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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 1ère Session


HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 98

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 4 mai 1998

VINITIATIVES PARLEMENTAIRES

. 1105

VLA CHARTE DES DROITS ET LIBERTÉS
VM. Garry Breitkreuz
VMotion

. 1110

. 1115

. 1120

VMme Eleni Bakopanos

. 1125

VM. Bill Blaikie

. 1130

. 1135

VM. Rick Borotsik

. 1140

. 1145

VM. Eric Lowther

. 1150

. 1155

VM. John Bryden
VM. Garry Breitkreuz

. 1200

VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI SUR L'IDENTIFICATION PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES
VProjet de loi C-3. Étape du rapport
VQuestion de privilège
VM. Peter MacKay

. 1205

. 1210

VM. Jack Ramsay
VM. Richard Marceau
VM. Peter Mancini

. 1215

VM. Nick Discepola
VMme Shaughnessy Cohen

. 1220

VLe Président
VDécision de la présidence
V>

. 1225

VMme Marlene Catterall
VMotion

. 1230

VMotions d'amendement
VM. Richard Marceau
VMotion no 1
VM. Peter Mancini
VMotion no 2
VM. Richard Marceau
VMotions nos 3 et 5

. 1235

VM. Nick Discepola

. 1240

VM. Peter Mancini

. 1245

VM. Jack Ramsay

. 1250

VM. Peter MacKay

. 1255

VM. Philip Mayfield

. 1300

. 1305

VM. Jake E. Hoeppner

. 1310

. 1315

VM. Gurmant Grewal

. 1320

. 1325

VM. Garry Breitkreuz

. 1330

. 1335

VM. Paul E. Forseth

. 1340

. 1345

VM. John Reynolds

. 1350

. 1355

VM. Chuck Strahl
VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VL'ÉDUCATION
VM. Bryon Wilfert
VLA FRAPPE DE LA MONNAIE
VM. Ken Epp

. 1400

VLA CONSTITUTION POLONAISE
VMme Sarmite Bulte
VLA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER
VM. Peter Adams
VLA GARDE DE LA REINE
VMme Beth Phinney
VLA FAMILLE
VM. Paul Forseth
VLA BATAILLE DE L'ATLANTIQUE
VM. George Proud

. 1405

VLE 55E ANNIVERSAIRE DE LA BATAILLE DE L'ATLANTIQUE
VM. Mark Assad
VLES SÉNATEURS D'OTTAWA
VM. Jason Kenney
VLES SCIENCES ET LA TECHNOLOGIE
VMme Francine Lalonde
VLE CHEF LIBÉRAL DU NOUVEAU-BRUNSWICK
VMme Claudette Bradshaw
VL'ASSOCIATION CANADIENNE DES SOCIÉTÉS ELIZABETH FRY
VM. Peter Mancini
VLA POLITIQUE INTERNATIONALE
VM. Denis Coderre

. 1410

VLE MANITOBA
VM. Rick Borotsik
VLA DÉCLARATION DE CALGARY
VM. Stéphane Bergeron
VCUBA
VMme Paddy Torsney
VL'HÉPATITE C
VM. Gerry Ritz
VLA SEMAINE ELIZABETH FRY
VM. Peter MacKay
VQUESTIONS ORALES

. 1415

VL'HÉPATITE C
VM. Preston Manning
VL'hon. Herb Gray
VM. Preston Manning
VL'hon. Allan Rock
VM. Preston Manning
VL'hon. Allan Rock
VM. Chuck Strahl
VL'hon. Allan Rock
VM. Chuck Strahl

. 1420

VL'hon. Herb Gray
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Herb Gray
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Allan Rock
VM. Michel Gauthier
VL'hon. Allan Rock
VM. Michel Gauthier
VL'hon. Herb Gray

. 1425

VM. Bill Blaikie
VL'hon. Allan Rock
VM. Bill Blaikie
VL'hon. Allan Rock
VMme Elsie Wayne
VL'hon. Allan Rock
VMme Elsie Wayne
VL'hon. Allan Rock

. 1430

VM. Preston Manning
VL'hon. Herb Gray
VM. Preston Manning
VL'hon. Allan Rock
VLA DÉCLARATION DE CALGARY
VM. Pierre Brien
VL'hon. Stéphane Dion
VM. Pierre Brien
VL'hon. Stéphane Dion
VL'HÉPATITE C
VM. Monte Solberg

. 1435

VL'hon. Allan Rock
VM. Monte Solberg
VL'hon. Allan Rock
VLA DÉCLARATION DE CALGARY
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Stéphane Dion
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Stéphane Dion
VLE SÉNAT
VM. Jason Kenney
VL'hon. Herb Gray
VM. Jason Kenney
VL'hon. Herb Gray

. 1440

VLA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE
VMme Christiane Gagnon
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLES DÉCHETS NUCLÉAIRES
VM. Lynn Myers
VM. Gerry Byrne
VLE SÉNAT
VM. Randy White
VL'hon. Herb Gray
VM. Jake E. Hoeppner
VL'hon. Herb Gray

. 1445

VL'HÉPATITE C
VMme Judy Wasylycia-Leis
VL'hon. Allan Rock
VMme Judy Wasylycia-Leis
VL'hon. Allan Rock
VLA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
VM. Peter MacKay
VL'hon. Marcel Massé
VM. Peter MacKay
VL'hon. Marcel Massé
VLE CANADA RURAL
VMme Susan Whelan
VL'hon. Lyle Vanclief
VLA LOI SUR LES ARMES À FEU
VM. Garry Breitkreuz

. 1450

VL'hon. Anne McLellan
VLA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
VM. Richard Marceau
VL'hon. Andy Scott
VLES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
VM. Rick Laliberte
VL'hon. Lloyd Axworthy
VLA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
VM. Peter MacKay
VL'hon. Marcel Massé
VL'EMPRESS OF IRELAND
VM. Mauril Bélanger
VL'hon. Andy Mitchell

. 1455

VLA LOI SUR LES ARMES À FEU
VM. Jack Ramsay
VL'hon. Anne McLellan
VL'INDUSTRIE DE L'AMIANTE
VM. Benoît Sauvageau
VM. Julian Reed
VLA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE
VM. Peter Mancini
VL'hon. Pierre S. Pettigrew
VLA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
VM. Peter MacKay
VL'hon. Marcel Massé
VLE SÉNAT
VM. Rob Anders

. 1500

VL'hon. Herb Gray
VQUESTION DE PRIVILÈGE
VLe projet de loi C-3—Décision de la Présidence
VLe Président
VRECOURS AU RÈGLEMENT
VLe dépôt de documents
VMme Elsie Wayne
VAFFAIRES COURANTES
VNOMINATIONS PAR DÉCRETS
VM. Peter Adams

. 1505

VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Peter Adams
VLES COMITÉS DE LA CHAMBRE
VDéveloppement des ressources humaines et condition des
VM. Bryon Wilfert
VPÉTITIONS
VLe CRTC
VM. Mac Harb
VLe parc provincial d'Ipperwash
VM. Gordon Earle
VLe service de traversier de Terre-Neuve
VM. Gerry Byrne
VLa fiscalité
VM. Paul Szabo
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Peter Adams
VL'hon. Harbance Singh Dhaliwal
VM. Peter MacKay

. 1510

VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI SUR L'IDENTIFICATION PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES
VProjet de loi C-3. Étape du rapport
VM. Chuck Strahl

. 1515

VM. Rob Anders

. 1520

. 1525

VM. John Duncan

. 1530

. 1535

VM. Jason Kenney

. 1540

. 1545

VM. Werner Schmidt

. 1550

. 1555

VM. Ken Epp

. 1600

. 1605

V>Demande et report du vote par appel nominal sur les motions nos 1, 2, 3 et 5
VM. Richard Marceau
VMotion nos 4, 6 et 13

. 1610

VM. Peter Mancini

. 1615

. 1620

VM. Jack Ramsay

. 1625

. 1630

VM. Peter MacKay

. 1635

VM. Nick Discepola

. 1640

VM. Jake E. Hoeppner

. 1645

. 1650

VM. Werner Schmidt

. 1655

. 1700

VM. Rob Anders

. 1705

. 1710

VM. Jason Kenney

. 1715

. 1720

VM. John Reynolds

. 1725

. 1730

VM. Philip Mayfield

. 1735

. 1740

VM. Garry Breitkreuz

. 1745

V>(Les votes sont réputés avoir été demandés et différés.)
VM. Peter Mancini
VMotion no 7

. 1750

. 1755

VM. Richard Marceau
VM. Peter MacKay

. 1800

. 1805

VM. Jack Ramsay

. 1810

. 1815

VM. Nick Discepola
VM. Philip Mayfield

. 1820

. 1825

VM. Garry Breitkreuz

. 1830

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 98


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 4 mai 1998

La séance est ouverte à 11 heures.



Prière


INITIATIVES PARLEMENTAIRES

 

. 1105 +

[Traduction]

LA CHARTE DES DROITS ET LIBERTÉS

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.) propose:  

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait autoriser qu'une proclamation soit faite par le gouverneur général sous le grand sceau du Canada afin de modifier l'article 7 de la Charte canadienne des droits et des libertés pour que soient reconnu: a) le droit fondamental des personnes de mener leur vie de famille librement sans ingérence indue de la part de l'État et b) le droit fondamental, la responsabilité et la liberté des parents de décider de l'éducation de leurs enfants, et afin d'exhorter les assemblées législatives des provinces à agir en ce sens.

—Monsieur le Président, je suis à la fois heureux et déçu de lancer ce matin le débat sur un sujet qui revêt une si grande importance pour toutes les familles canadiennes.

Je me demande ce que penseraient les députés et les Canadiens s'ils savaient que l'État a un pouvoir plus étendu que celui des parents de décider ce qui est le mieux pour leurs enfants. Je me demande comment nous réagirions et quelle réaction auraient les parents s'ils se rendaient compte que l'État a le pouvoir illimité de leur enlever leurs enfants sans avoir de véritable justification. J'entends démontrer aujourd'hui que les parents disposent uniquement de recours juridiques longs et coûteux pour défendre leurs droits contre les abus de la loi et de l'appareil bureaucratique et que le gouvernement abuse de ses pouvoirs.

Voici quelques exemples concrets, ou devrais-je plutôt dire quelques histoires d'horreur.

Jusqu'en février 1995, Charles et Sandra Butler faisaient eux-mêmes la classe, à la maison, à leurs enfants âgés de 11 ans, 8 ans et 5 ans respectivement. En effet, la loi à Terre-Neuve le permet, à condition que le programme d'études ait reçu l'approbation du conseil scolaire de district. Les Butler suivaient un programme établi par l'Église adventiste du septième jour, que le conseil scolaire local avait refusé d'approuver. Le couple n'avait aucun antécédent de négligence ou de mauvais traitement envers ses enfants.

Le ministère des services sociaux a décidé que les enfants de la famille Butler avaient besoin de protection aux termes de la loi provinciale sur le bien-être de l'enfant, parce que les Butler avaient négligé de pourvoir adéquatement à leur éducation. Les trois enfants ont été retirés de leur famille, en dépit du fait que le plus jeune, âgé de cinq ans, n'était pas encore obligé de fréquenter l'école en vertu de la loi. Les travailleurs sociaux ont fondé leur décision en alléguant qu'ils craignaient pour la santé et l'éducation des enfants et en invoquant le risque de violence physique et/ou affective et le zèle religieux de leurs parents.

Un juge a accordé la garde des enfants aux services sociaux pour une période de quatre mois. Les Butler ont dû retenir les services d'un avocat et faire appel de l'ordonnance prise par le juge, en faisant valoir que, premièrement, ce dernier avait appliqué une norme de preuve inadéquate, deuxièmement, il s'était fondé sur des preuves irrecevables et des ouï-dire, troisièmement, l'audition violait les principes de justice fondamentale, quatrièmement, les parents n'avaient pas été adéquatement informés de la nature de l'audition et, cinquièmement, on ne leur avait pas donné la possibilité de présenter une preuve.

En décembre 1995, plus de dix mois après le retrait des enfants de leur famille, le tribunal d'appel a donné raison aux Butler et a ordonné que les enfants leur soient rendus immédiatement.

Dans ses conclusions, la juge d'appel a statué qu'il y avait eu violation des droits parentaux des Butler visés à l'article 7 de la Charte des droits et libertés.

 

. 1110 + -

Elle a également conclu que les aptitudes intellectuelles des enfants semblaient normales pour leur âge. Ils semblaient bien adaptés. Ils étaient en bonne santé. Ils étaient rarement malades. Il n'y avait absolument aucune preuve que les parents avaient fait subir des mauvais traitements physiques ou psychologiques aux enfants.

Elle a aussi reconnu que les bureaucrates n'avaient pas traité le cas en respectant les principes de justice fondamentale.

Les enfants Butler ont dû passer plus de six mois en famille d'accueil. Cette séparation des enfants de leurs parents, imposée par le gouvernement, a eu des effets catastrophiques pour les enfants et la famille et a beaucoup nui aux relations de la famille avec le reste de la collectivité. Tout cela était tout à fait inutile. Une enquête appropriée par des bureaucrates, au départ, aurait permis d'en arriver exactement aux mêmes conclusions que celles que le juge a tirées.

Ce ne sont pas les parents, mais les bureaucrates qui ont commis des abus, même si le juge a conclu que les Butler avaient des droits en tant que parents aux termes de la Charte. Si ces droits avaient été reconnus dans la Charte, les bureaucrates auraient peut-être procédé à une enquête appropriée avant de séparer les enfants Butler de leurs parents pendant six mois.

Il y a de nombreuses histoires d'horreur. En voici une autre. En juin 1995, les services sociaux ont pris à un couple de Nanaïmo ses trois enfants. La fillette de deux ans de Terry et Lisa Neave a été hospitalisée pour des tests et pour se faire soigner pour un problème de suffocation. Un jour avant le transfert, un pédiatre a enseigné à Mme Neave une méthode pour dégager les voies respiratoires de sa fille lorsqu'elle s'étouffait. Il s'agissait de soulever la mâchoire de l'enfant en portant une main à son cou.

À l'hôpital pour enfants de Vancouver, Lisa Neave et sa fillette ont été placées dans une chambre à deux lits avec une autre mère et son enfant malade. À un moment donné, Mme Neave a dû utiliser la méthode qu'on lui avait enseignée parce que sa fille s'étouffait. L'autre mère a signalé ce qu'elle croyait être un cas de sévices aux autorités de l'hôpital. Mme Neave a dû expliquer à un travailleur social et au chef du service de protection de l'enfance de l'hôpital ce que son pédiatre lui avait dit de faire. Le chef de service a conclu que Mme Neave pratiquait un type particulier de violence à l'égard de son enfant en inventant une maladie dont souffrirait son enfant pour se justifier. Sans vérifier auprès du pédiatre ou du médecin de famille des Neave, le lendemain les services sociaux sont venus arracher les trois enfants Neave à leur famille.

Même si personne n'avait jamais vu Mme Neave maltraiter ses enfants, le juge a décidé que celle-ci constituait un risque élevé pour ses enfants. Le médecin de famille et le pédiatre des Neave ont essayé de se mettre en contact avec le travailleur social. Ils ont dit qu'on ne les avait même pas rappelés. Les enfants n'ont pu revenir à la maison qu'en décembre et encore, M. Neave était censé surveiller les agissements de son épouse.

En janvier, les résultats de l'évaluation psychiatrique de Mme Neave, ordonnée par le tribunal, indiquaient que les seuls troubles psychiatriques de Mme Neave étaient ceux engendrés par le fait qu'on lui ait enlevé ses enfants et par l'enquête de la GRC. En février, les ordonnances du tribunal imposées par le ministère des services sociaux étaient levées. Les enfants Neave avaient vécu hors de chez eux pendant cinq mois. Les frais juridiques dépassaient 10 000 $. Tout cela aurait pu être évité si le travailleur social avait simplement appelé le pédiatre et confirmé les instructions que Mme Neave avait reçues.

Si les droits parentaux figuraient dans la Charte des droits et libertés, cette parodie de justice et ce cauchemar psychologique n'auraient peut-être pas eu lieu.

Je pourrais raconter aux députés beaucoup d'histoires de ce genre. Cela devrait inquiéter singulièrement tous les Canadiens. Malheureusement, la Charte des droits et libertés ne protège que les droits et libertés individuels. Elle ne contient pas de disposition permettant d'avoir un juste équilibre entre les droits des parents, les droits des enfants et les droits de l'État.

Je prétends que c'est pour cela que l'on doit inclure les droits et les responsabilités des parents dans notre charte. Les agressions de l'État contre les enfants sont tout aussi intolérables que les agressions des parents. Il doit y avoir un juste équilibre entre le droit des parents à élever leurs enfants et le droit de l'État à intervenir. C'est l'objectif de ma motion 33.

Mon point principal est celui-ci. Les parents ont la responsabilité de pourvoir aux besoins essentiels de leurs enfants. Dans la mesure où les parents s'acquittent de cette responsabilité, le gouvernement devrait respecter leur droit fondamental d'élever leurs enfants sans interférence indue de l'État.

Cindy Silver, une avocate de Vancouver, fait remarquer que la dignité et la valeur des individus et des familles dans une société libre figurent en bonne place dans la Déclaration canadienne des droits, mais que toute référence à la famille a été omise dans la Charte canadienne des droits et libertés. Elle dit que le fait d'avoir omis la famille a contribué de façon marquée à la mort de l'autonomie familiale et à la dévaluation juridique de la famille.

 

. 1115 + -

La motion no 33 que j'ai présentée permettrait de rectifier cet oubli, de rétablir un juste équilibre entre les droits et les responsabilités des parents, et de réaffirmer le juste rôle de l'État à l'égard de la vie familiale au Canada.

L'article 15 de la Charte stipule que la loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination. Mme Silver fait remarquer à juste titre que l'âge faisant partie des motifs de distinction illicites prévus par la loi, cela fait que les enfants et les adultes sont égaux devant la loi.

Les enfants étant égaux devant la loi et la famille et les parents ne tombant pas sous le coup de la Constitution, les groupes de défense des droits de l'enfant sont en charge du programme politique et les parents ne peuvent guère, voire pas du tout, se défendre.

Le résultat est celui-ci. En 1991, le Canada a ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, qui essayait de répondre à toutes les préoccupations soulevées par les groupes de défense des droits de l'enfant dans le monde. Mme Silver dit qu'en conséquence, la Convention des Nations Unies confère des droits à la protection et à la liberté de choix et établit donc que les enfants devraient pouvoir agir de façon autonome chaque fois que c'est possible.

Mme Silver expose ensuite les choix que les gouvernements font pour tous les enfants au Canada, peu importe que les parents estiment que c'est un bon ou un mauvais choix pour leurs enfants. L'article 13 stipule que l'enfant a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen du choix de l'enfant.

L'article 14 vise le droit de l'enfant à la liberté de pensée, de conscience et de religion. L'article 15 vise son droit à la liberté d'association et l'article 16, son droit à la protection de la vie privée. L'article 19 établit que l'enfant a le droit d'être protégé contre toutes les formes de violence physiques ou mentales. Le comité d'examen de la Convention de l'ONU a jugé que l'article 19 autorisait la liberté, pour un parent aimant, de donner une simple tape de temps en temps pour corriger le comportement d'un enfant.

En juin 1995, le comité d'examen avait critiqué le Canada pour n'avoir pas révoqué l'article 43 du Code criminel, qui permet aux parents d'avoir recours à des punitions corporelles, dans une mesure raisonnable, pour corriger le comportement de leur enfant.

La Convention de l'ONU et la recommandation du comité d'examen n'ont pas d'impact légal sur le droit canadien, mais cela n'empêche pas les lobbyistes anti-punitions corporelles de demander au gouvernement de modifier la loi. D'ailleurs, le gouvernement fédéral n'a pas agi en témoin impartial. Il a financé ces groupes de pression contre les punitions corporelles, contre les droits parentaux, pour leur permettre de faire de la recherche et de s'adresser aux tribunaux pour faire avancer leur cause. C'est inacceptable.

Des parents et des familles se trouvent sans défense devant cette ingérence de l'État, tandis que le gouvernement offre son soutien moral et financier aux groupes de pression, ce qui amenuise les droits parentaux et l'autonomie des familles.

Le document de Mme Silver précise: «Depuis 1992, le gouvernement fédéral a versé 459 millions de dollars dans le but d'harmoniser le droit et les politiques du Canada aux dispositions de la Convention de l'ONU. Une partie de cette somme a été utilisée en 1992 pour créer le Bureau des enfants, de Santé Canada, dont le mandat est d'assurer la cohérence entre la Convention de l'ONU et les programmes et politiques du gouvernement fédéral concernant les enfants ainsi que la coordination entre ces programmes et politiques.»

C'est beaucoup de dépenses en ressources humaines et financières par le gouvernement pour mettre en oeuvre une convention de l'ONU qui n'a ni fait l'objet d'un débat ni été approuvée par les députés.

Dallas Miller, conseiller juridique de la Home School Legal Defence Association du Canada, décrit les aspects négatifs de la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant dans un document rédigé à l'intention des parents-enseignants.

Il affirme: «Bien que plusieurs dispositions présentent des platitudes généralement positives et inoffensives, une partie importante de la convention amenuise les droits parentaux. Ces menaces pour la famille peuvent généralement se classer en trois catégories: premièrement, le transfert à l'État des droits et responsabilités confiés par Dieu aux parents; deuxièmement, l'institutionnalisation de la rébellion par l'attribution de divers droits fondamentaux aux enfants qui font progresser les idées d'autonomie et de liberté des enfants par rapport aux conseils de leurs parents; troisièmement, l'établissement de bureaucraties et institutions nationales et internationales destinées à promouvoir les idées proclamées dans la Charte des Nations Unies et à permettre les enquêtes et les poursuites à l'endroit des parents qui violent les droits des enfants.»

 

. 1120 + -

M. Miller a analysé chaque article de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant et souligne comment il serait possible d'invoquer la Charte pour miner les droits et les responsabilités des parents. Voici quelques exemples qu'il donne. Article 3: Dans un article portant sur les enfants, les tribunaux, les travailleurs sociaux et les fonctionnaires sont investis du pouvoir de réglementer les familles en fonction d'une détermination subjective, par les fonctionnaires, de ce qu'est l'intérêt de l'enfant. Cela se produit au Canada.

Article 4: Les pays signataires sont tenus de prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont appropriées pour faire appliquer les droits énoncés dans la convention.

Article 13: Les petits enfants sont investis d'une liberté d'expression pratiquement absolue et, selon cette disposition, les parents risquent de perdre le droit d'empêcher leurs enfants d'entrer en contact avec de la pornographie, de la musique rock contenant des paroles sacrilèges ou des émissions de télévision violentes.

Il est terrible que cette situation soit permise. On garantit aux enfants la liberté de pensée, de conscience et de religion. Les enfants ont le droit juridique de s'opposer à toute formation religieuse inculquée par leurs parents.

Article 15: Cet article affirme le droit de l'enfant à la liberté d'association. Des enfants pourraient revendiquer le droit fondamental de se joindre à des gangs de rue, à des sectes ou à des organisations racistes, en dépit des objections de leurs parents.

J'ai bien d'autres points à faire valoir et c'est pourquoi j'ai présenté la motion no 33. La question me tient beaucoup à coeur, car plus de 6 000 pétitions viennent m'appuyer dans mes efforts pour protéger davantage les droits des parents contre l'ingérence indue de la nounoucratie.

Les parents doivent être libres de faire ce qui est, à mon avis, dans l'intérêt de leurs enfants. Si le gouvernement estime qu'ils ont tort, l'article 1 de la Charte garantit que le gouvernement ne peut intervenir que dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.

En conclusion, ma motion propose d'établir un juste équilibre entre les droits des enfants, des parents et de l'État. Je demande respectueusement, avec le consentement de la Chambre, que cette motion no 33 fasse l'objet d'un vote.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour que cette motion fasse l'objet d'un vote?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour me prononcer sur la motion ayant trait à la modification de l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Je tiens à faire observer qu'une fois de plus le député réformiste évoque des cas exceptionnels pour faire valoir son point de vue plutôt que de s'en tenir à la règle générale qui a cours au Canada.

L'article 7 de la charte dit ceci: «Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale». Cet article assure un équilibre entre les droits de l'individu et les droits de l'État.

Lorsqu'on analyse la protection que garantit l'article 7, il faut se demander d'abord s'il y a eu violation de l'un des trois droits protégés, et donc atteinte à la vie, à la liberté ou à la sécurité de la personne et, dans l'affirmative, si cette atteinte était, oui ou non, en conformité avec les principes de justice fondamentale. Ces principes sont au coeur même de notre système juridique et sont essentiels à la notion de justice chère à notre société.

[Français]

La motion présentée par le député vise à ajouter à l'article 7 le droit fondamental des individus de vivre une vie familiale à l'abri de l'ingérence indue de l'État, ainsi que le droit et le devoir fondamentaux des parents de diriger l'éducation de leurs enfants.

À première vue, cette motion n'a rien de répréhensible. Effectivement, il serait tentant de l'appuyer car qui, parmi nous, ne croit pas que tous les Canadiens et Canadiennes ont droit à une vie familiale riche et intéressante, à l'abri de l'intervention de l'État, et qui ne favorise pas une reconnaissance du droit et, bien sûr, le devoir des parents d'éduquer leurs enfants?

[Traduction]

Le Canada prend ses obligations envers ses enfants très au sérieux. Ainsi, en décembre 1991, le Canada a ratifié la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant, un traité d'une vaste portée qui énonce les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels des enfants.

En raison du rôle moteur qu'il a joué dans la rédaction de la convention, le Canada s'est fait connaître pour son action en faveur des enfants. En tant que mère de deux enfants, je suis rassurée de savoir que le gouvernement a tout fait pour reconnaître que les enfants aussi ont des droits dans notre société, et qu'il prend les mesures qui s'imposent pour protéger ces droits, tant au Canada qu'ailleurs dans le monde.

 

. 1125 + -

La famille est reconnue d'une myriade de façons par le système juridique canadien qui consacre son existence légale. Elle est traitée comme un élément fondamental de notre société. Il y a, par exemple, des lois concernant la validité du mariage et sa dissolution, qui voient aux intérêts financiers des deux parties et au bien-être continu des enfants; de récentes initiatives du gouvernement, comme les lignes directrices en matière de pensions alimentaires pour enfants vont dans ce sens.

Nous aidons les familles par l'intermédiaire de politiques et de programmes aussi nombreux que variés. Le Code criminel du Canada, et tout un réseau d'organismes de protection de l'enfance dans les provinces et les territoires protègent les enfants contre les sévices et la négligence. Notre système fiscal traite les unités familiales différemment des individus.

[Français]

Le Canada ne manque nullement de respect envers les familles. Il soutient les parents qui s'occupent de l'éducation de leurs enfants. Personne ne craint de mesures d'oppression, d'ingérence ou de répression à l'endroit de la famille au Canada.

Par conséquent, je ne comprends pas quels sont les risques auxquels les familles et les enfants sont exposés et que la présente motion vise à éliminer.

L'État peut-il s'ingérer dans la vie familiale aujourd'hui au Canada? Sans aucun doute, il peut le faire, et c'est même son devoir de le faire dans quelques cas. Idéalement, chaque parent devrait être un parent aimant, chaque enfant devrait être un enfant heureux, en santé et à l'abri des dangers, et chaque famille devrait être un refuge contre l'agitation quotidienne et un lieu empreint de chaleur, de sécurité et d'affection.

Cependant, et les exemples que le député a signalés le démontrent, il suffit de lire les journaux, d'écouter les nouvelles et de regarder la télévision pour constater que tel n'est pas le cas.

[Traduction]

À l'heure actuelle, les familles canadiennes n'ont pas besoin d'être davantage protégées contre l'ingérence de l'État. Chaque jour, dans ce pays, l'État se sert judicieusement, certains disent trop timidement, de ses pouvoirs pour protéger les membres les plus vulnérables de la famille, les femmes, les enfants et les personnes âgées, établissant ainsi un difficile équilibre. On pèse les droits des individus en cause et quand l'équilibre est rompu, l'État intervient et prend soin de ses citoyens.

Je ne pense pas que les Canadiens veulent voir cette capacité d'intervention sapée. Nous sommes outrés quand nous apprenons que des enfants ont été retournés ou laissés dans des familles qui les maltraitent. Tous les jours, les journaux locaux font état d'incidents de ce genre. Voulons-nous vraiment entraver les efforts des autorités chargées de la protection de l'enfance? Voulons-nous vraiment que les tribunaux soient engorgés par des contestations judiciaires basées sur la Charte pendant que nos concitoyens les plus vulnérables continuent à être maltraités?

[Français]

Les tribunaux ont examiné l'article 7 de la Charte et ses répercussions sur les droits de la famille. Je n'ai pas l'intention de dresser aujourd'hui une liste des décisions judiciaires rendues à ce sujet. À toutes fins pratiques, je n'en ai pas le temps.

Nos tribunaux ont conclu que le droit d'élever un enfant est une composante du droit à la liberté d'un parent. Ils ont affirmé que l'État devrait intervenir uniquement lorsque c'est nécessaire, confirmant de ce fait que les droits des parents ont une importance vitale pour notre société. Il ne s'agit pas d'une reconnaissance d'un droit de propriété sur les enfants, mais du pouvoir des parents de prendre des décisions dans l'intérêt de l'enfant.

Cependant, nos règles de common law reconnaissent depuis longtemps le droit et le pouvoir de l'État d'intervenir pour protéger les enfants en danger. C'est là un principe fondamental de notre droit.

[Traduction]

Selon moi et selon le gouvernement, l'article 7 de la Charte n'a pas besoin d'être modifié de la sorte. Les familles canadiennes sont protégées contre l'ingérence indue de l'État et les parents ont le droit d'élever leurs enfants comme bon leur semble, tant qu'ils restent dans les limites de la loi. La loi est là pour protéger les membres les plus vulnérables de la société, qui sont également notre ressource la plus précieuse, c'est-à-dire les enfants.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, les députés trouvent peut être le sujet un peu difficile à aborder. J'aimerais vous faire part de certains commentaires personnels. J'ai reçu beaucoup de courrier au sujet d'une question que le député présentant cette motion a mentionnée.

Personnellement, je ne suis pas d'accord avec l'abrogation de l'article 43 du Code criminel. Je l'ai fait comprendre très clairement aux électeurs qui m'ont écrit à ce sujet. Je sais que certains de mes collègues appuient cette idée. Toutefois, je tiens à faire savoir que, vu qu'il s'agit d'une initiative parlementaire, je ne suis pas de cet avis. Je ne crois pas que le gouvernement le soit non plus. C'est du moins ce qu'il dit.

 

. 1130 + -

Certaines personnes se réjouissent à l'idée que cet article du Code criminel pourrait être abrogé, mais je ne suis pas certain du tout que ce soit là l'intention du gouvernement. Toutefois, s'il avait l'intention de le faire, s'il devait proposer à la Chambre de l'abroger, je ne serais pas prêt à appuyer cette proposition.

Le député n'a fait que souligner de façon différente ce que j'avais déjà soulevé il y a plusieurs années, au moment du débat final sur la Charte ici même à la Chambre, à savoir que la Charte des droits et libertés officialise, dans ce pays, le point de vue de l'individualisme et du libéralisme face à la société et elle a ses limites.

Par exemple, elle ne reconnaît pas adéquatement les droits des communautés ou des collectivités. Elle tend à considérer toute vie humaine comme équivalant nécessairement à l'interaction entre les personnes. Dans un certain sens, elle va encore plus loin en reconnaissant l'existence des droits des autochtones, mais à mon avis elle demeure plutôt restreinte dans la mesure où elle ne fait qu'enchâsser cette vision de la vie qui relève de l'individualisme et du libéralisme.

Je ne veux pas dire que cette optique est mauvaise. Toutefois, elle ne tient pas compte de la complexité des liens que tant les individus que les groupes nouent les uns avec les autres.

Il y a une chose que j'avais soulignée à ce moment-là et qui s'applique toujours je crois. Le député affirme que l'on ne tient pas suffisamment compte de la réalité de la famille. Je retiens cet argument. En fait, j'ai lu les articles qu'il a fait circuler. On parle dans ces articles de préoccupations que je partage. Pour le moment, en tout cas, je ne suis pas persuadé qu'on puisse accomplir quelque chose en prévoyant dans la Constitution des dispositions concernant les parents et les familles. Je ne suis moi-même pas opposé à cette idée, seulement, je ne vois pas comment cela pourrait fonctionner.

Une chose que je trouve étrange dans le débat qui a cours ce matin, de même que sur d'autres tribunes et à propos d'autres questions, c'est la tension entre l'État et la famille. Dans une certaine mesure, je ne sais pas s'il faut la qualifier d'exagérée ou de déplacée ou de fausse guerre en ce sens.

Je crois que l'État et la famille perdent tous les deux du terrain en faveur du marché. Il y a deux institutions de plus en plus faibles dans notre société, à savoir l'État et la famille. Les personnes qui s'inquiètent pour les valeurs familiales réagissent en s'attaquant à l'État. Il est opportun de le faire dans certains cas, mais, dans tous les cas, il serait totalement inopportun de ne pas reconnaître que ce qui menace les valeurs familiales tout autant que des choses qui sont attribuées à l'État, ce sont les valeurs du marché.

Après tout, ce n'est pas l'État qui crée et entretient la culture de la violence qui passe par nos écrans de télévision. C'est la mise en marché très réussie des entreprises de télévision. Les annonceurs y sont pour quelque chose aussi. Ils paient des tarifs plus élevés pour des émissions dont la violence exerce un certain attrait. Cela se voit de plus en plus dans les sports aussi.

Ce n'est pas l'État qui est le vecteur de la pornographie. On voit ces mauvaises attitudes par rapport aux relations humaines, aux hommes et aux femmes non seulement dans ce que l'on appelle la pornographie, on le voit aussi dans la publicité.

 

. 1135 + -

Dès que l'on allume la télé, si l'on a de jeunes enfants, on se demande jusqu'où iront les publicitaires privés, que bon nombre d'entre nous à la Chambre considèrent comme des exemples à suivre. On dit de tel publicitaire, de telle entreprise de publicité qu'ils savent vendre leurs produits et que leurs actions se sont appréciées sur le marché.

C'est peut-être évident, mais j'ai de la difficulté à accepter que l'État mine de cette façon le tissu moral du pays. J'ai de la difficulté à accepter cela si, parallèlement, l'État ne s'attaque pas vigoureusement à la façon dont on se sert des valeurs pour vendre un produit, que ce soit par le sexe ou autrement, car la fin justifie les moyens et que le marché le veut ainsi et qu'il faut l'accepter.

Je ne pense pas qu'il faut l'accepter. Si l'on veut une société morale, il faut être prêt à adopter une démarche globale et non pas mettre l'accent uniquement sur une chose en fonction de ses prédispositions idéologiques. Il faut être prêt à s'attaquer au marché, ce que l'on n'est pas prêt à faire à notre époque.

Les gens qui parlent du marché comme je le fais sont considérés comme une sorte de vieux socialistes qui refusent la liberté qui vient avec le marché. Les gens ont le droit de vendre ce qu'ils veulent. Ils font tout ce qui est permis pour vendre leurs produits.

Je demande aux députés que cela préoccupe de penser aussi à des choses comme celle-là parce que, dans la mesure où nous cultivons une éthique particulière en ce qui concerne le marché, nous renforçons des valeurs que nous ne voulons pas nécessairement renforcer.

On dit souvent quand on parle de la criminalité juvénile que les jeunes ne semblent pas avoir de valeurs. Peut-être bien qu'ils en ont. Peut-être que les jeunes ont fait leurs les valeurs du marché au lieu d'adhérer à celles de la famille ou de l'État.

Peut-être que les jeunes ont fait leurs les valeurs du rendement et des marges de profit semestrielles. Quand des travailleurs sont mis à pied ou que des lits d'hôpitaux sont fermés, selon le cas, il importe peu que le responsable soit l'État ou une entreprise privée, selon l'activité en cause.

Peut-être que les jeunes ont constaté que, depuis 25 ans, la société glorifie la lutte pour la survie et qu'elle considère comme romantique, irréaliste ou idéaliste dans un sen péjoratif et condescendant quiconque dit que c'est peut-être une erreur et que peut-être nous ne devrions pas exalter ces valeurs au détriment des autres.

J'invite certainement les députés qui se préoccupent des points soulevés par le député de penser à cela aussi.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, je suis heureux aujourd'hui d'intervenir, au nom du Parti progressiste conservateur, sur la motion des réformistes concernant les familles canadiennes ainsi que le rôle et la responsabilité des parents.

Au Parti progressiste conservateur, nous croyons que l'éducation des enfants relève avant tout de leurs parents. Nous sommes d'avis qu'il faut aider les familles pour qu'elles élèvent de leur mieux leurs enfants et en fassent des membres productifs de la société. Nous encourageons les familles à mettre en valeur tout le potentiel de chaque enfant.

La motion dont nous sommes saisis aujourd'hui propose de modifier la Charte canadienne des droits et libertés de manière à permettre aux personnes de mener leur vie de famille librement sans ingérence indue de la part de l'État et à reconnaître le droit fondamental et la responsabilité des parents de décider de l'éducation de leurs enfants. Quelle serait au juste la modification à apporter à la Charte?

 

. 1140 + -

Aux termes de l'article 7 de la Charte, «Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale.»

D'après nous, il n'est pas nécessaire de modifier cet article pour que les familles soient libres d'élever leurs enfants comme elles l'entendent. L'article 7 garantit aux parents le droit d'élever librement leurs enfants comme elles le veulent, selon les valeurs fondamentales répandues dans la société. Nous affirmons que les lois existantes permettent déjà aux parents d'élever leurs enfants sans ingérence indue de la part de l'État, dans l'intérêt de l'ensemble de la population.

Que faut-il entendre par ingérence indue? Le parrain de la motion dit que les parents craignent que les autorités leur retirent leurs enfants s'ils corrigent ces derniers en public. C'est ce que le député entend par ingérence indue dans la vie familiale. Donner la fessée à un enfant pour le corriger est une question qui fait l'objet d'un vif débat, mais, à ma connaissance, la plupart des organisations provinciales d'aide à l'enfance considèrent la fessée comme une zone grise entre la discipline et le mauvais traitement. La manière de corriger les enfants est une question qui devrait continuer à faire l'objet de débats dans notre société.

Que faut-il penser de la regrettable nécessité de protéger certains enfants contre leurs propres parents? La modification que le Parti réformiste propose d'apporter à la Charte des droits et des libertés pourrait-elle empêcher l'État d'exercer son pouvoir de protéger les enfants victimes de mauvais traitements ou d'agressions sexuelles?

Les enfants devraient être élevés au sein de leur famille. La famille constitue le fondement de la société canadienne. Les parents devraient avoir la responsabilité de leurs enfants. Mais l'État doit avoir le pouvoir de protéger les enfants dans les situations où les parents sont incapables d'assumer cette responsabilité ou peu disposés à le faire.

Il n'est pas aussi simple que les députés réformistes voudraient nous le faire croire d'enlever un enfant à sa famille en vertu des lois provinciales actuelles. Les agents de la protection de l'enfance doivent recourir aux mesures les moins perturbantes, et les travailleurs sociaux doivent démontrer qu'il est dans l'intérêt bien compris de l'enfant de le sortir de sa famille.

La loi sur la protection de l'enfance stipule de façon très précise qu'on ne peut enlever un enfant à sa famille que si l'on peut établir devant les tribunaux des preuves de mauvais traitements ou d'agressions sexuelles ou de négligence. On s'efforce beaucoup au contraire d'aider les familles à mieux surmonter les tensions de la vie quotidienne de sorte que les enfants ne soient pas victimes de négligence ou de mauvais traitements et que les familles puissent travailler et vivre ensemble sans mauvais traitement ni négligence.

Est-ce là de l'ingérence indue dans la vie des gens? Il s'agit plutôt à mon avis d'un effort pour renforcer la cellule familiale au lieu de la faire éclater.

Il est ironique de voir le Parti réformiste proposer une modification à la Charte des droits et des libertés pour permettre aux parents d'élever leurs enfants sans ingérence de la part de l'État, alors que ses principes et ses politiques stipulent que: «Le Parti réformiste reconnaît que la violence faite aux enfants et la violence familiale minent les fondations mêmes de notre société organisée. Le Parti soutient l'adoption, la communication et l'application de lois protégeant la famille contre les actes de violence.» Ce principe du Parti réformiste n'entre-t-il pas en contradiction avec la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui? Les principes et les politiques du Parti réformiste semblent bien entrer en contradiction avec la motion du député.

Le Parti réformiste réclame qu'on abaisse l'âge auquel les jeunes contrevenants devraient être jugés par des tribunaux pour adultes. Même si ces enfants continuaient d'être considérés comme des mineurs, la politique du Parti réformiste réclamerait la possibilité pour l'État de s'ingérer dans le pouvoir des parents d'élever et de discipliner leurs enfants.

J'ajoute en conclusion que nous n'avons pas besoin de modifier la Charte des droits et des libertés pour permettre aux parents d'élever leurs enfants comme bon leur semble. Il nous faut plutôt une discussion mieux informée sur les problèmes qui ont poussé le député à proposer cette motion. Nous devons aussi prendre les mesures pour que les enfants ne soient pas victimes de mauvais traitements ou de négligence parce que leur famille vit dans la pauvreté.

Notre société doit mettre l'accent sur les besoins des enfants parce que ce sont eux qui viendront un jour à la Chambre des communes représenter le Canada.

Je remercie le député d'avoir soumis à la Chambre une question qui mérite de faire l'objet d'un débat approfondi. Ce n'est cependant pas en modifiant la Charte des droits et libertés que l'on pourra atteindre les objectifs souhaités par le député. On ne peut pas imposer par la loi de saines valeurs familiales. Ces valeurs doivent venir des familles et des parents eux-mêmes.

 

. 1145 + -

Monsieur le Président, je suis fier de ce que ma femme, ma famille et moi avons fait pour que mes enfants soient des membres constructifs de la société. Nous n'avons pas eu besoin de loi pour cela. Nous l'avons fait avec fierté, avec le dévouement que les deux parents doivent évidemment manifester et aussi avec le dévouement de mes enfants eux-mêmes.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir intervenir brièvement dans le débat sur la motion. Je veux laisser au motionnaire assez de temps pour conclure. J'aimerais que vous me fassiez signe au moment voulu.

La motion est très importante. À mon avis, beaucoup de députés n'ont pas vraiment pris conscience de toute son importance. Elle est importante parce que les Canadiens valorisent depuis longtemps le rôle de la famille au sein de la société. Historiquement, ils ont opté pour la séparation de l'État et de la famille.

On lit ceci dans le préambule de la Déclaration canadienne des droits:

    Le Parlement du Canada proclame que la nation canadienne repose sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu, la dignité et la valeur de la personne humaine ainsi que le rôle de la famille dans une société d'hommes libres et d'institutions libres.

Dans notre Déclaration des droits, les fondateurs de notre nation ont reconnu que la famille avait une place unique et particulière dans notre pays. De la même manière, les réformistes, des Canadiens qui ont modelé notre politique, sont aussi préoccupés. C'est pourquoi, dans les documents de notre parti, nous avons déclaré que:

    Le Parti réformiste affirme que les parents ont le devoir d'élever leurs enfants de façon responsable, selon leur propre conscience et leurs propres croyances, et affirme également qu'aucun individu, gouvernement ou organisme n'a le droit de s'ingérer dans la réalisation de ce devoir, tant que les parents agissent sans abus ni négligence.

Nous sommes préoccupés, car nous avons cru constater une érosion du respect du rôle de la famille dans la mosaïque canadienne et dans nos lois. Je pense au préambule de la Charte canadienne des droits et libertés, qui a maintenant préséance sur la Déclaration des droits, que nous connaissons tous. Ce préambule est ainsi libellé:

    Attendu que le Canada est fondé sur des principes qui reconnaissent la suprématie de Dieu et la primauté du droit:

Il n'y est pas question de la famille. Toute mention en ce sens a été supprimée, et cette omission, qui peut sembler sans importance, a des répercussions au Canada.

Le lien parent-enfant est extrêmement important pour le bien-être à long terme de notre pays et, au tout début, il est d'ordre physique. En fait, il existe avant même la naissance de l'enfant. Selon certaines études, dans l'utérus, l'enfant peut reconnaître la voix de sa mère et certains mouvements. J'ai personnellement des jumelles; l'une d'elles est très active, tandis que l'autre est un peu plus calme. Nous savions, au cours de la grossesse, que l'une d'elles était très active. À ce moment-là, elle était aussi active qu'aujourd'hui.

Une mère qui allaite son enfant établit avec lui un lien très étroit et lui transmet certains anticorps. Ce que je veux dire, c'est que les parents satisfont les besoins physiques de leurs enfants. De nouvelles études montrent l'importance des contacts physiques avec les parents. Les enfants dont les besoins sont satisfaits et qui sont placés dans un milieu stable acquièrent peu à peu confiance.

