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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 144

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 28 octobre 1998

. 1400

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VLIZ WARDEN
VM. John McKay
VLES AGRICULTEURS CANADIENS
VM. Leon E. Benoit
VLA SEMAINE DE SENSIBILISATION AUX TROUBLES DU SOMMEIL
VMme Elinor Caplan
VLA SOCIÉTÉ RADIO-NORD
VM. Guy St-Julien
VLE PRIX DU COMMONWEALTH JEWISH COUNCIL AND TRUST
VM. Mac Harb
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Myron Thompson
VLES NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
VM. Bernard Patry
VWILNO (ONTARIO)
VM. Hec Clouthier

. 1405

VLE MOIS DE LA PRÉVENTION DU MAUVAIS TRAITEMENT DES ENFANTS
VM. Gurbax Singh Malhi
VL'ACCORD DE RÈGLEMENT DES REVENDICATIONS TERRITORIALES DES
VM. Mike Scott
VL'ASSURANCE-MALADIE
VM. Bill Blaikie
VLES JOURNÉES QUÉBÉCOISES DE LA SOLIDARITÉ INTERNATIONALE
VMme Maud Debien

. 1410

VLA RECHERCHE SUR LE DIABÈTE
VM. Paul Steckle
VL'INDUSTRIE OVINE QUÉBÉCOISE
VM. Odina Desrochers
VLA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
VM. Gilles Bernier
VCANADIAN STEEL, CHINESE GRIT
VMme Sophia Leung
VL'AGRICULTURE
VM. Lee Morrison

. 1415

VQUESTIONS ORALES
VL'ASSURANCE-EMPLOI
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VL'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DU SOMMET DE L'APEC
VMme Deborah Grey
VLe très hon. Jean Chrétien

. 1420

VMme Deborah Grey
VLe très hon. Jean Chrétien
VL'UNION SOCIALE
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Gilles Duceppe
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Pierre Brien

. 1425

VL'hon. Stéphane Dion
VLA SANTÉ
VMme Pauline Picard
VLe très hon. Jean Chrétien
VLA PAUVRETÉ
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VL'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC
VMme Elsie Wayne
VL'hon. Andy Scott

. 1430

VM. Peter MacKay
VL'hon. Andy Scott
VL'ASSURANCE-EMPLOI
VM. Paul Crête
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VMme Christiane Gagnon
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Mike Scott
VL'hon. Jane Stewart
VM. Mike Scott

. 1435

VL'hon. Jane Stewart
VM. Myron Thompson
VL'hon. Jane Stewart
VM. Myron Thompson
VL'hon. Jane Stewart
VL'HARMONISATION DE LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES
VM. Yvan Loubier
VL'hon. Paul Martin

. 1440

VLA FONDATION DES BOURSES DU MILLÉNAIRE
VM. Bernard Bigras
VL'hon. Stéphane Dion
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Derrek Konrad
VL'hon. Jane Stewart
VM. Derrek Konrad
VL'hon. Jane Stewart
VLA TREMBLANTE DU MOUTON
VMme Hélène Alarie
VL'hon. Lyle Vanclief

. 1445

VLE CENTRE NATIONAL DES ARTS
VMme Sarmite Bulte
VL'hon. Sheila Copps
VL'ENVIRONNEMENT
VM. Rick Casson
VM. Rick Casson
VL'hon. Christine Stewart
VM. Bill Gilmour

. 1450

VL'hon. Christine Stewart
VLES POLITIQUES SOCIALES
VMme Michelle Dockrill
VL'hon. Paul Martin
VMme Wendy Lill
VL'hon. Paul Martin
VL'AGRICULTURE
VM. Rick Borotsik
VL'hon. Lyle Vanclief

. 1455

VM. Rick Borotsik
VL'hon. Lyle Vanclief
VLES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
VM. Sarkis Assadourian
VL'hon. Lloyd Axworthy
VLE KOSOVO
VM. Bob Mills
VL'hon. Lloyd Axworthy
VLE DÉGLAÇAGE DES PORTS
VM. Yves Rocheleau
VL'hon. David Anderson

. 1500

VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VMme Louise Hardy
VL'hon. Jane Stewart
VLA SANTÉ
VM. Greg Thompson
VL'hon. Allan Rock
VAFFAIRES COURANTES

. 1505

VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Peter Adams
VCOMITÉS DE LA CHAMBRE
VJustice et droits de la personne
VMme Shaughnessy Cohen
VDéfense nationale et anciens combattants
VM. Pat O'Brien

. 1510

VLES DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES
VM. Bob Speller
VLE CODE CRIMINEL
VProjet de loi C-450. Présentation et première lecture
VM. Myron Thompson
VLA LOI SUR LE PARLEMENT DU CANADA
VProjet de loi C-451. Présentation et première lecture.
VM. Jim Pankiw
VLES INITIATIVES PARLEMENTAIRES
VM. Peter Adams
VMotion

. 1515

VPÉTITIONS
VL'avortement
VM. Werner Schmidt
VLa famille
VM. Werner Schmidt
VLes petites embarcations
VM. Ovid L. Jackson
VLa justice
VMme Louise Hardy
VLes droits de la personne
VM. Paul Szabo
VL'unité nationale
VM. Peter Goldring
VLe projet de loi C-68
VM. Guy St-Julien
VLe CRTC
VM. Jim Pankiw
VLe Kosovo
VM. Gary Pillitteri
VLe Régime de pensions du Canada
VM. Nelson Riis

. 1520

VLa cruauté envers les animaux
VM. Nelson Riis
VL'accord multilatéral sur l'investissement
VM. Nelson Riis
VL'avortement
VM. Randy White
VLa famille
VM. Randy White
VL'équité salariale
VM. Randy White
VLes droits de la personne
VM. Pat Martin
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Peter Adams
VL'hon. Harbance Singh Dhaliwal
VM. Garry Breitkreuz

. 1525

VDEMANDES DE DOCUMENTS
VM. Peter Adams
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLA LOI SUR LE NUNAVUT
VProjet de loi C-57. Deuxième lecture
VL'hon. Lucienne Robillard
VMme Nancy Karetak-Lindell

. 1530

. 1535

. 1540

. 1545

VM. John Reynolds

. 1550

. 1555

. 1600

VM. Ghislain Fournier

. 1605

. 1610

. 1615

. 1620

VMme Louise Hardy

. 1625

. 1630

VM. Werner Schmidt

. 1635

VM. Reed Elley
VM. Roy Bailey
VM. Jim Gouk

. 1640

VM. Gerald Keddy

. 1645

VM. David Pratt

. 1650

VM. Gilles Bernier

. 1655

. 1700

VM. David Pratt
VL'hon. Lorne Nystrom

. 1705

VM. Mike Scott

. 1710

. 1715

. 1720

VM. Werner Schmidt

. 1725

VM. Roy Bailey
VM. Rob Anders

. 1730

VINITIATIVES PARLEMENTAIRES
VLA TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES
VL'hon. Lorne Nystrom
VMotion
VAmendement

. 1735

. 1740

. 1745

. 1750

VM. Tony Valeri

. 1755

. 1800

VM. Paul Forseth

. 1805

. 1810

VM. Benoît Sauvageau

. 1815

VAmendement

. 1820

VM. Scott Brison

. 1825

. 1830

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 144


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mercredi 28 octobre 1998

La séance est ouverte à 14 heures.



Prière


 

. 1400 +

Le Président: Comme nous le faisons tous les mercredis, nous allons maintenant chanter Ô Canada, qu'entonnera le député de Saanich—Gulf Islands.

[Note de la rédaction: Les députés se lèvent et chantent Ô Canada.]



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LIZ WARDEN

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui à la Chambre pour féliciter Liz Warden, qui a remporté la médaille d'argent du 400 mètres quatre nages individuel aux 16es Jeux du Commonwealth, qui ont eu lieu à Kuala Lumpur, en Malaisie, en septembre dernier. Ce faisant, elle a enregistré la meilleure performance de sa carrière.

Liz, qui appartenait au club de natation de Scarborough, est maintenant à l'Université de Toronto, et c'est avec fierté qu'elle a représenté le Canada à cette compétition où elle a remporté des résultats remarquables.

Elle s'entraîne maintenant en vue de la Coupe du monde, qui aura lieu à Edmonton le 28 novembre et à laquelle elle prendra part en tant que membre de l'équipe canadienne. Elle nous a dit, à ma fille et moi, qu'elle s'entraînait six heures par jour.

Je félicite Liz. Elle est le parfait exemple de ce à quoi on peut arriver à force de dévouement, de travail et de persévérance. Le Canada est fier d'elle. Je lui souhaite bonne chance pour sa prochaine compétition.

*  *  *

LES AGRICULTEURS CANADIENS

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, de nombreux agriculteurs, surtout dans l'Ouest, sont aux prises avec une crise du revenu. Ils n'y sont pour rien. La situation économique en Asie y est pour beaucoup, mais l'inaction du gouvernement, l'augmentation des droits d'utilisation et l'alourdissement de la fiscalité au cours des cinq dernières années en sont des facteurs impardonnables.

Les droits déraisonnables exigés en vertu des programmes de recouvrement des coûts ainsi que l'augmentation des taxes sur les carburants et autres intrants pressurent les agriculteurs au-delà des limites acceptables.

Ils ne demandent pas la charité. Tout ce qu'ils veulent, c'est être traités de façon équitable. C'est pour cela que, pendant la campagne électorale de 1993 et lors des discussions sur l'élimination du tarif du Nid-de-Corbeau, les députés réformistes ont demandé au gouvernement de réinvestir au moins une partie de cette subvention dans son programme d'ajustement des distorsions du commerce. À l'heure même où je vous parle, ce fonds permettrait de verser des sommes aux agriculteurs pour compenser en partie l'effondrement des prix dû aux pratiques commerciales déloyales des autres pays.

Mais le gouvernement nous a-t-il écoutés? Non. Il a abandonné les agriculteurs canadiens. Que compte-t-il faire maintenant?

*  *  *

[Français]

LA SEMAINE DE SENSIBILISATION AUX TROUBLES DU SOMMEIL

Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de signaler à la Chambre que la semaine du 19 au 25 octobre a été désignée comme étant la Semaine de sensibilisation aux troubles du sommeil.

[Traduction]

Cette semaine, où l'on change l'heure aux pendules, nous rappelle combien le sommeil est important dans notre vie quotidienne. Plus de deux millions de Canadiens souffrent de troubles du sommeil, tels que l'insomnie et l'apnée du sommeil marquée par l'interruption de la respiration. Les troubles du sommeil nuisent à la qualité de la vie des gens qui en souffrent en les rendant moins alertes et moins performants.

Affections du sommeil-éveil Canada est une organisation nationale bénévole oeuvrant dans le domaine de la santé et ayant des sections un peu partout au Canada, qui recrute et forme des bénévoles chargés d'aider les gens qui souffrent de troubles du sommeil de manière à améliorer leur qualité de vie.

Je demande aux députés d'adresser avec moi à cette organisation tous nos voeux de succès à l'occasion de cette Semaine nationale de sensibilisation aux troubles du sommeil.

Je voudrais aussi profiter de cette occasion pour faire savoir à la Chambre que mes petites-filles et mon petit-fils, Findlay, Tillie et Max...

Le Président: Le député d'Abitibi—Baie-James—Nunavik.

*  *  *

[Français]

LA SOCIÉTÉ RADIO-NORD

M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Monsieur le Président, Radio-Nord demande au ministre fédéral du Travail de donner au médiateur Jacques Lessard le pouvoir d'imposer aux 85 employés de l'entreprise leurs prochaines conditions de travail. C'est un abus de pouvoir que réclame Radio-Nord puisque le Code canadien du travail ne permet pas au ministre fédéral d'imposer des conditions de travail aux employés de Radio-Nord.

C'est même contraire à l'esprit du Code selon le syndicat, puisque l'article 107 permet tout au plus au ministre de prendre les mesures nécessaires pour favoriser la bonne entente dans le monde du travail et susciter des conditions favorables au règlement des différends.

La demande de Radio-Nord équivaut à enlever au syndicat le droit de négocier librement et d'exercer légitimement le droit de grève comme moyen pour faire valoir ses revendications. L'employeur a aussi aboli une dizaine de postes pendant le processus de conciliation.

Le syndicat croit qu'une solution négociée est préférable pour les employés et la population de l'Abitibi-Témiscamingue qui déplore la réduction des services de Radio-Nord depuis plusieurs années.

*  *  *

[Traduction]

LE PRIX DU COMMONWEALTH JEWISH COUNCIL AND TRUST

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais rendre hommage au lauréat du prix du Commonwealth Jewish Council and Trust de cette année.

Il s'agit de l'un des meilleurs fonctionnaires que nous ayons jamais eus dans ce pays. Pendant plus de 30 ans, avant et après son élection au Parlement, il s'est fait le champion de la justice et de l'équité. C'est un visionnaire et un ami du peuple.

Le prix du Commonwealth Jewish Council and Trust est décerné aux personnes qui ont fait plus que leur devoir afin d'aider leurs semblables et dont la contribution a été vraiment remarquable.

Parmi les autres Canadiens qui se sont vu décerner ce prix, on trouve le juge Maxwell Cohen et Mme Dorothy Reitman.

Je joins ma voix à mes collègues et à celle de tous les Canadiens pour féliciter le vice-premier ministre, le député de Windsor-Ouest, pour ce dernier accomplissement qui vient s'ajouter à tous les autres.

*  *  *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, la semaine dernière, le juge Tom Goodson, un membre autochtone de la Cour provinciale de l'Alberta, a été chargé de conduire une enquête médico-légale sur la mort de Connie et Ty Jacobs, qui ont été abattus.

J'espère que le juge Goodson suivra les traces du juge Reilly et procédera à une enquête la plus étendue possible. Il rendrait un grand service à tous les autochtones en faisant enquête sur les conditions sociales dans cette réserve, sur la gabegie qui y règne et sur les comptes que rend le conseil de bande.

J'espère qu'il va également voir pourquoi Connie vivait dans une maison condamnée, pourquoi il y a une pénurie chronique de logements sur cette réserve qui a reçu plus de 20 millions de dollars l'année dernière et pourquoi ces gens ont décidé, en août, de s'installer dans un casernement déserté sur la réserve dans l'espoir de mieux se loger.

Pour quelles raisons ces gens continuent-ils de vivre dans la pauvreté, d'avoir une mauvaise santé, d'être confrontés à la violence et au chômage malgré les milliards de dollars de deniers publics que les réserves reçoivent chaque année?

Cette enquête ne peut blâmer qui que ce soit. Cependant, le juge Goodson peut formuler de nombreuses recommandations sur la façon d'empêcher qu'un incident de ce genre ne se reproduise et améliorer par la suite la qualité de vie de tous les autochtones du pays.

*  *  *

[Français]

LES NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION

M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier, le gouvernement canadien annonçait une aide financière globale de 10,5 millions de dollars pour la réalisation d'une vingtaine de projets dans le domaine des nouvelles technologies de l'information et des nouveaux médias dans la région du Grand-Montréal.

Une première contribution financière est versée à Behaviour Communications Inc. Il s'agit dans ce cas d'une contribution de 9 millions de dollars, ce qui entraînera des investissements de 30 millions de dollars et la création de 200 nouveaux emplois.

Une enveloppe de 1,5 million de dollars est accordée à 18 entreprises parrainées par le Consortium multimédia CESAM, dans le cadre du fonds d'expérimentation en multimédia. Cet appui gouvernemental est accordé à titre de soutien financier au prédémarrage d'entreprises.

Il va sans dire que les gouvernements et les partenaires du secteur privé doivent créer ensemble un environnement propice pour attirer une main-d'oeuvre de haute qualité à Montréal et freiner l'exode de nos talents et de nos ressources compétentes.

Le gouvernement canadien encourage les initiatives québécoises et fait en sorte que nos entreprises puissent prendre la place qui leur revient.

*  *  *

[Traduction]

WILNO (ONTARIO)

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nippissing—Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, si les députés ne connaissent pas Wilno, ils en entendront parler ce soir, en même temps que tout le Canada, en regardant l'émission On The Road Again au réseau anglais de la télévision de Radio-Canada.

 

. 1405 + -

L'animateur, Wayne Rostad, a visité Wilno, la plus vieille colonie de peuplement polonais au Canada, une autre attraction incroyable dans la merveilleuse circonscription de Renfrew—Nipissing—Pembroke.

M. Rostad a déclaré: «Je sais que cette région a un attrait tout particulier pour les gens. On y retrouve vraiment d'excellents rapports de bon voisinage et un grand esprit communautaire. Il y a quelque chose de magique dans les collines de Wilno.»

M. Rostad a visité la célèbre taverne de Wilno, un mardi soir, à l'occasion de la soirée du blues, et il y a rencontré alors de nombreux musiciens, artistes et personnages originaux de l'endroit qui font de Wilno une collectivité aussi incroyablement diversifiée. Un de ces artistes est le fabricant de marionnettes Alex Sztasko, dont les marionnettes, qui semblent vivantes, reflètent bien la nature bien particulière de cette région.

M. Rostad a ajouté: «Alex est une personne parfaite pour notre émission, car nous faisons connaître des Canadiens aux Canadiens.»

Monsieur le Président, vous connaissez maintenant Wilno.

*  *  *

LE MOIS DE LA PRÉVENTION DU MAUVAIS TRAITEMENT DES ENFANTS

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, octobre est le Mois de la prévention du mauvais traitement des enfants.

En 1997, les sociétés d'aide à l'enfance de l'Ontario ont effectué 96 039 enquêtes sur des cas présumés de mauvais traitement ou de négligence envers des enfants. Ce nombre englobe 634 cas ayant fait l'objet d'enquêtes de la part de la société d'aide à l'enfance de la région de Peel. Cette dernière est une des nombreuses agences de protection de l'enfance à tenir en octobre une campagne du ruban violet dans un but d'éducation, de défense et de sensibilisation en matière de mauvais traitement des enfants. Jusqu'à 12 000 rubans seront ainsi distribués dans la région de Peel.

Même si le Mois de la prévention du mauvais traitement des enfants et la campagne du ruban violet se terminent samedi prochain, je tiens à rappeler aux Canadiens que toute personne qui a des raisons de soupçonner qu'un enfant est victime de mauvais traitement, ou a pu en avoir été victime, doit faire part de ce soupçon à une société d'aide à l'enfance.

*  *  *

L'ACCORD DE RÈGLEMENT DES REVENDICATIONS TERRITORIALES DES NISGA'A

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, le 4 août, le gouvernement libéral a paraphé l'accord de règlement des revendications territoriales des Nisga'a avec beaucoup de tapage et de battage publicitaire.

Le gouvernement provincial néo-démocrate, également signataire de l'accord, dépense maintenant les deniers publics par millions pour une campagne qui rappelle celle qui a suivi l'accord de Charlottetown.

Là encore, tous les interlocuteurs qui nous ont dit pourquoi l'accord de Charlottetown représentait le seul espoir pour le Canada réapparaissent pour nous dire pourquoi nous devons accepter l'accord avec les Nisga'a.

Les parallèles sont frappants. Un accord est élaboré à huis-clos par un groupe restreint de politiciens et d'intellectuels. On vient ensuite dire au public en termes non équivoques que l'accord ne peut pas être modifié et doit être accepté pour sauver le pays. L'intelligentsia fait sans hésiter et sans réserve l'éloge de l'accord en termes chaleureux, et ceux qui expriment des inquiétudes ou de l'opposition sont étiquetés «ennemis du Canada» dans le cas de l'accord de Charlottetown, ou «forces des ténèbres» dans le cas de l'accord avec les Nisga'a.

Ce sont tous là, chez les gouvernements, des indices clairs de dérive morale, de faillite intellectuelle et de méfiance envers la population.

Lorsque des gouvernements apportent des changements majeurs au contrat social, ils ne doivent jamais le faire...

Le Président: Le député de Winnipeg—Transcona.

*  *  *

L'ASSURANCE-MALADIE

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, l'Association médicale canadienne intronisera ce soir Tommy Douglas à son temple de la renommée. Tommy serait heureux de voir combien les choses ont changé depuis la grève des médecins en Saskatchewan, que les milieux médicaux eux-mêmes reconnaissent les mérites d'un régime de soins de santé financé à même les fonds publics et qu'ils travaillent de concert avec d'autres groupes à sauver le régime d'une mort certaine qui serait consécutive au sous-financement.

Mais Tommy aimerait également que nous insistions sur le fait que l'assurance-maladie a encore ses ennemis, visibles et invisibles. Ses ennemis visibles, ce sont les réformistes qui se disent franchement favorables à un régime à l'américaine, c'est-à-dire à deux vitesses. L'ennemi invisible ou du moins caché, c'est le gouvernement libéral fédéral qui crée sciemment les conditions qui assureront la victoire des ennemis du régime d'assurance-maladie.

À la fin de sa vie, Tommy nous avait prévenus: «Ne les laissez pas le détruire.» Le NPD exhorte tous les Canadiens à tenir compte de son avertissement et à avoir les réformistes et les libéraux à l'oeil.

*  *  *

[Français]

LES JOURNÉES QUÉBÉCOISES DE LA SOLIDARITÉ INTERNATIONALE

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, cette semaine se déroulent les Journées québécoises de la solidarité internationale.

Elles marqueront, cette année, notre engagement à poursuivre l'idéal de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Tant à Montréal, Sherbrooke, Trois-Rivières, Québec, que dans l'Outaouais, l'Abitibi, Lanaudière, les Bois-Francs, le Saguenay—Lac-Saint-Jean, tous sont conviés à participer aux nombreuses activités organisées en collaboration avec le ministère des Relations internationales du Québec pour découvrir la manière québécoise d'être solidaire avec le reste du monde.

À titre d'exemple, le gouvernement du Québec aidait financièrement les victimes d'un ouragan en République dominicaine et, le 20 novembre prochain, on dévoilera à l'Assemblée nationale une murale collective portant sur les droits humains.

 

. 1410 + -

Si les Québécois et les Québécoises sont de plus en plus présents sur la scène internationale, c'est pour exprimer leur identité, mais aussi leur solidarité envers les autres peuples de la terre.

*  *  *

[Traduction]

LA RECHERCHE SUR LE DIABÈTE

M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'il est arrivé sur la colline du Parlement aujourd'hui, Ayden Byle a été accueilli par des supporters venus le saluer. Il traverse le Canada à la course afin de collecter des fonds sous formes de partenariats et de dons publics pour la recherche en vue de trouver un remède contre le diabète.

Ayden avait entrepris son périple le 1er juin dans la parc Stanley et le terminera le 1er décembre à Halifax. Bien qu'il soit toujours un athlète actif, Ayden, qui est âgé de 24 ans, est insulino-dépendant et doit se faire cinq injections par jour.

Il espère que sa course sensibilisera davantage le public au diabète et il souhaite vraiment devenir un modèle pour les jeunes enfants qui sont aux prises avec les aspects physiques et psychologiques de cette maladie.

J'encourage tous mes collègues à joindre leurs voix à la mienne pour lui souhaiter bon succès au cours de sa traversée du Canada.

*  *  *

[Français]

L'INDUSTRIE OVINE QUÉBÉCOISE

M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, les éleveurs de moutons sont à la porte du Parlement.

Ils manifestent contre l'attitude arrogante du gouvernement libéral qui ne leur offre que des solutions minables pour leur venir en aide.

Alors que le ministre de l'Agriculture se vante d'être préoccupé par le fardeau financier et émotionnel qu'endure les producteurs, son gouvernement limite son aide à une mesure compensatoire qui pénalise tous les éleveurs de moutons qui se sont pliés, dès le début, aux ordres de l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

En marchant aujourd'hui vers le Parlement canadien, les éleveurs sont à nos portes pour lancer un cri de désespoir afin de sauver l'industrie ovine québécoise. Le ministre de l'Agriculture démontre clairement qu'il est complètement déconnecté de la situation dramatique que vivent nos éleveurs de moutons.

Ce n'est pas une épidémie de la tremblante qui se vit au Québec, mais bien un massacre commandé par le gouvernement fédéral pour l'industrie ovine du Québec, sans qu'à la base, il y ait de véritable fondement.

*  *  *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Gilles Bernier (Tobique—Mactaquac, PC): Monsieur le Président, il y a deux ans, Postes Canada se proposait de changer l'adresse de tous les habitants ruraux du Nouveau-Brunswick. La société prétendait que le système de poste restante devait disparaître et que tout le monde devait avoir un numéro unique sur une rue nommée.

L'idée a été vendue en promettant la mise en oeuvre d'un système d'urgence 911, et tout le monde a accepté.

Deux ans plus tard, nous apprenons la vérité. Ce nouveau système d'adressage est payé par les clients de la société canadienne des postes. La société a informé ses clients que s'ils voulaient recevoir du courrier, il leur fallait d'abord verser 34 $ pour le changement d'adresse. Les entreprises et les organisations sans but lucratif, comme la banque alimentaire, doivent payer la somme exorbitante de 150 $ parce que Postes Canada a décidé unilatéralement de changer leur adresse.

C'est scandaleux. Il est aussi immoral de demander aux personnes âgées à revenu fixe de payer ces droits.

Je demande au ministère de prolonger la période de d'exemption de ces droits jusqu'à ce que les clients ruraux aient eu le temps d'aviser tout le monde de leur changement d'adresse.

*  *  *

CANADIAN STEEL, CHINESE GRIT

Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureuse d'annoncer la première parlementaire du film «Canadian Steel, Chinese Grit», qui aura lieu le 4 novembre. Ce documentaire est une coproduction Chine-Canada qui reconnaît le rôle des travailleurs chinois dans la construction du chemin de fer trans-Canada.

Le film révèle la vie de ces courageux pionniers chinois. Il montre que leur contribution au développement économique et politique du Canada a laissé un héritage qui mérite une place particulière dans l'histoire canadienne.

*  *  *

L'AGRICULTURE

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, une crise économique frappe le secteur agricole des Prairies, mais le gouvernement infesté d'avocats ne s'en rend même pas compte.

Les États-Unis et l'Union européenne reconnaissent le travail des agriculteurs et les protègent, mais le ministre canadien de l'Agriculture n'a pas encore admis l'existence d'une crise au pays. Jusqu'à maintenant, la seule stratégie qu'il a appliquée pour éviter la faillite aux agriculteurs consiste à encourager les agriculteurs à avoir recours au CSRN, même si le compte de stabilisation du revenu net moyen ne parviendrait pas à couvrir l'achat de fertilisants et de produits chimiques, et encore moins l'achat de carburant, le paiement des impôts, les frais de transport, etc.

 

. 1415 + -

J'exhorte le ministre à cesser de faire l'autruche et je l'invite à écouter attentivement ce que les porte-parole de l'agriculture et ses homologues provinciaux auront à lui dire lors de la rencontre du 4 novembre. Je suis persuadé qu'il en entendra de belles. Cela le convaincra peut-être de prendre la crise agricole au sérieux.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, l'article 66 de la Loi sur l'assurance-emploi protège les sommes versées dans la caisse par les travailleurs et les employeurs. Cet argent doit servir uniquement à donner des prestations d'assurance-emploi aux chômeurs. Malgré cette loi, le premier ministre veut mettre la main sur l'excédent de la caisse et s'en servir à d'autres fins.

Le premier ministre a-t-il l'intention d'enfreindre la loi ou a-t-il l'intention de la modifier pour permettre ce pillage de la caisse d'assurance-emploi?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, si j'ai bien compris, hier, le ministre des Finances a cité un extrait du programme du Parti réformiste, qui disait que nous devrions nous servir de l'excédent de la caisse d'assurance-emploi pour réduire la dette. Ce n'est pas ce que nous avons fait.

Chaque année depuis notre accession au pouvoir, nous avons réduit les cotisations. Elles devaient s'établir à 3,30 $ le 1er janvier 1994, et nous avons ramené ce montant à 2,70 $ dans le dernier budget.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances a cité un document qui datait de 1995, à l'époque où le déficit s'élevait à 38 milliards de dollars. Je rappelle au premier ministre que nous sommes maintenant en 1998.

Le travailleur moyen verse 350 $ de trop dans la caisse d'assurance-emploi, et la petite entreprise moyenne verse 500 $ de trop par employé, mais tout excédent appartient toujours à ceux qui ont payé.

