu'il n'aura pas 12 ans. Comme les prostitués de rue, les jeunes contrevenants savent exactement comment jouir de l'impunité. L'impunité encourage.

Je voudrais aborder une autre question dont traite le projet de loi C-27, et peut-être ajouter quelques observations à propos du commerce du sexe à l'étranger. À l'article 1, le projet de loi ajoute un nouvelle disposition au Code criminel concernant ceux qui, à l'étranger, ont des rapports sexuels avec des personnes mineures. Cette pratique détestable doit être proscrite non seulement au Canada, mais partout dans le monde. Certains pays ont des lois beaucoup plus libérales ou permissives que les nôtres, au Canada. Ce sont les pays que visitent les contrevenants.

Le préambule du projet de loi prescrit notamment: «que, en ratifiant la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, le Canada s'est engagé à protéger l'enfant contre toutes les formes d'exploitation sexuelle et les mauvais traitements d'ordre sexuel, notamment à prendre des mesures pour empêcher que les enfants ne soient exploités dans le cadre de la prostitution ou d'autres pratiques sexuelles illégales».

En Thaïlande, pays de 56 millions d'habitants, il y aurait 2,8 millions de prostitués. C'est incroyable. Sur ce nombre, plus de 800 000 auraient moins de 16 ans. Dans un rapport de juillet 1994 concernant le centre d'accueil des religieuses Good Shepherd, en Thaïlande, on peut lire qu'un grand nombre des cinq millions de touristes que reçoit le pays font partie de tournées «roses» organisées au Japon, à Taïwan, en Corée du Sud, en Australie, en Europe et aux États-Unis. Même si le Canada ne figure pas sur cette liste, j'ai peine à croire que cette activité n'est pas organisée au Canada également.

Ceux qui ont approfondi ce dossier de l'exploitation sexuelle, des articles sur la prostitution impliquant des enfants à l'étranger paraissent régulièrement dans les journaux pour pédophiles. Un article paru dans le bulletin de l'association nord-américaine sur l'amour homme-garçon s'extasie sur un garçon asiatique de 12 ans qui aime vraiment son travail. L'article continue de la façon suivante: «Il convient de peser les avantages et les inconvénients du tourisme sexuel à l'étranger. On peut chercher et trouver l'amour platonique et purement émotionnel chez les garçons américains. Pour une satisfaction sexuelle, il faut aller à l'étranger une ou deux fois par année. On risque de se faire arrêter à l'étranger pour avoir bénéficié des services d'un jeune prostitué. Toutefois, les sanctions pour avoir retenu les services d'un jeune prostitué dans un endroit accueillant à l'étranger sont nettement moins sévères.»

(1535)

Les amis d'un pédophile lui ont recommandé d'aller en Asie pour avoir le choix entre des milliers d'enfants qui ne demandent que cela. Après avoir assisté à une réunion de l'association nord-américaine, il a confié à un membre qu'il voulait aller en Thaïlande, mais qu'il ignorait où s'adresser. On lui a dit qu'il n'y avait aucun problème, qu'il allait recevoir le nom d'un contact et qu'il allait pouvoir prendre les dispositions nécessaires. Quelques semaines plus tard, il était avec un de ceux qui étaient sur place pour choisir leur proie.

Après avoir été libéré, un individu trouvé coupable de pédophilie se plaisait à dire aux enfants de son voisinage que les garçons dont il retenait les services en Thaïlande ne demandaient que 8 $ ou 9 $. Il envisageait de déménager là-bas, peu avant sa disparition, pour profiter «des attitudes culturelles empreintes d'une plus grande maturité» de ce pays.

L'Australie, l'Allemagne, la Norvège, la Suède et les États-Unis ont maintenant tous adopté des lois permettant d'intenter des actions en justice contre ceux qui pratiquent le tourisme sexuel impliquant des enfants, une fois qu'ils sont de retour chez eux. Dans ces pays, certains détracteurs doutent toutefois de l'efficacité de ces mesures législatives. Un professeur de droit de l'Australie a dit ceci:

L'adoption d'une telle loi constituera une déclaration symbolique et politique importante. Cependant, si cette loi ne s'accompagne pas de mesures d'application efficaces à l'échelle tant nationale qu'internationale, ses promesses risquent de s'avérer plutôt trompeuses [. . .]Poursuivre quelqu'un accusé d'avoir commis une infraction sexuelle sur la personne d'un enfant est, dans tous les cas, une tâche assez difficile; quand, pour compliquer tout cela, il faut obtenir des preuves dans un pays étranger, s'assurer que les témoins sont prêts à témoigner dans un pays où les procédures se déroulent dans une langue étrangère, la tâche devient encore plus pénible. Qui plus est, les raisons pour lesquelles les autorités de certains pays n'appliquent pas efficacement les lois locales pourraient aussi avoir un effet préjudiciable sur la coopération étroite qui est indispensable à ce type de poursuite.
Cette déclaration a énormément de poids et elle devrait être prise en considération.

L'article du projet de loi C-27 concernant le tourisme sexuel impliquant des enfants paraît bien, mais le projet de loi ne précise pas comment le gouvernement va le mettre en application. Un des députés ministériels pourra peut-être nous donner des précisions à ce sujet dans le cadre du débat. Je suis impatient d'entendre leurs explications. Le gouvernement du Canada a le devoir de s'assurer qu'il donne non seulement suite aux conventions internationales mais aussi qu'il montre l'exemple par ses actes. Comme nous le savons tous, c'est par les actes et non par les paroles que l'on enraye la criminalité.

Le projet de loi C-27 est un projet de loi utile, mais pas extraordinaire. Un projet de loi excellent aurait modifié l'article 213 du Code criminel. Le ministre connaît toutefois mon projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-248. Je crois qu'il se rend compte que cet article doit être modifié pour pouvoir enrayer convenablement la prostitution. Il sait que cela aiderait la police, permettrait la prise d'empreintes et faciliterait les perquisitions.

Ce projet de loi aurait pu abroger l'article 745 ou un certain nombre d'autres dispositions.

En résumé, le projet de loi est plus tape-à-l'oeil que consistant. Ce ne sont pas seulement le ministre de la Justice et sa doctrine libérale qui ne répondent plus aux besoins; ce sont ses collègues du Cabinet et le premier ministre qui ne lui ont pas accordé la latitude nécessaire pour apporter les rectifications qui s'imposent au Code criminel. Si le gouvernement omet de légiférer en matière de justice


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pénale, c'est parce qu'il fait partie de la vieille école qui se contente de défendre le système au lieu de le changer.

D'une façon générale, les Canadiens n'ont pas beaucoup confiance dans la performance de nos instances pénales et ils n'ont pas beaucoup d'éloges à faire à ce sujet. Comme il s'agit en grande partie d'un système libéral, les Canadiens peuvent comprendre pourquoi le gouvernement actuel n'aura jamais la réputation d'être un spécialiste de l'ordre public ni d'avoir le courage de gouverner pour le compte des citoyens ordinaires et d'accroître la sécurité publique.

Le projet de loi à l'étude ne fait pas grand-chose alors qu'il y a tellement à faire. J'exhorte le ministre de s'attaquer rapidement et globalement aux sujets qui ne sont qu'effleurés dans ce projet de loi.

J'appuierai le projet de loi C-27 et j'espère que mes vis-à-vis rendront la politesse aux réformistes quand ils proposeront des amendements pour améliorer ce projet de loi et faire en sorte qu'il reflète davantage les valeurs que la population canadienne a fait siennes.

[Français]

M. Maurice Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead, BQ): Madame la Présidente, il me fait extrêmement plaisir d'intervenir dans ce débat. Je voudrais d'abord remercier ma collègue de Québec qui me permet d'intervenir, puisqu'elle a elle-même été l'instigatrice de motions et projets de loi d'initiatives parlementaires au cours des années 1994 et 1995 en ces matières.

(1540)

Je la félicite et je lui rends hommage, puisque c'est grâce à son travail et à ses interventions que le gouvernement, prenant conscience de l'importance de ce sujet, s'est finalement décidé à agir et à déposer le projet de loi C-27 qui est devant nous pour étude.

Alors, comme ma collègue de Québec l'a mentionné, l'opposition officielle va appuyer ce projet de loi puisqu'il constitue un pas dans la bonne direction, même si nous croyons que des amendements devraient être adoptés pour améliorer, non seulement le contenu, mais pour faire en sorte que les objectifs visés par le projet de loi soient atteints d'une façon plus efficace.

Au cours des minutes qui vont suivre, je souhaite personnellement m'attarder à l'aspect du tourisme sexuel qui est concerné par ce projet de loi. Bien sûr, quand on pense au tourisme sexuel, il nous vient tout de suite à l'esprit la question d'ordre moral. Personnellement, je trouve inacceptable cette pratique qui fait en sorte que des adultes-ce sont des hommes plus souvent qu'autrement, mais on me dit que des femmes s'y prêtent également-vont à l'extérieur du Canada dans des pays où la situation économique est toujours épouvantable, et qu'ils profitent de cette situation-j'y reviendrai pour le démontrer au cours de mon intervention-pour abuser sexuellement d'enfants de dix ans et même quelquefois de moins de dix ans. Encore là, je le dis, des enfants de sexes masculin et féminin.

Cette pratique est évidemment inacceptable. Il faut la dénoncer avec force sans aucune espèce de nuance. Il faut que ces adultes qui se livrent à ce genre d'exercice, de commerce, sachent que la population canadienne, et québécoise il va sans dire, de même que les représentants de ces populations, n'acceptent pas ce fait et c'est pourquoi, j'en suis convaincu, la très grande majorité des députés de cette Chambre appuieront l'adoption de ce projet de loi.

Mais au-delà de la question morale, il y a aussi une question de droit économique. Il faut se poser la question: comment se fait-il que dans ces pays qui sont concernés par le tourisme sexuel, le point commun soit la très grande pauvreté qui sévit? Qu'on pense aux pays d'Asie, d'Afrique, à certains pays d'Amérique du Sud, d'Amérique centrale, de même qu'en Indonésie, tous ces pays ont en commun une situation économique épouvantable, inacceptable, des populations qui vivent naturellement dans des conditions inhumaines sur le plan économique. J'y reviendrai pour faire le lien entre cette situation, le projet de loi qui nous concerne et comment le gouvernement canadien devrait agir dans ce sens.

Je voudrais également orienter mon intervention sur les questions suivantes.

(1545)

Quand on parle de tourisme sexuel, j'aimerais expliquer ce qu'on entend par cela, qui le pratique, pourquoi il existe et comment, dans le fond, y mettre fin. Le projet de loi C-27 répond à cette dernière question en faisant en sorte que des résidants canadiens, citoyens et citoyennes canadiens, risquent, à la suite de l'adoption de ce projet de loi, d'être poursuivis pour avoir participé à du tourisme sexuel à l'extérieur du Canada.

Je sais que le Bloc québécois, par l'entremise de notre porte-parle, déposera des amendements pour que toute personne, sur le territoire canadien, soit soumise à cette loi, puisque, selon l'étude que nous en faisons, selon l'interprétation de l'opposition officielle, il y a des catégories de concitoyens qui pourraient être exemptés ou qui pourraient éviter l'application de cette loi. On pense aux réfugiés politiques et aux citoyens en attente du statut de résidant ou de citoyen canadien. Donc, des amendements seront proposés par ma collègue en ce sens.

Revenons à ma première question: Qu'est-ce que le tourisme sexuel? Je l'ai déjà mentionné, c'est cette pratique qui consiste à aller dans des pays à l'extérieur du Canada-ce pourrait être au Canada aussi, bien sûr-mais qui, dans les faits, consiste à aller à l'extérieur du Canada pour abuser de jeunes garçons, de jeunes filles, qui sont âgés, habituellement, de moins de dix ans. On m'a parlé d'enfants de 6, 7 et 8 ans, qui sont abusés sexuellement, ce qui est tout à fait inacceptable, selon le code moral que nous avons ici au Canada, mais également selon l'application de notre Code criminel.

Qui pratique ce genre de tourisme sexuel? Je dirais qu'il n'y a pas de catégories d'individus qui sont exclus a priori. Souvent, on identifie plus facilement deux catégories, la première étant les hommes en général, et c'est le cas. Je suis convaincu que si on avait des statistiques ou que si on pouvait faire des enquêtes très pointues sur les individus qui pratiquent le tourisme sexuel, on constaterait que la très grande majorité de ces personnes sont des hommes. Je n'en disconviens d'aucune espèce de façon, mais il peut arriver et il semble qu'il arrive également que des femmes se prêtent au tourisme sexuel.

On pointe également une autre catégorie d'individus. Quand on parle de pédophiles, on a tendance à faire le lien entre pédophilie et homosexualité. On l'a vu lors du débat sur le projet de loi C-33, plusieurs collègues, en particulier les collègues du Parti réformiste et un bon nombre de collègues du Parti libéral, ont fait ce lien allègrement et sans aucune espèce de retenue pour servir leur cause politique. Mais on sait très bien, et c'est particulièrement vrai, je pense, dans le cas du tourisme sexuel, que les victimes de ce commerce sont, habituellement encore une fois, des jeunes filles.


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Tous les reportages que nous avons vus ou que j'ai eu l'occasion de voir personnellement à la télévision, que j'ai entendus à la radio ou lus dans les revues spécialisées ou les journaux, nous amènent à la conclusion que les victimes sont, plus souvent qu'autrement, des filles.

Qu'on parle d'abus sexuels auprès d'un enfant de sexe masculin ou féminin, cela reste tout à fait inacceptable dans l'un et l'autre cas. Mais je voulais faire cette distinction puisqu'il est facile, en particulier pour certains de nos collègues, de faire ce lien et de laisser entendre à la population que seuls les homosexuels pratiquent la pédophilie, alors que dans les faits, ce n'est absolument pas le cas.

(1550)

Pourquoi existe-t-il du tourisme sexuel? Je pense que c'est la question fondamentale qu'on doit se poser. Je vais d'abord l'aborder par la lunette du client, si on veut. On l'a mentionné, les gens qui pratiquent ce genre de tourisme à l'étranger le font sachant très bien que les lois, si on parle du Canada, interdisent ce genre de pratique ici même. Le Code criminel est très clair à ce sujet. Ces gens qui vont à l'extérieur le font en sachant très bien que c'est à l'encontre de nos lois et de la morale respectée au Canada. C'est aussi vrai dans la plupart des pays européens.

Ils le font parce qu'une bonne partie de ces gens considèrent que puisqu'on se retrouve dans un pays dont la culture est différente de la nôtre, les moeurs sont plus libérales. J'ai en tête un reportage qu'on a eu l'occasion de voir à la télévision de Radio-Canada il y a quelques semaines et qui portait précisément sur le tourisme sexuel.

Dans ce reportage, un citoyen français était interviewé. Il répondait au journaliste qui lui demandait: «Pourquoi vous, citoyen français, qui savez très bien que vous ne pourriez pas faire chez vous ce que vous êtes en train de faire ici-cela se passait en République dominicaine-c'est-à-dire pouvoir bénéficier des faveurs sexuelles de jeunes filles de 14, 15 ou 16 ans et quelquefois moins?» Il répondait à cette question précisément, et avec toute la candeur qu'on peut y mettre, en disant: «Oui, je suis très conscient que chez moi je ne pourrais pas faire la même chose, mais ici les moeurs sont différentes, les coutumes sont différentes et on peut se permettre ce genre de pratique.»

C'est épouvantable que des gens intelligents-j'en suis convaincu-des gens qui connaissent très bien le code moral et qui trouveraient inacceptable une telle pratique pour eux-mêmes et pour l'ensemble de la population dans leur propre pays, pensent pouvoir se permettre ce genre de pratique lorsqu'ils se retrouvent en République dominicaine, parce qu'ils sont à l'étranger, parce qu'ils concluent que les moeurs, les coutumes et les mentalités sont différentes dans ce pays.

J'ai pris l'exemple d'un citoyen français non pas pour stigmatiser nos amis français, mais parce que c'était le cas dans l'entrevue à laquelle je fais référence, mais ça aurait pu être un Canadien, un Allemand, un citoyen de n'importe quelle nationalité. C'est tout à inacceptable.

Je crois très sincèrement qu'un projet de loi comme celui que nous avons permettra d'envoyer un message clair au client avant qu'il ne quitte notre pays pour lui dire que ce genre de pratique est intolérable chez nous et il est intolérable partout sur cette planète. Nulle part sur cette planète, on n'acceptera que des enfants servent au tourisme sexuel, au commerce du sexe.

(1555)

J'ai mentionné, au début de mon intervention, qu'il faut également identifier un autre problème. Même si on adoptait cette législation et même si, du jour au lendemain, on se mettait à poursuivre les individus qui s'adonnent à ce genre de pratique, je suis convaincu qu'on ne réglerait pas le problème pour autant. On ne le réglera qu'en partie. La loi permettra de poursuivre des gens, de donner un exemple et d'envoyer un message, comme je l'ai dit tantôt, à notre population, pour que ces individus réfléchissent deux fois avant de se livrer à ce genre de pratique, et que l'on puisse également poursuivre des organisations, puisque le projet de loi vise également les organisations.

Quand on parle des proxénètes, on parle des gens dont les activités commerciales consistent à faire la promotion, à orienter des clients vers des pays où on peut pratiquer le tourisme sexuel. Ce sont ces gens qui seront poursuivis. Alors, on pourra sûrement atteindre un certain niveau d'efficacité, mais ce sera loin de permettre d'abolir ce genre de situation. S'il y a des pays où des enfants sont abusés sexuellement, je l'ai mentionné tantôt, ce n'est pas une question de coutumes, ce n'est pas une question de moeurs, mais c'est essentiellement et fondamentalement pour une question économique pour tous les pays qui sont concernés.

Je peux donner des exemples. Il y avait un article dans le journal La Presse de ce matin qui faisait état de 73 millions d'enfants qui sont au travail dans le monde. Ce ne sont pas 73 millions d'enfants qui sont abusés sexuellement, mais 73 millions d'enfants qu'on utilise pour presque faire des travaux forcés, de l'esclavage. Parmi le genre de travail auquel sont soumis ces enfants, un nombre important concerne le commerce du sexe. Parmi les pays où on retrouve des enfants qui travaillent et où on retrouve, dans la plupart, cette pratique du tourisme sexuel, il y en a un bon nombre d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine. Quand on fait la comparaison par exemple, entre le Burkina Faso où 51 p. 100 de la population enfantine est au travail, et l'Italie, puisqu'on l'a dans notre liste, où on parle de trois dixièmes de 1 p. 100 des enfants de 10 à 14 ans qui sont au travail, on voit qu'il y a une différence appréciable.

Le point que je veux faire, c'est qu'on aura beau adopter ce projet de loi-avec lequel je suis tout à fait d'accord et je voterai pour son adoption-il faut que le gouvernement canadien soit conscient, si on veut régler le problème, qu'il faut soutenir ces populations et leur gouvernement quand c'est possible, pour tenter d'améliorer leurs conditions économiques. Ces enfants, qui pourraient être nos enfants, qui ont moins de 14, 15 ans et souvent moins de 10 ans, se retrouvent plus souvent qu'autrement sans foyer, sans personne pour s'occuper d'eux, et ils n'ont d'autre choix que de faire tout ce qui est possible pour gagner leur vie et pour pouvoir manger. C'est cela qui fait que des enfants se retrouvent dans des situations d'esclavage, dans des usines où ils travaillent pour des salaires de famine, ou dans la rue où ils deviennent des proies pour les touristes sexuels.

Voilà le sens de mon intervention. Je dis que oui, il faut adopter ce projet de loi, mais d'autres mesures sont également nécessaires.

(1600)

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Madame la Présidente, je voudrais faire un commentaire à la suite de l'intervention de mon collègue du Bloc québécois qui vient de soulever toute la


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problématique du tourisme sexuel qui est un des volets du projet de loi C-27. Je sais que mon collègue est quand même quelqu'un de très sensible, compte tenu de ses responsabilités au Comité permanent des droits de la personne.

Nous allons voter en faveur de ce projet de loi, et je vois que mon collègue est d'accord avec moi pour qu'il y ait des amendements. J'abonde dans le même sens que mon collègue-je l'ai dit ce matin mais j'aimerais le répéter-à savoir que les catégories de personnes susceptibles d'être poursuivies devraient être élargies pour s'appliquer également à toute personne qui contribue au transport des tourismes, telles les agences de voyage qui font de la promotion.

Tout comme collègue l'a mentionné tout à l'heure, on a beau avoir une loi ici, il faut aussi dissuader toute agence de promotion, ce qui est le fléau, qui fait la promotion du tourisme sexuel à l'étranger.

On a très bien brossé le tableau de la condition sociale et des conditions de vie de ces jeunes enfants. On leur vole leur jeunesse, on leur vole leur enfance, en prétextant qu'on contribue-je l'ai souvent entendu dire-à l'économie des pays en développement. Je pense qu'il y aurait d'autres façons de faire.

L'adoption de ce projet de loi est un pas dans la bonne direction, j'en suis fort heureuse, mais je tiendrais quand même à ce que le ministre se penche sur certains amendements à apporter à cette loi pour qu'elle ait des dents. Donc c'est un des volets du projet de loi C-27 qui a trait au tourisme sexuel.

Je remercie mon collègue d'avoir bien voulu prendre la parole aujourd'hui sur ce sujet, compte tenu qu'il siège au Comité permanent des droits de la personne, qui touche les droits des enfants et leur intégrité physique. Ce sont des droits auxquels le Bloc québécois croit énormément et qu'il défend quotidiennement.

M. Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead): Madame la Présidente, les remarques de ma collègue de Québec sont tout à fait pertinentes quand elle se réfère au fait qu'à titre de porte-parole en matière de droits de la personne je devais intervenir dans ce débat. À partir de ses remarques, je voudrais apporter quelques précisions.

On a discuté et on continue de discuter actuellement au Comité permanent des droits de la personne de ce dossier des droits des personnes à l'extérieur du Canada. Le Canada étant un pays qui a une bonne réputation sur le plan international, on a la responsabilité de transmettre également un message clair quant aux droits de la personne à travers le monde.

À plusieurs reprises, j'ai eu l'occasion de dénoncer la façon de faire du gouvernement actuel, et en particulier celle de notre premier ministre qui fait preuve de laxisme quant aux droits de la personne. Plus souvent qu'autrement on associe droits de la personne et commerce international en faisant un marchandage. Ce n'est pas la ligne à suivre. Bien sûr, il faut être ouvert au commerce international avec toutes les nations. Quant à moi, je considère que les boycotts, plus souvent qu'autrement, ne donnent aucune espèce de résultat, mais il faut également envoyer un message clair en ce qui a trait au respect des droits de la personne.

Ce dossier nous permet d'agir dans ce sens. D'une part, en envoyant un premier message clair à nos propres concitoyens et concitoyennes en leur disant que nous n'allons pas accepter que nos concitoyens aillent à l'extérieur abuser de jeunes enfants. Le deuxième message est qu'il faut se préoccuper de ces victimes puisque, je l'ai déjà dit, même la meilleure des lois ne trouvera pas une application parfaite, il faut en être conscient. Donc la meilleure façon de régler ce problème est de faire en sorte que ces populations qui vivent une situation économique inacceptable, épouvantable puissent améliorer leur sort.

(1605)

On le fera en appuyant des initiatives sur le plan économique, mais aussi en demandant à ces pays d'établir des règles démocratiques, c'est-à-dire permettre à l'ensemble de la population de se prononcer dans des élections libres, car souvent, il s'agit de régimes où la démocratie est complètement bafouée, et aussi, d'assurer des services à leur population.

Je le disais tout à l'heure et je le répète, et ça m'apparaît fondamental, si les enfants dont on parle aujourd'hui, qui sont abusés partout à travers le monde, étaient à l'école, autrement dit, s'ils vivaient la même situation que nos propres enfants vivent ici au Canada, si les familles de ces enfants pouvaient s'en occuper, pouvaient leur fournir la nourriture, le gîte, faire en sorte qu'ils aillent à l'école, les encadrer, les surveiller, on n'en serait pas à discuter de ce problème, du moins pas d'une façon aussi aiguë qu'on est en train de le faire actuellement. Donc, il faut considérer les deux volets.

Comme ma collègue l'a mentionné tout à l'heure, c'est vraiment à titre de porte-parole, je le fais personnellement parce que j'ai ces dossiers à coeur, mais c'est aussi à titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière des droits de la personne que je veux traiter de cette particularité et aborder ce dossier sous cet angle.

[Traduction]

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureuse de prendre la parole au sujet du projet de loi C-27.

Le préambule du projet de loi est intéressant. Le gouvernement tente de mettre le décor en place en utilisant apparemment de nombreuses promesses du livre rouge pour montrer ainsi où il veut en venir. À mon avis, le gouvernement s'est engagé sur la bonne voie en s'attaquant à des problèmes qui doivent être réglés, mais le projet de loi ne va pas suffisamment loin.

Il est important d'appuyer la direction prise par le gouvernement pour régler ces problèmes. Or, j'encourage le gouvernement à renvoyer le projet de loi au comité et à examiner ses recommandations pour étoffer son projet de loi et envisager sérieusement de pousser encore plus loin les mesures qu'il prend à l'égard de nombreux problèmes.

Je voudrais parler de certaines questions en particulier, notamment la prostitution chez les enfants. J'utilise les envois collectifs dans ma circonscription pour communiquer avec mes électeurs et je reçois de nombreuses réponses. L'automne dernier, j'ai inscrit quelques questions dans un envoi collectif et j'ai reçu 4 386 réponses.


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L'une de ces questions était la suivante: Croyez-vous que la prostitution devrait être légalisée et réglementée par le gouvernement provincial et les municipalités? J'ai posé la question parce que j'ai entendu bien des gens dire qu'il fallait contrôler la prostitution dans nos communautés. La population de ma circonscription est très conservatrice, et j'ai été très étonnée de la réaction. Plus de 54 p. 100 des personnes qui ont répondu ont dit souhaiter que la prostitution soit légalisée et réglementée.

Mes électeurs peuvent également faire des observations dans les envois collectifs. Les observations faites par les membres de ma communauté, qui est très conservatrice et qui compte des familles traditionnelles et une population âgée, permettent de comprendre pourquoi les gens sont de cet avis et estiment que le moment est venu de légaliser et de réglementer la prostitution. Sur les 4 300 personnes qui m'ont répondu, beaucoup ont parlé de la prostitution chez les enfants. Elles estimaient que le moment était venu de réglementer la prostitution pour empêcher les jeunes de se retrouver dans la rue, de régler un problème qui, selon eux, va en s'aggravant.

(1610)

On voit tous les jours des jeunes garçons et des jeunes filles qui, pour une raison ou l'autre, se retrouvent dans la rue pour essayer de gagner leur vie ou sont forcés de gagner leur vie en se prostituant. Dans les grands centres urbains, ils n'ont parfois que 12 ou 13 ans. Je ne crois pas qu'il y ait un seul Canadien qui veuille encourager ou promouvoir cette situation. Tous les Canadiens s'inquiètent des enfants, qui sont vulnérables, et souhaitent qu'ils n'aient pas à se tourner vers la prostitution.

La modification que propose le gouvernement prévoit l'imposition d'une peine minimale obligatoire de cinq ans d'emprisonnement aux personnes qui tirent des gains de la délinquance juvénile. C'est reconnaître qu'un pareil acte mérite une sanction. Or, je dirais qu'il y a des cas où cette peine devrait être de plus de cinq ans. Je comprends que c'est un minimum, mais nous savons que, dans notre système judiciaire, une peine minimale devient devient trop souvent la norme. Quelle que soit la peine minimale, elle a tendance à devenir la peine appliquée. Le gouvernement va prévoir des mesures pour faciliter les arrestations. Il est bon aussi que l'on sache qu'il y a quelque chose à l'appui.

Le gouvernement parle de faciliter le témoignage des jeunes contre leur proxénète. Ils auront une certaine protection, de sorte qu'ils n'auront pas à être identifiés, ce qui est très important. Beaucoup de ces jeunes sont dans une situation dont ils ne peuvent se sortir, en raison des menaces de violence qu'ils reçoivent de leur proxénète. Il est très important, si nous voulons empêcher que cela se produise, que l'on facilite la dénonciation des proxénètes et que l'on attire notre attention sur ces cas.

L'autre aspect est le fait de rendre illégale la prestation de services sexuels par des moins de 18 ans. Je crains que le simple fait de rendre cela illégal ne va pas y mettre fin. La prostitution des 12 et 13 ans est déjà illégale. Il faut faire plus que l'inscrire dans la loi. Il faut donner aux tribunaux les moyens et les ressources de s'attaquer aux problèmes des jeunes qui vivent dans la rue. Nous avons besoin de mesures préventives. Nous devons offrir d'autres options à ces jeunes, des ressources dont ils puissent tirer parti lorsqu'ils essaient d'échapper à la rue.

La gravité de la prostitution des enfants ou la vulnérabilité des jeunes qui sont dans la rue me sont apparues clairement quand une tragédie s'est produite dans ma collectivité, celle de l'assassinat de Melanie Carpenter. Celui qui a tué Melanie Carpenter avait des antécédents de violence. Il avait attaqué deux jeunes prostituées de la région de Toronto au point où elles craignaient pour leur vie. Il n'a été condamné qu'à deux ans moins un jour parce que, ces jeunes étant des prostituées, on a jugé qu'il y avait un élément de consentement et que, par conséquent, ce n'était pas grave.

En tant que législateurs canadiens, nous avons reconnu que les tribunaux ont un rôle très important à jouer. J'espère que cette mesure législative et les changements qu'elle apporte enverront un message très clair aux tribunaux, celui que les Canadiens veulent que les tribunaux, les procureurs, les avocats de la défense et les juges prennent au sérieux ceux qui encouragent les jeunes à se prostituer ou à rester dans le milieu et ceux qui utilisent des services sexuels d'enfants.

Je veux maintenant passer aux modifications dans cette mesure législative qui permettraient de mettre un terme à ce que l'on appelle la prostitution touristique. Le gouvernement reconnaît que nous ne pouvons pas approuver la prostitution des enfants, même si elle se déroule à l'extérieur de notre pays. Si des citoyens canadiens se rendent en Thaïlande, aux Philippines ou ailleurs pour trouver des enfants qui se prostituent, il faut que la loi s'abatte sur eux avec force.

(1615)

Je félicite le gouvernement de prendre des mesures visant à inculper les Canadiens qui ont recours aux services sexuels d'enfants à l'extérieur du Canada. C'est quelque chose qui se fait déjà dans d'autres pays du monde. Le Canada a raison de collaborer et de devenir une partie intégrante de cette communauté internationale qui essaie de mettre un terme à cette forme d'exploitation des enfants.

Cela me rappelle un programme que j'ai vu il y a quelques mois à Radio-Canada. C'était un documentaire sur un groupe de Thaïlandais qui essayaient de replacer de jeunes enfants qui avaient été kidnappés dans leur village. Beaucoup de ces enfants avaient six, sept ou huit ans quand on les a retirés de force de leurs collectivités rurales pour en faire des prostitués dans les grandes villes.

Le documentaire racontait qui étaient ces enfants, comment on les avait kidnappés, comment ils vivaient maintenant dans les grandes villes, qui étaient les clients de la prostitution infantile. C'était répugnant de voir ces avions remplis d'individus d'Amérique du Nord, d'Australie, d'Europe et d'ailleurs, venus dans ces contrées dans le seul but d'avoir des relations sexuelles avec des enfants de six, huit, dix ans. Voilà quelque chose que nous, Canadiens, ne saurions encourager ou tolérer. Je félicite le gouvernement


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d'essayer d'amener le Canada à se joindre à la communauté internationale pour combattre ce problème.

Il y a aussi le problème de la mutilation d'organes génitaux féminins. J'ai été heureuse d'appuyer un de nos collègues du Bloc qui avait proposé un projet de loi d'initiative parlementaire pour inscrire dans le Code criminel des dispositions visant à combattre ce problème au Canada.

Je suis heureuse que le gouvernement reconnaisse qu'il faut faire quelque chose, que la mutilation d'organes génitaux féminins doit être considérée comme un acte illégal au Canada, mais je crains qu'il n'ait pas fait assez. Je m'inquiète du fait que cette mesure ne protège que les jeunes femmes de moins de 18 ans. La jeune fille de 19 ans qui est confrontée à cette situation a autant besoin de protection que celle qui a 17 ans.

Cette protection ne devrait pas souffrir de limite d'âge. La pratique de la mutilation d'organes génitaux féminins devrait être interdite. Quiconque aide, encourage, recommande ou soutient cette pratique devrait être puni avec toute la rigueur de la loi. Il nous faut envoyer un message on ne peut plus clair à tous ceux qui vivent chez nous: cette pratique est inacceptable.

J'ai des réserves à propos de l'exemption que le projet de loi prévoit pour les médecins. J'ai beaucoup de respect pour la collectivité médicale et je ne veux pas le moins du monde insinuer que les médecins abuseront de l'exemption. Je sais que, dans certaines circonstances, il faut faire de la chirurgie reconstructive et d'autres interventions sur les organes génitaux féminins.

Je veux toutefois m'assurer que le projet de loi à l'étude ne permettra pas à un médecin qui approuve cette pratique de la perpétuer au Canada, pour une raison ou une autre. Je pense qu'il faut examiner cet aspect de plus près. Nous devons nous assurer que le projet de loi protège toutes les femmes, non seulement celles qui ont moins de 18 ans, mais toutes celles qui peuvent être victimes de cette agression contre leur personne. Nous devons nous assurer qu'il n'y ait aucune possibilité d'abus au Canada.

(1620)

Je félicite le gouvernement d'avoir pris en considération le projet de loi d'initiative parlementaire qu'un de nos collègues a présenté et qui a été inclus dans le projet de loi à l'étude. Toutefois, j'aurais souhaité que le gouvernement propose une mesure un peu plus catégorique et sévère à cet égard.

Je voudrais parler brièvement du harcèlement avec menaces et du meurtre au premier degré. Les Canadiens veulent, j'en suis certaine, que toutes les actions possibles soient intentées contre les individus qui harcèlent et menacent délibérément autrui. Cependant, je me demande si nous pouvons justifier que des accusations de meurtre au premier degré soient portées contre quelqu'un qui n'avait pas l'intention de tuer. Il faut appliquer pleinement la loi contre quiconque fait du harcèlement, des attaques ou des menaces.

Ces dernières années, j'ai été très contrariée par les limites auxquelles se heurtent les agents chargés d'appliquer nos lois dans leurs efforts pour protéger les victimes de harcèlement avec menaces ou de harcèlement criminel de la part d'un prédateur, d'un ex-conjoint ou de toute autre personne. Il faut accroître la protection. Le gouvernement et les tribunaux doivent examiner le problème plus sérieusement.

Je ne suis pas certaine qu'il faille automatiquement porter des accusations de meurtre au premier degré contre ces personnes. Notre système de justice peut porter des accusations de meurtre au deuxième degré ou au premier degré contre les auteurs de ces infractions, si l'on peut prouver que l'intention du harceleur était de tuer. Si l'on ne peut le prouver, j'ai du mal à accepter le fait que, automatiquement, l'auteur du harcèlement avec menaces sera accusé de meurtre au premier degré.

Le projet de loi est un pas dans la bonne direction. Je me réjouis de ce que le gouvernement semble tenir compte d'un certain nombre de questions soulevées dans les projets de loi d'initiative parlementaire. Je me réjouis que le gouvernement essaie de régler les problèmes concernant la sécurité des femmes et des enfants. Cependant, le projet de loi doit être amélioré.