Qui plus est, des études montrent—j'en ai vu une qui date de 10 ans—que le fait de changer de gardien ou de gardienne a des effets négatifs sur les enfants et qu'il s'ensuit souvent des répercussions à long terme sur le plan psychique. On peut le constater, de nos jours, dans de nombreuses garderies. C'est de nos parents et des membres de notre famille que nous acquérons notre identité; il ressemble à oncle Joseph ou elle ressemble à tante Marie.

Le fait d'élever des enfants exige certainement des sacrifices. Cependant, comme pour tout ce qui vaut la peine, les gratifications sont grandes. Voir un enfant évoluer du moment de sa conception jusqu'à l'âge adulte, c'est un investissement spécial qui rapporte énormément aux parents.

 

. 1150 + -

Personne n'est mieux placé pour élever les enfants que les parents. Aucun État ou groupe social bien intentionné ne parviendra jamais à usurper le rôle du parent. Voilà pourquoi nos ancêtres ont voulu consacrer ce rôle dans notre déclaration des droits et dans nos lois.

Il convient également de veiller à ce que les parents puissent influer sur le développement de la capacité intellectuelle de leurs enfants. Selon une étude récente, le développement cognitif et intellectuel d'un enfant jusqu'à l'âge de 3 ans est crucial. Si les enfants ne sont pas stimulés adéquatement, dans un milieu propice, entourés de leurs parents, s'ils sont laissés à eux-mêmes, comme ce fut le cas dans les causes tragiques qui nous ont été décrites, il y a certaines parties du cerveau qui ne se développent pas. Après l'âge de 3 ans, quand les enfants vieillissent, il est impossible de réparer ces torts.

Les premières années sont une période cruciale dans la vie d'un enfant et seul un parent qui l'aime peut lui fournir ce dont il a besoin et prendre les mesures nécessaires pour veiller à ses intérêts.

À l'intérieur d'une famille, on enseigne aux enfants à bien s'entendre, à partager, à penser aux autres, à renoncer à leurs désirs personnels et à maîtriser leurs émotions. On ne fait pas toujours ce que l'on veut. Pour le bien de la famille, on renonce parfois à certaines choses. À une époque où les gens réclament constamment des droits, la famille est une institution où l'on apprend encore qu'on ne peut pas toujours obtenir ce que l'on veut, si l'on veut veiller au bien de l'ensemble de la famille. Le respect de l'autorité est issu de la famille.

Permettez-moi de souligner l'importance des liens entre le parent et l'enfant en citant une étude exhaustive effectuée en 1996 par la Foundation of Family Research and Education. On y dit que, lorsque la garde des enfants n'est pas régulièrement assurée par les parents, cela accroît de 66 p. 100 l'insécurité des liens affectifs chez les enfants. Les résultats de cette étude et d'autres travaux permettent de conclure que l'absence de liens affectifs solides à l'enfance est une cause directe des niveaux cliniques de troubles affectifs et de problèmes de comportement à l'adolescence, y compris de la criminalité chez les jeunes. Toujours d'après cette étude, il est évident que la famille est l'institution qui influe le plus sur le développement des enfants et des adolescents.

Les défis que nous posent aujourd'hui les jeunes ne font que souligner la nécessité de protéger l'autonomie des familles. Nous ne faisons pas que protéger la famille, nous l'appuyons et nous l'encourageons, dans le but d'assurer le bien-être à long terme du pays. Je félicite le député d'avoir proposé cette motion qui vise justement cet objectif.

Je voudrais aborder rapidement un autre sujet encore, soit la sollicitude aimante des parents pour leurs enfants. Les parents veulent que tout aille bien pour leurs enfants. Ils veulent qu'ils vivent heureux et à l'aise. Nous le savons tous. Les parents sont les mieux placés pour transmettre à leurs enfants un ensemble de valeurs fondamentales qui les aideront dans la vie. Ces valeurs, les parents eux-mêmes les ont intégrées. Ils les ont pratiquées dans les moments cruciaux de la vie. On leur a inculqué ces valeurs, et ils les ont pratiquées tout au long de leur vie. Comme tous les parents, lorsque je reviens sur le passé, je me dis qu'il y a des choses que je n'aurais pas dû faire. J'ai tiré des enseignements de cette réflexion. Je tiens à transmettre à mes enfants ce qu'il y a de mieux dans ce que j'ai appris, dans leur intérêt supérieur.

Aucune institution de l'État, aucune institution sociale ne peut agir de la sorte avec le même amour et la même sollicitude. J'applaudis au rôle des grands-parents aussi. Ils ont tellement à offrir.

Les parents jettent des bases pour leurs enfants. Les enfants mettent ces fondements à l'épreuve et ils peuvent les modifier et adopter leurs propres valeurs à l'âge adulte. Mais ce sont les parents qui sont les mieux placés pour inculquer ces valeurs. Aucun système, aucun gouvernement, aucun organisme ne doit s'ingérer dans ce travail.

Je sais qu'il y a des familles qui ont des difficultés et des problèmes, parfois tragiques. À notre époque technicienne, des pressions énormes s'exercent sur les familles. Dans notre enthousiasme, nous cherchons parfois des expédients, et nous nous pensons plus avisés que les parents. Toutefois, nous devons toujours nous méfier d'une bureaucratie qui cherche à prendre de l'expansion en prétendant que le gouvernement peut tout régler. Le remède est pire que le mal.

 

. 1155 + -

Si nous voulons vraiment aider nos enfants, nous devons respecter la relation privilégiée qui les unit à leurs parents, tout comme nos prédécesseurs l'ont fait en élaborant la déclaration des droits. Les gouvernements et les organismes sociaux bureaucratiques n'aident pas les familles en s'immisçant entre les parents et les enfants. Ils doivent plutôt chercher à soutenir, encourager et renforcer de saines relations familiales au lieu de s'y ingérer. Aidons les parents, ne prenons pas leur place.

Le Président: La parole est au député de Wentworth—Burlington. Son intervention nous mènera à 11 h 59. Le parrain du projet de loi aura ensuite cinq minutes pour conclure le débat.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de parler de la motion. Bien que l'intention soit bonne, la motion présente des défauts graves.

Je tiens à dire au député que, à mon avis, le plus grand problème que pose sa motion, c'est qu'elle oppose l'individu au groupe. La motion du député vise à modifier la charte pour que les parents aient certains droits à l'égard de leurs enfants.

L'essence même de la législation en matière de droits est de définir les limites s'appliquant aux mesures que l'État ou le groupe peut prendre à l'égard de l'individu. Que nous donnions des droits aux parents ou à l'État, nous nous trouvons quand même à miner les droits de l'individu. Nous aurions des problèmes terribles si nous accordions des droits spéciaux aux parents. Nous limiterions la capacité de l'État d'intervenir dans des cas où des parents maltraiteraient leurs enfants.

Par contre, le député a l'impression—et nos électeurs nous donnent tous cette même impression—qu'il y a une érosion de la capacité des parents qui ont la garde de leurs enfants d'élever ceux-ci comme ils le jugent bon parce qu'ils craignent que l'État n'intervienne de façon injustifiée s'ils punissent leurs enfants ou prennent d'autres mesures à leur égard.

Ce problème ne se limite pas aux parents. Il s'applique aussi à d'autres personnes comme les enseignants et les policiers qui ont affaire à des adolescents ou à des enfants. Avant la Charte des droits, l'enseignant, le parent ou le policier pouvait dire à un enfant qu'il ne devait pas faire telle ou telle chose. Il pouvait même lui imposer un châtiment, tout en respectant certaines limites.

Le problème que pose la Charte des droits, c'est qu'elle mine la capacité des parents, des enseignants ou des policiers d'imposer des châtiments aux enfants en accordant tous les droits civils à l'enfant avant qu'il n'atteigne l'âge de la majorité, donc avant qu'il ne soit assez responsable pour exercer ces droits.

Nous avons une situation maintenant où si un enseignant tente d'imposer un châtiment à un enfant à l'école, ou encore si un parent tente d'imposer un châtiment à un enfant à la maison, l'enfant peut faire appel aux tribunaux et même signaler l'incident à la police. Nous avons une situation maintenant dans nos écoles où les enseignants n'arrivent plus à faire régner la discipline parce que les enfants sont souvent un peu trop conscients de leurs droits. Cela cause un problème majeur dans les écoles.

Je crois que ce défaut de la Charte des droits est une cause principale des difficultés que nous éprouvons en ce qui a trait à la Loi sur les jeunes contrevenants. Quelles que soient les modifications que nous puissions apporter à la Loi sur les jeunes contrevenants, nous devrons, en bout de ligne, modifier la Charte des droits afin de ne pas donner tous les droits civils aux enfants, mais bien redonner certains droits aux parents, aux enseignants et aux tribunaux à l'égard des enfants dont ils ont la responsabilité.

Bien que j'appuie le principe qui sous-tend la motion, je ne peux malheureusement pas appuyer la motion elle-même.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, le parti ministériel, le Nouveau Parti démocratique et les conservateurs se sont prononcés contre la motion à l'étude et le gouvernement a dit qu'il refusait de poursuivre le débat parce que les exemples que j'ai cités avaient un caractère exceptionnel.

 

. 1200 + -

Il nous incombe, en tant que législateurs, d'adopter des lois pour interdire et décourager les comportements indésirables au Canada. Les vols à main armée constituent un acte exceptionnel. La grande majorité des gens n'ont pas besoin de loi contre les actes de ce genre, mais nous légiférons néanmoins en ce sens.

Les fonctionnaires et l'État abusent de leur pouvoir. L'argument avancé par le gouvernement n'est pas valable parce que la population doit être protégée contre l'appareil bureaucratique et l'État. Nous devons assurer un équilibre, et c'est précisément ce que j'ai défendu.

Le gouvernement a également fait valoir qu'une telle mesure engendrerait l'impasse dans les tribunaux, mais voyez ce qui se passe déjà. Les parents doivent se donner énormément de mal pour que leurs enfants leur soient rendus, même lorsqu'ils n'ont absolument rien fait de répréhensible.

La motion vise à protéger les enfants. Les gens ne comprennent pas. Les enfants ont besoin d'être protégés, ce qui est précisément le but de la motion. Ceux qui s'y opposent n'ont qu'à regarder ce qui se passe au Canada.

Je pourrais donner de nombreux autres exemples. J'invite le gouvernement, le Nouveau Parti démocratique et les conservateurs, qui ont tenté de déformer ce que j'ai dit, à examiner ces exemples de plus près.

Je voudrais citer brièvement l'article suivant publié par Mme Silvers:

    Ces cas montrent que la marge d'erreur des lois de protection de l'enfance au Canada place les familles dans une situation vulnérable. Ce qui ne veut pas dire que l'État n'a pas à protéger les enfants. La société a tout intérêt à s'assurer du bien-être des enfants. Le pouvoir de l'État d'intervenir dans des cas de violence physique ou sexuelle ou de négligence peut avoir une importance cruciale. Les droits d'un parent ne peuvent éclipser ceux de son enfant. Par ailleurs, les droits de l'un et de l'autre ne s'opposent pas forcément. Les droits de l'enfant doivent cependant primer dans tous les cas où le parent et l'État ne s'entendent pas sur ce qui constitue le bien-être de l'enfant. La loi doit comporter, au départ, une présomption favorable envers les parents et non pas envers l'État.

    Il incombe donc à ce dernier, conformément aux principes de justice fondamentale, de renverser cette présomption.

Mme Kari Simpson, directrice exécutive de Citizen's Research Institute, à Surrey, en Colombie-Britannique, m'a envoyé de la documentation sur des douzaines d'histoires d'horreur, où des fonctionnaires ont enlevé des enfants à leurs parents en invoquant la loi de l'enfance, de la famille et des services communautaires. Les personnes en cause ont dû communiquer avec mes bureaux. Je n'ai évidemment pas le temps de m'attarder à ces cas.

Si le Parlement adoptait aujourd'hui cette motion concernant les droits et responsabilités des parents, la résolution pourrait ensuite être envoyée aux assemblées législatives des dix provinces pour y faire l'objet d'un débat et d'un vote. Nous devons permettre aux Canadiens de tenir un débat sur cette question. Au lieu de cela, nous sommes en train de mettre la question de côté, et nous avons tort. La reconnaissance des droits, responsabilités et libertés des parents dans la Charte assurerait un juste équilibre entre la liberté fondamentale des parents d'élever leurs enfants et le rôle du gouvernement, qui est d'assurer la protection des enfants lorsque leurs parents s'acquittent mal de leurs responsabilités.

Ma motion assurerait un juste équilibre entre les droits des enfants, des parents et de l'État. C'est pourquoi j'ai demandé respectueusement à la Chambre de permettre à l'unanimité que la motion puisse faire l'objet d'un vote.

Le Président: Le député de Yorkton—Melville demande, si j'ai bien compris, à la Chambre la permission de présenter une motion demandant le consentement unanime pour que la motion puisse faire l'objet d'un vote. Est-ce exact?

M. Garry Breitkreuz: Je l'ai déjà demandé.

Le Président: Le député a-t-il la permission de présenter la motion?

Des voix: Non.

Le Président: La période prévue pour l'étude des initiatives parlementaires est maintenant terminée et l'ordre est rayé du Feuilleton.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR L'IDENTIFICATION PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES

 

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

QUESTION DE PRIVILÈGE

Le Président: Chers collègues, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough m'a signalé, ce matin, qu'il entendait soulever la question de privilège.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, c'est avec un certain regret que je soulève la question de privilège, mais je pense que c'est de mon devoir de le faire. Mon intervention découle du projet de loi C-3 dont l'amendement est à l'étude à la Chambre aujourd'hui.

 

. 1205 + -

Elle a également trait aux actions du gouvernement qui, à mon avis, nuisent au travail des députés dans le cadre de leur étude de ce projet de loi qu'on est censé étudier à l'étape du rapport aujourd'hui.

Une part essentielle du débat sur le projet de loi C-3 porte sur un désaccord sur une question constitutionnelle importante. On a demandé à des conseillers juridiques du secteur privé de donner un avis au sujet des options que le gouvernement envisageait. Le premier conseiller juridique de l'État, la ministre de la Justice, a décidé d'obtenir l'avis de ces trois éminents avocats du secteur privé qui avaient, dans le passé, été membres de la magistrature. Les membres du Comité de la justice l'ont appris le 20 avril, lorsque la ministre a témoigné devant le comité au sujet du budget des dépenses principal.

La ministre de la Justice a jugé nécessaire d'obtenir cet avis juridique à l'extérieur de son ministère, car il est question du moment opportun pour prélever des échantillons d'ADN, ce qui est au coeur du débat d'aujourd'hui.

Au cours du week-end, j'ai appris que, vendredi soir, on avait transmis les avis de ces trois éminents juristes au directeur exécutif de l'Association canadienne des policiers. Par contre, on n'a pas transmis ces opinions aux membres du Comité de la justice, ou du moins pas aux représentants de l'opposition auxquels j'ai parlé. On a donc fait part de cette information au directeur de l'Association canadienne des policiers, mais non aux membres du Comité de la justice.

On va demander à la Chambre des communes de se prononcer sur des questions touchant ce très important avis que la ministre de la Justice a jugé bon d'obtenir. À mon avis, nous sommes placés, en tant que députés, dans une position désavantageuse. Mon personnel et moi-même avons travaillé sur cette question au cours du week-end pour nous préparer pour le débat d'aujourd'hui, ainsi que l'ont fait d'autres députés de l'opposition. Nous l'avons fait sans connaître la teneur des avis juridiques obtenus par la ministre de la Justice. Je n'ai reçu ces avis que ce matin.

Elle nous a donc transmis ces avis, mais il semble qu'elle ne les ait pas de la même manière qu'elle les a fait parvenir au directeur de l'Association canadienne des policiers. En effet, je crois comprendre qu'il a reçu ces avis par messager à sa maison de Brockville alors que nous, députés, ne les avons pas reçus avant ce matin. J'ai pris la liberté de transmettre ces avis à mes collègues des autres partis, car ils ne les avaient pas encore reçus.

Je prétends que les actions du gouvernement montrent qu'il se préoccupe davantage de l'opinion d'un groupe d'intérêt que de celle des membres du Comité de la justice qui sont censés parler de cette question, à la Chambre, aujourd'hui. Le gouvernement n'a pas respecté son obligation de traiter les députés avec le même respect qu'il porte à d'autres personnes qui ne siègent pas à la Chambre. C'est la réponse de type «Le chèque est dans le courrier». Le gouvernement s'est donné la peine de faire en sorte que cette décision soit rendue mais, après coup, il ne s'est pas donné la peine de transmettre le résultat aux membres du comité.

Loin de moi l'idée de manquer de respect envers les groupes d'intérêts, surtout lorsqu'il s'agit de l'Association canadienne des policiers. Certes, cet organisme a tout à fait droit à cette information, mais on aurait dû rendre la pareille, on aurait dû en faire autant pour que les députés de la Chambre aient accès à cette donnée cruciale. Le gouvernement a préféré les informer par le moyen le plus lent et le moins rentable. On nous a demandé d'approuver les prévisions budgétaires du ministère et de dire au gouvernement ce que nous pensons de cette mesure législative très importante. Or, le gouvernement nous a communiqué ce renseignement par le moyen le plus lent qui soit.

J'y vois là une atteinte au privilège parlementaire. En cherchant à obtenir un avis juridique, le gouvernement espérait influencer les délibérations devant mener au vote sur le projet de loi C-3. Mais il s'est gardé de nous accorder le temps nécessaire pour que nous puissions prendre connaissance de ces précieuses données.

Je renvoie la présidence au commentaire 31(10) de la sixième édition du Beauchesne où un Président traite de la question des communications ministérielles à la Chambre. Il a dit ceci:

    On s'est demandé si les députés ont droit, en vertu de leurs prérogatives parlementaires, d'être mis au courant avant le public.

    Je ne trouve aucun précédent pour justifier cette idée.

Je ne prétends pas que nous devions être mis au courant avant le public, je dis tout simplement que nous devrions à tout le moins être informés en même temps. Ce renseignement a directement trait à la question qui fait l'objet du débat d'aujourd'hui. Il a directement trait au prélèvement d'échantillons d'ADN. Je puis assurer la Chambre que telle sera la position des députés de l'opposition. L'information doit être fournie à l'avance. Je dirais que l'action du gouvernement n'est pas seulement discutable, elle a été mal pensée et elle est mal à propos, étant donné que cette information est maintenant publique. La hâte conduit à de mauvaises lois et c'est le danger que fait planer cette situation.

 

. 1210 + -

Par conséquent, je pense que la présidence doit à tout le moins considérer cette question avant le début du débat. Nous devons avoir le temps d'examiner ces décisions. Nous avons besoin de temps pour digérer les opinions de ces juristes, auxquels le gouvernement a demandé de se prononcer, pour nous préparer au débat et parler des amendements en connaissance de cause.

Je suis d'avis que nous devons nous occuper de cela dans les meilleurs délais, pour reprendre l'expression de la ministre, de préférence avant le début du débat d'aujourd'hui.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, j'appuie ce que vient de dire mon collègue.

C'est un projet de loi important. Les trois opinions juridiques ont été rendues alors qu'il ne restait plus de temps au comité pour convoquer des témoins afin d'explorer toutes les avenues possibles.

Nous sommes maintenant dans une situation où tous les députés sont appelés à analyser ces trois opinions juridiques sans examen adéquat des positions ayant conduit à ces décisions. Cela nous handicape et nous ne pourrons pas étudier les opinions avancées dans ces trois décisions comme il le faudrait, puisque nous ne pourrons plus convoquer de témoins au comité.

Il est très important, en l'occurrence, que nous ayons le temps de convoquer des témoins. Sinon, nous allons simplement accepter ces opinions sans en avoir analysé les raisons qui les justifient.

J'ai à peine eu le temps de parcourir ces trois décisions ce matin. Nous devrions en débattre aujourd'hui, mais j'estime que ce ne serait pas juste pour les députés d'avoir à considérer ces décisions très importantes sans avoir le temps de le faire comme il faut et de convoquer des témoins pour voir s'il n'y a pas d'opinions contraires.

J'appuie mon collègue sur cette question de privilège.

[Français]

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, je veux également intervenir à la Chambre pour appuyer mon collègue du Parti progressiste-conservateur.

Ce matin, j'ai reçu, de la part de mon collègue, le leader parlementaire du Parti progressiste-conservateur, trois opinions juridiques qui totalisent 75 pages, en anglais seulement. Malheureusement, ce matin, j'étais en train de préparer les huit motions que je présenterai à la Chambre et je n'ai pas eu le temps de lire ces 75 pages.

Je dois toutefois ajouter qu'une opinion juridique ne se lit pas comme un roman de Stephen King ou de John Chisholm, et je crois que tous les députés qui prendront part au débat, et même tous les députés de cette Chambre, devraient avoir l'occasion de lire, de digérer et de comprendre ces trois opinions juridiques qui, je crois, auront un rôle très important à jouer dans le débat qui se tiendra cet après-midi ou plus tard, nous l'espérons.

[Traduction]

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, je veux, moi aussi, faire quelques remarques au sujet de cette question de privilège.

Le député de Crowfoot est un pas devant moi. Je n'ai pas encore vu les décisions rendues qui font partie intégrante des amendements que certains partis veulent proposer à l'égard de ce projet de loi.

Je peux deviner ce que les juges ont dit. Ils partagent peut-être mon opinion à ce sujet, mais je n'en suis pas certain, et c'est pourquoi j'aimerais voir ces décisions. Je crois que c'est important.

Je ne savais pas que ces décisions étaient accessibles jusqu'à ce que je reçoive un appel de mon collègue, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough. Je le remercie d'avoir fait cet appel aujourd'hui. J'ai téléphoné, à mon tour, au président du comité pour voir si nous pouvions avoir des copies de ces décisions importantes.

Comme il a déjà été mentionné, on ne peut pas prendre à la légère et lire rapidement des décisions rendues par des juges sur un point de droit particulier. Nous devons prendre une décision éclairée sur cette mesure législative. D'autres députés de mon parti m'ont posé des questions à ce sujet et je suis sûr que les députés du Bloc québécois, du Parti réformiste, du Parti conservateur et peut-être même du parti ministériel voudront prendre connaissance de ces importants renseignements.

Par conséquent, j'appuie la question de privilège soulevée par mes collègues.

 

. 1215 + -

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je me demande si le député de Pictou—Antigonish—Guysborough ne va pas à l'encontre de son argument lorsqu'il cite Beauchesne.

Le passage qu'il cite dit clairement que le ministre n'est nullement tenu d'informer les députés avant le public.

Je tiens à assurer au Président et aux députés que la ministre de la Justice a rendu ces avis publics le 1er mai. C'était un vendredi. Les vendredis, la Chambre s'ajourne à 14 heures, donc relativement tôt. Certains députés pouvaient très bien ne pas se trouver à leur bureau.

Les avis ont été communiqués au public et aux députés. Ils ont été communiqués à chacun des membres du comité. Le député a soupçonné le gouvernement d'avoir utilisé le moyen le plus lent possible pour communiquer ces avis aux députés et d'avoir recouru aux services de messagerie pour les communiquer au public.

Nous avons utilisé du moyen traditionnel, à savoir le courrier interne. Certains de mes collègues qui sont rentrés aujourd'hui n'ont pas non plus pris connaissance de ces avis.

Je ne pense pas que le gouvernement soit tenu de s'assurer que les députés se trouvent dans leur bureau pour recevoir leur courrier. C'est aux députés et à leur personnel de le faire. Je dirai qu'il n'y a pas ici de question de privilège.

Nous en sommes encore à l'étape du rapport et les députés de l'opposition ont amplement le temps de suggérer des changements. Comme je l'ai dit, des copies ont été envoyés par la voie normale que nous avons l'habitude d'utiliser à la Chambre.

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, je veux signaler certains faits. J'ai reçu ces avis juridiques vendredi après-midi.

En tant que présidente du comité, la distribution des documents m'a posé quelques problèmes. Nous avons adopté une motion de forme voulant qu'on ne distribue rien qui ne soit dans les deux langues officielles. C'est l'un des problèmes.

Le deuxième problème, c'est que ces avis juridiques n'avaient pas été commandés par suite d'une mesure de notre comité. Autrement dit, notre comité n'avait pas demandé ces avis. C'est la ministre qui les avait demandés au nom du gouvernement .

Les trois avis ont été formulés par des avocats, des juges à la retraite, que le gouvernement, le Cabinet ou la ministre de la Justice ont chargé d'émettre ces avis.

Selon moi, l'argument du leader du Parti conservateur à la Chambre ne tient pas, parce que le gouvernement n'est pas tenu de faire part aux députés des avis juridiques qu'il a obtenus contre paiement, dans le cours normal de ses activités.

Toutefois, la ministre de la Justice a choisi de le faire et s'y est mise dès vendredi, jour où elle a entrepris de distribuer ces avis.

N'oublions pas que notre comité a présenté son rapport sur ce projet de loi il y a déjà une semaine ou deux. Le vote en faveur de ce projet de loi a été très majoritaire au comité. Je ne crois pas qu'on ait changé d'idée. Le comité ne souhaite pas se rétracter ni rien.

Nous pouvons toujours réétudier la mesure en vertu du paragraphe 108(2) du Règlement, qui nous permet d'étudier tout ce qui relève de la compétence des ministères qui nous sont confiés.

L'argument du porte-parole du Parti réformiste en matière de justice n'est pas valable parce que, si le comité décide d'entreprendre une telle étude supplémentaire, il peut le faire en vertu du paragraphe 108(2) du Règlement.

Nous en sommes maintenant à l'étape du rapport, mais il ne faut pas oublier que le Sénat, que ça plaise ou non à certains d'entre nous, étudiera aussi cette mesure. On peut présumer que les sénateurs pourront consulter ces avis, puisqu'ils ont été rendus publics.

Le processus parlementaire se poursuit et se déroulera comme il se doit. Selon moi, le gouvernement n'est absolument pas tenu de fournir ce type d'opinions à tous les députés, ni même aux députés ministériels. Cependant, c'est ce qu'il a fait.

 

. 1220 + -

Je soutiens donc que ce n'est pas une question de privilège. Même si elle peut paraître de prime abord fondée, je crois que cette apparence a été écartée.

M. Peter MacKay: Monsieur le Président, il est utile de signaler que les documents nous sont parvenus à nos bureaux par le courrier régulier. Ils ne nous ont pas été livrés par messager. Je tenais à apporter cette précision à la lumière de ce que vient de déclarer le secrétaire parlementaire.

La députée de Windsor—St. Clair fait valoir également un point important, soit le fait que les documents n'ont été diffusés que dans une des deux langues officielles. Le député du Bloc avait également fait cette observation.

S'il n'y a pas matière à question de privilège, je propose qu'on nous donne tout au moins l'occasion d'examiner l'ensemble de la documentation. Si la question était assez importante pour qu'on demande une décision et qu'on remette la documentation à un groupe important comme l'Association canadienne des policiers, cela prouve sûrement que les députés qui sont appelés à aborder cette question aujourd'hui à la Chambre des communes devraient avoir la chance d'assimiler tous ces renseignements.

Le Président: Collègues députés, j'ai recueilli les arguments de députés des deux côtés de la Chambre. Il me semble, du moins à ce stade-ci, que le député de Pictou—Antigonish—Guysborough, après avoir défendu son point de vue, a cité certains de mes prédécesseurs qui ont établi que le gouvernement n'est pas obligé de partager tous les renseignements dont il dispose.

Par ailleurs, le secrétaire parlementaire soutient que la documentation a été expédiée de la façon habituelle, afin que les députés puissent en prendre connaissance en même temps que les autres, c'est-à-dire en même temps que le grand public.

La Chambre est saisie aujourd'hui même du projet de loi. Je tiens à analyser la situation. Il y a quelques petites choses que je veux éclaircir. Je tenterai de revenir sur cette question avant la fin de la journée. Pour l'instant, je déclare que le débat peut s'amorcer et, s'il doit être interrompu un peu plus tard, je me réserve le droit de le faire.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Je suis prêt à annoncer les groupements en ce qui a trait au projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génériques et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence.

[Français]

Il y a 14 motions d'amendement inscrites au Feuilleton des Avis en ce qui concerne l'étape du rapport du projet de loi C-3.

[Traduction]

Les motions seront regroupées de la manière suivante aux fins du débat.

[Français]

Groupe no 1: Les motions nos 1 à 3 et 5.

Groupe no 2: Les motions nos 4, 6 et 13.

[Traduction]

Groupe no 3, motion no 7.

[Français]

Groupe no 4: La motion no 8.

Groupe no 5: Les motions nos 9 et 14.

[Traduction]

Groupe no 6, motions nos 10 et 11. Groupe no 7, motion no 12.

[Français]

La façon de mettre aux voix les motions de chaque groupe est disponible auprès du greffier. La Présidence redonnera les détails à la Chambre au moment de chaque mise aux voix.

 

. 1225 + -

[Traduction]

Je propose donc maintenant les motions nos 1, 2, 3 et 5 à la Chambre.

M. Peter MacKay: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je m'excuse d'interrompre, mais j'aimerais attirer l'attention de la Chambre sur le fait que le regroupement proposé ne me semble pas approprié puisque les motions nos 1 et 2 n'ont absolument rien en commun avec les motions nos 3 et 5 et qu'elles n'ont pas non plus d'incidence sur elles. Je ne prétends pas qu'elles doivent faire l'objet d'un vote différent. Si je comprends bien, toutes ces motions feront l'objet d'un vote distinct, mais les motions nos 1 et 2 ne devraient pas être regroupées avec les motions nos 3 et 5.

Le Président: J'ai déjà discuté de ce cas avec les greffiers. Les motions nos 1, 2, 3 et 5 sont regroupées aux fins du débat parce qu'elles se rapportent à la protection de la vie privée et des renseignements personnels. C'est pour cette raison que nous avons voulu les mettre ensemble. Mais nous les séparerons aux fins du vote.

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, des discussions ont eu lieu entre les partis et je pense que vous constaterez qu'il y a unanimité pour adopter la motion suivante:  

    Que, durant le présent débat, toutes les motions à l'étape du rapport de C-3 soient réputées proposées et secondées et que les votes par appel nominal soient réputés demandés.

(La motion est adoptée.)

 

. 1230 + -

Le Président: La Chambre passe maintenant à l'étude des motions du premier groupe.

[Français]

MOTIONS D'AMENDEMENT

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ) propose:  

    Motion no 1

    Que le projet de loi C-3, à l'article 4, soit modifié par substitution aux lignes 16 à 26, page 2, de ce qui suit:

      «b) les profils d'identification génétique sont des renseignements uniques, privés et personnels qui peuvent seulement être utilisés pour des fins d'identification;

      c) l'utilisation abusive et la divulgation de profils d'identification génétique peuvent entraîner des torts importants pour les individus, notamment de la stigmatisation et de la discrimination dans des domaines comme l'emploi, l'éducation, les soins de santé, la reproduction et l'assurance;

      d) l'analyse génétique fournit des renseignements non seulement au sujet de l'individu, mais aussi au sujet de ses parents et de ses enfants et met donc en cause la vie privée de la famille;

      e) les profils d'identification génétique ont un lien avec la décision d'avoir des enfants laquelle constitue la décision la plus intime et la plus privée qu'une personne puisse prendre;

      f) il est nécessaire d'assurer la sécurité d'accès à la cueillette, à l'entreposage et à l'utilisation des substances corporelles, des profils d'identification génétique et des autres renseignements contenus dans la banque nationale de données génétiques afin de protéger la vie privée des personnes relativement aux renseignements personnels les concernant.»

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD) propose:  

    Motion no 2

    Que le projet de loi C-3, à l'article 4, soit modifié

      a) par substitution à la ligne 26, page 2, de ce qui suit:

      «même que leur accessibilité;

      c) à cause des renseignements personnels qu'il est possible de rassembler par l'utilisation des profils d'identification génétique, il appartient au gouvernement de remplir, par l'entremise d'organismes publics, les tâches mentionnées dans la présente loi.»

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ) propose:  

    Motion no 3

    Que le projet de loi C-3, à l'article 5, soit modifié par substitution aux lignes 33 à 36, page 2, de ce qui suit:

    «(2) Le commissaire veille à ce que l'Administration de la banque nationale de données génétiques garde trace de la consultation par toute personne de la banque nationale de données génétiques constituée en vertu du paragraphe (1) et de tout profil génétique qu'elle contient.»

    Motion no 5

    Que le projet de loi C-3, à l'article 9, soit modifié par adjonction, après la ligne 33, page 6, de ce qui suit:

    «9.1 (1) Tous les trois ans après l'entrée en vigueur de l'article 5, le Commissaire à la vie privée procède à une enquête complète au sujet de la banque nationale de données génétiques constituée en vertu de cet article afin d'assurer le respect de toutes les dispositions de la présente loi relatives à cette banque de données.

    (2) L'article 37 de la Loi sur la protection des renseignements personnels s'applique, avec les adaptations de circonstance nécessaires, aux enquêtes menées en vertu du paragraphe (1).»

—Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui à la Chambre pour parler de cet important projet de loi qui a demandé beaucoup d'attention, beaucoup de travail. Ce projet de loi porte sur des enjeux fondamentaux dans une société qui se veut libre et démocratique.

La motion no 1 est très simple. Elle vise à mettre des barèmes, une charte de principes, dans le préambule du projet de loi. N'oublions pas ce que fait l'ADN. Par l'ADN, on peut identifier non seulement une personne, mais aussi sa famille. On peut identifier les parents, connaître des renseignements sur les parents, sur les enfants, sur les frères et soeurs. C'est quelque chose d'intimement personnel. Il n'y a rien de plus personnel que l'ADN chez un humain.

Le but de la motion no 1 est très simple. Elle sert à donner des principes, des barèmes par lesquels le fonctionnement ou l'application du projet de loi devront paraître. On y dit entre autres que les profils d'identification génétique peuvent être utilisés seulement pour des fins d'identification, non pas à d'autres fins. Il y a plusieurs choses qui peuvent être faites avec l'ADN. Plus la technologie se développera, plus ce sera le cas.

On veut éviter l'utilisation abusive et la divulgation de profils d'identification génétique, toujours dans le même esprit, soit d'éviter d'utiliser à tort une technologie qui est très, très puissante.

Avant d'adopter le projet de loi, donnons-nous des principes que l'on respectera maintenant et à l'avenir, parce que ce projet de loi a des conséquences, non seulement maintenant mais il en aura aussi plus tard. À mesure que la technologie évoluera, plus les principes seront définis, ceux qu'on peut définir aujourd'hui, mieux ce sera. Cela est important. C'était donc la motion no 1.

La motion no 3 est tout aussi importante. On a étudié ce projet de loi en comité pendant des heures. Il vise à créer un équilibre entre la protection de la société, la lutte contre la criminalité et la protection de la vie privée. Rappelons-le, ce sont deux principes, deux éléments fondamentaux de notre société, et c'est une question d'équilibre.

La motion no 3 se rapporte à l'article 5 et elle se lit ainsi:

      «(2) Le commissaire veille à ce que l'Administration de la banque nationale de données génétiques garde trace de la consultation par toute personne de la banque nationale de données génétiques constituée en vertu du paragraphe (1) et de tout profil génétique qu'elle contient.»

Cela vise à faire en sorte que quelqu'un n'aille pas voir la banque pour des raisons X ou Y, et c'est pour garder trace de la consultation. En en gardant trace et en sachant qui est allé consulter la banque, pour quel individu et comment, on peut éviter les abus. Une personne, sachant qu'elle laisse des traces, hésitera à aller consulter la banque de données de façon inutile.

 

. 1235 + -

Je vais maintenant citer la motion no 5, parce qu'elle est tout aussi importante:

      «9.1 (1) Tous les trois ans après l'entrée en vigueur de l'article 5, le Commissaire à la vie privée procède à une enquête complète au sujet de la banque nationale de données génétiques constituée en vertu de cet article [...]

On a un organisme gouvernemental ici, au Canada, qui s'appelle le commissariat à la vie privée qui a pour mandat de s'assurer que la vie privée des gens soit bien respectée. Or, pourquoi ne pas donner à cet organisme gouvernemental la possibilité de vérifier si la banque nationale de données génétiques remplit son mandat, respecte la vie privée, et qu'il n'y a pas de mauvaise utilisation de cette banque?

En faisant en sorte de garder trace de toute consultation, cela donnera la possibilité au commissaire à la vie privée de regarder le dossier, de voir s'il y a eu trop de consultations, des consultations abusives, pour quelles raisons, et caetera. Il pourra, en l'occurrence, sanctionner les gens qui ne respecteront pas la vie privée qui, rappelons-le, est une valeur essentielle dans toute société qui se veut libre et démocratique.

Je termine là-dessus ma présentation des motions nos 1, 3 et 5 du groupe 1.

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, les motions du groupe 1 qui sont présentées par mon honorable collègue de Charlesbourg sont en général jugées inutiles, en ce sens qu'elles n'ajoutent pas au contexte détaillé du projet de loi à l'étude.

[Traduction]

En général, les motions présentées par les députés sont jugées inutiles parce que le projet de loi tient compte déjà de bon nombre de leurs préoccupations.

Ainsi, il est déjà précisé dans les articles sur l'objet et les principes que la banque nationale de données est destinée à aider les organismes chargés du contrôle d'application de la loi à identifier des personnes et que l'accès à l'information contenue dans la banque ainsi que son utilisation et sa communication doivent faire l'objet de protections. Les dispositions sont là pour protéger les renseignements personnels.

Je voudrais également faire remarquer au député que le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada sera responsable d'établir et d'administrer la banque de données. Cela garantira que l'information sur l'ADN ne tombera pas entre les mauvaises mains.

En outre, lorsque la banque aura été créée, le commissaire à la protection de la vie privée pourra en faire une vérification de temps à autre et non pas tous les trois ans, comme le propose le député.

[Français]

Je voudrais maintenant faire des remarques sur la motion no 1. Je crois qu'on a déjà souligné que la banque nationale des données génétiques a pour but d'aider les organismes, dans l'application de la loi, à identifier, comme le député l'a déjà soulevé, seulement les personnes et que des mesures de protection s'imposent concernant l'utilisation et la diffusion des données génétiques, ainsi que l'accès à la banque de données afin de protéger le caractère confidentiel des renseignements.

Les dispositions actuelles permettent de résoudre les problèmes soulevés par cette motion. J'invite donc mes collègues à rejeter cette motion.

En ce qui concerne la motion no 3, je m'y oppose également. Nonobstant que nous, du gouvernement, souscrivons au principe selon lequel il faut garder trace de la consultation, comme le demande le député, par toute personne, je crois que l'identification qui y est contenue, c'est le principe de la législation. On ne peut qu'avoir accès à l'identification même de la personne.

Étant donné qu'on assure déjà une certaine sécurité, je peux assurer le député que, selon nous, la demande faite par la motion no 3 porte surtout sur une question administrative et que le gouvernement en traitera, comme il le doit, dans les règlements qui se rapporteront à la loi. On juge inutile de changer le projet de loi, et c'est pourquoi on rejette également cette motion.

La dernière motion de ce groupe est la motion no 5. Cette motion suggère d'établir un délai fixe pour l'examen par le commissaire à la protection de la vie privée, mais n'ajoute rien aux pouvoirs d'examen que détient le commissaire. L'article 37 de la Loi sur la protection des renseignements personnels autorise déjà le commissaire à la protection de la vie privée à mener des enquêtes relativement à des renseignements personnels qui relèvent des institutions gouvernementales afin d'assurer la conformité aux dispositions de la loi en question.

 

. 1240 + -

Une fois que la banque nationale des données génétiques sera mise en place, elle fera déjà l'objet d'une vérification par le commissaire à la protection de la vie privée qui pourra, comme je l'ai dit, faire en tout temps une vérification, plutôt qu'en trois ans, comme le demande le député.

Pour ces raisons, à mon avis, le groupe de motions no 1, c'est-à-dire les motions nos 1, 2, 3 et 5, n'apporte vraiment pas de précisions au projet de loi. Les problèmes qui sont soulevés par ces motions sont déjà abordés dans le projet de loi actuel. Alors, j'invite les députés à rejeter ces motions.

[Traduction]

M. Peter Mancini: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Mon amendement, la motion no 2, se trouve dans le groupe no 1. Il n'était pas clair à mes yeux si ma motion faisait partie ou non de ce groupe. Si elle en fait toujours partie, il me semble que, comme mon collègue de Charlesbourg, je devrais pouvoir la présenter avant la reprise du débat.

Je demande des éclaircissements.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): La motion no 2 fait bien partie de ce groupe. À cette étape, les députés peuvent parler de toutes les motions, soit individuellement, soit en groupe. Est-ce clair?

M. Peter Mancini: Madame la Présidente, il me semble, et je vous demande votre avis, que si ma motion fait partie de groupe, je devrais pouvoir la commenter avant que les autres députés n'y réagissent.

M'invitez-vous à parler à la Chambre de ma motion?

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Dans ces circonstances et puisque le député a raison, je demanderais au député de Crowfoot de bien vouloir le laisser parler en premier.

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Madame la Présidente, les motions de ce groupe ont pour objet de renforcer les mesures de sécurité pour prévenir les abus et le mauvais usage des profils d'identification génétique conservés dans la banque de données génétiques.

L'amendement que je propose constitue la motion no 2. La première partie de la motion, l'alinéa a) dans le texte anglais, semble être déjà acceptée. C'est prévu dans la loi. Je passe donc à la partie dans laquelle je propose que l'on modifie les principes de la loi en y insérant ce qui suit, qui viendrait s'ajouter à l'article 4:

      c) à cause des renseignements personnels qu'il est possible de rassembler par l'utilisation des profils d'identification génétique, il appartient au gouvernement de remplir, par l'entremise d'organismes publics, les tâches mentionnées dans la présente loi.

Je propose cette modification à cause du raz de marée de privatisations dont nous sommes témoins depuis huit ou neuf ans de la part du gouvernement actuel et du gouvernement précédent. Des sociétés d'État et des organismes gouvernementaux, dont on pensait qu'ils devaient continuer à faire partie du gouvernement en raison des importants services publics qu'ils assuraient, ont été confiés au secteur privé en application d'une politique financière conservatrice.

 

. 1245 + -

Ce qui m'inquiète, c'est qu'on crée un organisme relevant de la GRC qui pourra prélever ces échantillons aux fins d'empreintes génétiques et les consigner. Personne ici n'a une boule de cristal. Personne ici ne peut être sûr que le présent gouvernement ou un autre ne trouvera pas un jour que cette banque de données génétiques coûte trop cher, non pas en ce qui concerne le prélèvement des échantillons, mais leur conservation. Nous ne savons pas quand une autre vague budgétaire conservatrice balaiera la Chambre...

M. Peter MacKay: Bientôt.

M. Peter Mancini: Nous allons faire tout notre possible pour nous prémunir contre l'avènement d'un tel gouvernement conservateur.

J'ai proposé cet amendement parce qu'il prévoit clairement que seul le gouvernement fédéral, par l'intermédiaire d'un organisme public, devrait stocker les renseignements très personnels dont parle le député de Charlesbourg. J'ai proposé la motion afin d'être sûr que seul le gouvernement, et non des organismes privés, qui pourraient profiter de la vente d'une telle information à un moment donné, puisse garder cette information en toute sécurité et confidentialité pour les Canadiens.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Madame la Présidente, je vais dire quelques mots à propos des quatre amendements du groupe no 1. Nous reconnaissons l'extrême importance du projet de loi. Il prévoit des outils prodigieux qui ont le potentiel d'aider la police à résoudre des crimes non résolus et à mieux protéger la société.

Pour ce qui est de la motion no 1, je dois dire très respectueusement que je comprends que l'on craigne pour la protection de la vie privée par suite du prélèvement d'échantillons d'ADN. Lorsque ce projet de loi a été soumis au comité, des témoins nous ont appris que la banque de données ne contiendra que le profil des échantillons d'ADN. La banque ne gardera que le profil d'identification génétique et celui-ci ne peut servir qu'à comparer un échantillon avec un autre profil. La question de la protection de la vie privée a donc été en grande partie réglée.

En outre, la peine prévue en cas de mauvaise utilisation de l'information concernant l'ADN est très importante. Il s'agit d'une peine maximale de deux années d'emprisonnement. Dans des amendements dont nous discuterons plus tard aujourd'hui, il est recommandé de porter cette peine à cinq années d'emprisonnement. Je suis persuadé que les préoccupations quant à la protection de la vie privée sont convenablement apaisées par la nature de la banque de données elle-même et par la peine prévue dans le projet de loi. Dépendant du vote des députés, la peine peut passer de deux à cinq années d'emprisonnement. Cela inquiète très peu mes collègues et moi-même. Qui plus est, le commissaire à la protection de la vie privée a le pouvoir d'examiner en tout temps la banque de données et son utilisation. Les garanties sont donc très strictes et très sûres en ce qui concerne la protection de la vie privée.