Le premier ministre exposera-t-il clairement sa position une fois pour toutes? Reconnaît-il que ces fonds appartiennent aux travailleurs et aux employeurs, oui ou non?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en 1995, lorsque le Parti réformiste nous demandait de nous servir de l'excédent pour réduire la dette, nous l'avons simplement utilisé pour réduire les cotisations.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre a dit l'autre jour qu'il voulait un débat ouvert sur cette question, mais il n'a pas encore présenté à la Chambre une modification aux dispositions de la loi relatives à la caisse d'assurance-emploi.

Au lieu de cela, il envoie son ministre des Finances rencontrer la Commission de l'assurance-emploi pour essayer de changer les règles en cachette.

Le premier ministre s'engagera-t-il à présenter une modification à la Loi sur l'assurance-emploi qui fera l'objet d'un débat et d'un vote à la Chambre, ou essaiera-t-il de changer la loi en cachette au moyen de règlements et de décrets?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout le monde sait que toute modification à la loi doit passer par la Chambre des communes. Si nous décidons de modifier la loi, nous ne pouvons pas le faire en cachette. Toute modification doit être présentée à la Chambre des communes. J'ai appris cela en avril 1963, lorsque je suis devenu député.

*  *  *

L'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DU SOMMET DE L'APEC

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, en 1963, le premier ministre n'avait pas le problème de l'APEC. C'est maintenant qu'il est aux prises avec ce problème.

Je demande au premier ministre...

Des voix: Oh, oh!

Le Président: La députée d'Edmonton-Nord.

Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, il est maintenant évident que le solliciteur général, le président de la commission et la GRC disent tous croire que la GRC est peut-être allée trop loin dans l'affaire de l'APEC. Qui va déterminer si le premier ministre est allé trop loin?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en 1963, la situation était très bonne. Nous n'avions pas le Parti réformiste au Canada.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: La parole est au premier ministre.

 

. 1420 + -

Le très hon. Jean Chrétien: Nous avons aussi appris que, quand il y a une enquête en cours en vertu d'une loi du Parlement, nous laissons la commission faire son travail. La commission se penchera sur tous les éléments.

Je ne suis pas inquiet du tout. Ce qui m'inquiète, c'est que l'opposition soit si inepte dans son travail d'opposition au gouvernement.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je suppose qu'il faut quelqu'un d'inepte pour reconnaître son pareil.

Cette commission ne siège même pas actuellement et le premier ministre le sait fort bien. Même si elle reprend ses travaux, le gouvernement et le premier ministre savent qu'elle ne peut examiner que la conduite et les actions de la GRC, et pas celles du premier ministre.

Le premier ministre sait qu'il ne sera pas assigné à comparaître et qu'il ne sera pas tenu de produire les documents que ses collaborateurs cachent délibérément. Quand allons-nous avoir une enquête judiciaire approfondie à cet égard?

Le Président: Nous prêtons des intentions. Je demande à la députée de retirer le mot délibérément.

Mme Deborah Grey: Excusez-moi, monsieur le Président. Je retire ce mot.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout le monde sait que, à ce moment-là, j'étais occupé à présider une réunion de 17 chefs d'État, dont les présidents des États-Unis et de la Chine, le premier ministre du Japon et d'autres, et que la région du Pacifique était en pleine crise financière.

À ce moment-là, je n'avais pas le temps de discuter avec la police. Toute personne de bon sens le saurait.

*  *  *

[Français]

L'UNION SOCIALE

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre a déclaré, hier, qu'il était prêt à bouger au plan constitutionnel s'il y avait un gouvernement docile à Québec, et si toutes les provinces étaient consentantes.

Lui qui cherche des consensus comme le sourcier cherche l'eau, on va lui en donner des exemples de consensus solides: à Saskatoon, l'été dernier, tous les premiers ministres de toutes les provinces se sont entendus pour réclamer le droit de retrait avec pleine compensation de tout nouveau programme fédéral.

Puisqu'il y a consensus sur l'union sociale, qu'est-ce que le premier ministre attend pour bouger?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la discussion qui a cours présentement à ce sujet est une initiative que j'ai prise moi-même à la réunion des premiers ministres, en décembre dernier, en collaboration avec le premier ministre de la province de la Saskatchewan.

Nous avons dit: «Il faut que tout le monde travaille ensemble pour développer un programme d'union sociale au Canada qui respectera les compétences de tout le monde.» Nous avons reçu les propositions des gouvernements provinciaux, il y a quelques mois, et la ministre de la Justice, qui mène les négociations, a rencontré ses collègues, il y a quelques semaines.

Nous ne répondons pas à une demande consensuelle des provinces. Ce fut une initiative...

Le Président: Le chef du Bloc québécois a la parole.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, c'est malheureux que vous ayez coupé la parole au premier ministre, parce que la réponse qu'il a donnée aux premiers ministres des provinces est la suivante: «S'ils veulent diriger le Canada, ils n'ont qu'à se faire élire premier ministre du Canada.» Après moi, le déluge!

Avec des déclarations comme celle-là, comment peut-on croire que le premier ministre veut régler quelque chose et bouger? Comment faire croire des choses avant les échéanciers référendaires, si c'est pour se croiser les bras et faire exactement le contraire par la suite? C'est toute sa carrière.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, étant donné que le premier ministre du Québec a décidé aujourd'hui de déclencher des élections, je me rends compte à quel point le Bloc québécois est nerveux à la Chambre aujourd'hui.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre dit que ça lui prend des consensus pour bouger.

À Saskatoon, tous les premiers ministres des provinces étaient d'accord pour dire que le fédéral devait rembourser les coupures de 6,3 milliards de dollars faites dans les transferts sociaux.

Ma question s'adresse au premier ministre. S'il est sérieux, pourquoi ne bouge-t-il pas?

 

. 1425 + -

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, pour éliminer un déficit de 42 milliards de dollars, les Canadiens ont dû faire des sacrifices et le gouvernement a veillé à ce que ces sacrifices soient justes.

Par exemple, on n'a pas touché aux paiements de péréquation. Par exemple, un économiste qui a travaillé de très près avec le Bloc, George Matthews, a calculé qu'encore maintenant, année après année, 4,5 milliards de dollars entrent dans les coffres du gouvernement du Québec en plus. Et ça, c'est la grande solidarité canadienne.

*  *  *

LA SANTÉ

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre dit que ça lui prend des consensus pour bouger.

Tout le monde au Canada lui demande de prendre une partie des surplus budgétaires et de remettre l'argent aux provinces pour la santé, parce que c'est la priorité partout.

S'il est sérieux, pourquoi ne bouge-t-il pas?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai fait un discours avant-hier à Toronto où j'ai encore répété que la priorité du gouvernement dans le prochain budget, c'est d'investir dans la santé.

Évidemment, le Bloc québécois n'est pas intéressé par la réalité. Mais s'il y a un grand consensus au Québec, exprimé lors de deux référendums, c'est que les Québécois veulent demeurer Canadiens.

*  *  *

[Traduction]

LA PAUVRETÉ

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, à une conférence ce matin, le ministre des Ressources humaines a raconté l'histoire d'un mendiant qui hésitait à accepter l'argent d'un jeune père, au cas où son enfant ait besoin de cet argent demain. Opposer les besoins d'un pauvre homme désespéré à ceux d'un enfant équivaut à une faillite morale. Or, c'est exactement ce que l'histoire du ministre illustre.

Le ministre ne peut-il pas comprendre que cette approche ne réglera jamais le problème de la pauvreté grandissante dans notre pays?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je suis désolé que le chef du NPD ait été mal informé au sujet d'une anecdote que j'ai relatée ce matin, à une très importante conférence sur les enfants.

J'expliquais que, dans notre pays, le gouvernement et les Canadiens veulent accorder la priorité aux enfants. Voici ce qui est arrivé. En passant devant un hôtel, un de mes adjoints qui avait un enfant dans une poussette a effectivement rencontré un mendiant. Celui-ci, en voyant l'enfant, a dit à mon adjoint qu'il ne voulait pas de son argent parce qu'il serait plus utile pour son enfant.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le gouvernement actuel a réduit à la pauvreté 500 000 enfants de plus, et le ministre s'enorgueillit de ce bilan.

Le programme libéral concernant la prestation fiscale pour enfants exclut bon nombre des enfants les plus démunis de notre pays. Le ministre le sait pertinemment, parce qu'il a conçu le programme ainsi.

Que faudrait-il pour persuader le ministre de bonifier le programme, de manière à ce que tous les enfants pauvres en bénéficient?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, la prestation fiscale nationale pour enfants, dans laquelle le gouvernement investira annuellement 1,7 milliard de dollars à compter de l'an prochain, a été conçue par le gouvernement fédéral actuel et par ceux des provinces, y compris les deux gouvernements néo-démocrates de la Colombie-Britannique et de la Saskatchewan.

Cette prestation fiscale nationale pour enfants aidera les parents à renoncer à l'aide sociale pour accéder au marché du travail sans pénaliser leurs enfants, ce qui constitue actuellement un problème au Canada. Voilà comment nous pouvons aider les enfants de notre pays.

*  *  *

L'ENQUÊTE SUR LE SOMMET DE L'APEC

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, il paraît que la GRC a recommandé que des accusations soient portées contre 11 policiers qui s'en sont pris à des manifestants lors du sommet de l'APEC, l'année dernière.

Si la GRC a estimé que des accusations devraient être portées contre ses agents, qui a ordonné à la Couronne de ne pas agir? Si la Couronne peut ordonner que des accusations soient portées lorsque des allégations sont sans fondement, comme dans l'affaire des Airbus, pourquoi des accusations n'ont-elles pas été portées dans ce cas-ci?

L'affaire se corse. Le solliciteur général nous dira-t-il ce qu'il va faire?

L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la décision de porter ou non des accusations relevait du ministère du Solliciteur général de la Colombie-Britannique.

 

. 1430 + -

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, nous avons des preuves de l'ingérence politique aux plus hauts niveaux du gouvernement. D'abord, ce fut l'affaire des Airbus, puis celle de la Somalie et, enfin, celle de l'APEC. Jusqu'où ira le gouvernement pour empêcher que la vérité sorte?

Les Canadiens veulent un gouvernement qui soit honnête et responsable, et non pas un premier ministre cherchant toujours à parvenir à ses fins pour protéger ses intérêts partisans.

Je demande au premier ministre de faire preuve de courage et d'intégrité et d'en finir avec cette mascarade. Mettra-t-il l'affaire de l'APEC entre les mains d'une commission d'enquête indépendante ou a-t-il peur de ce qui pourrait être dévoilé?

L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le Parlement a déjà décidé du moyen que les Canadiens doivent employer pour se plaindre de la GRC. Ils doivent le faire par le truchement de la Commission des plaintes du public contre la GRC, établie en 1988, dont le bilan est excellent. Elle est respectée dans le monde entier et elle est maintenant à l'oeuvre. Elle est maître de ses travaux. Le gouvernement respecte la décision du Parlement d'instituer cette commission.

*  *  *

[Français]

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre dit que ça lui prend des consensus pour bouger.

Il y a un consensus national dans le dossier de l'assurance-emploi. Toutes les provinces, tous les partis d'opposition, tout le monde lui demande de ne pas toucher aux surplus de l'assurance-emploi.

S'il est sérieux, pourquoi ne bouge-t-il pas?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, notre gouvernement a toujours adopté une attitude extrêmement responsable par rapport aux finances publiques de ce pays.

Nous avons également une attitude responsable à l'endroit des fonds de l'assurance-emploi, grâce à une gestion un peu plus intéressante que celle qui a été faite dans notre pays jusqu'à ce que nous prenions le pouvoir.

Nous sommes en effet en position d'avoir un surplus, alors qu'on était habitués à voir la caisse d'assurance-emploi en déficit. L'opposition devrait se lever et nous féliciter d'être capables d'avoir des surplus, ce qui stabilise nos finances.

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre dit que ça lui prend des consensus pour bouger.

Tout le monde au Canada lui demande de diminuer les cotisations à l'assurance-emploi et d'augmenter la protection des chômeurs et chômeuses avec les surplus du régime.

S'il est sérieux, pourquoi ne bouge-t-il pas?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, au moment où nous avons pris le pouvoir, la cotisation à l'assurance-emploi devait monter à 3,30 $. Nous l'avons baissée à chaque année consécutive. Nous l'avons baissée de 20c. encore l'année dernière. Elle se situe à 2,70 $ maintenant. Nous avons donc une tendance à la baisser constamment, ce qui est une excellente chose.

Nous avons été capables, en plus de cela, pour ceux qui n'étaient pas couverts par le système d'assurance-emploi, de mettre sur pied la Stratégie emploi jeunesse pour aider les jeunes à intégrer le marché du travail.

Nous avons mis 300 millions de dollars dans le Fonds transitoire de création d'emplois, tout en baissant...

Le Président: L'honorable député de Skeena a la parole.

*  *  *

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, beaucoup d'autochtones de la base vivant dans la réserve exigent des vérifications judiciaires étant donné que des dizaines de millions de dollars appartenant à la bande sont non comptabilisés.

Selon des renseignements obtenus par le Parti réformiste conformément à la Loi sur l'accès à l'information, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien refuse de faire enquête à moins que les chefs de bande le demandent. C'est un conflit d'intérêts ridicule.

La ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien reconnaîtra-t-elle qu'il est absurde de croire qu'un chef ou un conseil vont eux-mêmes demander de faire l'objet d'une enquête?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, à mon avis, le député est en train de clarifier le genre de relations que le Parti réformiste entretiendrait avec les premières nations du Canada s'il en avait la chance. Les réformistes s'assureraient d'amputer de un milliard de dollars les services et les programmes qui s'adressent directement aux premières nations et de faire que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien n'utilise rien d'autre que des mécanismes de contrôle comme des vérifications judiciaires.

Nous avons appris qu'il faut aller au-delà de ces relations de contrôle et construire un partenariat avec les premières nations.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, je tiens à citer ici ces documents obtenus conformément à la Loi sur l'accès à l'information: «Les vérifications judiciaires sont extrêmement coûteuses en temps et en argent, et il ne suffit pas pour en mener une que quelques membres de bande en colère le demandent.»

 

. 1435 + -

Certes, une libérale de la ville comme la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien peut comprendre que des gens qui meurent de froid et de faim dans des cabanes en papier goudronné sont...

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Le député de Skeena.

M. Mike Scott: Monsieur le Président, la ministre peut certes comprendre que des gens qui meurent de froid et de faim dans des cabanes en papier goudronné sont sérieux lorsqu'ils demandent des vérifications judiciaires.

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ai moi-même grandi sur une ferme. Tous les agriculteurs comme l'ensemble des Canadiens comprennent que pour être efficaces tous les gouvernements doivent rendre des comptes et être transparents. Les premières nations le savent aussi.

C'est pourquoi nous avons créé, en partenariat avec le gouvernement, un programme d'examen des pratiques de gestion de chacune des premières nations au Canada. Nous intervenons au palier local. Au niveau régional, les chefs, notamment ceux de l'Alberta, se réunissent pour définir des normes minimales de reddition de comptes relatives à leur travail au sein de leurs communautés respectives. Au niveau national...

Le Président: Le député de Wild Rose.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, la ministre donne des réponses ridicules. J'effectue des visites dans les réserves de ma circonscription et en Alberta depuis maintenant cinq ans. Les gens vivent dans de vieux autobus délabrés. Ils s'assoient sur des caisses de pommes. Rien ne se passe parce que la ministre refuse de parler aux gens. Quand va-t-elle parler aux personnes ordinaires, s'informer de leurs problèmes et proposer des solutions?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse que le député se rende dans les communautés des premières nations. Fort de cette expérience, il pourra peut-être expliquer à son parti et à son chef pourquoi il serait absolument impensable de réduire d'un milliard de dollars les programmes et services fournis aux premières nations, qui comprennent les logements et les écoles.

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, je réduirais les dépenses d'un milliard de dollars, mais ces compressions toucheraient l'appareil bureaucratique de la ministre...

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Le député de Wild Rose.

M. Myron Thompson: Monsieur le Président, après avoir économisé un milliard sur la bureaucratie, nous remettrions cet argent à ceux qui en ont le plus besoin.

M. Jerry Fontaine est le chef de la réserve Sagkeeng. Cette réserve a accumulé une dette de 11 millions de dollars. Elle a commandé la construction d'une école de 12 millions de dollars, mais n'a pas l'argent nécessaire. Les salaires des chefs et des membres du conseil coûtent plus d'un demi-million de dollars par année à cette réserve. Pourquoi la ministre n'ordonne-t-elle pas la tenue d'une vérification judiciaire dans cette réserve? Ses membres le méritent bien.

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à préciser que 90 p. 100 des fonds qui proviennent de mon ministère sont affectés aux programmes et services des premières nations. Cela dit, il faut bien comprendre ce que propose le Parti réformiste : il veut réduire le financement, avoir des vérifications judiciaires et dresser les membres d'une communauté les uns contre les autres. Je n'en ferai rien.

*  *  *

[Français]

L'HARMONISATION DE LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre dit que ça lui prend des consensus pour bouger. À St-Andrews, tous les premiers ministres des provinces lui ont demandé de réviser son programme d'harmonisation de la TPS qui prive indûment le Québec de deux milliards de dollars de compensation. Même Jean Charest pense que le Québec s'est fait avoir dans le dossier.

Si le premier ministre est sérieux, pourquoi ne bouge-t-il pas?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, dans les circonstances telles que décrites, le gouvernement donne une compensation lorsqu'il y a eu une perte. Dans le cas du Québec, il n'y a pas eu de perte. Nous avons compensé les provinces qui ont subi des pertes, mais celles qui n'en ont pas subi n'ont pas eu de compensation.

*  *  *

 

. 1440 + -

LA FONDATION DES BOURSES DU MILLÉNAIRE

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre dit que ça lui prend des consensus pour bouger. Au Québec, il y a un solide consensus contre les bourses du millénaire. Au Québec, on veut un droit de retrait avec pleine compensation dans ce dossier.

Si le premier ministre est sérieux, qu'attend-il pour bouger?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le plus gros des consensus au Québec, c'est qu'il n'y ait pas d'autre référendum.

Le 14 mai 1998, à l'Assemblée nationale, une motion a été adoptée à l'unanimité, proposant une façon de travailler, et le premier ministre a répondu au premier ministre Bouchard et je cite: «La Fondation a toute la souplesse désirée et toutes les obligations nécessaires pour lui permettre de conclure les ententes spécifiques avec le gouvernement du Québec et ce, dans l'esprit de la motion du 14 mai que votre gouvernement a lui-même entérinée.» Voilà le consensus.

*  *  *

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, on a rapporté des cas d'enfants vivant dans la pauvreté, d'irrégularités dans les comptes de certaines bandes et de chefs de bandes vivant dans le grand luxe. Nous avons réclamé des vérifications judiciaires sur les réserves dès le départ.

Je vous cite les paroles d'une personne de la réserve Waterhen, en Saskatchewan: «Nous ne passerons pas sous silence le problème persistant de mauvaise gestion qui pénalise nos enfants et les prochaines générations.» Ces paroles ont été prononcées il y a plus d'un an.

Quand la ministre cessera-t-elle de faire comme si le problème n'existait pas? Quand prendra-t-elle cette affaire au sérieux et annoncera-t-elle une vérification judiciaire?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je prends vraiment très au sérieux les défis auxquels sont confrontés les peuples autochtones du Canada.

Je peux affirmer que les solutions recommandées par l'opposition ne donneront aucun résultat. Ce sont des solutions que nous tentons d'appliquer depuis 100 ans, mais les défis restent toujours aussi grands.

Le gouvernement estime que, pour trouver des solutions durables, nous devons améliorer les conditions de vie des autochtones et nous devons travailler en collaboration. Nous devons adopter une démarche planifiée. Nous devons modifier les rapports que nous avons eus dans le passé en permettant aux gens d'acquérir des compétences et en aidant les collectivités à devenir des entités autonomes.

M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, depuis que cette ministre est responsable du portefeuille, nous n'avons vu que des problèmes. Nous réclamons une vérification judiciaire de toute la situation. Dans la réserve Waterhen, en Saskatchewan, des irrégularités dans la comptabilité ont été découvertes depuis plus d'un an et le ministère n'a pas encore réagi.

Quand la ministre renoncera-t-elle à son partenariat avec les chefs pour établir un partenariat avec la population, avec les autochtones de la base, qui réclament une vérification juridique?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je vais vous donner un exemple du fonctionnement de ce partenariat.

On réclame une vérification juridique qui, nous le savons, ne contribuera pas au développement durable...

Des voix: Oh, oh!

Le Président: La ministre des Affaires indiennes.

L'hon. Jane Stewart: Monsieur le Président, la première nation sahtu, pour prendre cet exemple, a de véritables défis à relever. Le chef et le conseil travaillent en collaboration avec les membres de leur collectivité. Ils ont mis sur pied une commission d'enquête qui a présenté des rapports au chef et au conseil. Ces rapports n'ont pas été préparés par le chef et le conseil. Les membres de la bande, conjointement avec leurs dirigeants, mettent en oeuvre les recommandations formulées pour assurer leur développement durable.

*  *  *

[Français]

LA TREMBLANTE DU MOUTON

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture vient de mettre en place un programme qui reconnaît que la perte d'une tête de bétail peut atteindre 600 $ pour un producteur ovin aux prises avec la tremblante du mouton.

Puisque le montant de la perte est maintenant reconnu par le ministre, pourquoi refuse-t-il d'être juste avec tous les producteurs et ne permet-il pas la rétroactivité de la compensation, ce qui est possible via un programme ad hoc, comme il l'a déjà fait dans des situations de crise pour les céréaliers de l'Ouest?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà signalé à la députée que la rétroactivité était illégale, selon la législation canadienne. Nous ne voulons pas participer précisément pour cette raison.

 

. 1445 + -

Nous avons versé 2 millions de dollars au cours des deux ou trois dernières années à des éleveurs de mouton dont le cheptel a malheureusement été touché. Nous avons doublé le montant maximum d'indemnisation hier.

Je rappelle de nouveau à la députée que la rétroactivité est illégale dans l'état actuel de la législation. Nous injectons également 1 million de dollars dans le dépistage des animaux malades. Nous dépensons près de 400 000 $ pour la recherche sur cette maladie qui affecte les moutons au Canada.

La Société du crédit agricole a mis en place un programme de report de prêt de 24 mois. Ces trois ou quatre dernières années, nous avons versé plus de 200 millions de dollars au Québec, de façon équitable, pour aider les agriculteurs qui sont aux prises avec des problèmes de revenu agricole semblables.

*  *  *

LE CENTRE NATIONAL DES ARTS

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine canadien.

Le Centre national des Arts est une institution culturelle très importante au Canada. Compte tenu des changements apportés dernièrement, la ministre pourrait-elle expliquer à la Chambre comment elle entend assurer le succès permanent du CNA?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée et les gens d'en face pour leurs questions sur les changements apportés récemment au CNA.

Je voudrais souligner que le Centre national des Arts est une institution culturelle importante non seulement pour la région de Hull-Ottawa, mais aussi pour l'ensemble du Canada. Je crois que, si nous respectons l'indépendance du conseil d'administration et observons le principe selon lequel le gouvernement doit s'abstenir de tirer les ficelles en catimini, le Centre national des Arts redeviendra un haut lieu de la culture canadienne pour tous les Canadiens et pour le monde entier.

*  *  *

L'ENVIRONNEMENT

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, il serait préférable d'éliminer les pauses publicitaires libérales pendant la période des questions.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Chers collègues, les questions posées à la Chambre ont toutes la même valeur. Le député de Lethbridge.

M. Rick Casson (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, je vais passer tout de suite à ma question. Cela fait presque un an que le gouvernement est revenu de Kyoto avec une position sur le changement climatique. Il ne reste plus qu'une semaine avant la conférence de Buenos Aires. La ministre dit être prête, mais le commissaire à l'environnement dit autre chose. Selon ce dernier, les Canadiens n'ont pas encore vu d'accord écrit avec les autres ordres de gouvernement. Ils n'ont vu aucun plan de mise en oeuvre et ils sont en droit de conclure que le gouvernement fait preuve de bien peu de leadership dans ce dossier. Dans ce cas, pourquoi aller à Buenos Aires? Est-ce pour y présenter un plan ou simplement pour prendre des vacances au soleil?

L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement collabore avec tous ses partenaires d'un bout à l'autre du pays, tant avec les provinces qu'avec les territoires.

Le ministre des Ressources naturelles et moi-même avons rencontré nos homologues de l'Énergie et de l'Environnement à Halifax, il y a deux ou trois semaines. Avec 450 spécialistes de tous les coins du pays, nous cherchons à mettre en place une stratégie de mise en oeuvre. De plus, nous avons annoncé à Halifax de nouvelles mesures faisant appel à la participation des Canadiens ordinaires, parce que nous savons que ce dossier les préoccupe et qu'ils veulent fixer leurs propres objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre afin que le Canada atteigne son objectif.

M. Bill Gilmour (Nanaïmo—Alberni, Réf.): Monsieur le Président, mon collègue a demandé quel était le plan du Canada en vue des négociations de Buenos Aires. La semaine prochaine, 160 pays se réuniront à la table de négociation pour revoir le protocole de Kyoto. Toutefois, selon les fonctionnaires des Affaires extérieures et d'Environnement Canada qui ont témoigné devant le comité, le Canada n'a pas encore de plan.

 

. 1450 + -

Nous devons participer à ces négociations la semaine prochaine. La ministre peut-elle nous dire maintenant quel est le plan du Canada en vue des négociations qui auront lieu à Buenos Aires la semaine prochaine?

L'hon. Christine Stewart (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, l'an dernier, à Kyoto, le Canada et les autres pays du monde industrialisé se sont fixé un objectif important.

Lorsque nous irons à Buenos Aires la semaine prochaine, nous discuterons de la mise en oeuvre d'un plan d'action à l'échelle internationale. Nous voulons nous assurer que nous avons une définition acceptable pour tous des notions comme l'échange de droits d'émission, le mécanisme de développement propre, la mise en oeuvre conjointe et les puits. Nous ferons preuve de leadership et travaillerons très activement à l'obtention d'un consensus sur les échéanciers.

*  *  *

LES POLITIQUES SOCIALES

Mme Michelle Dockrill (Bras d'Or—Cape Breton, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Selon des données parues la semaine dernière, le nombre de Canadiens de la classe moyenne a diminué de 16% au cours des deux dernières décennies. Les 10% les plus riches de la population gagnent maintenant 314 fois plus que les 10% les plus pauvres. Cela n'est pas étonnant.

Depuis le début de son mandat, le gouvernement a sabré dans les programmes sociaux, rompu ses promesses sur les garderies et éviscéré l'assurance-chômage.

Quand le gouvernement cessera-t-il d'adopter des mesures qui continuent d'élargir le fossé entre les riches et les pauvres?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, les chiffres démontrant l'élargissement des écarts entre les riches et les pauvres préoccupent évidemment tous les pays industrialisés.

Entre 1989 et 1992, le Canada a subi une grave récession qui a certainement marqué de nombreuses familles canadiennes. Nous sommes en train de remédier à cela. Depuis le début de notre mandat, nous avons réussi à éliminer le déficit et également à introduire une prestation fiscale pour enfants que nous avons bonifiée de 1,8 milliard de dollars.

Nous avons aussi adopté une série de mesures pour aider les mères à retourner à l'école. Nous avons adopté d'autres mesures pour aider les petits salariés. Nous avons aussi agi dans le domaine de l'éducation. D'ailleurs...

Le Président: La députée de Dartmouth.

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Monsieur le Président, je ne crois pas que le ministre comprenne la gravité de la situation.

Des enfants dorment dans des abris surpeuplés, sur des grilles de ventilation et dans des voitures abandonnées, et il commence à faire froid. Aujourd'hui, la Ville de Toronto a adopté à 53 contre 1 une motion demandant que le gouvernement fédéral déclare que la situation des sans-abri est une catastrophe nationale.

Le gouvernement fédéral prendra-t-il des mesures d'urgence et emploiera-t-il maintenant ses ressources, soit ses manèges militaires et ses espaces à bureau excédentaires, pour abriter les 200 000 sans-abri de tout le Canada avant que l'hiver ne s'installe?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, en 1997, pour la première fois en plus de 15 ans, le niveau de vie des Canadiens a commencé à s'améliorer. Il avait baissé pendant les 15 années précédentes.

