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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 9 octobre 1996

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE REGRETTÉ FRITZ ZIEGLER

LA RÉGION DES BASSES-LAURENTIDES

LA PUBLICITÉ SUR LES PRODUITS DU TABAC

LE PRIX CANSAVE POUR L'AIDE À L'ENFANCE

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

HABITAT FOR HUMANITY

L'ENVIRONNEMENT

LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA PRÉVENTION DESCATASTROPHES NATURELLES

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

L'EMPLOI

LA SEMAINE DE LA PRÉVENTION DES INCENDIES

L'ÉTHANOL

LE PROGRAMME «CALL TO REMEMBRANCE»

LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA PRÉVENTION DESCATASTROPHES NATURELLES

LA SEMAINE NATIONALE DE LA FAMILLE

LES NUMÉROS D'ASSURANCE-SOCIALE

    M. Lavigne (Verdun-Saint-Paul) 5286

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

QUESTIONS ORALES

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5287
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5287
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5287

L'EMPLOI

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5288
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5288
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5289

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

    M. Leroux (Shefford) 5289
    M. Leroux (Shefford) 5289

LA FISCALITÉ

    M. Martin (LaSalle-Émard) 5290
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5290

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5290
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5291

L'ASSURANCE-EMPLOI

    M. Harper (Simcoe-Centre) 5291
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5291
    M. Harper (Simcoe-Centre) 5291
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5291

LA LOI ÉLECTORALE

L'AMIANTE

L'ÉTHIQUE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5292
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5292

L'ASSURANCE-EMPLOI

L'ÉTHIQUE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5293
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 5293

LES ÉLEVEURS DE PORCS

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

    M. Martin (LaSalle-Émard) 5294

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE MOIS DE L'HISTOIRE DES FEMMES

    Mme Gagnon (Québec) 5295

COMITÉS DE LA CHAMBRE

AFFAIRES AUTOCHTONES ET DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

SANTÉ

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Adoption de la motion 5297

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA RÉFORME DE L'ENSEIGNEMENT À TERRE-NEUVE

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 5297

LA CONDUITE AUTOMOBILE AVEC FACULTÉS AFFAIBLIES

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 5297

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 5297

LES SOINS DE SANTÉ

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 5297

LES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE POUVOIR JUDICIAIRE

LES TAXES SUR L'ESSENCE

QUESTIONS AU FEUILLETON

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 5298

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

LA CONSOMMATION DE BOISSONS ALCOOLISÉES

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR LES MESURES EXTRATERRITORIALES ÉTRANGÈRES

    Projet de loi C-54. Motion visant à la troisième lecture 5299
    Mme Stewart (Northumberland) 5299
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 5307
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 5308
    Adoption de la motion; troisième lecture et adoptiondu projet de loi 5311

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGECANADA-ISRAËL

    Projet de loi C-61. Motion de deuxième lecture 5311

LOI SUR LES OCÉANS DU CANADA

    Projet de loi C-26. Reprise de l'étude entroisième lecture 5318
    Rejet de l'amendement par 126 voix contre 69 5318

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LE SERMENT D'ALLÉGEANCE

MOTION D'AJOURNEMENT

HOLLINGER INCORPORATED

LES PÊCHES

LES IMPORTATIONS DE COMBUSTIBLES

    M. O'Brien (London-Middlesex) 5329

5283


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mercredi 9 octobre 1996


La séance est ouverte à 14 heures.

_______________

Prière

_______________

Le Président: Comme nous avons l'habitude de le faire le mercredi, nous allons maintenant chanter le ô Canada qui sera entonné par le secrétaire d'État pour l'Asie-Pacifique.

[Note de l'éditeur: Tous les députés chantent l'hymne national.]

______________________________________________

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE REGRETTÉ FRITZ ZIEGLER

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, le regretté Fritz Ziegler de Vancouver, qui est décédé dans les 90 ans, était l'un des derniers romantiques de la côte ouest qui a contribué à poser les jalons de la prospérité économique actuelle de la Colombie-Britannique. C'était aussi un partisan infatigable de la collaboration entre les différentes communautés ethniques de la province et un organisateur de levées de fonds pour des organismes de charité et de santé communautaire.

Consul honoraire de Monaco et Grand Prieur pour les Amériques de l'Ordre souverain de Saint-Jean de Jérusalem, son imagination et son sens pratique sont symboliquement combinés dans le château gothique, du style du roi Louis de Bavière, qu'il a construit à flanc de montagne dans la forêt près de Langley, en Colombie-Britannique, et qui finira apparamment par servir d'établissement d'enseignement public.

* * *

[Français]

LA RÉGION DES BASSES-LAURENTIDES

M. Paul Mercier (Blainville-Deux-Montagnes, BQ): Monsieur le Président, la région des Basses-Laurentides est confrontée, depuis quelques mois, à une situation dramatique, frappée qu'elle est, coup sur coup, par trois traumatismes économiques majeurs.

Premièrement, il y a la cessation d'activité de l'usine Kenworth, que Québec essaie de sauver, sauvetage pour lequel la collaboration du gouvernement fédéral est déterminante. Deuxièmement, il y a le transfert de tous les vols internationaux de Mirabel à Dorval, suite à la décision d'ADM, sans que, malgré la demande de l'opposition officielle, Ottawa ait jusqu'ici cru bon d'exiger des audiences publiques pour permettre à la population de se faire entendre. Et, troisièmement, la grève vient d'éclater à la GM.

J'exprime ma solidarité à la population de ma circonscription, affectée par ce triple drame. Je fais appel aux parties concernées pour que, tant à Kenworth qu'à la GM et à ADM, les parties en présence fassent preuve d'esprit de conciliation et du souci de l'intérêt public qui seuls permettront de résoudre ce triple problème et de sauver notre région du marasme économique qui la menace.

* * *

[Traduction]

LA PUBLICITÉ SUR LES PRODUITS DU TABAC

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, la recherche nous dit que la publicité sur les produits du tabac a tendance à associer le fait de fumer à toute une gamme de caractéristiques désirables: la beauté, la popularité et même la santé. La recherche montre également que les jeunes sont deux fois plus susceptibles d'être influencés par la publicité pour les cigarettes que par la pression des pairs.

En reconnaissance de l'impact sur la jeunesse de la publicité sur les produits du tabac, la FDA des États-Unis a interdit toutes les opérations de parrainage des compagnies de tabac.

Jusqu'à maintenant, le gouvernement canadien n'a rien fait. Pourquoi? Est-ce parce que la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a une grande usine d'Imperial Tobacco dans sa circonscription? Est-ce parce que le ministre des Finances était membre du conseil d'administration d'Imasco et s'est inquiété de la santé de l'industrie du tabac à une époque où l'on discutait des taxes sur le tabac, en 1994? Est-ce parce que le sénateur libéral de South Shore, en Nouvelle-Écosse, est membre du conseil d'administration. . .

Le Président: Cher collègue, je pense que vous prenez trop de latitude par rapport aux règles.

* * *

LE PRIX CANSAVE POUR L'AIDE À L'ENFANCE

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Monsieur le Président, le 10 octobre, Aide à l'enfance-Canada remettra au sénateur Landon Pearson le prix CanSave pour l'aide à l'enfance.

Le sénateur Pearson défend depuis longtemps la cause des enfants et sa carrière dans ce domaine est exemplaire. Elle est membre fondateur et présidente de la Coalition canadienne des droits de l'enfance et elle a été présidente du Conseil canadien de l'enfance et de la jeunesse.


5284

Ce prix rend hommage à ceux qui ont contribué de façon remarquable à la réalisation des objectifs de la Déclaration des droits de l'enfant, adoptée en 1959 par les Nations Unies. Le premier prix pour l'aide à l'enfance avait été remis au beau-père du sénateur Pearson, l'ancien premier ministre Lester B. Pearson.

Je félicite donc le sénateur Pearson de cette réalisation exceptionnelle.

* * *

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, hier, le gouvernement a rendu public le rapport sur l'examen du mandat de la Société canadienne des postes. Ce rapport renferme un certain nombre de recommandations, dont une propose la privatisation de certaines activités commerciales de la Société canadienne des postes et la ministre a affirmé qu'elle étudierait ces recommandations. Elle a aussi laissé entendre que le gouvernement pourrait songer à privatiser la Société canadienne des postes si cette dernière cessait de jouer un rôle d'ordre public.

Les libéraux semblent vouloir retirer le gouvernement des services publics où les emplois et les salaires sont décents et favoriser plutôt un milieu à faibles salaires, qui serait profitable uniquement pour les grandes sociétés et ne garantirait pas à la population un service adéquat.

Nous avons déjà vu le même scénario. Compte tenu des compressions à Radio-Canada et de la privatisation du CN, d'Air Canada et de Petro-Canada, il semble que le gouvernement pratique une idéologie libérale-conservatrice qui vise la destruction de tout ce qui importe pour le Canada et qu'il veuille se décharger de toutes ses responsabilités publiques fondamentales.

L'idéologie axée sur le marché et non sur le citoyen est déplorable et il faut l'abandonner.

* * *

(1405)

HABITAT FOR HUMANITY

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, Habitat for Humanity est un organisme caritatif qui s'est donné pour mission d'éliminer les logements insalubres en donnant aux pauvres les moyens d'être propriétaires de leur maison.

Du 12 au 16 août, dans le cadre de ce projet lancé par Jimmy Carter, 600 bénévoles, dont 19 Canadiens, se sont retrouvés à Vac, en Hongrie, pour y construire dix maisons.

L'une d'entre elles, la maison du Canada, a été financée presque entièrement par des Canadiens d'origine hongroise. Beaucoup d'amour est allé dans la construction de la maison du Canada, comme en témoigne l'histoire de Marcus et Lisa Shantz. Ils ont passé une partie de leur voyage de noces à construire la maison du Canada sous la direction de Milo Shantz, père de Marcus.

Habitat for Humanity est un exemple du genre de créativité, de générosité et de progrès qui fait de notre monde un endroit plus agréable à habiter. Je félicite tous ceux qui ont participé aux travaux d'Habitat for Humanity à Vac, en Hongrie, ainsi que tous les bénévoles qui oeuvrent pour cet organisme à travers le monde.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, l'étude d'impact sur le bassin du MacKenzie, dont les résultats ont été rendus publics au printemps, indique sans l'ombre d'un doute que les changements climatologiques ont un impact sur cette région.

Le permafrost dégèle, les glissements de terrain et les incendies de forêts se multiplient, les caribous sont de plus en plus susceptibles aux maladies et aux parasites. Au fur et à mesure que ces impacts s'aggravent, leurs répercussions socio-économiques se font de plus en plus durement sentir dans les collectivités.

Les pays du monde entier s'entendent pour dire que c'est l'intervention de l'homme qui est la cause du réchauffement de la planète et des changements climatiques. Nous faisons tous partie du problème, nous devons tous faire partie de la solution.

* * *

[Français]

LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA PRÉVENTION DES CATASTROPHES NATURELLES

M. René Canuel (Matapédia-Matane, BQ): Monsieur le Président, les Nations Unies ont proclamé le second mercredi du mois d'octobre Journée internationale de la prévention des catastrophes naturelles.

Avec son thème «Villes en danger», cette journée porte à notre attention la situation extrêmement périlleuse des gigantesques agglomérations urbaines. Selon certaines estimations, d'ici à l'an 2000, 17 des 20 plus grandes villes au monde se retrouveront dans des pays en développement. Le défi est de taille.

La campagne «Villes en danger» offre l'occasion d'agir avant que le désastre ne se produise. Bien plus qu'une simple période de 24 heures, cette journée se veut le point culminant de tous les efforts investis dans la préparation d'urgence durant toute l'année.

Chez nous, le désastre du Saguenay-Lac-Saint-Jean nous a démontré l'importance de la prévention et la nécessité de la solidarité.

La journée d'aujourd'hui interpelle notre responsabilité à l'égard de l'humanité toute entière.

* * *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, le rapport sur l'examen du mandat de la Société canadienne


5285

des postes, qui a été rendu public hier, recommande que la société d'État soit assujettie à la Loi sur l'accès à l'information et fasse l'objet d'une vérification annuelle de la part du vérificateur général.

Il convient de noter qu'au mois de mars dernier j'ai déposé un projet de loi d'initiative parlementaire visant à modifier la Loi de l'accès à l'information de façon à ce que toutes les sociétés d'État soient tenues de se plier aux règles d'accès à l'information.

Dans le rapport Radwanski sur la Société canadienne des postes, on a formulé une série de recommandations qui méritent d'être étudiées attentivement, mais le ministre a fait fi de la plupart d'entre elles, y compris celle voulant que la Société canadienne des postes soit soumise à l'examen public.

Les Canadiens s'intéressent au fonctionnement des sociétés d'État. Ils ont le droit de savoir ce qui s'y passe, et le rapport Radwanski dit expressément qu'ils ont toutes les raisons de se préoccuper de la Société canadienne des postes.

Les libéraux ont promis un gouvernement qui travaille de façon plus transparente. Voilà le moment venu d'honorer cette promesse en assujettissant la Société canadienne des postes à la Loi sur l'accès à l'information et en confiant son examen au vérificateur général.

* * *

L'EMPLOI

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, aujourd'hui, le ministre des Finances va présenter un exposé économique au Comité des finances. Il va parler au comité de l'excellent travail que le gouvernement a fait au sujet de la réduction du déficit et dira que ce même gouvernement va dépasser ses objectifs.

Ce qu'il ne dira pas, c'est qu'il a réduit le déficit aux dépens des chômeurs. L'excédent de 5 milliards de dollars dans la caisse d'assurance-emploi gonfle ses chiffres au sujet du déficit. Il ne dira pas au comité que le taux de chômage est demeuré à plus de 9 p. 100 pendant plus de 72 mois consécutifs, la plus longue période depuis les années 30, malgré la promesse de créer des emplois.

Le Conference Board du Canada nous apprend que le taux réel de chômage chez les jeunes Canadiens dépasse 25 p. 100. Le gouvernement a promis des emplois. Au lieu de cela, il en supprime en maintenant les charges sociales à un niveau supérieur à celui qui est nécessaire.

(1410)

Le ministre des Finances fera-t-il la chose honorable en réduisant les cotisations d'assurance-emploi et en redonnant espoir à ceux et celles qui cherchent désespérément un emploi?

* * *

LA SEMAINE DE LA PRÉVENTION DES INCENDIES

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Monsieur le Président, comme de nombreux députés le savent, cette semaine est la Semaine de la prévention des incendies et tous les Canadiens peuvent y participer.

La Semaine de la prévention des incendies est un projet conjoint de votre collectivité, des services provinciaux d'incendie et de l'organisme Prévention des incendies du Canada. Ces experts veulent rappeler aux Canadiens qu'il ne faut que quelques minutes pour suivre quelques étapes fort simples.

Premièrement, installez des détecteurs de fumée à tous les étages et à l'extérieur de chaque chambre à coucher dans votre maison. Je tiens à vous rappeler de remettre la pile dans l'avertisseur lorsque vous avez fait brûler vos toasts.

Deuxièmement, vérifiez régulièreemnt le fonctionnement des détecteurs. Je sais que ce bruit est dérangeant, mais cela pourrait vous sauver la vie.

Troisièmement, prévoyez un plan d'évacuation de la maison en cas d'incendie et demandez à toute la famille de participer à des exercices d'incendie. C'est particulièrement important pour les familles qui ont de jeunes enfants.

Ces mesures vont réduire le nombre de morts tragiques et inutiles. En 1993, 417 Canadiens sont morts dans des incendies et plus de 3 400 ont été blessés. Je sais que tous mes collègues vont se joindre à moi pour encourager les Canadiens à rendre leur maison plus sûre toutes les semaines, et pas simplement pendant la Semaine de la prévention des incendies.

* * *

L'ÉTHANOL

M. Gar Knutson (Elgin-Norfolk, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens à la Chambre aujourd'hui pour souligner un autre fait marquant de l'industrie des techniques agricoles du Canada.

Je félicite la ville de Chatham et la société Commercial Alcohols qui ont annoncé récemment la construction d'une installation de production d'éthanol de 153 millions de dollars. Cette installation comptera parmi les plus grandes et les plus efficaces dans le monde. Cette usine favorisera l'industrie du maïs puisqu'elle utilisera jusqu'à 15 millions de boisseaux de maïs par an.

Dans l'entente conclue, les gagnants sont les producteurs de maïs de partout en Ontario, y compris ceux de ma circonscription d'Elgin-Norfolk. Au bout du compte, l'environnement aussi en bénéficiera, car les Canadiens abandonneront peu à peu les carburants aux hydrocarbures en faveur des hydrates de carbone renouvelables.

Le gouvernement libéral a encouragé le développement de l'éthanol au Canada en mettant en oeuvre un programme national de développement pour favoriser la production de l'éthanol à partir de matières de la biomasse. Ces efforts se sont soldés par 400 emplois permanents dans chaque installation et ils pourraient permettre de créer jusqu'à 6 000 emplois temporaires dans le bâtiment à l'avenir.

Voilà un autre exemple impressionnant de l'engagement que le gouvernement libéral a pris face aux emplois.

* * *

LE PROGRAMME «CALL TO REMEMBRANCE»

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole pour signaler à la Chambre un nouveau programme de jeu-questionnaire que la Légion royale canadienne est en train de mettre sur pied.

Le programme «Call to Remembrance» est un projet organisé à l'échelle du pays afin de contribuer à faire en sorte que les Cana-

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diens et surtout les jeunes comprennent la valeur des sacrifices consentis dans leur intérêt pendant les guerres que notre siècle a connues.

Je suis fier de dire que l'idée est née chez des membres de la filiale Hants-009 de la ville de Windsor, dans la circonscription d'Annapolis Valley-Hants.

Le jeu-concours «Call to Remembrance» sera lancé en 1997 partout au Canada. Ce programme permettra aux générations à venir d'apprendre à connaître les très durs sacrifices que les Canadiens ont eu à faire ainsi que l'effort national de guerre que nous avons dû consentir au cours des guerres qui ont marqué notre siècle.

* * *

[Français]

LA JOURNÉE INTERNATIONALE DE LA PRÉVENTION DES CATASTROPHES NATURELLES

M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui la Journée internationale de la prévention des catastrophes naturelles, journée soulignée partout à travers le monde depuis le début de la décennie. Le thème de cette année est «Villes en danger».

En l'an 2000, la moitié de la population mondiale habitera en zone urbaine sur un territoire représentant seulement 3 p. 100 de la superficie terrestre. Bon nombre de ces villes sont à risque: tremblements de terre, inondations, glissements de terrain et autres catastrophes naturelles peuvent s'y produire. L'an dernier, ces catastrophes ont coûté la vie à de nombreuses personnes et les dommages matériels, quant à eux, sont évalués à 65 milliards de dollars.

Notre vulnérabilité face aux catastrophes naturelles est réelle. Prévention, prévisions et information sont des outils à privilégier. La Journée internationale de la prévention des catastrophes naturelles est un moment de sensibilisation pour chacun et chacune d'entre nous.

* * *

[Traduction]

LA SEMAINE NATIONALE DE LA FAMILLE

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, à l'occasion de la Semaine nationale de la famille, il est nécessaire de rappeler aux libéraux qu'ils n'ont pas réussi à donner aux familles canadiennes ordinaires un sentiment d'espoir réel en l'avenir.

Ils affichent un bilan lamentable: un taux de chômage supérieur à 9 p. 100 depuis près de six ans; une fiscalité écrasante; des faillites en nombre sans précédent. Évidemment, la combinaison d'un traitement de ministre et d'un confortable régime de retraite de député a rendu les membres du gouvernement insensibles aux soucis économiques que les familles canadiennes éprouvent quotidiennement.

La donnée la plus choquante provient cependant d'une étude du Fraser Institute, qui révèle que le revenu disponible moyen de la famille canadienne a diminué de 3 800 $ depuis trois ans que les libéraux sont au pouvoir. C'est catastrophique.

(1415)

Les familles canadiennes ont besoin d'une baisse des impôts et de bons emplois permanents créés par un secteur privé florissant. Les parents veulent avoir la possibilité de s'occuper de leurs propres enfants, d'acheter une maison, de payer les études de leurs enfants et d'économiser pour leur propre retraite. Ils veulent un gouvernement plus petit et qui ne se mêle plus de leurs affaires.

Il est temps de réformer le gouvernement. . .

* * *

[Français]

LES NUMÉROS D'ASSURANCE-SOCIALE

M. Raymond Lavigne (Verdun-Saint-Paul, Lib.): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'informer cette Chambre de l'excellente initiative annoncée récemment par le ministre du Développement des ressources humaines du Canada.

Dorénavant, il ne sera plus possible à un conjoint violent de se servir de l'informatique afin de retracer sa femme. Le ministère vient en effet d'annoncer qu'il a pris les mesures nécessaires afin d'empêcher qu'un individu se serve de l'ancien numéro d'assurance-sociale de sa conjointe pour tenter d'obtenir le nouveau numéro d'assurance-sociale et, ainsi, la localiser.

Je tiens à féliciter le ministère du Développement des ressources humaines du Canada pour sa contribution à cette lutte de tous les instants que nous menons contre la violence et la criminalité.

* * *

LE PREMIER MINISTRE DU QUÉBEC

M. Mark Assad (Gatineau-La Lièvre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre du Québec, M. Bouchard, a demandé aux gens d'affaires de faire des efforts pour aider à créer des emplois. Le chef du gouvernement québécois demande de l'aide pour créer des emplois et pour réduire le déficit. Il demande de l'aide et de la solidarité face aux différentes coupures qu'il imposera à l'éducation, à la santé et aux programmes sociaux.

Les gens d'affaires et la population québécoise n'oublient pas que l'objectif premier de M. Bouchard est la séparation du Québec du Canada, et qu'à cause de cette option, la situation économique continuera d'être difficile. M. Bouchard va-t-il réaliser qu'une telle contradiction coûte très cher à la population du Québec?

______________________________________________


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QUESTIONS ORALES

[Français]

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, la crise qui touche les Forces armées est en train de se résorber lentement avec le départ de l'ex-ministre de la Défense et avec celui de l'ex-général en chef qui, à mon avis, a posé le seul geste qui pouvait être posé dans les circonstances. Mais un autre problème qui se pose, c'est celui de l'incapacité du premier ministre à admettre les faits quand il veut couvrir l'intégrité de son gouvernement.

Questionné hier en Chambre, le premier ministre déclarait que c'est le 2 octobre au matin qu'il avait été informé du fait que son


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ministre de la Défense avait gravement enfreint le code d'éthique des membres du Cabinet. Or, ce même mercredi, dans l'après-midi, le premier ministre déclarait, et je cite: «J'ai entièrement confiance dans le ministre de la Défense nationale», et il ajoutait: «Je vais le maintenir dans ses fonctions.»

Comment le premier ministre, qui avait su le matin même que son ministre de la Défense avait transgressé le code d'éthique, pouvait-il réitérer dans cette Chambre, à peine quelques heures plus tard, sa pleine confiance dans son ex-ministre de la Défense, et même nous dire que celui-ci resterait en poste longtemps? Comment peut-il expliquer cela?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à la Chambre, j'ai été informé le matin qu'il y avait un problème qui n'avait rien à voir avec les fonctions du ministre de la Défense en tant que tel, mais qu'il y avait peut-être un problème dans l'exécution de ses fonctions en tant que député au service d'un de ses commettants.

Alors, j'ai fait transmettre le problème à M. Wilson, qui est le conseiller en matière d'éthique. Je ne savais pas quelles allaient être ses conclusions, mais j'avais confiance au ministre de la Défense et j'ai toujours eu confiance au ministre de la Défense. Je répète qu'il a fait un excellent travail durant les trois ans au cours desquels il a été ministre de la Défense pour le ministère de la Défense nationale et pour le Canada.

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre peut bien dire qu'il semblait ne pas savoir véritablement si ce qu'avait fait le ministre de la Défense était un problème, mais le principe fondamental de son code d'éthique dit ceci: «Les ministres ne doivent ni intervenir, ni donner l'apparence d'intervenir.» Or, l'ex-ministre de la Défense avait écrit une lettre. Le premier ministre ne peut pas nous faire croire aujourd'hui qu'il ne savait pas vraiment s'il avait contrevenu ou non au code d'éthique. C'est trop facile.

(1420)

Dans le même ordre d'idées, en réponse à la lettre de démission du général Boyle, le premier ministre écrivait, et je cite: «Vous avez servi avec courage, dignité et intégrité.»

Sachant que des accusations portées sous serment par M. Gonzales pesaient contre le général Boyle, comment le premier ministre pouvait-il être si sûr de lui et louer l'intégrité du général en chef sans même connaître le dénouement de l'enquête qui se déroule à son sujet?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le général Boyle avait témoigné et il avait dit lui-même qu'il n'était pas au courant de certains faits et que la Commission regardait en la matière.

Dans l'exécution de ses fonctions en tant que général en chef des Forces armées canadiennes, il a bien fait son travail. Il avait une tâche extrêmement difficile; il accédait au poste de nouveau chef des forces armées au moment où la Commission commençait son travail. C'était difficile. C'est la première fois de l'histoire qu'il y avait une enquête de cette nature. Je pense que le général Boyle a fait de son mieux, il l'a fait honorablement. Il s'est aperçu, à la fin, qu'il était l'objet de controverses et, d'une façon très honorable, il a remis sa démission, que j'ai acceptée.

Alors pour moi, si la Commission, éventuellement, fait des commentaires là-dessus, j'aviserai, mais la tradition au Canada, et elle est très bonne, est qu'on ne déclare personne coupable avant qu'il y ait un jugement.

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre devrait être prudent et ajouter: «Et le premier ministre ne devrait peut-être pas féliciter quiconque avant que le jugement ne soit rendu quand des accusations pèsent.»

Un problème se pose actuellement devant la Chambre et c'est le suivant. Le premier ministre, sachant que son ministre était intervenu et qu'il avait contrevenu au code d'éthique, n'a accepté d'en admettre la réalité qu'au moment où il a été absolument incapable pour lui de s'en sauver, où il a été obligé de le faire. Le premier ministre, écrivant au général Boyle, continue de louer son intégrité et de vanter ses bons services, alors qu'il sait qu'une enquête se déroule et qu'il pourrait y avoir des conclusions. En tout cas, on peut au moins avoir un doute raisonnable dans ce cas-là.

Que penser de cette attitude du premier ministre? Doit-on comprendre que, pour lui, l'intégrité de son gouvernement est sauve tant et aussi longtemps qu'il ne se fait pas prendre la main dans le sac?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout cet incident de la semaine dernière a été rendu public et les décisions ont été prises avant que la presse n'en soit informée. J'ai été informé mercredi matin, j'ai eu l'avis, et le ministre de la Défense a eu l'avis de M. Wilson le jeudi, il est venu me voir à 18 heures et j'acceptais sa démission le lendemain matin. Je pense que c'est tout à fait raisonnable.

Je trouve très drôle que l'opposition n'ait pas grand-chose à dire contre le gouvernement pour s'attarder à des événements du passé. Alors, je tiens à féliciter tout mon Cabinet de bien mener le reste du gouvernement, parce que l'opposition n'a rien à dire ces jours-ci.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. En passant, on l'a entendu dire «le reste» des affaires était bien géré, donc, on comprend que celle-là ne l'était pas bien.

Le premier ministre a déclaré que la décision de son ex-ministre de la Défense n'avait aucun lien avec l'affaire de la Somalie, mais qu'elle était plutôt reliée à la question des règles d'éthique.

Pourtant, hier, le nouveau ministre de la Défense liait très clairement le départ de l'ancien ministre et celui du général Boyle à l'affaire somalienne en déclarant, et je cite: «Depuis quelque jours, deux gestes très difficiles pour les personnes impliquées ont été


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posés. Mon collègue, l'ancien ministre de la Défense nationale, a remis sa démission. Aujourd'hui, le général Boyle remet la sienne.»

Le premier ministre est-il conscient que dans son acharnement à vouloir sauver la face de son gouvernement, il va tellement loin, que son nouveau ministre de la Défense n'ose même plus le suivre?

(1425)

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, ce qui est très intéressant, dans la ligne de questions qu'on entend cet après-midi, c'est que ce que l'on sait, c'est grâce aux actions et aux actes de ce gouvernement, premièrement, en demandant une enquête sur ce qui s'est passé en Somalie. C'est pour cette raison que nous sommes devant quelques faits et on en attend toujours beaucoup d'autres.

Sur la question qui relève de la démission de mon prédécesseur comme ministre de la Défense nationale, encore là, nous sommes devant un fait qui a été très difficile, sans aucun doute, pour l'ex-ministre de la Défense nationale, de décider de donner sa démission. Pourquoi? À cause de règles mises en place par le premier ministre du Canada et son gouvernement pour assurer la bonne gestion du gouvernement.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question complémentaire s'adresse au premier ministre.

Le premier ministre peut-il nous dire si le fait que son nouveau ministre de la Défense revienne constamment sur la nécessité de faire uniquement la lumière sur les événements qui se sont produits en Somalie est une façon, pour son gouvernement, de détourner l'attention et d'enterrer, une fois pour toutes, l'opération falsification et camouflage de documents?

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Pas du tout, monsieur le Président. D'abord, c'est l'honorable député et d'autres collègues dans cette Chambre qui ont demandé qu'il y ait un rapport préliminaire par les enquêteurs sur les questions qui entouraient toute la situation touchant le général Boyle. Tout ce que j'ai dit, c'est qu'évidemment, avec la démission hier du général Boyle, on a traité jusqu'à un certain point de ce sujet.

Je vais accepter la proposition de l'honorable député et d'autres personnes dans cette Chambre en assurant que non seulement on fera la lumière sur ce qui vous intéresse aujourd'hui, mais qu'on fera la lumière sur ce qui intéresse les Canadiens et les Canadiennes, à savoir ce qui s'est passé en Somalie. C'est pour cette raison que je me joins à ceux et celles qui veulent avoir un rapport de la Commission d'enquête à la date prévue, à la fin du mois de mars, pour s'assurer justement que lorsqu'on s'en va en élections, il n'y a pas de camouflage.

* * *

[Traduction]

L'EMPLOI

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le bilan du gouvernement est loin d'être impeccable. Il

est terni, entre autres, par la promesse qu'il a rompue en ce qui a trait à la TPS et par le fiasco à la Défense nationale.

Cependant, la plus grave lacune du gouvernement est certes son incapacité à tenir sa promesse électorale de créer des emplois et encore des emplois. Il y a 1,4 million de chômeurs au Canada, 2 à 3 millions de travailleurs sous-employés et 4 millions de travailleurs qui craignent de perdre leur emploi. Cela représente presque la moitié de l'ensemble de la population active du Canada.

Le gouvernement a-t-il un plan pour créer non seulement des centaines de milliers d'emplois, mais bien les millions d'emplois nouveaux et enrichis qu'il doit livrer s'il veut respecter sa promesse électorale?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons un plan très précis à ce sujet. Nous avons réussi à créer 665 000 nouveaux emplois dans l'économie canadienne sur une période de trois ans. Nous avons aussi réussi à gérer l'économie en maintenant le taux d'inflation à 1,5 p. 100.

Le ministre des Finances, chargé de lutter contre le déficit du gouvernement, a toujours dépassé les objectifs qu'il s'était fixés. Voilà comment nous aimons procéder. D'ici deux ans, le gouvernement n'aura plus à emprunter, ce qui ne s'est pas vu depuis 25 ans.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, il y a une faille évidente dans la réponse du premier ministre. La seule façon de créer des emplois en nombre suffisant pour satisfaire les Canadiens consiste à réduire les taxes et les impôts, laissant ainsi plus d'argent dans les poches des consommateurs et des dirigeants d'entreprises privées qui créent des emplois. Toutefois, le gouvernement est incapable de réduire les taxes et les impôts, même qu'il fait tout le contraire. Il soutire de nos jours 25 milliards de dollars de plus aux contribuables qu'il ne le faisait la première année de son mandat.

(1430)

Quand le gouvernement réduira-t-il considérablement les taxes et les impôts pour créer les millions de nouveaux emplois intéressants dont ont besoin les Canadiens?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, si j'ai bonne souvenance, pendant la campagne électorale, le pays n'était aux prises qu'avec un seul problème, le déficit. C'est tout ce dont parlait le chef du tiers parti. C'est renversant de constater qu'il n'a toujours pas trouvé de nouveau cheval de bataille.