J'espère que mes collègues réformistes et bloquistes, de même que ceux du parti ministériel qui font partie du Comité de la justice, examineront les aspects du projet de loi que l'on peut améliorer et renforcer pour protéger plus de femmes et d'enfants canadiens. J'espère qu'on apportera des modifications en ce sens pour améliorer nettement le projet de loi. C'est un bon début, mais il y a encore du travail à faire. J'espère que le ministre de la Justice et le gouvernement accepteront les observations du comité qui viseront à améliorer le projet de loi.

Je remercie mon collègue de m'avoir permis de participer au débat sur ce projet de loi. J'espère que cette mesure sera grandement renforcée dans les jours à venir.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Madame la Présidente, je suis heureuse de voir qu'il y a d'autres collègues en cette Chambre qui appuieront certains des amendements que j'ai proposés lors de mon discours sur C-27, plus spécifiquement sur les mutilations génitales et le tourisme sexuel.

Je vois que ma collègue qui vient de prendre la parole est aussi d'accord avec moi sur la limite d'âge. Je ne vois pas pourquoi on aurait une limite d'âge sur les mutilations génitales et que certaines mutilations seraient permises après 18 ans. Je considère qu'il n'y a pas de limite d'âge.

Si on veut envoyer un message clair aux communautés culturelles, si on veut éliminer cette pratique, il ne faut pas faire d'exception. Quelle image donnerons-nous dans une loi où il y aurait une exception qui voudrait dire qu'on permet la pratique dans certains


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cas? Personnellement, je suis en faveur et je déposerai des amendements pour ne pas limiter l'âge et que l'interdiction s'applique à toute personne de sexe féminin.

Le projet de loi que j'avais déposé avait un but très précis qui était de défendre l'intégrité physique des femmes et des fillettes. L'intégrité physique des femmes se défend à tout âge. Avec le projet de loi du ministre, je pense que cet aspect-là ne sera pas respecté. Il faudrait aussi que la législation s'étende à toute personne qui participe ou encourage la mutilation.

(1625)

On sait que c'est une pratique culturelle qui fait que la personne accompagne, encourage, amène un enfant, par exemple, à l'extérieur du pays. C'est un autre amendement que j'aimerais apporter au projet de loi.

Il y a aussi un autre amendement que j'aimerais voir apporter pour qu'il n'y ait aucune exception pour permettre une opération chirurgicale. Je pense que les médecins savent très bien ce qu'est la mutilation et ils ne sont pas d'accord avec cette pratique, donc je ne verrais pas pourquoi il y aurait des exceptions pour permettre une chirurgie en cas de santé de la femme.

Donc, je suis réconfortée parce que je vois que d'autres collègues ici en cette Chambre vont appuyer mes amendements et je remercie la collègue d'avoir soulevé ces amendements ici en Chambre aujourd'hui.

[Traduction]

Mme Meredith: Madame la Présidente, je voudrais dire à la députée que j'appuie avec joie ses propositions d'amendement si elles permettent d'atteindre l'objectif. Cela m'a fait penser qu'il devrait peut-être y avoir une protection pour les gens qui sortent du pays pour cette opération et y reviennent ensuite. Peut-être qu'il s'agit là d'une autre protection que l'on pourrait envisager. C'est un peu comme la prostitution touristique. Si des personnes pratiquent cette activité, qu'il s'agisse de Canadiens ou d'immigrants reçus, et qu'elles aillent à l'extérieur du pays pour le faire, elles devraient être jugées avec toute la rigueur de la loi.

M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais que la députée reconnaisse que quiconque quitte le pays pour pratiquer une mutilation d'organes génitaux féminins est passible de sanctions criminelles au Canada. De plus, s'il s'agit d'adultes, une telle mutilation serait considérée comme des voies de fait ayant causé des lésions corporelles. La Cour suprême a déjà statué qu'une personne ne peut consentir à ce que des lésions corporelles lui soient infligées. Par conséquent, l'amendement de la députée est inutile.

Mme Meredith: Madame la Présidente, pour clarifier la question, je voudrais que le député nous dise de quelle protection il s'agit. Je ne vois rien dans le projet de loi au sujet de la mutilation d'organes génitaux féminins, qui protégerait quelqu'un qui le ferait faire à l'extérieur du pays ou quelqu'un qui le ferait faire et qui serait âgé de plus de 18 ans.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre part au débat sur le projet de loi C-27 déposé par le ministre de la Justice le 18 avril dernier. L'objectif de ce projet de loi me paraît fort louable en ce qu'il viendra modifier le Code criminel de façon à mettre un terme à la prostitution des enfants, au tourisme sexuel impliquant des enfants, au harcèlement criminel et aux mutilations d'organes génitaux féminins.

Je suis très sensible à ce problème en tant qu'immigrant, en tant que député et en tant que critique de l'opposition officielle en matière d'immigration. En effet, c'est parmi les femmes immigrantes en provenance notamment d'Afrique, d'Asie et du Moyen-Orient que cette pratique prend des proportions sérieuses. Je condamne vigoureusement ces pratiques criminelles, parce qu'elles constituent des actes de violence et d'exploitation à l'égard des femmes et des enfants. Elles attaquent directement leur intégrité physique et psychologique.

Ces pratiques préjudiciables aux enfants et aux femmes sont une violation et une négation des droits humains ainsi que des libertés fondamentales.

(1630)

Je me réjouis à l'idée qu'un tel projet de loi soit adopté afin de prohiber et d'éliminer toute exploitation sexuelle des enfants et toute mutilation des organes génitaux féminins. Les femmes et les enfants sont des personnes à part entière. Elles et ils doivent pouvoir jouir de tous les droits et libertés dans la société.

Je ne suis pas le seul à être extrêmement préoccupé par ces questions. Plusieurs groupes de défense des droits des femmes et des enfants, aussi bien au Québec qu'au Canada, se mobilisent afin d'enrayer totalement la prostitution des enfants, le tourisme sexuel impliquant des enfants et les mutilations d'organes génitaux féminins. Il est intéressant de noter que la Commission des droits de la personne du Québec a adopté le 21 décembre 1994 une opinion sur les pratiques de mutilations sexuelles faites aux femmes, à savoir l'excision et l'infibulation. Selon la Commission, de telles tactiques mettent en jeu les droits des femmes à leur intégrité et leurs droits à l'égalité et à la non-discrimination. La Commission concluait qu'il s'agissait d'une pratique discriminatoire à l'égard des femmes.

Je dois féliciter la députée de Québec, du Bloc québécois, qui avait déposé en 1995 le projet de loi C-277 sur les mutilations génitales des personnes du sexe féminin, projet qui, à mon avis, est plus large et plus complet que celui du ministre de la Justice.

À l'instar de mes collègues bloquistes qui m'ont précédé, je considère que la portée du projet de loi C-27 est limitée et restreinte. En effet, le projet de loi C-27 pourrait et devrait aller plus loin sur plus d'un plan.

Sur le plan du tourisme sexuel, j'aimerais rappeler ici certains faits qui démontrent l'ampleur et l'étendue du phénomène. Dans son article paru dans L'Actualité de mai 1993, le journaliste Luc Chartrand a dénombré qu'il y a entre 20 000 et 30 000 garçons mineurs qui se prostituent au Sri Lanka. Il estime que 10 p. 100 des


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touristes choisissent cette destination dans le but de s'adonner à la pédophilie.

Le Sri Lanka n'est pas le seul pays où la pédophilie est une pratique répandue. Il y a également d'autres pays pauvres d'Asie, comme la Thaïlande et les Philippines, de même qu'en Amérique latine, plus particulièrement en République dominicaine.

C'est avec beaucoup d'inquiétude que j'ai regardé un reportage à cet égard, présenté à Radio-Canada, il y a quelques semaines. Ce qui me choque le plus, c'est qu'il y a des Canadiens qui s'en vont en République dominicaine avec l'intention de profiter et d'exploiter sexuellement de jeunes enfants et des adolescents.

Une conséquence tragique du tourisme sexuel est celle de la prolifération du sida, notamment chez les jeunes garçons. Ce phénomène incite les clients à exiger les services d'enfants qui n'ont jamais eu de relations sexuelles, donc de plus en plus jeunes.

Aussi, il existe des réseaux clandestins où sont échangées des revues de pornographie infantile et parfois même des enfants. Le tourisme sexuel soulève donc de graves problèmes, dont principalement celui de réduire les enfants à l'esclavagisme.

Le Canada doit donc enrayer ces gestes criminels. Ils constituent une violation des droits de la personne. On se doit de suivre l'exemple de pays comme l'Allemagne et la Norvège qui ont déjà criminalisé ces pratiques inacceptables.

Ceci m'amène à vous faire part de ma première réserve au projet de loi C-27 concernant le tourisme sexuel. Cette réserve se trouve d'abord dans la définition même des personnes visées par ce projet. Afin d'enrayer complètement le tourisme sexuel, je suis d'avis que le projet de loi C-27 ne devrait pas seulement viser ceux qui ont recours à des services de prostitution infantile offerts à l'étranger.

(1635)

Le libellé du projet de loi devrait également inclure les personnes qui soutiennent l'exploitation sexuelle des enfants. Je fais référence ici aux promoteurs, aux organisateurs et aux agences de voyage ou de transport organisant des voyages à l'étranger à des fins de tourisme sexuel impliquant des personnes de moins de 18 ans. En somme, je souhaiterais que tous ceux qui encouragent de près ou de loin l'existence de ces pratiques criminelles soient punis.

Deuxièmement, selon l'article 4.1, le projet de loi C-27 ne s'applique qu'à des personnes qui sont citoyennes canadiennes ou immigrantes reçues. Je crois important qu'un tel projet de loi s'applique également à toute personne demeurant au Canada, citoyenne ou pas. Cette législation inclurait donc les réfugiés, les demandeurs d'asile, bref, tous ceux qui vivent au Canada sur une base relativement stable.

En ce qui a trait aux mutilations génitales, j'aimerais ici aussi exposer quelques données du problème. L'Organisation mondiale de la santé évalue entre 85 à 115 millions le nombre de femmes et de fillettes excisées dans le monde. Cette coutume consiste principalement à exciser le clitoris et les lèvres des jeunes filles âgées entre 5 et 10 ans.

Dans les pays qui la pratiquent, l'excision des fillettes fait partie intégrante d'une culture vieille parfois de plusieurs siècles. Cette coutume est considérée comme un rituel de passage: la fillette devient alors une femme. Mais je tiens à souligner que, contrairement à certaines croyances et affirmations, aucune religion n'accepte ni ne consent aux mutilations d'organes génitaux féminins.

On peut dénoncer ces us et coutumes. Mais il est difficile d'imposer nos vues contre la pratique des mutilations génitales féminines à l'étranger. Cependant, nous nous devons de légiférer de façon à enrayer toute mutilation génitale féminine au Canada. Cependant, ces us et coutumes ont des limites.

J'aimerais à cet égard citer la Déclaration et le Programme d'action adoptés à Vienne, le 25 juin 1993, où la Conférence mondiale sur les droits de l'homme, après avoir réitéré que tous les droits de l'homme et de la femme sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés, note que même «s'il convient de ne pas perdre de vue l'importance des particularismes nationaux et régionaux et la diversité historique culturelle et religieuse, il est du devoir des États, quel qu'en soit le système politique, économique et culturel, de promouvoir et de protéger tous les droits de l'homme et toutes les libertés fondamentales».

Elle souligne ensuite à quel point il importe de s'employer «à éliminer les contradictions qui peuvent exister entre les droits des femmes et les effets nuisibles de certaines pratiques traditionnelles ou coutumières, des préjugés culturels et de l'extrémisme religieux». Et plus loin, à la section consacrée aux droits de l'enfant, la Conférence «prie instamment les États d'abroger les lois et règlements en vigueur et d'éliminer les coutumes et pratiques qui sont discriminatoires et néfastes à l'endroit des filles».

Au Canada, le droit de ne pas subir de mutilations génitales transcende l'argument culturel. Le droit à l'intégrité physique est inclus dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, la Charte canadienne des droits de la personne et la Charte québécoise des droits et libertés de la personne.

(1640)

Au Canada, il est important de se doter d'une législation interdisant l'excision des organes génitaux féminins considérant que, de 1986 à 1991, le Canada a accueilli 40 000 immigrants originaires de pays où se pratiquent les mutilations. Pour l'année 1992 seulement, ce sont 3 245 immigrants en provenance de pays où les mutilations génitales sont soit tolérées soit encouragées, qui se sont ajoutés à ce nombre.

Ainsi au chapitre des mutilations génitales féminines, je considère que le projet de loi C-27 reste flou quant à la portée extraterritoriale de l'infraction. Je serais en faveur de l'ajout d'une disposition permettant de poursuivre, au Canada, les personnes emmenant un enfant à l'étranger afin de lui faire subir une mutilation génitale. Cette disposition me paraît importante en ce qu'elle élimine une façon de contourner la loi pour avoir recours aux mutilations génitales féminines. Méthode d'ailleurs utilisée actuellement par certains individus.

Je ne suis pas non plus à l'aise avec l'énoncé du projet permettant une exception à la pratique des mutilations génitales féminines. Cette exception accepterait la pratique dans le cas des opérations


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chirurgicales par un médecin pour des raisons de santé physique de la femme, ou pour lui permettre d'avoir des fonctions reproductives normales.

D'une part les médecins eux-mêmes estiment qu'une telle mesure n'est pas nécessaire. Le président de la Société des obstétriciens et gynécoloques du Canada, le Dr André Lalonde est très clair à ce sujet. Il affirme que les mutilations génitales féminines ne constituent pas un acte médical en soi. D'autre part, loin d'enrayer totalement la pratique par cette mesure d'exception, C-27 permet sa continuité pour des motifs de santé physique.

C'est dans ce même esprit que je souhaiterais que le projet de loi ne spécifie aucun âge auquel une personne peut ou non consentir aux mutilations des organes génitaux féminins. Le présent projet prévoit en effet qu'une personne ayant atteint l'âge adulte, soit 18 ans, puisse consentir à la mutilation génitale.

J'aimerais rappeler ici que les mutilations génitales féminines sont irrémédiables; elles marquent à jamais la vie des jeunes filles et des femmes qui les subissent. Aussi l'acceptation de cette pratique par les principales intéressées est souvent l'oeuvre d'un processus de conditionnement qui fait que, enfant ou adulte, le consentement à un tel acte est bien aléatoire.

L'imposition d'une limite d'âge pour accepter l'existence de la pratique de l'excision des organes génitaux féminins m'apparaît donc contraire au but visé par le projet de loi C-27: soit celui d'éradiquer les mutilations génitales féminines.

Par ailleurs, j'adhèrerais davantage à une législation qui poursuivrait toute personne oeuvrant directement ou indirectement dans le domaine des mutilations des organes génitaux féminins. À mon avis, C-27 est trop limité sur cet aspect parce qu'il ne vise que les personnes pratiquant l'opération.

Une législation pénalisant tous les intervenants dans le domaine aurait pour effet de les sensibiliser quant au caractère criminel de l'excision des organes génitaux féminins et aussi de les responsabiliser. Une telle législation contribuerait également au démantèlement des réseaux clandestins impliqués dans ce domaine, malheureusement fort nombreux.

Finalement, je crois que le projet C-27 est un pas dans la bonne direction. C-27 criminalise la prostitution des enfants, le tourisme sexuel et les mutilations des organes génitaux féminins.

(1645)

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Madame la Présidente, je vais laisser le temps à mon collègue de reprendre son souffle. Comme cela, il pourra répondre et poursuivre la fin de son discours.

Donc, je vois encore qu'un autre de mes collègues appuiera mes amendements. Concernant mes amendements, j'ai quand même effectué des consultations auprès de certains intervenants concernés par la pratique des mutilations génitales et on semblait d'accord pour dire que ce projet de loi n'allait pas assez loin pour plusieurs raisons. Un des amendements sur lesquels j'aimerais intervenir présentement est à propos de la mutilation des organes génitaux et sur le principe de l'extra-territorialité.

Comme ce principe a été appliqué dans la disposition du projet de loi sur le tourisme sexuel, je ne verrais pas pourquoi il ne serait pas inclus dans un projet de loi sur les mutilations des organes génitaux. Cela permettrait de poursuivre un individu qui est citoyen canadien. On sait très bien que cette pratique se fait souvent à l'extérieur du pays. Donc, avec le projet de loi du ministre, on ne pourrait pas poursuivre les individus, parce qu'il ne crée pas une nouvelle infraction. Mon projet de loi voulait créer une nouvelle infraction.

Le projet de loi du ministre ne fait que décrire ce que sont les mutilations génitales en regard des voies de fait. Ce que j'aurais souhaité, c'est qu'il y ait un article qui énumère toutes les facettes des mutilations génitales et toutes les interdictions et que cela ne se limite pas non plus à la personne qui fait la mutilation, mais que cela s'applique à toute personne qui encourage et qui contribue à ce qu'une personne subisse une mutilation des organes génitaux.

J'aimerais que mon collègue m'explique s'il trouve que ce principe extra-territorial est un bon principe et s'il ajouterait de la force à ce projet de loi.

M. Nunez: Madame la Présidente, je commence par féliciter la députée de Québec qui a déposé un excellent projet concernant la mutilation des organes génitaux féminins l'année dernière et qui a fait, à l'occasion, un très bon discours. Elle a poursuivi dans la même veine ce matin. Il s'agit d'un projet de loi extrêmement important.

Concernant le principe de la territorialité des lois, c'est un principe important en droit international, mais qui reçoit de plus en plus d'exceptions. Il y a par exemple les auteurs de crimes contre l'humanité qui peuvent être poursuivis n'importe où. C'est important, et je pense que dans ce projet de loi, le concept de territorialité devrait avoir une exception.

Les personnes qui commettent des délits à l'étranger pourraient être poursuivies ici et c'est justement un élément primordial de ce projet de loi. Il s'agit par exemple de Canadiens, pas seulement des citoyens, mais aussi de résidants ou de réfugiés ou des demandeurs d'asile, qui commettent des délits dans un autre pays et qui doivent et peuvent être poursuivis au Canada et je pense que c'est la façon d'enrayer cette pratique condamnable. Si on n'applique pas le concept de l'extra-territorialité, le projet reste trop limité et trop restreint et il n'aurait pas une signification importante.

[Traduction]

M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, je remercie le député pour ses commentaires, mais je dirais que, à certains égards, il existe d'autres interprétations, meilleures que les siennes, du droit pénal.

Il a déclaré qu'il aurait préféré que le projet de loi parle explicitement des voyagistes et des agents de voyage qui offrent des voyages de tourisme sexuel. Des dispositions en ce sens existent déjà dans le Code criminel du Canada. Les alinéas 212.1a) et g) prévoient expressément qu'est coupable d'un acte criminel quiconque induit, tente d'induire ou sollicite une personne à avoir des rapports sexuels illicites avec une autre personne, soit au Canada, soit à l'étranger, ou induit une personne à venir au Canada ou à quitter le Canada pour se livrer à la prostitution.


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(1650)

Il est clair que les voyagistes et les agents de voyage qui organisent ce genre de voyages sont coupables d'une infraction pénale aux termes des lois canadiennes.

Les nationaux canadiens et tous les résidents permanents, et pas seulement les citoyens canadiens, contrairement à ce qu'a dit le député, qui obtiennent ou tentent d'obtenir des faveurs sexuelles de personnes de moins de 18 ans hors du Canada se rendent coupables d'une infraction pénale.

[Français]

M. Nunez: Madame la Présidente, ce n'est pas suffisant de mentionner les citoyens ou les résidents permanents parce qu'il y a des personnes qui vivent au Canada qui ne sont ni citoyens ni résidents permanents, particulièrement les demandeurs d'asile. Ils viennent ici, déposent une demande pour obtenir le statut de réfugié; ils ne sont ni résidants ni citoyens mais vivent ici parfois un, deux ou trois ans, le temps que prendra la procédure administrative de la Commission. Alors, je pense que le projet devrait viser également cette catégorie de personnes qui sont relativement nombreuses.

Deuxièmement, le député me dit que les agences sont déjà inclues dans le projet de loi du ministre, mais je ne vois pas cela très clairement. Si c'était possible de clarifier un peu, je pense que ce serait un pas en avant, surtout que, dans le projet de loi déposé par la députée de Québec, c'était très clairement spécifié que les agences ou les organisations de transport feraient également partie de ces délits. Elles étaient clairement visées par la loi. D'après ce que le député me dit, c'est compris dans le projet de loi déposé par le ministre. Mais quant à moi, cela devrait être clarifié et explicité.

[Traduction]

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Madame la Présidente, je prends la parole pour appuyer, cela va de soi, le projet de loi C-27, modifiant le Code criminel.

Je tiens d'abord à féliciter mon collègue, le ministre de la Justice, de s'être fait le champion d'un projet de loi destiné à améliorer les dispositions du Code criminel dans quatre secteurs clés qui revêtent une importance capitale pour la santé et la sécurité des femmes et des enfants, au Canada et dans le monde entier.

Si je prends la parole à propos de ce projet de loi, c'est à la fois en qualité de secrétaire d'État à la Situation de la femme et en qualité de médecin qui a pu constater directement, dans ces quatre domaines, les résultats de ce déséquilibre du pouvoir au sein de notre société. Les quatre aspects en question sont le tourisme sexuel impliquant des enfants, la prostitution chez les enfants au Canada, le harcèlement criminel et la mutilation d'organes génitaux féminins.

Les députés n'auront sans doute pas oublié que la plupart des amendements à l'étude avaient été présentés au cours de la session précédente dans le projet de loi C-119. Depuis le début de la nouvelle session, nous avons ajouté un nouvel article portant sur le tourisme sexuel impliquant des enfants ainsi qu'un autre amendement relatif à la prostitution infantile au Canada.

Il y a quatre choses que ce projet de loi a en commun: le problème de la violence systémique dans notre société, surtout à l'égard des femmes et des enfants, et la ferme volonté du gouvernement d'y mettre un terme.

L'année dernière, à Beijing, à la quatrième conférence mondiale, beaucoup de participants étaient en faveur du règlement du problème de la violence systémique, pas uniquement par la voie législative mais aussi en s'attaquant à la racine du mal.

(1655)

La violence systémique nécessite des dispositions générales fermes qui régleront non seulement les aspects juridiques du problème mais aussi la question de la sensibilisation de la population par la prévention, l'éducation, le traitement de la personne harcelée ou violée et la réadaptation des coupables. C'est très important si l'on veut mettre un terme à ce genre de violence dans la société. S'il s'agit d'un élément important d'une stratégie globale, ce n'est pas le seul.

Par ailleurs, la plupart de ces problèmes de violence sont liés aux contextes culturel et religieux, à des problèmes sociaux, ce qui signifie que la violence est une balance traditionnelle du pouvoir dans notre société. Les membres de la société qui ont très peu d'appui, qui n'ont pas beaucoup la possibilité de défendre leurs intérêts, qui ont très peu d'autonomie et d'indépendance, sont les victimes traditionnelles de la violence. Dans ces quatre domaines, on peut voir que les victimes sont généralement des femmes et des enfants qui sont parmi les membres de notre société qui ne peuvent pas se défendre.

À Beijing, on a dit clairement que la religion n'était pas une excuse pour la mutilation et la violence.

J'exhorte tous mes collègues d'appuyer le projet de loi. Le fait d'aller à l'étranger pour avoir des relations sexuelles avec des enfants est de l'exploitation de la pire espèce, sous sa forme la plus honteuse. Cela veut dire que l'on ne veut pas faire dans son pays certaines choses dont on a honte et que l'on va à l'étranger où l'on peut exploiter et profiter des enfants des autres sous le couvert de l'anonymat.

Le Code criminel contient déjà des dispositions concernant certains aspects du tourisme sexuel. L'article 212, dont nous connaissons maintenant le texte intégral modifié, toucherait les organisateurs de voyages et agences de tourisme qui proposent des tournées sexuelles. L'alinéa 212(1)a) vise particulièrement les personnes qui induisent, tentent d'induire ou sollicitent une personne à avoir des rapports sexuels illicites avec une autre personne, au Canada ou à l'étranger, et celea comprend clairement les personnes qui organisent des tournées ou les agences de tourisme qui permettraient à des gens de participer à ce genre d'activité. L'alinéa g) vise à empêcher une personne de venir au Canada ou de quitter le pays pour se livrer à la prostitution. Cette infraction, punissable par voie d'acte de mise en accusation, est passible d'une peine d'emprisonnement de dix ans.

Les Canadiens sont perçus comme des modèles ailleurs dans le monde. C'est pourquoi il est tout à fait inacceptable que nous permettions à des Canadiens d'aller un peu partout dans le monde pour exploiter des jeunes et leur faire violence. Le projet de loi à l'étude, et en particulier les dispositions relatives à l'exterritoriali-


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té, montrent clairement que nous jugeons ce comportement inacceptable aussi bien chez nous qu'à l'étranger.

La Suède, la Norvège, le Danemark, la Finlande, l'Islande, la Belgique, la France, l'Allemagne, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis ont déjà adopté des lois qui permettent d'intenter des poursuites contre leurs ressortissants qui ont des activités sexuelles impliquant des enfants. Un congrès mondial contre l'exploitation sexuelle des enfants se tiendra à Stockholm, en Suède, le 27 août prochain. Le gouvernement canadien y sera représenté. Le congrès devrait adopter une déclaration et un plan d'action.

Il existe de toute évidence un environnement international favorable aux principes contenus dans les modifications apportées par le projet de loi à l'étude.

Le projet de loi C-27 modifie également l'article 7 du Code criminel pour permettre d'intenter des poursuites au Canada contre des citoyens canadiens qui se livrent, à l'étranger, à des activités liées à la prostitution juvénile. C'est une question de morale et de droits humains.

Le deuxième volet des modifications vise à changer la situation au Canada. Comme disait ma mère, la charité commence chez soi. Nous ferions preuve d'hypocrisie en adoptant des dispositions qui visent nos ressortissants à l'étranger, mais qui ne s'appliqueraient pas aux personnes qui continuent d'exploiter des enfants chez nous.

Ces modifications feront en sorte que le proxénétisme visant des jeunes de moins de 18 ans constituera un crime qualifié; elles viseront ceux qui vivent de la prostitution des enfants de moins de 18 ans et ceux qui utilisent la violence. La violence systémique comporte la notion de déséquilibre des pouvoirs. Les auteurs de ces actes ont recours à ce pouvoir et à la violence pour obliger des enfants de moins de 18 ans à continuer de se prostituer.

(1700)

La modification va régler un élément très important, car, dans le déséquilibre des pouvoirs, la crainte et l'anxiété jouent un rôle majeur. La plupart des victimes dans ce type de système ont peur de dénoncer celui qui a abusé d'elles ou les a exploitées. Avec ce projet de loi, nous faciliterons le témoignage des enfants en leur permettant de rester derrière un écran, de sorte qu'ils n'auront pas à craindre les conséquences de leur témoignage.

Le troisième élément de la modification fait qu'il sera maintenant illégal de menacer la sécurité d'une personne ou la sécurité d'une personne de sa connaissance, en la suivant, en la menaçant ou en lui faisant des menaces à la maison ou au travail. Ce qui est important au sujet de cette modification, c'est que le meurtre que commettra une personne dans le cadre du harcèlement sera maintenant un meurtre au premier degré, que l'on puisse prouver ou non qu'il a été planifié et délibéré.

Le meurtre au premier degré est punissable d'une peine d'emprisonnement de 25 ans sans possibilité de libération conditionnelle. C'est réellement important parce que, par le passé, il y avait toujours l'argument que la personne n'avait pas l'intention d'aller jusqu'au meurtre, que c'était arrivé par erreur ou que c'était un crime passionnel. De toute évidence, le harcèlement montre qu'une personne cherche à menacer ou à faire du mal. Cette personne sera maintenant considérée comme responsable.

Finalement, le quatrième élément de ce projet de loi traite de la mutilation des organes génitaux féminins. C'est une question complexe et délicate, parce qu'elle touche aux croyances culturelles et religieuses. C'est devenu une cause célèbre internationale. On a discuté de cette question à l'Organisation mondiale de la santé, à l'UNICEF, à l'ONU et de nouveau à Beijing, et on a décidé qu'il était absolument inacceptable d'utiliser la religion, la culture ou quelque autre raison pour faire violence à quiconque.

En tant que médecin, je peux vous dire que la mutilation des organes génitaux féminins n'entre pas seulement dans les manifestations de violence faite aux enfants ou aux femmes. Cela entraîne également des problèmes de santé chroniques, comme des douleurs chroniques, des maladies inflammatoires chroniques du pelvis, autant de choses avec lesquelles une femme doit vivre pour le reste de sa vie et qui, bien souvent, l'invalident. C'est de la violence de la pire espèce et c'est le pire abus de pouvoir parce que la religion est utilisée pour dire que quelqu'un doit succomber à ce genre de violence.

Le paragraphe 232 du programme d'action adopté à Beijing exige des gouvernements qu'ils interdisent la mutilation d'organes génitaux féminins partout où existe cette pratique, et il appuie vigoureusement les efforts déployés par les organisations non gouvernementales, les groupements communautaires et les institutions religieuses pour éliminer cette pratique.

Je disais que nous devions élaborer des mesures globales de lutte contre cette pratique. La loi est seulement l'une d'elles. Il faut y ajouter l'éducation, la formation psychosociale et la prise de conscience. Condition féminine Canada, le ministère du Solliciteur général et Santé Canada ont collaboré avec les collectivités et les organismes communautaires à la résolution de ce problème.

Nous avons constaté que dans bien des régions qui ont été soumises à des pratiques où se mêle la violence, telle la mutilation d'organes génitaux féminins, il est très difficile pour les gens d'en parler ouvertement. Il est très difficile pour eux de parler contre ce qui constitue une pratique religieuse, surtout quand ils vivent au sein de ces communautés.

Il est donc très important de s'attaquer à ces problèmes sur le terrain, au sein des collectivités où on les rencontre. Voilà pourquoi il nous faut à tout prix parler de violence systémique, adopter une approche non seulement législative mais également axée sur des stratégies holistiques globales, claires, avec la participation des ministères, des divers paliers de gouvernement, de la collectivité et des ONG, afin que nous puissions intervenir par des moyens appropriés.

À l'heure actuelle, le Code criminel interdit la mutilation d'organes génitaux féminins au Canada. Il interdit également d'amener des enfants à l'extérieur du Canada pour les soumettre à cette pratique. Le Code criminel dit que c'est illégal. On ne peut emmener quelqu'un hors du Canada pour commettre un acte illégal sur sa personne.

La modification apporte une clarification à cet égard. Elle ajoute également l'élément éducatif et psychosocial dont nous parlions plus tôt, en précisant que la mutilation d'organes génitaux féminins


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constitue une voie de fait grave. Une blessure ou une mutilation n'est pas une pratique culturelle. Une personne de moins de 18 ans ne peut consentir ni permettre à quiconque de consentir en son nom à cet acte terrible perpétré sur sa personne.

Une idée très importante sous-tend ces quatre modifications proposées au Code criminel: celle qui propose d'éliminer le déséquilibre du pouvoir qui est systémique dans notre société aujourd'hui. C'est une façon d'avertir les gens qui se trouvent en position d'autorité ou de confiance et qui infligent des mauvais traitements au nom de la religion ou de l'éducation. Dans bien des cas, des enfants de cinq ans à peine ont été assujettis au tourisme sexuel dans certains pays. Ce n'est même pas du tourisme sexuel; c'est de la pédophilie.

(1705)

Il faut mettre un terme à l'exploitation et au mauvais traitement de ceux qui sont au bas de l'échelle, soit les femmes et les enfants. À mon avis, ce projet de loi nous permet de franchir un pas pour y parvenir.

J'invite tous les députés à se prononcer en faveur de ce projet de loi. Continuons à travailler, non seulement en légiférant, mais aussi en adoptant des stratégies exhaustives pour que le Canada devienne un pays sûr pour les femmes et les enfants, et, un jour, il ne sera plus possible de les exploiter nulle part dans le monde.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté l'intervention de la députée avec beaucoup d'intérêt. Elle a fait remarquer qu'aux termes du projet de loi, un individu qui commet un meurtre après avoir harcelé sa victime peut être trouvé coupable d'un meurtre au premier degré même s'il n'est pas nécessaire de prouver qu'il en avait l'intention, et qu'il devra purger une peine de 25 ans d'emprisonnement.

Compte tenu de ce qu'elle vient de dire, la députée serait-elle disposée à appuyer la suppression de l'article 745 du Code criminel qui permettrait à ce meurtrier de demander à être admissible à la libération conditionnelle après avoir purgé 15 années seulement de sa peine?

Mme Fry: Monsieur le Président, je comprends à quoi le député veut en venir. Je ne puis appuyer la suppression complète de cet article du Code criminel. Nous devons voir comment on peut résoudre ce problème d'une autre façon. Nous ne pouvons pas examiner simplement comment la loi traite des cas individuels.

La loi doit être générale. La justice doit être rendue selon le crime. L'individu s'est-il réadapté? Nous ne pouvons pas mettre dans un même sac les tueurs en série et l'individu qui a commis un seul meurtre. Nous devons tenir compte des circonstances du meurtre. Les familles des victimes doivent être consultées, de même que les membres de la communauté qui étaient là au moment du meurtre. Nous devons examiner le problème d'une façon plus globale au lieu de réagir instinctivement à quelque chose qui pourrait être important. Nous pourrions faire plus de mal que de bien en prenant une décision qui aurait pour effet de causer un grand bouleversement dans la société.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, la secrétaire d'État à la Condition féminine dit que le projet de loi C-27 est un bon pas en avant, et je pense que oui. J'aimerais lui demander si elle est d'accord avec les amendements qu'on veut proposer dans le but de bonifier le projet de loi.

Quand elle dit que la mutilation est un acte illégal, elle a raison, mais les communautés qui pratiquent la mutilation des organes génitaux n'ont pas l'intention de commettre un acte illégal, ce n'est, pour eux, qu'une pratique culturelle et non pas religieuse. Pour bonifier le projet de loi, je voudrais que certains amendements y soient apportés.

Est-ce que la ministre, qui défend aussi la condition féminine, est d'accord avec la limite d'âge qui veut dire qu'on tolérerait qu'une femme de plus de 18 ans ne puisse pas défendre l'intégrité physique de son corps? Je pense que si on veut envoyer un message clair aux communautés culturelles, il ne faut pas mettre de limite d'âge. Je pense qu'avec ce projet de loi, on voulait envoyer un message clair et maintenant, on est en train d'affaiblir le projet de loi que j'avais présenté.

Après que le ministre ait fait connaître ses intentions sur ce projet de loi et tout particulièrement sur les mutilations génitales, j'ai consulté certains organismes qui sont d'accord avec ces amendements et qui trouvent que ce projet de loi ne va pas assez loin. D'ailleurs, on entendra les différents intervenants concernés par cette problématique en comité.

(1710)

Je demande à la secrétaire d'État si elle serait aussi d'accord à ce qu'on ajoute dans le projet de loi le cas des personnes qui encouragent ou qui assistent une personne dans ce type d'intervention. Pour le ministre, c'est présentement seulement la personne qui pratique.

On sait bien que c'est une coutume culturelle et que c'est la communauté qui fait en sorte qu'une jeune fille de sept ou huit ans subisse une mutilation des organes génitaux, soit l'ablation du clitoris. C'est atroce. Je pense que si on veut envoyer un message clair, il ne faut pas qu'il y ait d'exception pour les médecins qui pourraient permettre de pratiquer un acte médical pour la santé d'une femme. Les médecins savent ce que sont les mutilations.

J'aimerais que la secrétaire d'État nous explique aussi pourquoi avoir fait une exception pour le médecin, alors que l'association des obstétriciens n'est pas d'accord avec cela. L'association dit que le médecin sait très bien ce qu'est un acte de mutilation et qu'on n'a pas à l'exempter, qu'il pourrait permettre certains abus dans certains cas. Donc, je pose ces trois questions à la secrétaire d'État.