Cela est très important. Ce n'est qu'en améliorant le niveau de vie des Canadiens, en redonnant du travail à un plus grand nombre de Canadiens—à plus de un million depuis que nous avons pris le pouvoir—, en perfectionnant les Canadiens, en comprenant que le gouvernement ne doit pas viser à aider simplement les riches, comme le ferait le Parti réformiste, mais aussi les moins fortunés, que nous pourrons résoudre nos véritables et graves problèmes.

*  *  *

L'AGRICULTURE

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, le secteur agricole est en crise.

Les agriculteurs vendent leurs produits à perte. Leur revenu a baissé de 55 p. 100. L'agriculture est une industrie de 22 milliards de dollars, et le ministre se tourne les pouces pendant que les agriculteurs font faillite.

Les États-Unis viennent d'annoncer qu'ils consacreront 6 milliards de plus à leurs programmes de soutien. Depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement libéral a réduit de 60 p. 100 son soutien au revenu agricole et l'OCDE le classe à l'avant-dernier rang.

Il n'y a pas de temps à perdre en réunions. Il faut maintenant agir. Quel est le plan du ministre et quel montant prévoit-il?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je sais gré au député de son inquiétude, mais j'ai une question à lui poser.

Pourquoi a-t-il dit, dans le programme électoral de 1997 du Parti conservateur, que son parti, s'il était élu, poursuivrait la pratique du recouvrement des coûts dans les secteurs de l'inspection des aliments et de la surveillance de la réglementation, accélérerait l'élimination des subventions et retrancherait plus de 600 millions de dollars du secteur agricole et agroalimentaire?

 

. 1455 + -

Je rencontre les représentants du secteur afin de trouver avec les producteurs et les gouvernements provinciaux une solution à ce grave problème. Je n'adopte pas l'approche que prendrait le député.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, d'après sa réponse, le ministre n'est manifestement pas au courant de la grave crise que connaît actuellement le secteur agricole. Il continue de se cacher derrière le CSRN, mais le CSRN n'est pas suffisant. Le ministre devrait peut-être prendre des leçons du ministre des Pêches, qui semble trouver des fonds pour le secteur de la pêche.

Lorsqu'il s'agit de l'agriculture, les coffres sont vides. Est-ce parce que le ministre de l'Agriculture n'a aucune volonté politique?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, j'estime que nous faisons preuve de volonté politique, une volonté qui ne se traduit pas par des compressions. Nous avons un des régimes de sécurité les plus solides au monde. Nous sommes en train de le revoir avec la collaboration de tous les protagonistes du secteur agricole. Nous continuerons en ce sens pour renforcer davantage notre secteur agroalimentaire qui, j'en conviens, éprouve de graves problèmes.

J'espère que le député nous offrira son aide pour que nous puissions surmonter ces problèmes dans l'intérêt des agriculteurs canadiens.

*  *  *

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Aleksander Nikitin, ingénieur en sciences nucléaires et ancien capitaine de la marine russe, risque d'être exécuté. Son crime est de s'être servi de renseignements pour attirer l'attention sur le grave danger que représente pour l'environnement la flotte vieillissante des sous-marins nucléaires russes.

Que fait le gouvernement canadien pour que cet écologiste russe soit exonéré?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, nous partageons l'inquiétude du député. Dans le passé, le premier ministre a abordé la question directement avec son homologue. J'ai demandé au personnel de notre ambassade d'envoyer des représentants au procès, car nous avons des doutes sur le respect des garanties procédurales et légales. Je dois rencontrer le ministre russe des Affaires étrangères dans une quinzaine de jours et j'ai l'intention de lui parler de cette affaire.

*  *  *

LE KOSOVO

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens se préoccupent de la crise humanitaire qui sévit au Kosovo. Ils craignent aussi la possibilité que des gardiens de la paix soient pris en otage, surtout s'ils sont envoyés sans armes. Nous nous souvenons tous de ce qui est survenu en Bosnie où 55 Canadiens au total ont été pris en otages. Qui ne se souvient pas d'avoir vu Patrick Riechner enchaîné à un poteau et servant de bouclier humain? Les Canadiens ne veulent pas que pareille situation se répète.

Pourquoi le ministre envoie-t-il des Canadiens sans armes dans cette zone de combats?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait fort bien, la semaine dernière, à la réunion de l'OSCE, nous avons discuté avec l'ambassadeur Walker, qui dirige l'équipe de vérification. Plusieurs choses sont en place.

D'abord, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté une résolution autorisant des mesures de protection d'urgence pour l'équipe de vérification. Ensuite, l'OTAN maintient ses ordres d'intervention, de sorte qu'elle est prête à agir. En troisième lieu, une entente a été conclue avec le gouvernement Milosevic et, enfin, nous sommes également bien placés pour surveiller le respect des lignes directrices établies par l'OTAN.

Dans les circonstances, nous pensons qu'il est important pour le Canada de contribuer à...

Le Président: La parole est au député de Trois-Rivières.

*  *  *

[Français]

LE DÉGLAÇAGE DES PORTS

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans.

Le problème du déglaçage des ports de l'est n'en est pas un de coûts et de pourcentages, mais bien de répartition de la facture entre les régions. C'est ça, le vrai problème.

Le ministre trouve-t-il normal que 80 p. 100 du recouvrement des coûts du déglaçage soient imposés aux utilisateurs des ports québécois, alors qu'ils n'utilisent que 50 p. 100 des services de tout l'est du Canada?

L'hon. David Anderson (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le barème des taux a été établi par un comité de dix personnes, dont sept venaient de la région laurentienne, donc, du Québec et de l'Ontario.

Si le député pense vraiment que ce n'est pas juste envers les navires qui utilisent les ports de la région des Maritimes, il est étonnant que les membres du comité qui venaient de cette région aient établi un tel barème.

*  *  *

 

. 1500 + -

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Monsieur le Président, en janvier, la ministre des Affaires autochtones a rendu public un document intitulé Rassembler nos forces, dans lequel il n'est toutefois pas fait mention de la sécurité alimentaire dans le Nord.

En septembre, un rapport du Manitoba a proposé des recommandations afin de résoudre le problème du coût exorbitant de l'alimentation pour les premières nations.

Les familles et les enfants autochtones ne devraient pas avoir une existence semblable à celle des habitants des pays du tiers monde, ni souffrir de la pauvreté et de la faim. Je suis certaine que la ministre veut faire l'impossible pour nourrir ces familles. Que fera-t-elle pour s'assurer que toutes s'alimentent bien cet hiver?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme la députée l'a souligné, c'est un défi de veiller à ce que les gens du Nord aient accès à de la nourriture de bonne qualité.

Le transport de denrées périssables dans le Nord coûte extrêmement cher. Voilà pourquoi il est important que le gouvernement fédéral et les administrations territoriales conjuguent leurs efforts afin de s'assurer que des légumes frais et des denrées périssables parviennent aux localités du Nord.

*  *  *

LA SANTÉ

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, de 25 à 30 Canadiens meurent chaque année de la maladie de Creutzfeldt-Jakob, connue aussi sous le nom de maladie de la vache folle.

Il y a trois ans, la Croix-Rouge canadienne a ordonné le plus important retrait de produits sanguins de l'histoire de notre pays à cause de la contamination par la MCJ.

Le ministre fera-t-il maintenant ce qu'ont fait les Britanniques et ce qu'a fait la société Bayer, soit interdire l'utilisation de plasma britannique? Le temps presse. Le ministre a l'occasion de faire quelque chose. Agira-t-il dès maintenant?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit au député la semaine dernière ou la semaine d'avant, nous avons reçu le rapport Bayer. Nous sommes en train de l'étudier.

Nous pouvons compter non seulement sur les scientifiques de Santé Canada mais aussi sur ceux du Conseil de la sûreté du sang, un organisme indépendant qui a pour mission de nous conseiller. Nous recueillons les avis et prenons les décisions qui s'imposent.



AFFAIRES COURANTES

 

. 1505 + -

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8), j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 12 pétitions.

*  *  *

[Traduction]

COMITÉS DE LA CHAMBRE

JUSTICE ET DROITS DE LA PERSONNE

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter dans les deux langues officielles le quatorzième rapport du Comité permanent de la justice et des droits de la personne intitulé Les droits des victimes—Participer sans entraver.

Conformément à l'article 108(2) du Règlement, le comité a étudié le rôle des victimes au sein du système de justice pénale. Le comité et celui qui l'a précédé ont tenu des audiences et un Forum national de deux jours où les témoins et les participants représentaient l'ensemble de ceux qui sont touchés par le système de justice pénale, soit en y ayant un intérêt ou en y jouant un rôle.

Au nom de tous mes collègues membres du comité, je désire remercier la ministre et son personnel ainsi que le ministère de la Justice. Nous voulons surtout remercier le personnel du comité, y compris les trois greffiers qui se sont partagé le travail au cours de deux législatures, soit Richard Dupuis, Luc Fortin et Roger Préfontaine.

Nous voulons également remercier notre analyste politique principal Philip Rosen et la recherchiste Marilyn Pilon pour leur travail exceptionnel. Nous leur sommes reconnaissants de leur assiduité au travail, de leur professionnalisme et leur quête de l'excellence.

Fait sans précédent, ce rapport fait officiellement et officieusement l'unanimité auprès des membres de notre comité et des députés de tous les partis. Le souvenir de ce bel esprit de collaboration nous aidera sûrement à essuyer les prochaines tempêtes qui secoueront sûrement notre comité. Je suis très fière de déposer ce rapport.

DÉFENSE NATIONALE ET ANCIENS COMBATTANTS

M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport du Comité permanent de la Défense nationale et des anciens combattants qui traite de la qualité de vie du personnel des Forces canadiennes.

Ce rapport est intitulé: «Un engagement renouvelé—Un plan d'action pour l'amélioration de la qualité de la vie dans les Forces canadiennes».

Je voudrais profiter de l'occasion pour exprimer mes remerciements à tous les membres du comité pour leur travail et leur collaboration pendant toute la durée de cette étude intensive.

Puis-je, en tant que président de ce comité et au nom de tous mes collèges, présenter mes plus sincères remerciements au greffier, aux recherchistes et à tous les membres du personnel qui, directement ou indirectement, ont contribué à la production de ce rapport.

Notre comité espère que ses recommandations pourront être mises en oeuvre le plus rapidement possible afin d'améliorer la qualité de vie des membres du personnel des Forces canadiennes et de leurs familles.

[Français]

M. René Laurin: Monsieur le Président, à la suite du dépôt de ce rapport, je veux souligner à la Chambre, et j'espère que le président du Comité ne s'y objectera pas, qu'il manquait une partie du texte, approuvé hier, à la recommandation 75. Étant donné que nous n'avons pas eu le temps de retourner en comité pour approuver le rapport final, je voudrais m'assurer que la partie manquante apparaîtra dans le document officiel.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Malheureusement, le rapport doit venir de l'opposition officielle.

M. Bob Speller: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je me demandais si je ne pourrais pas avoir le consentement unanime de la Chambre pour revenir aux rapports des délégations interparlementaires.

Le président suppléant (M. McClelland): Y a-t-il consentement unanime pour revenir aux rapports des délégations interparlementaires?

Des voix: D'accord.

*  *  *

 

. 1510 + -

LES DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

M. Bob Speller (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 34 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre le rapport de la section canadienne de l'Association parlementaire du Commonwealth concernant la visite de la section britannique de l'APC, du 6 au 22 mai 1998; la 23e conférence des Caraïbes et des Amériques, région atlantique, tenue à Kingston, en Jamaïque, du 20 au 25 juillet 1998 et la 37e conférence de la région canadienne, tenue à Toronto du 18 au 24 juillet 1998.

*  *  *

LE CODE CRIMINEL

 

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-450, Loi modifiant le Code criminel (cautionnement en cas d'agression armée ou de harcèlement criminel).

—Monsieur le Président, vous savez sans doute qu'un bon nombre d'individus arrêtés après avoir commis des crimes de violence graves, et libérés sous caution, se sont empressés de récidiver.

Je suis heureux de présenter ce projet de loi d'initiative parlementaire qui ferait en sorte qu'une personne accusée d'une agression sexuelle armée, d'une agression sexuelle grave ou de harcèlement criminel et qui a été identifiée par la victime ou un témoin du crime ne puisse pas être libérée sous caution.

Il s'ensuivrait que l'accusé ne serait pas libéré à moins que l'accusation ne soit retirée ou qu'il ait été acquitté lors d'un procès.

Mon projet de loi vise donc à abroger le paragraphe 515.(2) qui autorise actuellement un juge d'une cour supérieure de juridiction criminelle à accorder, s'il le juge bon, un cautionnement à l'égard de ces infractions très graves.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

LA LOI SUR LE PARLEMENT DU CANADA

 

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-451, Loi modifiant la Loi sur le Parlement du Canada et la Loi électorale du Canada.

—Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je présente mon projet de loi qui vise à modifier la Loi sur le Parlement du Canada et la Loi électorale du Canada. Le projet de loi prévoit que les élections auraient lieu à date fixe, le troisième lundi d'octobre, tous les quatre ans.

Les députés réformistes sont les défenseurs de la responsabilisation en démocratie, et le projet de loi vise à rendre nos procédures plus démocratiques en mettant fin aux jeux de la politique et du favoritisme que permet le choix libre des dates d'élection.

J'exhorte tous les députés à appuyer mon projet de loi afin de rendre plus démocratique le processus électoral au Canada en prévoyant des élections à date fixe.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

LES INITIATIVES PARLEMENTAIRES

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, vous constaterez que la motion suivante recueille le consentement unanime:  

    Que, nonobstant tout article du Règlement ou toute pratique normale, le projet de loi C-303 sera classé sous le nom de M. Bellemare, plutôt que M. Bélanger, le projet de loi C-408 sera classé sous le nom de Mme Jennings, plutôt que M. Dromisky, le projet de loi C-409 sera inscrit au Feuilleton sous le nom de Mme Redman, plutôt que Mme Torsney, le projet de loi C-417 sera inscrit au Feuilleton sous le nom de M. Coderre, plutôt que M. Alcock, et les projets de loi C-254, C-282, C-368 et C-376 et les motions M-324 et M-325 seront réputés avoir été retirés.

Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre a entendu la motion. Consent-elle à ce que la motion soit proposée?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

*  *  *

 

. 1515 + -

PÉTITIONS

L'AVORTEMENT

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter à la Chambre. La première vise à demander au gouvernement de présenter, conformément à la Loi référendaire de 1992, un projet de loi prévoyant la tenue d'un référendum national obligatoire au moment des prochaines élections pour demander aux Canadiens s'ils sont ou non en faveur du financement, par le gouvernement, des avortements qui ne sont pas médicalement nécessaires.

LA FAMILLE

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition vise à demander au gouvernement du Canada de modifier l'article 7 de la Charte canadienne des droits et des libertés pour que soient reconnus: a) le droit fondamental des personnes de mener leur vie de famille librement sans ingérence indue de la part de l'État et b) le droit fondamental, la responsabilité et la liberté des parents de décider de l'éducation de leurs enfants, et d'exhorter les assemblées législatives des provinces à agir en ce sens.

LES PETITES EMBARCATIONS

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(1) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition au nom de mes électeurs des belles villes d'Owen Sound, Sauble Beach, Mar et Wiarton.

Les pétitionnaires demandent au gouvernement de réglementer l'utilisation des petites embarcations. La baie Georgienne est une magnifique région touristique, et la vitesse excessive des bateaux ainsi que leur bruit créent des problèmes. Les pétitionnaires aimeraient que nous réglementions leur usage.

LA JUSTICE

Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Monsieur le Président, je présente une pétition concernant la défense fondée sur la provocation. Les signataires expriment des préoccupations concernant la défense dont un accusé a bénéficié et qui a permis de réduire l'accusation de meurtre à une accusation d'homicide involontaire, défense qui se fondait sur une insulte ou sur l'insulte perçue, et non sur des gestes posés par la personne qui a été tuée.

Cette pétition tombe probablement à point, parce que la ministre de la Justice a publié un document de travail justement sur cette question. J'espère que la ministre tiendra compte de cette pétition.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition au nom d'un certain nombre de Canadiens venant notamment de ma circonscription, Mississauga-Sud. Elle porte sur les droits de la personne.

Les pétitionnaires voudraient attirer l'attention de la Chambre sur le fait que cette année marque le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme, que le Canada est reconnu sur la scène internationale comme un chef de file dans la défense des droits de la personne dans le monde entier et que malheureusement, dans de nombreux pays, notamment l'Indonésie, on continue de violer les droits de la personne.

Les pétitionnaires exhortent donc le Parlement et le Canada à intervenir, pour réclamer des mesures correctrices aux dirigeants des pays où les droits de la personne ne sont pas protégés et pour demander que soient traduits devant la justice les responsables de violations des droits de la personne universellement reconnus.

L'UNITÉ NATIONALE

M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens à la Chambre aujourd'hui en tant que l'humble serviteur de la circonscription d'Edmonton-Est et du Canada pour présenter fièrement une pétition.

Terre-Neuve s'est jointe à la Confédération en 1949 après s'être fièrement rangée du côté du Canada et de l'Angleterre durant les deux guerres mondiales. De nos jours, des Terre-Neuviens et des Québécois demandent ensemble, dans cette pétition, que le premier ministre et le Parlement du Canada déclarent que le Canada est indivisible et que notre nation ne peut être altérée que par l'ensemble de ses citoyens et le gouvernement national.

Je suis heureux que la Cour suprême du Canada ait récemment défendu cette position.

[Français]

LE PROJET DE LOI C-68

M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'aimerais déposer deux pétitions provenant de M. Normand Bélanger, de Matagami, et de M. Pierre Lessard, de Val-d'Or, concernant le projet de loi C-68 sur les armes à feu.

[Traduction]

LE CRTC

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais présenter aujourd'hui une pétition qui demande au Parlement de revoir le mandat du CRTC et de lui ordonner d'adopter une nouvelle politique encourageant la délivrance de licences à des radiodiffuseurs professant une religion unique.

LE KOSOVO

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je voudrais présenter aujourd'hui une pétition certifiée conforme qui m'a été remise à l'occasion de la 53e journée serbe qui a eu lieu dans ma circonscription, Niagara Falls.

Les pétitionnaires dont bon nombre viennent de Niagara Falls, demandent à la Chambre d'étudier très attentivement la situation au Kosovo, à l'heure actuelle.

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui une pétition, conformément à l'article 36 du Règlement, au nom d'un grand nombre d'électeurs de ma circonscription, Kamloops, Thompson and Highland Valleys, qui s'inquiètent de l'augmentation des cotisations au Régime de pensions du Canada et des répercussions que cela va avoir, surtout pour les chefs de petites entreprises et les travailleurs autonomes.

Nous vivons des moments cruciaux sur le plan économique et les pétitionnaires ont le sentiment que ces coûts supplémentaires pourraient poser de graves problèmes.

 

. 1520 + -

LA CRUAUTÉ ENVERS LES ANIMAUX

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, les pétitionnaires du centre de la Colombie-Britannique sont préoccupés par les peines imposées aux personnes qui font preuve de cruauté envers les animaux. Ils estiment que les juges ne prononcent pas des sentences appropriées et qu'il devrait y avoir un programme d'éducation quelconque pour les juges afin que ceux-ci traitent les personnes coupables de cruauté envers les animaux de façon plus appropriée.

L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, les pétitionnaires du centre de la Colombie-Britannique craignent que le gouvernement n'aie pas renoncé à l'AMI et qu'il essaie d'y donner suite auprès de l'OMC. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'imposer un moratoire sur toute ratification de l'AMI ou de ses dispositions par toute instance, que ce soit l'OMC ou autre.

L'AVORTEMENT

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter aujourd'hui. La première demande au Parlement d'appuyer une motion présentée par le député de Yorkton—Melville. Cette motion propose la tenue d'un référendum national exécutoire, aux prochaines élections, pour demander aux Canadiens s'ils sont ou non en faveur du financement, par le gouvernement fédéral, des avortements qui ne sont pas médicalement nécessaires.

LA FAMILLE

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition demande au Parlement d'appuyer une motion présentée par le député de Yorkton—Melville, qui propose que soient reconnus le droit fondamental des personnes de mener leur vie de famille librement sans ingérence indue de la part de l'État et le droit fondamental, la responsabilité et la liberté des parents de décider de l'éducation de leurs enfants, et que nous exhortions les assemblées législatives des provinces à agir en ce sens.

L'ÉQUITÉ SALARIALE

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, la troisième et dernière pétition concerne l'appel de la décision rendue le 29 juillet 1998 par le Tribunal canadien des droits de la personne, qui accorde un salaire égal pour un travail de valeur égale. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'intervenir afin que le gouvernement retire son appel et applique sans tarder la décision du Tribunal canadien des droits de la personne.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, de nombreux Canadiens qui ont signé cette pétition exercent des pressions auprès du gouvernement pour qu'il reconnaisse que la situation des droits de la personne se détériore dans la République islamique d'Iran. Or, le gouvernement canadien juge l'Iran comme un pays sûr et continue d'y extrader des personnes. Les pétitionnaires estiment que l'Iran ne devrait plus être reconnu comme un pays sûr et que le gouvernement canadien devrait cesser d'y extrader des personnes.

*  *  *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, on répondra aujourd'hui à la question no 129. .[Texte]

Question no 129—M. Lee Morrison:

    À combien s'élève les recettes triées dans chaque province de la taxe fédérale sur le carburant au cours de chaque exercice depuis 1993-1994?

L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre du Revenu national, Lib.): Les taxes fédérales sur les produits pétroliers sont imposées au niveau du manufacturier. La distribution des produits pétroliers aux diverses provinces et territoires se produit après l'imposition des taxes d'accise. Par conséquent, aucune information n'est disponible concernant les taxes perçues par province et territoire. De plus, les licenciés de l'accise peuvent produire une déclaration de taxes consolidée pour toute leur production canadienne plutôt que par province ou par site de production. C'est pourquoi Revenu Canada n'exige aucune donnée et ne fait aucune saisie de données par province des taxes fédérales d'accise sur les produits pétroliers.

Nous avons cependant joint à la présente le total des taxes d'accise sur les produits pétroliers perçus pour les années fiscales 1993-1994 à 1997-1998, ventilé par catégorie de revenu: la taxe sur les revenus pétroliers; la taxe d'accise sur l'essence pour véhicules moteur; et la taxe d'accise sur le carburant d'avion et sur le diesel.

   

[Traduction]

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, le 11 mars, j'ai fait inscrire au Feuilleton la question no Q-84. Je demandais dans cette question sur combien de crimes avec violence la GRC avait enquêté et combien parmi ces crimes comportaient l'utilisation d'armes à feu. Conformément au paragraphe 39 du Règlement, j'avais demandé une réponse par écrit dans les quarante-cinq jours. Cela fait 231 jours que mes électeurs attendent la réponse.

Le fait que le commissaire de la GRC m'ai écrit une lettre en date du 6 juillet dans laquelle il fait allusion à sa réponse à la question no Q-84 est intéressant. La GRC a fourni sa réponse au gouvernement il y a 114 jours. Quand le gouvernement va-t-il faire connaître à mes électeurs la réponse de la GRC à cette importante question? Pourquoi ne l'a-t-il pas fait alors qu'il a la réponse depuis 114 jours?

M. Peter Adams: Monsieur le Président, je prends note de l'impatience du député qui attend la réponse à la question no Q-84. Nous avons toujours répondu aux questions dans des délais satisfaisants. Nous avons déjà répondu à un pourcentage très élevé de questions. J'assure au député que je m'informerai de ce qu'il en est de la réponse à sa question.

Je demande que toutes les autres questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

*  *  *

 

. 1525 + -

DEMANDES DE DOCUMENTS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les motions portant production de documents soient reportées.

Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LE NUNAVUT

 

L'hon. Lucienne Robillard (au nom du ministre de la Justice) propose: Que le projet de loi C-57, Loi portant modification de la Loi sur le Nunavut relativement à la Cour de justice du Nunavut et modifiant diverses lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureuse de lancer le débat sur la motion de deuxième lecture du projet de loi C-57, Loi portant modification de la Loi sur le Nunavut relativement à la Cour de justice du Nunavut et modifiant diverses lois en conséquence.

Nous sommes aujourd'hui à une importante croisée des chemins dans l'histoire du Canada. Le 1er avril 1999, soit dans moins de six mois, le nouveau territoire du Nunavut sera créé. La création de ce nouveau territoire dans l'est de l'Arctique est la concrétisation d'un rêve depuis longtemps entretenu par les Inuit et nous attendons celle-ci avec impatience.

Nous, habitants du Nunavut, aurons notre propre gouvernement. En vertu du projet de loi C-57, nous aurons aussi notre propre système judiciaire.

Je tiens à souligner que la nouvelle structure judiciaire pour le Nunavut ne deviendra réalité que si le projet de loi C-57 est adopté par la Chambre des communes d'ici le 1er avril 1999. Par conséquent, j'ose espérer que les députés feront preuve de toute la diligence voulue relativement à cette mesure législative.

Le projet de loi original sur le Nunavut, adopté en 1993, prévoyait l'établissement d'un tribunal de première instance à deux paliers. Les députés se souviendront que, le printemps dernier, le projet de loi C-39, Loi modifiant la Loi sur le Nunavut et la Loi constitutionnelle de 1867, renfermait un certain nombre de modifications afin de clarifier le fonctionnement du tribunal de première instance à deux paliers pour le territoire du Nunavut. Si le projet de loi C-57 n'est pas adopté avant le 1er avril 1999, c'est l'option du tribunal de première instance à deux paliers qui sera retenue par défaut.

Au moment de la présentation du projet de loi C-39, la ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien avait dit qu'une autre mesure législative serait présentée plus tard dans l'année pour régler la question de la structure judiciaire. Le projet de loi C-57 est la mesure législative en question. C'est la dernière mesure législative importante que le gouvernement fédéral doit faire adopter relativement à l'établissement du Nunavut.

Le projet de loi C-57 propose des modifications à la Loi sur le Nunavut et à d'autres lois fédérales, dont le Code criminel, la Loi sur les juges et la Loi sur les jeunes contrevenants. Les modifications à la Loi sur le Nunavut visent à instituer un tribunal de première instance à palier unique, en juridiction supérieure, et à assurer une transition adéquate.

Le ministère de la Justice a travaillé en étroite collaboration avec les fonctionnaires du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et avec les représentants du Nunavut pour voir à ce que la mesure législative territoriale nécessaire soit adoptée avant le 1er avril 1999, et ce, afin d'établir un tribunal de première instance à palier unique au Nunavut.

Les modifications au Code criminel apportent les changements nécessaires pour permettre à un tribunal de première instance à palier unique de fonctionner dans un système de justice pénale conçu pour des tribunaux de première instance à deux paliers.

Les députés se demanderont peut-être ce qu'est exactement un tribunal de première instance à palier unique. Je vais répondre à cette question de la façon suivante. Le tribunal de première instance à palier unique regroupera en un seul tribunal toutes les fonctions et tous les pouvoirs qui, ailleurs au Canada, sont répartis entre deux paliers. Pour des raisons constitutionnelles, la Cour de justice du Nunavut sera constituée en juridiction supérieure. Ses juges seront nommés par le gouvernement fédéral.

 

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Pour les habitants du Nunavut, cela veut dire qu'un seul tribunal s'occupera de toutes les affaires de nature criminelle, civile et familiale. Ce tribunal s'appellera la Cour de justice du Nunavut.

Outre qu'il crée un système judiciaire nouveau et innovateur pour le Nunavut, le projet de loi C-57 est aussi important à un autre point de vue. C'est un autre exemple des résultats positifs que peut donner le fédéralisme coopératif. L'élaboration du projet de loi C-57 a exigé une grande coopération entre le gouvernement fédéral, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et les leaders politiques représentant le Nunavut. Le commissaire intérimaire du Nunavut et les parties à l'Accord politique sur le Nunavut ont officiellement demandé à la ministre de la Justice d'instituer un tribunal de première instance à palier unique pour le territoire du Nunavut. Le projet de loi C-57 fait suite à cette demande.

Je suis heureux de dire que tout au cours de l'élaboration de cette mesure législative, les fonctionnaires du ministère de la Justice ont travaillé en étroite collaboration avec les dirigeants et les milieux juridiques du Nord afin de veiller à ce qu'elle soit adaptée au besoin des habitants du Nunavut.