Des emplois ont été créés au Canada. En fait, plus d'emplois ont été créés au Canada qu'en Italie, qu'en Allemagne, qu'en France, qu'en Grande-Bretagne réunis.

La priorité du Canada n'est pas de réduire de 10 p. 100 les impôts de ceux qui gagnent un million de dollars par année. Lorsque ce sera possible, nous veillerons à ce que les plus démunis au sein de notre société profitent d'une part des avantages que nous créerons, ce qui n'est certainement pas l'objectif du député du tiers parti.


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M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre refuse de parler de réductions de taxes et d'impôts pour la simple raison que son gouvernement figure parmi les administrations qui traînent de la patte dans ce domaine au Canada.

Le premier ministre cite l'exemple de pays européens, mais omet de dire que son gouvernement ne fait pas autant pour résorber le déficit que l'Alberta, l'Ontario, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve.

On s'inquiète beaucoup plus d'une chute du revenu disponible des travailleurs dans les foyers canadiens que dans les réunions du Cabinet. Le revenu net d'impôt de la famille canadienne type a diminué de 3 000 $ depuis l'arrivée des libéraux au pouvoir.

Comment le premier ministre s'y prendra-t-il pour compenser la baisse de revenu de 3 000 $ que son gouvernement a imposée aux familles canadiennes?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de vous donner un exemple. Grâce à la bonne gestion du gouvernement, le taux d'intérêt affiche une baisse de 3 ou 4 p. 100 depuis un an et quelques mois.

Un propriétaire qui détient une hypothèque de 50 000 $ paiera 1 500 $ de moins après impôt. Un autre qui a une hypothèque de 100 000 $ paiera 3 000 $ de moins après impôt. Un automobiliste qui vient de s'acheter une voiture de 15 000 $ paiera 500 $ de moins en intérêts chaque année. Pourquoi? Parce que nous avons un bon ministre des Finances et un bon gouvernement.

Des voix: Bravo!

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Pourrais-je demander à mes collègues d'être un peu plus brefs et concis tant dans leurs questions que dans leurs réponses.

* * *

[Français]

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense.

Le ministre de la Défense a déclaré en cette Chambre qu'il veut faire toute la lumière sur ce qui s'est passé en Somalie. L'opposition officielle est d'accord avec lui. Mais s'il veut savoir ce qui s'est vraiment passé en Somalie, il doit avant tout faire toute la lumière sur la falsification des documents qui a eu lieu après.

Des voix: Oh, oh!

(1435)

M. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, ils sont bien énervés aujourd'hui.

Si le ministre refuse de demander un rapport intérimaire sur la falsification de documents, ne serait-ce pas parce que ce camouflage a eu lieu sous l'actuel gouvernement libéral?

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, nous voulons, comme mon honorable collègue, faire toute la lumière sur tout ce qui s'est passé entourant la situation en Somalie.

Le mandat de la Commission d'enquête sur la Somalie est très clair. Elle doit regarder tous les aspects et on espère qu'on aura des réponses dans les plus brefs délais, et surtout des recommandations.

Je veux me joindre à mon honorable collègue. Si les membres de la Commission d'enquête pensent que c'est la chose qu'ils doivent faire, de produire un rapport préliminaire, c'est à eux de le faire. On ne va pas donner de directives à la Commission. Je suis certain que tous les députés de cette Chambre comprennent qu'on ne doit pas s'ingérer dans les travaux de la Commission d'enquête.

Cela étant dit, j'espère que mon collègue se joindra à nous afin d'assurer que toute la lumière soit faite sur ce qui s'est passé en Somalie et que la Commission d'enquête fasse rapport à la date prévue, le 31 mars 1997, afin que tout le monde, tous les Canadiens et Canadiennes, les membres des Forces armées canadiennes, aussi bien que les députés de cette Chambre aient tous l'information nécessaire pour pouvoir prendre des décisions, si jamais il y avait une élection en 1997.

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, le ministre admettra-t-il que le gouvernement tente de faire en sorte qu'il n'y ait aucun rapport sur la Commission d'enquête portant sur la falsification des documents qui ne soit rendu public avant la prochaine élection pour sauver la face du gouvernement et celle du premier ministre?

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je vais tenter de sauver la face de l'honorable député. J'ai répondu à la question en lui disant: oui, si les gens qui font partie de la Commission d'enquête sur la Somalie croient que c'est dans les meilleurs intérêts et que ça reflète leur mandat, qu'ils désirent faire un rapport préliminaire, qu'ils le fassent. Je ne leur demande pas de le faire, parce que je ne veux pas m'ingérer dans les travaux de l'enquête. Mais s'ils croient que c'est la chose à faire, je suis d'accord.

Plus que ça, pour être certain de se comprendre, j'espère que toute la lumière sera faite, non seulement sur les faits qui intéressent l'honorable député, mais sur qui a fait quoi en Somalie, les raisons qui ont permis de le faire, comment on a camouflé ce qui a été fait, si c'est le cas, qui est responsable de cela et comment on s'organise pour s'assurer que cela ne se reproduise plus.

J'aimerais, et je suis certain que tous les députés de cette Chambre le veulent, avoir toutes les réponses en ce qui a trait à la question de la Somalie avant les prochaines élections, sans penser que j'en ai


5290

la date, car le premier ministre a toujours cette discrétion et cette prérogative. J'espère que la Commission d'enquête fera son rapport le 31 mars, tel que prévu, comme ça, on saura tout à ce moment-là.

* * *

[Traduction]

LA FISCALITÉ

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, beaucoup de familles canadiennes voudraient avoir la possibilité de choisir qu'un des parents reste à la maison, mais, vu le régime fiscal que nous avons, le ménage type à un seul revenu de 60 000 $ paie en impôt 7 000 $ de plus que le ménage qui a un revenu semblable, mais dont les deux conjoints font partie de la population active.

Pourquoi le ministre des Finances et le gouvernement continuent-ils à promouvoir des politiques fiscales discriminatoires qui privent les familles de la liberté de choisir comment elles veulent élever leurs enfants?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, si le député étudie la Loi de l'impôt sur le revenu et la politique du gouvernement, il constatera que la situation est bien différente de ce qu'il prétend.

Dans le régime actuel, par exemple, les couples mariés ont droit au crédit de personne mariée, qui peut réduire l'impôt sur le revenu d'un maximum de 1 500 $ dans les circonstances que le député a décrites.

Il existe aussi une supplément spécial, dans le cadre du crédit d'impôt pour enfants, crédit accordé aux parents qui gardent eux-mêmes au foyer leurs enfants d'âge préscolaire. Ce crédit est fonction du revenu du ménage, si bien qu'il augmente automatiquement lorsqu'un des parents renonce à un emploi pour rester à la maison.

En réalité, le régime fiscal répond directement aux préoccupations du député, qui ferait bien de s'informer au lieu de sauter aux conclusions.

(14440)

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, 7 000 $, ce n'est peut-être pas grand-chose pour les millionnaires, mais c'est beaucoup pour le contribuable ordinaire.

Le ministre des Finances peut-il expliquer aux Canadiens pourquoi un type de service de garde donne lieu à un crédit d'impôt et un autre non? Pourquoi le gouvernement oriente-t-il le choix personnel que les familles canadiennes peuvent faire dans l'éducation de leurs enfants? Pourquoi cette discrimination?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je le répète, c'est tout le contraire. Nous n'orientons pas les choix. Nous avons un régime qui prévoit de généreux avantages lorsqu'un des deux parents décide de rester à la maison précisément pour les raisons auxquelles le député semble faire allusion.

Si nous adoptions sur-le-champ le type de régime que le député préconise, le deuxième conjoint qui entrerait sur le marché du travail tomberait aussitôt sous le coup d'un impôt prohibitif. Cela ne tient pas debout.

Autre chose. Un certain nombre de pays européens, presque tous, en fait, qui établissaient l'impôt en fonction du ménage sont en train d'adopter le même genre de régime que le nôtre parce qu'il est de loin préférable.

* * *

[Français]

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, vantant les mérites de son ex-ministre de la Défense, le premier ministre déclarait hier, et je le cite: «Je lui ai dit que j'espérais un jour avoir l'occasion de lui souhaiter de nouveau la bienvenue au sein du Cabinet.»

Des voix: Bravo!

M. Duceppe: Monsieur le Président, le député de Glengarry-Prescott-Russell ferait peut-être mieux de ne pas applaudir, il a des chances de sortir si l'autre revient.

Le premier ministre peut-il s'engager devant cette Chambre à ce que l'ex-ministre de la Défense ne soit pas rappelé au Cabinet tant et aussi longtemps qu'un rapport faisant la lumière, et toute la lumière, sur la falsification de documents et sur la responsabilité de l'ex-ministre dans cette opération n'aura pas été rendu public?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre décide d'inviter quelqu'un au Cabinet lorsqu'il décide de l'inviter au Cabinet. Le ministre a remis sa démission pour des raisons très honorables et c'est avec beaucoup de regret que j'ai accepté sa démission, mais je maintiens qu'il a fait un travail extraordinaire en tant que ministre de la Défense dans des circonstances extrêmement difficiles.

L'ancien gouvernement avait eu sept ministres de la Défense en neuf ans, et le ministre de la Défense qui a démissionné vendredi dernier a réussi à effectuer des compressions énormes, à réduire le personnel, à réduire le nombre de généraux de 125 à 70, et il a continué à faire des compressions très difficiles. Je pense qu'il a droit aux remerciements de cette Chambre pour un travail bien fait.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, comment le premier ministre peut-il refuser d'attendre la parution d'un rapport intérimaire portant sur la falsification de documents avant de penser ramener au Cabinet son ami, l'ex-ministre de la Défense, alors qu'il déclarait en cette Chambre, le 2 octobre, et je le cite: «C'est justement parce que je veux que la Commission termine son travail que je n'anticiperai pas sur ses conclusions.»

Ce serait peut-être plus sage d'attendre. On ne sait jamais quelles pourraient être les conclusions de la Commission. Le premier ministre serait peut-être mieux de ne pas anticiper trop tôt.


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Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce que le gouvernement souhaite, c'est qu'on fasse, comme a dit le ministre de la Défense à plusieurs reprises en Chambre, avant-hier, hier et aujourd'hui. Il dit: «Nous espérons que la Commission va remplir le mandat qu'elle a reçu, soit de faire la lumière sur ce qui s'est passé en Somalie.»

C'est le mandat qui lui a été donné et nous espérons avoir le rapport le plus tôt possible, de telle sorte que si des changements doivent être apportés à l'intérieur de la structure des forces armées à cause des incidents de Somalie, le ministre de la Défense sera en mesure de porter remède dans les plus brefs délais. Si la Commission veut faire rapport avant le mois de mars, nous en serons très heureux.

* * *

[Traduction]

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, c'est la semaine de la famille, et les Canadiens veulent savoir ce que les libéraux font pour les familles qui continuent de subvenir aux besoins de leurs enfants qui n'arrivent pas à trouver du travail.

Récemment, le ministre des Finances a reconnu que l'assurance-emploi décourage l'embauche de nouveaux employés. Compte tenu des énormes surplus accumulés dans la caisse de l'assurance-emploi, quand le nouveau ministre du Développement des ressources humaines annoncera-t-il une réduction des cotisations, de manière que les jeunes Canadiens puissent trouver les emplois qu'ils cherchent si désespérément?

(1445)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, il ne fait pas de doute qu'il est important de réduire les charges sociales.

Au cours de la première année de son mandat, le gouvernement actuel a empêché que les cotisations à l'assurance-chômage passent à 3,30 $, comme c'était prévu. En fait, sous le gouvernement actuel, ces cotisations sont passées à 3,07 $, à 2,95 $ puis à 2,90 $. L'an dernier, à la même époque, nous avons pris toute une série de mesures et nous avons réussi, depuis notre arrivée au pouvoir, à réduire de 1,8 milliard de dollars la charge salariale que constitue l'assurance-chômage. Nous avons fait cela justement pour redonner du travail aux Canadiens.

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances parle de la première année où le gouvernement a été au pouvoir. Cette année-là, la dette était de 490 milliards de dollars; elle frôle maintenant les 600 milliards de dollars, et le taux de chômage chez les jeunes demeure à 18 p. 100.

Le système d'assurance-emploi est discriminatoire envers les jeunes, même envers ceux qui ont un emploi. Les étudiants à plein temps sont obligés de payer des cotisations même si, en vertu de la loi, ils ne pourront jamais toucher de prestations. Ils ont grandement besoin du montant de ces cotisations pour payer leurs livres et leurs frais de scolarité. Le nouveau ministre du Développement des ressources humaines prendra-t-il immédiatement des mesures pour soustraire les étudiants à plein temps à l'obligation de payer des cotisations pour des prestations d'assurance qu'ils ne pourront jamais toucher?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député parle d'aider les jeunes. Voyons un peu le fil des événements.

Lorsque l'ancien ministre du Développement des ressources humaines a haussé le budget des emplois d'été pour étudiants, le Parti réformiste s'est opposé à cette initiative. Lorsque le gouvernement a accru les crédits pour frais de scolarité des étudiants fréquentant un établissement d'enseignement, le Parti réformiste s'est dit contre cette mesure. Lorsque le gouvernement a mis davantage de fonds à la disposition des personnes qui ont la garde de leurs enfants pour leur permettre de suivre des cours pendant que d'autres s'occupent de leurs enfants, le Parti réformiste a exprimé son opposition.

Le Parti réformiste s'est opposé à toutes les mesures que nous avons proposées à la Chambre pour aider les étudiants et les jeunes Canadiens. En fait, les réformistes sont complètement déconnectés de la réalité canadienne.

* * *

[Français]

LA LOI ÉLECTORALE

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Nous avons appris, aujourd'hui, que le gouvernement avait décidé de ne pas en appeler du jugement de la Cour d'appel de l'Alberta, rendu en juin dernier, qui a invalidé les dispositions de la loi fédérale qui interdisait les tierces parties à dépenser plus de 1 000 $ pour la publicité lors des campagnes électorales.

Le ministre ne croit-il pas que sa décision de ne pas en appeler de ce jugement pourrait créer une situation identique à celle qui prévaut aux États-Unis et qui permet aux riches groupes de pression de financer les candidats de leur choix, ce qui influence injustement le résultat des élections?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais informer le député que mon collègue, le leader du gouvernement à la Chambre et solliciteur général, a l'intention d'examiner toute cette question et de proposer des mesures pour corriger la situation.

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, je pense que le gouvernement a l'occasion de les faire, ces modifications, et d'en appeler de cette décision.

Par son inaction, le ministre n'est-il pas en train d'admettre qu'il se prépare tranquillement à donner son appui à la cause Libman devant la Cour suprême qui conteste les dispositions de la Loi référendaire québécoise sur la limitation des dépenses pour ainsi défendre ses propres collègues et amis libéraux et peaufiner la stratégie référendaire de la prochaine campagne référendaire du Québec?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais informer le député que cette


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action ne s'applique pas à la Loi référendaire du Canada, car elle s'applique seulement à la Loi électorale.

Donc, en ce qui concerne la Loi électorale, le solliciteur général et leader du gouvernement à la Chambre est en train de regarder la situation. Il sera en mesure, dans un bref délai, de revenir avec des propositions.

* * *

L'AMIANTE

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, depuis que le gouvernement français a annoncé son intention de bannir l'utilisation de l'amiante, on voit et on entend constamment les représentants du gouvernement du Québec s'agiter dans tous les sens et répéter qu'ils travaillent activement sur la question. Le gouvernement fédéral s'occupe du dossier, mais les milliers de travailleurs de l'amiante commencent à s'impatienter.

La ministre des Ressources naturelles peut-elle nous dire si le gouvernement fédéral s'occupe activement du dossier de l'amiante et, dans l'affirmative, où en est rendu ce dossier?

(1450)

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de pouvoir rassurer le député en affirmant que le gouvernement fédéral a une stratégie très énergique dans le dossier de l'amiante et que nous travaillons en collaboration avec d'autres intervenants, dont la province de Québec.

Il y a quelques semaines, j'ai rencontré mon homologue à Québec et nous nous sommes entendues sur la nécessité de collaborer. Nous sommes maintenant en train de fixer les modalités de notre partenariat.

Mon collègue, le ministre du Commerce international, s'est mis en communication avec de nombreux gouvernements étrangers, dont le gouvernement français. De son côté, le ministre de la Santé est intervenu auprès de son homologue français pour s'assurer qu'il avait en mains des données exactes et précises sur les questions de santé entourant l'amiante.

Hier, c'est avec plaisir que j'ai annoncé que mon ministère accorderait 500 000 $ à l'Institut de l'amiante pour poursuivre un programme de recherche sur l'utilisation sûre et contrôlée des produits de l'amiante.

* * *

L'ÉTHIQUE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, hier, le premier ministre a donné une excuse incroyable à la Chambre pour ne pas publier les lignes directrices en matière d'éthique auxquelles sont assujettis les membres du Cabinet. Il a dit que la tradition parlementaire britannique l'empêchait de rendre les lignes directrices publiques. Le premier ministre n'est pas sans savoir que le gouvernement britannique a publié ses propres lignes directrices à cet égard en 1992.

Je demande à nouveau au premier ministre s'il va publier les lignes directrices en matière d'éthique auxquelles sont assujettis les membres du Cabinet.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ces lignes directrices sont des instructions que le premier ministre donne à ses ministres et que ceux-ci sont tenus de suivre. Un conseiller supervise le tout et éclaire les ministres qui estiment avoir un problème.

Il s'agit d'instructions que le premier ministre donne à ses ministres. Je le répète, dans la tradition britannique, c'est le premier ministre qui, au bout du compte, est responsable de leur conduite et j'ai toujours assumé l'entière responsabilité dans ce domaine. Les lignes directrices constituent des instructions pour mes ministres. Notre système veut que les communications entre le premier ministre et les ministres soient confidentielles.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre semble croire que l'éthique ne concerne que ses ministres et lui. Il ne veut pas publier les lignes directrices, dont il se sert seulement à son avantage politique, pour saquer, par exemple, le ministre de la Défense nationale.

L'éthique est une affaire publique. C'est à la population de juger si les ministres du premier ministre se conduisent bien et, pour cela, elle doit connaître les lignes directrices. Comment les Canadiens sont-ils censés savoir si les lignes directrices en matière d'éthique auxquelles sont assujettis les ministres sont valables si le premier ministre ne les rend pas publiques?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je me demande si le chef du tiers parti est en train de faire valoir que le ministre n'aurait pas dû démissionner. Le ministre m'a remis sa lettre de démission et je l'ai acceptée. Le député a l'air de dire qu'il n'y avait pas de quoi démissionner, mais il y avait amplement de raisons conformément à nos normes.

* * *

[Français]

L'ASSURANCE-EMPLOI

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Hier, le nouveau ministre du Développement des ressources humaines, et j'en profite pour le féliciter. . .

Des voix: Bravo!

Mme Lalonde: . . .et le plaindre un peu. . .

Des voix: Oh, oh!

Mme Lalonde: Oui, monsieur le Président, je répète: et le plaindre un peu.

Hier, le nouveau ministre disait sa fierté de voir l'assurance-chômage devenir, grâce à la réforme de ses prédécesseurs, un système qu'il dit moderne et adapté à ce qu'il appelle la nouvelle économie.


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(1455)

Le ministre est-il conscient que ce qu'il appelle un système moderne est en réalité un système qui, pour les personnes si nombreuses, trop nombreuses, acculées au chômage, donnera moins de prestations pendant moins longtemps après des exigences accrues de qualification?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'apprécie beaucoup la première question de ma collègue en cette Chambre. J'en suis tout à fait ravi.

Je peux rassurer les Canadiens que le nouveau système de l'assurance-emploi a pour objectif de passer de mesures qui étaient passives à un système de mesures actives qui valorisent le travail et qui, donc, aident les travailleurs à passer du non-emploi à un emploi.

C'est une façon qui est beaucoup plus intéressante et qui, j'attirerais l'attention de la députée, est un système qui couvre un plus grand nombre de Canadiens qui n'étaient pas couverts par l'ancien système et qui, notamment, permet à un plus grand nombre de femmes, qui n'étaient pas couvertes autrefois par l'ancien système, d'en profiter.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, le ministre va devoir rapidement faire le tour de son dossier, parce que je lui demande s'il est conscient que les mesures actives, pendant les cinq années qui viennent, ne représentent que 200 millions de plus, alors que pendant ce temps-là, plus de 65 milliards seront versés en prestations d'assurance-chômage. Le virage aux mesures actives est de la poudre aux yeux.

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le montant qui sera investi au cours des prochaines années sera de 800 millions. C'est quand même un montant qui est passablement intéressant et un montant qui permettra, comme je le disais un peu plus tôt, à des gens qui n'étaient pas couverts par l'ancien système de l'être au cours des prochaines années.

Les femmes de Papineau-Saint-Michel l'apprécient, parce qu'elles n'étaient pas couvertes par l'ancien système et elles en sont très reconnaissantes au gouvernement.

* * *

[Traduction]

L'ÉTHIQUE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Je lui demande d'y réfléchir attentivement. Je me demande si le premier ministre sait comment cette question est perçue dans la population en général. Je lui demande de revenir sur sa position.

De quoi a-t-il peur, que tente-t-il de cacher, pourquoi ne rend-il pas publiques les lignes directrices du code d'éthique que doivent respecter les ministres?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre est toujours responsable de la conduite de ses ministres. C'est à lui de juger et d'assumer les conséquences de ses décisions. C'est ainsi que le système fonctionne depuis des années.

En ce qui concerne les communications au sein du gouvernement, il est très important que le premier ministre et les ministres jouissent d'une certaine confidentialité en cette matière. Évidemment, le troisième parti n'en a cure parce qu'il sait qu'il ne formera jamais le gouvernement. Il ne se préoccupe donc pas de la responsabilité que doit assumer le gouvernement.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre parle beaucoup de ses responsabilités et des moyens qu'il entend prendre pour les assumer. Je vais le prendre au mot.

Assumera-t-il la responsabilité de ses lignes directrices et les rendra-t-il publiques pour qu'on puisse en prendre connaissance? Que tente-t-il de cacher? Il n'y a sûrement rien à cacher. Qu'il les rende donc publiques.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a rien à cacher. Les actes des ministres sont connus du public et le premier ministre en assume la responsabilité. C'est un processus très ouvert au public.

Quand le premier ministre traite avec les membres de son Cabinet, il a le droit et l'obligation d'avoir des conversations en privé avec eux. Autrement, il n'y aurait pas de gouvernement. Le gouvernement exige du premier ministre qu'il assume ses responsabilités. Tout le monde sait que je n'ai pas peur de prendre mes responsabilités.

* * *

LES ÉLEVEURS DE PORCS

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Les producteurs de porcs du Canada subissent des pressions économiques énormes depuis plusieurs années parce que le gouvernement américain impose des droits compensateurs sur toutes les importations de porcs en provenance du Canada.

Que fait le ministre pour protéger nos producteurs de porcs contre les conséquences néfastes de cette mesure prise par les États-Unis?

(1500)

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le département du Commerce des États-Unis procède depuis déjà quelque temps à un examen de l'exigibilité de droits compensateurs à l'égard de certains programmes agricoles canadiens, tant au niveau fédéral qu'au niveau provincial, particulièrement entre 1991 et 1994.

Je suis heureux d'annoncer au député deux bonnes nouvelles importantes découlant de cet examen des programmes canadiens par le département du Commerce. Premièrement, les producteurs de porcs du Canada recevront un remboursement de 28,5 millions de dollars pour les droits qu'ils ont déjà payés.

Deuxièmement, en faisant cet examen, le département du Commerce a également jeté un coup d'oeil sur le compte de stabilisation du revenu net, le CSRN, programme qui est au coeur de tout le système de soutien du revenu agricole au Canada, et il a confirmé que ce programme ne justifie pas l'imposition de droits compensa-

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teurs par les Américains. Le CSRN est sans incidence sur le commerce, ce qui confirme la position adoptée par notre gouvernement.

* * *

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances qui, dans une demi-heure, va probablement se disloquer une épaule à force de taper dans le dos de ses collègues du Cabinet pour leur performance financière récente.

Le 12 janvier dernier, le Citizen citait les propos suivants du ministre des Finances: «Dès que je le pourrai et que notre situation financière le permettra, je m'attaquerai au grave problème de la pauvreté chez les enfants au Canada.

Compte tenu que 1 747 000 enfants vivent actuellement sous le seuil de la pauvreté, quand le ministre croit-il pouvoir agir?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, la question du député touche une corde très sensible du gouvernement. C'est d'ailleurs ce qui explique que nous avons doublé, depuis 15 mois, le supplément du revenu gagné versé aux familles ayant de jeunes enfants. Le ministre de la Justice a introduit un train complet de lignes directrices concernant les pensions alimentaires pour enfants versées aux parents ayant la garde des enfants.

Il va de soi que le gouvernement voudrait pouvoir faire beaucoup plus et c'est d'ailleurs ce que nous entendons faire. Le député a raison lorsqu'il dit que le gouvernement assainit la situation financière du pays mais qu'il ne doit pas oublier d'améliorer les conditions financières des citoyens canadiens.

Un de nos plus gros problèmes est de venir à bout du gâchis créé par d'autres, pour être en mesure de réaliser ce que le député souhaite nous voir faire.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de M. Antonio Graziani, député du Parlement européen.

Des voix: Bravo!

______________________________________________


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AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à deux pétitions.

* * *

LE MOIS DE L'HISTOIRE DES FEMMES

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole pour souligner le Mois de l'histoire des femmes.

Le Mois de l'histoire des femmes a été promulgué en 1992 par le gouvernement fédéral en vue d'une meilleure sensibilisation des contributions historiques des femmes à notre société.

C'est à ma province, la Colombie-Britannique, que l'on doit l'idée du Mois de l'histoire des femmes, idée qui ne devait pas tarder à recevoir l'appui de diverses organisations à travers le pays.

(1505)

[Français]

Depuis les cinq dernières années, le mois d'octobre est désigné Mois de l'histoire des femmes au Canada. C'est l'occasion pour nous tous de reconnaître, de découvrir et de célébrer les réalisations des femmes au Canada dans tous les milieux de la société.

[Traduction]

Octobre a été jugé le mois le plus opportun pour reconnaître les réalisations des femmes puisque le 18 octobre marque une étape historique importante de la lutte en faveur de l'égalité des femmes, soit l'anniversaire du jour où les femmes ont légalement obtenu le status de personne au Canada. Ce jour-là, il y a tout juste 67 ans, cinq Albertaines-Nellie McCullung, Louise McKinney, Emily Murphy, Irene Parlby et Henrietta Muir Edward-ont finalement obtenu gain de cause dans la longue lutte en vue de faire reconnaître pleinement les femmes en tant que personnes. On a lors déclaré que les femmes n'étaient plus considérées officiellement comme des possessions ou des être inférieurs.

Le mois de l'histoire des femmes permet de reconnaître et de célébrer les femmes de ce pays. Tellement d'éléments très importants de l'histoire des femmes-leur apport au développement économique et social de ce grand pays-ont été négligés par les historiens traditonnelles, par les manuels scolaires et les médias.

Il faut trop souvent creuser profondément pour trouver ce qui été oublié ou passé sous silence. Chaque fois que nous le faisons, nous apprécions davantage le rôle essentiel que les femmes ont joué afin de façonner la société canadienne. L'histoire des femmes en est une de lutte, de courage et d'héroïsme.

Par le passé, les femmes se sont vu refuser le droit d'étudier. On leur a interdit l'accès à certaines professions et elles n'ont pas reçu le soutien nécessaire pour entrer dans la fonction publique et participer au processus décisionnel politique. Malgré ces terribles obstacles, les femmes ont réussi à contribuer de façon déterminante au développement du Canada.

Le mois de l'histoire des femmes nous donne l'occasion de raconter leur histoire et de célébrer leurs impressionnantes victoires, de parler de leurs contributions en temps de paix et de guerre, en tant que pionnières et scientifiques et en tant qu'héroïnes de tous les jours qui ont élevé des familles malgré la pauvreté et la privation, la violence et l'exclusion.


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[Français]

Cette année, ce cinquième Mois de l'histoire des femmes célèbre les femmes et les arts. Nous rendons hommage à notre héritage culturel. Tout au long de notre histoire, les réalisations artistiques et culturelles des femmes ont souvent été sous-estimées et oubliées, essentiellement en raison de l'inégalité des femmes au sein de la société.

[Traduction]

Les femmes ont activement participé à l'évolution culturelle de ce pays; elles ont forgé l'identité du Canada. Nous connaissons très bien certaines de ces femmes: Emily Carr, Mary Pickford, Gabrielle Roy. Que ce soient les écrits d'Adèle Bibaud, une des premières romancières canadiennes-françaises, ou les photos de la nature prises par Geraldine Moore au début du siècle, les oeuvres de ces Canadiennes sont autant de témoins de leur lutte pour la reconnaissance et de leur victoire.

On a déjà dit que ce sont les gestes quotidiens qui contribuent à bâtir l'histoire. Le Mois de l'histoire des femmes permet de mettre en valeur ces gestes quotidiens. Le fait de se souvenir de l'histoire des femmes, de la découvrir et de la célébrer, a une influence indéniable sur l'ensemble des Canadiens. Les Canadiennes nous ont laissé un héritage culturel extraordinaire, qui exprime bien les expériences changeantes et diverses des femmes de chez nous.

J'invite tous mes collègues de la Chambre à prendre le temps de découvrir et de célébrer ces femmes qui ont joué un rôle important dans l'héritage culturel de notre pays, à leur céder la place d'honneur en tant que modèles pour les Canadiens qui nous suivront, hommes et femmes. Ce faisant, je les encourage à jeter les bases de l'avenir, un avenir dans lequel les femmes et les hommes sont traités également, et avec respect.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, le mois d'octobre est le temps de l'année réservé pour souligner l'histoire des femmes. En effet, les noms de femmes ne jalonnent pas nos manuels d'histoire autant qu'on le souhaiterait et surtout pas à la mesure de leur implication dans la société.

Plusieurs femmes sont dans l'ombre, et je voudrais aujourd'hui leur rendre hommage. Cette histoire est plus souvent qu'autrement le fait d'hommes qui prennent des décisions sans l'apport de la moitié de la population et qui laissent ainsi leur nom à la postérité. Ce n'est pas une critique, c'est une constatation.

Je remercie la secrétaire d'État à la Situation de la femme et au Multiculturalisme d'avoir pris aujourd'hui l'initiative de souligner ce Mois de l'histoire des femmes par une déclaration ministérielle. Cette Chambre, qui ne compte malheureusement que bien peu de femmes, entendra un peu parler de nous aujourd'hui grâce à cette initiative qui vise à souligner le Mois de l'histoire des femmes au Canada.

En songeant à ce que fut l'histoire des femmes, force nous est de constater qu'elle compte des héroïnes qui, malgré les difficultés de leur temps, ont marqué leur époque et fait avancer les femmes vers l'égalité.

(1510)

Récemment, le Québec perdait l'une de ses plus grandes féministes en la personne de Claire Bonenfant, qui avait été présidente de la Fédération des femmes du Québec et avait donné au Québec sa première politique intégrée en condition féminine, une politique féministe qui portait le nom Égalité et Indépendance. Mme Bonenfant était épaulée par une championne des droits des femmes,Mme Lise Payette.

Ces contemporaines de l'histoire des femmes s'inscrivent tout droit dans la tradition de ces femmes professionnelles ou simples citoyennes qui ont investi dans le mieux-être de leur communauté. Depuis Marie Guyart, mieux connue sous le nom de Marie-de-l'Incarnation, en passant par Agnes McPhail, Marie Gérin-Lajoie, Carrie Derick, Thérèse Casgrain et Laure Gaudreault, toutes n'ont eu qu'un seul objectif: améliorer le sort des femmes et celui des enfants, parce que trop souvent les deux sont liés. Et toutes elles ont contribué à l'élaboration d'une société meilleure, sans égard aux gains ou aux pertes qu'elles allaient encourir.

