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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 2ième Session

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 6

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 19 octobre 1999

VAFFAIRES COURANTES

. 1000

VLA NATION NISGA'A
VL'hon. Robert D. Nault
VLES VOIES ET MOYENS
VAvis de motion
VL'hon. Robert D. Nault

. 1005

VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Derek Lee
VCOMITÉS DE LA CHAMBRE
VProcédure et affaires de la Chambre
VM. Derek Lee
VLE CODE CRIMINEL
VProjet de loi C-245. Présentation et première lecture
VM. Paul Szabo
VLOI SUR LE DÉDOMMAGEMENT DES AGENTS
VProjet de loi C-246. Présentation et première lecture
VM. Paul Szabo
VLE CODE CRIMINEL
VProjet de loi C-247. Présentation et première lecture
VMme Albina Guarnieri

. 1010

VLA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU
VProjet de loi C-248. Présentation et première lecture
VM. Paul Szabo
VLOI INTERDISANT L'EXPORTATION DES EAUX DU CANADA
VProjet de loi C-249. Présentation et première lecture
VM. Nelson Riis
VCOMITÉS DE LA CHAMBRE
VProcédure et affaires de la Chambre
VMotion d'adoption
VM. Derek Lee

. 1015

VProcédure et affaires de la Chambre
VM. Derek Lee
VMotion
VLes pêches et les océans
VM. Derek Lee
VMotion
VLE CODE CRIMINEL
VProjet de loi C-250. Présentation et première lecture
VM. Myron Thompson
VLE CODE CRIMINEL
VProjet de loi C-251. Présentation et première lecture
VM. Myron Thompson

. 1020

VPÉTITIONS
VLa fiscalité
VM. Ken Epp
VLa pornographie juvénile
VM. Ken Epp
VLes Snowbirds
VM. Dick Proctor
VLa Constitution
VMme Deborah Grey
VLes armes nucléaires
VM. Svend J. Robinson
VLe Sénat
VM. Svend J. Robinson
VLe traité conclu avec les Nisga'a
VM. Darrel Stinson
VLes Snowbirds
VM. Nelson Riis

. 1025

VLes aliments transformés génétiquement
VMme Marlene Jennings
VL'étiquetage des aliments
VMme Marlene Jennings
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Derek Lee
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI ÉLECTORALE DU CANADA
VProjet de loi C-2. Motion
VL'hon. Don Boudria

. 1030

. 1035

VM. Ted White
VM. Ted White

. 1040

. 1045

VM. Stéphane Bergeron

. 1050

. 1055

VM. John Solomon

. 1100

. 1105

VM. Peter MacKay

. 1110

. 1115

VM. Peter Adams

. 1120

. 1125

VM. Rob Anders

. 1130

. 1135

VMme Carolyn Bennett

. 1140

. 1145

VMme Madeleine Dalphond-Guiral

. 1150

VM. Nelson Riis

. 1155

. 1200

VM. John Harvard

. 1205

. 1210

VM. André Harvey

. 1215

. 1220

VL'hon. Charles Caccia

. 1225

. 1230

VM. Gurmant Grewal

. 1235

. 1240

VM. Gar Knutson

. 1245

. 1250

VM. Ken Epp

. 1255

. 1300

VM. Steve Mahoney

. 1305

. 1310

. 1315

VM. Yves Rocheleau

. 1320

. 1325

VM. Lynn Myers
VReport du vote sur la motion

. 1330

VLOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET LES
VProjet de loi C-6. Étape du rapport
VDécision de la Présidence
VLe vice-président
VMotions d'amendement
VM. Pierre Brien
VMotions nos 1, 2, 5, 9, 10, 27 à 33, 36 à 43, 47 à 49, 57, 59 à 97, 100 à 157

. 1335

. 1340

. 1345

. 1350

. 1355

VLE COMMISSAIRE À LA PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE
VLe Président
VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VALEXINA LOUIE
VMme Sarmite Bulte
VLES DONS D'ORGANES
VM. Keith Martin

. 1400

VLE WOMEN'S COLLEGE HOSPITAL
VMme Carolyn Bennett
VLE RÉSEAU INTERNATIONAL SUR LA POLITIQUE CULTURELLE
VM. Mauril Bélanger
VLE TRANSPORT DU GRAIN
VM. Lee Morrison
VM. ROBERT MUNDELL
VMme Madeleine Dalphond-Guiral

. 1405

VLE PRIX ENDICOTT-PEABODY POUR ACTIVITÉS HUMANITAIRES
VM. Julian Reed
VL'INDUSTRIE DU CAMIONNAGE
VM. Roy Cullen
VL'AGRICULTURE
VM. Inky Mark
VLA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ
VMme Eleni Bakopanos
VLE DÉCÈS DE FERNAND DUBÉ
VMme Elsie Wayne

. 1410

VLA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA
VM. Pierre de Savoye
VLES PARCS NATIONAUX
VL'hon. Charles Caccia
VL'AGRICULTURE
VM. Myron Thompson
VLA SEMAINE SANS VIOLENCE
VM. Peter Adams
VLA DÉPUTÉE DE DARTMOUTH
VMme Alexa McDonough

. 1415

VQUESTIONS ORALES
VL'INDUSTRIE AÉRIENNE
VM. Preston Manning
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Preston Manning
VL'hon. David M. Collenette
VM. Preston Manning

. 1420

VL'hon. David M. Collenette
VL'ÉQUITÉ SALARIALE
VM. Monte Solberg
VL'hon. Lucienne Robillard
VM. Monte Solberg
VL'hon. Lucienne Robillard
VLES PRODUCTIONS AUDIOVISUELLES
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Martin Cauchon
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Martin Cauchon
VM. Stéphane Bergeron
VL'hon. Sheila Copps

. 1425

VM. Stéphane Bergeron
VL'hon. Sheila Copps
VL'ÉQUITÉ SALARIALE
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Lucienne Robillard
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Lucienne Robillard
VL'INDUSTRIE AÉRIENNE
VM. Bill Casey
VL'hon. David M. Collenette
VM. Bill Casey

. 1430

VL'hon. David M. Collenette
VLES PÊCHES
VM. John Cummins
VL'hon. Harbance Singh Dhaliwal
VM. John Cummins
VL'hon. Harbance Singh Dhaliwal
VLES PRODUCTIONS AUDIOVISUELLES
VM. Michel Gauthier
VL'hon. Sheila Copps
VM. Michel Gauthier
VL'hon. Sheila Copps

. 1435

VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Mike Scott
VL'hon. Robert D. Nault
VM. Mike Scott
VL'hon. Robert D. Nault
VLES ALIMENTS MODIFIÉS GÉNÉTIQUEMENT
VMme Hélène Alarie
VL'hon. Lyle Vanclief
VMme Hélène Alarie
VL'hon. Lyle Vanclief
VLA DÉFENSE NATIONALE
VM. Jim Hart
VL'hon. Arthur C. Eggleton

. 1440

VM. Jim Hart
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VL'ÉQUITÉ SALARIALE
VMme Caroline St-Hilaire
VL'hon. Lucienne Robillard
VLE SOMMET DE LA FRANCOPHONIE
VM. Raymond Bonin
VL'hon. Ronald J. Duhamel
VLES TÉLÉCOMMUNICATIONS
VM. John Nunziata
VL'hon. Sheila Copps
VM. John Nunziata
VL'hon. Sheila Copps
VL'IMMIGRATION
VM. Leon E. Benoit