Nous pouvons appuyer la motion no 2 proposée par le NPD. L'amendement empêche des organismes et des laboratoires privés de prélever des échantillons. Il établit des normes publiques et prévoit des tests plus exacts. Cela apaisera dans une certaine mesure les préoccupations à l'égard de la protection de la vie privée.

 

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Il s'agit là d'un domaine où nous estimons qu'il conviendrait de mettre sur pied un organisme gouvernemental qui appliquerait des normes établies par les représentants élus de la population, de sorte que l'analyse des échantillons réponde à des normes approuvées par les deux Chambres du Parlement. Nous sommes d'avis que cet amendement est logique et tombe sous le sens, et nous pouvons y souscrire.

Je passe à la troisième motion de ce groupe. Cette motion nous préoccupe quelque peu, car elle supprimerait le paragraphe 5(2) du projet de loi. Nous pourrions l'appuyer si elle ne supprimait pas le paragraphe, qui se lit ainsi:

    Les fonctions que la présente loi confère au commissaire peuvent être exercées en son nom par toute personne qu'il habilite à cet effet.

Nous estimons que ce paragraphe ne devrait être pas retiré du projet de loi. Il devrait y demeurer. Par conséquent, nous aurons du mal à souscrire à cette motion.

En ce qui concerne la motion no 5, nous ne voyons aucune raison pour laquelle la loi devrait exiger un examen tous les trois ans. Je comprends la préoccupation du député à l'égard de la protection de la vie privée, mais j'estime que mes observations et mes arguments précédents répondent à cette question.

La banque de données ne contiendra que le profil. Quiconque obtiendra illégalement un profil de la banque de données ne saura quoi en faire, à moins de pouvoir le comparer à autre chose. Je crois savoir que les profils ne seront même pas associés à un nom. Je suis convaincu qu'on répondra aux exigences et aux préoccupations concernant la protection de la vie privée dans ce domaine.

J'estime également que le commissaire à la protection de la vie privée a le droit en tout temps de faire enquête au sujet de la banque de données. Il ne devrait pas devoir attendre trois ans pour le faire. Toute personne dont les motifs sont fondés peut demander au commissaire de procéder à cette enquête. En ce qui concerne la motion no 5, nous estimons que le projet de loi offre les garanties concernant la protection de la vie privée.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Madame la Présidente, comme l'ont dit les orateurs précédents, je suis très heureux moi aussi d'intervenir dans le débat.

Les orateurs qui m'ont précédé ont dit également qu'il s'agit là d'une mesure législative très importante, qui va certainement aider les policiers et les Canadiens en général dans leur lutte incessante contre la criminalité.

Je veux aborder les motions dans l'ordre où elles figurent au Feuilleton. Dans le cas de la motion no 1, proposée par le député de Charlesbourg, même si j'approuve certainement la raison pour laquelle il l'a proposée, je trouve qu'il s'agit là encore d'une motion ou d'un amendement dont l'objet est déjà bien servi dans le libellé actuel du projet de loi. L'article 4 du projet de loi est clair. Si l'on en remanie encore les dispositions, cela risque simplement de créer des malentendus et de mener évidemment à des litiges inutiles.

Je me trouve donc dans la position intenable d'avoir à me dire d'accord avec le gouvernement à ce sujet, à savoir que le libellé actuel répond déjà aux préoccupations légitimes. Bien que l'on puisse toujours craindre une mauvaise utilisation de cette importante technologie, je crois que les principes énoncés en préambule suffisent à apaiser ces craintes. Je n'irais certainement pas jusqu'à qualifier la motion de futile ou de vaine, mais je la trouve simplement répétitive.

 

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Le projet de loi est déjà très complexe. C'est incontestable. Nous, les députés à la Chambre et tout particulièrement ceux qui interviennent dans le débat, nous avons l'obligation de tâcher de simplifier la mesure à l'étude là où c'est possible au lieu de la rendre plus complexe.

La motion no 2 a été proposée par le député de Sydney—Victoria. Pour les raisons que j'ai déjà exposées, je trouve que l'objet de la motion est plus directement servi dans le libellé actuel du projet de loi.

Nous ne désapprouvons pas le principe de la motion; nous trouvons simplement que cet amendement ne servirait qu'à rendre le projet de loi trop complexe. Il y a certainement lieu de croire que ce genre de données génétiques peut servir à d'autres fins et y servira peut-être à l'avenir.

Quant à l'utilisation des données génétiques qui résultera de ce projet de loi, des garanties existent. D'autres articles du projet de loi feront l'objet du débat sur d'autres amendements qui aura lieu aujourd'hui à la Chambre. Cela fait peut-être double emploi. Il y a déjà des garanties dans la loi. Toute utilisation impropre ou illégale de données génétiques serait traitée aux termes d'articles qui existent déjà.

Je suis d'accord avec le troisième amendement proposé par le député de Charlesbourg concernant l'utilisation de profils génétiques ou, en fait, la façon dont le commissaire veillerait à ce que ces profils ne fassent pas l'objet d'une mauvaise utilisation. C'est un bon amendement, à mon avis.

Il vise précisément à protéger la vie privée. Il garantit l'obligation de rendre compte et devrait éviter une mauvaise utilisation de ces données. C'est un bon amendement. J'espère que tous les députés l'étudieront avec sérieux.

Il permettrait une enquête plus rigoureuse auprès de la banque de données génétiques. L'amendement apporte une garantie importante. Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous devrions l'adopter. Il interdirait aussi une mauvaise utilisation de ces données.

En principe, nous devrions également appuyer le cinquième amendement qui figure dans ce groupe de motions que propose le député bloquiste. Cependant, comme l'ont mentionné le secrétaire parlementaire et le député réformiste, il existe déjà des dispositions législatives qui prévoient une enquête à l'extérieur d'une période de trois ans.

Au fond, c'est un problème qui est déjà réglé. Je suis heureux que le secrétaire parlementaire appuie cette position. Le député bloquiste n'a donc plus à s'inquiéter à ce sujet. Il propose sûrement cet amendement dans un but très important, qui est d'établir un équilibre entre la protection du public et le besoin essentiel des agents de la paix d'utiliser ces infimes éléments de preuve et les données génétiques pour mener à bien leur lutte légitime contre le crime organisé et la criminalité tout en assurant le respect de la vie privée.

Nous devons garantir que c'est ce qui se produira avec la mise en application de cette mesure. Nous avons donc une lourde responsabilité à cet égard.

En terminant, je dirai au sujet des amendements dont la Chambre est saisie que nous appuyons les deux derniers, mais que nous éprouvons une certaine réticence face aux autres amendements qui figurent dans le même groupe.

M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je prends part au débat sur le projet de loi C-3 à l'étape du rapport, où l'on discute des amendements. Le projet de loi C-3 concerne l'identification par les empreintes génétiques.

Comme certains de mes collègues l'ont déjà dit, le Parti réformiste appuie sans réserves la création d'une banque de données sur l'ADN et l'utilisation de ces données pour traquer les criminels et les traduire devant les tribunaux. Toutefois, le projet de loi est d'une portée si limitée que nous ne pouvons pas l'appuyer, dans son libellé actuel. Par conséquent, les amendements revêtent une certaine importance.

 

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Ainsi que le savent presque tous ceux qui s'intéressent à cette question et au présent débat, l'opposition officielle est fermement déterminée à rétablir la confiance dans notre système judiciaire et à faire en sorte que la population du pays se sente vraiment en sécurité. Ce qui fait défaut à l'heure actuelle, c'est que les Canadiens ne se sentent pas en sécurité. Ils ne se sentent pas en sécurité et craignent d'être attaqués, volés ou malmenés. Ils n'ont pas confiance non plus dans le système judiciaire, pénal et carcéral.

Mes électeurs de Cariboo—Chilcotin sont très alarmés quand ils voient que, dans des cas de crimes odieux et violents, les preuves sont rejetées pour une question de procédure, qui repose principalement sur la dernière pensée que peut avoir le juge.

Quand on parle d'ADN, mes électeurs considèrent cela comme un important outil pour la recherche et la poursuite de criminels.

Le projet de loi C-3, dans son libellé actuel, donnera aux Canadiens un sentiment de sécurité, mais ce sera, à mon avis, une fausse sécurité. À l'instar de mes collègues, je n'appuierai pas le projet de loi, dans son libellé actuel.

Nos électeurs doivent obtenir l'assurance que ceux qui nous protègent seront dotés de vrais outils, pas d'outils imaginaires, d'outils qui seront à leur disposition pour lutter contre les délinquants violents dans notre société. Le projet de loi C-3 n'accordera pas aux forces de police, qui doivent faire respecter la loi, la pleine utilisation de la technologie de l'ADN, qui est maintenant facilement accessible, en dépit des coûts qu'elle entraîne.

Il y a lieu de se demander, à considérer ce que coûte le recours à des moyens déficients ou moins efficaces pour appréhender les criminels et les traduire devant les tribunaux, si on ne cherche pas à faire de fausses économies, lorsqu'on se préoccupe des coûts de la technologie des empreintes génétiques.

Il y a un autre point à prendre en considération, c'est-à-dire l'utilisation de cette technologie non seulement pour intenter les poursuites, mais aussi pour défendre les prévenus et faire libérer des innocents. Nous avons vu des exemples récents au Canada. Il y a eu des cas extrêmement déplorables de gens qui se sont trouvés au mauvais endroit au mauvais moment, et qui ont été appréhendés, mis en accusation, jugés et condamnés. Mais, une fois tous les faits connus, on a constaté qu'ils étaient parfaitement innocents. Ces personnes et leurs familles se sentent trahis non pendant des semaines ou des mois, mais pendant des années et des années par un système de justice qui cherche un coupable au lieu de chercher le vrai coupable.

Nous voulons non seulement élucider les crimes violents, mais aussi faire en sorte que la justice sévisse contre le vrai coupable.

Il y a des centaines de cas d'agression, de viol et d'homicide restés sans solution et dans lesquels l'auteur du crime a laissé sur les lieux des éléments qui permettent de relever les empreintes génétiques. Cette technologie offre des possibilités incomparables pour résoudre ces énigmes et traduire les criminels en justice.

Toutefois, comme le gouvernement a une frayeur irrationnelle de violer les droits à la vie privée des auteurs de ces crimes sordides, il entend limiter le recours à cette importante technologie par les forces de l'ordre.

Le projet de loi C-3 ne permet pas de prélever des substances corporelles au moment de la mise en accusation. Il ne permet pas non plus de prélèvements sur des criminels incarcérés autres que ceux désignés comme délinquants dangereux et les délinquants qui ont commis plusieurs crimes d'ordre sexuel ou plusieurs meurtres. Le projet de loi C-3 prévoit cependant une exception dangereuse et inutile autorisant les juges à refuser le mandat de prélèvement s'ils croient que le prélèvement aura des effets sur le respect de la vie privée et la sécurité de...

 

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M. Nick Discepola: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je ne veux pas interrompre le député, mais les amendements ont été classés par groupes. Le député semble avoir des préoccupations relativement à certains amendements. Je lui demanderais de s'en tenir au groupe dont nous discutons actuellement, à savoir les motions nos 1, 2, 3 et 5. Sauf erreur, le député traite actuellement de la motion no 10. Le débat pourrait progresser beaucoup plus rapidement si les observations du député portaient sur les motions du groupe à l'étude.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je pense que le secrétaire parlementaire a raison. Nous discutons actuellement des motions nos 1, 2, 3 et 5.

M. Philip Mayfield: Madame la Présidente, je vous remercie de cette précision. Néanmoins, j'ai l'intention de prendre la latitude nécessaire pour discuter de ces questions.

Le projet de loi C-3 prévoit une exemption dangereuse et inutile selon laquelle un juge ne doit pas délivrer un mandat pour le prélèvement d'un échantillon s'il estime que l'effet sur la vie privée de l'intéressé et sur sa sécurité serait nettement démesuré par rapport à l'intérêt public en ce qui touche la protection de la société.

Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-3 gêne l'application efficace de la loi et l'amélioration de la sécurité au sein de la société. Les responsables de notre système judiciaire continuent à ne pas hésiter à mettre en péril la vie et la sécurité de personnes innocentes.

Que ce soit en accordant une libération conditionnelle à des délinquants violents qui récidivent et commettent d'autres viols ou meurtres, en libérant des délinquants violents en vertu d'une libération sous condition, ou en empêchant les policiers d'agir au moyen du projet de loi C-3, le gouvernement libéral semble accorder une importance secondaire à la sécurité de la société.

Je sais que le gouvernement est préoccupé par le respect de la vie privée et je le suis aussi, jusqu'à un certain point. Le respect de la vie privée est une question que j'ai étudiée et qui me préoccupe beaucoup. Toutefois, à un moment donné, il faut donner la priorité à la protection de la société.

Il peut en être ainsi si l'on se sert de cet outil de façon efficace. Nous agissons de la bonne manière en incarcérant les délinquants dangereux. Il faut établir un équilibre entre le respect des droits des personnes innocentes et la protection de la société contre les récidivistes violents.

Il faut s'assurer que l'on ne bafouille pas les droits des personnes innocentes. Celles-ci ont aussi des droits dont il faut absolument tenir compte.

Il existe une distinction étroite entre l'atteinte aux droits individuels et à ceux d'un individu qui a commis un crime, en particulier un crime grave avec violence. Lorsqu'un individu commet un crime, il viole les lois de la société. Par conséquent, celui-ci ne devrait pas bénéficier des mêmes droits et privilèges que les autres membres de la société. Du fait qu'il a commis un crime, l'individu perd en quelque sorte son droit à ses privilèges en tant que membre de la société.

Le gouvernement semble avoir oublié que les criminels ne devraient pas continuer d'avoir les mêmes droits et privilèges que ceux qui respectent les lois, parce que cela a parfois comme conséquence de menacer la sécurité du reste de la société.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Madame la Présidente, qu'en est-il de la vie privée? Cela me rappelle l'histoire de David Milgaard, dont nous avons entendu parler il y a quelques années et qui a été incarcéré plus de vingt ans.

La famille de David vivait dans la région de Snowflake, où j'ai eu une exploitation agricole pendant un certain nombre d'années. Les gens de la collectivité ont toujours été convaincus de l'innocence de David Milgaard. Ils connaissaient sa famille et ils savaient comment il avait été élevé. Parce qu'il s'est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment, des soupçons ont pesé sur lui, et il a été condamné pour un crime qu'il n'avait pas commis.

 

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Si nous avions eu une banque de données sur les empreintes génétiques et que les corps policiers avaient eu à leur disposition certaines informations pour contrevérifier les preuves, David Milgaard aurait probablement été exonéré du crime en question et il aurait vécu en liberté les 22 ou 23 ans qu'il a passés en milieu carcéral.

À mon avis, la société a le droit à cette protection, et le gouvernement doit veiller à la protéger contre toute poursuite injuste.

Lorsque quelqu'un est impliqué dans un crime ou qu'il enfreint le Code civil ou les lois pénales, on devrait prélever ses empreintes génétiques afin qu'il puisse être inculpé ou exonéré dans d'autres circonstances ultérieures. La banque de données ne vise pas seulement à prouver que quelqu'un a commis un crime ou qu'il a participé à sa perpétration. Elle permet aussi d'éviter que quelqu'un soit condamné à tort.

Selon certaines observations faites lors de discussions précédentes, le gouvernement trouve que ce serait trop coûteux. La création de pareille banque coûterait trop cher à gérer. Le gouvernement a toutefois adopté le projet de loi C-68, celui sur le contrôle des armes à feu, afin d'enregistrer les armes de citoyens respectueux des lois, simplement pour pouvoir retracer les criminels qui pourraient éventuellement mettre la main sur ces armes. Or, d'après certaines hypothèses ou évaluations, l'enregistrement des armes à feu des citoyens respectueux des lois coûterait environ un demi-milliard de dollars.

Lorsqu'il s'agit de constituer une banque de données qui serait beaucoup plus utile pour épingler les criminels ou pour empêcher que des gens innocents soient poursuivis, l'argent semble poser un problème. Ce n'en était pas un lorsqu'il était question d'enregistrer les armes à feu. C'est insensé.

Dans le dossier de l'hépatite C, le gouvernement semble hésiter à parler de considérations monétaires. Il ne veut pas reconnaître qu'il s'est peut-être trompé. Il ne veut pas admettre que quelque chose aurait pu être fait pour prévenir ce problème du sang empoisonné. C'est la même chose avec la banque de données. Le gouvernement hésite beaucoup à donner des ressources à la banque et le pouvoir de prélever des échantillons d'ADN sur les personnes soupçonnées d'avoir commis un crime.

Si j'étais accusé à tort, j'exigerais que l'on prélève un échantillon d'ADN, pour ne pas être condamné pour un crime que je n'ai pas commis. Je ne vois pas en quoi c'est une question de protection de la vie privée et pourquoi je ne voudrais pas qu'un échantillon existe dans une banque contrôlée par le gouvernement.

Certains des amendements proposés par d'autres partis visent à implanter des protections, pour que les données obtenues ne soient pas utilisées à mauvais escient. Il vaut mieux prévenir que guérir. Si nous avions eu une banque de données, accessibles aux enquêteurs de la GRC, lorsque les affaires David Milgaard et Guy-Paul Morin se sont produites, les familles auraient beaucoup moins souffert.

Est-ce que le fait de donner un échantillon à une banque d'ADN, protégée par le gouvernement et dont les données ne peuvent être rendus publiques, risque de créer du stress aux individus contraints de produire un échantillon? Ce n'est pas un problème. C'est la même chose que le service des impôts. Lorsque ce service veut regarder mes livres, je dois les lui fournir. Si je ne les lui donne pas de mon plein gré, il peut m'y forcer. N'est-il pas plus simple de fournir les renseignements plutôt que d'y être contraint?

 

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Notre appui à ces amendements semble logique. Le projet de loi est un pas dans la bonne direction. Nous devrions appuyer certains de ces amendements pour garantir la sécurité. Nous devrions aussi adopter des amendements qui feront que l'on disposera de tous les outils dont la GRC et les enquêteurs ont besoin pour prouver au-delà de tout doute raisonnable qu'une personne est coupable. Pour moi, il est logique de donner cette protection aux citoyens ordinaires, qu'ils soient respectueux de la loi ou qu'ils vivent aux limites du légal.

Une voix: Est-ce que Jack n'était pas contre cela?

M. Jake E. Hoeppner: Jack a ses propres idées et est en droit de les défendre. Ce dont je veux parler moi, c'est de ce que disent ces amendements.

Une voix: Mais il s'oppose à ces amendements.

M. Jake E. Hoeppner: Pas à tous. Il ne s'oppose pas à tous les amendements, seulement à ceux qui n'ont pas de sens.

C'est le problème de ces gouvernements libéraux. Ils ignorent absolument ce qu'est le bon sens. Et quand ils le voient, ils le déforment jusqu'à ce qu'ils pensent obtenir quelque chose que le public pouvait accepter. C'est du lavage de cerveau pour faire croire aux gens que c'est bon pour eux. Ce n'est pas ainsi que ça fonctionne dans la vie réelle. Dans la vie réelle, le bon sens nous dit que nous devons agir de façon à protéger le citoyen ordinaire respectueux de la loi qui veut donner tout ce qu'il a de meilleur à ce pays.

Il y a des gens dans ma circonscription qui voudraient éviter des choses désagréables à des membres de leur famille et qui accepteraient volontiers qu'on leur prenne leurs empreintes génétiques. Il y en a plusieurs dans ce cas. Ces gens seraient prêts à ce que l'on prenne leurs empreintes génétiques afin de se protéger.

Une voix: Le projet de loi le permet.

M. Jake E. Hoeppner: Pas du tout. La personne doit avoir été condamnée pour que ce soit autorisé. C'est la façon dont j'interprète ce que dit ce projet de loi. Pour que l'on puisse lui demander de se prêter à un prélèvement, la personne doit avoir commis un crime.

La question est de savoir si cela a du bon sens ou non. Pour moi, cela n'a du sens que si cela peut nous aider à prévenir un crime. Je ne vois pas pourquoi, si la GRC soupçonne une personne ou si la police estime qu'elle devrait en avoir le droit, elles ne pourraient pas procéder à un prélèvement et verser les résultats dans la banque. Mon interprétation est que ce projet de loi ne permet pas de faire ça.

Aujourd'hui les libéraux vont essayer de nous faire un lavage de cerveau, de nous apaiser et de dire que c'est un projet de loi que tous les députés devraient appuyer. Nous appuyons ce projet de loi en partie. Le porte-parole pour les questions relatives à la justice s'oppose à certaines dispositions et je suis tout à fait d'accord avec lui.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je désire exprimer l'opposition de la population de Surrey-Centre au projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence. Ce projet de loi avait été présenté initialement en tant que projet de loi C-94, en avril 1997. Il semble subsister quelques différences mineures entre la version initiale et le projet de loi présentement à l'étude.

Mes collègues de l'opposition officielle croient que les Canadiens sont préoccupés par la situation des victimes de la criminalité. Mes électeurs et de nombreuses autres personnes, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des organismes responsables de l'application de la loi, sont très déçus de ce que les libéraux ont fait du projet de loi à l'étude.

Le Parti réformiste est déterminé à rétablir la confiance des Canadiens envers le système judiciaire et à faire en sorte qu'ils se sentent vraiment en sécurité. Nous devons, pour cela, renforcer les organismes d'exécution de la loi en les dotant de la technologie et des ressources de pointe nécessaires pour repérer et appréhender rapidement les auteurs des crimes les plus violents.

 

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L'identification par les empreintes génétiques constitue l'un de ces moyens. Si elle était utilisée à fond, la banque de données génétiques pourrait représenter le progrès le plus marquant dans la lutte contre la criminalité depuis l'avènement de l'identification par les empreintes digitales. La technologie d'identification des empreintes génétiques ferait de notre société un lieu plus sûr. Elle permettrait de mieux protéger nos maisons, nos familles et nos vies contre la criminalité, en particulier les crimes de violence.

Je crois savoir que l'identification des empreintes génétiques et les possibilités qu'offre cette méthode faciliteront grandement le travail des organismes responsables de l'application de la loi. Au cours des prochaines années et décennies, cette technologie transformera notre société grâce à de nouvelles méthodes de résolution et de détection des actes criminels et d'identification de leurs auteurs.

Le projet de loi C-3, s'il est adopté sans amendement, donnera aux Canadiens un faux sentiment de sécurité et c'est pourquoi le Parti réformiste ne saurait appuyer cette mesure inadéquate et incomplète. Le Parti réformiste est tout à fait favorable à la création d'une banque de données génétiques, mais conteste la portée limitée du projet de loi C-3.

Quelles sont les raisons pour lesquelles je m'oppose à ce projet de loi? Je m'oppose au projet de loi C-3 parce qu'il ne permet pas aux forces policières d'utiliser pleinement la technologie des empreintes génétiques et parce qu'il ne permet pas le prélèvement d'échantillons génétiques lorsque des accusations sont portées, alors que des empreintes génétiques sont prises au moment de l'arrestation. Je m'oppose également au projet de loi C-3 parce qu'il ne permet pas de prélever des échantillons sur des criminels incarcérés autres que des délinquants dangereux, les auteurs d'agressions sexuelles multiples et les auteurs de meurtres multiples.

Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-3 fera obstacle à une application plus efficace de la loi et nous empêchera de rendre la société plus sûre. Il constitue une mesure indûment restrictive. L'opposition officielle refuse de cautionner les libéraux dans leur tentative de tromper les Canadiens au sujet de ce que ce projet de loi fera, mais surtout de ce qu'il ne fera pas.

Ne nous y trompons pas, ce projet de loi ne va pas assez loin. C'est mal, et c'est pour cela que je voterai contre cette mesure inadéquate, au nom de la population de Surrey-Centre.

Les libéraux ont choisi de retarder la mise en oeuvre des méthodes d'identification par les empreintes génétiques pour lutter contre la criminalité. Les libéraux font en sorte que nos forces policières ne puissent pas recourir à cette technologie.

Le gouvernement a rejeté jusqu'ici les amendements que l'opposition officielle a proposés au projet de loi. Ces amendements donneraient un peu plus de mordant au projet de loi C-3, ce que les libéraux ne semblent pas souhaiter. Ils ont peur d'offrir ce puissant instrument de lutte contre le crime parce qu'ils se préoccupent davantage des criminels que de leurs victimes et davantage des droits des accusés que de ceux des victimes.

Il aurait fallu permettre à nos forces policières d'utiliser les outils qu'offre l'identification par les empreintes génétiques dès que cette technologie a vu le jour. C'est un peu comme si on obligeait les gens à s'éclairer à la bougie ou avec des lampes à pétrole plutôt que de prendre des ampoules électriques. Or comme si le cabinet d'un ministre exigeait que son personnel préfère les ordinateurs 286 aux pentiums. C'est ainsi qu'une évolution technologique est possible. Nous devrions utiliser cette technologie de pointe pour les fins prévues.

Les grands responsables de notre système de justice semblent toujours aussi résolus à mettre en danger la vie et la sécurité d'êtres innocents. Qu'il s'agit de mettre en liberté conditionnelle des délinquants violents qui s'empressent d'aller commettre d'autres viols ou d'autres meurtres, de libérer des délinquants violents avec les condamnations avec sursis ou de lier les mains de nos policiers par le truchement du projet de loi C-3, la sécurité de notre société n'est qu'une question périphérique pour le gouvernement libéral.

 

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Nous voyons les libéraux se livrer à toutes sortes de manoeuvres pour retarder le moment de doter nos forces policières des outils dont elles ont besoin. Ils ne font pas preuve de fermeté envers le crime, notamment le crime violent. Ils se refusent à faire le nécessaire pour que nos forces policières soient équipées de meilleurs outils pour résoudre les crimes et prévenir la criminalité.

Pourquoi les libéraux disent-ils non aux Canadiens qui souhaitent une réforme de la Loi sur les jeunes contrevenants? À cette question, la ministre de la Justice répond invariablement qu'elle y verra en temps opportun. Que signifie «opportun» si ce n'est jamais opportun pour elle?

Les libéraux disent qu'il se préoccupent des droits constitutionnels des criminels et de leurs droits à la protection de la vie privée et que c'est pour cette raison qu'ils tentent de faire adopter un projet de loi sur l'identification par des empreintes génétiques aussi édulcoré. Et pourtant, les libéraux refusent d'attendre le rapport d'un examen en vertu de la Constitution qui réglerait la question de l'identification par les empreintes génétiques.

Le projet de loi C-3, sous sa forme actuelle, empêche les forces de police de faire le plein usage des empreintes génétiques, ce qui expose la vie et la sécurité de nos concitoyens à un degré de risque inutile.

Le projet de loi C-3 prévoit une exemption dangereuse et inutile autorisant les juges à ne pas émettre de mandats pour le prélèvement de spécimens s'ils estiment que l'incidence d'un tel geste sur la vie privée et la sécurité de l'individu serait hors de proportion avec l'intérêt public et la mesure dans laquelle il contribuerait à la protection de la société. Il me semble que, si l'identification par les empreintes génétiques était positive, sans l'ombre d'un doute, il serait dans l'intérêt de chacun que cet individu fournisse un échantillon d'ADN.

L'analyse des tels échantillons donne des résultats concluants s'ils sont manipulés correctement et soigneusement. Un échantillon d'ADN peut confirmer la participation de l'accusé à un crime ou, au contraire, l'exclure. L'argument des libéraux justifiant le fait qu'un juge puisse refuser d'émettre un mandat pour prélever un échantillon d'ADN ne tient pas.

En raison de la crainte irrationnelle du gouvernement de violer les droits à la vie privée d'une personne accusée de crimes odieux, les libéraux limitent le recours à cette technologie très importante par les forces policières. Les libéraux devraient avoir honte.

Une fois de plus, les libéraux se cachent derrière un discours juridique insensible pour éviter de nous donner ce dont nous savons besoin. Le gouvernement libéral s'est servi de chiffres et d'arguments juridiques froids pour refuser d'indemniser toutes les victimes du sang contaminé. Et maintenant les libéraux permettent que certains crimes ne soient pas élucidés parce qu'ils craignent de violer les droits de l'accusé.

Des accusations auraient pu être portées beaucoup plus tôt contre Clifford Olson si la police avait eu accès à l'analyse des empreintes génétiques. Un plus grand nombre des meurtres qu'il a commis auraient été élucidés plus tôt et peut-être que certaines vies auraient pu être épargnées.

Les Canadiens sont dévastés quand des innocents sont victimes de violence, qu'elle soit motivée par la drogue, le vol, la cupidité ou la haine.

Le gouvernement manque à ses responsabilités envers les jeunes, les personnes âgées, les collectivités et l'ensemble de la société parce qu'il n'a pas la force morale de s'attaquer à tous les types de crimes violents et aux récidivistes.

Je pourrais continuer, mais je me contenterai d'exhorter le gouvernement, au nom de mes électeurs, à se montrer dur envers les criminels et à faire le travail nécessaire pour protéger la société. C'est pour cette raison que nous ne pouvons pas appuyer le projet de loi C-3 sous sa forme actuelle. À moins que les amendements ne soient adoptés, le projet de loi ne fait pas le nécessaire pour donner à nos forces de police ce qu'elles réclament en ce qui concerne l'utilisation de cet instrument d'identification que sont les empreintes génétiques.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, en suivant le débat et après examen de ce projet de loi sur les empreintes génétiques, trois questions viennent à l'esprit. J'aborderai ce matin ces trois questions.

La première question, c'est: pourquoi le gouvernement persiste-t-il à enregistrer les citoyens respectueux de la loi mais pas les criminels?

 

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La deuxième question que je veux aborder, c'est: pourquoi le gouvernement refuse-t-il de laisser la police utiliser un moyen qui l'aiderait à résoudre beaucoup de crimes et qui réduirait les frais judiciaires et le coût des mesures d'application de la loi?

La troisième question, c'est: pourquoi les libéraux gardent-ils des innocents en prison, des gens qui pourraient être libérés grâce à l'adoption du projet de loi C-3, cette mesure sur l'établissement d'une banque de données génétiques, qui est totalement inadéquate?

Je reviens à la première question. Pourquoi le gouvernement persiste-t-il à enregistrer les citoyens respectueux de la loi mais pas les criminels? Comment se fait-il que le gouvernement enregistre des citoyens respectueux de la loi? Il y a plusieurs années, le gouvernement a adopté un projet de loi qui a attiré l'attention du pays tout entier, le projet de loi C-68, une mesure qui force les propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi à s'enregistrer auprès du gouvernement alors qu'ils n'ont jamais commis le moindre crime.

Le gouvernement dépense des centaines de millions de dollars pour s'en prendre à des citoyens respectueux de la loi, au moyen d'un énorme appareil bureaucratique qui, selon les propres aveux du ministère compétent, fera exactement le contraire de ce que visait la loi. Cela tournera même des citoyens respectueux de la loi en criminels, parce que le règlement sur la possession d'armes à feu sera prévu dans le Code criminel du Canada. Ainsi, les gens qui ne le respectent pas pourraient se retrouver en prison pour un an, cinq ans ou même dix ans, pour n'avoir pas respecté le désir du gouvernement, qui veut les obliger à enregistrer leurs armes à feu.

Par contre, le gouvernement refuse d'enregistrer les criminels. En vertu de ce projet de loi, les personnes accusées d'un crime ne seront pas tenues de fournir un peu de salive, un cheveu ou un petit échantillon de peau à la police. Elles pourront faire valoir leur droit de ne pas laisser la police prendre leurs empreintes génétiques.

À l'heure actuelle, la police peut prendre les empreintes d'une personne qui est accusée de certains crimes. Le Parti réformiste ne préconise pas que tout le monde soit tenu de se conformer à la loi sur l'ADN, mais bien que cela devrait être permis dans le cas des délits criminels graves.

Pourquoi le gouvernement exige-t-il qu'on garde la trace de citoyens respectueux de la loi qui n'ont commis aucun délit ou qui ne constituent pas une menace pour la société—en fait, le contraire pourrait être soutenu—et non des éléments criminels? Je ne le sais pas. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement ne fait pas ce que demande la police.

Des représentants de la police ont comparu devant le gouvernement. Ils ont fait valoir qu'il s'agit là d'un outil très efficace qui pourrait réduire considérablement le coût d'exécution de la loi. Il pourrait rendre notre système de justice criminelle plus efficace. Il pourrait lui permettre d'innocenter beaucoup plus vite des personnes qui n'ont pas commis un crime. Non, cela n'intéresse pas le gouvernement.

N'est-ce pas déplorable, monsieur le Président? Je vois que vous écoutez. Vous êtes aussi préoccupé que moi par ce que le gouvernement exige des citoyens respectueux de la loi, mais pas des criminels. Pourquoi le gouvernement donne-t-il plus de droits aux criminels qu'aux citoyens respectueux de la loi? Je ne comprends pas. Cela me renverse totalement.

Pour ce qui est du programme d'enregistrement des armes à feu, le projet de loi dont la Chambre est saisie aura pour effet d'accroître la contrebande des armes à feu et d'en encourager le marché noir. Je ne suis pas le seul à le dire. Les bureaucrates du ministère de la Justice qui sont chargés de mettre en place cet énorme programme de réglementation le disent aussi. Pourquoi fait-on cela? C'est absolument ridicule.

 

. 1335 + -

D'un autre côté, les policiers affirment que si nous pouvions obtenir une empreinte génétique, ce qui est très facile, car nous avons la technologie voulue, nous pourrions élucider des crimes beaucoup plus rapidement. Nous pourrions établir la culpabilité ou l'innocence d'un individu beaucoup plus vite, ce qui aiderait beaucoup la police dans ses efforts pour contrôler la criminalité. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement défend les criminels.

Je me demande aussi pourquoi le gouvernement refuse de donner aux policiers un outil qu'ils pourraient utiliser pour élucider beaucoup de crimes, pour réduire les frais de justice et le coût d'application de la loi. Pour justifier sa position, le gouvernement prétend que, dans beaucoup de cas, on risquerait d'utiliser cette information à mauvais escient. Il affirme que si, en fait, un criminel donnait une empreinte génétique aux policiers, d'une façon ou d'une autre, plus tard, on pourrait utiliser cette information d'une façon qui empiéterait sur les droits du criminel.

La solution à ce problème est très simple. Il suffit de punir la mauvaise utilisation de cette information si on l'utilise d'une façon que le gouvernement ou la police juge inappropriée pour élucider un crime. Il s'agit de restreindre l'utilisation non éthique et illégale de cette information. On pourrait facilement le faire mais le gouvernement s'y refuse.

On peut très facilement apaiser les craintes du gouvernement au sujet d'une mauvaise utilisation de cette information. La protection voulue existe dans bien d'autres domaines. Pourquoi ne pas l'étendre alors à celui-ci? Cela n'a aucun sens.

Le gouvernement prétend également que les tribunaux risquent de ne pas approuver cette mesure législative si nous en étendons la portée à toutes les personnes accusées de certains crimes et si nous exigeons que tous ces individus fournissent des empreintes génétiques à la police. Le gouvernement a affirmé que cela pourrait empiéter sur les droits garantis aux criminels par la Constitution.

Là encore, la réponse à cela est si simple que j'ignore pourquoi le gouvernement n'agit pas en ce sens. Pourquoi ne pas renvoyer la question aux tribunaux? Il s'agit de demander à la Cour suprême du Canada de préciser les mesures qu'on devrait prendre et ce qu'on pourrait faire pour assurer la protection voulue. Nous pourrions prévoir cela dans cette mesure législative pour veiller à respecter la Charte canadienne des droits et libertés. Ces réponses sont si simples. Pourquoi ne prenons-nous pas alors les mesures voulues?

Je veux ensuite parler du fait qu'il y a de nombreuses personnes qui ont été condamnées à tort dans les 20 ou 30 dernières années. Des gens ont passé 5, 10, 15 et jusqu'à 20 ans en prison après avoir été condamnés à tort. Le gouvernement permet que cela se poursuive en ne mettant pas en place une banque de données génétiques pour empêcher que des choses de ce genre ne se produisent.

Si on conservait la loi sous sa forme actuelle, certaines personnes innocentes demeureraient en prison pendant de nombreuses années, alors qu'on pourrait les libérer en mettant en place ce système de données génétiques. Pourquoi le gouvernement ne met-il pas en place un système qui aiderait les personnes innocentes à recouvrer leur liberté?

En conclusion, j'exhorte le gouvernement à tenir compte des préoccupations des députés de l'opposition et des Canadiens qui veulent qu'on mette cela en oeuvre et, par-dessus tout, des policiers, qui ont besoin de cet outil. J'invite le gouvernement à écouter et à ne pas utiliser les moyens antidémocratiques auxquels il continue d'avoir recours pour faire adopter cette mesure législative envers et contre tous. Je l'invite à envisager d'adopter certains amendements que nous, réformistes, avons proposés, car ceux-ci renforceraient cette mesure législative et amélioreraient l'application de la loi au Canada.

M. Paul E. Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au nom de mes électeurs pour faire part de mes commentaires sur le projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence. Loi.

Précisons tout d'abord de quoi il s'agit. Ce projet de loi prévoit l'établissement d'une banque nationale de données génétiques qui sera tenue par le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada et destinée à aider les organismes chargés du contrôle d'application de la loi à résoudre des crimes.

 

. 1340 + -

La banque sera composée d'un fichier de criminalistique contenant les profils d'identification génétique établis à partir de substances corporelles trouvées sur tout lieu lié à la perpétration de certains types d'infractions graves et d'un fichier des condamnés contenant les profils établis à partir de substances corporelles prélevées sur des personnes déclarées coupables ou absoutes de ces types d'infractions.

De plus, le texte modifie le Code criminel pour prévoir des ordonnances autorisant le prélèvement de substances corporelles à partir desquelles seront établis des profils d'identification génétique destinés à la banque de données. Il le modifie également pour autoriser le prélèvement de substances corporelles sur des contrevenants qui purgent actuellement des peines et appartiennent à des catégories clairement définies de contrevenants.

Il prévoit enfin des dispositions régissant l'utilisation des substances corporelles ainsi prélevées, des profils d'identification génétique établis à partir de celles-ci et de l'information contenue dans la banque de même que la communication de cette information et l'accès qui y est donné.

Nous en sommes actuellement à l'étape du rapport de ce projet de loi et le Parti réformiste est résolument engagé à rétablir la confiance envers notre système de justice et à donner aux Canadiens un véritable sentiment de sécurité. Le débat d'aujourd'hui se divise en plusieurs parties qui correspondent aux divers amendements dont je parlerai plus tard.

Les Canadiens n'ont pas une grande confiance dans le système de justice actuel, ce qui est très peu étonnant vu que c'est un système essentiellement libéral. Les réformistes aimeraient appuyer davantage les services d'application de la loi en leur offrant les outils les plus perfectionnés qui soient pour leur permettre de retrouver et d'arrêter le plus tôt possible les auteurs des crimes les plus violents dans notre société.

Les empreintes génétiques permettraient cela, mais elles pourraient aussi disculper certains suspects, protéger les innocents et entraîner des économies permettant de mieux cibler les ressources destinées aux enquêtes.

Si on l'utilisait à sa juste valeur, la banque de données génétiques pourrait constituer le progrès le plus important dans la lutte contre la criminalité depuis la prise des empreintes digitales. Il est inacceptable d'empêcher les procureurs de la Couronne de mettre pleinement à contribution cette technique dans la lutte contre la criminalité, comme le fait le projet de loi C-3 dans sa forme actuelle, car cela met inutilement en danger la vie et la sécurité de nos concitoyens. Je pense qu'encore une fois, les libéraux ne font que la moitié du chemin dans la bonne direction et qu'ils nous prouvent la faiblesse du gouvernement.

S'il est adopté sans amendement, le projet de loi C-3, Loi sur l'identification par les empreintes génétiques, donnera une fausse impression de sécurité aux Canadiens. Il ne satisfait pas nos critères élevés.

Les réformistes appuient sans réserve la création de banques de données génétiques. Cependant, nous n'appuyons pas les mesures timides et faibles proposées dans le projet de loi C-3. Celui-ci ne permet pas à nos corps policiers de mettre pleinement à contribution la technologie déjà facilement à leur disposition en matière d'empreintes génétiques. Cette technologie permettrait d'élucider des centaines de crimes violents non résolus et pourrait sauver des vies en empêchant les prédateurs de circuler en toute liberté.

Permettez-moi de parler directement des motions dont il est question dans cette partie du débat à l'étape du rapport.

À la partie V du Feuilleton et Feuilleton des Avis du lundi 4 mai 1998, je remarque que 14 amendements sont proposés à l'étape du rapport. Je vais parler brièvement de ceux qui sont visés dans le débat actuel.

La motion no 1 est proposée par le Bloc. Je crois que le projet de loi comporte déjà des dispositions satisfaisantes à l'égard des points en question et qu'il n'est pas nécessaire de les renforcer au moyen de cet amendement.

La motion no 2 est proposée par le NPD, et je pense qu'elle est valable. Cette proposition d'amendement vise à interdire le prélèvement d'échantillons par des organismes et des laboratoires privés et elle propose la création de normes publiques plus rigoureuses pour évaluer la qualité. J'appuie cette motion.

La motion no 3 est proposée par le Bloc. Elle a aussi une certaine valeur. Elle préviendrait l'accès aux banques de données génétiques par des personnes non autorisées. Je suis en faveur de cette amélioration.

La motion no 5 est présentée par le Bloc. Je ne crois pas qu'elle soit particulièrement utile. En fait, cet amendement vise à créer des emplois, et rien ne justifie la tenue d'une enquête tous les trois ans. Cela ne facilite absolument pas l'atteinte des objectifs généraux du projet de loi.

Qui plus est, le projet de loi C-3 ne permet pas le prélèvement d'un échantillon d'empreintes génétiques lors d'une inculpation officielle. Il ne permet pas de prélever des échantillons auprès d'individus incarcérés, sauf s'il s'agit de délinquants dangereux, d'auteurs de nombreux délits sexuels ou de meurtriers en série.

 

. 1345 + -

On compte par centaines les cas de viols, d'agressions et d'homicides où des empreintes génétiques ont été laissées sur la scène du crime par le coupable. L'identification par les empreintes génétiques offre maintenant la possibilité sans précédent de résoudre nombre de cas semblables et de traduire les coupables devant les tribunaux. Cependant, comme il craint de violer les droits à la protection de la vie privée de ceux qui commettent ces crimes odieux, le gouvernement restreint le recours à cette très importante technologie par les forces de police. C'est une approche à laquelle on peut s'attendre de la part d'un gouvernement faible.

Ceux qui sont chargés de l'édification de notre système judiciaire continuent de mettre en danger la vie et la sécurité des Canadiens. Que ce soit en mettant en liberté conditionnelle des détenus violents, qui commettent un autre meurtre, en libérant des délinquants violents au moyen d'une condamnation avec sursis ou en limitant les pouvoirs de la police aux termes du projet de loi C-3, le gouvernement libéral montre que la sécurité de la société vient au second rang de ses préoccupations.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Monsieur le Président, le Parti réformiste est fermement déterminé à rétablir la confiance des Canadiens dans leur système judiciaire et à leur donner un vrai sentiment de sécurité. Cela signifie, notamment, renforcer nos forces de police en les dotant des derniers outils technologiques pour traquer rapidement et arrêter la plupart de ceux qui ont commis des crimes violents dans notre société d'aujourd'hui.

L'identification par les empreintes génétiques est ce genre d'outil. Si elle est utilisée pleinement, la banque d'empreintes génétiques pourrait être la plus importante innovation dans la lutte contre le crime depuis l'utilisation des empreintes digitales. En empêchant la police d'exploiter toutes les possibilités de cette technologie pour combattre le crime, le projet de loi C-3, dans son libellé actuel, continue de mettre en danger la vie et la sécurité de nos concitoyens, ce qui est inacceptable et déplorable.

S'il est adopté sans modification, le projet de loi C-3, Loi sur l'identification par les empreintes génétiques, donnerait aux Canadiens un faux sentiment de sécurité. Par conséquent, le Parti réformiste ne peut appuyer ce projet de loi inadéquat. Le Parti réformiste appuie sans réserve la création d'une banque de données génétiques, mais non la portée limitée du projet de loi C-3.

Le projet de loi C-3 n'autorise pas la police à exploiter pleinement la technologie à sa disposition, qui l'aiderait pourtant à résoudre des centaines de meurtres et de viols non résolus, ce qui permettrait de sauver des vies par suite de l'emprisonnement des prédateurs.

Le projet de loi C-3 n'autorise pas le prélèvement de données génétiques au moment de l'accusation. Il n'autorise pas le prélèvement de données génétiques sur des criminels incarcérés autres que des délinquants désignés dangereux, des délinquants ayant commis plusieurs agressions sexuelles ou plusieurs meurtres. Le projet de loi C-3 prévoit cependant une exception dangereuse et inutile autorisant les juges à refuser un mandat lorsqu'ils croient que ce prélèvement porterait à la vie privée et à la sécurité de la personne une atteinte nettement disproportionnée, compte tenu de ses avantages pour l'intérêt public et la protection de la société.