Aujourd'hui, encore une fois, je veux rendre hommage à Claire Bonenfant et la remercier sincèrement de son dévouement, de sa chaleur et de sa sincérité, qui nous auront permis d'avoir un modèle de féministe fidèle à ses convictions, même lorsqu'elle est devenue grande commis de l'État en tant que présidente du Conseil du statut de la femme.

Mais l'histoire s'inscrit dans le temps et donc se poursuit. Hélas, je dois bien le dire, nous en sommes encore à souligner régulièrement l'accession de la première femme à ce poste-ci ou à ce poste-là. Ainsi, tout récemment encore, ma collègue de Rimouski-Témiscouata soulignait la nomination de Lyse Lemieux, première femme à occuper le poste de juge en chef à la Cour supérieure du Québec.

Ces femmes font l'histoire et nous souhaitons que leurs nominations de plus en plus nombreuses nous rapprochent du jour où nous aurons une tradition dans les postes de leadership et de pouvoir.

Le mois d'octobre 1996 a pour objectif plus spécifique de marquer la présence des femmes dans les arts et la culture. Nous ne pouvons ici nous empêcher de nous rappeler les coupures imposées par ce gouvernement libéral aux grandes institutions culturelles, et ce, malgré des engagements fermes pris dans le livre rouge. La plus grande victime de ces coupures, en ce qui a trait aux femmes et à la culture, est certes le Studio D de l'Office national du film. Depuis sa fondation, en 1974, le Studio D, qui avait pour mandat la production de films portant sur la condition féminine, a réalisé plus de 120 films et mérité plus de 75 prix internationaux, dont un Génie et deux Oscars. Cette perte est lourde pour les femmes et lourde pour le monde culturel.

Mais le gouvernement ne s'est pas arrêté là. Année après année, et je le rappelle, malgré ses promesses inscrites au livre rouge, il coupe dans la culture. Ces coupures se traduisent par des pertes d'emplois et, conséquemment, par une diminution de la production culturelle.

Par ailleurs, selon la dernière enquête effectuée sur la population active du secteur culturel, il a été démontré que les femmes sont majoritaires dans deux secteurs d'activités: les arts visuels et la danse et la chorégraphie. Or, effectivement, ce sont les deux sec-


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teurs où les revenus moyens sont les moins élevés: 8 800 $ pour les peintres, sculpteurs et arts connexes et 12 800 $ pour les danseurs et chorégraphes. Il n'est pas étonnant non plus que les arts visuels soient le secteur d'activités culturelles le moins financé par le gouvernement fédéral. Ainsi donc, les coupures imposées à la culture touchent au premier chef les femmes.

En terminant, je voudrais rappeler au gouvernement que si les déclarations ministérielles sont réconfortantes pour les femmes, elles ne mettent pas de pain ni de beurre sur la table. Le gouvernement a fait disparaître, depuis son arrivée au pouvoir, le sous-comité qui traitait des questions relevant de la condition féminine et le Conseil consultatif sur la situation de la femme.

De même, le gouvernement, qui avait pris des engagements fermes pendant la campagne électorale concernant la garde des enfants, aujourd'hui, comme un enfant gâté, fâché parce que les provinces ne veulent pas passer par le chas de l'aiguille par lequel le fédéral voudrait qu'elles passent, retire son programme en matière de garde d'enfants et reste dans le coin avec son argent. Or, l'argent pour les services de garde revient aux femmes, aux familles, et le fédéral doit le leur remettre, et ce, sans délai.

Et que dire des nouveaux critères dans la Loi sur l'assurance-emploi, où les nouvelles règles pénalisent les femmes à cause du caractère temporaire et de la précarité de leur emploi?

Je comprends que c'est le mois des femmes et qu'il faut le souligner, mais il faut aussi faire de la politique, et je crois que les nouvelles orientations du gouvernement en matière de condition féminine les pénalisent.

(1515)

Pensons aussi aux coupures faites par ce gouvernement aux groupes communautaires du Canada qui, non seulement oeuvrent à la sensibilisation de la population sur les questions reliées à la condition des femmes comme la violence familiale, mais qui accordent également des services dans divers domaines d'activité. Là encore, il y a eu des coupures qui font mal justement aux femmes.

Les gestes du gouvernement libéral à ce jour envers les femmes témoignent du peu de cas que ce gouvernement fait de la condition féminine.

À ces critiques, le gouvernement fédéral répondra qu'il a élaboré un plan fédéral pour l'égalité des sexes. Cependant, tous savent que ce plan n'a rien donné à ce jour. Pas étonnant, puisque ce plan n'était assorti d'aucune enveloppe financière.

En conclusion, je veux terminer en rappelant que l'histoire canadienne et québécoise des femmes est jalonnée d'actes de courage et de ténacité. Le travail vers l'égalité des femmes se poursuit quotidiennement. Je saisis l'occasion qui m'est donnée pour saluer toutes ces femmes qui, aujourd'hui, oeuvrent dans le mouvement féministe. Il n'est pas facile, alors qu'on ne parle que de déficit et de rationalisation, de faire valoir des droits sociaux et juridiques et de lutter. . .

Le vice-président: Je regrette, mais le temps de parole de l'honorable députée est expiré.

[Traduction]

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir l'occasion de prendre la parole au sujet du Mois de l'histoire des femmes au Canada.

Les femmes contribuent à l'histoire au même titre que les hommes, depuis le début des temps, et ont accompli de grandes choses, parfois indépendamment, parfois en association avec d'autres.

Je ne souscris pas aux propos de la ministre responsable de la Situation de la femme, lorsqu'elle affirme que la contribution des femmes à l'histoire et à la civilisation est, en grande partie, passée sous silence. Dans toutes les générations, de grandes femmes ont été reconnues pour ce qu'elles avaient accompli. Parmi les dirigeants politiques des anciennes civilisations jusqu'aux temps modernes, on peut citer Indira Ghandi de l'Inde, Golda Meir d'Israël et Margaret Thatcher de Grande-Bretagne, qui ont toutes apporté une contribution remarquable.

Il existe également beaucoup d'autres exemples à caractère non politique, dont Florence Nightingale, Mère Thérésa et, au Canada, l'unique Laura Secord dont l'initiative a sauvé le Haut-Canada de l'invasion américaine.

Si, cette année, le Mois de l'histoire des femmes a pour thème la culture et les arts, il est important de reconnaître le rôle des femmes dans toute l'histoire et de mettre leurs succès en relief, même avant tous les mouvements d'action positive en faveur des droits des femmes. En ce qui concerne le thème de cette année, il est vrai que, dans l'histoire, les femmes ont contribué davantage à la culture.

La plupart des députés à la Chambre reconnaîtront sans doute que le foyer familial a toujours été le berceau de la culture et des traditions et que les femmes ont, à travers les époques, marqué profondément la vie de ceux qui ont fait l'histoire.

Le Mois de l'histoire des femmes est une célébration des réalisations uniques et diverses des femmes. Cette année, pour la cinquième année consécutive, nous rendons hommage aux femmes qui se sont distinguées dans le domaine des arts et de la culture. J'applaudis à la participation des femmes au développement culturel et artistique de notre pays.

En plus des nombreuses personnes qui ont été mentionnées aujourd'hui, je pense qu'il faut reconnaître le rôle bien mérité que les femmes ont joué et continuent de jouer dans la préservation et la protection de la famille, un rôle qui exige de la créativité, de l'inspiration et de la compassion.

Je salue les femmes qui, chaque jour, font face aux réalités quotidiennes de la vie au foyer tout en cherchant à favoriser l'ordre et l'harmonie dans une société toujours plus complexe. Les femmes occupent une place unique dans la société, en tant que partenaires stratégiques de l'orientation que prendra notre pays sur les plans économique, social et culturel. Par le rôle inestimable qu'elles jouent au sein de la famille, elles contribuent à faconner cette institution fondamentale de notre société. Elles jouent un rôle clé dans la transmission des valeurs et de la culture de notre nation.


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Les femmes, tant au foyer qu'à l'extérieur, méritent qu'on reconnaisse leur contribution essentielle à la croissance de la nation.

* * *

COMITÉS DE LA CHAMBRE

AFFAIRES AUTOCHTONES ET DÉVELOPPEMENT DU GRAND NORD

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Monsieur le Président, je présente deux rapports aujourd'hui.

J'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le quatrième rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.

(1520)

Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 17 juin 1996, votre comité a étudié le projet de loi C-39, Loi concernant l'accord de règlement de la première nation de York Factory sur des questions découlant d'une convention sur la submersion de terres, et a convenu de faire rapport du projet de loi avec une proposition d'amendement.

Monsieur le Président, j'ai aussi l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le cinquième rapport du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord.

Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 17 juin 1996, votre comité a étudié le projet de loi C-40, Loi concernant l'accord de règlement de la première nation de Nelson House sur des questions découlant d'une convention sur la submersion de terres, et a convenu de faire rapport du projet de loi avec une proposition d'amendement.

SANTÉ

M. John O'Reilly (Victoria-Haliburton, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le deuxième rapport du Comité permanent de la santé.

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, votre comité a adopté le premier rapport du sous-comité sur le VIH/SIDA intitulé Accès aux médicaments de recherche pour des raisons humanitaires.

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le trente-sixième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, portant sur le quorum au comité de liaison.

Si la Chambre y consent, je propose: Que le trente-sixième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre rapport soit adopté.

(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je prends la parole, conformément à l'article 36 du Règlement, pour présenter une pétition signée par 81 personnes de ma circonscription.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière qui tendrait à laisser entendre que la société approuve les relations entre personnes de même sexe, ou l'homosexualité, et de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

LA RÉFORME DE L'ENSEIGNEMENT À TERRE-NEUVE

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'ai à présenter un certain nombre de pétitions que j'ai regroupées en quatre catégories.

Le premier groupe de péritions est signé par des habitants de la Saskatchewan qui demandent à la Chambre des communes que le Parlement ne modifie pas la Constitution comme le lui demande Terre-Neuve, mais plutôt qu'il renvoie le problème de la réforme de l'éducation à cette province pour que le gouvernement y trouve une solution en ayant recours à d'autres moyens constitutionnels.

LA CONDUITE AUTOMOBILE AVEC FACULTÉS AFFAIBLIES

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, le deuxième groupe de pétitions que je présente aujourd'hui est signé par des citoyens canadiens habitant la Saskatchewan.

Les pétitionnaires demandent que le Parlement modifie le Code criminel de façon à ce que les peines imposées aux individus reconnus coupables d'avoir conduit avec les facultés affaiblies ou d'avoir blessé ou tué des gens alors qu'ils conduisaient dans cet état, reflètent et la gravité du crime et la politique de tolérance zéro adoptée par le Canada à l'égard de ce type de crime.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, le troisième groupe de pétitions que j'ai le plaisir de présenter porte les signatures de 227 citoyens inquiets. Les pétitionnaires, qui appartiennent à toutes les provinces, depuis la Colombie-Britannique jusqu'à la Nouvelle-Écosse, s'opposent à l'inclusion de l'expression «orientation sexuelle» dans la Loi sur les droits de la personne et dans toute autre loi fédérale.

Ces Canadiens croient que la Loi sur les droits de la personne et les autres lois canadiennes garantissent déjà la protection contre la discrimination.

LES SOINS DE SANTÉ

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, le quatrième groupe de pétitions que j'ai l'honneur de


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présenter comprend 14 pétitions signées par 300 Canadiens inquiets de la Saskatchewan, de l'Alberta, du Manitoba et de l'Ontario. Les pétitionnaires souhaitent attirer l'attention du Parlement sur le fait qu'environ 100,000 avortements thérapeutiques sont pratiqués chaque année au Canada, au coût de plus de 50 millions de dollars.

Ces pétitionnaires et tous les autres Canadiens doivent avoir leur mot à dire quand il s'agit de déterminer l'utilisation des derniers publics consacrés aux soins de santé et quels sont les actes médicaux qu'ils jugent essentiels.

(1525)

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'appuyer la tenue d'un référendum national exécutoire aux prochaines élections dans lequel on demanderait aux Canadiens s'ils sont en faveur du financement de l'avortement sur demande.

LES MÉDICAMENTS GÉNÉRIQUES

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition au nom des membres du club de l'âge d'or du Centre Nickel à Falconbridge, en Ontario.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur la question des médicaments génériques et prient le Parlement de maintenir la longue tradition canadienne qui consiste à commercialiser des médicaments génériques qui soient semblables aux produits de marque quant à la grosseur, à la forme et à la couleur.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais présenter trois pétitions.

La première, qui comporte 27 pages, est signée par de nombreux Canadiens, notamment beaucoup de mes électeurs. On y dit ce qui suit: attendu qu'on viole les droits de la personne des Kurdes, en Turquie, en Iran et en Iraq et attendu que les Canadiens croient fermement dans la protection des droits de la personne au Canada et à l'étranger, les pétitionnaires prient donc humblement le Parlement d'utiliser tous les moyens à sa disposition afin d'encourager la médiation internationale par l'entremise des Nations Unies et du gouvernement canadien pour parvenir à mettre un terme immédiatement au bain de sang dont sont victimes les Kurdes, pour obtenir la libération de tous les prisonniers politiques, y compris les députés kurdes faits prisonniers et pour parvenir à une solution politique permanente à ce problème.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, dans la deuxième pétition, les pétitionnaires s'opposent à l'inclusion de l'expression «orientation sexuelle» dans la Loi canadienne sur les droits de la personne et dans toute autre loi fédérale.

LE POUVOIR JUDICIAIRE

M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président, la troisième pétition attire l'attention de la Chambre sur diverses questions.

Les pétitionnaires exhortent le Parlement à procéder à une enquête publique complète sur les relations entre les établissements de crédit et le pouvoir judiciaire et à adopter une loi restreignant la nomination de juges qui ont des liens avec des établissements de crédit.

LES TAXES SUR L'ESSENCE

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir et l'honneur de présenter à la Chambre une pétition venant d'électeurs de Williams Lake, de 150 Mile House et d'autres régions de la Colombie-Britannique.

Les pétitionnaires signalent que, depuis dix ans, la taxe d'accise sur l'essence a augmenté de 466 p. 100 et qu'un comité du Parlement a recommandé une autre augmentation de 2c. le litre de la taxe fédérale d'accise sur l'essence dans le prochain budget fédéral.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas augmenter la taxe d'accise fédérale sur l'essence dans le prochain budget fédéral.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, je prends encore une fois la parole pour demander au leader du gouvernement à la Chambre à quel moment je peux m'attendre de recevoir une réponse aux questions nos Q-4 et Q-52 que j'ai fait inscrire au Feuilleton.

J'ai demandé une réponse à ces deux questions dans un délai de 45 jours. À ce jour, la question no Q-4 est en suspens depuis 225 jours, et la question no Q-52, depuis 147 jours.

Au lieu de donner des réponses à mes questions, le gouvernement se plaint du fait que les questions sont trop complexes, allant même jusqu'à laisser entendre qu'il devrait songer à limiter le droit d'un député de poser des questions de ce genre. Cela me préoccupe. Franchement, si le gouvernement s'intéressait autant qu'il le dit au contrôle des armes à feu, à la sécurité publique et à la lutte contre le déficit, il devrait avoir les réponses à ces questions sur le bout du doigt.

Je suis prêt à faire un compromis avec le gouvernement. Donnez-moi les renseignements que vous avez obtenus jusqu'ici, et je vous donnerai davantage de temps pour répondre. Donnez-moi ceux dont vous disposez déjà. Si vous avez besoin de plus de temps pour les points restants, je suis disposé à faire ce compromis. Seriez-vous prêt à accepter cela?

Le vice-président: Je demanderais à tous les députés de ne pas utiliser le mot vous, sauf lorsqu'ils s'adressent à la présidence.

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai entendu le député. Je lui demanderais de nous dispenser de cette comédie. Vraiment, je n'ai rien d'autre à ajouter à ce que j'ai dit hier sur le même sujet et sur les mêmes questions.

Le vice-président: Le député de Mississauga-Sud a une pétition à présenter. Je ne l'avais pas remarqué. Je demande l'autorisation de revenir aux pétitions.

Des voix: D'accord.

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PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je vous sais gré de votre obligeance.

J'ai deux pétitions à présenter aujourd'hui. La première vient d'Edmonton, en Alberta.

(1530)

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que diriger un foyer et prendre soin d'enfants d'âge préscolaire est une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société.

Ils demandent donc au Parlement de prendre des initiatives visant à supprimer la discrimination fiscale contre les familles qui choisissent de s'occuper, à la maison, d'enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, de malades chroniques ou de gens âgés.

LA CONSOMMATION DE BOISSONS ALCOOLISÉES

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition vient de Kingston, en Ontario, et concerne l'étiquetage des contenants de boissons alcoolisées.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcoolisées peut causer des problèmes de santé ou diminuer les capacités de ceux qui en consomment et, en particulier, que le syndrome d'alcoolisme foetal et d'autres malformations congénitales liées à l'alcool peuvent être évités dans tous les cas si la mère s'abstient de boire de l'alcool pendant sa grossesse.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement d'adopter une mesure législative qui rende obligatoire l'apposition sur les contenants de boissons alcoolisées d'étiquettes mettant en garde les futures mères et les autres consommateurs contre les risques associés à la consommation d'alcool.

Le vice-président: Le secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes n'a pas demandé que les autres questions restent au Feuilleton. Est-ce ainsi que vous voulez procéder?

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Je profite de l'occasion pour demander aussi que toutes les motions portant production de documents soient reportées.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

[Français]

Le vice-président: Je désire informer la Chambre qu'en raison de la déclaration ministérielle, les ordres émanant du gouvernement seront prolongés de 14 minutes.


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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LA LOI SUR LES MESURES EXTRATERRITORIALES ÉTRANGÈRES

L'hon. Christine Stewart (au nom du ministre de la Justice) propose: Que le projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères, soit lu pour la troisième fois et adopté.

-Monsieur le Président, je suis heureuse de vous parler du projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères, que j'appuie. Il ne fait pas de doute dans mon esprit que nous devons résister à toute ingérence étrangère dans nos affaires. Par leur loi Helms-Burton, les États-Unis étendent leur juridiction pour menacer les affaires légitimes menées entre sociétés d'autres pays et Cuba. La Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères, LMEE, constitue notre riposte à cet état de fait que nous jugeons inacceptable.

Nous sommes en désaccord avec les États-Unis sur la loi Helms-Burton, en partie parce que nous avons des approches fort différentes quant à la conduite des relations avec Cuba. Nos deux pays souhaitent l'instauration, à Cuba, d'une solide démocratie qui respecte pleinement les droit de la personne. Mais nous divergeons de vues sur la façon de réaliser cet objectif. Nous croyons à l'engagement et au dialogue; les États-Unis préfèrent l'isolement.

J'aimerais donc vous entretenir de nos relations avec Cuba avant de parler davantage de la LMEE.

Permettez-moi d'abord de dire que je suis fière de notre politique à l'égard de Cuba, qui est solidement appuyée par tous les partis politiques et par les Canadiens intéressés. Cette politique est aussi fort similaire à celle de la plupart des pays d'Amérique latine et d'Europe.

Le Canada estime son amitié et ses cinquante ans de relations ininterrompues avec Cuba. Nos relations non officielles, bien plus anciennes, se sont fondées sur les liens commerciaux et financiers établis avec le Canada atlantique. Depuis des décennies, le Canada et Cuba s'enrichissent mutuellement en discutant de buts et d'intérêts communs. Nous avons eu une coopération mutuellement avantageuse dans des domaines aussi divers que les pêcheries internationales, les politiques sociales, l'environnement, la science, la culture et le contrôle international des armements.

De nombreux liens ont aussi été tissés entre des organismes, des centres de recherche et des universités des deux pays, de même qu'entre leurs simples citoyens.

Notre grand objectif est d'aider Cuba à s'intégrer à la communauté des nations démocratiques en se donnant un gouvernement vraiment représentatif et une économie ouverte.

(1535)

Contrairement aux États-Unis, qui préconisent des mesures punitives comme l'embargo, nous préférons une politique d'engagement et de dialogue. Une partie importante de ce dialogue porte effectivement sur les droits de la personne, sur la réforme démocratique et sur la bonne gestion des affaires publiques.


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Mais nos relations de longue date ne nous ont pas empêchés d'exprimer nos préoccupations face à la piètre performance de Cuba au plan des droits de la personne.

[Traduction]

Le Canada a publiquement critiqué les Cubains pour leurs violations, comme celle de février dernier lorsque l'aviation cubaine a abattu deux avions civils américains, un incident que nous avons condamné et qui a entraîné une tragique perte de vies. Ce geste posé par les autorités cubaines était un recours excessif et inapproprié à la force, et violait les règles internationalement acceptées pour l'interception d'aéronefs civils.

Le Canada a saisi le gouvernement cubain de ses préoccupations concernant certains cas de violation des droits de la personne. D'ailleurs, question des droits de la personne a été l'un des grands points discutés lorsque le ministre des Affaires étrangères du Cuba, M. Robaina, a visité le Canada l'an dernier. Je dois ajouter que, pendant son séjour au pays, le ministre Robaina a aussi rencontré le commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme, qui se trouvait aussi à Ottawa. M. Ed Broadbent du Centre international des droits de la personne et du développement démocratique, et Jean-Pierre Kingsley d'Élections Canada.

Le Canada a été l'un des premiers pays à exprimer sa préoccupation face à la lourde sentence imposée l'an dernier à Francisco Chaviano, un défenseur des droits de la personne à Cuba. Nous avons aussi réagi très vivement au harcèlement pratiqué plus tôt cette année contre le Concilio Cubano, une nouvelle coalition de défenseurs des droits de la personne. De plus, des représentants de l'ambassade du Canada à La Havane rencontrent régulièrement des défenseurs des droits de la personne et ont assisté à des procès de dissidents.

Ce dialogue constant que Cuba a maintenu avec le Canada et d'autres pays a favorisé l'introduction de réformes. Cuba a commencé à modifier sa politique économique. et aussi à mieux respecter les droits de la personne. À titre d'exemple, Cuba a ratifié la Convention des Nations Unies contre la torture en mai 1995.

Nos liens commerciaux bien connus, que cible la loi Helms-Burton, ne sont qu'un élément des rapports multiformes que les Canadiens et les Cubains ont développés au fil des ans.

Les échanges parlementaires sont une composante importante de notre stratégie à l'égard de Cuba. Ils permettent à chacun de nos deux pays de mieux comprendre le régime de gouvernement de l'autre, et peut-être de s'enrichir de l'expérience de l'autre.

Le président de l'Assemblée nationale cubaine a visité le Canada en avril 1995. Et le Président de la Chambre des communes a profité de sa visite à Cuba en octobre 1995 pour offrir un important don de fournitures médicales.

En mai dernier, le sénateur Jacques Hébert et d'autres membres du Groupe parlementaire d'amitié Canada-Cuba ont pu accueillir une autre délégation parlementaire dirigée par le ministre de l'Éducation de Cuba. Pendant ces rencontres, les Cubains ont posé des questions détaillées sur les rouages du système parlementaire canadien, et les parlementaires canadiens ont pu faire un vibrant plaidoyer en faveur de nouveaux progrès aux plans de la réforme démocratique et de la protection des droits de la personne.

Nous collaborons aussi avec le gouvernement cubain pour identifier les domaines dans lesquels les Canadiens peuvent aider Cuba à moderniser certaines de ses grandes institutions chargées des politiques économiques. Revenu Canada offrira une assistance technique au ministère des Finances de Cuba pour l'élaboration d'un nouveau système d'imposition. Ce programme comprendra une formation en perception de l'impôt, en relations avec les clients et en informatisation de l'information sur l'impôt. La Banque du Canada aide par ailleurs le personnel de la Banque de Cuba à améliorer sa connaissance de l'informatique et sa formation de base en économique et en comptabilité.

En encourageant Cuba à s'ouvrir au reste du monde et à moderniser son appareil gouvernemental et ses organes économiques clés, nous aiderons la majorité de ses citoyens. Nous collaborons avec le gouvernement de Cuba pour offrir un avenir plus prometteur à tous les Cubains.

Le déclin marqué de l'économie cubaine entre 1989 et 1993 a entraîné une baisse significative dans le financement de tous les programmes sociaux.

Lorsque j'ai visité Cuba, en juin 1994, nous avons lancé un programme d'assistance acheminée par le canal du secteur non gouvernemental.

(1540)

Ce programme a permis aux Canadiens du secteur non gouvernemental d'aider les Cubains à traverser une période économique difficile et d'établir des contacts avec des institutions cubaines, notamment au niveau universitaire. Le petit programme d'aide bilatérale qui faisait l'objet de discussions à la fin de 1994 a mené au développement de plusieurs projets dont je viens de parler.

Grâce à ce programme, des ONG, des Églises, des syndicats et des universités du Canada travaillent maintenant avec diverses organisations cubaines, dont certaines sont en tain de se distancer du gouvernement pour adopter une position plus indépendante. Nous désirons vivement appuyer cette évolution.

En mars dernier, l'ACDI et OXFAM Canada ont signé un accord de coopération pour un grand effort visant à renforcer le secteur des ONG à Cuba. Doté d'un budget de 1 million de dollars sur trois ans, le projet appuiera le travail des ONG et des Églises cubaines, par exemple au titre de projets générateurs de revenus pour les femmes pauvres, d'activités de formation pour les petits agriculteurs indépendants et d'établissement de liens avec des ONG canadiennes, y compris des stages pour cinq Cubains au sein d'organismes canadiens.

Avant 1994, année où nous avons mis en place notre programme d'aide à Cuba, plusieurs universités canadiennes avaient déjà conclu des ententes de coopération avec des universités cubaines. Depuis 1994, nombre d'autres universités, collèges communautaires et établissements d'enseignement ont suivi leur exemple.


5301

Je pourrais continuer à énumérer les nombreux liens que le Canada a déjà ou est en train de nouer avec Cuba. Liens entre les milieux artistiques canadiens et cubains, par exemple. Des musiciens de jazz comme Vic Vogel et Jane Bunnett se sont rendus là-bas pour jouer avec des musiciens cubains. Lors d'un récent voyage, les Bunnett ont pris des dispositions pour que trois techniciens torontois offrent aux jeunes musiciens de La Havane des ateliers dont il avaient grandement besoin sur la réparation des instruments. L'industrie québécoise de la télévision et du cinéma a tourné plusieurs films et une importante série télévisée à Cuba. Et la liste s'allonge encore et encore.

Toutefois, des liens se sont aussi établis entre les syndicats. L'an dernier, Bob White, du Congrès du travail du Canada, est allé à Cuba s'entretenir avec les représentants du Congrès des travailleurs de Cuba. Puis, cette organisation a envoyé une délégation ici, au Canada, pour se renseigner.

Chaque année, 140 000 Canadiens visitent Cuba.

Nous croyons que c'est par l'entremise de tous ces engagements à divers niveaux que les Cubains vont mener leur propre réforme, qui ouvrira éventuellement leur société à des institutions économiques et politiques plus libérales.

Je le répète, nous ne contestons pas l'objectif américain d'amener pacifiquement la société cubaine à être plus démocratique, mais nous nous insurgeons contre le recours à la Loi Helms-Burton pour régler un problème que les États-Unis ont avec Cuba. Cette loi s'en prend à des entreprises et à des pays qui font légitimement des affaires avec Cuba.

Les États-Unis auraient pu emboîter le pas à d'autres pays et régler leur différend avec Cuba. En adoptant cette loi pour punir Cuba, les Américains risquent de blesser leurs amis et leurs alliés. Il nous fallait donc faire notre possible pour protéger les citoyens et les entreprises canadiennes.

Il était logique de présenter la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères; les changements qu'elle prévoit s'imposent. Toutefois, j'espère sincèrement qu'il ne sera pas nécessaire d'y recourir. Tout dépendra évidemment si les dispositions de la Loi Helms-Burton et d'autres mesures similaires seront invoquées contre des entreprises canadiennes.

J'espère que la Loi Helms-Burton passera comme un éclair. Les relations entre le Canada et les États-Unis sont solides et fructueuses et nous ne devrions pas nous chamailler au sujet d'irritants de ce genre.

Enfin, je regrette de ne pas pouvoir rester ici aujourd'hui jusqu'à la fin du présent débat, d'autres engagements m'appelant ailleurs, mais c'est avec intérêt que je prendrai connaissance de la suite du débat en lisant le hansard.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre à nouveau la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-54 qui, comme on le sait, et comme mon honorable collègue l'a dit précédemment, vise à contrer certains effets de la loi américaine à portée extraterritoriale, loi que l'on appelle la Loi Helms-Burton, dont on a fait mention à maintes reprises en cette Chambre depuis quelques jours et depuis quelques mois.

(1545)

Le Bloc québécois ne s'oppose pas à l'adoption de ce projet de loi, bien au contraire. Comme on l'a dit depuis le début, nous soutenons toute tentative qui a pour but de protéger les entreprises québécoises et canadiennes des gestes illégaux, des gestes que nous qualifions d'illégaux, posés par les Américains.

D'ailleurs, dès l'adoption de la Loi Helms-Burton, le Bloc québécois s'est vigoureusement opposé aux agissements du gouvernement américain qui, au début, tentait d'imposer à tous les États sa politique de sanctions économiques contre Cuba, et ce, en flagrante violation du droit international et de la souveraineté des États.

Depuis le début, le Bloc québécois est intervenu en Chambre pour demander au gouvernement fédéral de dénoncer fortement la Loi Helms-Burton et de tout mettre en oeuvre pour faire invalider cette loi. Cependant, la seule et unique réponse du gouvernement libéral a été le projet de loi C-54 que nous avons devant nous aujourd'hui. Sept mois, sept longs mois après l'adoption de la Loi Helms-Burton, le gouvernement dépose son projet de loi C-54 en Chambre, dans le but, nous dit-on, de répondre à l'urgent besoin de contrer les effets de cette loi qui, faut-il le rappeler, est toujours en vigueur puisque non contestée judiciairement, et dont l'application avait commencé au mois d'août.

J'ai déjà fait part de mes commentaires à cette Chambre concernant la tardiveté du projet de loi C-54 et son manque de fermeté. Mais ce dont je désire vous entretenir aujourd'hui, c'est de l'attitude irresponsable du gouvernement libéral et de ses ministres dans ce dossier.

Le manque de volonté et de sérieux du gouvernement dans le dossier de la Loi Helms-Burton est devenu inacceptable. Jamais le gouvernement n'a eu l'intention de faire invalider la Loi Helms-Burton, alors que c'est le seul moyen efficace de se débarrasser de cette loi et de démontrer aux Américains le sérieux du Canada à protéger sa politique commerciale et aussi sa souveraineté territoriale. Le Canada a riposté à un bombardement américain avec des fusils à eau. Quoique certains fusils à eau aient l'air vrai, ils ne sont toutefois pas efficaces dans le combat.

Le gouvernement libéral, encore récemment devant le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, refusait de réclamer un comité spécial de règlement des différends commerciaux en vertu de l'ALENA, alors qu'il en a le droit depuis le 29 juillet dernier, sous prétexte qu'il attend le moment propice. Le moment propice, c'était le 29 juillet dernier. C'est à partir de ce moment-là qu'on a eu le droit, qu'on a eu la possibilité de faire une demande d'un comité spécial, et c'est à partir de ce moment-là qu'on aurait dû agir, et non pas au lendemain d'une élection présidentielle aux États-Unis.

Le gouvernement nous dit qu'il a tout fait pour réagir à l'urgence de la situation, mais le gouvernement savait depuis le 12 mars dernier que la Loi Helms-Burton était en vigueur. Le gouvernement aurait pu agir dès le mois de mars ou avril. Ce n'était pas très long de


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modifier une loi déjà existante avec huit ou neuf petits articles pour inclure, à l'intérieur, la Loi Helms-Burton. On a attendu combien de temps? Sept mois. Sept mois pour modifier une loi existante et pour déposer à la Chambre le projet de loi C-54.

Le gouvernement a totalement manqué de leadership dans ce dossier, considérant qu'il était le mieux placé pour agir contre les Américains. Apeuré, notre gouvernement a tellement laissé passer de temps, que l'Union européenne, elle, a dû prendre elle-même l'initiative de contester la validité de la Loi Helms-Burton.