. 1445

VL'hon. Elinor Caplan
VM. Leon E. Benoit
VL'hon. Elinor Caplan
VL'AGRICULTURE
VM. Dick Proctor
VL'hon. Lyle Vanclief
VM. Dick Proctor
VL'hon. Lyle Vanclief
VLES MARINS MARCHANDS
VMme Elsie Wayne
VL'hon. George S. Baker

. 1450

VMme Elsie Wayne
VL'hon. George S. Baker
VLE TRANSPORT AÉRIEN
VMme Marlene Jennings
VL'hon. David M. Collenette
VLA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
VM. Jim Abbott
VL'hon. Lawrence MacAulay

. 1455

VL'ASSURANCE-EMPLOI
VM. Paul Crête
VL'hon. Jane Stewart
VM. Yvon Godin
VL'hon. Jane Stewart
VL'ÉQUITÉ SALARIALE
VMme Angela Vautour
VL'hon. Lucienne Robillard
VLE SIERRA LEONE
VMme Jean Augustine
VL'hon. David Kilgour
VLA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA
VM. Jim Abbott

. 1500

VL'hon. Lawrence MacAulay
VPRÉSENCE À LA TRIBUNE
VLe Président
VRECOURS AU RÈGLEMENT
VLa période des questions
VM. Jim Hart
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES

. 1505

VLOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET LES
VProjet de loi C-6. Étape du rapport
VM. Pierre Brien

. 1510

VM. Charlie Penson
VM. Nelson Riis

. 1515

. 1520

VM. John Cannis
VM. Paul Crête

. 1525

. 1530

VM. Rahim Jaffer

. 1535

. 1540

VM. Jim Jones

. 1545

. 1550

VMme Christiane Gagnon

. 1555

. 1600

VAFFAIRES COURANTES
VLES COMITÉS DE LA CHAMBRE
VTransports
VM. Derek Lee
VMotion
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET LES
VProjet de loi C-6. Étape du rapport
VM. Bernard Bigras

. 1605

. 1610

VProjet de loi C-6—Avis de motion concernant l'attribution
VL'hon. Don Boudria

. 1615

VÉtape du rapport
VMme Jocelyne Girard-Bujold

. 1620

. 1625

VMme Hélène Alarie

. 1630

. 1635

VM. Claude Bachand

. 1640

. 1645

. 1650

. 1655

VM. Benoît Sauvageau

. 1700

. 1705

VM. Louis Plamondon

. 1710

. 1715

. 1720

VMme Pauline Picard

. 1725

. 1730

VM. Jean-Guy Chrétien

. 1735

. 1740

VM. Jean-Paul Marchand

. 1745

. 1750

VM. Réal Ménard

. 1755

. 1800

VM. Yves Rocheleau

. 1805

. 1810

VM. Yvan Loubier

. 1815

. 1820

VM. Richard Marceau

. 1825

. 1830

VLOI ÉLECTORALE DU CANADA
VProjet de loi C-2. Reprise de l'étude de la motion

. 1900

(Vote 5)

VLe projet de loi est renvoyé à un comité.
VMOTION D'AJOURNEMENT
VLa garde d'enfants
VMme Libby Davies

. 1905

VMme Bonnie Brown
VLes pêches
VM. Greg Thompson

. 1910

VM. Lawrence D. O'Brien

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 6


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 19 octobre 1999

La séance est ouverte à 10 heures.



Prière


AFFAIRES COURANTES

 

. 1000 +

[Traduction]

LA NATION NISGA'A

L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur aujourd'hui de déposer, dans les deux langues officielles, l'entente finale avec les Nisga'a ainsi que l'accord fiscal conclu avec la nation Nisga'a.

*  *  *

LES VOIES ET MOYENS

AVIS DE MOTION

L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je profite de l'occasion pour déposer un motion de voies et moyens visant à mettre en oeuvre certaines dispositions de l'entente finale avec les Nisga'a ainsi que l'accord fiscal conclu avec la nation Nisga'a, et je demande qu'un ordre du jour soit désigné en vue de l'étude de cette motion.

*  *  *

 

. 1005 + -

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à sept pétitions.

*  *  *

COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le deuxième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, au sujet de la liste des membres et des membres associés des comités de la Chambre. Si la Chambre donne son consentement, j'ai l'intention de proposer l'adoption du deuxième rapport plus tard aujourd'hui.

*  *  *

LE CODE CRIMINEL

 

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-245, Loi modifiant le Code criminel (counseling obligatoire dans le cas de certaines agressions).

—Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter à nouveau le projet de loi désigné C-418 lors de la dernière session, Loi modifiant le Code criminel afin d'imposer le counseling obligatoire à titre de condition de l'ordonnance de probation dans le cas des personnes déclarées coupables de violence familiale.

Seule une intervention peut mettre fin au cycle de la violence dans notre société. Ce projet de loi demande aux Canadiens de s'exprimer et de dire non à la violence, ainsi que l'imposition du counselling obligatoire pour les personnes déclarées coupables de délit criminel de voies de fait.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

LOI SUR LE DÉDOMMAGEMENT DES AGENTS DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

 

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) demande à présenter le pojet de loi C-246, Loi concernant la prestation d'un dédommagement aux agents de la sécurité publique qui perdent la vie dans l'exercice de leurs fonctions.

—Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter à nouveau le projet de loi désigné C-246 lors de la dernière session.

Les policiers et les pompiers mettent chaque jour leur vie en danger pour protéger les Canadiens. Quand un policier ou un pompier perd la vie, nous déplorons tous sa disparition. Ce projet de loi a pour but de créer un fonds de charité pour recevoir les dons et les legs pour le bénéfice des familles des policiers, des pompiers et des autres agents de la sécurité publique qui perdent la vie dans l'exercice de leurs fonctions. J'espère que tous les députés appuieront ce projet de loi.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

LE CODE CRIMINEL

 

Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-247, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (peines consécutives).

—Ce projet de loi se présente sous la même forme que se présentait le projet de loi C-251 au moment de la prorogation de la première session de la 36e législature.

Cette mesure législative aura pour effet de mettre fin à la réduction automatique de la peine dont bénéficient au Canada de nombreux meurtriers et violeurs ayant commis plusieurs crimes.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

[Français]

Le vice-président: La Présidence est d'avis que ce projet de loi est dans le même état où était le projet de loi C-251 au moment de la prorogation de la première session de la 36e législature.

En conséquence, conformément au paragraphe 86(1) du Règlement, le projet de loi est réputé adopté à toutes les étapes et adopté à la Chambre.

(Le projet de loi est réputé avoir été lu une deuxième fois, étudié en comité, rapporté, agréé, lu pour la troisième fois et adopté.)

*  *  *

 

. 1010 + -

[Traduction]

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

 

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-248, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu et le Régime de pensions du Canada (transfert de revenu au conjoint).

—Monsieur le Président, je suis heureux de déposer de nouveau à la Chambre le projet de loi désigné C-244 lors de la dernière session, qui prévoit la modification de la Loi de l'impôt sur le revenu pour permettre à un contribuable de transférer une partie de son revenu à son conjoint qui s'occupe directement des enfants au foyer.

Ce revenu partagé avec le conjoint ou le parent qui reste à la maison serait admissible au RÉER et donnerait également au conjoint à la maison le droit de recevoir des prestations du Régime de pensions du Canada.