Il y a des centaines de cas d'agression, de viol et d'homicide restés sans solution et dans lesquels l'auteur du crime a laissé sur les lieux des éléments qui permettent de relever les empreintes génétiques. Cette technologie offre des possibilités incomparables pour résoudre ces énigmes et traduire les criminels en justice. Toutefois, comme le gouvernement a une peur irrationnelle de violer les droits à la vie privée des auteurs de crimes sordides, il entend limiter le recours à cette importante technologie par les forces de l'ordre.

Dans l'état actuel des choses, le projet de loi C-3 est une entrave à une application plus efficace de la loi et à la recherche d'une plus grande sécurité dans la société. Ceux qui ont la charge de notre système de justice sont prêts, comme toujours, à mettre en péril la vie et la sécurité de personnes innocentes. Qu'il s'agisse d'accorder une libération conditionnelle à des délinquants violents qui en profitent pour commettre d'autres viols, d'autres meurtres, de libérer des délinquants violents reconnus coupables en leur accordant un sursis ou encore d'entraver le travail des policiers comme il le fait par le projet de loi C-3, le gouvernement libéral fait passer au second plan la sécurité de la société.

Selon les journaux de ce matin, le solliciteur général aurait déclaré que le Canada a de gros problèmes à cause des terroristes et autres criminels et que les forces de police vont beaucoup travailler pour résoudre ce problème. Il devrait s'adresser à sa collègue de l'immigration qui laisse entrer ces gens-là parce que nos lois sont par trop médiocres. La Cour suprême dit que le Canada doit admettre les soi-disant réfugiés. Nous constatons après coup que ce sont des terroristes. L'esprit du projet de loi à l'étude est un peu semblable.

La mesure qu'on nous propose ne sera pas à la hauteur. Notre parti s'opposera à la motion no 1 parce que cet amendement nous semble inutile.

 

. 1350 + -

Nous appuyons la motion no 2, présentée par le NPD. Cet amendement empêche les agences et les laboratoires privés de prélever des échantillons. Il crée des normes publiques, contribuant ainsi à assurer la qualité des tests. Le gouvernement devrait examiner cet amendement.

Nous nous opposons à la motion no 3, qui est censée être une mesure de protection pour empêcher que des personnes non autorisées aient accès à la banque de données génétiques. Nous nous opposons à la motion no 4, qui dit que le fichier des condamnés doit être entièrement détruit. Il y a peut-être un problème dans la version anglaise de cet amendement. Nous nous opposons à la motion no 5 parce que nous croyons qu'il n'est pas nécessaire de faire un examen tous les trois ans.

Le leader parlementaire du Parti conservateur a soulevé la question des avis juridiques sollicités par le gouvernement au sujet de cette mesure législative. Je me demande comment le gouvernement a choisi les juges en question. Je sais que bien des juristes ne sont pas d'accord avec les trois avis obtenus par le gouvernement sur la question du prélèvement d'échantillons pour déterminer le taux d'alcoolémie.

Je vais lire un passage tiré d'un de ces rapports, celui de Martin R. Taylor, c.r., qui dit ceci:

    Le processus établi en vertu de l'article 254 du Code criminel pour le prélèvement d'échantillons, aux fins d'analyse, auprès des conducteurs soupçonnés d'avoir consommé de l'alcool ou de la drogue vise l'acquisition d'éléments de preuve de nature particulièrement périssable auprès de personnes conduisant des véhicules, une activité dangereuse, et la préservation de tels éléments de preuve.

    Cet article du Code criminel ne permet pas le prélèvement obligatoire d'échantillons, sauf dans le cas de personnes physiquement ou mentalement incapables de donner leur consentement, auquel cas un mandant doit être obtenu en vertu de l'article 256. Mais il faut reconnaître qu'un policier qui a des motifs raisonnables de croire que la capacité d'une personne de conduire un véhicule a été affaiblie par la consommation d'alcool ou d'une drogue peut contraindre la personne à consentir à fournir un échantillon d'haleine ou de sang, puisque le refus de se plier à une telle demande d'échantillon constitue en lui-même un acte criminel.

    Le processus prévu à l'article 254 permet le prélèvement d'échantillons de substances corporelles sans mandat sous un genre de contrainte qui, à toutes fins pratiques, équivaut à une obligation et, à mon avis, ce processus a plus en commun avec l'élargissement des pouvoirs proposé dans le projet de loi C-3 pour justifier le prélèvement obligatoire de substances corporelles aux fins d'analyse génétique auprès des accusés qu'avec le processus de prise des empreintes digitales autorisé par la Loi sur l'identification des criminels.

    Il y a toutefois une importante distinction à faire dans le contexte de la charte. La constitutionnalité des tests de consommation de drogues et des tests d'ivressomètre effectués aux termes de l'article 254 du Code criminel repose sur la vraie nature des problèmes associés avec la conduite avec facultés affaiblies. Il faut, de toute évidence, obtenir rapidement des échantillons de sang pour éviter que l'infraction se poursuive et pour obtenir des preuves qui seraient autrement à jamais perdues aux fins de la prévention de la criminalité. À mon avis, les tribunaux ne mettraient pas sur le même pied le prélèvement obligatoire d'échantillons d'ADN sans mandat aux termes de la Charte et le prélèvement d'échantillons d'haleine ou de sang aux termes de la loi chez les automobilistes soupçonnés de conduite avec facultés affaiblies. Je formule cet avis car les données génétiques personnelles ne changent pas au fil du temps et le prélèvement d'échantillons d'ADN ne mettrait pas fin à la perpétration d'une infraction en cours.

    Je ne crois pas que les comparaisons mentionnées seront considérées par les tribunaux comme des arguments convaincants dans le cas qui nous intéresse.

Voilà ce qu'avait à dire un ex-juge chargé de donner un avis juridique. Il soutient qu'un échantillon d'ADN ne pourrait pas être prélevé auprès d'une personne qui serait accusée, mais qu'un échantillon de sang pourrait être prélevé auprès d'une personne soupçonnée de conduite avec facultés affaiblies.

Faut-il comprendre que, si nous prélevons un échantillon de sang d'un conducteur en état d'ébriété et que nous découvrons que ses données génétiques sont identiques à celles prélevées dans le cas de six viols ou meurtres, nous ne serons pas en mesure de l'accuser, parce que nous aurions obtenu ces preuves de façon illégale?

Je ne suis pas avocat, mais il me semble que c'est ce qu'il faut retenir de tout cela. Nous devons nous protéger nous-mêmes. Nous devons veiller à ce que les criminels inculpés purgent leur peine et tenter d'éliminer tous ces échappatoires. La population en a assez des lois d'aujourd'hui, du nombre de causes rejetées par les tribunaux, parce que les droits de certaines personnes auraient été violés. Il semblerait que les criminels ont tous les droits et que les victimes n'en ont aucun. Même si le projet de loi C-3 représente un bon point de départ, il est insuffisant.

 

. 1355 + -

Il y a quelques semaines, notre caucus a entendu le chef de police d'une grande ville en Ontario. Ce monsieur a insisté en disant que le projet de loi sur les empreintes génétiques devait aller plus loin. Il était d'avis que nous devions faire en sorte que les données génétiques de criminels déjà reconnus coupables et emprisonnés soient enregistrées. Il nous a dit que, si c'était le cas, les forces policières pourraient résoudre littéralement des centaines de meurtres, de viols et de crimes graves au Canada.

Quand un crime a été commis et que le criminel purge une peine d'emprisonnement, il ne devrait pas pouvoir refuser que l'on prenne ses empreintes génétiques et qu'on les conserve, car il aurait perdu le droit de s'y opposer. Un grand nombre de Canadiens voudraient que les empreintes génétiques de tout le monde soient prises à la naissance et enregistrées.

Il va sans dire que le gouvernement devrait s'assurer que les données génétiques de tous les criminels au Canada soient enregistrées, de manière à pouvoir les retracer en cas de récidives. Évidemment, il faut penser à tous les crimes qui ont été commis partout au Canada et qui pourraient être élucidés si de bons amendements étaient apportés au projet de loi.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le débat à l'étape du rapport du projet de loi C-3, la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques.

Il est regrettable que le projet de loi ne représente qu'une demi-mesure, parce que les députés du Parti réformiste, l'opposition officielle, ne pourront l'appuyer entièrement. Le projet de loi est foncièrement bon, mais les gens d'en face devront se montrer très convaincants pour m'amener à voter en faveur de cette mesure. Le projet de loi vise un excellent objectif, qui est de prélever des empreintes génétiques. L'idée d'essayer d'identifier des criminels et d'élucider des crimes au moyen d'empreintes génétiques, qui suppose une technique scientifique moderne, est excellente. J'aurais simplement voulu que le projet de loi soit plus exhaustif et mieux pensé pour ce qui est de la façon de s'y prendre.

Le premier groupe de motions à étudier aujourd'hui comprend les motions nos 1, 2, 3 et 5.

Le Président: Je ne voudrais pas que le député s'emballe trop, car il lui restera neuf minutes quand nous reprendrons le débat.

Comme il est presque 14 heures, je dois l'interrompre. Toutefois, le député aura la parole quand nous reprendrons le débat.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

L'ÉDUCATION

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens ont une longue histoire dont ils ont raison d'être fiers. Or, la connaissance de cette histoire disparaît. L'enseignement de notre passé, passé témoin de nos traditions, de nos valeurs et des idées qui reflètent notre identité, disparaît.

Dans son nouvel ouvrage Who Killed Canadian History?, le professeur J.L. Granatstein rapporte que seulement 54 p. 100 des diplômés des écoles secondaires et des universités ont pu dire que Sir John A. Macdonald avait été le premier de nos premiers ministres. Seulement 36 p. 100 connaissaient l'année de la Confédération. Cette situation est déplorable et dénote l'état de l'histoire du Canada qui est enseigné dans nos écoles.

En tant qu'ancien enseignant d'histoire du Canada, je félicite le professeur Granatstein de dénoncer l'absence de programmes d'études cohérents.

Les Canadiens veulent que l'histoire du Canada soit davantage enseignée dans leurs écoles. Le gouvernement du Canada peut agir pour modifier cette tendance honteuse en inculquant à nos jeunes une compréhension et une appréciation de nos racines.

M. Granatstein propose que le gouvernement fédéral assume un rôle actif, par exemple, en abonnant toutes les écoles secondaires à une revue comme The Beaver and National History. Il propose aussi que nous établissions un centre dédié à l'histoire du Canada...

Le Président: Le député de Elk Island.

*  *  *

LA FRAPPE DE LA MONNAIE

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, à mon avis, de bonnes décisions découlent de renseignements exacts. C'est pourquoi nous avons tenté de soumettre au comité parlementaire le dossier de la nouvelle usine de fabrication de la monnaie que projette de construire la Monnaie royale canadienne.

Les divers protagonistes dans ce dossier ont des vues et des interprétations contradictoires au sujet des coûts, des économies, de la sécurité de l'approvisionnement, des emplois, de la demande internationale et de diverses autres questions. Pourquoi ne pas laisser le comité démêler cet écheveau?

Non, le gouvernement refuse qu'on dévoile les faits. Est-ce parce qu'il craint d'être mis dans l'embarras? Craint-il qu'on lui montre qu'il a tort? Si le gouvernement est si sûr de lui, il devrait être empressé, il me semble, de comparaître devant le comité et de jouer cartes sur table. Il aurait alors prouvé qu'il a raison et pourrait mettre son projet en branle.

Le refus du gouvernement d'autoriser le comité à examiner cette question est nettement suspect.

*  *  *

 

. 1400 + -

LA CONSTITUTION POLONAISE

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour rendre hommage aux Canadiens d'origine polonaise et, plus particulièrement, à la communauté polonaise de la circonscription de Parkdale—High Park, qui célébraient hier le 207e anniversaire de la Constitution polonaise.

Le 3 mai est jour de fête nationale pour les Polonais, une occasion de réfléchir au patrimoine et aux idéaux d'humanisme, de tolérance et de démocratie, et de les célébrer.

La Constitution du 3 mai 1791 a été la première constitution libérale adoptée en Europe et la deuxième dans le monde, après la constitution des États-Unis. Elle représentait un effort pour assurer les droits de larges segments de la population et pour mobiliser le pays contre les menaces croissantes à son indépendance. La Constitution de 1791 a été l'outil à l'origine de la suprématie parlementaire. Elle a également donné aux citoyens polonais un accès nouveau au Parlement.

Le jour de la Constitution représente un fier héritage pour les Canadiens d'origine polonaise et une confirmation des valeurs et des libertés fondamentales de notre société.

*  *  *

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DU CANCER

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, la Société canadienne du cancer est le principal organisme subventionnaire pour la recherche et les soins dans le domaine du cancer au Canada. Elle consacre aux projets de recherche près de la moitié des fonds qu'elle recueille, tandis que le reste demeure dans les collectivités locales.

Avril a été le Mois du cancer à Peterborough comme ailleurs. Les deux activités les plus connues de notre campagne sont le Festival de la jonquille et la sollicitation de porte à porte. Je suis heureux d'annoncer que la campagne des jonquilles de cette année a permis d'amasser 40 000 $. Nous en remercions la Sororité Bêta Sigma Phi.

Une autre activité à signaler est la campagne des policiers contre le cancer, dans le cadre de laquelle des policiers se font raser la tête pour recueillir des fonds. La prochaine coupe de cheveux aura lieu le 9 mai. Des tournois de golf et des courses sur route sont également prévus.

Lors de la campagne de 1997, les recettes ont dépassé 600 000 $, ce qui représentait l'un des taux par habitant les plus élevés au Canada.

À titre d'ancien président de la campagne contre le cancer et au nom de toutes les sections de la Société canadienne du cancer de Peterborough et de tout le Canada, je remercie toutes les localités et tous les bénévoles de leur soutien constant. On peut vaincre le cancer.

*  *  *

LA GARDE DE LA REINE

Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le Président, pour la première fois en 45 ans, des Canadiens assurent la garde de la Reine.

Quatre-vingt-seize soldats canadiens du Princess Patricia's Light Infantry feront la parade avec les soldats britanniques lors des cérémonies de la relève de la garde à Buckingham Palace au cours des prochaines semaines.

Le mois de mai marque le début de ce qui est informellement appelé le mois du Canada en Grande-Bretagne. Les célébrations prévues sont d'ordre militaire, littéraire, culturel et même culinaire. Elles tournent autour du 13 mai, date de la réouverture de la Maison du Canada, l'édifice du haut commissariat du Canada à Londres, en présence de la Reine Elizabeth et du premier ministre Jean Chrétien.

Je félicite le soldat Jonathan Murphy, qui a grandi dans ma circonscription...

Le Président: Je rappelle aux députés qu'ils ne doivent pas utiliser nos noms pendant les déclarations et les questions.

Le député de New Westminster—Coquitlam—Burnaby.

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LA FAMILLE

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, la loi qui dissout les familles au moment d'une séparation ou d'un divorce fait l'objet d'une refonte qui était bien nécessaire.

Durant la dernière législature, des modifications y ont été apportées pour mieux garantir le paiement des pensions alimentaires des enfants. Cependant, la portée trop étroite de ces modifications a donné lieu à une recrudescence de la guerre des sexes.

Les groupes féminins prétendent que les femmes sont des victimes sans toutefois admettre les abus qu'elles commettent, tandis que les groupes masculins prétendent être des victimes à la fois du système et des femmes, mais sans faire suffisamment pour reconnaître leurs torts et contribuer aux remèdes.

Heureusement, le gouvernement a finalement accepté qu'un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes étudie la Loi sur le divorce. La semaine dernière, nous avons entendu des témoins à Vancouver, Calgary, Regina et Winnipeg. Lundi dernier, j'avais organisé à New Westminster, ma ville, un forum public qui a été très populaire.

Il est essentiel de définir un cadre qui fait passer les responsabilités des parents avant leurs droits et qui permet de combler les besoins des enfants avant de répondre aux désirs des parents. Bref, nous devons faire passer les enfants en premier.

*  *  *

LA BATAILLE DE L'ATLANTIQUE

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Monsieur le Président, un événement important a eu lieu hier sur la colline du Parlement. À chaque année, le premier dimanche de mai, les Canadiens se rappellent la terrible bataille de l'Atlantique.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, les bateaux qui assuraient l'approvisionnement entre notre pays et le front ont joué un rôle déterminant dans le succès des opérations menées. Ils transportaient des armes, du matériel et du personnel indispensables de l'autre côté de l'océan. Ces bateaux n'effectuaient pas une simple traversée de l'Atlantique. Ils devaient affronter les redoutables sous-marins allemands et le temps imprévisible.

L'aviation et la marine de guerre escortaient les bateaux de la marine marchande qui assuraient cet approvisionnement, afin de les protéger contre l'ennemi. La marine a assumé l'essentiel de cette responsabilité.

Le Canada a subi de lourdes pertes au cours de la bataille de l'Atlantique: 50 navires de la marine marchande et 24 bâtiments de guerre ont été détruits. Il y a eu près de 4 000 pertes de vie dans les deux corps de marine et plus de 200 dans l'armée de l'air.

À nos anciens combattants et aux familles de ceux qui nous ont quittés, nous disons merci pour leur importante contribution à notre pays.

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. 1405 + -

[Français]

LE 55E ANNIVERSAIRE DE LA BATAILLE DE L'ATLANTIQUE

M. Mark Assad (Gatineau, Lib.): Monsieur le Président, la Colline parlementaire, Halifax et Esquimalt en Colombie-Britannique ont été, hier, le théâtre de cérémonies commémorant le 55e anniversaire de la bataille de l'Atlantique. Il s'agit d'un événement particulier à rappeler, car les Canadiens ont eu un rôle important à jouer au cours de ce conflit.

La guerre s'est terminée alors que les Allemands n'ont plus jamais menacé le lien atlantique entre l'Europe et l'Amérique, lequel allait permettre le transport des troupes et de matériel en prévision du débarquement.

C'est en mémoire de tous ceux et celles qui ont donné leur vie ou survécu à cette guerre que nous commémorons cet épisode. Nous avons appris de grandes leçons, lesquelles doivent nous guider, nous l'espérons, pour le maintien d'une paix durable partout dans le monde.

*  *  *

[Traduction]

LES SÉNATEURS D'OTTAWA

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, le travail, la discipline et l'assiduité sont les qualités qui font des Sénateurs la fierté des résidants d'Ottawa. Je fais évidemment allusion à l'équipe de la LNH, et non aux membres de la Chambre haute.

Samedi, les Sénateurs ont remporté la série les opposant aux Devils du New Jersey par quatre victoires contre deux défaites, éliminant ainsi les Devils des éliminatoires de la coupe Stanley. Les Sénateurs vont maintenant affronter les Capitals de Washington et nous leur souhaitons bonne chance.

Il est à espérer que nos braves hockeyeurs serviront d'exemples à leurs homonymes au Parlement. Nous espérons aussi que les Sénateurs d'Ottawa inspireront le premier ministre et que celui-ci profitera de l'occasion pour rétablir la confiance du public à l'égard de la Chambre haute, en permettant aux Canadiens d'élire leurs sénateurs.

Rétablissons les notions de travail, de responsabilité et d'assiduité au Sénat. En octobre, le premier ministre devrait reconnaître les sénateurs élus démocratiquement par les Albertains.

Le moment est venu de permettre aux Canadiens d'acclamer et d'élire leurs sénateurs favoris.

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[Français]

LES SCIENCES ET LA TECHNOLOGIE

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, au moment où le nouveau chef du Parti libéral du Québec veut abaisser le Québec en noircissant sans cesse son portrait économique, une importante revue scientifique française présente le système québécois de sciences et de technologie comme un modèle.

La revue La Recherche reconnaît avec raison que, par habitant, Montréal est la première ville nord-américaine en termes d'emplois technologiques, que le Québec produit plus de publications scientifiques que la France, et en ce qui concerne le capital de risque, le Québec est deuxième en Amérique du Nord après le Massachusetts et devant la Californie.

Voilà un aperçu du potentiel québécois dans un contexte où nous ne détenons qu'une partie de nos outils de développement économique. Imaginez le Québec une fois souverain. Comme le dirait le ministre fédéral des Finances: «Just better watch us», ce n'est qu'un début.

*  *  *

LE CHEF LIBÉRAL DU NOUVEAU-BRUNSWICK

Mme Claudette Bradshaw (Moncton, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de féliciter le nouveau chef libéral du Nouveau-Brunswick, choisi à l'issue d'un congrès à la chefferie qui s'est tenu en fin de semaine.

M. Camille Thériault s'est donné comme mission de se battre, comme francophone d'un milieu minoritaire, à défendre l'unité du pays.

[Traduction]

M. Thériault a participé au débat constitutionnel et a montré son engagement ferme à bâtir un Canada fort et uni, tout en défendant les intérêts de sa province.

[Français]

Rappelons que M. Thériault est un Acadien pure laine, comme on dit. Né à Baie-Sainte-Anne, il est parfaitement bilingue, détenteur d'un baccalauréat en sciences sociales, avec une spécialité en sciences politiques.

[Traduction]

Je félicite M. Thériault et je lui souhaite bonne chance comme nouveau premier ministre du Nouveau-Brunswick.

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L'ASSOCIATION CANADIENNE DES SOCIÉTÉS ELIZABETH FRY

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de rendre hommage au travail extrêmement important de l'Association canadienne des sociétés Elizabeth Fry, qui célèbre la Semaine Elizabeth Fry du 4 au 10 mai.

La semaine a pour thème cette année les solutions de rechange à l'incarcération. La société espère sensibiliser le public aux femmes qui ont des démêlés avec la justice criminelle.

La Société Elizabeth Fry est réputée pour le travail dévoué qu'elle fait dans les collectivités partout au pays. Elle offre des services aux femmes qui ont des démêlés avec la justice, des services dont ces femmes ont grandement besoin.

En se concentrant sur les solutions de rechange à l'incarcération, l'association espère encourager le public à examiner des solutions productives, fondées sur le service à la communauté. Comme moi, l'association espère ainsi encourager le service d'intérêt public comme solution de rechange à l'incarcération, notamment lorsqu'on a affaire à des délinquantes non violentes.

Je vous demande à tous d'appuyer l'important travail des sociétés Elizabeth Fry partout au Canada.

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[Français]

LA POLITIQUE INTERNATIONALE

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, des articles de journaux font état d'une nouvelle selon laquelle trois nouveaux prisonniers politiques cubains arriveront incessamment au Canada.

Ces trois nouveaux prisonniers s'ajoutent aux 14 déjà libérés et envoyés au Canada le mois dernier. Il n'en reste pas moins que ce geste constitue un pas important pour ce pays.

 

. 1410 + -

Le Parti réformiste avait tenté en Chambre de discréditer la récente visite du premier ministre à Cuba. Ces gestes prouvent que le gouvernement libéral n'a certainement pas de leçon à recevoir du Parti réformiste en matière de politique internationale.

Ces politiques démontrent que notre premier ministre atteint ses objectifs, et les réformistes devraient avoir honte de leur attitude mesquine.

Notre gouvernement a choisi la voie de la persuasion au lieu de la dénonciation tous azimuts comme semble vouloir le faire le Parti réformiste.

*  *  *

[Traduction]

LE MANITOBA

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de fierté que j'interviens aujourd'hui pour féliciter le premier ministre Gary Filmon à la veille du 10 anniversaire de son élection au poste de premier ministre de la province dynamique qu'est le Manitoba.

Tant le premier ministre que la province méritent des félicitations. Malgré les inondations dévastatrices de l'an dernier, le Manitoba est en voie d'accuser cette année et l'an prochain l'un des taux de croissance les plus forts du pays. Par ailleurs, avec un taux de chômage de 5,7 p. 100, la province a enregistré le taux de chômage le plus faible en 15 ans. C'est en grande partie grâce à la tradition qu'a le gouvernement Filmon de tenir ses promesses de saine gestion financière. Aujourd'hui la province a la loi anti-déficit la plus rigoureuse de tout le Canada et cela fait quatre années qu'elle a un budget équilibré.

Les Canadiens, d'un bout à l'autre du pays, sont impressionnés par les nombreux accomplissements de l'administration Filmon sur le plan financier et reconnaissent l'engagement du premier ministre provincial à l'égard des programmes sociaux de notre pays, dont l'un des plus importants est celui des soins de santé. Malgré une réduction des transferts fédéraux dans le dernier budget, le dernier budget du Manitoba annonce que 100 millions de dollars supplémentaires seront consacrés au budget de la santé.

Le premier ministre incarne les vrais principes de la tradition canadienne, qui consistent à se montrer progressiste sur le plan social et conservateur sur le plan financier.

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[Français]

LA DÉCLARATION DE CALGARY

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, un récent sondage COMQUEST—Léger & Léger nous révèle des faits importants au sujet de l'ultime réponse du Canada face aux résultats du référendum de 1995.

Quatre-vingt-quatorze p. 100 des Canadiens et des Québécois sont d'avis que la Déclaration de Calgary ne réglera pas la question constitutionnelle et, comme d'habitude, une forte majorité, 60 p. 100 des Canadiens, ne veut pas que la Constitution soit modifiée pour y inclure des éléments juridiques relatifs à la société distincte.

Encore une fois, la dernière offre du Canada est déjà rejetée, d'une part, par les Canadiens, parce qu'elle donne trop au Québec et, d'autre part, par les Québécois, parce qu'elle ne représente rien de plus que le statu quo constitutionnel.

Nous réitérons en cette Chambre que seule la souveraineté du Québec, assortie d'une entente de partenariat avec le Canada, peut nous permettre de sortir de ce cul-de-sac constitutionnel.

*  *  *

[Traduction]

CUBA

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, les députés et tous les Canadiens ont accueilli avec beaucoup de joie les nouvelles en provenance de La Havane, ce matin. En effet, la Commission cubaine des droits de la personne et de la réconciliation nationale a signalé, au cours du week-end, aux familles des prisonniers politiques cubains Guillermo Sambra Ferrandiz, Esperanza Micaela Atencio de la Rosa et Jose Miranda Acosta que ces prisonniers pourraient partir pour le Canada sous peu.

Étant donné que cette annonce suit de près la visite historique du premier ministre à Cuba, la semaine dernière, visite contre laquelle le Parti réformiste s'est élevé avec tant de véhémence, il est évident que la politique de relations constructives avec Cuba du premier ministre donne des résultats. Lors de ses rencontres avec le président Fidel Castro, notre premier ministre s'est attaqué aux questions des droits de la personne et il a demandé la libération de prisonniers politiques.

Tous les députés reconnaissent que cette annonce très importante va beaucoup faire avancer les négociations sur les droits de la personne entre nos deux pays. Félicitations au premier ministre.

*  *  *

L'HÉPATITE C

M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, nous savons que le gouvernement a beaucoup de mal à traiter tous les Canadiens de façon égale.

Il y a eu des débats, la semaine dernière, au sujet de victimes de l'hépatite C qui doivent consulter leur calendrier pour voir si l'approvisionnement sanguin fédéral les a rendues malades à une date qui convient aux avocats fédéraux. Il est clair que le gouvernement a beaucoup de choses à apprendre sur la façon de traiter les citoyens de façon juste et équitable. Lorsqu'il est question des familles canadiennes, nous ne sommes pas tous pareils, mais nous devrions nous attendre à ce que notre gouvernement nous traite tous de la même façon.

Au lieu de cela, le gouvernement offre une déduction pour frais de garde d'enfants aux parents qui travaillent tous les deux pour pouvoir payer leurs impôts, mais il ne voit pas la valeur qu'il y a à ce qu'un parent reste à la maison pour s'occuper de ses propres enfants.

Étant donné que 70 p. 100 des Canadiens disent souhaiter avoir les moyens de rester à la maison avec leurs enfants et que 90 p. 100 d'entre eux affirment qu'il est très important de le faire, quand le gouvernement va-t-il écouter la population et rendre le régime fiscal équitable?

*  *  *

LA SEMAINE ELIZABETH FRY

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, la semaine du 4 mai est la Semaine nationale Elizabeth Fry. Durant cette semaine, les sociétés Elizabeth Fry de tout le pays organisaient des activités pour sensibiliser davantage la population à la situation des femmes incarcérées.

Cette semaine nationale est toujours la semaine précédant la Fête des mères, étant donné que la majorité des femmes qui ont des démêlés avec la justice sont des mères. En fait, la majorité de ces femmes étaient le seul soutien de leur famille au moment où elles ont été incarcérées.

Lorsque des mères sont condamnées à des peines d'emprisonnement, les enfants sont condamnés à être séparés de leur mère sans qu'ils n'y soient pour rien. À l'occasion de la Semaine nationale Elizabeth Fry, appuyons le rôle important joué par la Société Elizabeth Fry pour ce qui est de trouver une solution de rechange communautaire à une incarcération coûteuse de délinquants non violents.



QUESTIONS ORALES

 

. 1415 + -

[Traduction]

L'HÉPATITE C

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le Québec a ouvert la porte et, aujourd'hui, l'Ontario s'est engagé à indemniser les victimes de l'hépatite C qui ont contracté la maladie avant 1986 selon les modalités du programme existant. Le gouvernement fédéral peut donc cesser de prétendre que les provinces appuient sa position à l'unanimité.

Il faudra plus que des conférences téléphoniques, des communiqués de presse ou des insultes pour régler ce problème. Quand le premier ministre se chargera-t-il personnellement de résoudre cette crise en acceptant de renégocier le programme d'indemnisation?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, juste avant la période des questions, nous avons appris cette nouvelle concernant l'annonce faite par le gouvernement de l'Ontario. Nous avons évidemment reçu le communiqué de presse de ce gouvernement provincial, mais n'avons eu aucun contact direct avec lui. Par conséquent, je crois que la première chose à faire pour nous devrait être de communiquer avec le gouvernement de l'Ontario pour obtenir des renseignements précis sur ce qu'il a l'intention de faire.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre Harris a vraiment fait preuve de leadership dans cette affaire en acceptant de renégocier le programme d'indemnisation et de payer sa juste part.

Au lieu d'entendre le gouvernement fédéral nous dire que c'est encourageant et intéressant et qu'il est prêt à discuter de cette nouvelle proposition, tout ce que nous entendons, c'est une autre réponse absolument vide de sens, le seul genre de réponse que nous ayons jamais de la part du vice-premier ministre.

Quand le premier ministre et le gouvernement fédéral cesseront-ils de contribuer au problème pour contribuer plutôt à la solution?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme le vice-premier ministre l'a dit, nous venons d'apprendre il y a quelques instants que l'Ontario a changé sa position pour la troisième fois, je crois, au cours des cinq derniers jours.

Je crois que nous devrions obtenir des précisions sur la position de l'Ontario. C'est manifestement quelque chose de nouveau et d'important. C'est différent de la position que partageaient tous les gouvernements encore très récemment. Nous allons obtenir des précisions sur la position de l'Ontario et répondre au chef de l'opposition lorsque nous aurons bien compris ce dont il s'agit.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Santé est manifestement déconnecté de la réalité. Les Canadiens ne veulent plus rien savoir de lui. Sa réputation en tant que ministre de la Santé est ternie à tout jamais. Il devrait prendre la parole uniquement pour annoncer qu'il est prêt à renégocier le programme d'indemnisation ou encore pour annoncer sa démission. Qu'est-ce que ce sera?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, il faut bien se rendre compte que, sans le gouvernement fédéral, il n'y aurait même pas eu de programme d'indemnisation.

Lorsque nous nous sommes réunis avec les gouvernements provinciaux, nous avons adopté à l'unanimité une position à l'égard des personnes infectées avant 1986. Ce qui s'est passé aujourd'hui est quelque chose de tout à fait nouveau. Un important partenaire a changé sa position.

Je dis au chef de l'opposition que nous allons tenir compte de cette position. Nous répondrons lorsque nous aurons bien compris ce que l'Ontario a l'intention de faire.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens réclament du leadership de la part du gouvernement, mais celui-ci n'a pas bougé dans ce dossier depuis plus de quatre semaines. Le gouvernement ontarien vient d'adopter une nouvelle position et le gouvernement fédéral, au lieu de d'accepter de collaborer de nouveau avec les provinces, tente de semer la confusion en disant qu'il examinera la situation.

À l'époque où M. Trudeau était premier ministre, un chercheur de la Croix Rouge, un certain Dr Moore, a réclamé que l'approvisionnement en sang soit testé. D'autres pays le faisaient et, pendant neuf ans, le gouvernement libéral de l'époque n'en a pas tenu compte.

N'est-il pas vrai que le premier ministre refuse d'indemniser les victimes infectées avant 1986 parce qu'il ne veut pas impliquer le gouvernement libéral de l'époque dans cette affaire tragique? N'est-ce pas vrai?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, lorsque les ministres de la Santé se sont rencontrés à quelques occasions pour discuter de la question, ils ont élaboré une position que tous partageaient.

Aujourd'hui, nous apprenons une nouvelle importante: l'Ontario vient d'adopter une position différente. Juste avant 14 heures, j'ai discuté avec Clay Serby, qui préside la conférence des ministres provinciaux cette année. Il croit que les ministres de la Santé devraient réexaminer la question.

Lorsque nous comprendrons la position de l'Ontario, nous serons en mesure de répondre à la question du chef de l'opposition.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement ontarien semble vouloir indemniser les victimes infectées avant 1986. Nous le voulons aussi, de même que les groupes de défense des droits des victimes. Seul le gouvernement fédéral hésite.

La France et le Japon ont connu des problèmes avec du sang contaminé et bon nombre de leurs bureaucrates ont été inculpés. Certains d'entre eux se sont même retrouvés en prison.

 

. 1420 + -

Au Canada, la destruction de preuves fait l'objet d'une enquête criminelle et voici que le Dr Brill-Edwards, scientifique principal à la Direction de la protection de la santé, nous dévoile la vérité, les véritables motifs pour lesquels le gouvernement libéral refuse d'indemniser les victimes infectées avant 1986. La vérité, c'est qu'ils connaissaient les preuves et ont omis de...

Le Président: Le vice-premier ministre a la parole.

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la vérité, c'est que, vendredi après-midi, Clay Serby, le ministre néo-démocrate de la Santé, affirmait encore qu'il parlait au nom de toutes les provinces. Il soutenait que les provinces ne demandaient pas à Ottawa d'élargir son programme d'indemnisation.

Nous avons appris par les médias la volte-face de l'Ontario. Il n'est que raisonnable de communiquer avec M. Serby pour découvrir la position exacte de toutes les provinces.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, non seulement près de la moitié des députés de la Chambre des communes sont en faveur d'une indemnisation pour toutes les victimes de l'hépatite C contaminées par le sang, mais à cela s'ajoutent au moins trois provinces, représentant près de 66 p. 100 de la population canadienne.

Face à cet appui massif pour l'indemnisation de toutes les victimes, comment le vice-premier ministre peut-il accepter que son ministre de la Santé continue à se promener sur toutes les tribunes pour dire que le dossier des victimes non indemnisées est maintenant clos?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la question de l'honorable député montre pourquoi nous devons chercher plus d'information. M. Harris a aujourd'hui accepté une responsabilité pour les victimes de l'hépatite C avant 1986 et désire partager la compensation avec le gouvernement fédéral.

Le gouvernement du Québec ne désire payer aucune compensation, selon le premier ministre Bouchard, la semaine passée. Il dit erronément que le fardeau n'est seulement qu'un fardeau fédéral. C'est pourquoi nous devons chercher plus d'information.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, je rappelle au vice-premier ministre que la motion unanime de l'Assemblée nationale a été faite par le Parti libéral du Québec et endossée par son nouveau chef, Jean Charest, un homme raisonnable, aux dires du premier ministre, ici à Ottawa.

Le vice-premier ministre va-t-il enfin admettre que les provinces font plus que leur part si l'on tient compte des coupures des paiements de transfert que leur a imposées ce gouvernement fédéral?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, quelque chose d'important s'est passé ce matin: l'Ontario a changé sa position. Alors, on doit maintenant demander à l'Ontario les détails de sa nouvelle position, mais on doit aussi déterminer si le Québec prendra la même position et contribuera financièrement pour ceux qui ont été infectés avant 1986.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, si le ministre de la Santé veut parler d'argent, nous allons en parler. Son premier ministre a affirmé à bien des occasions que son gouvernement paierait la plus grande part de la compensation accordée aux victimes de l'hépatite C. Or, il y a une compensation de 1,1 milliard de dollars, mais il y a aussi les soins qui sont nécessaires pour les victimes, ceux-ci coûtent 1,6 milliard de dollars et ce sont les provinces qui paieront.

Alors, le vice-premier ministre ou le ministre de la Santé admettront-ils qu'avec une participation de 800 millions de dollars sur un total de 2,7 milliards de dollars pour l'hépatite C, Ottawa s'en tire plutôt bien avec seulement 30 p. 100 de la facture?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, les coûts pour le système des soins de santé sont payés par le gouvernement fédéral et les provinces. Nous transférons chaque année de l'argent aux provinces pour le système des soins de santé.

Au sujet de l'indemnisation des victimes, je le répète, je me demande si le Québec contribuera financièrement, comme l'a apparemment fait l'Ontario, pour les victimes infectées avant 1986.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, quand le ministre de la Santé dit que le gouvernement fédéral paie pour les soins de santé, il oublie de dire que les transferts sont gelés à 12,5 milliards de dollars. Qu'il y ait des malades de l'hépatite C ou non, ils ont gelé les transferts après les avoir coupés.

Est-ce que le ministre ne comprend pas qu'en faisant montre d'un tel entêtement, d'une telle attitude, il fait en sorte que les personnes atteintes de l'hépatite C ont non seulement été victimes une première fois de leur incompétence, mais qu'ils sont maintenant victimes de leur entêtement?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je pense que mon honorable collègue oublie les paiements de péréquation et les points d'impôt qui sont des formes de transfert du gouvernement fédéral aux provinces pour les soins médicaux.

 

. 1425 + -

Il est alors totalement erroné de sa part de dire que tous les paiements de soins médicaux proviennent seulement des contribuables provinciaux. Le gouvernement fédéral paie chaque année à la province de Québec et aux autres provinces des millions et des millions de dollars pour les soins médicaux.

[Traduction]

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé.

À mon avis, ce que veulent tous les Canadiens est clair. Ils veulent que toutes les personnes qui ont contracté l'hépatite C après avoir reçu du sang contaminé soient indemnisées. Honnêtement, ils veulent qu'on cesse de se blâmer les uns les autres à la Chambre et ailleurs.

Le ministre de la Santé lui-même a dit que la situation avait évolué. C'est certes une raison pour qu'il demande à rencontrer les ministres de la Santé des provinces. Le fera-t-il? Laissera-t-il l'Ontario exposer sa nouvelle position à l'ensemble des ministres de la Santé et à lui-même et verra-t-il s'ils peuvent, tous ensemble, trouver une solution au problème?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je me réjouis du ton rafraîchissant et positif de la question du député. Pardonnez mon étonnement, monsieur le Président, mais je crois qu'il a tout à fait raison.

La situation a évolué de façon importante. Un des principaux partenaires de la Confédération a changé d'avis sur une entente à laquelle tous les gouvernements étaient parvenus. Examinons cette nouvelle situation. Allons au-delà des médias pour savoir ce que dit le gouvernement de l'Ontario.

Je me suis déjà entretenu avec le président du conseil des ministres provinciaux. Il a dit qu'une rencontre des ministres serait peut-être opportune à ce stade-ci, car, en dernière analyse, notre responsabilité est, ensemble...

Le Président: Le député de Winnipeg—Transcona.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, je répugnerais à penser que tout ceci se produit simplement parce que l'Ontario a changé d'avis. L'Ontario n'est pas un protagoniste important. C'est une province et, si toute autre province change d'avis, j'espère que l'effet sera le même.

Quand la rencontre aura-t-elle lieu? Les ministres de la Santé vont-ils se réunir cette semaine? Qu'on règle cette question une fois pour toutes. Agissons pour le mieux. La situation a évolué. Qu'on réunisse les ministres de la Santé et qu'on trouve une solution qui témoigne des valeurs de tous les Canadiens, à savoir qu'il faudrait prendre soin de ces victimes.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit au député et à la Chambre, nous irons au-delà des médias pour savoir ce que dit le gouvernement de l'Ontario. Je m'entretiendrai avec le ministre Clay Serby de la Saskatchewan, qui assure cette année la présidence du conseil des ministres provinciaux. S'il y a lieu, les ministres se réuniront.

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, le ministre de la Santé a dit qu'il examinerait la résolution dès qu'il en aurait une copie et que le gouvernement en ferait autant. Je demande à déposer cette résolution maintenant. Je le ferai à la fin de ma question, pour que le ministre puisse en prendre connaissance.

La sûreté du système d'approvisionnement sanguin est d'abord et avant tout la responsabilité du gouvernement fédéral. Certaines provinces condamnent clairement le fait d'avoir abandonné 40 000 personnes qui souffrent de l'hépatite C.

Quand le gouvernement et le ministre des Finances vont-ils faire preuve du même leadership que l'Ontario, en indemnisant toutes les victimes de l'hépatite C?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je rappelle, car il est important que ma collègue le sache, que sans le leadership dont ce gouvernement a fait preuve sous la direction du premier ministre, les victimes de l'hépatite C n'auraient reçu aucune indemnisation.

Lorsque les ministres se sont rencontrés, ils ont agi de bonne foi et ont fait de leur mieux pour prendre ensemble une décision difficile. Nous nous sommes tous entendus sur une position. L'Ontario semble avoir modifié sa position. Voilà un fait nouveau important. Comme je l'ai dit à la Chambre, et je le répète à la députée, nous examinerons ce que l'Ontario...

Le Président: Le chef du Parti conservateur.

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, il y a une province qui a joint l'acte à la parole, comme l'avait demandé le premier ministre du Canada. Cette province est prête à aider les personnes qui sont tombées malades sans y être pour quoi que ce soit.

Un ancien haut fonctionnaire du ministère de la Santé, M. Brill-Edwards, a déclaré que si le gouvernement fédéral avait fait ce qu'il devait pour assurer la sûreté des réserves de sang, nous n'aurions pas tant de personnes qui souffrent et meurent.

Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de faire ce qu'il doit et d'indemniser toutes les victimes de l'hépatite C?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, la députée doit se souvenir que la commission Krever, qui a mené une enquête approfondie dans cette affaire et qui a examiné les problèmes à l'origine de la tragédie, a clairement indiqué dans son rapport que bien que le gouvernement fédéral soit en cause, les provinces dont relève le système, et la Croix-Rouge qui l'administre, sont également à blâmer. Je tiens cependant à donner une fois de plus l'assurance à la députée que nous examinerons la proposition de l'Ontario. Si c'est un fait nouveau important, nous agirons en conséquence.

 

. 1430 + -

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement connaît déjà depuis plusieurs heures la nouvelle position de l'Ontario. Il a certainement une réponse plus constructive que celle qu'il vient de donner.

Le premier ministre Harris a dit que l'Ontario ferait ce qui doit être fait et il a invité le gouvernement fédéral à se joindre à sa province. Nous voulons une réponse à la question suivante. Un représentant du gouvernement est-il prêt à nous affirmer que le gouvernement va faire ce qu'il doit et se joindra aux provinces pour renégocier l'entente qui a été conclue?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai appris la nouvelle peu avant le début de la période des questions. À ma connaissance, il n'y a personne dans les rangs ministériels qui soit au courant de la nouvelle depuis plusieurs heures.

Je tiens cependant à donner l'assurance au député et à tous les Canadiens que le gouvernement a toujours eu l'intention de faire ce qui devait être fait.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, jusqu'à maintenant, le gouvernement n'a pas fait ce qu'il fallait dans ce dossier.

Lorsque l'entente sera renégociée, le ministre de la Santé perdra sa crédibilité. Il sera incapable de renégocier une nouvelle entente. Depuis le début, le ministre a déformé la position des provinces à la Chambre. Il les a calomniées et il essaie de s'approprier le mérite de faire preuve de leadership, alors que ce sont les provinces qui sont les chefs de file.

Quand aurons-nous un nouveau ministre de la Santé qui serait capable de renégocier de bonne foi une entente avec les provinces?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le chef de l'opposition doit savoir que nous avons appris la proposition de l'Ontario à 13 heures. La province a changé d'opinion à trois reprises en sept jours. Il semble qu'elle ait adopté une nouvelle position, mais je préfère en obtenir confirmation directement du gouvernement de l'Ontario et lorsque nous saurons à quoi nous en tenir, nous agirons en conséquence.

*  *  *

[Français]

LA DÉCLARATION DE CALGARY

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires intergouvernementales. Sept mois après la déclaration de Calgary, un sondage Léger & Léger—COMQUEST nous révèle que personne ou presque ne connaît le contenu de cette déclaration et que ceux qui en ont une petite idée, de toute façon, disent qu'elle ne donnera rien.

