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36e Législature, 2ième Session
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 23
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 18 novembre 1999
CHAMBRE DES COMMUNES |
AFFAIRES COURANTES |
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS |
M. Derek Lee |
DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES |
Mme Sophia Leung |
COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Procédure et affaires de la Chambre |
M. Derek Lee |
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI |
Projet de loi C-323. Présentation et première lecture |
M. Paul Crête |
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI |
Projet de loi C-324. Présentation et première lecture |
M. Paul Crête |
LA LOI SUR LES TEXTES RÉGLEMENTAIRES |
Projet de loi C-325. Présentation et première lecture |
M. Gurmant Grewal |
LOI CONCERNANT L'INTÉGRITÉ TERRITORIALE DU CANADA |
Projet de loi C-326. Présentation et première lecture |
M. Gurmant Grewal |
LA LOI SUR LA PROTECTION DU REVENU AGRICOLE |
Projet de loi C-327. Présentation et première lecture |
M. Leon E. Benoit |
COMITÉS DE LA CHAMBRE |
Procédure et affaires de la Chambre |
Motion d'adoption |
M. Derek Lee |
PÉTITIONS |
La sécurité de la vieillesse |
M. Gurmant Grewal |
Les jeunes contrevenants |
Mme Rose-Marie Ur |
La Société canadienne des postes |
M. Ghislain Lebel |
Les émissions provenant d'aéronefs |
M. Gordon Earle |
Les aliments transgéniques |
M. Reed Elley |
La constitution |
M. Peter Stoffer |
La pornographie juvénile |
M. Ken Epp |
QUESTIONS AU FEUILLETON |
M. Derek Lee |
L'hon. Lyle Vanclief |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES |
Projet de loi C-3—Motion d'attribution de temps |
L'hon. Don Boudria |
Deuxième lecture |
M. Bob Kilger |
Motion |
M. Grant McNally |
M. Peter Stoffer |
M. John Maloney |
M. Steve Mahoney |
M. Michel Bellehumeur |
M. Werner Schmidt |
M. Peter Stoffer |
M. Werner Schmidt |
M. Scott Brison |
M. Grant McNally |
M. Chuck Cadman |
Mme Brenda Chamberlain |
M. Maurice Godin |
M. John McKay |
M. Pat Martin |
Mme Hélène Alarie |
M. Bryon Wilfert |
M. Greg Thompson |
M. Reed Elley |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
LE DIABÈTE |
M. Janko Peric |
L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE |
M. Deepak Obhrai |
LA LETTONIE |
Mme Sarmite Bulte |
CAM GARDINER |
M. Rick Limoges |
MARK MCKINNON |
Mme Judi Longfield |
L'AGRICULTURE |
M. Garry Breitkreuz |
SIR WILFRID LAURIER |
M. Bryon Wilfert |
L'ÉDUCATION |
Mme Libby Davies |
L'ASSURANCE-EMPLOI |
M. Stéphan Tremblay |
LE 35E MONDIAL DES MÉTIERS |
Mme Raymonde Folco |
TARA SINGH HAYER |
M. Gurmant Grewal |
LES ENFANTS |
Mme Eleni Bakopanos |
LES JEUNES CONTREVENANTS |
Mme Jocelyne Girard-Bujold |
LE PRIX DU BRADAGE DU MOIS |
L'hon. Lorne Nystrom |
LA TÉLÉVISION FRANÇAISE DE L'ONTARIO |
M. Yvon Charbonneau |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Mark Muise |
LA CONVENTION DES NATIONS UNIES RELATIVE AUX DROITS DE L'ENFANT |
Mme Rose-Marie Ur |
LA SANTÉ |
M. Keith Martin |
QUESTIONS ORALES |
LE TRAITÉ NISGA'A |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Herb Gray |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Herb Gray |
Mme Deborah Grey |
L'hon. Herb Gray |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. John Cummins |
L'hon. Robert D. Nault |
M. John Cummins |
L'hon. Robert D. Nault |
LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Lawrence MacAulay |
M. Gilles Duceppe |
L'hon. Lawrence MacAulay |
M. Michel Bellehumeur |
L'hon. Lawrence MacAulay |
M. Michel Bellehumeur |
L'hon. Lawrence MacAulay |
LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Paul Martin |
Mme Alexa McDonough |
L'hon. Paul Martin |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. Mark Muise |
L'hon. Robert D. Nault |
M. Mark Muise |
L'hon. Robert D. Nault |
LE TRAITÉ NISGA'A |
M. Derrek Konrad |
L'hon. Robert D. Nault |
M. Derrek Konrad |
L'hon. Robert D. Nault |
LES PRODUCTIONS AUDIOVISUELLES |
M. Stéphane Bergeron |
L'hon. Sheila Copps |
M. Stéphane Bergeron |
L'hon. Sheila Copps |
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA |
M. Jim Abbott |
L'hon. Lawrence MacAulay |
M. Jim Abbott |
L'hon. Lawrence MacAulay |
LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS |
Mme Christiane Gagnon |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Christiane Gagnon |
L'hon. Jane Stewart |
LE FONDS TRANSITOIRE POUR LA CRÉATION D'EMPLOIS |
Mme Diane Ablonczy |
L'hon. Jane Stewart |
Mme Diane Ablonczy |
L'hon. Jane Stewart |
LE LOGEMENT SOCIAL |
M. Maurice Dumas |
L'hon. Alfonso Gagliano |
LE MUSÉE CANADIEN DES CIVILISATIONS |
M. Sarkis Assadourian |
L'hon. Sheila Copps |
L'IMMIGRATION |
M. Leon E. Benoit |
L'hon. Elinor Caplan |
M. Leon E. Benoit |
L'hon. Elinor Caplan |
L'INDUSTRIE DE LA MACHINERIE AGRICOLE |
M. Pat Martin |
M. John Cannis |
M. Pat Martin |
L'hon. Ronald J. Duhamel |
LE SCRS |
M. Peter MacKay |
L'hon. Lawrence MacAulay |
M. Peter MacKay |
L'hon. Lawrence MacAulay |
L'ÉQUITÉ SALARIALE |
M. Mark Assad |
L'hon. Lucienne Robillard |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Art Hanger |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURES |
M. Odina Desrochers |
L'hon. Lucienne Robillard |
LA SANTÉ |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
L'hon. Allan Rock |
LES PÊCHES |
M. Charlie Power |
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal |
LE TIMOR ORIENTAL |
M. Pat O'Brien |
L'hon. Raymond Chan |
LA DÉFENSE NATIONALE |
M. Art Hanger |
L'hon. Arthur C. Eggleton |
LE NUMÉRO D'ASSURANCE SOCIALE |
M. Paul Crête |
L'hon. Jane Stewart |
LES DROITS DES ENFANTS |
Mme Libby Davies |
L'hon. Jane Stewart |
LES AFFAIRES AUTOCHTONES |
M. John Herron |
LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE |
M. Grant McNally |
L'hon. Don Boudria |
INITIATIVES MINISTÉRIELLES |
LA LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES ADOLESCENTS |
Projet de loi C-3. Deuxième lecture |
L'hon. Ethel Blondin-Andrew |
M. Maurice Dumas |
M. Keith Martin |
Mme Monique Guay |
M. Monte Solberg |
M. Rey D. Pagtakhan |
M. Antoine Dubé |
M. Inky Mark |
M. Derek Lee |
M. Stéphan Tremblay |
M. Dale Johnston |
M. John Bryden |
M. René Canuel |
Report du vote sur la motion |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
CODE CRIMINEL |
Projet de loi C-207. Deuxième lecture |
M. Maurice Vellacott |
M. Yvon Charbonneau |
M. Greg Thompson |
MOTION D'AJOURNEMENT |
Le projet de loi C-80 |
Mme Judy Wasylycia-Leis |
M. Yvon Charbonneau |
(Version officielle)
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 23
CHAMBRE DES COMMUNES
Le jeudi 18 novembre 1999
La séance est ouverte à 10 heures.
Prière
[Traduction]
CHAMBRE DES COMMUNES
Le président suppléant (M. McClelland): J'ai l'honneur de déposer sur le Bureau le rapport sur le rendement de l'administration de la Chambre des communes pour la période d'avril 1998 à mars 1999.
AFFAIRES COURANTES
[Traduction]
RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à trois pétitions.
* * *
DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES
Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 34(1) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport de la délégation canadienne de l'Association parlementaire Canada-Europe sur la huitième réunion annuelle de l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, qui a eu lieu à St-Petersbourg, en Russie, du 6 au 10 juillet 1999.
* * *
COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le huitième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre concernant la liste des membres associés du Comité permanent du développement des ressources humaines et de la condition des personnes handicapées.
Si la Chambre y consent, j'ai l'intention de proposer l'adoption du huitième rapport plus tard aujourd'hui.
* * *
[Français]
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ) demande à présenter le projet de loi C-323, Loi de 1999 modifiant la Loi sur l'assurance-emploi (annexe I).
—Monsieur le Président, ce projet de loi vise à assurer aux prestataires de l'assurance-emploi un nombre suffisant de semaines pour leur donner un revenu qui leur permette de se rendre à l'emploi suivant.
C'est pour contrecarrer les effets négatifs de la réforme de l'assurance-emploi qui a créé ce qu'on appelle le «trou du printemps», soit la période de 5 à 15 semaines qui n'est pas couverte par le régime actuel.
Nous espérons que ce projet de loi permettra de venir corriger une des lacunes majeures de la réforme de l'assurance-emploi.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI SUR L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ) demande à présenter le projet de loi C-324, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi (détermination de l'emploi assurable).
—Monsieur le Président, l'acharnement actuel du gouvernement à récupérer le plus de sommes possible chez les chômeurs crée un comportement inacceptable sur la détermination de l'assurabilité des gens.
Les très petites entreprises où il y a des liens familiaux font présentement l'objet d'un harcèlement épouvantable. Je souhaite donc que la décision sur l'assurabilité soit transférée de Revenu Canada à Ressources humaines Canada pour qu'elle soit prise dans les régions en tenant compte des réalités des très petites entreprises familiales qui sont touchées par le comportement actuel de Revenu Canada.
(Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
[Traduction]
LA LOI SUR LES TEXTES RÉGLEMENTAIRES
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-325, Loi modifiant la Loi sur les textes réglementaires (procédure d'annulation des textes réglementaires).
Monsieur le Président, je prends la parole pour présenter mon projet d'initiative parlementaire, intitulé Loi modifiant la Loi sur les textes réglementaires (procédure d'annulation des textes réglementaires).
Ce projet de loi vise à établir une procédure d'annulation applicable à tous les textes réglementaires qui sont soumis à l'étude du Comité permanent mixte d'examen de la réglementation dont je suis coprésident.
Ce projet de loi fera en sorte que le Parlement puisse annuler tout texte réglementaire établi en vertu des pouvoirs délégués par le Parlement ou le Cabinet. Il autorise le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation à agir en la matière. Il donne aux membres de la Chambre des communes et du Sénat les moyens de démocratiser notre droit dans cette enceinte.
Je soumets ce projet de loi à l'étude de la Chambre.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LOI CONCERNANT L'INTÉGRITÉ TERRITORIALE DU CANADA
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-326, Loi concernant l'intégrité territoriale du Canada.
—Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter mon projet de loi d'initiative privée intitulé Loi concernant l'intégrité territoriale du Canada. Je remercie le député d'Elk Island d'appuyer mon projet de loi.
Cette mesure législative a pour but d'affirmer la souveraineté et l'indivisibilité du Canada. La raison pour laquelle je présente cette mesure législative est qu'il n'existe dans la Constitution aucune disposition concernant le retrait de la fédération d'une province ou d'un territoire.
Je cherche par ce projet de loi à faire trois choses: premièrement, veiller à ce que la fédération canadienne ne soit privée d'aucune partie du territoire du Canada excepté si le Canada y consent en modifiant la Constitution; deuxièmement, veiller à ce qu'aucune province ou aucun territoire ne puisse décider unilatéralement de se retirer de la fédération; troisièmement, faire en sorte qu'aucune province ou aucun territoire ne puisse déclarer unilatéralement son intention de se séparer de la fédération et de former un État distinct.
Je soumets ce projet de loi à l'attention de la Chambre.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
LA LOI SUR LA PROTECTION DU REVENU AGRICOLE
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-327, Loi modifiant la Loi sur la protection du revenu agricole (dommages aux récoltes causés par les gaufres).
—Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter ce projet de loi concernant un problème qui coûte aux agriculteurs des millions de dollars par an. Cette mesure législative a pour but d'exiger du gouvernement fédéral qu'il indemnise les agriculteurs en cas de dommages causés aux récoltes par des rongeurs comme les gaufres, étant donné que le poison qu'utilisent normalement les agriculteurs pour contrôler ces parasites a été retiré du marché pour différentes raisons, notamment la protection de l'environnement. Les dommages causés aux récoltes par les gaufres coûtent des millions de dollars par an aux agriculteurs de l'Ouest. C'est un grave problème.
Je compte bien que ce projet de loi sera tiré au sort et que les agriculteurs seront protégés contre les dommages causés aux récoltes parce qu'on leur a retiré certains outils.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)
* * *
COMITÉS DE LA CHAMBRE
PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, avec le consentement de la Chambre, je propose l'adoption du huitième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, lequel a été déposé tout à l'heure.
Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
PÉTITIONS
LA SÉCURITÉ DE LA VIEILLESSE
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter 12 pétitions signées par 300 personnes, essentiellement de la circonscription de Surrey-Centre. Ces Canadiens se déclarent préoccupées par une situation sur laquelle ils souhaitent attirer l'attention de la Chambre, à savoir la discrimination dont se rend coupable le régime de sécurité de la vieillesse. En effet, la Loi sur la sécurité de la vieillesse défavorise les personnes âgées originaires de certains pays. En conséquence de quoi, les pétitionnaires demandent instamment au Parlement que les indemnités de sécurité de la vieillesse soient accordées en fonction des besoins de toutes les personnes âgées de plus de 65 ans, et non pas de leur pays d'origine.
LES JEUNES CONTREVENANTS
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36, je voudrais présenter une pétition signée par des personnes habitant le village de Wyoming. Ces personnes souhaitent porter à l'attention de la Chambre les recommandations suivantes: les jeunes délinquants qui se rendent coupables de crimes graves, notamment de voies de fait, d'agressions sexuelles, de voies de fait graves, de meurtre, de tentatives de meurtre, d'homicide involontaire coupable, d'agressions sexuelles graves et de crimes contre les personnes âgées, doivent être traduits devant un tribunal pour adultes; les récidivistes ne doivent pas pouvoir bénéficier de la protection accordée par la Loi sur les jeunes contrevenants; cette loi doit seulement protéger les contrevenants coupables d'une infraction unique; la victime et la population doivent être informées de la libération d'un jeune contrevenant qui a commis un crime grave; et la Loi sur les jeunes contrevenants doit être modifiée pour ne s'appliquer qu'aux enfants âgés de 10 à 15 ans.
Les pétitionnaires demandent humblement qu'il plaise au Parlement de veiller à protéger les droits des victimes de jeunes contrevenants, car ces personnes sont respectueuses de la loi, et de mettre un terme à l'usage abusif du l'appareil judiciaire exercé par les jeunes.
[Français]
LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES
M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, je dépose une pétition signée par 53 personnes, tous des livreurs de courrier postal rural, qui demandent au gouvernement l'abolition du paragraphe 13(5) de la Loi sur la Société canadienne des postes qui interdit le regroupement et la négociation collective.
La secrétaire parlementaire du ministre disait, l'autre jour, qu'un avis juridique ou un jugement d'une cour inférieure avait indiqué que le gouvernement était tout à fait légitimé de maintenir cette clause, qu'il n'y avait rien d'illégal là-dedans et que cela ne contrevenait pas à la Charte.
Je précise qu'il s'agit d'une cour inférieure et d'une opinion juridique. Mais le plus drôle dans tout cela, c'est que c'est la ministre qui fait sa loi, qui négocie avec ces employés-là ou qui leur interdit le pouvoir de négocier.
Donc, le gouvernement est en net conflit d'intérêts dans cette affaire. Je dépose donc cette pétition en leur nom.
[Traduction]
LES ÉMISSIONS PROVENANT D'AÉRONEFS
M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, plus de 500 résidents de la région d'Espanola ont signé une pétition afin d'exprimer leur préoccupation concernant la participation possible du gouvernement dans ce qui semble être des avions émettant des aérosols visibles. Ils ont trouvé des traces élevées d'aluminium et de quartz dans des échantillons particulaires et dans de l'eau de pluie. Ces faits combinés aux problèmes d'insuffisance respiratoire ont conduit ces Canadiens à agir et à demander au gouvernement des réponses claires.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'abroger toute loi permettant la dispersion de paillettes militaires ou de toute substance d'ensemencement de nuage par des avions militaires canadiens ou étrangers sans le consentement informé des citoyens canadiens concernés.
LES ALIMENTS TRANSGÉNIQUES
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais présenter une pétition au nom de 200 électeurs et autres de l'île de Vancouver qui sont préoccupés par les aliments génétiquement modifiés. Ils estiment que tout consommateur a le droit de savoir ce que contiennent les aliments qu'il mange. Ils demandent au Parlement d'exiger des fabricants et des producteurs d'aliments génétiquement modifiés l'étiquetage de ces produits en conséquence de manière à ce que le public puisse le comprendre.
LA CONSTITUTION
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, je prends la parole conformément à l'article 36 du Règlement, pour présenter une pétition signée par les habitants formidables de la province de la Nouvelle-Écosse, particulièrement des villes merveilleuses de Lower Sackville, Bedford, Beaverbank, Timberlea et des collectivités environnantes.
Les pétitionnaires prient le Parlement et les parlementaires de maintenir la formulation actuelle de la constitution et de préserver la vérité que le Canada a été et reste fondé selon les principes de la suprématie de Dieu et la primauté du droit.
LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE
M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens continuent d'être tout à fait indignés de l'inaction du gouvernement libéral. J'ai 146 signatures de plus sur des pétitions qui expriment cette indignation à l'égard de l'inertie du gouvernement relativement à la question de la pornographie juvénile.
Les pétitionnaires demandent que le gouvernement fasse tout ce qui est nécessaire pour rétablir immédiatement les dispositions du Code criminel qui rendent illégale la possession de pornographie juvénile.
* * *
QUESTIONS AU FEUILLETON
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous répondons aujourd'hui à la question no 3. .[Texte] Question no 3—M. Rick Borotsik:
Le ministère de l'Agriculture a-t-il élaboré un plan pour la mise sur pied d'un programme autonome d'autogestion du risque à l'intention de l'industrie horticole conformément au rapport final du Comité consultatif national sur la protection du revenu en date du 15 juin 1998 et, dans l'affirmative, ce plan, en quoi consiste-t-il?
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Au cours de leur conférence de juillet 1998, les ministres fédéral et provinciaux ont convenu d'évaluer la possibilité de mettre en oeuvre à l'échelle nationale un programme d'autogestion du risque dans le cadre du processus de renouvellement du cadre de protection du revenu agricole. Les discussions se sont poursuivies sur la politique de protection du revenu à long terme, au cours de la réunion des ministres qui s'est tenue en juillet dernier, à Prince Albert, en Alberta. Il a été convenu qu'une analyse plus détaillée et des discussions sont requises afin de permettre aux ministres de décider du cadre de l'entente quinquennale au cours de leur réunion qui se tiendra en février 2000.
Les programmes actuels et proposés font actuellement l'objet d'une évaluation sous l'angle de leur efficacité et des modifications qu'il y aurait lieu de leur apporter. À cet égard, une étude sur l'efficacité de l'autogestion du risque a été complétée et ses résultats préliminaires ont été communiqués aux représentants d'organismes de producteurs horticoles. Nous poursuivons ce processus dans le cadre des consultations auprès de l'ensemble du secteur, avec, notamment, le Comité consultatif national sur la protection du revenu.
[Traduction]
M. Derek Lee: Je demande, monsieur le Président, que les autres questions restent au Feuilleton.
Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?
Des voix: D'accord.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES ADOLESCENTS
PROJET DE LOI C-3—MOTION D'ATTRIBUTION DE TEMPS
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) propose:
Que relativement au projet de loi C-3, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, au plus un jour de séance supplémentaire soit accordé aux délibérations à l'étape de la deuxième lecture; et que 15 minutes avant l'expiration du temps prévu pour les affaires émanant du gouvernement au cours du jour de séance attribué pour l'étude à l'étape de la deuxième lecture de ce projet de loi, toute délibération devant la Chambre soit interrompue, s'il y a lieu, aux fins de cet ordre et, par la suite, toute question nécessaire pour disposer de l'étape à l'étude à ce moment soit mise aux voix immédiatement et successivement, sans plus ample débat ni amendement.
M. Randy White: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.
Le président suppléant (M. McClelland): La Chambre est saisie d'une motion et un rappel au Règlement n'est pas recevable à ce stade-ci.
[Français]
Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les non l'emportent.
Et plus de cinq députés s'étant levés:
Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.
[Traduction]
(La motion, mise aux voix, est adoptée.)
Vote no 54
POUR
Députés
Adams | Anderson | Assad | Assadourian |
Augustine | Baker | Bakopanos | Beaumier |
Bélair | Bélanger | Bellemare | Bennett |
Bertrand | Bevilacqua | Blondin - Andrew | Bonwick |
Boudria | Bradshaw | Bryden | Bulte |
Caccia | Calder | Cannis | Caplan |
Carroll | Catterall | Chamberlain | Chan |
Charbonneau | Clouthier | Collenette | Comuzzi |
Copps | Cullen | DeVillers | Dhaliwal |
Discepola | Dromisky | Drouin | Duhamel |
Easter | Eggleton | Folco | Fontana |
Fry | Gagliano | Godfrey | Goodale |
Gray (Windsor West) | Grose | Guarnieri | Harb |
Harvard | Hubbard | Ianno | Jackson |
Jennings | Jordan | Karygiannis | Keyes |
Kilger (Stormont – Dundas – Charlottenburgh) | Kilgour (Edmonton Southeast) | Knutson | Kraft Sloan |
Lastewka | Lavigne | Lee | Leung |
Limoges (Windsor – St. Clair) | Lincoln | Longfield | MacAulay |
Mahoney | Malhi | Maloney | Manley |
Marleau | Martin (LaSalle – Émard) | Matthews | McCormick |
McGuire | McKay (Scarborough East) | McLellan (Edmonton West) | McTeague |
McWhinney | Mifflin | Mills (Broadview – Greenwood) | Minna |
Mitchell | Murray | Myers | Nault |
O'Brien (Labrador) | O'Brien (London – Fanshawe) | Pagtakhan | Paradis |
Parrish | Patry | Peric | Peterson |
Pettigrew | Phinney | Pickard (Chatham – Kent Essex) | Pillitteri |
Pratt | Proud | Provenzano | Redman |
Reed | Richardson | Robillard | Rock |
Saada | Scott (Fredericton) | Sekora | Shepherd |
Speller | St. Denis | St - Julien | Stewart (Brant) |
Szabo | Telegdi | Thibeault | Torsney |
Ur | Volpe | Whelan | Wilfert |
Wood – 129 |
CONTRE
Députés
Abbott | Ablonczy | Alarie | Anders |
Bachand (Richmond – Arthabaska) | Bellehumeur | Benoit | Bergeron |
Bigras | Breitkreuz (Yorkton – Melville) | Brison | Canuel |
Casey | Casson | Chatters | Chrétien (Frontenac – Mégantic) |
Crête | Cummins | Dalphond - Guiral | Davies |
Desjarlais | Desrochers | Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière) | Dubé (Madawaska – Restigouche) |
Dumas | Duncan | Earle | Elley |
Epp | Forseth | Gauthier | Gilmour |
Girard - Bujold | Godin (Acadie – Bathurst) | Godin (Châteauguay) | Goldring |
Grewal | Grey (Edmonton North) | Guay | Guimond |
Hanger | Harvey | Herron | Hilstrom |
Johnston | Jones | Konrad | Laurin |
Lebel | MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) | Mancini | Marceau |
Mark | Martin (Winnipeg Centre) | McNally | Mercier |
Meredith | Morrison | Muise | Nystrom |
Penson | Perron | Rocheleau | Schmidt |
Solberg | Solomon | St - Hilaire | Stoffer |
Thompson (New Brunswick Southwest) | Tremblay (Lac - Saint - Jean) | Vellacott | Wasylycia - Leis |
Wayne | White (Langley – Abbotsford) | White (North Vancouver) – 75 |
«PAIRÉS»
Députés
Axworthy | Bachand (Saint - Jean) | Barnes | Bonin |
Brien | Brown | Cardin | Cauchon |
Coderre | de Savoye | Debien | Dion |
Duceppe | Finlay | Fournier | Gagnon |
Graham | Iftody | Karetak - Lindell | Lalonde |
Lefebvre | Ménard | Normand | O'Reilly |
Picard (Drummond) | Sauvageau | Serré | Steckle |
Tremblay (Rimouski – Mitis) | Turp | Vanclief | Venne |
Le Président: Je déclare la motion adoptée.
DEUXIÈME LECTURE
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 21 octobre, de la motion: Que le projet de loi C-3, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.
M. Bob Kilger (Stormont—Dundas—Charlottenburgh, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Des discussions ont eu lieu entre tous les partis et vous constaterez qu'il y a consentement pour la motion suivante. Je propose:
Que, lorsque le débat sur la deuxième lecture du projet de loi C-3 prendra fin plus tard aujourd'hui, toutes les questions nécessaires pour disposer de la deuxième lecture du dit projet de loi soient réputées mises aux voix, que le vote par appel nominal soit réputé demandé et reporté à la fin de la période prévue pour les ordres émanant du gouvernement le mardi 23 novembre 1999.
Le président suppléant (M. McClelland): Le whip du gouvernement a-t-il le consentement de la Chambre pour présenter la motion?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion présentée par le whip en chef du gouvernement?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir de poursuivre mon discours sur le projet de loi C-3, Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Comme je le disais avant que la Chambre ne s'ajourne, le gouvernement aime beaucoup parler. La ministre de la Justice a parlé de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents pendant des années. Elle a utilisé l'expression «en temps opportun» et a rafistolé la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, mais elle n'y a pas apporté les modifications nécessaires pour qu'elle soit efficace et qu'elle atteigne son objectif.
La semaine dernière, j'ai parlé d'une initiative concernant les jeunes, qui a été mise en place dans ma circonscription par une certaine Lola Champagne; il s'agit d'un programme de déjudiciarisation qui est excellent et qui fonctionne très bien car il fait appel à la participation des membres de la communauté. Le programme établit une structure qui s'adresse aux jeunes qui ont commis un premier crime qui ne comprenait pas de violence, leur permettant de comparaître devant le comité de justice pour les jeunes dans le cadre d'un processus différent de ce qui existe à l'heure actuelle.
Nous savons maintenant que lorsqu'un jeune est accusé d'un crime, il se passe souvent un an et même parfois plus avant que l'affaire soit entendue par les tribunaux et le jeune reste dans l'incertitude pendant tout ce temps. Le problème n'est pas résolu. On ne s'en occupe pas.
Ce programme de déjudiciarisation des jeunes, qui est un programme excellent, traite tout le dossier dans les semaines, et parfois même dans les jours qui suivent l'infraction. Il met le jeune en contact avec les victimes de ses actes ainsi qu'avec les leaders de la communauté pour tenter d'en arriver à une solution, entraînant certaines conséquences pour le jeune.
Un organisme communautaire exerce par la suite un certain suivi. Une personne travaille avec le jeune, un peu comme le font les Grands Frères et les Grandes Soeurs, pour l'aider au cours de cette période et s'assurer qu'il ne s'engage pas dans une nouvelle situation fâcheuse. C'est un excellent programme. Le gouvernement devrait se pencher sur la question.
J'ai essayé de présenter à la Chambre le rapport sur cet excellent programme en vigueur dans ma circonscription, Maple Ridge, pour que tous les députés en soient informés et aient l'occasion d'en parler avec les gens de leurs propres circonscriptions. Comme il fait partie des dirigeants de sa communauté, le député a une certaine influence et il peut s'entretenir avec les autres dirigeants, les maires, les membres des conseils municipaux, les chefs de police et tous ces gens pour poursuivre ce genre d'initiative.
Ce consentement a été refusé par le gouvernement et c'est une honte. C'était pourtant une solution positive et encourageante au problème que représente la justice pour les jeunes.
On voit une fois de plus que le gouvernement semble dire: «Nous allons simplement dire ce qu'il faut pour faire la manchette et donner l'impression que nous faisons des efforts dans ce dossier», sans jamais rien faire de concret en vue de prendre les mesures nécessaires pour régler le problème. Ce projet de loi sur le système de justice pour les adolescents en est un autre exemple. Voilà comment fonctionne le gouvernement.
Et il recourt encore une fois à une motion d'allocation de temps pour limiter le débat sur cette mesure législative. Le gouvernement en a décidé ainsi plutôt que d'écouter les propositions venant d'autres députés, ou encore d'accepter que tous les députés puissent lire un excellent rapport de ma collectivité. Il préfère imposer l'allocation de temps. C'est une mauvaise façon de procéder.
Les Canadiens commencent à se rendre compte que le gouvernement ne sait pas s'y prendre. Dans un effort pour corriger le système de justice pour les jeunes, il présente un projet de loi qui est loin de pouvoir corriger les graves problèmes qui préoccupent les Canadiens.
Au Canada, on s'inquiète beaucoup des jeunes de moins de 12 ans qui ont des démêlés avec la justice et qu'il faut aider. Dans la loi actuelle et dans le projet de loi dont nous sommes saisis, il n'y a aucune disposition qui permette d'aider les jeunes de moins de 12 ans qui ont subi de mauvaises influences et se sont impliqués dans des activités criminelles.
Le gouvernement se contente de répéter que certains s'entêtent à vouloir mettre les jeunes derrière les barreaux. Il n'y a rien de plus faux. Nous voulons aider ces plus jeunes avant qu'ils ne s'engagent dans la voie d'infractions plus graves. Sous le régime de la loi actuelle, il n'y a pas moyen de le faire. Le gouvernement ne s'est pas attaqué à ce problème. Les députés ministériels font des observations calomnieuses à l'égard de ceux qui préconisent de telles solutions.
Le député de Crowfoot, qui est depuis longtemps membre du Comité de la justice, a émis beaucoup de bonnes propositions au fil des années ici à ce sujet. En tant qu'ancien membre de la GRC, il sait que s'occuper des plus jeunes contribuerait à les détourner de la voie d'infractions plus graves. Or, la ministre de la Justice et le gouvernement refusent d'écouter ces idées et ces suggestions. Ils ont tort. Des jeunes de 10 et 11 ans risquent ainsi d'être recrutés par d'autres plus vieux pour participer à des actes criminels parce qu'il n'y a rien qu'on puisse faire à l'égard des plus jeunes. C'est ainsi que, dans certains cas, des adolescents plus vieux exploitent des plus jeunes en les faisant participer à des activités criminelles, sachant que les plus jeunes sont à l'abri de la loi. C'est regrettable.
La ministre de la Justice le sait, mais elle ne fait rien à ce sujet. Elle et les doreurs d'image libéral tentent plutôt de créer l'impression que ceux qui préconisent cette idée ont tort, alors qu'en fait les policiers et les intervenants auprès des jeunes disent qu'il nous faut un moyen d'aider ces plus jeunes.
Je connais des agents de la GRC dans ma circonscription qui disent connaître de ces jeunes de 10 et 11 ans et attendre impatiemment qu'ils atteignent l'âge de 12 ans pour leur faire assumer la responsabilité de leurs actes. Nous savons que cela ne concerne qu'une faible proportion de jeunes, mais un petit groupe de jeunes peut causer beaucoup de dommage et de tort s'il n'y a pas de système en place pour s'occuper d'eux et les aider, de sorte qu'ils ne s'engagent pas dans ces activités.
Faute de prendre les mesures nécessaires pour apporter ces changements au moyen d'amendements au projet de loi, le gouvernement rate une occasion en or de résoudre un grave problème. Il peut bien dire ce qu'il veut, présenter les choses sous un autre angle et faire propager par ses partisans le message qu'il fait quelque chose pour remédier au système de justice pour les adolescents, mais en réalité, le projet de loi présente tellement de lacunes que les décisions qui en découleront entraîneront quand même de graves problèmes. Le gouvernement tient une occasion en or d'apporter maintenant, dans le projet de loi à l'étude, les changements nécessaires qui contribueront à résoudre le problème. Au lieu de cela, qu'a fait le gouvernement? Il a invoqué l'attribution de temps et n'a pas tenu compte des suggestions des autres visant l'amélioration du projet de loi.
M. Steve Mahoney: Ce n'est pas vrai.
M. Grant McNally: Le député de Mississauga-Ouest affirme que ce n'est pas vrai. J'aimerais entendre ses suggestions sur la façon de régler le problème d'adolescents de 10 ou 11 ans qui commettent des infractions graves, mais échappent à toute mesure en vertu de la loi, alors qu'il existe un programme de déjudiciarisation qui fonctionne très bien dans ma collectivité. Je ne sais pas s'il existe un tel programme dans la circonscription du député, mais le projet de loi ne comporte rien qui nous permette d'agir à l'égard des plus jeunes.
Le gouvernement devrait permettre aux plus jeunes de participer aux activités prévues par les programmes de déjudiciarisation. Vu qu'ils en sont souvent à leur première infraction, un tel programme leur apporterait de l'aide avant qu'ils ne soient happés par le cercle vicieux de la criminalité. Pourtant, les députés d'en face refusent d'entendre cette suggestion.
Nous voyons le topo. Qu'il s'agisse de justice pour les adolescents ou de toute autre question, le gouvernement semble heureux de maintenir le statu quo. Il déplace un peu les pièces du casse-tête pour donner l'impression qu'il prend des mesures alors qu'en regardant sous la surface et en analysant comment ce projet de loi s'appliquera aux gens dans la réalité, on constate que le gouvernement de modifie pas sensiblement le problème.
Tant que le gouvernement ne fera pas ces changements, le Parti réformiste continuera à réclamer l'adoption de solutions proactives et positives et à travailler à la Chambre de manière à arriver à former le gouvernement. Nous ferons les changements nécessaires, parce que le gouvernement libéral ne fera rien pour régler les problèmes graves, que ce soit dans le domaine de la justice pour les jeunes ou dans tout autre domaine. Le gouvernement a tort de ne pas agir. Le Parti réformiste continuera, de manière positive et proactive, à proposer des solutions dont le gouvernement continuera à faire fi.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, quel est, de l'avis de mon collègue, le principal facteur qui incite un jeune de 10 ou 11 ans à commettre un crime de nature violente ou aléatoire? Il y a de nombreux éléments qui entrent en ligne de compte, mais quel est, selon lui, le principal facteur qui incite des jeunes de cet âge à commettre un crime gratuit? Nous avons lu récemment dans les journaux au sujet du garçon de 11 ans aux États-Unis.
M. Grant McNally: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. Je sais qu'il se préoccupe de la violence au sein de sa propre collectivité. Il s'agit d'une question difficile.
Différents facteurs pourraient inciter un jeune de 10 ou 11 ans à commettre un acte de violence. À mon avis, le principal facteur est le manque d'affection ou de soutien de la part de sa famille. C'est le principal facteur, même s'il en existe de nombreux autres.
Pour régler le problème, nous pourrions mettre sur pied un réseau de soutien afin d'appuyer la famille du jeune, et ce, avant le fait de manière à prévenir des situations où des jeunes de 10 ou 11 ans en viennent à commettre des actes de violence. Les députés pourraient contribuer à remédier à la situation en adoptant une mesure législative qui appuierait préventivement la famille et la communauté et qui examinerait la façon dont nous traitons les jeunes et l'appui que nous pouvons accorder à l'unité fondamentale de notre société, la famille, avant même que le jeune n'en vienne à commettre un crime.
La question est très intéressante. Il y a de nombreux facteurs qui entrent en jeu, mais je vous ai décrit celui qui me semble le plus important.
M. John Maloney (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement l'exposé que le député a présenté aujourd'hui et ceux qu'il a présentés précédemment sur cette question.
Il a traité longuement du programme de déjudiciarisation, lequel a donné d'excellents résultats dans sa collectivité. Il a également mentionné les comités de justice pour la jeunesse. J'attire l'attention du député sur le fait que ce projet de loi prévoit justement un comité de justice pour la jeunesse, comme le faisait la Loi sur les jeunes contrevenants. Tous les aspects bénéfiques dont le député a parlé existent déjà dans cette loi.
Le député peut-il répondre à cela? N'a-t-il pas lu la loi? N'est-il pas au courant de l'article 18 de la loi? N'est-il pas au courant de l'article équivalent dans la Loi sur les jeunes contrevenants?
M. Grant McNally: Monsieur le Président, bien sûr que je connais l'article 18 de la loi. Ce à quoi je faisais allusion, c'est au fait que des jeunes de 10 et 11 ans ne peuvent pas participer à un programme de déjudiciarisation.
Je suis également conscient du fait que le député est secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice. Je sais aussi que le nom du député figurait dans une lettre adressée au premier ministre, lui demandant de songer à invoquer la disposition de dérogation afin d'enrayer la pornographie juvénile dans ma province, la Colombie-Britannique. Je sais qu'il a voté contre cette mesure. Il a écrit une lettre en faveur de cette mesure, puis a voté contre. Avec son groupe, il a voté pour que le jugement faisant jurisprudence soit maintenu. Je suis au courant de cela. Je suis au courant de bien des choses.
Il faudrait que les habitants d'Erie—Lincoln sachent et soient bien au courant du fait que leur député a appuyé le rejet d'une motion d'opposition qui aurait annulé le jugement rendu au sujet de la pornographie juvénile. Il faut qu'ils le sachent. Le gouvernement ne tient pas parole. Le député n'a manifestement pas tenu parole. C'est de cela que je suis au courant.
M. John Maloney: Monsieur le Président, le député n'a pas répondu à ma question. Ne sait-il pas que l'article 18 prévoit des programmes de déjudiciarisation? N'a-t-il pas lu la loi?
Il a beaucoup parlé des comités de justice pour la jeunesse. C'est de déjudiciarisation dont il est ici question. Cet aspect était prévu dans l'autre loi. Aurait-il l'obligeance de répondre à cela?
M. Grant McNally: Monsieur le Président, le député d'Erie—Lincoln pourrait peut-être retirer son écouteur et écouter très attentivement. Je le lui ai dit une fois et je vais le lui répéter. Je suis au courant des programmes de déjudiciarisation pour les jeunes. Peut-être n'a-t-il pas compris lorsque j'ai dit que des jeunes de 10 et 11 ans ne peuvent participer à ces programmes s'ils ne sont pas visés par la mesure législative. Il ne comprend pas. Le député, qui est le secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice, ne comprend pas cette réalité fondamentale.
Pourquoi son groupe m'a-t-il refusé la permission de déposer à la Chambre un rapport portant sur un programme de déjudiciarisation pour les jeunes qui fonctionne bien dans ma circonscription? Pourquoi ont-ils agi de la sorte?
M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'espère que vous ferez preuve d'indulgence à mon égard car j'ai le rhume aujourd'hui. Toutefois, lorsque j'ai constaté que j'avais la possibilité de prendre la parole au sujet de ce projet de loi, j'ai décidé de me présenter ici quand même. J'estime en effet que le projet de loi, le débat et toutes les notions propres au système de justice pour les adolescents constituent presque une question déterminante pour le pays. Le traitement que nous réservons aux jeunes en difficulté et aux jeunes à risque en dit long sur ce pays en tant que société et sur nos valeurs.
À cet égard, il est fort intéressant d'écouter les députés du Parti réformiste se prononcer sur cette question. À mon avis, les vues qu'ils expriment vont totalement à l'encontre des mesures qui, selon la majorité des Canadiens, sont nécessaires et donneront des résultats dans le cas des jeunes à risque ou des jeunes contrevenants.
Leur point de vue est diamétralement opposé dans la mesure où, s'ils devaient modifier le titre de ce projet de loi, ils le qualifieraient de projet de loi de revanche à l'endroit des adolescents plutôt que de projet de loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents.
Tous les propos venant de l'autre côté de la Chambre ne traitent que de vengeance. Si nous nous donnons pour quelque groupe d'âge que ce soit un système de justice fondé sur la vengeance, cela voudra dire que nous avons beaucoup régressé comme société humanitaire. Nous retournerions 50 ou 100 ans en arrière, à l'époque où c'était la seule préoccupation des gens; si une personne commettait un crime, il fallait se venger.
Il est tout à fait étonnant de constater que la majorité des députés du parti viennent d'une région du pays où les gens croient dans la bible.
M. Lynn Myers: Une bande de dinosaures.
M. Steve Mahoney: Ils viennent d'une région de notre pays qui est ancrée dans des croyances chrétiennes.
M. Lynn Myers: Ils veulent les fouetter.
M. Steve Mahoney: Ils viennent d'une région de notre pays où l'on sait qu'il est écrit dans la Bible...
M. Ken Epp: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Le Règlement de la Chambre interdit expressément d'imputer de faux mobiles à d'autres députés. Le député et son voisin ne font que cela. Je vous demande de les inviter à se rétracter et à bien se conduire ici.
Le président suppléant (M. McClelland): Aucun député n'ignore qu'il est strictement interdit de dénigrer directement un autre député. Quant à prêter des intentions malveillantes à un parti politique au cours du débat, je dirai que, si j'en juge du moins par mon expérience, cela arrive tous les jours à la Chambre. Si le député de Mississauga-Ouest croit qu'il a dénigré un député en particulier, je lui demanderai de se rétracter.
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je n'ai parlé de personne en particulier au cours de mes observations. Je parle d'un parti dont les députés exposent ici leurs idées et leurs principes. Si nous n'aimons pas leurs principes, ils disent en avoir d'autres.
De toute manière, ce que je disais, c'est que les réformistes donnent l'impression de croire que la vengeance est la première motivation.
Ce que j'allais dire lorsque le député m'a interrompu, c'est qu'il est écrit dans la Bible—que les députés connaissent probablement plus que moi—«À moi la vengeance, à moi la rétribution, dit le Seigneur». La vengeance n'appartient pas à l'État. La vengeance ne doit être un outil légal dans aucune mesure législative.
Les réformistes tentent de nous détourner de notre travail. Monsieur le Président, s'il y a lieu d'invoquer le Règlement au sujet du cirque dont nous sommes témoins ce matin, le rappel doit porter sur le fait que l'opposition ne s'est pas présentée ce matin et a plutôt essayé d'empêcher qu'il n'y ait quorum. Les députés de l'opposition ont déjà dit que, à moins qu'ils n'obtiennent un référendum national sur le traité nisga'a—qui est l'un des projets de loi et l'un des traités les plus importants pour le Canada—, à moins que nous n'acceptions un vote national tout à fait farfelu sur ce traité, ils allaient faire obstacle à tous les projets de loi possibles, retarder les travaux et recourir à toutes les tactiques possibles.
Il faut que les Canadiens soient au courant. Il faut qu'ils sachent que c'est un spectacle affligeant de voir les députés de l'opposition défiler à l'entrée principale du Parlement avec des sombreros; que c'est aussi un spectacle affligeant de les voir conduire autour de l'enceinte parlementaire un tacot peint aux couleurs du drapeau canadien. C'est presque une profanation du drapeau canadien. Voilà l'attitude que ces députés adoptent à la Chambre.
Le député qui a pris la parole avant moi me semblait tenir des propos très sensés jusqu'à ce que notre secrétaire parlementaire lui demande s'il avait lu le projet de loi. Au lieu de répondre qu'il l'avait lu, il s'est lancé dans une diatribe sur la pornographie juvénile.
Chaque fois, c'est une tentative flagrante d'induire le public en erreur au sujet de la position du gouvernement ou d'un député comme le secrétaire parlementaire.
Le gouvernement a bel et bien dit que la pornographie juvénile lui faisait horreur et que la décision rendue par la cour provinciale en Colombie-Britannique lui paraissait exécrable.
M. Ken Epp: Mais vous ne faites rien.
M. Lynn Myers: Vous êtes une bande de dinosaures alarmistes.
M. Steve Mahoney: Les députés d'en face prétendent maintenant que nous ne faisons rien. La vérité, c'est que nous en appelons de la décision. La Cour suprême du Canada et le système de justice de notre pays sont en place pour permettre à quiconque d'en appeler d'une décision qu'il n'appuie pas.
Le gouvernement a décidé d'en appeler de la décision. Serait-il plus efficace que nous présentions une loi du Parlement qui abrogera ou plutôt qui fera valoir la disposition d'exemption pour dire que nous ne souscrivons pas à la décision du tribunal? Ou serait-il plus efficace de demander à la Cour suprême d'analyser la décision et d'examiner les justifications que pourrait avoir un juge de la Colombie-Britannique, une région de notre pays que les députés d'en face devraient, si j'ose dire, connaître mieux que moi?
Quelles justifications un juge pourrait-il avoir? Je suppose que ce magistrat connaît la loi. Je suppose qu'il est intègre. Je suppose qu'il a étudié la question soigneusement, mais le fait est qu'il a statué que la possession de matériel de pornographie juvénile est acceptable. Je ne connais aucun Canadien qui abonde dans le même sens que la décision rendue.