Avant d'expliquer en quoi ce système de tribunal à palier unique devrait améliorer les choses, il serait bon à mon avis de parler un peu de certains problèmes particuliers recensés par les habitants de l'Arctique de l'Est en ce qui concerne l'administration de la justice.

Les députés qui connaissent bien l'administration de la justice dans l'est de l'Arctique doivent savoir que, sauf pour Iqaluit, les équipes judiciaires doivent se rendre par avion dans les diverses localités de l'est de l'Arctique pour entendre les causes judiciaires.

Il existe actuellement deux circuits distincts, un pour la Cour territoriale et un pour la Cour suprême. Ni l'une ni l'autre de ces deux cours n'entendront toutes les causes se présentant dans une localité donnée.

En moyenne, chacune des cours visite une localité trois ou quatre fois seulement par année. Il peut donc en résulter des délais importants entre le dépôt d'une accusation et la détermination finale de la culpabilité ou de l'innocence, ou, dans les causes familiales, le règlement des problèmes de garde d'enfants par exemple. Cela peut avoir un effet dévastateur sur les parties et peut susciter des divisions au sein de la localité jusqu'à ce que la cause soit résolue. Je peux donner des exemples des problèmes que nous causent ces procédures judiciaires.

À l'heure actuelle, une équipe judiciaire se rend par avion dans une localité. L'avocat arrive par le même avion que l'équipe judiciaire. Dans certains cas, l'accusé passe 15 minutes avec l'avocat avant l'audition de sa cause, parce que l'avocat vient d'arriver dans la localité. L'accusé a donc 15 minutes pour s'entretenir avec l'avocat. L'avenir de l'accusé doit être déterminé dans ce court laps de temps.

Il se produit des suicides directement liés à l'attente de la date de l'audition de la cause d'accusés. Je connais personnellement une jeune famille où le mari s'est enlevé la vie, laissant une femme et deux enfants, à cause du stress causé par l'attente de l'audition de sa cause.

Les longues attentes entre les sessions n'ont rien de sain pour personne. Toutes les localités sont petites, et l'accusé et la victime doivent vivre dans la même localité. Ils doivent donc se voir au magasin ou à la salle communautaire. Ils sont forcés de vivre l'un près de l'autre, ce qui est très stressant pour les deux.

On observe également dans le Nord un fort désir de détourner plus de causes du système judiciaire officiel, ou, quand des accusations sont portées en matière criminelle, de faire entendre les causes par les juges de paix locaux. Faire entendre les causes dans la localité plutôt que par une cour de circuit améliore l'accès à la justice en supprimant les obstacles liés au temps et à la distance entre les parties en cause et le décideur. Cela contribuerait à remédier aux situations que je viens d'évoquer.

 

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Le tribunal de première instance à palier unique est conçu dans l'espoir que, avec la formation voulue, les juges de paix locaux pourront procéder aux enquêtes préliminaires simples et aux poursuites par procédure sommaire.

J'aimerais donner un autre exemple. Les gens du Nunavut se préparent déjà à remplir ce rôle. J'ai récemment assisté à une retraite pour les juges, à Rankin Inlet; on y a établi les priorités et l'une des plus importantes est la formation des juges. Ils sont capables et le seront davantage une fois qu'ils auront reçu la formation voulue.

J'aimerais maintenant décrire de façon plus détaillée les principales caractéristiques du tribunal de première instance à palier unique, qui devrait rendre le système judiciaire dans l'Arctique de l'Est à la fois plus accessible et plus efficace.

Le projet de loi C-57 modifie la Loi sur le Nunavut de façon à créer un tribunal de juridiction supérieure au Nunavut. Alors qu'à l'heure actuelle, tous les juges de juridiction supérieure qui siègent dans l'Arctique de l'Est viennent en avion de l'Arctique de l'Ouest, les modifications apportées à la Loi sur les juges permettront que trois juges de juridiction supérieure résident à plein temps au Nunavut.

La Loi sur le Nunavut et le Code criminel vont stipuler clairement que les juges de la cour du Nunavut seront des juges de juridiction supérieure de plein droit possédant tous les pouvoirs légaux et inhérents des juges de juridiction supérieure.

Le Code criminel donnera expressément aux juges de la cour du Nunavut tous les pouvoirs nécessaires pour connaître de toutes les affaires criminelles, et même pour exécuter des tâches et des fonctions qui, ailleurs au Canada, sont normalement confiées à des magistrats ou à des juges qui n'appartiennent pas à une juridiction supérieure. Les modifications au Code criminel établiront toutefois clairement que, lorsque les juges s'acquittent de ces tâches ou fonctions, ils ne perdent pas leur statut de juges de juridiction supérieure.

L'avantage concret que cette mesure présentera pour la population du Nunavut, c'est qu'un juge de la Cour de justice du Nunavut pourra s'occuper seul de toutes les questions figurant dans le registre de la cour lorsqu'il tiendra une audience dans une localité particulière. On s'attend à réduire ainsi les délais pour le règlement des affaires et à améliorer l'efficacité du système de justice.

Les juges de paix continueront de s'occuper de la plupart des questions préalables au procès. On s'attend à ce que, après avoir reçu une formation adéquate, ils assument progressivement plus de responsabilités pour la conduite de certaines enquêtes préliminaires et de certains procès criminels mineurs.

Actuellement, la Cour d'appel de l'Alberta sert de cour d'appel centrale pour les Territoires du Nord-Ouest. Cet arrangement a très bien fonctionné. Je suis reconnaissante aux juges de la Cour d'appel de l'Alberta d'avoir accepté de poursuivre leur excellent travail et leurs efforts consciencieux à l'égard du Nunavut.

Parce qu'il était nécessaire d'évaluer la charge de travail de la Cour d'appel du Nunavut après l'établissement du territoire, nous avons décidé que la Cour d'appel de l'Alberta servirait de modèle à la Cour d'appel du Nunavut. Je m'attends à ce qu'elle soit épaulée dans son travail par des juges de la cour supérieure qui vivent dans le Nord et qui siégeront à titre de juges de la cour d'appel. Lorsque le gouvernement du Nunavut sera en mesure de le faire, il voudra peut-être envisager d'autres modèles pour sa cour d'appel.

Les modifications au projet de loi C-57 qui concernent les appels en matière de procédure sommaire s'expliquent du fait que la fonction relative au procès qui est exécutée par deux paliers de tribunaux ailleurs au Canada sera effectuée par une seule cour au Nunavut. Pour maintenir des droits d'appel sensiblement équivalents, il a fallu créer un niveau d'appel intermédiaire.

Lorsque la Cour de justice du Nunavut tient un procès relatif à une procédure sommaire, un appel pourra être interjeté auprès d'un seul juge de la cour d'appel du Nunavut, conformément aux mêmes critères qui s'appliquent pour toutes les procédures sommaires ailleurs au Canada. Les appels en matière criminelle resteront inchangés.

 

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La structure d'appel applicable aux poursuites sommaires vise à garantir aux parties à l'accord les mêmes droits substantiels et procéduraux que ceux des autres Canadiens. On peut penser que cette façon de faire diminue le statut des juges de la Cour de justice du Nunavut, en tant que juges de juridiction supérieure. Je pense qu'il est plus important de considérer cette caractéristique comme un choix nécessaire découlant du désir de protéger les droits des parties qui seront entendues par la cour dans le cadre d'un code criminel conçu pour un système à deux paliers de tribunaux plutôt que pour une seule cour.

Tout comme pour toutes les autres juridictions du Canada, un deuxième niveau d'appel sera accessible pour des motifs d'appel beaucoup plus limités, devant une section de la Cour d'appel composée de trois juges.

Le projet de loi C-57 prévoit que, dans les cas de condamnation par procédure sommaire réglés dans une localité devant un juge de paix, on pourra interjeter appel devant un juge de la Cour de justice du Nunavut, puis présenter un deuxième appel à la section de la Cour d'appel composée de trois juges.

Outre le droit d'appel, un recours en révision a été mis au point pour offrir un mécanisme intermédiaire plus rapide, permettant de rectifier les erreurs concernant les décisions importantes que les juges de la Cour de justice du Nunavut pourraient rendre. J'insiste encore une fois sur le fait que, en concevant ce mode de révision judiciaire, notre but était d'offrir, en substance, le même genre de recours que les parties en cause dans des procédures criminelles peuvent invoquer ailleurs au Canada grâce au contrôle judiciaire des brefs de prérogative.

Le projet de loi C-57 prévoit une nouvelle forme d'examen législatif dont la portée se limite à quelques points clés dans le processus de justice pénale où une méthode d'examen rapide est essentielle. L'examen sera effectué par un seul juge de la Cour d'appel du Nunavut.

L'examen des brefs de prérogative qu'on prévoit dans le Code criminel et dans la common law continuera de s'appliquer aux décisions des juges de paix et d'autres fonctionnaires de niveau inférieur au Nunavut.

Les modifications apportées à la Loi sur les jeunes contrevenants dans le projet de loi C-57 ne touchent pas à la politique, mais se limitent à ce qui est nécessaire pour faciliter le fonctionnement d'un tribunal à palier unique au Nunavut.

Par exemple, le projet de loi C-57 apporte à la Loi sur les jeunes contrevenants des modifications pour prévoir un processus d'appel analogue à celui offert aux adultes au Nunavut. Cela touche les infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité dont la Cour de justice du Nunavut est saisie en tant que tribunal pour adolescents. Comme dans le système pour adultes, ces appels vont être entendus par un seul juge de la Cour d'appel du Nunavut et il y aura un second droit d'appel, pour des motifs plus limités, à un comité de trois personnes de la Cour d'appel du Nunavut.

Le projet de loi C-57 adapte également les dispositions touchant le choix donné aux adolescents concernés dans la Loi sur les jeunes contrevenants pour refléter le fait que dans le cas des procès pour meurtre qui ont lieu devant le tribunal pour adolescents au Nunavut, le jeune contrevenant pourra choisir d'être jugé par un juge de la Cour de justice du Nunavut agissant comme tribunal pour adolescents ou bien seul ou avec un jury.

Les modifications à la Loi sur les juges prévoient également que trois juges de la Cour supérieure siégeront à la cour de justice du Nunavut et que les trois devront habiter le Nunavut. Le projet de loi C-57 va aussi modifier la Loi sur les juges pour que le juge principal de chacun des trois territoires soit tenu d'être membre du Conseil canadien de la magistrature.

À ce stade-ci, je voudrais ajouter que le projet de loi C-57 apporte également diverses modifications connexes à trois autres lois fédérales pour qu'elles puissent être adaptées à un tribunal à palier unique, au Nunavut. Dans bien des cas, ces modifications consistent à simplement modifier le nom du tribunal pertinent ou du juge dans les articles renfermant les définitions.

Je suis très heureuse de pouvoir dire que les modifications contenues dans le projet de loi C-57 qui visent à établir un tribunal à palier unique pour le Nunavut vont tout à fait dans le sens des recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones. L'établissement de la Cour de justice du Nunavut reflète le désir de longue date des gens et des dirigeants du Nunavut de créer une nouvelle institution mieux adaptée à nos traditions, à notre culture et à nos besoins particuliers.

 

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Cette réforme judiciaire témoigne bien du désir de la population du Nunavut de posséder un système de justice accessible et intégré.

La Cour de justice du Nunavut aura le pouvoir d'entendre toutes les causes, qu'elles soient de droit pénal, de droit civil ou de droit familial. Elle devra travailler de concert avec les juges de paix qui joueront un rôle important et même accru afin d'assurer des réponses au crime qui sont rapides et tiennent compte des différences culturelles.

La réponse du gouvernement aux recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones préconisait un nouveau partenariat avec les autochtones. Les vastes consultations qui ont précédé la création d'un tribunal de première instance à palier unique constituent un exemple de ce nouveau partenariat.

Je suis convaincue que la réforme judiciaire du Nunavut continuera de se faire dans un esprit de partenariat et qu'elle répondra toujours mieux aux besoins particuliers de ce nouveau territoire.

J'exhorte tous les députés de la Chambre à appuyer le projet de loi C-57 afin d'assurer la mise en oeuvre de ce système judiciaire tout à fait innovateur sur le nouveau territoire du Nunavut. Il serait également très utile que le Comité de la justice puisse tenir les audiences dans ma circonscription de façon que ses membres soient en mesure d'entendre la population sans intermédiaire et d'admirer la magnifique circonscription de Nunavut.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, la députée du Nunavut a bien raison. Je me suis déjà rendu dans cette circonscription et ce que disait ma collègue au sujet de la beauté de cette région est tout à fait véridique.

La députée a commencé son discours en disant que le projet de loi doit être adopté au plus tard le 1er avril 1999. Je puis lui donner l'assurance que mon parti ne s'efforcera pas d'accélérer les choses. De toute façon, comme le gouvernement a si souvent recours à la clôture, je suis certain qu'il sera parvenu à ses fins à la date prévue.

Cela me ramène à l'époque où le projet de loi a été présenté à la Chambre pour la première fois, en 1993. C'était à la fin du mandat du gouvernement conservateur précédent. La députée d'Edmonton-Nord s'en souviendra très bien car, réformiste solitaire à la Chambre, elle s'efforçait d'empêcher l'adoption du projet de loi parce qu'elle voulait l'examiner.

Le projet de loi comptait près de 300 pages et les parlementaires avaient une semaine pour l'étudier. La députée d'Edmonton-Nord, qui occupait une banquette dans un coin arrière de la Chambre, continuait de s'opposer bruyamment au consentement unanime, mais la présidence l'a ignorée et la députée s'est fait dire par la suite que puisqu'elle ne constituait pas un parti, son point de vue avait peu d'importance. Le projet de loi a été adopté à toute vitesse par la Chambre des communes. C'était un triste jour pour la démocratie, à cause de la façon dont le gouvernement avait alors agi.

Cela m'est revenu à la mémoire quand j'ai entendu la députée dire que nous devions adopter le projet de loi au plus tard le 1er avril de l'an prochain. Elle n'a rien à craindre, le gouvernement fera ce qu'il faut pour faire adopter ce projet de loi.

Je tiens également à féliciter les dirigeants du Nunavut. Ils ont réussi à obtenir beaucoup d'argent du gouvernement. Le projet de loi prévoit la nomination de trois juges de la Cour supérieure au Nunavut. Comme le disait ma collègue, il crée un système de tribunaux de première instance à niveau unique.

Pourquoi est-ce différent du reste du Canada? Le système est différent ailleurs. Pourquoi donnons-nous à une partie de notre pays un système de justice différent?

Certains vous diront que ce sont les Territoires du Nord-Ouest, que c'est très étendu. Je voudrais rappeler que d'autres provinces, le Québec et la Colombie-Britannique par exemple, ont demandé que des modifications soient apportées à la Constitution. Elles ne les ont pas obtenues.

Par ce projet de loi, le gouvernement crée une nouvelle province. Le Nunavut s'appelle encore un territoire, mais il a tous les pouvoirs d'une province. Le gouvernement sait bien qu'il n'aurait jamais pu faire du Nunavut une province, car il lui aurait fallu l'accord de sept des provinces existantes.

Ce qui me gêne beaucoup, c'est que nous accordons un traitement particulier à une région du Canada, une région de 26 000 âmes, qui est très éloignée d'Ottawa. En Colombie-Britannique, nous avons aussi bien des gens qui sont éloignés d'Ottawa et de certaines parties de la civilisation.

 

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Le projet de loi parle des 26 000 habitants et des 350 000 kilomètres carrés du Nunavut. C'est un grand territoire, mais je me demande combien de députés savent que les quatre circonscriptions du nord de la Colombie-Britannique représentent le double de cette superficie, soit 700 000 kilomètres carrés. La circonscription de Skeena, à elle seule, fait 244 569 kilomètres carrés. Cela représente les deux tiers du Nunavut. La circonscription de Prince George—Peace River couvre 217 188 kilomètres carrés. Caribou Chilcotin fait 120 000 kilomètres carrés et Prince George—Bulkley Valley, 100 000 kilomètres carrés. Les habitants de cette région voudraient bien la même chose que ce que l'on donne ici.

Allez dans le nord de la Colombie-Britannique. Les habitants de cette région doivent aller aux tribunaux de Vancouver et ils ont les mêmes inquiétudes que celles que mentionnait la députée: «Je n'ai vu mon avocat que pendant quelques minutes. Il me faut plus de temps.» Pourquoi cette région canadienne bénéficierait-elle d'un traitement spécial? Le système de justice devrait être le même qu'ailleurs au Canada. Le fait que la région se trouve loin dans le Nord ne devrait faire aucune différence.

Les juges nommés par le gouvernement fédéral vont gagner 180 000 $ par an. Les communiqués du gouvernement font état d'un chiffre nettement moins élevé, mais celui-ci n'inclut pas les augmentations que ces juges vont toucher. Il y a aussi les allocations pour frais, dont je vais parler dans un instant. Ces juges seront tous nommés par le gouvernement fédéral. L'idée en soi est terrifiante. Aucune participation locale n'est prévue.

Avons-nous besoin d'un tribunal si coûteux? Il y aura trois juges gagnant 180 000 $ par an, plus des allocations pour frais. Ces juges pourront toucher jusqu'à 300 000 $ ou 400 000 $ chacun. Cela dépasse nettement le million de dollars. Il y aura trois juges de la Cour suprême qui coûtent cher pour entendre des causes de vols de chiens. Nous n'avons pas besoin de cela au Canada. Ce n'est pas un bon projet de loi.

J'aurai bien des questions à poser sur ces points, au cours de l'étude en comité. J'ai hâte que le projet de loi soit étudié par le comité, parce que ce dernier nous expliquera peut-être pourquoi le gouvernement prend de telles décisions.

Selon le projet de loi, il y aura un juge principal et deux autres juges. Comme je l'ai dit plus tôt, les traitements indiqués sont trompeurs. Ils ne tiennent pas compte des nouvelles augmentations et d'autres à venir. Les juges recevront en outre, sans avoir à en rendre compte, une indemnité de 6 000 $ par an. Ils recevront aussi les allocations de frais ordinaires. Chaque juge principal pour les tribunaux du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, recevra un montant additionnel de 5 000 $ par an. Cela fait 11 000 $ par an pour des dépenses dont ils n'ont pas à rendre compte. Autrement dit, le traitement du juge principal atteint presque 200 000 $. Je trouve que c'est payer cher un juge affecté à un territoire de 26 000 habitants et dont la charge de travail est loin de se comparer à celle des juges de grandes villes canadiennes comme Montréal, Toronto et Vancouver. Je connais la charge de travail que doivent assumer ces juges.

Je sais que les juges dans le Nord sont appelés à voyager. C'est la même chose dans le reste du Canada. Il est impossible de se rendre à Atlin, en Colombie-Britannique, à partir de la Colombie-Britannique. Il faut venir par avion du Yukon ou de l'Alaska. Les habitants des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut ne sont pas les seuls à connaître des problèmes de ce genre. Nous connaissons les mêmes en Colombie-Britannique. Ces problèmes touchent aussi d'autres régions du Canada, comme le nord du Québec. Pourtant, nous n'avons pas pris de mesures spéciales ou créé un système juridique particulier adapté aux besoins de ces autres régions, ni encore moins acquiescé à la demande de ces provinces et apporté à la Constitution les changements qu'elles réclamaient. Cela me semble bizarre.

Les provinces du Québec et de la Colombie-Britannique ont formulé de nombreuses plaintes sur la façon de faire du gouvernement fédéral. Nous représentons une grande partie du Canada et pourtant nous n'avons pas réussi à convaincre le gouvernement de nous accorder une fraction de ce qu'il offre à un territoire de 26 000 habitants.

Je suis sûr que mes électeurs, qui autrement sympathisent avec les régions du Nord qui couvrent une grande superficie, se demandent toutefois pourquoi nous avons pour le Nunavut un député qui ne représente que 26 000 personnes. Quatre députés de la Colombie-Britannique représentent une région de 700 000 kilomètres carrés. Il y a quatre millions d'habitants qui vivent en Colombie-Britannique. Ce n'est pas juste. Les députés ne représentent pas tous le même nombre d'habitants. Nous avons fait des pieds et des mains pour prendre des mesures spéciales.

Je comprends que certaines de ces mesures sont justes. Elles s'imposent en raison de la région où vivent ces gens.

 

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C'est un peu exagéré que de créer un système judiciaire distinct et très coûteux dont on n'a pas besoin. Il y a sans doute de meilleures solutions. En Nouvelle-Zélande, par exemple, des gens nommés travaillent au niveau local non seulement avec les victimes, mais encore avec les criminels pour le bien de la collectivité en ce qui a trait aux crimes non violents et mineurs.

Nous n'avons certainement pas besoin de trois juges à 200 000 $ pour s'occuper de ce genre de chose au Canada.

Le budget accordé à ces juges sera tiré du budget annuel prévu pour la mise en oeuvre du Nunavut, soit 32 millions de dollars. Ce montant est loin d'être négligeable. Ce budget sera accordé jusqu'en 2008, le coût total étant évalué à 520 millions de dollars. C'est-à-dire, grosso modo, 20 000 $ pour chaque homme, femme et enfant.

Je me demande qui a pris ces décisions. Ont-elles été prises en 1993 quand ce projet de loi a été adopté à toute vapeur à la Chambre?

Il y a un autre poste budgétaire pour les conseils donnés sur la création du Nunavut à la commission de mise en oeuvre du Nunavut. Ce poste est fixé à 2,3 millions de dollars pour 1997-1998, contre 1,9 million de dollars l'an dernier. Je me demande jusqu'où ce montant augmentera d'une année à l'autre. Quand ces coûts cesseront-ils de monter? Quand donc cette population se tiendra-t-elle debout toute seule sans constamment demander de l'argent au reste du pays?

Les revendications territoriales sont une chose, mais la création d'une nouvelle province ou d'un nouveau territoire en est une autre. Quand ce projet de loi a été présenté, le gouvernement aurait dû aller au bout de sa démarche et faire du Nunavut une province, comme il devrait faire des Territoires du Nord-Ouest et du Yukon une province. Que l'on consulte les Canadiens, conformément à la Constitution, que toutes les provinces se prononcent et réglons le problème une fois pour toutes au lieu de multiplier les démarches coûteuses qui créent également des problèmes dans d'autres régions du Canada.

Je suis persuadé que la députée, qui est de cette région, est heureuse de ce qui s'est passé. Je le serais moi aussi, si j'étais le représentant de cette population. Mais il est plus difficile de donner des explications aux autres contribuables, qui paient la note, voient combien tout cela coûte par personne, quels seront les coûts permanents et quand cela va finir.

Quand on nous présente un projet de loi, il faut se demander aussi, puisque le problème est fréquent, combien d'autres projets de loi modificatifs viendront par la suite parce que le premier a été mal conçu.

Si le projet de loi avait été correctement conçu en 1993, nous n'en serions pas à étudier un autre projet à toute vapeur, avec une seule semaine pour examiner un changement très important pour notre pays, et à nous faire bâillonner. On nous parle maintenant d'attribution de temps, mais j'étais là lorsqu'ils n'employaient pas encore cette expression. Le seul mot «clôture» voulait vraiment dire quelque chose. Le gouvernement ne l'imposait que si les débats prenaient vraiment beaucoup de temps, peut-être un mois ou deux. Aujourd'hui, il y a recours régulièrement.

Je pourrais revenir en arrière et citer bien des interventions de l'actuel leader du gouvernement à la Chambre qui, lorsqu'il était dans l'opposition, criait au scandale lorsque le gouvernement conservateur imposait la clôture. Ce sont eux qui ont modifié cette règle. Ce fut un triste épisode pour le Canada. Autrefois, lorsqu'il y avait des débats à la Chambre, tous les députés avaient la possibilité de commenter tous les projets d loi, et les interventions étaient plus longues. Certains pensaient peut-être que c'était du temps perdu, mais la démocratie n'est pas une perte de temps. C'est peut-être ennuyeux pour le gouvernement du jour, mais ce n'est pas une perte de temps.

Voilà pourquoi on ne peut pas dire au sujet de ce projet de loi que ce n'est qu'une simple chose qui s'ajoute à un projet de loi important qui a été adopté par la Chambre. Nous acceptons le fait qu'il a été adopté. Le seul député réformiste qui était alors présent à la Chambre a voté contre. Nous pouvons dire que ce n'était pas correct puisque ce projet de loi est présenté. Le gouvernement dit même qu'il pourrait y avoir d'autres projets de loi habilitants qui coûteront très cher aux Canadiens. C'est ce qui préoccupe mon parti et c'est pourquoi nous ne pouvons pas appuyer ce projet de loi tel qu'il est formulé à l'heure actuelle.

Lorsque ce projet de loi sera renvoyé au comité, nous poserons beaucoup de questions auxquelles les Canadiens voudraient bien que l'on réponde. Nous espérons que le gouvernement sera prêt à répondre à ces questions au comité. Nous espérons que les députés ministériels pourront nous dire pourquoi ils peuvent faire cela dans cette partie-ci du Canada alors qu'ils ne peuvent rien faire dans d'autres. Je suis persuadé que nombre de mes collègues poseront ces questions dans les jours qui viennent.

 

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Lorsque nous en serons à cette partie du débat où les députés peuvent poser des questions, nous en aurons à poser aux députés ministériels et nous espérons qu'ils sauront y répondre. Nous collaborerons avec eux au comité pour apporter les changements qui s'imposent afin que les Canadiens puissent mieux comprendre pourquoi une partie du Canada a plus voix au chapitre dans le système de justice que toute autre partie du Canada

[Français]

M. Ghislain Fournier (Manicouagan, BQ): Monsieur le Président, en tant que membre du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord, pour le Bloc québécois, il me fait plaisir aujourd'hui de prendre la parole sur le projet de loi C-57, Loi portant modification de la Loi sur le Nunavut relativement à la Cour de justice du Nunavut et modifiant diverses lois en conséquence.

Ce projet de loi vise à modifier le Code criminel afin qu'il prenne en compte les réalités du nouveau territoire du Nunavut et ainsi permettre l'établissement d'un gouvernement opérationnel avant le 1er avril 1999, date consacrant la naissance officielle du territoire.

Le projet de loi C-57 s'inscrit dans le processus enclenché en 1992 par l'Accord sur les revendications territoriales qui fixait le cadre juridique et politique du nouveau territoire du Nunavut. Sanctionné en juin 1993, la création de ce territoire fait suite à l'adoption l'an dernier du projet de loi C-39, qui permet la tenue d'élection législative tout en facilitant la transition et en légitimant le processus.

Le projet de loi présenté à la Chambre cet après-midi s'inscrit fort bien dans ce continuum. Il constitue, en quelque sorte, la dernière pierre à l'édifice politico-légal permettant aux habitants de ce territoire d'être fin prêts pour avril 1999 et d'affronter les défis qui devront subséquemment être relevés.

Je ne peux donc qu'être satisfait que l'on légifère afin de remettre tous les outils politiques et, plus particulièrement pour le cas qui nous intéresse aujourd'hui, les instruments législatifs entre les mains des habitants du Nunavut.

Ceci leur permettra d'avoir une instance judiciaire répondant à leurs besoins et étant plus près d'eux. La mise en place des institutions juridiques est d'ailleurs, comme on le sait, une composante essentielle à l'autonomie gouvernementale. Le projet de loi C-57 permet justement de poursuivre dans cette voie.

Tout indique que la création du territoire du Nunavut, prévue pour le 1er avril 1999, est en bonne voie de se concrétiser. Effectivement, je rappelle que ce projet de loi C-39 sur le Nunavut et la Loi constitutionnelle de 1867, adopté en troisième lecture en juin dernier, modifie la carte géographique du Nord canadien par la création de cet immense territoire.

Depuis l'entrée de Terre-Neuve dans la Confédération, en 1949, les frontières du Canada n'ont subi, depuis ce temps, aucune modification. Ceci démontre bien à quel point la création du Nunavut est un moment historique et explique aussi l'importance que l'établissement de ce nouveau territoire revêt pour la population qui y vit.

Les Territoires du Nord-Ouest se retrouvent donc, par la création de ce territoire, divisés en deux entités distinctes. Le Nunavut comprend les terres du centre et de l'est des Territoires du Nord-Ouest, au-delà du 60e parallèle. Il couvre donc environ 2 millions de kilomètres carrés, soit le cinquième de la masse continentale du Canada.