Ce n'est là qu'un des moyens qui nous permettrait de reconnaître vraiment la participation des parents qui restent à la maison pour s'occuper des enfants. Je demande donc l'appui de tous les députés dans ce dossier.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

M. Nelson Riis: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je devais déposer mon projet de loi d'initiative parlementaire demain. Toutefois, il apparaît au Feuilleton d'aujourd'hui. Je demande donc le consentement unanime des députés pour le présenter aujourd'hui.

Le vice-président: Le député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys a-t-il le consentement unanime des députés pour déposer son projet de loi aujourd'hui?

Des voix: D'accord.

*  *  *

LOI INTERDISANT L'EXPORTATION DES EAUX DU CANADA

 

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD) demande à présenter le projet de loi C-249, Loi visant à interdire l'exportation des eaux du Canada par voie d'échanges entre bassins.

—Monsieur le Président, ce projet de loi arrive au bon moment. On s'intéresse beaucoup au pays à l'exportation des eaux en grande quantité et le projet de loi traite directement de ces questions.

Plusieurs projets sont à l'étude et diverses sociétés songent à détourner le cours de certaines rivières vers de nouveaux bassins afin d'exporter de l'eau vers les États-Unis et le nord du Mexique. Ce projet de loi interdirait le transfert de l'eau en grande quantité entre les bassins aux fins d'exportation.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

M. Myron Thompson: Monsieur le Président, je demande la parole pour faire un rappel au Règlement. Il m'a été indiqué que je pourrais présenter aujourd'hui deux projets de loi lors de la période réservée aux initiatives parlementaires. Ils sont prêts et je demande le consentement de la Chambre pour les présenter maintenant.

Le vice-président: Le député de Wild Rose a fait inscrire au Feuilleton d'aujourd'hui quatre projets de loi qui portent les nos 22, 23, 24 et 25 respectivement. La présidence voudrait savoir lesquels il compte présenter aujourd'hui.

M. Myron Thompson: Monsieur le Président, je ne me rappelle plus de la numérotation de mes projets de loi, mais je puis vous les décrire. L'un concerne les libérations sous caution et l'autre, les contrevenants d'origine autochtone pour lesquels un traitement spécial est demandé.

Le vice-président: Nous pourrions peut-être passer à l'examen des autres affaires courantes, ce qui permettrait au député de décider entre temps lesquels des quatre projets de loi il retiendra pour aujourd'hui; nous pourrions alors y revenir un peu plus tard. Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

*  *  *

COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

 

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, je propose que soit adopté le deuxième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre présenté à la Chambre un peu plus tôt aujourd'hui.

(La motion est adoptée.)

 

. 1015 + -

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre donne son consentement, je propose:  

    Que sur la liste des membres associés du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre figurent les noms suivants: M. Adams, M. Bellehumeur, M. Blaikie, Mme Dockrill, M. Doyle, Mme Grey, M. Hill, M. Jordan, M. Laurin, M. Lowther, M. Nystrom, M. McCormick, M. Ménard, Mme Tremblay, M. White.

Le vice-président: La Chambre donne-t-elle son consentement unanime pour que le secrétaire parlementaire puisse présenter cette motion?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Lui plaît-il de l'adopter?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

LES PÊCHES ET LES OCÉANS

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, en ce qui concerne un de nos comités permanents, je pense que vous obtiendrez le consentement de la Chambre pour que je propose la motion suivante:  

    Que, nonobstant le paragraphe 106(1) du Règlement, le Comité permanent des pêches et des océans soit autorisé à se réunir afin d'élire un président le mercredi 20 octobre 1999.

Le vice-président: La Chambre consent-elle à l'unanimité à ce que le secrétaire parlementaire présente cette motion?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: La Chambre a entendu la motion. Lui plaît-il de l'adopter?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Le vice-président: Nous allons maintenant revenir à la présentation des projets de loi d'initiative parlementaire.

*  *  *

LE CODE CRIMINEL

 

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-250, Loi modifiant le Code criminel (cautionnement en cas d'agression armée ou de harcèlement criminel).

—Monsieur le Président, ce projet de loi d'initiative parlementaire vise à modifier le Code criminel de façon à empêcher qu'une personne accusée d'agression sexuelle armée, de voies de fait graves, d'agression sexuelle ou de harcèlement criminel et ayant été identifiée par la victime ou par un témoin ne soit libérée tant que l'accusation dont elle fait l'objet n'a pas été retirée ou que son acquittement n'a pas été prononcée à son procès.

L'article 522, qui laisse actuellement à la discrétion des juges de juridiction supérieure ou pénale la mise en liberté sous caution des auteurs de ces graves infractions, serait abrogé.

Cela permettrait certainement d'apporter plus de sécurité aux Canadiens dont un certain nombre sont blessés chaque année par des gens qui commettent des crimes violents alors qu'ils sont en liberté sous caution.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

LE CODE CRIMINEL

 

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.) demande à présenter le projet de loi C-251, Loi modifiant le Code criminel.

—Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir présenter ce projet de loi d'initiative parlementaire. Il m'a été inspiré par l'accident dans lequel Craig Powell, Amber Keuben, Brandy Keuben et Stephanie Smith ont tous été tués sur le coup par un conducteur en état d'ivresse le 23 juin 1996 près de Morley, en Alberta, sur le chemin de retour d'un voyage de camping.

Le conducteur en état d'ébriété en l'occurrence était Christopher Goodstoney, qui fut inculpé sous quatre chefs d'accusation de négligence criminelle causant la mort et un chef d'accusation de négligence criminelle causant des blessures. Lors de l'audience pour la détermination de sa peine en avril dernier, le juge s'est référé au paragraphe 718.2(2) du Code criminel.

L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, ceci est contraire au Règlement.

Le vice-président: Le député est autorisé à expliquer succinctement l'objet du projet de loi, mais nous n'avons encore rien entendu à ce sujet. Je sais que le député a des faits intéressants à relater, mais il devrait attendre le débat en deuxième lecture pour le faire. Il devrait plutôt nous révéler la substantifique moelle de son projet de loi.

M. Myron Thompson: Monsieur le Président, je suis vraiment désolé. Je déteste froisser mon petit ami d'en face. Je vais tâcher de faire mieux.

La mesure que je propose a pour objet d'empêcher qu'un juge ait à prendre en considération la race d'un criminel reconnu coupable d'un crime.

(Les motions sont adoptées, et le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

 

. 1020 + -

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de prendre aujourd'hui la parole pour présenter deux pétitions au nom de mes électeurs.

La première pétition a trait à la discrimination exercée par la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard des familles qui choisissent qu'un parent reste au foyer pour s'occuper des enfants. Les pétitionnaires demandent que les familles à revenu unique puissent bénéficier des mêmes avantages fiscaux que les familles à deux revenus. La pétition porte 229 noms et s'ajoute aux nombreuses autres déjà présentées à ce sujet.

LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui s'ajoute à celles, regroupant plus de 300 000 noms, qui ont déjà été présentées à la Chambre au sujet de la pornographie juvénile.

Je suis très content des habitants de ma circonscription qui ont recueilli jusqu'à présent 4 311 signatures sur cette pétition qui demande au gouvernement de prendre immédiatement des mesures afin de redonner force de loi aux dispositions du Code criminel qui rendent la possession de pornographie juvénile illégale au Canada.