M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Si j'ai bien entendu, le député a laissé entendre que mon collègue aurait délibérément induit les Canadiens et la Chambre en erreur en faisant certaines déclarations. Je ne crois pas que ce soit correct de...
Le président suppléant (M. McClelland): Je dois dire respectueusement que j'ai écouté très attentivement ce que le député a dit et que ce n'est pas là l'impression que j'ai eue. Il ne fait pas de doute que le député de Mississauga-Ouest a accusé l'opposition, et certains députés de l'opposition, d'avoir induit les Canadiens en erreur quant à l'intention du gouvernement.
Je ne crois cependant pas que cela soit déplacé. À mon avis, c'est le genre de débat qui se déroule chaque jour à la Chambre, d'un côté comme de l'autre. Ce qui est inacceptable, c'est de dénigrer des députés en particulier. Je ne crois pas que dénigrer les motifs d'autres partis politiques soit quelque chose d'inacceptable dans notre système de gouvernement.
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je comprends la sensibilité des députés d'en face. Le fait est que la vérité peut parfois être quelque peu blessante. Tout ce qu'ils veulent faire, c'est invoquer le Règlement pour tenter de me faire taire. C'est là leur intention. Franchement, ils n'aiment peut-être pas ce que je dis, mais je m'en fiche éperdument. Je ne dis pas cela pour leur plaire. Je le dis pour contrer leurs allégations concernant l'attitude du gouvernement.
Ce n'est tout simplement pas vrai que nous n'avons rien fait au sujet de cette décision en Colombie-Britannique. C'est tout simplement faux. Je ne comprends pas comment un parti politique qui persiste à tromper les gens à la Chambre et ailleurs peut s'opposer à ce que j'ai dit.
M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le député vient d'affirmer directement que les députés ne disent pas la vérité. C'est exactement ce qu'il a dit. Il a dit que le parti a pris la parole. Ce ne sont pas les partis qui prennent la parole à la Chambre, mais les députés. Nous prenons la parole en tant que députés. Je voudrais qu'il retire ses propos. Ce qu'il a dit n'est pas vrai.
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je suppose que nous pourrions continuer ainsi toute la journée. Je voudrais attirer votre attention sur un point qui a été soulevé par le député qui vient de parler, et je parle directement de ce député. Je tiens à souligner que je suis en désaccord avec lui. Je considère que ses observations sont peut-être inexactes, malheureusement. Il a dit que le gouvernement n'a écouté aucun des amendements qui ont été présentés par d'autres députés à la Chambre.
Nous connaissons la tragédie vécue par le député de Surrey-Nord. Nous savons quelle douleur il peut ressentir et nous voulons tous le réconforter pour la perte qu'il a subie. Grâce à son apport, et je tiens à le souligner, d'autres dispositions du projet de loi prévoiraient des peines plus sévères pour les adultes qui enfreignent sciemment une ordonnance du tribunal les enjoignant de surveiller des jeunes à qui l'on a refusé la libération sous caution et qui leur ont été confiés; ces adultes pourraient en effet être accusés d'une infraction punissable par voie de déclaration sommaire de culpabilité ou d'un acte criminel. Cette mesure donne suite à une proposition qui a été faite par le député de Surrey-Nord.
J'ignore comment nous pourrions être plus clairs. Nous avons écouté le député en comité. Nous l'avons écouté à la Chambre. Nous savons qu'il souffre et nous pensons qu'il a mis une bonne idée de l'avant. Lorsqu'un tribunal autorise un jeune contrevenant à rentrer chez lui sous la surveillance d'un adulte et que cet adulte décide de partir en vacances en Floride ou ailleurs en laissant le jeune seul à la maison, c'est l'adulte qui doit assumer les conséquences de sa décision. Je crois que c'est juste. Le député a exposé une tragédie réelle à la Chambre des communes, et le gouvernement l'a écouté et en a tenu compte dans le projet de loi. Les députés peuvent intervenir s'ils le veulent, mais je maintiens que ce que le député affirmait est inexact parce que le projet de loi a été modifié pour tenir compte de ces situations.
Je voudrais parler de l'âge. Certains prétendent que nous devrions abaisser à 10 ans l'âge à partir duquel les jeunes sont assujettis à la loi sur le nouveau système de justice pour les jeunes. Cet âge est actuellement de 14 ans.
Ma femme Katie et moi avons élevé trois fils. Ils ont aujourd'hui 24, 27 et presque 29 ans. C'est difficile à croire tellement j'ai l'air jeune. Mais lorsque mes fils grandissaient, il y avait beaucoup d'autres garçons autour ainsi que des filles, Dieu soit loué. Les parents qui n'ont pas réussi à inculquer leurs valeurs à leurs enfants à l'âge de 7 ans n'y parviendront jamais. Je ne pense pas que l'on puisse avoir une énorme influence sur les enfants passé cet âge. Je parle ici de valeurs fondamentales, de la capacité de faire la différence entre le bien et le mal. Si d'autres pensent comme moi, j'imagine que l'on pourrait bien abaisser l'âge limite fixé dans la loi à sept ou huit ans.
L'opposition n'essaie de parler que des crimes qui font sensation, et nous les connaissons. Nous avons été témoins d'un incident tragique survenu la semaine dernière dans un parc de Toronto, où 10 ou 12 jeunes ont, de façon tout à fait inadmissible, battu un jeune garçon à mort. Qu'est-ce qui peut bien leur passer par la tête? C'est comme une meute d'animaux. Comment peuvent-ils faire une chose pareille, qu'aucun d'entre nous ne peut comprendre. Voyez ce qui s'est produit à Taber, en Alberta. Une jeune fille a été battue à mort par d'autres jeunes filles.
Il y a, sans aucun doute, un problème dans notre société, mais il est honteux d'utiliser le débat sur ce projet de loi pour simplement faire du sensationnalisme avec ces nouvelles et soulever les passions des gens plus bornés dans notre société. Le projet de loi permet de traduire devant un tribunal pour adultes de jeunes délinquants violents. Voulons-nous que des jeunes de huit ans soient emprisonnés ou se retrouvent entre les mains de la police?
M. Werner Schmidt: Qui a dit cela?
M. Steve Mahoney: Des jeunes de dix ans alors. Je reconnais qu'il est question de dix ans. Cependant, j'utilise mon analogie selon laquelle je crois qu'à sept ans, les parents doivent normalement avoir inculqué à leur enfant les sentiments, la compréhension et les valeurs morales de base nécessaires. Si d'autres croient cela, alors l'âge pourrait être réduit à huit ans. Mais quel type de société aurions-nous?
Il y a bien eu cette effroyable tuerie en Alberta et ce meurtre à Toronto, mais la grande majorité des jeunes contrevenants ne commettent pas de meurtre. Ils ne sont pas coupables de meurtre, d'homicide involontaire coupable, de voies de fait graves ou de viol. Ils commettent des crimes qui nous amènent à nous demander vers où ils s'en vont.
Ayant élevé moi-même trois jeunes garçons, comme je le disais, il y a bien des jours où je me suis demandé ce qu'ils pouvaient bien avoir dans la tête. Il semble presque que de l'âge de 12 ou 13 ans jusqu'à 22 ans environ le cerveau cesse de fonctionner, du moins en ce qui concerne les rapports avec les parents, mais nous parvenons quand même à passer à travers. Nous luttons et nous espérons que nous les avons assez bien éduqués jusqu'à l'âge de sept ans pour qu'ils s'en sortent. Nous espérons qu'ils ne commettront pas d'erreurs.
Il y a de nombreux exemples de jeunes qui ont commis ce type d'erreurs. Je pense que nous devons, et c'est ce que fait ce projet de loi, faire reposer le système de justice pénale pour les adolescents sur la compassion et non pas sur la vengeance. Nous devons le faire reposer sur la réadaptation, non pas sur la vengeance. Nous devons le faire reposer sur l'espoir et la conviction que les chances de réadaptation d'un adolescent qui commet un crime ou qui récidive sont plus grandes qu'elles ne le sont dans le cas d'un adulte et qu'il doit donc y avoir des différences. Pourtant, quand un adolescent commet un crime horrible, la société est furieuse.
J'étais à Londres, en Angleterre, quand on a trouvé un tout petit enfant, presque un bébé, battu à mort sur la voie ferrée. Il s'est trouvé que les auteurs de ce crime étaient aussi de tout petits enfants, presque des bébés. J'ai déjà dit à la Chambre ce que mon beau-frère, un Anglais, m'avait alors dit que, quand les bébés commencent à tuer d'autres bébés, il y a un problème.
Devons-nous mettre ces enfants entre les mains du système de justice pour adolescents? Devons-nous dire à la police de s'en occuper? Que fait-on des parents? Que fait-on du système d'éducation? Que fait-on de l'aide à l'enfance? Les parents nourriciers sont de véritables héros pour le travail qu'ils font dans notre société, car nous savons qu'à part certains, les jeunes délinquants viennent généralement de foyers brisés. Les jeunes délinquants sont eux-mêmes des victimes de mauvais traitements.
J'ai lu hier dans les journaux de Toronto l'histoire de ces femmes qui avaient été placées au foyer pour jeunes filles de Grandview, qui avaient eu droit aux excuses du procureur général de la province de l'Ontario pour avoir été victimes de mauvais traitements. Ce sont des femmes dans la quarantaine, la cinquantaine, la soixantaine. La plus âgée a dans les soixante-dix ans. Elle a raconté que, placée en garde à l'âge de treize ans, on l'avait mise dans une cellule et violée après l'avoir complètement déshabillée. Elle était incontrôlable, pleurant et sanglotant sur l'épaule d'amis et de parents qui de trouvaient là.
Comment peut-on réparer ce genre de dommages et toutes les conséquences qui en découlent? On peut s'excuser. Le procureur général de l'Ontario a eu un bien beau geste en se levant pour corriger un tort qui remontait à plusieurs années. Je dois avouer que j'ai honte de reconnaître que nous n'avons rien fait dans ce sens au moment où je siégeais à l'Assemblée législative de l'Ontario. Nous aurions dû offrir des excuses à ces femmes. Elles ont dit en sanglotant que ce qui les avait le plus émues, c'était que les députés provinciaux les avaient considérées comme des personnes et non pas uniquement comme des statistiques.
C'est d'après moi la chose qui importe le plus dans ce projet de loi sur le système de justice pour les jeunes. Nous pouvons nous pencher sur les statistiques. Nous pouvons établir la limite à 14, 12, 10 ou même 8 ans, mais nous devons nous pencher sur chacun des cas individuellement. Nous devons tenter de comprendre ce qui pousse les jeunes à commettre un meurtre ou des voies de fait graves. Je comprends ce qui les pousse à voler quelque chose dans un magasin, à faire du vol à l'étalage ou autre chose du genre. Ce peut être une incartade qui peut parfois prendre l'aspect d'une blague. C'est une chose que la société ne peut accepter. La mesure législative actuelle permettra de régler ces questions parce que ces jeunes ne seront pas pris en charge par le système pénal mais bien par la communauté.
C'est au niveau communautaire qu'on peut agir pour venir en aide aux jeunes, que ce soit par l'intermédiaire de la protection de l'enfance, du système d'éducation ou des groupements religieux ou en offrant des services de counselling aux parents. On peut dire aux parents que leurs jeunes ont de sérieux problèmes, qu'ils violent des règles que nous considérons comme importantes et que nous voulons que tout cela cesse.
Les modifications apportées feront de ce projet de loi une mesure législative plus responsable pour les jeunes contrevenants et pour tous les Canadiens.
Le président suppléant (M. McClelland): Avant que nous passions à la période des questions et des observations, on m'a signalé que le député de Mississauga-Ouest—je ne l'ai pas entendu, mais d'autres m'ont dit l'avoir entendu—a déclaré qu'un député avait délibérément trompé la Chambre.
Si c'est le cas, je demande au député de Mississauga-Ouest de retirer ses paroles. Sinon, nous pouvons poursuivre. Plutôt que de nous obliger à vérifier les bleus, j'ose espérer que le député de Mississauga fera en sorte que cela ne figure pas au compte rendu.
M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je n'ai pas dit qu'il avait trompé la Chambre. Ce que j'ai dit, c'est que je crois que la déclaration qu'il a faite était inexacte. Je voulais y apporter une correction en lisant le projet de loi. Je ne l'ai pas accusé d'avoir trompé la Chambre.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, je ne comprends pas tout à fait les critiques du député de Mississauga-Ouest à l'endroit des réformistes. Le projet de loi que l'on a devant nous ce matin est la politique réformiste que le gouvernement a mis dans un texte de loi.
Qui, à la Chambre, a demandé de rendre publics les noms des jeunes criminels, comme on le retrouve à l'heure actuelle dans le projet de loi C-3? Ce sont les réformistes. Qui, à la Chambre, a demandé que les jeunes criminels soient référés le plus souvent possible devant les tribunaux pour adultes? Ce sont les réformistes. Qui, à la Chambre, demande des peines toujours plus sévères et toujours plus de répression à l'endroit des jeunes? Ce sont les réformistes.
Je ne comprends pas que le député libéral se lève et critique le Parti réformiste. C'est exactement cette politique que la ministre de la Justice a mis dans un texte de loi. C'est une politique qui a fait la preuve qu'elle ne fonctionne pas. C'est une politique qui en a fait la preuve qu'au Québec—et tout le monde s'entend pour le dire—elle ne marche pas.
Il faut aller au niveau de la réadaptation. Rien dans le projet de loi ne va inciter les autres provinces, qui n'appliquent pas de toute façon la Loi sur les jeunes contrevenants qui existe aujourd'hui, à appliquer la nouvelle loi. De plus, cela va coûter des millions de dollars pour mettre en branle ce nouveau projet de loi, alors que cela fait 16 ans qu'on applique la loi au Québec et que l'on a des résultats probants, de très bons résultats à ce niveau-là.
La ministre de la Justice, suite aux pressions de l'Ouest canadien, met la loi à la poubelle et en fait une nouvelle. Ce ne sont pas des modifications—il faut enlever cela de notre vocabulaire—à la Loi sur les jeunes contrevenants, c'est une nouvelle loi. C'est une nouvelle loi intitulée, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents. C'est tout un revirement de vocabulaire, c'est tout un revirement de philosophie.
Si on dit qu'on veut faire un projet de loi pour la sécurité du public, on se trompe. À long terme, le Canada et le Québec vont payer pour les modifications qu'on vient d'apporter avec ce projet de loi. Quand les jeunes vont réintégrer la société, ils ne seront pas des citoyens anonymes comme on réussit à le faire aujourd'hui en appliquant correctement la loi et en investissant de l'argent, comme le Québec le fait, dans l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants qui est en vigueur aujourd'hui.
À mon avis, le député d'en face ne sait pas de quoi il parle. Je pense qu'il n'a même pas lu le texte du projet de loi C-3 et, surtout, qu'il n'a pas regardé les différences entre l'actuel système concernant les jeunes contrevenants et le projet de loi C-3. Ce que j'ai entendu ce matin, c'est un scandale.
[Traduction]
M. Steve Mahoney: Madame la Présidente, seul un bloquiste peut voir dans cette initiative un moyen de confronter le Québec au reste du pays. Je le remercie cependant d'avoir indiqué que cette province obtient des résultats probants avec ses jeunes contrevenants, ce dont je la félicite d'ailleurs. En fait, le projet de loi prévoit beaucoup de souplesse, ce qui permet à l'ensemble des provinces, et non pas uniquement au Québec, de l'appliquer dans le contexte de leur propre système de justice.
Parlons de la question de la publication des noms. Ce ne sont pas les réformistes qui m'ont convaincu de le faire, mais plutôt mes électeurs. À vrai dire, je pense que, bien avant mon élection à la Chambre, la population ne voyait pas pourquoi un jeune contrevenant ayant commis un crime dit d'adulte et ayant été traduit devant un tribunal pour adultes ne serait pas traité sur un pied d'égalité avec les adultes.
Je précise que nous n'avons pas l'intention de publier le nom de tous les jeunes contrevenants. Nous envisageons plutôt de publier, dans le cadre de l'application normale de la justice, les noms des jeunes contrevenants qui sont jugés dans le système pour adultes. Je rappelle que ce sont ceux qui se seraient rendu coupables de meurtre, de tentative de meurtre, de voies de fait, ou de crimes graves contre des individus et la société, et c'est pour cette raison que leur nom sera divulgué.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Madame la Présidente, le député d'en face a fait toutes sortes d'observations intéressantes. C'est manifestement un homme très instruit, et un homme capable de déformer les mots, d'en déformer le sens, pour faire paraître les choses autrement qu'elles sont en réalité. Cela me paraît plutôt négatif qu'on fasse pareille chose.
Il a cependant fait une observation dont je tiens à le féliciter. Elle ne se rapportait pas directement au projet de loi, mais avait trait au fonctionnement général de la Chambre. Il a soutenu dans son intervention que le projet de loi sur l'accord nisga'a était une mesure très importante qui assurait la mise en application du traité avec les Nisga'as. Il a dit qu'il était vraiment très important. Il a laissé entendre qu'il aurait des conséquences pour tout le Canada.
Pourquoi alors le député n'est-il pas favorable à la tenue d'un référendum? Étant donné que cette mesure aura des conséquences pour à peu près tout le monde, pour le Trésor public, pour nos activités et pour les administrations locales, pourquoi refuserait-il de la soumettre à un référendum?
M. Steve Mahoney: Madame la Présidente, cela n'a absolument rien à voir avec le projet de loi à l'étude.
Je faisais simplement observer que les députés du Parti réformiste, l'opposition officielle, recourent à toutes les tactiques à leur portée pour retarder, paralyser, faire dérailler le programme législatif du gouvernement en exigeant la tenue d'un référendum national.
En ce qui a trait au projet de loi, nous trouvons important que cette mesure sur le système de justice pour les adolescents soit adoptée par la Chambre afin qu'on puisse la mettre en application aussi rapidement que possible. Il me paraît presque antiparlementaire que les députés réformistes essaient de lier une mesure aussi importante que le projet de loi sur le système de justice pour les adolescents à une autre mesure à propos de laquelle ils ont déjà perdu. C'est certainement antidémocratique.
M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Madame la Présidente, le député du Parti libéral a dit que la vérité faisait mal. Il a abordé le sujet de la pornographie juvénile. Le fait est que 70 députés libéraux ont signé une lettre demandant au gouvernement d'avoir recours à la disposition d'exception contre la décision du tribunal de la Colombie-Britannique. Et c'est là que la vérité fait mal. Quand le moment est venu de voter, 66 de ces députés libéraux ont voté contre le document sur lequel ils avaient apposé leur signature.
La Chambre peut être sûre que, pendant la prochaine campagne électorale, cette lettre va être distribuée dans toutes les circonscriptions pour que les électeurs sachent que les libéraux disent une chose et font l'inverse.
Pendant plus de 20 ans, mes parents ont tenu un foyer de groupe à Burnaby, en Colombie-Britannique. Ils y ont accueilli plus de 400 enfants, certains pour quelques heures, d'autres pendant plusieurs années.
Les organismes canadiens d'application de la loi manquent de ressources. D'un bout à l'autre du pays, les programmes sportifs et pour les jeunes manquent de ressources, et ce, malgré le fait que, à l'origine, le système de loteries ait été mis en place pour financer les programmes sportifs, culturels et récréatifs, et non pas pour renflouer les caisses de l'État. Par ailleurs, il y a dans notre pays une pénurie grave de logements sociaux. Les libéraux n'ont pas d'argent pour ça.
Les libéraux présentent un énième projet de loi. Le député est-il prêt à se lever à la Chambre aujourd'hui et à annoncer que le gouvernement libéral va accorder aux organismes d'application de la loi et autres organismes du pays, non pas juste assez de ressources mais des ressources suffisantes pour qu'ils puissent faire leur travail de façon efficace et mettre en oeuvre un système de justice réparatrice pour nos jeunes?
M. Steve Mahoney: Madame la Présidente, beaucoup de points ont été abordés concernant cette question.
La lettre à laquelle le député fait référence se trouve sans aucun doute dans la photocopieuse Xerox en ce moment même afin d'être distribuée par un parti qui veut ainsi tromper une fois de plus les électeurs. La réalité est que les gens qui ont signé cela ont simplement dit si nécessaire, mais qu'il devait y avoir un appel. Il y a un appel. Je suis confiant que la Cour Suprême annulera cette décision.
Pour ce qui est des ressources dans la communauté, le gouvernement fédéral n'est pas un magasin multi-service. Nous avons des partenaires dans le pays. On appelle cela une confédération. Nos partenaires sont les provinces. Hier, les gros titres...
M. Scott Brison: Le partenaire Onex.
M. Steve Mahoney: Madame la Présidente, le député conservateur cherche le chahut. Hier, un gros titre dans le journal concernant les conservateurs indiquait le prélèvement par le gouvernement provincial de 800 millions de dollars supplémentaires sur le budget de l'éducation de l'Ontario. Pendant ce temps, nous avons augmenté les paiements de transfert et nous avons rétabli le financement pour les soins de santé. Nous continuons d'accorder à la province de l'Ontario une subvention de 950 millions de dollars qui pourrait, et devrait, être utilisée pour les points dont parlait le député.
Les municipalités doivent être nos partenaires. Les conseils scolaires doivent l'être également. Tout ne peut pas être réglé d'un coup de baguette magique socialiste du NPD.
M. Werner Schmidt (Kelowna, Réf.): Madame la Présidente, c'est pour moi un honneur et un privilège de participer au débat concernant le projet de loi C-3.
Mes commentaires seront présentés en deux volets. Premièrement, j'aborderai certaines dispositions du projet de loi. Deuxièmement, je traiterai du système de justice au Canada.
Si l'on se reporte au sommaire général qui figure au début du projet de loi, on est presque porté à croire que c'est la meilleure chose qui aurait pu arriver au système de justice pénale pour les adolescents. Voici ce qui y est dit:
Le texte prévoit notamment une gamme de mesures extrajudiciaires applicables aux adolescents accusés d'une infraction. Il vise à favoriser la participation des collectivités et plus particulièrement des parents des adolescents, des victimes, des comités de la justice pour les jeunes et des autres personnes intéressées par le système de justice pénale pour les adolescents. Il prévoit les peines qui peuvent être infligées par le tribunal pour adolescents, les règles applicables à la garde et à la surveillance des adolescents, à la conservation de dossiers les concernant et à la protection de leur vie privée. Il apporte en outre des modifications corrélatives à d'autres lois.
On pourrait penser que tout a été dit. Après cet énoncé, que peut-il rester d'autre à faire?
J'aimerais aborder quelques points. Les condamnations avec sursis, par exemple, sont ici possibles. Nous savons que, par le passé, les condamnations avec sursis dont ont fait l'objet les auteurs de crimes graves, comme des trafiquants de drogue et les auteurs d'homicide involontaire coupable, ne se sont pas traduits par des peines concrètes pour ces gens. Les personnes ayant commis ces crimes très graves n'ont pas subi de conséquences sérieuses.
Il y a un autre aspect. Seulement cinq infractions désignées ont été inscrites: le meurtre au premier et au deuxième degré, la tentative de meurtre, l'homicide involontaire coupable et l'agression sexuelle grave. Ce sont les crimes graves dont les auteurs doivent être traduits devant les tribunaux pour adultes.
Il y a ici de graves omissions. Qu'en est-il de la mort attribuable à la négligence criminelle? Qu'en est-il des lésions corporelles attribuables à la négligence criminelle? Qu'en est-il des agressions sexuelles faites sous la menace d'une arme? Qu'en est-il des prises d'otage et de la séquestration? Ce sont là des infractions très graves. Je doute qu'ils soient moins violents que ceux que vise l'article de la loi. Il m'apparaît clairement que des amendements sont nécessaires pour que la loi atteigne son objectif.
Je voudrais aussi parler un peu de l'âge. Le député de Mississauga-Ouest a laissé entendre que nous voudrions l'abaisser à huit ans. Personne n'a fait une telle proposition. Le député prend ses rêves pour la réalité. Dans notre société, les jeunes de 10 et de 11 ans savent faire la distinction entre le bien et le mal. Ils sont en mesure de prendre des décisions et ils le font. Nous devons agir avec sérieux à leur endroit.
Le député a laissé entendre que la plupart des jeunes sont décents et se conduisent bien. Je l'espère bien. Ce projet de loi ne vise pas 95 p. 100 de la population, mais bien ceux qui ont décidé de violer la loi. Voilà le problème et c'est cela que nous voulons corriger. Il faut s'occuper d'une façon raisonnable de ces jeunes de 10 et de 11 ans qui violent la loi et qui le font délibérément d'une façon préméditée.
Devrions-nous inclure des périodes de transition? Devrions-nous avoir des programmes de restitution et de réadaptation? Bien sûr. Nous ne parlons pas d'incarcération ni de vengeance. Nous devons faire comprendre à ces jeunes que lorsqu'ils violent la loi, ils commettent une infraction grave et que la société ne tolère pas ce genre de comportement. Nous voulons les aider à devenir des membres qui réussissent dans la société en y apportant une contribution.
Il n'est pas déplacé de dire que le projet de loi devrait viser les jeunes de 10 à 15 ans. Nous avons vu bien trop de jeunes de 10 et 11 ans profiter de leur immunité, profiter du fait qu'ils ne peuvent faire l'objet d'aucune poursuite pénale. C'est triste à dire, mais il y a des adultes qui sont au courant et qui ont recours à ces jeunes pour commettre des crimes.
Permettez-moi maintenant de dire un mot de notre système de justice. Je me reporte à un livre dont je conseille la lecture à tous les députés et à tous les Canadiens. Cet ouvrage intitulé Outrage a pour auteur Alex MacDonald, qui n'est pas n'importe qui. Il a travaillé dans le domaine du droit et de la justice pendant 40 ans. Il a été procureur général de la Colombie-Britannique. Il a été avocat et ministre. Il a siégé aux Communes. Il sait de quoi il parle. Au début de son livre, M. MacDonald écrit:
Le système juridique canadien court à la catastrophe, car il s'attache tellement à la protection des droits de l'individu qu'il néglige de protéger les droits de la société. Généreux envers certains, ce système n'est pas équitable pour la majorité des Canadiens, car il sacrifie des idées consacrées par le temps, comme la vérité et la justice, à une fascination malsaine pour le processus.
Ces mots ne sont pas ceux d'un amateur. Il s'agit d'un praticien du système, d'une personne qui comprend de quoi il retourne. Le type de mesure qu'on nous a présentée dans le projet de loi C-3 ne fera rien pour modifier cette conclusion.
La grande lacune de ce projet de loi se situe au niveau des principes fondamentaux. Toute une partie du projet porte sur les principes en jeu, mais le principe fondamental de la recherche de la justice n'est pas du nombre. Un grand principe veut que les droits des citoyens respectueux des lois et des victimes aient clairement la priorité lorsqu'il y a conflit avec les droits de l'auteur du crime.
Il semble que les seuls qui aient pour mission de protéger la société soient les policiers, les hommes et les femmes qui font respecter la loi. Ils s'exposent à des risques. Ils sont quotidiennement en danger. Que fait le gouvernement à ces gens qui veillent sur les intérêts de la société? Il sabre leurs budgets et leur lie les mains. Il a un système de libération conditionnelle qui favorise la récidive et un système de justice qui est mal équilibré.
Que dit un de ces principes? J'attire particulièrement l'attention sur un énoncé de principe du projet de loi. Le sous-alinéa 3(1)c)(ii) dit ceci:
c) les mesures prises à l'égard des adolescents, en plus de respecter le principe de la responsabilité juste et proportionnelle, doivent viser à:
En anglais, il dit «should» et non «shall».
(ii) favoriser la réparation des dommages causés à la victime et à la collectivité.
Je suis d'accord. Mais, en anglais, le mot clé est «should», et non «shall». S'il s'agissait là d'un principe, on dirait plutôt «shall». De toute évidence, ce n'est pas un principe. Si c'en est un, il est tellement souple qu'il ne veut plus rien dire. Il pourrait être plus précis.
Il existe une autre disposition de ce projet de loi dont je ne suis pas certain qu'elle constitue un principe. Je crois que c'en est un, mais on ne le trouve pas dans cet article. C'est probablement le pire article qu'on puisse trouver dans le projet de loi. Il est au coeur de l'ancienne Loi sur les jeunes délinquants et de la Loi sur les jeunes contrevenants, et on le trouve encore une fois, mot pour mot, textuellement, dans le projet de loi à l'étude. L'alinéa 145(2)b) dit ceci:
b) la personne à qui la déclaration a été faite a, avant de la recueillir, expliqué clairement à l'adolescent, en des termes adaptés à son âge et à sa compréhension...
La personne en question est l'agent de police. Le premier point à souligner, c'est que l'adolescent n'est pas tenu de faire une déclaration. Autrement dit, l'adolescent qui est accusé d'un crime, qui a été appréhendé ou a fait l'objet d'autres mesures, n'a aucune obligation de faire une déclaration. Il peut garder le silence. Cela suscite un grave problème. Quelles sont les conséquences d'une telle disposition?
Quel genre de message cela envoie-t-il aux adolescents? Cela témoigne d'un principe arbitraire du droit canadien, principe que les avocats de la défense sont apparemment disposés à défendre jusqu'au bout. Peu importe si cela est contraire à la sagesse traditionnelle quant à la façon d'élever des jeunes pour en faire des adultes responsables.
Ce sont, encore là, les mots d'Alex Macdonald.
Chaque parent sensé veut élever ses enfants de la bonne façon. Le député de Mississauga a déclaré qu'il avait élevé trois garçons. Il sait qu'il a très bien réussi. Il l'a dit lui-même; c'est tout à fait remarquable. Lorsque ses enfants sont en difficulté, le parent avisé, et je suis convaincu que le député de Mississauga le sait très bien, se demande ce qui cause le problème; il veut savoir tout ce qui se passe. Voilà ce que nous devons faire. M. MacDonald observe:
Les parents sensés savent que la première chose à faire pour corriger un jeune dont le comportement est répréhensible est de l'amener à avouer sa faute. Ils savent aussi que c'est dans l'intérêt du jeune de reconnaître qu'il a mal agi car cela réduit les risques de récidive.
Malheureusement, les législateurs du gouvernement fédéral n'ont pas encore compris ce concept. Le monde entier sait que la confession fait du bien à l'âme. Pourquoi la loi n'en tient-elle pas compte? Il est certain que le devoir de parler est plus bénéfique pour les jeunes en difficulté que le droit de rester muet.
J'aimerais consigner au compte rendu un cas en particulier. L'événement a commencé en 1988 sur l'île de Vancouver en Colombie-Britannique. Le protagoniste se nomme Pierre.
Le 12 octobre 1988, aux petites heures du matin, ce jeune homme [...] et deux de ses amis, âgés de 17 et de 23 ans, ont pris un taxi qui les a menés de la réserve de Duncan, en Colombie-Britannique, à Victoria, située à environ 65 kilomètres plus au sud. Ils avaient fêté une bonne partie de la nuit et ont pris quelques verres en chemin. Ils avaient en leur possession deux carabines à plomb qui avaient l'air dangereux, deux «couteaux de jet» et ce que le jeune de 23 ans a décrit plus tard comme des «outils de cambrioleur».
À leur arrivée à Victoria vers 4 heures du matin, les trois jeunes voulaient encore de la bière et ont demandé au chauffeur de taxi de leur en procurer. Après avoir réglé la course, ils ont appelé un autre taxi. Deux d'entre eux se sont assis sur la banquette arrière et Peter s'est assis en avant.
Les deux jeunes assis sur la banquette arrière ont appliqué leurs armes sur le cou du chauffeur, mais celui-ci a résisté. Durant la bataille qui a éclaté lorsque les jeunes ont voulu dépouillé le chauffeur de son portefeuille, Peter, assis sur la banquette avant, a poignardé le chauffeur plusieurs fois. L'homme est mort.
Au domicile d'un de leurs amis, les jeunes ont tenté de faire disparaître le sang qui tâchait leurs vêtements, mais il en est resté des traces sur les vêtements de Peter. Plus tard au cours de la journée, un des jeunes a mentionné avec désinvolture qu'ils avaient tué un chauffeur de taxi. La GRC en a eu vent, et les trois jeunes ont été arrêtés. Par la suite, on a rappelé à Peter, alors détenu dans une cellule de police, ses droits aux termes de la Charte et on lui a conseillé d'appeler un avocat et un gardien. Il a choisi d'appeler une de ses grand-tantes. Toutefois, avant l'arrivée de son avocat—mais après celui de sa grand-tante—le constable Logan a entamé une longue discussion avec Peter. Au cours de cet entretien, Peter a raconté au constable Logan un peu ce qui s'était passé. Les deux autres jeunes devaient appliquer leurs armes sur le cou du chauffeur de taxi. Peter, lui, devait s'asseoir sur la banquette avant et «juste poignarder» la victime. Le constable a ensuite conduit Peter à une maison où se trouvaient l'arme du crime et les clés du chauffeur de taxi. Plus tard au cours de la journée, sur les instances du constable Logan, Peter a discuté avec son avocat.
Le lendemain matin, Peter a eu un autre entretien téléphonique avec son avocat. Puis, voyant Logan, il a dit à l'agent qu'il avait oublié des détails et qu'il voulait en dire plus. Les deux hommes se sont entretenus à nouveau et Peter a avoué à nouveau.
Sur les conseils de son avocat, Peter n'a pas témoigné à son procès au tribunal de la jeunesse. Il a été reconnu coupable de meurtre au deuxième degré et le verdict a été confirmé par la cour d'appel. En 1993, toutefois, la Cour suprême a cassé le jugement.
Le tribunal ne doutait nullement que les déclarations de Peter étaient foncièrement vraies et que Logan avait été franc et poli dans tous ses entretiens avec le jeune. Néanmoins, il a soutenu que le constable Logan avait cafouillé dans la manière dont il avait obtenu les aveux. Par conséquent, il a fallu faire comme s'il n'y avait jamais eu d'aveux. Autrement, le beau nom de la loi aurait été souillé.
En fin de compte, il était clair que trois jeunes gens avaient commis un meurtre, au moins un meurtre au deuxième degré. Leurs degrés de complicité variaient peut-être quelque peu, mais cela aurait dû se refléter dans la détermination de leur peine. En disculpant Peter, le tribunal n'avait plus à délibérer sur la question grave, sur la question réelle du crime. MacDonald ajoute ceci:
Les affaires criminelles, spécialement celles qui impliquent des jeunes, doivent s'éloigner du modèle accusatoire et de ses combats gladiatoriens entre procureurs et avocats de la défense, les premiers inventant des stratégies pour déborder les seconds. Le juge qui préside devrait interroger les deux côtés, séparément s'il le faut—de façon inquisitoire plus qu'accusatoire.
L'«impartialité juridique», comme dans le cas de Peter, l'emporte trop souvent sur la recherche de la vérité. Et en faisant fi de la vérité, on rend encore plus glissant le terrain sur lequel s'aventure un jeune contrevenant et on encourage celui-ci à gâcher sa vie en devenant un criminel.
Ce sont des observations très graves faites par un ancien procureur général de la Colombie-Britannique.
Il est évident que la vérité est sacrifiée sur l'autel du processus et des subtilités juridiques. Il s'agit d'un système de justice, mais il ne suscite pas le respect de la loi, des valeurs de la société, de l'obligation de rendre compte ou de la responsabilité personnelle ni le respect envers les agents chargés de faire respecter la loi.
L'honorable Alex MacDonald fait ensuite cette observation. À propos du système de justice qui est assujetti à la loi de la prodigalité, il écrit ceci: «On complique les procédures afin d'épuiser le temps et les fonds disponibles.» C'est une accusation très grave. Je vais donner un exemple qui s'est produit à Winnipeg afin d'expliquer à quel point on complique les procédures pour épuiser le temps et les fonds disponibles:
En 1984, «Joe», un jeune Winnipegois de 17 ans a sauvagement violé et assassiné une fillette de trois ans. L'enfant a été trouvée dans le garage, sa petite culotte bleue à ses pieds; elle avait le rectum déchiré et tuméfié, le crâne fracturé et le cou cassé.
Dès que son corps a été découvert, la police a commencé à rassembler des témoins possibles, dont ce jeune de 17 ans. Au poste de police, Joe a fait un compte rendu de ses allées et venues, compte rendu qui s'est révélé faux après vérification. Il a aussi tenté de faire porter le blâme sur quelqu'un d'autre.
On a présenté au jeune homme des parcelles de cuir chevelu et de vêtements qui auraient pu être les siens. Encore une fois, il a essayé d'imputer le crime à quelqu'un d'autre en disant ceci: «Ouais, comme je l'ai dit, il l'a amenée dans le garage et elle réclamait sa grand-mère en pleurant.» Seule la personne coupable pouvait savoir des détails comme ceux-là. Il a alors admis qu'il l'avait amenée de force dans le garage et qu'après il ne se souvenait plus de rien.
La police a cessé son interrogatoire, elle a arrêté Joe et lui a lu ses droits en vertu de la Charte. Il s'est entretenu avec son avocate pendant 37 minutes. Lorsqu'elle est partie, sans demander aux agents de ne pas poursuivre leur interrogatoire, les policiers ont recommencé à poser leurs questions. Une fois de plus, Joe a avoué le crime de son plein gré. En route vers le centre de détention, il a montré l'immeuble où il avait enlevé la fillette, le garage où il l'avait assommée pour qu'elle cesse de crier et il a même montré le bloc qu'il avait utilisé à cette fin. Au procès, qui s'est tenu devant un tribunal pour adultes, le juge a laissé le jury écouter les aveux de Joe qui avaient été enregistrés avant la visite de son avocat. Mais ce qu'il a dit et ce qu'il a révélé à la police après avoir vu son avocat a été écarté. Joe a été condamné pour meurtre au premier degré.
La cause est allée en appel, où la cour a jugé le contraire, rejetant les aveux faits par Joe avant d'avoir vu son avocat et admettant tout ce qu'il a dit et fait par la suite. Un nouveau procès a été ordonné...
Il y a eu un procès. Puis l'affaire est allée en appel. Le tribunal d'appel a annulé la décision initiale et un nouveau procès a été ordonné. L'accusé a été condamné à l'issue du nouveau procès, mais les choses n'en sont pas restées là. Cette cause date de 1984. En 1991, sept ans après la perpétration du crime, un troisième procès a été ordonné. Joe a été condamné par la Cour suprême en 1991, sept ans plus tard.
Quelle personne raisonnable pourrait s'attendre à ce qu'en vertu d'une loi semblable, il faille sept ans pour en arriver à une conclusion? Nous devons en venir au point où nous reconnaîtrons que les valeurs de notre société doivent être protégées et que les droits d'une personne sont également assortis de devoirs.
Tout se passe comme si les droits individuels sont considérés comme importants, mais que l'obligation de rendre compte et le sens des responsabilités des intéressés passent au second plan. Nous devons faire faire un virage à 180 degrés à notre système de justice pour qu'il devienne un système de justice qui recherche la vérité et condamne les coupables au lieu d'être un système laissant toute la place au processus et aux formalités judiciaires.
M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, ma question est fort simple. Si le député avait le choix, croit-il que le Canada serait mieux servi sans la Charte des droits?
M. Werner Schmidt: Bien sûr que non, monsieur le Président. Il n'est pas question de dire ici que la Charte des droits est une source de problèmes.
Le point que je veux soulever, c'est que la responsabilité et l'obligation de rendre compte ne sont pas incluses dans la Charte des droits. Nous avons tous des droits, mais ces droits nous obligent à être responsables et à rendre des comptes parce que nous faisons des choix fondés sur les droits que nous avons et aussi sur ceux des autres.
Ma liberté n'est pas envahissante pour les autres. Elle se termine là où commence celle de l'autre. C'est quelque chose que nous devons reconnaître. Je remercie le député de m'avoir posé cette question et de m'avoir ainsi permis de préciser ma pensée.
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Monsieur le Président, je veux poser une brève question au sujet des programmes de déjudiciarisation. Je les ai mentionnés dans mon discours. Le secrétaire parlementaire de la ministre de la Justice ne semble pas comprendre que les jeunes de 10 et 11 ans ne sont pas admissibles aux programmes de déjudiciarisation prévus dans ce projet de loi. Ils ne sont pas visés par la loi. J'aimerais que mon collègue fasse quelques remarques à ce sujet.
M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, je félicite la collectivité de Maple Ridge pour le travail qu'elle fait dans ce sens. Elle n'a pas seulement un programme de déjudiciarisation, mais aussi un bon programme de justice réparatrice. Elle est un chef de file au Canada à cet égard.
J'appuie certainement ce genre de programme, mais ce qui est important surtout, c'est que ces groupes et ces comités de déjudiciarisation mettent l'accent sur la responsabilité et l'obligation de rendre compte. Les individus doivent comprendre qu'ils ont commis un crime, qu'ils ont fait intrusion dans la vie d'autrui, qu'ils ont violé le caractère sacré de la personne humaine et porté atteinte à la propriété. Il faut que cela soit bien compris.
C'est exactement ce que font les programmes de déjudiciarisation. L'individu est confronté à sa victime et aux torts qu'il a causés dans l'espoir qu'il éprouvera un certain remords pour ses actes. Un nouveau système de valeurs peut peut-être lui être inculqué pour l'amener à reconnaître qu'il n'est pas le seul à avoir des droits, mais que sa victime aussi en a, et qu'ils doivent travailler ensemble. C'est pour cela que ces programmes sont si utiles. C'est pourquoi ils devraient être offerts aux jeunes contrevenants de 10 à 15 ans.
Pas une seule personne raisonnable, parent ou autre, ne dirait qu'un enfant de 10 ou 11 ans qui a un choix à faire ne devrait pas avoir la possibilité de participer à un programme de réadaptation et à un programme de déjudiciarisation où il peut être amené à reconnaître la nature des gestes qu'il a posés et à adopter un comportement plus positif et plus socialement acceptable.
M. Chuck Cadman (Surrey-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je recommande à tous les Canadiens la lecture de l'ouvrage d'Alex Macdonald. C'est un très bon livre et il est très instructif. Je félicite le député pour l'avoir porté à notre attention à la Chambre.
Je sais très bien ce que les électeurs de ma circonscription pensent de la Loi sur les jeunes contrevenants actuelle. Je sais aussi ce qu'ils pensent du projet de loi. Le député peut-il nous dire quel est le consensus qui se dégage dans sa circonscription? A-t-il présenté à ses électeurs la proposition du gouvernement et quelle a été leur réaction?
M. Werner Schmidt: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. C'est une excellente question parce qu'elle comporte deux volets.
En 1994, j'ai eu l'honneur de présenter une pétition qui était l'initiative d'élèves du secondaire à Kelowna. Cette pétition renfermait quelque 25 000 signatures et demandait que la Loi sur les jeunes contrevenants soit modifiée parce qu'elle était une farce.
Il y a environ deux semaines nous avons tenu une réunion dans la circonscription et nous avons discuté de certaines des dispositions de la loi proposée. Les gens savait que la Loi sur les jeunes contrevenants allait être remplacée par la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, mais ils demandaient ce qui a changé. Telle était leur réaction initiale.
Le titre a changé. La nouvelle loi offre une plus grande souplesse et nous avons discuté de certains de ces aspects. L'un des points sur lesquels ont insisté les participants à cette réunion et que j'ai fait valoir ici ce matin est le fait que le système de justice n'est pas un système de justice, mais bien un système juridique.
Ces personnes ont aussi dit qu'indépendamment de la qualité de la mesure législative déposée à la Chambre, nous, en tant que parents, éducateurs et leaders au sein de la société, devons prendre conscience du fait qu'il faut montrer et enseigner à nos jeunes ce qui est bon et ce qui est mal. Il incombe à chaque leader, enseignant, parent, religieux ou autre intervenant au sein de la collectivité d'enseigner clairement aux jeunes que voler une auto pour le plaisir de faire une balade, comme s'il s'agissait d'un rite de passage à l'âge adulte, n'est absolument pas acceptable.
Le président suppléant (M. McClelland): Avant de reprendre le débat, je désire informer la Chambre que la période prévue pour les discours de 20 minutes est maintenant expirée. Les députés auront 10 minutes pour le débat, sans période de questions et observations.
Mme Brenda Chamberlain (Guelph—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre part au débat sur une mesure législative que je considère comme très importante et qui va toucher l'ensemble de la société. Il y a longtemps que les habitants de ma circonscription réclament cette mesure législative.
La Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents reconnaît que la protection du public, des gens comme vous et moi monsieur le Président, de nos familles et des êtres qui nous sont chers, doit constituer le principal objectif de toute tentative de réforme du système de justice pénale pour les jeunes.
Cette nouvelle mesure législative est une façon équilibrée de remplacer la Loi sur les jeunes contrevenants. Elle prévoit des mesures pour apaiser les craintes de la société à l'égard des crimes violents commis par les jeunes avec récidive et répondre à la nécessité de mettre en place un système qui encourage la responsabilité, le respect et la justice.
Toutefois, elle ne se limite pas à punir les délinquants comme le voudrait le Parti réformiste. Elle va au-delà. Elle favorise la prévention de la criminalité. Elle propose d'autres solutions en matière de peine. Elle prévoit des mesures de réadaptation pour empêcher les récidives. Bref, la punition seule ne suffit pas.