 

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Cet immense territoire est divisé en trois régions et comprend 28 collectivités. L'extrême sud-est du Nunavut rejoint le nord du Labrador. Le Nunavut est également un territoire borné d'eau. Ses terres les plus au nord touchent aux rives de l'océan Arctique. À l'est, la baie de Baffin sépare les terres du Nunavut. Au sud, le Nunavut touche aux eaux de la baie d'Hudson et de la baie d'Ungava.

Quatre-vingt pour cent de la population du Nunavut est inuit, soit environ 17 500 personnes sur les 22 000 composant l'ensemble du territoire. Ce territoire est donc à majorité inuit. Le mot Nunavut signifie très bien d'ailleurs «notre terre» en inuktitut, langue des Inuits.

Je tiens donc à préciser, avant d'aller plus loin, que le Bloc québécois est favorable au principe du projet de loi C-57 qui permet à ces milliers d'autochtones de franchir une autre étape vers une autonomie gouvernementale solide et viable. Je rappelle quelques éléments du projet de loi C-39 qui a été adopté, l'an dernier, pour mieux situer le projet de loi d'aujourd'hui.

Le projet de loi C-39 permet aux Inuits du Nunavut d'administrer les 1,9 million kilomètres carrés de leurs terres par le biais d'une assemblée législative élue au suffrage universel. Il apporte des modifications à la Loi sur le Nunavut adoptée par le Parlement et le Sénat en 1993. Ainsi, une transition est assurée et les pouvoirs et l'administration des gouvernements fédéral et territorial sont dévolus au territoire du Nunavut.

Cette loi prévoit aussi, en modifiant la Loi constitutionnelle de 1867, que la population de ce territoire soit représentée à la Chambre des communes et au Sénat. Le but premier du projet de loi C-39 était de permettre la tenue d'élections pour former l'assemblée législative du Nunavut avant le 1er avril 1999, afin que les représentants des Inuits du Nunavut puissent, dès la création effective de leur territoire, servir leur population à l'aide d'une assemblée législative opérante.

De plus, le projet de loi C-39 amende la Loi constitutionnelle de 1867 afin d'assurer une représentation du Nunavut à la Chambre des communes et au Sénat, représentation semblable à celle du Yukon dans les Territoires du Nord-Ouest. Le projet de loi C-39 permet aussi le transfert des services gouvernementaux des Territoires du Nord-Ouest et du fédéral vers le Nunavut lors de la période de transition.

Les transferts des services et des programmes en matière de culture, de santé et de logements publics sont, pour leur part, censés être réalisés d'ici l'an 2009. Comme on peut le deviner, les tâches à accomplir sont grandes d'ici le 1er avril 1999. C'est pourquoi je suis heureux de constater que le projet de loi C-57 vient compléter la mise en oeuvre du territoire inuit du Nunavut dans sa composante juridique et administrative.

Avant de passer au projet de loi C-57, je tiens à rappeler brièvement que le Bloc québécois ne s'est pas opposé au projet de loi C-39. Le Bloc québécois a en effet voté en faveur de ce projet de loi qui venait matérialiser plusieurs années de négociations de la part, notamment, de l'organisation représentant les Inuits du Canada, soit l'Inuit Taparisat du Canada. Cette organisation est engagée dans le processus de négociations de ce territoire depuis les années 1970.

 

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Je souligne qu'il a fallu deux référendums, en 1982 et en 1992, pour que, de part et d'autre, on en arrive à cette délimitation du territoire et que tous acceptent ces nouvelles frontières. Or, le Bloc québécois ne s'est pas opposé à une législation qui concrétise plus de 25 années de négociations et qui permet aux Inuits, un des grands peuples du Canada, d'occuper la place qui leur revient au sein du continent en prenant en main leur destinée. En devenant maîtres chez eux, les Inuits posséderont ainsi tous les leviers politiques, économiques et judiciaires pour se développer et se gouverner eux-mêmes.

En juin dernier, mon collègue, le porte-parole du Bloc québécois pour les affaires autochtones, disait à la Chambre que grâce au projet de loi C-39, les Inuits pourront maintenant agir et se gouverner dans le sens de leurs intérêts, pour le bien-être de leur collectivité et pour un développement harmonieux de leur territoire. Je suis tout à fait d'accord avec les propos qu'il tenait et je les partage.

Nous avions cependant émis une réserve, en juin dernier, celle de la représentation du Nunavut au Sénat. En soi, le Bloc québécois n'a rien contre le fait que les Inuits veulent être représentés. Toutefois, lors de la législature précédente, nous avions entrepris des démarches en vue d'abolir cette institution désuète et inefficace qu'est le Sénat, une institution inutilement coûteuse pour l'ensemble des Québécois et des Canadiens. Elle est archaïque. Le Sénat fonctionne grâce à des récompenses politiques. Les nominations partisanes enlèvent toute la crédibilité et l'objectivité nécessaires au processus de sanction de la législation au pays. Cette objectivité est pourtant essentielle. Toutefois, malgré ces réserves, nous n'avions pas formulé d'amendement en ce sens, contrairement aux réformistes qui ont tenté de suggérer une réforme du Sénat par le biais d'un amendement à ce projet de loi.

Je me permets de mentionner un autre élément que nous avons soulevé l'an dernier et qui me préoccupe toujours. Il concerne les îles côtières de l'est de la baie James, au sud de la baie d'Hudson et au nord du Nunavik, au Québec. Depuis 1977, les Cris de la baie James et les Inuits du Nunavik veulent négocier avec le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien la reconnaissance des droits sur les eaux, les glaces de mer qui les entourent, de même que sur les ressources.

Depuis 1977, les négociations ont été interrompues. Il semble que cela soit lié à une question de divergence touchant les dédommagements et le statut des régions. Depuis que les démarches sont enclenchées pour la création du Nunavut, les Cris et les Inuits du nord du Québec voudraient reprendre le dialogue avec le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien à cet effet.

L'annonce du 24 septembre dernier, par le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, de la nomination d'un négociateur fédéral en chef, pour ce qui est de la revendication des zones extracôtières du Grand Conseil des Cris du Québec, est un bon signe. Il reste à espérer que les négociations reprendront bel et bien et qu'elles mèneront, cette fois-ci, à des prises de décisions constructives.

Des représentants du Grand Conseil des Cris du Québec ont d'ailleurs comparu au Comité permanent des affaires autochtones, au printemps dernier, dans le cadre de l'étude du projet de loi sur le Nunavut. Ils nous ont fait part de leurs préoccupations face à ce projet de loi eu égard à leurs revendications propres.

Bien qu'ils se disent favorables à la création du Nunavut, ils voudraient que le ministère des Affaires indiennes reprenne sérieusement les négociations en vue de reconnaître leurs droits dans les limites du nouveau territoire.

 

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J'espère donc que cette nomination représente un engagement clair de la part du ministre des Affaires indiennes et de ses fonctionnaires à négocier avec les Cris du Québec.

Revenons maintenant plus directement au projet de loi C-57. Afin donc d'être fin prêt pour avril 1999, le territoire du Nunavut doit maintenant avoir en main tous les outils législatifs. Le projet de loi C-57 vise justement cet objectif.

Comme on le sait, le transfert de certaines juridictions des gouvernements territorial et fédéral vers le Nunavut n'est pas simple. Ce transfert est néanmoins essentiel et répond à la réalité du Grand Nord.

Effectivement, le projet de loi C-57 répond à une demande faite par les artisans de la mise en place de l'autonomie gouvernementale au ministre de la Justice, appuyée par les organismes inuits du Nunavut. La législation institue un tribunal de première instance à palier unique pour le territoire du Nunavut.

L'objectif de la création de ce tribunal, qu'on appelle désormais la Cour de justice du Nunavut, est d'établir un système judiciaire efficace, accessible et propre à répondre aux besoins particuliers du territoire, tout en garantissant à ses justiciables les mêmes droits que ceux des autres Canadiens.

Concrètement, dans le nouveau territoire du Nunavut, il y aura donc la Cour de justice du Nunavut. Elle remplacera l'actuelle Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest à titre de cour de juridiction supérieure et la cour territoriale, à titre de cour à juridiction inférieure. Le projet de loi C-57 se trouve donc à modifier, une fois de plus, la Loi du Nunavut, adoptée sous le règne du Parti progressiste-conservateur, en 1993.

De plus, le projet de loi C-57 se trouve également à modifier la Loi sur les juges, afin de prévoir la nomination de trois juges de juridiction supérieure à la Cour de justice, le doyen des juges de chacun des trois territoires devant être membre du Conseil canadien de la magistrature.

Il importe effectivement de s'assurer, étant donné les compétences élargies de cette cour, que les magistrats seront compétents pour entendre l'ensemble des causes, tant de juridiction inférieure que de juridiction supérieure, mises à part les causes relevant des tribunaux spécialisés et administratifs.

Cette législation insère aussi au Code criminel des mécanismes de procédure adaptés à la Cour de justice et précise les pouvoirs des juges et des juges de paix, les appels en matière de procédure sommaire, le mode de révision judiciaire, la mise en liberté provisoire par voie judiciaire et le choix du mode de jugement.

Donc, le projet de loi C-57 modifie aussi la Loi sur les jeunes contrevenants afin d'harmoniser les structures judiciaires et la procédure avec celles du Code criminel, ainsi que d'autres lois fédérales.

La création de cette cour de justice permettra un traitement judiciaire souple et efficace sur l'ensemble du territoire ciblé. En rendant cette cour compétente pour entendre toute affaire, tant les affaires mineures que les infractions criminelles graves, on permet à la population du territoire d'avoir accès à un service plus près de ses réalités.

Dorénavant, lorsqu'un magistrat se rendra dans un des petits villages du Nunavut, il sera plus polyvalent. Il faut comprendre que la multiplicité des juridictions, c'est-à-dire la complexité de l'organisation judiciaire, qui est utile dans les grands centres urbains à forte densité de population, ne sert pas nécessairement la bonne administration de la justice sur un territoire comme celui du Nunavut.

 

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C'est pour cette raison qu'il importe de légiférer sur la question et de permettre les modifications nécessaires aux différentes lois qui, jusqu'à présent, octroyaient à des juridictions différentes les compétences pour entendre diverses causes. Le projet de loi C-57 apporte les changements nécessaires à la mise en place et au bon fonctionnement de cette cour de justice.

Cette structure de tribunal tient donc compte des caractéristiques particulières de l'Arctique oriental. Les juges de la Cour de justice du Nunavut pourront donc entendre toutes les affaires en matière pénale, familiale et civile. En d'autres termes, cette nouvelle structure judiciaire est plus simple et répond davantage aux besoins de la population du nouveau territoire.

En terminant, je tiens à ajouter que ce projet de loi, étant arrivé rapidement au menu législatif, nous allons, au cours des prochaines semaines, l'étudier en profondeur. Une rencontre avec les fonctionnaires du ministère de la Justice sera grandement appréciée lorsque l'on avancera dans le processus d'étude du projet de loi, ce qui nous permettra de mieux cerner les enjeux de cette législation et les nombreuses implications sur les lois existantes.

Une consultation auprès des principaux intéressés pourrait aussi nous éclairer davantage. La Loi créant le Nunavut et les lois subséquentes permettant la bonne gestion politique, administrative et légale du territoire sont le fruit de plus de 25 années d'efforts et de lutte menée par les Inuits pour regagner le contrôle de leur terre.

Nous ne pouvons que saluer ces efforts et, à l'instar de mon collègue, le porte-parole du dossier pour le Bloc québécois, je leur souhaite d'être à même de relever les défis qui se présenteront à eux.

En conclusion, je précise une fois de plus que nous sommes favorables au projet de loi et que nous continuerons à appuyer le principe des démarches qui, comme le projet de loi C-57, permettent aux peuples de se munir des outils nécessaires au plein épanouissement de leur identité.

[Traduction]

Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Monsieur le Président, la première chose que j'ai vue à propos du projet de loi C-57 a été le titre de journal: «Le Nunavut obtient un système judiciaire unique, un tribunal de première instance à palier unique, considéré comme l'idéal pour les vastes territoires.»

Cette déclaration est importante, car elle est vraie et elle établit pour le Nord un modèle extrêmement difficile à surpasser. Le territoire du Yukon et les Territoires du Nord-Ouest voudront atteindre ce modèle de justice. Ils emboîteront sûrement le pas au Nunavut.

À propos du modèle difficile à surpasser, il faut vraiment envier le Nunavut. C'est un territoire qui peut partir à neuf. Il est en train de créer un système de justice qui conviendra à ses habitants, qui sera responsable devant eux et qui répondra à leurs besoins. Comme le Nuvavut possède une langue officielle, une langue des premières nations, le tribunal devra dorénavant communiquer avec les habitants dans leur langue.

La justice témoigne de notre souveraineté. Même s'il n'y a que 26 000 habitants au Nunavut, que peu d'habitants dans les Territoires du Nord-Ouest et que peu d'habitants au Yukon, cela veut-il dire qu'ils n'ont pas droit à la justice? Cela veut-il dire que, parce que cela coûte trop cher, nous ne pouvons pas avoir accès à la justice? Cela veut-il dire que nous ne pouvons disposer d'un tribunal qu'une fois par année parce que nous sommes trop éloignés, ou que nous devons rassembler tous les gens et les envoyer ailleurs pour qu'ils aient accès à la justice?

Ce projet de loi est important, car il s'inscrit clairement dans les valeurs auxquelles adhère notre pays. Même si une personne habite dans un endroit reculé ou entouré de glaces, elle a droit à la justice comme tous les autres Canadiens.

 

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Dans le Nord, la justice est souvent vue comme un gros mammouth qui traverse les villages en piétinant tout sur son passage. Après le passage de la justice, c'est le chaos et la confusion au sein de la collectivité, quand ce n'est pas un de ses membres qui est expédié à des milliers de milles, dans un pénitencier fédéral. Ceux qui doivent purger une peine qui dépasse deux ans moins un jour doivent nécessairement quitter le territoire. Ils ne bénéficient donc d'aucun soutien de leur collectivité. Après une telle peine, il est extrêmement éprouvant de tenter de se réinsérer dans la société. La Loi sur les juges réglera une partie de ce problème parce qu'elle amènera la justice plus proche de la population du Nord.

Récemment, dans le Nord, j'ai participé à une assemblée publique où il a été question de justice et du document de discussion que la ministre de la Justice a produit sur la provocation comme moyen de défense, sur la légitime défense et sur la protection de la propriété. Les gens ne voulaient pas nécessairement discuter uniquement de ces sujets, ils voulaient discuter de la justice en général et de leur sentiment d'aliénation face à la justice, de l'impression que la justice ne leur appartient pas. Le facteur humain ne compte tout simplement pas pour le système juridique. Le système de justice à un seul palier de tribunal permettra aux gens de sentir qu'ils font partie du système de justice.

Les habitants du Nord ont toujours réclamé des changements pour que le système de justice soit plus responsable, qu'il ne serve pas uniquement à prendre les gens et à les mettre à l'écart de la société sans recours. En fait, la population du Nord a été la pionnière en matière de justice communautaire et de conseil de détermination de la peine. J'ai fait partie d'un des premiers conseils de détermination de la peine et d'autres par la suite.

La tâche de ces conseils n'est ni facile ni simple. Elle exige un incroyable niveau de dévouement de la part des membres de la collectivité. Ce processus diffère de celui qui consiste à emprisonner quelqu'un et qui nécessite habituellement la présence de gardes durant deux ou trois postes de travail, sans parler de cuisiniers et de nettoyeurs. Avec un conseil de détermination de la peine, lorsqu'une personne accepte de s'occuper de quelqu'un qui s'est vu imposer une peine, la communauté et la personne sont les seules ressources disponibles pour garder un oeil sur le contrevenant et l'encourager à adopter un mode de vie meilleur. Cela représente un engagement énorme et toute communauté ou personne qui est prête à recourir à un conseil de détermination de la peine mérite notre admiration pour le travail qu'elle accomplit.

Lorsqu'on parle de justice pour les membres des premières nations—et il y a beaucoup de membres des premières nations dans le Nord—il ne faut pas oublier que ceux-ci sont pauvres. Ils vivent dans des conditions comparables à celles de pays du tiers monde. Ils représentent une grande proportion de la population carcérale au pays et sont même surreprésentés. Leur culture n'est pas prise en considération. Leur condition sociale laisse à désirer. Il n'est tout simplement pas correct de tous les envoyer dans des pénitenciers fédéraux.

J'en viens maintenant au fond même du projet de loi. Celui-ci vise à créer un tribunal à palier unique pour le territoire du Nunavut. Il vise aussi à assurer des droits fondamentaux ainsi que des droits en matière de procédure qui soient équivalents à ceux dont on jouit ailleurs au Canada.

Un tribunal à palier unique ne veut peut-être pas dire grand-chose si l'on n'a pas une expérience de la justice dans les territoires. Il y a en général le tribunal fédéral. Un procureur de la Couronne est nommé et le justiciable peut se retrouver devant ce juge ou attendre de pouvoir comparaître à un certain palier. Le juge fédéral est nommé par le gouvernement fédéral. Il n'est donc pas responsable devant la communauté qu'il sert puisqu'elle n'est pas son employeur. Les juges fédéraux sont donc assurément moins sensibles aux besoins de la communauté.

Le système de tribunal de première instance à palier unique permettra une résolution à intervalle régulier et plus fréquente des affaires en instance, ce qui est d'une importance cruciale pour les petites communautés du Nord, car l'isolement peut devenir tout à fait insupportable.

Le projet de loi insère au Code criminel des mécanismes procéduraux adaptés à la Cour de justice du Nunavut dans les domaines suivants: les pouvoirs des juges et des juges de paix; les appels en matière de procédure sommaire; le mode de révision judiciaire; la mise en liberté provisoire par voie judiciaire; et le choix du mode de jugement. Une des langues des premières nations fait partie des langues officielles et le tribunal devra en tenir compte. Certaines parties du projet de loi sont uniques, notamment l'article 35.1 qui modifie la Loi sur le Nunavut:

    Le juge de la Cour peut exercer les pouvoirs et fonctions de celle-ci partout au Canada dans le cas d'une infraction criminelle commise ou poursuivie au Nunavut.

 

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Ma seule réserve importante au sujet du projet de loi concerne la nomination des juges. Il ne prévoit aucun mécanisme d'examen parlementaire des candidats au poste de juge fédéral. Les candidats n'ont pas à comparaître devant les comités de la justice ou des affaires autochtones. Nous ne pouvons pas attendre le même niveau de réceptivité et de responsabilité de la part des juges que ce ne serait le cas si le territoire lui-même les nommait et les sélectionnait préalablement. Cette lacune est très préoccupante car elle reproduit une situation qui existe déjà ici. Nous devrions éviter de la répéter au moment de créer ce nouveau système.

Le Nouveau Parti démocratique appuiera le projet de loi, avec certaines réserves. Je suis impatiente de l'examiner en comité.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, c'était là un discours des plus intéressants. Il s'en dégageait beaucoup de compassion. C'est certainement quelque chose que j'appuie. L'administration de la justice au Canada ou n'importe où est très importante. Je comprends que la députée dise que ces gens eux aussi ont droit à la justice. Je suis entièrement d'accord avec elle sur ce point. On devrait avoir un système de justice où tous les facteurs importants sont pris en compte dans la détermination de la peine. La justice devrait être le plus près possible des gens. Elle devrait être rapide. Ce sont toutes là des choses extrêmement importantes.

Je partage aussi les réserves de la députée à l'égard de la nomination des juges.

Toutefois, pourquoi appuierions-nous un système judiciaire différent? J'appuie les mêmes principes que la députée, mais pourquoi aurions-nous un système différent? Pourquoi faudrait-il avoir, dans une région du Canada, un système qui n'existe nulle part ailleurs au pays? Y a-t-il une raison qui fait que la justice au Nunavut devrait être administrée différemment qu'elle ne l'est dans les autres régions du Canada? Je ne vois pas pourquoi il en serait ainsi. Il me semble que, par définition, la justice comporte un élément d'uniformité. Après tout, la justice, c'est la justice. Nous tenons tous au principe de la justice et de l'égalité devant la loi. Pourquoi aurions-nous, dans une région du Canada, un système différent de celui que nous avons dans une autre région?

Mme Louise Hardy: Monsieur le Président, de la façon dont je vois les choses, la justice doit s'adapter aux besoins de ceux qu'elle sert. Cela ne veut pas dire que la loi change, mais seulement que la façon dont nous nous y prenons change. Ce n'est pas parce que le système judiciaire ne fonctionne pas dans le reste du Canada que le Nunavut ne devrait pas prendre les mesures nécessaires pour qu'il fonctionne dans le territoire, en s'assurant que les tribunaux siègent plus souvent.

Les gens qui vivent dans les grands centres ont un tribunal. Ils savent qu'ils peuvent y avoir accès, ce qui n'est pas le cas pour les gens qui habitent dans le Nord. Ils doivent attendre jusqu'à ce que la cour de circuit arrive jusqu'à eux. Ce système judiciaire nomade est pénible pour ceux qui sont obligés de se déplacer, mais ils sont prêts à faire ce sacrifice pour que la justice soit rapide et accessible...

M. Werner Schmidt: Mais ce n'est pas de ça que nous parlons. Nous parlons d'un système à palier unique.

Mme Louise Hardy: C'est important. C'est un changement heureux. C'est ce dont on a besoin, c'est ce qu'on veut et c'est ce qui a été prévu.

M. Werner Schmidt: Mais pourquoi? C'est ce que je me demande.

Mme Louise Hardy: Une des raisons, c'est que ça coûtera moins cher, car il n'y aura qu'un palier de juges à rémunérer. Le Nunavut ne paiera pas au palier fédéral et au palier territorial, mais uniquement à un seul palier. Il n'y aura qu'un seul circuit, au lieu de deux ou trois. Il ira dans les mêmes localités, mais il traitera de questions différentes.

Je crois que la justice doit pouvoir être novatrice. Les lois doivent être dynamiques. Il ne faut pas qu'elles soient figées, sinon on aurait beaucoup de mal à accepter les décisions en bout de ligne, et on se demanderait d'où elles viennent. Si nous, en tant que citoyens, nous connaissions bien notre système judiciaire nous ne serions pas choqués par les différences entre les peines.

Qui est ce juge qui vient chez nous? On n'en a pas la moindre idée.

 

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Cette initiative rapproche la justice de la population. C'est un changement important qui sera bénéfique.

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je comprends que ma collègue estime que la justice devrait être souple. Je suis certes d'accord avec elle là-dessus.

Ce que nous cherchons à obtenir, c'est non seulement l'égalité devant la loi, mais encore l'égalité d'accès aux services dans tout le pays.

Ma collègue envisagerait-elle que l'on implante un tel système dans les vastes territoires du nord de la Colombie-Britannique, où des régions sont encore plus étendues que le Nunavut? Les habitants du nord de la Colombie-Britannique ont les mêmes problèmes et les mêmes préoccupations que ceux du Nunavut pour ce qui est d'accéder au système de justice et de devoir parcourir de grandes distances.

Des membres de collectivités autochtones du nord de la Colombie-Britannique se disent parfois préoccupés de devoir aller jusqu'à Vancouver pour des procès ou d'autres choses du genre. La députée serait-elle d'accord pour qu'on implante quelque chose comme cela dans le nord de la Colombie-Britannique?

Mme Louise Hardy: Absolument, monsieur le Président. On devrait l'étendre à cette région. Par exemple, Atlin, en Colombie-Britannique, est à 100 milles à peine de Whitehorse, au Yukon. Il serait logique que ses habitants puissent avoir accès au système de justice plus près d'eux, où ils se rendent pour faire leurs emplettes.

Nous pourrions envisager un système général pour les régions éloignées du Canada.

Le projet de loi C-57 crée un précédent. Si les habitants du Nunavut l'ont, tous les Canadiens ne méritent-ils pas d'en profiter?

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, je conviens avec la députée du Yukon et mon collègue que les habitants des régions éloignées devraient être aussi près que possible du système de justice. À mon avis, nous devons cela aux Canadiens des régions éloignées.

Mais j'ai une réserve. La députée croit-elle que les décisions des juges dans les régions éloignées seraient différentes de celles concernant un crime commis 200 milles plus au sud? Y a-t-il une différence dans l'interprétation de la loi et les mesures punitives? Est-ce là ce que la députée veut dire? Si ce n'est pas le cas, qu'on me corrige, mais j'ai cru comprendre que c'est ce qu'elle disait.

Mme Louise Hardy: Non, monsieur le Président, non, ce n'est pas ce que je voulais dire. Les lois du Canada sont celles du Canada et des territoires. Il s'agit simplement des modalités d'accès aux tribunaux et à la justice.

Il se fait beaucoup de travail sur des questions comme les cercles de détermination de la peine et les initiatives de justice communautaire. Les résultats peuvent être différents, et j'espère que nous évoluerons vers d'autres changements en ce sens.

M. Jim Gouk (Kootenay—Boundary—Okanagan, Réf.): Monsieur le Président, il y a quelque chose qui m'inquiète beaucoup. Comme la députée représente un territoire, elle a peut-être la réponse. Chaque fois que je jette un coup d'oeil sur ce projet de loi, j'y remarque de nouvelles horreurs.

À l'heure actuelle, dans toutes les provinces, si une personne commet une infraction relativement mineure, est reconnue coupable et interjette appel, la cause est portée devant la cour d'appel provinciale. Dans les Territoires du Nord-Ouest, en ce moment, les appels sont entendus par la cour d'appel de l'Alberta. Or, aux termes du projet de loi, les condamnations seront prononcées par un juge de la Cour fédérale.

Je voudrais connaître le processus d'appel. Comme c'est un juge de la Cour fédérale qui aura condamné le prévenu, est-ce que celui-ci devra se pourvoir en appel auprès de la Cour suprême du Canada? Si tel est le cas, les coûts seront horribles, et à mon avis la Cour suprême du Canada refusera, ce qui est bien normal, d'entendre les appels sur des vols de chiens et d'autres délits mineurs. Mais cela veut dire que les habitants du Nunavut perdront leur droit d'appel. Ils n'auront pas le même accès à la justice que les Canadiens des Territoires du Nord-Ouest, du Yukon ou des provinces.

 

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Mme Louise Hardy: Monsieur le Président, je partage les préoccupations du député. Il faudra étudier la question au comité. Il est très inquiétant que les juges soient des juges fédéraux, car ils n'auront pas de comptes à rendre aux habitants du Nunavut.

M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole sur le projet de loi C-57, Loi portant modification de la Loi sur le Nunavut relativement à la Cour de justice du Nunavut et modifiant diverses lois en conséquence.

D'abord, je voudrais dire que je partagerai mon temps de parole avec le député de Tobique—Mactaquac.

Ce projet de loi modifie le système judiciaire et la nomination des juges dans le nouveau territoire du Nunavut, qui deviendra réalité le 1 avril 1999.

Ce nouveau territoire est créé dans le cadre de l'entente sur la revendication territoriale du Nunavut, conclue initialement par le gouvernement progressiste conservateur en 1993.

Je vais le répéter à titre d'information pour tous les députés parce que les quelques députés qui ont mentionné la superficie du territoire se sont trompés. Le nouveau territoire, sera d'une superficie de 2 242 000 kilomètres carrés, soit environ un cinquième de la superficie du Canada et 69 p. 100 de celle des Territoires du Nord-Ouest actuels.

Il importe d'assurer une transition en douceur en avril quand le Nunavut deviendra réalité. De toute évidence, il est impératif que le système de justice soit en place et que le personnel nécessaire ait été désigné et soit prêt à commencer à travailler le 1er avril 1999.

Les modifications proposées dans ce projet de loi permettront l'établissement d'un système de justice unique au Canada. À l'heure actuelle, les provinces et les territoires disposent d'un système composé de deux instances où un tribunal provincial ou territorial travaille de concert avec un tribunal supérieur, la Cour du banc de la Reine ou une cour suprême selon la terminologie utilisée. Le projet de loi instituera un système de tribunal de première instance à palier unique dans tout l'est de l'Arctique.

Ce projet de loi portant modification de la Loi sur le Nunavut est nécessaire parce qu'en vertu de la loi initiale un système à deux paliers serait établi dans le nouveau territoire. En modifiant la loi, les Inuit du Nunavut espèrent que leur système de justice sera davantage conforme à leurs traditions. La question de savoir si ce sera le cas est encore matière à discussion.