[Traduction]

Mme Fry: Monsieur le Président, la question de la députée est très intéressante. Comme je ne suis pas juriste, je peux dire que l'interprétation des lois est souvent très difficile. Toutefois, dans bien des cas, lorsqu'une loi est adoptée ou est conçue en des termes assez généraux pour toucher des personnes qui doivent, dans l'exercice de leurs fonctions, prendre des mesures pour préserver la santé


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d'un patient et que l'interprétation risque d'aller dans un autre sens, il faut qu'il y ait une certaine protection.

Lorsque nous parlons d'opérations sur des femmes ou des enfants pour des raisons de santé, il y a bien des opérations possibles. Par exemple, si chez une enfant ou une adulte, les organes génitaux externes ne fonctionnent pas correctement, il peut être nécessaire de faire certaines opérations. Cela n'a rien à voir avec la mutilation des organes génitaux féminins. La mutilation empêche un fonctionnement normal.

Une distinction délicate s'impose dans le cas des opérations qui visent à améliorer l'état de santé de la personne et ne sont pas nécessairement des mutilations. Il y a beaucoup d'opérations médicales qui consistent à ouvrir le passage pour que l'écoulement du flux menstruel se fasse normalement. Il faut s'assurer que le médecin qui fait ces opérations dans l'intérêt de la santé de la patiente ne puisse être considéré comme coupable de mutilation des organes génitaux féminins. Je présume qu'il faudrait procéder cas par cas et définir clairement l'intervention.

Je remercie beaucoup la députée de cette question très importante.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, je veux seulement développer l'idée avancée par la députée d'en face. Lorsqu'elle dit que toute personne reconnue coupable de meurtre après harcèlement avec menaces devrait être passible de 25 ans d'emprisonnement, elle devrait clarifier ce qu'elle veut dire. Elle n'ignore pas que, conformément à l'article 745 du Code criminel, cette personne aurait droit à une libération conditionnelle anticipée après seulement 15 ans.

Nous ne pouvons pas faire abstraction de cela, car c'est un fait. La députée n'est pas entièrement franche lorsqu'elle laisse entendre que toute personne reconnue coupable de meurtre après harcèlement avec menaces devrait purger une peine d'emprisonnement de 25 ans. Conformément à la loi canadienne actuelle, tous les meurtriers peuvent se prévaloir de l'article 745 pour tenter, aux frais des contribuables, de faire baisser le nombre d'années donnant droit à la libération conditionnelle après avoir purgé seulement 15 années de leur peine.

Néanmoins, j'appuie aujourd'hui le projet de loi ministériel C-27. En 1993, 52 réformistes sont venus à Ottawa après avoir promis aux Canadiens de réformer le Parlement. Cette promesse de réforme comprenait l'engagement d'appuyer le plus de projets de loi ministériels possibles. Nous nous sommes engagés à ne pas contester les projets de loi ministériels pour le seul plaisir de les contester ni pour se faire du capital politique.

Si un projet de loi rehausse la sécurité publique, nous allons l'appuyer. Par conséquent, nous appuyons l'initiative ministérielle que constitue le projet de loi C-27. Le projet de loi C-27 est une série de modifications du Code criminel concernant la prostitution chez les enfants, le tourisme sexuel impliquant des enfants, le harcèlement criminel et la mutilation d'organes génitaux féminins. Il va contribuer à réduire la violence faite aux femmes et aux enfants. Par conséquent, nous l'appuyons.

(1715)

Le projet de loi n'est pas une panacée. Il faudra mettre en vigueur un certain nombre d'autres modifications législatives si l'on veut vraiment supprimer la violence familiale et l'exploitation des enfants. Il faut mettre l'accent sur la prévention de la criminalité et commencer par cerner la cause de la violence familiale.

L'article 5 du projet de loi C-27 modifie l'article 268 du Code criminel concernant les voies de fait graves. Conformément au projet de loi C-27, l'infibulation ou la mutilation totale ou partielle des grandes lèvres, des petites lèvres ou du clitoris d'une personne âgée de moins de 18 ans seront considérées comme des voies de fait graves rendant passible d'une peine d'au plus 14 ans d'emprisonnement. Le plus odieux dans tout cela, c'est que des parents canadiens soient disposés à soumettre leurs enfants à ce genre de traitement.

Nous allons donc insister pour que soit apportée la modification prévue à cet article du projet de loi C-27 afin que soit complètement supprimée cette pratique barbare et inhumaine et que toutes les femmes de notre pays soient protégées.

Compte tenu des préoccupations exprimées en 1992 par le Collège des médecins et chirurgiens de l'Ontario, il faut apporter cette modification au Code criminel. Le collège a rapporté une hausse dans le nombre des demandes d'infibulation au Canada. L'infibulation consiste à exciser les organes génitaux d'une petite fille, y compris le clitoris, et à coudre les grandes lèvres en ne laissant qu'un petit orifice pour le passage de l'urine et du flux menstruel.

Le simple fait d'y penser, de lire à ce sujet et d'en parler m'inspire une telle répulsion que je me demande pourquoi le gouvernement a attendu aussi longtemps avant d'agir. Comme ma collègue de Surrey-White Rock l'a mentionné, nous somme redevables à la députée de Québec qui a, je pense, encouragé le gouvernement à prendre des dispositions en ce sens avec son projet de loi d'initiative parlementaire. Je la félicite.

L'Organisation mondiale de la santé a dit que le Canada était un des quarante pays où se pratique ce que l'on connaît maintenant comme étant la circoncision féminine, correctement appelée la mutilation des organes génitaux féminins. La mutilation des organes génitaux féminins cause un certain nombre de problèmes à court et à long terme, dont des douleurs atroces, des hémorragies, parfois la mort, des taux exceptionnellement élevés d'infections du tractus urinaire, de la vessie, des organes reproducteurs et de l'intestin, des problèmes menstruels et de grossesse, de l'anémie et des kystes qui entraînent des déformations et qui non seulement réduisent ou suppriment tout plaisir sexuel, mais qui peuvent aussi rendre les relations sexuelles extrêmement douloureuses, voire impossibles.

Il suffit de dire que, de l'avis de la collectivité médicale canadienne, la mutilation des organes génitaux féminins ne présente absolument aucun avantage tout en étant complètement inutile et extrêmement dangereuse.

Une adjointe de mon bureau a regardé un documentaire sur la mutilation des organes génitaux féminins. Mon adjointe est la mère d'une fillette de cinq ans et elle dit qu'elle ne peut effacer l'impression d'horreur que le film lui a laissée. Le documentaire traitait de la pratique culturelle de la mutilation des organes génitaux féminins. Dans le film, une fillette de quatre ans était assise sur ce qui semblait être un tabouret posé sur un plancher sal pendant qu'une femme âgée du village excisait son clitoris à l'aide d'un instrument rudimentaire. Tout cela sans anesthésie, à froid. Sous les cris d'horreur et de douleur de la fillette, la vieille femme continuait l'opéra-


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tion sans aucun signe d'anxiété de la part de la mère, qui non seulement était témoin de la mutilation barbare de sa fille, mais encore y prenait part. Comme la mère ne montrait aucun signe d'émotion, la fillette s'est tue. Une fois l'opération terminée, la pauvre fillette gisait sur un matelas tout sal, sanglotant les pieds et les mains liés.

Si je raconte cette horrible histoire à la Chambre aujourd'hui, c'est afin qu'en tant que nation nous envoyions le message au monde entier que cette pratique de la mutilation de jeunes filles est absolument déplorable et, partant, qu'elle doit être interdite partout.

En Somalie et dans d'autres pays, cette pratique est d'ordre culturel; elle est un élément d'identification et sert à préserver la virginité des filles et l'honneur familial. Il est temps que les Nations Unies interviennent et protègent les enfants partout dans le monde contre les agressions et les mutilations faites au nom de pratiques culturellement acceptables. Les Nations Unies ont été appelées à arrêter l'exploitation de la main-d'oeuvre infantile. Par conséquent, elles doivent également être appelées à mettre fin à ces brutales agressions contre des enfants.

(1720)

Je presse le gouvernement canadien de prendre les devants dans cette affaire en amorçant des pourparlers avec les pays qui appuieraient l'initiative des Nations Unies à cet égard. Nous devons prendre toutes les mesures possibles pour protéger les enfants du pays et du monde entier.

J'appuie donc sans réserve le projet de loi C-27, qui criminalise le fait, pour un citoyen canadien, d'obtenir des services sexuels rémunérés d'enfants à l'étranger ou de participer à des activités liées à la prostitution enfantine à l'étranger.

Le plus alarmant dans cette affaire, c'est le fait que des adultes de ce pays aillent dans des pays étrangers pour avoir des relations sexuelles avec des enfants. Je trouve alarmant que des adultes d'autres pays puissent venir au Canada et profitent et abusent des enfants prostitués provenant de familles dysfonctionnelles. Nous avons beaucoup de travail à faire au Canada même et à l'étranger.

Cependant, je m'interroge sérieusement sur l'efficacité du projet de loi comme mesure pouvant éliminer la prostitution infantile dans le monde. Il se peut que l'on traduise des Canadiens devant les tribunaux, mais cela n'arrêtera pas les citoyens d'autres pays d'avoir des relations sexuelles avec des enfants. Je crois que le seul moyen d'éradiquer cette forme d'abus sexuels contre les enfants passe nécessairement par les Nations Unies et d'autres organisations internationales.

J'appuie également la partie du projet de loi C-27 qui impose une peine minimale obligatoire de cinq ans d'emprisonnement aux personnes déclarées coupables de tirer profit de la prostitution juvénile. Je m'interroge sur l'efficacité d'une peine minimale de cinq ans seulement. Être entremetteur est une infraction grave et devrait donc être sérieusement puni. Par conséquent, je demanderai l'avis des témoins que le comité entendra sur des amendements éventuels à apporter à cette partie du projet de loi c-27.

Aux termes du paragraphe 212(4) du Code criminel, obtenir les services sexuels d'une personne de moins de 18 ans constitue un acte criminel passible d'un emprisonnement maximal de cinq ans. Le projet de loi C-27 modifie cette disposition du Code en ajoutant que l'obtention des services sexuels d'une personne que l'on croit âgée de moins de 18 ans constitue aussi un acte criminel. J'appuie cette modification.

Cependant, je recommande qu'une autre modification soit apportée pour imposer un emprisonnement minimal de cinq ans aux personnes qui incitent des personnes de moins de 18 ans à la prostitution. Prenons des mesures pour éliminer la demande. Si les clients qui exploitent ces jeunes enfants, des filles comme des garçons, savaient qu'ils s'exposent à une peine d'emprisonnement sévère, ils réfléchiraient peut-être à deux fois avant de manifester leurs désirs sexuels à l'égard de nos enfants.

À mon avis, acheter des relations sexuelles avec des enfants est tout aussi mal que de les vendre. Dans ce pays, la prostitution est une industrie florissante et les enfants semblent être une marchandise très recherchée. Les pédophiles demandent de la chair fraîche. Les proxénètes sont des parasites, parfois violents, qui se font un plaisir de répondre à la demande. La demande d'enfants prostitués ne disparaîtra pas tant que les pédophiles arrivent à s'endormir facilement le soir en sachant que les risques d'arrestation sont minimes et que dans ce cas, la peine maximale n'est que de cinq ans.

D'après le bureau du procureur général de la Colombie-Britannique, depuis 1988, huit hommes de la province seulement ont été traduits en justice pour avoir acheté des relations sexuelles à un enfant. Par contre, 215 accusations pour proxénétisme ont été portées en 1988 et 1993. Les enfants exploités sexuellement méritent la protection du Code criminel au même titre que tous les autres enfants qui sont victimes de prédateurs sexuels.

Que ces enfants soient exploités sexuellement dans la rue au lieu de l'être chez eux ou à l'école, la peine doit être la même. Tous les enfants, surtout ceux qui sont le produit de familles violentes et perturbées qui les ont forcés à battre en retraite dans la rue où ils sont également victimes de mauvais traitements, méritent la même protection légale.

Si nous espérons arriver un jour à réduire et à finir par supprimer la prostitution chez les enfants, il faut s'attaquer aux raisons pour lesquelles les enfants décident de vivre dans la rue où ils sont vulnérables aux mauvais traitements et à l'exploitation. Malgré que le ministre de la Justice ait reconnu à l'automne de 1995 qu'il n'avait pas d'argent pour la prévention de la criminalité, il faut mettre en oeuvre des mesures préventives surtout en ce qui concerne la prostitution chez les enfants et les jeunes contrevenants.

(1725)

Au cours de la tournée que nous faisons dans le pays pour la révision de la Loi sur les jeunes contrevenants, cette révision prévue après 12 ans d'application, il faudrait parler aux représentants de groupements et d'organisations qui font de la détection précoce et du travail préventif afin de mettre les jeunes enfants à l'abri de la prostitution et du trafic de stupéfiants. Il existe des moyens de lutte.


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Il faut consacrer à des programmes de prévention une plus grande partie des 10 milliards de dollars que l'on dépense pour la répression. Ces jeunes sont là et ils ont besoin de nous. Nous pouvons les tenir à l'abri de la rue, de la prostitution, de la drogue et du système de justice pénale.

Il faut offrir aux enfants qui vont vivre dans la rue et s'adonnent à la criminalité un refuge sûr où ils puissent avoir un certain espoir et de l'aide pour s'assurer un avenir constructif et productif.

Pour finir, je voudrais parler brièvement de la partie du projet de loi C-27 qui concerne le harcèlement. Nous sommes tous au courant de la recrudescence du problème de la violence familiale au Canada et de la nécessité d'adopter l'article du projet de loi sur le harcèlement. Il nous faut davantage de mesures législatives et de mesures préventives concernant la violence familiale et il faut notamment accorder davantage de pouvoirs à la police pour qu'elle puisse faire enquête sur les personnes qui maltraitent leurs conjoints et les poursuivre.

Si le ministre de la Justice pense que le projet C-27 et que sa loi sur l'enregistrement des armes à feu sont les seules mesures nécessaires pour lutter contre la violence familiale, je lui signale qu'il a tort. L'enregistrement des armes à feu n'éliminera pas ou n'enrayera pas cette forme de violence, comme l'a prouvé l'horrible tragédie survenue récemment à Vernon, en Colombie-Britannique, où dix membres d'une même famille ont été abattus par un ex-conjoint éperdu de douleur.

La police n'a non seulement pas suivi la directive gouvernementale de 1993 décrétant de faire enquête sur les cas de violence familiale, y compris ceux où la victime ne coopère pas, mais elle a donné un port d'armes à la personne qui faisait l'objet d'allégations de violence.

Voici ce que l'on disait dans un article de l'édition du 10 avril 1996 du Globe and Mail:

Cette tuerie de 10 personnes survenue la semaine dernière à Vernon, en Colombie-Britannique, a révélé les lacunes fatales que présente dans la vie quotidienne la législation fédérale en matière de contrôle des armes à feu dont on a tellement vanté les mérites.
Les deux armes de poing utilisées par le meurtrier ont été acquises légalement parce qu'il n'y avait pas assez d'agents de police, de fonds publics ni de pressions politiques pour vérifier si les rumeurs selon lesquelles cet individu risquait d'être dangereux étaient fondées.
Pour terminer, je répéterai ce que j'ai dit au début. Nous appuyons le projet de loi C-27, mais nous espérons présenter des amendements qui accroîtront son efficacité dans le cadre de la lutte contre la prostitution chez les jeunes, contre la violence familiale et contre la mutilation d'organes génitaux féminins.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais d'abord féliciter ma collègue de Québec pour son courage et sa ténacité. Elle s'est levée régulièrement en Chambre pour réclamer une nouvelle législation sur la pratique des mutilations génitales. Elle a été tenace et elle a posé plusieurs questions au ministre en ce qui concerne ces pratiques abusives.

Il me fait donc plaisir une deuxième fois de prendre la parole sur ce projet de loi parce que je l'avais déjà fait lorsque ma collègue avait déposé le projet de loi C-248. Je suis heureuse que la voix de ma collègue ait été entendue par le ministre de la Justice, ce qui nous amène à débattre aujourd'hui du projet de loi C-27.

Ce projet de loi vient modifier le Code criminel en matière d'infraction relative à la violence faite aux femmes et aux enfants. Ce faisant, il touche plusieurs aspects, dont le proxénétisme, le harcèlement criminel et la protection des jeunes témoins, thèmes qui ont été abordés plus en profondeur par d'autres de mes collègues.

Pour ma part, je vais me concentrer sur deux aspects qui me tiennent particulièrement à coeur, soit le tourisme sexuel et la mutilation génitale.

Dans le premier cas, celui du tourisme sexuel, le projet de loi C-27 modifie les dispositions actuelles de façon à faciliter l'arrestation et la poursuite des clients d'enfants impliqués dans la prostitution au Canada et à l'étranger. Ce projet de loi corrigera une situation inacceptable qui, jusqu'à ce jour, restait souvent impunie.

(1730)

Ce projet de loi veut également introduire le principe de l'extra-territorialité qui permettrait au Canada de poursuivre une personne en justice même si l'acte a été commis dans un autre pays. Contrairement à la loi commerciale américaine Helms-Burton, à laquelle nous nous opposons, le caractère extra-territorial d'une loi sur le tourisme sexuel vise à protéger les droits de la personne, les droits fondamentaux qui peuvent justifier une dérogation aux principes législatifs habituels.

Le texte actuel du projet de loi C-27 est toutefois incomplet, puisqu'il ne précise pas que les promoteurs de voyage à l'étranger à des fins de tourisme sexuel, de même que les organisateurs, transporteurs et tous ceux qui ont à voir avec l'organisation de ces voyages peuvent être poursuivis. Il serait tout à fait approprié d'apporter ces précisions pour que le projet de loi soit le plus complet possible et pour que les victimes de la prostitution juvénile aient la meilleure protection possible.

L'argument voulant que d'autres dispositions du Code criminel pourraient permettre de telles poursuites ne tient pas. Quand il est question des droits de la personne, on ne peut pas se permettre de risquer des erreurs et des mauvaises interprétations. Il serait donc important d'ajouter des dispositions expresses visant ces catégories de contrevenants pour qu'il soit clair qu'ils peuvent faire l'objet de poursuites au même titre que ceux qui commettent l'acte aux termes de la loi.

À ce titre, le libellé du projet de loi C-246 que ma collègue de Québec a déposé plus tôt cette session est tout à fait adéquat, puisqu'en plus de l'interdiction de participer à la prostitution juvénile, il précise la culpabilité de celui qui transporte ou mène à une maison de débauche où se trouvent des personnes de moins de 18 ans.

L'autre point qui me fait dire que le projet de loi C-27 est incomplet est l'application de la loi à des personnes qui ne sont ni citoyennes canadiennes ni immigrantes reçues. En effet, l'article 1 du projet de loi mentionne qu'une personne peut être poursuivie si


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elle a la citoyenneté canadienne ou est un résidant permanent au sens de la Loi sur l'immigration. Or, il existe d'autres catégories de gens que la loi pourrait inclure, comme par exemple les réfugiés ou les demandeurs d'asile.

Je voudrais m'arrêter ici en ce qui concerne le tourisme sexuel, parce que je voudrais accorder un peu plus de temps aux mutilations génitales féminines. En tant que porte-parole de la santé, c'est un article du projet de loi qui me tient plus à coeur, compte tenu de mes fonctions.

Je voudrais cependant préciser qu'il est inacceptable qu'en 1996, on se retrouve encore avec des difficultés aussi grandes que le tourisme sexuel. Des gens, des abuseurs vont utiliser les services d'enfants pour satisfaire leurs besoins sexuels. On nous dit que ces enfants sont de plus en plus jeunes, compte tenu de la contamination au VIH qui sévit dans les pays en développement ou dans les pays pauvres où un grand nombre de touristes vont passer des vacances chaque année.

C'est inadmissible. On a vu des scènes la semaine passée à la télévision de Radio-Canada où on voyait de jeunes adolescentes de 10, 11, 12 ans, et des gens qui utilisent les services de ces enfants dire en toute liberté que ce n'était pas grave, parce que c'était dans leur culture d'avoir recours à ces services sexuels.

C'est inadmissible, c'est horrible et il est temps que quelqu'un mette ses culottes, comme on dit chez nous, et fasse enfin adopter une loi qui soit claire, complète, et qu'on interdise, qu'on criminalise une fois pour toutes ces pratiques qui lèsent les droits des enfants. C'est comme si nos enfants n'étaient pas des personnes. On peut avoir recours aux services sexuels d'enfants et on ne le fait même pas avec les bêtes.

(1735)

C'est inadmissible et j'espère que nous adopterons une loi lourde de conséquence pour mettre fin à ces pratiques. Ce n'est pas vrai que dans un pays comme le Canada qui prône la protection des droits de l'homme, et je pense que les enfants en font aussi partie, on laissera la porte ouverte à ces abuseurs.

Je voudrais continuer sur la disposition du projet C-27 concernant l'excision et les pratiques touchant les mutilations génitales féminines. Je pense que la disposition du projet de loi C-27 représente un pas dans la bonne direction. Encore là, il y a place pour l'amélioration.

Il y a près de 30 ans que je milite dans les groupes de femmes. La première fois où j'ai rencontré des groupes de femmes, les premières réflexions qu'on m'a faites concernaient l'inquiétude face aux mutilations génitales. Ce n'est pas d'hier que les groupes de femmes à travers le monde dénoncent ce genre de pratique.

Il est heureux qu'on ait ici, aujourd'hui, un projet de loi, mais il faudrait tout de même, comme dans le cas du tourisme sexuel, pas seulement effleurer un article, pas seulement faire de la prévention ou donner de l'information, il faut une fois pour toutes avertir que cette pratique est un crime, qu'une atteinte aux organes génitaux féminins c'est une mutilation. Il faut que tous ceux qui arrivent au pays ou tous ceux qui y demeurent sachent qu'ici, au Canada, les mutilations génitales féminines c'est un crime, c'est une infraction au Code criminel tout comme l'alcool au volant.

J'aimerais vous en parler un peu plus en détails pour que les gens qui nous écoutent soient vraiment très sensibilisés concernant ce genre de pratique. Ce ne sont pas cinq ou six cas par année dans chaque pays. Des études publiées en 1993-1994 disent qu'il y avait entre 85 millions et 114 millions de femmes, vivant actuellement, qui avaient subi la mutilation génitale.

Actuellement, selon certaines statistiques, il y a une augmentation de ces pratiques de deux millions par année et ce dans près de 40 pays dont l'Afrique, l'Asie, le Moyen-Orient et j'en passe. Ces pratiques se font sur des filles âgées de 4 à 10 ans en moyenne, c'est épouvantable.

Ces quelques statistiques bien qu'impressionnantes ne disent rien sur l'expérience traumatisante que vivent ces fillettes, pour la plupart de jeunes enfants. Elles ne disent rien sur la douleur qui survient pendant et après ces mutilations ni sur les problèmes de santé avec lesquels plusieurs seront aux prises pour le reste de leur vie.

Souvent pratiquées dans des conditions plus que douteuses par des personnes n'ayant aucune connaissance médicale réelle, les mutilations peuvent entraîner de nombreuses conséquences. Je voudrais seulement vous en énumérer quelques-unes: hémorragie, incontinence, abcès, infection, traumatisme, état de choc, infertilité et j'en passe.

Dans ces opérations, on utilise des outils mal stérilisés, quand ce ne sont pas tout simplement des couteaux de cuisine. Un document du Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme rapporte aussi qu'on utilise du sucre, des oeufs, des épines et des éclisses de palmiers. Très douloureuses et souvent pratiquées sans anesthésie, ces interventions irréversibles entraînent souvent chez les victimes des traumatismes et des complications d'ordre sexuel et psychologique. Je ne crois pas qu'il soit utile à faire la description de cette pratique pour que l'on comprenne bien à quoi nous avons à faire.

(1740)

Il est clair qu'il s'agit d'une pratique inacceptable et qui ne doit, en aucun cas, être tolérée. De plus, il faut s'assurer que ceux et celles qui la pratiquent soient sévèrement punis.

Le ministre de la Justice a décidé de ne pas créer une infraction distincte pour l'excision. Cette décision repose sur deux arguments: les dispositions actuelles permettent de poursuivre ceux qui pratiqueraient l'excision. C'est très difficile, dans un pays comme le nôtre, quand les gens entrent ici et que cette pratique fait partie de leur culture, car ils ne se dénonceront pas entre eux.

Alors, comment poursuivre ceux qui pratiquent l'excision? Il faut vraiment avertir tous les gens qui entrent ici qu'au Canada, on ne tolère pas cela, que c'est criminel. C'est pour cela que je vous disais tantôt qu'il ne faut pas dire que c'est déjà dans le Code criminel. Ce n'est pas ça. Cela fait plusieurs fois qu'on le réclame. C'était inscrit dans le projet de loi de ma collègue de Québec. Cela ne fonctionne pas.


3588

Plusieurs médecins à travers le Canada dénoncent qu'à toute minute, ils reçoivent des appels téléphoniques ou des visites de gens leur demandant de faire cette opération. Alors, ces médecins sont tenus, par un code professionnel, de ne pas les dénoncer à la GRC. On a vu un cas dernièrement où la jeune fillette avait à peu près quatre ans, et la mère étant partie faire des courses, la grand-mère a décidé de pratiquer la mutilation chez l'enfant. Pensez-vous que cette mère, qui était vraiment déboussolée par rapport à ce que la grand-mère venait de faire, allait la dénoncer à la GRC pour qu'elle soit emprisonnée? C'est ce qu'on veut dire. Il faut absolument que les gens qui pratiquent la mutilation dans leur culture, qui entrent ici et qui vivent ici soient au courant que cette pratique est criminelle et que si jamais on porte des accusations, ils se retrouveront en prison.

Deuxièmement, le ministre de la Justice a décidé de mettre l'accent sur l'éducation et la prévention. À mon avis, ces deux arguments sont trop faibles pour justifier la décision de ne pas créer une infraction distincte. Je le disais tantôt, je suis d'accord avec la prévention et l'information. Il faut le faire, mais ce n'est pas assez. Comme le disait Machiavel, «seule la vertu n'a aucun pouvoir sur l'homme si elle ne s'accompagne d'un peu de force pour le dissuader». Alors, il faudrait inclure dans le Code criminel une disposition portant uniquement sur les mutilations génitales féminines afin de faire prendre conscience aux gens que cette pratique bien précise est illégale.

De même, puisqu'on sait que l'opération sur des ressortissantes canadiennes est souvent pratiquée à l'extérieur du pays, il faudrait que le ministre, comme il l'a fait dans le cadre du tourisme sexuel impliquant des enfants, ajoute une portée extra-territoriale à l'article portant sur les mutilations génitales féminines. Ceci permettrait la poursuite, au Canada, des personnes qui emmènent une enfant à l'étranger ou qui organisent son transport pour qu'elle y subisse l'opération. Cette portée extra-territoriale permettrait d'éviter que des personnes continuent de contourner la loi et protégerait plus efficacement les enfants, objectif visé par la loi.

Troisièmement, j'aimerais remettre en question l'exception prévue pour les interventions chirurgicales soi-disant nécessaires, parce que les médecins ne reconnaissent pas les mutilations génitales féminines comme un acte médical. Il n'est nul besoin de les prévoir dans un texte de loi.

Il y a aussi, dans le projet de loi C-27, une disposition portant qu'une personne adulte pourrait consentir à subir une forme de mutilation génitale.

(1745)

Je rejette cette possibilité avec la plus grande vigueur parce qu'elle va complètement à l'encontre de l'objectif visé qui est l'éradication des mutilations génitales féminines.

Au nom de quel principe peut-on déclarer dans un texte de loi qu'une personne peut consentir à se faire mutiler? Comment peut-on imaginer éradiquer une pratique culturelle vieille de plusieurs siècles et grandement répandue dans certaines cultures en permettant qu'on lui donne un certain consentement? Quelqu'un qui arrive ici à 22 ou 23 ans demandera la mutilation parce que, dans sa famille et dans sa culture, on l'a vraiment initiée à se faire mutiler. Cette pratique est inacceptable et il faut absolument qu'elle soit condamnée ici au Canada; peu importe la raison, elle est condamnable.

La prévention, oui, mais avant tout il faut que le législateur adopte une loi spécifique et distincte, comme dans le projet de loi C-235, qui rendrait illégale la pratique des mutilations génitales sur les fillettes et les femmes car, après tout, à quoi bon prévenir quand le mal est déjà fait?

En conclusion, éducation et prévention sont très bien, mais elles sont insuffisantes. Il faut établir un climat de surveillance, trouver, dénoncer les coupables, et surtout les punir véritablement.

Il faut agir rapidement, car les dispositions actuelles ne permettent pas d'empêcher que ces actes se produisent. De plus en plus, on peut avoir de sérieux doutes quant à l'efficacité d'une simple politique de prévention par l'information. La seule avenue qui reste est que le législateur criminalise, par une loi extra-territoriale qui touche l'ensemble de la population, des pratiques comme l'excision, le tourisme sexuel, le harcèlement et autres formes d'abus.

Le projet de loi C-27 peut représenter un pas dans la bonne direction, mais il reste de nombreux détails à améliorer afin de corriger cette situation définitivement, efficacement, et une fois pour toutes.

La France, la Grande-Bretagne et la Suède l'ont déjà fait. La Norvège, ainsi que plusieurs États américains ont aussi renforcé leurs lois en ce sens. Il est maintenant temps qu'ici aussi, un geste concret soit posé. Il faut que tout le monde sache clairement que la violence sexuelle faite aux femmes et aux enfants est inacceptable et qu'elle ne sera tolérée sous aucune forme, d'aucune façon. Il faut que tout le monde sache que ce sont des actes criminels et que ceux qui les perpétuent, que ce soit ici ou ailleurs dans le monde, ne pourront échapper à la justice et devront répondre de leurs actes devant la loi.

[Traduction]

M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée de ses observations. Cependant, malgré tout le respect que je lui dois, certaines choses ne sont pas fondées.

Elle a laissé entendre qu'il ne serait pas illégal d'effectuer la mutilation d'organes génitaux féminins sur une personne âgée de plus de 18 ans. Ce n'est pas le cas. Un tel acte est illégal. La Cour suprême a statué clairement que nul ne peut consentir à des voies de fait graves, ce qu'est la mutilation d'organes génitaux féminins. Un tel acte est donc illégal.

Elle a également dit que les organisateurs de voyages ou ceux qui organisent des tournées sexuelles ne seraient pas visés par la loi. Comme je l'ai dit plus tôt, le Code criminel contient déjà des dispositions qui indiquent clairement que les agences de tourisme et les organisateurs de voyages qui proposent des tournées sexuelles sont coupables d'une infraction criminelle au Canada.

(1750)

Elle a également dit que les personnes qui se rendraient à l'extérieur du Canada pour obtenir une mutilation d'organes génitaux féminins échapperaient à la loi. Il s'agit, là aussi, d'une erreur puisque toute personne qui quitte le Canada dans le but de commet-


3589

tre une infraction criminelle, ce que constitue la mutilation d'organes génitaux féminins, est coupable d'une infraction.

Je tenais à faire la lumière sur certaines erreurs qui ont été commises et je remercie tous les députés de l'appui qu'ils ont apporté au projet de loi à l'étude.

[Français]

Mme Picard: Monsieur le Président, je remercie le député de ses commentaires. Ce que je pourrais répondre au député, c'est pourquoi en faire une exemption? On est ici pour défendre l'intégrité de toutes les femmes et de tous les enfants. Pourquoi arriver avec une exemption? Si on est d'accord avec le fait que la mutilation des organes génitaux est illégale, qu'on l'interdit ici et si ça ne se pratique pas ici, dans ce pays, pourquoi ferait-on une exemption et mettrait-on une limite d'âge en disant qu'au-dessus de 18 ans, on a le droit de se le faire faire?

Comme je l'ai mentionné, peut-être que je n'ai pas été assez claire, c'est qu'il y a certaines cultures où on fait ce qu'on appelle un lavage de cerveau. On dit à ces femmes: «Tu ne trouveras pas mari si tu ne subis pas cette pratique.» Ces femmes qui cherchent à se marier, comme elles ont eu de l'information sur le plan culturel, pensent que cette pratique est bien. Elles demandent donc à le faire faire.

Nous, au Canada, ce qu'on prône et ce qu'on dit, c'est qu'on ne veut pas de cette pratique pour qui que ce soit, qu'on ait 18 ans, 5 ans ou 40 ans. Ce qu'on a voulu avec le projet de loi de ma collègue, ce qu'elle a mentionné, c'est que peu importe l'âge, cette pratique ne soit pas tolérée ici au Canada.

[Traduction]

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais faire écho à la contradiction que ma collègue vient de mettre en évidence.

Si la loi actuelle protège les femmes adultes, pourquoi ne protège-t-elle pas aussi les moins de 18 ans? Si la loi contient les dispositions nécessaires pour protéger les plus de 18 ans, pourquoi n'accorde-t-elle pas la même protection aux moins de 18 ans?

Il y a là une contradiction, et je ne doute pas que des amendements seront apportés pour y remédier. Pour que les choses soient plus claires pour toutes les personnes touchées par cette question, je voudrais que cette partie du projet de loi soit amendée de manière à ce qu'elle ne semble pas exclure les personnes de plus de 18 ans.

Le projet de loi devrait l'indiquer de façon claire et nette. Aussi, j'appuie les observations de la députée.

[Français]

Mme Picard: Monsieur le Président, je remercie mon collègue du Parti réformiste de son encouragement. Il est sûr que s'il présente ce genre d'amendement au projet de loi C-27, le Bloc québécois votera en sa faveur.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu une deuxième fois et renvoyé au comité.)

* * *

(1755)

LA LOI SUR LES OCÉANS

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-26, Loi concernant les océans du Canada, dont un comité législatif a fait rapport avec des propositions d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le président suppléant (M. Kilger): Il y a 92 motions d'amendement inscrites au Feuilleton à l'étape du rapport du projet de loi C-26, Loi concernant les océans du Canada.

Les motions nos 6 et 10 proposent des amendements qui ont déjà été présentés et rejetés en comité. Par conséquent, conformément au paragraphe 76.1(5) du Règlement, elles n'ont pas été retenues.

Les autres motions seront regroupées aux fins du débat de la façon suivante:

Groupe no 2, motions nos 1 à 4.

Groupe no 3, motions nos 5, 22, 38, 42, 43, 47, 48, 49, 51, 52, 57 à 64, 72, 74, 75, 89, 90 et 91.

[Français]

Le groupe no 4. Les motions nos 7, 11, 12, 13, 15, 16 et 31.

[Traduction]

Groupe no 5, motions nos 8, 9, 14, 17 à 21, 23, 32, 33, 34, 35.

[Français]

Le groupe no 6. Les motions nos 24 à 27, 39 et 66.

[Traduction]

Groupe no 7, motions nos 28, 29, 30.

Groupe no 8, motions nos 36, 37, 40, 41, 44, 45, 46, 50, 53, 56, 73.

[Français]

Le groupe no 9. Les motions nos 54, 55, 69, 71 et 92.

[Traduction]

Groupe no 10, motion no 65.

Groupe no 11, motions nos 67, 68, 70.


3590

[Français]

Le groupe no 12. Les motions nos 76, 78, 80, 82 et 88.

[Traduction]

Groupe no 13, motions nos 77, 79, 81, 83 à 87.

Les modalités du vote sur les motions dans chaque groupe sont disponibles au bureau. La présidence rappellera à la Chambre les modalités à suivre avant chaque vote.

Je propose à la Chambre les motions nos 1, 2, 3 et 4.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je demande le consentement unanime pour dire que toutes les motions à l'étape du rapport du projet de loi C-26 ont été proposées, appuyées et lues à la Chambre par le Président.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Nous allons maintenant passer au débat sur le groupe no 2.