LES SNOWBIRDS

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur et l'obligation de présenter une pétition au sujet des Snowbirds, signée par des centaines de gens de ma circonscription surtout, mais également de l'Alberta et de la Colombie-Britannique.

Les pétitionnaires signalent que les Snowbirds sont un symbole national et une institution canadienne. Cette pétition découle de la suggestion faite cet été par le ministère de la Défense nationale, qui a laissé entendre que l'escadron 431 de démonstration aérienne, les Snowbirds, pourrait être et devrait être démantelé pour des raisons financières.

Les pétitionnaires font également remarquer que la mission des Snowbirds est de démontrer les compétences, le professionnalisme et le travail d'équipe des Forces canadiennes et que ces remarquables pilotes et leurs appareils devraient pouvoir continuer de voler dans un avenir prévisible.

Les pétitionnaires exhortent le Parlement à prendre les mesures nécessaires pour s'assurer qu'un financement continu et stable pour l'escadron de démonstration aérienne 431, les Snowbirds, demeure une priorité.

LA CONSTITUTION

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, puisqu'il est question de certains événements qui se sont produits cet été, je suis également heureuse de présenter une pétition en conformité de l'article 36 du Règlement.

Elle est signée par un grand nombre de gens qui expriment les préoccupations suivantes et attirent l'attention de la Chambre sur celles-ci: le droit canadien a toujours été basé sur des valeurs et des principes moraux judéo-chrétiens qui ont été transmis au cours des siècles par notre civilisation occidentale.

Ils défendent le préambule de la Charte canadienne des droits et libertés en tant que fondement des articles subséquents. Ils défendent le point de vue de la majorité des Canadiens.

Ils croient en Dieu qui a créé le paradis et la terre et ne sont pas offensés par la mention de son nom dans le préambule de la Charte canadienne des droits et libertés. Ils sont fiers de le nommer et soumettent cette pétition au Parlement en ce sens.

LES ARMES NUCLÉAIRES

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter deux pétitions. La première porte sur les armes nucléaires.

Les pétitionnaires font remarquer qu'il y a encore plus de 30 000 armes nucléaires sur notre planète et que l'existence continue des armes nucléaires menace la santé et la survie de l'espèce humaine et de l'environnement mondial. Ils signalent les préoccupations exprimées par le secrétaire général des Nations Unies à ce sujet.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement d'appuyer le lancement immédiat et la conclusion d'ici à l'an 2000 d'une convention internationale qui établisse un calendrier exécutoire pour l'abolition de toutes les armes nucléaires.

LE SÉNAT

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une seconde pétition, celle-ci sur l'abolition du Sénat.

Les pétitionnaires, habitants de ma circonscription, Burnaby—Douglas, et d'ailleurs soulignent que le Sénat canadien est une institution non démocratique composée de membres non élus qui n'ont pas de comptes à rendre au peuple canadien, que le Sénat coûte quelque 50 millions de dollars par an aux contribuables, qu'il fait double emploi étant donné le rôle que jouent la Cour suprême et les provinces, qu'il amoindrit le rôle des députés de la Chambre des communes, et qu'il faut moderniser nos institutions parlementaires.

En foi de quoi, les pétitionnaires demandent au Parlement de prendre les mesures nécessaires pour abolir le Sénat.

LE TRAITÉ CONCLU AVEC LES NISGA'A

M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je dépose une pétition qui porte la signature de 237 personnes de ma circonscription, Okanagan—Shuswap.

Les pétitionnaires demandent le rejet du traité avec les Nisga'a, traité qui va consacrer le principe de l'inégalité et qui risque de diviser les Canadiens à tout jamais.

LES SNOWBIRDS

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur de présenter, conformément à l'article 36 du Règlement, cette pétition au nom de plusieurs Canadiens de l'Ouest qui sont préoccupés par la survie des Snowbirds en tant qu'institution nationale et symbole canadien.

 

. 1025 + -

Ils soulignent, entre autres, que, au cours des 28 dernières années, 85 millions d'Américains ont été captivés par les Snowbirds.

Ils demandent donc au Parlement de prendre les mesures nécessaires pour que le financement stable et continu du 431e Escadron de démonstration aérienne, les Snowbirds, demeure une priorité pour notre pays.

[Français]

LES ALIMENTS TRANSFORMÉS GÉNÉTIQUEMENT

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, la première pétition que je dépose aujourd'hui à la Chambre est une requête visant l'étiquetage obligatoire et la vérification complète des aliments transformés génétiquement.

C'est un sujet qui touche beaucoup de Canadiens et de Canadiennes. Plusieurs signataires demandent au Parlement d'adopter une loi pour l'étiquetage des aliments transformés génétiquement.

L'ÉTIQUETAGE DES ALIMENTS

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition demande au Parlement d'adopter une loi qui requiert obligatoirement des compagnies qui font de l'importation des produits alimentaires au Canada de s'assurer que ces produits soient bien étiquetés en ce qui a trait à leurs ingrédients.

[Traduction]

Les pétitionnaires demandent que toutes les compagnies qui importent des produits alimentaires au Canada veillent à ce qu'ils soient correctement étiquetés de façon à ce que l'on puisse connaître la listes des ingrédients qu'ils contiennent ainsi que tout ce qu'ils renferment du fait de l'environnement dans lequel ils ont été préparés.

*  *  *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI ÉLECTORALE DU CANADA

Projet de loi C-2. L'Ordre du jour appelle: Ordres inscrits au nom du gouvernement.

      14 octobre 1999-Le leader du gouvernement à la Chambre des communes-Deuxième lecture et renvoi au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre du projet de loi C-2, Loi concernant l'élection des députés à la Chambre des communes, modifiant certaines lois et abrogeant certaines autres lois.

 

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je propose:

    Que le projet de loi C-2, Loi concernant l'élection des députés à la Chambre des communes, modifiant certaines lois et abrogeant certaines autres lois, soit renvoyé sur-le-champ au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

—Monsieur le Président, aujourd'hui, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre la nouvelle Loi électorale du Canada. La Loi électorale du Canada constitue le fondement opérationnel et la base de notre régime électoral démocratique. Notre loi électorale repose sur trois principes essentiels: l'équité, la transparence et l'accessibilité.

Depuis près de 30 ans, la Loi électorale du Canada est au coeur d'un système électoral qui inspire les démocraties du monde entier. Les principes et orientations de notre loi électorale sont solides. Toutefois, nous devons éliminer les incohérences administratives qui se sont créées au fil des 30 dernières années et modifier les articles de la loi que les tribunaux ont choisi d'invalider.

J'aimerais d'abord remercier les membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre qui ont préparé l'excellent rapport sur lequel est basée cette loi, en particulier l'honorable député de Peterborough qui a présidé ce travail.

Les modifications que nous proposons aujourd'hui tirent leur origine des constatations et des recommandations du comité. Le projet de loi reflète également les recommandations que contenait le rapport de 1991 de la Commission royale d'enquête sur la réforme électorale, soit la Commission Lortie, les propositions déposées en 1993 par le Comité spécial de la Chambre, les rapports que le directeur général des élections a présentés au Parlement en 1996 et en 1997.