En effet, l'Union européenne a annoncé, la semaine dernière, qu'elle allait demander l'arbitrage, et au besoin, un comité spécial sur le règlement des différends commerciaux en vertu de l'Organisation mondiale du commerce, le 16 octobre prochain, soit avant les élections américaines.

Les membres de l'Union européenne ont compris, eux, l'importance et l'urgence d'agir. Comment le ministre du Commerce international peut-il se vanter maintenant, dans les médias, de vouloir participer à ce processus devant l'OMC, vu l'importance de la situation? De notre côté, on serait un peu gênés. On serait un peu gênés d'avoir manqué le bateau et de devoir être à la remorque d'autres États pour contester une loi qui aurait dû être contestée depuis sept mois par le gouvernement canadien en vertu de l'ALENA. Mais non, on se rabat sur l'OMC et on est à la remorque de l'Union européenne.

Encore une fois, le gouvernement libéral nous a donné la preuve de son manque de leadership et de son incapacité à défendre efficacement les entreprises québécoises et canadiennes face aux pressions étrangères.

(1550)

D'ailleurs, l'Union européenne a aussi décidé d'entamer des consultations au sein de l'OMC en prévision d'un éventuel arbitrage au sujet de l'autre législation américaine à portée extraterritoriale, la Loi de 1996 sur les sanctions contre l'Iran et la Lybie, qui sanctionne les entreprises qui investissent dans les secteurs pétrolier et gazier en Iran et en Lybie, alors que le gouvernement canadien n'a encore rien fait pour contester cette loi.

Il est évident qu'il n'y a pas une multitude d'entreprises québécoises et canadiennes qui investissent dans le secteur gazier ou le secteur pétrolier en Iran ou en Lybie. Le problème n'est pas là. Le problème est que, premièrement, on conteste la Loi Helms-Burton, on dit que ce n'est pas correct, mais on attend avant de poser des gestes. On se fait mettre devant le fait accompli. On se fait démontrer que le gouvernement américain, plutôt que de comprendre, réagit d'une autre façon, avec une autre loi à portée extraterritoriale; c'est le principe de cette loi que le gouvernement canadien aurait dû contester. Mais non, on attend, on attend et on laisse passer le temps.

Il semble que les ministres des affaires étrangères européens aient plus de courage que nos ministres canadiens qui, eux, n'osent pas s'attaquer au président américain ou aux politiques américaines durant la campagne présidentielle. Contrairement à nos ministres canadiens, le commissaire européen au Commerce extérieur, M. Leon Brittan, ne voit aucune raison de retarder l'arbitrage.

En terminant, je fais le souhait que le gouvernement veille à l'application de sa Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères modifiée et qu'elle ne soit pas reléguée aux oubliettes. Comme le ministre du Commerce international ou le ministre des Affaires étrangères le disent souvent: «On a apporté des modifications, mais, on le dit en Chambre et devant les médias, on espère ne jamais utiliser cette loi. On modifie une loi, on la rend plus sévère, on augmente les montants de pénalité ou les montants de recouvrement, mais, écoutez, nos amis Américains, on espère ne jamais l'utiliser.» À force de ne vouloir jamais l'utiliser, on va la désapprouver face à l'opinion publique internationale.

Je me dois aussi de rappeler que le projet de loi C-54 ne contre pas tous les effets pervers de la Loi Helms-Burton. En effet, l'article 4 est toujours en vigueur, et les dirigeants de compagnies faisant affaire avec Cuba, dont ceux de la compagnie canadienne Sherritt, sont interdits d'entrée aux États-Unis. Peut-être que d'autres compagnies québécoises ou canadiennes se verront-elles indiquer une interdiction d'entrée aux États-Unis à leurs dirigeants et à leur famille.

Le gouvernement canadien, en présentant la loi C-54 telle qu'il la présente aujourd'hui, en disant que c'est pour faire face à une urgence d'agir, il ne règle que la moitié du problème qui est celui où une compagnie canadienne ou québécoise pourrait se voir poursuivie si cette compagnie fait des affaires avec Cuba.

Mais l'article 4 qui interdit aux dirigeants ou à leur famille le droit de séjour aux États-Unis est toujours en vigueur. Nous, au Bloc québécois, ce que l'on dit à nos amis du Parti libéral c'est que, si vous voulez éliminer l'article 4, si vous voulez éliminer l'épée de Damoclès au-dessus de la tête des dirigeants canadiens et québécois qui font des affaires avec Cuba, c'est simple, vous avez, dans votre jeu de cartes, une carte, depuis le 29 juillet, qui vous permet, dans le cadre de l'ALENA, de faire une demande d'un comité spécial pour invalider la Loi Helms-Burton. De cette façon, non pas par le projet de loi C-54, mais bel et bien selon les normes, les droits convenus dans l'ALENA, éliminer, contrecarrer tout le projet de loi Helms-Burton et ainsi mettre de côté, annuler les dangers de l'article 4 pour les dirigeants et leur famille de compagnies canadiennes et québécoises.

Mais devant l'inaction du gouvernement, nous leur proposons des solutions concrètes, mais ils attendent. Nous le savons, le lendemain d'une élection présidentielle, si le président américain laisse tomber les articles 3 et 4 de la loi Helms-Burton ou qu'il les met de côté, nos gouvernement diront: «On avait bien raison d'attendre, on voit maintenant qu'il ne s'est rien passé.» Mais si le président américain décide de signer, que fait-on? On aura attendu neuf mois ou un an et, là, peut-être que, pour ne pas lui faire de peine, on n'ira pas devant ce comité spécial, ou peut-être se décidera-t-on enfin, après les Européens, à porter des gestes concrets.

Malgré tout, nous voterons en faveur du projet de loi C-54, quoique ses effets soient très limités, mais soyez assurés que nous


5303

ne décernerons pas au gouvernement une médaille pour sa réponse au gouvernement américain. Qu'il apprenne une fois pour toutes de ses erreurs et qu'il refasse ses devoirs.

(1555)

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, nous sommes saisis aujourd'hui du projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères, la loi qui vise à contrer la Loi Helms-Burton des États-Unis.

Je suis heureux de prendre la parole à l'occasion de la troisième et dernière étape de l'étude du projet de loi C-54. Au cours d'un débat précédent sur ce projet de loi, j'ai trouvé intéressant que des députés de l'opposition soient d'accord avec le Parti réformiste pour dire que le projet de loi n'allait pas assez loin, même s'ils l'appuyaient. Je vais expliciter ma pensée à cet égard.

Le projet de loi n'est qu'une mesure de rapiéçage, une demi-mesure, si vous voulez, qui doit être améliorée. J'ai déclaré à maintes reprises que le projet de loi n'allait pas assez loin. Le Canada doit agir d'autres manières pour résoudre ce problème rapidement.

C'est une bonne chose de pouvoir invoquer une loi au besoin. Cependant, comme le ministre du Commerce international l'a dit, nous espérons ne jamais avoir à le faire.

Même si on dispose d'une bonne trousse médicale comprenant une antidote contre les empoisonnements accidentels et les morsures de serpent, on espère ne jamais avoir à l'utiliser. Cependant, on se sent plus en sécurité si on dispose d'une telle trousse. La meilleure solution consiste toutefois à éliminer le problème de son territoire et à garder hors du foyer tout poison mortel.

En d'autres termes, il faut dire aux Américains non seulement que la Loi Helms-Burton n'est pas sage, mais qu'elle est illégale. En effet, les articles 3 et 4 de la Loi Helms-Burton sont en violation très nette avec l'ALENA, que les États-Unis ont pourtant signé. L'article 3 viole en outre le droit international et la souveraineté de tous les pays qui investissent à Cuba ou font du commerce avec lui.

Même s'il est bon d'avoir une antidote, il faut avant tout se débarrasser du poison une fois pour toutes. Le Canada est justifié depuis un certain temps à déposer une plainte devant le groupe spécial chargé du règlement des différends, aux termes de l'ALENA. Je suis d'avis que si nous avions déposé une plainte en juin lorsque ce problème s'est fait jour, la question serait peut-être réglée maintenant. Le problème serait réglé, et toute difficulté future aurait pu être évitée.

Nous savons que le président des États-Unis a accordé un sursis de six mois au Canada et qu'il pourrait prolonger ce sursis. C'est le temps des élections chez nos voisins du sud de sorte que nous ne savons pas si le président va le faire. En fait, le président Clinton, ou peut-être le président Dole, si ce dernier est élu, pourrait être en mesure de prolonger le sursis. Il se pourrait aussi qu'il en soit autrement. Une nouvelle crise pourrait survenir, et le président pourrait être forcé de donner le feu vert aux poursuites en justice. Nous ne voulons pas que nos entreprises se retrouvent dans cette situation.

De plus, comme l'échéance concernant le report des poursuites approche, nous risquons encore de faire l'objet de poursuites et le passif continue de s'accumuler. Le projet de loi ne protège absolument pas certains cadres canadiens et leurs familles qui peuvent se voir interdire l'accès aux États-Unis. Ce problème subsiste. Il faut que nous fassions annuler la Loi Helms-Burton. La seule façon d'y parvenir, c'est de contester cette loi auprès d'un groupe spécial de l'ALENA.

Il y a une autre raison de faire annuler la Loi Helms-Burton. Les entreprises canadiennes qui font des affaires à Cuba doivent décider de continuer ou non leurs affaires avec ce pays. Elles peuvent se conformer aux règles américaines. En ce cas, elles sont frappées d'une amende de 1,5 million de dollars canadiens; par contre, si elles décident de ne pas suivre les règles américaines, elles sont alors frappées d'une amende d'un million de dollars américains. C'est comme avoir le choix d'être frappé par une brique ou un bâton de baseball. En fait, les entreprises n'ont guère le choix. La seule façon de résoudre le problème, c'est de le régler une fois pour toutes en demandant à un groupe spécial de l'ALENA de se prononcer.

Je déplore que, à maintes occasions, le gouvernement se soit laissé dicter sa conduite par les Américains. Je pense qu'une tendance persistante est certainement en train de s'établir à cet égard.

Rappelons qu'en 1994, le Canada s'est incliné devant les États-Unis dans un différend concernant le blé qui sert à la fabrication des pâtes alimentaires. Nous avons accepté des plafonds d'exportation. Ce qui s'est produit en l'occurrence, c'est que l'accord de libre-échange permet au Canada, si nous avons un avantage économique à le faire, d'exporter nos produits aux États-Unis, tout comme les États-Unis peuvent exporter les leurs chez nous. Les subventions sont égales. Ce n'est pas là le règlement que nous avons accepté. Nous avons convenu de plafonner nos exportations de blé destinées aux États-Unis. L'accord est maintenant arrivé à échéance. Certains signes de mécontentement donnent à penser que les Américains veulent recommencer le même jeu.

(1600)

Nous avons cédé sur la question du bois d'oeuvre. Plutôt que de porter notre cause devant un groupe spécial d'arbitrage prévu dans l'ALENA ou devant l'Organisation mondiale du commerce, nous avons accepté de plafonner nos exportations. Nous nous sommes mis dans une situation pire qu'avant parce que, en l'occurrence, nous devons administrer nous-mêmes l'enfer bureaucratique qui a été créé.

L'industrie du bois d'oeuvre attend depuis six mois que les règles soient fixées pour savoir exactement à quoi s'en tenir. Cependant, elle vient tout juste d'apprendre qu'il faudra encore au moins un mois avant que les quotas de chaque province aient été fixés. Ensuite, il y aura le sérieux problème de la répartition de ces quotas entre les différentes entreprises forestières.

C'est toujours la même chose: le Canada a peur de recourir aux mécanismes de règlement des différends que nous avons travaillé si fort pour mettre en place pour affronter les Américains.


5304

À mon avis, nous ne devons pas nous laisser marcher sur les pieds. En outre, cela est tout à fait inutile. Nos accords commerciaux nous donnent toute la protection dont nous avons besoin. Nous avons lutté pour obtenir ces mécanismes et, maintenant qu'il est temps de les mettre à l'épreuve, nous avons peur de nous en servir et nous plions toujours.

J'affirme également qu'il est très important pour nous de mettre les accords à l'épreuve lorsque nous pensons pouvoir l'emporter. De quoi aura l'air le Canada au moment de présenter devant l'Organisation mondiale du commerce les nouvelles réformes et les nouveaux mécanismes de règlement des différends qu'il souhaite s'il ne se sert même pas de ceux qu'il a déjà négociés?

Je voudrais parler un peu du petit pays touché par la loi Helms-Burton, c'est-à-dire, bien sûr, de Cuba. Nous devons saisir toutes les occasions de rappeler aux Américains que c'est avec Cuba qu'ils ont un litige, pas avec le Canada. Comme les Américains, nous voudrions voir Cuba devenir un pays plus démocratique où ont cours les lois du marché, mais nous pensons qu'il y a d'autres moyens que celui qu'ont choisi les États-Unis pour y arriver. Nous savons que les États-Unis ont une politique isolationniste et je ne crois pas qu'elle donne des résultats. Nos voisins pratiquent cette politique depuis 40 ans et il y a toujours un gouvernement communiste à Cuba.

Je crois que le Canada doit assumer une partie de la responsabilité pour les problèmes qui existent à Cuba. Nous continuons de commercer avec ce pays et nous devons continuer, mais nous avons d'autres instruments à notre disposition.

Un peu plus tôt, nous avons entendu la secrétaire d'État chargée de l'Amérique latine parler des percées dans le secteur des droits de la personne et dans celui des réformes économiques ainsi que des mesures prises par le Canada pour aider Cuba. C'est louable que nous aidions Cuba dans la mesure du possible, mais nous ne semblons pas avoir eu tellement de succès pour ce qui est de faire de Cuba un pays plus ouvert et plus démocratique, pour ce qui est d'avoir des élections multipartites libres dans ce pays. Nous n'avons pas vu tellement de résultats en ce qui a trait à la liberté de voter, à la liberté d'expression. Il y a encore énormément de restrictions.

Pendant 40 ans, nous avons eu une politique d'échanges commerciaux avec Cuba, et qu'avons-nous obtenu comme résultat? Très peu de choses, il me semble, et je crois que nous devons travailler beaucoup plus fort pour essayer de faire de Cuba un pays démocratique. Nous devons travailler avec l'OEA pour atteindre ce but. Le Parti réformiste croit que le Canada a raison de se rapprocher de Cuba. Il estime qu'il y a d'autres moyens d'atteindre le but visé, et je vais en parler.

Je crois que, dans ce cas, le commerce est notre carotte. Nous pouvons utiliser d'autres méthodes, comme la méthode de la carotte et du bâton, si l'on veut, mais nous devons commercer avec Cuba et nous devons profiter de ces occasions pour discuter des questions sérieuses à l'égard desquelles nous ne voyons pas beaucoup de progrès.

Nous pouvons faire en sorte que notre aide soit conditionnelle aux progrès réalisés dans des secteurs comme les droits de la personne et la réforme démocratique. Nous pouvons insister pour que Cuba ne bénéficie pas d'un traitement de faveur de la part du Canada sur le plan de l'aide bilatérale. Nous pouvons voir à ce qu'il n'y ait pas de partenariats parrainés par l'ACDI par exemple-cette aide a totalisé environ 500 000 $ en 1994-1995-et à ce que Cuba ne reçoive pas d'aide technique du Centre canadien de recherches pour le développement international.

Nous devons voir des progrès, des améliorations, avant d'offrir ce genre d'aide technique. Nous devrions certainement cesser de puiser dans le Fonds canadien pour appuyer des activités à Cuba jusqu'à ce que nous voyons des progrès dans les secteurs que j'ai mentionnés.

Nous devrions continuer les échanges commerciaux dans le secteur privé, mais faire ce que nous pouvons pour encourager le changement et limiter nos programmes d'aide jusqu'à ce que nous ayons vu des améliorations.

En conclusion, le Parti réformiste appuie ce projet de loi, mais nous croyons qu'il ne va vraiment pas assez loin. Nous devons trouver une solution au moyen de l'ALENA, mais c'est une mesure provisoire qui, je crois, est probablement nécessaire.

(1605)

De plus, nous devons être plus fermes envers les États-Unis dans les conflits de ce genre. Le Canada doit tenir tête aux États-Unis, qui sont allés beaucoup trop loin dans cette affaire. Je crois que les États-Unis ne respectent pas les pays qui cèdent, et cela semble être ce que nous faisons depuis quelque temps. Nous devrions tenir tête aux États-Unis chaque fois que nous sommes convaincus que nous avons raison, et cette question concernant Cuba est justement une de ces fois.

M. Jesse Flis (Parkdale-High Park, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le secrétaire parlementaire du ministre de la Coopération internationale.

Je suis très heureux d'appuyer le projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères, à l'étape de la troisième lecture. Ce projet de loi arrive au bon moment et répond à un besoin pressant.

La Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères a été adoptée en février 1984 pour empêcher l'application au Canada de lois ou décisions déraisonnables de pays étrangers. Le moment est venu de mettre cette loi à jour pour lui conserver sa crédibilité. Je suis heureux que les deux partis d'opposition appuient le projet de loi, ce qui en assurera l'adoption rapide.

Le projet de loi C-54 et les amendements qui y sont proposés donneront au Canada des moyens plus efficaces pour empêcher des pays d'appliquer au Canada des lois et décisions inacceptables. La loi Helms-Burton adoptée par les États-Unis ne respecte pas la territorialité du droit et viole les buts et principes de la charte des Nations Unies. De plus, cette loi empiète sur la souveraineté du Canada et celle d'autres pays commerçants amis du Canada.

La politique étrangère et les relations commerciales du Canada sont déterminées au Canada et non pas aux États-Unis. Le gouvernement américain a pleinement le droit de définir la politique commerciale des États-Unis envers Cuba, mais il n'a pas le droit de nous imposer ses politiques et ses lois.


5305

Dans l'ensemble, le Canada entretient de bonnes relations avec les États-Unis. En ma qualité de président canadien de la Commission permanente mixte de défense Canada-États-Unis, je sais que nos deux pays entretiennent des rapports étroits dans le domaine de la sécurité de l'Amérique du Nord. Les États-Unis ont prouvé à de multiples reprises leur capacité de travailler avec des partenaires. Nous entretenons des liens économiques puissants avec notre voisin du sud.

Toutefois, dans le cas présent, nous devons nous affirmer. La Loi Helms-Burton crée un dangereux précédent pour les futures relations commerciales. Le premier ministre du Canada a raison lorsqu'il dit que les amis sont les amis et les affaires sont les affaires. Toutefois, la Loi Helms-Burton n'est pas une façon de faire des affaires ou de traiter des amis.

Nous vivons dans une économie mondiale où l'interdépendance entre les pays est plus grande que jamais. Les relations officielles entre le Canada et Cuba n'ont jamais été suspendues depuis 1945. Les deux pays ont toujours entretenu de bonnes relations dans un grand nombre de domaines-clés comme les pêches, où Cuba a appuyé le point de vue du Canada quant à la nécessité de prendre des mesures pour mettre fin à la surpêche en haute mer des stocks chevauchants et des stocks de poissons grands migrateurs.

Les deux pays ont également entretenu de bonnes relations dans les domaines de l'agriculture, de la mise en valeur des ressources naturelles et du tourisme-plus de 120 000 Canadiens vont à Cuba chaque année. Lorsque j'étais secrétaire parlementaire, j'ai eu le plaisir d'ouvrir un consulat honoraire supplémentaire pour assurer des services aux touristes canadiens à Cuba-en plus des services fournis par notre ambassade à la Havane.

L'an dernier, le Canada a exporté à Cuba pour plus de 274 millions de dollars de marchandises, principalement des produits agroalimentaires et des biens manufacturés, et a importé de Cuba pour près de 321 millions de dollars de marchandises, principalement du sucre et du nickel.

En octobre 1994, j'ai eu le privilège de me rendre en mission officielle à Cuba pour assister à la Foire internationale de la Havane. J'ai rencontré les représentants de 24 compagnies canadiennes faisant des affaires avec Cuba, parmi lesquelles: Sherritt Incorporated de Fort Saskatchewan, en Alberta, Romet Limited de Mississauga, en Ontario, J.D. Irving de Saint John, au Nouveau-Brunswick, Galax Incorporated de Montréal, au Québec, et United Tire and Rubber Compagny Limited de Rexdale, en Ontario.

J'ai pu constater de mes propres yeux les avantages des relations qu'entretient le Canada avec Cuba. Je suis tout à fait d'accord avec le ministre des Affaires étrangères lorsqu'il dit que le Canada partage les objectifs des États-Unis, à savoir l'amélioration des normes en matière de droits de la personne et l'avènement d'un gouvernement plus représentatif à Cuba.

(1610)

Le Canada et les États-Unis ont pris des moyens très différents pour atteindre ces objectifs d'importance majeure. Tandis que les États-Unis appliquent une politique d'isolation à l'égard de Cuba, le Canada favorise une politique de dialogue et de rapprochement.

Le Canada a pris certaines mesures pour promouvoir les réformes démocratiques à Cuba, et celles-ci ont produit leur effet. Le Canada a créé un programme d'assistance technique pour aider Cuba à moderniser ses institutions économiques. Dans le cadre de ce programme de partenariat, l'Agence canadienne de développement international a financé des organisations non gouvernementales du Canada collaborant de près avec des organisations populaires de Cuba.

Une politique d'ouverture, de dialogue et d'interaction est un moyen efficace d'aider Cuba à devenir une société pluraliste. C'est évident que la loi Helms-Burton ne fait rien pour faire progresser les politiques rationnelles, à court ou à long termes.

Sur une note plus positive, disons que, en juillet dernier, le président Clinton a suspendu pour six mois le droit des sociétés américaines d'intenter des poursuites en vertu de cette loi. C'est un progrès, mais la menace de poursuites à venir est toujours là.

Malheureusement, certains Canadiens ont déjà été mis au courant qu'ils ne sont plus les bienvenus en sol américain. C'est tout à fait incompréhensible pour moi qu'un particulier ou une personne morale faisant affaire à Cuba, ou le conjoint et les personnes à charge de la personne en cause, puissent être interdits de séjour dans ce magnifique pays que sont les États-Unis.

Les sociétés canadiennes ont besoin de moyens pour se défendre et le projet de loi C-54 donnera plus de mordant à la LMEE en permettant aux Canadiens de s'adresser aux tribunaux pour récupérer toute somme allouée par un tribunal étranger, ainsi que les frais judiciaires encourus au Canada et dans le pays étranger. C'est ce qu'on appelle une disposition de récupération.

Le procureur général pourra empêcher toute tentative d'un demandeur d'un pays étranger de faire appliquer un jugement en vertu d'une loi étrangère inadmissible telle que la loi Helms-Burton.

On peut espérer que ces modifications apportées à la LMEE dissuaderont les entreprises américaines de prendre des mesures contre les Canadiens. Les entreprises canadiennes poursuivies aux États-Unis auront le droit d'intenter des contre-poursuites visant les intérêts détenus ici par ces entreprises américaines.

En conclusion, l'objectif du projet de loi C-54 et des amendements est très clair, c'est de renforcer la souveraineté du Canada.

La loi Helms-Burton entraîne des pays tiers dans un démêlé politique entre les États-Unis et Cuba. C'est un dangereux précédent et c'est inacceptable.

La ferme opposition manifestée par les pays de l'Union européenne et de l'Amérique latine montre que le Canada a des alliés spontanés assez puissants.

Le projet de loi et les amendements renforcent la position du Canada, soit que nous avons tout à fait le droit de faire des échanges et toute forme de commerce avec les pays d'Amérique centrale et des Antilles, et de renforcer ses relations diplomatiques avec Cuba à des fins de commerce et de développement.


5306

Encore une fois, je remercie les partis d'opposition et tous les députés qui ont reconnu l'importance de cette mesure de la coopération dont ils ont fait preuve afin que ce projet de loi soit adopté rapidement.

M. John Godfrey (secrétaire parlementaire du ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, je prends moi aussi la parole pour appuyer le projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères. Pour ce faire, je vais explorer la logique de la mesure législative américaine qui a déclenché cette réponse, à savoir la loi Helms-Burton.

La logique en est simple. Le principe sous-jacent, s'il est appliqué dans son ensemble, est qu'un pays peut et devrait donner à ses citoyens dont les biens à l'étranger ont été confisqués le moyen de poursuivre pour dommages-intérêts ceux qui ont la jouissance des dits biens, même s'ils ne sont pas ressortissants du pays ayant procédé à la confiscation, et de les punir en les empêchant d'entrer aux États-Unis.

Je me suis souvent demandé ce qui arriverait si nous appliquions cette nouvelle norme de moralité internationale à d'autres révolutions, présentes et passées. Que se passerait-il si nous appliquions cette nouvelle norme, des plus stricte, à l'histoire américaine, à la grande révolution dont sont issus les États-Unis, la révolution de 1776? Ne nous trouvons-nous pas devant une situation identique?

(1615)

De 1776 à 1783, les biens de plus de 100 000 Américains qui n'approuvaient pas la révolution, qui étaient restés fidèles aux principes du bon ordre et de la propriété privée, ont été confisqués par les tribunaux révolutionnaires américains, bafouant ainsi les droits de ces individus. Tout comme les Cubains après 1959, nombre d'entre eux se sont exilés, fuyant au Canada, en Grande-Bretagne, et aux Antilles, où ils se sont retrouvés sans rien, comme beaucoup des Cubains qui se sont réfugiés aux États-Unis.

Contrairement à la situation actuelle, en 1783, à l'issue de la guerre qui avait opposé les futurs États-Unis et la Grande-Bretagne, un traité de paix fut signé à Paris au mois de septembre de cette même année. L'article V de ce traité de paix prévoyait que les Américains devaient restituer tous les biens, droits et propriétés qui avaient été confisqués. Contrairement aux Cubains, les Américains ont promis de rendre les propriétés et les territoires confisqués, mais ils ne l'ont jamais fait.

Si nous devions appliquer la logique de la Loi Helms-Burton à la révolution américaine, nous constaterions que les Américains ont complètement fait fi de leurs propres principes. En réalité, ils n'ont pas respecté le traité. Les Cubains n'ont jamais signé de traité promettant de faire quoi que ce soit. Les Américains avaient, eux, signé un traité. La question n'a jamais été résolue.

Les Américains ont poursuivi leur petit bonhomme de chemin sans jamais indemniser les 100 000 personnes qui avaient fui: 40 000 au Canada, dont trois millions d'entre nous sont actuellement des descendants ayant des droits confirmés sur les propriétés confisquées, 40 000 autres au Royaume-Uni et 20 000 dans les Antilles. Certains d'entre nous se demandent si l'on ne devrait pas appliquer aux États-Unis les méthodes qu'ils emploient. Serait-il possible d'appliquer le principe de la Loi Helms-Burton à une révolution antérieure, passablement antérieure à 1959, j'en conviens, puisque nous remontons à 1776? Qu'arriverait-il?

À l'appui de ce projet de loi, j'aimerais dire que deux d'entre nous allons présenter un projet de loi d'initiative parlementaire qui sera conçu en réponse à la Loi Helms-Burton et qui sera connu sous le nom de mesure Godfrey-Milliken. Il imitera dans les moindres détails la Loi Helms-Burton. Je dois dire ici que, en tant que descendant d'un loyaliste, j'ai un intérêt dans une certaine propriété en Virginie et mon collègue, le député de Kingston et les îles, réclamera un grand territoire qui lui revient dans la vallée Mohawk de l'État de New York.

Le principe de notre projet de loi est très simple: il est juste et équitable que les Canadiens, qui sont des héritiers de loyalistes dont les propriétés ont été confisquées, volées ou détruites par les révolutionnaires américains, reçoivent la même aide que celle que le gouvernement américain accorde à ses citoyens dont les propriétés à Cuba ont été confisquées par le gouvernement révolutionnaire de ce pays. Dans notre projet de loi, nous allons appliquer exactement les mêmes sanctions.

Nous allons établir une liste des revendications, que j'ai déjà commencé à compiler sur mon site Internet, dont je veux donner l'adresse, si je peux me permettre de faire un peu de publicité: www.johngodfrey.org. Les gens d'ascendance loyaliste pourront entrer en contact avec nous. Nous enregistrerons leurs revendications pour s'assurer qu'elles seront transmises au sénateur Helms et au représentant Burton qui pourront faire une ventilation de ce que coûte toute cette folie.

On dira que toute personne ayant raison de croire qu'elle peut revendiquer la propriété de biens confisqués pourra intenter une action en justice devant la Cour fédérale du Canada, qui déterminera si la revendication est valide. Dans l'affirmative, la cour ordonnera que les biens en question soient remis aux descendants des loyalistes et qu'un dédommagement soit versé directement soit pour le montant exact, soit pour une somme égale à trois fois leur valeur. Cela semble familier, n'est-ce pas? La cour ordonnera aussi que soient interdits d'entrée au Canada tous ceux qui dirigent des institutions faisant le trafic de nos biens, qu'il s'agisse de dirigeants d'organismes, de ministères, de municipalités ou de sociétés, ou qu'il s'agisse d'actionnaires ou de particuliers, ou même de leurs épouses et personnes à charge.

(1620)

J'admets que, si jamais le projet de loi Godfrey-Milliken était adopté à la Chambre, son application pourrait poser certaines difficultés pratiques. Une personne a communiqué avec nous pour dire que 700 acres de terres situées en plein centre ville de Washington appartenaient à sa famille. Ainsi, le président-directeur général d'une immense société détenant une bonne part de ces biens immobiliers, le président des États-Unis en l'occurrence, pourrait être interdit de séjour au Canada. S'il est encore en poste après les élections de novembre, sa fille et sa charmante épouse pourraient


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n'avoir plus le droit d'entrer au Canada, tout comme, à l'heure actuelle, certains dirigeants de sociétés canadiennes ne peuvent pas entrer aux États-Unis. J'admets qu'une telle mesure serait sévère, mais elle serait juste.

En terminant, en appuyant ce projet de loi, il faut réaliser qu'il pourrait n'être que le premier pas dans une longue série progressive de réponses à la provocation américaine. Nous avons aussi des armes puissantes à notre disposition-j'aime bien les comparer à celles de Fort York à Toronto-pour fournir une riposte plus vigoureuse si jamais les Américains ne comprennent pas notre logique.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, d'après le discours du député et sa référence aux débuts de l'histoire des États-Unis, il semble un ardent défenseur des droits à la propriété. S'il était réellement sérieux à ce sujet, il agirait de façon éloquente et exhorterait son gouvernement à appuyer le renforcement de ces droits au Canada. Cependant, cela ne s'est pas produit. La législation fédérale à cet égard a besoin d'être modifiée.

Pourquoi son gouvernement n'appuie-t-il pas le renforcement des droits à la propriété au Canada, au lieu de souscrire à cette démarche qui tourne le Parlement canadien en dérision?

M. Godfrey: Monsieur le Président, que cette démarche tourne le Parlement en dérision ou attire l'attention sur l'illogisme de la loi est une question de point de vue. Je présume qu'on pourrait en discuter.

Je dirais ceci au sujet des droits à la propriété. Le gouvernement croit à la primauté du droit, comme le député l'a peut-être entendu au cours des quelques dernières périodes de questions. C'est la primauté du droit et des contrats qui régit les relations entre les personnes et les relations concernant les biens.

Cette mesure législative dont nous parlons aujourd'hui, le projet de loi C-54, ne fait que réaffirmer un principe du droit international. C'est ce principe qui a été violé. La notion voulant qu'un pays puisse unilatéralement imposer ses normes au reste du monde, sans consultation, sans entente et sans consensus, est inacceptable aux yeux de tout pays souverain. C'est particulièrement le cas pour notre pays souverain.

M. George S. Baker (Gander-Grand Falls, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le secrétaire parlementaire, le député de Don Valley-Ouest, et l'ancien secrétaire parlementaire, le député de Parkdale-High Park.

Je suppose que les réformistes ne comprennent pas vraiment ce dont il parle au juste. Permettez-moi de signaler que le député de Don Valley-Ouest a fait allusion aux excellentes relations commerciales que de nombreux Canadiens entretiennent avec Cuba.