L'une des préoccupations des Inuit concerne l'emplacement des prisons. À l'heure actuelle, il n'y a pas de pénitencier fédéral dans le Nord, de sorte que tous ceux qui purgent une peine de plus de deux ans doivent aller dans un pénitencier du Sud. La seule autre option est une entente de transfert en vertu de laquelle une prison régionale accepterait de garder le détenu en cause. La question, bien qu'importante aux yeux des Inuit, n'a rien à voir avec le système judiciaire et n'est pas abordée dans le projet de loi dont nous sommes saisis.

Aux termes de ces modifications à la loi, trois juges seront appelés à se rendre dans diverses localités périphériques du nouveau territoire du Nunavut. Ces trois juges présideront des causes en matière civile, criminelle et familiale. À l'heure actuelle, la juge qui préside toutes les causes dans l'est de l'Arctique procède de la même façon dans les causes au civil et au criminel. Elle travaille à Iqaluit, mais se déplace pour se rendre, s'il y a lieu, dans les localités éloignées. Toutefois, les causes traitant de questions comme le divorce et l'adoption sont renvoyées à la Cour suprême située à Yellowknife.

Selon la mesure législative, les trois juges chargés de présider les causes au Nunavut auront les mêmes pouvoirs et autorisations pour entendre toutes les causes, sans avoir à les renvoyer à une instance supérieure. Au cas où des appels seraient logés, il existera quand même une cour d'appel, qui s'appellera la Cour d'appel du Nunavut et qui soulève un certain nombre de questions.

Le projet de loi institue un appareil judiciaire à palier unique dans l'est de l'Arctique. La région ouest des Territoires du Nord-Ouest et le reste du Canada surveilleront de près ce nouveau système qui sera mis à l'essai. S'il connaît du succès, je crois comprendre que la région ouest envisage d'adopter une méthode similaire à l'intérieur de son propre système judiciaire.

J'ai eu l'occasion de me rendre à quelques reprises dans l'ouest et dans l'est de l'Arctique et je me réjouis de la création du Nunavut qui verra le jour le 1er avril prochain. L'an dernier, j'ai eu l'occasion de débattre de certaines modifications à la Loi sur le Nunavut qui devaient veiller à ce que les programmes et procédures nécessaires soient en place et fonctionnels au 1er avril 1999.

Cette mesure législative augmente également le nombre de sièges à la Chambre des communes et prévoit la représentation des deux territoires qui forment actuellement les Territoires du Nord-Ouest.

 

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Le Parti progressiste conservateur a aidé à jeter les bases du nouveau territoire. Je suis heureux d'avoir pu travailler à l'élaboration du projet de loi à l'étude, lequel fera en sorte que tout soit en place et prêt à fonctionner en avril prochain. Ce sera un moment historique pour le Canada et une excellente occasion de mettre en place un système de tribunal à palier unique.

Il restera à déterminer si pareil système saura répondre aux attentes élevées des Inuit, mais nous avons ici l'occasion de voir comment le système de justice peut être adapté à des circonstances uniques.

Bien qu'il ait été question à différentes occasions d'un système de tribunal à palier unique comme solution de rechange à un système à deux paliers, l'expérience n'a jamais été tentée. Étant donné les conditions qui existent dans l'est de l'Arctique, voilà une excellente occasion d'établir pareil système.

On suppose que le système de tribunal à palier unique aura l'avantage d'être moins coûteux et plus efficace, puisqu'un seul palier, et non pas deux, se rendra dans les diverses localités. Les coûts de fonctionnement devraient s'en trouver réduits, notamment puisqu'il est nécessaire de se rendre par avion dans les collectivités éloignées.

C'est d'autant plus important si l'on tient compte du fait que le nouveau territoire du Nunavut comprend 26 collectivités dont la population compte environ 26 000 âmes. Ce système pourrait aussi être plus efficace étant donné que chaque juge pourra s'occuper des diverses catégories d'affaires, ce qui devrait réduire les problèmes concernant l'établissement du calendrier des travaux d'un tribunal à deux paliers.

Par contre, cela signifie qu'un seul système peut s'occuper des différents types d'infractions qui relèvent des compétences territoriales aussi bien que fédérales. Certains pourraient s'interroger sur l'équité d'un système qui entend les affaires de tous les paliers.

Par ailleurs, même s'il faudra peut-être faire certains rajustements et s'il y aura peut-être des problèmes mineurs à surmonter, ce système sera unique au nouveau territoire et il sera étroitement surveillé par le gouvernement du Canada, notamment dans la partie occidentale des Territoires du Nord-Ouest actuels.

Le projet de loi est nécessaire pour établir un système de tribunal à palier unique, une autre mesure qui assurera une transition en douceur vers l'établissement d'un nouveau territoire le 1er avril 1999.

Le Parti progressiste conservateur a toujours appuyé la création du Nunavut et le règlement des revendications territoriales qui prévoit l'établissement du nouveau territoire. J'attends avec impatience la création du Nunavut l'an prochain et je continuerai d'appuyer les dispositions législatives qui facilitent la réalisation de ce projet.

Je me réjouis de la possibilité d'étudier le projet de loi en comité.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le député de South Shore nous parler de l'incarcération. Je suppose que cette mesure n'a pas grand-chose à voir avec l'incarcération.

J'aimerais qu'il pousse plus loin ses réflexions sur le sujet étant donné que cela se rattache de toute évidence au système de justice. Il devra y avoir des ententes pour loger le plus près possible de chez eux les détenus condamnés à plus de deux ans de détention, car nous pensons que cela peut augmenter leurs chances de réinsertion sociale.

Le Parti conservateur a une longue tradition de construction de prisons. Je pense tout de suite à celle qui a été construite dans la circonscription de l'ancien premier ministre conservateur québécois, à Port-Cartier, je crois.

Le député a-t-il d'autres idées sur la façon d'aborder les questions d'incarcération? Si je me fie à ce qu'il a dit cet après-midi, il semble posséder de grandes connaissances sur la question.

J'ignore s'il a les chiffres, mais j'aimerais connaître le nombre de détenus dont nous parlons ici. Il nous rendrait service en nous communiquant cette information.

Le député a également dit que, si les modifications visant à instaurer un système unique de tribunaux dans l'est de l'Arctique aboutissent, la population de l'ouest de l'Arctique suivra avec intérêt l'expérience, pour ainsi dire.

À la connaissance du député, la population de l'ouest de l'Arctique subit-elle une forme ou une autre de pression politique pour l'amener à adopter rapidement un système semblable?

 

. 1650 + -

J'aimerais que le député de South Shore éclaire la Chambre sur ces questions.

M. Gerald Keddy: Monsieur le Président, le premier point c'est que les prisons et les musées ont tendance à être traités de façon semblable pour ce qui est de la loi à l'étude et certaines de ses applications à la justice dont parlait le député.

Je ne suis pas un professionnel du droit et je ne prétends pas l'être. Notre parti a examiné cette question et nous l'étudierons en détail en comité. Comme mon collègue le sait, nous avons une occasion en or de mettre à l'essai, dans le nord du Canada où il y a un vaste territoire et beaucoup de recoupements de secteurs de compétence, un système à un seul tribunal. Si on peut régler le problème avec un tribunal unique, nous serions totalement en faveur de le faire.

Sur le plan de savoir si l'incarcération se fera dans le Nord, mous avons un accord en place. Les détails de cet accord en ce qui concerne les peines de plus de deux ans ne sont pas clairs. Nous examinerons cela en comité. La mesure législative soulève beaucoup de questions auxquelles nous n'avons pas encore de réponses. Ce qu'il est important de se souvenir, c'est qu'il s'agit d'un ballon d'essai. Nous avons l'occasion parfaite de créer un système avec un seul tribunal et d'en étudier le fonctionnement.

Quant à la troisième question concernant l'Arctique de l'Ouest et le Yukon, on étudie ce système de près. C'est une chose qui pourrait les intéresser énormément. Ils ont aussi la possibilité d'attendre pour voir comment les choses évoluent. Pour eux, il y a un avantage possible.

Dans l'Arctique de l'Est il y a 2,242 millions de kilomètres carrés et 26 villages. Il est bien difficile d'attendre pour voir s'il faut un système à un tribunal.

M. Gilles Bernier (Tobique—Mactaquac, PC): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui sur le projet de loi C-57, Loi portant modification de la Loi sur le Nunavut relativement à la Cour de justice du Nunavut et modifiant diverses lois en conséquence.

J'appuie entièrement les observations de mon collègue de South Shore qui a été un porte-parole énergique non seulement pour ses électeurs, mais aussi pour le Parti progressiste conservateur du Canada dans les dossiers concernant le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Je loue également les efforts de la députée de Nunavut. Même si nous nos allégeances diffèrent, je sais qu'elle est profondément engagée à défendre les intérêts de ses électeurs qui se préparent à entrer dans le XXIe siècle à titre d'habitants du plus récent territoire du Canada.

Il est regrettable de voir le chef de l'opposition officielle utiliser cyniquement le débat sur la Loi sur le Nunavut qui a eu lieu plus tôt dans la session pour faire valoir son programme politique concernant la réforme du Sénat. La longue diatribe du chef de l'opposition officielle contre la Chambre haute, où son père a déjà siégé, prouve une fois de plus que, même s'il sait jouer le jeu de l'opposition avec les meilleurs politiciens, il n'a pas les qualités qu'il faut pour diriger le Canada. Les habitants de Nunavut méritent mieux.

Heureusement, le Canada a eu un chef qui avait assez d'ouverture d'esprit et de vision pour mettre en oeuvre un programme vraiment dynamique. Les Canadiens ont eu le très honorable Brian Mulroney, qui a lancé le processus menant à la création du territoire du Nunavut, en signant l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut en 1992.

L'établissement du Nunavut est une autre raison qui explique pourquoi M. Mulroney a été nommé compagnon de l'Ordre du Canada. De plus, grâce à l'ancien gouvernement conservateur et à son ministre des Affaires constitutionnelles Joe Clark, qui revient d'ailleurs sur la scène nationale, les peuples autochtones ont participé pleinement aux négociations formelles portant sur la Constitution et ce, pour la première fois de l'histoire au Canada.

Brian Mulroney demeure un bouc émissaire commode pour les libéraux qui s'en prennent à lui pour se défendre.

 

. 1655 + -

N'empêche qu'on ne dira jamais assez que le précédent gouvernement progressiste conservateur a donné une voix aux peuples autochtones à la table constitutionnelle. Il leur a aussi donné une voix par l'intermédiaire de la commission royale et dans le cadre de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Il a en outre donné une voix aux Inuit en signant l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut.

Nous voici en train de débattre d'une autre mesure législative présentée par le gouvernement qui découle en droite ligne des réalisations de l'ancien gouvernement progressiste conservateur. Je ne suis pas inquiet quant à ce qui arrivera quand les libéraux seront à court de politiques volées à l'ancien gouvernement. Les Canadiens se tourneront vers les progressistes conservateurs pour les charger de faire des changements utiles et progressistes afin d'améliorer le pays. Même si les politiques ambitieuses de notre parti n'étaient pas populaires à l'époque, l'histoire prouve encore une fois que, dans l'ensemble, ces politiques progressistes conservatrices sont avantageuses pour tous les Canadiens.

Le projet de loi C-57 vise à assurer la meilleure cour de justice possible au Nunavut. Il y en a peut-être qui s'opposent à ce qu'on donne aux habitants du Nunavut un système juridique à palier unique. On peut craindre que, du point de vue juridique, ce projet de loi crée un dangereux précédent. On peut dire que ce projet de loi viole, d'une certaine manière, les dispositions de la Charte des droits et libertés sur l'égalité.

Je ne partage pas ces opinions. Le projet de loi C-57 semble adapté aux circonstances uniques qui caractérisent les habitants du Nunavut. D'abord et avant tout, dans cet environnement unique, les Inuit constituent la grande majorité de la population du Nunavut, soit 17 000 des 22 000 habitants, ou 77 p. 100. Le territoire du Nunavut représente aussi environ le cinquième du territoire du Canada. Pourtant, sa population totale n'est que de 22 000 habitants. C'est moins qu'un quart pour cent de la population du pays.

Comparons la taille et la population du Nunavut à celles d'autres juridictions. Avec 1,9 million de kilomètres carrés, le Nunavut arrive juste après le Groenland. Le Nunavut a cinq fois la taille de l'Allemagne, quatre fois la taille de la Suède et un cinquième de la taille de la Chine.

Considérons maintenant la distribution de la population sur le territoire. Le Nunavut ne compte qu'un centième de personne au kilomètre carré. Le Canada au complet compte près de trois personnes au kilomètre carré. L'Ontario compte 11 habitants par kilomètre carré, la Chine, 120 et l'Allemagne, 220.

Les principales caractéristiques humaines et territoriales du Nunavut ne sont pas uniques au Canada, elles sont uniques au monde. Par exemple, le Nunavut n'a que 20 kilomètres de routes. En outre, les localités sont très différentes les unes des autres. La plus grande est sa future capitale, Iqaluit. Elle compte plus de 3 000 habitants. Cette localité est située à quelque 2 000 kilomètres d'Ottawa, et les températures moyennes varient entre moins 30 degrés Celsius en janvier et 15 degrés en juillet. Les habitants d'Iqaluit ont 24 heures de lumière par jour en juin, et au plus six heures en décembre.

Par ailleurs, Grise Ford, la localité la plus au nord du Nunavut, est située à 2 700 kilomètres d'Ottawa. Elle compte environ 130 habitants et la température moyenne se situe à moins 35 degrés en janvier et à 10 degrés en juillet. Ces gens robustes ont également 24 heures de lumière par jour en juin et vivent dans l'obscurité complète en décembre.

Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough a dû relever des défis énormes lorsqu'il pratiquait le droit dans la région rurale d'où il vient. Il m'a dit qu'il avait du mal à concevoir comment les procédures judiciaires, qu'elles soient liées au droit pénal, civil ou familial, pouvaient avoir lieu efficacement dans une juridiction aussi vaste, avec une population aussi peu nombreuse et des localités aussi diverses.

Comme on l'a déjà mentionné, le projet de loi C-57 modifie plusieurs lois fédérales actuelles. Il modifie la Loi sur le Nunavut pour instituer un tribunal de première instance à palier unique, qui sera appelé Cour de justice du Nunavut.

Il modifie la Loi sur les juges afin de prévoir la nomination de trois juges de juridiction supérieure à la Cour de justice, le juge principal de chacun des trois territoires devant être membre du Conseil canadien de la magistrature. Il insère au Code Criminel des mécanismes procéduraux adaptés à la Cour de justice et précise: les pouvoirs des juges et des juges de paix, les appels en matière de procédure sommaire, un nouveau mode de révision judiciaire, la mise en liberté provisoire par voie judiciaire et le choix du mode de jugement.

 

. 1700 + -

Enfin, le projet de loi C-57 modifie la Loi sur les jeunes contrevenants afin d'harmoniser les structures judiciaires et la procédure avec celles du Code criminel.

Par conséquent, j'estime que le projet de loi C-57 est une mesure positive qui reconnaît les conditions particulières des habitants du Nunavut. J'ai hâte de travailler avec mes collègues du caucus, les députés de South Shore et du Nunavut, ainsi que les autres députés de la Chambre, mais tout particulièrement les habitants du Nunavut, lorsque le Comité de la justice étudiera cette mesure législative.

Il faut s'assurer que le projet de loi C-57 reflète adéquatement les besoins du Nunavut et l'obligation qu'a le gouvernement du Canada de protéger la nouvelle cour de justice. Il faut poursuivre le travail entrepris par l'ancien gouvernement progressiste conservateur pour assurer aux Inuit leur autonomie gouvernementale.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les remarques du député. Étant que celui-ci est avocat, il est en mesure d'offrir une perspective différente relativement à cette mesure législative.

La question que je veux lui poser au sujet du nouveau système qui sera appliqué au Nunavut est celle de savoir si la structure offrira la souplesse nécessaire pour répondre aux besoins des communautés autochtones. Nous savons tous qu'il existe des traditions très différentes dans notre pays, au niveau de la justice et de son application.

En m'amenant ici ce matin, j'écoutais Radio-Canada et on discutait de la possibilité de recourir à des conseils de détermination de la peine dans les collectivités du sud du pays, comme par exemple la municipalité régionale d'Ottawa-Carleton. J'aimerais que le député me dise si, à sa connaissance, le système offre la souplesse nécessaire à cette fin. J'aimerais savoir si, en vertu de la mesure législative proposée, le système est assez souple pour offrir ce genre de solutions de rechange dans le nord.

Il va de soi que certains mécanismes découlant du système judiciaire britannique diffèrent énormément de ceux du système appliqué chez les autochtones. Le député dispose-t-il de renseignements sur cette question et sait-il si nous verrons des systèmes de justice plus innovateurs dans les communautés nordiques, des systèmes qui correspondent mieux aux besoins et aux traditions des personnes qui vivent dans ces communautés?

M. Gilles Bernier: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Au Canada, nous avons plusieurs provinces et territoires. Nous avons des lois provinciales et fédérales. Je suis sûr que cette nouvelle loi sera utile à la population du Nord. Je puis assurer le député que l'objet de sa question sera étudié au comité très prochainement.

L'hon. Lorne Nystrom (Regina-Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, j'ai écouté le député avec beaucoup d'intérêt. Il a parlé du Sénat, du fait que le Parti réformiste avait été trop négatif au sujet de l'autre endroit, de tous ces admirables sénateurs et quoi encore.

J'ai remarqué dans le dernier sondage que de plus en plus de personnes veulent abolir le Sénat. Le sondage Angus Reid montrait, il y a quelques mois, que 41 p. 100 de la population voulait l'abolir tandis que 43 p. 100 voulait plutôt une réforme de cette institution. En décembre dernier, un sondage Pollara avait montré que 34 p. 100 de la population voulait l'abolir tandis que 33 p. 100 voulait le réformer.

Je me demande si le député se joindrait à un projet lancé par le député de Sarnia et moi-même pour abolir le Sénat en préparation du nouveau millénaire, afin d'améliorer l'état de la démocratie dans notre pays. Cela semble correspondre aux désirs des Canadiens. Je sais que le Parti conservateur a un processus très démocratique pour la sélection de son chef, puisque c'est un parti du peuple.

 

. 1705 + -

M. Bob Kilger: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je veux seulement rappeler aux députés que nous discutons du projet de loi C-57, Loi portant modification de la Loi sur le Nunavut relativement à la Cour de justice du Nunavut et modifiant diverses lois en conséquence. Sommes-nous passés à autre chose? Ai-je manqué quelque chose?

Le président suppléant (M. McClelland): Non, bien que le débat ait porté sur la notion du changement dans la représentation et sur l'autre endroit.

M. Gilles Bernier: Monsieur le Président, je remercie le député néo-démocrate de sa question.

J'ai dit que, lorsque nous avons tenu ce débat à la Chambre des communes, le chef de l'opposition officielle n'en avait pas parlé. Il était davantage intéressé à parler du Sénat. C'est ce que je voulais dire.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à souligner l'importance de ce qu'ont fait pour le Canada les résidents qui vivent au nord du 60e parallèle. Je rappelle, par exemple, que leur présence a été extrêmement importante au maintien de la souveraineté canadienne dans l'Arctique.

Ces personnes vivent dans une région du Canada qui connaît un dur climat. Ils ont des conditions de vie difficiles et vivent dans une région où il n'est pas aisé de gagner sa vie.

Comme je représente une circonscription du nord de la Colombie-Britannique qui compte de nombreuses petites communautés reculées, j'ai une certaine idée, quoique imparfaite, de ce qu'est la vie au nord du 60e parallèle.

Voyons en quoi consiste le projet de loi et demandons-nous très sérieusement à quoi il aboutira. À entendre certains des députés qui ont pris la parole aujourd'hui, on croirait que les résidents qui vivent au nord du 60e parallèle n'ont pas de système judiciaire et n'ont pas accès à la justice.

Nous savons que c'est faux et que ces gens ont accès à la justice depuis l'établissement de la souveraineté du Canada en 1867.

Nous constatons, du moins c'est le cas du Parti réformiste, que ce projet de loi, comme d'autres mesures législatives qui l'ont précédé, vise à renforcer l'idée d'un territoire du Nunavut. Dans l'esprit de nombreux députés réformistes, la création du Nunavut est un projet très boiteux, financièrement irresponsable et qui témoigne d'une absence de rigueur intellectuelle.

Le fait de reconnaître que les gens qui vivent au nord du 60e parallèle subissent un climat difficile et des conditions de vie éprouvantes ne justifie pas pour autant qu'on doive adopter l'idée d'un territoire du Nunavut et puiser 300 millions de dollars dans les poches des contribuables pour la réaliser.

L'État dépensera 12 000 $ par personne pour un territoire de 25 000 habitants, c'est-à-dire l'équivalent de la population d'une ville rurale moyenne au Canada. Je rappelle qu'environ la moitié de ces personnes sont des mineurs. Le gouvernement dépensera donc des sommes considérables pour une population peu nombreuse.

Le gouvernement va devoir établir un système judiciaire, créer une assemblée législative, un Sénat et tout ce que l'on associe au concept de territoire au Nunavut.

Selon bien des personnes, y compris des constitutionnalistes, des gens qui étaient autour de la table en 1980-1981 lorsque l'ancien premier ministre Trudeau était en train de rapatrier la Constitution au Canada, l'établissement du Nunavut est une façon détournée de créer une province.

 

. 1710 + -

À strictement parler, si le gouvernement fédéral et les autres provinces s'entendaient pour qu'une nouvelle province soit créée, il faudrait suivre un processus pour apporter la modification constitutionnelle nécessaire à cette fin.

Cependant, le gouvernement fédéral a décidé, de façon arbitraire et seul, de créer ce nouveau territoire appelé le Nunavut, qui est une province en fait.

Je prétends que viendra un temps où quelqu'un, une province ou un groupe va contester la constitutionnalité de la loi créant le Nunavut. Je crois également qu'il est très probable que les tribunaux donnent raison aux intéressés.

Il faut se demander ce qu'on pourrait faire pour les gens qui vivent au nord du 60e parallèle avec les dépenses proposées. Et n'oublions pas que le coût de mise en oeuvre de 300 millions de dollars n'est qu'une petite partie du coût global. En fait, ce qu'ils obtiennent c'est une énorme bureaucratie. On vient renforcer l'idée selon laquelle les grosses bureaucraties accroissent d'une façon ou d'une autre le niveau de vie des gens et créent de la richesse. Nous savons qu'il n'en est rien.

Nous savons que depuis de nombreuses décennies maintenant, les gouvernements libéraux et conservateurs à Ottawa ont essayé de mettre en pratique cette politique financière erronée et que cela a presque conduit le pays à la faillite. Je n'aurais jamais pensé voir cela, mais à l'heure actuelle, même des libéraux reconnaissent que nous devons trouver d'autres façons que l'intervention gouvernementale pour accroître le niveau de vie des gens, améliorer leur qualité de vie.

Ce qu'on propose dans le cas du Nunavut, c'est une énorme infusion de fonds fédéraux pour mettre en oeuvre et maintenir de façon permanente une structure qui est censée améliorer le niveau de vie des gens de la région. Je prétends que ce n'est pas une question de création de richesses, mais c'est une question de transfert permanent de richesses du reste du Canada à une région géographique extrêmement étendue et très peu densément peuplée. Je pense que le raisonnement qui sous-tend la création du Nunavut est erroné.

Lorsqu'on examine le projet de loi dont nous sommes saisis, un certain nombre de questions nous viennent à l'esprit. Qu'est-ce qui manque? Combien ce projet de loi va-t-il coûter? Combien va-t-il falloir dépenser pour la mise en oeuvre et le maintien de cette structure? Qui va payer la note?

Je ne pense pas que les 25 000 habitants de l'Extrême-Arctique vont pouvoir supporter le coût de tout ceci de façon régulière grâce à leur assiette fiscale. Je ne peux pas voir comment.

Ce que nous disons, en fait, c'est que le gouvernement canadien, c'est-à-dire les contribuables canadiens de tout le pays, va supporter les coûts de ce nouveau système de justice à jamais. Il y a quelque chose de fondamentalement répréhensible dans cela. On peut très bien offrir aux gens qui vivent au nord du 60e parallèle un système de justice et les services de tous les autres ministères gouvernementaux de façon beaucoup plus rentable et beaucoup plus équitable pour les contribuables du reste du pays.

Je le répète, c'est le résultat d'un processus intellectuel qui, au mieux, est erroné et au pire, peut conduire à la faillite.

 

. 1715 + -

Ceux qui ont concocté cette mesure et qui l'ont fait adopter par les Communes continuent à l'appuyer et à faire adopter de nouvelles lois pour le Nunavut. Ils n'ont pas été honnêtes avec eux-mêmes ou avec les Canadiens qui habitent au nord du 60e parallèle et qui doivent, censément, bénéficier de cette mesure. Ils n'ont pas été honnêtes non plus avec les autres Canadiens.

On peut dresser bien des parallèles. Je sais qu'il ne s'agit pas d'un traité territorial ni d'un accord sur une revendication territoriale, mais il y a certainement eu une réflexion intense avant qu'on ne crée le Nunavut. Si cette initiative a été appuyée, c'est sur la foi du principe selon lequel la population qui habite au nord du 60e parallèle et qui est à prédominance autochtone, inuit, devrait être davantage maître de son propre destin.

Je ne pense pas qu'un seul député rejette cette idée. Personne ne soutiendra que ces gens-là doivent être sous la coupe d'Ottawa. Dieu sait que, comme Britanno-Colombien qui a grandi dans les années 60 et 70, j'en ai eu tout mon soûl d'entendre Ottawa nous dire, à ma province et à moi, comment nous devions vivre.

Une voix: Ottawa le fait encore.

M. Mike Scott: Les gens d'Ottawa veulent encore nous dire quoi faire. C'est pourquoi le Parti réformiste est ici. C'est pourquoi il est important de ne pas abolir le Sénat, mais d'avoir plutôt un Sénat efficace et élu. C'est un moyen d'assurer aux régions, le nord du Canada compris, la possibilité de faire contrepoids à la très forte représentation qui siège aux Communes. C'est là qu'est le point faible du raisonnement de mon collègue qui a soulevé la question il y a quelques minutes.

À première vue, l'idée est immédiatement séduisante, mais à long terme elle ne servira pas les régions du Canada. En fait, cela les prive pour toujours de la possibilité d'avoir une représentation égale et effective fondée sur un modèle régional plutôt qu'une représentation fondée sur la population.

Si nous abandonnons l'idée d'un Sénat triple-E, nous nous résignons pour toujours à voir le Canada central dicter au reste du pays et aux régions la façon dont nous allons vivre notre vie. Cela serait laisser tomber nos électeurs, surtout pour ceux d'entre nous qui venons de régions rurales.

Je vois de nombreux parallèles entre le raisonnement qui a donné naissance au Nunavut, aux institutions que l'on est en train de créer, dont le système judiciaire, et le raisonnement qui a présidé et qui préside encore au processus d'élaboration des traités en Colombie-Britannique.

Par exemple, dans l'accord avec les Nisga'a en Colombie- Britannique, le premier accord de règlement des revendications territoriales à avoir été conclu ou apparemment conclu, car ce n'est pas encore chose faite, le gouvernement entend créer un système judiciaire séparé, exactement comme on tente de le faire en l'occurrence avec le projet de loi concernant le Nunavut. Cela donne l'impression que les gens de ce territoire n'ont pas accès à la justice actuellement, qu'ils sont laissés à l'écart ou traités injustement. Je soutiens simplement que ce n'est pas le cas.

Je ne comprends pas comment on peut justifier de dire à un groupe de personnes, que ce soit sur une base ethnique comme dans le cas des Nisga'a, ou sur une base géographique comme dans le cas du Nunavut, qu'ils ont droit à un système judiciaire séparé qui coûtera un montant énorme compte tenu du nombre de personnes qu'il est censé servir.

Nous, de ce côté-ci de la Chambre, déplorons énormément le manque de sensibilité du système judiciaire à l'heure actuelle et trouvons qu'il n'accomplit pas ce qu'il devrait accomplir. Mais il existe quand même pour tous les Canadiens. Je ne vois pas comment les députés d'en face peuvent soutenir à bon droit que des gens sont laissés pour compte et ont besoin de leur propre système judiciaire pour s'en trouver mieux. Je ne comprends absolument pas ce raisonnement.