Cette mesure législative s'inscrit dans le cadre de la stratégie de renouvellement du système de justice pour les jeunes qui met l'accent sur trois volets principaux: premièrement, la prévention afin de s'attaquer aux causes premières de la criminalité et d'encourager les efforts communautaires de prévention de la criminalité. Deuxièmement, la punition afin de responsabiliser les jeunes délinquants, de les aider à comprendre les conséquences de leurs actes et de leur permettre de réparer les torts qu'ils ont causés à leurs victimes et à la communauté. Troisièmement, la réadaptation et la réinsertion, un volet très important qui a pour but de s'assurer que le jeune qui a commis un délit subisse un traitement et ait accès aux programmes nécessaires pour l'empêcher de récidiver.
Il ne s'agit pas seulement de punir, mais de prévenir. La réadaptation est extrêmement importante. Comme beaucoup de mes collègues de la Chambre des communes et comme beaucoup d'électeurs de la circonscription de Guelph—Wellington que je représente, j'estime qu'enfreindre la loi ne va pas sans conséquences sérieuses. J'espère néanmoins que les mesures préventives prévues dans la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents contribueront à diminuer le taux de criminalité chez les jeunes et, partant, à prévenir des années de chagrin pour le contrevenant, la victime et la collectivité.
J'estime que la réadaptation est extrêmement importante. On observe trop souvent un type de comportement particulier chez les jeunes contrevenants. Cette mesure législative viendra briser le cycle de criminalité qui mène à la prison et vice-versa, en offrant aux jeunes contrevenants l'accès à des services de counselling et à d'autres programmes de nature à les aider à comprendre que la loi doit être respectée, et non pas enfreinte, et qu'ils peuvent être et deviendront des membres fort appréciés de la société s'ils veulent jouer un rôle constructif au sein de cette société.
Les programmes visant à réadapter, à superviser et à orienter les jeunes au moment où ils réintègrent leurs collectivités contribuent à la protection de la population en ce qu'ils permettent de prévenir d'autres crimes. Voilà de quoi nous réjouir. Cette composante s'est avérée extrêmement positive au Québec. Et le Canada tout entier compte bien bâtir sur ces succès.
Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, quand des crimes sont commis, on s'attend à ce que des conséquences significatives s'ensuivent. Je tiens à féliciter ma collègue, la ministre de la Justice, qui s'est assurée que ces conséquences soient en rapport avec la gravité de l'infraction. C'est très frustrant pour une société que de constater qu'un contrevenant reçoit une peine qui ne correspond pas à la nature du crime qu'il a commis.
Grâce aux modifications proposées à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, on peut espérer que justice sera rendue. Ainsi, l'âge auquel un jeune peut devoir comparaître devant un tribunal pour adultes sera abaissé, passant de 16 à 14 ans. Ceux qui sont condamnés à une peine applicable aux adultes verront leur nom publié. Leurs casiers seront traités comme ceux de contrevenants adultes.
Ces mesures ne sont pas destinées à mettre des enfants en prison ni à ruiner leur vie, mais plutôt à veiller à ce que les crimes graves aient de sérieuses conséquences. Les crimes moins graves pourraient faire l'objet de peines purgées dans la collectivité qui aideront le délinquant et la collectivité à se remettre de cette expérience et à reprendre leur vie normale.
Dans tous les cas, les jeunes feront face à des conséquences qui favorisent la responsabilité à l'égard de la victime et de la collectivité, et qui renforcent les valeurs de notre société en aidant le délinquant à comprendre les répercussions de ses actes.
Je voudrais prendre un instant pour souligner certaines des modifications proposées au système de justice pénale pour les adolescents, car je crois qu'elles sont importantes et méritent d'être notées. La Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents va établir un processus plus efficient. Elle donne aux tribunaux le pouvoir d'imposer des peines applicables aux adultes dans le cas de crimes graves. Cette modification, tout en respectant les droits de l'accusé, soulage également le fardeau des victimes et de leurs familles.
Les infractions pour lesquelles un jeune délinquant pourrait être jugé par un tribunal pour adultes ont été élargies pour inclure une série de condamnations pour des crimes graves et violents. En tant que parent et membre de la collectivité de Guelph—Wellington, cela me rassure beaucoup. Je pense que cela aide beaucoup à garder nos rues sûres. La loi autorisera également les déclarations des victimes.
Je voudrais aussi souligner une autre modification importante, soit la disposition prévoyant des peines plus sévères pour les adultes qui violent volontairement un engagement pris à l'égard du tribunal de superviser les jeunes auxquels on refuse un cautionnement et qui sont placés sous leur garde. Lorsqu'un tribunal place un jeune contrevenant sous la garde d'un adulte, cet adulte accepte cette très sérieuse responsabilité qui consiste à veiller à ce que le jeune dont il s'occupe respecte les ordonnances de la cour. Ce n'est pas une responsabilité qu'il faut prendre à la légère.
Cette mesure répond à une proposition faite par mon collègue, le député de Surrey-Nord, et je voudrais le féliciter pour ses efforts en la matière. Pour ma part, j'estime qu'il s'agit là d'une mesure très importante qui envoie un message très puissant aux parents. Le rôle qu'ils jouent lorsqu'ils amènent un jeune contrevenant devant le système de justice est important. Les parents doivent continuer de jouer un rôle actif pour aider leurs enfants à devenir des membres productifs de la société.
Je voudrais également souligner que le projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents prévoit de nouvelles façons de punir les auteurs d'infractions mineures. Certains adolescents sont conduits devant les tribunaux pour adultes à la suite d'infractions mineures pour lesquelles les sanctions habituelles ne sont pas toujours indiquées. Les modifications proposées dans le projet de loi prévoient une autre gamme de programmes et de solutions de rechange en cas d'infractions moins graves. Les nouvelles sanctions seront encore sérieuses, mais n'entraîneront pas forcément une peine d'emprisonnement. Elles visent plutôt à trouver des moyens de réparer les torts causés à la collectivité et à la victime.
Ce sont encore les tribunaux ordinaires qui examineront les cas d'infraction grave. Le projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents constitue un élément important de la stratégie du gouvernement fédéral concernant les jeunes. À mon avis, cette stratégie sera couronnée de succès, car elle réunit des partenaires de tous les paliers de gouvernement, de même que de la collectivité: les gouvernements provinciaux et les municipalités, les autorités chargées d'appliquer la loi, les membres de la profession du droit, les services sociaux et les organismes d'aide à l'enfance.
Ces dernières années, le service de police de Guelph a adopté, en ce qui a trait à l'application de la loi, une approche qui sollicite davantage la participation de la collectivité. Cette approche connaît un énorme succès. Elle connaît un franc succès parce que l'ensemble de la collectivité estime désormais avoir un plus grand rôle à jouer dans la protection de notre société. Je profite de cette occasion pour féliciter le service de police de Guelph de son excellent travail. Guelph—Wellington a de la chance d'avoir un service de police aussi compétent et dévoué.
J'estime que le projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents contribue à atteindre tous les objectifs qui suivent: un système de justice qui favorise la responsabilité, l'équité et le respect, de nouvelles mesures de prévention du crime qui sollicitent la participation de l'ensemble de la collectivité, de sérieuses conséquences lorsque des crimes sont commis, et des programmes qui favorisent la réinsertion sociale du contrevenant, tout en réparant les torts causés à la victime et à la société. Je me réjouis de voir que ces changements ont lieu.
La population et les victimes, tout comme moi, voulons ce projet de loi. Nous aurions tort de nous contenter de moins.
Le président suppléant (M. McClelland): Avant de donner la parole au prochain intervenant, je voudrais signaler que le système de roulement que nous avons toujours appliqué a donné lieu ce matin à une controverse, certains députés estimant qu'il n'était pas toujours nécessairement équitable. Aussi, dans le courant de l'après-midi nous tâcherons de donner la parole à un ou deux bloquistes de plus. Pour que les choses soient claires pour tous, voici ce que nous ferons. Nous alternerons les députés des deux côtés de la Chambre, mais, dans le courant de l'après-midi, nous entendrons quelques bloquistes de plus.
[Français]
M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole au nom des citoyens et citoyennes de mon comté et au nom de mon parti sur le projet de loi C-3, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence.
Nous pensions que la ministre de la Justice et procureure général du Canada aurait profité du discours du Trône, présenté le 12 octobre dernier, pour laisser ce projet de loi tant contesté lors de la première session sous l'appellation de projet de loi C-8, mourir de sa belle mort, comme tant d'autres projets de loi en discussion.
Nous savons qu'un discours du Trône présenté en milieu de mandat a pour but premier de permettre au gouvernement de réaligner sa politique dans certains domaines, de réaménager certains projets de loi ou de les laisser mourir au Feuilleton de la Chambre. Présentement, tel n'est pas le cas.
La ministre représente le même projet de loi, malgré les nombreux griefs de la population, principalement au Québec, et maintient la même orientation, soit celle de combattre et de faire la lutte aux réformistes sur ce terrain de la droite, afin d'améliorer l'image de son parti dans l'Ouest canadien.
Le projet de loi C-3 ne se contente pas de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants, il l'abroge. La ministre y énonce les nouveaux principes applicables en matière de criminalité juvénile, ce qui veut dire que les principes fondamentaux de la Loi sur les jeunes contrevenants, parmi lesquels on retrouvait le respect des besoins spéciaux de l'adolescent, seront remplacés par de nouveaux principes qui sont étrangers aux caractéristiques propres à la criminalité juvénile.
Mon collègue et responsable du dossier, le député de Berthier—Montcalm, suggérait à la ministre, dans une lettre qu'il lui adressait cet été, après avoir appris que le gouvernement prorogeait la session, de profiter de la lecture du discours du Trône pour retirer son projet de loi pour les raisons suivantes, et je cite:
Votre réforme n'a pas sa raison d'être. Les statistiques démontrent clairement l'efficacité de l'application de la loi au Québec qui repose sur les besoins spéciaux des adolescents et l'individualisation des traitements en fonction des caractéristiques propres à l'adolescent, et non sur la nature et la gravité de l'infraction commise par le jeune.
Or, les statistiques, au Québec, démontrent la justesse des propos de mon collègue de Berthier—Montcalm. Comme je le disais précédemment, le Québec possède le taux de criminalité juvénile le plus bas au Canada. Pourtant, la ministre maintient son orientation sur ce projet de loi axé sur la gravité de l'infraction et la répression, plutôt que la réinsertion. Pourquoi cet entêtement de la part de la ministre? Que cache-t-elle vraiment, si ce n'est que de doubler les réformistes sur la droite au détriment des enfants?
Ce projet de loi, appliqué tel que conçu, risque de marquer des jeunes pour la vie, de les diriger vers les criminels endurcis, plutôt que de les réintégrer dans le droit chemin. Le plus intrigant de cette situation, c'est le fait que la ministre, en acceptant, dit-elle, une certaine flexibilité, un «opting out», démontre un doute qui prévaut dans son esprit en regard de son projet de loi.
La ministre prétend qu'il y a flexibilité, car les procureurs des provinces devront, au cas par cas, décider s'ils s'opposeront ou non à l'imposition des peines pour adultes pour des jeunes de 14 ans.
Or, ce même gouvernement, qui intervient trop souvent dans des champs de compétence provinciaux au nom d'une sainte norme nationale, permet, par ce projet de loi, une application différente reposant sur les épaules des procureurs provinciaux.
Au Québec, plusieurs organismes sont membres de la Coalition pour la justice des mineurs. Ils trouvent que la ministre fait une grave erreur en orientant son projet de loi vers la répression. Parmi ces organismes, nous retrouvons la Commission des services juridiques, le Conseil permanent de la jeunesse, l'École de criminologie de l'Université de Montréal, le Centre communautaire juridique de Montréal, la Fondation québécoise pour les jeunes contrevenants, l'Institut Philippe-Pinel, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec, la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux, l'Association des centres jeunesse du Québec, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le Bureau des substituts du procureur général, l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec, l'École de psychoéducation de l'Université de Montréal, le Regroupement des organismes de justice alternative du Québec, la Ligue pour le bien-être de l'enfance du Canada, l'Association canadienne pour la justice pénale, l'Association des avocats de la défense du Québec et la Société de criminologie du Québec.
Cela fait plusieurs organismes, qui sont très près des adolescents, qui pensent que la ministre fait un faux pas dans cette direction.
Il y a un autre exemple qui mérite une réflexion approfondie, bien qu'il soit un peu différent. Jeudi dernier, dans le comté voisin du mien, dans la ville de Valleyfield, l'Association des groupes d'intervention en défense des droits en santé mentale du Québec tenait un colloque intitulé, «Isolement et contention: pour s'en sortir et s'en défaire».
En entrevue au journal La Presse, le docteur Tomkiewicz, connu partout dans le monde pour ses travaux sur la délinquance juvénile, déclarait, et je cite:
L'isolement et la contention, ça ne vaut rien. Je n'arrive pas à admettre que ce soit thérapeutique. L'adolescent, il faut d'abord lui parler, l'écouter, apprendre à le connaître, bref, le traiter comme un être d'histoire, d'amour, de désir. Depuis 1960, j'endigue l'agressivité des jeunes par le biais de la créativité, l'art, le théâtre, le cinéma, la photo, et ça marche.
Cela se passait tout récemment, soit la semaine dernière, tout près de mon comté.
On admettra avec moi que ce témoignage est loin de cette philosophie libérale que j'identifie comme étant une politique répressive.
Le projet de loi C-3 étend le groupe de contrevenants susceptibles d'être condamnés à une peine dont serait passible un adulte afin d'englober les jeunes de 14 et 15 ans. Il crée une peine de placement sous garde visant les jeunes à risques les plus élevés et les récidivistes dans les cas de crimes violents.
L'exemple que j'ai mentionné précédemment rejoint beaucoup plus l'application de la loi au Québec et la vision du Bloc québécois que la philosophie répressive du Parti libéral.
Selon l'article du journal relatif à ce colloque, plusieurs autres invités partageaient les dires du docteur Tomkiewicz. C'était le cas de Gilles Gendron, professeur à l'Université de Montréal, de Daniel Michelin, des centres jeunesse de la Montérégie, et de Marc Bélanger, de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse.
Je ne comprends pas que ce gouvernement, qui dépense des millions en consultation dans plusieurs domaines durant une année sous prétexte d'éviter des erreurs, fasse fi aujourd'hui non seulement des recommandations de spécialistes, mais du vécu et des excellents résultats du Québec.
Encore une fois, nous constatons que le problème de ce fédéralisme canadien est beaucoup plus dans son application que dans sa forme. C'est pourquoi j'espère que la ministre tiendra compte des avis et des résultats du Québec pour modifier ce projet de loi tant contesté.
[Traduction]
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, je suis content que nous ayons trouvé une solution à ce problème.
Il n'est sans doute aucune autre sujet qui anime autant les Canadiens que le système de justice pénale pour les jeunes; nous en avons un nouvel exemple aujourd'hui. Il arrive parfois que le débat soit plus orageux qu'éclairé, et je voudrais, dans ce contexte, citer quelques statistiques sur les taux d'inculpation.
Dans le cadre d'une comparaison internationale en matière de criminalité il ressort, au Canada, que sur 100 000 jeunes environ 7 900 sont traduits en justice et, de ce nombre, 447 sont incarcérés. Curieusement, aux États-Unis, pour ces mêmes 100 000 jeunes, seuls 5 000 sont traduits en justice. Il est donc permis de croire que nous faisons appel à la justice beaucoup plus souvent que les États-Unis, ce bastion de l'ordre public.
Voici un autre fait significatif: le nombre d'incarcérations par centaine de millier de jeunes est de 311 aux États-Unis par rapport à 447 au Canada. Encore une ironie. Nous nous croyons meilleurs, plus doux, plus compatissants, mais nous incarcérons plus de jeunes que les États-Unis. Je le signale en passant, ces chiffres sont exactement à l'inverse lorsqu'il s'agit d'adultes.
Espérons que cela contribuera à faire tomber le mythe voulant que la criminalité chez les jeunes soit hors de contrôle au pays, que notre système judiciaire ne soit pas assez sévère et qu'il dorlote ces enfants qui mériteraient plutôt qu'on leur donne la fessée avant de les renvoyer chez eux. En fait, je dirais exactement le contraire. Si l'on se fie aux statistiques, il semble qu'il faille se pencher sur ce système basé sur des accusations. Je crois qu'il faut revoir tout le système. Je félicite la ministre d'avoir eu le courage de déposer ce projet de loi, lequel nous force à approfondir notre réflexion.
En fait, la criminalité chez les jeunes est à la baisse. Je sais bien que cela ne risque pas beaucoup d'intéresser les éditorialistes et les responsables des manchettes, mais c'est la vérité. La criminalité chez les jeunes est à la baisse. Cela n'a absolument rien à voir avec les administrations provinciales, les parlements et autres choses du genre. C'est un simple fait démographique. Nous faisons tout simplement moins d'enfants et il y a donc moins de jeunes pour commettre des crimes. C'est une bonne nouvelle.
La mauvaise nouvelle, c'est qu'il y a un autre groupe en évolution qui devrait bientôt commencer à commettre des crimes, tant du point de vue démographique que statistique. Encore une fois, je voudrais féliciter la ministre parce que même s'il y a un recul au niveau du taux de criminalité pour toutes sortes de raisons, nous devons reconnaître qu'elle a mené de nombreuses consultations sur le sujet et qu'elle a bien analysé les questions en cause.
Les Canadiens considèrent que nous ne sommes pas assez sévères face au crime. Si j'avais pu percevoir une pièce de dix sous à chaque fois que quelqu'un a dit cette phrase, je pourrais probablement prendre ma retraite maintenant et renoncer à cette fabuleuse pension dorée à laquelle j'aurai droit si je suis réélu.
J'attire l'attention des députés sur l'article 6 de la loi qui traite de l'infraction désignée. Il y a deux choses que j'aimerais souligner à ce sujet. Il y a les cinq premières infractions, c'est-à-dire les meurtres au premier et au second degrés, la tentative de meurtre, l'homicide volontaire coupable et l'agression sexuelle grave. Le changement marquant, c'est qu'au lieu de faire en sorte que ces adolescents soient traduits devant un tribunal pour adulte où les avocats peuvent débattre de la pertinence de les faire comparaître devant ce tribunal, la Couronne dira désormais simplement «Votre honneur, j'exerce un choix et, à ce stade-ci, je réclame une peine d'adulte pour cette personne.» Au début du procès, cette question sera mise de côté et la Couronne, la défense et le juge iront de l'avant avec le procès et décideront à la fin de celui-ci si la condamnation vaut à cette personne une peine d'adulte.
L'autre point intéressant a trait à la sixième infraction. Ce n'est pas une infraction qui s'applique dans le cas des adultes. Je suis convaincu que cela soulèvera de l'intérêt et de la controverse en comité. C'est l'infraction grave avec violence. Une personne peut se voir imposer une peine d'adulte si elle est reconnue coupable d'une infraction grave avec violence qui ne fait pas nécessairement partie des cinq premières infractions désignées.
Il est question d'une infraction grave avec violence, pour laquelle un adulte peut se voir imposer une peine d'emprisonnement de plus de deux ans, commise par un adolescent après l'entrée en vigueur de l'article 41 du projet de loi. Dans le cas de la personne ayant commis l'infraction, il sera déterminé à l'occasion d'au moins deux instances différentes, en vertu du paragraphe 41(8), que l'adolescent a commis une infraction grave avec violence. En d'autres mots, c'est en quelque sorte «ouvrir la porte et enfermer l'adolescent» parce que cette personne serait condamnée par deux instances judiciaires distinctes comme était un adolescent qui, si je peux me permettre l'expression, est hors de contrôle.
À mon avis, la ministre a répondu d'une façon aussi raisonnable que l'on est en droit de s'y attendre dans le contexte de la Charte des droits et libertés. C'est une réponse créative face aux préoccupations de nombreux Canadiens qui pensent que nous ne sommes pas très sévères avec les adolescents.
Heureusement, la ministre n'en est pas restée là. Elle a énoncé les principes et les buts de la détermination de la peine. Le Code criminel du Canada comprend des lignes directrices en matière de détermination de la peine qui permettent au Parlement de s'adresser aux juges qui imposent les peines et de leur indiquer le genre de mesures que l'on veut qu'ils appliquent aux personnes reconnues coupables d'infractions données. C'est le genre de démarche que l'on trouve à l'article 37 qui donne une directive aux juges eux-mêmes. On leur rappelle qu'ils s'occupent d'adolescents.
La détermination de la peine en vertu de l'article 41 a pour objet de contribuer à la protection de la société en tenant un adolescent responsable d'une infraction qu'il a commise et en lui imposant une sanction juste qui a des conséquences significatives et qui facilite sa réadaptation et sa réintégration dans la société.
Quatre principes pour la détermination des peines sont clairement exposés par le Parlement aux juges qui prononcent les peines: la protection de la société, la responsabilité, les conséquences significatives et la promotion de la réadaptation de l'individu dans la société. Cela donnera ensuite lieu à des peines différentes le cas échéant, pouvant différer de celles qui seraient imposées à des adultes.
L'autre domaine dans lequel le Parlement donne des instructions aux juges sur cette question se trouve sous l'article 3. Ce qu'on demande aux juges de prendre en considération indépendamment des autres principes pour la détermination des peines qu'ils peuvent appliquer, c'est le degré de participation de la jeune personne dans la perpétration du crime et les préjudices qu'ont subis les victimes.
Les députés remarqueront que nous avons fait des efforts considérables, dans le projet de loi sur les droits des victimes, pour que les victimes aient une place dans le processus et puissent y jouer un rôle important. Cela inclut toute réparation faite par le jeune à la victime ou à la communauté; le temps qu'a passé le jeune en détention pour l'infraction et les verdicts de culpabilité préalables. Je réfère les députés à l'article relatif aux infractions violentes graves. Cela inclut également les autres circonstances aggravantes et atténuantes liées au jeune et à l'infraction et pertinentes pour l'objectif et les principes de cet article. Ce sont là les recommandations et les principes que le Parlement dicte à l'ordre judiciaire.
J'ai hâte que ce projet de loi arrive au comité. J'ai hâte d'examiner l'article 6 afin de déterminer s'il est approprié. J'ai hâte d'examiner l'article 37 afin de déterminer s'il est approprié et si tous les principes ont été couverts.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, au printemps de 1999, j'ai suivi avec intérêt le déroulement du débat sur le projet de loi C-68 en écoutant les députés en parler longuement les uns après les autres. Je puis dire à la Chambre qu'une bonne partie du débat à l'époque m'a mis en colère. J'ai passé beaucoup de temps à suivre ce débat et je trouvais très irritant ce que j'entendais de la part de plusieurs des autres partis. Franchement, je n'aimais ni le ton ni le contenu d'une bonne partie des interventions.
Je puis dire que cette colère a maintenant fait place à un sentiment généralisé de tristesse. Je ne sais pas ce qui vaut mieux. J'ai le très vif sentiment que nous ne tiendrions pas le débat que nous tenons aujourd'hui si nous avions une meilleure compréhension de ce que nous devons réellement faire à l'égard du système de justice pénale concernant les jeunes.
Je ne suis pas un juriste et je formulerai mes observations d'une façon moins technique que certains orateurs. Je m'exprime davantage en tant que parent et en tant que résident des vieux quartiers d'une grande ville canadienne, où ce dossier revêt un grand intérêt car nous avons des problèmes de gangs de jeunes, de gangs de rue, de vandalisme et de violence. Je reçois beaucoup d'appels à mon bureau de la part de gens qui déplorent le manque de sécurité dans les rues ou qui se préoccupent du système de justice pour les adolescents.
Je tiens à rappeler aux députés que le projet de loi à l'étude porte en fin de compte sur les enfants. Cela doit être la préoccupation centrale de toutes nos observations. Cela devrait réellement établir le ton pour la plus grande partie du débat. Nous devons vraiment garder à l'esprit que nous parlons d'enfants.
Je trouve très inquiétant de voir dans le projet de loi C-3 des dispositions prévoyant des peines de 25 ans de prison pour des enfants âgés de 14 ans seulement. Cela me donne à croire que les députés de cette Chambre qui appuient cette initiative ont abandonné toute idée de réadaptation et que l'incarcération des jeunes contrevenants a plus à voir avec la vengeance qu'avec l'espoir de les rééduquer. Je rappelle que si on applique le concept d'un oeil pour un oeil, toute la population finit par être aveugle.
J'aimerais également rappeler à la Chambre que ce n'est qu'au cours du siècle actuel que nous avons reconnu le caractère sacré de l'enfance qui doit être protégé dans une société civile. Je fais allusion au fait que ce n'est qu'au cours de ce siècle que nous avons interdit le travail des enfants.
Jusqu'au tout début du siècle, les enfants descendaient dans les mines, une mèche entre les dents, parce qu'ils étaient suffisamment petits pour ramper dans les crevasses et les fissures. On ne trouvait alors rien à redire à ce genre d'exploitation des enfants. C'était des êtres humains de petite taille, c'est tout. Dieu merci, nous n'en sommes plus là. Nous avons remporté la bataille, au moins dans notre pays. Je ferais remarquer que cela ne semble toutefois pas trop déranger les Canadiens quand ça se passe dans les autres pays. Le gouvernement canadien n'a toujours pas signé la convention no 138 de l'OIT, qui porte sur l'interdiction du travail des enfants, pas plus que la convention no 87, qui elle porte sur les pires formes d'exploitation des enfants. Si nous croyons vraiment au caractère sacré de l'enfance, non seulement en ce qui concerne nos propres enfants, qui sont privilégiés, mais tous les enfants du monde, nous devrions voir à ce que ça soit fait.
Reste à savoir si le projet de loi C-3 répond à la question suivante: comment traiter les enfants qui ont des démêlés avec la justice canadienne? J'ai entendu bien des idées exprimées à la Chambre. Nous avons tous à l'esprit le spectre bizarre de ce député bien connu qui voulait aller à Singapour pour apprendre comment mieux battre les enfants et quelle taille de verge il fallait utiliser pour les fouetter.
Ce débat est passé du ridicule au sublime. On a fait valoir toutes sortes de positions, allant même jusqu'à proposer de traiter comme des criminels les jeunes qui ont des démêlés avec le système de justice pénale. On imagine facilement les conséquences. Nous serons les architectes de notre malheur le jour où nous traiterons les enfants de cette façon.
Contrairement à une opinion répandue, le NPD porte un jugement sévère sur les activités criminelles. Nous réprouvons aussi les causes de la criminalité. C'est justement sur ces causes que nous canalisons nos efforts, car nous croyons fermement que c'est de cette façon que nous obtiendrons les meilleurs résultats. Tout le monde reconnaît que la pauvreté chronique est l'un des premiers facteurs de la hausse du taux de criminalité dans nos collectivités.
Que nous tolérions toujours la pauvreté chronique au sein de la civilisation la plus riche et la plus puissante au monde est une chose qui me dépasse. La pauvreté chez les enfants met dans l'embarras tous les Canadiens. Même le gouvernement commence à comprendre. Il siège à la Chambre des communes depuis dix ans. Je suis très fier de pouvoir dire que c'est le chef du Nouveau Parti démocratique, M. Ed Broadbent, qui avait proposé en 1989 la motion visant à éliminer la pauvreté chez les enfants avant l'an 2000, motion qui a été adoptée à l'unanimité. Il est très rare qu'on appuie unanimement une motion d'initiative parlementaire à la Chambre des communes, mais en 1989, le problème préoccupait suffisamment les Canadiens qu'il y a eu un vote unanime.
En 1989, 14 p. 100 des enfants canadiens vivaient dans la pauvreté. D'après les mêmes barèmes, dix ans plus tard, en 1999 et à quelques mois seulement de la date butoir de l'an 2000, le taux national de pauvreté chez les enfants est de 27 p. 100. Au lieu d'avoir éradiqué la pauvreté des enfants, et toutes ses conséquences prévisibles, nous l'avons vue presque doubler. Dans ma circonscription, Winnipeg-Centre, une circonscription urbaine au coeur de la ville de Winnipeg, le quartier de Point Douglas forme une frontière provinciale; le taux de pauvreté chez les enfants y est de 57,7 p. 100, près de 60 p. 100.
Tant que nous n'aurons pas attaqué la cause profonde du crime, c'est-à-dire la pauvreté des enfants vivant dans des familles pauvres, nous ne pourrons pas élaborer une loi qui comblera nos besoins.
J'admets que le projet de loi C-3 comporte de nombreuses qualités. Bon nombre de ses éléments ont été élaborés en consultation avec la collectivité et les activistes dans le domaine.
J'ai déjà mentionné une disposition qui suscite chez moi d'importantes réserves. Un enfant de 14 ans à peine pourrait être condamné à purger une peine de 25 ans pour un meurtre au premier degré, au lieu de la peine maximale de 10 ans en vigueur à l'heure actuelle pour les jeunes contrevenants comparaissant devant un tribunal pour adolescents. Je trouve cette possibilité troublante et j'ai bien du mal à l'accepter.
Par ailleurs, j'ai remarqué une disposition fort intéressante. Les parents ou tuteurs d'un adolescent pourraient être emprisonnés pendant une période pouvant atteindre deux ans dans les cas graves, s'ils ont négligé de surveiller l'enfant remis en liberté après son incarcération. Cette mesure est beaucoup plus sévère que la peine maximale actuelle, soit six mois d'emprisonnement ou une amende de 2 000 $. Normalement, lorsqu'un enfant est accusé d'un crime, en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants, son père, sa mère ou son tuteur signe une entente qui l'engage à surveiller l'enfant et à faire respecter certaines conditions jusqu'à la tenue du procès.
On recommande d'autres modifications dans le projet de loi C-3. Le système de justice va commencer à suivre les jeunes contrevenants pendant des années après leur libération et les forcer à participer à une initiative de type probation qui prévoira une période de surveillance étroite et des programmes intenses de transition. À l'heure actuelle, les jeunes contrevenants peuvent sortir sans aucune condition ni restriction quant à leur probation. Il est clair que les Canadiens réclament un resserrement du contrôle. C'est ce que le projet de loi C-3 fait et cela pourrait les satisfaire dans une certaine mesure à cet égard.
La loi proposée doit être équilibrée en mettant l'accent sur la nécessité de punir sévèrement les récidivistes violents et en faisant davantage appel à des programmes communautaires pour les jeunes et pour leur famille. On ne fait qu'apporter des retouches à la Loi sur les jeunes contrevenants sans véritablement la modifier de façon marquée et il est probable qu'on ne va pas modifier en profondeur le système actuel de justice pour les adolescents ou apaiser les craintes légitimes de la population au sujet de la criminalité juvénile. Le NPD a d'importantes réserves et préoccupations et je vais faire part de certaines d'entre elles.
Nous craignons qu'on puisse avoir plus facilement recours aux nouvelles dispositions sur la publication des noms des délinquants. On peut publier le nom des jeunes contrevenants. Ces dispositions existent déjà et nous ne croyons pas qu'il est nécessaire de les élargir en quoi que ce soit.
J'ai déjà parlé de l'emprisonnement à perpétuité, pendant 25 ans. On abandonne en fait toute idée de réadaptation lorsqu'on condamne un jeune de 14 ans à 25 ans d'emprisonnement. Il est question de châtiment, de vengeance. Ce n'est pas de la réadaptation.
Pour ce qui est d'accroître les sanctions imposées aux parents et aux tuteurs, là encore, je pense que c'est une question à laquelle la plupart des Canadiens attachent beaucoup d'importance. Cela impose un fardeau indu aux familles à très faible revenu d'où proviennent la majeure partie des jeunes coupables de crimes et d'actes violents. Étant donné que j'ai déjà signalé que la pauvreté était la principale cause de la criminalité, et que ce sont les jeunes vivant dans les familles pauvres qui commettent le plus de crimes, c'est probablement les familles à faible revenu qui seront victimes de ces sanctions accrues. Ce type de mesure punitive imposée à une famille monoparentale, par exemple, victimise encore davantage la famille en cause et ne fait que la plonger encore plus dans la pauvreté.
Le projet de loi va faire supporter un fardeau financier et administratif encore beaucoup plus lourd aux provinces. Nous croyons énormément que les dispositions du projet de loi C-3 accroissent la charge de travail des provinces dans une large mesure sans leur accorder le financement correspondant.
Monsieur le Président, je vois que mon temps de parole est écoulé. Le temps passe vraiment très vite.
[Français]
Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, en parlant de l'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants, voici ce que dit la Coalition québécoise pour la justice des mineurs, dont les noms des membres ont précédemment été mentionnés par mon collègue:
Avant de faire table rase de 16 ans de pratique, d'ajustements et de jurisprudence pour s'engager dans une avenue qui rompt avec près d'un siècle de tradition, les parlementaires doivent se demander si le jeu en vaut la chandelle. Auront-ils le courage de défendre une loi qui fait l'unanimité de ceux qui la connaissent et l'utilisent, ou céderont-ils aux lobbies qui misent sur la désinformation pour faire avancer un programme aussi mesquin que réducteur?
Résumons la situation actuelle. Tout d'abord, le projet de loi C-68 avait été déposé en première lecture par la ministre de la Justice, le 11 mars 1999. Ce projet de loi émanait de la stratégie de renouvellement du système de justice pour les jeunes, rendue publique au mois de mai 1998. Le projet de loi C-68 est mort au Feuilleton, dû à la prorogation de la Chambre.
Suite au discours du Trône, un nouveau projet de loi, le projet de loi C-3, a été déposé en première lecture, le 14 octobre. Hormis quelques modifications de forme, le projet de loi C-3 est en tous points identiques au projet de loi C-68. Rappelons que le Bloc québécois et tous les intervenants du Québec s'opposent à cette réforme, la jugeant inutile et dangereuse quant à ses effets anticipés sur la réduction de la criminalité à long terme.
Au Québec, la réforme de la Loi sur les jeunes contrevenants ne passe tout simplement pas la rampe. Le projet de loi C-3, tout comme l'ancien projet de loi C-68, est dénoncé par celles et ceux qui se trouvent au front de la lutte contre la criminalité juvénile, c'est-à-dire ceux qui connaissent bien le sujet, à savoir les criminologues, les intervenants sociaux, les corps policiers et les juristes.
Nous ne sommes pas intéressés par l'approche répressive, mais plutôt par l'expertise québécoise issue de l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants qui a fait ses preuves.
Mais l'opposition au projet de loi ne se concentre pas uniquement au Québec. De plus en plus de voix se font entendre un peu partout au Canada pour s'opposer aux politiques simplistes du gouvernement en matière de justice. Mentionnons l'Association canadienne pour la justice pénale et la Ligue pour le bien-être de l'enfance du Canada qui se sont jointes à la Coalition québécoise pour demander à la ministre de retirer son projet de loi.
C'est la Loi sur les jeunes contrevenants qui a permis au Canada de réduire substantiellement son taux de criminalité juvénile. Depuis 1991, le taux de criminalité juvénile a chuté de 23 p. 100. C'est cette même loi qui a permis au Québec d'afficher le plus bas taux de criminalité juvénile au Canada.
Quel sort le gouvernement libéral réserve-t-il à une loi aussi efficace? Il la met carrément à la poubelle. Le projet de loi C-3 ne se contente pas de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants, il l'abroge. Cela veut dire que les principes fondamentaux de la Loi sur les jeunes contrevenants, parmi lesquels on retrouvait le «respect des besoins spéciaux de l'adolescent», seront remplacés par de nouveaux principes qui sont étrangers aux caractéristiques propres à la criminalité juvénile.
Le silence du législateur indiquera clairement que la prise en considération des besoins spéciaux de l'adolescent n'est plus la règle principale en matière de justice juvénile. En effet, les nouveaux principes sont davantage axés sur la responsabilisation du jeune.
Quand on lit ces passages et qu'on voit l'efficacité du système actuel en regard de la Loi sur les jeunes contrevenants, on se demande si les députés de la Chambre ont déjà vécu avec des jeunes. On se demande s'ils les connaissent bien.
J'ai entendu des propos assez incroyables aujourd'hui. Est-ce qu'on peut parler de criminel grave lorsqu'on parle d'un enfant de 12 ans? Je l'ai entendu à la Chambre. Cessons de citer des exemples et des cas sordides qui sont généralement très rares, alors qu'on a besoin d'aider ces jeunes enfants.
Il ne faut pas parler des adolescents—puisqu'il est question d'adolescents dans le projet de loi—avec hystérie. Il faudrait apprendre, ici, à la Chambre, à parler de ces enfants avec amour. L'approche de réhabilitation que nous avons adoptée au Québec oblige les aidants à évaluer l'enfant, à le connaître et à l'accompagner, car on ne met pas un jeune de 14 ans en prison, on ne l'incarcère pas à l'école du crime.
Quand on a une famille—surtout si elle est grande, on a un plus grand champ d'expertise—on s'aperçoit qu'aucun de nos enfants ne réagit de la même façon dans des situations différentes. Comment peut-on appliquer une loi rigide à des adolescents, alors que dans la vraie vie, on sait comment réagissent ces jeunes, qui ont une âme et de la créativité? On peut les sauver avec des programmes de réhabilitation qui collent à leur réalité.
J'écoutais le député de Mississauga-Ouest dire qu'à sept ans, tout est joué pour un enfant. C'est assez étrange qu'on parle de réhabilitation d'adultes et qu'on soit incapable de parler d'adaptation et de réhabilitation des jeunes. Si tout est joué à sept ans, je pense qu'on n'a rien à faire ici. L'adolescence, de nos jours, se prolonge—il y a des études qui disent que l'adolescence se prolonge même jusque dans la vingtaine—et ceux qui ont de grands enfants le savent.
Que dire de ces jeunes de 14 à 16 ans? Pourquoi réviser le système de justice pénale pour adolescents, alors qu'on a entre les mains une loi qui fait ses preuves depuis les 10 dernières années et qui a permis de réduire de beaucoup la criminalité?
J'aimerais citer un extrait d'un rapport d'un groupe de travail québécois, le Rapport Jasmin:
Il est souvent plus facile de modifier une loi que de changer les pratiques d'intervention. Et il est peut-être tentant de se laisser aller à croire qu'en durcissant la loi, on apportera une solution aux problèmes que pose la délinquance. Les réponses simples sont un leurre lorsqu'elles s'adressent à des problèmes complexes; elles en occultent l'ampleur en créant la fausse impression que l'on fait le nécessaire pour les régler. Substituer la répression aux approches éducatives relève de ces réponses simples. C'est cependant oublier que les adolescents sont en processus d'éducation et c'est leur faire porter seuls la responsabilité de la délinquance, comme si la société et le milieu dans lequel ils vivent n'y étaient pour rien.
Dans le projet de loi, deux aspects m'interpellent beaucoup et je m'y objecte. Il s'agit des peines les plus répressives, soit celle qui étend le groupe de contrevenants susceptibles d'être condamnés à une peine dont serait passible un adulte afin d'englober les jeunes de 14 et 15 ans et celle de créer une peine de placement sous garde visant les jeunes à risque le plus élevé et récidivistes dans le cas de crimes violents.
Notre société n'a rien à gagner à ce que ces jeunes s'endurcissent dans le milieu carcéral, à l'école du crime. Tôt ou tard, ceux-ci devront retourner dans la collectivité. Notre sécurité collective est directement liée au succès de la réhabilitation des jeunes contrevenants et une incarcération abusive pourrait miner ses chances de succès.
En conclusion, je répète que le Bloc québécois s'oppose fermement au projet de loi C-3 et qu'il est heureux de vivre avec la Loi sur les jeunes contrevenants, telle que nous la connaissons aujourd'hui, puisque nous l'appliquons au Québec. J'aimerais, pour donner une flexibilité concrète au projet de loi, que la ministre de la Justice permette au Québec d'être exclu de l'application de la nouvelle loi et qu'il continue à appliquer la loi actuelle.
En fait, pour que le projet de loi C-3 fasse état d'une réelle flexibilité, il devrait simplement contenir la disposition suivante: «La présente loi s'applique à toutes les provinces, sauf au Québec. Dans ce dernier cas, les dispositions de la Loi sur les jeunes contrevenants continuent de s'appliquer».
[Traduction]
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole à la Chambre au sujet du projet de loi C-3, Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Je suis quelque peu désemparé cet après-midi à cause de deux incidents qui sont survenus récemment à Toronto. Le premier est la mort insensée d'un jeune de 15 ans, Dmitri Baranovski, qui a été battu à mort. Ses agresseurs sont toujours en liberté. Ses parents vivent le pire des cauchemars, car ils ont dû enterrer leur fils.
Au cours de la cérémonie à la mémoire de Dmitri, le rabbin Zaltzman a invité toutes les personnes présentes à combattre la violence qui a mené à cette mort. Il a pressé le gouvernement de renforcer les lois pour réprimer la violence.
Le deuxième cas est celui d'une jeune fille de 14 ans que la police de Toronto a retrouvée couverte de contusions et de blessures, avec des brûlures de cigarette dans le dos, après deux heures de torture aux mains de quatre adolescentes plus âgées. Les journaux de ce matin rapportent ses propos: «Il faut que tout cela cesse. Cela paraîtra enfantin, mais je le pense: si c'était mon monde, rien de cela ne se produirait.»
Ce n'est pas enfantin du tout. Je voudrais que la Chambre puisse lui dire que nous allons mettre un terme à tout cela, que rien de ce qui lui est arrivé ne risque d'arriver à quelqu'un d'autre.
À cause d'incidents comme ceux-là, les députés doivent étudier les difficiles problèmes de la jeunesse et profiter de leurs fonctions électives pour combattre la violence.
Les Canadiens veulent vivre, travailler et élever leur famille dans un milieu sûr et sain. Cela est à notre image et fait de nous ce que nous sommes. Nous voulons que tous les Canadiens, et plus particulièrement les jeunes, participent pleinement à la vie de notre société.
Nous sommes résolus à collaborer avec nos partenaires pour réformer le système de justice pour les adolescents, et c'est pourquoi le projet de loi est axé sur la prévention, la prise de mesures offrant des perspectives positives, la réadaptation et la réinsertion sociale.
Les habitants d'Oak Ridges n'auraient pu être plus clairs. Ils sont très inquiets des jeunes qui enfreignent la loi et qui commettent des actes de violence à répétition. En même temps, ils veulent un système favorisant l'imputabilité, le respect, la responsabilité et l'équité.
Nous savons tous que les gestes que nous posons ont des conséquences et mes électeurs veulent que les jeunes en soient informés avant même de songer à enfreindre la loi. Cela signifie que nous devons parler de prévention, déterminer les causes principales de la criminalité et encourager les efforts déployés par les collectivités pour réduire la criminalité. Réduisons la criminalité en l'éliminant avant même qu'elle n'apparaisse.
À l'époque où j'étais éducateur, j'ai appris que la meilleure façon de composer avec un de mes élèves, lorsque je devais appliquer des mesures disciplinaires, était de le traiter avec respect et dignité. Oui, les méfaits de mes élèves n'avaient rien à voir avec des crimes violents, mais le principe du respect s'applique toujours.
Nos jeunes doivent savoir et comprendre que les crimes qu'ils peuvent commettre ont des conséquences et qu'ils en seront tenus responsables. L'un des grands principes sur lequel repose le projet de loi correspond à la détermination de la peine. La peine imposée à un adolescent devrait être proportionnelle à la gravité de l'infraction commise.
Par exemple, aux termes du projet de loi, une peine pour adultes peut être imposée à un jeune de 14 ans ou plus reconnu coupable d'une infraction appelant une peine d'emprisonnement de plus de deux ans.
Le projet de loi prévoit également un processus plus efficace permettant aux tribunaux d'imposer aux adolescents des peines pour adultes lorsque certains critères sont respectés. Ainsi sera créé un système qui respectera les droits de l'accusé à l'application régulière de la loi, qui allégera le fardeau des victimes et de leurs familles et qui donnera au tribunal saisi d'une affaire mettant en cause un jeune les outils nécessaires pour prendre les décisions qui s'imposent.
Il ajoutera d'autres infractions pour lesquelles un adolescent peut se voir infliger une peine pour adultes, comme les infractions violentes et graves.
Il inclura les adolescents de 14 et 15 ans au nombre de ceux qui sont susceptibles de se voir infliger une peine pour adultes. Il autorisera les déclarations des victimes devant un tribunal pour adolescents.
J'estime que ces dispositions incarnent ce que Rabbi Zaltzman disait au sujet du renforcement des lois contre la violence.
Quand les adolescents commettent des crimes, il importe qu'il y ait des programmes et des traitements à leur disposition pour prévenir toute récidive. Le projet de loi C-3 comprend également ces éléments de réhabilitation et de réintégration.
Il importe de se rappeler que, en effet, les adolescents doivent être tenus responsables de leurs crimes, mais aussi qu'ils sont plus susceptibles que les délinquants adultes d'être réhabilités et de devenir des citoyens respectueux des lois.
Ce projet de loi exige que toutes les périodes de garde soient suivies d'une période intensive de surveillance dans la collectivité, qui sera égale à la moitié de la période de garde. Cela permettrait aux autorités de surveiller étroitement l'adolescent et de veiller à ce qu'il obtienne l'aide nécessaire pour qu'il soit réinséré avec succès et en toute sécurité dans la société.