Je tiens à signaler que lorsque le Canada a essayé de gérer ses ressources marines par l'entremise des Nations Unies, une organisation appelée l'Organisation des pêches de l'Atlantique Nord-Ouest a été formée. Cuba s'est joint au Canada. Les États-Unis ont refusé de le faire.

(1625)

Le Canada a connu dans son secteur de la pêche, aux extrémités des Grands Bancs, une crise dont nous sommes tous au courant. Une organisation composée du Japon, de la Norvège, de la Suède, du Danemark et de tous les pays membres de la Communauté européenne a été formée, mais les États-Unis ont refusé d'y adhérer.

Cuba a donné son adhésion lorsque le Canada a souhaité assumer ses responsabilités en matière de conservation des ressources et à chaque fois, on a établi des relations commerciales. Lorsque le Canada a voulu obtenir des données scientifiques sur les océans, les États-Unis ont refusé. Cuba est le seul pays de ce côté-ci de l'Atlantique qui accepte que nous ayons des observateurs à bord de tous ses navires. Imaginez, tout cela se fait dans les eaux internationales. Cuba s'est porté volontaire et a décidé de financer cette évaluation scientifique. Je pourrais vous donner ainsi beaucoup d'autres exemples.

Dans le cadre actuel des Nations Unies, le Canada est tenu de former une organisation de toutes les nations qui exploitent les ressources marines au large de la côte est du Canada afin de gérer les ressources. Des réunions ont lieu tous les ans à Halifax, en Nouvelle-Écosse. Que s'est-il passé? Les États-Unis refusent d'y participer. Par contre, Cuba envoie ses représentants.

C'est ce dont le député parle. Il est question de tous ces liens qui ont été établis entre des entreprises et dans le domaine scientifique. Tout à coup, dans ma circonscription, les avions de la société Cubana se posent à l'aéroport de Gander. La loi Helms-Burton menace tous ceux qui ont établi des relations commerciales avec Cuba dont les réformistes ignorent tout. C'est ce dont le député parle. Il pourrait peut-être ajouter quelque chose au sujet de ses vues sur cette question.

M. Godfrey: Monsieur le Président, non seulement le député vante mes mérites, mais il lit dans mes pensées. Je n'avais aucune idée que je disais tant de choses. Parfois, le subconscient joue un rôle plus important qu'on ne peut l'imaginer. Il fait bon savoir que ce qu'on dit a un tel écho au point de conduire à ce type d'interprétation.

Je vais tout simplement ajouter ceci en terminant. Si nous voulons sortir de l'impasse avec Cuba, et soyons honnêtes, il s'agit d'un régime qu'aucun député ici n'approuve particulièrement, il faut précisément éviter cet esprit de confrontation que perpétue la loi Helms-Burton qui perpétue le régime cubain. Il y a une relation symbiotique entre le président de Cuba, M. Castro, et le sénateur Helms. Ils ont besoin l'un de l'autre pour pouvoir continuer d'agiter leurs propres épouvantails.

Si nous pouvons intervenir et restaurer la primauté du droit à Cuba, ce qui est déjà chose faite dans le secteur des pêches, en fait, comme mon collègue l'a signalé, nous aurons alors rendu un grand


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service à notre pays, à Cuba, à l'hémisphère occidental et, en particulier, aux États-Unis.

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi C-54, Loi modifiant la Loi sur les mesures extraterritoriales étrangères.

Pour bien étudier ce projet de loi, il serait sage de tenir compte de la loi Helms-Burton et de se demander pourquoi les Américains l'ont adoptée. En fait, cette loi visait à satisfaire la communauté des exilés cubains aux États-Unis.

À mon avis, peu de gens comprennent le pouvoir de cette communauté aux États-Unis. Il ne s'agit pas de groupes marginaux, mais de groupes qui veulent orienter la politique étrangère américaine, et ils y sont parvenus avec la loi Helms-Burton. Ils tentent de récupérer l'argent et les biens qu'ils disent s'être fait saisir quand ils ont quitté Cuba. Ils sont prêts à tout pour cela. En intervenant auprès des membres du Congrès et des sénateurs aux États-Unis, ils n'hésitent même pas à menacer les représentants et les sénateurs.

(1630)

On peut s'étonner de constater que leur sphère d'influence ne se limite pas à la Floride et au sud-est des États-Unis, mais s'étend bien au-delà, le long de la côte est et jusqu'en Californie. Ils exercent un vaste pouvoir, tant politique que financier, et peuvent modifier la politique étrangère des États-Unis. La raison pour laquelle la loi Helms-Burton a été adoptée cette année, c'est parce que c'est une année d'élections. Les membres du Congrès et les sénateurs qui vont se présenter cette année subiront la pression des petits, mais puissants groupes d'expatriés cubains.

Il n'est donc pas étonnant que le Canada, et il faut l'en féliciter, ait dénoncé cette mesure odieuse qui informe les autres pays qu'ils doivent considérer les amis des Américains comme les leurs, les ennemis des Américains comme les leurs et la politique étrangère américaine comme la leur. Si les autres pays s'y opposent, les lois américaines s'appliqueront chez eux.

Le Canada a amplement eu raison de protester fermement contre cette grossière et inexcusable mesure prise par un pays qui cherche toujours à s'imposer sur la scène internationale. Il est parfois bénéfique qu'il agisse ainsi, mais, dans ce cas-ci, il se comporte de façon déplorable à l'égard d'un pays qu'il a toujours considéré comme un ami et un allié.

La mesure ne nuit pas seulement au Canada, mais bien à tous les pays étrangers. C'est pourquoi je félicite le ministre de porter sa plainte devant le groupe de l'ALENA. J'espère qu'il en saisira l'Organisation mondiale du commerce. Je sais qu'il a protesté auprès de l'Union européenne. J'espère qu'il le fera aussi à l'Organisation des États américains.

Prises collectivement, ces plaintes peuvent adresser aux États-Unis un message très clair: «Vous ne pouvez pas adopter ce genre de comportement dans la sphère internationale. Vous êtes peut-être une des deux super-puissances mondiales, mais vous devez vous aussi vous conformer aux lois qui gouvernement le monde, vous devez vous aussi respecter les règles qui régissent le commerce international et vous n'êtes pas assez gros pour être abattus par les autres pays du monde.»

Ces lois et ces règles ont été établies pour notre avantage commun. Aux yeux des opposants au libre-échange, nous voyons ici parfaitement illustré comment un pays, dix fois moins populeux que les États-Unis, peut jouer un rôle de premier plan afin d'amener notre gros voisin du sud à tenir compte des règles qui nous gouvernent tous pour le bien de tous aux plans du commerce international et de la sécurité internationale.

Je tiens également à féliciter le Canada du rôle qu'il a joué à Cuba. Nous n'avons pas tenu compte des menaces des États-Unis dans le passé et nous avons entretenu avec Cuba des relations bilatérales en matière de coopération et de commerce.

C'est très important. Les Américains n'arrivent malheureusement pas à en comprendre l'importance. S'ils préfèrent ne pas attacher d'importance aux accords bilatéraux en matière de coopération, de commerce, d'interaction sociale et de dialogue avec Cuba, ils vont se retrouver avec un autre Haïti parmi nous. Nous savons tous le prix que nous avons à payer collectivement pour avoir laissé Haïti sombrer dans la situation tragique dans laquelle il se trouve. L'Occident, l'Amérique du Nord, les Antilles et l'Amérique centrale n'ont pas besoin d'un autre Haïti.

Cuba se trouve à un moment très délicat de son histoire. Je suis très heureux que le Canada ait pris l'initiative de jouer un rôle de premier plan pour établir des relations de compréhension, de coopération et de commerce pour le bien du peuple cubain.

Les Cubains n'oublieront pas les efforts que les Canadiens ont faits pour améliorer leur bien-être. Quiconque est allé à Cuba comprend très clairement les terribles difficultés que connaissent actuellement les Cubains.

Nous tenons là une merveilleuse occasion d'utiliser le savoir-faire que nous possédons au Canada pour établir des relations bilatérales d'aide, de coopération et de commerce qui aideront les Cubains à se relever et à établir une base économique solide indispensable à la paix.

(1635)

La politique étrangère des États-Unis vise à abattre l'économie cubaine et le peuple cubain. La mort de M. Castro créera un grand vide au niveau du pouvoir politique. Qu'est-ce qui se produit dans ces circonstances? Comme nous avons pu le constater dans bien d'autres régions du monde, des conflits dramatiques éclatent. Sur ce plan-là aussi, le Canada a saisi l'initiative pour essayer de prévenir ces situations dangereuses où les conflits risquent éclater, comme cela s'est produit à Haïti.

Voilà qui montre quel rôle le Canada peut jouer sur la scène internationale à l'avenir, dans une région où se crée un vide. Au cours du prochain siècle, le pouvoir viendra de trois sources. Les deux premières sont bien connues: la puissance économique et la


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puissance militaire. La troisième, aucun pays ne s'en soucie, mais je crois que le Canada et une poignée d'autres pays peuvent tabler sur ce pourvoir, celui d'organiser. Le Canada pourrait être cette moyenne puissance qui va organiser les initiatives multinationales. Le réaménagement des initiatives multinationales sera nécessaire pour assurer une sécurité géopolitique cruciale et contrer les menaces environnementales qui planent sur tous les pays du monde.

Peu de pays peuvent jouer ce rôle. Chose certaine, les États-Unis ne le peuvent pas, et aucun des pays qui font actuellement partie du Conseil de sécurité non plus, selon moi. Je dirais au ministre que le Canada doit travailler avec le ministre des Affaires étrangères et les six à huit puissances moyennes qui ont réussi à préserver leur neutralité, leur respect et leur compétence dans les initiatives diplomatiques internationales.

N'oublions pas que le Canada a, à plusieurs reprises, joué ce rôle de façon superbe. Dans de nombreux conflits internationaux et dans plusieurs régions du monde, les Canadiens ont réussi, au moyen du corps diplomatique, au moyen d'initiatives diplomatiques, au moyen d'une politique étrangère intelligente, à sauver des millions de vies et à empêcher la perte de milliards de dollars qu'auraient engloutis ces conflits si nous n'avions pas su les prévenir ou les atténuer.

Les Canadiens de toutes les régions du pays devraient être fiers de la contribution non seulement de leur corps diplomatique, mais aussi des casques bleus qui, au péril de leur vie, veillent à la paix et à la prospérité de la communauté internationale.

Il s'agit d'un rôle qui convient très bien au Canada. De concert avec d'autres pays, nous pouvons jouer un rôle de premier plan et exercer des pressions sur les autres nations puissantes, comme les États membres du Conseil de sécurité, pour qu'elles agissent de façon à véritablement prévenir les conflits au lieu d'appliquer la politique étrangère qui semble avoir la cote actuellement et qui consiste à gérer les conflits.

Permettez-moi de faire une petite digression. Par le passé, nous avons concentré nos efforts sur la gestion ou la prévention des conflits. C'est là une grave erreur, car les signes précurseurs sont visibles des années avant que n'éclate le conflit. Si nous avions pu déceler ces signes précurseurs et y réagir, avec la collaboration des autorités des régions concernées, nous aurions pu éviter bon nombre des tragédies dont nous avons été témoins vers la fin du XXe siècle.

La plus grande tragédie des derniers temps est certes le conflit dans l'ancienne Yougoslavie. Peut-être que les conflits au Burundi et au Rwanda n'auraient pu être prévenus, mais les massacres auraient sûrement été atténués, si nous avions pu intervenir plus tôt. Il aurait fallu déceler les signes précurseurs et tenter d'améliorer la situation.

Le Canada a joué un rôle dans ce sens, mais notre politique étrangère est encore axée sur la gestion des conflits, c'est-à-dire sur la création de forces de réaction rapide et le maintien de la paix. Lorsqu'il faut déployer des forces de réaction rapide ou organiser des missions de maintien de la paix, il est déjà trop tard. Les germes du mécontentement ethnique ont déjà été semés pour ce conflit et pour d'autres à venir et il est trop tard pour faire cela.

C'est fort triste car ce ne sont habituellement pas les soldats qui sont tués lors de ces tragédies. En fait, 90 p. 100 des victimes des conflits du XXe siècle sont des civils. Ils n'ont pas demandé cela, ils ne l'ont pas voulu. Tout ce que veulent les civils, c'est vivre en paix. Souvent, des milliers sinon des millions de personnes vont souffrir parce qu'un petit groupe de mégalomanes, qui n'ont aucun scrupule à tuer les civils de leur pays, décident d'exercer le pouvoir, non pas dans l'intérêt de la paix, mais dans le leur propre.

(1640)

C'est là que le Canada peut jouer un rôle. Nous ne devrions pas envoyer nos casques bleus ça et là. La collectivité peut certes prendre de solides mesures pour empêcher qu'un conflit n'éclate.

Le Canada pourrait prendre des mesures par l'intermédiaire des institutions financières internationales. Des pressions économiques plutôt que militaires doivent être exercées contre les individus qui refusent d'assumer leurs responsabilités à l'égard d'un pays et d'un peuple et qui adoptent une conduite de nature à menacer la sécurité internationale.

Nous n'avons rien fait collectivement pour empêcher cela. Cela a coûté la vie à de nos casques bleus et de l'argent à notre ministère de la Défense. Des milliards de dollars de nos budgets d'aide ont été engloutis dans des programmes de reconstruction. Cela aurait pu être évité.

On peut soutenir qu'il faut intervenir tôt pour des raisons humanitaires. Toutefois, il y a aussi une bonne raison d'intervenir tôt, et c'est la simple et froide question d'argent.

Les Canadiens veulent savoir pourquoi nous nous mêlons de conflits qui font rage à l'autre bout du monde. Pour des raisons économiques. En outre, beaucoup de personnes quittent les régions secouées par des conflits pour venir s'établir chez nous. Ces réfugiés authentiques sont tout à fait les bienvenus au Canada, mais il reste qu'ils préféreraient vivre en paix et en sécurité dans leur pays.

J'encourage nos ministres à travailler en collaboration avec leurs homologues d'autres moyennes puissances comme la Nouvelle-Zélande, l'Australie, le Danemark, la Norvège et la Suède. Les ministres des Affaires étrangères de ces pays devraient se réunir pour élaborer des projets de coopération visant à prévenir les conflits plutôt qu'à les gérer.

De plus, j'insiste auprès du ministre sur la nécessité de prendre des mesures par l'entremise d'institutions financières internationales, comme la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, et par l'entremise des Nations Unies.

Je ne m'illusionne pas; je sais que ce sont là d'énormes tâches et que nous ne réussirons pas à faire tout ce que nous voulons. Cependant, nous devons essayer. Un pays seul ne pourra contrer les menaces géopolitiques et environnementales de demain. Il faudra que tous les pays du monde y fassent face. C'est là la réalité brutale.


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Un pays seul ne peut régler ces problèmes. Il faut un effort collectif pour les résoudre.

Nous devons examiner cette question non seulement d'un point de vue humanitaire, mais aussi en fonction de considérations pratiques d'ordre économique, afin de réaliser des économies par rapport à l'aide que nous accordons et à notre personnel militaire. En faisant cela, nous réaliserons des économies dans ces secteurs.

J'appuie fermement le projet de loi à l'étude. C'est une excellente initiative du Canada. J'espère qu'il s'agira de l'une des nombreuses initiatives que le Canada prendra en tant que chef de file sur la scène internationale. Fait à signaler, il se pourrait qu'en raison de ce projet de loi, la réputation du Canada soit beaucoup plus solide auprès de la communauté internationale. Notre force de persuasion morale et nos pouvoirs diplomatiques s'en trouveraient accrus. Je le répète, il n'est pas nécessaire que cela coûte de l'argent. Nous pourrions peut-être mettre à contribution les membres de notre corps diplomatique qui sont très enthousiastes, très intelligents et très éloquents et qui ont une très vaste expérience. Nous pourrions peut-être les utiliser plus efficacement dans les initiatives dont je viens de parler.

(1645)

Je sais que les députés du Parti réformiste et, j'en suis certain, ceux du Bloc québécois seraient très heureux de travailler en collaboration avec le gouvernement pour essayer de mener à bien des initiatives qui seront avantageuses pour l'ensemble de notre société.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député d'Esquimalt-Juan de Fuca de son intervention et de son discours à caractère historique, et international aussi, qui était fort intéressant.

J'ai été un peu surpris de l'entendre louanger les interventions du ministre du Commerce international et dire que le Canada a été beau, grand, fort, gentil et rapide, fin, etc. Je pense qu'il a sorti son dictionnaire des synonymes pour inventer toutes les qualités qu'il a trouvées au ministre du Commerce international et à son gouvernement. Le ministre est très gentil, soit dit en passant, mais il y a peut-être quelques petits bémols à amener aux beaux mots du député réformiste.

Si le projet de loi, comme il le dit lui-même, était aussi indécent ou aussi inacceptable pour le Canada, comment pourrait-il expliquer, lui, que le gouvernement canadien ait attendu sept mois avant de présenter ce projet de loi C-54 devant cette Chambre?

Ma première question porte donc sur le délai. Est-ce qu'il est satisfait de la rapidité de l'intervention, «rapidité» de sept mois, étant donné qu'on sait depuis le mois de mars que le gouvernement américain a déposé sa Loi Helms-Burton?

J'ai aussi une deuxième question pour mon collègue réformiste. Il a aussi encensé l'intervention du gouvernement qui est à la remorque de l'Union européenne, plutôt que d'utiliser un pouvoir qu'il a entre les mains, comme je le disais tout à l'heure, depuis le 29 juillet, et de faire preuve de leadership dans une intervention en demandant un comité spécial dans le cadre de l'ALENA. Pourquoi mon collègue réformiste est-il si enjoué et si enthousiaste de voir le gouvernement canadien être à la remorque de l'Union européenne, aujourd'hui, au mois d'octobre, alors que le gouvernement canadien aurait pu, depuis le mois de juillet, dans le cadre d'un comité spécial de l'ALENA, faire la demande?

Donc, ce sont deux questions toutes simples. Premièrement, pourquoi est-il si heureux que cela ait pris sept mois, et deuxièmement, est-il si heureux qu'on soit à la remorque de l'Union européenne?

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, je remercie mon collègue du Bloc québécois pour sa question.

[Traduction]

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, pour répondre au député, j'estime comme lui que le dépôt de cette mesure à la Chambre a beaucoup trop tardé. Comme lui et mon collègue réformiste, le porte-parole en matière de commerce international, je crois que le problème aurait dû être soumis immédiatement à un groupe spécial de l'ALENA. Il est regrettable que le gouvernement ne l'ait pas fait.

J'espère que le ministre se souviendra à l'avenir qu'il peut compter sur la coopération de mon parti pour saisir un groupe spécial de l'ALENA ou l'Organisation mondiale du commerce de questions de ce genre. Si la même situation se reproduisait, j'espère qu'il agira en ce sens.

Aussitôt que le gouvernement aura pris cette initiative, je suis certain que le porte-parole réformiste en matière de commerce international s'empressera de mettre ses connaissances à contribution pour proposer des façons constructives de résoudre ces questions très complexes de commerce international.

Soit dit en passant, j'espère que dans le cas de l'accord de libre-échange Canada-Israël, le ministre tiendra également compte de ses répercussions sur le peuple palestinien. S'il choisissait de les ignorer, il nuirait à l'un des principaux éléments de solution de problèmes majeurs qui constituent la crise du Proche-Orient.

Aussi, je conseille vivement au ministre de prendre garde et de veiller à collaborer avec le peuple palestinien pour s'assurer que l'accord de libre-échange Canada-Israël comportera des mesures de coopération qui permettront d'améliorer la situation économique tragique et terrible qui frappe la Cisjordanie et la bande de Gaza.

(1650)

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?


5311

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Le vice-président: Chers collègues, en conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qui seront soulevées ce soir à l'heure de l'ajournement: le député de Regina-Lumsden-Hollinger Inc.; le député de South Shore-les pêches; le député de London-Middlesex-les importations de carburant.

* * *

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE CANADA-ISRAËL

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre du Commerce international, Lib.) propose: Que le projet de loi C-61, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange Canada-Israël, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, je suis heureux d'amorcer le débat de deuxième lecture sur le projet de loi concernant l'Accord de libre-échange Canada-Israël.

[Français]

Cet accord historique est à la fois important et symbolique. Important parce qu'il constitue le premier accord de libre-échange signé par le Canada avec un pays n'appartenant pas au continent américain, et symbolique parce qu'il apporte un nouveau témoignage de notre attachement à libéralisation du commerce à l'échelle du globe.

[Traduction]

Le message est on ne peut plus clair. Le Canada est disposé et apte à commercer avec le reste du monde. Grâce à cet accord, nous nous trouverons à égalité avec l'Union européenne et les États-Unis, qui ont tous deux déjà conclu des accords de libre-échange avec Israël.

Pour la première fois, nous aurons directement accès au marché israélien, sans avoir à acheminer notre commerce par les États-Unis ou tout autre pays.

La mondialisation des marchés figure parmi les grandes vagues de l'histoire. Le Canada ne peut se permettre de l'observer du rivage, et il n'en a pas du tout l'intention.

Dans notre monde en constante mutation, aucun pays, si riche ou si pauvre soit-il, ne saurait demeurer longtemps à l'écart des grands courants économiques de l'heure. Les marchés s'ouvrent, les barrières tombent et la libre circulation des marchandises, des services et des idées devient impossible à freiner.

Aujourd'hui, les entreprises canadiennes ont le monde pour marché, et les possibilités sont infinies. Avec vigueur et succès, nous nous attachons à conquérir de nouveaux marchés et à ouvrir de nouveaux horizons.

Il en est résulté que notre balance commerciale a atteint de nouveaux sommets, enregistrant un excédent record de plus de 28 milliards de dollars en 1995.

Le succès que nous connaissons aujourd'hui, nous le devons en partie à l'approche coopérative adoptée par notre gouvernement dès

son arrivée au pouvoir. De nouveaux partenariats ont été établis dans toutes les provinces pour améliorer les services à l'exportation offerts aux entreprises canadiennes, et tout particulièrement aux dynamiques petites et moyennes entreprises.

Nous avons aussi tiré parti des missions commerciales de l'Équipe Canada à l'étranger, qui ont permis aux gouvernements fédéral et provinciaux et au secteur privé de conjuguer leurs efforts à la recherche de nouveaux débouchés pour les entreprises canadiennes.

À ce jour, ces missions ont rapporté des contrats de 20 milliards de dollars à nos entreprises, lesquelles devront embaucher du personnel supplémentaire pour honorer ces contrats ainsi que pour en obtenir de nouveaux. On estime que, pour chaque milliard de dollars de nouveaux échanges commerciaux, 11 000 emplois sont maintenus et créés.

(1655)

Toutes ces activités indiquent, à mon avis, un changement radical dans la façon dont les Canadiens envisagent le libre-échange. Nous avons fini par nous rendre compte que les avantages que présente la mondialisation sont bien plus nombreux que les dangers qu'elle pourrait comporter. Nous comprenons enfin que la libéralisation des échanges constitue la clé de la croissance économique, tant au Canada que partout ailleurs dans le monde. Plus précisément, elle permet de créer des emplois et de les maintenir. Des tas d'emplois.

Un emploi canadien sur trois dépend aujourd'hui de nos exportations. Les échanges commerciaux représentent quelque 37 p. 100 de notre produit intérieur brut, soit plus du tiers. Il est donc clair que notre commerce avec le reste du monde est devenu le moteur de notre économie.

Le choix qui s'offre à nous est clair: ou nous prenons de l'expansion et diversifions notre commerce, ou nous stagnons et nous nous condamnons, de même que nos enfants, à une existence étriquée dans un pays étriqué.

Notre gouvernement n'a pas l'intention de laisser une telle situation se produire. Nous n'avons pas l'intention de rester les bras croisés pendant que les emplois, la croissance et les possibilités passent à d'autres pays. Nous sommes résolus à ce que le Canada se trouve en position de réaliser son plein potentiel et non seulement de maintenir, mais de relever le niveau de vie de ses citoyens.

Pour y parvenir, nous devons constamment rechercher de nouveaux partenaires et de nouveaux marchés. Notre marché intérieur étant relativement restreint, nous devons regarder au-delà de nos frontières et nous devons assurer à nos entreprises l'accès dont elles ont besoin aux économies les plus dynamiques et les plus vigoureuses de la planète.

C'est pour cela que nous avons signé l'Accord de libre-échange nord-américain, l'ALENA, et que nous cherchons à faciliter l'accession du Chili à cet instrument. C'est pour cela que nous favorisons avec diligence la création d'une zone de libre-échange des Amériques. C'est pour cela encore que nous appuyons avec tant d'énergie l'Organisation mondiale du commerce et ses initiatives de libéralisation des échanges mondiaux. C'est pour cette même raison que nous faisons partie du mécanisme de coopération économique


5312

Asie-Pacifique, l'APEC. C'est pour cette même raison que nous avons signé un accord de libre-échange avec Israël.

Cet instrument constitue le parfait complément de nos efforts d'expansion de notre commerce. Depuis novembre 1993, comme l'a répété à maintes reprises mon collègue, le ministre des Finances, les Canadiens ont créé plus de 600 000 nouveaux emplois. S'il faut en croire les prévisions, le Canada devrait enregistrer le taux de création d'emplois le plus élevé du G-7 en 1996, et de nouveau en 1997. Il faut se rendre à l'évidence, lorsqu'ils ont accès aux marchés mondiaux, les Canadiens créent des emplois et créent la prospérité.

Il reste que le commerce international porte sur des chiffres très élevés-les échanges s'expriment en milliards de dollars, les emplois créés se comptent par millions. Devant cette chaîne de zéros, on oublie parfois que les chiffres cachent des Canadiens en chair et en os, des hommes et des femmes qui se voient ainsi conférer la dignité du travail. Des hommes et des femmes qui se mettent à planifier pour l'avenir et à construire une vie meilleure pour eux-mêmes et pour leurs enfants, des hommes et des femmes qui paient des impôts et contribuent à la prospérité économique de nos collectivités et de notre pays.

Conscient de cette réalité, notre gouvernement s'est donné pour but de doubler le nombre d'entreprises canadiennes exportatrices d'ici l'an 2000. Nous croyons que c'est là le meilleur moyen de stimuler la croissance et de créer des emplois.

L'accord de libre-échange avec Israël marque le franchissement d'une nouvelle étape vers l'atteinte de notre objectif de libéralisation accrue du commerce mondial. Il témoigne à l'évidence de la volonté du Canada d'assortir d'actes concrets ses discours sur le libre-échange.

(1700)

Pourquoi Israël? Nos deux pays entretiennent d'étroites relations depuis longtemps. Nos liens reposent sur des valeurs et des convictions démocratiques partagées, notamment sur la foi en la liberté et la dignité de la personne humaine. Nos liens reposent aussi sur un espoir commun de paix et de prospérité. Avec cet accord de libre-échange, nous sommes en voie de cimenter nos liens et de réaliser le potentiel économique de notre relation.

C'est en novembre 1994 que le regretté premier ministre d'Israël, Yitzhak Rabin, et notre premier ministre ont engagé le processus qui devait aboutir à cet accord historique. C'est à Toronto, il y a quelques mois à peine, que j'ai eu le privilège de signer l'accord définitif en compagnie de Nathan Charansky, ministre israélien de l'Industrie et du Commerce.

Si je puis me permettre une parenthèse personnelle, je dirai que ce fut pour moi un très grand honneur de faire la connaissance de M. Charansky, sur qui j'avais beaucoup lu. Ayant suivi pendant tant d'années sa courageuse croisade en faveur des droits de la personne dans l'ancienne Union soviétique, j'ai éprouvé un immense plaisir à le rencontrer et à m'entretenir avec lui de nombreux sujets.

La persévérance et le pouvoir de se dépasser sont parmi ses qualités les plus remarquables. Privé de liberté pendant de longues années, jamais il n'a trahi ses principes. Aux heures les plus sombres de l'oppression soviétique, il a entretenu avec constance la flamme de la liberté.

Donc, en signant cet accord en juillet, les deux pays se sont engagés à soumettre à leurs parlements respectifs un texte législatif visant à en assurer la mise en oeuvre. C'est pourquoi nous présentons aujourd'hui le projet de loi C-61. Si les formalités requises de part et d'autres s'accomplissent avant la fin de l'année, l'accord entrera en vigueur le 1er janvier 1997.

Avant d'aborder les points saillants de l'accord, je tiens toutefois à déclarer bien clairement ceci. Certes, cet accord lie les seuls gouvernements du Canada et d'Israël, mais nous entendons bien faire profiter les Palestiniens des mêmes avantages. Nous rencontrerons les représentants palestiniens afin de déterminer le meilleur moyen d'y parvenir.

Le Canada s'est toujours montré fermement attaché au processus de paix au Moyen-Orient. La corrélation entre la paix et la libéralisation du commerce n'est plus à démontrer. Dans le meilleur des cas, le libre-échange apporte un système de règles pour la gestion de relations économiques pacifiques. Il favorisera le développement économique, ce qui contribuera à apporter la stabilité dans la région pour les gens d'Israël et pour ceux qui relèvent des autorités palestiniennes à Gaza et en Cisjordanie.

L'ancien premier ministre d'Israël, le regretté Itzhak Rabin, a dit un jour que la paix exige tout en ensemble de nouveaux concepts. Parmi les nouveaux concepts qui façonnent notre monde aujourd'hui, l'un des plus importants est la libéralisation du commerce entre les États.

Certes, la récente évolution de la situation au Moyen-Orient est source de préoccupations pour nous tous, mais elle ne doit pas nous faire perdre de vue les progrès accomplis à ce jour, ni nous détourner de nos objectifs à long terme. Le président Arafat et le premier ministre Nétanyahou ont promis de renoncer à la violence et de poursuivre les négociations. Ces promesses nous sont un encouragement. Elles indiquent clairement que, conscients de l'importance des enjeux, les deux côtés se rendent enfin à cette simple évidence qu'il est bien plus constructif de se serrer la main que de se montrer le poing.

Il nous faut aussi reconnaître que le processus de paix a déjà procuré des avantages concrets à Israël. Un grand nombre de projets d'immobilisations, touchant les transports, les communications et le secteur énergétique, sont actuellement à l'étude entre l'État israélien et ses voisins, marquant une évolution encore inconcevable il y a quelques années à peine. Le Canada appuie de telles alliances constructives, et il veut prendre une part active et concrète au futur développement économique de la région.

L'accord présente aussi pour le Canada un autre intérêt, qui tient à la nature même de l'économie israélienne. Avec son secteur privé florissant, sa main-d'oeuvre instruite, son système bancaire moderne, sa Bourse importante et son excellent réseau de communications, Israël possède l'une des économies qui connaissent la croissance la plus rapide dans la région.


5313

(1705)

Le programme économique de grande envergure du nouveau gouvernement israélien vise à réduire les impôts ainsi que les dépenses publiques, à simplifier les formalités administratives et à mettre de l'ordre dans les pratiques restrictives du travail. Résultat: la construction domiciliaire est en plein essor et les investissements étrangers se font plus nombreux. En fait, Israël fait aujourd'hui figure d'aimant aux yeux des investisseurs étrangers, qui lui apportent les capitaux dont son économie a besoin pour croître et prospérer.

Israël a aussi entrepris d'élargir ses relations commerciales, signant des accords de libre-échange avec la Turquie, la République tchèque, la Slovaquie et, comme je l'ai mentionné plus tôt, avec l'Union européenne et les États-Unis.

Les réformes économiques s'accompagnent par ailleurs d'une expansion des relations politiques. À la fin de 1995, Israël avait renoué avec plus de 40 pays qui avaient rompu leurs relations avec lui dans les années 1960 et au début des années 1970.

C'est là une évolution positive qui témoigne encore une fois de la volonté d'Israël de présider à la naissance d'un nouveau Moyen-Orient, un Moyen-Orient dynamique et tourné vers l'extérieur, qui accueille le changement politique et multiplie les possibilités, un Moyen-Orient qui ne laisse pas son passé hypothéquer son avenir. C'est dans ce nouveau Moyen-Orient qu'Israël s'apprête à devenir une puissance économique. Le moment est donc opportun pour le Canada de se montrer présent et de se garantir un accès sur ce marché stratégique au moyen de l'accord de libre-échange entre le Canada et Israël.