Le projet de loi tient également compte des discussions que j'ai tenues avec mes homologues au Royaume-Uni et il s'inspire des idées, des préoccupations et des initiatives que nous ont communiquées de très nombreux députés et sénateurs de tous les partis politiques, des universitaires, des groupes d'intérêt et de simples citoyens.

 

. 1030 + -

Notre gouvernement est déterminé à faire adopter ce projet de loi et à mettre en oeuvre des modifications qui reflètent la sagesse et la vision collective des députés.

[Traduction]

Le renvoi du projet de loi à un comité avant sa deuxième lecture permettra d'y proposer des amendements plus larges, à condition, bien sûr, que ces amendements modifient la même loi que celle qui fait l'objet du projet de loi. Permettez-moi de prendre quelques instants pour décrire quelques-uns des changements administratifs proposés dans ce projet de loi.

Nous avons proposé que le directeur général des élections soit autorisé à changer les heures de scrutin dans les régions qui n'adoptent pas l'heure avancée. Cette mesure réglera le problème que les électeurs de la Saskatchewan ont connu lors des dernières élections.

En outre, comme la loi électorale a été adoptée en 1974, nous entendons compenser l'effet de l'inflation en faisant passer de 100 $ à 200 $ le seuil prévu à l'égard de la divulgation du nom et de l'adresse de ceux qui font des contributions ou des dons, et le seuil prévu à l'égard du crédit d'impôt de 75 p. 100 pour contributions politiques. La limite de dépenses avec pièces justificatives passera de 25 $ à 50 $. Comme il est désormais fort difficile de retenir les services de vérificateurs pour 750 $, la limite de dépenses pour honoraires de vérification sera portée à 1 500 $.

Nous avons proposé d'accorder le droit de vote à tous les directeurs du scrutin au Canada. Nous avons inséré des amendements pour assurer le droit de faire campagne et de poser des affiches dans les immeubles à logements multiples. Nous avons proposé de renforcer les pouvoirs d'exécution du commissaire d'Élections Canada.

Ces dernières années, des décisions judiciaires ont exhorté le gouvernement du Canada à réexaminer certains articles de la Loi électorale du Canada. Nous sommes d'avis que les modifications que renferme ce projet de loi respectent l'esprit et la lettre de ces décisions. Les dispositions sur les dépenses par des tiers en sont une parfaite illustration.

Nous avons examiné soigneusement la décision rendue en 1996 par la Cour d'appel de l'Alberta éliminant les anciens plafonds de dépenses, mais nous avons également étudié l'arrêt Libman rendu en 1997 par la Cour suprême du Canada, qui a dit ce qui suit:

    Avec égards, [...] nous avons déjà souligné que nous ne pouvions retenir le point de vue de la Cour d'appel de l'Alberta en raison de notre désaccord avec sa conclusion quant à la légitimité de l'objectif de ces dispositions.

La Cour suprême a ajouté: «Tout en reconnaissant leur droit [des tierces parties] de participer au processus électoral, les individus et les groupes indépendants ne peuvent être assujettis aux mêmes règles financières que les candidats, candidates ou partis politiques et se voir allouer les mêmes plafonds de dépenses. Bien que leur voix soit importante, ce sont les candidats, candidates ou partis politiques qui se font élire. La limite financière permise aux indépendants doit donc être plus basse que celle imposée aux candidats, candidates ou partis politiques.»

De plus, nous plaçons l'équité au coeur des modifications proposées aux règles régissant le black-out. Récemment, la Cour suprême du Canada a supprimé le black-out de 72 heures sur les sondages électoraux. Toutefois, la Cour n'a pas interdit de donner aux électeurs les moyens et le temps de se faire une idée du scrutin. Conformément aux directives de ce tribunal, nous demandons de rendre obligatoire la publication des méthodes de sondage et de raccourcir la période de black-out.

Nous avons aussi abordé la question de l'interdiction de la publicité politique. Par suite de la décision des tribunaux de l'Alberta, il demeure désormais interdit aux partis politiques de faire de la publicité tandis que, parallèlement, les candidats et les tiers partis ne sont pas soumis à une semblable mesure. Ce n'est manifestement pas juste, et la même règle devrait valoir pour tout le monde.

Nous avons proposé une nouvelle période d'interdiction de la publicité politique qui entrerait en vigueur 48 heures avant le jour des élections. Personne ne pourrait faire de publicité le jour même ainsi que la veille des élections. Nous voulons que le seul groupe à avoir le dernier mot pendant une campagne soit celui des électeurs canadiens.

Tout récemment, la décision Figueroa rendue par le tribunal de l'Ontario a fait tomber une autre disposition de la Loi sur les élections qui prévoit qu'un parti perdant son statut de parti politique inscrit doit demander la révocation de son inscription, liquider tous ses biens et les donner au receveur général.

 

. 1035 + -

Nous avons tenu compte de cette décision et nous avons réagi en autorisant les tiers partis qui ne réussissent pas à présenter le nombre requis de candidats à une élection à conserver leurs biens moyennant certaines conditions. Toutefois, comme le savent la majorité des députés, le gouvernement interjette appel de la partie de l'ordonnance du tribunal selon laquelle un parti n'a qu'à désigner deux candidats pour accéder au statut de parti inscrit. Le gouvernement croit fermement qu'il y a lieu de défendre le maintien des exigences actuelles.

Chacun des amendements proposés dans le projet de loi, chacun de ceux que nous avons mis de l'avant, met l'accent sur les valeurs et les principes qui sous-tendent la Loi sur les élections et qui sont chers aux Canadiens. Dans chaque cas, nous nous sommes posé les questions qui ont servi de fondement à la Loi électorale du Canada. Est-ce une mesure équitable? Favorise-t-elle l'accessibilité? Fait-elle en sorte que notre système électoral demeure ouvert et transparent? Selon moi, la réponse à ces questions est affirmative dans chaque cas.

Ce sera bien sûr un effort non partisan. Je suis impatient de transmettre le projet de loi au comité et de prendre connaissance des suggestions constructives que feront tous les députés afin de l'améliorer, pourvu que les amendements portent sur les mêmes lois que celles dont il y est question.

Je prie instamment tous les députés d'accorder leur appui au projet de loi et à sa transmission au comité. À mon avis, en travaillant ensemble, nous réussirons à conserver une des plus importantes mesures législatives canadiennes au moment où notre pays et notre démocratie vont amorcer le XXIe siècle.

Je remercie les députés de tout le travail qu'ils ont consenti jusqu'à maintenant en vue d'améliorer la Loi électorale du Canada. Je suis impatient de comparaître devant le comité, de répondre à toutes les questions des députés et de collaborer avec eux à l'amélioration de ce projet de loi pour le bien de tous les Canadiens.

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Dans l'esprit dont le leader du gouvernement à la Chambre a donné l'exemple, la Chambre m'accorderait-elle cinq minutes pour poser des questions au ministre?

L'hon. Don Boudria: Monsieur le Président, je n'ai aucune objection, mais le débat est limité à trois heures, et j'enlèverais ainsi du temps à d'autres députés. Je vais comparaître devant le comité dans quelques jours. Nous pouvons procéder d'une façon ou de l'autre, cela m'importe peu. Je répugne simplement à priver d'autres députés du temps qui leur revient.

Le vice-président: Voyons ce qu'il en est. Y a-t-il consentement unanime pour qu'on puisse poser des questions au ministre pendant cinq minutes?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: Je n'ai entendu aucune objection. Y a-t-il quelqu'un qui dit non à la proposition? Personne ne s'y oppose.