Le ministre, lui qui s'inquiétait de l'absence de consultations au Québec par rapport à ce qui se faisait ailleurs, qu'a-t-il à répondre aujourd'hui, maintenant qu'on apprend que 90 p. 100 des personnes au Canada sont incapables de dire ce que contient la Déclaration de Calgary?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, il m'est impossible de commenter un sondage que l'on n'a pas vu en entier. Seulement quelques extraits sont parus dans les journaux et, d'après les libellés des questions, on comprend que l'on n'a pas vraiment interrogé les gens sur le contenu exact de Calgary.

Par contre, dans un sondage paru récemment en Colombie-Britannique, en janvier dernier, 54 p. 100 des gens de la Colombie-Britannique connaissaient l'entente de Calgary, 62 p. 100 appuyaient le caractère unique de la société québécoise, 69 p. 100 appuyaient le rôle de l'Assemblée nationale, 80 p. 100 appuyaient l'entente de Calgary, et même 66 p. 100 n'auraient pas objection à ce que l'on mette cette entente dans la Constitution.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, le ministre prend ses désirs pour des réalités. À l'époque de Meech et de Charlottetown, le ministre était un observateur attentif de la scène politique canadienne. Il a constaté que ces deux initiatives ont débouché chaque fois sur un échec total.

Maintenant qu'il est devenu un acteur de premier plan dans l'élaboration et le suivi de Calgary, n'est-il pas en train de jouer dans un «remake» du même vieux film, avec les mêmes acteurs, qui débouchera sur la même finale sans surprise, c'est-à-dire que la déclaration de Calgary, c'est insuffisant pour le Québec et beaucoup trop pour le Canada?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, l'entente de Calgary n'est pas un texte constitutionnel. Par contre, il y a quelque chose d'intéressant par rapport à ce qui s'était fait à Charlottetown. À Charlottetown, un sondage postréférendaire démontrait que la majorité des Canadiens étaient incapables de nommer une seule clause de Charlottetown. Par contre, quand on leur montrait Charlottetown, clause par clause, les Canadiens étaient plutôt contre, y compris les Québécois.

La différence avec l'entente de Calgary est que, quand on demande par sondage aux gens s'ils sont d'accord avec chacune des clauses de l'entente de Calgary, l'appui est très fort partout au Canada, y compris au Québec.

*  *  *

[Traduction]

L'HÉPATITE C

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, parlant de changer de position, je voudrais rappeler au ministre de la Santé ce qu'il disait il n'y a pas très longtemps. Il disait que le dossier était clos. Je me souviens très bien l'avoir entendu dire cela. En fait, lorsque les députés libéraux de l'arrière-ban lui ont posé des questions, il a répondu que le dossier était clos.

 

. 1435 + -

Alors, qui a changé de position? Est-ce que la vraie raison pour laquelle le gouvernement change de position n'est pas qu'il est en train de perdre la bataille des relations publiques?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, les ministres des 12 gouvernements se sont entendus de bonne foi. Sur une question difficile ils se sont mis d'accord sur une position commune. Les choses ont maintenant changé.

Comme je l'ai dit aux collègues du député, nous allons examiner la nouvelle position de l'Ontario. Nous voulons aussi savoir ce que sera la réponse des autres provinces. Nous réagirons lorsque nous aurons ces renseignements.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, le dossier était fermé, mais maintenant le dossier est de nouveau ouvert. Il semblerait que le gouvernement commence enfin a ressentir la pression de l'opinion publique.

Quand le ministre admettra-t-il que la véritable raison pour laquelle il remet le dossier sur la table c'est qu'il perd la bataille des relations publiques? Il sait que les députés de l'arrière-ban veulent une entente. Il sait que le public veut un changement. Quand admettra-t-il que le gouvernement a fait une erreur et que c'est pour cela que l'on ouvre de nouveau le dossier?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, j'ai dit au député et à ses collègues que, vu les nouveaux développements, nous allons voir ce qu'est la position de l'Ontario et nous allons réagir en conséquence.

*  *  *

[Français]

LA DÉCLARATION DE CALGARY

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales affirme que le caractère unique de la Déclaration de Calgary, c'est la même chose que la société distincte de l'Accord du lac Meech. Pourtant, les premiers ministres des provinces banalisent ledit caractère unique, en insistant sur le fait que ça ne donne aucun statut particulier au Québec.

Lui qui se dit le champion de la clarification, comment le ministre peut-il nous expliquer cette contradiction majeure?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, en effet, ce n'est pas un statut particulier, un statut spécial, mais c'est un engagement de tous les Canadiens à l'effet que nous allons avoir une fédération qui respecte les principes d'égalité, étant entendu que l'égalité n'est pas synonyme d'uniformité, mais doit aller de pair avec un profond respect pour la diversité du pays, y compris le caractère unique de la société québécoise.

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, le ministre disait qu'il était entré en politique pour vendre au Canada anglais la notion de société distincte. Lorsqu'il constate l'opposition farouche des Canadiens à constitutionnaliser un statut particulier pour le Québec, se rend-il compte que sa démarche, même en ayant tenté de vendre le Québec à rabais, se dirige vers un échec lamentable?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas allé en politique pour vendre la société distincte mais bien pour aider mes concitoyens à rester ensemble.

Le Canada tel qu'il est, sans changements constitutionnels, avec les forces de changements que l'on voit dans ce pays, est infiniment préférable à l'approche séparatiste du Bloc. On peut cependant améliorer la Constitution. Cela va se faire étape par étape, en discutant sérieusement.

Je demanderais d'ailleurs à mon collègue s'il y a un des principes de l'entente de Calgary qui lui paraît mauvais.

*  *  *

[Traduction]

LE SÉNAT

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, selon une étude réalisée cette année en Alberta par le groupe Environics, 91 p. 100 des habitants de la province préféreraient élire leur prochain représentant au Sénat plutôt que d'avoir un nouveau sénateur qui bénéficie d'une nomination politique. Ce pourcentage prouve donc que, peu importe leur allégeance, la grande majorité des électeurs de l'Alberta veulent élire leurs sénateurs.

Le premier ministre Klein a décidé que de telles élections auraient lieu à l'automne. Le premier ministre et le gouvernement vont-ils nommer les sénateurs qui seront élus ou méprisent-ils trop les électeurs albertains pour cela?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous respectons au plus haut point les opinions des Albertains, à l'exception peut-être de celles du député qui pose la question.

A-t-on demandé aux Albertains s'ils voulaient élire des sénateurs à vie, sans qu'ils aient le moindre recours si jamais ils étaient insatisfaits de leur choix? C'est le point faible de la position que défend le député. Si la personne élue était nommée au Sénat, elle y resterait jusqu'à l'âge de 75 ans, peu importe l'importance de sa contribution. Ce n'est pas démocratique.

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, il est étonnant d'entendre parler de démocratie un gouvernement qui vient de traiter aussi cavalièrement ses simples députés. Si ce gouvernement refuse de respecter les souhaits de ses propres députés, comment va-t-il respecter ceux de millions d'électeurs albertains?

Il y aura des élections le 19 octobre. Des centaines de milliers d'électeurs albertains vont choisir leur prochain sénateur. Le gouvernement va-t-il nommer au Sénat les personnes qui auront ainsi été élues, oui ou non?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le député n'a pas répondu à ma question. Pourquoi voudrait-il élire des sénateurs à vie? C'est antidémocratique. Il faut noter que l'assemblée législative de l'Alberta n'a présenté aucune résolution visant une modification constitutionnelle.

 

. 1440 + -

Pour effectuer une réforme aussi importante du Sénat, il faudra absolument modifier la Constitution. D'ici là, le premier ministre doit respecter la Constitution et il va le faire.

*  *  *

[Français]

LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

On apprend que le gouvernement fédéral s'apprête à racheter les permis de pêche d'une partie des pêcheurs qui sont actuellement bénéficiaires de la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique.

Puisque de très nombreuses personnes ne pourront pas se qualifier pour ce nouveau programme de rachat, qu'est-ce que le ministre entend faire au juste pour supporter les autres bénéficiaires de la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique, pêcheurs ou travailleurs de la pêche, qui se retrouveront très bientôt devant rien?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, comme on le sait, la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique se terminera au mois d'août cette année.

Plusieurs de mes collègues et moi-même travaillons très fort, à l'heure actuelle, pour consulter des communautés et des individus et travailler en coordination avec les provinces pour nous assurer que nous traitions de la situation de l'après-TAGS, de l'après-Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique, de la façon la plus appropriée pour aider les communautés et les individus, étant donné que le poisson ne revient pas dans les eaux de l'Atlantique, comme nous l'avions espéré.

*  *  *

[Traduction]

LES DÉCHETS NUCLÉAIRES

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Ressources naturelles.

Un comité de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale s'est prononcé récemment contre l'aménagement d'énormes enceintes dans le granit du Bouclier canadien que l'on proposait comme la façon la meilleure et la plus sûre d'éliminer les déchets nucléaires.

Étant donné cette décision, que prévoit faire le gouvernement pour éliminer les déchets nucléaires au Canada?

M. Gerry Byrne (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, le stockage des déchets nucléaires s'effectue actuellement d'une manière très efficace et très responsable. Le gouvernement du Canada a toujours à coeur de trouver une solution à long terme, une solution qui soit parfaitement convenable.

Le comité Seaborn a examiné la proposition de stockage en profondeur des déchets nucléaires et est parvenu à la conclusion que, bien que faisable sur les plans technique et environnemental, cette solution suscitait des inquiétudes sur le plan sociologique. Les gens estiment en effet que ce n'est pas une bonne méthode.

Nous continuerons de travailler de concert avec les intéressés pour trouver des solutions convenables.

*  *  *

LE SÉNAT

M. Randy White (Langley—Abbotsford, Réf.): Monsieur le Président, l'Alberta n'est pas la seule province dont la vaste majorité des électeurs réclament le droit d'élire leurs sénateurs.

Un important sondage d'opinion effectué récemment par la maison Marketrend Research a révélé que 84 p. 100 des gens de la Colombie-Britannique réclamaient le droit d'élire leurs sénateurs.

Nous savons que le premier ministre se croit plus intelligent que la moyenne de ses députés d'arrière-ban. Voilà pourquoi il ne les a pas laissés voter librement sur la question de l'hépatite C. Se croit-il vraiment plus intelligent que les électeurs de la Colombie-Britannique quand il s'agit de choisir leurs propres sénateurs?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais savoir si les gens de la Colombie-Britannique qui ont répondu aux questions du sondage savaient que, s'ils adoptaient la proposition réformiste, les sénateurs seraient élus pour la vie et qu'ils n'auraient pas la possibilité de les destituer?

La meilleure façon de régler la question consiste à apporter une modification à la Constitution. Jusqu'à présent, je n'ai vu aucun gouvernement provincial proposer par voie de résolution à son assemblée législative une modification réclamant un Sénat dont tous les membres sont élus. Jusqu'à ce que cela se produise, le premier ministre n'a d'autre choix que de se conformer à la Constitution, et c'est exactement ce qu'il fait.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, la société Western Opinion Research vient de mener un vaste sondage au Manitoba. Selon les données obtenues, 86 p. 100 des Manitobains sont en faveur d'un sénat élu. Seulement 7 p. 100 d'entre eux se sont dit d'accord avec le fait que les sénateurs soient nommés par le premier ministre.

Nous savons que le premier ministre a tendance à traiter ses députés d'arrière-ban comme des moutons qui ne peuvent penser par eux-mêmes. Ils les a d'ailleurs fouettés si fort dans le dossier de l'hépatite C que certains d'entre eux pleuraient au moment du vote.

Est-ce également la façon dont le premier ministre compte traiter les 86 p. 100 des Manitobains dans le dossier de la réforme du Sénat?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les 86 p. 100 des Manitobains qui ont répondu au sondage se sont-ils rendu compte que la proposition des réformistes visait à élire ces personnes pour la vie, c'est-à-dire jusqu'à l'âge de 75 ans, et qu'elles auraient donc le droit d'y rester jusqu'à cet âge, quel que soit leur rendement?

Je suis persuadé que les Manitobains, comme tous les autres répondants au sondage, croyaient que ces élections, si elles avaient lieu, ne viseraient qu'un seul mandat, ce qui leur donnerait par la suite la possibilité de remplacer ces gens élus dans l'autre Chambre au besoin.

 

. 1445 + -

D'ici à ce que cela se produise, c'est-à-dire d'ici à ce que l'on modifie la Constitution, le premier ministre n'aura d'autre choix que de respecter les dispositions de la Constitution.

*  *  *

L'HÉPATITE C

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, nous apprécions le premier signe d'ouverture que le gouvernement a donné aujourd'hui dans le dossier de l'indemnisation des victimes de l'hépatite C, mais nous savons aussi qu'il faut agir promptement pour dissiper la confusion.

Je sais que je ne peux pas me reporter à des documents, mais le fait est que le premier ministre de l'Ontario a publié un communiqué disant précisément que le gouvernement était disposé à entamer des discussions sur l'indemnisation de toutes les victimes.

Étant donné la situation, le ministre donnera-t-il à la Chambre l'assurance qu'il convoquera une réunion des ministres de la Santé et annoncera-t-il...

Le Président: Le ministre de la Santé.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je reconnais l'approche constructive de la députée et je l'en remercie.

Je vais parler de nouveau au ministre Serby de la Saskatchewan, qui est le président du conseil des ministres provinciaux cette année. Les ministres auront certainement leurs réactions propres à cette évolution de la situation en Ontario.

Si cela est utile, je suis persuadé que les ministres seront disposés à se réunir pour discuter de la question.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, tous les députés veulent qu'on prenne les mesures qui s'imposent dans ce dossier. Nous savons qu'il faut dissiper la confusion qui règne dans le pays, à la Chambre et chez les Canadiens infectés par du sang contaminé.

Comme il a dit qu'il étudierait la question et que nous connaissons les faits, le ministre annoncera-t-il aujourd'hui une réunion des ministres de la Santé pour très bientôt?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, par respect pour les ministres, je dois communiquer directement avec eux, et c'est ce que j'entends faire.

Je répondrai à la députée dans les meilleurs délais au sujet de la tenue d'une réunion des ministres.

*  *  *

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, la semaine dernière, le Président du Conseil du Trésor a dit qu'il n'avait rien à redire sur ce que son collaborateur, Jacques Roy, a fait puisque les renseignements qu'il a donnés pour une collecte de fonds légale étaient en fait des renseignements publics.

Le ministre dira-t-il à la Chambre aujourd'hui que les demandes de deniers publics des ministères sont des renseignements publics avant leur approbation par le gouvernement?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, tous les renseignements en cause ont été communiqués à la GRC.

Elle a fait enquête. Elle est arrivée à une conclusion. Il n'y a pas de faits nouveaux. Il n'y a rien à ajouter.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je pense qu'il y a quelque chose à ajouter.

Les Canadiens doivent savoir que des renseignements confidentiels donnés au gouvernement ne sont pas utilisés aux fins du Parti libéral.

La semaine dernière, il a été confirmé devant un tribunal de Montréal que Jacques Roy, un adjoint spécial du président du Conseil du Trésor, a communiqué des renseignements gouvernementaux à une personne trouvée coupable d'extorsion, Pierre Corbeil.

Le ministre peut-il nous dire s'il a pris des mesures disciplinaires contre cet employé ou s'il a fermé les yeux sur son geste?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, c'est un ministre de notre gouvernement qui a demandé à la GRC de faire une enquête. La GRC est au courant de tous les faits. Elle a fait son enquête et en est venue à une conclusion. Elle a renvoyé la question à un juge. Il n'y a pas de faits nouveaux. L'enquête a été faite.

Je le répète, la GRC a été mise au courant de tous les faits. Il n'y a pas de faits nouveaux. Il n'y a rien à ajouter.

*  *  *

LE CANADA RURAL

Mme Susan Whelan (Essex, Lib.): Monsieur le Président, dans la circonscription d'Essex que je représente, il se trouve de nombreux électeurs vivant en région rurale dont les intérêts et les besoins économiques et autres diffèrent de ceux des habitants des grands centres urbains.

Comment le ministre responsable des affaires rurales établit-il ce que les Canadiens des régions rurales attendent de leur gouvernement?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, dans le cadre de l'initiative de partenariat rural que notre gouvernement vient de lancer, nous engagerons de nombreux dialogues touchant les questions rurales avec tous les milieux ruraux canadiens, accordant ainsi aux Canadiens des régions rurales autant d'occasions de discuter de la formation de partenariats avec le gouvernement fédéral, d'examiner les moyens de les servir et d'exprimer ce qu'ils attendent du gouvernement fédéral.

J'attends avec impatience les résultats de ces dialogues pour développer et même renforcer le Canada rural.

*  *  *

LA LOI SUR LES ARMES À FEU

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, la ministre de la Justice et son gouvernement ont dit aux Canadiens que l'enregistrement des armes à feu aiderait à lutter contre le marché noir des armes à feu et à réduire la contrebande d'armes au Canada. Or, de leur propre aveu, les fonctionnaires de la ministre disent maintenant que le programme d'enregistrement des armes à feu aura l'effet contraire et qu'il entraînera un accroissement du marché noir des armes à feu.

 

. 1450 + -

Que compte faire la ministre, maintenant qu'elle sait que les dispositions législatives auront l'effet contraire à celui recherché?

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, l'enregistrement des armes à feu sera efficace. Le gouvernement en est persuadé.

Permettez-moi de rappeler au député et à l'opposition officielle que, selon le dernier sondage Angus Reid réalisé à ce sujet en mars 1998, 80 p. 100 des Canadiens sont en faveur de l'enregistrement des armes à feu.

Au lieu de continuer à dénoncer le contrôle et l'enregistrement des armes à feu, il serait peut-être temps que le député et son parti se mettent au diapason du reste du Canada.

*  *  *

[Français]

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, on apprend par les journaux que les célébrations pour le 125e anniversaire de la GRC coûteront 1,5 million de dollars pour le Québec seulement.

Est-ce que le Solliciteur général peut nous dire quel va être le budget total des fêtes de la GRC, combien sera dépensé au Québec, et surtout d'où vient l'argent?

[Traduction]

L'hon. Andy Scott (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme le commissaire de la GRC l'a déjà expliqué au député lorsqu'il a comparu devant le comité la semaine dernière, la GRC a un budget de fonctionnement qui prévoit des spectacles du Caroussel et d'autres activités semblables qui s'inscrivent dans le cadre du patrimoine canadien.

Je suis très fier de cette activité. C'est parce que la GRC célèbre en tout temps son excellent travail, partout au Canada, qu'aucun montant particulier n'est associé au 125e anniversaire.

*  *  *

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. Rick Laliberte (Rivière Churchill, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

En 1993, le gouvernement avait promis de renégocier l'ALENA pour rendre cet accord avantageux pour les Canadiens. Aux dernières nouvelles, l'eau douce du Canada serait à vendre et l'Ontario a déclaré qu'il était légal de permettre la vente et l'exportation d'eau canadienne par des entreprises privées.

L'ALENA ne laisse que très peu de latitude au gouvernement pour protéger notre eau, qui est une ressource naturelle.

Devant les inquiétudes exprimées à ce sujet, que fera le ministre pour empêcher l'exportation de grandes quantités d'eau canadienne?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le député sera peut-être intéressé de savoir que, puisque les exportations se feront vers l'Asie et non vers les États-Unis, l'ALENA ne s'applique pas.

Cependant, la véritable question dont il faut se soucier, c'est l'exportation d'eau douce sur une grande échelle. Nous avons toujours été fermement opposés à cela.

Nous étudions en ce moment différentes lois, y compris le Traité des eaux limitrophes et d'autres dossiers, pour trouver des moyens de prévenir les exportations d'eau.

La question nous préoccupe et nous examinons les options dont nous disposons.

*  *  *

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, le ministre s'obstine à dire que le dossier est fermé et que la question sera oubliée, mais je souligne que c'est un de ses employés qui a fourni des renseignements confidentiels à M. Corbeil. Celui-ci a ensuite utilisé ces renseignements dans le cadre d'activités occultes au profit du Parti libéral.

Il est clair que la personne visée au bureau du président du Conseil du Trésor n'aurait pas pu participer à ces activités si les renseignements ne lui avaient pas été fournis. Il est clair que le président du Conseil du Trésor, qui a nié toute participation de son bureau, a tort.

Devant ces faits, le président du Conseil du Trésor fera-t-il le ménage à son bureau ou démissionnera-t-il?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, un membre du gouvernement a demandé à la GRC de faire enquête. La GRC a pris connaissance de tous les faits au cours de son enquête et n'a porté qu'une seule accusation. L'affaire a été jugée. La personne accusée a plaidé coupable.

À mon avis, le député perd son temps.

*  *  *

L'EMPRESS OF IRELAND

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État responsable des parcs.

En 1914, 1 014 personnes ont perdu la vie lorsque l'Empress of Ireland a coulé, près de Rimouski. Que leur âme repose en paix.

Selon certaines sources, des entrepreneurs en sauvetage envisageraient de se servir d'explosifs pour récupérer des lingots de nickel d'une grande valeur à cet endroit.

Qu'entend faire le gouvernement afin d'empêcher une telle désacralisation de ce lieu?

L'hon. Andy Mitchell (secrétaire d'État (Parcs), Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement et moi-même pensons que tous les Canadiens souhaitent que ce lieu soit protégé. C'est la raison pour laquelle le gouvernement fédéral a communiqué avec le procureur général du Québec la semaine dernière, afin de s'assurer que les dispositions du Code criminel qui ont trait à la désacralisation de cimetières soient appliquées.

Je suis heureux de voir que le ministre du Québec responsable a invoqué la loi provinciale sur les biens culturels pour s'assurer que l'endroit sera protégé durant une année.

 

. 1455 + -

Enfin, j'ai écrit à mon homologue du Québec pour lui proposer de travailler en collaboration, afin d'assurer la protection à long terme de ce lieu très important.

*  *  *

LA LOI SUR LES ARMES À FEU

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, la Loi sur les armes à feu est très mal reçue. Quatre provinces et deux territoires en contestent la constitutionnalité devant les tribunaux.

Maintenant nous comprenons, au moins en partie, pourquoi. C'est parce que le propre groupe consultatif de la ministre de la Justice, le Firearms Users Group, a dit à la ministre que la loi allait entraîner une augmentation très marquée du trafic des armes à feu de tous types.

La ministre peut-elle expliquer en quoi sa Loi sur les armes à feu va faire augmenter les activités criminelles liées à la contrebande et au trafic des armes à feu, au lieu de les faire diminuer? Comment peut-elle expliquer cela?

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas sûre d'avoir compris la question, mais permettez-moi d'assurer à tout le monde à la Chambre que notre nouvelle législation sur le contrôle des armes à feu ne va accroître ni les transactions sur le marché noir, ni la contrebande d'armes à feu.

Permettez-moi de revenir sur ce que j'ai dit plus tôt. Le contrôle et l'enregistrement des armes à feu gagnent de plus en plus d'appuis dans ce pays. Les seules personnes qui semblent encore s'y opposer sont les députés de l'opposition officielle, qui en cela vont à l'encontre de l'opinion de 80 p. 100 des Canadiens.

*  *  *

[Français]

L'INDUSTRIE DE L'AMIANTE

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Commerce international ou au secrétaire parlementaire, s'il daigne répondre une fois à une de nos questions.

Le Conseil de l'Europe vient de recommander le bannissement complet de l'amiante sur l'ensemble de son territoire, cela affectant gravement ce secteur important de l'économie québécoise.

Est-ce que le ministre ou le secrétaire parlementaire peut nous dire si le dossier du bannissement de l'amiante a été abordé lors de la rencontre du ministre avec le ministre du Commerce extérieur français la semaine dernière à Paris?

[Traduction]

M. Julian Reed (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, le secrétaire d'État français à la Santé rencontre le premier ministre cet après-midi même. J'ignore quel est l'ordre du jour du premier ministre, mais je sais que des discussions ont eu lieu, qu'elles se poursuivent et qu'elles continueront.

Le Québec a joué un rôle important, en coopération avec le gouvernement du Canada, et nous allons continuer à travailler jusqu'à ce que ce problème soit réglé à la satisfaction de tous.

*  *  *

LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, le ministre du Développement des ressources humaines parle de l'après-LSPA et je m'en réjouis, car l'actuel programme LSPA est l'exemple même d'objectifs confus, de mauvaise gestion et de buts non atteints.

Quatre ans après sa mise en oeuvre, quelle assurance le ministre peut-il donner aux pêcheurs, aux travailleurs des usines de transformation de la côte Est et aux membres de leur famille que le nouveau programme ne se fera pas couper les vivres par le ministre des Finances? Peut-il aussi nous faire savoir quand il sera annoncé?

L'hon. Pierre S. Pettigrew (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il est très injuste, je crois, de dire que le programme s'est fait couper les vivres. Le programme disposait de 1,9 milliard de dollars et avait été instauré pour aider les pêcheurs à traverser la très difficile période de la crise de 1993. Je ne crois pas qu'on puisse dire qu'on a coupé les vivres alors qu'on a mis en oeuvre un programme de 1,9 milliard de dollars.

Nous nous montrons très responsables à l'heure actuelle. Nous examinons très attentivement les besoins des collectivités et des pêcheurs. Nous consultons les provinces intéressées afin de nous assurer de relever le mieux possible les défis de l'après-LSPA.

*  *  *

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, peut-être bien que je perds mon temps, mais je voudrais savoir du président du Conseil du Trésor quelles mesures de sécurité il a prises pour s'assurer que des renseignements du genre ne serviront plus jamais à des fins illégales, comme cela s'est déjà vu.

Je voudrais savoir quand il a appris cette fuite venant de son bureau et ce qu'il a fait et entend encore faire à cet égard.

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, on a déjà répondu à toutes ces questions.

*  *  *

LE SÉNAT

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, quand? Le 19 octobre. Où? En Alberta. Qui? Aucun candidat ne peut être un représentant plus responsable envers la population qu'un sénateur choisi par les Albertains. La seule question qui reste est «pourquoi?»

Le gouvernement respectera-t-il la volonté des Albertains ou laissera-t-il le vice-premier ministre absorber l'onde de choc pour n'avoir pas nommé la personne dûment choisie le 19 octobre?

 

. 1500 + -

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en posant une question comme celle-là, le député porte atteinte à sa propre crédibilité. Comment une personne peut-elle rendre vraiment des comptes à la population de l'Alberta si elle est élue à vie? C'est insensé.

*  *  *

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE PROJET DE LOI C-3—DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Je suis prêt à rendre une décision. Plus tôt aujourd'hui, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough a soulevé une question de privilège concernant l'accès aux documents relatifs à l'étude effectuée par le Comité de la justice du projet de loi C-3, Loi sur l'identification par les empreintes génétiques.

Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough a soutenu que le ministère de la Justice avait accepté de fournir certains documents aux membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Il a ajouté que des groupes de l'extérieur avaient apparemment obtenu les documents vendredi dernier tandis qu'il ne les avait reçus que ce matin. Selon lui, c'était une atteinte à ses privilèges de député.

[Français]

J'aimerais remercier tous les députés qui ont pris part dans les débats plus tôt aujourd'hui.

[Traduction]

Des échanges ont permis de constater que la distribution de ces documents avait effectivement rencontré des difficultés. La Chambre a été informée que la ministre avait offert les documents au comité par simple courtoisie et non à la suite d'une demande officielle du comité. Il semble que le ministère ait réellement essayé de transmettre rapidement l'information aux membres du comité. De toute évidence, il y a eu des problèmes.

Je comprends la déception du député, mais je ne vois pas en quoi cela constitue une atteinte à ses privilèges. Cela pourrait faire l'objet d'une plainte au sujet de la lenteur de la distribution des documents, mais il ne me semble pas y avoir là matière à question de privilège.

*  *  *

RECOURS AU RÈGLEMENT

LE DÉPÔT DE DOCUMENTS

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, je crois comprendre que je dois avoir le consentement unanime de la Chambre pour déposer la résolution du gouvernement ontarien de Mike Harris au sujet du dossier de l'hépatite C. J'aimerais, monsieur le Président, avoir le consentement unanime pour déposer cette résolution à la Chambre aujourd'hui.

Le Président: Y a-t-il consentement unanime pour permettre à la députée de présenter la motion?

Une voix: Non.



AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

NOMINATIONS PAR DÉCRETS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il me fait grand plaisir de déposer aujourd'hui à la Chambre, dans les deux langues officielles, des décrets annonçant des nominations faites par le gouvernement. Conformément au paragraphe 110(1) du Règlement, ces décrets sont réputés avoir été renvoyés aux comités permanents pertinents, énumérés en annexe.

*  *  *

 

. 1505 + -

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à cinq pétitions.

*  *  *

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES ET CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le deuxième rapport du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées.

Conformément à l'ordre de renvoi du mardi, 17 mars 1998, votre comité a examiné le projet de loi C-19, Loi modifiant le Code canadien du travail (partie I), la Loi sur les déclarations des personnes morales et des syndicats et d'autres lois en conséquence, et a convenu d'en faire rapport avec une proposition d'amendement.

*  *  *

PÉTITIONS

LE CRTC

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai en main une pétition signée par bon nombre des électeurs de ma circonscription et d'autres signataires de la région de la Capitale nationale qui demandent au Parlement de revoir le mandat du CRTC et de demander à cet organisme de prévoir une nouvelle politique encourageant la délivrance de licences à des radiodiffuseurs religieux.

LE PARC PROVINCIAL D'IPPERWASH

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le plaisir de présenter une pétition demandant la tenue d'une enquête publique sur l'affaire d'Ipperwash. Cette pétition a été signée par un bon nombre de résidents de la province de l'Ontario. Compte tenu de la gravité de l'affaire et du grand nombre de questions qui restent toujours sans réponse dans le cas du meurtre de Anthony Dudley George le 6 septembre 1995 au parc provincial d'Ipperwash, les pétitionnaires exigent la tenue d'une enquête publique de manière à lever toute suspicion entretenue par les gouvernements, la Police provinciale de l'Ontario et la population de Stoney Point ou à leur égard.

LE SERVICE DE TRAVERSIER DE TERRE-NEUVE

M. Gerry Byrne (Humber—St. Barbe—Baie Verte, Lib.): Monsieur le Président, conformément aux articles pertinents du Règlement, j'aimerais déposer une pétition concernant le service de traversier dans le golfe de Terre-Neuve. Je veux dire un mot sur cette pétition.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de respecter l'obligation constitutionnelle du Canada et de Terre-Neuve de fournir un service de traversier public essentiel entre la province de Terre-Neuve et du Labrador et la partie continentale du Canada. Les pétitionnaires demandent au Parlement du Canada d'adopter une loi qui assurera un niveau de financement adéquat pour ce service, et qui fera en sorte que ce service soit effectivement considéré comme un service essentiel, de façon à être assuré en permanence.

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter une pétition signée par un certain nombre de Canadiens, y compris des résidents de ma propre circonscription, Mississauga-Sud.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que gérer la maison familiale et s'occuper d'enfants d'âge préscolaire est une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur par la société.

Les pétitionnaires soulignent aussi qu'ils sont d'accord avec la déclaration renfermée dans l'ébauche de rapport du Forum national sur la santé, portant que la Loi de l'impôt sur le revenu est discriminatoire envers les familles qui choisissent d'assurer une présence parentale directe aux enfants d'âge préscolaire à la maison, puisqu'elle ne reconnaît pas les coûts réels liés au fait d'élever des enfants.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de prendre des mesures afin d'éliminer la discrimination fiscale à l'égard des familles qui décident d'assurer une présence parentale directe aux enfants d'âge préscolaire à la maison.

*  *  *

[Français]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, on répondra aujourd'hui à la question no 92. .[Texte] L'hon. Lorne Nystrom:

    Compte tenu des récentes modifications apportées à la convention fiscale entre les États-Unis et le Canada, qui rétablit l'exonération fiscale accordée par le ministère fédéral du Revenu des États-Unis à tous les Canadiens qui ont touché des prestations de sécurité sociale ou une pension de retraite des chemins de fer des États-Unis en 1996 et 1997, quelles mesures le ministre du Revenu national a-t-il pris pour faire en sorte que les bénéficiaires admissibles obtiennent en remboursement rapide des impôts payés en trop qui ont été prélevés pour les années d'imposition 1996 et 1997?

L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre du Revenu National, Lib.): Revenu Canada a déjà complété les redressements pour 1996 pour la majorité des clients qui reçoivent les prestations de sécurité sociale des États-Unis et pour qui la modification à la convention fiscale est avantageuse. Le ministère est en train de faire les arrangements avec l'Internal Revenue Service pour obtenir les détails de la retenue de l'impôt sur les prestations de sécurité sociale pour 1997 et commencera les redressements pour les clients qui ont droit à un remboursement aussitôt que les renseignements seront disponibles.

[Français]

M. Peter Adams: Monsieur le Président, je suggère que les autres questions soient réservées.

[Traduction]

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

Voici une autre occasion que j'offre au secrétaire parlementaire d'informer la Chambre de la date à laquelle on pourrait s'attendre à une réponse à la question no 21. À maintes reprises je me suis levé pour demander quand, et non pas si, on aura une réponse. Nous sommes très perplexes devant la sorte de questions qu'on pose à la Chambre par rapport à cette question précise.

De nouveau, je demande au secrétaire parlementaire de nous dire à quel moment nous pouvons espérer recevoir une réponse.

 

. 1510 + -

M. Peter Adams: Monsieur le Président, je répète que je comprends la préoccupation du député. Je crois que nous avons répondu à bien plus de 60% des questions. Je vais m'informer au sujet du statut de la question no 21, comme je l'ai fait la semaine dernière.

Le Président: Est-ce que toutes les autres questions restent au Feuilleton?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR L'IDENTIFICATION PAR LES EMPREINTES GÉNÉTIQUES

 

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques etmodifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence, dont le comité a fait rapport avec propositions d'amendement, et des motions du groupe no 1.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais parler brièvement du projet de loi C-3 qui concerne l'identification par l'ADN. J'ai amorcé mes observations avant la période des questions.

Pour ceux qui nous regardent, je dirais qu'il serait utile de considérer cette mesure comme l'équivalent pour les années 90 de la loi sur les empreintes digitales. C'est ce que l'on faisait avec les empreintes digitales lorsque c'était la méthode la plus moderne d'identification des personnes qui avaient été sur les lieux d'un crime. Toute personne condamnée devait donner ses empreintes digitales et celles-ci étaient versées au registre où elles restaient à jamais. Par conséquent, il était possible de trouver les récidivistes. Le débat sur le projet de loi C-3 devrait essentiellement reproduire les efforts faits à l'époque, j'imagine, pendant les débats similaires sur les empreintes digitales.

On comprendra en général pourquoi nous approuvons ce projet de loi. Il permettra à la police de prélever des échantillons d'ADN. Un tel échantillon pourrait se révéler très utile pour inculper un prévenu et le faire condamner. Par ailleurs, il resterait au dossier et pourrait servir si cette personne venait à récidiver. Pour toutes ces raisons, il est facile d'appuyer le projet de loi.

Ce qui est regrettable, comme je le disais avant la période des questions, c'est que l'on ne traite pas ces preuves de la même façon que l'on traite la prise des empreintes digitales. Je m'explique.

Lorsque la police inculpe quelqu'un d'une grave infraction, en vertu des règles actuelles, la personne est amenée au poste de police et, une fois l'inculpation portée, on prend ses empreintes digitales. Celles-ci seront versées ou non au registre permanent, selon que la personne est condamnée ou non. De toute façon, on prend les empreintes digitales. Si la personne est condamnée ses empreintes sont versées au registre permanent, avec une photo et d'autres renseignements.

Le projet de loi C-3 ne va pas aussi loin. Il ne permet pas à la police de prélever les empreintes génétiques au moment de l'inculpation, sauf s'il s'agit de délinquants désignés dangereux. Malheureusement, ça veut dire que la preuve qui devrait faire partie des pièces à conviction versées au dossier de cette personne n'est pas nécessairement mise à la disposition de la police à tous les stades.

Il est important de noter que, dans ce premier groupe d'amendements que nous examinons, il y en a certains que nous devons appuyer et d'autres que nous devons rejeter.

En ce qui a trait à la motion no 1 concernant la protection de la vie privée, nous comprenons la nécessité de conserver la preuve génétique, tout comme dirons-nous sont conservées les empreintes digitales, et l'importance de veiller à ce que cette preuve ne soit pas divulguée au public. Il ne serait pas correct de faire un prélèvement, et de permettre que les données ne tombent entre les mains du public, à cause de la mauvaise gestion des dossiers ou de la négligence de la police ou des tribunaux. La preuve génétique devrait rester entre les mains de la police qui l'utilise dans le cadre de son travail.

Cette première motion est inutile étant donné que le projet de loi tient déjà compte du risque que la preuve génétique ne tombe aux mains du public. L'utilisation de cette preuve à des fins non prévues par la loi constitue une violation des droits de l'intéressé et de la protection de sa vie privée.

 

. 1515 + -

Le projet de loi contient déjà une disposition prévoyant une peine d'emprisonnement maximale de deux ans pour toute personne reconnue coupable d'avoir communiqué volontairement ou sciemment les résultats de l'analyse génétique à des fins non prévues par la loi.

Autrement dit, toute personne qui vend des échantillons de substances corporelles, les donne ou s'en sert à des fins non prévues par la loi, commet une infraction criminelle comme celle qui communique des preuves figurant dans les dossiers de la police maintenant. Ces dossiers sont protégés et devraient l'être pour des raisons évidentes.

Selon nous, la motion no 1 concernant la protection de la vie privée est inutile. Les dispositions du projet de loi à cet égard sont satisfaisantes. Elles sont adéquates et tiennent compte de la nécessité de protéger la vie privée lorsqu'on effectue des prélèvements de substances corporelles.

La motion no 2 est facile à appuyer. Cet amendement dit simplement que nous ne voulons pas que des organismes et des laboratoires privés prélèvent des échantillons, etc. Nous voulons exercer un certain contrôle de la qualité sur les échantillons d'ADN. Une seule mèche de cheveu, par exemple, pourrait contaminer ou modifier le processus de prélèvement d'échantillons d'ADN.

Il est important de respecter les normes les plus strictes pour qu'il n'y ait pas de contamination, pour éviter qu'un dossier soit traité de façon inappropriée ou mal interprété. En d'autres termes, il faut respecter les normes les plus élevées, car on a littéralement la vie de quelqu'un entre les mains. La personne en question pourrait être condamnée à perpétuité si on ne suit pas la procédure appropriée.

Nous aimerions qu'un organisme gouvernemental s'occupe de cela. Ce n'est pas parce que les organismes gouvernementaux ont un bilan parfait, comme on a pu le constater dans le cas de l'hépatite C, dont on discute à la Chambre dernièrement. Ce qu'on peut faire avec un organisme gouvernemental, c'est imposer des restrictions, des lignes directrices et un contrôle de la qualité pour veiller à ce qu'il n'y ait pas d'erreurs dans le traitement des échantillons d'ADN.

Un seul organisme est responsable. Il y a un ensemble de règles. Il s'agit d'un organisme sans but lucratif et c'est la meilleure façon de veiller à ce qu'on respecte les normes. Il est facile de souscrire à la motion no 2 et c'est ce que nous allons faire lors du vote, plus tard.

La motion no 3 vise à s'assurer que les données génétiques ne tombent pas entre de mauvaises mains. Là encore, c'est le même argument utilisé dans le cas de la motion no 1. Il est question d'éviter que des personnes qui n'y sont pas habilitées aient accès à la banque de données génétiques. Nous voulons veiller à ce que seules des personnes compétentes, qui ont le droit de manipuler ces échantillons, y aient accès.

Là encore, nous croyons qu'il y a des garanties suffisantes en place et nous ne pensons pas que cette troisième motion tendant à créer une nouvelle série de garanties est nécessaire.

Le dernier amendement au sein de ce groupe, la motion no 5, parle d'un examen du processus tous les trois ans. À première vue, cela semble une bonne idée. C'est peut-être même nécessaire.

Le gouvernement va réexaminer ce projet de loi si on l'adopte sous sa forme actuelle. Si le gouvernement n'adopte pas les amendements que nous présentons, on devra réexaminer cette mesure. Il ne s'agira pas d'examen obligatoire prévu après trois ans. On se penchera à nouveau sur cette mesure, car elle ne fonctionnera pas bien.

L'Association canadienne des policiers a déjà dit qu'elle n'était pas satisfaite du libellé de ce projet de loi. Elle réclame certaines modifications. Elle veut donner aux policiers les outils nécessaires pour s'acquitter de leur travail.

Il faut espérer que certains de ces amendements seront adoptés. Je ne crois pas alors qu'on aura besoin de cet amendement. L'examen après trois ans ne sera pas nécessaire. Il s'agira de donner du travail à un Comité de la justice très occupé, mais je ne pense pas que cela sera nécessaire, si les amendements sont adoptés.

Nous serons intéressés d'entendre ce que le gouvernement a à dire durant le débat pour voir si certains de ces amendements vont être adoptés. Dans la négative, un examen sera peut-être nécessaire. Je pense que cela se produira, qu'on le demande ou on l'exige dans la loi, ou que cela se fasse naturellement.

Malheureusement, cet examen aura lieu, vous pouvez m'en croire, si le gouvernement n'adopte pas les amendements que les réformistes et d'autres ont présentés aujourd'hui.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais simplement signaler à l'intention des personnes qui nous écoutent à la maison que je suis en principe favorable à l'établissement d'une banque de données génétiques. Ça me semble tout à fait sensé.

Quand la technique fondée sur l'identification par empreintes digitales a été utilisée pour la première fois, elle a permis de résoudre beaucoup de crimes jusqu'alors insolubles. Le fait de posséder notre propre banque de données génétiques nous dotera des outils technologiques indispensables pour résoudre les crimes que nous ne pouvons pas résoudre en ce moment. C'est donc, en principe, une bonne idée. Mais l'ennui avec le projet de loi C-3 tel qu'il est actuellement, c'est qu'il ne donne pas au gouvernement autant de moyens dont celui-ci disposerait si l'on adoptait certains amendements que proposent les députés du Parti réformiste et d'autres députés en face pour résoudre ces crimes et jeter les coupables en prison.

 

. 1520 + -

Dans le premier groupe d'amendements, les motions nos 1, 2, 3 et 5, soit le premier amendement présenté par un député du Bloc québécois, il est question de la protection des renseignements personnels. Je ne pourrai malheureusement pas appuyer mon collègue du Bloc québécois parce que nous serions ainsi empêchés d'avoir accès à des renseignements dont nous pourrions avoir besoin.

Même s'il s'agit ici d'assurer la protection des renseignements personnels, j'aurais parfois du mal à regarder la victime d'un viol dans les yeux et à lui expliquer que, à cause d'une lacune qui se serait glissée dans cet amendement, en raison d'un détail technique, son agresseur a dû être remis en liberté. Par conséquent, je ne vais pas pouvoir souscrire à la motion no 1 que propose le député bloquiste.

La motion no 2, qui est présentée par un député néo-démocrate, vise à empêcher des organismes et des laboratoires privés de faire de tels prélèvements et à fixer des normes aux organismes publics, notamment pour assurer une plus grande exactitude des tests. Je suis d'avis que c'est au gouvernement de s'occuper de ces substances et de ces données. Je ne voudrais pas qu'elles tombent dans les mains du premier venu. J'appuie donc la motion néo-démocrate.

La seule réserve que j'ai à l'égard de cette motion c'est que j'espère que, si un jour les laboratoires privés sont plus perfectionnés que les laboratoires publics dans l'identification par les empreintes génétiques et la collecte de données génétiques, cela n'empêchera pas d'utiliser les techniques plus avancées à la disposition des laboratoires privés. Je pense que ce serait une catastrophe si nous empêchions la justice d'avoir accès aux techniques perfectionnées disponibles dans le secteur privé, mais pas encore dans le secteur public. C'est la seule réserve que m'inspire cette motion néo-démocrate, la motion no 2.

La motion no 3 vise à empêcher que des personnes indésirables aient accès à la banque de données génétiques. Elle est dans le même ordre d'idées que la première motion. Elle vient également de mon collègue bloquiste. Nous devons protéger la vie privée et faire en sorte que ces renseignements demeurent confidentiels. Ils doivent servir presque exclusivement à des fins d'enquête criminelle et seules les personnes qui travaillent dans ce domaine peuvent y avoir accès.

La motion no 5, qui est la dernière de ce groupe, est essentiellement considérée comme une modification visant à créer de l'emploi puisqu'elle prévoit un examen triennal. Si nous arrivons à faire adopter certains des amendements concernant la banque nationale de données, nous n'aurons pas à nous préoccuper de revoir la loi si souvent car elle sera réussie dès le départ.