 

. 1720 + -

La justification intellectuelle de la création du Nunavut au coût de 300 millions de dollars ne se tient tout simplement pas. La mesure à l'étude sert à faire avancer cette mauvaise idée. Je ne le dis absolument pas par manque de respect envers les habitants du Grand Nord, mais simplement pour reconnaître la réalité.

Par conséquent, je ne puis appuyer la mesure à l'étude. J'aimerais bien reconnaître la contribution des gens qui vivent dans le Grand Nord, mais je devrai voter contre quand la Chambre sera appelée à se prononcer sur le projet de loi.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue de l'érudition dont il a fait preuve en narrant ce qui s'est passé au Nunavut, à savoir la création du Nunavut par une loi émanant du Sud. Il a mentionné certaines erreurs et la vision à courte vue qui ont entaché la première législation. Il a signalé l'apport de la population.

Je rends hommage à ma collègue du Yukon qui a expliqué avec beaucoup de compassion combien il était nécessaire que justice soit rendue dans cette partie du Canada. Elle a dit que nous souhaitions tous la justice et c'est bien mon avis.

Mon collègue souscrit-il à l'idée que, si justice doit être rendue, cette justice doit être égale pour tous les Canadiens? Un des éléments d'un système de justice égalitaire, c'est qu'il soit plus ou moins parallèle. Nous sommes devant une situation où l'enjeu est apparemment la justice. L'égalité des citoyens devant et sous la loi est également l'enjeu et l'objet d'un système de justice complet et équitable.

En quoi la création d'une structure des tribunaux totalement différente de celle qu'on retrouve dans les autres provinces dans une partie du Canada, à savoir le Nunavut, peut-elle servir l'égalité de la justice? Pourquoi cette partie du Canada devrait-elle disposer d'un système de justice à part?

M. Mike Scott: Monsieur le Président, je remercie le député de son excellente question. Il a mis le doigt sur l'essentiel du problème.

Selon les principes qui m'ont été inculqués lorsque je grandissais, le Canada a été et est fondé sur la notion de nationalisme civique. Cela signifie que notre participation à la démocratie ne dépend pas de notre sexe, de notre race, de notre langue ni de notre religion. Elle ne dépend d'aucune caractéristique distinctive. Pour y participer, il faut être majeur, chaque individu ayant droit à un vote. Nous avons tous les droits et libertés que nous confère la Charte des droits et libertés. Avant, ces droits nous étaient conférés en vertu de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique.

Le projet de loi montre encore une fois que nous devons être prudents. Le Canada risque en effet de délaisser la notion de nationalisme civique au profit de ce que je considère être le principe régressif et moins intéressant du nationalisme ethnique. Nous sommes témoins de cela dans bien des secteurs. Nous en avons même été témoins à la Chambre. Je dis cela respectueusement, parce que je ne veux attaquer aucun député injustement ou d'une manière injustifiée.

Examinons la disposition de la Constitution qui garantit nos droits et libertés et qui les énonce. Le paragraphe suivant stipule que, même si nous avons ces droits et libertés, le gouvernement peut les abroger s'il estime que c'est dans l'intérêt de notre pays. Je ne vois pas comment une personne sensée pourrait accepter qu'on prive quelqu'un de ses droits pour quelque raison que ce soit. Ces droits devraient être immuables. Ils devraient être des piliers, des pierres angulaires qui ne pourront jamais être affectés par quelque mesure gouvernementale que ce soit.

 

. 1725 + -

Ce qui est proposé dans tout le nouveau concept du Nunavut risque fortement de rompre le principe de l'égalité de tous les Canadiens devant la loi et du droit de tous les Canadiens d'avoir un accès égal aux institutions gouvernementales, y compris celles de la justice. Cela se rapproche dangereusement du principe de nationalisme ethnique, principe que je ne pourrais jamais appuyer et qu'une majorité de Canadiens n'appuieraient pas non plus, je pense.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais poser une question concernant le système des juges dans le nouveau territoire.

Dans 14 mois nous serons dans un nouveau millénaire. Avec le système de justice qu'apportera ce projet de loi, quel espoir ont les habitants d'avoir dans le nouveau territoire le même système de justice que tous les autres Canadiens?

M. Mike Scott: Monsieur le Président, je ne suis pas sûr de comprendre la question du député, mais j'hésite à croire que ceux qui chercheront justice en vertu du système dont nous parlons auront le même accès et le même traitement désengagé que les autres Canadiens attendent du système.

Il est important, dans une nation civilisée comme le Canada, que tous les citoyens aient la conviction profonde que la justice est neutre, non engagée et rend des décisions justes ne prenant en considération aucun facteur autre que les faits reconnus par tout système de justice.

Lorsque je regarde ce projet de loi et pense à ce qu'il y a derrière, je m'inquiète. Cela ne m'inquiète pas autant que le principe de la création du Nunavut lui-même, mais je n'accepte certainement pas la notion que certains Canadiens, du fait de l'endroit où ils vivent ou d'autres raisons particulières, aient accès à une justice différente, ayant des règles, des règlements et des protocoles différents de ceux que nous avons dans le reste du Canada.

Je ne sais pas si j'ai répondu assez succinctement à la question du député. J'espère que oui, car c'est le mieux que je puisse faire pour le député.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, ce projet de loi modifiant la Loi sur le Nunavut me porte à croire que le gouvernement avait peut-être agi un peu vite en légiférant la première fois, puisqu'il parle maintenant d'établir un système de justice différent de celui qui est en place partout ailleurs au Canada. Bien sûr, on aurait pu profiter de l'occasion pour mettre en place un système différent pour sélectionner des sénateurs. Le gouvernement doit prévoir un nouveau siège au Sénat pour que ce territoire y soit représenté.

M. Mike Scott: Monsieur le Président, je serai bref, car vous ne me donnez pas le choix.

Pour répondre à la question du député, je dirai qu'il est évident que le gouvernement choisit; il joue à pile je gagne et face vous perdez. Il ne tolère pas qu'il soit question de la réforme du Sénat en parlant du Nunavut, mais il n'hésite pas à modifier le système de justice si cela lui convient.

 

. 1730 + -

Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 17 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES

L'hon. Lorne Nystrom (Regina-Qu'Appelle, NPD) propose:  

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait faire preuve de leadership et décréter une taxe sur les transactions financières de concert avec tous les pays de l'OCDE.

—Monsieur le Président, j'ai consulté tous les partis et, si je ne m'abuse, il y aurait consentement unanime concernant la motion suivante:

Je propose:  

    Qu'on modifie la motion en retranchant les mots «tous les pays de l'OCDE» et en les remplaçant par ce qui suit: «la communauté internationale».

Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

(L'amendement est adopté.)

Le président suppléant (M. McClelland): Le débat porte maintenant sur la motion telle qu'amendée.

L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, je remercie les députés d'avoir accepté à l'unanimité cette modification qui traduit un plus large consensus au Canada et à la Chambre.

L'objectif de la motion d'aujourd'hui, qui est une des rares motions d'initiative parlementaire sur lesquelles nous pouvons voter, est de lancer un débat sur une nouvelle idée qui, à bien des égards, est déjà vieille. Elle a été mise de l'avant pour la première fois par James Tobin, prix Nobel d'économie de 1992. Il avait en effet proposé dès 1981 que l'on impose une très petite taxe sur les transactions en devises comme moyen de réglementer ou d'ordonner le marché international des opérations en devises. Cela doit se faire de concert avec la communauté internationale, car un pays ne pourrait pas à lui seul imposer une telle taxe. Cette mesure mettrait un peu d'ordre dans la situation mondiale que l'on connaît aujourd'hui.

Le deuxième objectif de la motion est d'utiliser les recettes pour établir un fonds de développement international qui servirait à financer de nombreux projets partout dans le monde. Je reviendrai à cet aspect tout à l'heure.

Il est maintenant temps de commencer à étudier de nouvelles façons d'oeuvrer pour le bien commun, et pas seulement au Canada, mais partout dans le monde. M. Tobin a lancé cette idée il y a déjà quelques années. Il s'agit d'imposer une très petite taxe sur les transactions financières en devises. Partout dans le monde, le chiffre de 0,1 p. 100 est avancé, ce qui représente un dollar pour chaque tranche de 1 000 $. Si vous achetiez un appartement en copropriété de 100 000 $, cette taxe représenterait 100 $.

J'aimerais donner à la Chambre une idée de l'ampleur du projet envisagé. Dans les années 1970, les échanges mondiaux en devises s'élevaient à environ 17 milliards de dollars par jour. Aujourd'hui, ils atteignent 1,3 billion de dollars. C'est un chiffre si gros que l'on peut difficilement imaginer ce qu'il représente. On peut comparer, par exemple, le commerce mondial de produits et de services qui, chaque année, 365 jours par année, représente 4,3 billions de dollars et les échanges monétaires, qui se chiffrent à 1,3 billion de dollars par jour. C'est beaucoup d'argent.

 

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Les conséquences de cela, c'est que beaucoup de gens ont le sentiment que les États-nations ont cédé une grande part de leur souveraineté à ceux que nous appelons parfois les gars en bretelles rouges, qui font des spéculations sur les devises dans le monde.

Il est très opportun de traiter de cette question en ce moment, car une bonne partie du monde est en récession et beaucoup de gens prédisent une dépression mondiale. Nous en avons vu les conséquences énormes sur les devises étrangères et l'effet sur notre propre monnaie. Nous avons été témoins des problèmes en Asie du Sud-Est et en Thaïlande, problèmes qui se sont répandus à d'autres pays de cette région du monde, au Japon, à la Russie, qui est maintenant pratiquement sans gouvernement et dans un état de chaos total. Les problèmes se répandent également au Brésil et dans certaines régions de l'Amérique latine.

Une grande partie de ces problèmes est attribuable au mouvement rapide de capital à court terme qu'on cherche à placer pour en maximiser le rendement. Cela se fait en appuyant sur un bouton d'ordinateur; des milliards de dollars sont échangés, je le répète, au rythme de 1,3 billion de dollars par jour.

Notre pays est-il impuissant devant cela? Voulons-nous plutôt affirmer notre souveraineté et tenter, de concert avec les autres citoyens du monde, de trouver un moyen pour ramener un peu d'ordre dans l'agitation que connaissent actuellement les marchés financiers internationaux? À mon avis, la réponse est oui.

Le gouverneur de la Banque du Canada a comparu devant le Comité des finances hier soir. Le ministre des Finances y a également comparu hier soir. Tous deux ont dit qu'il fallait tenter de ramener un peu d'ordre sur les marchés financiers mondiaux. C'est une idée à laquelle nous devrions songer, je crois, pour tenter d'atteindre cet objectif.

Une des conséquences des bouleversements technologiques et de la mondialisation dont nous sommes témoins aujourd'hui a été la disparition du pouvoir de l'État-nation. À mon avis, personne ne pourrait le contester. Mais cette situation offre à la race humaine de nouvelles possibilités en ce qui concerne sa façon de se gouverner. Je crois que nous devrons maintenant commencer à faire sur le plan international bien des choses que nous avions l'habitude de faire sur le plan national, chaque pays individuellement en tant qu'État-nation, car les frontières disparaissent de plus en plus.

Quand on observe l'offensive contre les programmes sociaux partout dans le monde, quand on observe les problèmes environnementaux dans le monde, quand on observe le manque de souveraineté réelle sur le plan de la politique monétaire d'un pays à l'autre, je pense qu'on se rend compte qu'il faut prendre des mesures communes avec d'autres pays. Cela ouvre une toute nouvelle et intéressante perspective sur le monde de demain où, quelle que soit la couleur de leur peau, quelle que soit la région du monde où ils habitent, tous conjugueront leurs efforts pour le bien-être et des objectifs communs.

Une façon de le faire consiste à prélever pour la première fois une taxe minime sur les opérations financières partout dans le monde. C'est une avenue que nous devrions explorer. L'heure consacrée aux initiatives parlementaires est justement le bon moment pour le faire parce que nous pouvons tous voter librement sans tenir compte de la discipline de parti ou des consignes de nos whips. Cette motion n'oblige pas le gouvernement à agir. Elle dit que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait faire preuve de leadership et décréter une taxe sur les transactions financières, de concert avec la communauté internationale.

Le ministre des Finances a fait des déclarations publiques dans lesquelles il se disait intéressé en principe au concept de la taxe Tobin. Il s'est penché très sérieusement sur la question en 1995, lors de la conférence du G7, à Halifax. Il a demandé que l'on fasse des études sur ce concept.

L'une des raisons pour lesquelles le ministre des Finances est devenu plutôt pessimiste quant à l'adoption d'une telle taxe au cours de l'année qui vient de s'écouler, c'est qu'il ne pensait pas que l'idée serait retenue à cause de la position du gouvernement de la Grande-Bretagne et de celui de l'Allemagne, deux grands pays européens.

Or, depuis un an, ces deux gouvernements ont changé. En Grande-Bretagne, ce sont maintenant Tony Blair et le Parti travailliste qui sont au pouvoir, alors qu'en Allemagne, M. Schroeder et les Sociaux-démocrates ont été élus il y a trois semaines. Dans les deux cas, ces gouvernements sont prêts à examiner la possibilité d'appliquer la taxe Tobin et à déterminer si on peut s'entendre sur une méthode permettant de faire de cette taxe une composante réalisable du nouvel ordre mondial et de la nouvelle vision mondiale.

 

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Cela pourrait être excitant pour notre pays et pour notre Parlement. Nous devrions demander au ministre des Finances de jouer le rôle de chef de file relativement à cette question très importante pour le monde de demain.

Comme je l'ai dit, cette question a déjà été débattue. L'idée a été lancée par M. Tobin, l'économiste qui a remporté le prix Nobel. On en a parlé en octobre 1987 lors de la débâcle boursière qui a frappé le monde entier. On en a aussi parlé en 1984 lorsque le peso mexicain s'est effondré, entraînant une importante fuite de capitaux qui a causé beaucoup de difficultés et de pauvreté chez les Mexicains ordinaires.

Encore une fois, ce débat a été ravivé par l'excès de capitaux partout dans le monde à la recherche d'un refuge sûr et de profit, même si la majeure partie de cet argent s'en va aux États-Unis. Voilà une autre raison qui fait que nous devrions examiner cette possibilité.

Je veux donner trois exemples de la taxe Tobin. Tout d'abord, je dirai à mes collègues hautement préoccupés par les questions fiscales qu'il s'agit d'une taxe très minime. On parle actuellement d'une taxe de 0,1 p. 100, et elle serait peut-être même inférieure à cela. Cela n'aurait pratiquement aucune incidence sur les investissements à long terme dans le monde, les investissements à long terme dont les pays développés et les pays en développement ont tous besoin. La taxe serait si minime qu'elle n'aurait aucun effet sur les investissements à long terme.

Par contre, elle aurait un effet dissuasif pour ce qui est de la spéculation à court terme, c'est-à-dire l'argent qui est investi dans un marché pendant quelques minutes, quelques heures ou quelques jours et qui est retiré ensuite de ce marché après des gains à court terme. Cet argent se promène partout dans le monde, et les marges de profit sont très faibles. Cela a pour effet de créer d'importantes distorsions dans des économies nationales comme celles du Mexique, du Brésil ou encore de la Russie, comme nous le voyons aujourd'hui. Cela a même un effet sur nous, rendant notre dollar plus faible qu'il ne devrait l'être, à cause de tout cet argent qui cherche refuge aux États-Unis.

Une telle taxe n'aurait aucune incidence sur les investissements à long terme, mais elle rétablirait un semblant d'ordre dans la communauté internationale et dans le monde des hommes aux bretelles rouges qui s'amusent avec les devises comme si le monde était un gigantesque casino, sans se soucier de l'effet de leur jeu sur les travailleurs de chaque pays.

Une telle taxe apporterait plus de stabilité aux exportateurs, aux importateurs, aux investisseurs et au gouvernement pour ce qui est de la planification des budgets, des politiques gouvernementales et des politiques monétaires des États-nations partout dans le monde. Elle apporterait plus de stabilité parce que la grande volatilité de l'économie casino serait tempérée dans une certaine mesure.

Enfin, comme je l'ai dit, cette taxe réduirait le pouvoir des spéculateurs et accroîtrait celui des gouvernements nationaux de faire plus de choses dans leur pays et d'exercer un plus grand pouvoir par l'entremise d'organismes et d'organisations internationales. C'est la principale raison pour ladite taxe Tobin, la taxe sur les transactions internationales.

La deuxième raison de cette motion, c'est de recueillir des fonds pour financer des projets valables un peu partout dans le monde. C'est l'objectif secondaire, mais il est très important. Il arrive souvent que se produisent des catastrophes mondiales et que nous ayons du mal à recueillir des fonds pour y faire face. Il y a actuellement aux États-Unis un important débat afin de déterminer ce que les Américains devraient verser aux Nations Unies pour leur permettre de continuer à fonctionner, un débat entre les républicains et les démocrates, entre le bureau du Président et le Congrès.

Je me souviens de la catastrophe de Tchernobyl, l'explosion du réacteur en Ukraine, et du temps qu'il nous a fallu pour trouver les fonds nécessaires pour les secours aux victimes et la décontamination. L'argent pourrait servir à de nombreux projets de développement dans le monde.

Je pense à toute la question des emplois, de l'économie et des millions de personnes qui se retrouvent sans travail à cause de ce qui se passe dans bien des régions du monde. Une partie de cet argent pourrait servir à la création d'emplois. Une partie pourrait servir au maintien de la paix, à l'enlèvement des mines, à la recherche médicale, au financement des projets environnementaux et à la recherche environnementale. Cet argent pourrait servir à beaucoup de choses.

 

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Pour vous donner des exemples, une taxe Tobin de 0,1 p. 100 sur les transactions en devises étrangères permettrait de recueillir 176 milliards de dollars américains en dollars de 1995. C'est énorme. Une taxe Tobin de 0,003 p. 100 rapporterait assez d'argent pour financer les opérations de maintien de la paix des Nations Unies dans le monde. Elle pourrait financer le projet de déminage lancé, en grande partie, par notre ministre des Affaires étrangères. Il y a beaucoup de causes valables à appuyer dans le monde.

Cette initiative pourrait mener notamment à la création d'un village planétaire, axé sur le bien commun de toutes les nations, et au renforcement des organisations internationales. Les Nations Unies deviendraient un important gouvernement mondial et partageraient certaines responsabilités avec les gouvernements nationaux du monde entier. Il pourrait y avoir une force internationale permanente du maintien de la paix. Nous pourrions réaliser bien des choses.

Comment cette taxe serait-elle appliquée? Il y a plusieurs possibilités. On pourrait réformer le Fonds monétaire international pour le charger de cette mission ou encore réformer la Banque mondiale à cette fin. J'opte plutôt pour la création d'une agence financière internationale qui gérerait la perception de la taxe Tobin.

Qui percevrait cette taxe? Les gouvernements nationaux la percevraient dans le monde entier.

Le temps est venu pour notre pays de songer à jouer un rôle de leadership dans un domaine tout à fait nouveau, à chercher à remettre de l'ordre dans le chaos qui règne de nos jours. Cela transcende les frontières politiques. Je ne partage pas toujours l'avis de mes collègues des autres partis, du Parti réformiste ou du gouvernement. Cependant, je discute avec des députés du Parti réformiste, du Parti libéral, du Bloc québécois et du Parti progressiste conservateur et je constate que tous nos électeurs sont inquiets.

Les gens se sentent démunis et désespérés devant les fluctuations du marché boursier et la chute de notre dollar. Ils ont eu la frousse au mois d'août lorsque le dollar a commencé à plonger et que le taux d'escompte a été relevé à deux occasions. Ils s'inquiètent de la situation au Brésil. La Thaïlande était un des pays qui connaissaient le plus de succès il y a environ un an. On citait en exemple les tigres de l'Asie qui géraient bien leur économie en n'enregistrant presque aucune dette. Tout à coup, tout s'est mis à s'écrouler comme un château de cartes.

Une voix: Cela a fait baisser la valeur de mes actions.

L'hon. Lorne Nystrom: Cela a probablement fait baisser la valeur de certaines actions du député. Je suis convaincu que le député de Souris—Moose Mountain sera un défenseur enthousiaste de la motion.

Cette motion redonnerait une certaine souveraineté aux peuples par l'intermédiaire de leurs gouvernements nationaux et des organisations internationales. Il ne faut pas laisser régner la loi de la jungle où quelques personnes armées d'ordinateurs font des opérations sur les marchés de contrat à terme, sur les marchés des changes et sur les marchés boursiers du monde. Le projet proposé aurait des répercussions senties dans la vie de beaucoup de gens.

Je demande à la Chambre de prendre la motion très au sérieux. On ne demande pas au Canada d'agir seul. Évidemment, il ne le pourrait pas. On ne demande pas au Canada d'agir avec le Zimbabwe, le Pérou et cinq ou six petits pays. On demande que le Canada agisse de concert avec la communauté internationale. Pour que cela fonctionne, il faut que les États-Unis, la République d'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne, de même que beaucoup d'autres grands pays membres de l'OCDE et du G7 participent.

Le changement n'est possible que si nous y mettons des efforts. Le Canada est un pays très respecté dans le monde. Le Canada devrait commencer à parler de l'idée avec les nouveaux gouvernements d'Europe. L'an dernier, la France a élu un nouveau gouvernement socialiste dirigé par Lionel Jospin. Il y a de nouveaux gouvernements en France, en Allemagne et en Grande-Bretagne. Maintenant qu'il y a de nouveaux gouvernements dans le monde, nous pouvons peut-être faire des progrès. Si nous n'agissons pas, nous serons de plus en plus impuissants à exercer le pouvoir et la souveraineté que doivent posséder tous les peuples de la terre.

 

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J'attends la suite du débat avec impatience et j'espère que tous mettront leur esprit de parti de côté pour appuyer une idée pour laquelle le monde est mûr.

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de commencer en disant que nous partageons les préoccupations du député concernant l'instabilité des marchés financiers et c'est d'ailleurs pour cela que nous sommes en mesure d'appuyer sa motion.

L'instabilité financière menace la prospérité de tout un chacun et je pense que les gouvernements ont la responsabilité d'envisager toutes les options possibles pour éliminer ce problème. La taxe Tobin est l'une des options possibles.

Soyons clairs. Le Canada exerce déjà un leadership international dans le cadre d'une vaste stratégie en vue de s'attaquer aux causes de l'instabilité des marchés financiers et nous réussissons très bien à travailler en collaboration avec nos partenaires à la recherche de moyens pratiques pour améliorer le fonctionnement des marchés internationaux, et pour prévenir et gérer les crises.

Nous préférerions tous un monde où les marchés fonctionneraient toujours bien, un monde où les taux de change se comporteraient toujours de manière compréhensible compte tenu de notre situation et de nos politiques économiques, un monde où les fluctuations des taux de change contribueraient toujours à promouvoir une croissance solide et la création d'emplois pour nos concitoyens. Mais les marchés financiers ne sont pas des créatures parfaites. Ils ne fonctionnent pas toujours bien. Ils sont grégaires. Ils se laissent influencer par les rumeurs. Parfois ils ignorent les principes les plus fondamentaux et trop souvent ils manquent la cible.

Les taux de change fluctuent parfois de façon erratique et ces fluctuations erratiques peuvent entraîner des problèmes économiques qui ont des répercussions sur la compétitivité, forçant les autorités à intervenir, contre leur gré, pour défendre leur devise.

Le défi qui se pose à nous est de trouver la meilleure façon de régler ces problèmes que les économistes appellent les imperfections du marché.

Les partisans de la taxe Tobin avancent qu'une taxe de ce genre mettrait du sable dans les rouages du monde financier international en prélevant un tout petit pourcentage sur toutes les opérations de change internationales. Selon certains, cela découragerait la spéculation et stabiliserait les marchés financiers sans gêner indûment le commerce ou les investissements à plus long terme.

D'autres sont attirés par les recettes que générerait une telle taxe et qui, pensent-ils, permettraient de financer beaucoup de programmes valables.

Les arguments qui entourent les mérites de la taxe Tobin sont certainement intéressants; ils ont fait l'objet de nombreuses discussions de la part d'économistes et d'autres intéressés. Je suis certain que le débat n'est pas prêt de s'arrêter.

Toutefois, de notre point de vue, le plus important n'est pas tant de savoir en théorie quels seront les bienfaits d'une telle taxe, mais bien si elle est applicable dans la pratique. Et il semble très peu probable que la taxe Tobin puisse être imposée sur une échelle telle qu'elle soit aussi avantageuse que le soutiennent ses partisans sans que certains pays soient gravement pénalisés.

Pourquoi? Parce que, pour vraiment réussir à stabiliser les marchés ou à hausser les revenus, la taxe devrait être appliquée à l'échelle mondiale, et, avec la technologie moderne des communications et de l'informatique, des transactions peuvent être menées partout dans le monde et passer d'un endroit à l'autre en un clin d'oeil. Si la taxe Tobin n'est pas universelle, les transactions de même que les revenus et les emplois qu'elles génèrent iront tout simplement là où la taxe n'est pas imposée.

En fait, le Canada a exploré l'idée au Sommet de Halifax, où il est apparu clairement qu'un certain nombre de pays du G7 étaient résolument contre. Leur position n'a pas changé même si, comme l'a signalé le député, certains ont changé de gouvernement.

Mais, même si tous les pays du G7 ou tous les pays industrialisés étaient d'accord, cela ne suffirait pas à assurer le succès de la proposition. Il faudrait que tous les pays soient d'accord. Des pays seraient toujours tentés de ne pas participer, se transformant ainsi en centres financiers extraterritoriaux. Aucun député, je crois, n'appuierait une politique qui ne ferait qu'encourager la création de centres bancaires extraterritoriaux.

Il y a d'autres problèmes pratiques. Pour appliquer la taxe Tobin, il faudrait constamment jouer au chat et à la souris et supprimer les échappatoires que trouveraient les intervenants du marché.

C'est donc pour ces raisons que la taxe Tobin n'a pas été particulièrement bien accueillie par les autres pays.

Je ne dis pas aujourd'hui à la Chambre qu'il n'y a rien à faire pour résoudre le problème de la volatilité des marchés financiers internationaux. En fait, on déploie de grands efforts à cet égard et le Canada fait preuve d'un leadership considérable dans ce dossier.

 

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Nous voulons, en collaboration avec nos partenaires internationaux, enrayer les causes sous-jacentes de crises internationales comme la crise asiatique et mettre en place des mécanismes qui nous aideront à gérer ces crises lorsqu'elles surviennent.

Même si la crise en Asie avait des sources complexes, il est clair que les gouvernements de cette région ont aggravé le problème en permettant et parfois même en encourageant des prêts imprudents de la part des institutions financières locales.

De plus, la promesse de taux de change fixes, une promesse qui s'est finalement avérée vaine, a encouragé les entreprises et les banques locales à contracter d'énormes emprunts en devises étrangères. Une tourmente financière a inévitablement résulté de ces pratiques et politiques inadéquates.

Le Canada a fait preuve de leadership sur la scène internationale en proposant des réformes visant à enrayer les causes sous-jacentes des crises financières et non pas simplement leurs symptômes.

À la rencontre du printemps du FMI et de la Banque mondiale, le ministre des Finances de notre pays a proposé des mesures pour renforcer la surveillance et la réglementation des secteurs financiers, y compris un examen par les pairs. Ainsi, dans le cadre d'un examen par les pairs, des spécialistes du Canada et d'autres pays pourraient partager leurs compétences avec leurs homologues des jeunes marchés et veiller à ce qu'ils mettent en application les meilleures pratiques possibles.

Je suis heureux d'annoncer à la Chambre que les pays du G7 et le FMI ont appuyé la proposition du Canada lors de leurs assemblées annuelles à Washington. Dès l'an prochain, le FMI commencera à recourir à l'examen par les pairs afin de renforcer la surveillance et la réglementation des secteurs financiers.

Le Canada a aussi proposé un mécanisme pour que les investisseurs du secteur privé, les banques par exemple, puissent participer à la résolution des crises financières internationales d'une façon beaucoup plus intégrée que ce n'a été le cas jusqu'à maintenant.