Il imposerait également des conditions pour les périodes de surveillance. Ces conditions pourraient être adaptées à la situation particulière de l'adolescent, comme la présence à l'école, la recherche d'emploi ou le respect d'un couvre-feu. Ce pourrait être également le fait de s'abstenir de boire de l'alcool ou de prendre de la drogue, de suivre des traitements, de consulter des services de counselling et de ne pas avoir de relations avec des membres de gangs criminels.
Ce sont là le genre de mesures que souhaitent mes électeurs.
Nous allons travailler avec nos partenaires, les provinces, les municipalités, les organismes chargés d'appliquer les lois, les tribunaux, les travailleurs sociaux, les enseignants, les parents et bien d'autres.
C'est une démarche raisonnable et réfléchie. Elle comprend des solutions de rechange au système de justice pour les infractions non violentes et présente la flexibilité intrinsèque que souhaitent les provinces.
J'exhorte les députés à faire preuve de sagesse et à appuyer la motion de la ministre de la Justice, la députée d'Edmonton-Ouest: Que le projet de loi soit lu une deuxième fois et renvoyé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Ce faisant, ils feront oeuvre utile contre le genre de violence juvénile dont j'ai parlé plus tôt et feront savoir clairement aux adolescents de 14 ans que nous voulons nous assurer que cela ne se reproduira plus. Si nous y parvenons, j'estime que nous aurons fait avancer la cause.
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, c'est la deuxième fois que je participe au présent débat. J'ai déjà eu l'occasion de prendre la parole à propos de ce projet de loi avant que la Chambre ne s'ajourne pour l'été.
Je tiens à remercier le député de Pictou—Antigonish—Guysborough, notre porte-parole en matière de justice, de m'avoir aidé à comprendre les difficultés de ce projet de loi. En tant que notre porte-parole en matière juridique, il l'a vraiment examiné d'un bout à l'autre. Il a passé beaucoup de temps sur ce projet de loi et au comité aussi, manifestement.
Après avoir parcouru le projet de loi, lu divers articles de tout le pays et entendu le témoignage de spécialistes, j'ai le sentiment que ce projet de loi a beaucoup déçu. Ce n'est qu'un rafistolage de l'ancien projet de loi, soit la Loi sur les jeunes contrevenants. Le gouvernement s'est contenté d'ajouter à l'ancien projet de loi. Il y a apporté des améliorations, dont je vais parler ici, mais ce n'est finalement que du rafistolage.
Dans une autre allocution que j'ai prononcée sur ce projet de loi, j'ai parlé du chef du service régional de police de York, Julian Fantino. Mon collègue, le député d'Ontario, connaît probablement cet homme qui est très respecté dans son domaine.
M. Fantino a dit:
Bien des agents de police et des citoyens de l'Ontario sont déçus de la Loi sur les jeunes contrevenants parce qu'elle tend essentiellement à protéger les droits des contrevenants... Il est décevant de voir que le gouvernement fédéral ne profitera pas de l'occasion pour corriger la situation et adopter une loi beaucoup plus sévère afin de lutter contre la criminalité chez les jeunes.
Cela ne veut pas dire que nous devons infliger des peines plus sévères, mais je crois que nous devons être plus rigoureux dans la façon dont nous nous occupons du problème, dans les programmes que nous offrons pour venir en aide à ces jeunes contrevenants.
Nous avons espéré beaucoup du projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, mais il nous a énormément déçus. Un des problèmes concerne l'identification des contrevenants violents et leur différenciation par rapport à ceux qui ne le sont pas. Le projet de loi devrait mettre l'accent sur la prévention et le traitement, mais il ne le fait pas. Il ne prévoit pas non plus de ressources permettant aux provinces de s'en charger.
Ce qui se produit essentiellement, c'est que le gouvernement fédéral établit les règles pour les provinces. C'est aussi ce qu'on a constaté avec bien d'autres projets de loi. Le gouvernement fédéral établit les règles, mais il ne fournit pas de fonds.
Prenons l'exemple de la Loi canadienne sur la santé, monsieur le Président. Dans la province d'où vous êtes originaire, il y a actuellement un vif débat sur les mesures que le premier ministre de l'Alberta propose de prendre en matière de santé et par rapport à la façon de dispenser les soins de santé. Ces mesures sont dénoncées par le ministre fédéral de la Santé, celui-là même qui fait partie du gouvernement qui a saigné à blanc les soins de santé au Canada.
À cause de cela, les provinces doivent maintenant recourir à des mesures extraordinaires pour compenser le financement insuffisant accordé pour les soins de santé. Le ministre de la Santé reproche au premier ministre de l'Alberta de vouloir pratiquer une opération draconienne. Je ne sais pas si elle est si draconienne que cela, mais le premier ministre envisage certainement de faire quelque chose qui ne s'est jamais vu auparavant. Ce que je dis, et c'est directement lié au projet de loi à l'étude, c'est que le gouvernement fixe les règles, mais qu'il refuse de fournir les fonds nécessaires. C'est là une des principales lacunes du projet de loi à l'étude. En fin de compte, quel genre de changements permettra-t-il de faire? Je crois que les changements seront très minimes.
Une des choses que nous avons entendu dire à la Chambre est qu'il faudrait abaisser l'âge à partir duquel s'applique la loi. Cette question n'a pas été réglée de façon satisfaisante dans le projet de loi. On a beaucoup de preuves montrant que certains de ces plus jeunes contrevenants doivent être jugés par des tribunaux pour adultes, parce que nous parlons ici de crimes avec violence et, dans certains cas, de crimes avec beaucoup de violence.
La province de Québec est probablement le meilleur modèle à suivre pour le reste du Canada en ce qui concerne le traitement des jeunes contrevenants. Cette province affiche le taux de criminalité chez les jeunes le plus bas de toutes les provinces canadiennes. Elle était prête à investir les fonds nécessaires dans ce secteur et a ainsi pu obtenir des résultats très crédibles. Nous ne pouvons pas nous attendre à ce que toutes les provinces soient capables de faire de même.
Comme je le disais, il y a des différences énormes d'un bout à l'autre du pays sur le plan de la prestation des soins de santé. Malheureusement, nous avons des provinces qui sont plus pauvres que d'autres. Heureusement, nous avons des provinces qui vont très bien, et ces provinces peuvent assurer la prestation des services de façon beaucoup plus efficace que les provinces plus pauvres.
Comme dans le cas des soins de santé, nous voyons les mêmes différences d'un bout à l'autre du pays, et le manque d'appui de la part du gouvernement fédéral nuit au fonctionnement du système de justice pénale pour les jeunes. Aux termes des dispositions de ce projet de loi, les provinces recevront du gouvernement fédéral moins de 50 p. 100 du coût de mise en oeuvre du système. Dans certains cas, le financement fourni par le gouvernement fédéral ne sera que d'environ 35 p. 100. Cela impose un lourd fardeau aux provinces.
Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough a fait des remarques fort intéressantes. Je crois qu'il vaut la peine d'en citer quelques-unes. Le 11 mars, il a exprimé sa réaction au projet de loi C-3. Tout d'abord, il a mis en doute l'efficacité de la nouvelle loi déposée à la Chambre en disant que la loi pourrait être plus sévère, mais qu'elle ne l'était pas. Il a accusé le gouvernement fédéral d'avoir plutôt eu recours à un tour de passe-passe pour donner l'impression qu'il renforçait une mesure législative. Il se demandait si le projet de loi C-3 répond vraiment à la volonté manifeste dans tout le Canada d'être plus dur envers les jeunes criminels.
Il affirmait du même souffle qu'il était déçu que le gouvernement fédéral ne fasse rien pour ramener de 12 à 10 ans l'âge de la responsabilité pénale. J'avais précisé que cela avait été proposé par notre parti au cours de la campagne électorale de 1997. En février 1998, le député de Pictou—Antigonish—Guysborough déposait un projet de loi d'initiative parlementaire, le projet de loi C-313, pour modifier l'âge de la responsabilité pénale dans la Loi sur les jeunes contrevenants.
Selon le député, le Parti conservateur demandait au gouvernement fédéral d'abaisser à 10 ans l'âge de la responsabilité pénale. Il précisait que, lorsqu'un nombre croissant de crimes sont commis par des enfants qui n'ont que 10 ans, il faut mettre en place un mécanisme pour amener ces individus devant les tribunaux le plus tôt possible.
Le projet de loi mettra davantage de pression sur les agents de police, cela ne fait aucun doute. Il faudra davantage de dialogue entre les policiers, les sociétés d'aide à l'enfance et les parents. Il faudra des agents dans les rues.
Nous savons qu'il faut des consultations et, en soi, c'est une bonne chose. Cependant, au bout du compte, il y aura davantage d'agents participant aux discussions entre les sociétés d'aide à l'enfance et les parents et donc moins d'agents dans les rues pour faire appliquer la loi dont nous parlons aujourd'hui. Encore une fois, nous sommes ramenés à la question du niveau de financement par le gouvernement fédéral. Ce gouvernement rédige les règles, mais refuse de fournir les fonds.
En conclusion, le gouvernement doit commencer à écouter le débat à la Chambre et ne pas se contenter tout simplement des tours de passe-passe dont il a l'habitude.
M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole relativement au projet de loi C-3, Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Je suis fier que cette mesure législative ait enfin été déposée à la Chambre des communes. J'espère seulement que le gouvernement libéral, et en particulier la ministre de la Justice, vont écouter ce que les députés de la Chambre et les membres du Comité de la justice ont à dire sur ce projet de loi.
Je reconnais d'emblée que cette mesure législative comporte certains aspects positifs. Je suis d'accord qu'il faut adopter une approche équilibrée en matière de justice pour les jeunes. Chaque situation comporte des aspects semblables mais aussi différents, de sorte qu'il importe de traiter chaque cas individuellement. Les crimes ne doivent pas tous entraîner la même peine, mais tous les crimes doivent être punis et la société doit avoir le sentiment que le contrevenant a été traité d'une façon qui assure le respect de la justice tout en lui donnant la possibilité de changer.
Les jeunes d'aujourd'hui doivent être tenus responsables de leurs actes. Il va de soi que ceux-ci doivent comprendre pourquoi ils devraient avoir des remords et, lorsque c'est possible, vouloir réparer le préjudice qu'ils ont causé. J'appuie la notion de déjudiciarisation, ou ce que la ministre appelle les mesures extrajudiciaires. Les députés de Crowfoot et de Surrey ont fait beaucoup de travail dans ce domaine. Ils ont constaté de visu l'effet des mesures de déjudiciarisation et ils croient en cette approche. Des électeurs m'ont aussi écrit pour exprimer leur appui à cette forme de justice, qui a du bon et que j'appuie.
Faire rencontrer aux jeunes contrevenants les personnes à qui ceux-ci ont causé un préjudice devrait leur permettre de prendre conscience de leurs actes. Les criminels de tous âges, mais en particulier les jeunes, doivent savoir que lorsqu'ils volent, qu'ils vandalisent ou qu'ils commettent d'autres actes répréhensibles, ils affectent la vie d'une autre personne qui a dû économiser pour s'acheter un téléviseur, une auto ou une maison.
Ce n'est pas correct de commettre de façon gratuite un acte criminel, sans songer à son impact sur les victimes et leurs familles. Les jeunes qui commettent des crimes doivent comprendre les répercussions que leurs actes entraînent sur la vie d'autrui, reconnaître qu'ils ont violé les droits de ces personnes et qu'ils ont causé beaucoup de stress et de souffrances aux familles de ces victimes.
Malheureusement, ce projet de loi me cause beaucoup plus de préoccupations que de réjouissances. Bien que nous reconnaissons que l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants était loin d'être parfaite, je ne vois vraiment pas comment ce nouveau projet de loi corrigera toutes les lacunes que bon nombre de Canadiens ont soulignées d'un bout à l'autre du pays.
Nous entendons souvent parler de la terrible violence de certains crimes commis par des jeunes de nos jours. Il n'y a pas que chez nos voisins du Sud où des choses de ce genre se produisent. Il y a de la violence et des émeutes dans nos écoles secondaires et nos jeunes sont impliqués dans des fusillades et des batailles, des fusillades au volant de voitures, des actes de piraterie routière, des crimes de haine de même que des actes d'intimidation, des vols à l'étalage, des vols par effraction et bien d'autres choses encore.
J'habite tout près de Victoria où Renna Virk a été sauvagement battue et abandonnée avant de mourir noyée. La semaine dernière nous avons appris avec stupeur l'attaque en groupe d'un jeune torontois de 15 ans, qui aurait été tué pour une cigarette. Il est bien malheureux de constater que notre pays et certains de nos jeunes Canadiens en sont rendus à un tel point.
Au cours des dernières années, les Canadiens ont témoigné de plus en plus de craintes en regard de notre système de justice, plus particulièrement en ce qui touche les jeunes contrevenants, ou la justice pour les jeunes selon la terminologie utilisée dans le projet de loi. Les jeunes eux-mêmes considèrent la Loi sur les jeunes contrevenants avec mépris.
Pensons par exemple à la question de l'âge. Les jeunes savent bien qu'ils peuvent se tirer d'à peu près n'importe quoi, y compris d'un meurtre, tant qu'ils n'ont pas atteint l'âge de 18 ans. Quel leurre que notre système de justice pour les jeunes.
Les jeunes de 16 et de 17 ans doivent être traités comme des adultes. Ces jeunes demandent à obtenir leur permis de conduire, à trouver un bon emploi rémunérateur et à s'intégrer au monde des adultes. En bénéficiant de ces droits et de ces privilèges, ils doivent accepter non seulement une partie, mais aussi la totalité des responsabilités que doivent assumer les adultes.
Je trouve également préoccupant que le projet de loi ne tienne pas les jeunes de 10 et 11 ans responsables de leurs actes criminels. Nous ne voulons pas que des enfants de 10 ans soient incarcérés. Mais nous voulons faire en sorte que les enfants de cet âge-là reçoivent l'aide dont ils ont besoin. Que la ministre de la Justice laisse entendre le contraire est ridicule et ne vaut certes pas la peine que je fasse d'autres observations à ce sujet.
Confier des enfants de cet âge-là uniquement aux organismes de protection de la jeunesse n'est une approche raisonnable ni pour ces enfants ni pour ces organismes. Les jeunes qui sont violents ont besoin de plus que ce que des organismes de protection de la jeunesse peuvent leur offrir. Lorsqu'on confie ces jeunes aux organismes actuels de protection de la jeunesse, on gruge des ressources nettement insuffisantes et on les amenuise encore davantage.
Il faut s'assurer que ces enfants soient réadaptés avant qu'ils ne prennent d'autres habitudes criminelles ou des habitudes plus graves. En offrant aux jeunes enfants un système de réadaptation qui leur enseigne le respect et la discipline et qui favorise l'acquisition de connaissances, nous aurons un citoyen qui contribuera à la société au lieu de l'exploiter. Il coûte beaucoup moins cher de réadapter un jeune aujourd'hui que de l'incarcérer demain.
L'autre aspect qui me préoccupe concerne le groupe de jeunes plus âgés. Les adolescents de 14 et 15 ans qui commettent des crimes graves devraient être traduits devant un tribunal pour adultes. Il faut qu'ils se rendent compte de la gravité de leurs actes. Ils faut qu'ils en assument la responsabilité. Il faut qu'ils comprennent qu'ils doivent en subir les conséquences. Cela fait partie du processus d'apprentissage et de cheminement vers la maturité. À mesure que nous grandissons et que nous assumons des tâches plus lourdes, nous devons également accepter les plus lourdes responsabilités qui les accompagnent.
Malheureusement, notre société a dégénéré à bien des égards. La famille en est une pierre angulaire. Un aspect du projet de loi que je me réjouis quelque peu de voir est la tendance vers la reconnaissance des droits des victimes. À mon avis, le projet de loi et notre système de justice dans son ensemble pourraient accorder beaucoup plus d'importance à cette reconnaissance.
À cet égard, j'encourage les députés à prendre connaissance du projet de loi sur les droits des victimes élaboré par le député de Langley—Abbotsford. Il s'est consacré à ce dossier avec passion pendant de nombreuses années et c'est un projet de loi sur les droits qui méritent notre attention.
Nous ne pouvons manifestement pas parler des adolescents sans tenir compte des répercussions sur la famille. Notre société s'écarte depuis un certain temps déjà des valeurs familiales fortes. À mon avis, certains des problèmes de criminalité chez les adolescents sont directement liés à l'éclatement de la cellule familiale.
C'est donc pour moi un réconfort de constater que le projet de loi précise que les parents sont obligés de se présenter devant le tribunal si le juge estime que leur présence est nécessaire dans le meilleur intérêt de l'enfant. Les gens sont occupés et souvent un avertissement s'impose afin qu'ils réorganisent leurs priorités personnelles.
Je tire aussi de l'encouragement du fait que l'on prévoit des conséquences possibles pour les parents qui ne se plient pas aux directives du tribunal en ce qui concerne la supervision de leurs enfants. Si des parents négligent sciemment de respecter les ordonnances d'un tribunal, ils font courir aux autres un nouveau risque d'être victimes des actions de leurs enfants et ils donnent un mauvais exemple à leurs enfants.
Le gouvernement libéral doit accepter une part de la responsabilité pour l'éclatement de la cellule familiale. Des taux d'imposition élevés ont mené de nombreuses familles à deux doigts de la catastrophe financière. Lorsque la mère et le père ne font que chercher à s'en tirer, il n'en faut pas beaucoup pour que des failles se manifestent: des failles financières, des failles émotives, des failles à tous les niveaux du tempérament et de la patience. Il ne faut pas attendre très longtemps pour que ces failles s'élargissent et que les gens, nos enfants, commencent à s'y engouffrer.
Le projet de loi ne résoudra manifestement pas tous ces problèmes. Ce n'est d'ailleurs pas son objectif. Il devrait être un élément de plus dans la structure visant à renforcer et à soutenir les familles dans la société. À mon avis, il ne contribuera pas vraiment beaucoup à l'atteinte de cet objectif.
On a remanié légèrement la Loi sur les jeunes contrevenants pour aboutir à la Loi concernant le système de justice pénale pour les jeunes. La Loi sur les jeunes contrevenants exige une refonte complète. La ministre de la Justice promet depuis longtemps un projet de loi global qui aborderait les besoins exprimés par tous les Canadiens d'un océan à l'autre. À mon avis, les Canadiens sont déçus des mesures timides adoptées jusqu'à maintenant, et ce projet de loi ne va pas assez loin non plus. On n'a pas intégralement tenu compte de l'intérêt des Canadiens.
Malheureusement, je ne pourrai accorder à ce stade-ci mon appui au projet de loi. Toutefois, j'espère que le gouvernement saura écouter en comité les suggestions et les recommandations des gens et qu'en bout de piste, nous pourrons appuyer le projet de loi dans son ensemble.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Traduction]
LE DIABÈTE
M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, dans un effort de sensibilisation au diabète, le mois de novembre a été désigné Mois international du diabète.
Le diabète est une maladie chronique qui empêche l'organisme d'utiliser la nourriture comme il faut et peut entraîner un risque accru de maladie du coeur, d'accident cérébrovasculaire, de cécité et de maladie du rein.
La Fondation de diabète juvénile Canada s'est fixée comme objectifs de trouver un remède contre le diabète et d'améliorer la qualité de vie des personnes atteintes de cette maladie. Au cours de la présente année seulement, c'est plus de 100 millions de dollars que la Fondation consacrera à la recherche dans le monde et 5 millions de dollars au Canada.
J'invite la Chambre à se joindre à moi pour féliciter les nombreux bénévoles et le personnel de la Fondation de diabète juvénile Canada.
* * *
L'ORGANISATION MONDIALE DU COMMERCE
M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Réf.): Monsieur le Président, hier, j'ai eu le plaisir de participer à une table ronde réunissant un grand nombre de dirigeants d'entreprises canadiens qui sont désireux de faire une véritable différence dans le monde en développement, et ce, dans des domaines aussi variés que la consultation agricole et les télécommunications.
Au moment où le Canada se prépare à une nouvelle série de négociations sous les auspices de l'OMC, nous ne devons pas oublier que, si notre pays a prospéré, c'est en bonne partie grâce à un système commercial fondé sur des règles. Mais nous ne saurions priver les pays en développement des avantages économiques et sociaux du commerce international.
Le secteur privé canadien, en collaboration avec les entreprises privées des pays en développement, peut jouer un rôle essentiel au cours du nouveau millénaire dans la lutte contre la pauvreté en insufflant l'espoir, en ouvrant des perspectives qui laissent miroiter la possibilité d'un avenir meilleur où il y aura des emplois et de nouvelles opportunités pour les générations d'aujourd'hui et de demain. Tels sont les bienfaits du commerce international.
Nous nous tournons vers Seattle et l'OMC dans l'espoir de mettre en place un mécanisme visant à accroître la prospérité de tous les peuples de la terre, et non pas de quelques-uns seulement.
* * *
LA LETTONIE
Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, à titre de premier membre du Parlement d'ascendance lettone, je suis très fière de me lever pour féliciter les Lettons et tous les Canadiens d'origine lettone qui célèbrent aujourd'hui le 81e anniversaire de la déclaration d'indépendance de la Lettonie.
La Lettonie a surmonté de nombreux obstacles depuis le 18 novembre 1918 et, malgré des années d'occupation étrangère, les Lettons ont su préserver leur identité nationale et leur propre culture. Ils ont montré comment un petit pays peut préserver sa souveraineté s'il a un désir de liberté inébranlable allié à une force lui permettant de résister même à l'occupation par une autre puissance. Le pays a regagné son indépendance le 21 août 1991.
En novembre l'an dernier, j'ai dirigé la première mission commerciale expresse dans les pays baltes, soit en Lettonie, en Lituanie et en Estonie. Cette mission commerciale a été un franc succès d'abord et avant tout parce qu'elle a montré que nous sommes engagés à promouvoir les investissements et les échanges entre le Canada et les pays baltes.
Au moment où la Lettonie célèbre la proclamation de l'indépendance acquise il y a 81 ans, elle a parfaitement raison d'espérer une amélioration de la qualité de vie de sa population au cours du siècle à venir.
[Note de la rédaction: La députée s'exprime en letton]
* * *
[Traduction]
CAM GARDINER
M. Rick Limoges (Windsor—St. Clair, Lib.): Monsieur le Président, le 2 novembre dernier, à Montréal, j'ai eu le plaisir de remettre à Cam Gardiner, coanimateur matinal de CKLW de Windsor, le prestigieux Ruban d'or de l'Association canadienne des radiodiffuseurs, dans la catégorie «service exceptionnel à la collectivité par un radiodiffuseur individuel».
Cam Gardiner a contribué grandement à la qualité de vie dans notre région, car voilà plus de 30 ans qu'il se consacre au service de la communauté.
Je suis certain que les députés comprennent tous la contribution importante que font les diffuseurs locaux à la radio ou à la télévision privée, en participant aux activités communautaires et à des oeuvres de bienfaisance. C'est pourquoi cette reconnaissance nationale de Cam Gardiner et de CKLW est vraiment très spéciale.
Je félicite Cam Gardiner pour cette reconnaissance nationale et je remercie l'Association canadienne des radiodiffuseurs d'avoir accordé cet honneur à l'un de nos concitoyens les plus respectés. Voilà un autre exemple de la manière dont Windsor et Tecumseh représentent l'élite de notre société et font du Canada un endroit où il fait si bon vivre.
* * *
MARK MCKINNON
Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour rendre hommage à un homme très courageux. Le 16 juillet 1999, un résident de Whitby, Mark McKinnon, pompier depuis 17 ans au service des incendies de Toronto, nous a montré avec quel dévouement et avec quelle détermination les pompiers exécutent leur tâche.
À 7 h 30 ce matin-là, une grave explosion s'est produite dans la salle de commutation à haute tension d'un édifice de Bell Canada au centre-ville de Toronto. Au quatrième étage, dans une salle totalement enfumée, couverte de six pouces d'eau, où se trouvait un courant électrique de 13 000 volts, Mark McKinnon a découvert un homme souffrant de brûlures, oppressé par l'inhalation de fumée, aveugle et en état de choc. Il l'a soulevé et l'a porté pour descendre l'escalier et l'emmener en lieu sûr.
En reconnaissance de ces efforts héroïques, Mark McKinnon et son équipe ont récemment reçu la décoration suprême accordée par le service des incendies de Toronto et Mark a aussi reçu la médaille de bravoure pour la lutte contre les incendies décernée par l'Ontario.
Le service à la collectivité est une qualité intrinsèque de Mark. Il n'est pas seulement pompier décoré, il est aussi conseiller du quartier Whitby ouest et il trouve le temps d'être entraîneur d'équipes de hockey et de travailler sans relâche...
Le Président: Le député de Yorkton—Melville a la parole.
* * *
L'AGRICULTURE
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, les commentaires du premier ministre du pays sont très troublants. Durant sa visite en Afrique, il a déclaré que le Canada n'a pas suffisamment aidé les pays du tiers monde et qu'il augmentera l'aide financière accordée à ces nations à l'avenir.
Il devrait d'abord regarder dans sa propre cour arrière. Il n'est pas nécessaire de se rendre de l'autre côté de la planète pour voir des pauvres. Il suffit de venir en Saskatchewan pour voir la souffrance des collectivités rurales.
Le premier ministre accorde de l'aide aux pays étrangers, mais il refuse d'aider ceux qui lui fournissent son pain quotidien. Voici ce qu'a déclaré un de mes électeurs l'autre jour:
C'est tout simplement choquant d'entendre le premier ministre promettre plus d'aide à un autre pays, à même mon argent dont j'ai moi-même grand besoin.
Le gouvernement a perdu contact avec la réalité du secteur rural de notre société. Le premier ministre devrait se rendre dans les prairies pour constater la souffrance qui existe dans son propre pays. Quand prendra-t-il conscience du fait qu'il aura un autre pays du tiers monde à renflouer s'il ne fait rien pour les gens des prairies, mais que cette fois ce sera son propre pays?
* * *
SIR WILFRID LAURIER
M. Bryon Wilfert (Oak Ridges, Lib.): Monsieur le Président, le 20 novembre marquera le 158e anniversaire de la naissance de sir Wilfrid Laurier.
Notre septième premier ministre était un vrai Canadien, un homme qui croyait en la vertu de tolérance et en l'unité nationale. Il a laissé en héritage au Canada le fait d'avoir rapproché les Canadiens anglophones et francophones pour qu'ils vivent en harmonie dans un pays uni.
La vision que Laurier avait de la réalité canadienne et le leadership qu'il a exercé ont donné à notre pays l'impulsion et la confiance dont il avait besoin à un moment critique de son histoire. L'ouverture de l'ouest du Canada et la formation de la marine canadienne se sont produites sous son administration.
Dans son livre, intitulé Who Killed Canadian History?, le professeur Granatstein fait observer que la connaissance de notre histoire disparaît. Nous devons honorer nos héros. J'exhorte le gouvernement à proclamer une journée consacrée à la mémoire de notre septième premier ministre, sir Wilfrid Laurier.
* * *
L'ÉDUCATION
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, combien de fois avons-nous entendu le gouvernement libéral dire que l'éducation constitue un investissement dans l'avenir, que les jeunes doivent avoir des débouchés et que l'économie du savoir représente notre salut? Eh! bien, songez donc à ceci. La situation des étudiants est maintenant pire que jamais. Les frais de scolarité ont grimpé de 126 p. 100 depuis 1990. Une fois diplômés, les étudiants nagent dans les dettes et la pauvreté.
Ne nous y trompons pas. Le système public d'enseignement postsecondaire est dans un état de crise à cause du recul du financement public, qui a diminué de 7 milliards de dollars depuis 1993. Les vautours de la privatisation tournent en rond en attendant de fondre sur leur proie.
Comme c'est le cas dans tant de dossiers, parler ne coûte pas grand-chose aux libéraux. Le gouvernement fédéral est maintenant prêt à déposer l'éducation sur l'autel de la cupidité des sociétés à l'OMC.
Nos collèges et nos universités ont besoin d'aide. Les étudiants canadiens ont besoin d'aide. Aujourd'hui, nous exhortons le gouvernement à défendre l'enseignement public, à rétablir son financement, à geler les frais de scolarité, à établir un système national de bourses et à faire de l'accessibilité une nouvelle norme nationale.
* * *
[Français]
L'ASSURANCE-EMPLOI
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, les fédéralistes ont longtemps invoqué le fait que le Québec recevait beaucoup plus des prestations qu'il ne cotisait au régime d'assurance-emploi.
Mais aujourd'hui, les fédéralistes ne peuvent plus se servir de cet argument pour faire la sourde oreille aux demandes du Québec qui réclame sa juste part des dépenses structurantes fédérales.
En effet, depuis 1995, le Québec contribue au régime d'assurance-emploi plus qu'il n'en reçoit.
En 1995, les Québécoises et les Québécois ont contribué 4,477 milliards de dollars, alors qu'ils n'ont retiré en prestations que 4,343 milliards de dollars.
En 1996, les cotisations étaient de 4,475 milliards de dollars. Quant aux prestations, elles étaient de 4,122 milliards de dollars.
En 1997, le manque à recevoir était de près un milliard de dollars. Et finalement, en 1998, c'est encore près d'un milliard de dollars de surplus que les Québécois ont versé à leur régime.
En quatre ans, au Québec, nous avons versé plus de 2 milliards de plus que nous n'avons reçu, et les fédéralistes se sont tus. Il est grand temps que les députés ministériels fassent entendre leurs voix pour que le Québec reçoive sa juste part des dépenses structurantes.
* * *
LE 35E MONDIAL DES MÉTIERS
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le 35e Mondial des métiers, qui s'est tenu à Montréal, a pris fin hier.
Pour la première fois au Canada, plus de 600 jeunes représentant 34 pays se sont mesurés aux normes de l'industrie dans près d'une quarantaine de métiers spécialisés et de technologie de pointe.
Nous pouvons être fiers de nos représentants. Karine Desroches et Robert Waite ont tous deux obtenu la médaille de bronze, respectivement pour les services de restauration et l'installation électrique. Jessika Lessard a obtenu la médaille d'or pour les soins esthétiques, un métier en démonstration.
La stratégie Emploi jeunesse du gouvernement du Canada, l'un des partenaires du 35e Mondial des métiers, aide les jeunes à entreprendre une carrière dans des métiers spécialisés et les technologies. Ces domaines, nous en sommes convaincus, offrent de judicieux choix de carrière aux jeunes Canadiens.
Nous félicitons les participants au 35e Mondial des métiers. Ce sont tous des gagnants.
* * *
[Traduction]
TARA SINGH HAYER
M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, nous jouissons au Canada de la liberté de parole, de la liberté d'expression et de la liberté de la presse.
Le rôle des médias est de rapporter fidèlement les nouvelles. Les Canadiens ne croient pas tout ce qu'ils lisent. Le public surveille de près les médias. La plume est plus puissante que l'épée, dit-on, mais est-elle plus puissante que le fusil?
Il y a un an, le rédacteur en chef de l'Indo-Canadian Times, Tara Singh Hayer, a été abattu d'un coup de fusil dans ce qui ressemblait à une exécution. M. Hayer était récipiendaire de l'Ordre de la Colombie-Britannique. Après avoir servi dans l'Armée indienne, il avait immigré au Canada, il y a de cela de nombreuses années.
Ses éditoriaux étaient controversés. Quel que soit le nombre de ses détracteurs, tout le monde convient qu'il avait droit à ses opinions. Il a usé de la liberté d'expression que nous avons au Canada et il a payé cette liberté de sa vie.
J'exhorte tous les députés et les Canadiens en général à condamner des actes de violence aussi lâches.
* * *
LES ENFANTS
Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Monsieur le Président, à l'occasion de la Journée nationale de l'enfant, je tiens à citer ici deux strophes d'un poème composé par une prostituée enfant et intitulé: «Un engagement envers les enfants».
Et nous serons responsables de ceux qui font des cauchemars
éveillés
Qui ne mangent jamais
Qui n'ont jamais consulté un dentiste
Que personne ne gâte
Qui se couchent le ventre vide
Et qui s'endorment en pleurant
De ceux qui vivent et se meuvent, mais qui n'existent pas.
Et nous serons responsables des enfants qui veulent être
portés
Et de ceux pour lesquels nous ne perdons jamais espoir
Et de ceux qui ne demandent pas une autre chance
De ceux que nous serrons très fort
Et de ceux qui prendront la main
Que quiconque aura la bonté de leur tendre.
Prenons cet engagement, non seulement pour le 20 novembre, mais pour le reste de notre vie de parlementaires.
* * *
[Français]
LES JEUNES CONTREVENANTS
Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, une vingtaine d'organismes québécois oeuvrant auprès des jeunes contrevenants dénoncent ouvertement le projet de loi C-3 visant à abroger la Loi sur les jeunes contrevenants.
Malheureusement, les députés libéraux du Québec semblent incapables d'entendre le message lancé par celles et ceux qui défendent l'expertise québécoise en cette matière depuis plusieurs décennies.
Où sont passés les députés de Westmount—Ville-Marie, Lac-Saint-Louis et Ahuntsic? Où se cachent les députés de Bourassa, Saint-Laurent—Cartierville et Verdun—Saint-Henri?
Qu'ont à dire les députés de Beauce et Papineau—Saint-Denis? Les députés de Pierrefonds—Dollard, Outremont et Gatineau ont-ils un avis?
Le silence des députés de LaSalle—Émard, Brossard—La Prairie et Saint-Léonard—Saint-Michel et celui des députés de Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Vaudreuil—Soulanges et Brome—Missisquoi est incompréhensible. Mais le plus inquiétant est sans doute l'aval donné au projet de loi C-3 par le député de Saint-Maurice.
Devons-nous comprendre que les représentants libéraux du Québec préfèrent donner suite aux pressions des réformistes plutôt que de promouvoir l'avis des experts québécois?
* * *
[Traduction]
LE PRIX DU BRADAGE DU MOIS
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, les Canadiens s'inquiètent du bradage de notre économie à des multinationales étrangères et de la perte de souveraineté et d'emplois qui en résulte. J'aimerais aujourd'hui illustrer mon propos en décernant notre prix du bradage du mois pour la plus importante transaction dans le bradage de nos sociétés. Il y a trois candidats en lice. Tous les prix sont exprimés en dollars américains.
Le premier candidat est le Groupe Forex, qui exerce ses activités dans le domaine des instruments optiques et dans celui de l'exploitation forestière, vendu à Louisiana Pacific pour 408 millions de dollars. Le deuxième candidat est la société Versatile Tractor, qui avait été achetée par North America New Holland et qui vient d'être fusionnée avec la société American Case Corporation, évaluée à 4,6 milliards de dollars. Le troisième candidat est le groupe Loewen, propriétaire de salons funéraires et de cimetières, qui a été vendu à la société U.S. Funeral Homes pour 429 millions de dollars.
L'enveloppe, s'il vous plaît. Le gagnant du prix du bradage pour ce mois-ci est la société New Holland and American Case, pour avoir fermé Versatile Tractor, la dernière usine qui construisait des tracteurs au Canada, et mis 700 personnes au chômage et à la rue.
* * *
[Français]
LA TÉLÉVISION FRANÇAISE DE L'ONTARIO
M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur le Président, après avoir tenté de priver les Québécois et les Québécoises de leur droit de célébrer l'Année de la Francophonie canadienne, voilà que le Bloc et le gouvernement péquiste tentent d'ériger un mur culturel afin de priver les Québécois des émissions de la télé française de TFO.
Malgré les nombreuses lettres d'appui de Québécois et les éditoriaux, les séparatistes font tout pour isoler la population du Québec des autres Canadiens français.
Pourtant, le Bloc et sa maison-mère à Québec ne cessent de louanger la venue d'émissions étrangères, comme celles de RFO, et nous n'avons rien contre cela.
L'érection de murs autour de communautés relève de régimes dépassés qui feront face au jugement de l'histoire. Les Québécois sont des gens ouverts.
Que les séparatistes cessent donc d'imposer des barrières aux choix des Québécois!
* * *
[Traduction]
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le Président, hier, la Cour suprême du Canada a finalement fourni aux Canadiens de l'Atlantique des précisions sur la portée de sa décision du 17 septembre en ce qui concerne les droits des autochtones.
De toute évidence, la décision de la Cour suprême a été interprétée complètement de travers par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, qui avait décidé unilatéralement que certaines dispositions du jugement concernaient directement les droits d'exploitation forestière, d'exploitation minière et d'exploitation du gaz marin.
Le ministre a contredit son propre collègue, le ministre des Pêches, à un moment crucial, alors que la tension sur la côte est était à son paroxysme. Ses déclarations, qui étaient totalement irresponsables, n'ont fait qu'accroître la peur et l'agitation dans nos localités.
Le ministre et son gouvernement ont fait la sourde oreille quand on a demandé des clarifications sur la décision de la cour dans l'affaire Donald Marshal; ce faisant, ils ont obligé la West Nova Fishermen's Coalition à faire leur travail à leur place. Les actions du ministre sont totalement irresponsables. Il a mal interprété la décision de la cour et a donc mal informé les Canadiens.
* * *
LA CONVENTION DES NATIONS UNIES RELATIVE AUX DROITS DE L'ENFANT
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant a été adoptée par l'assemblée générale de l'ONU en novembre 1989, à l'occasion du 30e anniversaire de l'adoption de la Déclaration des droits de l'enfant des Nations Unies. La rédaction de la convention a été entreprise en 1979, au cours de l'Année internationale de l'enfant. Le Canada est fier d'avoir joué un rôle actif dans l'élaboration de ce traité.
Le Canada est également fier de figurer parmi le premier groupe de pays à avoir ratifié la convention en décembre 1991, après avoir consulté les provinces, les territoires et les organisations autochtones nationales. Aucune autre convention n'a été ratifiée par un plus grand nombre d'États, soit 191, ce qui en fait le traité relatif aux droits fondamentaux le plus largement accepté dans l'histoire de l'humanité.
La convention rallie tous ceux qui luttent pour défendre les droits des enfants, non seulement les gouvernements et les organismes de l'ONU, mais également la société civile, y compris les ONG, les universitaires, les professionnels et surtout les enfants, les adolescents et leurs familles.
L'adoption de la convention est à l'origine d'un mouvement tendant vers le renforcement des normes internationales, par exemple dans le cas des nouveaux traités. Malgré tout ce que nous avons pu réaliser dans les dix années suivant l'adoption de la convention, force nous est de reconnaître qu'il reste énormément à faire. Beaucoup trop d'enfants vivent encore tous les jours dans la souffrance et la peur.
* * *
LA SANTÉ
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Santé se dresse sur ses ergots pour dénoncer le premier ministre Klein qui tente de sauver notre régime de soins de santé financé par les fonds publics.
Voici pourtant ce qui s'est passé sous le règne du gouvernement actuel. Les libéraux ont retranché 21 milliards de dollars des paiements de transfert au titre des soins de santé. Il y a maintenant 187 000 Canadiens sur les listes d'attente. À Montréal, les services d'urgence prient les gens d'aller se faire soigner ailleurs, parce qu'ils sont débordés. En matière de technologie de pointe, le Canada se classe dans le dernier tiers des pays du monde entier, derrière la Hongrie et la République tchèque. Dans onze ans, nous aurons besoin de 113 000 infirmières, mais nous ne les aurons pas. De plus, en 1997, 84 services médicaux ont été rayés de la liste des services couverts par le régime de soins de santé.
Nous sommes aux prises avec un énorme problème. Dans le domaine de la santé, le gouvernement sera toujours connu comme celui qui aura privé les pauvres et la classe moyenne des soins de santé dont ils ont besoin et qui aura présidé à la disparition du régime canadien de soins de santé financés par les fonds publics.
QUESTIONS ORALES
[Traduction]
LE TRAITÉ NISGA'A
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, tout le monde au Canada sait que le traité nisga'a établit deux catégories de citoyens et crée des inégalités devant la loi.
Le gouvernement ne pense même pas que les Canadiens devraient avoir leur mot à dire à ce sujet. Aux audiences sur le traité nisga'a en Colombie-Britannique, le député libéral de Haliburton—Victoria—Brock a qualifié de charade le processus de consultation publique en cours.
Seuls les Nisga'as ont eu voix au chapitre à cet égard. Voici ma question: pourquoi le gouvernement n'admet-il pas qu'il refuse de tenir un référendum sur ce traité parce qu'il est certain de perdre?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce dont la députée parle ne fait pas partie du processus gouvernemental normal au Canada. Nous avons un régime parlementaire. Ce régime permet d'étudier des mesures et de les débattre. Nous avons eu l'étude à l'étape de la deuxième lecture, le comité tient actuellement des audiences, puis nous aurons l'étude à l'étape du rapport et à celle de la troisième lecture. À chaque étape, il y a un débat. Ce qui est plus important encore, il y aura aussi la possibilité de voter et de prendre des décisions qui nous permettront de nous engager sur une nouvelle voie avec l'appui de la population canadienne.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, c'est un député libéral qui a critiqué le processus.
Le gouvernement sait qu'il ne pourrait pas aller plus loin avec ce traité si le public avait son mot à dire, tout comme dans le cas de l'Accord de Charlottetown.
Le chef libéral de la Colombie-Britannique a dit que c'était là un affront inacceptable envers la Colombie-Britannique et tous les Canadiens.
Si le traité nisga'a est si merveilleux, pourquoi le gouvernement ne donne-t-il pas voix au chapitre aux habitants de la Colombie-Britannique?
L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suis surpris que la députée ait mentionné Charlottetown. Cela me donne la chance de signaler que, si son parti ne s'était pas opposé à l'Accord de Charlottetown, nous aurions peut-être un Sénat élu aujourd'hui.
Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, nous aimerions beaucoup avoir un vrai Sénat élu, non pas le genre de Sénat bidon proposé par un gouvernement qui n'arrive pas à se détacher du passé et de l'Accord de Charlottetown.
Aujourd'hui même, le gouvernement se fera encore fustiger par le chef libéral de la Colombie-Britannique, Gordon Campbell, lorsqu'il témoignera cet après-midi à Victoria...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La députée d'Edmonton-Nord à la parole.
Mme Deborah Grey: Monsieur le Président, le gouvernement se fera fustiger cet après-midi par le chef libéral de la Colombie-Britannique, Gordon Campbell, lorsqu'il témoignera dans le comité, même si ce n'est qu'une charade, comme l'a dit un député libéral. Il veut la tenue d'un référendum dans toute la Colombie-Britannique.
Si c'est une bonne idée pour ce libéral, pourquoi n'est-ce pas une bonne idée pour les libéraux d'en face?
L'hon. Herb Gray (Windsor-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, ma collègue montre que le processus fonctionne. Les audiences permettent à quelqu'un qui s'oppose à l'accord de venir présenter ses arguments sur une tribune publique. Le système fonctionne.
De plus, comme je l'ai déjà dit, nous avons d'abord vu le Parti réformiste appuyer l'Alternative unie, et voilà qu'il appuie les libéraux provinciaux de la Colombie-Britannique. N'est-ce pas remarquable?
* * *
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Monsieur le Président, la décision rendue hier au sujet de l'affaire Marshall n'a pas porté sur l'accès aux ressources autres que les anguilles. Pourtant, le ministre des Affaires indiennes continue de négocier le transfert de toutes les ressources aux termes du traité.
Pourquoi le gouvernement transfère-t-il des ressources aux autochtones, alors que rien ne l'oblige à pratiquer cette politique qui sème la discorde?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de citer certains des propos que le député a tenus hier. Il a parlé de victoire pour les pêcheurs non autochtones. Il s'est réjoui que les droits issus du traité soient limités. Il a tenté de semer la frayeur en disant qu'on brade tout.
Je tiens à ce que la Chambre sache que le gouvernement et le député et ministre qui vous parle souhaitent négocier les relations avec les signataires de traités dans un contexte moderne. Voilà notre politique, et c'est dans ce sens que nous agirons.
M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement est précisément en train de tout brader par ces traités.
Le traité nisga'a accorde un accès aux ressources naturelles en fonction de la race. Il oppose un groupe de Canadiens à un autre, les autochtones aux non-autochtones et même des autochtones à d'autres autochtones. Les Gitanyow et les Gitksans ont dit que, à leur avis, le traité nisga'a était un acte d'agression. On a brandi des armes à feu, et il y a eu des menaces de violence et de guerre. Pourquoi le gouvernement s'entête-t-il à appliquer un processus qui dresse un groupe de Canadiens contre un autre?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, cela ne tient pas debout.
* * *
[Français]
LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le solliciteur général disait, hier, qu'il considérait les bavures du SCRS comme très sérieuses.
Or, le premier ministre, de son côté, banalise l'affaire et déclare qu'il est heureux de vivre dans un pays ouvert et que, de toute façon, tout finissait par se savoir, même les secrets d'État.
Comment le solliciteur général peut-il concilier ses propos avec ceux du premier ministre?