MOTIONS D'AMENDEMENT

L'hon. Fred Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) propose:

Motion no 1
Qu'on modifie le projet de loi C-26, au Préambule, par substitution, aux lignes 2 à 35, page 1, de ce qui suit:
«que le Canada reconnaît que les trois océans qui le bordent, l'Arctique, le Pacifique et l'Atlantique, font partie du patrimoine de tous les Canadiens;
que le Parlement désire réaffirmer le rôle du Canada en tant que chef de file mondial en matière de gestion des océans et des ressources marines;
que le Parlement désire affirmer, dans les lois internes, les droits souverains du Canada sur sa zone économique exclusive et les responsabilités qu'il compte assumer à cet égard;
que le Canada est déterminé à promouvoir la connaissance des océans, des phénomènes océaniques ainsi que des ressources et des écosystèmes marins, en vue d'assurer la préservation des océans et la durabilité de leurs ressources;
que le Canada estime que la conservation, selon la méthode des écosystèmes, présente une importance fondamentale pour la sauvegarde de la diversité biologique et de la productivité du milieu marin;
que le Canada encourage l'application du principe de la prévention relativement à la conservation, à la gestion et à l'exploitation des ressources marines afin de protéger ces ressources et de préserver l'environnement marin;
que le Canada reconnaît que les océans et les ressources marines offrent des possibilités importantes de diversification et de croissance économiques au profit de tous les Canadiens et, en particulier, des collectivités côtières;
que le Canada est déterminé à promouvoir la gestion intégrée des océans et des ressources marines;
que le ministre des Pêches et des Océans, en collaboration avec d'autres ministres et organismes fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les organisations autochtones, les collectivités côtières et les autres personnes de droit public et de droit privé intéressées, y compris celles constituées dans le cadre d'accords sur des revendications territoriales, encourage l'élaboration et la mise en».

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ) propose:

Motion no 2
Qu'on modifie le projet de loi C-26, au Préambule, par adjonction, après la ligne 16, page 1, de ce qui suit:
«que les provinces canadiennes exercent également des compétences législatives en ce qui concerne les océans et leurs ressources;».
Motion no 3
Qu'on modifie le projet de loi C-26, au Préambule, par substitution, à la ligne 19, page 1, de ce qui suit:
«ressources marines de concert avec les provinces, compte tenu des compétences de chaque ordre de gouvernement;».
Motion no 4
Qu'on modifie le projet de loi C-26, au Préambule, par substitution, à la ligne 33, page 1, de ce qui suit:
«avec les gouvernements provinciaux, d'autres ministres fédéraux et les».
[Français]

M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole, aujourd'hui, à l'appui de l'amendement proposé par le gouvernement au préambule de la Loi sur les océans du Canada. Ce n'est pas une simple coïncidence si la devise du Canada est «a mari usque ad mare», c'est-à-dire d'un océan à l'autre. S'il y a au monde un pays qui a été influencé par la mer, c'est bien le Canada.

(1800)

Le Canada est un pays maritime par définition. Nous sommes bordés par trois océans: l'Atlantique, le Pacifique et l'Arctique. Et une bonne partie de notre frontière sud est formée par une véritable mer intérieure d'eau douce, c'est-à-dire les Grands Lacs. Depuis la nuit des temps l'exubérante vie maritime de ses eaux a contribué à forger la culture et l'identité canadienne, que l'on songe aux villages côtiers des Premières Nations, aux baleiniers et pêcheurs européens qui n'hésitaient pas à affronter la haute mer pour venir puiser à même les richesses de nos mers ou encore aux premiers colons venus de l'ancien monde pour se bâtir une nouvelle vie sur les rives de cette terre nouvellement trouvée, c'est-à-dire Terre-Neuve.

Les vastes écosystèmes marins le long de nos côtes sont variés, productifs et précieux. Nous avons la responsabilité, autant au niveau national qu'international, de protéger le patrimoine marin pour les générations présentes et futures.

Par sa motion visant à amender le projet de loi C-26, Loi concernant les océans du Canada, le gouvernement propose d'ajouter quatre nouveaux énoncés au préambule qui ont été discutés et acceptés au Comité permanent des pêches et océans.


3591

En cherchant ainsi à faire modifier le préambule, le gouvernement veut s'assurer que les voeux exprimés par les nombreux témoins qui ont comparu devant le Comité permanent soient pris en compte dans le texte de cette loi. Le gouvernement s'y prend de plusieurs manières.

[Traduction]

Le premier énoncé reconnaît les caractéristiques distinctes des trois océans qui bordent le Canada et déclare que ceux-ci font partie du patrimoine de tous les Canadiens. Ce sentiment a été exprimé de façon très éloquente par bon nombre de témoins représentant des associations de pêcheurs, de même que par les autorités autochtones qui ont aussi comparu devant le comité permanent.

Le deuxième énoncé proposé par le gouvernement, qui est ajouté à titre d'énoncé no 5 du préambule, stipule que la conservation, selon la méthode des écosystèmes, présente une importance fondamentale pour la sauvegarde de la diversité biologique et de la productivité du milieu marin. Ce principe est à la base de la nouvelle stratégie de gestion des océans qui sera élaborée après l'adoption de cette mesure législative. Un tel amendement du préambule répond aux nombreuses demandes des témoins ayant comparu devant le comité et il est conforme à l'approche du gouvernement à l'égard de la conservation.

Le troisième énoncé proposé par le gouvernement, qui est ajouté à titre d'énoncé no 6 du préambule, stipule que le Canada encourage l'application du principe de la prévention relativement à la conservation, à la gestion et à l'exploitation des ressources marines afin de protéger ces ressources et de préserver l'environnement marin. C'est dire que nous préférons pécher par excès de prudence au lieu d'attendre d'être aux prises avec les graves conséquences de notre procrastination pour prendre des mesures de conservation à l'égard de nos précieuses et fragiles ressources marines.

Le Canada préconise fortement l'inclusion du principe de prévention dans la convention sur les stocks chevauchants et les espèces hautement migratoires. Il est tout à fait naturel d'inclure ce principe dans notre propre droit interne.

Le dernier amendement au préambule proposé par le gouvernement fait suite aux commentaires des représentants des industries océaniques et porte sur les possibilités de nos océans. Ce serait le septième énoncé du préambule. Il stipulerait que le Canada reconnaît que les océans et les ressources marines offrent des possibilités importantes de diversification et de croissance économiques au profit de tous les Canadiens et en particulier des collectivités côtières.

Tous ces amendements ajoutent, dans le corps du préambule, des concepts que les Canadiens espèrent trouver dans cette mesure législative. Ce projet de loi favorise la coopération en permettant à tous les Canadiens de travailler ensemble à la préservation de nos ressources marines.

Les motions présentées par l'opposition proposent d'autres amendements, qui visent plus particulièrement la compétence provinciale en matière de gestion de nos océans et de nos ressources marines. Je dis humblement que c'est une tentative en vue de modifier la compétence provinciale qui est prévue dans la Constitution. Ce n'est pas constitutionnellement nécessaire de réaffirmer la volonté du gouvernement fédéral de privilégier la coopération en matière de gestion des océans. Cette question figure déjà dans le préambule qui souligne le rôle des provinces et des autres intéressés.

Le passage dans le préambule auquel je fais allusion dit que dans l'exercice des attributions qui lui sont conférées par la présente loi, le ministre coopère avec d'autres ministres fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux, et avec les organisations autochtones touchées. Les provinces sont expressément mentionnées une nouvelle fois au paragraphe 33(2), qui traite de la consultation.

Cette mesure législative a-t-elle l'air d'une mesure d'exclusion? A-t-elle l'air d'une mesure qui veut priver les provinces de leurs droits et privilèges. Bien sûr que non. Ce n'est pas ce qu'essaie de faire cette mesure législative. Autrement, le gouvernement ne ferait pas ici la promotion du projet de loi C-26.

(1805)

La loi n'essaie pas de modifier le cadre constitutionnel ou la répartition des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les provinces. Comment une mesure législative ordinaire le pourrait-elle? Elle n'empiète d'aucune façon sur les droits des provinces, pas plus qu'elle n'ajoute à ces droits.

Le projet de loi que la Chambre a devant elle aujourd'hui demande à tous les Canadiens, y compris les provinces, de mettre au point ensemble une stratégie qui permette d'exploiter le potentiel économique des océans tout en respectant les besoins environnementaux des océans. Le programme national de l'environnement ne peut plus être distinct des autres programmes nationaux: économie, affaires sociales et affaires étrangères.

Le préambule au projet de loi C-26 est visionnaire, il est détaillé et inclusif. C'est la convergence des vues de tous les Canadiens de ce pays à l'égard d'une gestion responsable des océans. Les membres du Comité permanent des pêches et des océans ont travaillé dur pour faire de ces vues une réalité dans cette mesure législative. Ils ont travaillé dur pour veiller à ce que le projet de loi C-26 soit inclusif et encourage la coopération entre le gouvernement fédéral et les provinces.

La participation des provinces à la gestion de nos océans est automatique étant donné l'esprit de coopération de ce projet de loi. C'est la raison pour laquelle j'espère que tous les députés appuieront la Loi concernant les océans du Canada et tout ce qu'elle représente pour la gestion des océans, ainsi que la motion no 1 du gouvernement afin de modifier le préambule. Je recommande en même temps aux députés de rejeter les amendements proposés par l'opposition officielle, les motions no 2, 3 et 4, qui sont inutiles


3592

étant donné ce qui figure déjà dans le préambule et ce que propose le gouvernement.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, le député qui vient de me précéder en Chambre a essayé de minimiser l'importance de nos amendements et avant de réagir à ses propos, j'aimerais réagir à l'amendement proposé par le gouvernement. C'est une motion qui concerne, il faut le rappeler, la Loi concernant les océans du Canada.

Il y a bien sûr trois océans. Le Québec est particulièrement concerné par l'océan Atlantique et son golfe. On a vu que le projet de loi est une nouvelle façon que le gouvernement fédéral veut instaurer pour aller plus loin encore ou articuler davantage toute son offensive relative aux ressources à tous niveaux.

Moi qui venais du Comité du développement des ressources humaines, j'ai regardé ce projet de loi avec un oeil surpris pour constater que, même dans les ressources naturelles, on voit que le gouvernement fédéral se nourrit du même esprit, celui d'écarter et d'ignorer les provinces et particulièrement le Québec. Évidemment, nous regardons les intérêts du Québec en premier, et on se rend compte là-dedans que les provinces sont considérées au même titre qu'une municipalité, qu'une communauté quelconque.

Pour le gouvernement fédéral, la stratégie nationale est surtout sous l'inspiration de Capitaine Canada, l'ancien ministre des Pêches et des Océans, qui avait fait des remontrances à l'Espagne et tout ça. On dirait que c'est le gouvernement fédéral qui détient toutes les responsabilités, puis on fait ce plan et on ose penser, du côté du gouvernement, que l'opposition restera muette, impassible devant cette offensive qui se poursuit à tous les égards.

Or que dit la motion no 1 du Parti libéral? Des voeux pieux. On pourrait même dire que c'est un chapelet de voeux pieux. C'est une manoeuvre que je qualifierais d'hypocrite pour faire figure de bon garçon ou de bonne fille. Le fédéral y intègre la notion de gouvernements provinciaux, oui, mais c'est en noyant cette entité parmi les organisations autochtones, les collectivités côtières et les autres personnes de droit public et de droit privé intéressées.

Si le gouvernement fédéral est vraiment de bonne foi dans sa volonté de respecter les gouvernements provinciaux, qu'il le démontre en acceptant les motions proposées par le Bloc québécois, l'opposition officielle, qui, elles, impliquent véritablement les provinces. Sans geste concret de la part du gouvernement fédéral, cette motion demeure un nuage de fumée.

(1810)

Que veut-on accomplir avec les motions 2, 3 et 4? On veut intégrer, de façon claire, dans le projet de loi que les provinces canadiennes doivent pouvoir exercer leurs compétences au chapitre des océans et de leurs ressources. Circonscrire le pouvoir du fédéral par l'intégration et le respect du pouvoir des provinces est le point central des efforts déployés par l'opposition officielle en ce qui concerne les modifications apportées à ce projet de loi.

Même si les motions sont courtes, je pense qu'il faut les lire. On passe ça du revers de la main comme si ce n'était rien. Ce qu'on propose à la motion no 2, c'est:

«que les provinces canadiennes exercent également des compétences législatives en ce qui concerne les océans et leurs ressources».
La motion no 3 propose:

Qu'on modifie le projet de loi C-26, au Préambule, par substitution, à la ligne 19, de ce qui suit:
«ressources marines de concert avec les provinces, compte tenu des compétences de chaque ordre de gouvernement;».
La motion 4 propose de modifier le projet de loi C-26, au Préambule-on connaît l'importance d'un préambule dans la Constitution, c'est la même chose dans les lois-de la façon suivante:

«avec les gouvernements provinciaux, d'autres ministres fédéraux et les»
autres organismes.

Si on présente ces motions, c'est parce qu'on sait que le passé est souvent garant de l'avenir. Du point de vue des Québécois, le gouvernement fédéral nous a souvent passé des sapins, je n'ai pas de termes équivalents qui me viennent à l'esprit pour le domaine océanique. Il m'en vient un finalement. Étant du comté de Lévis, de la MIL Davie, on se fait souvent passer un bateau, on les voit passer.

Cette fois-ci on sera vigilant et on dit que les précisions amenées par le gouvernement fédéral c'est toujours pour parler de son rôle et tout ça et pousser plus loin le rouleau compresseur de la centralisation. Tous les Gaspésiens, tous les gens de la baie des Chaleurs jusque dans l'intérieur du golfe en passant par ceux de la Côte Nord demandent à l'opposition officielle de les défendre. C'est ce qu'on compte faire devant cette Chambre et en comité.

[Traduction]

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, en ce qui concerne les motions dont la Chambre est saisie, les députés du Parti réformiste veulent qu'il soit bien entendu qu'ils sont d'accord avec le secrétaire parlementaire sur la motion no 1. Nous y donnerons notre appui, parce que, d'après nous, elle répond aux voeux des Canadiens. Elle répond aux exigences citées par le Parti réformiste, c'est-à-dire qu'elle établit un traitement de nos océans, eaux côtières et estuaires fondé sur le principe de la conservation des écosystèmes.

Pour les motions nos 2, 3 et 4, qui sont des amendements présentés par le Bloc, nous proposons ceci. C'est bien clair que les régions du Canada nourrissent beaucoup d'hostilité à l'égard d'Ottawa en raison des recoupements administratifs réels ou imaginés, Ottawa intervenant apparemment dans des domaines de compétence où il ne devrait pas.

Je comprends tout à fait les sentiments des députés du Bloc et d'autres à la Chambre ainsi que de Canadiens des quatre coins du pays, quand on parle de partage des compétences.


3593

Après examen de la Loi sur les océans et de ce que cette mesure vise à faire, il est clair que beaucoup des préoccupations que les députés du Bloc ou des députés dans d'autres régions du Canada pourraient avoir au sujet des compétences d'Ottawa ne se régleront pas par un simple transfert de ces compétences aux provinces.

Par exemple, beaucoup de ressources marines sont migratoires, le poisson, la faune, les phoques, les oiseaux et d'autres. Ces espèces ne respectent pas les frontières, internationales ou provinciales. Elles vivent leur cycle biologique sans égard aux activités humaines.

(1815)

Il importe, par conséquent, que nous veillions aux ressources marines du Canada dans une perspective nationale et en bons pères de famille. Il y a aussi beaucoup de facettes et de conséquences internationales qu'il faut considérer en ce qui a trait aux ressources marines du Canada, et je crois que la Loi sur les océans en tient compte honorablement, en majeure partie. Toutefois, je dois dire que, sur bien des points, le ministre des Pêches et des Océans a le devoir d'effectuer des consultations beaucoup plus approfondies auprès des provinces. C'est pourquoi, en ce qui concerne la motion no 3, nous proposerons un sous-amendement. Nous avons avisé le Parti libéral et le Bloc que nous allions proposer un sous-amendement. Je propose:

Qu'on modifie la motion no 3 en supprimant les mots suivants: «compte tenu des compétences de chaque ordre de gouvernement».
Le président suppléant (M. Kilger): Je vais examiner le sous-amendement et j'en reparlerai sans délai à la Chambre.

[Français]

M. Dubé: Monsieur le Président, on débattait du groupe de motions no 2 et le député a déjà pris la parole sur ce groupe de motions, alors que de ce côté-ci de la Chambre, il y a encore des orateurs qui aimeraient intervenir sur le groupe no 2. Donc, je vous invite, monsieur le Président, à reconnaître le député de Richelieu qui, lui, voudrait bien intervenir sur le groupe de motions no 2.

Le président suppléant (M. Kilger): Je me rappelle très bien que le secrétaire parlementaire a lancé le débat sur le premier groupe de motions, le groupe no 2. Je viens tout juste de céder la parole au secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international; il ne s'agit pas du même. En d'autres mots, c'estM. MacDonald de Dartmouth.

[Traduction]

M. Ron MacDonald (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais d'abord je suis heureux de voir ce projet de loi revenir à la Chambre à l'étape du rapport.

Autrefois, dans une législature antérieure, j'ai eu le privilège de présider le Comité permanent des pêches et océans. Je voudrais remercier tous les députés de ce comité, y compris le président actuel, le député d'Egmont, du diligent travail qu'ils ont fait à propos de ce projet de loi.

Je voudrais aussi féliciter le député de Skeena qui siégeait à ce comité. Il a montré qu'il avait un profond intérêt pour le sujet et une profonde compréhension de la nécessité pour les gouvernements de revoir périodiquement la façon dont ils font les choses, afin d'essayer de les faire mieux, de les rendre plus cohérentes et un peu plus efficaces.

En ce qui concerne les observations qui ont été faites il y a un moment par nos collègues du Bloc québécois, je voudrais dire que, malheureusement, je ne peux pas être aussi magnanime à leur égard. Certains des amendements que je vois dans le premier groupe ne témoignent pas de l'appui que ce projet de loi a reçu d'un grand nombre de sources alors que nous délibérions en comité. Le Bloc québécois semble plus intéressé par des déclarations au sujet de la souveraineté et de la compétence du Québec que par l'amélioration du projet de loi. C'est regrettable mais, comme tout membre du comité a le droit de le faire, ils utilisent leur temps comme ils le veulent. C'est leur propre argent, ils en font ce qu'ils désirent.

(1820)

Je ne peux pas m'empêcher de noter que les amendements qui ont été proposés par le Bloc québécois ne reflètent en rien les témoignages que nous avons entendus. Certains des amendements proposés par le Parti réformiste, même si je ne les approuve pas tous, sont au moins basés sur des faits. Les témoins que nous avons entendus avaient des vues différentes à propos de divers aspects du projet de loi et le député du Parti réformiste a repris quelques-unes d'entre elles.

Ce projet de loi est attendu depuis longtemps. Les gens que nous avons entendus, ceux qui travaillent dans le secteur environnemental, ceux qui seront le plus touchés par ce projet de loi, disent qu'il a pris trop de temps à venir. Tout le monde a applaudi le projet de loi. Beaucoup avaient des points de vue différents au sujet de divers aspects et avaient des suggestions sur la façon de l'améliorer. Tous les intervenants étaient cependant d'accord pour dire que la Loi sur les océans était attendue depuis longtemps.

Dans le cas d'un pays comme le Canada, qui a une très grande longueur de côte sur trois océans, une des plus longues côtes continues dans le monde, la plupart des gens diront qu'il était temps que l'on mettre de l'ordre dans les divers lois et programmes que le gouvernement fédéral administre et qui ont une influence sur les ressources maritimes. Ce projet de loi, qui vise regrouper une bonne partie de ces activités sous la compétence d'un ministre, d'un ministère et d'une loi, accomplit beaucoup de choses. Plus de 14 programmes ou activités ministérielles se retrouvetn sous une seule compétence, celle du ministre des Pêches et des Océans.

Nous avons entendu beaucoup d'arguments de la part de divers fonctionnaires et ministères sur les raisons pour lesquelles certains des domaines de compétence devraient être laissés au ministère de l'Environnement ou à celui des Ressources naturelles. J'ai soutenu alors, comme je le ferai aujourd'hui, que la Loi sur les océans


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constitue une bonne première démarche, mais que nous devons continuer d'examiner certains des domaines qu'il serait préférable de confier directement au ministre des Pêches.

Je songe ici à certaines mesures législatives sur les déversements en eau profonde, qui relèvent actuellement du ministre de l'Environnement, de même que celles qui traitent de l'océan Arctique et qui devraient être examinées plus longuement par un comité de la Chambre, ou peut-être, par un sous-comité ou un comité mixte du Comité des pêches et des océans et du Comité permanent de l'environnement et du développement durable. Il y a eu des discussions, et j'espère qu'on ne perçoit pas ce projet de loi comme la fin des travaux, mais bien comme le début très important d'un long examen.

Nous avons entendu beaucoup de témoins excellents, dont les représentants du Comité canadien des ressources de l'Arctique qui nous ont guidés dans l'élaboration de ce projet de loi. Lorsque des gens demandaient quelle consultation avait eu lieu avant que ce projet de loi ne soit déposé devant le Parlement du Canada, il suffisait de jeter un coup d'oeil sur le mémoire du groupe du CCRA. Le CCRA avait travaillé fort longtemps au dossier et était devenu le porte-parole de dizaines d'organismes et de groupes intéressés. Lorsque le temps est venu de mettre la dernière main au projet de loi, le CCRA nous a aidés, moi, en tant que président, et le comité à trouver certains termes et certains amendements qui ont clarifié et amélioré davantage le projet de loi.

Je remercie les représentants du Fonds mondial pour la nature, Greenpeace, les nombreux pêcheurs que nous avons entendus et beaucoup d'autres gens intéressés qui ont témoigné devant le comité. Dans tous les cas, ils cherchaient manifestement, non pas à faire échouer et retarder le projet de loi, mais bien à l'améliorer.

Ce projet de loi part du principe de la prévention, du principe du développement durable. Il indique clairement que le ministre des Pêches et des Océans est le responsable au premier chef des diverses domaines liés au développement durable des ressources marines.

Cela confère au ministre la responsabilité d'agir de concert avec ses collègues du Cabinet et les ministères pour s'assurer que ces principaux principes régiront l'examen de tous les programmes et de toutes les lois de l'État qui concernent les océans du Canada. Cela est très important.

(1825)

Une des choses les plus importantes qui s'est produite et dont fait état le projet de loi, c'est la mise en place d'une nouvelle terminologie dans le paysage politique du Canada, et je veux parler notamment des zones marines protégées. Depuis des années, des environnementalistes, comme ceux du CCRA et du Fonds mondial pour la nature, des pêcheurs et des habitants du Nunavut font valoir très clairement la nécessité d'un cadre juridique en vue de la création de zones marines protégées dans les lois canadiennes. Il y a des zones où l'on trouve des écosystèmes tels qu'il y a tout lieu de les protéger dans des lois canadiennes. Il faut un responsable qui veille à ce qu'il y ait une personne qui assure la protection des écosystèmes uniques dont sont dotés les océans du Canada. C'est précisément ce que l'on fait dans ce projet de loi. Et c'est probablement une des raisons pour lesquelles cette mesure législative a suscité un intérêt si vif et un appui si ferme de la part de la population.

En terminant, je voudrais exprimer combien je me réjouis de ce que le gouvernement, avec le concours des principaux partis représentés à la Chambre, ait décidé de réintroduire ce projet de loi. À la fin de la dernière session, j'ai eu bien peur que cet excellent travail n'aboutisse à rien.

Le comité peut être fier du résultat. C'est la preuve que tous les députés, indépendamment de leur allégeance politique, peuvent avoir une influence très positive sur les textes législatifs dont la Chambre est saisie. Certes, cela ne s'est pas fait sans mal. Je l'ai mentionné, les bloquistes n'ont eu de cesse de proposer des amendements et de les défendre à la Chambre.

Ces amendements ne reposaient sur aucun témoignage entendu. Ils s'inspiraient plutôt de leur idéologie politique et il leur est arrivé à maintes reprises de chercher à créer l'impression que l'on voulait humilier le Québec et que toute loi fédérale ne visait qu'à s'accaparer d'une autre parcelle du champ de compétence des provinces. Or, sain de corps et d'esprit, je peux donner l'assurance que ce projet de loi n'affecte aucunement les compétences des provinces, Québec compris.

Il est regrettable que le seul vrai problème que nous avons eu au cours de l'étude de ce projet de loi, c'est quand les pêcheurs et les travailleurs d'usine de la Nouvelle-Écosse ont manifesté. Nous avons éprouvé des difficultés, parce qu'un député néo-démocrate irresponsable de l'assemblée législative provinciale, M. Chisolm, qui est depuis devenu chef du Nouveau Parti démocratique de la Nouvelle-Écosse, a pratiquement incité les pêcheurs et les travailleurs d'usine à se révolter. Il leur a dit que le projet de loi allait imposer des frais et privatiser les pêches, autrement dit qu'il prévoyait toutes ces mesures détestables auxquelles nous sommes opposés de ce côté-ci de la Chambre.

Nous avons agi de façon bien imprudente. Sauf erreur, M. Chisolm, qui espère devenir un jour premier ministre de la Nouvelle-Écosse, n'a même pas pris la peine de lire le projet de loi avant de faire le tour de sa province pour y répandre de faux renseignements. Je suis certain qu'il a perdu un peu de son charisme, parce que les hommes et les femmes de l'industrie des pêches qui ont choisi de comparaître devant le comité avaient des préoccupations et ont écouté ce que nous avions à dire. J'espère qu'aujourd'hui, ils appuient le rapport du comité et que le projet de loi progressera rapidement. Enfin, nous ferons en sorte que la Loi sur les océans du Canada soit proclamée.

[Français]

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, je suis estomaqué d'entendre l'ancien président du Comité permanent des pêches et des océans s'adresser avec autant d'ignorance à la Chambre en ce qui regarde ce dossier. Il parle de l'unanimité des témoins entendus prétendument en faveur de ce projet de loi, alors que plusieurs témoins, je dirais même la majorité, y voyaient une


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nécessité de modification et une nécessité d'amendements très concrets. Ils souhaitaient, d'après la correspondance parvenue au Bloc québécois et par les nombreux appels téléphoniques reçus, que l'opposition officielle joue un rôle de harponnage pour pouvoir arriver à modifier ce projet de loi, surtout les motions nos 2, 3 et 4, le groupe qui inclut ces motions, dont nous discutons aujourd'hui.

(1830)

Si ce parlementaire est sérieux, si ce gouvernement est sérieux, qu'il cesse de dire qu'il veut respecter les juridictions et qu'il adopte les motions que nous avons présentées et qui vont exactement en ce sens. Mon confrère du Parti réformiste parlait tout à l'heure dans le même sens. D'ailleurs, monsieur le Président, l'amendement sur lequel vous réfléchissez, par l'intermédiaire de vos hauts fonctionnaires présentement, va dans le sens de ce dont je viens de parler. Cependant, je sais à quel point votre sagesse les accompagne, monsieur le Président.

Je disais que dans les pures coutumes du gouvernement fédéral par rapport à l'argumentation du gouvernement du Québec, par rapport à ce que revendiquait le Québec justement, non pas par privilège, mais sa juste part, cela a toujours été manoeuvré, pour ne pas dire manigancé par le gouvernement, et pire quand il s'agit d'un gouvernement fédéral libéral, parce que ça veut tout dire.

Cela veut dire des manigances, mais de grandes manigances; cela veut dire des promesses électorales à profusion, mais aucun respect. Qu'on parle de la TPS, qu'on parle du patrimoine canadien, lorsqu'on parlait par exemple que les droits d'auteur seraient entre les mains du ministère du Patrimoine plutôt qu'entre celles du ministère de l'Industrie, tout cela, c'est écrit dans les promesses électorales du livre rouge, mais on rejette cela du revers de la main.

Après que l'élection est finie, on commence et on agit avec nos bonnes vieilles habitudes de manigances libérales, nos bonnes vieilles habitudes de tricherie, nos bonnes vieilles habitudes de «chums» qu'on protège, comme le faisait l'ancien ministre du Patrimoine lorsqu'il recevait 20 personnes chez lui pour un cocktail à 2 000 $ par personne, donc 40 000 $ pour les fonds du parti. Sept de ces personnes avaient des contrats du gouvernement directement accordés par son ministère de façon discrétionnaire.

Cela, c'est le gouvernement, et ce sont les bonnes vieilles habitudes libérales. On alimente les «chums», on nomme des avocats en tête de consultations, allons-y, l'argent sort, les amis sont gâtés. Quand il s'agit de dévoiler les noms dans un certain comité au sujet des protections sur la finance ou des transferts de deux milliards, il faut garder cela secret, la caisse électorale pourrait en souffrir. C'est cela, au fond, le gouvernement libéral, et vous nous demandez de nous fier sur vous, de vous croire et de nous fier que ce sera fait correctement, qu'il y aura un respect des juridictions? Mais quand le gouvernement fédéral a-t-il déjà respecté des juridictions provinciales?

Les mines ne lui appartiennent pas et il a le nez fourré là-dedans. C'est pareil pour le tourisme. Combien y a-t-il de ministères qui, selon la Constitution, devraient être régis par les provinces, mais où il a mis ses grands pieds? En mettant ses grands pieds, il n'a fait qu'augmenter les problèmes, créer des divisions. Est-ce qu'on se fiera à ce gouvernement?

Comme vient de le dire l'orateur précédent, le secrétaire parlementaire, ce que nous souhaitons, c'est très clair dans les motions nos 2, 3 et 4. Et pourtant, encore là, on arrive avec des voeux pieux. Je rappellerai au secrétaire parlementaire qui s'est adressé à nous tout à l'heure que les voeux pieux sont souvent les décisions qu'on n'a pas su prendre au bon moment.

Oui, il y a longtemps qu'on veut améliorer, qu'on voudrait un regroupement sous un seul ministère, qu'on voudrait améliorer tout ce qui regarde la gestion d'un océan à l'autre, comme le disait le premier orateur. Cependant, on ne veut pas que ça se fasse sur notre dos et cette division en trois est exactement ce sur quoi tous les opposants qui sont venus au comité ont crié leur indignation, puisque ce sera encore le Québec qui paiera la grosse part. Ce sera encore sur notre dos que se fera cette réforme.

Même si ce n'est pas nouveau, même si on est habitués à se faire rouler et à se faire organiser, dans ce cas-là, vous allez nous entendre pour chaque motion, vous allez nous entendre en comité et nous gagnerons cette bataille, parce que l'ensemble de la population s'y opposera fortement. Vous aurez à rendre des comptes lors de la prochaine campagne électorale, qui pourrait venir plus tôt qu'on pense, paraît-il. Je ne leur conseille pas de s'essayer.

Ce serait vraiment un mauvais moment avec le style de projets de loi qu'on a eus depuis quelque temps, surtout celui-là, qui a un impact économique très important pour le Québec, qui changera complètement les données et qui pourrait faire en sorte que le transport maritime se dirige vers les États-Unis, principalement à Philadelphie, qui a développé une politique très agressive pour attirer la clientèle là, ou il pourrait nécessairement glisser plus en profondeur vers l'est pour ce qui est des grands ports du Québec.

(1835)

On voudrait améliorer le projet de loi, on ne veut pas le rejeter, mais on voudrait recevoir une oreille attentive et avoir des gestes concrets, c'est-à-dire des papiers signés parce que vous ne tenez jamais votre parole.

La pire chose qui pourrait arriver serait de confier au premier ministre actuel, qui incarne l'image de toutes les manigances libérales puisqu'il est là, dans ce parti, depuis plus de 25 ans, tous ces manques de parole, tous ces non-respects d'engagement, toute cette médiocrité administrative qui caractérise les libéraux lorsqu'ils sont au pouvoir, la responsabilité avec un projet de loi aussi peu précis et qui n'accepterait pas les amendements aussi logiques et corrects que nous présentons. Ce serait un peu comme confier la banque de sang de la Croix-Rouge à Dracula. C'est à peu près ce qui se passerait si on se fiait à ce gouvernement-là. Je vois des gens dans l'assistance qui rient, mais l'exemple que j'ai pu donner est beaucoup plus sérieux que vous ne le croyez.

Ce gouvernement libéral, comme tous ceux qui l'ont précédé, incarne le non-respect des engagements donnés, le non-respect, lorsqu'on donne une ouverture dans un projet de loi, de l'esprit qui animait ceux qui l'ont voté, qui animait les comités qui ont entendu les témoins et qui animait les témoins venus revendiquer des changements ou proposer des amendements fort utiles pour l'ensemble


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de la population, amendements qui seraient directement reliés à cette restructuration que l'on propose.

Alors, je termine là-dessus en disant au Parti libéral, au gouvernement que s'ils sont vraiment de bonne foi, s'ils souhaitent vraiment voir ce projet de loi, comme le disait mon confrère tout à l'heure, être voté rapidement et correctement, il faudrait qu'ils se penchent dessus en profondeur, avec respect, et qu'ils trouvent d'autres arguments que ceux que je viens d'entendre de l'orateur pour rejeter ces arguments voulus par la population, voulus par les utilisateurs et souhaités par les membres du Bloc québécois ainsi que par plusieurs membres du Parti réformiste qui se sont prononcés. Alors, le gouvernement a une chance de démontrer à quel point il est ouvert à des suggestions éclairées et je souhaite de voir les amendements 2, 3 et 4 acceptés par la majorité des membres de cette Chambre.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Je suis prêt à rendre ma décision sur la proposition du député de Skeena voulant que la motion no 3 soit modifiée par la suppression du passage suivant: «compte tenu des compétences de chaque ordre de gouvernement». Cet amendement est recevable.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole ici ce soir sur ce projet de loi. Je dois vous dire que je suis fraîchement débarqué de l'avion. Avec la modernité, on est maintenant capable de se déplacer d'un bout à l'autre du pays d'une façon plutôt rapide.

Ce qu'il faut retenir de ce projet de loi, c'est qu'il y a 13 groupes de motions. Cette loi comporte trois parties. Le premier groupe touche la première partie de la loi. Cette partie cherche surtout à intégrer le nouveau vocabulaire du droit de la mer, la nouvelle convention prévue à l'ONU, que le Canada n'a pas encore signée.

Il y a peut-être des choses qui sont intéressantes là-dedans. J'ai attrapé quelques bribes du discours de l'ancien président du comité, mais je dois peut-être corriger certaines choses qu'il a mentionnées. On peut être d'accord qu'il faut se moderniser sur certains points, mais cependant, lorsqu'on en arrive à demander à faire respecter les provinces, comment se fait-il que ça leur prend tellement de temps à comprendre?

Les modifications dont on a discuté en comité, les choses qu'on nous apporte aujourd'hui dans ce projet de loi, les modifications que les libéraux ont faites, ma lecture personnelle c'est qu'on tente de diluer, de noyer le poisson.

(1840)

Ce n'est pas que j'aie quelque chose contre les communautés côtières ou les collectivités autochtones ou les autres groupes de droit privé ou public qui sont intéressés à la gestion des océans. Non, là où je veux en venir c'est que cette loi parapluie aura des tentacules partout. On verra plus tard que la Partie II cherche à établir une stratégie de gestion qui impliquera tous les différents ministères.

J'aimerais m'assurer que les provinces et les territoires qui forment le Canada soient respectés au premier niveau de consultation et de relation. Pourquoi cherche-t-on à diluer ce principe?

Je tiens à faire un petit ricochet. Ici même au mois de décembre dernier, après le référendum, je ne voulais pas en parler aujourd'hui, mais puisqu'on m'a ouvert la porte je vais le faire, ce n'est pas qu'on ne cherche à parler que de la souveraineté et à faire de la politique, mais l'autre côté avait voté la motion de société distincte pour le Québec. On tente de nous dire qu'on était différents cette journée-là mais lorsqu'on arrive pour l'appliquer dans les règlements on refuse de faire transparaître clairement cette idée de respecter le Québec comme étant un joueur, partie prenante, dans cela.