[Français]

Il y aura donc une période de questions de cinq minutes.

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le Président, je comprends les préoccupations de mon honorable collègue, le leader du gouvernement à la Chambre, et je dois dire que je les partage jusqu'à un certain point.

Si la période de questions et commentaires n'est limitée qu'à cinq minutes, il est bien clair que ce sont cinq minutes dont sont privées l'ensemble des formations politiques. Alors, si on s'entendait, par exemple, sur une période de cinq minutes pour chacune des formations politiques, je pourrais, à ce moment-là, être d'accord, mais autrement, nous ne pouvons accorder notre consentement.

Le vice-président: C'est cinq minutes pour tout le monde. Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

Une voix: Non.

[Traduction]

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, c'est une honte qu'on ne nous laisse pas l'occasion, dès le début du débat, de poser quelques questions au ministre. Cela aiderait à tirer les choses au clair. Même si nous devions tous renoncer à 30 secondes de notre temps, cela aiderait à situer le débat un peu plus nettement.

La pratique qui consiste à renvoyer des projets de loi aux comités avant la deuxième lecture n'est rien d'autre, à vrai dire, qu'un stratagème que le gouvernement a trouvé pour faire adopter rapidement des mesures législatives sans que le public et les médias aient vraiment le temps de s'y intéresser.

Je sais que je ne suis pas censé brandir des objets, mais le projet de loi est un document de 253 pages. C'est jeudi dernier que le ministre a présenté ce projet de loi à la Chambre et voici que, seulement quelques jours plus tard, il veut le faire étudier à toute vapeur par le comité, à huis clos, afin de le cacher au public et aux médias. Le projet de loi est tellement rempli de mesures inadmissibles que le gouvernement a tout intérêt à agir de la sorte.

Le leader du gouvernement à la Chambre refuse à la population et aux médias l'occasion d'assister à un débat sérieux sur ce projet de loi, sur les importantes dispositions qu'il renferme, avant que la mesure législative ne soit renvoyée au comité. Si elles ignorent que le projet de loi est à l'étude, comment la population et les parties intéressées pourront-elles obtenir les renseignements dont elles ont besoin pour se présenter devant le comité, faire des observations pertinentes, répondre à des questions et proposer des amendements?

 

. 1040 + -

En vérité, lorsque ce projet de loi sera renvoyé plus tard aujourd'hui au comité, après la tenue d'un vote à la Chambre, son existence ne sera connue que d'une poignée de groupes d'intérêts spéciaux qui, s'ils en ont l'occasion, en glisseront peut-être un mot à quelques animateurs de télé ou chroniqueurs pour les inciter à en parler. Il est épouvantable de faire adopter ainsi un projet de loi aussi volumineux.

Je siège ici depuis six ans et j'ai vu très peu de projets de loi aussi volumineux. Il y a eu, bien sûr, le projet de loi C-68 sur le contrôle des armes à feu que nous avons étudié il y a quelques années. Rappelez-vous tout le temps qu'il a mis pour franchir les étapes du processus législatif à la Chambre. Aujourd'hui, il faudrait adopter ce nouveau projet de loi en moins de rien.

Si j'en avais eu l'occasion, il y a quelques minutes, j'aurais posé deux ou trois questions au ministre au sujet de la contestation, par le Parti communiste du Canada, de la Loi électorale et de la prescription quant au nombre de députés constituant un parti. Pourquoi le leader parlementaire du gouvernement craint-il tellement que le nom du Parti communiste du Canada ou du Parti Vert du Canada figure sur les bulletins de vote? De quoi le ministre a-t-il tellement peur pour vouloir rétablir la règle voulant qu'un groupe présente au moins 50 candidats pour être considéré comme un parti? Que diable y a-t-il de mal à ce que deux, trois ou dix personnes forment un parti dont le nom figurerait sur les bulletins de vote? Le leader parlementaire craint-il tellement la compétition qu'il ne peut pas supporter l'idée que le nom de quelque autre groupe crédible figure sur les bulletins de vote?

Dans les pays qui ont un système électoral à représentation proportionnelle, comme l'Allemagne ou la Nouvelle-Zélande, jusqu'à 35 partis peuvent figurer sur les bulletins de vote. Les électeurs de ces pays n'en semblent pas moins parfaitement capables de décider quel parti élire ou rejeter.

Pourquoi le leader du gouvernement à la Chambre croit-il que les électeurs canadiens sont trop stupides pour faire de même? Il soutient que la décision finale revient aux électeurs du Canada; pourquoi ne les laisse-t-il donc pas décider? Qu'on inscrive donc sur les bulletins de vote le nom de quiconque est disposé à suivre les règles et à payer son dépôt! Qu'on laisse donc les candidats mettre le nom qu'ils veulent sur les bulletins de vote et qu'on laisse les électeurs décider! Je crois sincèrement que les électeurs sont assez sensés et assez intelligents pour décider par eux-mêmes.

J'aurais eu une autre question à poser au ministre, relativement au favoritisme qui est en train de contaminer toutes les activités sur le terrain d'Élections Canada. Élections Canada supplie le gouvernement depuis des années de supprimer de la Loi électorale les dispositions qui permettent le favoritisme. Lorsque Élections Canada donne à des gouvernements de pays du tiers monde et à des démocraties naissantes des conseils sur la façon de mettre en place leurs régimes électoraux, il ne leur recommande jamais d'adopter le régime de favoritisme politique qui existe ici dans toutes les activités sur le terrain d'Élections Canada.

Les partis enregistrés peuvent nommer les directeurs du scrutin et les scrutateurs, les greffiers et toute une foule de personnes que l'on nomme à des fonctions rétribuées pour les remercier d'appuyer le parti ministériel ou d'autres partis. Élections Canada a imploré le gouvernement de lui laisser le droit d'embaucher et de congédier les candidats à ces fonctions selon leur mérite. Le gouvernement refuse de lui accorder ce droit parce qu'il veut pouvoir récompenser ses partisans politiques.

Le leader du gouvernement à la Chambre a mentionné qu'il accordera le droit de vote aux directeurs du scrutin. Comme chacun le sait, actuellement, en raison des nominations teintées de favoritisme, tous les directeurs du scrutin sont des libéraux. J'imagine que le parti ministériel doit avoir peur de ne pas récolter suffisamment de voix et que c'est pour cette raison qu'il doit tenter d'obtenir la moindre voix possible.

En ce qui concerne les dépenses des tiers partis, j'ai entendu le leader du gouvernement à la Chambre citer abondamment une décision rendue par un tribunal du Québec, parce qu'il voulait éviter à tout prix de tenir compte des décisions rendues en Alberta. Je trouve curieux que même le gouvernement soit prêt à fermer les yeux sur des décisions qu'un tribunal de la Colombie-Britannique a rendues et qui laissent sévir la pornographie infantile. Le gouvernement est tout à fait disposé à ne pas tenir compte des décisions de tribunaux en faveur de droits de pêche fondés sur la race, mais il agit promptement lorsqu'il s'agit d'une décision de tribunal mineure susceptible de porter atteinte à son avantage lors d'élections, comme la règle des 50 candidats et les dépenses des tiers. Il tient à maintenir le favoritisme. Il parle de démocratie du bout des lèvres, mais ses gestes sont plus éloquents que ses paroles.