[Traduction]
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit, lorsque le directeur du SCRS m'a informé de cette affaire très grave, il m'a dit que l'inspecteur général faisait enquête sur cette histoire. Il m'a aussi dit que le SCRS enquêtait également. J'étais aussi parfaitement au courant du fait que le CSARS était mandaté par la Chambre pour évaluer la situation et qu'il avait accès aux dossiers du SCRS. C'est exactement ce qui se produit actuellement.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, c'est très intéressant, mais ce n'est pas la question. Je lui demandais pourquoi il considère, lui, que c'est sérieux, alors que le premier ministre considère que ce n'est pas très sérieux comme problème.
On va en essayer une autre. On sait que les documents de la GRC et du SCRS contiennent de l'information très privilégiée, comme des noms d'informateurs par exemple, et que la divulgation de ces renseignements pourrait avoir des conséquences très sérieuses pour ces personnes. J'imagine qu'il n'est pas nécessaire de faire un dessin pour le comprendre.
Quelles mesures le solliciteur général a-t-il prises pour que les gens dont les noms apparaissent sur ces listes ne subissent pas de préjudice? Il y a peut-être du monde qui les recherche, et ce n'est pas la GRC.
[Traduction]
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà expliqué au député que le gouvernement et moi sommes parfaitement conscients de la gravité de la situation. Nous avons suivi la ligne de conduite prévue en pareil cas. C'est exactement ce qui doit être fait actuellement.
Le SCRS enquête. Le CSARS étudie la situation, et l'inspecteur général mène son enquête. C'est ce qu'il convient de faire.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, les gaffes incroyables faites par les agents du SCRS ont jeté du discrédit sur tous les services secrets canadiens. Certains ex-directeurs de la CIA et du FBI ont même qualifié cette affaire de renversante et d'inexplicable.
Le solliciteur général ne se rend-il pas compte que les gaffes à répétition des services secrets les ont rendus ridicules partout dans le monde, en plus de démontrer son incapacité à assumer la responsabilité de solliciteur général?
[Traduction]
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je puis assurer au député que nos alliés dans le monde entier respectent énormément le SCRS. Ils sont en rapport avec lui dans bien des dossiers. Ce genre d'incident peut arriver et, en pareil cas, il y a une ligne de conduite à suivre. C'est ce que nous faisons en l'occurrence. Nous suivons la ligne de conduite prévue, et tout ce que je demande au député, c'est de laisser le processus suivre son cours.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, dans l'affaire de la disquette perdue dans la cabine téléphonique, il y a eu une enquête, et semble-t-il que des sanctions personnelles ont été prises.
Le solliciteur général peut-il nous dire si des directives ont été émises pour empêcher qu'à l'avenir, de telles disquettes circulent hors des bureaux, et surtout, est-ce que maintenant ces disquettes sont protégées pour qu'on ne puisse pas les lire aussi facilement qu'on le fait maintenant?
[Traduction]
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, oui, l'incident qui est survenu en 1996 avait été signalé par le directeur du SCRS au solliciteur général de l'époque. Le député sait sûrement que cette question est abordée dans le rapport du CSARS que j'ai déposé à la Chambre il y a deux semaines.
* * *
LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le ministre des Finances nous dit que la pauvreté chez les enfants le préoccupe, et je le crois.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le chef du Nouveau Parti démocratique.
Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, je crois le ministre des Finances lorsqu'il dit que la pauvreté chez les enfants le préoccupe...
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je crois que ce sont les compliments qui suscitent du désordre.
Mme Alexa McDonough: Monsieur le Président, le problème, c'est que le ministre des Finances est davantage préoccupé par bien d'autres choses. C'est pourquoi, dans d'autres domaines, il fixe des objectifs et des délais pour les atteindre, et sa détermination à les atteindre ne fléchit pas, quoi qu'il arrive. Cependant, lorsqu'il est question de pauvreté chez les enfants, il n'y a aucun objectif, aucun délai, aucune détermination infléchissable. Ma question, c'est: pourquoi?
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le chef du NPD a parfaitement raison. Le ministre des Finances est très préoccupé par la pauvreté chez les enfants. De plus, tous les députés ministériels et tous les libéraux, d'un océan à l'autre, se soucient énormément des enfants canadiens.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, ces habiles réparties ne feront pas disparaître la pauvreté chez les enfants...
Une voix: Avez-vous remarqué qu'Allan Rock ne demande pas la parole?
Mme Alexa McDonough: Selon les derniers rapports, le pourcentage d'enfants vivant dans des familles gagnant moins de 20 000 $ par année a doublé depuis 1989. Le nombre d'enfants qui vont dans les banques alimentaires a doublé.
Le ministre des Finances a un jour déclaré que le manque de logements abordables contribuait au cycle de pauvreté, voire l'accélérait, ce qui est inacceptable dans une société aussi riche que la nôtre, mais que le gouvernement ne faisait rien pour remédier à la situation.
Le ministre des Finances croit-il encore ce qu'il disait?
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Premièrement, je demande à la députée de ne pas brandir d'objets. Deuxièmement, les microphones sont branchés et nous nous faisons parfois prendre par inadvertance.
L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je ne peux qu'être d'accord avec la députée lorsqu'elle cite ce qui est ma propre politique et la politique du gouvernement. La seule chose qui m'intrigue, c'est pourquoi il lui a fallu tant de temps pour comprendre.
* * *
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le Président, le ministre des Affaires indiennes pourrait-il dire à la Chambre s'il a ou non demandé un avis juridique en ce qui concerne la décision rendue dans l'affaire Marshall avant d'aller dire aux Canadiens que la décision de la Cour suprême protège les droits des autochtones en matière d'exploitation forestière, d'exploitation minière et d'exploration du sous-sol de la mer?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, ce qui s'est passé hier est très intéressant. La ministre de la Justice et, bien sûr, le ministre des Ressources naturelles du Nouveau-Brunswick sont tombés d'accord avec nous pour dire que nous devons négocier avec les peuples autochtones du Canada atlantique. C'est précisément ce que nous allons faire.
M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le Président, le 20 octobre, le ministre des Affaires indiennes a déclaré que la décision rendue dans l'affaire Marshall protégeait les droits des autochtones en matière d'exploitation forestière, d'exploitation minière et d'exploration du sous-sol de la mer. Hier, dans une décision qu'elle a rendue, la Cour suprême a clairement affirmé que ce n'était pas le cas. Pourquoi le ministre a-t-il créé artificiellement une crise dans d'autres secteurs de ressources naturelles alors qu'il n'avait pas le droit de le faire?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je ne puis que répéter que les ressources naturelles sont, pour les peuples autochtones, un élément très important pour le développement économique et la création d'économies autochtones.
J'ai toutes les intentions de m'assurer que les peuples autochtones contribuent à notre économie.
* * *
LE TRAITÉ NISGA'A
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, le Comité des affaires indiennes a entendu de témoins gitxans que l'accord nisga'a attribue des terres de Gitxans aux Nisga'as. Les Nisga'as ont pu exprimer leur avis, mais pas les Gitxans qui s'estiment spoliés.
Pourquoi le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien refuse-t-il aux Gitxans, et à tous les autres habitants de la Colombie-Britannique, le droit de s'exprimer sur le traité nisga'a par voie de référendum? Pourquoi cela?
L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, nous négocions en ce moment même avec les Gitxans.
M. Derrek Konrad (Prince Albert, Réf.): Monsieur le Président, un vote serait de loin préférable à des pourparlers.
Le gouvernement n'a nulle intention d'entendre les Canadiens touchés par le traité nisga'a. En fait, ils ont été écartés des audiences du comité.
Le député libéral de Haliburton—Victoria—Brock a déclaré en rigolant que les audiences du comité étaient une farce. Sachant les libéraux de cet avis, le ministre peut-il donner à la population de la Colombie-Britannique une possibilité réelle de se faire entendre en lui accordant un référendum? Le fera-t-il?
L'hon. Robert D. Nault (Kenora—Rainy River, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, j'engage les réformistes à se faire expliquer le traité nisga'a.
Dans cet accord, le paragraphe 33 du chapitre concernant les dispositions générales précise ceci:
L'Accord n'a pas pour effet de reconnaître ou de conférer à aucun autre peuple autochtone que la nation Nisga'a des droits au sens de l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, ni d'avoir d'effet sur de tels droits.
Nous ne mettons donc pas en oeuvre un traité qui est susceptible de se répercuter sur les droits des autres premières nations.
* * *
[Français]
LES PRODUCTIONS AUDIOVISUELLES
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, hier, un représentant de la GRC a révélé que l'enquête policière en cours sur l'utilisation de prête-noms dans l'industrie télévisuelle ne portait que sur une seule maison de production.
Or, nous avons appris, voilà quelque temps, que l'utilisation de prête-noms serait une pratique qui a eu cours également chez World Affairs.
Ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine. La ministre ne devrait-elle pas demander à la GRC d'enquêter également chez World Affairs, comme elle l'a fait pour CINAR?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai pas exercé de contraintes sur l'enquête de la GRC. La GRC est libre d'enquêter sur tous les problèmes qui touchent le niveau individuel.
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, qu'on se comprenne bien: il y a des allégations très sérieuses qui concernent la maison de production CINAR et des aveux de M. Shapiro, producteur exécutif, incriminant également World Affairs.
Comment la ministre peut-elle se satisfaire de n'avoir demandé une enquête que sur l'une de ces deux maisons de production, si elle veut véritablement faire la lumière, comme elle le prétend, sur l'utilisation des fonds publics dont elle est responsable?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai parlé d'aucune compagnie précise, c'est le député qui a parlé d'une compagnie.
* * *
[Traduction]
LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, ce n'est pas la première fois que le ministère du solliciteur général éprouve des difficultés avec son contrôle de l'information.
En effet, après les élections de 1993, le progressiste conservateur Doug Lewis a égaré des boîtes d'information du SCRS. Ensuite, le prédécesseur du ministre a trop parlé sur l'affaire de l'APEC. Enfin, le ministre actuellement en poste a perdu des documents qui se trouvaient sur la banquette arrière d'une voiture.
Comment les Canadiens peuvent-ils faire confiance au ministre ou à son ministère? Comment peuvent-ils avoir la certitude que leur vie est protégée?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, les services de police et du renseignement de sécurité prennent ces questions très au sérieux, et moi aussi.
Quand il y a une infraction à la sécurité, et malheureusement cela se produit, nous procédons à une enquête et prenons toutes les mesures nécessaires pour y remédier.
M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, je dois dire que l'un des aspects les plus effrayants dans cette affaire de ce matin concernant la perte d'une disquette est peut-être le fait que la personne qui a trouvé la disquette a agi de façon responsable en ne la vendant pas ou en ne la remettant pas aux personnes nommées sur la disquette. La personne en cause a donc fait preuve d'un très net sens des responsabilités, ce que l'on ne peut pas dire du solliciteur général.
Comment les Canadiens peuvent-ils avoir la certitude que le ministre prend ses responsabilités relativement aux gens qui mettent leur vie en danger en faisant des confidences au SCRS ou à la GRC?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit, le directeur a informé le solliciteur général de cette situation en 1996. Je puis donner l'assurance au député que les mesures qui s'imposaient ont été prises.
D'ailleurs, comme je l'ai déjà dit à la Chambre, je viens de déposer le document du CSARS dans lequel on dit que la question a été réglée.
* * *
[Français]
LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, la semaine prochaine, c'est dans la tristesse qu'on célébrera le 10e anniversaire de la motion adoptée unanimement par la Chambre des communes visant à réduire la pauvreté chez les enfants au Canada.
Comment le ministre des Finances peut-il expliquer que son gouvernement ait si lamentablement failli à la tâche d'éliminer la pauvreté chez les enfants?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (Brant, Lib.): Monsieur le Président, il n'est personne à la Chambre, pas plus qu'au Canada, qui ne soit conscient du fait que nous avons traversé de durs moments en matière de finances. Nous avons remis de l'ordre dans nos finances. Le ministre des Finances a fait un travail extraordinaire en réussissant à tous nous réconcilier.
Maintenant que des choix s'offrent de nouveau à nous, ceux des députés ce côté-ci de la Chambre comprennent les enfants, qui sont notre grande priorité.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, c'est regrettable que le ministre des Finances n'ait pas répondu à ma question.
Quoi qu'en disent les chiffres de la ministre, ils sont éloquents. Il y avait un million d'enfants pauvres au Canada à l'arrivée au pouvoir des libéraux et ce chiffre a considérablement augmenté depuis.
Quelles sont les explications que la ministre pourrait nous donner sur l'augmentation de la pauvreté des enfants au Canada?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais répéter que pour les députés de ce côté-ci de la Chambre, la question des enfants et de la pauvreté chez les enfants est en effet une priorité. Nous prenons des mesures dans ce domaine très important. Le discours du Trône le montre. Nous doublons le congé parental. Nous allons procéder à un troisième investissement considérable dans la Prestation nationale pour enfants.
Nous allons travailler de concert avec les provinces, y compris avec le Québec, pour nous concentrer sur les premières années de développement des enfants. Nous avons une stratégie en place et nous allons changer les choses.
* * *
LE FONDS TRANSITOIRE POUR LA CRÉATION D'EMPLOIS
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, il y a des contradictions inquiétantes dans la version des faits de la ministre du Développement des ressources humaines relativement à la réserve ministérielle du Fonds transitoire pour la création d'emplois.
Elle affirme que le demi-million de dollars prélevé sur cette réserve ministérielle a servi à créer des emplois qui faisaient cruellement défaut dans Brantford. Cependant, le bureau régional du ministère du Développement des ressources humaines affirme qu'aucun demandeur ne s'est jamais manifesté. Ainsi, cet argent n'a jamais servi à créer des emplois.
Qui dit la vérité dans ce dossier? La ministre ou le ministère du Développement des ressources humaines?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, la députée va devoir faire quelques vérifications.
En vérité, ma circonscription a été désignée pour profiter du Fonds transitoire en 1995, car les taux de chômage y étaient très élevés. La moyenne était de 11,8 p. 100, mais le taux dépassait parfois les 14 p. 100. À cette époque, on a débloqué des crédits, mais les projets n'étaient pas en place.
Par la suite, on a procédé à des investissements très efficaces dans ma circonscription dans le cadre du Fonds transitoire pour la création d'emplois. À l'heure actuelle, notre collectivité se porte fort bien grâce à la participation du gouvernement fédéral à des projets communautaires bien ciblés.
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Monsieur le Président, la ministre ne cesse de confondre le Fonds transitoire pour la création d'emplois et cette réserve ministérielle. Est-ce délibéré de sa part?
Voici un autre cas où la version donnée par la ministre à la Chambre et les renseignements fournis par son ministère ne concordent pas. Hier, elle a essayé vaillamment de justifier cette caisse noire de plusieurs millions de dollars constituée à partir des fonds de l'assurance-emploi en affirmant qu'une partie de cet argent est allée à la circonscription du député réformiste de West Vancouver—Sunshine Coast. Cependant, son ministère affirme qu'aucun projet de ce genre n'a jamais été financé grâce à cette soi-disant réserve ministérielle spéciale pour la création d'emplois. Comment expliquer cette contradiction?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a aucune contradiction.
Lorsqu'on a décidé que ma circonscription pourrait profiter du Fonds transitoire pour la création d'emplois, on pouvait alors utiliser de l'argent provenant de la réserve ministérielle. Ce n'est pas inapproprié. Il n'y a rien de répréhensible à cela. On ne s'est pas servi de cet argent à ce moment-là. Ce sont plutôt des crédits du Fonds transitoire pour la création d'emplois qui ont été affectés à ces projets.
Je rappelle à la Chambre qu'en 1997, le Toronto Star a publié un article dans lequel on disait que ma collectivité avait le pire centre-ville au Canada. Il y a deux mois à peine, il publiait un autre article qui parlait du redressement de la situation dans ma collectivité.
* * *
[Français]
LE LOGEMENT SOCIAL
M. Maurice Dumas (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral, depuis six ans, n'a rien investi dans la construction de logements sociaux au Québec, et cela, même si le gouvernement du Québec et les groupes sociaux lui demandent avec insistance de réinvestir dans ce secteur.
Ma question s'adresse au ministre des Travaux publics. Comment un gouvernement qui dit vouloir lutter contre la pauvreté peut-il justifier qu'il refuse toujours d'investir quelque argent que ce soit dans la construction de logements sociaux?
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, nous continuons toujours d'investir dans le logement abordable. Tout d'abord, j'aimerais rappeler à la Chambre que le gouvernement continue d'investir tout près de deux milliards de dollars par année dans le logement social.
Nous avons aussi un programme d'assurance-hypothèque qui permet de construire et d'assurer plus de 475 000 maisons par année. Nous avons investi 300 millions de dollars dans le programme PAREL, dont le Québec bénéficie.
Aussi, depuis que nous formons le gouvernement, avec le projet des...
Le Président: L'honorable député de Brampton-Centre a la parole.
* * *
[Traduction]
LE MUSÉE CANADIEN DES CIVILISATIONS
M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine canadien.
Après des mois de lobbying, des milliers de lettres et des pétitions renfermant plus de 2 500 signatures afin d'appuyer la tenue d'une exposition au Musée canadien des civilisations pour reconnaître tous les crimes contre l'humanité commis au XXe siècle, la ministre peut-elle dire à la Chambre quelles mesures seront prises, compte tenu de l'appui incroyable manifesté partout au pays à l'égard de ce projet?
L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je veux d'abord remercier le député de Brampton-Centre, qui a fait un travail incroyable afin de mobiliser 22 organismes de toutes les régions du pays pour travailler à cet important projet.
J'espère que tous les députés seront présents à la Chambre pour exprimer leur appui au projet de loi d'initiative parlementaire C-224, qui sera débattu le 30 novembre.
* * *
L'IMMIGRATION
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, la Cour fédérale a statué que les étrangers qui purgent des peines d'emprisonnement au Canada doivent bénéficier des mêmes droits que les Canadiens. Ainsi, même si des criminels font l'objet d'une ordonnance d'expulsion, ils peuvent demander une libération conditionnelle de jour sans surveillance.
Il n'y a qu'un moyen d'empêcher la libération de ces criminels. Les autorités de l'immigration doivent convaincre la CISR qu'ils risquent de disparaître.
La ministre de l'Immigration promettra-t-elle aujourd'hui qu'elle s'opposera à toutes les demandes de libération conditionnelle, ou laissera-t-elle tous ces criminels échapper à la justice?
L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à dire au député et à tous les autres députés que la sécurité publique est notre première préoccupation, que je n'ai absolument aucune sympathie pour les ressortissants étrangers qui commettent des crimes graves au Canada et que ce jugement nous permettra, en vertu de la Loi sur l'immigration, de demander que soit détenue toute personne qui présente une menace pour la sécurité du Canada ou dont nous craignons qu'elle ne s'enfuie si elle est libérée.
M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, la ministre n'a tout simplement pas répondu à la question.
Le trafic de drogues auquel se livrent des Honduriens en Colombie-Britannique prouve que la situation est grave. Ces gens présentent des demandes de statut de réfugié, mais commencent à vendre des drogues quelques jours après être entrés au Canada. Ils sont appréhendés, accusés, condamnés et des ordonnances d'expulsion sont finalement prises contre eux. Cependant, à ce moment-là, la ministre de l'Immigration ne peut plus les retracer.
Quand la ministre de l'Immigration va-t-elle enfin comprendre? Pourquoi le gouvernement libéral fait-il libérer des criminels étrangers qui ont été condamnés et qui sont sous le coup d'une ordonnance d'expulsion?
L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le député est entièrement dans l'erreur. Il confond les questions d'ordre public, soit les services de police, les poursuites judiciaires et l'administration de la justice, qui relèvent toutes des provinces, avec le pouvoir du gouvernement fédéral d'expulser les personnes qui ne sont pas admissibles au Canada.
Je rappelle au député que quiconque a commis un crime à l'étranger ne peut entrer au Canada. Je répète que je n'ai aucune sympathie pour les ressortissants étrangers qui commettent des crimes au Canada. Nous les expulserons le plus rapidement possible.
* * *
L'INDUSTRIE DE LA MACHINERIE AGRICOLE
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, Versatile Tractor de Winnipeg est le dernier fabricant de tracteurs au pays. Par suite de l'annonce de la fusion de Ford New Holland et de Case, les autorités américaines ont ordonné l'abandon de la production de tracteurs à Versatile, ce qui réduit presque à néant l'usine de Winnipeg. Cette mesure fera disparaître 700 bons emplois et touchera le coeur de l'industrie de la machinerie agricole au pays.
Ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. Quel rôle le gouvernement fédéral a-t-il joué dans les audiences américaines sur les pratiques restrictives et l'accord final qui a été conclu? Quelles mesures le gouvernement a-t-il prises pour protéger nos intérêts, nos emplois et notre industrie de la machinerie agricole?
M. John Cannis (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, en réponse à la question du député, c'est là une question très importante pour le gouvernement. Elle se trouve au centre même de cette industrie. Nous gardons constamment la situation à l'oeil.
M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, il y a une autre question que j'aimerais souligner. Le gouvernement fédéral a versé 45,5 millions de dollars à la société Versatile dans le cadre du programme de recherche et développement, pour la mise au point de cette même ligne de tracteurs que nous perdrons bientôt, soit le tracteur bi-directionnel TV-140, l'un des meilleurs au monde.
Alors que les Manitobains cherchent désespérément un acheteur pour la nouvelle usine Versatile, le ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien pourrait-il nous dire si le gouvernement fédéral est prêt à offrir des prêts et subventions de ce genre à de nouvelles compagnies dans le but de favoriser un certain développement industriel qui compenserait la perte de la technologie de Versatile et de ces 700 emplois à Winnipeg.
L'hon. Ronald J. Duhamel (secrétaire d'État) (Diversification de l'économie de l'Ouest canadien) (Francophonie), Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement n'a pas accepté cette situation d'emblée.
Nous continuons de collaborer avec les compagnies pour essayer de conserver ces emplois et pour voir si nous pouvons agrandir l'usine. En ce qui touche les investissements traditionnels, nous nous pencherons sur la question en temps voulu. Ce n'est toutefois pas encore le cas.
* * *
LE SCRS
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, malgré l'attitude désinvolte du directeur du SCRS envers le solliciteur général et le Parlement, il appert que ce n'est pas la première fois que des renseignements confidentiels sont traités avec négligence par ce service. Des fautes commises par les cadres supérieurs du SCRS sont dévoilées chaque jour.
En 1996, une disquette du SCRS laissée dans une cabine téléphonique de Toronto renfermait des documents confidentiels incluant les noms d'objectifs. Une autre preuve que le SCRS est en crise est l'annulation de l'enquête Sidewinder. Il serait bon de rester à l'écoute.
Le solliciteur général répète que c'est une affaire grave. Puis il hausse les épaules en disant qu'il est normal que de tels incidents se produisent. Quand le solliciteur général fera-t-il preuve de leadership et suspendra-t-il le directeur?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit, le directeur m'a immédiatement informé de l'incident. L'affaire à laquelle fait allusion le député date de 1996. Elle avait été signalée au solliciteur général de l'époque et le processus approprié a été observé.
Je répète que le CSARS a rédigé un rapport, que j'ai reçu et qui a été déposé à la Chambre. Ce rapport indiquait notamment que les mesures de procédure appropriées avaient été prises.
M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, il a fallu trois ans au solliciteur général pour présenter ce document. On peut difficilement dire que le processus fonctionne bien.
Le SCRS fait enquête sur lui-même. L'inspecteur général fraîchement nommé fera rapport. Le directeur qui, au départ, n'a pas informé le chien de garde approprié, le CSARS, et qui a couvert les traces de l'agent en cause sera chargé de collaborer tout au long de l'enquête.
Le solliciteur général croit-il vraiment que cette enquête interne d'un espion sur un autre espion inspirera confiance aux Canadiens et réussira vraiment à mettre au jour les fautes de son ministère?
L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas au juste ce que le député ne comprend pas. Le directeur m'a informé. Il y a un processus à observer. Il m'a dit que l'inspecteur général faisait enquête, que le SCRS menait une enquête.
Nous savons tous à la Chambre que le CSARS a pour mandat de revoir tous les dossier du SCRS. Pourquoi le député s'oppose-t-il au déroulement du processus en place?
* * *
[Français]
L'ÉQUITÉ SALARIALE
M. Mark Assad (Gatineau, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la présidente du Conseil du Trésor.
Il y a deux semaines, il y a eu une entente entre le Conseil du Trésor et les fonctionnaires fédéraux sur la question de l'équité salariale. Depuis, j'ai reçu plusieurs appels de ceux et celles qui sont touchés par cette entente. Ils veulent connaître les étapes à venir.
Est-ce que la ministre peut informer cette Chambre des étapes à venir et quand ces gens vont recevoir leur premier chèque?
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'informer les députés de cette Chambre que le Tribunal canadien des droits de la personne a entériné l'entente que nous avons conclue avec l'Alliance de la fonction publique du Canada sur la mise en oeuvre du jugement sur l'équité salariale.
On est donc prêts à passer à la seconde étape, celle de calculer précisément ce qui est dû à chacun des fonctionnaires. Nos employés actuels peuvent s'attendre à recevoir les montants d'ici quatre à six mois. Ces montants seront calculés automatiquement et versés par les ministères qui les emploient actuellement. Nous avons aussi mis sur pied des lignes téléphoniques sans frais pour nos anciens employés.
* * *
[Traduction]
LA DÉFENSE NATIONALE
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, dans un récent rapport de la Conférence des associations de défense, un regroupement d'experts militaires, on peut lire ceci, et je cite: «Les Forces canadiennes sont sur le point de s'effondrer».
Cette crise est directement attribuable à la politique de la terre brûlée pratiquée par le gouvernement libéral. Or, niant l'évidence même, le ministre refuse de rétablir certaines dépenses militaires.
Comment le ministre peut-il encore et toujours nier l'évidence et persister à priver nos forces armées du nécessaire?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, les Forces canadiennes ne sont nullement sur le point de s'effondrer. C'est vrai que nous sommes coincés financièrement, mais il ne faudrait pas exagérer la situation. Or, c'est bel et bien une exagération.
Le gouvernement a investi des fonds dans du nouveau matériel. Il a soit acheté du nouvel matériel, soit modernisé et amélioré le matériel principal à l'usage des Forces canadiennes. Il a investi dans la rémunération et la qualité de vie de nos soldats parce qu'ils constituent sa priorité. Le gouvernement continuera dans cette voie.
* * *
[Français]
LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURES
M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): Monsieur le Président, au Québec, on constate qu'il existe une volonté très forte d'entreprendre une programme d'infrastructures dans les meilleurs délais. Tous réclament l'amorce de négociations d'un nouveau programme de travaux d'infrastructures.
Ma question s'adresse à la présidente du Conseil du Trésor. Peut-elle nous dire si elle se mettra immédiatement au travail pour répondre à ces demandes et ne pas attendre à 2001 pour le faire?
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, j'invite le député du Bloc à relire encore une fois le texte du discours du Trône dans lequel il est statué très clairement que nous aurons un programme d'infrastructures et que nous allons nous donner le temps de le négocier avec nos partenaires.
Notre échéancier est le mois de décembre de l'an 2000. Nous allons le faire dans le calme et nous allons réussir à le faire pour répondre aux besoins de la population d'abord et avant tout.
* * *
[Traduction]
LA SANTÉ
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, le ministre de la Santé a maintenant eu l'occasion d'examiner le missile dont se dote Ralph Klein pour détruire le régime d'assurance-maladie.
Nous avons entendu hier des banalités à l'eau de rose. Aujourd'hui, les Canadiens exigent qu'on passe à l'action. Hier, nous avons informé le gouvernement qu'il pourrait invoquer immédiatement l'article 6 de l'entente sur l'union sociale, qui stipule que la prévention et le règlement des différends s'appliqueront à l'interprétation des principes de la Loi canadienne sur la santé.
Voilà sûrement ce dont nous parlons aujourd'hui. Le ministre de la Santé prendra-t-il cette mesure aujourd'hui?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, nous savons tous qu'il y a des problèmes et des défis auxquels le système de santé du Canada peut faire face.
Nous travaillons depuis six ans à le renforcer et nous continuerons de le faire. Le statu quo n'est pas acceptable. Il faut apporter des changements pour améliorer les soins de santé au Canada, mais il faut pour ce faire prendre pour point de départ les principes de la Loi canadienne sur la santé. Voilà pourquoi nous ne partageons pas l'approche adoptée par le Parti réformiste.
Cependant, si le Nouveau Parti démocratique veut collaborer avec nous à cet égard et se joindre à nous pour affirmer les principes de la Loi canadienne sur la santé et pour exhorter toutes les provinces, pas seulement l'Alberta, mais tous les gouvernements provinciaux, à agir selon les principes de la Loi canadienne sur la santé et à renforcer le système public de santé, il peut le faire.
* * *
LES PÊCHES
M. Charlie Power (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, la Cour suprême a apporté des éclaircissements à la décision Marshall et dit une deuxième fois au ministre des Pêches qu'il peut adopter des règlements et les faire respecter.
Le ministre dira-t-il à tous les pêcheurs, tant autochtones que non autochtones, qu'ils doivent respecter les règlements actuels jusqu'à ce qu'ils aient été modifiés? De plus, donnera-t-il à ses agents des pêches l'instruction d'appliquer la Loi sur les pêches afin qu'il n'y ait qu'un ensemble de règles pour tous les pêcheurs?
L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député. Si celui-ci se tenait au courant du dossier, il saurait que j'ai dit dès le départ que le secteur des pêches serait réglementé, ce qui s'est produit, et que nous appliquerions les règlements en matière de pêche.
La seule position du Parti progressiste conservateur consiste à dire qu'il invoquerait la disposition dérogatoire. Quelle est sa position? Il ne lui a pas donné des proportions moins grandes. Aurait-il l'obligeance de nous dire quelle est sa position?
* * *
LE TIMOR ORIENTAL
M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État (Asie-Pacifique) qui s'est rendu au Timor oriental à l'occasion du référendum.
Quelles mesures précises le Canada adopte-t-il pour aider le courageux peuple du Timor oriental à réussir la transition vers l'indépendance?
L'hon. Raymond Chan (secrétaire d'État (Asie-Pacifique), Lib.): Monsieur le Président, le Canada est un des pays qui a apporté le plus d'aide au Timor oriental. À l'heure actuelle environ 600 soldats canadiens se trouvent au Timor oriental en vue d'instaurer un climat de stabilité dans la région. Nous avons également fourni beaucoup d'aide humanitaire.
Nous avons aussi pris une part très active à la création de l'administration transitoire des Nations Unies pour le Timor oriental. Cette initiative assurera la sécurité et, parallèlement, l'administration de la justice. Elle contribuera aussi à l'établissement des mesures d'aide sociale et civile à la région.
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LA DÉFENSE NATIONALE
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de la Défense sait que le Parti réformiste a appuyé une hausse de deux milliards de dollars du budget de la défense.
En fait, le président du Comité de la défense, un député libéral, s'est aussi exprimé en faveur de cette augmentation de deux milliards de dollars. Cependant, le ministre continue de tergiverser.
Qu'attend-il? Est-il, oui ou non, disposé à rétablir le financement?
L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, j'ai reconnu que la situation financière des Forces canadiennes était difficile. Je cherche des ressources additionnelles pour qu'on puisse respecter la teneur du discours du Trône, c'est-à-dire veiller à ce que les Forces canadiennes puissent accomplir leur travail.
Je ne comprends pas toutefois car, durant la dernière campagne électorale, les réformistes avaient dit qu'ils suspendraient toute dépense pendant trois ans, y compris les dépenses de la défense, afin de consacrer tous les excédents au remboursement de la dette et aux allégements fiscaux. Les réformistes auraient-ils oublié leur promesse? Est-ce qu'il change maintenant d'avis? Qui peut accorder foi aux propos des gens de ce parti?
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[Français]
LE NUMÉRO D'ASSURANCE SOCIALE
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, malgré la crise dans la gestion du numéro d'assurance sociale dénoncée par le vérificateur général, le gouvernement a décidé de rejeter le rapport unanime du Comité permanent du développement des ressources humaines.
Est-ce que la ministre du Développement des ressources humaines a décidé de faire fi de l'avis du vérificateur général en laissant ainsi se perpétuer le fouillis au niveau de la gestion du NAS et la fraude incontrôlée qui en découle?
[Traduction]
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je sais que des fonctionnaires de mon ministère étaient présents à la séance de travail du comité permanent ce matin. Ils ont examiné la réponse au rapport du comité sur les numéros d'assurance sociale.
Je crois que bon nombre des points contenus dans le rapport que le comité permanent nous a remis sont mentionnés dans la réponse et qu'on prend des mesures à leur égard. En outre, je peux dire que nous continuerons de travailler avec le comité permanent pour que l'utilisation des numéros d'assurance sociale ne nuise pas à la protection des renseignements personnels des Canadiens.
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LES DROITS DES ENFANTS
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, un énième rapport prouve que le gouvernement a trahi les enfants du Canada. Que ce soit dans le domaine de la lutte contre la pauvreté, de la santé ou de l'éducation, les libéraux se méritent un beau zéro.
Il faut maintenant nous demander quelle place occupent les enfants handicapés. Ils sont au bas de la liste des priorités puisque le Canada ne s'est pas acquitté de ses obligations aux termes de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant.
Ma question s'adresse à la ministre du Développement des ressources humaines. Pourquoi le gouvernement n'insiste-t-il pas pour que les enfants handicapés jouissent des droits, des services et du soutien auxquels ils ont droit? Pourquoi le gouvernement ne fait-il pas son travail?
L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le rapport publié aujourd'hui reconnaît le travail que fait le Canada pour mettre en oeuvre la déclaration des Nations Unies relative aux droits des enfants. En fait, nous avons obtenu une très bonne note.
Le rapport indique toutefois que nous pouvons mieux faire dans certains domaines, notamment à l'égard des enfants vulnérables, y compris les enfants handicapés. Je suis heureuse d'annoncer que lors d'une récente réunion avec les ministres des services sociaux, nous avons discuté en priorité des problèmes auxquels font face les Canadiens handicapés. Je ne doute pas que, ensemble, nous arrivions à faire des progrès constants.
* * *
LES AFFAIRES AUTOCHTONES
M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, le Herald de Halifax rapporte aujourd'hui que le ministre des Affaires indiennes aurait déclaré n'avoir jamais dit que la décision rendue dans l'affaire Marshall s'appliquait aux gisements de gaz ou à l'exploitation forestière. Or, nous savons très bien que, lors du débat d'urgence que nous avons eu le 13 octobre à la Chambre, il a dit: «L'incidence de l'affaire Marshall ne se limitera probablement pas à la pêche ni d'ailleurs à la région canadienne de l'Atlantique».
Ma question est simple. Le ministre peut-il promettre à la Chambre que dorénavant, avant de faire d'autres commentaires imprudents et provocateurs relativement à la décision rendue dans l'affaire Marshall, il tournera sept fois la langue dans sa bouche?
Des voix: Oh, oh!
Le Président: Sur cette joyeuse note prend fin la période des questions pour aujourd'hui.
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LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Réf.): Madame la Présidente, jeudi étant notre jour favori à tous, je me demande si le leader du gouvernement à la Chambre pourrait dire à la Chambre quel est le programme des travaux pour le reste de la semaine et quels sont les plans pour la semaine prochaine, et nous dire également où il a eu sa cravate car elle est très bien.
L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, les commentaires au sujet de la mode sont toujours appréciés, surtout quand ils sont positifs. En attendant, j'aimerais faire part à la Chambre de ce qui suit.
[Français]
Aujourd'hui, nous allons terminer le débat en deuxième lecture du projet de loi C-3, Loi concernant la justice pénale pour les adolescents.
Vendredi, nous allons passer à l'étape du rapport et à la troisième lecture du projet de loi C-4, Loi sur la station spatiale, comme convenu avec les leaders parlementaires un peu plus tôt aujourd'hui. Ensuite, ce sera la deuxième lecture du projet de loi C-10, Loi sur les subventions aux municipalités. J'espère que nous aurons l'occasion de compléter ces deux projets de loi demain.
Lundi prochain sera un jour désigné. Mardi, nous étudierons la deuxième lecture du projet de loi C-13, Loi concernant les Instituts de recherche en santé.
[Traduction]
Mercredi prochain, nous passerons à l'étude de l'étape du rapport du projet de loi C-8, Loi sur les aires marines.
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[Traduction]
LA LOI SUR LE SYSTÈME DE JUSTICE PÉNALE POUR LES ADOLESCENTS
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-3, Loi concernant le système de justice pénale pour les adolescents, et modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité; ainsi que de l'amendement.
L'hon. Ethel Blondin-Andrew (secrétaire d'État (Enfance et Jeunesse), Lib.): Madame la Présidente, en ma qualité de secrétaire d'État à l'Enfance et à la Jeunesse, je suis ravie de participer à ce débat et d'exprimer mon appui au projet de loi C-3, Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Il s'agit d'un texte de loi fort important que mon collègue, le ministre de la Justice, a présenté. Il a pour objet de remplacer l'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants. Le projet de loi C-3 est le fruit d'une réflexion profonde et de la réforme substantielle du système de justice pénale en ce qui s'applique aux adolescents.
C'est bien la première fois que les objectifs sont clairement énoncés et les principes clairement définis dans la loi pour nous guider dans le traitement des jeunes contrevenants dans tous les aspects du système de justice pénale. Après des consultations exhaustives menées auprès de la population, le gouvernement a veillé à ce que ces principes et le texte de loi dans son ensemble soient conformes aux valeurs préconisées par les Canadiens, tout en protégeant les intérêts des adolescents. Ce texte doit guider les magistrats et la police lorsqu'ils sont confrontés à de jeunes contrevenants. À titre d'exemple, le préambule réaffirme les valeurs que les Canadiens souhaitent instaurer dans le système de justice pénale pour les adolescents, notamment la responsabilisation, le respect, la responsabilité et l'équité.
La loi proposée établit clairement que la protection de la société est le principal objectif du système de justice pour les jeunes et qu'on atteint mieux cet objectif par la prévention, par des conséquences significatives et par la réadaptation.
La loi proposée énonce des principes qui prévoient clairement que les jeunes doivent être tenus responsables de leurs actes et que les conséquences devraient renforcer le respect des valeurs sociales, encourager les réparations envers les victimes et la communauté et refléter les circonstances particulières de chaque infraction.
Le gouvernement a écouté attentivement les Canadiens de tout le pays exprimer leurs préoccupations au sujet de la criminalité chez les jeunes et de la façon dont notre système de justice y fait face. Nous savons que les Canadiens s'attendent à ce que le gouvernement renforce les valeurs de la responsabilité et de la responsabilisation de chacun. Nous savons qu'il faut faire confiance aux familles et aux communautés et les aider à faire de nos jeunes des individus en bonne santé et responsables. Nous reconnaissons que les Canadiens s'attendent à ce que les sanctions imposées aux jeunes soient proportionnelles à l'infraction. Cependant, les sanctions doivent tenir compte de l'âge et d'autres facteurs propres à l'individu, de l'impact du crime sur la victime ainsi que de la nécessité et des avantages de la réadaptation des jeunes contrevenants et de leur réinsertion sociale.
En débattant de ce projet de loi, nous devons garder à l'esprit que les jeunes gens ne sont pas un ennemi. Ils sont tout aussi souvent victimes de crimes perpétrés par des jeunes ou des adultes. Comme le savent tous les parents, élever des enfants de façon à en faire des individus en bonne santé, heureux et responsables est un défi complexe, quoique formidable. Cela exige de l'attention, de la sensibilité, du bon sens et un sens profond des valeurs et des priorités. De même, la tâche de régler le problème de la criminalité chez les jeunes exige de la détermination, un grand sens des valeurs et la capacité de tenir compte de la situation de chacun de ces jeunes et de sa place dans la communauté.
Le système de justice pénale doit être capable de prendre en considération les divers facteurs de la criminalité chez les jeunes. Les solutions simplistes, comme enfermer les délinquants et jeter la clé, ne sont pas efficaces. Il a même été montré qu'elles risquent d'aggraver la récidive au lieu de la faire diminuer.
Je suis bien placée pour le savoir. Au début des années 90, la circonscription de Western Arctic et celle de Kenora—Rainy River, représentée par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, étaient considérées comme les régions où le taux de récidive était le plus élevé.
Le projet de loi, tout en étant ferme à l'égard de la criminalité juvénile violente, appuie, et cela est tout aussi important, la réadaptation des jeunes qui ont maille à partir avec la loi. La majorité d'entre eux ne commettent pas des crimes violents.
Nous devons considérer le projet de loi dans le contexte de la criminalité juvénile telle qu'elle existe au Canada. Je signale les statistiques récentes qui montrent que ce type de criminalité est à la baisse au Canada.
Entre 1991 et 1997, le taux d'inculpation chez les jeunes a diminué de 23 p. 100. Un nombre relativement faible de jeunes sont mêlés à des crimes graves ou violents. La majorité des inculpations portent sur des crimes non violents contre des biens. En 1997, par exemple, 82 p. 100 des inculpations concernaient des crimes non violents comme le vol, la possession de drogue et le non-respect d'ordonnances du tribunal.
Je ne cherche pas à minimiser la gravité de ces infractions, mais plutôt à montrer que, pour la majorité des jeunes qui ont des démêlés avec la justice, il s'agit d'un problème temporaire. Avec l'aide de la société, ils peuvent se racheter. Ils peuvent transformer leur vie et devenir des membres productifs et responsables de la société.
Nous savons également que, en 1997, 18 p. 100 des inculpations portaient sur des crimes violents, ce qui représente une baisse de 2 p. 100 par rapport à l'année précédente. Mais cette statistique rassurante ne doit pas nous inviter à la complaisance.
Aux termes du projet de loi, les jeunes contrevenants coupables de crimes violents seront tenus responsables de leurs actes et se verront imposer les peines et les traitements qui s'imposent. Le projet de loi prévoit, à cette fin, une garde intensive pour les jeunes récidivistes qui présentent les risques les plus élevés ou qui ont commis un meurtre, une tentative de meurtre, un homicide involontaire coupable ou une agression sexuelle grave. Ces peines visent les délinquants souffrant d'une maladie ou de graves troubles d'ordre mental, psychologique ou émotionnel. La peine sera assortie d'un plan de traitement intensif et de surveillance des jeunes contrevenants; toutes les décisions relatives à leur libération dans le cadre d'un programme de réintégration surveillée seront prises par les tribunaux. Le gouvernement fédéral accordera aux provinces des fonds supplémentaires pour leur permettre d'appliquer ces nouvelles peines.
Selon le projet de loi C-3, les déclarations de victime seront autorisées devant les tribunaux de la jeunesse, et les jeunes de 14 et de 15 ans feront désormais partie du groupe de jeunes contrevenants passibles d'une peine pour adultes. Une peine pour adultes pourra aussi être imposée à un jeune de 14 ans ou plus qui aura été reconnu coupable d'une infraction appelant une peine d'emprisonnement de plus de 2 ans, si la Couronne le demande et si le tribunal le juge opportun dans les circonstances.
Quant aux mesures de détention et de réintégration, le projet de loi exigera que les adolescents soient, en général, tenus à l'écart des adultes, afin que leurs échanges avec les criminels adultes soient limités.
Le projet de loi C-3 permettra la publication des noms de tous les jeunes condamnés à une peine pour adultes. De plus, les noms des jeunes de 14 à 17 ans reconnus coupables de meurtre, de tentative de meurtre, d'homicide involontaire coupable, d'agression grave, d'agression sexuelle ou de crime violent avec récidive et condamnés à une peine pour adolescents pourraient également être publiés. La publication sera autorisée si le jeune contrevenant est en liberté et considéré comme dangereux par un juge.
Tout en s'occupant fermement des crimes violents perpétrés par des adolescents, le projet de loi veillera à ce que le système de justice pénale ait la flexibilité voulue pour s'occuper aussi des nombreux autres cas relatifs aux infractions non violentes. Dans ces derniers cas, les solutions de rechange à la détention représentent souvent le meilleur moyen de promouvoir la réhabilitation et la réinsertion avec l'aide de la famille et de la collectivité du délinquant. Nous savons que les jeunes contrevenants sont beaucoup plus susceptibles que les contrevenants adultes d'être réhabilités et de devenir des citoyens respectueux des lois.
Depuis cinq ans, le nombre d'adolescents en détention est de 3 500 à 4 000 environ. En 1997, le quart seulement des jeunes contrevenants au Canada faisaient l'objet d'un traitement à l'extérieur du système de justice comme tel. En comparaison, ce taux était de 53 p. 100 aux États-Unis, de 57 p. 100 en Grande-Bretagne et de 61 p. 100 en Nouvelle-Zélande. Notre système a fait un trop grand recours à la détention pour la vaste majorité des infractions non violentes perpétrées par des adolescents, et nous en avons payé le prix par un taux de récidive élevé.
Je voudrais citer le 13e rapport du Comité permanent de la justice et des affaires juridiques intitulé Renouvellement du système de justice pour les jeunes:
Ainsi, en 1993-1994, 40 p. 100 des jeunes ayant reçu une condamnation d'un tribunal de la jeunesse étaient des récidivistes, et 25 p. 100, des contrevenants comptant au moins trois condamnations antérieures. De plus, une proportion considérable d'adultes purgeant des peines d'emprisonnement dans des prisons provinciales et des pénitenciers fédéraux sont des «rejetons» du système de justice pour les jeunes. Ces données appuient les conclusions de recherches empiriques qui révèlent de façon systématique que les peines lourdes n'ont pas d'incidence sur la récidive.