La procédure courante actuellement, pour le FMI, la Banque mondiale ou les gouvernements nationaux, est de fournir l'argent en premier. Le secteur privé ne rentre en cause qu'à la fin, souvent jamais. De toute évidence, ce n'est pas une manière équitable de partager le fardeau. Je dirais même, ce n'est plus acceptable.

Notre ministre des Finances a proposé un système qui gèlerait les paiements pendant les crises financières. Cela donnerait aux pays en difficultés le temps nécessaire pour mettre en place des réformes économiques, de la même manière que les sociétés solvables, mais sans disponibilités financières, peuvent se protéger de leurs créanciers.

On a fait pas mal de progrès sur ces mesures concrètes destinées à contrer la volatilité des marchés financiers internationaux. De toute évidence, il y a encore du travail à faire dans ce domaine.

Le Canada est résolu à poursuivre ses efforts pour amener la communauté internationale vers une économie mondiale plus prospère et plus stable. C'est dans ce contexte que le Canada pourrait accepter une taxe Tobin si les problèmes que nous avons exposés étaient résolus et si tous les pays—et il faut bien préciser cela—étaient d'accord. Malheureusement ce sont des «si» de taille.

Notre ministre des Finances, le gouvernement et même tout le pays, plutôt que d'attendre l'avènement d'une taxe Tobin ou d'une autre option, ont agi d'une façon qui montre la voie. Nous présentons un plan en six points pour s'attaquer aux causes sous-jacentes de la volatilité des marchés et, en présentant ce plan, nous avons l'appui du FMI et des pays du G7.

Il y a des pays qui s'attendent à ce que le Canada joue un rôle de chef de file en cette matière. Le ministre des Finances a fait la preuve de ce leadership. Nous continuerons de le faire en poursuivant l'exploration de ce concept avec d'autres pays importants et nous continuerons de faire preuve de leadership dans l'élaboration d'une stratégie plus globale de lutte contre les causes sous-jacentes de la volatilité des marchés financiers.

Je félicite le député d'avoir présenté cette motion et d'avoir donné l'occasion à la Chambre de débattre la question. Nous en avons déjà discuté et nous continuerons de le faire. C'est une chose honorable à faire, mais cette proposition n'est pas sans failles. L'une d'elles, c'est le principe suivant lequel tous les pays doivent appliquer une taxe Tobin. Ils doivent tous l'appliquer en même temps afin de ne pas créer des centres financiers extraterritoriaux. Nous pouvons appuyer cette motion en principe.

 

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Je signale toutefois à la Chambre et au député que de nombreux écueils se dressent sur la route de l'adoption de cette taxe. Entre-temps, nous continuerons de faire preuve de leadership comme pays. Notre ministre des Finances continuera de faire preuve de leadership au FMI en adoptant une stratégie de lutte contre les grandes causes sous-jacentes des crises qui assaillent le monde entier.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, je le dis franchement, je m'oppose à la taxe Tobin parce que je pense aux démunis et aux Canadiens ordinaires qui devront payer la note au bout du compte.

Au fond, nous sommes réellement en train de discuter de mythes socialistes. C'est bien de pouvoir parler de grandes idées, mais que le ciel nous vienne en aide si nous laissons le monde aller dans la direction où la motion d'aujourd'hui le conduirait. Des millions de gens en souffriraient si la taxe avait la vaste portée qu'elle doit avoir pour atteindre ses objectifs.

Le député de Regina—Qu'Appelle exhorte le gouvernement à décréter une taxe sur les transactions financières, ou la taxe Tobin comme l'appellent les théoriciens et les universitaires. En termes simples, une taxe sur les transactions financières peut être n'importe quelle taxe. C'est un droit, un montant imposé par un gouvernement sur la vente, l'achat, le transfert ou l'enregistrement d'un instrument financier. Elle peut s'appliquer sur une grande échelle ou elle peut donner lieu à des exemptions. Elle peut être imposée sur des transactions faites par des Canadiens, faites au Canada ou encore à l'étranger.

Je pense parler au nom de mes concitoyens quand je dis que les impôts découragent l'activité positive, en particulier quand ce sont des impôts excessifs et des pénalités dissuasives. Une taxe sur les transactions financières découragerait l'activité financière au bout du compte. Elle nuirait à l'économie canadienne. C'est une mesure qui s'attaque aux symptômes plutôt qu'aux causes des difficultés financières.

Il y a plusieurs semaines, il y a eu une réunion des représentants de tous les partis d'opposition. Ils ont convenu qu'il fallait réduire les cotisations à l'assurance-emploi. Tous les partis d'opposition ont demandé une baisse d'une taxe précise. Chaque parti avait sa propre idée sur la manière d'utiliser l'excédent du fonds d'AE, mais ils étaient au moins tous opposés à ce qu'il y ait une hausse fiscale, parce que cela risquerait de nuire aux taux d'emploi que nous voulons au Canada.

De toute évidence, la taxe sur les transactions financières n'est pas considérée tout à fait comme la cotisation à l'assurance-emploi. Je voulais simplement démontrer que les gens détestent les impôts et que les impôts exorbitants leur sont préjudiciables.

Pourquoi les Canadiens étaient-ils tellement opposés à la TPS, même si l'adoption de cette taxe a eu pour effet de réduire les prix de certains biens de consommation? C'est que les nouvelles taxes sont toujours difficiles à faire accepter du public et qu'elles provoquent presque toujours des distorsions sur le marché.

Le Nouveau Parti démocratique et les socialistes du monde entier veulent de ce genre de taxe. Pour eux, c'est un moyen d'aller chercher des revenus pour des fins sociales, mais souvent sans reddition de comptes politique. Un des arguments qu'invoque M. James Tobin pour faire accepter son projet de taxe dans divers pays consiste à dire que les recettes de la taxe pourraient servir à financer les Nations Unies ou, comme d'autres l'ont suggéré, des campagnes internationales comme la campagne contre les mines antipersonnel. C'est une bonne façon de dorer la pilule.

Aux yeux des gens mal informés ou hostiles à l'idée, le projet peut paraître acceptable sur papier mais nous devons l'examiner attentivement pour voir comment les recettes sont gérées. La principale raison d'être d'une taxe est de générer des recettes. Le Nouveau Parti démocratique peut bien prétendre que cette taxe corrigera les marchés mondiaux, ce qui n'est certainement pas le cas, mais en définitive il est favorable à ce genre de mesure parce qu'elle lui permet de réaliser son programme secondaire.

En 1995, un groupe d'ONG environnementaux se sont réunis pour créer l'initiative de Halifax. Sous l'égide du Sierra Club du Canada, le groupe a exhorté le Canada, durant la rencontre des leaders du G7 à Halifax, à jouer un rôle de leader et à instituer une taxe sur les transactions financières.

Un des arguments invoqués par les auteurs de l'initiative de Halifax était le suivant: «La mise en place de cette taxe soulève deux questions politiques majeures. Premièrement, il faut que les principaux pays parviennent à une entente concernant l'adoption d'une taxe uniforme et, deuxièmement, ces pays doivent s'entendre au sujet de la perception et de la distribution des recettes.» On aurait peut-être dû ajouter, en troisième lieu, que tous les pays devraient reconnaître l'existence du Père Noël.

En théorie, la perception de la taxe pourrait être possible, mais ce serait là la partie la plus facile. Le plus difficile serait de distribuer les recettes. Si ces recettes étaient remises à divers gouvernements, quelles règles détermineraient la part attribuée à chaque pays? À qui appartient l'argent, de toute façon?

 

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La redistribution va-t-elle favoriser les pays qui ont d'importants centres financiers? Va-t-elle favoriser les pays en fonction de leurs actions avec droit de vote à l'intérieur, par exemple, du Fonds monétaire international? Que fait-on de l'affectation de recettes à des causes mondiales? Comment une organisation internationale peut-elle obtenir l'accord de tous les pays? L'épreuve de force qui s'ensuivrait serait catastrophique.

Les partisans de cette taxe proposent que tous les pays membres du G7 se réunissent pour créer cette taxe. Les intéressés devraient examiner ce qui se passe dans d'autres pays qui ont déjà vécu ce genre de taxes qui découragent toute activité et nuisent ainsi aux gens.

Le Japon a une taxe sur les transactions financières qui cause des problèmes considérables, car elle a des répercussions négatives sur le marché japonais. C'est la même chose dans le cas du Royaume-Uni. Il perçoit de l'argent grâce à cette taxe, mais d'aucuns croient qu'on pourrait obtenir de bien meilleurs résultats sans la taxe. Le Royaume-Uni envisage d'abolir cette taxe. La Suède a également eu de mauvaises expériences avec la taxe. L'Allemagne a décidé que les coûts et les problèmes reliés à cette taxe sont nettement supérieurs aux avantages lorsqu'il est question de ce type de recettes.

Obtenir l'accord de tous les pays semble une tâche insurmontable. M. Tobin a déclaré qu'une taxe sur les achats et les ventes de devises étrangères devrait être universelle et uniforme. Elle devrait s'appliquer à tous les pays et le taux devrait être égal sur tous les marchés. C'est son critère. Il est évident que cela serait tout à fait impossible à réaliser.

Il y a d'autres raisons pour s'opposer à la taxe sur les transactions financières notamment le fait qu'on étend son application à d'autres gouvernements. Il est impossible que tous les pays souscrivent aux méthodes de la taxe Tobin. Par conséquent, les membres du secteur financier recourront tout simplement à des refuges fiscaux à l'étranger pour éviter la taxe. Ils élaboreront des stratégies compliquées pour l'éviter. On n'en sortira plus.

En 1995, le FMI a rédigé un document concernant les taxes sur les transactions financières. Il a parlé clairement des substitutions. Il a dit dans ce document: «Si les taxes sur les transactions ne s'appliquaient qu'aux transactions sur les marchés intérieurs, les investisseurs pourraient substituer les opérations de change étrangères comme moyen d'éviter la taxe. Il est relativement facile de modifier le lieu des transactions d'avoirs financiers, les transactions étant transférées dans d'autres pays ou dans des endroits qui possèdent des marchés financiers reconnus. Par exemple, beaucoup de transactions d'actions des États-Unis se font à Londres.»

La taxe a pour objectif déclaré de ralentir le rythme des marchés financiers étrangers. Mais une fois la taxe établie, des pressions seraient exercées pour qu'on continue de l'augmenter jusqu'à ce qu'elle commence en fait à donner des résultats. Cela deviendrait alors une très forte désincitation pour l'économie mondiale.

Bref, cette stratégie idéaliste comporte des échappatoires insurmontables. Les marchés financiers renferment de nombreux produits qui sont de proches substituts d'autres produits. Une obligation d'État est un proche substitut d'une obligation de sociétés. Les dépôts bancaires sont des substituts des fonds du marché monétaire. Si nous taxons un produit, tout investisseur y cherchera un substitut.

Je crois que les députés néo-démocrates conviendront que, même dans un monde parfait, ce ne sont pas tous les pays qui adhéreraient à un traité fiscal comme celui qu'ils proposent. Par conséquent, si un pays refusait d'instituer une taxe sur les transactions financières, ce pays deviendrait essentiellement très alléchant pour les grandes banques mondiales qui veulent effectuer des opérations de change étrangères. Ce serait catastrophique pour les pays qui auraient appliqué la taxe. Ce serait un désincitatif pour ces pays et un avantage concurrentiel pour les pays qui n'auraient pas adhéré au concept.

La volatilité des marchés de change étrangers est un fait avec lequel il faut composer dans l'économie mondiale. Ce que je recommande aux gouvernements, c'est d'appliquer une politique financière crédible et de favoriser des secteurs financiers forts et transparents plutôt que de punir les cambistes. L'argent change de place quand un secteur n'a pas un bon rendement. Les réalisations d'un marché qui fonctionne sont récompensées. Ceux qui n'ont pas une bonne performance perdent du terrain. Souvent, la volatilité de l'argent dans le monde est liée à la recherche d'un meilleur rendement. C'est la meilleure discipline possible, et nous nous en tirerions tous bien mieux si nous l'appliquions.

Sur papier, la théorie en convainc peut-être quelques-uns, mais ça ne peut pas fonctionner en réalité. Je m'oppose donc tout à fait à l'idée d'une taxe Tobin.

À notre avis, le gouvernement a des choses beaucoup plus pressantes à régler dans le domaine financier, pour remettre de l'ordre dans nos finances. Ce que j'espère, c'est que le gouvernement commencera à travailler avec ardeur à la réduction, par exemple, des cotisations d'assurance-emploi, afin de regagner la confiance des Canadiens dans nos marchés financiers intérieurs, qui est en train de se perdre. Nous avons besoin d'impôts plus bas. Pour que les marchés fonctionnement mieux, une baisse d'impôts serait certainement préférable à l'adoption d'un système administratif de traitement de l'argent. Il est préférable de laisser l'argent dans les mains d'un contribuable, d'un consommateur ou d'un investisseur.

 

. 1810 + -

Les marchés monétaires sont volatils partout dans le monde. Éventuellement, on en arrive à s'apercevoir que les éléments fondamentaux...

Le président suppléant (M. McClelland): Je suis désolé, mais le temps de parole du député est écoulé.

[Français]

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, je veux féliciter le député de Regina—Qu'Appelle d'avoir eu la bonne idée de nous présenter la motion M-239, telle que modifiée, qui se lit comme suit:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait faire preuve de leadership et décréter une taxe sur les transactions financières de concert avec la communauté internationale.

Mes collègues du Bloc québécois et moi sommes, en principe, assez favorables à la motion telle qu'elle est présentée. Mon collègue de Lac-Saint-Jean l'a déjà démontré de façon évidente. La mondialisation à tout crin, sans réglementation, ça nous fait peur un peu.

Donc, avoir une forme de réglementation sur ces transactions financières internationales, sur cette spéculation financière éhontée, est pour nous une bonne chose. On sera en mesure de le remarquer au cours de mon discours.

Les mots «transactions financières», au sens large, mériteraient, selon nous, d'être spécifiés. Je donne un exemple qui est peut-être un peu facile, mais si je dois aller aux États-Unis demain matin et que je prends 100 dollars canadiens que je fais changer en 100 dollars américains, est-ce que c'est une transaction financière qui risque d'influencer le dollar canadien, le dollar américain? Je crois que non. Est-ce qu'on doit taxer cette simple transaction financière? Je crois que non.

Donc, oui, on doit taxer ou réglementer la spéculation. Peut-être que le mot «transaction» mériterait d'être précisé, et c'est plutôt ce que nous allons voir.

Juste à écouter le discours de mon prédécesseur, le député réformiste, nous voyons que la taxe Tobin porte à une multitude d'interprétations. On lui fait dire beaucoup de choses et on lui impute beaucoup de torts.

Lorsque M. James Tobin—je tiens à le répéter, ce n'est pas le premier ministre de Terre-Neuve et ancien ministre de l'autre côté qui a pensé instaurer cette taxe, mais bel et bien un économiste américain du nom de James Tobin—a reçu le prix Nobel en 1972, je ne crois pas qu'aucun réformiste était sur le jury parce qu'il n'aurait probablement jamais eu l'honneur et l'occasion de recevoir un tel prix qui était grandement mérité.

Ce n'est pas parce qu'une idée est difficilement applicable qu'on doive automatiquement la rejeter du revers de la main. Je tiens à rappeler à mon collègue réformiste que lorsqu'il dit que c'est inapplicable et impensable et qu'on doit même, dans la troisième ou quatrième solution, penser à réinventer le Père Noël, je crois qu'il va un peu loin.

Lorsqu'il dit que c'est inapplicable de créer une entente internationale où tous les pays pourraient, ensemble, harmoniser une décision qui favoriserait une limite, une réglementation, un cadre légal aux spéculations financières internationales, il oublie peut-être qu'aujourd'hui, en 1998, il y a l'OMC qui existe et qui regroupe la très grande majorité des pays, pour ne pas dire la totalité des pays. Il n'en manque que quelques-uns.

On a quand même réussi, après plusieurs années d'échanges et de négociations—on est partis avec le GATT, on a continué, on a travaillé—à en arriver à une harmonisation sur les transferts douaniers et les taux tarifaires aux douanes. Dix ans avant les premières rondes du GATT et avant l'OMC, on tenait peut-être, dans les différents parlements, ce genre de discours: «Essayer de trouver une harmonie internationale sur les tarifs douaniers, c'est inapplicable, c'est impensable, c'est infaisable, c'est utopique.»

Mais on le vit aujourd'hui. Pourquoi? Parce que les pays se sont rendu compte que si on voulait réglementer, si on voulait une évolution constructive et sécurisante pour ceux qui font ce genre de commerce international, il était avantageux, pour les pays riches comme pour les pays pauvres, de se donner un cadre légal, un cadre consensuel d'échanges et de tarifs commerciaux pour arriver à augmenter le commerce international et le profit dans les pays qui peuvent bénéficier de ces échanges.

 

. 1815 + -

Mais il y a une réglementation. Comment est-ce appliqué? Qui décide où on siège? La première réunion ministérielle a été tenue à Singapour, la deuxième, à Genève, il n'y a pas longtemps, et on modifie, on améliore. Cela existe, des institutions internationales qui trouvent l'harmonie. Pourquoi se borne-t-on à des discours en disant: «Si c'est compliqué, on cesse nos travaux, on abdique notre responsabilité et on se retire.» Je suis en total désaccord avec cela.

La motion stipule d'aller de l'avant et d'étudier davantage, compte tenu de la nouvelle réalité. Certains diront que ça fait 20 ans que cela a été lancé, ça fait 20 ans qu'on en discute, mais on ne peut pas le mettre en application.

Il y a 20 ans, il n'y avait pas eu la crise du peso au Mexique. Il y a 20 ans, il n'y avait pas eu la crise asiatique qu'on vit aujourd'hui. Il y a 20 ans, il n'y avait pas George Soros qui, avec 10 milliards de dollars, en une journée, a réussi à faire tomber la livre sterling et à faire un milliard de dollars de profit.

Si la situation économique internationale évolue, pourquoi notre discours et notre pensée ne pourraient-ils pas évoluer? Pourquoi doit-on rester avec l'idée—j'espère que cela ne s'applique pas à la majorité—présentée par le Parti réformiste, qui dit: «Si c'est difficile, on abdique et on refuse; on va voter contre.»

Il faut aussi avoir un brin d'intelligence, et pouvoir dire qu'on ne croit pas sincèrement qu'avec cette taxe, on veuille absolument tout taxer. Que j'investisse 1 000 $ à la bourse, ou que j'investisse 1 000 $ dans un fonds commun de placement, je ne crois pas que je serai un dangereux spéculateur qui influencera la valeur du peso ou celle du dollar américain.

Cependant, des gens jouent à la roulette russe avec les devises de différents pays. Les Thaïlandais et les Mexicains sont bien placés pour nous dire que parfois, trop souvent, cela influence directement la valeur de leur monnaie, et par la suite, l'économie nationale d'un pays.

Je vais prendre un exemple. Dans le dernier numéro de L'Actualité, on peut lire que Bill Gates, avec son avoir de 51 milliards de dollars, pourrait d'un coup, en une journée, décider de renflouer toute l'économie de la Russie. Donc, oui, cela se fait dans la nouvelle réalité économique, car il y a des gens, des consortiums, des groupes d'individus qui peuvent, d'une journée à l'autre, faire bouger leur argent pour influencer et faire tomber des économies nationales qui ont une implication régionale ensuite.

On l'a vu, par la suite, cela a une implication internationale. Dans quelques mois ou quelques années, le Canada en vivra malheureusement les effets. Est-ce qu'on doit aujourd'hui, dans la nouvelle réalité économique, se poser la question?

J'écoutais l'exposé du secrétaire parlementaire et j'en ai été un peu surpris. Il parlait également des difficultés d'application d'une telle taxe. Il faisait référence au rapport du Comité permanent des affaires étrangères de mai 1995, «De Bretton Woods à Halifax». Avec votre permission, je vais citer un passage de ce rapport, qu'on retrouve à la page 62:

    Pour le moment, le Comité estime qu'on n'a pas encore montré que l'idée est réalisable, mais qu'il faut garder l'esprit ouvert. Les objectifs d'une taxe sur les spéculations monétaires ont suffisamment de mérite et sont assez prometteuses pour qu'on les examine plus à fond dans le contexte du G7.

    Nous savons que des recherches ont déjà été réalisées à ce sujet, notamment au ministère des Finances du Canada. Comme les idées de ce genre n'en sont encore qu'à leurs balbutiements, nous sommes toutefois encore loin d'en décider. Même ses partisans reconnaissent volontiers que:

      [...] une étude de faisabilité approfondie s'impose pour analyser la mécanique très complexe des transactions en devises étrangères [...].

C'était en 1995, il y a trois ans, bientôt quatre ans: «Une étude de faisabilité s'impose.» Qu'est-ce que le gouvernement a fait de ces recommandations? Qu'est-ce que le gouvernement a fait, depuis mai 1995, avec cette recommandation de création d'un comité d'étude? On ne l'a jamais vu.

En terminant, j'ai un amendement à proposer à la motion M-239. Je propose:  

    Que la motion soit modifiée par substitution des mots «décréter une taxe sur les transactions financières» par ce qui suit:

    «favoriser la mise en place d'une taxe visant à décourager la spéculation sur les variations de taux de change».

On précise l'aspect de «transaction», tel que je l'ai mentionné en début de discours, et on retrouverait l'essence de la taxe Tobin en acceptant cet amendement à la motion M-239.

 

. 1820 + -

Je souhaite que tous les parlementaires de la Chambre appuient cet amendement et, par la suite, la motion M-239.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): La présidence a obtenu tout à l'heure un avis à propos de l'amendement, qui est jugé recevable.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, je félicite mon collègue du Nouveau Parti démocratique d'avoir saisi la Chambre des communes de cette question.

Lorsque James Tobin a lancé l'idée d'une taxe Tobin il y a 20 ans, l'idée n'a pas fait grand vague, comme il l'a dit lui-même. En fait, elle a coulé à pic. Nous entendons périodiquement parler d'une taxe Tobin, et l'idée réapparaît typiquement à des moments de bouleversement économique.

Dans le contexte actuel, alors qu'il se transige pour 1,3 billion de dollars d'actions quotidiennement sur les marchés mondiaux, l'idée a resurgi à la façon du monstre du Loch Ness. Ce monstre apparaît périodiquement. Certains le voient et d'autres non, comme d'habitude à des périodes de bouleversement.

Le député nous a rendu service en soulevant la question de sorte que nous puissions discuter de la taxe Tobin à la Chambre. La taxe Tobin m'inspire de vives inquiétudes. Non que je ne reconnaisse l'importance de mettre au point des dispositifs de contrôle des marchés ou de trouver un moyen de prévenir le genre de désastres financiers que nous avons vus en Asie du Sud-Est et auparavant au Mexique, de même que dans le cas de la Barings Bank et de certaines des retombées de ce fiasco, ou dans le cas de la BCNI. Les désastres du genre ont causé beaucoup de tort non seulement aux économies des États où ils se sont produits, mais aussi à l'économie mondiale.

Je ne suis pas d'accord avec l'idée de la taxe Tobin. Il y a à cet égard une certaine dose de naïveté économique qui ne tient pas compte de certaines des conséquences non intentionnelles de ce genre de taxe. L'une des choses importantes que nous devons particulièrement chercher à protéger dans une société mondiale basée sur le savoir, c'est l'efficacité de nos marchés financiers. Cela ne peut que nous être bénéfique à plusieurs égards.

Ces dernières semaines et ces derniers mois, nous avons assisté à la crise asiatique et avons vu les problèmes qui en ont résulté. Ce que nous devrions nous demander, ce n'est pas si une taxe Tobin aurait pu ou non empêcher la crise asiatique—certains diront que oui, d'autres diront que non—mais plutôt pourquoi les spéculateurs financiers ont pu au départ spéculer sur les marchés asiatiques. La raison, c'est que les gouvernements en Asie du Sud-Est avaient des politiques fiscales incompatibles avec leurs politiques monétaires.

Les spéculateurs l'ont bien vu et ont trouvé là la possibilité de gagner de l'argent. Ce faisant, ils ont remédié à ce qui n'allait pas dans ces économies, plus rapidement que si nous avions eu une taxe Tobin. C'est comme demander à un pays ayant des lacunes structurelles dans ses politiques fiscales ou monétaires s'il préfère mourir lentement au bout de son sang ou être frappé par un autobus et se retrouver à l'hôpital. Le fait est que les spéculateurs en monnaie sont comme un autobus; ils attirent très rapidement l'attention du monde sur les économies en pleine hémorragie et nous amènent à les aider beaucoup plus vite, au moyen de solutions valables à long terme axées sur le marché, qui s'avéreront finalement les meilleures.

 

. 1825 + -

M. Tobin a dit au début que la taxe serait comme du sable dans l'engrenage de la finance internationale. J'estime que les personnes qui croient qu'on peut, avec quelque chose comme la taxe Tobin, jeter du sable dans l'engrenage de la finance nationale, se mettent la tête dans le sable. Il s'agit d'une énorme entreprise internationale à laquelle les Canadiens peuvent participer et cela, avec succès, si l'on crée dans l'économie canadienne les stimulants et les éléments structuraux appropriés, de même que les rendements qu'il faut. En fait, la taxe Tobin travaillerait contre nous.

L'idée d'imposer une taxe sur les opérations de change a l'air plutôt innocente en ce qu'elle rendrait les spéculations plus coûteuses et, dans les propositions, ses partisans prétendent que cela inhiberait la spéculation. La question qu'il faut se poser, c'est si la spéculation peut entraîner des corrections qui supprimeront éventuellement la capacité des gouvernements de prendre de mauvaises décisions ou d'adopter des politiques financières extravagantes qui ne seraient pas soutenables à long terme, est-ce que nous voulons y faire obstacle? L'idée d'une taxe financière destinée à rabrouer les marchés financiers surgit périodiquement et la plupart des économistes reconnaissent que la taxe Tobin ne fonctionnerait pas et ne serait pas souhaitable. Le principal probable est en un de force exécutoire.

Même si tous les pays de l'OCDE signaient, ce qui serait un grand pas, les transactions fuiraient vers Singapour ou d'autres pays comme les îles Cayman qui verraient là une occasion extraordinaire à saisir. La taxe devrait frapper toute une gamme de transactions financières, et pas seulement les transactions sur les changes.

Parmi les transactions financières les plus difficiles à contrôler et qu'il serait presque impossible d'assujettir à une taxe Tobin sont celles qui portent sur les instruments dérivés. Ces instruments et d'autres instruments financiers de plus en plus complexes sont de plus en plus courants sur les marchés mondiaux, et la taxe Tobin ne pourrait rien y changer.

Je pourrais passer 20 minutes à décrire la taxe Tobin et les difficultés que j'y vois. L'ONU décrit la taxe Tobin comme une sorte de proposition des Luddites, car elle vise à inverser un mouvement à la baisse dans le coût des transactions financières internationales. Nous devrions examiner certaines des mesures envisageables, et c'est pourquoi je suis heureux que ce débat se fasse à la Chambre. Nous devrions notamment travailler de concert avec le FMI à l'amélioration de la communication des renseignements afin que nous voyions plus rapidement ce qui se passe ailleurs. Il faut améliorer la capacité des gouvernements à communiquer des renseignements. Il faut rendre les politiques gouvernementales plus transparentes, ce qui va tout à fait dans le sens opposé de ce que fait le gouvernement actuel.

Au moment de la crise du dollar cet été, le gouvernement a rejeté la faute sur les spéculateurs de devises, le premier ministre se comportant comme le président Suharto. Il a rejeté la responsabilité de la faiblesse du dollar canadien sur les spéculateurs de devises, alors que ces sont les obstacles structuraux à la croissance de l'économie canadienne qui sont les grands responsables. Ce ne sont pas les spéculateurs de devises. Ce sont plutôt les gouvernements, qui poursuivent des politiques économiques irréalistes, qui ne font pas preuve d'ouverture et de transparence avec les marchés internationaux afin de les renseigner sur les pratiques qui nuisent à leur crédibilité et provoquent des situations comme celle de la baisse systématique du dollar canadien ou encore la crise que connaît l'Asie du Sud-Est, où la politique monétaire n'allait pas de pair avec la politique budgétaire.

 

. 1830 + -

Le président suppléant (M. McClelland): La période réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée. L'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

Comme il est 18 h 30, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 30.)