Si les autres provinces ne sont pas intéressées ou ne voient pas de la même façon que nous cette loi ou la façon de gérer leurs pêcheries ou les eaux connexes à leurs côtes, libre à eux, mais pourquoi nous en enlever, à nous, le privilège ou nous enlever, à nous, le souci de vouloir les gérer, de vouloir participer à cela? Je m'en étonne depuis deux ans et demi.

Je garderai toujours cette volonté de défendre les intérêts des Québécois, de les promulguer haut et fort, mais tout en faisant cela j'ai vainement cherché, par mon travail au comité étudiant le projet de loi C-26, de faire accepter mes idées. Je ne l'ai pas avec moi, mais j'ai même reçu une lettre de mon ex-confrère de l'autre côté, M. Brian Tobin, concernant justement ce projet de loi et qui disait: «Monsieur Bernier, l'idée que vous transmettez d'un réel partenariat, votre idée sera respectée.» Nos idées, elles ne le sont pas respectées.

Si M. Tobin était sincère-et je pense qu'il l'était lorsqu'il l'a dit et qu'il m'a écrit ces propos-s'il faisait encore partie de ce gouvernement, je crois qu'il tiendrait compte des amendements qu'on propose et respecterait sa parole et serait en faveur des amendements qu'on propose qui ne cherchent qu'à positionner comme il faut les relations entre le fédéral et le provincial de façon à ce que ce soit clair, ce qui n'est pas le cas présentement. Oui les provinces apparaissent, mais on met d'autres groupes d'intérêt alors que ce n'est pas cela. Ce n'est pas ça.

Je voudrais rajouter un dernier exemple. Vous vous rappelez il y a environ deux semaines, il y a eu un conflit dans la pêche au crabe, deux, trois provinces étaient impliquées. Le ministre des Pêches et des Océans, ici présent, n'a pas bougé. Il n'a pas rencontré les travailleurs.

Qui s'est chargé de régler les problèmes à ce moment-là? Ce sont les provinces. La province de Québec a rencontré ses travailleurs, la province du Nouveau-Brunswick a rencontré ses travailleurs. Devant des faits aussi évidents que cela, comment se fait-il qu'on ne veuille pas accorder une priorité, consacrée dans une loi, aux relations avec les provinces?

Bien malgré lui, le Nouveau-Brunswick a été obligé de s'impliquer dans le conflit de la pêche au crabe. Dès le départ, son ministre des Pêches a spécifié que c'était de juridiction fédérale. Bien mal lui


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en prit, les gens de son comté ont lapidé sa maison lorsqu'il leur a dit de retourner pêcher car le ministre ne voulait pas bouger. Ce qu'il faut retenir c'est que la province a été obligée d'intervenir quand même dans le conflit.

(1845)

Le Nouveau-Brunswick a été obligé de proposer des solutions aux gens de sa région. C'était la conclusion du ministre des Pêches du Nouveau-Brunswick qui ne partage pas du tout l'option souverainiste qui est la mienne. Il dit que les députés provinciaux sont peut-être plus près, ils connaissent mieux les problèmes et c'est eux qui ont encaissé le coup cette fois-ci.

Je pense que ce n'est pas que cette fois-ci. De plus en plus, les gens vont interpeller leurs députés provinciaux. C'est vrai qu'ici, on est un peu déconnectés de la réalité. Excusez l'expression, ce n'est peut-être pas français, on est peut-être aveuglés, pas assez sensibilisés à la réalité des comtés.

J'ai toujours pensé qu'à un problème local existaient des solutions locales. Les gens avaient des solutions à proposer. Il y a présentement des négociations en cours, mais je ne m'étendrai pas trop sur le sujet cette fois-ci. Tout cela pour illustrer que bien malgré elles, les provinces se doivent d'être impliquées dans la gestion et ce, au premier rang avec celui qui crée la loi.

Puisque nous sommes encore dans le système fédéral, je le reconnais, peut-on être reconnus? De toute façon, nous aurons-quand je dis nous, je veux parler des provinces-un rôle de premier plan à jouer. Elles doivent rapporter à Ottawa quels sont les tenants et aboutissants, les demandes de leur population. Elles doivent négocier cela avec Ottawa. Elles doivent s'assurer qu'Ottawa a bien compris. Elles doivent parfois confronter leur vision des choses avec les autres provinces de façon à ce que le grand législateur qu'est Ottawa, quand il sera là, puisse être bien éclairé.

C'est ce qui est sous-entendu dans ce projet de loi, on veut établir une stratégie de gestion. On veut parler d'un système de gestion intégrée des océans avec tout ce qui en découle, mais il nous faut, dès le départ, camper la position avec les provinces et ça, on ne le voit pas. Ce n'est pas que de la sémantique, ce n'est pas qu'une guerre des mots qu'on veut faire ici, c'est vraiment affirmer le réel besoin de fonctionner de cette manière.

Ceux qui se disent désintéressés de ce type de partenariat resteront avec leurs relations avec le fédéral telles qu'elles sont. On doit savoir tout de suite, en partant, qu'il y a des joueurs qui sont différents, qu'il y aura des problèmes différents, des besoins différents. Je vais me restreindre à cela concernant ce groupe de motions.

Je surveillerai les débats ce soir. Je serai là demain si on en discute encore. Tant et aussi longtemps que le gouvernement n'aura pas compris le message, il est important de marteler le message et de le rappeler.

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir pendant quelques minutes sur ce projet de loi qui m'apparaît très révélateur des intentions profondes du gouvernement fédéral dans le contexte de l'évolution du fédéralisme canadien.

Cela m'apparaît une réponse évidente à tous ceux qui rêvent d'un Canada décentralisé qui pourrait peut-être constitué, pour un certain nombre de fédéralistes, une réponse aux aspirations légitimes du peuple québécois à sa souveraineté.

Une des réponses, dans une certaine école de pensée, consiste à dire que le Canada pourrait être davantage décentralisé, les provinces étant plus près de leurs électeurs ayant plus de pouvoir pour veiller au bien-être de la population.

Avec un projet de loi comme celui-là, on arrive, de peine et de misère, à faire mention de l'existence des gouvernements provinciaux. On peut mettre ça en parallèle avec ce qu'on veut faire, en termes de commission des valeurs mobilières, ce qu'on veut faire avec la Garde côtière où on décide ici sur des matières où les populations de chacune des dix provinces canadiennes sont touchées directement. Mais on voit, de peine et de misère, le gouvernement fédéral mentionner l'existence des gouvernements provinciaux au même titre que les communautés autochtones, les collectivités côtières ou d'autres intervenants.

(1850)

On le voit d'ailleurs dans un autre volet de l'activité de Pêches et Océans actuellement où on veut taxer les embarcations. Si vous avez le malheur d'avoir un pédalo, un canot, une chaloupe à rames, ou une planche à voile, si vous avez la fortune d'avoir un chalet, vous saurez que, dorénavant, votre plaisir sera diminué parce que vous devrez payer une tarification de 5 $ à 35 $ à l'État fédéral pour avoir cet humble équipement. Cela, sans qu'il y ait intervention directe des gouvernements provinciaux, encore moins de consultation, le gouvernement fédéral ayant l'intention de mettre de l'avant des partenariats avec toute espèce d'intervenants régionaux pour faire en sorte qu'il puisse collecter ces nouveaux deniers. Et sous le beau prétexte-on l'a entendu à quelques reprises du ministre jusqu'à maintenant-de la sécurité publique, vu qu'il y a des noyades, c'est bien sûr, quand on se promène sur l'eau, il peut y en avoir tous les ans.

Personne n'étant contre la vertu, c'est d'autant plus difficile, la sécurité publique étant le seul argument véritablement utilisé par le gouvernement pour, ainsi, en arriver à taxer d'une nouvelle façon l'humble citoyen dans ses loisirs, n'étant pas assuré que ceux qui ont vraiment des embarcations de plaisance, avec tous les coûts que cela sous-entend, quand on sait qu'il existe des bateaux de 20, 30, 40 et 50 pieds qui exigent d'avoir un pilote ou un capitaine à bord et que tout ça est du domaine privé. Moi, je serais curieux de voir comment ces gens sont véritablement taxés, comment ils viennent en aide au Trésor public, alors qu'on sait que la dimension profonde de l'opération qui concerne les plaisanciers est de faire en sorte que le fisc s'en trouve enrichi.

Pour revenir à ma prémisse, je voudrais simplement dire que le seul fait que le gouvernement fédéral aille de l'avant de cette façon contrevient complètement, et devrait faire réfléchir les cerveaux au Canada anglais qui se demandent quelle pourrait être la solution face à la mariée montante que constituent les souverainistes. Je pense qu'il n'y a pas ici actuellement, à Ottawa, malgré ce qu'en


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pensent certains, à l'édifice Langevin, une volonté de décentraliser la fédération canadienne. Il y a une volonté manifeste, de mieux en mieux articulée de faire en sorte que les vraies décisions se prennent ici, à Ottawa.

Pour les Canadiens, cela peut aller, parce qu'on sent que l'appartenance première du peuple canadien-anglais est ici, au gouvernement fédéral, dans une proportion, si on compare au Québec, de 20-80, selon les informations que nous avons. Une proportion de 20 p. 100 des Canadiens anglais disent que c'est leur gouvernement provincial qui est leur premier lieu d'affection, et 80 p. 100 disent que c'est le fédéral. Si vous arrivez au Québec, les pourcentages sont inversés: 20 p. 100 le fédéral, 80 p. 100 le gouvernement du Québec.

Donc, ça peut aller, une espèce de décentralisation qui est un rêve actuellement parce qu'on voit qu'il n'y a aucun embryon de ça. Mais quand on arrive au Québec, si jamais même on réussissait à décentraliser la fédération canadienne, ça contrevient aux aspirations profondes du peuple québécois, qui tentent, ce qui se confirme et se précise de plus en plus, uniquement, légitimement et de plus en plus avec éclatement, vers la souveraineté, c'est-à-dire le partenariat, c'est-à-dire la voie la plus juste, la plus légitime, la plus harmonieuse et sans doute la plus rentable pour les deux parties que constituent le Québec et le Canada dans un partenariat économique respectant les deux entités politiques.

(1855)

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote porte sur la motion no 1. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 1 est différé.

[Français]

M. Dubé: Monsieur le Président, j'aimerais m'informer auprès de la Présidence sur ce qu'on vient de faire. Nous avons voté sur la motion no 1, qui est l'une des quatre motions du groupe no 2. Donc, dans le groupe no 2, il reste les motions nos 2, 3 et 4 et évidemment, nous aimerions voter également de façon différente, je vous l'annonce, sur ces trois motions.

Le président suppléant (M. Kilger): Les votes sur les motions nos 2, 3 et 4 ne pourront être pris tant que n'aurons pas voter sur la motion no 1.

[Traduction]

Le groupe no 3 comprend les motions nos 5, 22, 38, 42, 43, 47, 48, 49, 51, 52, 57 à 64, 72, 74, 75, 89, 90 et 91.

L'hon. Fred Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) propose:

Motion no 5
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 2.1, dans la version française, par substitution, à la ligne 16, page 3, de ce qui suit:
«ne porte pas atteinte aux droits existants-ancestraux».
Motion no 22
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 23, par substitution, à la ligne 24, page 11, de ce qui suit:
«ministre et attestant».
Motion no 38
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 32, dans la version française
a) par substitution, à la ligne 11, page 16, de ce qui suit:
«ral, relativement aux activités ou mesures touchant les»;
b) par substitution, aux lignes 14 à 16, page 16, de ce qui suit:
«ment avec d'autres ministres ou organismes fédéraux ou d'autres personnes de droit public ou de droit privé, et après avoir pris en considération le point de vue d'autres ministres et organismes fédéraux, des gouvernements provinciaux et territoriaux et des organisations autochtones, des collectivités côtières et des autres personnes de droit public et de droit privé intéressées, y compris celles constituées dans le cadre d'accords sur des revendications territoriales, constituer des organismes de consul-»; et
c) par substitution, aux lignes 22 à 26, page 16, de ce qui suit:
«ministres et organismes fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les organisations autochtones, les collectivités côtières et les autres personnes de droit public et de droit privé intéressées, y compris celles constituées dans le cadre d'accords sur des revendications territoriales, établir des directives,».
Motion no 42
Qu'on modifie le projet de loi C-26 par suppression de l'article 32.1.
Motion no 43
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 33, dans la version française
a) par substitution, aux lignes 9 à 14, page 17, de ce qui suit:

3599

«a) coopère avec d'autres ministres et organismes fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les organisations autochtones, les collectivités côtières et les autres personnes de droit public et de droit privé intéressées, y compris celles constituées dans le cadre d'accords sur des revendications territoriales;»; et
b) par substitution, aux lignes 30 à 36, page 17, de ce qui suit:
«par la présente partie, le ministre peut consulter d'autres ministres et organismes fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les organisations autochtones, les collectivités côtières et les autres personnes de droit public et de droit privé intéressées, y compris celles constituées dans le cadre d'accords sur des revendica-».
Motion no 49
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 35
a) dans la version française, par substitution, à la ligne 10, page 18, de ce qui suit:
«autres, y compris les mammifères marins, et de»;
b) dans la version française, par substitution, aux lignes 21 et 22, page 18, de ce qui suit:
«ressources ou habitats marins, pour la réalisation du mandat du minis-»;
c) dans la version anglaise, par substitution, à la ligne 25, page 18, de ce qui suit:
«ment plans referred to in sections 31 and»;
d) par substitution, aux lignes 32 et 33, page 18, de ce qui suit:
«a) désigner des zones de protection marine;»;
e) dans la version française, par substitution, à la ligne 34, page 18, de ce qui suit:
«b) prendre toute mesure compatible avec l'objet de la désignation, notamment:»; et
f) dans la version française, par suppression des lignes 39 et 40, page 18.
Motion no 57
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 37, dans la version française, par substitution, à la ligne 15, page 19, de ce qui suit:
«l'exercice d'un pouvoir prévu à l'alinéa 35(3)b)».
Motion no 58
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 39, dans la version française, par substitution, à la ligne 11, page 20, de ce qui suit
«toute personne agissant sous la direction ou l'autorité».
Motion no 59
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 39.5, par substitution, à la ligne 39, page 22, de ce qui suit:
«du chef du Canada lorsqu'ils en excèdent le produit de l'aliéna-».
Motion no 60
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 39.6, par substitution, aux lignes 26 à 28, page 23, de ce qui suit:
«infliger, en sus de l'amende maximale prévue par la présente loi, une amende supplémentaire correspondant à son évaluation de ces avantages.»
Motion no 61
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 39.7, par substitution, à la ligne 32, page 23, de ce qui suit:
«profit de Sa Majesté du chef du Canada des objets saisis ou du».
Motion no 62
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 39.9, dans la version française
a) par substitution, aux lignes 19 et 20, page 24, de ce qui suit:
«a) s'abstenir de tout acte ou activité risquant, selon le tribunal, d'entraîner la continuation de»;
b) par substitution, à la ligne 22, page 24, de ce qui suit:
«b) prendre les mesures que le tribunal estime indi-»;
c) par substitution, à la ligne 27, page 24, de ce qui suit:
«c) publier, de la façon indiquée par le tribunal, les»;
d) par substitution, à la ligne 42, page 24, de ce qui suit:
«g) satisfaire aux autres exigences que le tribunal»; et
e) par substitution, à la ligne2, page 25, de ce qui suit:
«du tribunal le montant que celui-ci estime indiqué.»
Motion no 63
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 39.10, par substitution, aux lignes 3 à 7, page 25, de ce qui suit:
«39.10 (1) Lorsque, en vertu du Code criminel, il sursoit au prononcé de la peine, le tribunal, en plus de toute ordonnance de probation rendue au titre de cette loi à l'occasion du sursis, peut, par ordonnance, enjoindre».
Motion no 64
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 39.11
a) dans la version anglaise, par substitution, à la ligne 31, page 25, de ce qui suit:
«conviction in respect of an offence may be commenced at»; et
b) dans la version française, par substitution, à la ligne 22, page 25, de ce qui suit:
«deux ans à compter de la date où le ministre a eu».
Motion no 72
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 42
a) dans la version anglaise, par substitution, à la ligne 4, page 28, de ce qui suit:
«fishing zones of Canada and adjacent waters;»; et
b) dans la version française, par substitution, à la ligne 12, page 28, de ce qui suit:
«j) effectuer des études pour mettre à profit les».
Motion no 74
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 43, dans la version française
a) par substitution, aux lignes 32 et 33, page 28, de ce qui suit:
«peut à cet effet établir ou maintenir-notamment à bord de navires-des instituts de recherche, des labora-»;

3600

b) par substitution, à la ligne 36, page 28, de ce qui suit:
«fonctionnement. Il peut, de plus,»; et
c) par substitution, aux lignes 41 et 42, page 28, de ce qui suit:
«États, aux organismes internationaux et à toute autre personne.»
Motion no 75
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 45, dans la version française
a) par substitution, aux lignes 24 et 25, page 29, de ce qui suit:
«ves, à l'intention notamment des hydrographes, relativement à la collecte des données»; et
b) par substitution, aux lignes 32 et 33, page 29, de ce qui suit:
«États, aux organismes internationaux et à toute autre personne.»
Motion no 89
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 52, par substitution, à la ligne 12, page 31, de ce qui suit:
«suivant l'entrée en vigueur du présent article.»
Motion no 90
Qu'on modifie le projet de loi C-26 par adjonction, après la ligne 23, page 31, du nouvel article suivant:
«52.1 Sur la recommandation du ministre, le gouverneur en conseil peut, par règlement, prendre les mesures nécessaires à l'application de la présente loi, notamment:
a) établir des exigences et des normes concernant la qualité du milieu marin;
b) régir l'exercice des attributions conférées aux agents de l'autorité désignés par le ministre;
c) mettre en oeuvre les dispositions des accords conclus en vertu de la présente loi.»
Motion no 91
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 53, par substitution, aux lignes 24 à 30, page 31, de ce qui suit:
«53. En cas de sanction du projet de loi C-25, déposé au cours de la deuxième session de la trente-cinquième législature et intitulé Loi concernant les règlements et autres textes, y compris leur examen, enregistrement, publication et contrôle parlementaire, et modifiant certaines lois en conséquence, à».
M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ) propose:

Motion no 47
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 33, par substitution, à la ligne 30, page 17, de ce qui suit:
«par la présente partie, le ministre agit de concert avec les provinces et peut consul-».
Motion no 48
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 33, par substitution, à la ligne 30, page 17, de ce qui suit:
«par la présente partie, le ministre doit consulter les provinces et le comité permanent et peut consul-».
Motion no 51
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 35, par substitution, aux lignes 32 et 33, page 18, de ce qui suit:
«a) avec l'approbation du comité permanent, constituer des zones de protection marine, sous réserve du paragraphe (1);».
Motion no 52
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 35, par substitution, à la ligne 33, page 18, de ce qui suit:
«tuer des zones de protection des ressources halieutiques;».
[Français]

M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends à nouveau la parole pour me prononcer en faveur de la du projet de loi C-26, Loi concernant les océans du Canada.

Tous les Canadiens qui ont le moindrement suivi le cheminement de cette loi savent que les membres du Comité permanent des pêches et des océans ont travaillé très fort pour s'assurer que le projet de loi C-26 fasse l'objet d'un examen approfondi et minutieux.

Le Comité a convoqué comme témoins des représentants de plus de 30 groupes et organisations de partout au Canada au cours d'audiences qui ont duré plusieurs semaines. Le Comité ne s'est pas contenté de convoquer ces témoins; il a écouté ce que chacun d'eux avait à dire, il a écouté ce que l'ensemble des Canadiens ne cessent de dire depuis des années, que notre pays a besoin d'une loi qui assure une bonne gestion des océans en inscrivant dans la législation les concepts du développement durable, d'une approche fondée sur la méthode des écosystèmes et sur le principe préventif pour la conservation, la gestion et l'exploitation des ressources marines.

Les Canadiens veulent une loi qui reconnaît la valeur et l'importance des connaissances écologiques traditionnelles en matière de gestion des océans. En fait, pas un seul des témoins et en fait, absolument personne n'a dit: «Nous n'avons pas besoin d'une Loi sur les océans du Canada.» Ce qu'ils ont tous dit, par contre, c'est que la loi pouvait être renforcée. C'est exactement ce qui a été fait.

[Traduction]

Chose également importante, le comité a écouté les provinces et les territoires et proposé un amendement qui garantit la collaboration avec leurs gouvernements de même qu'avec les organisations autochtones, les communautés côtières et les groupes d'intérêt concernés par la gestion des océans.

Nous devrions les remercier du travail qu'ils ont accompli. Les députés ont devant eux un projet de loi qui est tourné vers l'avenir et qui est fondé sur de solides principes. En élaborant le projet de loi, nous tenions à ce qu'il soit bâti sur les fondations les plus solides. Ces fondations permettront de prendre de meilleures décisions en matière de gestion des océans.


3601

(1900)

C'est pour cette raison que le gouvernement a examiné chaque article, chaque ligne et chaque mot du projet de loi tel qu'on en a fait rapport, pour s'assurer que les fondations sont bien solides et que ce le texte montre bien aux Canadiens que le gouvernement comprend et respecte ce qu'ils veulent pour les océans entourant le Canada.

Dans son examen, le gouvernement a découvert de légères erreurs de transcription, des possibilités d'amélioration de la qualité et de la clarté du libellé ainsi que de légères fautes de concordance entre les versions française et anglaise du texte. Les motions nos 5, 22, 38, 42, 43, 49, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 72, 74, 75, 89, 90 et 91 proposent des modifications de forme. Bien que ces modifications de forme puissent paraître mineures, le gouvernement a reconnu que, sans elles, on risquait de faire des interprétations erronées de la loi.

La loi permettra aux Canadiens de travailler ensemble à façonner les meilleures solutions, sur les plans national et local, aux problèmes de développement durable des ressources de nos océans. Les diverses modifications de forme proposées par le gouvernement rendront la loi plus claire.

Le critère de base d'une loi du Parlement, c'est la certitude et la flexibilité. Nous croyons que la Loi sur les océans du Canada établit un bon équilibre entre ces deux principes de certitude et de flexibilité. Nous exhortons tous les députés à voter en faveur des motions nos 5, 22, 38, 42, 43, 49, 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 72, 74, 75, 89, 90 et 91.

Les motions nos 47 et 48 proposées par le Bloc québécois modifient la même ligne du texte du projet de loi de deux façons différentes. Que veut vraiment le Bloc québécois? Cet article du projet de loi énonce le thème général des consultations et donne au ministre la possibilité de consulter avec n'importe qui ou tout le monde sur les questions relatives à la Partie II du projet de loi.

La motion no 47 propose que le ministre et les provinces consultent tous les autres intervenants sur les questions relatives à la Partie II du projet de loi. Pourquoi les provinces consulteraient-elles sur des questions qui ne relèvent pas de leur compétence?

Je recommanderais au Bloc de tenir davantage compte des rôles et des missions attribués par la Constitution, et des lois ordinaires par opposition à la procédure de modification de la Constitution. Il me semble que les amendements proposés par le Bloc cherchent à apporter de façon indirecte des modifications constitutionnelles qui n'ont pas leur place ici. Nous observons là des modifications larvées touchant la répartition des pouvoirs entre le fédéral et les provinces. Cela n'est pas acceptable dans les projets de loi ordinaires qui sont présentés à la Chambre.

Les Canadiens n'ont pas demandé qu'il y ait dix responsables de la gestion de nos océans. Ils demandent qu'il y en ait un. Par conséquent, il faut rejeter la motion no 47.

La motion no 48 prévoit que le ministre consulte toutes les provinces et le comité permanent en exerçant le mandat que lui confère la Partie II de ce projet de loi. Cela est contraire à la souplesse de cet article, qui prévoit que le ministre consulte les provinces ou les groupes sur une question qui les intéresse. Il n'est pas toujours nécessaire de consulter tout le monde sur une question qui n'intéresse peut-être qu'une province, un territoire ou un groupe.

En outre, cette motion oblige le ministre à consulter le comité permanent dans l'exercice du mandat que lui confère la Partie II de ce projet de loi. Cela veut dire que le comité permanent va constamment participer à la prise de décisions du ministère des Pêches et des Océans.

Je rappelle à la Chambre ce que j'ai dit au sujet des modifications constitutionnelles intempestives. Cet amendement bloquiste semble ne tenir aucun compte du partage des pouvoirs constitutionnels. Il soulève des questions constitutionnelles qu'il vaudrait mieux traiter ailleurs et autrement qu'entre les lignes d'un projet de loi ordinaire sur les océans.

D'ailleurs, dans son analyse du projet de loi, le comité permanent a déjà prévu un article permettant au comité permanent de réexaminer la mise en oeuvre de cette loi dans trois ans. C'est pourquoi il faut rejeter la motion no 48 dans sa forme actuelle.

En outre, avec les motions nos 51 et 52, le Bloc propose d'apporter deux amendements distincts à la même ligne du même article 35. Ces amendements prévoient que le ministre des Pêches et Océans obtienne l'approbation du comité permanent pour exercer son mandat de constituer des zones de protection marine.Il restreindrait aussi ces zones à la protection des ressources halieutiques.

Cela va complètement à l'encontre du témoignage présenté au comité permanent par des Canadiens de tout le pays. Il y a plus de ressources halieutiques et d'habitats dans la mer qu'on en exploite et il y en a beaucoup plus qui méritent d'être protégés. Par conséquent, je demande à tous les députés d'appuyer la loi en rejetant les motions nos 47, 48, 51 et 52 et en appuyant le passage de la Loi concernant les océans du Canada à la prochaine étape du processus législatif.

(1905)

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, ce que le secrétaire parlementaire oublie ou ne voit pas là-dedans, quand il dit que ce n'est pas la place pour parler de Constitution, c'est que je n'ai pas essayé de constitutionnaliser les propositions que j'ai faites, et je ne parle pas non plus de constitutionnaliser.

Ce que je leur dis, c'est qu'on a présentement des problèmes et le fédéral n'est pas outillé pour faire face à la situation. Je leur dis de regarder en face, de regarder les provinces qui sont prêtes à jouer, qu'ils vont s'éviter bien des troubles. C'est facile à comprendre. On n'a pas besoin de faire des réunions constitutionnelles là-dessus. Mais de jouer à l'autruche, c'est pire. On ne peut se mettre la tête dans le sable en disant qu'on ne peut pas toucher à cela, que c'est la


3602

Constitution. Quand on a des problèmes, on ne se cache pas la tête dans le sable.

Il faut juste une petite ligne pour dire qu'on collaborera avec les provinces, mais qu'on va le mettre en ligne directe, qu'on va leur parler. S'ils disent qu'ils ne veulent pas impliquer les dix provinces, je comprends. L'Alberta est peut-être moins préoccupée par les océans que le Québec ou la Nouvelle-Écosse peuvent l'être. Ça ne fait pas mal et ça n'enlève rien au reste du Canada. Ils s'en serviront. Ça veut dire que les réunions iront très vite. Il n'y aura que les provinces concernées qui iront à ce moment-là. Et celles qui ne veulent pas s'en occuper parce qu'elles ont d'autres problèmes, qu'elles préfèrent confier ça à Ottawa et qu'elles n'ont pas le temps de toucher à ça, que ça fait leur affaire et qu'elles vivent avec ça, alors, tant mieux pour elles.

Ce que je dis, c'est que ça ne fait pas notre affaire et ce n'est pas reflété là-dedans. Je n'ai pas demandé de récrire la Constitution. J'ai seulement demandé de tenir compte du fait qu'il fallait travailler avec les provinces. On n'a pas le choix.

D'autres choses sont importantes à surveiller là-dedans. Par exemple, dans la motion 51, on demande qu'il y ait un processus de consultation, que ça revienne devant le comité. Si le secrétaire parlementaire nous indique que l'autre Chambre s'est déjà penchée là-dessus et dit qu'il faudrait que ça revienne à tous les trois ans, ça ne fait pas mal quand même de le mettre là. J'aimerais mieux savoir que ce sont les gens élus ici dans cette Chambre qui vont indiquer ce qu'il faut faire dans ce projet de loi. C'est nous qui, dans six mois ou un an, allons faire face de nouveau à la population pour une élection. Je ne pourrai pas arriver à Gaspé et dire que je n'ai pas pu toucher à ça, que cela avait déjà été décidé dans l'autre Chambre. Ça ne fonctionne pas.

Les mots et le temps me manquent. Il y a beaucoup de choses à dire, mais le nouveau président du comité des pêches, quand il se lèvera, parce que c'est un homme plein de bon sens, du moins il l'était encore jusqu'à la semaine dernière, il devra reconnaître lui aussi qu'entre gens de bonne volonté, on peut s'entendre.

Ce qu'on présente comme motion n'a justement que cela pour but. Regardez partout, je ne parle pas de constitutionnaliser des choses. Je pense que si vous voulez refaire une loi, profitons-en donc pour la rendre intéressante. J'ai déjà dit au sujet de ce projet de loi, lors de la seconde lecture, que le principe pouvait être bon, qu'il était intelligent que la main droite sache ce que fait la main gauche.

(1910)

Je me suis demandé comment il se faisait que ça prenait une loi pour qu'ils se parlent entre ministères fédéraux. Mais quoi qu'il en soit, elle est là cette loi et on tente de la bonifier. On leur dit qu'on est là, on sait qu'il existe des problèmes, et on sait qu'il y aura des problèmes dans les relations avec les provinces. On leur mentionne ça et on nous dit qu'on essaie de parler de Constitution. Je n'essaie pas de parler de Constitution, j'essaie de régler des problèmes.

La motion no 52 parle de zones de protection marine-je suis obligé d'aller un peu plus vite-alors que nous voudrions plutôt parler de zones de protection de ressources halieutiques. Pourquoi? Je pense que cela peut se comprendre facilement.

L'objectif premier de cette loi est de gérer les océans certes, mais la deuxième chose-et là j'en profite pour le noter au secrétaire parlementaire qui pourra commenter là-dessus par la suite-c'est que dans la Constitution, il est prévu que les pêches relèvent de la juridiction fédérale. Je serais tenté d'apporter des modifications là-dedans, mais on y reviendra.

Il y a d'autres zones de gestion qui ne sont pas décrites dans la Constitution. Il y a des zones plus grises. Et pour éviter des problèmes, je voudrais qu'on parle plus précisément des ressources halieutiques. Si on veut rentrer dans l'autre domaine, zones de protection marine, il faudrait d'abord s'entendre avec les provinces qui constituent le Canada pour savoir ce qu'on veut cacher dans cette expression, parce qu'elle n'est pas claire.

Y a-t-il imbroglio ou quiproquo, ne serait-ce qu'au niveau de l'environnement? Ah, mon Dieu, le mot est lâché! Il y a des problèmes au sujet de l'environnement même dans le Cabinet fédéral, du moins le précédent, celui de février. Je peux en parler, les deux n'étant plus là.

Au comité parlementaire, l'ancien ministre des Pêches, M. Brian Tobin, quand je lui ai posé la question à savoir ce qu'il en était des relations entre le ministère des Pêches et le ministère de l'Environnement, m'a répondu: «Yvan, c'est le yin et le yang.» À l'époque, le ministre de l'Environnement était Mme Copps, celle qui sera en élection le 17 juin.

Si deux ministères ne s'entendent pas sur les définitions, s'ils ne s'entendent pas entre eux, et là on est juste ici, à Ottawa, si deux personnes faisant partie de la même équipe, les libéraux, ne s'entendent pas, deux personnes qui sont là depuis longtemps-M. Tobin et Mme Copps ont travaillé longtemps ensemble-que doit-on en conclure? Ce n'est pas seulement un problème de relations personnelles. On connaît le verbe coloré de M. Tobin. J'ai pris sa réponse pour du «cash», c'est écrit dans le hansard.

Je tente de leur donner une chance, et je leur dis: «Ne parlons pas de zones de protection marine, parlons de zones de protection des ressources halieutiques, car du moins, ça, c'est clair.» Mais dans l'autre chose, ce n'est pas clair. Qu'en serait-il des relations entre les provinces vis-à-vis le fédéral sur cette même définition? Y a-t-il eu des rencontres entres les fonctionnaires, les hauts fonctionnaires et les sous-ministres pour essayer d'éclaircir cette appellation? Je ne pense pas.

Ce projet de loi était rendu en deuxième lecture lorsque l'ancien ministre des Pêches a échappé cette phrase devant moi, que c'était


3603

le yin et le yang entre son ministère et le ministère de l'Environnement qui était représenté par Mme Copps.

Je reprendrai la parole tout au long de la soirée, mais vous voyez que sur un seul groupe de motions, on pourrait débattre des heures et des heures. C'est ce qu'on a fait en comité. Malheureusement, j'ai dû retenir certains de mes arguments parce que lorsque nos amendements sont défaits en comité, on ne peut pas les représenter ici. Vous comprendrez que j'en ai bien long à raconter encore et j'ai bien des choses à dire pour informer la population.

(1915)

[Traduction]

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le député de Gaspé. Il fait partie du Comité permanent des pêches et des océans. J'apprécie certainement son apport aux travaux du comité depuis deux ans, car il y présente un point de vue valable. Je sens que le député de Gaspé et bien des Québécois sont profondément déçus. J'ai abordé cette question précédemment, lorsque nous discutions du premier groupe d'amendements.

Il est grand temps que le gouvernement fédéral se retire de nombreux secteurs dont il a actuellement la responsabilité ou dont il prétend être responsable et qu'il laisse les provinces et, dans certains cas, les autorités municipales prendre des décisions plus conformes au désir de la population qui devra vivre avec leurs conséquences.

Ainsi, en Colombie-Britannique, le gouvernement du Canada prend une décision importante au sujet des ressources halieutiques de la côte. C'est une décision avec laquelle les habitants de la Colombie-Britannique seront les seuls à composer. Cette décision consiste à inclure une composante halieutique autochtone dans les revendications territoriales des traités modernes visant la Colombie-Britannique.

Les politiciens de l'Ontario, du Québec et de la Nouvelle-Écosse n'auront pas à subir les conséquences de cette décision, mais ils ont certainement eu un grand rôle à jouer dans le processus décisionnel. Je sens la déception du député de Gaspé. Parce que je suis originaire de la Colombie-Britannique et que je sais à quel point cette question est délicate dans ma province, je comprends la déception du député.

Cependant, quand on examine la Loi sur les océans, force est d'admettre que le gouvernement fédéral a parfois à jouer un rôle qui dépasse les compétences municipales et provinciales. Les océans sont clairement du ressort du gouvernement fédéral, notamment lorsqu'il est question des stocks chevauchants ou des espèces fauniques et des stocks de poisson migrateurs.

Je ne vois pas comment les gouvernements provinciaux pourraient prendre des décisions à ce chapitre, dans la conjoncture actuelle. Le gouvernement fédéral a l'obligation impérieuse de consulter les provinces. Les décisions fédérales causent souvent de grandes difficultés aux provinces, des difficultés d'ordre économique notamment.

Si les députés ne me croient pas, qu'ils regardent ce qui est arrivé à la pêche au poisson de fond à Terre-Neuve. C'est à cause de l'incurie du gouvernement fédéral si cette pêche s'est effondrée. En effet, le gouvernement fédéral a poussé à peu près tout le monde à se lancer dans la pêche au poisson de fond en accordant des subventions à des usines de transformation et pour la construction de bateaux, avec le résultat que l'on sait: il n'y a plus de poisson et c'est la province qui en fait les frais. La province traverse de graves difficultés économiques à cause de la mauvaise gestion du gouvernement fédéral. Les provinces ont le droit d'être consultées.