[Français]
M. Maurice Dumas (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Madame la Présidente, à titre de parlementaire, je trouve regrettable de devoir prendre la parole pour défendre la Loi sur les jeunes contrevenants, qui est efficace, et que le gouvernement voudrait reléguer aux oubliettes. Le projet de loi C-3 est un projet de loi aussi inutile que dangereux. Ce projet de loi est l'outil de la politique du moindre effort du gouvernement d'en face pour changer une loi qui affiche de très bons résultats.
En effet, la Loi sur les jeunes contrevenants a permis de faire chuter le taux de criminalité juvénile de façon substantielle. Étrangement, la ministre de la Justice nous a servi des chiffres très convaincants à cet effet lorsqu'elle a présenté sa nouvelle loi, en mai 1998. La criminalité juvénile, selon elle, a baissé de 23 p. 100 depuis 1991. Elle affirmait aussi que le taux de crimes avec violence a diminué depuis 1995.
Comme on reconnaît l'arbre à ses fruits, on doit juger la Loi sur les jeunes contrevenants en fonction des résultats qu'elle affiche et non sur la base d'une fausse perception.
Il serait irresponsable de réformer la justice juvénile aveuglément, sans tenir compte de tous les éléments qui entrent en jeu. En effet, puisqu'elle protège des concepts aussi fondamentaux que la vie et l'intégrité physique, la Loi sur les jeunes contrevenants joue un rôle primordial dans la consolidation de la confiance collective à l'égard de nos institutions.
Les parlementaires ont donc la responsabilité de répondre rapidement aux inquiétudes de leurs concitoyens en effectuant, si nécessaire, les modifications législatives appropriées. Cependant, ils doivent avant tout s'assurer que la population possède l'information requise pour se faire une idée juste d'un problème aussi complexe que la criminalité juvénile.
Or, la ministre fédérale de la Justice a failli à son devoir d'information. En militant en faveur d'une loi «plus ferme», la ministre sous-entend à tort que le régime actuel est déficient et lui fait porter l'odieux de son manque de leadership. En fait, le projet de loi C-3 démontre qu'il est plus facile pour le gouvernement libéral de sacrifier une bonne loi que de promouvoir l'approche efficace qu'elle favorise.
Il faut retourner à la 35e législature pour constater les premières tentatives libérales de faire de la Loi sur les jeunes contrevenants le bouc émissaire qu'elle est maintenant devenue.
Le 28 avril 1994, l'actuel ministre de la Santé et ancien ministre de la Justice stipulait à la Chambre que le virage à droite répondait à des engagements électoraux. Est-il nécessaire de préciser que ces engagements ne visaient certainement pas l'électorat québécois? En fait, c'est un secret de polichinelle que de prétendre que le Parti libéral s'était fixé comme objectif de courtiser la clientèle réformiste de l'Ouest canadien.
Ainsi, par l'adoption du projet de loi C-37, le gouvernement libéral introduisait dans la Loi sur les jeunes contrevenants une série d'automatismes qui allaient grandement affecter le fragile équilibre du système de justice juvénile. En permettant les renvois automatiques de jeunes de 16 et 17 ans devant les tribunaux pour adultes, ce gouvernement atténuait davantage la particularité de la justice juvénile qui, au rythme où vont les choses, n'aura bientôt de juvénile que le nom.
Dans la même veine, la ministre de la Justice présentait sa Stratégie de renouvellement du système de justice pour les jeunes en mai 1998. La ministre de la Justice annonçait notamment qu'elle allait étendre les renvois aux jeunes de 14 et 15 ans.
Cette mesure fut décriée par l'ensemble des intervenants du Québec. Par exemple, certains d'entre eux posaient la question suivante: «Où exactement le gouvernement a-t-il puisé l'information à l'effet que les hausses de peine allaient avoir quelque impact que ce soit sur le taux de criminalité?»
Les intervenants québécois avaient bien ciblé la problématique. Non seulement la réforme n'était pas nécessaire, mais les solutions retenues par la ministre sont erronées et dangereuses.
Le 19 mars dernier, une quinzaine d'organismes québécois sont sortis publiquement pour réaffirmer leur opposition au projet de loi C-68. Réunis en conférence de presse, l'Association des centres jeunesse du Québec, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le Conseil permanent de la jeunesse et l'Association des chefs de police et de pompiers du Québec, pour ne nommer que ceux-là, ont réaffirmé le consensus québécois et contredit la ministre de la Justice.
Le message était fort simple. Il disait à la ministre: «Nous ne voulons pas de votre projet de loi». Ils ont répondu du tac au tac aux prétentions de la ministre qui affirme que son régime flexible permettra au Québec d'appliquer la loi comme il l'entend.
Le criminologue Jean Trépanier, un expert reconnu en matière de criminalité juvénile au Québec, n'a pas été tendre à l'endroit de la fameuse flexibilité de la ministre. Lors de la conférence de presse, il disait, et je cite: «La soi-disant flexibilité semble être un leurre politique. Les juges du Québec ne pourront pas faire abstraction des peines imposées ailleurs.»
Mme Cécile Toutant, une intervenante très respectée du milieu québécois, s'en est prise quant à elle à certaines mesures retenues par le projet de loi. La criminologue, qui est responsable du programme pour les adolescents de l'Institut Pinel, a dénoncé les nouvelles mesures permettant l'imposition automatique de peines pour adultes aux jeunes de 14 et 15 ans. Selon elle, le temps d'incarcération n'a rien à voir avec la protection du public.
Une très large coalition québécoise s'oppose au projet de loi C-3. La Coalition pour la justice des mineurs regroupe maintenant plus d'une vingtaine d'organismes oeuvrant auprès des jeunes contrevenants.
Ceux qui devront vivre quotidiennement avec la nouvelle loi ne se soucient guère des préoccupations électoralistes du gouvernement libéral. Ce sont eux qui devront appliquer la nouvelle loi. Le porte-parole de l'Association des centres jeunesse du Québec a été très clair à cet effet en soulignant, et je cite: «Ce sera un vrai bordel si le projet de loi est adopté.»
Les Québécois ne veulent pas de ce bordel. Nous nous opposerons donc avec vigueur au projet de loi C-3 qui s'avère être un bel exemple de manque de courage politique.
[Traduction]
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de participer aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-3. Le Parti réformiste essaie depuis des années d'améliorer notre système de justice pour les jeunes et de faire des suggestions constructives au gouvernement à cet égard.
Aujourd'hui, je veux mettre l'accent en partie sur la question de la prévention. La chose la plus importante que le gouvernement peut faire en ce qui a trait à la criminalité chez les jeunes, c'est la prévenir. Il n'a qu'à regarder le travail qui s'est fait au Canada et dans d'autres pays sur les façons de prévenir le crime.
Jetons un coup d'oeil sur les antécédents du crime. Les enfants qui sont incarcérés ont souvent un dénominateur commun. Beaucoup de ces enfants ont vécu des traumatismes. Ils ont été exposés à la drogue, à la violence ou à une mauvaise nutrition, ou à plusieurs de ces facteurs. Beaucoup d'entre eux ont été exposés à la drogue ou à l'alcool alors qu'ils étaient encore à l'état de foetus, ce qui a causé une épidémie de cas de syndrome d'alcoolisme foetal non seulement dans la population générale, mais aussi dans la sous-population des enfants incarcérés.
Bien que cela ne les exonère pas des crimes qu'ils ont commis, cela nous aide à comprendre pourquoi ces enfants ont commis de tels crimes.
Les expériences neurologiques et neuroscientifiques récentes, particulièrement l'utilisation de la caméra à positons, ont montré clairement que ce sont les six à huit premières années de la vie qui sont les plus importantes pour le développement du cerveau. C'est au cours de cette période que les neurones établissent des connexions importantes qui permettront plus tard à l'enfant d'assimiler et de bien traiter l'information. C'est au cours de cette période que les enfants apprennent à faire preuve d'empathie, à éprouver de la sympathie et à établir de bonnes relations interpersonnelles. Si, au cours de cette étape de son développement, l'enfant peut éviter les traumatismes et les mauvais traitements, bénéficier d'un milieu adéquat, aimant et sûr avec les soins attentionnés et constants d'adultes, il a toutes les chances d'acquérir des compétences en relations interpersonnelles qui lui permettront de devenir un adulte capable de bien s'intégrer à la société. Si, par contre, le cerveau subit des dommages au cours de cette période du développement, toutes sortes de problèmes psychologiques menacent l'enfant.
J'ai travaillé comme agent de correction et comme médecin dans des pénitenciers et j'ai été frappé par le nombre de personnes qui ont eu des enfances que l'on ne souhaite à personne. Nous savons que les enfants exposés à des traumatismes au cours de leur développement risquent d'avoir toutes sortes de problèmes plus tard au cours de leur vie. Ce qu'il faut faire, c'est prévenir ces traumatismes.
Les programmes de soutien au cours de la petite enfance et les programmes d'intervention précoce donnent d'excellents résultats. Le programme de Moncton, mis sur pied par la ministre du Travail et son mari, de même que le programme du Michigan, le programme préscolaire Perry, et le programme bon départ d'Hawaii donnent d'excellents résultats. Avec le programme d'Hawaii, qui est un programme d'intervention précoce où on s'assure que les besoins de base de l'enfant sont comblés et où on renforce les liens entre les parents et l'enfant, on constate une baisse de 99 p. 100 des mauvais traitements infligés aux enfants.
Si l'on examine les programmes qui sont en place à Moncton et au Michigan depuis plus de 25 ans, on constate que la criminalité chez les jeunes a diminué de 60 p. 100, que les grossesses chez les adolescentes ont chuté de 40 p. 100, que moins de personnes dépendent de l'aide sociale et qu'il y a moins de décrocheurs. Soit dit en passant, dans ma province, la Colombie-Britannique, c'est un problème grave, car 30 p. 100 des élèves abandonnent leurs études avant de les avoir terminées.
En fin de compte, un programme d'intervention précoce met à contribution les ressources existantes pour renforcer le lien parent-enfant, il montre aux parents comment bien s'acquitter de leur rôle parental et il garantit que les besoins fondamentaux des enfants sont satisfaits. Dans un milieu sûr où il est aimé, où il mange bien et où il n'est pas victime de traumatismes, de mauvais traitements et de violence, l'enfant a de meilleures chances de devenir un être bien intégré dans la société et respectueux des lois. Au bout du compte, on a réalisé des économies de six ou sept dollars pour chaque dollar investi dans le programme.
J'espère que la ministre de la Justice, qui, je le sais, a grandement appuyé cette approche, la ministre du Développement des ressources humaines et le ministre de la Santé travailleront en collaboration avec leurs homologues et donneront suite à la motion que les réformistes ont proposée et qui a été adoptée en mai 1998, motion préconisant la mise en place d'un programme Bon départ, programme auquel tous les enfants du Canada qui le désirent pourraient avoir accès.
Le programme ne serait pas destiné aux familles présentant traditionnellement des risques élevés. Il ne viserait pas uniquement les pauvres, car il y a énormément d'enfants qui sont issus de certains milieux parmi les plus aisés de notre pays et qui sont traités à peine mieux que des meubles. Ces enfants ont beau avoir une Mercedes Benz dans l'entrée, cela ne les aide guère à obtenir l'amour, le milieu sûr, la présence parentale de qualité et la surveillance adulte dont ils ont besoin pour que se développent les assises neurologiques et psychologiques dont ils ont besoin pour devenir des adultes productifs et des êtres bien intégrés de notre société.
Je demande aux ministres de travailler de concert avec tous les députés pour que cela devienne réalité. S'ils n'agissent pas, s'ils ne s'attaquent pas à ce dossier, on se prépare des lendemains qui déchantent. Les solutions sont là. Les Canadiens ont été les pionniers des programmes Bon départ. Nous avons été à l'avant-garde de la prévention. Tout ce qu'il faut, c'est que le gouvernement prenne le taureau par les cornes, autrement dit qu'il s'attaque au problème de façon constructive, rentable.
Je voudrais maintenant toucher un mot de la ligne de démarcation à tracer en ce qui concerne la Loi sur les jeunes contrevenants. Le Parti réformiste réclame depuis longtemps des dispositions qui assureraient une application beaucoup plus rapide de la Loi sur les jeunes contrevenants. Il s'agit de diviser ces jeunes en deux catégories. Il y a d'abord les délinquants récidivistes et violents qui, à notre avis, devraient être mis sous les verrous pour les empêcher de s'en prendre à tous les passants. Il y a l'autre catégorie, à savoir les délinquants qui ne sont pas violents, qui en sont à leur première infraction. Dans leur cas, il faut trouver d'autres formules comme la justice réparatrice par exemple, afin de leur donner une chance de sortir du cycle crime-punition-récidive que l'on observe trop souvent chez les jeunes délinquants, voire dans la société que forment les adultes d'aujourd'hui. Mon collègue, le député de Surrey, en Colombie-Britannique, s'est fait le champion de cette approche.
Un autre aspect très important dans ma province a trait au système juridique et à la façon dont la défense des gens est assurée. Le système actuel est très coûteux. Je propose que l'on étudie la possibilité d'adopter un système de défenseur public. On mettrait ainsi un terme aux inepties onéreuses qui ont cours de nos jours dans les tribunaux où des avocats peuvent utiliser et manipuler le système et faire en sorte que leurs causes traînent beaucoup trop en longueur, parfois au détriment de leurs clients. Il existe de meilleures façons de faire les choses. Nous devons envisager un système de défenseur qui fait que l'accusé bénéficie d'un procès sûr et est bien représenté à un coût moindre pour les contribuables. Nous avons besoin d'un système plus efficace qui n'engorgera pas le système judiciaire, comme c'est le cas à l'heure actuelle.
Les tribunaux de tout le pays sont engorgés. C'est en partie en raison des contraintes bureaucratiques et juridiques que nous avons laissées se glisser dans le système. Un système de défenseur public ne constituera pas un remède miracle, mais il contribuera nettement à simplifier le système judiciaire afin de le rendre équitable.
Il est intéressant de s'arrêter à l'expérience américaine. À la suite d'une comparaison entre un système de défenseur public et un système où les particuliers ont le droit de recourir à des avocats payés par le gouvernement, on a constaté que le système de défenseur public donne d'aussi bons résultats que l'autre. Il n'y avait pas de différence dans les peines et les coûts étaient beaucoup moindres pour les contribuables. Le système de défenseur public est une solution sur laquelle la ministre de la Justice pourrait se pencher et qu'elle pourrait mettre en oeuvre si elle le voulait.
L'administration des services correctionnels est un autre aspect très important pour les gens de ma province. En raison d'un manque de ressources, ma province élimine des psychologues, des psychiatres, des conseillers et des conseillers en maîtrise de la colère qui sont nécessaires afin de veiller à ce que les détenus bénéficient du traitement voulu pour ne pas commettre plus tard d'autres crimes et être de nouveau condamnés. La province congédie actuellement toutes ces personnes et envoie les agents des services correctionnels suivre un cours de formation d'une semaine pour qu'ils puissent devenir conseillers.
Les agents des services correctionnels accomplissent un travail fantastique, mais ils ne sont pas des conseillers. En raison de ce plan à courte vue du gouvernement, les assises de la réadaptation sont éliminées. Nous sèmerons les germes de problèmes futurs si nous ne nous attaquons pas immédiatement à ce problème.
[Français]
Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Madame la Présidente, les jeunes sont nos bâtisseurs de demain. C'est vers eux qu'il faut se tourner afin d'assurer un avenir meilleur pour notre société.
Avec le projet de loi C-3, qui a pour but de réformer le système de justice pénale pour les adolescents, le gouvernement fédéral veut instituer un système judiciaire juvénile basé sur la répression et non sur la réinsertion, comme il devrait l'être.
Bien sûr, le Bloc québécois est très sensible au problème de la violence chez les jeunes. J'ai deux adolescents qui vont à l'école et, quelquefois, je suis inquiète face à toute la violence dans nos écoles et dans notre société. Voilà pourquoi il est important d'éduquer notre jeunesse.
Nous, adultes et parents, avons le devoir de sensibiliser nos enfants contre toute cette violence. D'ailleurs, c'est pour cela que la société s'est donné des outils très efficaces afin de tendre vers l'éradication de la violence chez les adultes, mais aussi chez nos jeunes. Or, le Québec est sans aucun doute un véritable modèle dans la lutte contre la criminalité juvénile, et tous les députés de cette Chambre sont, j'en suis convaincue, d'accord avec moi.
Le Québec est l'endroit au Canada où le taux de criminalité juvénile est le plus bas. Pourquoi? Parce que les autorités, au Québec, ont su appliquer la Loi sur les jeunes contrevenants d'une façon efficace qui répondait aux nouvelles réalités sociales du Québec.
Le gouvernement du Québec a pris l'heureuse initiative d'investir dans la prévention et dans la réhabilitation sociale, contrairement à ce que veulent les droitistes de l'Ouest, c'est-à-dire investir dans le béton des prisons.
La Loi sur les jeunes contrevenants est une très bonne loi qui a donné des résultats très positifs au Québec. Qu'il en demeure ainsi, en tout cas pour le Québec. Si le reste du Canada désire adhérer au projet de loi C-3, libre à eux, mais au Québec, la réforme de la Loi sur les jeunes contrevenants fait l'unanimité contre elle.
En effet, le projet de loi C-3, tout comme l'ancien projet de loi C-68, est contesté et rejeté par la majorité des intervenants qui travaillent directement sur le terrain au Québec et qui luttent contre la criminalité juvénile: les criminologues, les intervenants sociaux, les corps policiers et les juristes.
Même la Coalition pour la justice des mineurs, qui regroupe des organismes aussi crédibles que le Conseil permanent de la jeunesse, la Fondation québécoise pour les jeunes contrevenants, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec, la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, la Société de criminologie du Québec, et j'en passe, s'oppose à ce projet de loi.
Il n'y a pas qu'au Québec qu'on s'oppose au projet de loi C-3. Dans le reste du Canada, il y a aussi de plus en plus de voix qui se font entendre contre ce projet de loi. Nous n'avons qu'à penser à l'Association canadienne pour la justice pénale et la Ligue pour le bien-être de l'enfance du Canada. Nous pouvons même affirmer sans hésitation que l'ancien ministre de la Justice de ce gouvernement est lui aussi contre cette réforme de la Loi sur les jeunes contrevenants puisque ce dernier affirmait, lors de la période des questions orales du 28 avril 1994, et je le cite:
Il ne faut pas s'imaginer que la société résoudra le problème des crimes violents en remaniant ou en modifiant ses lois. En fait, le système de justice pénale ne peut pas lui-même venir à bout des crimes violents. Il ne s'occupe que des conséquences des problèmes sociaux sous-jacents. C'est la prévention de la criminalité qui doit recevoir au moins autant d'attention de la Chambre des communes.
À la lumière de ce refus en bloc de tous les intervenants au Québec et au Canada en matière de criminalité juvénile, comment la ministre de la Justice peut-elle expliquer et justifier cette réforme? L'explication est fort simple et, croyez-le ou non, électoraliste.
La ministre de la Justice n'a comme unique objectif que de courtiser l'électorat de l'Ouest au détriment des réformistes. C'est ça, la véritable raison du projet de loi C-3. À part cette raison, la réforme de la ministre ne tient pas debout et elle n'est pas logique. Les statistiques de ce gouvernement à ce sujet parlent d'elles-mêmes.
En voici quelques-unes. Le taux de criminalité juvénile décline au Canada. Par exemple, entre 1991 et 1997, le taux d'accusations visant les jeunes a baissé de 23 p. 100. Le taux d'accusations pour les crimes violents parmi les jeunes a chuté de 3,2 p. 100 depuis 1995.
En 1997, le taux national de criminalité déclaré par la police a diminué pour la sixième année consécutive, chutant de 5 p. 100. Cette baisse a produit le taux le plus faible observé depuis 1980.
Le taux des adolescents accusés d'infractions au Code criminel a régressé de 7 p. 100, poursuivant la tendance générale à la baisse observée depuis 1991. Le taux des jeunes accusés d'infractions de violence a baissé de 2 p. 100 pour la deuxième année consécutive. Il faut également souligner que la majorité, soit 53 p. 100 des jeunes accusés, le sont pour des infractions contre la propriété, alors que 20 p. 100 l'ont été pour des crimes violents. Et je pourrais en citer encore davantage.
La ministre se targue en disant que le projet de loi C-3 est un modèle de flexibilité, ce qui va permettre aux provinces de continuer à appliquer le modèle de justice juvénile qu'elles privilégient. Or, c'est totalement faux. Il n'y a aucune flexibilité dans ce projet de loi.
La Coalition pour la justice des mineurs, qui regroupe 18 organismes et qui s'est penchée sur le projet de loi C-3, fait un constat accablant, et je cite:
Ainsi la prétendue flexibilité laissée aux provinces dans l'application de la loi ne s'avère, en fait, qu'être une série de pouvoirs limités qui reposent sur les épaules des procureurs de la Couronne. On ne retrouve nulle part dans le projet de loi confirmation du droit des provinces d'appliquer leur propre modèle.
Lors d'une conférence de presse du regroupement des organismes qui s'intéressent à la situation des jeunes contrevenants, Me Jean Trépanier, criminologue et membre du sous-comité sur les jeunes contrevenants du Barreau du Québec, a été très clair en dénonçant la fausse flexibilité du projet de loi C-3.
Selon ce dernier, la loi soi-disant flexible dont il a été question avant le dépôt du projet de loi semble être un leurre politique. Les juges du Québec ne pourront pas faire abstraction des peines imposées ailleurs.
Les personnes que je viens de citer ne sont pas du Bloc québécois. Elles ne font pas de la politique. Ce sont des experts et ils sont unanimes: le projet de loi C-3 doit disparaître, un point, c'est tout.
Une autre aberration de cette réforme du système pénal juvénile est que l'âge limite de condamnation pour une peine d'adulte va être abaissé à 14 ans. La question qu'il faut se poser est la suivante. Sur quelle étude ou statistique se fonde la ministre de la Justice pour inclure une telle clause dans son projet de loi? Je pose la question. Bien entendu, je n'aurai pas de réponse puisqu'aucune statistique ou étude n'a réussi à démontrer que l'emprisonnement avait un impact réel sur les taux de criminalité.
Si la ministre de la Justice avait fait un travail sérieux et bien documenté, elle aurait vu dans plusieurs études que les délinquants violents peuvent être réhabilités. Si elle croit que de faire croupir un adolescent de 14 ou 15 ans dans le fond d'une cellule va permettre aux jeunes de réintégrer normalement la société, eh bien, elle se trompe carrément.
Ce type de pratique est inefficace. Emprisonner un jeune de 14 ou 15 ans, c'est lui ouvrir toute grande la porte de l'école du crime que sont les prisons.
Le Québec a prouvé que la réhabilitation est la clef du succès chez les jeunes délinquants. Alors, pourquoi la ministre de la Justice n'a-t-elle pas voulu considérer le modèle québécois en matière de justice pénale juvénile?
Avec le projet de loi C-3, la ministre est en train de détruire 16 ans de pratique très constructive dans ce domaine. Pour quelle considération le fait-elle? C'est pour une poignée de votes dans l'Ouest canadien. C'est inconcevable et inacceptable.
Une autre mesure totalement inutile dans le projet de loi C-3, c'est celle où il est question d'autoriser la publication des noms des jeunes contrevenants. Pourquoi, un coup parti, ne pas inscrire «Wanted» sous la photo du jeune contrevenant?
À ce sujet, j'invite la ministre à consulter son collègue le ministre de la Santé et ex-ministre de la Justice. Il affirmait, lors de la période de questions du 20 juin 1994, et je le cite:
Les dispositions auxquelles le député fait allusion visent à faire en sorte que lorsque des jeunes commettent une erreur de cette nature, ils soient effectivement punis et que cela leur serve de leçon; il ne s'agit cependant pas de les stigmatiser pour la vie en publiant leurs noms dans les journaux, ce qui pourrait les empêcher de poursuivre leurs études ou d'obtenir un emploi. Cela va certes dans l'intérêt public au Canada.
J'invite le ministre de la Santé à répéter ces paroles encore une fois à la Chambre.
En terminant, avec le projet de loi C-3, il ne fait aucun doute que le gouvernement fédéral devrait, dès maintenant, se retirer de l'administration de la justice pénale et donner ces responsabilités aux provinces. De cette façon, la justice serait véritablement au service de la population et non au service d'un gouvernement qui veut acheter des votes sur le dos de la sécurité du peuple québécois et canadien.
[Traduction]
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre part aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-3, Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Je demande aux députés de réfléchir au concept de la justice. Quand nous parlons de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, qui est essentiellement la Loi sur les jeunes contrevenants, il m'apparaît vraiment important que nous prenions le temps d'examiner certains termes que nous employons de façon assez libre et que nous essayions de comprendre ce qu'ils veulent dire.
Je commencerai d'abord par le concept de justice comme tel. Que signifie la justice? Si je m'en fie à mes lectures et à mon bon sens, il y a certains éléments inhérents à l'idée de justice. Le premier élément, c'est la punition; le second, une peine à la mesure du crime.
Ces deux éléments inhérents au concept de la justice sont parfois absents dans cette mesure législative et dans l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants. Parfois il n'y a pas de peine, et lorsqu'il y en a une elle n'est pas à la mesure du crime. Je m'explique.
Que ce soit dans la Loi sur les jeunes contrevenants ou dans le projet de loi C-3, la nouvelle loi sur le système de justice pénale pour adolescents, les peines maximales prévues pour certains crimes, par exemple 10 ans pour meurtre, peuvent sembler suffisantes, mais très souvent elles ne sont pas vraiment à la mesure du crime. Quand un adolescent ôte la vie à une autre personne, lui vole le reste de sa vie, les 50 ou 75 ans qui lui restent à vivre, il me semble déplacé de condamner cet adolescent à une peine de trois ou cinq ans et pourtant, c'est souvent le cas.
Il n'est pas étonnant que la ministre de la Justice dise de que la Loi sur les jeunes contrevenants constitue aux yeux du public la mesure législative la plus choquante. Ainsi, je n'exprime pas simplement mon opinion ou celle des membres de mon parti. C'est ce qu'a dit elle-même la ministre de la Justice et cela se reflète dans la population de nos jours. C'est l'idée que trop souvent, on impose des peines qui donnent à la population l'impression qu'il n'y a pas de justice, car on ne punit pas les gens pour les crimes qu'ils ont commis et les peines ne sont pas proportionnelles aux crimes commis.
On ne tient pas compte des années volées aux victimes d'un meurtre dans la détermination des peines. Malheureusement, cela laisse les familles des victimes amères et elles ont le sentiment d'être une fois de plus les victimes lorsque les jugements sont rendus. C'est la première critique que j'adresse à ce projet de loi. Il ne remédie pas à cette ancienne notion de la justice.
Selon moi, personne ne croit que nous devrions être extrêmement durs, qu'il faut punir le plus sévèrement possible un jeune de 13 ans accusé de vol à l'étalage. C'est ridicule. Ce n'est pas ce que nous souhaitons. Nous trouvons que les mesures de rechange sont une bonne idée. En fait, nous avons proposé cela il y a un certain nombre d'années. Le gouvernement essaie désespérément de s'en attribuer le mérite, mais c'était une initiative du Parti réformiste.
Nous croyons que tout le monde devrait avoir une deuxième chance lorsque le crime n'est pas trop grave, que les individus en cause devraient avoir la possibilité de reconnaître la responsabilité de leurs actes et, en fin de compte, d'essayer de corriger ce qu'ils ont fait, ce qui leur permettra peut-être d'apprendre une leçon et de voir dans quelle mesure leurs actes ont nui aux victimes de leurs crimes. Il est très important de continuer à souscrire à cette notion.
J'ai parlé récemment dans ma collectivité avec des gens victimes de crimes qui sont passés par ce processus ou sont sur le point de le faire et qui peuvent en voir les avantages. Je suis fier que des députés de mon caucus aient proposé cela, comme le député de Crowfoot l'a fait.
Je voudrais aborder d'autres questions. Le projet de loi C-3 est sentencieux, mais il apporte très peu de nouveautés susceptibles de rassurer la population. L'un des plus grand reproches faits aux nouveaux textes de loi concernant la justice pénale pour adolescents—il y en a eu beaucoup, mais aucun ne semble avoir trouvé la bonne formule—est l'interdiction de divulguer l'identité des auteurs de ces crimes. Dans certains cas, il s'agit de crimes violents et beaucoup soutiennent que la population a le droit de connaître l'identité de ces personnes qui s'en sont rendu coupables et qui ont été inculpés. Cela me paraît légitime et fondé et je vais vous dire pourquoi.
La première raison en est fort simple. Si une personne ayant commis un crime très grave, un vol à main armée ou même un meurtre, et en ayant été reconnue coupable sort de prison et que son identité nous reste cachée, à certains égards, la sécurité publique s'en trouve compromise. Les Canadiens devraient avoir le droit de savoir que leur voisin a commis un crime très grave. Ils pourraient alors prendre des dispositions pour se protéger. Hélas, il se trouve, au Canada, que des personnes ont été reconnues coupables de crimes extrêmement graves, que leur anonymat a été préservé parce que la loi le permettait, et qu'elles ont récidivé en commettant des crimes odieux.
Je pourrais raconter une histoire qui s'est passée en Colombie-Britannique et qui briserait le coeur de tout le monde, mais je n'en ai pas le temps. Il est extrêmement important que nous rétablissions l'idée que les gens qui ont commis un crime et qui ont été reconnus coupables soient tenus responsables et que leur nom soit publié et connu du public. Il s'agit d'un aspect important de la justice. Malheureusement, on ne prend ici aucune mesure concernant cette question.
J'aimerais également parler de la question des enfants de 10 et 11 ans qui, trop souvent commettent ce qui serait des crimes si ces enfants étaient assez vieux pour être reconnus coupables. Là encore, le projet de loi sur la justice pour les jeunes ne règle pas cette question. Il ne l'aborde pas. Nous savons, en lisant les journaux, que les jeunes enfants commettent de nombreux crimes. On les surprend par exemple en train de brûler des bâtiments. Dans certains cas, ils sont même recrutés par de jeunes contrevenants plus âgés afin de les aider à perpétrer des crimes.
Ce serait une bonne idée de donner aux autorités compétentes le pouvoir légal de s'occuper de ces jeunes contrevenants de 10 et 11 ans. Cela ne signifie pas les jeter en prison. Il serait bon de permettre à ces autorités de recourir à d'autres solutions pour s'occuper de ces jeunes de façon à ce qu'ils puissent être traduits devant elles s'ils ont fait quelque chose de mal. S'ils admettent leur responsabilité, ils pourraient être confrontés à leurs victimes, qui pourraient leur expliquer ce que le crime a fait à leur vie. On espère que s'ils ont une conscience, ils se sentiront coupables et auront honte et que cela les empêchera d'être des criminels toute leur vie et leur évitera beaucoup de tribulations plus tard.
Pour des raisons qui me sont obscures, le gouvernement a choisi de ne pas aller dans ce sens. Je ne comprends pas. Nous savons que la population aimerait que les autorités aient les moyens de remettre sur le droit chemin les jeunes qui se comportent de la sorte. Mes collègues et moi-même sommes très déçus que rien ne soit fait à cet égard. Ce n'est vraiment pas rendre service aux jeunes de permettre que la situation se perpétue sans donner aux forces de police le pouvoir d'agir. En dernière analyse, nous condamnons ces jeunes à répéter leurs erreurs à l'infini. Non seulement cela porte tort à leurs victimes, ce qui est évident, mais également à ces jeunes mêmes.
Si nous pouvions les rééduquer quand ils ont 10 et 11 ans, nous aurions de meilleures chances de les remettre sur le droit chemin que lorsqu'ils ont 15, 16 ou 17 ans. Je prétends que le gouvernement fait une erreur en ne reconnaissant pas que c'est là une faille importante.
Enfin, j'ai quelque chose à dire au gouvernement qui trop souvent prétend que les crimes violents sont une chose du passé au Canada, ou du moins qu'ils sont en baisse et qu'ils ne constituent plus un gros problème. Nous déplorons le meurtre horrible de Jason Lang, qui a été tué cette année, dans ma circonscription, on le présume, par un jeune de 14 ans. Comment après cela ne pas prendre au sérieux le problème de la violence et de la criminalité chez les jeunes? Nous ne pouvons faire comme s'il n'existait plus. C'est bel et bien un problème. Et les exemples ne sont que trop fréquents, comme celui qui vient de se produire à Toronto.
Ne fermons pas les yeux. Prenons ces questions aux sérieux. C'est notre devoir en tant que législateurs. Malheureusement, selon moi, cette mesure législative ne nous y aide pas.
M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Madame la Présidente, je suis très heureux de participer à ce débat et de pouvoir rectifier certaines informations fausses données par le député réformiste. Je ne crois pas que cela ait été fait délibérément. Peut-être le député de Medicine Hat n'a-t-il pas eu le temps de lire le projet de loi en entier ou d'en étudier attentivement le contenu. J'aimerais revenir sur ses propos voulant qu'il n'y ait rien qui donne à la police le pouvoir d'adopter des mesures extrajudiciaires, par exemple.
Je vais essayer de citer les articles précis du projet de loi à l'intention du député et du grand public.
Auparavant toutefois, j'aimerais dire en préambule que le projet de loi C-3, le nouveau projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, a été déposé à la Chambre plus tôt cette année pour remplir les obligations du gouvernement. C'est la députée d'Edmonton-Ouest, ministre de la Justice et procureur général du Canada, qui l'a déposé pour remplacer l'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants. Le gouvernement du Canada propose par là une nouvelle approche en vue de respecter son engagement concernant la réforme du système de justice pour les jeunes au Canada, pour le mieux-être de notre société.
Dans l'intérêt des jeunes et de toutes les personnes concernées, nous aimerions faire une meilleure distinction entre les infractions avec violence et les infractions sans violence, afin de prévoir des mesures appropriées pour traiter les deux niveaux d'infraction, pour renforcer les efforts visant à réintégrer les jeunes qui ont commis ces infractions et pour encourager l'utilisation de solutions de rechange réelles et efficaces à la détention pour les jeunes qui ont commis des infractions sans violence.
Le projet de loi répond effectivement à certaines des préoccupations exprimées par le député de Medicine Hat. J'espère qu'il prendra ce fait en considération en parlant plus tard de la mesure à l'étude.
J'ajouterai également que le projet de loi a été élaboré après de vastes consultations avec les autorités provinciales et territoriales et auprès de travailleurs de première ligne dans le domaine, de policiers, de juristes, de juges, de membres du monde universitaire et d'organismes non gouvernementaux. Cela veut dire qu'après ces vastes consultations auprès de tous ces groupes de personnes, nous pouvons trouver dans le projet de loi la sagesse distillée de ces experts en la matière. Le projet de loi a également un respect inhérent pour les secteurs de compétence fédérale et provinciale et manifeste de la flexibilité à l'égard d'une province qui voudrait y ajouter un élément de sa propre création pourvu que cela corresponde à l'esprit de l'ensemble du projet de loi.
Je rappelle à la Chambre que, lorsque le projet de loi a été déposé plus tôt cette année par la ministre de la Justice et procureur général du Canada, celle-ci a déclaré: «Les Canadiens et les Canadiennes veulent un système de justice pour les adolescents, qui protège la société et inculque des valeurs telles que l'imputabilité, la responsabilité et le respect. Ils veulent que les gouvernements... elle veut dire tous les paliers de gouvernement—les aident d'abord à empêcher la criminalité chez les jeunes et qu'il y ait des conséquences significatives à cet égard.» Le nouveau projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents a été élaboré précisément pour réaliser ces objectifs.
Avant de passer aux principes du projet de loi et pour que cela soit bien clair dans l'esprit des Canadiens, je voudrais expliquer ce que nous entendons par le mot «jeune». Dans ce projet de loi, un jeune signifie un enfant ou un adolescent. La distinction entre les deux est expliquée clairement à l'article 2 du projet de loi qui a pour titre Interprétation. Il dit ceci:
«enfant» Toute personne âgée de moins de douze ans ou, en l'absence de preuve contraire, paraissant ne pas avoir atteint cet âge.
«adolescent» Toute personne qui, étant âgée d'au moins douze ans, n'a pas atteint l'âge de dix-huit ans ou qui, en l'absence de preuve contraire, paraît avoir un âge compris entre ces limites...
Nous comprenons maintenant très clairement ce que signifie les âges compris entre ces limites.
Je vais traiter maintenant des principes généraux du projet de loi, qui sont au nombre de quatre. Je crois qu'il est très important que les Canadiens connaissent ces principes, car, lorsque nous en comprenons l'essence, nous pouvons mieux comprendre l'objectif du projet de loi. Je suis convaincu que, lorsque les députés d'en face comprendront vraiment et parfaitement l'essence de ces principes, les critiques cesseront.
Le premier principe veut que l'objectif principal du système de justice pénale pour les adolescents soit de protéger le public en prévenant le crime, en s'attaquant aux causes de la délinquance, en veillant à ce que les jeunes contrevenants subissent des conséquences sérieuses pour leurs actes et en assurant la réadaptation et la réinsertion sociale de ces jeunes. Qui peut contester ce premier principe du projet de loi, qui consiste à protéger le public par divers moyens?
Le deuxième principe est que le système de justice pénale pour les adolescents doit être distinct de celui des adultes. L'accent est mis sur les différences suivantes: tout d'abord, une responsabilité équitable et proportionnelle à la dépendance plus grande des jeunes et à leur moindre maturité; deuxièmement, une meilleure protection au moyen de la procédure afin que les jeunes soient traités équitablement et que soient protégés leurs droits, y compris le droit au respect de leur vie privée; troisièmement, un accent plus appuyé sur la réadaptation et la réinsertion sociale. Qui pourrait rejeter ce principe qui reconnaît la différence entre un adolescent et un adulte, entre un enfant, un jeune et un adulte?
Le troisième principe veut que, dans les limites dictées par une responsabilité juste et proportionnelle, les mesures prises à l'encontre des jeunes contrevenants renforcent le respect des valeurs sociales, encouragent la réparation des torts causés aux victimes et à la collectivité, soient sérieuses pour le jeune, respectent les différences liées au sexe, à l'origine ethnique, à la culture et à la langue, et tiennent compte des particularités des jeunes qui ont des besoins particuliers. Cela se passe d'explication.
Selon le quatrième et dernier principe, il faut qu'on accorde une considération spéciale aux jeunes dans la procédure. Ainsi, le projet de loi tient très clairement compte des intérêts du prévenu parce que c'est ce que veut le principe judiciaire canadien. Il tient compte également des victimes et des préoccupations des parents.
Le projet de loi tient compte de tout ce qu'il nous faut faire si nous voulons vraiment faire progresser le système de justice pour les adolescents au Canada.
En ce qui a trait au mesures extrajudiciaires, l'article 4 à la page 7 du projet de loi énonce clairement les principes qui s'appliquent et que je cite:
a) le recours aux mesures extrajudiciaires est souvent la meilleure façon de s'attaquer à la délinquance juvénile;
b) le recours à ces mesures permet d'intervenir rapidement et efficacement pour réprimer le comportement délictueux des adolescents;
c) il est présumé que la prise de mesures extrajudiciaires suffit pour faire répondre les adolescents de leurs actes délictueux dans le cas où ceux-ci ont commis des infractions sans violence et n'ont jamais été déclarés coupables d'une infraction auparavant;
d) il convient de recourir aux mesures extrajudiciaires lorsqu'elles suffisent pour faire répondre les adolescents de leurs actes délictueux...
Ces mesures extrajudiciaires doivent permettre de réagir de façon efficace et opportune au comportement délictueux, d'inviter les jeunes à reconnaître et à réparer les dommages causés à la victime et à la collectivité, de favoriser la participation des familles, des familles étendues et de la collectivité en général, à la détermination de ces mesures et à leur mise en oeuvre, de donner aux victimes la possibilité de participer aux décisions ayant trait aux mesures à prendre et d'obtenir réparation, de respecter les droits et libertés des jeunes et de tenir compte de la gravité de l'infraction.
L'esprit canadien transcende cette nouvelle loi sur le système de justice pour les adolescents. Enfin, et je termine là-dessus, contrairement à ce que pense le député de Medicine Hat, le projet de loi prévoit que les avertissements, les mises en garde et les renvois peuvent aussi bien être faits par les avocats que par les agents de police.
[Français]
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Madame la Présidente, c'est à mon tour d'intervenir pour indiquer mon opposition à ce projet de loi.
J'ai écouté attentivement le député d'en face parler d'un projet de loi qui colle à la réalité canadienne et qui respecte les valeurs des Canadiens. Il est assez étonnant, quand on regarde les statistiques, de voir qu'elles démontrent tout le contraire de ce qu'il vient de dire, à savoir que le taux de criminalité a diminué.
Le Bloc québécois est le reflet de la société québécoise. Et la société québécoise, par une coalition qui s'est formée, s'oppose à ce projet de loi. Même si d'autres collègues l'ont déjà fait, je pense qu'il vaut la peine de nommer les différents groupes qui font partie de cette coalition, et on verra que c'est très représentatif.
On y retrouve la Commission des services juridiques, le Conseil permanent de la jeunesse, la Centrale de l'enseignement du Québec, l'École de criminologie de l'Université de Montréal, le Centre communautaire juridique de Montréal, la Fondation québécoise pour les jeunes contrevenants, l'Institut Philippe-Pinel, l'Association des chefs de police et pompiers du Québec, la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux, l'Association des centres jeunesse du Québec, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le Bureau des substituts du procureur général du ministère de la Justice du Québec, l'Association des CLSC et des CHSLD du Québec, l'École de psychoéducation de l'Université de Montréal, le Regroupement des organismes de justice alternative du Québec, la Ligue pour le bien-être de l'enfance du Canada, l'Association canadienne pour la justice pénale, l'Association des avocats de la défense du Québec et la Société de criminologie du Québec.
Cela représente beaucoup de personnes qui disent que ce projet de loi n'a pas de bon sens. Parlons d'abord de la réalité. En regardant les statistiques qui viennent de Statistique Canada ou de différents services—la ministre de la Justice connaît ces statistiques—on voit qu'entre 1991 et 1997, le taux d'accusations visant les jeunes a baissé de 23 p. 100. Il n'a pas augmenté, il n'a pas été maintenu, il a baissé de 23 p. 100.
Le taux d'accusations pour les crimes violents parmi les jeunes a chuté de 3,2 p. 100 depuis 1995. Les jeunes Canadiens qui commettent des infractions criminelles sont incarcérés dans une proportion quatre fois supérieure à celle des citoyens adultes et deux fois supérieure à celle des Américains. Que veut le gouvernement? Il veut aller plus loin encore. Cela n'a pas de sens.
On va prendre les chiffres d'une seule année. En 1997, le taux national de criminalité déclarée par la police a diminué pour la sixième année consécutive, chutant de 5 p. 100. Cette baisse a produit le taux le plus bas observé depuis 1980.
Les taux de presque toutes les infractions de violence ont diminué, y compris l'agression sexuelle qui est à 0,9 p. 100. Le vol qualifié a diminué de 8 p. 100, les homicides, de 9 p. 100. Le taux des adolescents accusés d'infractions au Code criminel a régressé de 7 p. 100, poursuivant la tendance générale à la baisse observée depuis 1991. Le taux des jeunes accusés d'infractions de violence a baissé de 2 p. 100 pour la deuxième année consécutive. Il faut également souligner que la majorité, 53 p. 100 des jeunes accusés, le sont pour des infractions contre la propriété, alors que 20 p. 100 l'ont été pour des crimes violents.
Les crimes de violence continuent de chuter. Pourtant, la ministre continue de vouloir imposer son projet de loi. Les crimes violents incluent l'homicide, la tentative de meurtre, les voies de fait, l'agression sexuelle, les autres infractions d'ordre sexuel, l'enlèvement et le vol qualifié. Le taux de crimes de violence a diminué de 1,1 p. 100 en 1997. Ce n'est pas énorme à première vue, mais c'est quand même pour la cinquième année consécutive.
Le taux des jeunes accusés de crimes de violence est en baisse pour la deuxième année consécutive. Il a baissé de 2 p. 100 en 1997. Au cours de la dernière décennie, le taux d'homicides chez les jeunes accusés est demeuré relativement stable à environ 50 jeunes accusés d'homicides par année. Le taux national d'homicides a diminué de 9 p. 100 en 1997, atteignant ainsi son plus bas niveau depuis 1969.
Je pourrais continuer longuement ainsi à citer des statistiques, mais je veux revenir au discours du député d'en face qui disait: «On répond à la réalité canadienne.»
Si le projet de loi faisait ça, il faudrait l'assouplir parce que la situation s'améliore. Le taux de criminalité chez les jeunes diminue, mais on renforce les mesures. Quelle réaction!
Les arguments sont d'ordre politique. Lorsqu'on regarde les statistiques, on voit que le taux de criminalité est de plus en plus élevé lorsqu'on va de l'Est vers l'Ouest. Il semble que c'est un fait qu'il y a un taux de criminalité plus élevé dans certains coins du pays. Les députés réformistes venant de l'Ouest réagissent à cela.