En ce qui concerne les grandes lignes de ces quatre motions du premier groupe et l'incidence qu'elles ont sur l'ensemble du projet de loi, nous cherchons à établir un système d'enregistrement nous permettant de retrouver ces contrevenants, ces criminels violents, de les traduire en justice et, si possible, d'obtenir un verdict de culpabilité. Aux termes du projet de loi C-68 sur les armes à feu, le gouvernement ne voit aucun inconvénient à enregistrer les citoyens respectueux des lois; il ne devrait pas voir d'inconvénient à aller au delà de ce que propose le projet de loi C-3 et à donner aux agents de police les outils nécessaires pour leur permettre d'obtenir un verdict de culpabilité.

Certaines de ces suggestions nous ont été faites par l'Association canadienne des policiers. Ce n'est pas seulement le Parti réformiste qui demande aujourd'hui à la Chambre des pouvoirs et des compétences accrus pour que la banque nationale des données génétiques soit plus efficace.

 

. 1525 + -

Les policiers et l'organisme qui les représente, l'Association canadienne des policiers, demandent aussi certaines de ces choses.

Voilà pourquoi certains des amendements proposés doivent être adoptés et pourquoi la banque de données génétiques doit être aussi efficace que possible. Cela permettrait de réduire les coûts d'application de la loi et de faciliter la condamnation des criminels. Les organismes responsables de l'application de la loi seraient plus efficaces. Nous sommes en faveur de la sécurité publique. Nous croyons que les Canadiens doivent se sentir en sécurité. Gardons-nous de leur donner un faux sentiment de sécurité et faisons en sorte que le projet de loi soit le plus efficace possible.

Nous n'acceptons pas de priver la police, que ce soit la GRC ou les forces policières municipales, des moyens dont elle a besoin pour mener à bien les enquêtes concernant les actes criminels et autres infractions au Code criminel.

L'utilisation des empreintes génétiques constituera certainement le changement le plus marquant apporté au système judiciaire relativement à l'obtention de la preuve, depuis l'introduction de la méthode d'identification par empreintes digitales. Les huiles des empreintes digitales permettraient sans doute d'en tirer de l'information à des fins d'identification génétique. Toutefois, la méthode d'identification génétique ne se limite pas à l'utilisation des huiles sécrétées par les doigts et la peau, mais permet aussi l'utilisation de cheveux et de poils et, dans les cas de crimes sexuels, d'échantillons de sperme et de sang. Nous pouvons maintenant avoir recours à ces moyens. Personne au monde ne peut avoir le même ADN que celui que laisserait un criminel sur les lieux de son crime.

L'idée générale du projet de loi est bonne, mais les demi-mesures ne suffisent pas. C'est pourquoi il est nécessaire d'y apporter des améliorations. L'utilisation des empreintes génétiques innocentera les personnes injustement accusées. En fin de compte, l'utilisation des empreintes génétiques sera bénéfique pour les personnes innocentes puisqu'il sera d'autant plus aisé d'établir qu'elles n'étaient pas sur les lieux d'un crime.

Je voudrais faire une mise en garde au gouvernement. Nous nous posons des questions fondamentales au sujet des conséquences, nous nous demandons qui souhaite ce système et nous posons d'autres questions que j'ai déjà soulevées à la Chambre. Si nous n'apportons pas des amendements au projet de loi pour rendre le système le plus efficace possible en élargissant la gamme des substances pouvant être prélevées à des fins d'identification génétique, des criminels pourront continuer de circuler en toute liberté. Ces individus ne doivent pas rester en liberté.

Qui souhaite la mise en oeuvre du système? Bien entendu, les agents de police qui appliquent la loi et ceux qui veulent que justice soit faite, mais également les victimes, pour empêcher leurs agresseurs et les personnes violentes de circuler en toute liberté.

Nous devons adopter certains de ces changements, dans l'intérêt des victimes, pour l'Association canadienne des policiers, pour les agents de police et pour les honnêtes citoyens qui veulent que justice soit faite. N'adoptons pas le projet de loi C-3 sans l'examiner à fond et avant de le rendre le plus efficace possible.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de traiter du projet de loi C-3 et des amendements du groupe no 1 concernant l'identification génétique.

J'aimerais croire que les Canadiens sont préoccupés avant tout par les problèmes de santé et de sécurité. Des questions extrêmement personnelles nous viennent à l'esprit lorsque nous commençons à songer à ces problèmes. Il convient de s'éloigner un instant de notre système de justice pénale et de parler de notre régime de santé, pour montrer la communauté de vues des gens au sujet de ces questions très personnelles.

Par exemple, nous sommes constamment témoins de percées dans les techniques médicales. Les gens acceptent d'emblée ces techniques. Il est très simple d'assimiler les nouvelles techniques médicales aux conséquences qu'elles ont sur la santé des gens.

 

. 1530 + -

Nous en avons eu de nombreux exemples aujourd'hui. Ce matin, je lisais un article concernant les souris et le cancer, et les deux antidotes qu'on peut allier pour essentiellement priver les tumeurs de sang et les réduire à néant. Cette recherche pourrait éventuellement aboutir à une véritable percée pour les humains. Nous n'aurons aucun mal à convaincre le grand public, les groupes de financement, les dispensateurs de soins de santé ou toute autre personne que tout cela est très bien, que c'est ainsi que les choses devraient se passer et que cela aura d'importantes conséquences positives pour l'ensemble de la société.

Nous sommes favorables à la nouvelle technologie et les gens l'appuient. Nous en comprenons les avantages et nous voulons en bénéficier.

La technologie concernant la prévention de la criminalité a également connu de nombreux progrès. Pourquoi serions-nous donc d'un avis très différent à cet égard? Ce projet de loi me préoccupe vivement, car nous et le gouvernement savons que la population désire l'identification génétique et une banque de données génétiques. Elle veut tout cela. Nous savons maintenant que nous disposons également de la technologie à cette fin.

Le gouvernement a rédigé le projet de loi C-3, que nous débattons actuellement, et il le présente comme une mesure qui répondra aux désirs de la population. Je suis désolé, mais, lorsqu'on fait la lecture du projet de loi, on constate qu'il ne répond pas aux désirs de la population. En fait, il empêche nos agents de la paix de recourir à ce nouveau moyen d'une manière qui sera profitable à la société.

La seule raison que je puisse trouver pour comprendre pourquoi le gouvernement agit ainsi, c'est qu'il fait preuve de cohérence. Nous avons été témoins de cette cohérence dans d'autres aspects des projets de loi sur la justice pénale qui ont été présentés à la Chambre. On l'a vu à la période des questions aujourd'hui. Les bureaucrates du ministère de la Justice savent que le registre des armes à feu comme la loi actuelle le prévoit aura pour conséquence d'accroître la contrebande et de rendre les armes du marché noir plus attrayantes. Empiriquement, nous savons cela depuis des années.

Nous le savions parce que, lorsque le ministre de la Justice a présenté le projet de loi, les médias nous ont dit que ceux qui trempent dans diverses activités illicites étaient reconnaissants au ministre parce qu'ils allaient pouvoir gonfler leur marge bénéficiaire. Ce n'est pas sorcier, mais, malheureusement, le gouvernement a légiféré en obéissant aux diktats de la rectitude politique plutôt qu'en cherchant à obtenir des résultats concrets pour la société.

Ce fut la même chose pour les condamnations avec sursis. Cette loi a été adoptée au cours de la dernière législature. Elle permet aux juges de ne pas imposer de peine d'incarcération pour des motifs divers. C'est peut-être une pratique éclairée, mais pas lorsqu'il s'agit de délinquants sexuels ou de délinquants violents.

Par ses amendements, le Parti réformiste a essayé, à la dernière législature, de faire en sorte que la loi ne s'applique qu'aux délinquants violents et aux délinquants sexuels. Le gouvernement nous a dit que la précision était inutile, puisque c'est ainsi que la loi s'appliquerait. Désolé, mais ce n'est pas ce qui se passe. Nous avons des exemples bien concrets, en chair et en os, de délinquants sexuels violents qui s'en sont tirés sans presque rien: une condamnation avec sursis. Ces gens-là sont dangereux et présentent des risques pour la société. Un grand nombre d'entre eux ont récidivé parce qu'ils n'avaient pas été envoyés en prison.

 

. 1535 + -

On nous propose maintenant une loi sur les empreintes génétiques qui exploitent à peine les possibilités de cette technique. Nous savons que cette loi exige des normes nationales, des lignes directrices sur le contrôle de la qualité et des restrictions.

D'autres technologies apparaîtront du côté de la prévention du crime. Si nous empêchons nos policiers d'utiliser cette technologie, que faisons-nous? Nous refusons-nous les avantages d'autres technologies nouvelles? Une autre technologie nouvelle a déjà fait ses preuves une fois. Elle a de nombreux avantages communs avec les techniques d'identification génétique, mais elle est fondée sur les odeurs. Elle permet de déterminer si une personne s'est trouvée dans une certaine pièce et ce, jusqu'à un mois après l'incident.

J'ai un autre exemple d'utilisation éclairée de la technologie. Je crois que ça s'est passé en Angleterre. Un contrevenant avait dit en cour qu'il n'avait jamais été à un certain endroit, mais on a constaté qu'il y avait des fragments de plantes accrochés à ses vêtements. On a donc comparé un échantillon des feuilles qui se trouvaient dans ses vêtements aux arbres du pays tout entier et constaté que seuls les arbres du lieu où le crime avait été commis pouvaient porter l'empreinte génétique de l'échantillon. C'est une bonne manière non invasive d'utiliser l'identification génétique.

Pourquoi ne pas adopter la meilleure loi possible puisque, de toute évidence, la population y serait favorable, plutôt que de n'avoir qu'une apparence de loi? Je ne sais pas comment bien me faire comprendre. Autrefois, il suffisait de s'adresser à un mécanicien ayant un coffre à outils raisonnablement bien garni pour faire réparer sa voiture. Maintenant, il faut quelqu'un qui est doté de la dernière technologie informatique, avec matériel de diagnostic et tout le tralala. Notre législation doit évoluer avec la société. Dans sa forme actuelle, ce projet de loi ne fait pas le poids.

M. John Reynolds: Madame la Présidente, je ne crois pas que nous ayons le quorum à la Chambre.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il y a maintenant quorum.

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Madame la Présidente, je remarque que certains de mes collègues d'en face considèrent que c'est une perte de temps que d'assister aux débats à la Chambre des communes. J'espère que ça paraîtra dans le compte rendu. Ça en dit long sur leur perception de la démocratie et de son fonctionnement, et c'est représentatif de ce qui s'est passé l'autre soir durant le vote sur l'hépatite C.

 

. 1540 + -

Je prends aujourd'hui la parole sur le projet de loi C-3, Loi sur l'identification par les empreintes génétiques. Nous discutons maintenant du groupe d'amendements no 1 relativement à ce projet de loi.

Mme Marlene Catterall: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Le député sait qu'il n'est pas permis de parler de la présence ou de l'absence de députés à la Chambre des communes.

Comme c'est déjà fait, toutefois, je pense qu'il n'est que juste de mentionner que les membres de son parti sont loin d'être les plus nombreux.

M. Jason Kenney: Madame la Présidente, je suppose que cela n'est pas considéré comme un rappel au Règlement. Je ne faisais pas d'observation à propos des députés d'en face, mais, puisqu'on a soulevé la question, je dirai qu'on trouve habituellement plus de députés sur les banquettes de l'opposition que sur les banquettes ministérielles.

Je réagissais aux propos d'un député d'en face qui s'était écrié que c'est une perte de temps que de demander le quorum. Les députés d'en face estiment que c'est une perte de temps que de participer aux débats en cette enceinte démocratique, la plus importante du pays.

Cela traduit bien leur engagement solide envers la démocratie de représentation, comme on a pu en juger d'après la représentation consciencieuse dont les députés d'en face ont fait preuve lors du vote sur l'indemnisation des victimes de l'hépatite C. C'est honteux.

Il est intéressant de noter que les députés d'en face sont peu disposés à rester ici pour discuter de ce projet de loi important ou des propositions d'amendement au projet de loi C-3 concernant l'identification par les empreintes génétiques.

Le Parti réformiste appuie le principe du projet de loi, qui est de permettre aux forces de police d'utiliser la nouvelle technologie biologique à leur disposition pour établir des preuves permettant de faire condamner des criminels accusés de crimes graves.

Ce genre d'identification par les empreintes génétiques est une chose que le Parti réformiste demande instamment depuis plusieurs années. Il est bien connu que notre parti s'est notamment donné pour mission de promouvoir un système de justice dans lequel les droits des victimes l'emportent sur ceux des criminels.

Dans le cas de toutes ces mesures concernant le Code criminel, les règles de preuve et les règles d'établissement de la peine, nous, les députés, devons établir un équilibre au chapitre des libertés civiles des citoyens pour veiller, d'une part, à ce qu'ils soient condamnés uniquement en conformité avec la règle du droit et avec les principes de la justice fondamentale et, d'autre part, à ce que nous ayons un système de justice qui fonctionne bien et qui jette les criminels en prison.

Trop souvent, nous en arrivons à un déséquilibre. Trop souvent, nous finissons par nous préoccuper davantage des libertés civiles des Karla Homolka de ce monde sans nous préoccuper suffisamment de donner aux agents de police le pouvoir de faire respecter le Code criminel.

Nous nous réjouissons de voir que le gouvernement a enfin réussi à faire un pas dans la bonne direction de l'identification par les empreintes génétiques en proposant le projet de loi C-3, mais nous trouvons que la mesure à l'étude ne va pas assez loin à plusieurs égards.

La motion no 1, qui est proposée par un député bloquiste, a trait au respect de la vie privée. Cet amendement comporte six dispositions qui expliquent en détail les protections que le projet de loi devrait comprendre relativement à la vie privée. Mais cette motion est tout à fait redondante dans le mesure où le projet de loi comprend déjà des dispositions satisfaisantes pour protéger la vie privée des gens par rapport à l'identification par les empreintes génétiques.

Le paragraphe 487.07(1) sur le respect de la vie privée et les paragraphes 487.08(1) et 487.08(2) sur l'utilisation des substances corporelles reconnaissent déjà les préjudices qui pourraient découler d'une utilisation à mauvais escient des données génétiques. De plus, le paragraphe 487.08(4) propose des peines pour quiconque contrevient aux dispositions visant à protéger la vie privée. La motion no 1 est donc redondante, et c'est pour cette raison que nous nous y opposons.

 

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La motion no 2 est proposée par un député du caucus néo-démocrate. Elle vise à interdire la prise d'échantillons par des organismes et des laboratoires privés. Elle limite essentiellement la collecte d'échantillons d'empreintes génétiques au gouvernement, par l'entremise d'organismes publics. Comme cela semble être une protection sensée, nous allons appuyer la motion no 2.

La motion no 3, qui fait partie du groupe d'amendements à l'étude, concerne les protections contre les personnes qui voudraient, de manière illégitime, avoir accès aux informations de la banque de données génétiques, et elle propose l'établissement d'un registre de tous ceux qui veulent avoir accès à ces informations.

Encore une fois, nous trouvons cette proposition redondante, car le projet de loi comprend déjà des dispositions qui empêchent le personnel non autorisé d'avoir accès à des informations génétiques personnelles contenues dans la banque de données.

Enfin, la motion no 5 propose que le Commissaire à la vie privée procède à une enquête afin de garantir que la loi ne porte pas atteinte au droit à la vie privée des Canadiens. Cet amendement semble tout à fait inutile dans la mesure où le projet de loi C-3 habilite déjà le Commissaire à la vie privée à examiner les atteintes à la vie privée dont il est fait état dans les dispositions législatives sur la protection de la vie privée. Voilà pourquoi nous nous opposerons à la motion no 5.

L'important par rapport à tous les amendements proposés au projet de loi C-3, c'est que nos policiers, nos agents de police puissent appliquer la loi sans se heurter à trop de tracasseries administratives, de difficultés et d'obstacles. Nous voulons protéger les libertés civiles des Canadiens et leur droit à la vie privée, mais pas en paralysant ceux qui ont la tâche difficile d'enquêter sur des crimes graves et qui ont besoin de preuves pour poursuivre efficacement et faire déclarer coupables les pires criminels de notre société.

J'attends avec impatience la suite du débat et l'occasion de discuter des prochains amendements au projet de loi C-3.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Madame la Présidente, je suis très heureux de prendre part au débat sur les motions nos 1, 2, 3 et 5 du premier groupe.

Mon intervention portera sur trois points: tout d'abord, la technologie liée à l'ADN; deuxièmement, la question de la vie privée telle qu'abordée dans les motions; et troisièmement, le point qu'a fait valoir le vice-premier ministre pendant la période des questions, à savoir, qu'il faut faire ce qui est bien.

Nous disposons maintenant d'une technologie qui permet aux organismes d'exécution de la loi de découvrir l'identité de l'auteur d'un crime avec une plus grande précision. Bien sûr, il s'agit d'un outil très utile, mais c'est aussi un outil très fiable et très valide. Ce sont là deux critères qui doivent s'appliquer à tous les tests scientifiques.

Si deux scientifiques peuvent examiner le même échantillon et arriver à la même conclusion, nous avons des raisons de croire que le test est fiable, peu importe qui l'administre et à quel moment. C'est aussi un test valide, car il permet de savoir avec précision de qui provient un échantillon. C'est là un outil très utile et nécessaire qui permet d'éviter des erreurs.

Pourquoi cet outil est-il si important pour lutter contre le crime et identifier les criminels? C'est évidemment parce qu'il permet de mieux protéger la société. Nous voulons par-dessus tout être en sécurité dans notre collectivité et avoir des familles heureuses et des rues sûres. Nous voulons pouvoir aller à l'épicerie faire nos courses sans exposer notre vie. Nous voulons que nos enfants puissent prendre l'autobus ou marcher jusqu'à l'école sans qu'ils aient besoin de gardes du corps et le reste. C'est pour cela que cet outil est important. Il sert aussi à protéger les suspects.

Il y a de nombreux exemples de personnes mises en prison pour des crimes qu'elles n'avaient pas commis. L'affaire Milgaard vient tout de suite à l'esprit. Ce n'est que lorsque les tests d'ADN sont devenus disponibles que l'on a pu établir l'innocence de Milgaard. Pendant de nombreuses années, cet homme a été incarcéré parce qu'il n'avait pas été bien identifié. Nous avons ici un outil utile qui devrait être mis à la disposition des organismes d'application de la loi.

 

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Certaines de ces motions concernent la protection de la vie privée. C'est évidemment une question qui nous préoccupe tous. Il n'y a rien de plus important pour une personne que la protection de sa vie privée. En fait, nous avons nommé un commissaire à la protection de la vie privée dont le mandat est de veiller à ce qu'il n'y ait pas d'ingérence inhabituelle, inutile ou inconstitutionnelle dans la vie privée des gens.

Le week-end dernier, nous avons eu, ici même à Ottawa, une discussion sur le commerce électronique. L'Association canadienne de la technologie de l'information et des représentants de grandes entreprises se sont réunis. De quoi ont-ils parlé? Ils ont parlé de la protection de la vie privée. Ils ont parlé de la sécurité de l'information. Ils ont parlé de la sécurité des virements de fonds d'une institution à une autre ou d'un compte à un autre.

Que pouvait-on lire samedi dans le Globe and Mail? On pouvait lire que la CIBC avait eu un problème informatique. Quel était le problème? Plusieurs personnes ont déposé de l'argent en passant par le guichet automatique, mais leur compte n'a pas été crédité de la somme déposée. La banque nous a assuré et a assuré à ces gens qu'elle a un compte rendu de ces transactions et que leur compte sera crédité de la somme déposée. Cet incident fait ressortir à quel point la protection de la vie privée est nécessaire et les mesures prises à cet égard doivent être fiables. Il est essentiel que cela soit prévu dans la loi, et c'est d'ailleurs prévu dans la loi.

Cela va encore plus loin. Nous devons être certains que la communication elle-même est protégée afin qu'elle aille seulement aux personnes qui ont besoin de ces informations. Nous devons reconnaître que ces renseignements sont protégés non seulement contre ceux qui ne devraient pas y avoir accès, mais encore contre ceux qui n'ont ni le droit ni besoin de les utiliser. Le droit à la vie privée doit être protégé, et il l'est. Les amendements proposés sont donc inutiles et je félicite le gouvernement d'avoir fait cela.

Je voudrais passer au troisième point, soit faire ce qui s'impose. Nous devons faire ce qui s'impose. À cet égard, je voudrais vous rappeler une déclaration qui a été faite relativement aux victimes de l'hépatite C. Il faut faire ce qui s'impose. Dans le cas des victimes de l'hépatite C, il faut veiller à ce que les personnes qui souffrent aient des soins qui conviennent. C'est une des questions à débattre.

En ce qui concerne la criminalité dont traite ce projet de loi, il y a trois problèmes. Le premier, c'est la nécessité d'identifier les coupables avec soin et de les punir. Le deuxième, c'est l'identification pour protéger les victimes contre leurs agresseurs, qui pourraient les attaquer de nouveau. Le troisième, c'est la protection de la société dans son ensemble.

D'une certaine façon, quand quelqu'un commet un meurtre, un vol ou un acte violent de tout genre, nous sommes tous indirectement des victimes parce que nous ne savons pas où frappera de nouveau le criminel. Il importe de protéger le reste de la société contre ce genre d'individus.

Que faut-il faire? C'est utiliser la meilleure technologie et les meilleurs outils sur le marché pour identifier ceux qui ont commis un crime afin de protéger d'éventuelles victimes et que les victimes des crimes puissent dire que le coupable a été formellement identifié et puni en conséquence.

Mais cela va encore plus loin. En effet, il faut faire ce que la morale exige. Il faut donner l'assurance à toute la société que la principale préoccupation du gouvernement consiste à fournir à la population un système judiciaire qui soit équitable et des lois qui soient justes. Les lois doivent être justes et punir les fautifs. Cela inspirerait confiance à la population qui ferait confiance à la loi. Qui plus est, l'application de la loi en dépend.

 

. 1555 + -

Nous avons dépensé beaucoup d'argent pour engager des policiers et autres agents de la paix ayant les compétences et la formation appropriées. Nous voulons nous assurer que ces gens comprennent bien la loi, qu'ils en reconnaissent l'importance et qu'ils aient à leur disposition tous les outils nécessaires pour la faire appliquer.

Si nous ne leur accordons pas les outils dont ils ont besoin, nous ne pouvons pas nous attendre à ce que notre système judiciaire réponde aux objectifs pour lesquels il a été créé. En notre qualité d'opposition officielle, nous sommes d'avis que l'identification par les empreintes génétiques est l'un de ces outils. Le gouvernement dira probablement que c'est ce que fait le projet de loi. Il répond à ce besoin, mais ce n'est toutefois qu'un début. Le gouvernement aurait pu faire tellement mieux. Il aurait pu reconnaître intégralement la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques et permettre aux responsables de l'application de la loi d'y avoir recours de façon non équivoque et sans aucune restriction.

Le présent projet de loi est restrictif. Il n'apporte pas beaucoup d'aide. Il amorce la question puis s'arrête en cours de route et ceux qui tentent de faire appliquer la loi disent qu'ils ne peuvent y avoir recours jusqu'au bout et que ce dont ils ont besoin pour obtenir une condamnation leur est refusé.

Un système judiciaire efficace, un bon système judiciaire ne devrait pas fonctionner de cette façon. Un bon service d'application de la loi ne devrait pas avoir à travailler de cette façon. Cela va même plus loin. Cela va même jusqu'au point de reconnaître que pour bien faire ce travail, nous devons nous assurer que la preuve est entière, qu'elle le demeure et qu'elle n'est accessible qu'à ceux qui ont un besoin de la connaître, soit les policiers, les juges et les tribunaux.

Je suis d'avis que ces trois motions du groupe 1 devraient être étudiées de la façon proposée. Nous serions donc contre la première motion, en faveur de la deuxième et contre les motions nos 3 et 5.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Madame la Présidente, toute cette question de l'identification des gens m'intrigue. Heureusement que je n'ai pas de jumeau identique; il y en a assez d'un comme moi. Il ne fait aucun doute que je suis une personne tout à fait unique. Les données génétiques qui serviraient à m'identifier pourraient être comparées à un numéro de série attribué au moment de la fabrication. Elles m'identifient comme un être unique.

Après notre mariage, mon épouse et moi nous sommes établis dans une petite ville de l'Alberta. Certaines de nos connaissances qui vivaient dans une grande ville nous ont dit: «Comment pouvez-vous vivre dans une si petite ville? Tout le monde sait ce que vous faites?» Je leur répondais: «Je n'ai pas honte de ce que je fais, alors, qu'ils apprennent à me connaître.» Je vous raconte cette anecdote, parce qu'elle illustre le principe que nous débattons ce soir et qui sous-tend ce projet de loi sur l'identification par les empreintes génétiques.

Les gens qui n'ont rien fait de mal veulent que ce processus d'identification fonctionne bien, afin d'éviter d'être injustement accusés et inculpés d'un crime quelconque. Par contre, les gens qui ont commis des infractions sont ceux, dans notre petite ville, qui se cachent derrière les rideaux et quittent leur demeure, le soir, afin que personne ne sache ce qu'ils font, car ils ne sont pas fiers de leurs agissements et ne sauraient les justifier devant leur collectivité.

Par conséquent, il y a deux aspects à la question de l'identification. Et cela nous ramène à l'ancienne question du système juridique. Dans tout système juridique, l'identification des criminels vise deux objectifs. Naturellement, comme mon collègue vient de le mentionner, le principe premier de notre système devrait consister à protéger les citoyens respectueux de la loi. À cette fin, il faut pouvoir identifier correctement les membres de notre société qui ne respectent pas les règles du jeu, c'est-à-dire les auteurs d'actes criminels qui menacent la vie, les biens et la sécurité des Canadiens et de leurs familles.

 

. 1600 + -

Ce que nous voulons faire avec ce double objectif d'identification, c'est identifier correctement la personne qui a bel et bien commis le crime. En corollaire, nous voulons en même temps nous assurer qu'on n'identifie pas la mauvaise personne. Autrement dit, nous voulons identifier le coupable plutôt qu'un innocent. Par contre, nous voulons pouvoir faire la preuve que la personne qui est innocente est injustement accusée.

J'ai enseigné les mathématiques et les statistiques pendant un certain nombre d'années et en échantillonnage, par exemple, nous avions des erreurs de type A et des erreurs de type B. Si l'on prélevait un échantillon d'un produit en cours de fabrication et qu'on voulait savoir si le lot devait être approuvé, une erreur consistait à le laisser passer alors qu'il aurait dû être rejeté. L'autre erreur consistait à rejeter le lot quand l'échantillon était conforme aux spécifications.

La nouvelle technologie des empreintes génétiques nous permet de faire cela. Elle nous permet d'identifier les individus d'une façon bien unique. En matière d'activité criminelle, elle est unique parce que les individus qui commettent certains crimes laissent derrière eux des traces évidentes de leur identité. C'est comme si mon numéro d'assurance sociale figurait sur des petits papiers et que, en marchant, j'en laisserais tomber un à tous les trois pieds pour qu'on puisse retracer exactement où je suis allé. Les criminels laissent derrière eux des particules de peau, des cheveux et divers autres morceaux de leur corps. Parfois, ils se blessent et perdent du sang. Il y a bien des façons d'obtenir un échantillon unique qui porte le numéro de série de l'individu.

Il est question ici d'utiliser cette technologie le plus efficacement possible de telle sorte que les agents de la paix puissent identifier correctement les coupables et exonérer les innocents.

Je n'ai que des considérations générales à présenter aujourd'hui au sujet des motions dont nous sommes saisis. Nous devons veiller à ce que la police ait les moyens de s'assurer que les échantillons d'ADN sont prélevés et gardés de telle sorte que le processus d'identification se déroule le plus efficacement possible.

En conséquence, il faut absolument s'assurer que la police peut prélever et garder les échantillons de façon sûre. Certes, il faut aussi se prémunir contre une mauvaise utilisation des empreintes génétiques comme moyen d'identification car, évidemment, on s'empressera d'inventer des moyens de transplanter de l'ADN pour impliquer des innocents. Toutes ces analyses doivent comporter de solides garanties.

Il semble que nous devons parler ici de protéger les innocents et de vraiment s'attaquer aux coupables.

En disant que le sentiment de culpabilité n'est pas le même pour tout le monde, je pensais réellement que nous commettons une erreur en établissant des règles qui favorisent même les accusés. J'ai souvent dit que, si l'on m'accusait à tort d'un crime, je tiendrais à ce que la vérité soit établie. S'il existait au monde une banque de données renfermant les codes d'identification génétique de différents individus et que j'étais accusé d'un crime que je n'aurais pas commis, je serais reconnaissant que le vrai coupable soit trouvé, arrêté et jugé coupable.

 

. 1605 + -

Franchement, je pense que seuls les coupables qui craignent d'être pris voudraient que ces échantillons soient rapidement détruits et que la trace permettant de les identifier disparaisse au plus tôt pour qu'il soit moins probable qu'on les identifie, les accuse et les condamne.

En fin de compte, au nom des Canadiens respectueux des lois, je soutiens qu'il serait souhaitable de renforcer ce projet de loi. Nous voulons qu'il soit assez rigoureux pour donner d'excellents résultats et faciliter l'atteinte de l'objet qu'il propose. Les propos de ceux qui s'opposent et refusent une telle mesure m'importent peu. Ils ont peut-être des raisons de s'opposer, mais je voudrais bien savoir ce qui a priorité pour nous.

Nous parlons tellement des droits à la protection de la vie privée et d'une multitude d'autres droits. Je demande sincèrement à quel moment nous pouvons dire que les droits et la protection des citoyens respectueux des lois viennent avant les intérêts de celui qui a un échantillon d'empreintes génétiques qu'il ne devrait pas avoir? Cela devient secondaire.

Bien sûr, je serais très inquiet si quelqu'un avait mes empreintes digitales ou ma signature génétique et pouvait s'en servir pour me faire du tort. Je veux qu'il y ait des garanties contre cela. Cela ne fait aucun doute. En même temps, n'empêchons pas nos forces policières et nos organisations chargées d'exécuter la loi de faire leur travail.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Conformément à ce qui a été convenu plus tôt aujourd'hui, toutes les motions du groupe no 1 sont mises aux voix, le vote par appel nominal est demandé et reporté.

La Chambre passe maintenant au débat sur les motions comprises dans le groupe no 2.  

[Français]

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ) propose:  

    Motion no 4

    Que le projet de loi C-3, à l'article 9, soit modifié

      a) par substitution aux lignes 22 et 23, page 5, de ce qui suit:

      «(2) Il doit être détruit:»

      b) par adjonction, après la ligne 33, page 6, de ce qui suit:

    «(3) Les paragraphes (1) et (2) s'appliquent également aux renseignements communiqués conformément à la présente loi et qui se trouvent en possession de tout laboratoire ou organisme canadien, fédéral ou provincial, chargé du contrôle d'application de la loi.»

    Motion no 6

    Que le projet de loi C-3, à l'article 10, soit modifié par adjonction, après la ligne 37, page 8, de ce qui suit:

    «(7.1) Le commissaire est tenu de détruire sans délai les substances corporelles entreposées d'une personne après que l'analyse génétique a été effectuée une première fois en vertu du présent article.»

    Motion no 13

    Que le projet de loi C-3, à l'article 22, soit modifié par adjonction, après la ligne 32, page 24, de ce qui suit:

    «(2) L'alinéa 487.09(1)b) de la même loi est remplacé par ce qui suit:

      b) dès que celle-ci est acquittée définitivement de l'infraction désignée et de toute autre infraction qui découle de la même affaire;»

—Madame la Présidente, il me fait plaisir de reprendre la parole et d'essayer de recentrer le débat sur ce qui nous occupe aujourd'hui, c'est-à-dire le projet de loi C-3 et les amendements qui y sont apportés. Cela fait changement de parler de la lune et du soleil.

Le premier amendement apporté est la motion no 4, dans laquelle on parle de destruction des renseignements contenus dans le fichier des condamnés. À l'heure actuelle, on peut lire au paragraphe 9.(1) du projet de loi:

    9.(1) Sous réserve du paragraphe (2) de la Loi sur le casier judiciaire, tout renseignement contenu dans le fichier des condamnés y est conservé pour une période indéterminée.

    (2) Il doit être rendu inaccessible une fois pour toutes [...]

On parle d'inaccessibilité, même dans les cas où il y a annulation de déclaration de culpabilité, absolution de la personne ou encore dans le cas de jeunes contrevenants, mais c'est ici un petit peu plus technique.

En comité, lorsqu'on soulevait cette question et qu'on se demandait pourquoi, au lieu de le rendre inaccessible, on ne détruit pas tout simplement le fichier, on se faisait répondre que c'est compliqué avec l'informatique, qu'on ne savait pas trop, que ce sont des fichiers, que c'est technique, etc. Je n'en revenais pas et d'autres témoins non plus. Si on a la capacité technologique, la technologie et les connaissances scientifiques pour analyser l'ADN, qui est tout petit et qui nous permet d'aller voir au centre même des cellules humaines pour identifier une personne, jamais je ne croirai que nous ne sommes pas capables de détruire des fichiers informatiques.

Alors, la motion no 4 présentée par le Bloc québécois vise justement cela. Au lieu de rendre inaccessible le dossier et de le laisser flotter quelque part dans une banque informatique, ne sachant pas trop ce qui peut en arriver plus tard, détruisons-le et réglons le problème. Enlevons la tentation de réutiliser plus tard ces données informatiques à mauvais escient. C'était le but de la motion no 4.

 

. 1610 + -

On n'a pas inventé la roue. Plusieurs témoins sont venus nous dire: «Un instant, là. La technologie d'ADN est tellement puissante et potentiellement tellement puissante qu'il faut faire en sorte de limiter le plus possible les mauvaises tentations.» Donc, c'était la motion no 4.

La motion no 6 va dans le même sens, et je la cite:

    «(7.1) Le commissaire est tenu de détruire sans délai les substances corporelles entreposées d'une personne après que l'analyse générique a été effectuée une première fois en vertu du présent article.»

Si on fait un prélèvement génétique, qu'il s'agisse de la salive, du sang ou des cheveux, il faut qu'on en ait tiré les informations dont on voulait. Pourquoi garder le cheveu, la salive ou le sang? On a déjà le portrait et les informations dont on avait besoin.

Encore une fois, c'est pour enlever la tentation possible—parce qu'elle est toujours présente—pour faire en sorte qu'il n'y ait pas d'utilisation à mauvais escient des substances corporelles. N'oublions pas que lorsqu'on prend un prélèvement à des fins d'analyse, on est non seulement capable d'avoir plusieurs renseignements sur la personne dont on prend l'échantillon, mais aussi sur sa famille, ses parents, ses enfants et ses frères et soeurs. Plus la personne est proche du côté biologique de celle sur qui on prend l'information, plus on est capable d'aller chercher des informations sur cette personne.

Donc, la motion no 6 va aussi dans le même sens que la motion no 4. Enlevons cette tentation pour éviter qu'on l'utilise à des fins plus ou moins bonnes.

Continuons avec le groupe de motions no 2. La motion no 13 se rapporte à l'article 22 de la page 24 du projet de loi. On parle de l'article 487.09(1) du Code criminel. L'article 22, à l'heure actuelle, se lit ainsi:

    Sous réserve du paragraphe (2), les substances corporelles prélevées sur une personne en exécution du mandat visé à l'article 487.05 et les résultats de l'analyse génétique y afférente sont détruits ou, dans le cas de résultats sur support électronique, rendus inaccessibles une fois pour toutes selon le [...]

Alors, je reviens à ce que je disais au sujet de la motion no 4. Pourquoi, si on a la technologie pour analyser l'ADN, pour voir ce qu'il y a à l'intérieur même d'une personne, faire en sorte de ne pas détruire le fichier informatique qui est là? C'est possible. Au lieu de simplement couper le lien entre M. X et ses données qui flotteraient quelque part dans la banque de données informatiques, détruisons ce qu'il y a dans cette banque de données. Enlevons la tentation.

Assurons-nous que le droit à la vie privée est sacré et sera respecté, non seulement aujourd'hui, mais également dans le futur. Il ne faut pas oublier que le projet de loi qu'on étudie présentement sera en vigueur pour les 5, 10, 15 ou 20 prochaines années, et il ne s'agit ici que d'un précédent qui changera sûrement avec la technologie à mesure qu'elle évoluera, et dieu sait qu'elle évolue rapidement.

Alors, enlevons la tentation pour nous assurer que la vie privée de tous les citoyens et citoyennes de ce pays soit respectée.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre la question qu'elle abordera au moment de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable députée de Winnipeg-Centre-Nord, L'hépatite C.

[Traduction]

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Madame la Présidente, je prends la parole pour un certain nombre de raisons.

Premièrement, j'appuie les motions du groupe no 2 qui ont trait au projet de loi C-3, Loi sur l'identification par les empreintes génétiques. Lorsqu'on discute de ces motions, il convient d'apporter certaines précisions pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent ou qui vont lire le compte rendu du débat. Je fais allusion à certaines remarques formulées plus tôt.

Une question en particulier intéresse tout le monde relativement à ce dossier. Celle-ci a été soulevée à maintes occasions au comité. Le député de Crowfoot et moi en avons discuté. Quelle est la différence entre un échantillon d'empreintes génétiques et les empreintes digitales? Cette question a fait l'objet de diverses réponses. Elle a fait l'objet d'une discussion raisonnée et de questions posées à un grand nombre de témoins qui ont comparu devant le comité de la justice au cours des nombreuses semaines où nous avons étudié le projet de loi.

 

. 1615 + -

Certains ont dit ici aujourd'hui qu'il n'y avait pas réellement de différence, que les empreintes génétiques sont une version moderne des empreintes digitales, à l'approche du nouveau millénaire. Pourtant, il existe une différence très nette qu'il faut mentionner et comprendre. Je n'ai pas encore reçu la décision écrite des juges de la Cour suprême à laquelle on a fait allusion plus tôt lors d'un rappel au Règlement, mais je crois savoir qu'ils sont d'accord avec mon interprétation de la différence entre les empreintes digitales et l'analyse génétique.

Afin d'obtenir la réponse la plus simple possible, j'ai interrogé divers fonctionnaires du ministère de la Justice. Voici ce qu'il en est. Prélever un échantillon génétique équivaut à prélever une partie de la personne. Cette mesure consiste à prélever une partie d'une personne, tandis que lorsqu'on prend les empreintes digitales d'une personne, on prend en quelque sorte sa photo.

Prenons un exemple encore plus concret. Si quelqu'un croit qu'un crime a été commis au 1313 de la ruelle Mockingbird, il peut prendre une photo de la maison. C'est ce que l'on fait en prélevant des empreintes digitales. Par contre, c'est une toute autre histoire que d'accorder aux autorités le pouvoir de pénétrer dans la maison et de prendre des meubles.

Il n'est pas correct de dire que de prélever un échantillon d'empreintes génétiques, même si c'est une technique moderne associée au nouveau millénaire, équivaut à prendre des empreintes digitales. Ce n'est pas la même chose. Il y a atteinte au corps de la personne. Lorsque le député de Charlesbourg parle de la nécessité d'avoir des mesures de protection, c'est pour protéger la personne contre toute intrusion de la part de l'État ou du gouvernement dans ce que cette personne a de plus fondamental.

Je pense qu'il fallait clarifier ce point. C'est un débat intéressant et une question intéressante. Lorsque nous aurons promulgué cette mesure législative et qu'elle prendra forme au cours des trois ou quatre prochaines années, avant que la Chambre n'en soit saisie à nouveau aux fins d'examen, il sera intéressant de voir exactement comment les autorités et les tribunaux vont traiter cette question.

Si je peux m'arrêter sur les questions posées par mon collègue bloquiste, je tiens à dire que je l'appuie en partie. J'ai soumis moi-même un amendement tout à fait semblable que le gouvernement a examiné sérieusement, selon moi.

Je prétendais que les échantillons d'ADN devaient être détruits une fois pour toutes. Mon collègue précise dans son amendement que le fichier devrait être détruit sans délai.

Ce qui est intéressant, c'est que les membres du comité étaient très inquiets lorsqu'ils ont appris que le fichier d'identification génétique d'une personne innocente ne pouvait être complètement détruit. Voici la question qu'on leur a posée: «Pourquoi ne disons-nous pas que ce fichier devait être détruit si la personne est innocente?» Après un instant de réflexion, on nous a répondu que sur l'écran de l'ordinateur, on ne pouvait détruire ce fichier définitivement. On a ajouté que des fragments demeuraient, mais qu'ils ne pourraient servir à rien, qu'il était impossible pour quiconque d'en comprendre la signification.

On nous a dit à je ne sais combien de reprises au cours de ce débat que la technologie avance très rapidement, que nous avons du mal à suivre les progrès scientifiques. Qui peut dire que, si on prend des échantillon d'ADN d'une personne innocente, on les analyse et on les insère dans une banque de données et qu'il en reste des traces, la technologie dans dix ans ne nous permettra pas de réunir ce qui reste de ces données et de déterminer le code génétique d'une personne pour voir si elle a une prédisposition à certaines maladies ou si elle devrait être assurée ou être engagée pour certains emplois.

La motion du député de Charlesbourg a vraiment du bon. Pour cette raison, je vais souscrire aux motions nos 4, 6 et 13 qui offrent toutes des garanties au sujet de la destruction des profils d'identification génétique et des échantillons de substances corporelles.

Pourquoi devrions-nous garder ces échantillons? Mon collège pose une bonne question. Nous vivons dans une ère où les médias s'intéressent beaucoup aux célébrités. On ne peut qu'imaginer combien pourraient rapporter des échantillons de cheveux prélevés sur les lieux de l'accident dans lequel la princesse de Galles a perdu la vie si on les garde dans une banque de données, dans un laboratoire d'échantillons d'ADN au cours des 20 prochaines années. Pourquoi ne pas les détruire? Pourquoi ne pas veiller à protéger les gens et leur vie privée?

 

. 1620 + -

Certains affirment que le projet de loi ne va pas assez loin pour ce qui est de donner aux corps policiers ce qu'ils souhaitent. Il est question alors du pour et du contre du projet de loi et du fond de cette mesure, ce dont je parlerai plus tard.

Aujourd'hui, je tiens à signaler qu'à ce stade-ci, nous ne faisons que discuter des amendements au projet de loi et je ne vais donc pas utiliser plus de temps que nécessaire. En ce qui concerne les amendements du groupe 2, je peux signaler que j'y souscris.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Madame la Présidente, je prends la parole dans le débat sur les motions du groupe no 2. Il y en a trois, toutes proposées par le député du Bloc québécois. J'apprécie sa contribution au comité autant que celle du député néo-démocrate. Ceux-ci se préoccupent beaucoup de cette partie du projet de loi, qui concerne la vie privée et la possibilité d'une utilisation abusive des échantillons d'ADN.

Il faut déterminer si ces amendements sont nécessaires pour protéger non seulement les échantillons mais aussi l'analyse et le profil.

La motion no 6 s'applique au paragraphe 10.(7), qui commence ainsi: «Il est cependant tenu de les détruire dans les délais mentionnés ci-dessous», avant d'énumérer les conditions a), b), c), d) et e). L'amendement de l'honorable député viendrait après e) et se lirait ainsi: «Le commissaire est tenu de détruire sans délai les substances corporelles entreposées d'une personne après que l'analyse génétique a été effectuée une première fois en vertu du présent article.» C'est exactement ce qui est prévu au début de l'article: «Il est cependant tenu de les détruire dans les délais mentionnés ci-dessous» Pourquoi dire la même chose deux fois?

À moins d'avoir mal lu cette disposition ou à moins qu'elle présente un problème d'interprétation, je ne vois pas l'utilité de l'amendement. L'auteur ou les tenants de la motion pourraient peut-être m'en expliquer la logique, mais cette disposition figure déjà au paragraphe 10(7). Je ne comprends pas la motion et j'avoue qu'elle me rend perplexe. Cela vaut aussi pour les deux autres amendements. Des dispositions sont déjà en place pour protéger la vie privée.

Le député néo-démocrate qui vient de parler exprime des inquiétudes au sujet de la protection de la vie privée, ce qui est légitime. Cependant, les experts qui ont témoigné devant le comité ont fourni des preuves probantes que le profil d'identification génétique d'un échantillon ne pouvait servir à rien d'autre. L'échantillon lui-même peut servir à d'autres fins, mais pas le profil. Or, c'est le profil qui est consigné au fichier. Vu la difficulté, sinon l'impossibilité d'extraire le profil du fichier, d'où viennent les inquiétudes? Quel mal peut-il faire? Tout ce qu'on peut faire, c'est comparer un profil à un autre. Si le profil en question est identifié, alors on peut savoir d'où vient l'échantillon.

J'ai de la misère à comprendre les inquiétudes exprimées par les députés alors qu'aucun des témoins qui ont comparu devant le comité n'a exprimé de telles inquiétudes.