J'ai des réserves à formuler au sujet du libellé de ces amendements. Nous allons donc proposer des amendements aux motions nos 48 et 90.

Je propose:

Que l'on modifie la motion no 48 en supprimant ce qui suit: «les provinces [. . .]
et peut consulter d'autres»
Je propose:

Que l'on modifie la motion no 90 en substituant les mots «lignes directrices» au mot «exigences».
(1920)

Le président suppléant (M. Bonin): La présidence va étudier les amendements.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, je vous rends hommage parce que je sais que vous faites votre possible, vous remplacez au pied levé un de vos confrères. C'est remarquable.

Quand on parle de la Loi concernant les océans du Canada, d'aucuns pourraient se demander ce que vient faire le député de Lévis dans le débat, étant donné que le comté de Lévis est loin de l'océan Atlantique, loin de l'océan Arctique et encore plus loin de l'océan Pacifique. Mais selon la définition même d'un océan, d'après la jurisprudence, c'est tout ce qui concerne l'eau salée. Or, j'informe mes collègues qui ont, eux aussi, l'air surpris de ma définition que l'eau salée pénètre dans le Saint-Laurent jusqu'à mon comté.

C'est pour ça que tout à l'heure, lorsque je parlais de l'ingérence encore plus grande du fédéral, sa poursuite d'étendre son bras dans le but de gérer tout le monde, quand je vois qu'il emprunte la définition d'océan qui signifie eau salée qui avance, alors je vois arriver le bras du fédéral jusque dans ma région sous le pont de Québec.

Lorsqu'on voit que ce projet de loi couvre également la gestion de la Garde côtière, il se trouve que la Garde côtière est très importante dans le fleuve Saint-Laurent. Vous comprendrez que nous sommes inquiets de voir apparaître des zones maritimes. Pour cette raison, j'aime bien l'amendement proposé par le député de Gaspé qui parle de ressources halieutiques. Que sont des ressources halieutiques?


3604

Dans mon comté, j'ai fait des interventions à ce sujet parce que, encore aujourd'hui, quelqu'un, avant d'arriver ici, à Ottawa, me dit: «M. le député, je n'ai pas une grosse instruction, mais on dirait que le gouvernement, les fonctionnaires ou ceux qui rédigent les lois font exprès pour nous embêter avec des grands termes.» Je prends l'exemple des ressources «halieutiques». Ce n'est pas le terme qui le préoccupait dans mon bureau, mais il faut le préciser.

On a un rôle, nous, en tant que députés dans cette Chambre, d'informer correctement la population. Alors que signifie «ressources halieutiques»? Une ressource halieutique, c'est mieux qu'une zone maritime ou qu'une zone marine parce ça concerne la ressource vivante, les poissons, toute espèce animale qui vit à l'intérieur des océans, dans le fond comme à la surface. Et on a le devoir de préciser cela au moment de la rédaction d'une loi.

Mais cela représente beaucoup d'espèces. Je ne les ai pas dénombrées, mais, dans le fleuve, dans le golfe, on pêche encore de l'anguille et de l'esturgeon. On voit que la ressource se fait de plus en plus rare parce qu'elle a été mal protégée dans les zones du Canada à l'intérieur des 200 milles parce qu'à un moment donné le contour des océans n'est pas toujours tout droit, n'est pas rectiligne.

Mais lorsque la notion d'océan s'étend jusqu'au fleuve, on a le devoir d'intervenir et d'apporter ces précisions. C'est pour ça que je souscris pleinement aux propositions d'amendements du député de Gaspé, qui connaît beaucoup le domaine de la pêche et des océans. Il est né dans le milieu, il habite le milieu et, je le vois aller depuis trois ans en cette Chambre, dans les comités, à l'intérieur du caucus, il nous informe constamment parce que parfois nous, les gens de la ville, on mange du poisson de différentes espèces.

(1925)

On est contents de l'avoir, mais il faut se préoccuper de le conserver correctement. En même temps, il y a beaucoup de gens impliqués dans cette industrie et certains d'entre eux ont été aidés par les gouvernements provinciaux.

J'ai travaillé longtemps avec l'ancien ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, Jean Garon. Je l'accompagnais dans les réunions et j'entendais les pêcheurs trouver important qu'il y ait une intervention du gouvernement provincial là-dedans parce que le gouvernement fédéral ne suffisait pas à lui seul au niveau des usines de transformation.

Il y a beaucoup de domaines où les provinces ont un rôle à jouer si elles le veulent. Le Québec a essayé de le jouer maintes et maintes fois. Il le joue encore parce que c'est une ressource importante. Je me souviens des ressources, qui aujourd'hui on dirait vont de soi, comme par exemple le crabe, mais qui à une époque n'étaient pas exploitées ainsi. Le crabe était uniquement une ressource exportée au Japon, qui faisait l'affaire des Japonais mais qu'on ne connaissait pas assez. Aujourd'hui, on sait par des promotions, par des transformations particulières, que c'est un aliment maintenant recherché par les Québécois, peut-être même trop recherché parce qu'à un certain moment, on en manque.

Parlons aussi de l'anguille. J'en parlais tout à l'heure. C'est une ressource qu'on trouve dans le fleuve, dans la zone qu'on considère justement comme une zone marine en rapport avec la présente loi, qui n'est pas assez connue par notre population ici mais qui, par contre, ravit les Européens, particulièrement les Allemands qui aiment ce poisson qui est une ressource qu'on pourrait exploiter davantage.

Ce sont donc toutes sortes de bonnes raisons pour que le gouvernement fédéral, même s'il a la responsabilité des pêches au plan constitutionnel, s'associe aux provinces dans une optique de partenariat pour mieux développer cette ressource et permettre aux provinces de s'ajouter comme partenaires pour aider les personnes travaillant dans l'industrie de la pêche.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Je suis prêt à rendre une décision sur les amendements proposés par le député de Skeena. D'abord:

Que l'on modifie la motion no 48 par la suppression de ce qui suit: «les provinces [. . .] et peut consulter d'autres».
Ensuite:

Que l'on modifie la motion no 90 en substituant les mots «lignes directrices» au mot «exigences».
Les deux amendements sont recevables.

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote porte sur la motion no 5. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 5 est reporté. Le vote différé portera aussi sur les motions nos 22, 38, 42, 43, 49, 57 à 64, 72, 74, 75, 89, 90 et 91.

(1930)

[Français]

Nous allons maintenant procéder au groupe de motions no 4, qui comprend les motions nos 7, 11, 12, 13, 15, 16 et 31.


3605

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ) propose:

Motion no 7
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 5, par substitution, à la ligne 16, page 4, de ce qui suit:
«base est la limite extérieure de cet espace, qu'il fasse partie ou non du territoire d'une province.»
Motion no 11
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 15, par substitution, à la ligne 14, page 7, de ce qui suit:
«ressources qui s'y trouvent, appartiennent, lorsqu'ils ne sont pas compris dans le territoire d'une province, à Sa».
Motion no 12
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 15, par substitution, à la ligne 15, page 7, de ce qui suit:
«Majesté du chef du Canada ou à Sa Majesté du chef d'une province, selon que le fonds et le sous-sol sont adjacents ou non à ceux de la mer territoriale qui sont contigus au territoire de la province.»
Motion no 13
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 15, par substitution, à la ligne 15, page 7, de ce qui suit:
«Majesté du chef du Canada ou à Sa Majesté du chef d'une province, selon que le fond et le sous-sol sont compris ou non dans le territoire d'une province.»
Motion no 15
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 19, par substitution, à la ligne 25, page 8, de ce qui suit:
«nent à Sa Majesté du chef du Canada ou à Sa Majesté du chef d'une province, selon que le plateau continental est compris ou non dans le territoire d'une province.»
Motion no 16
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 19, par substitution, à la ligne 25, page 8, de ce qui suit:
«nent à Sa Majesté du chef du Canada ou à sa Majesté du chef d'une province, selon que le plateau continental est adjacent ou non au fonds et au sous-sol de la mer territoriale qui sont contigus au territoire de la province.»
Motion no 31
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 28, par substitution, à la ligne 2, page 15, de ce qui suit:
«s'applique ni directement ni indirectement aux lacs et aux rivières ainsi qu'aux fleuves et à leurs estuaires.»
M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je demande avec insistance aux députés de la Chambre de rejeter les motions nos 7, 11, 12, 13, 15, 16 et 31 soumises par l'honorable député de Gaspé. Ces motions ont pour objet de miner la Loi sur les océans du Canada qui, sous sa forme actuelle, se conforme strictement aux codes et usages du droit international.

[Traduction]

Le Canada a une longue histoire maritime au cours de laquelle il a pris toutes sortes de mesures allant de la diplomatie tranquille dans l'élaboration d'accords internationaux visant à l'adoption d'un ensemble de règlements internationaux complets sur les océans jusqu'à des initiatives déterminées pour la protection des stocks chevauchants et des stocks de poisson migrateurs.

Le projet de loi dont nous discutons constitue un élément majeur de la stratégie globale visant à intensifier les efforts du gouvernement du Canada en matière de conservation, de protection et de développement durable de nos océans et de leurs ressources.

Le premier objectif du projet de loi C-26 consiste à reconnaître, en droit canadien, les droits et responsabilités du Canada, État côtier, en matière de zones maritimes et à délimiter la zone sur laquelle le Canada étendra ses initiatives en matière de conservation et de protection.

La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, entrée en vigueur le 14 novembre 1994, prévoit la délimitation et l'établissement de zones maritimes nationales et définit les droits des États côtiers et des autres États dans ces zones.

La Loi sur les océans met en oeuvre les dispositions sur les zones maritimes de la convention des Nations Unies. Il ne s'agit pas d'une mesure législative par laquelle le Canada ratifiera la convention des Nations Unies. Les députés se souviendront que, dans le discours du Trône de février, le gouvernement a indiqué son intention de déposer une mesure législative habilitante permettant au Canada de ratifier la convention. Cette mesure sera présentée au Parlement à une date ultérieure.

Les articles que le Bloc québécois veut modifier servent à délimiter les zones maritimes du Canada en mer en les distinguant des eaux intérieures conformément à la codification contenue dans la convention des Nations Unies.

Les amendements que le Bloc propose dans le groupe de motions à l'étude changeraient tout cela. Je renvoie à ce que j'ai déjà dit au sujet de la nécessité de respecter les rôles et les missions juridiques. En adoptant les propositions d'amendement du Bloc, le Canada irait délibérément à l'encontre de la convention internationale que le Canada a travaillé d'arrache-pied à faire adopter.

La motion no 7 est inutile et trompeuse. Elle renvoie à l'article 5, qui décrit comment est calculée une ligne de base et qui respecte la convention des Nations Unies. La motion dénote une confusion entre la délimitation des frontières internes d'un pays et la délimitation des frontières internationales.

En droit international, et dans le projet de loi C-26, le concept de ligne de base ne sert pas à délimiter les frontières internes d'un État. Ce concept permet de fixer des lignes de base servant de référence pour délimiter les frontières maritimes des États en conformité du droit international. Par conséquent, les amendements proposés sont trompeurs. Ils ne contribuent pas à améliorer le projet de loi mais plutôt à le rendre plus flou.


3606

Les motions nos 11, 12 et 13 du Bloc s'appliquent à la zone économique exclusive du Canada et essaient d'insinuer que cette zone et le fond pourraient être compris dans le territoire d'une province. La zone économique exclusive débute à la limite extérieure de la Mer territoriale et elle s'étend à une distance de 200 milles nautiques de la ligne de base ou du littoral. Par définition, en vertu du droit international, la zone économique exclusive est nettement au-delà des eaux provinciales. Pourtant, les amendements des bloquistes voudraient nous inciter à modifier ce projet de loi important pour laisser entendre le contraire.

Les motions bloquistes nos 15 et 16 concernant le plateau continental font les mêmes insinuations trompeuses, à savoir que le plateau continental pourrait se trouver dans les limites d'une province. Il est nettement au-delà de ces limites. Si l'on apportait les amendements proposés par les bloquistes à ce projet de loi, la nouvelle loi concernant les océans du Canada irait à l'encontre du droit international. Ce n'est pas bien ni légal.

La motion no 31 proposée par le Bloc québécois vise à modifier l'article 28 qui détermine la zone d'application de la stratégie de gestion des océans et indique clairement que les océans comprennent les estuaires et les eaux côtières. Cet article précise que la partie II de la loi, intitulée «Stratégie de gestion des océans» ne s'applique pas aux lacs, fleuves et rivières.

(1935)

La motion bloquiste vise à exclure l'application d'une stratégie aux estuaires, ce qui est ridicule du fait que la zone où se mêle l'eau douce et l'eau salée constitue un élément important des écosystèmes océaniques et est également importante pour le bien-être socio-économique des Canadiens. En appliquant la stratégie de gestion des océans, on ferait en fait fi des principes de gestion des écosystèmes qui sont énoncés dans cette loi.

C'est pourquoi j'exhorte les députés de rejeter les motions bloquistes relatives aux zones maritimes du Canada et à la stratégie de gestion des océans. Les accepter serait enfreindre le droit international. Cela limiterait également l'efficacité des efforts que nous déployons pour conserver et protéger les écosystèmes océaniques.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, ce qu'on doit comprendre et ce que les gens de l'autre côté ont de la difficulté à saisir, c'est que, lorsqu'ils nous disent que c'est pour se rendre conforme au droit international qu'ils veulent adopter ce type de définitions, une des premières phrases qu'on retrouve dans le projet de loi, dès le point de départ, c'est pour permettre au Canada d'affirmer sa souveraineté sur ses eaux. Ce que je veux mentionner par là, c'est qu'on peut aussi affirmer notre souveraineté, on est souverains dans ce qu'on veut faire, dans ce qu'on veut dire.

On peut donc, tout en respectant l'esprit de la nouvelle Convention du droit de la mer, agir un peu avec imagination. On peut calquer ce projet de loi sur les volontés et les besoins des participants ou des gens qui forment le Canada. Je le répète, ce sont les provinces qui forment le Canada.

Alors, le problème que je tente de faire refléter dans ce projet de loi, c'est que pour moi, les pouvoirs, les juridictions et la définition de territoires marins semblent être une zone grise. Au comité, j'avais confié d'emblée que j'avais une certaine inquiétude à voir le gouvernement fédéral procéder aussi rapidement avec ce type de projet de loi et pour moi, il restait des questions en suspens.

Je reviens toujours sur le fait que le ministre des Pêches de l'époque, M. Tobin, m'avait promis que ce n'était pas pour flouer aucune province que le projet de loi a été rédigé. Ce projet de loi se voulait une stratégie qui permettrait de créer une forme de partenariat. Lorsqu'on veut être le partenaire de quelqu'un, on prend le temps de l'écouter. On prend le temps de répondre à ses insécurités, parce que le projet de loi que nous sommes en train d'étudier, on devra vivre avec un bon bout de temps. On devra surtout travailler avec les mots qui y seront inscrits.

Si, comme représentant du Québec aujourd'hui, je pars avec une inquiétude, comment peut-on croire qu'il y a eu bonne foi de l'autre côté? Si, avant de signer le contrat, je leur dis que j'ai de la difficulté avec tel article et qu'on devrait l'éclaircir, mais qu'on me répond que ce n'est pas nécessaire, eh bien, si ce n'est pas grave, selon eux, pourquoi ne l'inscrit-on pas?

Toutes les motions que j'ai présentée, ou presque-et je n'ai pas l'intention d'en refaire la lecture pour le bénéfice des gens, car de toute façon, je ne dispose pas de suffisamment de temps-mais elles ont pour but de préciser que ce projet de loi ne portera pas atteinte à des droits actuellement détenus, peut-être pas nécessairement manifestés par les provinces, mais qui sont là. Alors, pourquoi se presse-t-on tellement à vouloir balayer cela et à essayer de parler le moins possible des provinces? Chaque fois que j'avance là-dedans, si on parle d'une définition de territoire, j'ajoute «pourvu que cela ne brime pas les droits existants ou les droits passés qui étaient détenus par les provinces».

(1940)

J'essaie d'éclaircir au maximum le fait qu'on a besoin de choses limpides à ce propos. Mais comment se fait-il que chaque fois on nous ramène au point de départ en disant non? On dirait que c'est la politique du moindre effort. On refuse de bouger sur des choses, mais ce ne sont pas de petites choses. Peut-être que les mots me manquent ce soir. Si ça semble important pour nous, s'il y a des inquiétudes, qu'ont-ils fait pour lever ces inquiétudes? Rien.

Ils nous disent que ce n'est pas important et qu'il n'y a pas de danger là-dedans. S'il n'y a pas de danger, qu'on l'écrive, qu'on modifie l'article du Règlement, qu'on le mentionne. Ce serait beaucoup plus clair par la suite. Pourquoi est-ce que j'insiste aussi dans la motion no 31 sur le fait disant que cela ne «s'applique ni directement ni indirectement aux lacs et aux rivières ainsi qu'aux fleuves et à leurs estuaires»? Parce qu'on en a beaucoup chez nous. Parce qu'on aimerait bien avoir notre mot à dire et parce qu'au Québec les relations qu'on doit avoir avec les différents interve-


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nants sont déjà assez compliquées. Quand on pense aux municipalités, au ministère de l'Environnement, pourquoi le fédéral viendrait, par ce projet de loi, jouer avec ses gros sabots? Pourquoi?

On me dit que je n'ai pas raison de m'inquiéter. Ce n'est pas une raison pour que j'arrête de m'inquiéter, de me dire: «Non, non, non, il n'y a pas de danger là, ne t'occupe pas de ça.» On demande clairement que ce projet de loi ne touche ni aux rivières, ni aux lacs, ni aux fleuves, ni aux estuaires. Quand on me dit que ça ne serait pas sérieux de ne pas inclure les estuaires, je veux bien croire que le premier verre d'eau qui se met à dérouler du Saguenay va rouler, il va passer en face de Gaspé, il va passer à un moment donné en face de la Nouvelle-Écosse puis il va passer en face de Terre-Neuve.

Je veux bien croire que c'est une chaîne. On ne leur dit pas qu'on ne veut pas collaborer avec eux. À chaque phrase, quand on parle de stratégies de relations, on indique que s'ils veulent que ça marche, il faut que le partenaire, qui s'appelle la province ou les provinces concernées, puisse être impliqué au premier niveau. Aussitôt qu'une idée germe dans la tête du ministre, il en parle tout de suite avec son homologue provincial. Quand une idée provient de la tête du haut fonctionnaire fédéral, qu'il puisse en parler tout de suite avec son homologue pour voir s'il y a un problème.

Quand on arriverait avec ça, on verrait que chacun chercherait à partager les problèmes, mais pour cela, il faut que ce soit bien compris et bien entendu qu'il y a un bout de territoire qui est à nous et que c'est à cause de cela qu'on va partager les responsabilités, c'est à cause de cela qu'on va partager la gestion. Ce dont je m'aperçois, c'est que les libéraux veulent tout simplement tirer le tapis de leur côté, en nous disant: «Ne t'occupe pas de cela, il n'y a pas de problème.» Un instant, il y en a, des problèmes.

Seulement pour revenir au préambule du collègue d'en face, le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches, quand il disait que c'était pour arriver à la modernité du droit international, les États-Unis ont aussi lu la Convention du droit de la mer. Ils l'ont lue et leur façon de gérer, c'est écrit, est que les États-Unis sont souverains concernant leurs océans, mais c'est spécifié aussi que les États côtiers, c'est-à-dire les États membres des États-Unis, ont une responsabilité. Je pense que c'est trois milles à partir de la côte.

Qu'en est-il du partage ou de la reconnaissance du territoire marin avec les provinces?

(1945)

Sans vouloir partir un contentieux, j'attire l'attention des députés d'en face sur le fait que si on veut se mettre à l'ère du modernisme, il faudrait peut-être suivre l'exemple des États-Unis où il y a déjà un bon moment qu'on confie la gestion aux États. Par cela, les États membres des États-Unis parlent avec le grand patron à Washington. Si on m'enlève tout en partant, de quoi pourrais-je leur parler?

Je le rappelle encore. Au mois de décembre, le gouvernement a adopté une motion disant que le Québec était une société distincte. Il a dit qu'il tenterait de la constitutionnaliser et de la faire transparaître dans toutes les autres lois canadiennes. Il a la chance de reconnaître le fait que le Québec est intéressé à gérer ses problèmes lui-même et à participer avec eux à la gestion, mais il nous le refuse.

Ne soyez pas surpris, monsieur le Président, si je me lève encore ce soir, parce que j'ai encore bien des choses à dire là-dessus, et je le ferai tant qu'ils n'auront pas compris. Je pense que la veillée sera très longue, ils ont la tête très dure.

[Traduction]

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, je dois encore une fois m'incliner devant la compétence du député de Gaspé. Il a fait de l'excellent travail au Comité permanent des pêches et des océans.

J'examine les amendements proposés dans ce groupe, qui sont tous proposés par mon collègue, et ils me posent beaucoup de difficulté. Il est clair qu'en tant que gouvernement central, le gouvernement fédéral a compétence sur les eaux du Canada. Le gouvernement fédéral est le dépositaire de la souveraineté du Canada. Les provinces sont les dépositaires intermédiaires de cette souveraineté, mais, en définitive, le gouvernement fédéral exerce la souveraineté.

Lorsque nous parlons de choses comme la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et d'autres questions maritimes de nature internationale, il est indiqué que le gouvernement fédéral exerce la compétence et puisse légiférer et agir dans les intérêts du Canada.

Les députés réformistes reconnaissent la justesse du raisonnement sur lequel reposent les amendements. Les Canadiens de l'Ouest et des provinces de l'Atlantique partagent le même point de vue, c'est-à-dire que le gouvernement fédéral est trop envahissant, trop gros, trop puissant, qu'il puise trop d'argent dans les poches des contribuables et qu'il est présent dans de trop nombreux domaines. Cependant, nous reconnaissons qu'il joue un rôle juste et légitime dans le cas présent. C'est pourquoi nous ne pouvons malheureusement pas accorder notre appui à ces amendements.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, c'est la première occasion que j'ai de prendre la parole sur le projet de loi C-26, la loi traitant du droit des océans, si je puis dire. Cependant, je suis un peu déçu. J'ai suivi un cours de droit à l'Université Laval et le député de Vancouver Quadra de l'époque était cité quotidiennement en droit constitutionnel, dès les premiers cours de droit qu'on nous donnait à l'Université Laval.

Le monde est bien petit puisque 20 ans plus tard, je me retrouve assis en face du député de Vancouver Quadra que j'ai toujours admiré et que j'admire toujours pour sa rigueur et ses principes qui ont conduit toute sa vie. C'est indéniable. J'ai vu des jugements de la Cour suprême dans lesquels on citait le député de Vancouver Quadra. Je me souviens de Bora Laskin et de Brian Dickson, deux grands juges de la Cour suprême, qui avaient le respect du professeur qu'était le député de Vancouver Quadra.

Je le rencontre aujourd'hui, quelque vingt années plus tard, et je suis quand même surpris de voir qu'il prêche actuellement le contraire de ce qu'il a toujours soutenu du temps où il était professeur d'université. La politique oblige, dit-on, et je pense que le député de Vancouver Quadra ne fait pas exception à cet égard. Il


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m'aurait ébloui s'il avait, encore une fois, fait exception, mais tel n'est malheureusement pas le cas. Même les structures les plus fortes ont des limites, et je pense que c'est le cas du député de Vancouver Quadra. Cela dit, je le respecte énormément et j'espère qu'il ne prendra pas ombrage de mes propos, vous avez tout mon respect, collègue.

(1950)

Cependant, lorsque le député de Gaspé fait une approche que je qualifierais de néo-constitutionnelle du projet de loi, du menu législatif qu'on a devant nous, c'est vrai, comme le disait le député du Parti réformiste, c'est vrai, comme le soutient le député de Vancouver Quadra, que la navigation, les pêches et océans sont de compétence fédérale. En 1867, les Pères de la confédération, qui avaient à l'esprit la navigation, la préservation des ressources halieutiques, des ressources marines, la sécurité, le transport international, le transport marin, il est sans doute vrai que les Pères de la confédération avaient décidé de conférer au gouvernement fédéral cet aspect de la géographie canadienne.

Mais les provinces n'avaient jamais-le député de Vancouver Quadra me reprendra là-dessus s'il n'est pas d'accord-songé à renier même leur présence ou leur existence historique sur cette portion des océans ou des mers qui était adjacente ou, comme le Québec, intérieurement incluse dans leur territoire.

Je n'apprendrai rien au député de Vancouver Quadra sur ce sujet. Par exemple, à la pointe aux Anglais sur la Côte-Nord, il y a une flotte, celle de Walker, qui est allée s'y échouer. C'est un patrimoine historique. C'est un patrimoine qu'on estime, nous, Québécois. Il y a des milliers de plongeurs qui, année après année, vont fouiller dans les vestiges situés à la pointe aux Anglais.

Dans l'esprit des Pères de la confédération, ce n'était pas ce qu'ils visaient, les épaves de bateaux coulés au fond de la mer, lorsqu'ils ont décidé de conférer au gouvernement fédéral la navigation, la sécurité, etc. Donc l'approche du député de Gaspé en ce sens c'est que, oui, c'est vrai que la compétence fédérale peut être sauvegardée, sauf que, dans les temps modernes, un peu en citant l'exemple des Américains, il serait peut-être à propos maintenant de remettre les pendules à l'heure et dire que la concertation a bien meilleur goût dans ce domaine et que, effectivement, dans le sous-sol marin, dans le sol marin, entre parenthèses, il pourrait y avoir des compétences partagées ou au moins de la concertation ou de la consultation.

Avec le projet de loi C-26, on procédera dorénavant unilatéralement. On s'avance dans le jardin avec la débroussailleuse et on coupe tout, les mauvaises herbes comme le bon grain. C'est ce que dit le député de Gaspé. Tant qu'à faire quelque chose, essayons donc une fois pour toutes de mettre au rancart, de mettre de côté cette fameuse dispute constitutionnelle, 1991-1992, droit civil Québec, navigation et pêcherie relèveront du fédéral, puis essayer, justement en accord avec ce qui a été voté comme société distincte juste avant les Fêtes, de dire qu'il y a peut-être lieu, surtout dans des domaines où ça peut être obscur, où l'interprétation générale de la Constitution peut porter à interprétation.

Le député de Vancouver Quadra se rendra compte, et il les connaît mieux que moi, que certains jugements passés ont conduit à des aberrations. Lorsqu'on a décrété, par exemple, que les tramways de Montréal étaient des ouvrages à l'avantage du Canada, vers 1906, je pense qu'on s'était trompé, ce n'est pas ce que les Pères de la confédération voulaient lorsqu'ils ont décrété que les ouvrages à l'avantage général du Canada pouvaient être de compétence fédérale.

Lorsqu'on est arrivé avec le contenu, par exemple, des émissions de télévision, on a commencé par dire le contenant, le moyen de transport, les tours, les fils, on a associé ça avec le télégraphe pour arriver une bonne journée à définir ce qui appartenait maintenant à la compétence fédérale au sujet d'une émission de télévision, de radio ou peu importe.

(1955)

C'est allé de fil en aiguille, mais toujours dans un sens, du côté du fédéral. Cela faisait dire à Maurice Duplessis la phrase célèbre suivante, que «la Cour suprême du Canada était comme la tour de Pise, elle penchait dangereusement toujours du même bord».

Ce serait peut-être le temps, aujourd'hui, que les parlementaires, les ministres du Cabinet, les gens du pouvoir essaient de rétablir un certain équilibre en reconnaissant aux provinces, peut-être pas un pouvoir décisionnel absolu, mais qu'ils reconnaissent, dans les faits, dans les textes, une concertation, l'élaboration de politiques communes et, finalement, le respect et la reconnaissance de l'existence de l'autre et vice versa.

C'est ce que les politiciens refusent de faire ici, et c'est choquant, non seulement pour les gens du Québec, car j'imagine que ceux de la Colombie-Britannique ont aussi des interrogations. On ne parle pas ici d'une question de langue ou d'histoire. On parle de gestion de ressources, ressources qui sont, dans ce cas-ci, les océans, les mers, l'Atlantique, le Pacifique et l'Arctique. On parle de partenariat.

À mon avis, c'est l'occasion rêvée qui est offerte au gouvernement de montrer ce qu'il a dans le ventre lorsqu'il nous fait des promesses et des discours. Il nous dit qu'on va s'entendre, qu'on va discuter de choses. Eh bien, c'est le temps ou jamais de le faire. Peut-être qu'à l'automne, il sera déjà trop tard. Si ce qu'on entend partout se concrétise, vous aurez peut-être raté la dernière chance que vous aviez de satisfaire vos partenaires provinciaux. Je crois que le député de Vancouver Quadra devrait essayer d'influencer son gouvernement pour qu'il puisse, une fois pour toutes, se rendre à la raison, parce que je sais que vous n'en manquez pas.

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, je ne pensais pas intervenir, mais à force d'entendre mes collègues parler de gros bon sens, cela a fini par attirer mon attention et m'influencer.

Je trouve qu'on nage en pleine contradiction. Il y a quelques mois, on avait un référendum au Québec et quelques jours avant la tenue du référendum, on a vu le premier ministre, encore une fois, comme l'avait fait un autre premier ministre quelques jours avant le référendum de 1980, monter sur les tribunes et, la main sur le coeur, faire de grandes promesses à l'effet que oui, on allait changer la fédération canadienne, que oui, on allait tenir compte des intérêts et


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des demandes des Québécois et, comme dirait le leremier ministre, pouf! c'est disparu. Quelques mois après, tout est disparu, tout s'est envolé.

Dans le débat présent, on entend les députés ministériels nous dire qu'ils ne peuvent pas faire autre chose que ce qu'ils se préparent à faire, parce qu'ils veulent le respect de la Constitution, le respect de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Mais que ces choses sont bien dites! Comment se fait-il que tout à coup, le respect de la Constitution devient quelque chose d'absolu, un critère incontournable? Mais qu'ont fait les gouvernements qui se sont succédé, conservateurs et libéraux, depuis 1867? On a eu le temps de les voir aller.

Qu'est-ce qu'ils ont fait durant toute cette période? À partir de leurs pouvoirs de dépenser, ils se sont introduits dans les champs de compétence des provinces. Et comme disait mon collègue de Gaspé, ils ont mis leurs gros sabots dans les juridictions des provinces. Et là, la Constitution n'était plus importante. Ce qui était important, c'était le pouvoir de dépenser.

Mais lorsque les députés du Bloc québécois ont revendiqué, au nom du gros bon sens, au nom de la volonté du Québec de prendre sa place, d'exercer de l'influence sur les lois de ce pays, alors là, la seule chose qui est importante, c'est le respect de la Constitution.

(2000)

Il n'y a pas très longtemps, quelque temps après le débat référendaire, il y a eu un discours du Trône. Qu'y disait-on? On y disait que le fédéral ne s'ingérera plus dans aucune compétence provinciale. Je suis d'accord que c'est une compétence qui, semble-t-il, appartient au fédéral, mais l'esprit était présent. On aurait pu penser qu'à la suite au discours du Trône il y avait une volonté de transformer le régime fédéral.

Il est évident, comme disait mon collègue de Trois-Rivières plus tôt, qu'il n'y en a pas de volonté. Il n'y a pas de volonté de changement. C'est à croire que, dans ce pays, les députés fédéralistes, les politiciens fédéralistes sont incapables de tirer une leçon du passé, même un passé récent. On passe notre temps à leur envoyer des messages et jamais ils ne portent fruit. C'est encore une occasion que le gouvernement se prépare à manquer, à laisser passer.

Ils auraient la chance de démontrer concrètement qu'ils peuvent s'ajuster, qu'ils peuvent transformer la fédération canadienne, comme se plaît à le dire le premier ministre. Mais ils sont incapables de le faire parce qu'ils ont une vision différente de ce pays. Ils ont une vision unitaire, il faut que le gouvernement qui exerce le plus grand nombre de pouvoirs soit situé à Ottawa et les autres gouvernements, les gouvernements des provinces n'aient finalement que des juridictions très partielles sur de petites choses sans importance.

À chaque fois qu'on est confrontés à un vrai projet de loi, on est toujours en face de ce même dilemme, des discours d'une part et quand arrive la réalité, la marchandise n'est jamais livrée.

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi C-26 et particulièrement sur la motion no 7. Ce projet de loi ne parle pas de la participation des provinces. On sait que les océans sont une vaste richesse naturelle au sujet de laquelle le gouvernement du Québec aurait avantage à avoir son mot à dire.

Dans le passé, on a vu une iniquité assez évidente concernant par exemple les droits de pêche. On a vu aussi une iniquité assez évidente quand le gouvernement fédéral a décidé unilatéralement de développer les ressources pétrolières par le grand projet Hibernia. Sans le consentement du Québec, on a décidé de mettre en valeur le pétrole près de Terre-Neuve en disant que cela favoriserait Terre-Neuve, que c'était un projet de développement pour les régions de l'Est.

Nous, du Québec, étions carrément contre parce que nous savions d'avance que Hibernia serait un projet qui n'aurait presque pas de retombées pour le Québec. Il est certain que le Québec aurait refusé de subventionner ce grand projet de Hibernia. Nous savons très bien que le projet Hibernia coûtera aux Québécois et Québécoises la jolie somme de deux à trois milliards de dollars, alors que les retombées ne seront certainement que de quelques centaines de millions de dollars. Et le Québec n'a pas été consulté relativement à ce projet.

Encore une fois, je voudrais dire que j'appuie la motion de mon collègue de Gaspé qui demande à ce que les provinces aient un droit de regard, qu'elles soient au moins informées de ce qui vient. À l'heure actuelle, on n'a aucune information. Le gouvernement fédéral, comme il a l'habitude de faire avec ses grands pieds, décide unilatéralement d'agir dans de grands projets sans consulter les provinces. Le Québec est souvent pénalisé par ces grands projets fédéraux. On ne les voit pas venir.

(2005)

Je me souviens très bien, j'étais ici en cette Chambre quand on a décidé de lancer le projet Hibernia. À ce moment-là, je siégeais comme indépendant. Nous étions un petit groupe de huit députés indépendants, et on a su le vendredi matin que le Parti libéral, le Parti conservateur et le NPD, qui était représenté ici en grand nombre, avaient décidé unilatéralement de déposer ce projet de loi un vendredi matin en catimini parce qu'ils ne voulaient pas qu'on en parle.

Alors mon collègue de Richelieu et moi-même avons su cela le matin et nous sommes entrés ici en cette Chambre pour contester ce projet. Nous savions très bien que ça allait à l'encontre des intérêts du Québec. Nous avons été le seul parti, nous n'étions même pas un parti, mais comme on le sait, quand il s'agit de grands projets régionaux favorisés par le gouvernement fédéral, c'est trop facile, parce que les trois grands partis nationaux se mettent toujours de connivence, ils passent cela en douce et qui en souffre? Ce sont souvent les provinces.

Ici je ne parle pas simplement pour le Québec. Je pense que la Colombie-Britannique, qui est très exposée par rapport à ses océans, aurait aussi le droit d'être consultée, et informée au moins avant que le gouvernement fédéral n'agisse dans les grands dossiers qui touchent les océans. Comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, il y a d'énormes richesses dans les océans et il faut absolument que les provinces soient consultées afin que l'on puisse participer de différentes façons et afin également qu'on puisse


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accepter, ou refuser dans quelques cas, de s'impliquer dans des projets dont on sait qu'ils ne seront jamais rentables pour nous.

Quand nous parlons d'équité, en tant que Québécois, nous ne demandons pas la charité, nous demandons tout simplement l'équité. Nous ne voulons pas de dons, nous voulons être capables de participer et de profiter, comme de bons citoyens, à faire en sorte qu'on ait notre part équitable. Il n'est pas normal, à l'heure actuelle, que le Québec étant une des provinces les plus industrialisées au Canada ait le plus haut taux de chômage et de bien-être social. Il n'est pas normal que cela arrive.