Le commerce entre nos deux pays est modeste, mais il se développe. L'an dernier, nos échanges bilatéraux se sont accrus de 37 p. 100, pour s'établir à 450 millions de dollars. Nos exportations se sont chiffrées à 216 millions de dollars en 1995, soit une augmentation de 49 p. 100 par rapport à l'année précédente. J'ai confiance que ces chiffres augmenteront de façon spectaculaire avec la mise en oeuvre de l'accord.

En fait, même avant la signature de cet accord, les entreprises des deux pays ont commencé à se rééquiper et à modifier leurs projets. Le service d'Air Canada à destination d'Israël aide à accélérer le cours des affaires et le mouvement des marchandises et des personnes entre nos deux nations.

En 1995, plus de 68 000 touristes israéliens ont visité le Canada, Si cette tendance se maintient, ils seront 100 000 cette année.

Grâce à la signature de cet accord, la demande accumulée sera satisfaite, les liens se resserreront et les énormes possibilités pourront commencer à se réaliser. Les entreprises canadiennes et israéliennes auront accès en franchise à leurs marchés réciproques des produits industriels. De plus, ils bénéficieront d'une réduction, voire de l'élimination, des droits de douane sur les produits agricoles.

Beaucoup de compagnies canadiennes, dont certaines bien connues, comme Bombardier et Newbridge, et d'autres moins, comme Claridge Israel, Global Upholstery, Reikh International, Signatel et Telespace, sont sur place, explorant de nouveaux partenariats et soumissionnant de nouveaux travaux d'infrastructure. Ces sociétés sont à la fine pointe d'une hausse des exportations et des importations entre nos deux pays. Elles gonflent les investissements et encouragent l'innovation par la recherche et le développement et par des coentreprises. Tous leurs efforts, et aussi ceux d'autres entreprises, seront graduellement facilités par l'accord que nous examinons aujourd'hui.

L'économie israélienne dans son ensemble représente un marché vigoureux et dynamique pour les produits et les services canadiens, mais certains secteurs offrent un potentiel particulièrement riche. Ce sont les systèmes électroniques et de communication évolués, les travaux d'aménagement électrique et énergétique, la prospection pétrolière et gazière, ainsi que les produits agroalimentaires et la technologie environnementale. Ce sont tous des domaines où le Canada jouit d'une expertise de calibre mondial, et tous offrent des débouchés en Israël.

Cet accord ouvre l'accès au marché israélien, mais nous n'ignorons pas que l'accès n'est que la moitié de la bataille. Il faut aussi faire connaître aux compagnies les débouchés qui les attendent. Les compagnies canadiennes qui voudront étendre leurs activités en Israël disposeront d'un appui généreux. L'ambassade du Canada à Tel Aviv s'applique à apparier des partenaires éventuels et à assortir des produits et services canadiens avec des acheteurs israéliens.

(1710)

Un autre important canal que nos entreprises peuvent exploiter est la Fondation Canada-Israël pour la recherche et le développement industriels. Créée en 1993 avec mission de promouvoir la coopération industrielle, la Fondation met en contact des entreprises canadiennes avec des firmes israéliennes. Jusqu'à maintenant, elle a approuvé quelque 11 projets de R-D coopérative, d'une valeur totale de plus de 9 millions de dollars. Elle octroie également des subventions remboursables à des coentreprises prometteuses.

Je note avec satisfaction que le gouvernement de l'Alberta et l'Agence de promotion économique du Canada atlantique (APECA) ont signé des accords de coopération avec la Fondation. Une entente semblable avec le Bureau de développement régional pour le Québec (BDRQ) est en préparation. La participation de ces gouvernements et organismes est fort encourageante, car elle élargit considérablement le marché qui bénéficiera des bons offices de la Fondation, d'où résulteront un plus grand nombre de partenariats et de nouveaux débouchés.

Par ailleurs, la Société pour l'expansion des exportations (SEE) offre quatre lignes de crédit pour le crédit acheteur en Israël. Les entreprises canadiennes à la recherche de services financiers ou de services de gestion du risque en trouveront une source parfaite à la SEE.

Donc, l'infrastructure d'appui au libre-échange est en place. Les gouvernements ont joué leur rôle, et il appartient maintenant aux secteurs privés des deux pays d'exploiter les nouvelles relations qui se sont nouées.


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J'aborderai maintenant de façon brève la substance de l'Accord. Je n'entrerai pas dans les détails, mais je voudrais en esquisser les principaux éléments.

Premièrement, aux termes de cet accord, les droits de douane sur tous les produits industriels seront abolis à compter du 1er janvier 1997. Les seules exceptions sont, à la demande du Canada, les maillots de bain pour dames et, à la demande d'Israël, certains tissus de coton, qui continueront à être frappés de droits de douane, mais, même dans ces deux cas, les droits de douanes doivent être éliminés graduellement en deux ans et demi.

Deuxièmement, divers produits agricoles et produits de la mer seront admis en franchise ou frappés de droits de douane modestes. Dans le cas du Canada, cela inclue les céréales, les produits céréaliers, la viande bovine, le sucre d'érable, l'alcool et divers aliments transformés.

Troisièmement, l'accord définit des règles d'origine claires et explicites, ce qui est un élément crucial de toute relation commerciale fructueuse. J'ajouterai que ces règles d'origine sont généralement moins restrictives que celles qui sont prévues dans l'ALENA, ce qui reflète les structures et l'ouverture de nos économies respectives.

Quatrièmement, en cas de litige concernant l'application de l'accord, les deux parties sont convenues de s'en remettre à un mécanisme obligatoire de règlement des différends.

Il convient de souligner les domaines qui échappent à la portée de l'accord. Comme nous pouvons nous y attendre, les produits laitiers et avicoles à offre réglementée sont exclus. De même les industries culturelles et le Pacte de l'auto. D'autres dossiers, comme le commerce des services et les marchés publics continueront d'être assujettis aux règles multilatérales établies par l'entremise de l'Organisation mondiale du commerce.

Ce sont là quelques-uns des avantages que cet accord apporte aux Canadiens. Je suis fier du travail accompli par nos négociateurs. Je les félicite. Je suis emballé par les perspectives qui s'ouvrent grâce à cet accord.

L'élimination des barrières commerciales, dans le monde entier, crée des possibilités pratiquement illimitées pour le Canada.

[Français]

Un monde du possible s'ouvre à nous et nous sommes déterminés à mettre les Canadiens en situation d'en tirer profit. Cet accord est un important pas dans cette direction.

[Traduction]

Il nous ouvre l'accès à un marché dynamique et important. Nos solides liens d'amitié seront complétés par des liens économiques plus forts. Nous serons partenaires, non seulement pour la paix, mais pour le progrès, non seulement pour la sécurité, mais pour la prospérité, non seulement pour la survie, mais pour l'enrichissement.

(1715)

Cet accord n'est pas un acte de foi, mais une déclaration de confiance, confiance dans la capacité des Canadiens à affronter avec succès la concurrence, dans le monde entier. À ceux qui disent que les vieilles barrières commerciales sont simplement remplacées par de nouveaux blocs commerciaux, cet accord offre la preuve éloquent du contraire.

À ceux qui disent que nous devons diversifier nos échanges dans le monde, cet accord apporte un motif d'optimisme. Notre critère et notre but étant la libéralisation des échanges, continuons à ouvrir un monde de possibilités aux Canadiens, confiants de pouvoir y soutenir la concurrence et la vaincre.

Pour terminer, je voudrais répondre à certaines questions que j'ai entendues à propos de cet accord. L'une d'elles a trait au processus qui a été suivi. Nous avons appliqué dans ce cas le processus de négociation employé normalement pour des affaires de ce genre. Nous avons négocié de gouvernement à gouvernement, et nous l'avons fait de manière à consulter les industries touchées.

J'ai précisé que, à certains égards, nous abolirons graduellement les droits de douane à la demande de certaines des industries consultées. C'est le genre de processus que nous appliquons, que ce soit directement avec les industries touchées ou par l'intermédiaire de comités de consultation sectorielle en matière de commerce international, qui me conseillent sur ces questions. Nous faisons en sorte que le processus de consultation aboutisse à un accord que le secteur privé appuiera et trouvera avantageux, parce que c'est fondamental pour le succès de l'entreprise.

Nous avons suivi le processus de négociation normal. Nous avons procédé aux consultations, et nous soumettons maintenant à la Chambre les détails du projet.

L'autre question qui se pose est celle-ci: Pourquoi maintenant? Cette question, on l'aborde souvent en songeant au conflit qui a actuellement cours au Moyen-Orient. Malheureusement, les conflits ont jalonné l'histoire de cette région. Le Canada s'engage à contribuer à la résolution du conflit et à ramener la paix, la stabilité et la prospérité au Moyen-Orient.

Il faut avoir à l'esprit qu'une des raisons pour lesquelles il convient d'agir maintenant, c'est que le Canada est désavantagé au chapitre du commerce avec Israël. Nos concurrents, qu'ils soient de l'Union européenne, des États-Unis et de quelques autres pays, ont librement accès à ce marché, ce qui n'est pas encore le cas des sociétés canadiennes. Je connais des entreprises d'ici qui fabriquent un produit en partie seulement et l'envoient ensuite aux États-Unis pour la finition, et ce, afin de profiter de l'accord de libre-échange des Américains. Ça coûte des emplois au Canada.

Nous voulons faire en sorte que les sociétés canadiennes cessent d'être ainsi désavantagées, et le plus tôt sera le mieux. Nous avons fixé au 1er janvier 1997 la date d'entrée en vigueur de cet accord avec l'objectif de renverser cette situation désavantageuse et d'établir des règles équitables en faveur des entreprises canadiennes. Comme il s'agit d'un calendrier ambitieux dont la réalisation dépend de la collaboration de tous, y compris celle des députés,


5315

j'espère que la Chambre voudra bien d'adopter la mesure législative à temps pour qu'elle entre en vigueur le premier de l'an.

Il y a un autre motif qui milite en faveur d'une initiative à ce moment-ci au Moyen-Orient: la situation qui y prévaut actuellement et que j'ai décrite tout à l'heure. Si nous voulons ramener la paix et la stabilité, il faut aussi qu'il y ait développement économique. Il faut offrir des opportunités aux Israéliens et à ceux qui relèvent de l'autorité palestinienne.

Comme je l'ai mentionné, par le truchement de l'autorité palestinienne, cet accord est offert aux populations de Gaza et de la Cisjordanie. Plus tôt cet accord deviendra effectif pour elles, plus tôt les possibilités d'emplois viendront relever leur économie. Pareil développement économique est nécessaire pour ramener la stabilité dans la région.

(1720)

J'espère que nous débattrons à fond de la question. Mais j'espère également que tous les députés de la Chambre se joindront à nous pour appuyer cette mesure législative qui permettra aux entreprises canadiennes d'accroître leurs relations commerciales avec Israël, aidera les Canadiens à se lancer à la conquête des marchés internationaux et contribuera à la création d'emplois au Canada et à la croissance économique de notre pays.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Madame la Présidente, je sais qu'il n'y a pas de période de questions ou commentaires, mais vous allez quand même me permettre, étant donné le fait que j'ai écouté avec une attention quasi religieuse le discours du ministre du Commerce international, de commenter quelque peu son discours. Lors d'une prochaine rencontre, peut-être qu'il répondra à mes commentaires par d'autres commentaires ou par des réponses.

La première surprise vient du fait de ses mots louangeurs à l'égard du libre-échange, du libre-échange et encore du libre-échange avec les États-Unis, avec l'Asie, avec le monde entier, même, a-t-il dit, à un moment donné. Je trouve que cela contrevient un peu avec les discours des libéraux qu'on entendait, il y a quelques années, lors des négociations sur l'Accord de libre-échange avec les États-Unis. Nous sommes très heureux de voir maintenant cette modification, ce virage de la part des libéraux vers la superbe idée proposée et mise de l'avant par des gens, probablement majoritairement du Québec, sur le libre-échange. Nous sommes donc très heureux de voir ces conversions de la part de nos collègues.

Dans le domaine de la création d'emplois, je sais qu'on pose beaucoup de questions et qu'il y a beaucoup de chiffres là-dedans, mais je me pose une question très simple, et probablement que l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes, des Québécois et des Québécoises se posent. Le ministre nous dit que chaque fois qu'un accord de libre-échange est signé ou que chaque fois que Team Canada fait un voyage, cela crée tant de mille emplois par million. S'ils ont créé autant d'emplois depuis qu'ils ont pris le pouvoir, alors que le taux de chômage, à l'époque, se situait à peu près à 10,5 p. 100 ou 11 p. 100, pourquoi, aujourd'hui, le taux de chômage se situe-t-il toujours à 10,5 p. 100 ou 11 p. 100?

Peu importe le nombre de questions de Statistique Canada, du ministre des Finances, du ministre du Développement des ressources humaines ou de qui que ce soit d'autre, s'ils sont si bons que ça, comment se fait-il que le pourcentage du taux de chômage ne diminue pas? C'est une autre question que je me pose.

Mais il y a une partie de son discours, et là, je devrai sortir le dictionnaire des synonymes de qualités que mon collègue a sorti tantôt pour lui mentionner les même qualités sur cette partie du discours.

Lorsqu'il disait que le libre-échange avec Israël était une panacée à peu près à tous les maux et une création d'emplois merveilleux et tout le reste, il n'a pas parlé de trois aspects relativement importants. D'abord, pour que le Canada signe un accord de libre-échange avec Israël, la stabilité politique ou économique n'a pas semblé être une condition primordiale. Donc, on peut faire des affaires, parler de création d'emplois avec un pays où la stabilité politique et la stabilité économique n'est pas présente quotidiennement.

On n'a qu'à regarder un peu la télévision ou lire la section relations internationales dans les journaux pour constater que, si c'est si bon que ça pour le Canada de signer un traité de libre-échange avec Israël pour la création d'emplois, cela ne veut pas nécessairement dire que l'économie va mal au Québec à cause de l'instabilité politique. Si on fait une corrélation avec les propos, ça devrait être ça.

Si le Canada est si heureux de signer un accord de libre-échange avec un pays dont les échanges Canada-Israël-et ce sont les chiffres du ministre-se retrouvent à peu près à 450 millions par année, nous pouvons présumer bien naïvement, j'en conviens, que le Canada serait d'autant plus encouragé de signer un traité de libre-échange avec un pays faisant des affaires de 250 milliards de dollars avec le Canada. Ainsi, dans un même ordre d'idées, le gouvernement canadien et le ministre, qui, je l'espère, sera encore en poste à ce moment-là, vont promouvoir la création d'emplois, le libre-échange et ne feront pas mention d'instabilité politique ou économique.

Donc, cette partie de son discours, je crois qu'on va la conserver dans les tiroirs de nos bureaux et, à un moment donné, peut-être dans une période électorale ou dans une période référendaire, on pourra l'utiliser et dire: «Si c'était si bon que ça à 450 millions, ce ne sera sûrement pas pire à 200 milliards».

C'étaient les quelques commentaires que j'avais à faire à la suite du discours du ministre du Commerce international.

(1725)

Maintenant, je puis dire que nous sommes enfin très heureux de pouvoir discuter de ce projet de loi, le projet de loi C-61, sur l'accord de libre-échange avec Israël. Le jour est venu où nous avons finalement la chance de prendre la parole sur l'accord de libre-échange entre notre pays et Israël. Je vous avoue que c'est pour moi un grand plaisir.

Je dois cependant d'ores et déjà souligner que le Bloc québécois déplore le fait que tout ce qui entoure cet accord a été tenu si secret jusqu'à maintenant. Plus loin dans mon discours je vais prouver ce que j'avance.

Le Bloc québécois votera en faveur du projet de loi C-61, car nous saluons avec enthousiasme la signature d'un accord de libre-échange entre le Canada et l'État d'Israël. Nous espérons que cet accord fera accroître nos échanges commerciaux avec Israël comme


5316

avec le restant des pays du monde, ultérieurement, comme le ministre l'a dit.

En effet, nous avons toujours été en faveur de la mondialisation des marchés et des traités de libre-échange, nous. Cet accord sera bénéfique autant pour les entreprises québécoises que canadiennes, et aussi pour les entreprises israéliennes. Nos entreprises québécoises et canadiennes ont besoin de l'accès aux marchés étrangers pour se développer. La signature d'une entente de libre-échange est donc bienvenue dans la situation économique actuelle. D'ailleurs, la Société pour l'expansion des exportations, la SEE, a des crédits disponibles pour les entreprises québécoises et canadiennes qui désirent commercer avec l'État d'Israël.

Même si le Bloc québécois encourage l'accroissement des échanges commerciaux entre le Canada et l'État d'Israël, puisque nous considérons que l'intensification du commerce peut aider au processus de paix et à la stabilisation de la région, nous demandons au gouvernement canadien de veiller au respect des valeurs fondamentales démocratiques canadiennes et aux droits de la personne par l'État d'Israël.

De plus, nous exhortons le gouvernement libéral à inviter le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, à rétablir et à maintenir la paix avec le peuple palestinien, de manière à stabiliser la situation au Moyen-Orient.

Nous suggérons au gouvernement canadien de ne pas exclure les Palestiniens de ces échanges commerciaux. Par conséquent, les discussions avec les représentants palestiniens sont nécessaires pour étudier la possibilité d'élargir cet accord au territoire.

L'État d'Israël, avec une population d'environ six millions d'habitants, comme le Québec, possède un régime démocratique, un secteur privé florissant et des marchés financiers modernes. Il possède une économie très développée, fondée sur la technologie de pointe. Ses industries principales sont les services financiers, les produits de consommation, le tourisme et la construction. Son taux de croissance annuel moyen est de 5 p. 100, et ce, depuis 1985. Son année record était de 10 p. 100 en 1993 et, en 1994, 6,8 p. 100 d'augmentation.

Israël est une porte ouverte sur le Moyen-Orient pour le Canada, comme le ministre l'a souligné tout à l'heure. Le Canada fait partie des partenaires de l'État d'Israël depuis sa création, en 1948. En effet, le Canada a reconnu l'État d'Israël en décembre 1948. Nous avons, avec l'État d'Israël, une histoire commerciale, et ce, depuis de nombreuses années. Nos échanges ont commencé dès la création de l'État d'Israël.

Divers comités bilatéraux existent depuis plusieurs années entre le Canada et Israël, comme par exemple le Comité Canada-Israël, mis sur pied en 1970 pour assurer des discussions sur des sujets tels les droits de la personne, la question monétaire; la Chambre de commerce Canada-Israël; la Fondation Canada-Israël pour la recherche et le développement industriel qui existe depuis 1994; et finalement le Comité mixte Canada-Israël, qui a été formé il y a plusieurs années pour discuter de questions commerciales d'intérêt commun entre nos deux pays.

Pour l'instant, nos échanges commerciaux avec Israël représentent environ 450 ou 500 millions de dollars par année. Rien de comparable, bien entendu, avec les échanges commerciaux entre Israël et les États-Unis, qui représentent un milliard par jour. Mais grâce à l'accord de libre-échange que nous nous apprêtons à approuver, nous pouvons espérer une augmentation significative du commerce avec Israël.

Israël représente un potentiel de commerce à développer pour les entreprises québécoises et canadiennes. Le commerce extérieur de l'État d'Israël représente 25 p. 100 de son PIB. Ce pays avait des importations totalisant 24,9 milliards de dollars en 1994, et des exportations se chiffrant à 6,4 milliards de dollars toujours en 1994.

(1730)

Pour l'année 1995, les exportations canadiennes vers Israël représentaient 216 millions de dollars canadiens, réparties surtout dans les produits suivants: l'aluminium, la machinerie, les produits pharmaceutiques, le bois, la pâte de bois et le papier. Toujours pour l'année 1995, les importations en provenance d'Israël se chiffraient à 240 millions de dollars et étaient principalement constituées de diamants, c'est pratique, de vêtements, de machinerie et de matériel électrique.

Les principaux partenaires commerciaux de l'État d'Israël sont les États-Unis et l'Union européenne. D'ailleurs, Israël a signé des accords de libre-échange avec ces derniers, et ce il y a plusieurs années.

L'accord instituant une zone de libre-échange entre les États-Unis et Israël a été signé le 22 avril 1985 et est entré en vigueur le 1er septembre de la même année. Une déclaration sur le commerce des services a également été signée parallèlement à l'accord. Un comité mixte a été chargé de suivre la mise en oeuvre de l'accord et de tenir des consultations sur les questions concernant le fonctionnement et l'interprétation de l'accord.

Ce comité examine les moyens d'améliorer les échanges bilatéraux. Le principal objectif de cet accord était de supprimer des droits d'importation sur tous les produits à partir du 1er janvier 1995. Les droits applicables à certaines importations considérées sensibles sont progressivement réduits sur plusieurs années pour permettre aux branches de production des deux pays de s'adapter à l'accroissement de la concurrence.

Concernant l'agriculture, l'accord, tout en reconnaissant qu'il serait souhaitable d'ouvrir les marchés en supprimant les droits de douane, permet aux deux pays d'appliquer d'autres restrictions afin de maintenir leur système respectif de soutien des prix.

L'accord de libre-échange entre Israël et la Communauté européenne a été signé en mai 1975. L'accord vise tous les produits industriels, certains produits agricoles et certains produits agricoles transformés. En 1976, un protocole industriel technique et financier additionnel a été intégré à cet accord. La mise en oeuvre de cet accord s'est terminée en 1989. Depuis, un autre traité est intervenu avec l'Union européenne cette fois, et est en vigueur depuis le 1er janvier 1996.


5317

En septembre 1992, Israël a signé un accord de libre-échange avec l'Association européenne de libre-échange, appelée AELE. Les objectifs de cet accord sont de promouvoir le développement harmonieux des relations économiques entre les pays de l'AELE et Israël, d'assurer des conditions de concurrence équitables dans les échanges entre les signataires, de contribuer par l'élimination d'obstacles aux échanges, aux développements harmonieux et à l'expansion du commerce mondial, et finalement d'améliorer la coopération entre les pays membres de l'AELE et Israël. Les membres de l'AELE représentent environ 11 p. 100 des importations de marchandise effectuées par Israël, et 4 p. 100 de ses exportations. En vertu de l'accord qui est entré en vigueur le 1er janvier 1993, les droits de douane ont été éliminés pour les échanges bilatéraux de produits industriels, de poisson et des autres produits de la mer, ainsi que pour les produits agricoles transformés.

La conclusion de l'Accord de libre-échange Canada-Israël permettra donc aux entreprises canadiennes qui commercent avec Israël d'être sur le même pied d'égalité que les entreprises américaines et européennes qui commercent avec ce même pays.

Le 29 avril 1994, le gouvernement de l'État d'Israël et l'Organisation de libération de la Palestine, l'OLP, ont signé un accord économique qui confère à l'autorité palestinienne des pouvoirs étendus en matière d'imposition et de réglementation des échanges et des banques dans le cadre de l'autonomie de la bande de Gaza et de la région de Jéricho. L'accord doit être étendu à la Cisjordanie. Il équivaut pour l'essentiel à une union douanière, à deux exceptions près. L'une concerne l'importation des produits agricoles et de main-d'oeuvre en Israël, et l'autre a trait aux différences des tarifs douaniers vis-à-vis de l'extérieur, que les Palestiniens peuvent appliquer pour une liste convenue d'importations destinées à être utilisées dans les territoires.

L'accord permet à l'autorité palestinienne de percevoir des impôts et des droits d'importation inférieurs à ceux qui sont appliqués en Israël sur une large gamme de produits, mais uniquement pour répondre aux besoins de Gaza et de Jéricho. Tous les échanges de marchandises entre Israël et la bande de Gaza et la région de Jéricho seront libres, exception faite des produits agricoles, pour une période de cinq ans.

L'État d'Israël est partie contractante à l'Accord général sur les tarifs douaniers et du commerce, connu sous le sigle de GATT, depuis 1962, et signataire de l'Accord de l'OMC.

(1735)

Le projet de loi C-61, que nous avons devant nous aujourd'hui, mettra en oeuvre l'accord de libre-échange conclu en juillet dernier entre le gouvernement du Canada et celui de l'État d'Israël. Le projet de loi comme tel prévoit à son article 8 que la Chambre approuve l'ALECI.

Dans la deuxième partie du projet de loi, on retrouve les modifications qui doivent être apportées à nos lois canadiennes pour que ces dernières soient compatibles avec l'accord. Les quatre lois suivantes seront modifiées: la Loi sur le tribunal canadien du commerce extérieur, la Loi sur les licences d'exportation et d'importation, la Loi sur les douanes et la Loi sur les tarifs de douane.

L'entrée en vigueur de l'accord est prévue, si tout va bien, pour le premier janvier 1997. Toutefois, nous suggérons que la date de mise en oeuvre soit peut-être repoussée si le gouvernement n'est pas convaincu que l'État d'Israël est vraiment prêt à appliquer l'accord, tout comme le permet l'article 62 du projet de loi C-61.

Cet article prévoit que le gouverneur en conseil ne peut prendre aucun décret d'entrée en vigueur, à moins d'être convaincu que le gouvernement de l'État d'Israël a pris les mesures nécessaires à la mise en oeuvre de l'accord.

L'accord de libre-échange, signé le 31 juillet dernier à Toronto par le ministre du Commerce international canadien et le ministre des Affaires étrangères israélien, a pour objectif d'éliminer les obstacles au commerce et de faciliter le mouvement des biens entre le Canada et l'État d'Israël.

L'article 2.1 de l'accord prévoit l'élimination des droits de douane sur les produits industriels à compter du premier janvier 1997, sauf deux exceptions. Un régime spécial est prévu aussi pour les produits agricoles.

À la demande de l'État d'Israël, certains tissus de coton ont été soumis à un régime spécial, tout comme les maillots de bain pour femmes, et ce, à la demande du Bloc québécois. Pour ces produits, les droits de douane seront progressivement réduits sur une période de deux ans et demi, pour être abolis totalement le premier juillet 1999.

Cette exception donnée aux maillots de bain pour femmes est le fruit de nombreuses pressions faites par les entreprises québécoises, dont Shan, à Laval, et par le Bloc québécois. En effet, le Bloc est intervenu en Chambre à plusieurs reprises pour informer le gouvernement libéral des préoccupations des compagnies québécoises de maillots de bain et de lingerie concernant un éventuel accord de libre-échange avec l'État d'Israël.

Ces compagnies étaient préoccupées par le fait que les entreprises israéliennes bénéficient, en vertu de l'accord de libre-échange avec les pays européens, de l'abolition des droits de douane sur les tissus européens, ce qui assure aux entreprises israéliennes un avantage certain dans les coûts de fabrication de maillots de bain et de lingerie, permettant des économies de l'ordre de 25 à 35 p. 100 sur l'achat de matières premières. Il est à noter que l'État d'Israël est un des plus importants compétiteurs du Canada dans le domaine du maillot de bain et de la lingerie.

En 1993, l'industrie du maillot de bain et de la lingerie représentait 10 p. 100 de toute l'industrie canadienne, avec des ventes annuelles de l'ordre de 450 millions de dollars. Ce montant, 450 millions de dollars, c'est la somme totale des échanges entre le Canada et Israël.

Soulignons de plus qu'à la suite de l'Accord de libre-échange Canada-États-Unis, de l'Accord de libre-échange nord-américain et de l'Uruguay Round, les entreprises oeuvrant dans le secteur du textile et du vêtement ont dû faire des ajustements très importants. Il était alors normal que la venue d'un nouvel accord de libre-échange les inquiète au plus haut point.


5318

En 1995, les tarifs douaniers canadiens sur les maillots de bain et la lingerie étaient de 18 à 25 p. 100. L'abolition progressive des tarifs sur une période de deux ans et demi est un moindre mal pour les entreprises qui fabriquent des maillots de bain. La période de deux ans et demi permettra au moins à ces entreprises québécoises et canadiennes de se préparer et de s'ajuster à la concurrence israélienne.

Nous espérons de plus que ce délai permettra au gouvernement canadien de négocier des abolitions de tarifs douaniers, tel que le demandent les entreprises québécoises de maillots de bain et de lingerie depuis plusieurs mois, pour nos entreprises canadiennes sur le tissu européen, comme en bénéficient les entreprises israéliennes.

Le Bloc québécois déplore le fait que la lingerie ne fasse pas partie des exceptions prévues dans l'accord. Les entreprises qui fabriquent de la lingerie, qui sont souvent les mêmes que celles qui fabriquent les maillots de bain, avaient elles aussi fait des représentations à cet effet et possèdent des motifs aussi valables que les entreprises fabricant des maillots de bain pour réclamer une période d'ajustement pour se préparer à l'ouverture du marché canadien à leurs concurrents. Mais les entreprises de lingerie ont été victimes du jeu de négociations, comme cela arrive malheureusement trop souvent.

L'Accord de libre-échange Canada-Israël renvoie aux règles du GATT et de l'OMC, à plusieurs règles, comme, par exemple, pour le processus de règlement des différends commerciaux. Les industries culturelles canadiennes et israëliennes sont exemptées de l'accord.

Les négociations entourant l'Accord de libre-échange avec l'État d'Israël ont débuté en nombre 1994. Durant les deux années qu'ont duré les négociations, peu de gens et peu de compagnies ont été consultés sur le contenu de l'Accord. D'ailleurs, même la signature de cet accord a été tenue dans le plus grand secret. Il semble que ce soit la politique du gouvernement libéral de négocier, sans consultation et dans l'ombre, des accords de libre-échange qui touchent directement la population canadienne. Pourtant, les citoyens canadiens et les entreprises canadiennes ont le droit et doivent savoir d'avance-et je dis bien d'avance et non pas lorsque tout est décidé-les ententes commerciales que négocie et signe le gouvernement canadien pour eux.

Avant que la Chambre ne s'ajourne au mois de juin, nous avons fait des demandes répétées auprès du cabinet du ministre du Commerce international pour obtenir des informations concernant l'état des négociations concernant l'Accord de libre-échange Canada-Israël. À ce moment-là, on nous a garanti, en juin dernier, qu'il n'était pas question que quoi que ce soit ne soit décidé avant le retour en Chambre en septembre. C'est pour ça qu'à notre grande surprise, nous avons appris, le 31 juillet ou même le 1er août, par l'entremise des journaux, que tout avait été signé. Nous avons demandé, afin de donner notre collaboration juste et entière, pour faire notre travail tout simplement, si on pouvait nous tenir au courant de l'état des négociations entre le Canada et Israël.

Les fonctionnaires du ministère du Commerce international nous ont dit: «C'est au point mort pour l'été; en septembre, on revient et on vous donne des informations.» Quand je disais tout à l'heure qu'on préfère, de l'autre côté, négocier en catimini, en voilà une preuve.

De plus, ces entreprises doivent être informées. Les entreprises québécoises et canadiennes ont aussi le droit de donner leur opinion et d'être dûment consultées avant que les décisions qui les touchent ne soient prises. L'histoire se répète avec les négociations de l'Accord de libre-échange avec le Chili. Alors qu'on apprend que l'accord devrait être signé lors de la prochaine visite du président chilien, M. Frei, prévue à la mi-novembre, nous ne sommes toujours pas informés du contenu de l'accord ou, du moins, de ses grandes lignes.

Encore une fois, et tout comme dans le cas de l'accord de libre-échange avec l'État d'Israël, les entreprises québécoises et canadiennes n'ont pas été consultées et dûment écoutées avant que l'accord ne soit finalisé. Encore une fois, la population canadienne sera informée à quelques mois de l'entrée en vigueur des dispositions qui affecteront le commerce et l'avenir de nos entreprises.

Le gouvernement doit écouter ce que les entreprises, les groupes sociaux, les groupes culturels, environnementaux, les associations et ce que toute autre personne ont à dire avant de conclure une entente commerciale de ce type avec d'autres pays.

En conclusion, le Bloc québécois votera en faveur du projet de loi C-61, mais nous faisons une mise en garde sérieuse au gouvernement sur sa manière d'agir en matière de négociation et de signature de traités de libre-échange en catimini.

* * *

LOI SUR LES OCÉANS DU CANADA

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 8 octobre 1996, de la motion: Que le projet de loi C-26, Loi concernant les océans du Canada, soit maintenant lu une troisième fois et adopté, ainsi que de l'amendement.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Comme il est 17 h 44, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé sur l'amendement de M. Bernier, à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-26, Loi concernant les océans du Canada.

Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est rejetée par le vote suivant:)

(Vote no 135)

POUR

Députés
Abbott
Ablonczy
Asselin
Bachand
Bellehumeur
Benoit
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Brien
Canuel
Caron
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
de Savoye
Debien
Deshaies
Dubé
Duceppe
Epp
Fillion
Forseth
Frazer
Gauthier
Godin
Grubel
Guimond
Harper (Calgary West/Ouest)
Hayes
Hill (Prince George-Peace River)

5319

Lalonde
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest/Sud-Ouest)
Ménard
Meredith
Morrison
Nunez
Paré
Penson
Picard (Drummond)
Plamondon
Ramsay
Ringma
Rocheleau
Sauvageau
Schmidt
Solberg
Speaker
Stinson
Strahl
Tremblay (Lac-Saint-Jean)
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Venne
Wayne-69

CONTRE

Députés
Allmand
Arseneault
Assadourian
Augustine
Baker
Bakopanos
Bélair
Bélanger
Bellemare
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Caccia
Calder
Catterall
Chamberlain
Chan
Collenette
Collins
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
Cullen
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Discepola
Duhamel
Dupuy
Easter
English
Fewchuk
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gerrard
Godfrey
Goodale
Graham
Grose
Guarnieri
Harvard
Hickey
Hopkins
Hubbard
Iftody
Irwin
Jackson
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Lincoln
Loney
MacAulay
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Marchi
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mitchell
Murphy
Murray
O'Brien (Labrador)
O'Brien (London-Middlesex)
O'Reilly
Pagtakhan
Paradis
Parrish
Patry
Payne
Peric
Peters
Peterson
Pettigrew
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Rideout
Robichaud
Robillard
Robinson
Rock
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Shepherd
Sheridan
Simmons
Solomon
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Taylor
Telegdi
Ur
Valeri

Vanclief
Volpe
Walker
Wappel
Wells
Whelan
Young
Zed-126

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Adams
Alcock
Anderson
Bélisle
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Byrne
Cohen
Dromisky
Dumas
Guay
Jacob
Keyes
Lebel
Mercier
Pomerleau
Regan
St-Laurent
Thalheimer

[Traduction]

Le Président: Je déclare l'amendement rejeté.

Comme il est 18 h 10, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

______________________________________________


5319

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LE SERMENT D'ALLÉGEANCE

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, les députés devraient réciter le serment d'allégeance au drapeau canadien dans les deux langues officielles tous les jours après la prière.
-Madame la Présidente, comme tous mes collègues à la Chambre, je suis ici en raison de la confiance de l'électorat de ma circonscription. Je suis également ici parce que j'ai beaucoup d'amour et d'admiration pour notre pays. Je pense qu'il nous offre à tous la possibilité de travailler au nom de nos électeurs, en tant que députés à la Chambre des communes, et de faire connaître leurs désirs, leurs souhaits et leurs inquiétudes.

Même si nous avons un pays qui est vaste sur le plan géographique et extrêmement divers de l'Atlantique au Pacifique et à l'Arctique, divers par sa culture, sa langue et son économie, nous avons souvent tendance, en tant que Canadiens, à hésiter à témoigner de notre patriotisme et de notre respect pour ce grand pays qui a si bien réussi à tant de générations. Je suis très heureux d'avoir l'occasion aujourd'hui de présenter une motion sur le serment d'allégeance.

(1815)

En se fondant sur les mêmes critères pour tous les pays du monde, les Nations Unies ont choisi, au cours des trois dernières années, le Canada comme le meilleur pays au monde quant à la qualité de vie. Cela ne signifie pas que nous n'avons pas de problè-


5320

mes, que nous n'avons pas de défis à relever, mais les défis sont là pour que nous les surmontions. Comme la Chambre le sait, nous allons nous attaquer à ces défis et les surmonter, maintenant et dans l'avenir.

Au cours des dernières années, j'ai eu l'occasion de parler à des élèves de nombreuses écoles. Dans ma circonscription, Carleton-Charlotte, il y a 42 écoles et deux collèges communautaires. Je me suis fixé comme objectif personnel de visiter chacune de ces écoles, pendant mon mandat, pour parler de ce magnifique pays que nous appelons le Canada.

Malgré toutes les différences que j'ai mentionnées plus tôt en matière de culture, de langue et d'économie, nous devons regarder ce qui nous unit. Que nous soyons de la côte atlantique, de Terre-Neuve ou du Labrador, ou de la côte pacifique, en Colombie-Britannique, que nous soyons des Territoires du Nord-Ouest ou du Yukon ou de toutes ces autres provinces sans façade maritime, nous avons certaines choses qui nous unissent et qui nous réunissent. Certaines de ces choses sont ici à la Chambre, par exemple notre drapeau.

Que nous soyons à Terre-Neuve, en Colombie-Britannique, en Ontario ou dans les territoires, le drapeau canadien est toujours le même. Nous devrions en être fiers et nous devrions le faire flotter sur tous les édifices publics. Qu'il s'agisse des écoles ou des édifices gouvernementaux en tous genres, le drapeau canadien devrait y flotter fièrement.

Il y a aussi la question de l'hymne national. Ici encore, quelle que soit la province ou la côte où l'on habite, l'hymne national, l'ô Canada, est le même. Qu'il soit chanté en français ou en anglais, il a la même signification. C'est notre hymne national.

Quand j'ai pris la parole dans les écoles, j'ai d'abord songé à tout ce qui unit les Canadiens, l'ensemble du Canada. Je me suis rappelé qu'à l'école primaire, je récitais un serment d'allégeance.

Quand nous nous sommes installés à Ottawa, j'ai demandé si le serment d'allégeance existait toujours. On m'a répondu par l'affirmative. On m'a raconté qu'au fil des ans le texte avait été légèrement modifié mais que le serment d'allégeance existait bel et bien encore.

J'en ai demandé des copies en anglais et en français. On me les a fournies. J'ai pris du matériel de mon bureau afin de pouvoir offrir des copies de notre serment d'allégeance aux écoles, aux clubs philanthropiques, aux organismes et aux municipalités de ma circonscription. J'ai commencé à en parler quand je rendais visite aux diverses écoles de la région.

(1820)

Devinez quoi. J'ai commencé à recevoir des demandes de circonscriptions autres que la mienne, dans ma province d'origine, le Nouveau-Brunswick. Une des raisons à cela, c'est que les districts scolaires chevauchent les sphères de compétence fédérale. Bien sûr, lorsque nous avons reçu des demandes d'une circonscription et qu'une autre en a été mise au courant, les demandes ont commencé à pleuvoir. J'ai reçu des demandes d'exemplaires du serment d'allégeance de la magnifique province de l'Ontario, de la belle province de Québec, de toutes les provinces du pays.

Il ne s'agit pas de mon serment. Il appartient à tous les députés de la Chambre et à tous les Canadiens. Je voudrais en remettre à tous les députés de la Chambre et à tous les Canadiens. C'est pourquoi j'ai présenté la motion à la Chambre aujourd'hui.

Lorsque je m'adresse à des étudiants rassemblés dans les écoles-il s'agit parfois d'écoles très peuplées, parfois de petites écoles rurales-j'ai toujours sur moi un petit questionnaire au sujet de notre merveilleux pays qu'est le Canada. Nous parlons de toutes les provinces et des territoires qui composent le pays. Nous parlons des économies et des différences qui les caractérisent, des pêches, des forêts, de l'agriculture, des mines et de toutes les merveilleuses ressources que nous avons la chance de posséder au Canada.

Nous parlons des capitales des provinces et des gouvernements. Je les interroge toujours pour savoir comment ils se débrouillent et s'ils connaissent bien l'histoire du Canada. Je leur explique toujours à quel point nous sommes influencés par nos puissants voisins du Sud, les États-Unis d'Amérique. Nous voyons leurs canaux de télévision s'étendre au Canada. Nous voyons des revues américaines. Nous subissons tellement l'influence de nos voisins du Sud que, parfois, nous en connaissons davantage sur leur histoire et sur leur géographie que sur les nôtres.

Je pose toujours une petite question aux étudiants: «À propos, qui était le premier président des États-Unis?» Bien sûr, ils lèvent tous la main, car nous connaissons tous la réponse. Ils lâchent tous: «George Washington.» Je parle un peu de la géographie et de l'histoire de notre merveilleux pays, puis je leur demande: «À propos, qui a été le premier de nos premiers ministres au Canada?» Plus souvent qu'autrement, le silence se fait dans la salle.

J'ai une petite analogie que j'utilise avec eux. Les députés sont les bienvenus s'ils veulent en faire autaant. Je leur dis: «Lorsque vous partez en vacances avec votre famille, pendant l'été, que l'heure du lunch arrive et que vous voyez de grandes arches dorées, à quoi cela vous fait-il penser?» Ils crient tous: «McDonald.» Je dis: «Vous avez absolument raison; c'est le nom du premier de nos premiers ministres, sir John A. Macdonald.» C'est une analogie qui, je l'espère, les aidera à se rappeler pour le reste de leur vie le nom du premier de nos premiers ministres.

Il est important que nous connaissions notre passé aussi bien que notre présent, à une période où nous nourrissons de grandes aspirations pour l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants, où nous commençons et continuons à bâtir notre pays pour assurer un meilleur avenir à tous les Canadiens, peu importe où ils habitent.

Comme je l'ai mentionné, nous arborons notre drapeau national à la Chambre. Tous les mercredis, après la prière d'ouverture de la séance, les députés chantent l'hymne national.


5321

(1825)

Le comité pertinent a examiné cette motion que j'ai présentée. Même si elle ne peut pas faire l'objet d'un vote aujourd'hui, je vais demander au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre d'envisager sérieusement que les députés récitent le serment d'allégeance au drapeau canadien à la Chambre.

Je crois fermement qu'il nous incombe de donner l'exemple aux jeunes et aux étudiants de demain. Ce sont, après tout, les futurs dirigeants du pays. Nos fils et nos filles, ainsi que nos petits-enfants, vont être les futurs bâtisseurs de notre pays. Nous devrions leur enseigner tout cela le plus tôt possible.

La plus haute cour du pays, la Chambre des communes, doit être la première à donner l'exemple. Ainsi, je vais certainement inciter le comité pertinent à envisager de laisser les députés, à l'ouverture de chaque séance, réciter le serment d'allégeance au drapeau canadien dans les deux langues officielles.

Je le répète, c'est notre serment. Ce n'est pas celui des États-Unis, de la France, de la Grande-Bretagne ou de tout autre pays. Il est bien à nous et il nous incombe d'y faire honneur comme au drapeau canadien et à notre hymne national.

En tant que Canadiens, nous avons parfois tendance à être quelque peu complaisants au sujet de notre patriotisme, même si je sais que les Canadiens de toutes les couches de la société aiment notre pays et les possibilités qu'il offre.

Trois années d'affilée, les Nations Unies ont non seulement félicité le Canada, mais l'ont également choisi comme le meilleur pays du monde où vivre. Cela ne veut pas dire que nous sommes parfaits, que nous ne sommes pas confrontés à des problèmes et des défis. Nous en avons, bien entendu, et ce sera toujours le cas.

Cependant, des députés et des gens dans toutes les provinces sont prêts à relever ces défis. Que ce soit dans les collectivités, avec les maires et les conseils municipaux, dans les provinces, avec les premiers ministres provinciaux et les assemblées législatives, ou à la Chambre, il nous incombe de donner des exemples d'attachement à la patrie comme on peut en voir des deux côtés du Président, sous la forme du drapeau canadien. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir de faire à titre individuel.

Comme la plupart des députés le savent, le ministre des Finances nous a fait part de très bonnes nouvelles aujourd'hui, dans le cadre de son exposé devant le Comité permanent des finances. La grande nouvelle, c'est que nous sommes en train de surmonter les difficultés auxquelles nous avons été confrontés à notre arrivée à la Chambre, à la fin de l'automne 1993. Avec détermination, nous avons entrepris de régler le problème, soit un énorme déficit de 42 milliards de dollars et une dette d'au-delà de 500 milliards de dollars. À l'époque, chacun s'était dit que, si une entreprise se trouvait dans cette situation, il fallait envisager la fermeture. Le gouvernement ne s'est pas esquivé. Son ministre des Finances a décidé de relever le défi en disant que nous en viendrions à bout.

(1830)

La grande nouvelle aujourd'hui, c'est que nous avons atteint l'objectif qui était de réduire le déficit à 32,7 milliards de dollars au cours de l'exercice 1995-1996. Cet exercice, terminé en mars dernier, a fait état d'un déficit de 28,7 milliards de dollars, soit 4 milliards de moins que prévu. C'est formidable.

Le ministre des Finances a fait un pas de plus et affirmé que nous allions fixer un nouvel objectif pour notre cycle de deux ans. Aujourd'hui, nous nous sommes penchés sur l'exercice de 1998-1999. Puisque nous avons atteint, voire dépassé nos objectifs passés, le ministre a annoncé qu'au cours de l'exercice 1998-1999, nous allions réduire davantage le déficit et le faire passe sous la barre des 10 millions de dollars. Pour la première fois depuis 20 ou 30 ans, le déficit tombera au plus bas et représentera 1 p. 100 du produit intérieur brut.

Je vois le jour, dans un avenir assez rapproché-et nous savons tous que le tournant du siècle approche-où nous aurons un budget équilibré au Canada. C'est une nouvelle réjouissante, n'est-ce pas? C'est précisément ce que les Canadiens ont demandé à leurs parlementaires et à leur gouvernement. Ils voulaient un gouvernement capable d'équilibrer le budget, mais sans recourir à la politique de la terre brûlée dont on a tant parlé. Oui, la tâche était de taille. Franchement, peu de politiciens aime rentrer dans leur circonscription pour annoncer des compressions à leurs électeurs.

Toutefois, nous avons atteint notre objectif, grâce au ministre des Finances et aux efforts conjugués du gouvernement. En tant que Canadiens, nous devrions être très fiers aujourd'hui d'y être parvenus.

Comme il ne me reste plus beaucoup de temps, je voudrais lire à l'intention de tous les députés un serment d'allégeance au drapeau canadien. Je l'ai lu pour la première fois à la Chambre le 30 septembre 1994. Le voici de nouveau aujourd'hui:

À mon drapeau et au pays qu'il représente, je promets respect et fidélité. D'une mer à l'autre, flotte avec fierté et dans tes plis garde-nous toujours unis. Sois, pour nous tous, un symbole de l'amour, de la liberté et de la justice. Que Dieu garde notre drapeau. Que Dieu protège notre Canada.
[Français]

M. François Langlois (Bellechasse, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir d'intervenir sur la motion M-227 présentée par mon collègue, l'honorable député de Carleton-Charlotte.

J'ai écouté attentivement les propos de mon collègue et je ne mets pas en doute la sincérité des sentiments qui l'animent ni la fierté qu'il peut ressentir en prêtant le serment dont il a eu la grâce de nous faire la lecture à la fin de son intervention.

(1835)

L'intervention que je suis appelé à faire nous démontre encore une fois la différence qui peut exister entre la perception d'un Canadien français, d'un Québécois en cette Chambre et celle que peut avoir mon collègue.


5322

Quand j'étais petit bonhomme, lors de la procession de la Saint-Jean-Baptiste, le 24 juin, je me rappelle, dans mon village et dans les villages environnants, il y avait la procession avec le petit saint Jean Baptiste avec son mouton et les drapeaux étaient déployés.

À l'époque, c'était le paradoxe, tels ceux qu'on a retrouvés un peu tout au cours de l'histoire de ce pays. On voyait, un à côté de l'autre, l'Union Jack qui flottait avec le drapeau du Vatican. Les gens aimaient les symboles et se souciaient peu qu'on avait, côte à côte, le drapeau qui représentait la papauté romaine et l'autre symbole, qui est aussi le symbole de l'Église d'Angleterre et du Royaume-Uni. Et les gens ont pu vivre dans une grande tolérance.

On a développé, en respectant les divers symboles, cet esprit de tolérance au Canada. De temps à autres on s'écarte du milieu du chemin, mais on y revient assez facilement lorsque les passions s'apaisent.

Cet Union Jack, qui est encore le drapeau sur la tour du parlement de Westminster, en Grande-Bretagne, a été longtemps le nôtre, par défaut. Ce n'est qu'en 1945, par arrêté en conseil, que le gouvernement du Canada a remplacé l'Union Jack de façon temporaire, en attendant l'élaboration d'un autre drapeau, par ce qu'on a appelé le «ensign», qui comportait toujours, dans son coin supérieur gauche, l'Union Jack, mais quelque peu rapetissé.

Il a fallu quand même un certain temps pour voir l'évolution du drapeau canadien. Il faudra attendre en 1964 pour que les débats ici, à la Chambre des communes, et au Sénat ne s'engagent là-dessus pour qu'une résolution soit votée demandant une proclamation à Sa Majesté.

Il faut dire qu'il y a sûrement eu un certain sentiment d'identification à ce symbole, qui est le drapeau canadien et dont un exemplaire est à votre gauche et l'autre à votre droite. Il y a eu des luttes épiques. Je me rappelle des discours de M. Diefenbaker à l'époque, en cette Chambre, qui, avec véhémence, s'était objecté à l'adoption d'un drapeau canadien. Je me rappelle également que certains députés avaient même tenté de s'interposer physiquement, le 15 février 1965, lorsqu'on a tenté de monter à la Tour de la paix ce drapeau, qui avait été adopté légitimement et par les députés de cette Chambre élus par la population canadienne.

Je pense que ce jour, le 15 février 1965, a été un grand jour, puisque c'était l'affranchissement, pour plusieurs, d'un lien qui avait peut-être trop longtemps duré. Le Canada, c'est vrai, s'est donné des symboles.

Mais autant j'ai écouté l'éloquence avec laquelle le député de Carleton-Charlotte pouvait s'exprimer, les sentiments de fierté qui pouvaient l'animer, autant pour moi le drapeau canadien représente un symbole mais pas le même. Le drapeau canadien, pour moi, représente le symbole de l'État fédéral canadien, un peu comme le drapeau de l'union européenne représente le symbole de l'union, de l'espace économique canadien, pourrions-nous dire ici, pour reprendre les mots que M. Bourassa privilégiait pendant qu'il était au pouvoir et que même les fédéralistes au Québec emploient généralement.

Alors c'est le drapeau de l'union. Ce n'est pas le drapeau de ma première allégeance. Ma première allégeance, je la dois au drapeau fleurdelisé qui est l'emblême de la nation que je représente en cette Chambre et qui, lui, a été adopté comme drapeau national du Québec le 21 janvier 1948. Donc 17 ans avant que l'unifolié ne soit adopté comme drapeau canadien.

Il y a donc deux visions. Peut-être qu'elles sont irréconciliables. On a deux voies parallèles. Ça ne nous empêche pas de faire des ponts, mais le texte, le très beau texte d'ailleurs, que lisait le député de Carleton-Charlotte tout à l'heure, peut difficilement convenir à quelqu'un qui a sa première allégeance pour le drapeau du Québec et pour l'État québécois. Je vais le lire dans son texte français. D'abord, ça permettra de le retrouver au hansard et, deuxièmement, ça permet d'en faire l'analyse.

(1840)

Cela s'intitule Salut au drapeau canadien:

À mon drapeau et au pays qu'il représente
Je promets respect et fidélité
D'une mer à l'autre flotte avec fierté
Et dans tes plis garde-nous toujours unis
Sois pour nous tous un symbole de l'amour,
de la liberté et de la justice
Dieu garde notre drapeau
Dieu protège notre Canada

Alors, c'était la version française de ce que le député de Carleton-Charlotte mentionnait tout à l'heure.

C'est difficile d'avoir deux allégeances. La règle qu'on retrouve dans La Bible, «nul ne peut servir deux maîtres», s'applique à moi. Ma première allégeance: j'ai promis à mes électeurs et à mes électrices, et je me suis fait élire sur une plate-forme qui vise à faire du Québec un État souverain maintenant des liens d'amitié et de fraternité avec, bien sûr, le Canada. Alors, je ne peux pas jurer que je vais prier tous les jours pour que le Canada demeure uni. Je veux une réforme constitutionnelle.

Il est bien certain que je veux une union économique, une monnaie commune, un passeport commun. Tout ce qu'on peut mettre en commun, mettons-le en commun, mais refaisons donc les structures politiques qui nous permettent d'éviter ces querelles, ces guerres de symboles.

Dans le fond, et le député de Carleton-Charlotte et les gens de l'opposition officielle ont raison. On ne peut pas avoir tort, parce qu'on sert en cette Chambre les symboles auxquels on croit et auxquels on est attachés le plus fermement possible. Je m'incline bien bas devant les valeurs qu'il représente et je suis convaincu qu'au fond de lui-même, le député de Carleton-Charlotte peut comprendre et il respecte, dans les faits-c'est un gentleman, ce collègue-les valeurs auxquelles je puis croire.

Malheureusement, elles sont irréconciliables. C'est en ce sens que je ne peux pas appuyer la motion qui est devant nous. C'est un peu malheureux, mais c'est la constatation de deux visions du Canada, à mon avis irréconciliables, et qu'il faudra un jour trancher. Quand ce sera tranché définitivement, probablement que nous pourrons nous donner des symboles communs qui feront la joie et


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l'agrément de tous et qui susciteront, sans débat, une adhésion à peu près universelle.

[Traduction]

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre moi aussi la parole au sujet de cette motion, dont le débat prendra fin ce soir.

L'auteur de la motion est bien intentionné. Il est animé d'un amour sincère pour notre pays, et je l'en félicite. On dirait qu'il faut, de nos jours, apprécier toutes les manifestations d'émotion, d'amour ou d'attachement pour le Canada. C'est dans ce sens que j'apprécie la motion dont le député nous a saisis aujourd'hui.

Généralement parlant, on peut dire que le sentiment de patriotisme laisse à désirer au Canada. Nous pouvons être très fiers de notre pays. Même si je siège dans l'opposition, je suis extrêmement fier du Canada et je suis extrêmement fier des chances que nous avons et de notre situation par rapport au reste du monde. Nous avons le bonheur d'avoir d'abondantes ressources naturelles. Nous avons le bonheur d'avoir une excellente population. Le Canada possède de nombreux atouts dont nous pouvons être fiers.

Cette motion qui nous invite à réciter le serment d'allégeance au drapeau est, à certains égards, similaire à celle qui nous invitait à chanter l'hymne national. Les gens pensent que si nous accomplissons des gestes patriotiques, si nous hissons le drapeau, si nous chantons l'hymne national, cela est bon pour le patriotisme et bon pour le Canada. Cela stimule l'enthousiasme. Cela contribue à nous unir, et ainsi de suite.

La députée de Beaver River a proposé la motion nous invitant à chanter le O Canada à la Chambre des communes à cause notamment de sa valeur symbolique. Nous avons dit qu'il était bon de chanter l'hymne national et qu'il était bon de le chanter ici de temps en temps. Il y a eu une longue dispute de procédure pour que cela se fasse. La motion a été renvoyée au comité de la procédure et des affaires de la Chambre. On en a pesé le pour et le contre. Maintenant, je crois que le public est content que nous chantions l'hymne national à la Chambre au moins une fois par semaine. Il est donc chanté et entendu ici.

La motion est peut-être typique de ce que nous éprouvons: un sursaut de patriotisme. C'est en grande partie attribuable au fait que nous traversons, encore une fois, une autre crise de l'unité. Cela semble n'avoir jamais de fin. Cela revient périodiquement depuis de nombreuses années, 40 ans peut-être. Comme le démontre l'opposition officielle à la Chambre, il existe encore un mouvement actif qui cherche à diviser le pays en deux.

(1845)

On dirait que nous sommes en train de traverser une crise de l'unité au ralenti. Contradiction dans les termes? C'est une crise par le caractère d'urgence du problème. Elle se déroule au ralenti, car elle semble interminable.

La motion à l'étude est une réaction à cette crise. À bien des égards, cela fait penser au débat et aux questions suscités par le programme de distribution de drapeaux de la ministre du Patrimoine canadien. La ministre distribue des drapeaux partout, à tous ceux qui le demandent, dans l'espoir qu'il y en ait un plus grand nombre qui flottent au haut des mâts, que cela nous unisse d'un océan à l'autre autour d'un élément commun. Nous allons nous rallier autour du drapeau, qui est un symbole, et, comme par enchantement, la crise de l'unité nationale va se résorber.

Je ne pense pas que cela puisse marcher, Si c'est à cela que se résume le programme fédéral d'unité nationale, ce n'est pas, à moins qu'on le reformule, une très bonne réplique aux séparatistes, ni une très bonne réponse aux Canadiens qui souhaitent des changements profonds dans la fédération. Ils veulent quelque chose de substantiel, pas uniquement des symboles.

J'aurais été beaucoup plus heureux ce soir de débattre une motion du député de Carleton-Charlotte s'il avait proposé une décentralisation du gouvernement, s'il avait proposé une réduction de la taille de l'appareil étatique, s'il avait proposé d'interrompre les dépenses du programme de distribution de drapeaux. Je suis bien conscient que tout cela ne peut pas se faire par une seule motion d'initiative parlementaire. Le député aurait peut-être pu proposer des mesures en vue de préserver l'unité de notre pays. Il aurait été plus utile de discuter ce soir d'une proposition plus substantielle que celle-ci.

Ce que je crains, c'est que nous continuions d'esquiver la question de savoir ce qui ne va pas au Canada, tant sur le plan constitutionnel que d'une manière générale, dans notre façon de nous diriger. Nous continuons de trouver des solutions de fortune au lieu de nous attaquer aux problèmes fondamentaux. Le gouvernement camoufle les problèmes fondamentaux qu'il ne règle pas et il veut faire croire aux Québécois et aux Canadiens qu'il a procédé à de véritables changements. Cela ne fonctionnera pas. J'aimerais que nous puissions discuter de quelque chose qui soit davantage étoffé.

La motion est ainsi libellée: «Que, de l'avis de la Chambre, les députés devraient réciter le serment d'allégeance au drapeau canadien dans les deux langues officielles tous les jours après la prière.»

Comme je l'ai dit tout à l'heure, je n'ai rien contre ces manifestations de patriotisme à la Chambre ou au Canada. Il en faudrait même davantage. Il y a quelques années, durant le débat sur l'hymne national, je me souviens d'être sorti et d'avoir chanté cet hymne dans les marches d'en avant, pour prouver que cela ne nous ferait pas de mal d'être un peu plus patriotiques. Peu après, nous avons évidemment commencé à chanter l'hymne national à la Chambre.

Je n'ai généralement rien contre l'idée de réciter quotidiennement un serment d'allégeance au drapeau, mais cette proposition pose certains problèmes pratiques que je voudrais énumérer rapidement.

Premièrement, il y a déjà à la Chambre beaucoup de rituels qui prennent du temps. Même si je sais qu'il ne faut à peu près qu'une minute pour réciter ce serment tous les jours, j'ai peur qu'en le ritualisant, nous en diminuions la portée, que nous en fassions un geste quotidien, que nous nous levions pour prononcer des paroles


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qui, bientôt, ne voudront plus rien dire. Il faut un peu de temps pour procéder à ce rituel quotidien dans les deux langues officielles. Je crains que cela perde bientôt tout son sens.

Le deuxième problème, c'est que les Américains prêtent allégeance à leur drapeau chaque fois qu'ils en ont l'occasion. Je n'ai rien contre les Américains. Je les considère comme nos meilleurs amis. Je pense que nous avons énormément de chance de les avoir comme voisins immédiats sur le plan géographique. Nous sommes liés à eux de bien des façons. Dieu merci! Je suis heureux que nous ayons les Américains pour voisins.

(1850)

Cependant, prêter serment d'allégeance au drapeau à la moindre occasion est une tradition américaine. C'est très américain. D'une certaine manière, je suis juste assez canadien pour être irrité de voir que l'on veut s'engager dans la même voie que les Américains.

Troisièmement, j'ai de sérieuses réserves au sujet de l'idée du serment d'allégeance à un drapeau en soi. J'ai toujours trouvé cela un peu étrange. J'admire le patriotisme américain, mais prêter serment d'allégeance à un drapeau n'est pas une réponse canadienne au problème de patriotisme.

Ce n'est pas à un drapeau, mais à ce qu'il représente que nous devrions prêter serment d'allégeance. D'une certaine manière, notre drapeau représente notre pays, nos valeurs et ce qui fait la grandeur de notre pays. Pourquoi devrions-nous recourir à l'euphémisme proposé dans la motion et prêter serment d'allégeance à un morceau de tissu?

Je n'aurais aucune hésitation si le serment d'allégeance était envers mon pays. Je serais heureux de faire cela. Peut-être devrait-on aussi transformer le serment des députés en un serment d'allégeance au pays. Cette idée ne me déplairait pas du tout. Prêter serment à un symbole me paraît cependant un peu étrange.

Voici mon quatrième point. Des gens font un serment d'allégeance à un drapeau. Comme notre collègue bloquiste l'a dit, beaucoup de gens prêtaient autrefois serment d'allégeance à l'Union Jack. Mais ce drapeau a été remplacé par l'unifolié. Beaucoup d'entre eux diront que ce n'était pas vraiment au drapeau, mais au pays qu'ils prêtaient serment. On peut modifier un drapeau ou l'arborer différemment. On peut faire beaucoup de choses avec un drapeau, mais, au fond, il ne s'agit toujours que d'un drapeau.

En conclusion, je préférerais que le serment d'allégeance porte sur le pays plutôt que sur le drapeau. Si on retient l'idée du drapeau, il faudra beaucoup de consultations sur la question. Je ne pense pas qu'il y ait unanimité sur le texte du serment et le reste. Je m'en tiens à l'allégeance au pays et, à mon avis, nous pouvons remettre le débat sur le drapeau à un autre jour.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Madame la Présidente, selon moi, le député qui a pris la parole avant moi a complètement raté la cible. Il ne s'agit pas de couleur ou de tissu, mais bien du symbole de notre nation. Le drapeau, c'est le Canada. C'est pourquoi je ne reviendrai pas sur certains des points qu'il a soulevés dans son intervention.

Je veux remercier le député de Carleton-Charlotte d'avoir porté cette question à notre attention ce soir. Les habitants de Durham sont très favorables à la campagne de promotion du drapeau. Plus de 7 000 drapeaux ont été distribués aux gens de Durham.

Quand le député de Carleton-Charlotte a parlé de ses tournées dans sa circonscription, il m'a fait penser à ce que nous faisons, ma femme et moi. Nous avons deux voitures qui roulent dans la circonscription. Un drapeau du Canada est apposé à l'arrière de chacune d'elles. Ce sont des drapeaux de papier. Chaque fois que nous participons à une manifestation populaire, nous veillons à ce que tous les enfants aient un drapeau de papier. C'est extraordinaire que d'aller à un défilé du père Noël, par exemple, et de parler aux gens dans la foule au milieu d'une mer de drapeaux du Canada. À ces moments-là, je suis très fier d'être Canadien et de savoir que les gens aiment leur pays comme il est.

Les observations du député de Bellechasse m'ont particulièrement intéressé. Il y a des problèmes dans notre pays. Nous ne nous arrêtons pas vraiment à penser à quand remonte l'histoire de notre pays. Elle ne remonte pas à 1948, mais à beaucoup plus loin.

Le symbolisme, c'est la lutte d'une nation pour se définir et former un pays. Le député a raison. À partir de la Confédération, en 1867, jusqu'en 1965, le Canada n'a jamais vraiment eu de drapeau. Nous avons eu bien des drapeaux que nous avons considérés comme nôtres. Pensons seulement à la croix de Saint-Georges, qui flottait au Labrador, en 1749. Le Fleur de lis a été accepté comme drapeau canadien, puis vinrent ensuite l'Union Jack et le Red Ensign, mais aucun d'eux ne fut officiellement reconnu comme le drapeau du Canada.

(1855)

Les Français et les Anglais partagent une histoire commune au Canada. John Cabot hissa le drapeau de Saint-Georges sur nos rives orientales en 1497 et Jacques Cartier hissa le Fleur de lis à Gaspé en 1534.