La ministre de la Justice, voulant probablement protéger sa réélection, tient compte du climat politique qui existe dans cette région du Canada. Toutefois, elle est la ministre de la Justice pour tout le Canada. Partout au Québec, tous les organismes que j'ai mentionnés au début sont en désaccord.
La ministre de la Justice du Québec, qui est la députée de mon comté, a mené un combat qui n'est cependant pas terminé. Il sera terminé lorsque la ministre fédérale de la Justice aura retiré ce projet de loi. La ministre québécoise a soumis un amendement qui faisait en sorte que le Québec serait en quelque sorte soustrait à l'application de cette loi. Mais on ne veut pas recevoir cet amendement.
Malgré toutes les représentations et l'appui de tous les organismes québécois dans ce domaine, Mme Goupil n'a pas réussi à infléchir la volonté de la ministre fédérale de la Justice. Il faut croire que si cela vient du Québec ce n'est pas aussi bon que quand cela vient de l'Ouest, là où elle est plus près. Elle pense à sa réélection.
C'est dommage que la justice soit ainsi influencée par des courants d'opinion publique qui existent peut-être à un certain niveau dans une région donnée, mais aussi par des courants d'opinion publique alimentés par certains médias.
Le matin, je trépigne chaque fois en regardant les sept ou huit premières pages de certains journaux. On voit des photographies. Ce ne sont évidemment pas celles de jeunes délinquants parce qu'au Québec, cela est interdit. Jusqu'à maintenant, ce l'est également au Canada. Mais que veut faire le projet de loi? Il veut enlever cet anonymat. C'est une volonté contraire.
Je ne dis pas que c'est l'intention de la ministre. J'espère que ce ne l'est pas, mais on voudrait que dorénavant des photographies de jeunes de moins de 18 ans paraissent dans certains journaux, au Québec comme au Canada, avec tout ce que cela signifie comme impact sur leurs familles.
On m'a appris dans ma jeune enfance des principes que j'ai toujours gardés. Il faut se rappeler l'enseignement reçu de ses parents. L'autre jour, je parlais du petit catéchisme qui précisait ce qu'était un péché mortel. Il fallait trois conditions. Il faut que ce soit une offense grave faite en pleine connaissance. Il faut qu'il y ait consentement de la volonté. Est-ce qu'un jeune de 12 ou 14 ans a pleine conscience de la gravité de de certains méfaits qu'il commet? Non. Qui dans cette Chambre n'a pas, dans sa jeunesse, fait une petite folie ou un geste qu'il regrette maintenant?
Mme Jocelyne Girard-Bujold: Qu'ils se lèvent.
M. Antoine Dubé: Je n'ose pas me joindre à l'invitation de la députée de Jonquière qui demande que se lèvent ceux qui n'ont pas fait une bêtise avant l'âge de 18 ans. Il n'y en aurait peut-être pas beaucoup. Je ne veux pas non plus lancer trop de pierres parce que, fouillant dans mon passé, je pourrais peut-être trouver quelque chose, mais sûrement pas quelque chose de grave.
En conclusion, un projet de loi qui renforce les pénalités devrait être la conséquence de l'augmentation de la criminalité. Or, c'est le contraire. La criminalité chez les jeunes a diminué. Pourtant, la ministre veut se plier aux arguments du Parti réformiste pour préserver sa réélection.
[Traduction]
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de parler du projet de loi C-3 qui modifie l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants.
La Chambre aurait dû être saisie de ce projet de loi au début des années 90. En disant cela, je parle en ma qualité d'ancien maire d'une municipalité au Manitoba. Les administrations municipales, notamment la mienne, pressent le gouvernement d'apporter les changements appropriés depuis le début des années 90. De nombreuses résolutions ont été présentées par les municipalités au niveau local et par le truchement de la Fédération canadienne des municipalités. De toute évidence ce fut en vain. Il a fallu près de dix ans pour qu'un projet de loi modifiant la Loi sur les jeunes contrevenants soit présenté à la Chambre.
Nous reconnaissons tous l'énorme différence qui existe entre les délinquants violents et ceux qui ne le sont pas. Il faut les traiter différemment.
Je me souviens que le ministère du solliciteur général avait, à un moment donné, fait parvenir à toutes les administrations municipales des questionnaires de sondage demandant ce qu'il fallait changer selon elles. Nous nous sommes pour la plupart empressés de répondre au questionnaire et de le retourner. Malheureusement, nous n'avons jamais eu de réaction de la part du bureau du solliciteur général. Je ne sais pas si un tel mutisme était chose surprenante au début des années 90.
Puisque la société change, il faut à l'occasion changer les règles pour qu'elles demeurent pertinentes.
La plus récente intervention au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants est venue de nos forces policières, des membres de la GRC plus précisément, qui ont dit aux municipalités qu'ils faisaient leur travail et arrêtaient les délinquants, mais qu'ils ne pouvaient rien faire de plus à cause de la Loi sur les jeunes contrevenants.
Il est regrettable que les petites localités du Canada, qu'on avait toujours considérées comme des endroits sûrs où vivre, aient dernièrement constaté à leur grand étonnement qu'elles ne sont plus des lieux sûrs. Même ma petite localité, celle de Dauphin, a été le théâtre de crimes très violents commis par des jeunes. Par exemple, une bande de jeunes est entrée par effraction dans la résidence d'un aîné. Ils ont volé et battu le vieillard, qui est par la suite décédé. C'est le genre d'expérience qui traumatise les habitants d'une petite localité canadienne; ceux-ci ne savent pas comment composer avec la tournure des événements.
Lorsque je me déplace, j'entends aussi parler constamment de vandalisme. Ma circonscription est très grande. Elle comprend environ 80 municipalités. Le vandalisme y est un problème tellement grave que la police ne se donne même plus la peine de s'occuper de ces cas. En juin, lorsque j'ai quitté Ottawa pour retourner dans ma circonscription pendant le congé estival, je me suis rendu compte, en approchant de ma maison, que le mur latéral de mon garage avait été peinturé avec une bombe aérosol. J'ai par la suite constaté que le méfait avait été commis par une bande de jeunes de ma localité. Ce qui est ridicule, c'est que, croyez-le ou non, ma maison est située à proximité d'un poste de police. Je peux voir le poste de police de l'avant de ma maison.
Voilà le genre de questions qui préoccupent les Canadiens, en tout cas, certainement ceux de ma circonscription, celle de Dauphin—Swan River. Il faut modifier la Loi sur les jeunes contrevenants. Cette loi doit être modifiée depuis très longtemps.
Pendant la dernière semaine de congé, j'ai rencontré les représentants d'une douzaine de municipalités, lors d'une assemblée organisée avec des porte-parole de la GRC et portant sur la criminalité des jeunes et le travail de la police. Il ne fait aucun doute que, ces dernières années, beaucoup de problèmes ont été causés par les compressions budgétaires imposées à la GRC. Je pense que cette année, d'après les chiffres que j'ai en main, le budget des policiers augmentera de 11,8 millions de dollars. Puis j'ai remarqué que le gouvernement avait prélevé 35 autres millions de dollars pour l'enregistrement des armes à feu. Qu'y a-t-il de plus important au Canada, enregistrer les armes à feu ou s'occuper de la GRC dont nous avons vraiment besoin?
La consolidation de notre service de police a aussi créé un problème. Cette consolidation a résulté des compressions budgétaires qui ont été imposées au service. Au cours de la dernière année, on a entendu parler à la Chambre des nombreuses occasions où les policiers ont pratiquement dû cesser de se servir de leurs voitures et de leurs autres véhicules faute de fonds pour les faire fonctionner et les faire réparer.
Le fait est que les Canadiens des grands centres comme des petites localités veulent vivre en sécurité. Nous tenons tous à une présence policière. Telles sont les préoccupations qui ont été soulevées par les représentants des municipalités avec lesquels je me suis entretenu la semaine dernière. Ils veulent que les forces policières puissent appliquer la loi.
La prévention est une bonne chose. Nous croyons tous que c'est la meilleure des choses, mais il arrive qu'il faille aller au-delà de la prévention. Il arrive que des lois soient violées, que des gens soient blessés et que des propriétés soient endommagées. Que devons-nous faire des personnes qui ne respectent pas les règles de la société?
L'actuelle Loi sur les jeunes contrevenants ne fonctionne pas. On nous le dit et on nous le répète. Autrement dit, les forces policières ont autant besoin d'aide que les autres Canadiens. Ils ont besoin que la Chambre élabore une bonne loi qui servira les Canadiens de façon responsable et efficace.
J'ai vu beaucoup de vandalisme. Par exemple, la vitrine d'un petit commerce a été fracassée. Qui en étaient les victimes? Tous les membres de la collectivité. C'est malheureux, mais nous souffrons tous du comportement irresponsable des jeunes.
En ce moment, la société ne semble pas en mesure de régler le problème. En fait, la situation est telle que dans la petite ville de Burtle, au Manitoba, la chambre de commerce locale a dû engager ses propres gardiens de sécurité pour patrouiller la rue principale la nuit parce que, croyez-le ou non, il y avait trop de vandalisme. Les commerces étaient directement pénalisés par le coût du vandalisme. Ils ont constaté qu'en engageant leurs propres gardiens de sécurité, ils ont pu changer la situation du tout au tout. Autrement dit, ils font le travail que la police devrait faire.
Je n'arrive pas à comprendre pourquoi le gouvernement n'a pas modifié les données en ce qui concerne le contrôle des armes à feu et les besoins financiers de la GRC. Il pourra peut-être repenser tout cela avant la présentation du Budget des dépenses le mois prochain à la Chambre.
La Loi sur les jeunes contrevenants a fait l'objet de critiques pendant de nombreuses années. Dans bien des cas, la violence est sans doute inévitable, mais nous croyons que la prévention est la meilleure solution.
En raison de l'inaction du gouvernement, une foule de communautés rurales du pays en sont venues à croire qu'un couvre-feu est nécessaire. Il est vraiment malheureux que certaines localités soient forcées de trouver des moyens de venir en aide à la police. Je sais que l'imposition d'un couvre-feu n'est certes pas une panacée, mais elle fait sûrement partie de la solution.
Le Parti réformiste appuie l'abrogation de la Loi sur les jeunes contrevenants et l'établissement d'une définition de contrevenant juvénile dans le Code criminel. Il faut faire en sorte que la Loi sur les jeunes contrevenants ne s'applique qu'aux jeunes contrevenants âgés de 10 à 15, alors que les délinquants violents âgés de 14 et 15 ans ainsi que les contrevenants âgés de 16 ans ou plus seraient jugés par un tribunal pour adultes.
La Loi sur les jeunes contrevenants devrait également permette l'accès public aux tribunaux dans les cas où des contrevenants de 14 et 15 ans sont jugés et dans ceux où le droit du public de savoir l'emporte sur le besoin de protéger l'identité du jeune contrevenant.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): En conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qui seront soulevées ce soir à l'heure de l'ajournement: le député de Winnipeg-Centre-Nord—le projet de loi C-80.
M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, nous discutons aujourd'hui d'un projet de loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Ce n'est pas la première fois que je participe à un débat visant à modifier la Loi sur les jeunes contrevenants.
J'ai suivi le débat d'aujourd'hui et j'ai entendu des députés de l'opposition dire qu'il avait fallu très longtemps avant que des modifications soient finalement soumises à la Chambre. Le compte rendu montrera clairement que nous avons présenté trois projets de loi modifiant la Loi sur les jeunes contrevenants jusqu'à maintenant.
La loi a été adoptée en 1984 et il y a eu trois séries distinctes de modifications à cette loi. Les modifications de fond que propose maintenant la ministre de la Justice constituent la quatrième série.
N'oublions pas que, avant l'adoption de la Loi sur les jeunes contrevenants de 1984, il y avait une autre loi sur les jeunes contrevenants. Elle portait un nom légèrement différent. Elle était alors connue sous le nom de Loi sur les jeunes contrevenants. Cette loi prévoyait des mesures pour le traitement des jeunes contrevenants qui se rendaient coupables de crimes et enfreignaient le Code criminel. Certains diront que c'était tout aussi efficace, ou moins ou plus, que ce que nous faisons à l'heure actuelle.
Toutefois, il est clair que nous avons toujours eu dans notre société une loi prévoyant une intervention séparée et des mesures distinctes pour les jeunes contrevenants. Que l'on parle de jeunes, d'enfants, d'adolescents, de garçons et de filles, de jeunes adultes ou de non adultes, il y a toujours eu une loi pour s'en occuper. La loi de 1984 sur les jeunes contrevenant n'était pas très différente.
Je suis arrivé à la Chambre en 1988. Au fil des années, depuis 1984, il était devenu nécessaire d'amender la loi. C'est du moins ce que les Canadiens nous ont dit. Je n'étais pas au Parlement à l'époque, mais le gouvernement du jour a reconnu que des modifications s'imposaient. Ces modifications portaient sur certaines dispositions relatives à la détermination de la peine dans les cas plus graves, à la publication des noms et ce genre de choses. Toutes ces modifications visaient a améliorer le fonctionnement de cette loi.
Il était clair dès le début que bien que la loi avait été adoptée par le gouvernement fédéral, il revenait aux provinces de l'administrer. En retournant quinze ans en arrière, on peut se demander s'il y avait eu suffisamment de consultations avant l'adoption de la Loi sur les jeunes contrevenants en 1984, au chapitre du rôle de l'administration provinciale.
Ce sont les provinces qui doivent supporter le fardeau financier du traitement distinct des jeunes contrevenants. Il arrive peu souvent que les jeunes contrevenants soient traduits devant les tribunaux criminels ordinaires qui sont administrés par les provinces. Il est encore plus rare qu'ils soient envoyés dans les pénitenciers fédéraux où tous ceux qui sont condamnés à plus de deux ans doivent être détenus. La plupart des jeunes qui enfreignent la loi sont pris en charge par les autorités provinciales.
J'ai entendu les députés d'en face reprendre tous les vieux paradigmes et les clichés éculés. Ils ont parlé d'absence de responsabilité. Ils ont dit combien la Loi sur les jeunes contrevenants est inadéquate et inefficace et qu'elle manque de responsabilisation.
Chacun de nous connaît un cas horrible qu'il pourrait citer. Nous avons tous rencontré des policiers dans le pays qui nous ont dit: «J'ai les mains liées. Nous ne pouvons rien faire. Il s'agissait d'un jeune contrevenant.»
Ce policier avait certainement répondu à une plainte, procédé à une arrestation, porté une accusation, comparu comme témoin et assisté à la condamnation. Ce n'est pas ce que j'appelle avoir les mains liées. Ce n'est pas ce que j'appelle ne rien pouvoir faire. Ce n'est pas ce que j'appelle une absence de mesures. C'est exactement la façon dont on procède pour toute personne accusée de crime.
J'ai souvent entendu les députés de l'opposition laisser entendre que la Loi sur les jeunes contrevenants était la cause de la criminalité. Ils ont affirmé que c'était la Loi sur les jeunes contrevenants qui était fautive. Ils parlent rarement de toutes les autres causes de la criminalité.
Tout le monde à la Chambre sait que le Code criminel n'est pas la cause de la criminalité. Ce n'est pas le Code criminel qui fait que des banques sont dévalisées. Ce n'est pas la Loi sur les jeunes contrevenants qui est la cause de la criminalité. La Loi sur les aliments et drogues n'est pas la cause du trafic de drogues.
La Loi sur les jeunes contrevenants n'est pas la cause des crimes qui sont commis. De temps en temps, certains d'entre nous tirent sur le messager sans savoir qui il est et sans comprendre ce qui se passe.
Le motif du Code criminel, le motif de la justice pour les jeunes est l'intervention et la sanction de la société pour les actes criminels anti-sociaux commis par des jeunes ou par des adultes. La Loi sur les jeunes contrevenants et la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents prévoient des niveaux et une intensité appropriés d'intervention face aux crimes commis.
Nous savons tous que le taux de criminalité est en baisse. Mon argument en sera peut-être un peu moins percutant, mais il faut reconnaître que cette baisse est excellente. Qui faut-il féliciter? Certainement pas les députés du gouvernement ni ceux de l'opposition. Le taux de criminalité chute quand les causes de la criminalité disparaissent. Ces causes sont d'ordre démographique, économique et administratif. Nous pouvons toujours féliciter nos forces policières qui font du bon travail.
Je voudrais parler du niveau d'intervention ainsi que de l'intensité de cette intervention, selon la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Cette intervention représente la réponse de la société et elle est prévue aux termes du Code criminel et de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Comme la loi actuelle que nous espérons qu'elle remplacera, la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents prévoit différentes formes d'intervention d'une intensité variable selon la gravité du crime et selon l'âge du contrevenant. La plupart des Canadiens acceptent qu'une infraction criminelle mineure fasse l'objet d'un traitement différent selon qu'elle est commise par un jeune de 13 ans ou par un jeune de 16 ans.
Comme la loi actuelle tente généralement de le faire, selon ce projet de loi, plus l'âge du jeune reconnu coupable est élevé et plus le crime pour lequel il est reconnu coupable est grave, plus l'intervention est intense. Il y a divers niveaux d'intervention. Il faut d'abord espérer que le jeune se fasse prendre et qu'il soit possible d'intervenir en collaboration avec un ou deux parents. Toutefois, si par malheur il n'y avait pas un parent, le jeune doit faire face à la police, le tribunal et un juge.
Le projet de loi accorde une certaine marge de manoeuvre. Il faut souligner, pour nos provinces, que, dans le cas des crimes les plus graves, le degré d'intervention sera dicté par le procureur général de la province. La structure de l'intervention est établie par le procureur général et non par le gouvernement du Canada. Les provinces ont ainsi une certaine marge de manoeuvre pour aborder ce genre de criminalité des adolescents.
Deux ou trois provinces ont déjà des systèmes efficaces d'intervention en vertu de la Loi sur les jeunes contrevenants; on a déjà mentionné ici que le Québec était l'une de ces provinces. Le projet de loi ne va pas changer cela.
Le but des modifications proposées est de produire, pour les jeunes Canadiens, une loi qui assure une intervention musclée, y compris l'emprisonnement s'il y a lieu. Il appartiendra au juge d'en décider pour que le jeune en cause ne poursuive pas une vie dans la criminalité et puisse éventuellement devenir un membre à part entière de la société canadienne.
[Français]
M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui sur un sujet d'une si grande importance.
Je commencerai par une citation d'Albert Jacquard, un généticien connu, qui disait: «Une prison dans une ville signifie que quelque chose ne va pas dans cette ville.»
En effet, aujourd'hui, nous parlons de criminalité mais d'une criminalité un peu spéciale, soit la criminalité juvénile. Je pense que nous avons tous à coeur de pouvoir réduire la criminalité dans nos milieux. C'est clair que c'est quelque chose de fort louable et de fort souhaitable. Mais là où je mets des bémols aujourd'hui et où je me pose une question, c'est sur la façon dont nous nous y prenons pour réduire cette criminalité.
Nous faisons face aujourd'hui au projet de loi C-3 qui propose une façon de faire à laquelle je ne souscris pas. Auparavant, lorsqu'un jeune était arrêté, il avait un traitement spécial étant donné qu'on se disait que plutôt que d'envoyer directement en prison les jeunes de moins de 18 ans, on les acheminait vers des instances différentes qui allait peut-être les faire revenir sur la bonne voie.
Aujourd'hui, ce que l'on fait, c'est de dire non et que nous allons être plus sévères. Nous allons les considérer comme des adultes dépendant, bien entendu, de l'ampleur du crime. Il faut comprendre les conséquences de cela. Je comprends qu'aujourd'hui à la Chambre certains de mes collègues députés ont peut-être déjà été victimes de crimes, ont déjà assisté à des actes criminels commis envers leurs parents ou leur famille, et que cela a eu pour conséquence d'engendrer une certaine frustration et une certaine soif de vengeance.
En effet, lorsque l'on voit étaler dans les premières pages des journaux ces crimes fort déplorables, on peut se dire que cela n'a aucun sens et qu'il faut faire quelque chose. Je suis d'accord, sauf que la façon facile de vouloir régler le problème, c'est de dire que ces jeunes criminels doivent payer. Ils doivent payer comme les adultes le font et ils doivent être tenus responsables. C'est vrai que cela peut avoir une certaine logique. Toutefois, dans les faits, c'est faux et les statistiques nous le prouvent. Plutôt que de parler de façons d'incarcérer les jeunes plus fortement, on devrait parler de l'origine de la criminalité.
La semaine prochaine, nous célébrerons—ce n'est pas vraiment une célébration—le dixième anniversaire d'un souhait de la Chambre qui voulait qu'on élimine d'ici l'an 2000 la pauvreté des enfants. Or, cette dernière a presque doublé depuis ce voeu exprimé par la Chambre. Pourquoi est-ce que je dis cela? C'est que parfois, et c'est le cas très souvent dans les milieux moins favorisés, certains jeunes ont moins eu la chance d'avoir un père et une mère qui leur offraient un soutien physique et moral. Il est plus que probable que ce jeune a parfois eu tendance à tomber dans la délinquance.
Je crois qu'il y a un lien à faire entre l'accroissement de la pauvreté et celui de la criminalité. C'est peut-être à la base et c'est surtout les questions relatives aux sources de la criminalité que nous devrions débattre aujourd'hui. Malheureusement, ce n'est pas cela qu'on fait parce que la ministre défend un projet de loi qui va faire en sorte de renforcer les règles carcérales ce qui, je pense, n'engendrera rien de bon pour la société.
Si on incarcère un jeune délinquant avec d'autres criminels, on l'envoie à l'école du crime. Il côtoiera des gens, des jeunes et des criminels qui sont déjà frustrés contre la société et qui n'ont pas nécessairement le goût de respecter la société. C'est un peu comme les envoyer à l'école du crime.
J'aimerais beaucoup plus que l'on parle d'alternative au système carcéral plutôt que de penser à appliquer un pansement sur une blessure. Oui, il y a une blessure; oui, il y a un problème de criminalité. Mais voyons de quelle façon on peut guérir la plaie, plutôt que d'y appliquer un pansement et dire que cela résoudra le problème. Je ne peux pas adhérer à cela.
Ce que je dis aujourd'hui n'est pas émotionnel, c'est prouvé statistiquement. Mes collègues l'ont dit auparavant: le Québec avait, et a toujours actuellement, une façon de traiter ses jeunes criminels d'une manière plus préventive, de façon à les réintégrer à la société. Et ça fonctionne. Les statistiques le prouvent. On a les statistiques ici. On est en mesure de prouver, chiffres à l'appui, que ça fonctionne mieux. Je n'aime pas avancer des chiffres sur les comportements humains, mais je pense que cette fois-ci, cela démontre clairement que l'approche du Québec est la meilleure au Canada.
Aujourd'hui, avec le projet de loi qui est présenté, on vient nous dire: «Mettez ça de côté. La bonne manière, c'est la nôtre.» Malheureusement, c'est l'approche un peu réformiste qui aura force de loi.
Je pense que c'est très déplorable. D'autant plus qu'un consensus s'est établi au Québec contre ce projet de loi. Si nous étions dans une fédération aussi flexible que certains le prétendent, le Québec pourrait dire: «Si vous voulez essayer cette façon de faire, faite-le. Mais nous, au Québec, on a notre façon de faire, on y croit, on veut l'approfondir et même l'améliorer. On voudrait avoir l'opportunité et la liberté de maintenir notre façon de faire en ce qui a trait à la criminalité.»
Voilà pourquoi je demande le consentement unanime pour que le Québec puisse être soustrait à cette mesure et puisse continuer à faire en sorte que ses jeunes criminels soient traités de la façon dont ils le sont actuellement.
Je demande le consentement unanime de la Chambre.
Le président suppléant (M. McClelland): Malheureusement, je n'ai pas compris la question.
M. Stéphan Tremblay: Monsieur le Président, ce que je disais, c'est que la façon de faire québécoise est originale. Elle fonctionne bien, chiffres à l'appui, et il me semble que le Québec pourrait continuer de cette façon. Si le reste du Canada veut être plus sévère avec ses jeunes contrevenants, qu'il le soit. Cela ne me dérange pas. Ce que je veux, et c'est pourquoi je demande le consentement unanime de la Chambre, c'est que le Québec puisse continuer d'agir à sa façon et que le reste du Canada puisse faire comme bon lui semble.
[Traduction]
Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Lac-Saint-Jean a posé une question qui requiert le consentement unanime de la Chambre. Y a-t-il consentement unanime?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
[Français]
M. Stéphan Tremblay: Monsieur le Président, est-ce que c'est ça, le fédéralisme flexible? Je pense que si j'étais fédéraliste, je pourrais dire que c'est agréable, parce que chaque province pourrait établir son propre système et ensuite, cela deviendrait comme des espèces de laboratoires.
Mais non, c'est une uniformisation des façons de faire, et en plus, on élimine les bonnes façons de faire. Je trouve que c'est absolument, mais absolument déplorable.
Pensez-vous qu'un jeune de 14 ans, qui ne lit jamais les journaux et qui ne sait pas du tout ce qui se passe en politique, avant d'aller commettre un acte criminel de quelque nature que ce soit, va se dire: «Ah oui, c'est vrai, avec le projet de loi C-3, si je commets un acte criminel, on va m'envoyer en prison plus longtemps»? Voyons donc! Cela n'aura aucune conséquence.
Les jeunes criminels, bien souvent, viennent de milieux défavorisés, sont moins éduqués et moins informés. Donc, croyez-vous que si on renforce la loi, cela aura des conséquences?
D'ailleurs, aux États-Unis, des études le démontrent. Quand on renforce la loi, cela n'a absolument aucune conséquence sur le taux de criminalité. Cela me dérange encore plus, parce que je sais que je suis le plus jeune parlementaire de cette Chambre. Si on s'occupe mal des jeunes criminels, qu'on les envoie à l'école du crime et qu'ils reviennent éventuellement dans la société, je pense qu'on est en train de leur enseigner à devenir des vrais criminels. Étant donné qu'ils sont jeunes, on aura à les subir encore plus longtemps, et ça coûtera encore plus cher à la société, justement, pour lutter contre le crime.
Je pense que ce projet de loi va à l'encontre du bon sens. J'en déchirerais ma chemise tant cela n'a pas de bon sens. J'en appelle aux parlementaires de cette Chambre de se réveiller et de voir les chiffres. Il y a un consensus face à la façon de faire actuelle qui a fait ses preuves. Cette loi ne fait aucun sens.
Si le reste du Canada veut faire à sa manière, s'il pense qu'il a une meilleure façon, qu'il l'essaie, qu'il fasse la tentative, je n'ai rien contre, sauf que je ne peux adhérer au fait de mettre au rancart une façon de faire qui a fait ses preuves. Cette façon de faire n'est pas parfaite, bien sûr, et on tente de l'améliorer, mais je pense que le reste du Canada aurait dû s'en inspirer.
Malheureusement, j'ai l'impression que pour des raisons électoralistes, la ministre de la Justice a voulu démontrer qu'elle mettait un peu d'eau dans son vin ou que c'était l'approche équilibrée des libéraux. Elle veut peut-être démontrer, selon la méthode réformiste, que les libéraux peuvent être un peu à gauche et un peu à droite, je ne sais pas trop. Je ne sais pas ce qui se passe dans la tête de la ministre, mais je peux vous dire que je trouve cela déplorable, et j'en suis déçu.
[Traduction]
M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.): Monsieur le Président, je considère vraiment comme une chance de pouvoir prendre la parole à propos de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents. Il faut seulement espérer qu'il y ait de la justice dans cette Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents.
Je ne crois pas qu'il y ait de justice à la Chambre alors que le leader parlementaire du gouvernement prend régulièrement la parole pour proposer la clôture à tout propos. Nous sommes ici saisis d'un autre projet de loi qui compte au moins 190 ou 200 pages. Alors que nous avons eu jusqu'à maintenant moins de cinq heures pour débattre de ce projet de loi, le leader parlementaire vient nous dire que nous avons d'importantes choses au programme. Nous n'avons encore pris connaissance d'aucune de ces choses. Nous avons tous consulté l'ordre du jour et le Feuilleton, dans lequel se trouve l'ordre projeté des travaux et rien ne semble aussi urgent que cela.
On croirait qu'une modification à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents mérite plus que six ou sept heures de débat. Il y a 301 députés à la Chambre. Comment ce projet de loi peut-il être convenablement débattu à l'étape de la deuxième lecture en moins de sept heures?
Ce n'est tout simplement pas possible. Le gouvernement nous sert là une autre de ses décisions arrogantes, terribles, minables— je choisis mes mots, monsieur le Président, car je veux m'en tenir au langage parlementaire. Il se contente de dire qu'il est majoritaire et qu'il recourra à la clôture chaque fois qu'il en aura envie.
Il fut un temps où la clôture n'était invoquée que dans les circonstances les plus extrêmes. C'est quelque chose qui n'avait jamais été utilisé à la Chambre. Pendant des années, il n'a jamais été question d'y recourir. C'est Pierre Elliott Trudeau qui en a fait un outil courant en y recourant comme ceci: «Nous sommes mercredi, 15 heures? Je crois que je vais invoquer la clôture. Pourquoi pas? Nous invoquons la clôture, alors.» Il n'avait pas besoin d'une meilleure raison que cela, et l'actuel leader parlementaire des libéraux ne semble pas avoir non plus besoin d'une meilleure raison que cela.
Dans son intervention, le député de Scarborough—Rouge River a dit qu'il fallait prévenir la criminalité juvénile, mais que la solution ne consistait pas à pénaliser les jeunes. Prenons pour hypothèse que les gens devraient être tenus responsables de leurs actes. C'est sur cette base que j'invite la Chambre à réfléchir aux observations que je ferai au nom d'une de mes électrices.
Il y a environ quatre ans, je me promenais dans le centre-ville de Leduc et je me suis arrêté dans une petite boutique appelée Crafts and More. En entrant, je me suis présenté comme le député de Wetaskiwin et j'ai rencontré une très charmante dame du nom de Donna Rowe. Elle m'a dit qu'elle était bien étonnée de me voir: «Vous êtes le premier politicien fédéral à venir me voir dans ma boutique. En fait, votre visite tombe bien car j'ai une histoire à vous raconter.»
Voici l'histoire de Donna Rowe. Je tiens à ce que les députés à la Chambre comprennent bien que Donna Rowe ne parle pas de pénaliser qui que ce soit. Elle parle de l'un des termes qui figurent dans le titre du projet de loi, justice. Elle est en quête de justice.
Deux jeunes, au début de l'adolescence, qui étaient connus des policiers—autrement dit ils avaient un dossier—sont entrés par effraction dans sa camionnette d'une demi-tonne d'un modèle récent, dotée d'une campeuse, peinte d'une couleur correspondante à la caisse de la camionnette. Cette dame se servait de sa camionnette pour son commerce, car c'était son seul véhicule, qui servait également de véhicule familial et était un élément essentiel de sa vie.
On ne peut pas révéler les noms de ces deux jeunes car ils avaient moins de 18 ans et par conséquent n'étaient apparemment pas responsables de leurs actes. On peut penser que c'est une déclaration assez osée, mais quand les députés entendront ce que j'ai à dire, je pense qu'ils me donneront raison.
Les jeunes ont pris son véhicule. Cela peut se produire dans bien des circonstances. Supposons, à la limite, que les jeunes étaient pieds nus, ils ne l'étaient pas, soit dit en passant, qu'il y avait de la neige, que le moteur du véhicule était en marche, que la portière était déverrouillée et que le camion offrait un habitacle accueillant et chaud.
Les circonstances étaient toutefois bien différentes. Les jeunes ont défoncé le pare-brise, ils sont montés dans le camion, ils l'ont fait démarrer en trafiquant les fils et ils ont conduit jusqu'à ce que le camion ne puisse aller plus loin. Ils sont alors sortis du véhicule et ont décoché des coups de pieds sur tout ce qu'ils pouvaient, les rétroviseurs, les phares, le pare-brise, les fenêtres, les cadrans et le tableau de bord. Ils ont tout massacré, ils ont trouvé un couteau avec lequel ils ont déchiré les banquettes et ils ont ensuite essayé de mettre le feu au camion.
J'imagine qu'il s'agissait simplement de jeunes qui voulaient s'amuser un peu avant d'aller à leur pratique de chorale ou à leur réunion de scouts. Il s'agissait de gentils jeunes, mais ils étaient connus de la police. Ils avaient un casier. Mais on ne peut dire leurs noms parce qu'ils n'avaient pas 18 ans et que, de ce fait, j'imagine qu'ils n'étaient pas responsables de leur conduite.
Cet incident a eu un effet dévastateur sur Mme Rowe. Elle s'est sentie violée. Elle a eu l'impression qu'on avait porté atteinte à sa sécurité. Cela l'a terriblement dérangée. Elle s'est réjouie d'avoir souscrit à une police d'assurance. Elle a communiqué avec son agent qui lui a dit que son camion était irréparable, qu'il était une perte totale. Il lui a demandé quel montant elle accepterait pour compenser.
Elle savait qu'elle devrait remplacer le véhicule parce qu'elle en avait besoin. Elle a reçu de l'assurance un montant d'indemnisation. Que croyez-vous qu'il est arrivé à ses primes d'assurance, monsieur le Président? Ont-elles baissé, parce que la pauvre dame n'avait pas eu de chance et qu'elle avait été durement éprouvée? Pas vraiment. Elles ont grimpé de façon inouïe parce qu'elle a fait une réclamation.
La dame a dit aux représentants de sa compagnie d'assurance qu'elle n'était pas responsable des dommages, que son véhicule avait été volé. Ils lui ont répondu qu'ils s'en fichaient éperdument. Pour la compagnie d'assurance, c'était une réclamation en bonne et due forme. La compagnie la traitait comme si, ivre, elle avait heurté un poteau téléphonique et elle comptait bien augmenter sa prime. La dame Elle a tenté de leur faire comprendre qu'elle n'était absolument pas responsable, qu'on avait pénétré par effraction dans sa voiture et qu'on était parti avec.
Que cherchait en fait Donna Rowe? Était-ce sa faute si ces individus flânaient devant le bureau de poste le jour de la paye? Absolument pas. Tout ce qu'elle voulait, c'est qu'on fasse preuve d'un peu de justice et de responsabilité envers elle. Est-ce qu'on a exigé que ces jeunes l'indemnisent pour qu'elle puisse remplacer sa voiture? Non, bien au contraire, son avocat a déclaré qu'il n'était même pas sûr s'ils lui devaient des excuses.
Pas d'excuses parce qu'ils sont jeunes, je suppose. Le juge a condamné chacun à un an de garde en milieu ouvert et à un an de probation. Quelle différence y a-t-il? Qu'est-ce que la garde en milieu ouvert? Est-ce que cela va les empêcher de voler des autos les mardis et jeudis? Qu'est-ce que ça signifie? Ils n'ont pas eu de peine de prison à purger. Ils n'ont versé aucune indemnisation. Ils ne sont pas excusés. Bref, ils n'ont pas été punis. La garde en milieu ouvert, c'est un peu une invite à récidiver.
Tout ce que voulait Mme Rowe, c'était un peu de justice et de responsabilisation. Elle a eu l'impression que le système pénal l'a laissé tomber à tout jamais.
Qu'y a-t-il dans ce projet de loi qui soit de nature à apaiser les craintes de Mme Rowe et des gens qui se trouvent dans la même situation? Je connais encore bien d'autres exemples. C'est vraiment dommage que je ne dispose pas de plus de temps parce que elles sont nombreuses les personnes qui sont venues me raconter de pareilles anecdotes. Il ne s'agit pas simplement de punir les gens pour le plaisir de la chose. Il s'agit de les obliger à faire quelque chose pour les victimes.
A-t-on affaire à un crime sans victime? Loin de là. Mme Rowe est la victime dans ce cas qui nous occupe. Justice n'a pas été rendue en ce qui la concerne.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je ne voulais pas vraiment participer à ce débat, mais il se trouve que je suis aujourd'hui de service pour mon parti. J'en ai profité pour étudier le projet de loi et lui accorder une attention particulière.
Étant donné mes antécédents, il y a un aspect du projet de loi qui m'intéresse plus particulièrement, monsieur le Président. Je suis un ancien journaliste, et j'ai même fait des reportages policiers à une certaine époque. J'ai passé une partie de ma jeunesse à couvrir des affaires criminelles pour les journaux. Tout projet de loi a des faiblesses et des points forts, mais je crois que celui-ci prévoit quelques mesures positives pour ce qui est de la publication du nom des jeunes contrevenants. Il ne va pas aussi loin que je le souhaiterais, mais c'est un progrès.
Bien des gens se demanderont en quoi la publication du nom des jeunes contrevenants peut être un problème. Lorsque la Loi sur les jeunes contrevenants a été élaborée, nous nous sommes dit qu'il fallait donner aux jeunes toutes les chances de se réadapter et les protéger complètement ou le plus possible de la publicité pour qu'ils puissent remettre de l'ordre dans leur vie et devenir de bons citoyens à l'âge adulte.
Mais cette interdiction générale de publication—qui est d'ailleurs assortie de sévères sanctions pour les journaux et les stations de télévision qui oseraient passer outre—n'est pas sans conséquences. L'une de ces conséquences, c'est que, lorsque des jeunes contrevenants sont des récidivistes notoires et commettent des crimes graves, il n'y a aucun moyen de prévenir la collectivité quand ils sont remis en liberté.
Il y a quelques mois, dans ma circonscription, le journal local, le Spectator de Hamilton, a osé publier la photo d'un jeune délinquant dangereux qui s'était évadé. Le journal a pris sur lui de publier cette photo pour avertir la communauté que ce jeune délinquant était en fuite. Cela a provoqué une controverse au sein de la communauté, qui se demande à présent si le journal n'a pas vraiment dépassé les limites. Objectivement, je dois dire que le journal a enfreint la loi, mais je dois dire aussi qu'il l'a fait pour une raison légitime, qu'il l'a fait dans l'intérêt du public. Or, comme on ne peut pas enfreindre ainsi la loi, il faut changer la loi.
Je pense, monsieur le Président, que l'un des points très positifs de ce projet de loi, c'est que, en ce qui concerne la publication des noms, il stipule au paragraphe 109(4) que, si le policier ou le juge du tribunal pour adolescents décide qu'un délinquant en liberté ou en fuite est dangereux pour la communauté, le juge peut rendre une ordonnance afin d'autoriser la publication du nom et, je suppose, de la photo du jeune délinquant dans les médias.
À mon avis, monsieur le Président, cette disposition est tout à fait nécessaire. C'est une mesure très positive. Je suis sûr que le journal de ma localité va se sentir justifié avec cette mesure législative qui va dans le sens de ce qu'il avait lui-même estimé être dans l'intérêt du public. Même si je n'approuve pas les infractions à la loi, je félicite le journal. Ce quotidien a fait preuve de grand courage quand il décidé de privilégier l'intérêt de la communauté et de publier la photo d'un jeune réputé très dangereux.
Par contre, le projet de loi recule, à mon sens, lorsqu'il s'agit de publier le nom de jeunes contrevenants ou tout autre renseignement les concernant. Le texte de loi actuellement en vigueur, que ce projet de loi est d'ailleurs appelé à remplacer s'il est adopté, prend des dispositions concernant les adolescents accusés de crimes très graves, de meurtre ou autre infraction grave. Il est possible de traduire ces jeunes personnes devant un tribunal pour adultes pour qu'ils y soient jugés comme tels. Le projet de loi à l'étude aujourd'hui revient là-dessus en permettant que ces jeunes soient jugés par des tribunaux pour adolescents tout en recevant des sentences pour adultes. Si vous me suivez bien, monsieur le Président, un jeune accusé de meurtre au premier degré et risquant une condamnation à perpétuité pourrait être jugé devant un tribunal pour adolescents, au lieu d'être déféré devant un tribunal pour adultes, et, s'il est inculpé, il pourrait se voir effectivement condamné à perpétuité.
L'ennui, c'est que, dans le système actuellement en vigueur, si ce jeune qui est accusé d'un crime lourd est déféré devant un tribunal pour adulte, le procès se déroule en audience publique. Les médias pourraient suivre l'intégralité du procès. Advenant une inculpation, nous saurions tout de l'affaire et, le plus important, la population aussi; et elle saurait que le procès a abouti une peine très lourde.
Malheureusement, du moins selon moi, pour faire en sorte que le système fonctionne mieux, et je reconnais que le gouvernement essaie de faire quelque chose de positif ici, en renvoyant la cause devant le tribunal pour les jeunes, il permet la publication de l'identité d'un jeune contrevenant condamné pour une infraction grave pour laquelle on peut imposer la même peine qu'à un adulte, seulement après condamnation et imposition de la peine.
Monsieur le Président, je propose que le gouvernement examine attentivement cet article. Je ne suis pas quelqu'un qui cite très souvent la Charte, mais je suis vraiment préoccupé par le fait que, lorsque la vie d'une personne est entre les mains des tribunaux, qu'elle ait 16 ou 60 ans, le procès devrait être un processus ouvert. Il devrait l'être tout le long du processus. Malheureusement, la loi modifiée à l'aide de cette disposition qui consiste à faire passer les infractions graves des tribunaux pour adultes aux tribunaux pour les jeunes est une erreur. J'espère que le comité de la justice, lorsqu'il examinera cette mesure législative, accordera une attention particulière à cet article.
J'aimerais dire une dernière chose, monsieur le Président. Un autre article explique que l'identité des jeunes gens qui sont victimes de crimes commis par de jeunes contrevenants ne peut pas être divulguée non plus et qu'on ne peut rien faire pour publier le nom de ces jeunes.
C'est une situation ironique lorsqu'on sait que le Parti réformiste, avec tout le respect que nous leur devons, parlent sans cesse de l'attention que nous devons accorder aux victimes de crimes. Voilà un cas où, je le reconnais, il est très difficile de trancher pour le gouvernement. Si les victimes du crime sont des jeunes, ils ne peuvent avoir la satisfaction d'être reconnus comme les victimes du crime, car alors, il est possible que le jeune contrevenant puisse être identifié. Là encore, il s'agit d'une sorte de jugement de Salomon. Nous voulons protéger l'identité d'un délinquant, mais nous retirons quelque chose à la victime du crime commis par ce jeune contrevenant. Là encore, je pense que c'est une chose qui doit au moins être débattue au comité.
Enfin, il y a une lacune générale que ce projet de loi ne comble pas en ce qui concerne l'identification du jeune délinquant. C'est une chose que je voudrais bien voir modifiée un jour. Je ne pense pas pouvoir persuader le comité de la justice de le faire maintenant. Je crois vraiment que nous devrions avoir envisagé dans le projet de loi la possibilité de dévoiler l'identité des jeunes contrevenants condamnés pour des infractions punissables par voie de déclaration sommaire de culpabilité.
Nos vis-à-vis ont parlé à plusieurs reprises de jeunes coupables de vandalisme et de toutes sortes de choses de ce genre et qui peuvent s'en sortir. Ils ne sont pratiquement pas punis par les tribunaux et il ne semble pas y avoir vraiment de contrôle sur ces individus qui commettent de petits crimes. En fait, je pense qu'il y a un grand problème dans nos écoles en ce qui concerne les jeunes qui se livrent à des actes qu'on peut considérer comme des crimes pouvant faire l'objet d'une déclaration sommaire de culpabilité. Il s'agit de crimes moins importants, d'agressions mineures et de choses de ce genre.
Je prétends que le véritable contrôle pour ce genre de choses, comme c'était le cas lorsque j'étais jeune, c'est le danger que le nom d'un individu paraisse dans l'hebdomadaire local et que ses parents s'en rendent compte.
Je pense que c'est une chose que nous devrions envisager à nouveau. Il ne s'agit pas simplement d'interdire la publication du nom des auteurs de crimes graves, mais également d'envisager la possibilité de permettre la publication de l'identité des individus coupables de crimes mineurs.
[Français]
M. René Canuel (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le Président, lorsque mes collègues ont commencé leurs discours, ils ont dit que c'était avec plaisir qu'ils prenaient la parole aujourd'hui. Moi, je dirai plutôt que c'est avec regret que je prends la parole aujourd'hui à la Chambre.
Le débat sur le projet de loi C-3 n'aurait jamais dû avoir lieu et la ministre de la Justice le sait très bien. Il a été démontré à maintes reprises que ce n'est pas la Loi sur les jeunes contrevenants qui fait défaut, mais plutôt son application. Ceux qui l'appliquent de façon convenable réussissent là où d'autres échouent. Malgré tout, le gouvernement libéral s'entête et s'apprête à changer l'esprit de cette approche.
Quant à moi, j'aurais aimé qu'avant de présenter un projet de loi, on se pose quelques questions, des questions fondamentales. Comment se fait-il qu'un jeune de 12, 13, 14 ou 18 ans devienne délinquant? Cette question, on ne se la pose pas. Il n'est pas nécessaire d'être psychologue ou psychiatre pour répondre à cette question.
Pour ces jeunes, il s'est passé quelque chose. Il y a eu un bris faisant en sorte qu'ils ne se sentent pas aimés. À ce moment-là, ils se retrouvent très souvent en gang et ils veulent se faire reconnaître.