 

. 1625 + -

D'aucuns estiment que le prélèvement d'un échantillon d'ADN représente une intrusion. Or, on peut en trouver sur un verre dans lequel quelqu'un vient de boire, sur un mouchoir qu'on vient d'utiliser, sur un coton-tige ou un band-aid collé à un doigt. J'en ai un en ce moment, parce que je me suis coupé le doigt; on pourrait donc obtenir un échantillon de mon ADN si je le jetais à la poubelle.

Des centaines de milliers d'échantillons d'ADN se font prélever tous les ans. On prélève du sang de tous les nouveaux-nés. Chaque fois qu'on va voir le médecin et que celui-ci prélève un échantillon sanguin, cet échantillon est conservé. Nous n'avons aucune preuve d'utilisation à des fins abusives des banques de sang qui existent et croissent à un rythme fantastique—probablement plus rapidement que ne le fera jamais la banque des empreintes génétiques—puisqu'un prélèvement de sang est effectué sur chaque nouveau-né et que chaque fois que nous allons chez le médecin et que, pour une raison ou une autre, une prise de sang est nécessaire, les résultats sont versés dans une banque quelconque.

S'il existait une crainte légitime que quelqu'un n'ait intérêt à mettre la main sur ces échantillons, à des fins d'assurance ou autres, je suis sûr que nous en aurions déjà la preuve. Or, nous n'en avons aucune.

Quand nous parlons de la menace à la vie privée que constitue ce projet de loi et des pouvoirs qu'il confère, je pense que nous devons les analyser à la lumière de la réalité. La réalité, c'est qu'il existe une banque de données énorme liée aux banques de sang. Aucune utilisation à des fins abusives n'a été faite des données concernant ces banques et, contrairement à ce que suggèrent mes collègues, il n'y a pas à craindre une utilisation à des fins abusives des données que contiendrait une banque contrôlée par la GRC.

Rien n'est prévu en ce qui concerne l'utilisation à des fins abusives des échantillons qui se trouvent maintenant dans ces banques. Ce projet de loi prévoit une peine d'emprisonnement de deux ans pour toute utilisation à des fins non prévues par la loi de ces échantillons ou de ces profils. Je pense que la vie privée de l'individu qui doit se soumettre à un prélèvement est bien protégée, certainement plus que la mienne lorsqu'on a prélevé un échantillon de mon sang lors de ma dernière visite chez le médecin. J'ignore où est allé cet échantillon et je n'ai aucune raison de m'inquiéter à ce stade.

Si je ne m'inquiète pas du fait que mon échantillon de sang se trouve consigné dans la banque de données d'une clinique, pourquoi devrais-je m'inquiéter du fait qu'un échantillon de mes substances corporelles se trouve dans une banque de données de la GRC protégée par la loi et par le Commissaire à la vie privée, qui a le droit de procéder à une vérification du fonctionnement de la banque à n'importe quel moment? Pourquoi devrais-je m'inquiéter alors qu'il n'existe pas de telles mesures pour protéger ma vie privée dans le cas des autres banques? Je ne crains pas que les échantillons que j'ai donnés au cours de ma vie soient utilisés à des fins abusives.

Je pense que cette préoccupation est totalement injustifiée. Je respecte les préoccupations qui ont été exprimées par mes collègues et les témoins qui ont comparu devant le comité, mais je voudrais qu'on m'explique le bien-fondé de cette inquiétude pour que je puisse en tenir compte. Je n'ai cependant rien entendu qui m'indique qu'elle soit justifiée. En fait, l'identification est la seule chose que permet d'établir un profil, alors qu'un échantillon comporte effectivement plus de possibilités.

En terminant, je ne crois pas que les échantillons devraient être détruits, car les progrès de la technologie pourraient permettre de mettre au point une méthode d'identification plus efficace et plus précise. Si nous pouvons protéger les échantillons ou si nous pouvons protéger les profils, nous pouvons certainement assurer la même protection aux échantillons en vertu de la mesure législative, compte tenu des dispositions qui s'y trouvent.

 

. 1630 + -

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur cet important projet de loi, qui arrive à point nommé.

Des députés ont fait valoir avant moi que la motion présentée par le député de Charlevoix vise à protéger la vie privée des gens et, en particulier, l'intégrité des échantillons servant à des tests, prélevés dans le cadre d'une enquête policière.

À l'instar du député qui m'a précédé, je me vois dans l'impossibilité, en toute conscience, d'appuyer cette motion. Un chimiste professionnel qui a comparu devant le Comité de la justice pour parler de la capacité des scientifiques de détruire un profil d'ADN a dit que cela n'était pas possible. Le profil d'ADN est constitué de telle façon qu'il figure sur une feuille avec 24 autres profils. Le retrait physique d'un seul profil engendrerait un ensemble désorganisé. Je ne m'exprime certainement pas aussi bien que le professeur, mais si j'ai bien compris, il est physiquement impossible de détruire ce profil. Je suis un peu étonné de l'insistance du député du Bloc par rapport à l'adoption de cette motion.

La motion no 4 du deuxième groupe est la première. Pour des raisons que j'ai déjà soulignées, je suis d'avis qu'il ne serait pas approprié de nous précipiter pour appuyer cette motion.

La motion no 6 a été présentée par le député du Bloc. Cette motion traite de la nécessité pour le commissaire de détruire sans délai les substances corporelles entreposées d'une personne après que l'analyse génétique a été effectuée. Comme d'autres l'ont souligné avant moi, je suis d'avis que ce n'est pas là une nécessité et que l'amendement tel que proposé viendrait contredire l'amendement précédent. Cela ne signifie pas pour autant que le paragraphe 7.1 proposé dans l'amendement contredirait le paragraphe 7.

Le député de Charlevoix aurait dû indiquer dans son amendement que le paragraphe 7 devrait être supprimé si l'amendement était adopté. Dans sa forme actuelle, le paragraphe 7 est clair et suffisant. Il ne serait pas approprié de faire disparaître toutes les autres mesures de protection. Ces mesures sont essentielles à la protection des droits individuels. Elles exigent que le commissaire tienne compte de certains facteurs pour déterminer comment et quand les substances et les profils d'identification seront utilisés.

Ce n'est pas le moment de toucher à ces mesures de protection. Je n'appuierais donc pas cet amendement pour les raisons énumérées.

La motion no 13, qui fait partie de ce groupe, porte sur la nécessité de modifier le paragraphe 487.09 du Code criminel qui traite de l'utilisation des substances corporelles recueillies dans le cadre de procès ou d'autres recours devant les tribunaux, lorsqu'une personne n'a pas été reconnue criminellement responsable. Lorsqu'une personne est acquittée définitivement de l'infraction désignée et de toute autre infraction qui découle de la même affaire, cette personne ne devrait pas faire l'objet d'une autre enquête et le profil d'identification génétique ne devrait pas être utilisé de nouveau.

Cette motion demande la destruction des substances corporelles et la destruction du profil d'identification génétique d'une personne considérée non coupable en raison d'un déséquilibre mental.

 

. 1635 + -

Nous estimons qu'il est important de continuer d'entreposer et de garder ces renseignements et le profil d'un individu, comme la loi le prévoit actuellement. Détruire ces renseignements sur la foi des conclusions du tribunal empêcherait la police d'établir, à l'aide de cet échantillon, que l'individu avait commis l'actus reus. Il appartiendrait au tribunal de déterminer s'il avait formé le mens rea nécessaire, s'il avait l'intention de commettre son acte. La police pourrait au moins mettre un terme à son enquête. Elle pourrait dire qu'elle a le profil d'identification génétique de l'individu qui a commis l'acte. Il s'agit là d'un élément important que cet amendement empêcherait les agents de la paix d'invoquer.

L'article 672 du Code criminel, qui porte sur les ordonnances d'évaluation de l'état mental, autorise les tribunaux à rendre des conclusions précises au sujet de la culpabilité d'une personne et de la question de savoir si elle avait l'intention de commettre son acte. Cet article renferme des dispositions qui visent des personnes réputées non criminellement responsables. Ce n'est ni le moment ni le lieu pour nous de nous ingérer dans ces dispositions, comme le demande cette motion. Elle nuit aux garanties prévues actuellement. Nous ne devrions pas examiner cette question à ce stade-ci.

Les amendements importants qui sont présentés partent des meilleures intentions. L'objectif du député de Charlevoix est très clair: il veut répondre aux préoccupations concernant la protection de la vie privée. Encore une fois, si nous acceptons ces amendements, je crains que nous ne rendions ce projet de loi inutilement encombrant et plus compliqué qu'il ne l'est actuellement.

En adoptant ce projet de loi important et historique, nous espérons donner aux agents de police les moyens dont ils ont besoin pour mener des enquêtes criminelles, surtout dans le cas d'infractions très violentes. Cela aidera les agents de police à résoudre un grand nombre de meurtres qui ne sont toujours pas élucidés. Ce projet de loi donnera à ces agents de la paix un moyen de s'atteler à la tâche très importante de résoudre ces crimes, non seulement pour tenir les personnes responsables de leurs actes horribles, mais également pour permettre aux victimes de tourner la page. Il donnera aux familles des victimes une possibilité de comprendre ce qui s'est passé. Dans la seule province de Colombie-Britannique, il y a 600 cas de ce genre.

J'espère que la démarche que nous amorçons aujourd'hui, en examinant ce projet de loi et en cherchant des façons de l'améliorer et de l'étoffer, aidera les agents de police à s'acquitter des tâches importantes qui leur sont confiées.

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, les motions nos 4, 6 et 13 portent sur la destruction des échantillons d'ADN ou des renseignements relatifs à la banque de données génétiques.

[Français]

La motion no 4 proposée par le député de Charlesbourg est sensiblement la même motion qui a été présentée, sous une autre forme peut-être, et le Comité de la justice l'a déjà rejetée sur un point technique, comme cela a déjà été soulevé par plusieurs députés.

La motion pose des problèmes surtout sur le plan technique, en raison des limites de la technologie qui a été utilisée et qui sera utilisée, parce que l'information concernant un délinquant particulier ne peut être détruite. On a déjà expliqué pourquoi sur le plan technique. Alors, ce que l'on fait, on brise le lien entre l'identification et le profil même. C'est comme si, dans un bottin téléphonique, on enlèverait tous les numéros de téléphone et que l'on aurait toute une liste, au hasard, des numéros de téléphone et des noms des personnes, sans aucun lien. Alors, de cette façon on brisera ce lien.

 

. 1640 + -

La deuxième partie de la même motion porte sur la communication de l'information génétique. Encore une fois, elle est jugée inutile parce que, dans l'article 6 du projet de loi, il est stipulé que le commissaire de la GRC ne peut communiquer des renseignements de la base de données qu'à un organisme canadien chargé de l'application de la loi ou à un laboratoire qu'il juge compétent. C'est déjà prévu dans la loi.

La motion no 6 porte surtout sur la distribution des échantillons génétiques.

[Traduction]

Nous sommes encore confrontés à un problème. L'idée maîtresse de la Loi sur l'identification par les empreintes génétiques est l'établissement d'une banque de données. On ne saurait établir une banque des données si on ne conserve pas les échantillons prélevés, si on détruit les échantillons dès qu'on a établi le profil d'identification génétique et procédé à l'analyse nécessaire. Notre comité a entendu de nombreux témoignages selon lesquels la technologie et l'analyse font des progrès presque chaque jour, sinon chaque semaine.

Par conséquent, si on détruisait les échantillons immédiatement après avoir établi cette unique banque de données, je ferai observer aux députés que nous irions à l'encontre de l'objet de cette mesure législative qui est d'établir une banque de données génétiques qui soit utile aujourd'hui et pour les années à venir.

Il y a donc lieu de conserver les échantillons. Il est important de conserver les échantillons car, compte tenu des progrès accomplis par la technologie, il nous faudra parfois reprendre les tests. Les coûts administratifs qu'entraînerait l'obligation de faire subir un nouveau test à tout le monde seraient énormes. Il faut donc conserver les échantillons d'ADN.

En ce qui concerne la motion no 13, le gouvernement appuie cet amendement. Je crois savoir, pour avoir parlé à un certain nombre de députés, que le Parti réformiste et le Parti progressiste conservateur n'appuient pas cet amendement.

Nous y souscrivons parce que la motion no 13 vise à modifier l'alinéa 487.09(1)b) du Code criminel pour assurer l'uniformité avec les dispositions pertinentes du projet de loi dans sa mouture actuelle.

Le projet de loi C-3 propose la destruction des substances corporelles appartenant à des personnes acquittées. Malheureusement, il ne fait aucune distinction, aux termes du Code criminel, entre les substances prélevées chez des personnes atteintes de troubles mentaux et celles provenant de délinquants ne souffrant pas de troubles mentaux.

Cette motion fera donc en sorte que les substances corporelles prélevées chez toute personne acquittée soient détruites. Voilà pourquoi nous exhortons les députés à appuyer cette motion.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Madame la Présidente, c'est pour moi un plaisir de traiter brièvement du deuxième groupe de motions.

Je crois que le député bloquiste a proposé ces motions avec les meilleures intentions du monde, mais elles ne font rien pour préciser les objectifs du projet de loi.

Selon moi, le grand principe du projet de loi devrait être la protection du citoyen respectueux de loi. Nous devons faire tout notre possible pour protéger ceux qui ont parfois à souffrir des conséquences d'actes criminels.

Je voudrais revenir à mars 1995. Mon propre fils a été victime d'une sauvage agression à Winnipeg. Il a été battu au point d'en être méconnaissable, mais il est resté suspendu entre la vie et la mort pendant quelques jours.

Lorsque j'ai téléphoné à la police, à Winnipeg, pour savoir ce qu'on faisait pour essayer d'appréhender le ou les coupables qui avaient attaqué aussi sauvagement mon fils et un de ses amis, on n'a pas su quoi me répondre. Le même genre d'incident s'était produit au même endroit en octobre, et la victime avait cette fois trouvé la mort. Les policiers avaient l'impression que c'était un autre cas où un gang avait exigé un acte violent quelconque à des gens qui voulaient se faire initier, et tuer quelqu'un faisait partie de l'initiation pour entrer dans cette bande. J'aurais fait n'importe quoi pour attraper cette personne.

 

. 1645 + -

Si, en octobre, la police avait eu une banque de données à sa disposition, elle aurait pu au moins recueillir les empreintes génétiques, à défaut d'appréhender le coupable. Elle aurait pu établir un rapport avec les agresseurs de mon fils. J'aurais appuyé à fond ce genre de chose.

Je conviens avec le secrétaire parlementaire que nous ne pouvons pas prendre une carte et essayer d'en retirer un morceau. Je trouve très important d'avoir une carte quand je me déplace dans tout le pays. Si sur une carte routière une destination était effacée ou un détour nécessaire n'était pas indiqué, je me perdrais et cette carte ne servirait donc à rien. Je pense que c'est la même chose pour cette banque de données. Si nous constituons une banque de données, que nous y inscrivons des données de base pour effacer ensuite les données concernant les personnes accusées à tort, il faut nous attendre à beaucoup de problèmes.

Les projets de loi que nous adoptons à la Chambre ont souvent des objectifs très louables, mais ils ne sont pas assez fermes. C'est un peu comme pour les gens qui planifient un voyage. Ils se fixent un certain délai pour se rendre à une destination. C'est ainsi que je conçois cette banque de données. C'est un autre moyen que nous nous donnons pour être sûrs d'arriver à la destination prévue depuis quelques années.

L'utilisation des empreintes digitales est un bon moyen dont on se sert depuis nombre d'années. Il a été utile à des enquêtes majeures. Nous avons maintenant le moyen supplémentaire qu'est une banque de données génétiques. Nous devrions l'utiliser pleinement. Nous devrions en tirer le meilleur usage possible dans les circonstances afin que les bons citoyens, et non les criminels, soient protégés.

On s'inquiète si souvent du risque de ne pas respecter les droits des criminels. À mon avis, quand une personne a violé la loi, surtout si elle a commis un acte violent ou qui touche la société en général, elle doit en payer le prix. Si la banque de données peut servir à identifier cette personne de manière confidentielle mais permettant de protéger les bons citoyens, on devrait s'en servir pleinement.

C'est très important de réduire le taux de criminalité au Canada. Les statistiques montrent que les crimes violents ne cessent d'augmenter. C'est le cas non seulement dans la société en général, mais dans tous les secteurs particuliers, chez les jeunes, chez les adultes et même parfois chez les personnes âgées. Quand j'entends parler de personnes âgées ayant commis des actes violents, je ne sais pas si c'est leur âge ou leur attitude qui me choque le plus.

Nous avons fait un court séjour aux États-Unis. Là-bas, deux personnes âgées qui jouaient aux cartes sont mortes avant la fin de la partie. On peut se demander comment un couple de vieux amis peuvent, en jouant aux cartes, se mettre tellement en colère qu'ils en viennent à se tuer.

On exagère parfois sur ce genre de choses mais, bien souvent, quand de tels actes criminels se produisent, c'est la police qui doit trouver ce qui s'est passé et aller au fond des choses pour faire éclater la vérité. Si les criminels savent qu'il y a très peu de chances qu'ils échappent à la justice, ce sera déjà dissuasif. C'est important d'impressionner davantage les criminels, pour qu'ils se rendent compte qu'ils seront pris et qu'ils auront une peine à purger. Cela peut annuler les quelques libertés qu'ils exigent en vertu de la Charte des droits. Je préférerais sacrifier un peu du principe des droits et libertés, que du principe de lutte contre le crime, pour que les citoyens pacifiques et respectueux de la loi n'en fasse pas les frais.

 

. 1650 + -

C'est pratiquement devenu un fait accepté que dans n'importe quelle famille quelqu'un sera victime d'un acte de violence. C'est triste. Lorsque j'étais adolescent, c'est quelque chose qui n'arrivait que dans les grandes villes et encore aux autres. J'entends parler que l'on a tiré d'une voiture dans ma petite ville d'Altona. J'entends parler d'un meurtre à Miami relié au trafic de drogues. Il y a quelques semaines, j'apprends qu'un de mes voisins a été victime d'une fusillade parce qu'il était agent d'infiltration de la GRC, et qu'il n'y a aucun indice sur l'identité du coupable.

Je suis donc résolu à faire adopter par cette Chambre des mesures qui faciliteront l'arrestation de ces criminels. Ce projet de loi s'ajoutera aux instruments permettant d'atteindre ce but. Il est important que nous rendions ce projet de loi aussi utile que possible pour appréhender les criminels. Tout le monde a à coeur le respect des droits et de la vie privée. Mais lorsque des personnes innocentes sont victimes d'actes de violence, il devient très important pour nous, en tant que législateurs, que nous adoptions des lois qui protègent les citoyens.

Nous nous devons d'examiner l'expérience d'autres nations, où les lois ont modifié le pays. J'étais en Union soviétique en 1991. J'ai appris qu'il n'y avait dans la ville de Moscou que 40 personnes pour faire appliquer les lois. De quoi avoir peur. Le gouvernement de l'époque avait adopté ses lois par l'intermédiaire du régime militaire. Il n'y avait pas de droit civil, alors que la politique de perestroïka était en route. Le gouvernement n'avait pas de lois nationales pour protéger les citoyens honnêtes. Si l'on regarde l'évolution de l'Union soviétique au cours des dernières années, on constate que les éléments criminels sont devenus beaucoup plus puissants qu'ils l'étaient.

Il est important que l'on donne aux agents de la GRC et autres agents chargés de l'application de la loi une banque de données sur l'ADN qui leur permette d'identifier les gens, pas seulement d'attraper les criminels, mais aussi de protéger ceux qui n'ont rien fait mais qui se trouvaient au mauvais endroit, comme David Milgaard, que j'ai mentionné plus tôt.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Monsieur le Président, je suis d'avis que ce groupe d'amendements, en particulier l'amendement no 4, va au coeur des dispositions du projet de loi C-3.

Pour ceux qui suivent nos travaux, je me permets de rappeler en quoi consiste le projet de loi C-3, qui prévoit l'établissement d'une banque nationale de données génétiques, tenue par le commissaire de la Gendarmerie royale du Canada et destinée à aider les organismes chargés de l'application de la loi à résoudre des crimes. C'est le principal objet du projet de loi C-3.

À mon sens, le groupe d'amendements et en particulier l'amendement no 4 supposeraient l'élimination du fichier contenant les profils d'identification génétique, qui est l'objet précis qui sous-tend tout le projet de loi. Je déclare respectueusement que l'objectif poursuivi en proposant les amendements consisterait peut-être à interdire l'accès abusif ou l'accès par inadvertance au fichier. Il va sans dire que je respecte, j'admire et j'appuie cet objectif. Cependant, le libellé laisse entendre que le fichier même devrait être éliminé. Cela semble contredire l'objet et l'essence mêmes du projet de loi C-3.

 

. 1655 + -

Ce projet de loi prévoit autre chose. Il décrit exactement ce que sera la banque de données. Cette banque sera composée d'un fichier de criminalistique contenant les profils d'identification génétique établis à partir de substances corporelles trouvées sur tout lieu lié à la perpétration de certains types d'infractions graves et d'un fichier des condamnés contenant les profils établis à partir de substances corporelles prélevées sur des personnes déclarées coupables ou absoutes de ces types d'infractions. Nous avons là une indication très nette de ce qui s'impose ici.

L'objet et l'intention qui sous-tendent l'établissement d'un fichier consistent à protéger à la fois la société en général et, en particulier, une personne qui aurait pu être aperçue près du lieu d'un crime, qui n'aurait peut-être pas commis le crime, qui aurait pu paraître l'avoir commis, mais qui ne l'aurait pas commis. La preuve établie en comparant les profils représente un instrument beaucoup plus fiable et permet aux agents de la paix de mieux accomplir leur travail.

Le projet de loi modifie ensuite le Code criminel pour prévoir des ordonnances autorisant le prélèvement de substances corporelles à partir desquelles seront établis des profils l'identification génétique destinés à la banque de données. Il le modifie également pour autoriser le prélèvement de substances corporelles sur des contrevenants qui purgent actuellement des peines et appartiennent à des catégories clairement définies de contrevenants. Cela suppose une collecte obligatoire.

Cependant, même s'il est admirable et va dans la bonne direction, l'objet du projet de loi ne va pas assez loin. Le projet de loi propose de bonnes solutions et va dans la bonne direction, mais il est évident qu'il ne donne pas aux agents de la paix la latitude nécessaire pour user de discernement et recueillir, au moment opportun, les renseignements et les données nécessaires afin de pouvoir inculper le contrevenant à partir des résultats de la comparaison des divers profils d'identification génétique.

Enfin, le projet de loi prévoit des dispositions régissant l'utilisation des substances corporelles prélevées, des profils d'identification génétique établis à partir de celles-ci et de l'information contenue dans la banque de même que la communication de cette information et l'accès qui y est donné.

La motion no 4 traite justement de ce sujet, puisqu'elle touche au paragraphe 9.(2). Ce paragraphe est très clair. Il modifie le Code criminel et rend tout renseignement contenu dans le fichier des condamnés inaccessible une fois pour toutes selon les conditions qui sont énumérées.

L'objectif visé consiste très clairement à limiter l'accès à l'information concernant toute personne accusée mais non inculpée. Les preuves et le profil de cette personne demeureraient dans le fichier, comme il se doit, mais l'accès y serait interdit si la personne n'est pas reconnue coupable.

N'est-ce pas exactement le but de la charte des droits et libertés? La charte tend à protéger la vie privée des citoyens, afin que personne ne puisse exploiter ou utiliser à mauvais escient des renseignements à leur sujet.

Il est crucial que cette disposition figure dans le projet de loi. Toutefois, la motion ne donne pas accès à l'information. Elle détruirait plutôt le fichier lui-même. C'est ce que je reproche à la motion. Je me demande si le député qui a proposé cette motion a vraiment pensé qu'elle aurait pour effet de détruire le fichier au lieu de prévoir des mesures de protection adéquates pour empêcher que des personnes qui pourraient utiliser ces renseignements à leurs propres fins ou à des fins abusives aient accès au fichier.

 

. 1700 + -

Je dirai respectueusement au député qui a présenté cette motion que ce n'est probablement pas le genre de motion qui nous aiderait à atteindre le but visé dans le projet de loi ni notre objectif général, qui consiste à doter le Canada d'un système judiciaire juste et équilibré.

Je veux maintenant revenir à la raison première du profil génétique. Nous avons eu des cas au Canada où des personnes ont été accusées d'avoir commis un crime parce que, dans chaque cas, toutes les preuves semblaient indiquer que la personne avait commis le crime en question, sans qu'on ait toutefois de preuves concluantes. On avait surtout des preuves indirectes. En fait, dans un cas en particulier, ces preuves indirectes étaient si accablantes que même les meilleurs avocats et les meilleurs juges n'ont pu empêcher que cette personne soit reconnue coupable et emprisonnée.

Puis, les gens se sont mis à insister pour dire qu'ils avaient besoin de preuves incontestables pour pouvoir reconnaître que cette personne avait bel et bien commis ce crime. Grâce à l'insistance de ces gens, on a fini par découvrir qu'un élément de preuve plus concret n'appuyait pas les preuves indirectes. Quel élément de preuve a-t-on utilisé dans ce cas pour dissiper le doute? On a utilisé le profil génétique.

Je crois qu'il est absolument essentiel, si nous voulons un système judiciaire qui soit juste et équitable, que nous ayons un outil, le meilleur que la science et la technologie puisse mettre à notre disposition, pour pouvoir identifier les personnes de façon claire et non équivoque. C'est exactement là le rôle du profil génétique.

C'est pourquoi il est essentiel que les policiers soient capables de prélever ces échantillons qui nous donneront le profil génétique exact d'une personne, profil qui est absolument unique et que l'on peut donc distinguer facilement de celui d'une autre personne.

Lorsque ce genre de procédé existe, son utilisation ne devrait pas être limitée de façon arbitraire ou capricieuse. Les modifications proposées dans ce projet de loi sont bonnes en général et méritent d'être appuyées. Mais le projet de loi devrait aller plus loin.

À mon avis, la motion no 4 ne fait que restreindre encore davantage le projet de loi. Je recommande que nous rejetions cet amendement et que nous examinions très attentivement comment nous pouvons améliorer notre système judiciaire au Canada pour que justice soit faite, pour que nos rues soient sûres et pour que les citoyens respectueux des lois soient protégés et récompensés.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, nous parlons maintenant du deuxième groupe de motions. Je veux qu'il soit clair, pour les gens de ma circonscription, de quoi il s'agit. Nous parlons du projet de loi C-3, qui porte sur la banque nationale de données génétiques. Il y a 13 motions. Nous parlons maintenant des motions nos 4, 6 et 13.

En bref, une de ces motions détruirait le fichier des contrevenants reconnus coupables. Le but d'un banque nationale de donnés génétiques est justement de créer un fichier de ces individus.

Je pense que cela va directement à l'encontre de l'objet du projet de loi. Le projet de loi a pour objet de créer un fichier des contrevenants reconnus coupables, et si la motion no 4, proposée par un député bloquiste, vise à éliminer le fichier, à mon avis cela va directement à l'encontre de l'objet du projet de loi.

Mais il y a pire. La motion no 6 propose de détruire les substances corporelles entreposées. Pour établir le fichier, nous avons besoin de ces substances. Le débat n'est pas terminé sur la question de savoir si, une fois qu'on a établi un profil, on a besoin de conserver les substances corporelles car, prétendent certains, une fois qu'on a le profil, on a le profil.

 

. 1705 + -

Je demanderais aux députés de revenir un peu en arrière. Imaginons qu'à l'époque qui a précédé la découverte et la compréhension de la double hélice, on ait eu la capacité de recueillir des substances sur la scène d'un crime, mais sans pouvoir établir les empreintes génétiques, et sans pouvoir procéder à l'analyse génétique des ces substances. Nous ne serions pas capables de dire si elles appartiennent à un contrevenant ou à un criminel donné.

C'est comme si nous étions au bord d'une falaise technologique, à la lisière du meilleur des mondes. Si nous détruisons ces substances, alors que le gouvernement a admis ici même, aujourd'hui, que des chimistes qui ont témoigné devant le comité avaient dit que des progrès se font quotidiennement dans le domaine de l'ADN, dans l'analyse de ces choses sur le plan judiciaire et autres, nous nous débarrasserons de données essentielles à la poursuite des criminels. C'est un crime en soi. C'est ce dont il s'agit dans la motion no 6. Si nous détruisons ces substances corporelles, alors qu'il serait facile de les garder dans les dossiers et de les préserver, tout ce que nous faisons, c'est que nous conservons un profil sous sa forme la plus simpliste.

Étant donné que je ne suis pas chimiste mais simple politicien, je ne saurais dire si dans 10, 15 ou 20 ans la chimie ou l'analyse génétique aura progressé au point où les profils d'identification seront beaucoup plus détaillés qu'ils ne le sont actuellement.

La motion no 13 porte elle aussi sur la destruction des substances corporelles. Cette motion vise à assurer l'uniformité avec les autres parties du Code criminel qui ont trait à la destruction des substances ou des éléments de preuve dans le cas d'un acquittement.

Encore une fois, examinons la question en fonction des victimes et des personnes innocentes qui veulent faire la preuve de leur innocence et qui veulent être acquittées, plutôt qu'en fonction des délinquants.

Il arrive trop souvent que l'on tienne compte des droits des criminels, plutôt que de ceux des victimes dans ces circonstances. Je veux discuter de certains arguments que des députés ont fait valoir ici aujourd'hui relativement au deuxième groupe de motions.

Un collègue réformiste a mentionné un point très juste. D'aucuns disent que si quelqu'un vit dans une petite localité, tout le monde sait ce que tout le monde fait et c'est terrible. En fait, c'est terrible seulement si quelqu'un n'est pas très fier de ce qu'il fait. Tout repose encore une fois sur la question de l'innocence d'une personne.

Si nous avons une banque nationale de données génétiques et si les substances corporelles sont gardées après l'acquittement d'une personne, au lieu du simple profil que l'on peut établir en ce moment—indépendamment de ce que l'on pourra faire dans 10, 15 ou 20 ans—, les seules personnes qui ont quelque chose à craindre sont les criminels. Ce ne sont pas les innocents, puisqu'ils seront libérés.

Cela soulève la question de savoir pourquoi ces personnes s'inquiètent autant de ce que les données génétiques soient conservées pendant plus d'un an ou seulement durant le procès. En fait, la composition de l'index vise à permettre à la police de faire des recoupements pour d'autres crimes.

Un député du Bloc a demandé pourquoi on devrait garder ces substances. D'abord, on pourrait avoir besoin de plus d'échantillons à des fins de vérification. Je le répète, je ne suis pas un expert en la matière. Mais j'estime que s'il y a plusieurs cheveux et divers types de sang sur la scène du crime et si un seul échantillon de cheveu est prélevé, puis détruit, rien ne dit qu'il n'y a pas d'autres échantillons de sang sur ce cheveu. Nous voulons être en mesure de déterminer ce genre de chose, de sorte qu'il importe de conserver les substances corporelles.

Le deuxième point, que j'ai déjà soulevé, a trait aux tests de l'avenir. J'avoue que je ne suis pas le meilleur juge pour déterminer, en ce moment de notre histoire, si la technologie changera et si elle pourra nous permettre de procéder à des tests plus poussés que maintenant.

 

. 1710 + -

Les néo-démocrates ont aussi eu l'occasion de prendre la parole sur ces motions. À leur avis, la conservation des substances corporelles et des banques de données génétiques est une violation de la vie privée. Ils estiment qu'il faut s'interroger sérieusement là-dessus et que la meilleure chose à faire consiste à détruire ces substances.

Le problème est le suivant. Si nous nous inquiétons sans cesse de la violation de la vie privée des criminels, de la solidité de la cause de la défense, nous n'accordons pas la priorité aux droits des victimes plutôt qu'à ceux des criminels. Ainsi, en cas de meurtre ou de viol, pourquoi sommes-nous plus préoccupés par l'intrusion dans la vie des victimes que par l'intrusion dans la vie des criminels dans ces enquêtes?

Il arrive trop souvent que nous nous préoccupions du système de justice pénale, et pas assez des victimes.

Un de mes collègues du Parti réformiste a dit également aujourd'hui que les banques de sang ont connu une expansion qui a dépassé, et de loin, leurs capacités, ce dont il n'y a pas lieu de s'inquiéter pour l'instant pour les banques de données génétiques. Prélever des données pour des crimes ne fait que rendre service aux citoyens respectueux des lois qui veulent que le gouvernement remédie aux injustices.

Les progressistes conservateurs ont soulevé cette question également; c'est le cas, notamment, du député de ce parti qui siège au Comité de la justice. Il a dit que d'après les témoins, la destruction des profils d'identification génétique était une question très complexe, voire impossible.

Avoir 20 profils par page et essayer d'en détruire un et donc risquer de modifier ou détruire une page entière, rendrait inutile la tenue d'un fichier. Je le répète, si on se donne la peine de créer un fichier pour rendre plus efficace l'application de la loi au Canada, pourquoi chercherait-on à y toucher? On devrait vouloir l'avoir. Cela aiderait les forces policières dans les poursuites criminelles.

Certains libéraux ont parlé de façon encourageante de ce groupe de motions en demandant pourquoi détruire des échantillons quand la technologie évoluait de jour en jour ou de semaine en semaine. J'ai fait valoir la même chose, donc je les félicite d'avoir reconnu quelque chose de vraiment valable. Ils ont aussi parlé des coûts d'un ré-échantillonnage et des exigences administratives. Nous ne voudrions pas ajouter d'autres coûts et plus d'administration au fardeau des contribuables. Cela n'a pas de sens.

Je félicite mes collègues d'en face qui voulaient réduire les coûts administratifs du ré-échantillonnage. C'est dommage qu'ils n'aient pas cette idée à l'esprit dans d'autres dossiers.

Un collège réformiste a parlé de toute la question des fichiers. Le fait de chercher à se débarrasser du fichier va à l'encontre des objectifs que vise ce projet de loi et de la justice qu'on y recherche.

Cela dit, je laisse le débat aux autres députés et je dis que nous ne pouvons d'aucune façon appuyer certains de ces amendements, soit les motions nos 2, 4 et 13. Nous allons devoir voter contre ces amendements.

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux moi aussi d'intervenir dans le débat, à l'étape du rapport, du projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques, ainsi que des motions nos 4, 6 et 13.

Comme je l'ai déjà dit, nous appuyons le principe du projet de loi, mais nous trouvons qu'il prévoit trop d'exceptions, d'échappatoires et de formalités administratives pour assurer à nos agents de police le genre de latitude dont ils ont besoin pour que cette mesure importante pour la sécurité publique fonctionne vraiment dans l'intérêt des victimes et des victimes potentielles.

 

. 1715 + -

Nous devrions nous soucier d'abord et avant tout de donner à nos agents de police, à nos procureurs de la poursuite, à nos tribunaux et à notre système de justice tout entier le genre de preuves dont ils ont besoin pour faire condamner les gens coupables de crimes graves, et de veiller à ce que ces derniers ne puissent échapper à la condamnation à cause d'échappatoires dans la loi qui permettraient de détruire des éléments de preuve importants sous forme d'empreintes génétiques ou d'empêcher de les recueillir pour commencer.

Je voudrais parler plus particulièrement de la motion no 4 proposée par l'un de mes collègues du troisième parti. La motion propose de modifier le projet de loi à l'article 9:

      a) par substitution aux lignes 22 et 23, de ce qui suit:

      «(2) Il doit être détruit:»

      b) par adjonction, après la ligne 33, page 6, de ce qui suit:

      «(3) Les paragraphes (1) et (2) s'appliquent également aux renseignements communiqués conformément à la présente loi et qui se trouvent en possession de tout laboratoire ou organisme canadien, fédéral ou provincial, chargé du contrôle d'application de la loi.»

Il nous semble que cet amendement aurait pour effet d'éliminer tout le fichier, de le détruire. Le problème réside peut-être dans la traduction anglaise. Nous ne pouvons pas comprendre pourquoi notre collègue du troisième parti, ou de quelque parti que ce soit, proposerait un amendement aussi général qui aurait pour effet de saper un des objets fondamentaux de la loi, celui de constituer un fichier que l'on pourrait consulter plus tard après que des criminels ont été trouvés coupables des crimes dont ils sont accusés.

Dans son libellé actuel, le projet de loi prévoit la destruction de certains éléments de la preuve. Il définit soigneusement quels éléments du fichier peuvent être détruits. La motion no 4 ne fait aucune distinction. Elle ouvre plutôt la porte à la destruction complète de la liste de tous les délinquants condamnés. Nous ne pouvons pas appuyer une telle mesure. Il nous semble que cette motion, comme l'ensemble du projet de loi, met trop d'accent sur les droits des criminels et pas assez sur les droits des victimes, ce que nous voyons trop souvent dans les projets de loi sur la justice pénale de ce genre.

Je passe à la motion no 6, du groupe no 2. Cette motion est présentée par un de nos collègues du tiers parti. Elle ajouterait ceci à l'article 10, après la ligne 37:

      «(7.1) Le commissaire est tenu de détruire sans délai les substances corporelles entreposées d'une personne après que l'analyse génétique a été effectuée une première fois en vertu du présent article.»

Il est important de conserver les substances pour effectuer de nouvelles analyses médico-légales si de nouvelles techniques sont mises au point. Nous ne pouvons pas prévoir les progrès scientifiques et techniques de l'avenir. Il y a 15, 20 ou 30 ans, les législateurs ne pouvaient pas raisonnablement s'attendre à ce que les policiers et les procureurs disposent des méthodes d'analyse génétique modernes. Ne faisons donc rien qui pourrait empêcher les tribunaux, les procureurs, les policiers et les enquêteurs d'utiliser les nouvelles techniques qui seront mises au point un jour. Conservons les éléments de preuve. Conservons les données dans la banque. Ne détruisons rien inutilement.

J'ignore ce qui peut motiver de telles propositions d'amendement. Pourquoi l'objectif du projet de loi ne pourrait-il pas être de constituer une banque de données génétiques sur les criminels aussi complète que possible, mais respectant le droit à la vie privée des personnes qui ne sont pas condamnées?

N'ajoutons aucune échappatoire de ce genre au projet de loi. Si l'amendement est adopté, des éléments de preuve pouvant un jour servir à condamner des auteurs de crimes de violence pourront être détruits. Nous ne pouvons pas courir un tel risque. Un élément de preuve contenu dans cette banque de données pourrait suffire à empêcher que des personnes deviennent les victimes de criminels violents. Nous devrions opter pour une banque globale de données qui ne détruit pas de preuves sans raison valable.

 

. 1720 + -

Je passe à la troisième et dernière motion du groupe no 2 d'amendements que l'on propose d'apporter au projet de loi C-3, à savoir la motion no 13 du même député du tiers parti. Nous trouvons cette motion difficile à comprendre. Je ne suis pas sûr que le député la comprend. Il pourrait peut-être éclairer un peu plus notre lanterne. Elle vise apparemment à modifier l'alinéa 487.09(1)b) en le remplaçant par ceci:

      «b) dès que celle-ci est acquittée définitivement de l'infraction désignée et de toute autre infraction qui découle de la même affaire;»

Nous ne voyons pas l'utilité de cela. Cet amendement semble dilatoire et frivole et sans utilité. Il ne renforce pas le projet de loi du point de vue de sa portée ou de la taille ou de l'étendue de la banque de données génétiques. Nous ne voyons aucune raison d'appuyer cet amendement et nous allons voter contre.

Pour terminer, je tiens à dire à quel point il importe de ne pas transformer ce projet de loi en passoire de telle sorte que les avocats des criminels arrivent à faire passer leurs clients à travers les mailles du filet et à embrouiller les tribunaux, les agents de police et les procureurs dans des tracasseries administratives conçues par et pour des personnes qui se préoccupent plus des droits des criminels que des droits des victimes.

Nous nous opposons à ces trois amendements et nous allons continuer à exhorter nos collègues des trois partis à appuyer des amendements de nature à faire que ce projet de loi permette l'établissement d'une banque complète de données génétiques sur des criminels reconnus.

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de participer, à l'étape du rapport, au débat sur le projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence.

Nous examinons maintenant le groupe de motions no 2, qui comprend les motions 4, 6 et 13. Comme mon collègue vient de le dire, nous nous opposerons à ces trois propositions d'amendement.

Le premier amendement propose de détruire les renseignements contenus dans le fichier des condamnés. Nous appuyons l'objectif du projet de loi, mais il faut modifier ce dernier pour faire en sorte qu'il soit d'abord et avant tout efficace pour les policiers et l'ensemble des Canadiens. Lorsqu'on prend des empreintes digitales, celles-ci ne sont jamais détruites. Lorsqu'on détermine le groupe sanguin de quelqu'un à sa naissance, les données à ce sujet ne sont jamais détruites. À l'instar des députés de mon parti, je n'arrive pas à comprendre pourquoi on voudrait détruire un fichier de données génétiques.

La motion no 6, aussi proposée par le Bloc, préconise la destruction des substances corporelles. Il est très important, notamment dans le contexte scientifique actuel, de ne pas détruire ce que nous avons en notre possession. Il est arrivé trop souvent, ces dernières années, que des gens soient trouvés coupables grâce à des preuves fondées sur les empreintes génétiques. Des crimes ont été élucidés après que des personnes eurent passé des années en établissement carcéral parce que, grâce à la nouvelle technologie, on a pu prouver le véritable auteur du crime.

Les tribunaux sont actuellement saisis d'une affaire concernant un homme qui a passé de nombreuses années en prison. Un autre individu sur qui pesaient des soupçons à l'époque va maintenant être inculpé du crime. Il devra faire face à la justice et à la population et sera probablement condamné pour un crime qu'il a commis il y a bien des années. Si nous avions eu les preuves et les données fondées sur les empreintes génétiques, la personne innocente n'aurait jamais été incarcérée, et le coupable aurait été condamné il y a longtemps. Il est essentiel que nous préservions les substances corporelles qui sont prélevées. Nous nous opposons évidemment à la motion no 13, qui fait partie de cet article.

 

. 1725 + -

En examinant les motions présentées relativement à cet article, je constate que le gouvernement a reçu les avis juridiques de trois anciens juges. Nous ne savons pas précisément comment il les a choisis. Comme nous le savons tous, il est possible de demander l'avis de n'importe quel avocat. Il suffit de payer et de choisir la personne. J'aimerais savoir qui sont ces trois juges, qui ont décidé à l'unanimité, dans ce cas, de ce que la Constitution permet ou ne permet pas de faire.

Je cite ici M. Taylor, c.r., qui terminait ainsi, plus tôt aujourd'hui, ce qu'il disait au sujet d'autres motions. Il déclarait:

    Aussi, je suis d'avis que le fait d'accorder à la police, dans le projet de loi C-3, le pouvoir de prélever, sans mandat, des échantillons d'ADN sur des personnes accusées ou arrêtées, mais n'ayant pas été jugées et condamnées, serait considéré comme contraire aux garanties énoncées aux articles 7, 8 et à l'alinéa 11d) de la Charte des droits et ne pourrait davantage être justifié en regard des limites prescrites à l'article 1 de la Charte. Le pouvoir serait par conséquent jugé inconstitutionnel et sans effet aux termes de l'article 52 de la Loi constitutionnelle de 1982.

La dernière ligne de la citation renvoie à Loi constitutionnelle de 1982 qui confère aux juges beaucoup plus de pouvoir qu'ils ne devraient en avoir, à mon avis. Je crois qu'il appartient au Parlement canadien et non pas aux juges de la Cour suprême du Canada et aux autres tribunaux canadiens de faire les lois.

Je trouve intéressant, en ce qui concerne les déclarations faites par l'ancien juge dans ce rapport au gouvernement et certaines des motions dont la Chambre est présentement saisie, que des échantillons de sang sont déjà prélevés à l'heure actuelle. Avant d'aborder cette question, je voudrais lire une autre conclusion d'un ancien juge, après quoi je pourrai la relier aux trois motions présentement à l'étude. Des points très intéressants sont soulevés. M. Bisson déclare, dans sa conclusion, qu'une mesure législative autorisant...

M. Rob Anders: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je crois que nous n'avons pas quorum. Je vous demande donc de vérifier le quorum.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je vais faire vérifier tout de suite.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je crois qu'il y a maintenant quorum.

M. John Reynolds: Que c'est plaisant de compter quelques libéraux dans la Chambre, en plus des quelques centaines de milliers qui nous écoutent sur les ondes.

J'étais en train de citer la conclusion du juge Bisson. Selon lui, puisqu'il y a atteinte aux droits que la Charte garantit aux individus, la loi sera invalidée et l'on ne pourra pas invoquer l'article 1 de la Charte pour la justifier parce que les conditions préalables ne sont pas réunies. On ne peut nullement comparer la prise des empreintes digitales de quelqu'un au moment de son arrestation et le prélèvement, également au moment de son arrestation, d'échantillons corporels sans y être autorisé par un juge. Prendre les empreintes digitales de quelqu'un ne représente pas une perquisition et saisie, contrairement au prélèvement d'échantillons corporels qui ne devrait donc se faire qu'avec le maximum de garanties, dont l'intervention judiciaire en premier lieu.