Si cela arrive aujourd'hui, c'est parce qu'il y a quelque chose qui n'a pas fonctionné dans le système fédéral. On ne parle pas de dons, on parle simplement d'équité. On parle d'être capables de pouvoir participer dans les grands projets afin d'en bénéficier, pas plus que les autres provinces, mais au moins de façon égale aux autres provinces.

La meilleure preuve qu'on a est toujours par les résultats. On dit toujours que le résultat est la preuve de la réussite ou non. Si nous avons plus de bien-être social et plus de chômage au Québec que dans les autres provinces, excepté les petites provinces des Maritimes, c'est parce que nous avons été, en quelque sorte, défavorisés, mais pas sur le plan des dons. On n'attend pas de dons, on ne veut pas de charité. On veut tout simplement être capables de participer aux grand projets qui nous sont favorables, en profiter correctement et, autant que possible, ne pas participer à ceux qui ne nous sont pas favorables. C'est dans ce sens que j'interviens pour informer les Québécois que le gouvernement fédéral, encore une fois, est en train de nous en passer une petite vite, en excluant le Québec du débat en ce qui concerne la réglementation des océans.

Encore une fois, je le répète, ce n'est pas rien. Il y a des richesses extraordinaires dans les océans et il faut absolument que le Québec puisse être capable de participer aux décisions.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote porte sur la motion no 7. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 7 est reporté.

(2010)

[Français]

La prochaine mise aux voix porte sur la motion no 11. Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

[Traduction]

Le vote suivant porte sur la motion no 12.

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 12 est différé.

Le vote suivant porte sur la motion no 15. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.


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Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 15 est différé.

Le vote suivant porte sur la motion no 31. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 31 est différé.

Nous passons maintenant au groupe de motions no 5, qui inclut les motions nos 8, 9, 14, 17 à 21, 23, 32, 33, 34 et 35.

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ) propose:

Motion no 8
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 8, par substitution, à la ligne 34, page 4, de ce qui suit
«porter atteinte aux droits des provinces ou à ceux acquis avant le 4».
Motion no 9
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 9, en supprimant les lignes 17 à 24, page 5.
Motion no 14
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 15, par substitution, à la ligne 17, page 7, de ce qui suit:
«porter atteinte aux droits des provinces ou à ceux acquis avant le 4».
Motion no 17
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 19, par substitution, à la ligne 27, page 8, de ce qui suit:
«porter atteinte aux droits d'une province ou à ceux acquis avant le 4».
Motion no 18
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 20, par substitution, à la ligne 29, page 8, de ce qui suit:
«20. (1) À l'extérieur des limites des provinces, dans le respect de leurs droits, et sous réserve des règlements d'appli-».
Motion no 19
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 21, en supprimant les lignes 5 à 12, page 10.
Motion no 20
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 23, par substitution, à la ligne 7, page 11, de ce qui suit:
«23. (1) Sous réserve du paragraphe (4), dans toute procédure, vaut preuve».
Motion no 21
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 23, par substitution, à la ligne 21, page 11, de ce qui suit:
«(2) Sous réserve du paragraphe (4), dans toute procédure, vaut preuve».
Motion no 23
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 23, par adjonction, après la ligne 34, page 11, de ce qui suit:
«(4) Les certificats visés au présent article ne valent pas preuve des renseignements qui y sont énoncés s'ils ont pour effet de porter atteinte aux droits et aux compétences législatives d'une province.»
Motion no 32
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 29, par substitution, aux lignes 3 à 15, page 15, de ce qui suit:
«29. Le ministre, de concert avec les gouvernements provinciaux et en collaboration avec d'autres ministres fédéraux et les personnes de droit public et de droit privé intéressées, dirige et favorise, dans le respect des droits et des compétences législatives des provinces, l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie nationale de gestion des écosystèmes marins des eaux faisant partie du Canada ou sur lesquelles le droit international reconnaît à celui-ci des droits souverains qui échoient à Sa Majesté du chef du Canada.»
Motion no 34
Qu'on modifie le projet de loi C-98, à l'article 31, par substitution, aux lignes 30 à 43, page 15, de ce qui suit:
«31. Le ministre, de concert avec les gouvernements provinciaux et en collaboration avec d'autres ministres fédéraux et les personnes de droit public et de droit privé intéressés, dirige et favorise, dans le respect des droits et des compétences législatives des provinces, l'élaboration et la mise en oeuvre de plans pour la gestion intégrée des activités qui s'exercent dans les eaux marines faisant partie du Canada ou sur lesquelles le droit international reconnaît à celui-ci des droits souverains qui échoient à Sa Majesté du chef du Canada.»
Hon. Fred Mifflin (Ministre des Pêches et Océans, Lib.) propose:

Motion no 33
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 29, dans la version française, par substitution, aux lignes 4 à 10, page 15, de ce qui suit:
«d'autres ministres et organismes fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les organisations autochtones, les collectivités côtières et les autres personnes de droit public et de droit privé intéressées, y compris celles constituées dans le cadre d'accords sur des revendications territoriales, dirige et favorise l'élaboration et la mise en».
Motion no 35

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Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 31, dans la version française, par substitution, aux lignes 31 à 37, page 15, de ce qui suit:
«d'autres ministres et organismes fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les organisations autochtones, les collectivités côtières et les autres personnes de droit public et de droit privé intéressées, y compris celles constituées dans le cadre d'accords sur des revendications territoriales, dirige et favorise l'élaboration et la mise en».
M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole au sujet du projet de Loi concernant les océans du Canada et des amendements qui ont été proposés à cette mesure législative.

Je dois revenir à un point que j'ai déjà fait valoir, mais peut-être avec plus de précision. J'ai déjà dit que le rôle ou la mission de la Chambre n'était pas d'éprouver les modifications constitutionnelles, qu'elles viennent du directeur ou des processus actuellement prévus dans les relations intergouvernementales et entre les ministres fédéraux et provinciaux. Il s'agit d'un projet de loi qui vise les océans du Canada et son intégrité devrait être respectée sous réserve de critères acceptables.

Les articles que le Bloc québécois désirent modifier dans ce projet de loi ont trait aux droits et compétences du Canada sur la mer territoriale, la zone contiguë, la zone économique exclusive et le plateau continental tels qu'ils sont codifiés en vertu de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.

(2015)

Ces amendements sont basés sur la fausse impression que cette loi pourrait avoir des conséquences pour les droits et les limites des provinces. Pourtant, aucune mesure législative ordinaire de la Chambre ne peut modifier la répartition constitutionnelle des pouvoirs. Il y a d'autres endroits et d'autres processus où cela peut se faire si telle est la volonté du pays.

Je ne prendrai pas le temps de la Chambre pour énumérer nos droits et nos responsabilités dans chacune des zones maritimes du Canada, puisque c'est dans le projet de loi C-26. Toutefois, je ferais remarquer que les éléments de la loi, y compris la déclaration et la reconnaissance de nos droits dans toutes les zones maritimes mentionnées, sont parfaitement conformes aux codes et pratiques internationaux.

Le Bloc québécois voudrait modifier la Loi sur les océans de façon à laisser entendre que les provinces ont des droits et des compétences sur les zones maritimes du Canada. En vertu de la loi internationale, toutefois, ces droits sont très nettement la prérogative de l'État côtier, à savoir le Canada. Rien n'empêche que l'on s'efforce de promouvoir des changements constitutionnels, par des modifications directes ou autres, mais cela ne nous appartient pas; cela peut se faire à un autre moment et dans un autre contexte. Ce serait certainement déformer la loi que d'essayer d'y ajouter des modifications de cette nature.

Les motions nos 8 et 9 du Bloc laissent entendre que les provinces ont des droits en mer au-delà de la ligne de base. Le principe de la ligne de base n'est pas utilisé en droit international ou dans le projet de loi C-26 pour déterminer les frontières internes d'une nation. Plutôt, la ligne de base sert de ligne de référence à partir de laquelle la nation définit ses limites maritimes nationales conformément au droit international.

Le droit international confère à l'État côtier les droits sur les eaux au-delà de la ligne de base. Le Canada détient un titre souverain sur les eaux à l'intérieur de sa ligne de base et ses eaux territoriales. Ces eaux font partie intégrante du territoire du Canada. En outre, contrairement à ce qu'on laisse entendre dans les motions nos 8 et 9, le Canada détient des droits de propriété sur le fond et le sous-sol des eaux non comprises dans le territoire d'une province.

La motion no 14 s'applique à la zone économique exclusive du Canada. Elle cherche à dire qu'il existe, ou pourrait exister, des droits provinciaux souverains sur cette zone économique exclusive. Cependant, en vertu du droit international, la zone économique exclusive appartient au Canada. À ces fins, la zone économique exclusive est située bien au-delà des eaux provinciales. Le droit international, codifié dans la Convention des Nations Unies, attribue à l'État côtier, soit le Canada, les droits et responsabilités à l'égard de la zone économique exclusive; ces droits sont conférés au Canada et non aux provinces.

Les motions nos 17, 18 et 19 du Bloc concernent le plateau continental et repose sur la même assertion erronée en termes juridiques, soit que le plateau continental se trouverait à l'intérieur des limites d'une province et que la province pourrait exercer ses droits à l'égard de ce plateau. Je renvoie à nouveau les députés d'en face à l'article 77 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Cet article stipule clairement que l'État côtier, le Canada, possède des droits souverains sur l'exploration et l'exploitation du plateau continental, ses ressources non biologiques et les autres espèces sédentaires, c'est-à-dire immobiles sur le fond ou au-dessous du fond. Ces droits sont dévolus non pas aux provinces, mais à l'État côtier, en vertu de la convention internationale.

Je demande donc aux députés de rejeter les motions nos 8, 9, 14, 17, 18 et 19 du Bloc québécois se rapportant aux zones maritimes du Canada. Les appuyer reviendrait à détruire la crédibilité internationale du Canada, à enfreindre le droit international et à démolir le travail accompli par le Comité permanent des pêches et des océans.

Les motions nos 20, 21 et 23 du Bloc renvoient à l'article 23 de la Loi sur les océans où il est question de certificats d'emplacement géographique délivrés par le ministre des Affaires étrangères et par le ministre des Pêches et des Océans. Ces certificats sont des documents juridiques délivrés par le ministre, ou sous son autorité, et qui attestent où se trouvait un lieu à l'époque en cause.

Dans le cas du certificat délivré par le ministre des Affaires étrangères, le document attesterait qu'un lieu se trouvait dans les eaux intérieures, dans la mer territoriale, dans la zone contiguë, dans la zone économique exclusive ou sur le plateau continental. Dans le cas du certificat délivré par le ministre des Pêches et des


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Océans, le document attesterait que le lieu décrit se trouve dans un espace maritime où le droit de la province désignée dans le certificat s'appliquait. Je le répète, ces certificats ne s'intéressent qu'à l'emplacement géographique du lieu en cause. Ils ne touchent pas un mot des pouvoirs qui y sont exercés.

(2020)

Une loi solide doit reposer sur une base solide. Les instruments de base que sont ces certificats visent à permettre aux tribunaux du pays d'assurer la bonne conduite de leurs affaires.

Il est clair que certains députés n'ont pas saisi la nature des certificats dont il est question à l'article 23 de la Loi sur les océans. Par les amendements qu'ils proposent aux motions nos 20, 21 et 23, les bloquistes laissent entendre que le gouvernement fédéral pourrait, par le truchement des certificats délivrés par le ministre des Affaires étrangères ou le ministre des Pêches et des Océans, empiéter sur les droits ou les compétences législatives d'une province. Les certificats prévus dans cette mesure ne portent pas sur la compétence législative, mais plutôt sur des endroits géographiques, des degrés de latitude et de longitude. Selon la Constitution, leur objet ne va pas au-delà de cela.

Comme on l'a déjà mentionné, et je le répète, les frontières et les revendications des provinces sont des questions constitutionnelles qui ne peuvent être et ne seront pas modifiées par une mesure législative et administrative comme celle qui traite de la délivrance de ces certificats.

J'invite donc tous les députés à rejeter les motions présentées par le Bloc, car leur adoption rendrait la nouvelle loi sur les océans du Canada contraire au droit international.

Par ailleurs, la motion no 32 du Bloc, qui fait partie du même groupe, propose notamment que le ministre des Pêches et des Océans et les provinces jouent un rôle de leader dans l'élaboration d'une stratégie de gestion des océans. De même, la motion no 34 propose que le ministre des Pêches et des Océans et les provinces jouent un rôle de leader dans l'élaboration de plans de gestion intégrés. Les Canadiens ont demandé un leader, mais ils n'en veulent pas dix. Avec une telle proposition, nous serions toujours où nous en sommes aujourd'hui, c'est-à-dire dans un dédale de lois et de responsabilités, alors que personne ne serait chargé de faire collaborer tous les participants.

Le processus ne tient pas les provinces à l'écart. Le ministre s'engage à collaborer avec les provinces, les territoires, les organisations autochtones, les collectivités côtières et de nombreux autres intéressés. L'engagement transcende tout le projet de loi. Il faut préserver le rôle de leader du ministre. Ne serait-ce que pour cette raison, nous devons rejeter les motions nos 32 et 34.

Pour renforcer davantage le libellé du projet de loi, je propose, dans les motions nos 33 et 35, qu'on modifie la version française de l'article 29 de manière à ce qu'elle soit conforme au texte anglais, afin de clarifier et de supprimer les redondances et de rendre le projet de loi conforme à la formulation employée dans la Constitution et dans d'autres lois.

Qui plus est, pendant que le comité permanent étudiait le projet de loi, le député de Gaspé, en face, a exprimé des réserves relativement à l'emploi de l'expression «communautés côtières». On a remplacé cette expression par «collectivités côtières», afin de tenir compte des réserves exprimées par le député.

J'exhorte donc les députés à accepter les modifications de forme que le gouvernement propose dans les motions nos 33 et 35, à rejeter les motions nos 8, 9, 14, 17, 18 et 19 que le Bloc propose afin de tenter de modifier les frontières provinciales, ainsi que les motions nos 20, 21 et 23, qui sont fondées sur l'hypothèse erronée selon laquelle le gouvernement fédéral cherche à modifier les compétences fédérales-provinciales et les frontières des provinces. Ce n'est pas son intention et il ne pourrait le faire avec ce projet de loi.

Il faudrait aussi rejeter les motions nos 32 et 34 du Bloc, pour permettre au ministre des Pêches et des Océans d'assumer le leadership, comme les Canadiens l'ont clairement demandé.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, pour la seconde fois ce soir, je dois encore m'opposer à mon idole de jeunesse. Il ne faudrait pas qu'il voit là quelque chose de dirigé contre sa personne, bien au contraire.

Lorsque le député de Vancouver Quadra dit que la Chambre des communes n'est pas l'endroit pour débattre de Constitution, j'ai beaucoup de difficulté avec cela. Je sais, comme lui, que, traditionnellement, les débats constitutionnels se tiennent généralement au Château Laurier, et ce qui s'y passe véritablement, comme modification, cela se fait la nuit, entre minuit et 6 heures le matin. C'est là que la Constitution de 1982 a été tramée, que René Lévesque s'est fait emberlificoter; ce qu'on a appelé traditionnellement la nuit des longs couteaux. Je sais tout ça et le député de Vancouver Quadra ne m'apprend rien là-dessus. Je comprends ça.

Qu'avons-nous fait ici, avant les Fêtes, lorsqu'on a adopté la motion sur la société distincte? Qu'avons-nous fait ici et que faisait le gouvernement actuel, le gouvernement du député de Saint-Maurice, le petit gars de Shawinigan, lorsqu'il disait, pendant la campagne référendaire, qu'il allait faire des ententes administratives? Le chef de l'opposition officielle à Québec est en train de faire carrière sur les ententes administratives. Si cela n'émane pas du Parlement actuel, d'où cela vient-il?

(2025)

Je ne suis pas d'accord lorsqu'on dit que la Chambre des communes ne doit pas servir à faire indirectement ce qu'on ne peut faire directement. Je suis obligé de rappeler au député de Vancouver Quadra que les quelques fois où on l'a fait directement, on aurait peut-être été mieux de le faire indirectement, parce que le résultat n'était pas quelque chose dont on peut se vanter. Je lui fais remarquer d'ailleurs que la Constitution de 1982 attend toujours la signa-


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ture du premier ministre du Québec et une ratification de l'Assemblée nationale du Québec.

Je suis d'accord que la compétence en matière de pêches, océans, navigation, sécurité, survol des plates-bandes marines, si l'on peut dire, est fédérale. C'est vrai, on ne nie pas cela, le député a raison. Mais on lui fait une suggestion, car sincèrement, je n'y crois pas.

Hier soir, j'écoutais le premier ministre à l'émission Le Point de Radio-Canada; il était prêt à faire indirectement ce que le député nous reproche de tenter de faire. Il était prêt à conclure des ententes administratives, à discuter de ces choses, ici en Chambre. Il était prêt à tout hier soir. Devant les caméras, le premier ministre est excellent pour vouloir tout et son contraire et encore.

Une voix: Il est bon pour noyer le poisson.

M. Lebel: Oui, il pêche des poissons morts, parce qu'ils les noient à tous les coups.

Le livre rouge du Parti libéral parlait pourtant de décentralisation, d'ententes administratives. C'est ce qu'on soulève ici. Vous êtes dans un domaine de compétence fédérale, c'est le temps d'en faire des ententes administratives avec les provinces. Alors que vous êtes forts pour conclure des ententes administratives lorsque vous voulez empiéter dans le domaine des compétences provinciales, essayons d'inverser la vapeur et de conclure des ententes administratives dans vos champs de compétence. Vous trouvez cela moins drôle; ce n'est pas l'endroit, on ne fait pas ça ici. Il ne faut pas faire indirectement ce qu'on ne peut faire directement.

Vous parliez des droits économiques. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre, s'il vous plaît. J'hésite à interrompre le député, mais par contre, je veux rappeler à la Chambre que toute intervention doit être faite par l'entremise de la Présidence et non directement à nos collègues d'un côté de la Chambre à l'autre, même s'il s'agit d'anciens collègues, d'étudiants, de professeurs, etc. de longue date.

M. Lebel: Donc, monsieur le Président, je ne peux même pas faire directement ce que je ne peux pas faire indirectement, c'est compliqué. Lorsqu'on parle d'intégration, je vous citerai un passage de quelque chose qui a été écrit récemment. Il y a deux types d'intégration à assurer dans une entité politique si on veut en garantir la stabilité et la cohésion: l'économie et la politique.

L'intégration économique suppose que l'activité économique, dans tous ses aspects, peut se poursuivre à l'intérieur de l'entité sans contrainte tarifaire ni autre entrave commerciale et qu'il y a une interaction économique appréciable à l'intérieur de toute la zone.

Donc, lorsqu'on parle d'entité économique qu'on doit avoir pour se tenir politiquement, c'est ça: relations avec les pêcheurs, les exploitants du milieu, ceux qui sont les gestionnaires du milieu et surtout ceux qui vivent du milieu, car c'est eux les plus directement touchés. Voilà pour le premier aspect, l'intégration économique. Par votre entremise, je voudrais dire au député de Vancouver Quadra qu'il ne veut pas considérer cela.

Il y a aussi l'intégration politique qui veut dire que les citoyens de l'entité politique partagent de nombreuses valeurs et convictions communes et qu'ils s'identifient aux institutions politiques, lois et politiques gouvernementales par lesquelles ces valeurs se manifestent. On parle de pêcheurs, de gens qui exploitent la ressource, qui en vivent. On leur dit de ne pas se mêler de ça, que cela ne les regarde pas. En fait, ce qu'on leur dit, c'est de s'amuser dans leur chaloupe, de pêcher tant qu'ils veulent, qu'il y ait du poisson ou pas, ça ne les regarde pas, qu'on en ensemence ou pas, ça ne les regarde pas; l'eau, la mer nous appartient, mais par contre, enregistrez vos chaloupes.

Ne comprenez-vous pas que ces gens-là dépendent de votre politique? Ils devront composer avec vos politiques. Pour certains, ce sera le drame. Ce sera sans doute le drame, j'en suis convaincu, lorsque les richesses sous-marines halieutiques s'épuiseront, mais au moins, ils auront eu la chance de faire valoir leur point de vue, ils auront eu la chance de se faire entendre.

(2030)

On parlait des ressources halieutiques. Des études montrent que si on avait éliminé les otaries et les phoques dans l'estuaire du Saint-Laurent, peut-être que la population de poissons ne serait pas aussi basse qu'elle l'est actuellement, mais quand on l'a dit il y a 20 ans, personne ne l'a cru. Les politiciens étaient au-dessus de ça. Les politiciens disaient que le problème venait d'ailleurs.

On s'aperçoit aujourd'hui que les fonds sous-marins contiennent à peu près 5 p. 100 du poisson et des ressources qui s'y trouvaient en 1974, mais ce 5 p. 100 qui reste, avant de le perdre ad infinitum, il serait peut-être temps que, dans sa grande sagesse, le gouvernement fédéral commence à consulter les provinces concernées, ainsi que les pêcheurs et les populations concernés. Mais non, on ne fait pas ça directement. On ne parle pas de Constitution ici.

Qu'est-ce qu'on fait ici, monsieur le Président? Je me le demande. Je veux simplement faire savoir au député de Vancouver Quadra que je me demande ce qu'il fait là, lui aussi. Il faut parler de Constitution et si on ne peut pas l'atteindre directement, soit, qu'on le fasse indirectement, mais qu'on ait le résultat. Balzac disait: «Peu importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse.» Monsieur le député de Vancouver Quadra, je ne me formaliserai pas du moyen, mais ayez le résultat, c'est tout ce que je vous demande.

[Traduction]

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, encore une fois le député du Bloc dit que la population craint vivement l'intrusion du gouvernement fédéral dans des domaines où il n'y a pas de raison qu'il intervienne.

En examinant les motions et les groupes, on voit bien que les motions nos 33 et 35 concernent des modifications de forme.


3615

Les motions nos 8, 14 et 17 du Bloc visent la sauvegarde des droits légalement reconnus aux provinces. Actuellement, le Parti réformiste voit ces motions d'un bon oeil. Dans le cadre du débat, nous n'avons rien entendu qui nous porte à croire que certains aspects de ces amendements pourraient être une source de préoccupation pour le gouvernement fédéral.

Les motions nos 32 et 34 confèrent aux provinces un plus grand rôle dans le processus consultatif, ce qui constitue un progrès, à notre avis.

Malheureusement, les motions 9, 18, 19, 20, 21 et 23 traitent toutes de la question de la compétence. Or, le gouvernement fédéral a parfaitement le droit et la responsabilité, en tant que gouvernement souverain de notre pays, d'exercer sa compétence sur les eaux marines du Canada. Il y a beaucoup trop de questions liées aux eaux marines du Canada, par exemple les accords internationaux ainsi que les espèces fauniques et les stocks de poisson migrateurs, qui ne reconnaissent pas les frontières provinciales ou internationales et qui font que le gouvernement fédéral est le seul en mesure de bien surveiller la gestion des eaux marines canadiennes.

Le Parti réformiste appuiera les motions nos 33 et 35. Nous voyons aussi d'un bon oeil les motions nos 8, 14, 17, 32 et 34, mais nous nous opposerons aux motions nos 9, 18, 19, 20, 21 et 23.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, je dois vous dire en commençant qu'il est réconfortant de voir que tous les collègues du Bloc québécois prennent le suivi de ce projet de loi à l'étape du rapport avec un certain intérêt. Je remercie le député de Chambly des bons propos qu'il a tenus tout à l'heure.

Si je veux revenir à mes moutons, vous excuserez un peu mon langage monsieur le Président, même si les moutons sont normalement sur la terre, il y a parfois des moutons sur l'eau, et c'est ce qu'on appelle les vagues.

(2035)

Ce qu'on doit comprendre ici ce soir dans le groupe no 5, et j'ai aimé tout à l'heure l'expression de mon collègue de Chambly quand il a parlé de relations néo-constitutionnelles, c'est qu'on cherche par tous les moyens à essayer de s'entendre avec les gens d'en face. Nous, on appelle cela le partenariat, si on peut dire cela. C'est même en raison de l'invitation de l'ancien ministre des Pêches, M. Tobin, qui a dit: «Yvan, on veut être partenaires. We want to establish a partnership.» Quand on veut établir un partenariat, on s'assoit avec le partenaire d'en face, on compare et on s'entend sur les définitions. C'est la base même de la relation d'un partenariat. On est égaux.

Pour cela il faut se parler et il faut que les prémisses soient là en partant. Je n'avais pas du tout à l'esprit, lorsque j'ai procédé à la rédaction de ces motions, que le débat prendrait cette tournure. Je dois dire qu'avec le travail qu'on a fait au Comité, j'ai essayé de faire passer l'idée. Je ne suis pas arrivé pour braquer les gens, mais lorsque les gens me disent: «Oui, on veut être partenaires avec vous et on veut avancer», j'en profite pour vérifier la solidité des choses. C'est pour cela qu'on arrive avec les motions telles que présentées ici.

Si je peux me permettre, il y en a peut-être quelques-unes que je devrais partager ou que je devrais lire. Ce sont des choses simples. J'arrive aux motions nos 8 et 9. La motion no 8 a rapport à l'article 8, qui définit les relations des droits. Je fais simplement ajouter l'expression «porter atteinte aux droits des provinces ou à ceux acquis avant le 4.» J'ajoute la notion de province. Ça ne fait de mal à personne, ça. Pourquoi est-ce qu'on aurait honte de nommer quelque part dans le document législatif nos principaux partenaires qui sont les provinces? C'est un exemple.

Je vais lire l'article 9. C'est très éloquent. On parle d'établir un partenariat avec quelqu'un au paragraphe 9(5), et c'est ce paragraphe que je voudrais faire enlever-je veux bien croire que c'est plate pour les gens qui nous écoutent à la maison, moi aussi j'aimerais bien aller faire autre chose-mais en termes simples, c'est écrit «Restrictions» en marge, à droite du paragraphe 9(5). On fait des restrictions.

Comment se lit le paragraphe 9(5)? Il se lit comme suit:

Il demeure entendu que ni les provinces, ni quiconque en leur nom, ne peuvent se fonder sur le présent article pour prétendre à des droits ou à une compétence législative sur les espaces extracôtiers visés ou sur leurs ressources biologiques ou non biologiques;
Qu'est-ce que cela veut dire? On nous dit qu'on ne peut pas prétendre à quelque chose. On nous fait une restriction. Ça part mal lorsqu'on veut établir une relation de partenariat. Je n'ai pas la prétention d'être un grand légiste constitutionnel. Je n'ai peut-être pas autant d'expérience en termes de droit que le député de Vancouver Quadra ou le député de Chambly. Cependant, j'étais un administrateur de déformation. Quand on part avec des restrictions, ça part bien mal.

À la motion no 14-on peut entrer dans les détails si on veut ce soir, on a un peu de temps-c'est encore la même chose. Je spécifie le mot «provinces» dans cette motion. Encore une fois, ce n'est pas compliqué. Pourquoi a-t-on peur de nommer l'un de nos principaux partenaires?

Je vais arriver à des motions qui sont plus intéressantes encore. Dans la motion no 23, j'ajoute un quatrième paragraphe à l'article 23. Quand on parlait des certificats tout à l'heure, le député de Vancouver Quadra nous disait: «Concernant la souveraineté canadienne, concernant le droit international, ce n'est pas tout à fait comme cela qu'on procède.» Ce n'est pas nécessairement le monde entier que le député de Vancouver Quadra a à convaincre. Il a à convaincre les partenaires qui sont les provinces et qui sont les députés ici dans cette Chambre.

(2040)

La motion que je propose à l'article 23, c'est d'ajouter un quatrième paragraphe qui dit ceci:


3616

«(4) Les certificats visés au présent article ne valent pas preuve des renseignements qui y sont énoncés s'ils ont pour effet de porter atteinte aux droits et aux compétences législatives d'une province.»
Il pourrait nous dire que ce qui est indiqué à l'article 23 ne relève peut-être pas d'une province, peut-être que et peut-être que, mais ça ne ferait pas mal de l'inscrire dans le projet de loi, ce qui aurait pour notion de faire respecter l'esprit du partenariat. On dirait à l'autre: «Écoute, si tu acceptes ça ainsi, je suis prêt à vivre avec l'article 4 parce que cela ne m'enlève rien, et puis si ça fait ton affaire, eh bien, tant mieux.» Mais non. On dit que ça ne peut pas fonctionner de cette façon.

Je vais aller tout de suite à la motion 32. Je vais la lire attentivement en ralentissant sur les mots importants et en la comparant en même temps. Elle a trait à l'article 29. Il s'agit peut-être d'un exercice académique, en tout cas, je pense que ce pourrait être instructif pour les gens qui nous écoutent à la maison et même pour certains députés qui n'ont pas eu la chance de parcourir au complet ce projet de loi.

Tel que libellé, l'article se lit ainsi dans le projet de loi:

29. Le ministre, en collaboration avec d'autres ministres fédéraux, les gouvernements provinciaux et territoriaux [. . .]»
Je remarque que les gouvernements provinciaux n'arrivent pas tout à fait en dernier, mais après les relations avec les ministres fédéraux, et en collaboration.

Ce que je souhaite et que je mentionne dans la motion, puisqu'on sera les provinciaux partenaires à y vivre, parce que c'est encore les provinces qui ont formé le Canada, j'aimerais plutôt l'appellation suivante:

«29. Le ministre, de concert avec les gouvernements provinciaux [. . .]»
Donc, il y a un lien direct en partant. Dès qu'on lit, c'est clair: le principal partenaire, ce sont les provinces et c'est avec elles qu'on doit s'entendre. Par la suite, «en collaboration avec d'autres ministres fédéraux», et ensuite «les personnes de droit public et de droit privé intéressées». Mais c'est le ministre, de concert avec les gouvernements provinciaux, qui va «diriger et favoriser, dans le respect des droits et des compétences législatives des provinces,-ça ne fait pas mal de le mentionner-l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie nationale.»

Autrement dit, la façon de placer tout de suite les choses simplifie les relations par la suite. Ce n'est pas parce que je suis souverainiste que je place ces mots dans cet ordre. Je vous ai dit tout à l'heure que mon deuxième défaut est d'être un administrateur par déformation; donc, j'aime bien qu'on puisse identifier en partant les joueurs avec lesquels on va jouer pour qu'on puisse ensuite identifier le type de relation qu'on aura avec eux. C'est «de concert». Qu'est-ce qu'on fait de concert? On dirige et on élabore la mise en place d'une stratégie. Ah, là, c'est clair! Mais qu'on ne parte pas avec une énumération qui, lorsqu'on lit l'article et qu'on fait face à des juristes plus expérimentés, comme il peut y en avoir dans cette Chambre, réussit à diminuer, à diluer l'objectif de cette motion.

Si on tente de faire cela, on risque d'avoir de graves problèmes puisque cette loi sera mise sur pied pour régler des problèmes. Alors, il faudrait, dès le départ, éviter de créer des problèmes de façon à ce que les relations soient très claires.

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, j'écoutais les propos du député de Vancouver Quadra. Même si elle était rigoureusement juridique, son interprétation est que toutes les propositions d'amendement suggérées par le député de Gaspé et appuyées par moi-même sont des modifications constitutionnelles et qu'en vertu de cela, il n'y a rien à faire, ce n'est pas la bonne tribune pour parler de ça. Nous ne sommes donc pas les bonnes personnes pour parler de cela, parce que nous sommes au Parlement fédéral et qu'on doit parler de loi et non de Constitution.

Je trouve ça curieux. Pourtant, on en a étudié des lois ici, et je faisais partie du Comité permanent des ressources humaines. Je me rappelle du fameux débat sur la formation professionnelle.

(2045)

Là c'était une juridiction provinciale et pourtant dans le projet de loi C-96 qui est la Loi constituant le ministère du Développement des ressources humaines, le ministre s'attribuait des pouvoirs en cette matière comme il rendait officiels les pouvoirs qu'il se reconnaissait déjà puisque ça fait longtemps qu'il s'ingérait là-dedans.

Dans une autre session, dans C-28, on parlait d'aide financière aux étudiants, toujours un domaine de juridiction provinciale, l'éducation, c'est reconnu dans la Constitution et, par une loi, le ministre rendait possible son ingérence dans ce domaine.

Je fais partie du Comité de la santé depuis quelques semaines. Il y a eu une loi qui vient officialiser l'existence du ministère de la Santé au Canada, renforcer et préciser son rôle. Il existait déjà, il s'appelait autrement, mais maintenant il s'appelle vraiment le ministère de la Santé. On a adopté une loi à ce sujet. Cette loi vient préciser les pouvoirs du ministre et pourtant la santé c'est de juridiction provinciale.

Le genre de discours qu'on a entendu tantôt, on ne l'entendait pas à ce moment, c'était correct, c'était au nom du bien-être de tous les Canadiens et Canadiennes. À chaque fois qu'il y a une intervention fédérale c'est pour le bien du peuple. Il y a longtemps que je m'intéresse à la politique et je me rappelle quand Réal Caouette était ici. Il disait: «Le gouvernement fédéral veut votre bien et il va s'arranger pour l'avoir.» Je dis qu'il avait bien raison.

Il y a des domaines qui ne sont pas dans la Constitution: la culture, l'environnement, les communications et bien d'autres. Comme ce n'est pas écrit, ce n'est pas précisé, quand on arrive dans une zone grise, on sait que lorsque la Cour suprême a à trancher dit toujours que si ce n'est pas prévu, c'est de compétence fédérale.


3617

Sans vouloir refaire toute l'histoire récente. Le premier ministre a répété récemment, et hier soir encore à l'émission Le Point, qu'il veut une relation de partenariat et ce que propose le député de Gaspé c'est justement d'offrir la possibilité de conclure des offres de partenariat, de s'entendre, de collaborer avec les provinces. Pourquoi? Parce que la Constitution a été écrite en 1867 et que, comme le catéchisme, les choses ont évolué.

Permettez-moi l'analogie. J'aurai bientôt 50 ans, mais lorsque j'étais à la petite école, on lisait le catéchisme. On avait des questions et des réponses et on nous disait: «C'est comme ça.» Je m'étais préparé à l'idée que les choses ne bougeaient pas, mais aujourd'hui, vous savez, ça dépend peut-être de la religion, mais les péchés n'existent plus de la même façon. Ça a évolué. Il n'est même plus nécessaire de se confesser à un prêtre. Ça change, ça évolue. La société évolue, mais la Constitution canadienne est immuable. Il est impossible de la changer.

Dernièrement on nous disait que vu que la souveraineté d'une province n'y est pas prévue, ça ne peut pas se faire. On essaie de nous faire croire que c'est immuable et que tout ce qui n'est pas prévu est impossible. Si on écoute de façon-j'allais dire religieuse-le député de Vancouver Quadra il n'y a rien à changer. Il est absolument impossible de changer quoi que ce soit.

La question qui a été posée à l'effet qu'il est impossible de changer quoi que ce soit, pas une virgule de tout ce qui vient de l'opposition. Je me souviens, il y a trois ans que je suis ici et quand on réussit à faire adopter un petit amendement sur un petit mot de rien, il faut crier victoire parce que ce n'est pas dans la tradition de ce régime d'accepter des propositions qui viennent de l'opposition. C'est le parti au pouvoir qui mène. On le voit sur la feuille qu'on a, ça respire ça. C'est proposé par le gouvernement libéral, c'est bon et si ça vient de l'opposition, ce n'est pas bon.

(2050)

Les gens qui nous écoutent doivent se demander de quelle sorte d'affaire il s'agit là. Qu'est-ce que cela donne, tout ça? Il faut absolument changer cela et les discours de l'opposition sont pour essayer de convaincre les gens d'en face que oui, il devrait être théoriquement possible de changer quelque chose. On a dit: «On est souverainistes, bien sûr, mais c'est parce que le système est immuable, qu'il n'a jamais voulu changer.»