 

. 1045 + -

J'ai parlé de la taille du projet de loi. Nous avons déjà commencé à communiquer avec quelques partis, groupes et personnes intéressés par ce projet de loi. Nous n'avons pas réussi à leur faire parvenir une copie du projet de loi avant hier.

Le ministre veut se présenter devant le comité dès jeudi de cette semaine. Est-il vraiment raisonnable de s'attendre à ce que les Canadiens intéressés, qu'ils aient ou pas une formation juridique, puissent passer à travers un projet de loi complexe de 253 pages, en comprendre les répercussions pour leur groupe ou leur section de la société, préparer des mémoires, demander à être entendus par le comité à Ottawa et être ici jeudi ou la semaine prochaine?

Lorsque le comité commencera à parler du délai d'adoption du projet de loi, j'espère que nous penserons aux personnes extérieures au système parlementaire qui pourraient s'y intéresser et qui aimeraient être entendues par le comité. J'espère qu'il y aura un calendrier réaliste et que l'étude du projet de loi sera prolongée jusqu'au printemps prochain. Je ne vois pas pourquoi nous précipiterions l'adoption d'un projet de loi aussi compliqué.

Une voix: Peut-être y aura-t-il une élection surprise.

M. Ted White: Un de mes collègues dit qu'il y aura peut-être bientôt une élection surprise. Il est intéressant qu'il dise cela parce que j'ai remarqué que le projet de loi C-2, qui remplace grosso modo le projet de loi C-83, qui a été présenté avant l'ajournement de l'été et a mis fin à la première session, renferme quelques articles supplémentaires qui ne figuraient pas dans le projet de loi C-83. Ces articles ont trait à l'inscription et à la déclaration des parties avant juin 2000, si le projet de loi est adopté avant cette date.

Quand j'ai lu ces articles, je me suis demandé si jamais des élections rapides étaient prévues et que le gouvernement veuille s'assurer de l'adoption d'un certain nombre de choses avant le mois de juin prochain. Il est intéressant que le député le mentionne. J'ignore s'il a lu les articles en cause, mais ils y sont.

Même ce débat que nous tenons ce matin est un affront à la démocratie. Le leader parlementaire a parlé du processus démocratique et affirmé qu'il le soutenait. Or, ce débat est, en tant que tel, un affront à la démocratie. En effet, nous ne pouvons poser aucune question à aucun député ministériel. Tout ce que nous pouvons faire, c'est désigner quatre personnes disposant de dix minutes chacune, sans questions ni observations, après quoi la Chambre passera au vote, le gouvernement l'emportera et le projet de loi sera renvoyé au comité.

Nous sommes tous ici depuis suffisamment longtemps pour savoir exactement ce qui arrivera derrière des portes closes. Nous sommes tous des adultes. Le projet de loi sera adopté à toute vapeur, article par article. Il n'y aura pas d'étude véritable. Après cet examen bidon, le projet de loi sera renvoyé à la Chambre dans son libellé définitif. C'est inconcevable.

J'exhorte le ministre, s'il croit vraiment en ce qu'il a dit ce matin, à faire en sorte que le projet de loi soit analysé en profondeur au comité et que l'on puisse proposer des amendements significatifs, et j'en ai un à proposer qui n'est sûrement pas trop controversé. C'est permettre au directeur général des élections d'expérimenter le vote électronique. Ce mode de scrutin figure dans la loi de l'Ontario depuis trois ans. Je ne vois donc pas pourquoi il ne devrait pas être prévu par la loi fédérale.

Merci, monsieur le Président. J'ai hâte de siéger au comité et de pouvoir tenir un vrai débat quand ce projet de loi reviendra à la Chambre.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui dans le cadre de ce débat en préétude du projet de loi C-2, Loi concernant l'élection des députés à la Chambre des communes, modifiant certaines lois et abrogeant certaines autres lois.

Je précise d'ailleurs qu'au cours de la présente législature, pas moins de 14 séances du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre ont été consacrées à l'étude de l'actuelle Loi électorale, en préparation de ce projet de loi.

Compte tenu du sérieux avec lequel nous avons procédé à cette étude minutieuse, nous étions en droit de nous attendre à ce que le gouvernement prête une attention particulière aux différentes recommandations qui ont été formulées par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, mais tel ne devait pas tout à fait être le cas.

Certaines recommandations unanimes du comité, en effet, n'ont trouvé aucun écho dans ce projet de loi, et j'y reviendrai un peu plus tard dans mon intervention.

 

. 1050 + -

D'entrée de jeu, signalons que deux éléments ont particulièrement retenu mon attention au cours de l'étude de la Loi électorale: le financement des partis politiques et la question corollaire des fonds en fiducie mis sur pied pour appuyer des candidats. De façon non moins importante, je dirais que le processus partisan de nomination des officiers électoraux me laisse également perplexe.

La Loi électorale du Canada a toujours permis aux corporations, petites et grandes, de contribuer au financement des partis politiques fédéraux. Cette pratique permet aux différents partis d'amasser des sommes colossales en minimisant les opérations de sollicitation devant être menées auprès des simples électrices et électeurs.

N'ayant pas à se conformer à quelque plafond de contributions, les corporations peuvent verser aux partis politiques fédéraux de leur choix des sommes faramineuses, et est-il besoin de le signaler, ces contributions ne sont certainement pas consenties à des partis politiques à des fins purement philanthropiques.

Le financement des partis politiques, tel que pratiqué sur la scène fédérale, implique nécessairement un traitement préférentiel pour les plus offrants, et Dieu sait à quel point la loi leur permet de l'être.

Je veux simplement dire qu'avec une humble contribution de quelques dollars, un simple électeur risque de ne pas avoir autant l'oreille de ses représentants politiques qu'une banque qui, elle, par exemple, peut offrir des contributions substantielles s'élevant à quelques dizaines de milliers de dollars.

Cette situation a pour effet de créer différentes catégories de contributeurs et, il faut malheureusement le craindre, une attention différente à l'égard des multiples requêtes et attentes auxquelles les dirigeants politiques doivent répondre.

Nous étudions aujourd'hui un projet de loi qui, au dire du gouvernement, a pour objectif, et je cite: «l'équité, la transparence et l'accessibilité». Permettez-moi d'en douter. Comment peut-on prétendre à l'équité d'un tel processus, alors que les dispositions de ce projet de loi ne prévoient aucun plafond de contributions?

Qui pourra soutenir sans sourciller que ce système est véritablement équitable, transparent et accessible, lui qui permet à des corporations qui n'ont pas le droit de vote, de s'ingérer dans le processus électoral, par le biais de contributions qui dépassent largement la capacité financière des simples électeurs, et, ainsi, d'influencer indûment les orientations politiques des partis et candidats qui briguent les suffrages?

Ce projet de loi trahit une conception bien étroite des règles démocratiques qui devraient régir notre société, puisque celui-ci permet toujours que les mieux nantis puissent avoir une oreille plus attentive et une voix prépondérante auprès des représentants de la population.

Comme je le mentionnais en introduction, la question des fonds en fiducie pour soutenir des candidats m'apparaît également pour le moins nébuleuse. Encore une question d'argent, me direz-vous. Cette question a fait l'objet d'une recommandation unanime de la part des membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre lors de l'étude de la Loi électorale fédérale.