Je ne partage absolument pas l'avis de ces juges sur cette question. Selon eux, les deux actes se différencient. Lors d'une arrestation, la police prend les empreintes digitales. Elle met les doigts de l'individu arrêté sur une matière salissante et les appuie ensuite sur une feuille de papier. Les empreintes sont gardées dans les archives et y demeurent même si l'individu n'est pas trouvé coupable. Par la suite, si l'individu est à nouveau arrêté, ses empreintes digitales sont déjà dans les archives.

Certains considèrent cela comme une atteinte à l'intégrité corporelle. On peut prélever un échantillon de DNA d'un individu simplement en frottant sa langue d'un coton-tige. Nul besoin de prélèvement de sang, nul besoin d'aiguille. Le DNA se prélève de maintes façons. Peut-on alors parler d'atteinte à l'intégrité corporelle? Les gens devraient se réjouir que des prélèvements sont faits lorsqu'un individu est arrêté parce que ses empreintes génétiques restent dans la banque pour faciliter son arrestation ultérieure en cas de récidive.

Je ne comprends pas du tout l'opposition à cette mesure.

 

. 1730 + -

Il est fantastique qu'on présente ce projet de loi, mais assurons-nous qu'il fonctionnera. Des milliers de cas de viol et de meurtre ne sont pas encore résolus dans notre pays. Avec les échantillons d'empreintes génétiques des personnes qui sont actuellement incarcérées, nous pouvons résoudre immédiatement quelques-uns de ces crimes. La police et les Canadiens le savent. Pourquoi avons-nous alors un projet de loi qui protège ces criminels au lieu de donner une tranquillité d'esprit aux parents qui ont perdu leurs enfants? Des gens ont perdu des membres de leur famille et des crimes ne sont pas résolus.

Je reviens au cas dont j'ai parlé précédemment. Cet homme subira un procès pour meurtre, alors qu'un innocent a déjà purgé une peine de prison. Cet homme sera reconnu coupable grâce à ses empreintes génétiques. Si nous avions eu ses empreintes génétiques il y a 15 ans, cette erreur judiciaire n'aurait pas été commise.

Je suis certain que nous aurons une occasion d'en reparler à maintes reprises avant que ce projet de loi ne soit adopté. Il est extrêmement important que le gouvernement examine ce projet de loi et accepte certains amendements qu'a présentés l'opposition. Pour m'être entretenu avec quelques-uns des députés de l'autre côté, je sais qu'ils partagent cet avis. Nous continuerons de parler de ce projet de loi jusqu'à ce qu'il soit modifié comme il convient avant son adoption à la Chambre.

M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je prends à nouveau la parole aujourd'hui pour participer au débat à l'étape du rapport sur le projet de loi C-3. Les amendements du groupe no 2 portent sur les dispositions relatives à l'analyse génétique dont je vais parler.

Mais tout d'abord, j'aimerais raconter une petite histoire. Il y a un ou deux ans, mon bureau de circonscription a été cambriolé en pleine nuit. Il n'y avait personne à ce moment-là et personne n'a été blessé. Le lendemain matin, la police est arrivée et a constaté que tout ce qui manquait était le poste de télévision. C'était dommage car il était tout neuf. Des agents de police ont relevé les empreintes digitales. Ils nous ont parlé un moment, puis ils sont partis. Le soir même un agent de police est venu chez moi, le poste de télévision sous le bras. Je lui ai demandé comment il avait fait pour le retrouver si vite. Il m'a demandé si je me souvenais qu'il y avait eu une chute de neige la veille. Il avait tout simplement suivi les traces de pas dans la neige. Elles conduisait à un garage abandonné où le voleur avait laissé le poste de télévision. La police a attendu qu'il revienne et l'a arrêté. J'ai raconté cette histoire un peu facétieusement.

Or, la loi dit que les profils génétiques constituent de l'information exclusivement privée et personnelle qui ne peut être utilisée qu'aux fins d'identification. Si je ne me trompe, c'est exactement ce que sont les empreintes digitales. Je suis très heureux qu'elles figurent déjà dans la législation. Je ne voudrais pas voir ce qui se passerait si nous essayions d'inclure dans la loi les empreintes dans la neige et de les mettre dans une catégorie. Je vois déjà les problèmes que cela poserait pour certains de nos collègues libéraux. Cela pourrait constituer un acte de discrimination fondée sur le poids d'une personne parce que l'empreinte de son pied était trop profonde. La façon dont la personne marchait révélerait si c'était un homme, une femme ou une personne handicapée et utiliser une preuve de ce genre serait faire acte de discrimination à l'égard de ces personnes.

Ma préoccupation dans le dossier de l'ADN c'est que c'est un moyen d'identifier un individu qui a fait quelque chose de très mal. Il faut que nous sachions qui est cet individu et que nous lui demandions, et à juste titre, des comptes de ce qu'il a fait. C'est la seule raison pour laquelle les données génétiques sont nécessaires, aux fins d'identification. Elles devraient être conservées dans les dossiers tant que cet objectif n'a pas été atteint. Elles ne serviront pas à décrire le type génétique d'une personne ni les défauts génétiques qui risquent de se manifester dans les générations à venir. Ces données génétiques ne serviront qu'à des fins d'identification. Tous les autres aspects sont couverts par la loi.

 

. 1735 + -

Cette question est importante, pour le Parti réformiste. En fait, une mesure presque identique, le projet de loi C-94, a été déposée vers la fin de la deuxième session de la dernière législature. Même si cette mesure comportait de graves lacunes, notre parti était prêt à appuyer le gouvernement et à permettre quand même son adoption à toute vapeur. Nous pensions simplement que l'établissement d'une banque de données génétiques serait trop importante pour en priver nos organismes chargés d'exécuter la loi.

Les amendements du groupe no 2, qui sont tous proposés par le député bloquiste de Charlesbourg, ont trait à la destruction de données génétiques. Pourquoi serait-il si important de détruire des données recueillies de façon si pertinente?

Je suis préoccupé par la motion no 6, selon laquelle «le commissaire est tenu de détruire sans délai les substances corporelles entreposées d'une personne après que l'analyse génétique a été effectuée une première fois en vertu du présent article.» Pourquoi détruire ces données sans délai?

En étudiant cette motion, ce sont les coûts qu'elle suppose qui me préoccupent. Nous savons comme on s'inquiète des coûts qu'entraîneront l'établissement et la tenue de cette banque de données.

Toutefois, cet amendement risque d'augmenter ces coûts, non seulement les coûts liés à la destruction des données, mais aussi ceux qu'entraînera une nouvelle collecte des données, soit pour retracer les personnes visées ou pour prélever les données auprès de personnes décédées. Que se passera-t-il alors?

Comme nous le savons, la technologie se développe à un rythme effarant et ce progrès s'accompagne de nouveaux tests et de nouvelles analyses toujours plus perfectionnés. Même si l'analyse des données génétiques est nettement plus précise que les autres technologies que nous connaissons déjà, dans deux ou trois ans, elle sera encore nettement meilleure.

Dans un certain sens, il semble donc qu'il y ait une perte de temps et un gaspillage de fonds associés à la destruction de données pour ensuite les recueillir de nouveau plus tard aux fins de nouvelles analyses.

Je m'inquiète aussi quand je pense à la destruction trop hâtive de données génétiques, parce qu'un technicien pourrait commettre des erreurs en analysant les données dont il dispose. Si les données sont mal analysées et détruites sans délai, comment comblerons-nous cette perte? J'y ai fait allusion plus tôt. La technologie en question est relativement nouvelle. Les tests et les analyses ne sont pas encore à toute épreuve.

Que se passera-t-il si le technicien qui effectue les premiers tests se trompe et si, de ce fait, l'analyse est annulée? Qu'arrive-t-il en cas d'analyse erronée si la personne dont provient l'échantillon n'est pas en détention, n'est pas disponible, qu'on ne peut la trouver et que les forces de l'ordre ne peuvent pas obtenir un autre échantillon?

Je pense qu'il est beaucoup plus rentable et sûr d'entreposer ces échantillons un certain temps plutôt que de détruire prématurément cette preuve précieuse.

Cela nous amène aux raisons pour lesquelles nous détruisons des preuves qui sont obtenues légalement et en bonne et due forme, et entreposées et conservées à des seules fins d'identification. Pourquoi ne pouvons-nous pas garder ces données comme nous gardons aujourd'hui les empreintes digitales?

Je ne comprends pas la nécessité de détruire cette preuve. Il me semble qu'il y aurait deux avantages à la conserver. Premièrement, en cas de crime, la preuve serait au dossier et, en cas de récidive, elle pourrait être utilisée ultérieurement à des fins d'identification. Deuxièmement, en cas d'arrestation, cette preuve pourrait servir à libérer un innocent. Cela a des avantages dans les deux sens.

Ce n'est pas seulement l'arrestation des coupables qui nous préoccupe, c'est aussi l'application correcte de la justice de façon à ce qu'une personne arrêtée pour un crime dont elle est innocente puisse se voir disculpée et qu'il soit mis fin aux poursuites engagées contre elle.

Cette personne pourra alors retrouver une vie normale parmi les siens sans autre dérangement et sans autre tort.

 

. 1740 + -

Voilà quelles sont mes préoccupations. J'espère pouvoir intervenir au sujet des autres groupes de motions. C'est une question très intéressante. Elle est extrêmement importante pour le maintien de la justice. Il arrive souvent que des gens condamnés à tort à une longue peine de prison soient disculpés grâce à la preuve génétique et à son utilisation à des fins légitimes.

Nous ne devons pas l'oublier. C'est trop important. C'est un outil précieux. Nous devons l'utiliser dans la mesure des besoins et dans les limites prescrites et arrêter de nous demander idiotement comment nous pouvons éviter de l'utiliser quand c'est nécessaire.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Madame la Présidente, j'ai quelques brèves observations à faire. J'ai soulevé certaines questions ce matin auxquelles le gouvernement n'a toujours pas répondu. Avant d'aller plus loin, je pense qu'il appartient au gouvernement de nous répondre.

Voici une autre chose qui m'inquiète en ce qui concerne le projet de loi C-3 et la question de la vie privée. Nous avons émis de sérieuses réserves au sujet du projet de loi C-68, adopté par les libéraux lors de la précédente législature. Celui-ci empiétait sur les droits des particuliers en ce qui concerne la vie privée. Maintenant, pour ce projet de loi, ces mêmes libéraux soulèvent la question de la vie privée pour les criminels.

Lorsqu'il s'agissait de citoyens respectueux de la loi, la question du respect de la vie privée ne les préoccupait pas. Maintenant que l'on parle de personnes inculpées d'infractions majeures, ils nous disent qu'il y a un problème de respect de la vie privée.

Nous pouvons très bien adopter une mesure qui empêche que les renseignements obtenus soient utilisés à des fins non légitimes, mais nous dire que l'on s'inquiète davantage du respect de la vie privée des criminels que de celle des propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi me paraît une contradiction flagrante et je pense que les Canadiens devraient s'en inquiéter sérieusement.

Je pense qu'il appartient au gouvernement de nous expliquer pour quelles raisons on ne pourrait pas mettre quelque mesure de protection dans la loi, de sorte que les renseignements obtenus par la police soient protégés.

Je vais passer en revue ce que serait cette banque d'ADN. On ferait des prélèvements d'une petite quantité de cellules de la personne inculpée d'une grave infraction, par exemple une mèche de cheveux ou un échantillon de salive. On pourrait utiliser ces prélèvements pour prouver l'innocence ou la culpabilité de la personne. De nos jours, grâce à la technologie, on peut examiner ce genre de choses en profondeur. Je ne dirai rien des molécules examinées ou de la science qui permet de le faire, mais le fait est que nous avons maintenant les moyens scientifiques d'utiliser de tels prélèvements pour faire condamner ou absoudre une personne.

Nous devrions nous servir de ces nouveaux moyens. Les services policiers le demandent. Nous devrions permettre leur utilisation.

J'ai lu l'histoire de ce type d'identification. Quand on a commencé à utiliser les empreintes digitales, les gens avaient les mêmes préoccupations concernant le respect de la vie privée et la pertinence d'utiliser ce genre de preuves. Aujourd'hui, personne ne remettrait plus en question l'utilisation des empreintes digitales. C'est un moyen couramment accepté.

Le gouvernement ne devrait pas renoncer à utiliser l'empreinte génétique d'une personne juste parce que c'est nouveau. Cela pourrait avoir beaucoup de bonnes applications. La police a maintenant la capacité d'utiliser cette technique. Cela pourrait aider beaucoup de prisonniers qui clament actuellement leur innocence et qui pourraient ainsi prouver qu'ils sont innocents. Ça s'est déjà fait. Cela permettrait par ailleurs à la police d'élucider beaucoup de crimes. Les policiers le disent et je crois que nous devrions les prendre au sérieux. Le gouvernement a imposé trop de restrictions dans la mesure proposée. Certaines propositions de ce groupe d'amendements et d'autres groupes visent à alléger ces restrictions. Je crois que nous devrions les examiner attentivement.

 

. 1745 + -

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Conformément à l'entente conclue plus tôt aujourd'hui, toutes les motions du groupe no 2 sont réputées avoir été mises aux voix et un vote par appel nominal est réputé avoir été demandé et différé.  

La Chambre passe maintenant au débat sur la motion no 7 du groupe no 3.

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD) propose:  

    Motion no 7

    Que le projet de loi C-3, à l'article 11, soit modifié par substitution à la ligne 5, page 9, de ce qui suit:

      «emprisonnement maximal de cinq ans;»

—Madame la Présidente, je suis le seul à présenter une motion du groupe no 3; je suppose que cela rend mon intervention en quelque sorte exclusive.

J'aimerais tout d'abord formuler quelques commentaires d'ordre général. Certains députés réformistes ont insisté sur l'importance de donner aux policiers les outils d'enquête dont ils ont besoin. Le NPD appuie entièrement cette idée.

Le policier ordinaire qui travaille dans la rue de nos jours a besoin de toute l'aide qu'il peut obtenir pour mener des enquêtes sur les crimes et faire son travail efficacement. Le NPD appuie le travail des policiers et espère que ce projet de loi permettra, malgré ses imperfections, de donner aux policiers certains des outils d'enquête dont ils ont besoin pour traduire les criminels en justice.

J'établis à dessein une distinction entre l'accusé et le criminel parce que certains de mes collègues, plus précisément les députés de Calgary et de Calgary-Ouest, ont affirmé plusieurs fois en parlant des néo-démocrates que nous voulions faire passer les droits des criminels avant ceux des victimes. Rien ne pourrait être plus faux.

Nous voulons tout simplement garantir le respect des droits des accusés au sein du système juridique. Certains députés oublient qu'un accusé n'est pas nécessairement un criminel. Ils oublient que tous et chacun d'entre nous, même ceux qui ont utilisé ces termes, pourraient être accusés des crimes les plus odieux. Au moment où une accusation est portée, la personne accusée n'est pas encore reconnue coupable et s'il y a des mesures de protection au sein du système, c'est que trop de gens au cours des ans ont été condamnés par erreur.

À titre de Parlement juste et responsable et de société qui prend ses responsabilités au sérieux, nous devons nous assurer qu'il y a un juste équilibre, c'est-à-dire que les policiers ont à leur disposition les outils dont ils ont besoin pour mener leurs enquêtes et les tribunaux les règles qui leur permettent de s'assurer que les innocents sont remis en liberté et les criminels punis.

Je passe à ma motion, qui augmente la peine de toute personne qui enfreint la loi. La mesure proposée par le gouvernement stipule, à l'article 11, que:

    Quiconque contrevient aux paragraphe 6(6) ou (7), à l'article 8 ou aux paragraphes 10(3) ou (5) est coupable, selon le cas:

      a) d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement >maximal de deux ans;

      b) d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et passible d'une amende maximale de 2 000 $ et d'un emprisonnement maximal de six mois, ou de l'une de ces peines.

Étant donné que nous reconnaissons l'importance des renseignements sur les empreintes génétiques et de leur caractère privé, la mesure législative dit qu'il est interdit, sauf pour l'application de la présente loi, d'utiliser ou de laisser utiliser un profil d'identification génétique reçu pour dépôt à la banque de données.

Quiconque travaillant dans le laboratoire qui reçoit les données de l'analyse des empreintes génétiques doit garder ces renseignements confidentiels et ne peut les utiliser que de la façon que le Parlement le juge appropriée. Le paragraphe 7 dit ensuite que:

    (7) Il est interdit, sauf en conformité avec le présent article, de communiquer ou de laisser communiquer les profils d'identification génétique enregistrés dans la banque ou l'information visée au paragraphe (1).

 

. 1750 + -

Bref, la loi dit qu'il est criminel de communiquer, autrement que selon les modalités prévues, tout renseignement sur l'ADN d'une personne. La peine maximale infligée pour un tel crime est un emprisonnement de deux ans. Ma motion veut que l'emprisonnement maximal passe à cinq ans. Il est encore possible d'imposer une peine minimale. Les tribunaux ont tout le loisir de déterminer la durée de la peine à imposer.

La raison de toutes ces dispositions, je le répète, c'est que le prélèvement des échantillons d'ADN et la tenue des fichiers doivent être réglementés et gérés comme il se doit par le gouvernement. Il convient de considérer quiconque enfreint ces dispositions comme s'il violait la loi de cette Chambre et lui infliger une peine sévère. On saura ainsi faire comprendre à tous l'importance de garder ces renseignements confidentiels

Nous vivons dans une ère scandaleuse d'une certaine façon. Il y a des gens qui vendent des lettres d'amour de la princesse de Galles pour des millions de dollars. Nous savons qu'une conversation enregistrée entre une personne et un personnage politique vaut des milliers de dollars pour les tabloïdes. Nous devons reconnaître que cette information très personnelle, qui touche votre serviteur, n'importe quelle personne qui regarde les travaux de la Chambre ce soir, n'importe quel député ministériel ou de l'opposition, est si personnelle et si privée que toute tentative faite pour la transmettre à d'autres dans des circonstances autres que celles prévues par la loi devrait être passible d'une peine sévère. En alourdissant la peine, nous enverrions ce message.

C'est une question importante d'ordre public. Je veux être très clair. Le Nouveau Parti démocratique s'inquiète de la sécurité des gens dans les collectivités du pays, ceux qui sont préoccupés par la criminalité.

Nous nous préoccupons également d'informations fausses transmises aux gens. On a dit, au cours du débat de ce soir, qu'on sait, qu'on peut tenir pour acquis, que dans nos familles, au moins un membre finira par être victime d'une agression ou d'un crime. On a lancé cette affirmation sans avoir aucune statistique pour la soutenir. Beaucoup de personnes qui regardent ce débat à la télévision ont un certain respect pour ce que nous disons parce que nous sommes des parlementaires.

Une voix: Les gens ne croient pas un mot de ce que nous disons.

M. Peter Mancini: Il nous incombe de nous élever au-dessus de ce cynisme et de tenir un débat honnête sur les questions dont la Chambre est saisie. Des déclarations qui sont faites sans s'appuyer sur aucun fait, qui n'ont pour objectif que d'attiser les passions, sont loin de convaincre les gens que nous tenons sérieusement compte de leurs besoins et des lois qu'il faut mettre en place pour tous les Canadiens.

Nous prenons au sérieux la recommandation de l'Association canadienne des policiers. Nous prenons au sérieux la recommandation du Commissaire à la protection de la vie privée, qui a un point de vue tout à fait opposé. Nous prenons également au sérieux celles de l'Association du Barreau canadien.

En tant que parlementaires, nous devons peser le pour et le contre de chacun de ces arguments, de considérer les besoins et les intérêts des Canadiens dans le cadre d'un exercice intellectuel sérieux et réfléchi. Nous devons être très prudents quand nous affirmons que les droits des criminels passent avant ceux des victimes, lorsqu'il s'agit de personnes accusées. Notre pays est basé sur la primauté du droit dont le principe fondamental veut que toute personne est innocente tant qu'on n'a pas prouvé sa culpabilité. Ce projet de loi a pour objectif de donner aux policiers les outils voulus pour les aider à établir la culpabilité d'une personne. Une fois que cette culpabilité est établie, les droits du criminel ne doivent pas passer avant ceux de la victime. Je défends ce point de vue pour les gens qui nous écoutent ce soir.

Je remercie la Chambre et je lui demande d'appuyer ma motion.

 

. 1755 + -

[Français]

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole à la suite de mon collègue du Nouveau Parti démocratique pour lui dire qu'il n'est pas seul; sa motion peut bien être seule dans le groupe no 3, mais il ne sera pas seul à l'appuyer, loin de là.

Je dois d'abord faire part de ma déception au fait qu'à quelques reprises précédemment, sur quelques motions que j'avais présentées, j'avais demandé l'appui de la plupart des parlementaires pour souligner l'importance que la Chambre et le gouvernement doivent accorder à la protection de la vie privée, mais que malheureusement, ces motions n'ont pas reçu l'appui que j'espérais.

En revanche, la motion no 7 de mon collègue de Sydney—Victoria revient sur le même principe, mais d'une autre façon qui sera peut-être plus naturelle, à certains de mes collègues qui se tiennent à ma droite, et peut-être même plus à droite sur l'échiquier politique.

L'article fait passer de deux à sept ans la peine d'emprisonnement maximale pour ceux qui contreviennent à certaines dispositions du projet de loi qui font en sorte d'essayer de garder le plus secrets possible les renseignements recueillis.

Nous, du Bloc québécois, accordons une très grande importance à la protection de la vie privée. D'ailleurs, concernant tout ce qui touche à l'information, le Bloc québécois est d'une fermeté incroyable. Par exemple, nous étions favorables à un durcissement des peines lorsqu'il y avait destruction de documents qui devraient être accessibles en vertu des lois sur l'information. On veut le plus de transparence possible, mais on veut en même temps que cette transparence ne donne pas la possibilité à certaines personnes de mettre la main sur des renseignements dont elles ne devraient sûrement pas avoir connaissance.

Il est important de rappeler que l'ADN révèle les secrets les plus profonds d'un être humain, la couleur de ses cheveux et certaines caractéristiques physiques. Qui sait si, dans quelques années, la technologie ne permettra pas de connaître la personnalité, le caractère de quelqu'un. C'est un outil très puissant et il faut absolument dissuader les gens d'utiliser les données génétiques à des fins autres que celles qui sont prévues dans le projet de loi.

C'est donc avec plaisir que j'appuie la motion de mon collègue de Sydney—Victoria. J'espère que mes autres collègues, et à ma droite et en face, feront de même afin de vraiment donner une importance fondamentale et primordiale à la protection de la vie privée dans ce projet de loi.

[Traduction]

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre part au débat d'aujourd'hui, surtout après mes collègues du NPD et du Bloc.

Je note, non sans un certain amusement, que nous avons ici affaire à un avocat de la défense qui demande que l'on allonge la peine. Je pense que cela témoigne de l'objet de la motion, à savoir mettre l'accent sur l'importance de la protection des renseignements personnels et accorder plus de latitude aux juges pour qu'ils puissent imposer une peine maximale de cinq ans à quiconque choisit de violer cette importante loi en utilisant à mauvais escient des données génétiques.

C'est une proposition que la Chambre et, je l'espère, le gouvernement examineront très sérieusement. Peut-être qu'ils souscriront à la proposition du député de Sydney—Victoria.

La flexibilité et la latitude qu'elle procurerait sont certainement très, très importantes. Elles seront également sauvegardées, comme le député de Sydney—Victoria l'a dit, parce que c'est toujours un juge qui dispose du pouvoir discrétionnaire. La Couronne peut toujours procéder par voie de déclaration sommaire de culpabilité. Sans compter que la Couronne et la défense auront toujours voix au chapitre dans le processus de détermination de la peine. Le juge sera alors appelé à appliquer les principes de la détermination de la peine, à garantir l'équité, à veiller à ce que le jugement soit adapté au crime et non pas standardisé, comme l'a peut-être entendu aussi le député de la Nouvelle-Écosse dans les salles d'audience.

 

. 1800 + -

C'est prévu. C'est implicite dans le système qu'il n'y aura pas de réaction disproportionnée.

La motion du député élargit essentiellement la capacité des juges d'examiner le scénario devant eux en cas de violation du droit à la protection des renseignements personnels, de mauvaise utilisation des données génétiques. Je suis donc d'accord avec le député. J'estime qu'il a présenté une importante motion à la Chambre.

Cette motion représente une réponse plus sérieuse à une activité criminelle comme l'utilisation criminelle de données génétiques. Il est important que nous examinions cette question très attentivement parce que, en présentant ce projet de loi, nous donnons au gouvernement et aux policiers un outil très important pour répondre à un problème grave qui est très répandu au Canada.

C'est pourquoi nous, de ce côté-ci de la Chambre, encourageons le gouvernement à aller jusqu'au bout. Je crois que ce sera là le nouveau cri de ralliement relativement à ce projet de loi: «Jusqu'au bout!» Utilisons cet outil dans toute la mesure du possible. Pour une fois, soyons à l'avant-garde du système judiciaire. N'avançons pas avec hésitation. Sans vouloir manquer de respect envers la Cour suprême, ne nous tracassons pas trop de ce qu'elle fera avec ce projet de loi. Avançons de façon éclairée.

Nous avons tenu de vastes audiences sur ce projet de loi. De nombreux témoins ont présenté leur point de vue au comité. Les représentants de la communauté policière, des groupes de défense des droits des victimes, de la communauté scientifique, tous ces gens qui seront appelés à participer à la mise en oeuvre de ce projet de loi nous encouragent tous à profiter au maximum de cette occasion qui nous est fournie. Le temps est venu pour le Parlement d'agir, de faire quelque chose de positif pour aider les responsables de l'application de la loi et aussi pour aider à satisfaire les victimes qui ont l'impression que le système judiciaire les a abandonnés.

En fait, nous avons l'occasion de prévoir des peines graves en cas d'infraction à cette loi. Le député propose que nous augmentions à un emprisonnement maximal de cinq ans la peine imposée à toute personne reconnue coupable d'avoir fait une mauvaise utilisation de la technologie des empreintes génétiques. Cela envoie un message très clair et non équivoque à ceux qui voudraient se livrer à ce genre d'activité criminelle. Cela met encore plus en relief l'importance de dispositions dissuasives, d'une réponse du gouvernement et du système de justice qui soit rigoureuse envers ceux qui enfreignent la loi.

Il faut que les policiers et l'ensemble des Canadiens sachent qu'ils ont l'appui du Parlement et que celui-ci s'emploie à assurer leur protection.

Au nom de mes collègues du Parti progressiste conservateur, je tiens à dire que nous appuyons cet amendement fort important si nous voulons adopter un projet de loi qui puisse être mis en application, que les Canadiens puissent prendre très au sérieux et qui permette aux policiers de s'acquitter de la tâche très importante qui leur incombe, celle d'appliquer les dispositions de la loi et de les utiliser efficacement dans leur lutte quotidienne contre la criminalité.

Sur ce, je félicite le député de la circonscription de Sydney—Victoria, mon collègue de la Nouvelle-Écosse. Il a proposé un amendement très important, et j'exhorte tous les députés à le prendre sérieusement en considération au moment de la mise aux voix, à se montrer ouverts et à l'appuyer. Voilà ce qu'ils devraient faire.

 

. 1805 + -

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Madame la Présidente, j'exhorte moi aussi les députés à appuyer cette motion. Au sein du comité, j'ai proposé que nous supprimions la partie de la disposition qui a trait à la déclaration de culpabilité par procédure sommaire et que nous nous en tenions à l'idée d'un acte criminel passible d'un emprisonnement maximal de deux ans. Ma proposition a évidemment été rejetée. Nous verrons donc ce qui se produira quand viendra le moment de se prononcer sur cette peine accrue.

Que faisons-nous en l'occurrence? Nous protégeons la vie privée, mais nous tenons compte d'une crainte et d'une appréhension qui, à bien des égards, sont contradictoires. Lorsque je vais chez le médecin et que je lui donne un échantillon de mon sang, il peut en faire ce qu'il veut. Je peux volontairement donner un échantillon de sang à un policier et il peut placer celui-ci dans la banque de données avec le profil d'identification génétique. Selon la loi, s'il l'utilise à mauvais escient, il peut être inculpé et condamné à une peine d'emprisonnement d'un maximum de cinq ans, mais il n'en est pas de même de mon médecin. Ce dernier peut prendre un échantillon de mon sang et l'utiliser à sa guise. Il ne sera pas mis en accusation et ne s'exposera certainement pas à cinq ans d'emprisonnement. Il y a une contradiction dans notre façon d'agir, mais nous agissons tout de même ainsi. Pourquoi faisons-nous cela? Par crainte. Un examen plus approfondi révèle toutefois que pareille crainte n'est pas fondée.

Si j'examine toutes les préoccupations exprimées au sujet de la vie privée et de l'utilisation à mauvais escient du profil et des échantillons, je constate qu'il n'y a pas lieu de s'inquiéter. Pareille appréhension existe toutefois. Ce genre de crainte est tout à fait réel. Nous l'avons constaté en entendant le témoignage de représentants de la justice qui ont comparu devant notre comité. Ils craignaient énormément ce que pourrait faire la Cour suprême si nous donnions le feu vert aux empreintes génétiques et si nous autorisions le prélèvement d'échantillons au moment de l'arrestation ou, à tout le moins, au moment de l'inculpation pour une des infractions primaires. Comme l'inquiétude est énorme, je suppose que la Chambre en tiendra compte, qu'elle soit ou non fondée, et que nous procéderons avec prudence dans l'ombre de la Cour suprême du Canada.

C'est pourquoi nous disons que nous allons condamner à une peine maximale possible de cinq années d'emprisonnement toute personne qui osera faire ce que tout responsable de banques de données, de banques de sang ou de quelque autre banque du genre peut faire impunément, compte tenu de cette inquiétude que nous reconnaissons, comme il se doit, en tant que députés. Et pourtant, les organismes d'exécution de la loi nous disent en même temps qu'il leur faut résoudre les crimes non résolus.

Je vais dire quelques mots au sujet de ce que mon collègue a mentionné, et avec raison, sur les droits des accusés. Ce projet de loi ne concerne pas que les accusés. Il concerne aussi les personnes qui ont été reconnues coupables d'une infraction désignée et qui sont par conséquent en état d'arrestation. Il permettra de prélever des échantillons d'ADN de certaines de ces personnes. Il va donc au-delà de la reconnaissance du droit des accusés de se défendre eux-mêmes et de ne pas s'incriminer eux-mêmes.

Lorsqu'on voit ce que fera ce projet de loi, on n'a aucune raison de ne pas aller jusqu'au bout. La raison en est que si l'on examine même ce que les trois anciens juges ont dit, on a déjà le moyen et le droit de prélever un échantillon de sang si un agent de police croit qu'une personne conduit un véhicule automobile ou un bateau avec des facultés affaiblies par l'alcool ou la drogue. Je crois que cela est prévu à l'article 254. Nous avons déjà ce pouvoir.

 

. 1810 + -

Lorsque j'ai examiné rapidement les avis des trois avocats de droit constitutionnel sur ce projet de loi, je n'en ai trouvé qu'un seul qui reflétait une analyse réaliste des inconséquences qui surgissent. Qu'a dit M. Taylor à ce sujet? Il a dit que c'était permis parce qu'il s'agissait d'une infraction en cours de commission et que la preuve peut disparaître avec le temps du dossier d'un individu.

Néanmoins, je trouve très faible l'argumentation voulant qu'il soit constitutionnel de prélever un échantillon de sang dans cette situation, mais pas de le faire lorsque quelqu'un est arrêté et accusé de meurtre, de viol, d'homicide involontaire coupable, de voies de fait grave ou de toute autre infraction désignée. Il y a là une énorme inconséquence qui est fondée sur l'inquiétude.

Il semble que le véritable témoignage que nous devions respecter et écouter soit celui des experts des questions médico-légales parce qu'ils savent si la vie privée est menacée oui ou non. Ils savent s'il est possible d'utiliser les données à mauvais escient et si nous devons nous prémunir contre une telle possibilité. Ils le savent.

J'ai écouté les témoins entendus par le comité et je dois dire, sauf le respect que je leur dois, que leurs plus grandes peurs n'étaient fondées sur rien. Par conséquent, nous ne donnerons pas aux policiers le droit de tout simplement prélever des échantillons. Nous allons encadrer leurs interventions. Je prévois que nous finirons par refuser aux policiers le droit de prélever un échantillon sur un suspect qui a déjà été condamné pour une infraction désignée. J'anticipe peut-être, mais la motion s'en vient. Nous verrons comment les choses se passeront.

Tout ce que je veux dire, c'est que la motion repose sur la peur. Elle vise à imposer une peine d'emprisonnement maximale de cinq ans à toute personne qui utilise à mauvais escient un échantillon génétique. Les autres banques de données ne sont pas régies par des lois sur les usages légitimes et abusifs des échantillons, par exemple, les banques de données sur les prélèvements effectués couramment sur les bébés et d'autres personnes.

J'appuie la motion. Je comprends très bien ce qui la motive. Je crois qu'elle témoigne tout simplement de la peur que suscitent toutes ces questions. La peur de quoi? La peur que les juges de la Cour suprême du Canada examinent les choses de leur propre point de vue et déclarent si oui ou non nous sommes allés trop loin. Jusqu'à maintenant, les juges ne voient rien de mal. Nous pouvons prélever des échantillons dans certaines conditions. Tout ce qu'ils disent, c'est que nous ne pouvons pas prélever ces échantillons de façon routinière, sans raison, mais qu'il faut que ce soit sous l'autorité des tribunaux. Il faut que ce soit à des fins judiciaires. Il faut qu'un juge émette un mandat autorisant le prélèvement d'un échantillon aux termes du projet de loi C-104.

Il semble qu'un pouvoir légal ne suffise pas. Il faut plus que des motifs raisonnables de croire que quelqu'un a commis une infraction désignée. On ne peut pas non plus se contenter d'amener ces individus devant un fonctionnaire judiciaire et de faire une déclaration sous serment. Il faut un mandat émanant du pouvoir judiciaire. Apparemment il faut que les choses soient ainsi.

Peut-être nous faut-il progresser ainsi, à petits pas et avec prudence pour élargir les dispositions un jour, lorsqu'il aura été établi que les craintes n'étaient pas justifiées.

 

. 1815 + -

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, je tiens à faire remarquer que de nombreux témoins ont été entendus. De même, comme on l'a déjà dit, nous avons entendu beaucoup de témoignages.

J'ai peut-être manqué une des séances. Sauf erreur, je ne me rappelle pas avoir entendu un témoin réclamer que l'on porte de deux à cinq ans la peine d'emprisonnement en cas de mauvaise utilisation de ce genre d'information. Je le répète, nous avons entendu bien des choses à propos des questions de protection de la vie privée qui ont été soulevées, mais je n'ai entendu aucun témoin réclamer ce que propose la motion à l'étude.

Le gouvernement se préoccupe beaucoup du risque de mauvaise utilisation. Voilà pourquoi, dès le départ, nous avons confié l'établissement, l'administration et la coordination de la banque de données génétiques à l'un des service de police les plus respectés au monde, la GRC, par l'intermédiaire de son commissaire. C'est cet organisme qui sera chargé de mettre sur pied et d'administrer la banque de données. Nous avons tâché d'établir un équilibre entre la nécessité de veiller à ce qu'on n'utilise pas à mauvais escient l'information fournie et la nécessité de montrer aux Canadiens que nous prenons les empreintes génétiques au sérieux.

Comme on l'a souligné, le profil d'identification génétique peut révéler beaucoup plus de choses qu'une empreinte digitale. Comme le député de Sydney—Victoria l'a fait remarquer au cours des séances du comité, nous avons tendance à comparer les profils d'identification génétique avec les empreintes digitales. Comme il l'a dit avec tant de justesse, une empreinte digitale est une impression que je laisse tandis que l'empreinte génétique est une partie de moi. Il existe une différence fondamentale entre les deux, mais nous les confondons souvent.

Je tiens à mettre les députés en garde. La proposition d'amendement parle des paragraphes 6(6) et (7). Ces paragraphes ont trait à l'utilisation interdite et à la communication interdite du contenu d'un profil d'identification génétique. Nous ne parlons pas de l'identification de l'individu auquel le profil peut appartenir. C'est la même chose pour les échantillons.

Nous disons que, si on en fait une mauvaise utilisation, cela constitue une infraction grave. Nous avons tâché d'établir un équilibre. Nous n'avons pas consulté la Cour suprême à propos de toutes les dispositions, comme le porte-parole du Parti réformiste voudrait nous le faire croire. Nous avons simplement dit que cela constituait une infraction. Voilà ce que nous voulons faire comprendre aux Canadiens, c'est-à-dire qu'il est grave d'utiliser cette information à mauvais escient. Nous avons simplement tâché d'être cohérents par rapport à des infractions similaires déjà prévues dans le Code criminel.

Si le gouvernement augmentait la sévérité de la peine en la portant de deux à cinq ans, cela ne concorderait pas avec des infractions similaires prévues dans le Code criminel et serait excessif. Voilà pourquoi je demande aux députés de voter contre cette motion d'amendement.

M. Philip Mayfield (Cariboo—Chilcotin, Réf.): Madame la Présidente, j'ai trouvé intéressant que le secrétaire parlementaire signale qu'aucun témoin n'avait préconisé ce genre de peine devant le comité. Je lui signale par contre qu'il y a au moins quatre personnes qui l'ont fait à la Chambre des communes.

J'exhorte le député à ne pas se prononcer sur le projet de loi uniquement d'après ce qui s'est passé au comité et d'après les témoignages. Qu'il se rappelle que les députés expriment non seulement leur propre point de vue, mais aussi celui de nombreuses autres personnes. Nous exposons ces opinions à la Chambre et au gouvernement pour qu'ils sachent, dans ce cas-ci, que les gens s'inquiètent beaucoup des lacunes du système de justice lorsqu'il s'agit d'appréhender des délinquants violents qui causent un grand préjudice à des personnes, à nos collectivités et à la structure de nos collectivités.

 

. 1820 + -

On ne saurait nier la très grande importance de la question des empreintes génétiques. Le secrétaire parlementaire a tout à fait raison de dire que ces profils fournissent une grande quantité d'information très personnelle.

Il faut bien comprendre que, dans le cadre de cette loi, cette information ne doit servir qu'aux fins prévues, c'est-à-dire pour identifier les personnes appréhendées ou aider à établir leur innocence ou leur culpabilité.

La position du gouvernement n'est pas exempte d'intéressants paradoxes. Dans le projet de loi à l'étude, la protection de la vie privée est fort importante. Je ne veux minimiser cette importance d'aucune manière. Il y a d'autres cas où cette protection est loin d'être aussi importante.

J'ai reçu une lettre d'un de mes électeurs qui est conseiller financier. Il s'inquiète de l'information qu'il a reçue de Statistique Canada. On propose l'achat d'information qui vient des déclarations de revenu des particuliers, au sujet de la situation financière des collectivités, des districts, jusqu'au niveau du particulier.

Tout cela est fondé sur le code postal. Comment peut-on dresser un profil à partir d'un code postal? Dans un cas, un code postal peut correspondre à une tour d'habitation. Il ne serait pas trop difficile de savoir quelles sont les personnes concernées, dans le profil que Statistique Canada fournirait. Comme les députés le savent, l'information qui vient des déclarations de revenu est très personnelle.

Je voudrais donner un autre cas de profil établi d'après un code postal. Lorsque ma famille s'est établie à Calgary, nous avons emménagé dans une maison située au coin d'une rue. Un code postal avait été attribué pour cette maison-là seulement.

À l'époque, je ne me suis pas rendu compte que, au moyen de profils établis à partir du code postal, Statistique Canada pouvait fournir ma déclaration fiscale à des établissements financiers, à des conseillers financiers et à tous ceux qui voulaient bien payer pour obtenir ces renseignements.

Je vous raconte cela pour vous montrer que, dans certains, cas, le gouvernement considère que la protection de la vie privée est une question importante. Dans d'autres cas, c'est beaucoup moins important.

Je crois que la motion no 7 souligne l'importance du caractère privé de ces renseignements, qui doivent être utilisés uniquement à des fins très précises. Autrement, leur utilisation entraîne des peines très sévères. Elle souligne donc l'importance des renseignements privés, qui ne doivent être utilisés que de façon adéquate. Sinon, cela peut avoir de graves conséquences.

Je tiens à féliciter le député de Sydney—Victoria qui propose cette motion. La motion tombe à point nommé. Elle attire notre attention sur un aspect très important du projet de loi. Mon collègue conservateur a mentionné qu'il était avocat de la défense. Après avoir entendu l'opinion de la poursuite, de la défense et d'un certain nombre de profanes, comme moi-même, je crois que nous avons couvert tous les aspects de la question.

En renforçant cet article, en rendant la peine plus sévère, en prolongeant la peine d'emprisonnement maximale pour cet acte criminel, nous espérons dissuader ceux qui songeraient à utiliser ces renseignements à mauvais escient.

 

. 1825 + -

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais simplement répondre aux remarques faites par le ministériel.

Celui-ci a dit que les empreintes digitales identifient la personne, mais que les empreintes génétiques sont une partie de la personne. Si c'est l'argument que fait valoir le député, celui-ci devrait appuyer l'amendement. Si, à l'heure actuelle, les empreintes génétiques servent à toute fin autre que celles auxquelles servent les empreintes digitales, des sanctions devraient être imposées, et ces sanctions devraient être établies en fonction du crime. Je félicite le député néo-démocrate d'avoir proposé cet amendement. Je suis fier qu'il l'ait fait. Si l'argument qu'a fait valoir le député est valable, celui-ci devrait appuyer l'amendement. Le député a dit que prélever des empreintes génétiques équivalait à prendre une partie de la personne.

Permettez-moi de donner un petit cours de sciences. Si vous laissez des empreintes digitales, la technologie moderne nous permettra, à peu près dans un an, d'obtenir de ces empreintes les mêmes renseignements que l'on obtient en prélevant un cheveu ou un échantillon de salive d'une personne. Il faut prévoir des peines appropriées au cas où quelqu'un se servirait de cette information. Le gouvernement doit appuyer l'amendement.

Nous aurons bientôt la technologie qui nous permettra de faire toutes sortes de choses. Par conséquent, il faut protéger le public contre une utilisation inappropriée de cette information. La banque de données génétiques devrait être utilisée de la même façon que les empreintes digitales, soit pour identifier une personne, ni plus, ni moins. Nous serions en faveur d'une telle disposition.

Je suis d'accord avec l'amendement proposé par le NPD. Il est intéressant—et c'est presque un événement historique—de voir le NPD reconnaître que la sévérité d'une peine envoie un signal à la société quant à la gravité du crime. Je pense qu'il faut procéder de cette façon. Si, dans l'avenir, quelqu'un trouve une façon de faire une utilisation inappropriée des échantillons génétiques et porte atteinte à la vie privée des personnes, il faut faire en sorte que des châtiments appropriés soient déjà prévus.

Nous ne voyons peut-être pas l'ensemble du tableau, mais la question qui nous est posée par cet amendement c'est: est-ce que, pour le public, la longueur de la peine reflète ou devrait refléter le degré de gravité de l'infraction? C'est de cela que nous parlons et c'est pour cela que le gouvernement devrait appuyer l'amendement. Il serait possible de commettre de graves infractions en utilisant ces données à mauvais escient.

Le public s'inquiète également de ce que les tribunaux n'utilisent pas les dispositions de la loi pour donner à la société une idée de la gravité des infractions. Je suis peut-être parti sur une tangente, mais dans ma circonscription il y a eu quelques crimes graves, des meurtres en fait, et les tribunaux ne les ont pas punis très sévèrement. Certains des coupables n'ont eu que huit ans d'emprisonnement. L'un a même eu quatre ans seulement. Cela veut dire qu'après moins de deux ans il était libéré sous condition. Ce n'est pas le bon signal à envoyer à la société. Il est clair qu'il faut faire savoir que les conséquences peuvent être très graves.

En conclusion, je voudrais parler un peu des contradictions dans la position du gouvernement qui ne veut pas accepter une augmentation de la peine.

Le gouvernement a adopté une mesure législative en vertu de laquelle si, dans quelques années, vous faites une erreur sur la feuille que vous aurez à remplir lorsque vous irez enregistrer votre arme à feu, vous pourriez écoper d'un maximum de 10 ans de prison. Ici, vous pourriez faire quelque chose de beaucoup plus grave en utilisant à mauvais escient les données sur l'ADN, mais la peine maximale serait de deux ans seulement. Je trouve cela assez paradoxal. Je trouve incroyable que le gouvernement fasse quelque chose de ce genre. C'est une véritable contradiction et c'est pourquoi le gouvernement devrait changer d'avis et appuyer l'amendement du député néo-démocrate.

 

. 1830 + -

[Français]

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Comme il est 18 h 30, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 30.)