Même au primaire, il y a des jeunes de 4e ou 5e année qui sont déjà—je n'aime pas dire le mot—de la graine qui leur permettra éventuellement de devenir délinquants et on ne s'en occupe pas. Si on avait la dignité de s'occuper de ces jeunes, jamais, au grand jamais, on ne les verrait devant un tribunal.
Les coupures dans les transferts aux provinces dans le secteur de l'éducation font que les professeurs sont pénalisés. Ils n'ont pas le temps de s'occuper des élèves et certains d'entre eux se considèrent malheureusement comme des numéros.
La Loi sur les jeunes contrevenants a été adoptée en 1982 et est entrée en vigueur en 1984. Cette législation n'est pas née du jour au lendemain. Elle est le résultat de plusieurs décennies de réflexion. En fait, il faut remonter à 1857 pour retracer les premières initiatives octroyant un statut spécial aux délinquants mineurs. En 1908, nous avons institué le premier système de justice juvénile. La Loi sur les jeunes délinquants visait à remettre le jeune dans le droit chemin en minimisant sa responsabilité.
Au Québec, nous avons une loi reconnue et c'est là qu'il y a le moins de criminalité. Quand un jeune est puni et qu'on l'envoie en prison, les plus anciens vont lui montrer évidemment à commettre des crimes et à s'en sortir le mieux possible.
Au début des années 1970, le Québec s'est doté de deux mesures sociales qui allaient s'avérer fort utiles sous le régime de la Loi sur les jeunes contrevenants: l'aide juridique et la réforme des services sociaux. En 1974, les premières mesures visaient à utiliser d'autres moyens que ceux des tribunaux pour régler des problèmes. Maintenant, on veut mettre des griffes à la loi.
J'écoutais nos amis du Parti réformiste dire qu'il faudrait publier les noms des jeunes contrevenants dans les journaux ou les diffuser à la radio. Quand nous en sommes rendus là, on ne mérite pas de s'appeler des citoyens responsables. Comme je l'ai dit tantôt, la responsabilité commence dans les écoles au niveau primaire.
On dit qu'il y a 1,5 million d'enfants qui ne mangent pas à leur faim. Au Québec, cette année, on a fait une campagne pour acheter des crayons aux étudiants et étudiantes du primaire. Il y a des parents qui ne peuvent pas se permettre d'acheter des crayons. C'est rendu grave. Des enfants ne mangent pas le midi et voient leurs compagnons aller à la cafétéria, sortir de l'argent de poche, s'acheter des fruits et du chocolat pendant qu'eux n'ont rien. Je ne sais pas comment on vivrait ça. Je ne sais pas si on n'aurait pas la révolte au coeur.
Le gouvernement dit: «Mettons des lois plus punitives. Envoyons-les en prison et ça va régler le problème. Ils vont réfléchir en prison.» Demandons-nous quelle réflexion on peut faire en prison, si ce n'est que de se durcir davantage et d'essayer d'avoir des trucs pour s'en sortir.
C'est sûr que dans nos prisons il y a quand même de l'aide. Il y a des personnes très compétentes qui essaient d'aider. Mais quand la révolte est dans le coeur d'une personne, cela prend plus que six mois ou un an pour s'en sortir. Cela prend des années et, pendant ces années-là, il faut que quelqu'un soit tout près, je dirais quotidiennement. Quand un arbre est blessé, que fait-on? On va lui fournir un enduit. Quand un jeune arbre pousse tout croche, que fait-on? On ne l'envoie pas dans le garage. On le laisse à l'air libre et on lui met un tuteur.
Il faudrait faire au moins la même chose avec les jeunes, c'est-à-dire leur donner un tuteur et non pas leur couper l'air libre.
Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 17 h 15, conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, toutes les questions pour disposer de l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-3 sont réputées avoir été mises aux voix et le vote par appel nominal est réputé avoir été demandé et différé jusqu'à mardi, le 23 novembre 1999, à la fin de la période prévue pour les ordres émanant du gouvernement.
[Traduction]
M. Derek Lee: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Compte tenu de la façon dont le Feuilleton de la Chambre est formulé, je crois que vous constateriez ordinairement qu'il y a consentement unanime de la Chambre pour dire qu'il est 17 h 30, heure à laquelle débuterait l'heure réservée aux initiatives parlementaires. Toutefois, nous ne l'entreprendrons pas tant que le député ne sera pas ici.
Je propose que nous suspendions la séance jusqu'à l'appel de la présidence. Il surviendrait au plus tard lorsque le député, qui est prêt à prendre la parole, entre à la Chambre.
Monsieur le Président, puis-je simplement laisser cette question entre vos mains? Je propose que nous fassions comme s'il était 17 h 30.
[Français]
M. René Laurin: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je ne sais trop quelle procédure utiliser, mais je suggère à la Chambre, au lieu de se faire croire qu'il est déjà 17 h 30, de bénéficier des 15 minutes additionnelles pour continuer le débat sur le projet de loi C-3. Cela permettrait à des orateurs qui n'ont pas eu la chance de le faire de continuer jusqu'à 17 h 30, puisque le temps nous le permet. À 17 h 30, on n'aura pas besoin de se raconter des menteries, ce sera vrai.
[Traduction]
Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Joliette a fait une suggestion qui a du bon sens. Toutefois, l'ordre du jour que nous avons adopté plus tôt aujourd'hui précisait expressément que le débat prendrait fin à 17 h 15, ce qui a été le cas. Le débat a pris fin à 17 h 15 pour que le timbre puisse se faire entendre pendant 15 minutes, mais le vote a été reporté à une autre fois.
Étant donné que les 15 minutes n'ont pas été utilisées pour faire entendre le timbre, la suggestion du député de Joliette a bien du bon sens. Malheureusement, nous avons déjà dépassé cette limite.
[Français]
M. René Laurin: Monsieur le Président, je soumets ceci à votre attention: est-ce que vous pourriez demander s'il y a consentement unanime pour qu'on poursuive le débat jusqu'à 17 h 30 avant de disposer de la suggestion de mon honorable collègue?
[Traduction]
Le président suppléant (M. McClelland): Oui, sauf que nous avons déjà mis la question aux voix. Nous avons déjà terminé le débat. Si cela était intervenu plus tôt avec le consentement unanime, nous aurions pu le faire. Toutefois, les dés étaient déjà jetés.
Par conséquent, y a-t-il consentement unanime pour dire qu'il est 17 h 30?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 17 h 30, la Chambre passera maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Traduction]
CODE CRIMINEL
M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.) propose: Que le projet de loi C-207, Loi modifiant le Code criminel afin d'interdire la coercition contre une personne à l'égard des actes médicaux qui sont contraires à sa religion ou à sa croyance au caractère inviolable de la vie humaine soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
—Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi C-207, Loi modifiant le Code criminel afin d'interdire la coercition contre une personne à l'égard de certains actes médicaux.
On peut lire ce qui suit dans le sommaire de ce projet de loi:
Ce texte protège le droit des professionnels de la santé et d'autres de refuser, sans crainte de représailles ou d'autres mesures coercitives et discriminatoires, de participer à des actes médicaux qui sont contraires aux préceptes de leur religion ou à leur croyance au caractère inviolable de la vie humaine.
Le projet de loi a pour objet d'assurer que les dispensateurs de soins de santé, et en particulier les infirmières, ne seront jamais forcés de participer contre leur gré à certaines interventions, notamment les avortements et l'euthanasie. En soi, le projet de loi n'interdit pas l'avortement, mais il rend illégal le fait de forcer une personne à participer à une telle intervention.
Il existe à plusieurs endroits, dont 45 des 50 États américains, des mesure législatives qui protègent les travailleurs de la santé. Toutefois, au Canada, ces protections n'existent pas, ni au niveau fédéral, ni au niveau provincial.
C'est vraiment déplorable, car le besoin est criant. Il y a eu des violations flagrantes des droits fondamentaux des infirmiers et infirmières qui travaillent dans notre pays. Beaucoup se sont vu refuser un emploi. Nous avons eu des conversations et des échanges de lettres avec plusieurs d'entre eux. On leur a refusé une promotion ou ils ont été congédiés pour avoir refusé de participer à des avortements. D'autres infirmiers et infirmières qui craignaient de perdre leur emploi, voire leur carrière, ont dû faire taire leur conscience pour garder leur emploi. Cela leur a causé beaucoup de souffrances psychologiques, puisqu'ils ont embrassé cette profession par désir d'aider et de guérir, mais se trouvent forcés d'infliger ce qui, selon leur conscience, est la forme ultime de violence.
Cette situation à laquelle les infirmières doivent faire face est bien décrite par l'organisme appelé Nurses for Life. Il faut considérer au moins cinq facteurs lorsqu'on examine le dilemme auquel se heurtent aujourd'hui un certain nombre d'infirmiers et d'infirmières dans notre pays.
Premièrement, nous devons nous rappeler que, bien que certains prétendent fréquemment que l'avortement concerne strictement une femme enceinte et son médecin, les infirmières savent que ce n'est jamais le cas. Les médecins n'agissent pas sans la présence d'infirmières, qui les assistent dans leurs actes médicaux.
Je suis devenu père d'un garçon, dimanche soir. Le médecin est arrivé à la dernière minute. Ce sont des infirmières, ces merveilleuses et courageuses professionnelles de la santé, qui ont été constamment au chevet de ma femme pour l'aider jusqu'à la naissance du bébé. Le médecin est arrivé au dernier moment. Nous savons que ce sont les infirmières qui sont le plus près des patients, et que c'est le cas également lors des avortements.
Le problème, c'est que, bien que les médecins soient libres de pratiquer ou non des avortements, et bien que les femmes enceintes soient libres de subir ou non un avortement, on n'a pas donné aux infirmières la liberté de participer ou non à cette procédure. Ce n'est pas correct.
Deuxièmement, contrairement aux médecins, les infirmières sont des employées d'hôpitaux. Il faut donc qu'elles restent dans les bonnes grâces des administrateurs d'hôpitaux pour conserver leur emploi et leur salaire, à la différence des médecins qui n'ont pas ces soucis.
Troisièmement, même dans les rares cas où les employeurs des infirmières respectent leur droit de conscience, ces infirmières qui ont un respect pour la vie humaine peuvent se voir coller la réputation d'être des non-conformistes qui n'ont pas «l'esprit d'équipe». Cela peut nuire sérieusement à leurs chances de promotion.
Quatrièmement, il devient de plus en plus difficile pour les infirmières de choisir des domaines de pratique dans lesquels elles peuvent éviter le problème d'avoir à participer à des avortements, étant donné que ces actes médicaux sont souvent exécutés de plus en plus souvent dans des services autres que ceux d'obstétrique et de gynécologie.
Ces préoccupations traduisent l'exaspération de centaines d'infirmières de partout au Canada qui ont été injustement forcées d'y participer d'une façon ou d'une autre. Nous sommes entrés en contact avec plusieurs d'entre elles. La plupart de leurs histoires n'ont jamais été portées à l'attention du public. Certaines l'ont bien sûr été. Un cas notoire a trait au mauvais traitement fait à certaines infirmières de l'hôpital de Markham-Stouffville, dans la région de Toronto, en Ontario. Huit infirmières ont été congédiées de l'hôpital en 1994 parce qu'elles ne voulaient pas participer à des avortements. Elles ont porté plainte auprès de la Commission des droits de la personne de l'Ontario et ont attendu cinq longues années pour se faire entendre, période au cours de laquelle une d'entre elles est décédée. Au dernier moment, juste avant l'audience qui était prévue pour cette année, l'hôpital a accepté de régler l'affaire. En plus d'offrir une indemnisation financière à ces infirmières, qui obtenaient justice après avoir attendu si longtemps, l'hôpital a également accepté de rédiger un énoncé de politique ferme protégeant la conscience et les droits syndicaux des infirmières travaillant encore à cet hôpital.
La situation à laquelle les infirmières pro-vie font face sur les lieux de travail est clairement inacceptable. Tout indique que les infirmières ont droit, ou devraient avoir droit à des protections juridiques. Il y a des précédents à cela.
Premièrement, l'article 2 de la Charte des droits et libertés garantit la liberté de conscience et de religion.
Deuxièmement, ces libertés sont aussi prévues dans la Loi canadienne sur les droits de la personne et dans les lois provinciales sur les droits de la personne.
Troisièmement, il existe des précédents, car la jurisprudence relative aux deux causes fondées sur la Charte et aux droits de la personne appuie massivement la protection de la liberté de conscience et de religion dans ce magnifique pays qu'est le Canada. Les différents jugements qui forment cette jurisprudence indiquent que toute infirmière illicitement congédiée qui porterait plainte contre son ancien employeur gagnerait probablement sa cause. Toutefois, pourquoi les infirmières devraient-elle subir pareil stress et consacrer une somme énorme d'argent et de temps à obtenir justice?
Quatrièmement, un autre précédent qui les protège est le code d'éthique de l'Association médicale canadienne, qui reconnaît clairement le principe voulant que les professionnels de la santé, dans ce cas-ci les médecins, ont le droit de prendre des décisions selon leur conscience. Il y est dit que le médecin doit prévenir son patient lorsque ses «valeurs personnelles auraient un effet sur la recommandation de toute intervention médicale que le patient souhaite ou dont il a besoin, ou sur la pratique de celle-ci». Il est donc clair que ce n'est pas parce que le médecin informe le patient de ses convictions personnelles qu'il doit abandonner ces convictions. Dans le cas de l'avortement, par exemple, les médecins ne sont nullement tenus de pratiquer des avortements ni même de renvoyer leurs clientes à des avorteurs.
Cinquièmement, un autre précédent est le fait que des services médicaux reconnaissent aux infirmières le droit de prendre des décisions selon leur conscience. Ce n'est pas une idée très courante et répandue au pays. J'ai déjà parlé de l'hôpital Markham Stouffville, dans la région de Toronto, qui est le plus récent exemple d'un hôpital ayant rédigé et mis en vigueur un énoncé de principes pour protéger les infirmières.
Le premier élément clé de son énoncé de principes se lit comme suit: «Toutes les infirmières qui, pour des motifs religieux, s'opposent à l'exécution ou ne veulent pas participer à l'exécution d'une interruption de grossesse durant le premier trimestre en seront exemptées.» Les articles suivants reprennent cette affirmation à l'égard des avortements effectués durant les deuxième et troisième trimestres. La seule exception à ligne de conduite s'applique lorsqu'un accident survenu en cours de grossesse menace la vie de la mère.
Malgré la limpidité de la Charte, des lois sur les droits de la personne, des déclarations de l'Association médicale canadienne et des énoncés de principes des divers hôpitaux, les droits des infirmières sont encore violés. Pourquoi? Pourquoi toutes ces lois et déclarations de principes ne suffisent-elles pas? Il a une explication à cela.
Commençons par la Charte. Elle ne peut protéger les infirmières de toute coercition en milieu de travail, car elle n'a pas été conçue à cette fin. On peut invoquer la Charte uniquement pour contester des lois qui vont à l'encontre des droits établis en vertu de la Charte. Puisque aucune loi provinciale ou fédérale ne régit les violations des droits des infirmières qui présentent des objections de conscience, il est impossible de protester en vertu de la Charte. Celle-ci ne peut donc pas aider les infirmières dans la situation actuelle.
Si la Charte ne peut guère leur être utile, qu'en est-il des lois et commissions sur les droits de la personne? Malheureusement, elles sont aussi insuffisantes. Les commissions des droits de la personne essaient de redresser les injustices après le fait, habituellement des années après le fait. Elles ne peuvent absolument pas prévenir les mises à pied. De plus, elles ne s'attaquent qu'aux abus qui sont signalés par des gens qui ont un sens de l'initiative peu ordinaire, connaissent parfaitement leurs droits et tiennent mordicus à ce que justice soit rendue en leur faveur. Par conséquent, nombreux sont ceux qui ne se sentent pas la force de mener le combat jusqu'au bout, et les cas d'injustice non signalée sont légion.
En règle générale, les commissions des droits de la personne sont lentes et peu proactives, ce qui les rend inaptes à fournir aux infirmières la protection immédiate nécessaire pour garantir leur maintien en poste.
Enfin, il faut prendre en compte l'efficacité des énoncés de principes des hôpitaux. Le problème à cet égard, c'est que peu d'hôpitaux et de districts de santé disposent de telles déclarations. J'ai parlé en bien du cas de l'hôpital de Markham Stouffville. Mais il faut savoir que cet hôpital n'a adopté cette ligne de conduite que quelque temps avant de comparaître devant la Commission ontarienne des droits de la personne. Il a finalement fait ce qu'il convenait de faire, mais vraiment à contrecoeur. Si aucune pression n'avait été exercée, cela ne se serait jamais fait.
D'où la pertinence d'une loi qui reconnaisse explicitement la liberté de conscience des professionnels de la santé. Je crois que c'est la responsabilité du gouvernement fédéral. Nous avons besoins d'une mesure législative comme le projet de loi C-207.
Le projet de loi a une portée limitée, mais il atténuerait quelque peu la menace qui pèse actuellement sur les infirmières. Nous aurons néanmoins besoin, plus tard, d'une mesure plus complète que ce projet de loi. Je tiens à développer ce point important en me servant de l'exemple fort instructif de l'expérience américaine.
Les lois américaines sur la liberté de conscience sont inégales et elles ne protègent qu'imparfaitement les professionnels de la santé. Sur les 45 lois actuellement en vigueur dans les différents États, certaines ne s'appliquent qu'à l'avortement tandis que d'autres concernent aussi d'autres actes médicaux. Certains textes ne s'appliquent qu'aux individus tandis que d'autres s'appliquent aussi aux établissements. Certaines lois offrent à l'individu une protection directe, alors que d'autres lui donnent seulement une cause d'action.
Ces variations s'expliquent essentiellement par le fait que les législateurs américains, comme leurs confrères ailleurs, se sont fixé pour objectif de trouver une solution à des atteintes aux droits des objecteurs de conscience qui ont bel et bien eu lieu. Comme il nous arrive de le faire si souvent, ils ont légiféré pour réagir à des situations bien précises. Il convient de signaler les lois pour objecteurs de conscience, adoptées dans de nombreux États entre 1973 et 1982. Ces lois étaient intéressantes, mais elles avaient été adoptées en réaction à certaines décisions qui avaient été arrêtées à l'époque par la Cour suprême.
Du fait de ces lois édictées par réaction, les États-Unis sont aujourd'hui dépourvus de moyens juridiques exhaustifs et réfléchis permettant de protéger la liberté de conscience et de religion en matière de santé. La plupart des textes de loi sauvegardant la liberté de conscience garantissent le droit de refuser de participer à un ou deux actes médicaux seulement. Ils ne traitent pas des nouvelles questions morales émergentes, par exemple l'aide au suicide par des moyens médicaux, les traitements contre l'infertilité ou les expériences médicales.
Il nous faut adopter en bout de ligne une perspective d'ensemble qui nous permettra de nous adapter à ces évolutions technologiques rapides. Des partisans de l'avortement libre ont tourné en dérision les droits des objecteurs de conscience, pensant que cela n'intéressait que les partisans de pro-vie. Or avec le progrès de la science, il se produira une chose étonnante. Qu'on prenne bonne note de mes paroles. Des professionnels de la santé seront confrontés en plus grands nombres à des décisions déontologiques pertubatrices. Patricia Wall, éthicienne en soins à l'université McMaster, a eu raison de dire que les problèmes d'ordre moral auxquels font face les professionnels des soins de santé feront boule de neige. C'est désormais confirmé.
Rien que dans le domaine des techniques de reproduction, les progrès scientifiques complexes peuvent finir par choquer le plus ouvert des médecins. Si on ne met pas en place une mesure législative adéquate, il se peut qu'un jour, tous les médecins sentent qu'il y a atteinte à leurs croyances. Si le patient a toujours raison, les médecins et autres professionnels de la santé seront contraints de faire ce que leur ordonneront leurs clients. Ce n'est pas ce que le médecin aura décidé qui sera important, mais ce que le client aura demandé.
Il faut une approche qui réconcilie les éthiciens, les scientifiques, les avocats, les politiciens, les médecins, les infirmières, les administrateurs, les chefs religieux et les autres personnes qui peuvent contribuer à la formulation d'une approche globale.
Ma question serait la suivante: pourquoi le gouvernement libéral ne prend-il aucune mesure proactive pour répondre à la nécessité d'une mesure législative d'ensemble? Pourquoi ne pouvons-nous pas faire adopter un projet de loi élémentaire tel que le projet de loi C-207 à la Chambre des communes du Canada?
Le gouvernement libéral ne permet pas que ce projet de loi fasse l'objet d'un vote, de sorte qu'il ne deviendra pas loi. C'est tragique. Il a été examiné par un comité. Cent députés de tous les partis ont signé une pétition pour que ce projet de loi fasse l'objet d'un débat. Je crois qu'il aurait été adopté, s'il y avait eu un vote libre à la Chambre.
J'aimerais exprimer ma reconnaissance aux infirmières qui m'ont écrit et qui, lors de discussions, m'ont soutenu dans mes efforts pour présenter ce projet de loi à la Chambre. Je leur souhaite sincèrement que les développements sociaux, politiques et technologiques futurs attirent de nouveau l'attention du public sur cette question du droit des professionnels des soins de la santé à suivre leur conscience et que la justice finisse par l'emporter pour ceux qui subissent actuellement les contraintes de leurs employeurs médicaux avec la bénédiction du gouvernement.
[Français]
M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, le projet de loi C-207, présenté par le député de Wanuskewin, parle abondamment de la santé et de certaines réalités que vivent les professionnels de la santé.
À première vue, on penserait qu'il s'agit d'une question relevant du portefeuille ministériel de la Santé, mais il y a bien plus que cela dans son projet de loi.
Le projet de loi réfère aussi au domaine de la justice et doit aussi prendre en considération le contexte des relations fédérales-provinciales. On oublie souvent, au cours des nombreux débats qui marquent le secteur de la Santé, que le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires ont depuis longtemps une tradition de collaboration très serrée dans ce domaine.
À titre d'exemple, l'Entente-cadre sur l'union sociale a été signée il y a un an par le gouvernement fédéral, neuf provinces et les trois territoires. Cette entente est un des très importants fruits de cette collaboration. Comme il est mentionné dans le préambule de cette Entente-cadre, et je cite:
L'Entente repose sur le respect mutuel et la volonté des gouvernements de travailler ensemble de plus près afin de répondre aux besoins des Canadiens.
[Traduction]
À cet égard, il est essentiel que le gouvernement fédéral reconnaisse que la réglementation des professions de la santé et l'élaboration des normes d'emploi pour ces professions sont de compétence provinciale et territoriale. Pourquoi cela est-il important en ce qui concerne le projet de loi C-207? Ce dernier traite d'éducation et de normes d'emploi dans le domaine de la santé. En vertu de la loi et du cadre fédéral-provincial-territorial, ce sont là des secteurs de compétence provinciale et territoriale. Il s'ensuit donc qu'essayer d'empiéter sur les compétences provinciales et territoriales en invoquant le Code criminel de façon imaginative va à l'encontre de tous les protocoles juridiques et stratégiques en matière de santé.
[Français]
Le projet de loi C-207 vise à modifier le Code criminel en vue d'offrir dit-on une meilleure protection aux professionnels de la santé contre toutes représailles découlant de leur décision de ne pas entreprendre certains actes médicaux pour des motifs religieux ou éthiques.
Le projet de loi propose d'ailleurs de créer trois infractions. Par exemple, dans le cas d'un employeur qui refuse d'employer un praticien du domaine de la santé et le congédie pour des raisons religieuses ou éthiques, dans le cas d'un éducateur du secteur de la santé qui refuse l'admission à de telles personnes à des programmes relevant du domaine de la santé et dans le cas d'un dirigeant d'une association professionnelle qui agit dans le même sens.
Je veux faire remarquer que Santé Canada n'a pas le mandat d'intervenir dans aucun des cas relevant exclusivement des compétences provinciales et territoriales. Les professionnels de la santé sont assujettis à des lois privées provinciales et territoriales qui sont édictées pour leur permettre d'autoréglementer leur prestation professionnelle.
Par ailleurs, la majorité de ces professionnels doivent respecter un code d'éthique adapté à leur profession. De telles questions ne sont pas du ressort de Santé Canada, ni du gouvernement fédéral.
L'objectif de la Loi canadienne sur la santé n'est pas de diriger et de contrôler les professionnels, leurs employeurs ou leurs éducateurs, mais de veiller à ce que la population canadienne ait un accès raisonnable à des services assurés et nécessaires sur le plan médical.
En plus des lois provinciales, chaque administration est protégée par la législation provinciale ou territoriale sur les droits de la personne qui constitue non seulement un élément dissuasif en regard de la discrimination ou des représailles, mais représente aussi un moyen approprié pour traiter du genre de violation dont on parle.
[Traduction]
Une autre considération importante lorsque l'on examine le projet de loi C-207 concerne l'application appropriée du Code criminel, qui représente l'énoncé par excellence de nos valeurs fondamentales exprimées sous forme d'interdictions.
[Français]
En général, il devrait être appliqué en dernier recours et non en premier lieu dans les cas de sanctions légales touchant le domaine de la santé. Les deux paliers d'administration disposent d'autres processus législatifs qui sont appropriés à des infractions de moindre importance.
Même en présence manifeste d'une infraction grave, le gouvernement fédéral a préféré utiliser le pouvoir du droit pénal exprimé dans la législation sur la santé au lieu du Code criminel pour des questions de santé.
[Traduction]
Même si les dispositions du projet de loi C-207 relevaient de la compétence fédérale, ce qui n'est pas le cas, le Code criminel ne serait pas le bon moyen à utiliser pour réglementer l'exécution, ou la non-exécution, de tâches liées au travail quotidien.
[Français]
En terminant, j'encourage fortement les personnes qui sont intéressées aux questions soulevées par le projet de loi C-207 à étudier sérieusement ces questions à la lumière du respect des compétences établies en ces matières. On constatera alors que le Code criminel ne convient pas aux questions soulevées, en particulier par le projet de loi C-207.
Un débat s'impose également sur l'éthique dans la prestation des soins de santé et il pourrait en ressortir des éléments juridiques pertinents. Toutefois ce débat, lui aussi, devra prendre en considération et respecter les compétences provinciales, les lois provinciales et les ententes fédérales-provinciales établies dans ce domaine.
[Traduction]
En guise de conclusion, je dirai que si le projet de loi du député porte certes sur un sujet important et délicat, il n'en demeure pas moins qu'il n'est pas du ressort de Santé Canada ni du gouvernement fédéral.
M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Madame la Présidente, avec tout le respect que je vous dois, je voudrais proposer que le débat soit maintenant interrompu. Le député qui parraine le projet de loi n'est pas à la Chambre, ni aucun membre de son parti. Par conséquent, je propose:
Que le débat cesse maintenant.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député sait que la motion qu'il propose est recevable, mais la présidence doit la recevoir par écrit maintenant.
M. Greg Thompson: Madame la Présidente, je vois que le député est maintenant revenu à la Chambre. Je suis donc prêt à débattre ce projet de loi.
Je suis déçu que les collègues du député, qui ont cette question bien à coeur, ne soient pas à la Chambre pour appuyer le député. Je sais que les intentions du député sont bonnes et je vais faire allusion à certaines d'entre elles dans mon discours.
Le projet de loi a été présenté au cours de la première session du Parlement. Il s'agissait alors du projet de loi C-461. Cette mesure ne fait pas l'objet d'un vote, mais vise à protéger le droit des professionnels de la santé et d'autres de refuser, sans crainte de représailles ou d'autres mesures coercitives et discriminatoires, de participer à des actes médicaux qui sont contraires aux préceptes de leur religion ou à leur croyance au caractère inviolable de la vie humaine. Il n'y a rien à reprocher à cette intention.
Toute violation de l'interdiction de coercition par les employeurs du secteur de la santé, par les éducateurs et par les associations professionnelles est punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. J'ignore ce que fait ce projet de loi au juste, mais je rappelle à la Chambre que le Code criminel renferme déjà des dispositions sur la protection des médecins praticiens.
Je souligne également que le code de déontologie de l'Association médicale canadienne ainsi que la Charte des médecins renferment tous deux des dispositions qui accordent aux professionnels de la santé—ce terme est important—le droit de ne pas effectuer des procédures qu'ils désapprouvent. Ce droit est déjà prévu par leur code ou leur charte.
Le préambule de la Charte des médecins est important. Tous les médecins au Canada observent cette charte, dont le préambule est le suivant:
L'objectif des médecins du Canada, en partenariat avec leurs patients, est de fournir les meilleurs soins de santé possible. Cette Charte précise ce dont les médecins du Canada ont besoin pour atteindre cet objectif.
Elle complète les politiques de l'AMC et son Code de déontologie qui précisent les responsabilités des médecins à l'égard des patients, de la société, de la profession médicale et à l'égard d'eux-mêmes.
Ce préambule rappelle aux médecins que, en dépit de leurs énormes devoirs envers leurs patients, la communauté médicale et l'ensemble de la société, ils se doivent aussi, et avant tout, respect à eux-mêmes. Cela signifie que les médecins sont exemptés—et c'est un mot capital ici—de poser des actes qui vont à l'encontre de leurs valeurs personnelles.
En outre, et il importe de le rappeler, les médecins peuvent, ce qu'ils font souvent, renvoyer des patients vers d'autres médecins ou professionnels de la santé pour qu'ils puissent obtenir les soins qu'ils désirent ou auxquels ils ont droit. Un médecin peut renvoyer un patient à un autre médecin.
À l'article 7 de la section II de la charte des médecins, il est dit que les médecins doivent pouvoir exercer la médecine conformément à leurs valeurs professionnelles et personnelles, dans les limites du Code de déontologie de l'Association médicale canadienne. Cette disposition de la charte des médecins protège leurs droits et leurs valeurs personnelles. Le mot clé ici, c'est «protéger».
La charte vise à assurer une qualité de vie aux médecins canadiens. Elle porte que les médecins doivent pouvoir établir un équilibre entre les exigences de leur profession et leurs propres exigences en matière de qualité de vie et de santé personnelle. Par conséquent, à l'article 18 de la section IV. Il est dit que les médecins doivent être libres de harcèlement, de discrimination, d'intimidation ou de violence, aussi bien pendant leur formation que dans l'exercice de leur profession.
La coercition dont il est question dans le projet de loi est couverte par cet article de la charte des médecins.
M. Maurice Vellacott: Il est ici question du personnel infirmier.
M. Greg Thompson: Madame la Présidente, le député aura la chance de conclure et de poursuivre le débat; je l'invite donc à montrer la retenue dont la plupart d'entre nous faisons preuve pendant l'étude des initiatives parlementaires.
Je félicite le député de son projet de loi, mais, comme le député du parti ministériel l'a dit, il relève essentiellement de la compétence des provinces.
Je suis très déçu. Je sais que le député a cette cause à coeur et qu'il pense avoir raison. C'est pour cela qu'il s'est fait élire à la Chambre. Cependant, pourquoi les réformistes sont-ils absents en si grand nombre? Il n'y a pas un seul député du Parti réformiste...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je dois rappeler au député qu'il est interdit de faire des remarques sur la présence ou l'absence de députés à la Chambre.
M. Greg Thompson: Madame la Présidente, pour reformer tout cela d'une manière qui est peut-être conforme à l'usage parlementaire, disons qu'il n'y a pas ici un seul député de l'opposition officielle, sauf l'auteur du projet de loi. Cela en dit long sur le peu d'appui que le député a au sein même de son parti, sur son parti et sur l'importance que celui-ci accorde à cette question.
M. Maurice Vellacott: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement, car je tiens à signaler aux téléspectateurs que j'ai reçu énormément d'appui de députés de tous les partis.
Une voix: Il ne s'agit pas d'un recours au Règlement.
M. Maurice Vellacott: Si, c'est un recours au Règlement. Cela en est certainement un.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il ne s'agit pas d'un recours au Règlement. Je prierais tous les députés de bien vouloir éviter de faire des remarques sur la présence ou l'absence de députés à la Chambre. Nous allons reprendre le débat.
M. Greg Thompson: Madame la Présidente, je m'excuse d'avoir parlé de l'absence de députés réformistes à la Chambre.
M. Maurice Vellacott: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Les commentaires du député sont très choquants quand il s'agit d'une question aussi grave. Des députés de tous les partis appuient ce projet de loi.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je crains fort que cela ne soit matière à débat.
M. Greg Thompson: Madame la Présidente, le député qui a proposé la motion est un membre de ce même parti qui, lors de la journée d'opposition, l'autre jour, a refusé de nous donner le consentement unanime pour poursuivre le débat.
Je ne puis croire, encore une fois, qu'il soit le seul membre de son parti à débattre ici de cette question. Où sont les autres? Sont-ils rentrés chez eux? Quel est le problème? Pourquoi...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Ce sera là le dernier rappel au Règlement à ce sujet.
M. Maurice Vellacott: Madame la Présidente, j'ai écouté les commentaires du député et je suis d'avis que vous devriez le faire taire. Il terminera son discours. Nous avons l'appui de tous les députés...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je dois de nouveau avertir le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest.
M. Greg Thompson: Madame la Présidente, je n'ai rien à dire comme tel contre le député en ce qui a trait à son engagement face à cette question, mais ce que j'essaie de dire c'est que lorsqu'un projet de loi est déposé à la Chambre, il doit obtenir un vaste appui. Je ne vois pas ce genre d'appui de l'autre côté de la Chambre. Je ne le vois pas non plus de ce côté-ci. En fait, le problème c'est qu'il touche à ce que l'on considère généralement comme des domaine de compétence provinciale. À ce seul niveau, je ne crois pas qu'il obtiendra le genre d'appui qu'il recherche.
Le préambule du projet de loi et certains des faits que le député a présentés à la Chambre ouvrent des discussions en ce qui a trait à la protection que les dispensateurs de soins de santé, médecins et infirmières, se voient accorder aujourd'hui en vertu de la Charte des droits et des droits individuels qui leur sont conférés à titre de travailleurs canadiens. C'est un dossier très respecté et nous voulons que ce respect et le niveau de protection des droits individuels se poursuive. Je crois que c'est ce qui arrive dans le cadre de la loi actuelle.
Bien que ses intentions soient bonnes, je ne crois pas que ce projet de loi vienne ajouter quoi que ce soit au débat. Sur cette base, je vais me rasseoir et laisser le seul député réformiste poursuivre.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je vais donner la parole au député qui a présenté le projet de loi, car il a cinq minutes pour répondre. Cela mettra fin au débat.
M. Maurice Vellacott: Madame la Présidente, je vais commencer par remercier les députés du parti ministériel qui ont appuyé le projet de loi. Même s'ils ne sont pas ici en personne, je sais qu'ils sont ici en esprit et qu'ils appuient cette mesure.
Il est malheureux que, dans notre système actuel, les projets de loi d'initiative parlementaire soient souvent étudiés à la fin de la journée, tard dans la semaine, au moment où certains députés doivent prendre l'avion ou autre chose du genre. L'appui venait de députés du Nouveau Parti démocratique, du Parti conservateur et du Parti libéral. Plus de 100 signatures ont été recueillies à l'appui du projet de loi. C'est aussi le tirage au sort qui nous a permis de discuter de cette mesure aujourd'hui.
Ce qui me paraît vraiment discutable dans notre système, c'est le fait que, si un projet de loi qui a l'appui d'au moins un tiers des députés peut être renvoyé à un comité, celui-ci devrait être soumis à la Chambre. Il devrait faire l'objet d'un vote, il devrait être modifié, changé, amélioré.
J'accueillerais certainement avec plaisir les contributions que le député conservateur qui vient de parler ferait au comité. En écoutant les divers témoins, les membres du groupe Nurses for Life et divers autres travailleurs de la santé, il verrait que, en fait, nous n'avons pas de protection actuellement dans notre pays pour le personnel infirmier, pour les hommes et les femmes qui travaillent avec les médecins. Tout ce qu'il avait à dire concernait la protection des médecins. Les médecins sont très différents du personnel infirmier. C'est exactement ce sur quoi porte la discussion d'aujourd'hui. Je tiens à remercier et à encourager d'autres personnes qui travaillent dans le secteur de la santé et les jeunes qui sont dans les établissements de formation.
Je me rappelle qu'un jour, il y a quelques mois, une autochtone s'est présentée à mon bureau. Elle avait les nerfs plutôt à vif. Elle arrivait à la fin de ses études. Elle m'a demandé: «Que puis-je faire dans la situation où je me trouve? Je suis censée faire une étude de certains modules ou choisir certains modules au moment où j'arrive à la fin de mes études, et il semble—je ne le sais pas et je dois le vérifier—que je dois participer à un avortement.» C'était une autochtone et, d'après son éducation, religieuse ou non, le caractère sacré de la vie, le respect de la vie, étaient choses importantes. Elle avait le sentiment qu'elle serait forcée d'accepter de participer à un avortement, sinon elle ne pourrait pas terminer son programme d'études. J'ai parlé à des médecins et à d'autres professionnels de la santé, et il semble que, du moins dans certaines écoles, les étudiants sont forcés de participer à cet acte médical dans le cadre de leur programme de formation.
Comme l'a mentionné le député qui est intervenu juste avant moi, ce sujet n'est pas couvert. Il y a trop d'infirmières, trop de personnes qui nous appellent pour nous dire que c'est un problème. Ce n'est pas une chose que nous pouvons simplement laisser de côté. Ce ne serait plus un problème si c'était un sujet dont les provinces pouvaient s'occuper. Il faut la protection plus large du gouvernement fédéral. Cet aspect devrait figurer dans le Code criminel, comme nous le suggérons en l'occurrence.
S'il y a de meilleures idées pour assurer la protection des professionnels de la santé, nous y sommes certainement ouverts, mais aucune n'a été proposée jusqu'à présent. Nous ferions volontiers tout ce que nous pourrions pour défendre de bons professionnels de la santé qui consacrent leur vie à leur profession ou qui se spécialisent dans les accouchements et qui ne veulent pas pratiquer des avortements. Le projet de loi n'interdit pas les avortements. Il dit simplement qu'on ne peut obliger personne à en pratiquer. On ne peut forcer personne à pratiquer l'euthanasie. Il est à espérer que l'on adoptera un jour un projet de loi sur les techniques de reproduction qui inquiètent grandement des professionnels de la santé au plan de l'éthique.
Enfin, je tiens à nouveau à remercier les députés qui m'écoutent peut-être même dans leur bureau ou à la maison grâce à la CPAC, en particulier les députés ministériels. Ce n'est manifestement pas la minorité, mais il y a de bons députés du parti ministériel et du Parti conservateur qui appuient cette mesure. En fait, c'est le leader adjoint du gouvernement, qui est des Maritimes, qui a appuyé ce projet de loi. C'est mon propre collègue.
Je tiens à remercier les députés de mon parti, un grand nombre d'entre eux, peut-être les plus nombreux parmi ces 100 signataires, ainsi que certains députés du NPD. Il faut insister sur cette question, et nous le ferons en temps opportun.
M. Greg Thompson: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je sais gré des remerciements, mais je voudrais rappeler au député que son propre groupe parlementaire rate ce débat. J'en suis fort déçu.
Le président suppléant (M. McClelland): J'ai fait preuve d'une grande patience envers le député.
Le député de Wanuskewin voudrait-il terminer ses observations?
M. Maurice Vellacott: Madame la Présidente, j'ai terminé. Je voudrais seulement assurer aux députés de tous les partis qui prennent ces préoccupations à coeur que nous continuerons de chercher à améliorer le projet de loi par divers moyens, afin qu'il tienne compte des travailleurs et qu'il les protège. Il semble que, pour l'instant, notre seul recours soit de l'insérer dans le Code criminel, afin que les travailleurs de la santé bénéficient d'une protection étendue et uniforme dans tout le pays.
Le président suppléant (M. McClelland): Comme il n'y a pas d'autres députés qui désirent participer au débat et que la motion n'est pas désignée comme pouvant faire l'objet d'un vote, l'heure réservée aux initiatives parlementaires est écoulée et l'article est rayé du Feuilleton.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Traduction]
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
LE PROJET DE LOI C-80
Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Madame la Présidente, je suis très heureuse de pouvoir parler d'une question que j'ai soulevée à la Chambre le 18 octobre.
À cette date, j'ai soulevé un point et porté à l'attention du ministre de la Santé une situation liée au grave dossier de la salubrité des aliments.
J'ai précisément demandé au gouvernement quelles étaient ses intentions par rapport au projet de loi C-80 déposé au Parlement le printemps dernier, mais qui n'a pu être étudié avant la pause estivale.
Entre temps, une chose des plus inhabituelle s'est produite. Deux cents employés du ministère de la Santé ont manifesté publiquement leur inquiétude d'une manière absolument extraordinaire. Deux cents scientifiques de la Direction générale de la protection de la santé, bien au fait de la question de l'innocuité des aliments et de la recherche alimentaire, se sont exprimés publiquement. C'est du jamais vu. Voir un groupe aussi important d'employés du gouvernement manifester publiquement leurs inquiétudes me porte à penser, tout comme les autres membres de mon parti, que le problème est grave et profond au sein du ministère de la Santé, que personne ne s'y est attaqué et qu'il continue de croupir et d'inquiéter les Canadiens.
Ces scientifiques ont parlé publiquement le 30 septembre dernier. Ils ont demandé au gouvernement de renverser sa décision au sujet du projet de loi C-80 et de revoir son approche par rapport à la désintégration du système de contrôle de la salubrité des aliments. Ils ont parlé clairement des problèmes du projet de loi C-80 et des autres événements qui ont suscité, chez les Canadiens, de graves inquiétudes quant à la qualité et à la salubrité de nos aliments.
Ils ont précisément abordé les aspects du projet de loi que le gouvernement devait revoir. Par exemple, une de leurs préoccupations fondamentales tient à la possibilité de conflit d'intérêts dans tout le système d'inspection et de surveillance qui doit garantir la sécurité des aliments.
Le gouvernement a fait passer la responsabilité de Santé Canada à l'Agence canadienne d'inspection des aliments, ce qui nous éloigne un peu plus d'une reddition directe des comptes au Parlement et en fait présente un risque grave de conflit d'intérêts, puisque cet organisme est chargé à la fois de la promotion et de la commercialisation des aliments, d'une part, et, d'autre part, de l'inspection et de la sécurité de ces produits. Ils croient que le projet de loi C-80 nous fait franchir un pas de plus dans cette direction.
Ces scientifiques ont également des préoccupations parce que le gouvernement, comme on peut le constater dans le projet de loi C-80 déposé au printemps dernier, ne s'assure pas que les produits génétiquement modifiés sont sans danger. Ils vont même jusqu'à dire que cette loi ouvrira les vannes toutes grandes et permettra à la biotechnologie de se développer très rapidement au Canada sans aucune recherche approfondie sur les conséquences à long terme pour la santé humaine, les modes de production et l'environnement.
Ils croient encore que ce projet de loi réduirait le ministre de la Santé à l'impuissance et l'empêcherait de s'acquitter des obligations que lui confie la Loi sur les aliments et drogues.
Ils ont bien d'autres préoccupations que le gouvernement connaît parfaitement, j'en suis persuadée. Cependant, je tiens à profiter de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour demander si le gouvernement est disposé non pas à mettre le projet de loi en veilleuse, mais à le rayer carrément de son programme et à rétablir...
La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je regrette, mais le temps de parole de la députée est terminé.
[Français]
M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, le ministre de la Santé a pris très au sérieux la question soulevée par la députée de Winnipeg-Centre-Nord. Il a aussi pris très au sérieux la pétition signée par plus de 200 membres du personnel de la Direction des aliments, et il leur a répondu que la sécurité des aliments est d'une importance vitale et incontournable pour le ministre et le ministère.
Les employés de la Direction des aliments ont récemment rencontré la haute direction, et le ministre accorde son appui le plus total au dialogue qui a suivi.
Nous estimons aussi que les récentes nominations du Dr Le Maguer, un scientifique de réputation internationale à la tête de la Direction des aliments, et du Dr Mohamed Karmali, un ancien membre du Conseil consultatif des sciences de Santé Canada à titre de chef de laboratoire de Guelph et spécialiste des maladies entériques, constituent un important signal de l'engagement de Santé Canada à l'excellence scientifique et au renouvellement du programme de surveillance des aliments.
Permettez-moi aussi de réitérer les engagements pris dans le discours du Trône du 12 octobre concernant les investissements stratégiques dans la recherche et la technologie en santé, et dans l'amélioration du Programme de sécurité alimentaire canadien de Santé Canada, et aussi des investissements qui vont moderniser nos activités de protection de la santé pour mieux refléter notre monde en évolution. Ces engagements continus envers la sécurité des aliments viennent appuyer les 65 millions de dollars annoncés dans le dernier budget fédéral.
Quand le Parlement a créé l'Agence canadienne d'inspection des aliments en 1997, il a mis en place un système de vérification selon lequel le ministre de la Santé se voit confier la responsabilité d'établir des politiques et des normes concernant la sécurité des aliments et la nutrition et la responsabilité d'évaluer l'efficacité des activités de l'Agence dans le domaine de la sécurité des aliments. Santé Canada assume ces mandats avec le plus grand soin.
La présidente suppléante (Mme Thibeault): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 06.)