Il est intéressant de noter que le Fleur de lis est aussi le drapeau d'une autre nation souveraine. C'est un symbole de la monarchie en France. C'était le symbole du colonialisme, tout comme l'Union Jack. Voilà pourquoi je doute qu'il puisse devenir le drapeau d'un autre pays, car c'est, par définition, un symbole du colonialisme.

La feuille d'érable est l'emblème de notre pays depuis de très nombreuses années, en fait depuis les premiers colons. Ce sont eux qui ont reconnu la force de l'érable qui leur procurait un aliment et du bois pour construire leurs meubles. Autrement dit, cet arbre symbolisait la survie des premiers colons au Nouveau Monde.


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La feuille d'érable a été utilisée dès le début des années 1700 et est apparue très tôt sur les monnaies du Canada. C'était l'emblème de la Société Saint-Jean-Baptiste en Nouvelle-France dès 1834. En 1863, le recteur Dawson de l'Université McGill a décrété que c'était l'emblème de la vitalité et de l'énergie d'un nouveau pays.

Ce symbole a traversé deux guerres. Les gens ont versé leur sang sur la feuille d'érable. Partout au monde, la feuille d'érable symbolise non pas le Canada français ou le Canada anglais, mais tout simplement le Canada. Au fait, on n'a pas demandé à ceux qui ont versé leur sang s'ils étaient d'origine française ou anglaise; c'était le sang de Canadiens.

J'ai toujours été fier de porter cet emblème chaque jour à la Chambre des communes et je suis fier de le porter dans tous mes déplacements à travers le monde. Je sais que d'autres Canadiens le sont également, même des citoyens de la province de Québec. Les Canadiens et les gens du monde entier reconnaissent le Canada comme un pays de tolérance, un pays où la population résout ses problèmes démocratiquement, comme nous le faisons dans cette Chambre.

L'érable est un excellent symbole de ce que le Canada est réellement. C'est un pays vital en pleine croissance, qui a des racines profondes et dont les racines continuent sans cesse à s'étendre. Ces racines continueront à pousser, non seulement dans les maritimes de John Cabot et le Québec de Jacques Cartier, mais dans tout le pays d'un océan à l'autre. Il en va de même de ses branches. Nos branches s'étendent partout dans le pays et même ailleurs dans le monde. Le monde entier reconnaît la feuille d'érable comme un symbole de tolérance.

En terminant, je voudrais dire combien il est important pour un pays d'avoir des symboles. Ceci est le symbole d'un pays fort et uni. On peut facilement l'adapter et ce devrait être le symbole de toute la population du Canada, y compris celle du Québec qui à une société très ouverte, et c'est essentiellement le pays que nous avons essayé de créer. La feuille d'érable est autant un symbole du Canada français que du Canada anglais.

Je remercie le député de Carleton-Charlotte d'avoir présenté cette motion à la Chambre. Il peut être assuré que, tout comme la population de Durham, j'appuie ses intentions.

(1900)

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse de parler de la motion no 227, que mon collègue, le député de Carleton-Charlotte, a présentée. Je l'appuie, et je félicite mon collègue de son patriotisme et de l'amour qu'il porte à notre merveilleux pays.

Les députés ne sont pas sans savoir que j'ai récemment présenté le projet de loi C-302, Loi instituant un serment d'allégeance officiel au drapeau du Canada. La motion du député encourage la Chambre à réciter une des versions non officielles. On se sert de cette version à la Jeune Chambre du Canada, et la ville de Windsor, en Ontario, a souscrit à son utilisation comme version officielle.

Depuis la présentation de mon projet de loi d'initiative parlementaire, je suis très touchée par l'appui que les Canadiens de tout le pays apportent à l'idée d'un serment d'allégeance. Je crois qu'il convient tout à fait que les députés récitent ce serment d'allégeance à la Chambre. Il s'agit du Parlement national du Canada et en tant que députés, nous parlons non seulement au nom de nos électeurs, mais également au nom de tous les Canadiens.

Le député de Carleton-Charlotte et tous les députés seront heureux d'apprendre que j'ai reçu plus de 1 650 messages d'appui de toutes les provinces du Canada, y compris le Québec. Les Canadiens me téléphonent, signent des pétitions, m'écrivent des lettres et me proposent des serments. De plus, 75 municipalités ont souscrit à l'idée d'un serment d'allégeance officiel. C'est le cas notamment des villes de Woodstock, Sackville, Dalhousie et Sussex, et du village de Minto, dans la province du député, le Nouveau-Brunswick. Je suis fière de dire que dans ma propre circonscription, Guelph-Wellington, la ville et le comté de Guelph appuient également mon initiative.

Les Canadiens prêtent allégeance de diverses façons à notre drapeau depuis de nombreuses années. Deux anciens enseignants de l'Alberta m'ont écrit pour me rappeler qu'il y a des années, les élèves se levaient tous les matins et récitaient ces paroles: «À mon drapeau et au pays qu'il représente, je promets amour et loyauté.»

Une autre Canadienne m'a dit que lorsqu'elle était petite, à Dartmouth, en Nouvelle-Écosse, elle récitait le serment suivant: «Je prête allégeance au drapeau et à l'empire qu'il représente; une nation indivisible, offrant liberté et justice à tous.»

Selon un Canadien de Lakefield, en Ontario, les Shriners du Canada utilisent une version semblable à celle des Shriners des États-Unis et du Mexique. Et comme je l'ai dit plus tôt, la Jeune Chambre du Canada s'est jointe au député de Carleton-Charlotte et utilise la version à laquelle la ville de Windsor a souscrit récemment.

La seule critique qu'on a face à l'idée d'un serment d'allégeance, c'est que certains craignent que ce soit une notion trop américaine. Pourtant, je peux leur rétorquer que notre histoire diffère de celle des États-Unis et que notre amour pour notre pays est tout à fait unique.

Les Canadiens découvrent l'importance de notre drapeau dans leur quotidien. Qui peut oublier la feuille d'érable hissée sur les bateaux de pêche britanniques en signe d'appui à nos efforts pour conserver nos stocks de poissons? Nous nous rappelons tous le drapeau que portaient les milliers de Canadiens qui se sont rendus à Montréal quelques jours avant la tenue du dernier référendum. Qu'il soit hissé dans le cadre des Jeux olympiques ou d'un championnat international de hockey ou cousu sur les manches de nos casques bleus, le drapeau représente la tolérance, la compréhension et c'est un symbole reconnu du pays où il fait le mieux vivre au monde.


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Je crois qu'à ce moment critique de notre histoire nous devrions prendre en considération tout ce qui fait que nous sommes Canadiens. Le patriotisme, c'est un sentiment qui vient droit du coeur certes, mais il doit aussi se traduire en mots et en gestes.

Dernièrement, la Chambre des communes a commencé à chanter l'hymne national les mercredis. L'Ô Canada, qui n'a été déclaré officiellement hymne national il y a une vingtaine d'années seulement, nous réunit. Tout comme le fait le drapeau. C'est le symbole du meilleur pays du monde.

Je voudrais profiter des quelques instants qu'il me reste pour faire part à la Chambre de quelques suggestions que j'ai reçues en réponse à mon initiative. Eleanor Hadley, de Vancouver, propose la formule de serment suivante: «Avec amour et respect, je promets loyauté au Canada et au drapeau canadien.»

Voici ce qu'écrit Mme Clara Jones, de Saint-Hubert, au Québec: «Je suis fière d'être Canadienne et promets allégeance à notre drapeau qui est gage de liberté et de justice pour tous les Canadiens d'un océan à l'autre. Restons unis sous la protection de la Constitution canadienne.»

(1905)

Evelyne Day, de Saint John, au Nouveau-Brunswick, propose ceci: «Au drapeau à feuille d'érable, fierté de notre pays, je promets allégeance avec sincérité, dignité et honneur.»

David Evans, de Victoria, en Colombie-Britannique, écrit: «En ma qualité de citoyen canadien, je promets allégeance, respect et loyauté à notre drapeau et à notre pays, le Canada, uni d'un océan à l'autre.»

Donc, je souscris à cette initiative et me réjouis d'être une citoyenne de ce grand pays.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de participer au débat sur la motion présentée par le député de Carleton-Charlotte, surtout après avoir écouté le discours du député de Bellechasse. Ses observations m'ont beaucoup ému, car j'ai le sentiment qu'elles venaient du fond de son coeur. Il a partagé avec la Chambre le dilemme qu'il vit en tant que Québécois qui estime avoir une allégeance d'abord pour le Québec. Il ne fait pas abstraction du reste du pays. En effet, il a parlé d'un passeport collectif. Son coeur est certes déchiré entre la loyauté qu'il éprouve pour le Québec et celle qu'il ressent pour le Canada en général.

Le drapeau a vu le jour il y a 30 ans, au milieu d'un débat tout comme celui que nous avons actuellement ici, à la Chambre des communes. Lester Pearson estimait que le Canada était menacé par la division, voire par la séparation, et s'était arrangé pour amorcer un débat sur la création d'un drapeau canadian afin de régler le problème qui se posait à cette époque-là.

J'étais un jeune homme lorsque l'unifolié est devenu notre drapeau national. Une vingtaine de mois plus tard, je faisais de l'auto-stop en France, en compagnie d'un jeune étudiant anglais. Le Britannique, affichant son Union Jack, et moi, mon drapeau canadien, sommes partis pour la France. Le Britannique m'a demandé ce que représentait la tache rouge sur mon sac à dos. Je lui ai expliqué que c'était le nouveau drapeau du Canada. Il a répliqué: «Eh bien, nous avons l'Union Jack depuis des siècles.»

Rendus en Normandie, nous étions debout sur le bord de la route quand un agriculteur français est arrivé sur sa bicyclette. À l'époque, il était typique de voir un Français habillé de serge bleue et coiffé d'un béret bleu. Il s'est arrêté près de nos sacs à dos, examinant d'abord celui du Britannique, avec son Union Jack, puis le mien. S'adressant à moi, il a dit: «Vous êtes canadien. Les Canadiens sont bons.» Il a enfourché de nouveau sa bicyclette et s'est éloigné. Notre drapeau avait à peine 20 mois d'existence.

Depuis 30 ans, il a fait sa marque et on le reconnaît partout dans le monde. Comme le député de Durham, je dois dire que, si mon sac à dos avait été orné d'un drapeau fleurdelisé, ce Français n'aurait jamais su que j'étais canadien et que je venais d'un pays en particulier, parce que la fleur de lis est un symbole utilisé par d'autres pays.

Où que nous allions dans le monde, notre drapeau nous identifie comme venant d'un pays connu pour sa tolérance et sa capacité de composer avec ses différences, ce qui fait d'ailleurs partie du génie qui marque le Québec.

M. Pearson a proposé le drapeau à une époque où le Canada était aux prises avec un débat concernant sa composante canadienne-française et ce drapeau est devenu un symbole vraiment reconnu à l'échelle mondiale. Ce symbole mondial appartient autant au Québec qu'au reste du Canada, parce que c'est le Québec qui a soulevé le débat et qui est à l'origine du drapeau.

Le débat d'aujourd'hui porte sur le serment d'allégeance. Des débats comme celui d'aujourd'hui me donnent l'absolue certitude que, tant qu'il y aura des députés, comme celui de Bellechasse, qui expriment leurs vraies convictions aux Communes et devant les Canadiens pour que nous puissions résoudre nos problèmes, nous serons en bonne voie de devenir non pas une société distincte formée de diverses provinces, mais une société distincte qui n'est rien d'autre que le Canada.

Je voudrais revenir sur une affirmation du député. Il a dit qu'il ne pensait pas que nos divergences de vues soient conciliables parce qu'il dit devoir son allégeance première au Québec.

(1910)

Nos opinions divergent sur une chose, mais ce n'est qu'une nuance. Lorsque je pense au Canada, je ressens de l'attachement pour la Colombie-Britannique, Terre-Neuve, le Québec. Il dit que le Québec forme une nation. Je lui dit que le Québec fait aussi partie de mon Canada. Québec est aussi mon pays. Je suis désolé de ne pas parler français couramment, mais je fais des efforts désespérés. Tout cela gravite autour des merveilleuses rencontres qui nous réunissent de temps à autre pour nous interroger, comme Canadiens, sur notre identité.

5327

Nous constaterons toujours que nous sommes un peuple tolérant qui sait comprendre. Nous scrutons sans cesse notre conscience à cause de la présence du Québec.

M. Jesse Flis (Parkdale-High Park, Lib.): Madame la Présidente, je prête allégeance à mon drapeau et au pays qu'il représente, un pays indivisible pour le bien de tous. Voilà le serment que j'ai appris en première année, à une école rurale de la Saskatchewan. Je ne l'oublierai jamais. Voilà pourquoi je n'insisterai jamais assez sur la nécessité d'appuyer cette motion et l'initiative parlementaire dont nous sommes saisis.

Tout s'enchaîne. Tous les jours, ou au moins une fois par semaine, les députés pourraient se lever et saluer le drapeau et le pays qu'il représente. Ensuite, les enfants de toutes les régions du pays pourraient suivre l'exemple que nous leur donnons et faire de même dans leur école.

On pourrait même aller plus loin et j'ai un défi à lancer aux Canadiens à ce sujet. Nous pourrions tenir un concours national où les Canadiens seraient invités à composer un hymne au drapeau, un hymne semblable à celui que j'ai appris en Saskatchewan. La chanson s'intitulait «The Maple Leaf Forever». Nous sommes certainement sur la bonne voie lorsque nous prenons ce genre de mesures.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La période consacrée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée et l'article est rayé du Feuilleton.

______________________________________________


5327

MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

HOLLINGER INCORPORATED

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Madame la Présidente, le 29 mai dernier, j'ai posé deux questions au premier ministre: pourquoi le gouvernement fédéral n'a-t-il rien fait pour empêcher la société Hollinger Incorporated de se porter acquéreur de plus de 60 p. 100 de tous les journaux canadiens et combien d'autres menaces à la liberté et à la démocratie faudra-t-il pour que le gouvernement prenne enfin des mesures afin de préserver la concurrence, la liberté d'expression et le droit du public d'être informé, face à cette concentration de la propriété dans l'industrie canadienne de la presse?

On m'a répondu que la loi sur la concurrence se préoccupait uniquement de l'impact économique. On n'a pas tenu compte du fait que les acquisitions de Hollinger avaient eu un impact économique sur les petits journaux indépendants en Saskatchewan. Ces journaux s'étaient plaints que Hollinger avait menacé de les acculer à la faillite si ils décidaient de procéder de façon coopérative aux fins de la publicité. On n'a pas relevé cette plainte.

Le ministre de l'Industrie n'a pas tenu compte du fait que Hollinger Incorporated avait congédié 182 personnes deux jours après s'être portée acquéreur du Leader Post de Regina et du Star Phoenix de Saskatoon. Ces journaux faisaient de bons profits, mais, d'après Conrad Black, ils n'en faisaient pas suffisamment.

Hollinger Incorporated contrôle maintenant tous les quotidiens de la Saskatchewan. Quand une personne contrôle 60 p. 100 des journaux au Canada et la totalité des quotidiens d'une province, la concurrence s'en trouve réduite sinon complètement éliminée. Elle est certainement éliminée dans des provinces comme la Saskatchewan et Terre-Neuve, où la société Hollinger de Conrad Black possède tous les quotidiens.

En 1981, la Commission Kent, mise sur pied les libéraux, avait recommandé de ne pas permettre à une personne ou à une société de posséder plus de 20 p. 100 du tirage de la presse au Canada afin de laisser libre cours à la concurrence dans l'industrie de la presse. Les libéraux font maintenant fi de ces recommandations.

Le Bureau de la politique de concurrence a déclaré officiellement qu'il ne s'occuperait pas de ces mainmises. Et pourtant, il a admis que la concentration d'entreprises dans les médias nuisait à la qualité des journaux, influençait les vues exprimées dans les éditoriaux et réduisait considérablement la diversité éditoriale dans tout le Canada. Le bureau aurait dit que même si ces préoccupations sociales étaient valables, il ne convient pas que le rédacteur en chef présente des observations sur la diversité des éditoriaux et la qualité du journal.

Le gouvernement se sert de ce prétexte pour ne rien faire à cet égard. Il se défile et affirme exactement le contraire de ce que les libéraux soutenaient lorsqu'ils formaient l'opposition.

(1915)

Il faut se pencher immédiatement sur le problème que pose la concentration de la propriété dans les médias. Depuis un mois, trois rédacteurs en chef de journaux Hollinger ont donné leur démission. Tous trois ont invoqué d'importants différends avec leur nouvel employeur, Conrad Black, comme raison de leur départ.

C'est nouveau, mais ce n'est pas surprenant. Le président de Hollinger, M. David Radler, a dit que les journaux Hollinger ne prendront même pas la peine de rapporter franchement ces questions. Il a affirmé qu'il ne rapportera pas les questions soulevées par les néo-démocrates, qui défendent les travailleurs et la classe moyenne du Canada, ou par toute organisation qui croit dans l'importance des programmes sociaux, dans la justice, dans la collectivité ou dans la collaboration.

Les opinions politiques extrémistes de Conrad Black sont bien connues. On a rapporté qu'il a dit que la défaite des conservateurs en 1993 était attribuable au fait qu'ils étaient trop socialistes, si tant est qu'une telle chose soit possible. Aucun des trois éditorialistes qui ont démissionné ne peut être considéré comme un socialiste, mais les trois étaient tellement déphasés par rapport aux idées étroitement favorables à la grande entreprise de Conrad Black qu'ils ont été forcés de quitter leur poste.

Le premier ministre a semblé agité et assez mal à l'aise quand je lui ai posé des questions au sujet des acquisitions de Conrad Black.


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Je me demande pourquoi. Deux jours après que j'eus soulevé cette question de la concentration de la presse, le premier ministre a passé trois jours à faire la fête, à jouer au golf et à faire de l'équitation avec Conrad Black dans une propriété du nord de Toronto appartenant la Banque canadienne impériale de commerce. Évidemment, les médias n'étaient pas admis dans la propriété. Mais le fait est que Conrad Black est un ami influent du premier ministre et qu'il verse une contribution financière au Parti libéral. Il a versé 13 000 $ aux libéraux, et 11 000 $, au Parti réformiste, en 1995.

Les Canadiens demandent au gouvernement libéral de faire ce qui s'impose, soit instituer une enquête sur les récentes acquisitions de la société Hollinger de Conrad Black pour faire en sorte que les Canadiens aient des reportages équilibrés dans leurs journaux.

M. Morris Bodnar (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Madame la Présidente, j'ai quelques observations à faire en réponse à ce que vient de dire le député.

J'invite le député à expliquer au gouvernement comment il pourrait interdire des acquisitions qui n'enfreignent les dispositions d'aucune loi adoptée par le Parlement.

Contrairement à ce que laisse entendre le député, le gouvernement actuel n'est pas habilité à interdire ou à empêcher des transactions commerciales. En fait, le député sait pertinemment que ce sont ses amis du NPD en Saskatchewan qui détiennent la solution au problème. Ce sont eux qui peuvent résoudre le problème qu'il dénonce. Mais non, le député ne demandera pas à ces amis-là de régler le problème. Il essaie de se faire du capital politique en prévision des prochaines élections, en menant tout simplement une campagne de diffamation sur les mesures prises à ce jour.

Deuxièmement, la liberté d'expression est garantie en vertu de la Charte des droits et libertés.

Troisièmement, des changements fondamentaux sont en cours dans les modes de communication. La radio, la télévision et l'Internet sont maintenant d'excellents véhicules pour échanger de l'information et des opinions.

Le député a parlé de certains dons à des partis politiques. Il est intéressant de signaler que le député ne mentionne jamais les dons que la Banque Scotia a faits au NPD. Les autres dons sont insignifiants par rapport à ceux que le NPD de la Saskatchewan a reçus de cette institution bancaire. Aussi, il est très surprenant que le député fasse de telles remarques à la Chambre.

L'application de la Loi sur la concurrence relève d'un agent impartial chargé d'exécuter la loi, en l'occurrence, le directeur des Enquêtes et Recherches. Le rôle du directeur, en vertu des dispositions de la Loi sur la concurrence qui concernent les fusions, consiste à examiner les répercussions économiques et la concentration de la propriété. Le directeur n'est pas mandaté pour examiner les questions d'ordre social que le NPD fait valoir, par exemple la diversité du contenu rédactionnel.

LES PÊCHES

M. Derek Wells (South Shore, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux d'avoir aujourd'hui l'occasion de revenir sur la question que j'ai posée le 17 mai dernier au ministre des Pêches et des Océans. Cette question avait trait aux frais d'inspection proposés pour les usines de conditionnement du poisson.

Lorsque je suis arrivé à Ottawa, j'ai été étonné de constater à quel point on comprenait mal l'industrie de la pêche et du conditionnement du poisson et ses problèmes. Beaucoup de Canadiens ne le savent pas, mais c'est la Nouvelle-Écosse qui vient en tête des provinces canadiennes pour le chiffre d'affaires de son industrie de la pêche. Nous devançons toutes les autres provinces pour ce qui est des quantités et de la valeur des prises débarquées. De plus, le poisson et les produits du poisson sont les premières exportations de la Nouvelle-Écosse.

De toutes les circonscriptions du Canada, la mienne, South Shore, est celle où la pêche est la plus importante. La pêche côtière de même que la pêche au homard, au pétoncle et au thon, pour ne nommer que celles-là, y sont prospères. D'ailleurs, le ministre a récemment annoncé que les quotas de pêche à la morue et à l'aiglefin seraient augmentés dans les zones adjacentes à ma circonscription. C'est le seul endroit du Canada atlantique où de telles augmentations ont été recommandées.

(1920)

Il y a plus de 100 usines de conditionnement du poisson dans les collectivités de la circonscription de South Shore. C'est aussi là que l'on trouve la plus grande usine de conditionnement du poisson du Canada, la National Sea Products, qui emploie environ 615 personnes, de même que les plus petites, qui emploient une ou deux personnes.

Les frais d'enregistrement et d'inspection proposés inquiètent sérieusement toutes les entreprises visées, surtout les plus petites.

Je veux remercier le ministre d'avoir reconnu les différences entre les diverses usines de transformation du poisson et d'avoir pris des mesures pour alléger le fardeau des droits de permis en établissant un plafond de 1 000 $ pour les usines de moins de 300 mètres carrés et un plafond de 10 000 $ par année de calendrier pour les services de certification de produits devant être payés par les exportateurs, ce qui aidera beaucoup notre secteur de l'exportation à demeurer concurrentiel sur le marché mondial.

L'annonce du ministre au sujet des droits a grandement contribué à montrer la volonté du gouvernement d'écouter l'industrie. De plus, on a mis en place un mécanisme de communication visant à régler certains des problèmes qui existent entre Ottawa et les régions au sujet de la réglementation en matière d'inspection.

Ces améliorations sont encourageantes pour les producteurs de fruits de mer, mais ceux-ci ont encore certaines inquiétudes au sujet des relations futures entre l'industrie et les inspecteurs de fruits de mer, spécialement depuis le dépôt du projet de loi C-60, qui établit la nouvelle Agence canadienne d'inspection des aliments.

J'ai rencontré à plusieurs reprises des représentants des principales entreprises de transformation du poisson de la Nouvelle-Écosse. Ils m'ont demandé de m'assurer auprès des autorités compétentes à Ottawa que la restructuration et la fusion des services d'inspection

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des aliments de trois ministères ne causeront pas d'autres problèmes et ne compromettront pas la compétitivité future de ces entreprises à cause de l'établissement de nouveaux règlements.

Le secteur de la transformation du poisson a traversé des années très difficiles et a réussi à s'adapter aux changements dans la base de ressources, aux changements sur le marché et aux changements apportés par les gouvernements.

Je ne suis pas convaincu que l'industrie puisse continuer à survivre dans un climat d'incertitude perpétuelle. J'espère que le ministre est au courant des préoccupations exprimées par l'industrie. Beaucoup craignent d'être engloutis dans une agence nationale d'inspection des aliments parce que le secteur des fruits de mer est beaucoup plus petit que les secteurs agricole et pharmaceutique.

J'espère que le ministre sera capable d'assurer aux transformateurs de poisson qu'ils seront bien représentés durant les discussions sur la structure et le fonctionnement de la nouvelle agence d'inspection des aliments et qu'il y aura une division des fruits de mer qui s'occupera des questions propres à ce secteur.

Les compagnies de fruits de mer de ma circonscription aimeraient entendre le point de vue du ministre sur la façon dont s'opérera la transition entre le ministère des Pêches et la nouvelle agence d'inspection des aliments. J'aimerais qu'on me dise quels plans sont en place pour protéger les intérêts de la principale industrie de ma province.

M. Ted McWhinney (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Madame la Présidente, je remercie le député de la diligence avec laquelle il a soulevé cette question. La modification réglementaire visant le recouvrement des coûts des services d'inspection du poisson s'inscrit dans le cadre du programme général du gouvernement fédéral de réduction des coûts par l'accroissement de l'efficience dans tous les ministères fédéraux. Dans cette optique, le ministère des Pêches et des Océans a fait tout son possible pour atteindre les objectifs gouvernementaux.

Dans le cadre du programme d'inspection du ministère des Pêches et des Océans, les coûts pour les contribuables canadiens passeront, selon les prévisions, de 33 millions de dollars en 1990-1991 à 19 millions en 1997-1998. Ces prévisions comprennent un montant de 4,8 millions qui devrait provenir du recouvrement des coûts. Le ministère est responsable de la mise en place d'un programme de gestion, dont la qualité est reconnue, qui a permis d'améliorer l'efficience des services d'inspection du poisson. Même s'il a accru son efficience et réduit ses coûts, le ministère n'a pas atteint son objectif de réduction des coûts. Par conséquent, sur les 14 millions de dollars épargnés par les contribuables sous forme de réduction des coûts, 4,8 millions proviendront du recouvrement des coûts.

Un processus réglementaire établi par le gouvernement canadien régit la mise en oeuvre des systèmes de recouvrement. Le ministère des Pêches et des Océans y a adhéré. En outre, à l'été 1995, le ministère a tenu une série de consultations auprès de l'industrie. En mars 1996, le ministère a publié un communiqué informant l'industrie des modifications réglementaires et, en avril 1996, il a effectué la publication préalable des modifications dans la Partie l de la Gazette du Canada afin de permettre à la population de faire connaître son opinion.

Le processus de consultation et d'élaboration du système de recouvrement des coûts des services d'inspection est en cours depuis plus d'un an. Le ministère a consulté toutes les parties intéressées et a examiné tous les aspects du recouvrement des coûts. En fait, suite aux observations de l'industrie et en réponse aux intérêts et aux préoccupations dont le député s'est fait le porte-parole de façon si éloquente et convaincante, le ministre a apporté des ajustements au système de recouvrement des coûts d'inspection du poisson. En outre, le ministère s'est engagé à faire un examen du système de recouvrement des coûts des services d'inspection du poisson un an après son entrée en vigueur.

(1925)

Le ministère est déterminé à recouvrer une partie des coûts engagés, tout en continuant de fournir des services d'inspection du poisson. Toutefois, il demeure conscient des préoccupations de l'industrie. Les consultations auprès de l'industrie font partie du processus d'examen et ont déjà commencé.

LES IMPORTATIONS DE COMBUSTIBLES

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Madame la Présidente, la semaine dernière à la Chambre, j'ai eu l'occasion de demander à la ministre des Ressources naturelles ce qu'elle pensait de la proposition d'Énergie atomique du Canada et d'Hydro Ontario d'importer des combustibles au plutonium des États-Unis.

Cette question faisait suite à plusieurs préoccupations dont m'ont fait part, en tant que député de London-Middlesex, le conseil municipal de London, en Ontario, le conseil du comté de Middlesex et d'autres personnes dans la région du sud-ouest de l'Ontario que cette proposition pourrait toucher.

J'aimerais passer brièvement en revue plusieurs de ces préoccupations. La première et la plus importante, à mon avis, est la question de la participation du public. Les conseils que je viens de mentionner et les citoyens qui m'ont contacté redoutent que le public n'ait pas la pleine possibilité de se faire entendre.

La ministre m'a assuré que ce serait le cas, et je suis très heureux de sa réponse. Toutefois, je voudrais avoir des garanties supplémentaires. Je voudrais que l'on m'assure qu'une évaluation environnementale approfondie sera effectuée avant que cette proposition ne soit approuvée et que le public ait des possibilités de se faire entendre.

La deuxième préoccupation a trait à la santé publique et à la protection de l'environnement. Je crois que la question que nous devons nous poser, après mûre réflexion, est celle-ci: devrions-nous permettre l'importation au Canada de plutonium en provenance d'autres pays? Il est question d'importer du plutonium en provenance des États-Unis et de la Russie.

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Troisièmement, se pose la question de la sécurité et du coût, à supposer qu'il soit donné suite à cette proposition. Selon toute probabilité, cela signifierait que les combustibles passeraient par Sarnia et seraient acheminés jusqu'à la centrale nucléaire de Bruce, à deux ou trois heures de route, selon l'époque de l'année et l'état des routes, le long de la route 21 qui est très fréquentée, mais qui n'est certainement pas une route principale. Cette route peut parfois être très dangereuse et très fréquentée. Se pose donc la question de la sécurité du transport de ces combustibles.

Vient ensuite la question de la nécessité d'accroître la sécurité à la centrale même, étant donné la nature des matériaux qui seraient entreposés à la centrale nucléaire de Bruce.

Enfin, il y a toute la question des déchets radioactifs à laquelle donnerait lieu l'utilisation de plutonium comme combustible. Cela deviendrait de toute évidence le problème d'Hydro Ontario et pourrait créer un dangereux précédent en ce sens que nous pourrions envisager l'importation d'autres déchets radioactifs au Canada.

Ce qui m'amène à la question de savoir ce que l'on fait de ces déchets radioactifs. Une proposition d'enfouir les déchets radioactifs dans le bouclier canadien est maintenant à l'étude. Une évaluation environnementale approfondie est en cours à ce sujet, mais tout est très incertain.

Pour terminer, je voudrais seulement souligner que l'on a attiré mon attention et celle d'autres députés à la Chambre, en particulier du sud-ouest de l'Ontario, sur un certain nombre de préoccupations.

J'apprécie les garanties que la ministre m'a données la semaine dernière concernant les audiences publiques. Cependant, j'attends avec impatience qu'elle me dise ce qu'elle pense de ces autres préoccupations, car mes électeurs attendent sa réponse.

Mme Marlene Cowling (secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources naturelles, Lib.): Madame la Présidente, l'idée d'utiliser du combustible MOX, qui contient une petite quantité de plutonium d'armements, pour générer de l'électricité est intéressante, parce qu'elle respecte les objectifs en matière de dividendes de la paix et qu'elle entraînerait des répercussions avantageuses en matière de non-prolifération et de désarmement. Les États-Unis et la Russie étudient actuellement l'idée d'utiliser le combustible MOX avec les réacteurs CANDU, mais ce n'est pas un projet à court terme.

Si les études et les tests en cours continuent de confirmer que l'option CANDU est faisable, les États-Unis et la Russie devront alors prendre des décisions quant aux différentes options pour la disposition finale. On ne donnerait suite à toute proposition d'utiliser du combustible MOX dans les réacteurs CANDU au Canada qu'avec l'accord du gouvernement du Canada seulement.

Tout projet prévoyant l'usage de réacteurs CANDU au Canada devrait respecter toutes les conditions posées par des lois fédérales et provinciales sévères, comme la Loi sur le contrôle de l'énergie atomique et la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Autrement dit, tout projet devrait être évalué et obtenir les permis nécessaires auprès des autorités fédérales et provinciales en matière de sécurité, de santé et de protection de l'environnement.

L'évaluation du projet ne se ferait pas sans consultation du public. L'ACEE, notamment, a des dispositions bien précises sur la participation du public. Le Canada est heureux que ces armes de destruction de masse soient détruites. Il réclame depuis longtemps de telles mesures. Si l'utilisation des réacteurs CANDU peut aider à assurer que le plutonium contenu dans ces armements ne serve plus jamais à la fabrication d'armes nucléaires, nous devons être disposés à envisager sérieusement la réalisation d'un projet d'utilisation de combustible MOX et des réacteurs CANDU, au Canada.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La motion portant que la Chambre s'ajourne est maintenant réputéeadoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 31.)