Donc, eux qui ont le fardeau de la preuve de dire qu'on a tort devraient faire la preuve éloquente que c'est modifiable, qu'on peut améliorer tout cela et que l'opposition a des choses intéressantes à dire. Quand c'est logique, ça devrait être acceptable. Non, on a la ligne de parti et c'est rejeté à ce moment-là.

Lorsqu'on ne fait pas cela, on fait comme le député de Vancouver Quadra, on dit: «La Constitution ne le permet pas.» Donc, monsieur le Président, on parle ce soir de choses qui sont presque non permises et j'apprécie votre tolérance extraordinaire qui nous permet de parler de quelque chose dont le député de Vancouver Quadra pense qu'on ne pourrait parler. Mais c'est assez curieux que la Présidence, avec ses officiers, ait accepté que nos amendements, les amendements proposés par le député de Gaspé, soient recevables, donc, qu'il soit possible d'en discuter et qu'ils puissent faire l'objet d'un vote.

Le député de Vancouver Quadra dit: «C'est peut-être recevable, on peut peut-être en discuter, mais de toute façon, cela ne donne rien car la Constitution ne permet pas les changements.» C'est une drôle de situation et comme il n'est pas possible de changer davantage de choses, je n'userai pas davantage ma voix, mais je trouve cela un peu bizarre sur le plan juridique. C'est une belle leçon de démocratie à donner à nos jeunes qui nous écoutent. Les efforts qu'on fait pour intéresser les gens à la politique ne servent à rien quand la réponse est: «Ce n'est pas dans le catéchisme constitutionnel et quand ce n'est pas dans le catéchisme constitutionnel, il n'y a pas de salut.»

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote porte sur la motion no 8. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion est différé. Le vote par appel nominal s'appliquera également aux motions nos 14 et 17.

[Traduction]

Le prochain vote porte sur la motion no 9. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:


3618

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 9 est différé et s'appliquera aussi à la motion no 19.

M. Boudria: Monsieur le Président, je me demande si vous pouvez demander le consentement unanime pour que l'on fasse comme si le vote par appel nominal avait été demandé pour toutes les motions du groupe 5 et pour que l'on reporte le vote sur toutes ces motions au moment choisi.

Le président suppléant (M. Kilger): Êtes-vous d'accord?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. Kilger): Le prochain vote porte sur la motion no 18. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 18 est reporté.

Le vote suivant porte sur la motion no 20. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 20 est reporté.

Le prochain vote porte sur la motion no 21. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 21 est reporté.

Le prochain vote porte sur la motion no 23. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 23 est reporté.

Le prochain vote porte sur la motion no 32. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 32 est reporté.

Le prochain vote porte sur la motion no 33. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.


3619

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 33 est reporté.

Le prochain vote porte sur la motion no 34. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 34 est reporté.

Le prochain vote porte sur la motion no 35. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion no 35 est reporté.

(2055)

Groupe no 6. Les motions nos 24, 27, 39 et 66.

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ) propose:

Motion no 24
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 25, par substitution, à la ligne 1, page 12, de ce qui suit:
«25. Le gouverneur en conseil peut, en consultation avec le comité permanent et le gouvernement des provinces, sur la».
Motion no 25
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 25, par substitution, à la ligne 3, page 12, de ce qui suit:
«étrangères, après consultation des provinces concernées, prendre des règlements:».
Motion no 26
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 26, par substitution, à la ligne 1, page 13, de ce qui suit:
«26. (1) Le gouverneur en conseil peut, en consultation avec le comité permanent et les gouvernements des provinces, sur la».
Motion no 27
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 26, par substitution, à la ligne 3, page 13, de ce qui suit:
«après consultation des provinces concernées, prendre des règlements pour:».
Motion no 39
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 32, par substitution, à la ligne 18, page 16, de ce qui suit:
«nommer ou désigner des membres en consultation avec les provinces et avec l'approbation du comité permanent, ou».
Motion no 66
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 40, par adjonction, après la ligne 8, page 26, de ce qui suit:
«(2) Dans l'exercice de ses attributions, le ministre veille, dans la mesure du possible, à ce que les provinces concernées par l'application de la présente loi soient consultées.»
M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, à l'occasion de la reprise du débat, je me permets de dire que l'on a été fasciné par le débat de ce soir. Je signale à ceux qui ont été formés dans la grande tradition cartésienne que l'équilibre et la forme font partie intégrante de son mode de raisonnement. Par conséquent, ce que nous recommandons relève pleinement de cette tradition.

Il s'agit d'une loi concernant les océans et ce n'est pas le bon endroit pour aborder, à la manière du Congrès américain, d'autres sujets que l'on ferait mieux de débattre ailleurs.

Il n'y a rien dans ce débat qui indique que le gouvernement considère que les commentaires faits par les députés d'en face ne sont pas pertinents ou qu'ils n'ont aucune importance et ne méritent aucune attention. Ce sont des commentaires qui devraient être faits à un autre endroit et nous apprécierions que les membres de l'opposition officielle participent au fédéralisme coopératif en entamant des discussions du genre de celles auxquelles le député de Chambly a fait allusion dans le cadre des conférences fédérales-provinciales.

En ce qui concerne la loi sur les océans, elle a son intégrité et il faudrait en rester là. Les renvois au paragraphe 9(5) de la loi sont


3620

déplacés. Il s'agit d'une simple disposition interprétative. Par conséquent, laissez les choses telles qu'elles étaient.

Pour en revenir aux amendements proposés par le Bloc, il faut reconnaître que le gouvernement a adopté dans ce cas-ci une approche multidisciplinaire. Il envisage l'intégration des considérations économiques, écologiques et sociales et cherche à faire participer tous les intervenants.

L'intendance des ressources océaniques et côtières sont des responsabilités qui doivent être partagées entre les autorités fédérales, territoriales, provinciales, municipales et autochtones, avec le concours de la collectivité, c'est-à-dire de la famille élargie, de l'entreprise, des syndicats, des organisations non-gouvernementales et des milieux universitaires.

Le gouvernement est préparé pour prendre la direction de la gestion des océans et reconnaît que l'intendance et le partenariat coopératifs sont une réalité.

Bien que le gouvernement se soit engagé à collaborer avec les provinces, comme en témoigne le préambule de la loi concernant les océans du Canada, le Bloc québécois a proposé des amendements comme les motions nos 24, 25, 26 et 27, qui nécessiteraient d'autres consultations avec les provinces et nous obligeraient à examiner des décisions prises par le gouverneur en conseil et par le comité permanent.

Il s'agit d'une modification fondamentale de la structure gouvernementale qui mériterait peut-être d'être étudiée dans une autre tribune. Tous les sujets peuvent être abordés mais ce n'est pas la bonne manière que d'essayer de greffer cela à la loi sur les océans qui a son intégrité et ses objectifs.

Les amendements proposés par le Bloc s'appliquent aux ministres et au gouverneur en conseil. Au plan juridique, il est ridicule d'exiger du gouverneur en conseil qu'il consulte les provinces et le comité permanent avant de prendre un règlement recommandé par un autre ministre.

Le ministre des Affaires étrangères fera des recommandations au gouverneur en conseil au sujet de la délimitation des zones maritimes. Cette question relève des relations internationales et non pas des relations fédérales-provinciales comme le suggère la motionno 24 du Bloc.

Le ministre de la Justice fera des recommandations concernant l'application des lois fédérales et provinciales aux zones maritimes du Canada.

(2100)

Les règlements concernant l'application des lois fédérales et provinciales à ces zones, conformément à la partie I de la Loi sur les océans du Canada sont la responsabilité du ministre de la Justice. Il n'appartient pas aux provinces ou au Comité permanent des pêches et des océans de modifier les responsabilités de l'un ou l'autre de ces deux ministres ou de s'ingérer dans les recommandations qu'ils font au gouverneur en conseil.

De plus, la motion no 39 propose d'exiger que le ministre consulte les provinces et reçoive l'approbation du comité permanent avant de constituer des organismes de consultation ou de gestion et d'en nommer les membres. Le ministre étant déjà obligé de tenir compte du point de vue des provinces, cette motion est juridiquement superflue.

Encore une fois, le Bloc propose de restreindre la capacité du ministre d'exercer son mandat, cette fois en proposant d'utiliser le précieux temps du comité permanent. Ce dernier serait plus utile s'il employait son temps à représenter les points de vue et les intérêts des Canadiens.

En somme, le débat a produit des idées intéressantes et utiles. Étant donné la nature des modifications proposées, le Président aurait pu exercer sa discrétion dans l'autre sens, mais nous n'avons fait aucune proposition à cette fin. À mon avis, l'objet de ces motions n'est pas en rapport avec la Loi sur les océans présentement à l'étude. Il serait préférable d'en saisir une autre tribune, à un autre moment. La Chambre peut être assurée que le gouvernement serait alors prêt à examiner toute proposition présentée sur une autre tribune.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, j'ai décidément de la difficulté à saisir la ligne que trace le secrétaire parlementaire, ce soir, quand il dit que les motions que j'ai déposées, ce n'est pas la bonne place pour en discuter. C'est justement parce qu'en comité, on n'a pas été capables de s'entendre qu'il est dans ma prérogative de parlementaire de faire part à la Chambre des propos qui n'ont pu être entendus lors de l'étude en comité.

L'esprit sous-entendu par toutes les motions qu'on a présentement devant nous, ce soir, n'a pas transcendé dans le travail du comité. J'ai l'impression que, pressés par le temps, c'était sur le point de départ du ministre Tobin, la machine s'est quelque peu emballée, et on a été obligés de restreindre un peu notre travail.

Je veux d'emblée dire que, règle générale, je suis d'une nature facile à travailler, facile à communiquer. Je dois dire que de l'autre côté, ça allait bien jusqu'au moment où il y a eu une pression de la machine gouvernementale ou du ministère, peut-être en prévision du départ de M. Tobin, qui a fait en sorte que l'esprit n'a pu être retenu et que j'ai dû attendre le débat, devant cette Chambre, pour expliquer, devant tous les députés et via la caméra, puisque le travail en comité ne permet pas toujours de s'adresser directement à la population. C'est la raison pour laquelle on est ici ce soir.

Je reviens toujours à l'esprit de base. Je prends le groupe incluant les motions nos 24, 25, 26 et 27, et je vais les relire. C'est bien simple. Parce qu'elles sont courtes, je vais les lire. La motion no 24 dit que «le gouverneur en conseil peut, en consultation avec le comité permanent et le gouvernement des provinces». Pourquoi refuserait-on de nommer un de nos principaux partenaires?

La motion no 25 dit ceci: «après consultation des provinces concernées, prendre des règlements». Les provinces sont en contact direct avec les populations. Je pense qu'il est normal qu'elles soient


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consultées avant que les règlements soient mis en vigueur. Si on adopte cette ligne-là, on se prive d'une source d'information. Les provinces étant plus proches, elles sont normalement capables de véhiculer ou d'exprimer les problèmes de leur population.

J'ai lâché un chiffre à la blague tantôt dans l'antichambre pour les députés qui étaient là. Je leur ai dit que si on prenait simplement ce canevas, ce n'est pas refaire la Constitution et l'histoire du Canada, c'est juste se donner des outils de travail qui nous permettraient de régler à la base 90 p. 100 des problèmes avant qu'ils n'apparaissent.

(2105)

Alors, il faut aller chercher des sources d'information.

À la motion 26 on lit:

26. (1) Le gouverneur en conseil peut, en consultation avec le comité permanent et les gouvernements des provinces, sur la».
Je mentionne cette motion de nouveau, car il s'agit de quatre groupes de motion indiquent simplement qu'il est bon de consulter, qu'il est bon d'aller à la base, d'avoir un processus de communication ou de feedback, de rétroaction. Si on n'a pas ça, on court au-devant des troubles.

Ottawa, la capitale, c'est peut-être bien beau, mais c'est situé en plein milieu du pays. Je veux bien croire que les ministères ont des bureaux régionaux, mais ça ne semble pas suffisant lorsque les bureaux régionaux, dans chacun de nos coins de comté, sont dirigés ou sont vus à travers la lorgnette des gens qui sont ici. Ils sont peut-être remplis de bonne foi, mais ils sont privés, eux, du contact avec la base, alors qu'il est très important d'y revenir.

Si j'essaie d'accélérer un petit peu, parmi les autres motions il y a la motion 39, que je trouve intéressante. Je vais la lire et expliquer par la suite. Je propose de:

«nommer ou désigner des membres en consultation avec les provinces et avec l'approbation du comité permanent, ou».
L'article 32 dit ceci: «En vue de la mise en oeuvre de plans de gestion intégrée, le ministre: a) élabore [. . .], b) recommande [. . .], c) peut faire des consultations et il peut, selon le cas, constituer des organismes ou désigner des membres.»

Mais si on se doit de constituer un organisme qui va voir à la mise en oeuvre de la gestion intégrée des océans, n'est-il pas bon, au même titre que quand je demande, en commençant tout de suite les relations au niveau de partenariat, je dis: «Messieurs du fédéral, M. le gouvernement fédéral, discutez donc tout de suite avec celui qui a formé le Canada, c'est-à-dire les provinces. Discutez tout de suite.» Ça, c'est au niveau des idées et de ce qu'on devrait mettre sur la table.

Lorsqu'on arrive pour intégrer et faire une mise en oeuvre de la stratégie de gestion, je pense qu'il serait opportun, parce qu'il n'y aura pas que deux personnes qui siégeront, de consulter les provinces nommément, parce que les gens proviendront de quelque part. Ils ne viendront pas de la planète Mars. Alors il serait important que les provinces aient un certain regard sur qui sera nommé à ces organismes, puisqu'il y a de bonnes chances que cela puisse refléter leur philosophie ou, à tout le moins, s'assurer que la personne connaîtra la philosophie de départ de la province qui voudra se faire représenter. Le fédéral, lui, pourra aussi s'assurer d'avoir une présence des gens dans cet organisme qui reflétera sa philosophie de départ à lui aussi.

Je pense que c'est le gros bons sens qui dicte nos gestes, à savoir que, si on veut que ça avance, il faut s'assurer de partager les idées. Ensuite, il faut s'assurer qu'on a un droit de regard sur les gens qui en feront la gestion.

Le temps qui m'est imparti achève, mais il y en avait une autre que je voulais lire, la motion no 66. Si je n'ai pas le temps de terminer, peut-être qu'un confrère pourra le faire.

«(2) Dans l'exercice de ses attributions, le ministre veille, dans la mesure du possible, à ce que les provinces concernées par l'application de la présente loi soient consultées.»
C'est ce que je demande. On ne le mentionnait pas à l'article 40 du projet de loi. L'article 40 concerne les attributions du ministre, la Partie III du projet de loi. Là, on embarque dans le concret, c'est-à-dire quels sont les pouvoirs que le ministre aura maintenant: il peut gérer. Dans la Partie II, il met en place une stratégie de gestion intégrée; dans la Partie III, on voit les pouvoirs qu'il aura.

Je pense qu'il serait opportun que, lorsqu'il met quelque chose en place, si ça touche des provinces ou une population d'une province, qu'il puisse consulter cette province. C'est le moindre réflexe. Pourquoi suis-je obligé de le mentionner par écrit? Parce que, dans ce qu'on vient de voir ou de ce que j'ai vu au cours de mes deux ans et demi en tant que député, ce n'est pas un réflexe normal pour Ottawa.

Pour ne nommer que celui-là, comment se fait-il que, dans le cas de la Garde côtière et de la nouvelle tarification en vigueur pour les navires commerciaux, il n'y ait pas eu de rencontre directe entre le ministre des Pêches fédéral et le représentant des Transports à Québec, comme il n'y en a pas eu pour l'Ontario non plus.

(2110)

Monsieur le Président, vous me permettrez à ce moment-là de m'interroger et de demander à ce que la Chambre inclue ce genre de choses-là parce que ce n'est pas un réflexe normal. Autrement dit, dans toutes les relations qu'on doit avoir, on doit se protéger. Alors, ce serait un peu notre sauf-conduit pour la sécurité.

[Traduction]

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, les motions de ce groupe montrent que le gouverneur en conseil a l'obligation d'écouter les préoccupations exprimées par les témoins qui ont comparu devant le comité permanent et d'en tenir compte au moment de prendre des décisions.


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Nous pouvons appuyer en grande partie ces motions. Elles ne disent rien quant à la question de la compétence, mais elles obligent le gouvernement fédéral à agir de façon sensible et à tenir des consultations.

Il n'y a rien de mal à ce que le gouvernement fédéral soit tenu de consulter les intéressés, les provinces et les autres lorsqu'il modifie la législation, lorsqu'il modifie les règles et règlements qui régissent les secteurs maritimes du Canada. En fait, c'est mieux. C'est pourquoi le Parti réformiste appuie ces motions et remercie le député de Gaspé de les avoir présentées.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer sur le groupe no 6?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote porte sur la motion no 24. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote sur la motion est reporté. Les résultats du vote s'appliqueront également à la motion no 26.

Le vote suivant porte sur la motion no 25. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote sur la motion est reporté. Les résultats du vote s'appliqueront également à la motion no 27.

Le vote suivant porte sur la motion no 39. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote sur la motion est reporté.

(2115)

Le vote suivant porte sur la motion no 66. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

Nous passons maintenant au groupe no 7, qui comprend les motions nos 28, 29 et 30.

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ) propose:

Motion no 28
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 27, par substitution, aux lignes 27 à 36, page 14, de ce qui suit:
«27. Le projet de règlement d'application de l'alinéa 25b) ou de l'article 26, de même que les modifications de ce projet de règlement, sont publiés dans la Gazette du Canada au moins soixante jours avant la date envisagée pour leur prise d'effet, les intéressés se voyant accorder la possibilité de présenter leurs observations.»


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Motion no 30

Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 27, en supprimant les lignes 34 à 36, page 14.
L'hon. Fred Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) propose:

Motion no 29
Qu'on modifie le projet de loi C-26, à l'article 27, dans la version française, par substitution, à la ligne 31, page 14, de ce qui suit:
«d'effet, les intéressés-notamment les provinces-se».
M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole encore une fois pour appuyer la Loi sur les océans du Canada.

Je tiens à remercier tous les membres du Comité permanent des pêches et des océans, y compris le député de Gaspé, en face de moi, pour avoir veillé à ce que le projet de loi C-26 constitue le reflet exact des impressions des Canadiens recueillies au fil des consultations et des points de vue des témoins entendus par le comité.

Les motions nos 28, 29 et 30 modifient l'article 27 de la Loi sur les océans du Canada. L'article 27 reprend l'obligation de prépublication prévue dans la Loi sur l'application extracôtière des lois canadiennes. C'est un rappel intéressant de cette mesure qui exige du gouvernement qu'il publie les mesures avant la date envisagée pour leur prise d'effet.

Actuellement, la disposition comporte des considérations spéciales concernant les provinces pour qu'elles puissent donner leurs impressions sur les règlements proposés. La politique et les pratiques du gouvernement fédéral en matière législative est déjà de consulter les intéressés sur les modifications proposées aux règlements.

À notre avis, la motion no 28 du Bloc ne servirait qu'à accroître le fardeau administratif en obligeant le gouvernement à prépublier toutes les modifications proposées, ainsi qu'à continuer la pratique de consultation publique.

Le fardeau administratif est quelque chose que le gouvernement essaie de réduire, en raison du coût pour le contribuable. Je pense que je peux dire en toute sécurité qu'il n'y a pas une seule personne ou une seule organisation qui, en consultation ou lorsqu'elle s'est présentée devant le comité permanent à l'automne de 1995, ait demandé que la mesure législative exige plus de paperasserie. Par conséquent, le gouvernement n'est pas prêt à appuyer la motionno 28, ni la motion no 30 qui élimine la disposition indiquant qu'il n'est pas nécessaire de publier de nouveau le projet de règlement même s'il a été modifié.

De plus, obliger le gouvernement a prépublier chacune des modifications proposées à tous les règlements serait non seulement un fardeau inutile, mais cela n'aurait aucune raison d'être. Accepter cette motion ne servirait qu'à accroître le fardeau administratif du gouvernement qui essaie de son mieux de le réduire. Par ailleurs, il n'en résulterait aucun avantage pour les Canadiens.

Je suis heureux d'appuyer la disposition sur la réglementation qui résulte de la motion no 29. Il s'agit d'un amendement technique qui précise l'intention de l'article 27, c'est-à-dire qui mentionne nommément que les provinces ont la possibilité de présenter leurs observations sur les règlements d'application publiés dans La Gazette du Canada.

Cet amendement et d'autres amendements techniques sont proposés pour montrer que la Loi sur les océans permet aux Canadiens de travailler ensemble à former les meilleures réponses nationales et les meilleures réponses locales pour le développement durable des ressources océaniques.

Je demande à tous les députés de rejeter les amendements proposés par le Bloc pour les dispositions de cette loi concernant les règlements, à savoir les motions nos 28 et 30 qui sont inutiles et sans fondement, et d'appuyer l'amendement du gouvernement, c'est-à-dire la motion no 29.

Je suis heureux d'appuyer le projet de loi et j'invite tous les députés à se joindre à moi pour permettre l'adoption de cette mesure.

[Français]

M. Yvan Bernier (Gaspé, BQ): Monsieur le Président, à la lecture des documents, on ne semble pas en avoir la même compréhension.

Une voix: C'est un autre fuseau horaire.

M. Bernier (Gaspé): Ce n'est peut-être pas à cause du fuseau horaire, mais je ne comprends pas. Dans le but de clarifier, pour l'ensemble des députés ici présents et pour les gens qui nous écoutent, il est présentement question des motions nos 28 et 30. Ces motions parlent de ceci. Il y a deux articles qui traite des règlements dans le projet de loi, l'article 25 et l'article 26. L'article 25 concerne les règlements, sous les recommandations du ministre des Affaires étrangères. À l'article 26, il s'agit des règlements qui proviennent toujours du gouverneur en conseil, mais cette fois-ci, qui émanent du ministère de la Justice.

(2120)

Ce pourquoi j'attire votre attention là-dessus, c'est que le présent projet de loi essaie de faire une gestion intégrée, ce qui forcera tous les membres du Cabinet, de l'autre côté, à se parler. C'est bien. Deuxièmement, il faudrait aussi qu'on puisse avoir les canaux de communication. Dans chacun de ces articles, on indique de quelle façon ce sera publié. Mais lorsqu'on arrive à l'article 27, les choses ne semblent pas claires.

Ce qui me choque là-dedans, et j'en arrive à l'article 28, ma motion no 30, c'est quand on prend l'article 27, au paragraphe (2), et qu'on y lit ce qui suit: «Il n'est pas nécessaire de publier de nouveau le projet de règlement, même s'il a été modifié». Qu'est-ce qu'on veut cacher par ça? On dit qu'on peut faire des règlements, on peut les modifier, mais qu'ils ne seront plus publiés. Je ne comprends pas. Je veux bien croire que depuis le début de la soirée, on nous dit que ce n'est pas l'endroit, ici en Chambre, pour parler de modifications de Constitution ou que ce n'est pas l'endroit pour dire ce qu'on


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aimerait changer, mais en plus, on nous dit que cette fois-ci, on va changer des choses mais qu'on ne nous le dira plus. Qu'est-ce qu'on doit comprendre là-dedans?

Je vais présenter l'autre motion dont le secrétaire parlementaire a fait état. C'est la version du ministère, celle du ministre des Pêches. Sa modification parle des provinces, et pour une fois, les provinces étaient bien citées dans l'article 27. On précisait comme il faut les relations avec les provinces, mais là, on enlève ça et on dit «notamment les provinces». On balaie cela du revers de la main. On n'a pas osé le dire clairement, mais selon ma compréhension, c'est ça.

Depuis le début de la soirée, je m'évertue à essayer de faire comprendre que l'objectif de ce projet de loi est de faire une gestion intégrée, donc de créer une équipe. Créer une équipe, c'est d'avoir des partenaires. Il faut respecter cet esprit de partenariat. Donc, il faut donc indiquer clairement avec qui on va jouer. Moi, je dis que ce sont les provinces qui ont formé le Canada, il faut jouer avec elles. Comment va-t-on mettre ces choses-là en place?

Tout à l'heure, j'ai dit que des organismes seraient mis sur pied pour gérer cette mise en oeuvre du plan de gestion. On nous refuse le droit d' être consultés sur les nominations qui y seront faites. Cette fois-ci, on nous dit qu'on va pouvoir faire des règlements, mais qu'on ne sera pas obligés de les republier. Comment faire?

Cela devient éreintant aussi. On a passé une grande veillée à parler de cela. J'ai passé des semaines et des heures à en discuter au comité. Vous voyez ce qu'il en ressort? C'est supposé être bien important.

Vous noterez qu'on a surtout entendu parler le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et Océans. Mais il y avait des gens qui avaient aussi travaillé sur ce comité-là. J'aimerais pouvoir les entendre. Le projet de loi sur la gestion des océans est quelque chose d'important. Comment se fait-il qu'il n'y ait pas plus de gens qui en parlent? Doit-on comprendre que, soit que ce n'est pas important, soit que ce soit conflictuel et que les gens n'osent pas trop en parler? Je suis un peu dégoûté de tout ça. J'aimerais qu'on puisse tirer tout cela au clair.

Après tout ce qu'on a dit, qu'est-ce que les gens à la maison peuvent penser du type de débat qu'on fait ici? Cela a l'air d'un dialogue de sourds. Le député se lève et il dit que ce n'est pas l'endroit pour parler de modifications. Je me lève et je demande où je peux en parler. J'essaie d'éclaircir des choses.

(2125)

Je leur montre, en mettant le doigt sur les articles de règlement précis, et je leur dis: «J'aimerais que cela soit publié; j'aimerais que l'on parle carrément des provinces; j'aimerais qu'on respecte l'esprit de partenariat nécessaire là-dedans.» Mais ce n'est jamais le bon moment. Le bon moment sera où et quand? Comment ne pas s'étonner après cela, lorsqu'on tient ce genre de discours, qu'on refuse de réformer et qu'on refuse de se moderniser puis de tenir compte de certaines choses?

Comment ne pas s'étonner que la population, à un moment donné, du moins au Québec, se réveille et gronde un peu? On est habitués d'avoir un référendum aux 15 ans. Ce sont tous des petits phénomènes comme ceux-là, de frustration accumulée année après année, projet de loi après projet de loi. En affaires, en partenariat, le premier principe, pour être sûr que l'affaire soit concluante et intéressante et pour être sûr que ce sera une entente à long terme, c'est de s'assurer que les parties prenantes ne se sentiront pas flouées, ne se sentiront pas comme si elles s'étaient fait passer un sapin.

Comment se fait-il qu'ici, ce soir, j'ai l'impression de m'en faire passer un par les écritures qu'il y a là? Et on me le dit en toutes lettres lorsqu'on arrive à dire qu'«il n'est pas nécessaire de publier de nouveau le projet de règlement, même s'il a été modifié.» Peut-on croire que c'est une coquille qui s'est glissée au niveau de l'écriture? Je ne pense pas. Mais depuis le début de la soirée, quand je vous dis que j'ai l'impression qu'on peut s'en faire passer une belle avec ce projet de loi, c'en est un exemple frappant qui illustre les propos tenus par le gouvernement d'en face.

Quelle est aussi l'urgence pour le Canada de faire passer ce règlement? J'ai mentionné tout à l'heure les relations entre les différents ministères, et je vous ai mentionné les procès-verbaux des travaux des comités. Le précédent ministre des Pêches avait dit lui-même que ses relations avec l'ancienne ministre de l'Environnement étaient le yin et le yang.

Si ce n'est pas encore clair de l'autre côté, comment feront-ils pour s'entendre lorsqu'ils arriveront pour parler avec les autres partenaires ainsi décrits? Ce que je veux soulever, mais je vois que mon temps s'achève, c'est que l'objectif semble louable pour une fois. Je suis obligé de reconnaître qu'à un moment donné un projet de loi qui va chercher à faire comprendre à la main gauche ce qui se passe dans la main droite, c'est très intelligent, mais il ne faudrait pas que la machine gouvernementale s'emballe au détriment de vouloir vraiment tout faire passer ces projets de loi, en enlevant l'essence qui est importante là-dedans. Je le répète encore, si on écoute les choses qui sont là, ce sont des outils de gestion pour faire en sorte que 90 p. 100 des problèmes vont être réglés avant qu'on soit dans la. . . Excusez-la.

[Traduction]

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, je suis tout à fait d'accord avec mon collègue du Bloc.

Cette série d'amendements a pour effet d'obliger le gouvernement à ne rien faire d'autre qu'à recourir à la Gazettte du Canada pour faire connaître aux Canadiens les changements qu'il se propose d'apporter. Lorsque le secrétaire parlementaire s'est opposé à ces motions, il a dit qu'elles n'appporteraient que des tracasseries administratives, qu'elles ne seraient d'aucune utilité et qu'elles allaient coûter cher.

Je lui ferai valoir, à lui et à son gouvernement, que c'est précisément ce genre d'attitude, ce fédéralisme autoritaire qui a mis le pays dans le pétrin et qui nous vaut tous les problèmes auxquels nous sommes actuellement confrontés. Je ne vois rien de mal à ce que le gouvernement, par le truchement de la Gazette du Canada, informe

3625

les Canadiens des modifications qu'il a l'intention d'apporter à nos règlements et lois.

Le Parti réformiste estime que le gouvernement devrait annoncer publiquement toute modification qu'il entend apporter à des dispositions réglementaires et, pour ce faire, recourir à la Gazette du Canada, comme le veut la mise en oeuvre de n'importe quel autre règlement. Grâce à l'obligation faite au gouverneur en conseil de publier toutes les modifications de règlements ainsi que tous les règlements originaux, on sera sûr que tous les règlements seront établis de façon transparente. Cela donnerait au public 60 jours pour faire une présentation au sujet d'un règlement ou d'un règlement modifié qui peut le concerner. Il faut absolument tenir des consultations; il ne faut pas y voir un élément négatif mais au contraire un moyen de s'assurer que les règlements sont équitables et tiennent compte des intérêts de tous les intervenants.

(2130)

Le Parti réformiste a un dicton. Nous apprenons à le dire en français: Le problème du Canada, c'est Ottawa.

Le président suppléant (M. Kilger): Chers collègues, nous avons accompli beaucoup de travail ce soir concernant le projet de loi C-26. Les motions sont nombreuses. L'opposition officielle, le Bloc Québécois, demande qu'un de ses députés intervienne pendant une période maximale de cinq minutes. En conséquence, le député de Chambly aurait la parole pour au plus cinq minutes, ce qui mettrait un terme au débat sur le groupe no 7. La Chambre est-elle d'accord?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, encore une fois et bien à contrecoeur, croyez-moi, je passe par vous pour m'adresser au député de Vancouver Quadra. En droit administratif, on disait toujours dans les lois que le gouverneur en conseil peut par ordre, les mots «par ordre» signifiaient par un ordre de cette Chambre. Donc cette Chambre pouvait demander au gouverneur en conseil d'adopter ou de promulguer tel ou tel règlement.

Monsieur le député de Vancouver Quadra et ministre d'État aux Pêches écoutez bien, ceci dit par l'entremise du Président qui nous écoute très attentivement, «le gouverneur en conseil peut sur la recommandation du ministre des Affaires étrangères», c'est l'article 25. On ne dit pas sur un ordre de la Chambre, mais «sur la recommandation du ministres des Affaires étrangères.» L'article 26(1) a le même effet, sauf qu'on dit «sur la recommandation du ministre de la Justice, prendre des règlements pour:».

Vous savez, la Loi sur les textes réglementaires ce ne sont pas les bloquistes, ni les péquistes, ni le gouvernement du Québec, ni l'ancien chef de l'opposition qui l'ont adoptée. C'est vous ici réunis. C'est votre pièce législative, ça émane de vous. Pas vous personnellement, monsieur le Président, mais la Chambre. On passe outre à la Loi sur les textes réglementaires et on entre dans l'esprit et la foulée des défunts projets de loi. J'ose dire défunts, C-62 du printemps dernier qui n'a jamais été adopté, C-84 qui est revenu présenté sous le nom de C-25. Le ministre s'arroge les pouvoirs de cette Chambre.

C'est finie la Loi sur les textes réglementaires. Dorénavant, le ministre peut de sa propre initiative, le ministre se lève un matin le gros bout devant et ça ne marche pas, il passe un règlement, n'importe lequel. Il dit au gouverneur en conseil: «Passe-moi ça ce matin, adopte-moi ça.» La Chambre n'est pas au courant, personne n'est au courant.

Et le pire, la cerise sur le sundae, comme ils disent en espagnol, c'est l'article 26(2). On s'est mêlé, on s'est trompé, on a mal appliqué, on a mal annoncé le règlement, qu'à cela ne tienne. Ce n'est pas grave. Il n'est pas nécessaire de publier de nouveau le projet de règlement même s'il a été modifié.

Par exemple, on dit que les gros bateaux n'ont plus le droit de naviguer sur le Saint-Laurent et on s'aperçoit que c'est une erreur, on s'est trompé. Là on dit que ce sont les petits bateaux qui n'ont plus le droit de naviguer sur le Saint-Laurent, mais on ne publie pas ça et le premier qu'on pogne dans le chenail du moine ou dans le comté de mon chum, le Saguenay, on lui dit qu'il est en infraction. Il nous dit qu'il n'a rien vu à cet effet et on lui répond qu'il n'a pas à le voir, ce n'est pas publié.

On en avait publié un, il n'était pas bon; on en a fait un autre, on ne le publie pas. Nul n'est censé ignorer la loi, et mon collègue, le député de Vancouver Quadra doit certainement connaître cette maxime. Mais là, il est en train de la changer pour: Devinez juste. C'est ça, dorénavant, avec le paragraphe 26(2) surtout: Devinez juste.

Tout à l'heure, il me reprochait de vouloir faire indirectement ce que la loi ne me permet pas de faire directement. Mais là, c'est l'inverse. Il fait indirectement ce que la loi l'oblige à faire directement. Donc, c'est le monde à l'envers. Vous le direz au député de Vancouver Quadra, monsieur le Président, puisque je n'ai pas le droit de lui dire moi-même. Alors, comme on disait: «À bon entendeur, salut!»

Tout ça pour dire au député de Vancouver Quadra: Essayez donc de poser un geste. . . Là, je vois le député Glengarry-Prescott-Russell qui s'épivarde. C'est un chic type d'ailleurs. Je ne suis pas sûr par exemple qu'il a compris cette technique. Le député de Vancouver Quadra pourra lui expliquer. Je suis certain qu'il fera bien cela. C'est un grand prof.

Je lui demande une dernière fois d'intercéder auprès de son chef ou de ses autorités ou du ministre des Pêches et des Océans. Il y a même un article qui dit qu'il peut pêcher, pourvu que ce soit de bonne foi. J'ai vu ça quelque part là-dedans. Je n'ai jamais vu une loi semblable.

En tout cas, pour ce qui est de l'adoption des règlements, je demande au député de Vancouver Quadra, s'il peut jouer un peu de son autorité en la matière, d'essayer de leur mettre les yeux vis-à-vis des trous, ils en ont besoin.

Le président suppléant (M. Kilger): Nous allons passer à la mise aux voix. Le vote porte sur la motion no 28. Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?

3626

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

[Traduction]

Il nous faudrait attendre que le vote soit tenu sur la motion no 28 pour savoir comment le résultat s'appliquerait aux motions 29 et 30, comme c'est arrivé plus tôt dans la soirée avec un autre groupe.

[Français]

Je remercie tous les intervenants ce soir de leur coopération. Conformément à l'ordre adopté le mardi 14 mai 1996, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à 14 heures.

(La séance est levée à 21 h 38.)