Les membres du Comité souhaitaient que le gouvernement clarifie les règles régissant cette pratique qui peut permettre de contourner les dispositions déjà permissives de la Loi électorale au chapitre du financement des partis politiques. Eh bien, pas un traître mot; rien de ce que nous avons recommandé sur le sujet ne se retrouve dans le projet de loi sur lequel nous nous penchons aujourd'hui.

À quoi sert-il donc de procéder à une étude approfondie en prévision d'un projet de loi comme celui-ci, si le gouvernement n'en fait qu'à sa tête et ne retient de nos délibérations que les éléments qui font son affaire et sur lesquels il avait vraisemblablement déjà décidé de légiférer?

Est-ce à dire que les travaux des comités ne sont reconnus et que leurs recommandations ne sont retenues que s'ils répondent aux attentes du Cabinet?

Des sommes importantes peuvent être déposées, par le biais des fonds en fiducie, à la caisse électorale d'un candidat, sans qu'on puisse en identifier la provenance, ce qui contrevient directement à l'esprit et même à la lettre de la Loi électorale. Circonscrire, dans un cadre législatif, la provenance des fonds en fiducie d'un candidat aurait certes ajouté à la transparence du système électoral, pour reprendre un terme apparemment si cher à ce gouvernement. On a toutefois jugé bon de ne pas souscrire à une telle recommandation, et on peut se demander pourquoi.

Je dirai maintenant quelques mots sur le processus de nomination des officiers électoraux, un autre exemple de transparence pour le moins obscur.

 

. 1055 + -

Comment peut-on prétendre à un processus électoral transparent, alors que les directeurs de scrutin sont tous nommés par le gouverneur en conseil, c'est-à-dire par le parti au pouvoir?

Le Bloc québécois ne peut que déplorer la nature partisane de ces nominations qui n'a certainement pas sa raison d'être dans le cadre d'un exercice aussi démocratique que celui d'une élection.

Le gouvernement a préféré conserver ce levier d'intervention éminemment partisan qui l'avantage plutôt que de remettre le processus électoral entre les mains d'un personnel qualifié, neutre et objectif. Peut-on véritablement croire à l'impartialité d'un directeur de scrutin nommé par le parti au pouvoir? Dans plusieurs cas, on me permettra d'en douter. Et que dire des dispositions touchant l'intervention des tiers qui ne fixent une limite de dépenses que pour les frais engagés au chapitre de la publicité?

C'est en examinant des éléments comme ceux que j'ai évoqués précédemment que la formation politique dont je suis membre en est venue à considérer que les expressions «refonte» ou «révision en profondeur de la loi électorale» sont un peu surfaites. Il y a plus de trente ans qu'une refonte sérieuse de la loi électorale n'a pas été effectuée. Ce gouvernement, malgré les soi-disant principes d'équité, de transparence et d'accessibilité qu'il a prétendu mettre de l'avant, ne s'est livré à autre chose qu'à un exercice où il sert avant tout ses propres intérêts au détriment de ceux des électrices et des électeurs qu'il devrait pourtant servir.

Les députés ministériels ont manqué une bonne occasion de démontrer qu'ils avaient véritablement à coeur de démocratiser le processus électoral. Il nous semblait à nous, députés du Bloc québécois, qu'après trente années de pratique électorale sous cette législation, une réforme sérieuse pouvait et devait être entreprise. Après avoir vécu, en cette dernière année du millénaire, la gestion du régime libéral et les vingt-cinq bâillons qu'il a imposés seulement lors de la première session de la 36e législature, il serait utopique de croire que ce gouvernement ait véritablement eu l'intention de procéder à une réelle modernisation du système électoral.

Là-dessus, j'en profite pour formuler le souhait qu'en dépit du caractère un peu particulier du processus législatif dans lequel nous sommes engagés actuellement pour l'adoption du projet de loi C-2, le gouvernement saura véritablement être attentif aux préoccupations qui seront exprimées par les témoins qui comparaîtront devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, qu'il sera ouvert aux propositions d'amendements qui pourraient leur venir des différentes formations politiques présentes dans cette Chambre, et qu'il voudra véritablement faire de ce processus et de cette opération de refonte de la loi électorale fédérale, un processus voué à une véritable démocratisation du système électoral au Canada.

[Traduction]

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur le projet C-2, qui constitue la première refonte majeure de la Loi électorale du Canada depuis 1970. Les députés s'intéressent de près aux menus détails de ce projet de loi parce que c'est un des instruments clés régissant la politique en tant que sport et en tant que profession.

Je vais me servir du contexte pour mettre en relief l'importance du projet de loi. La plus grande différence entre nos règles électorales et celles en vigueur aux États-Unis est le fait que, au Canada, nous avons des limites de dépenses raisonnables pour les campagnes électorales. Aux États-Unis, les limites de dépenses sont astronomiques. Nous n'avons pas besoin d'être des milliardaires comme Donald Trump, Ross Perot, Steven Forbes ou Oprah Winfrey pour faire une campagne électorale au Canada, comme ce serait le cas aux États-Unis. En tant que représentants élus, nous n'avons pas à passer la majeure partie de notre temps à courtiser les comités d'action politique de divers groupes de lobbyistes qui ont le pouvoir de réunir des fonds pour nos campagnes électorales ou de dépenser des millions de dollars pour nous battre à cause d'un désaccord sur une question quelconque.

Il est vrai que nous voyons quelques américanismes faire leur apparition dans notre système sur une petite échelle. Si nous écoutions la National Citizens Coalition et le Parti réformiste, nous en aurions encore plus. Ils veulent des soins de santé à l'américaine et ils veulent un système politique à l'américaine pour les aider à atteindre ce but.

Soyons fiers de ce qui suit. Il en a coûté 22 millions de dollars US à Barbara Boxer pour se faire élire au Sénat en tant que représentante de la Californie. Hillary Clinton et Rudy Juliani dépenseront autant d'argent et même plus dans leur campagne pour occuper le siège vacant au Sénat pour représenter l'État de New York.

Par comparaison, je viens de recevoir une lettre du directeur général des élections du Canada, disant que la limite de dépenses dans ma circonscription pour les prochaines élections sera d'environ 61 000 $. Il suffira de quelques tournois de golf et de quelques repas-partage de plus auxquels participeront les centaines de partisans que nous avons dans mon district pour que nous puissions facilement réunir cette somme sur une période de quatre ans.

Nous avons ces limites de dépenses en partie parce que David Lewis et le NDP ont été assez prévoyants pour les exiger en retour de leur appui au gouvernement libéral minoritaire en 1974.

 

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Le financement à l'américaine des campagnes électorales ne permet pas à des hommes ordinaires comme vous et moi, ici, à la Chambre, de solliciter l'électorat. Les personnes désireuses de collaborer à titre bénévole aux campagnes électorales se transforment en des professionnels à plein temps dûment rémunérés, amenés à travailler 24 heures sur 24 et 12 mois sur 12. Les groupes de pression et les mouvements sociaux se trouvent réduits à acheter et vendre des votes, au lieu de s'employer à infléchir la politique officielle, forts des résultats de leurs travaux de recherche et du poids moral de leurs arguments.

Pour évaluer les modifications apportées à la loi électorale, on pourrait vérifier si telle ou telle disposition permet à l'homme de la rue de prendre part au système électoral; si c'est effectivement le cas, alors la disposition mérite d'être retenue.

On pourrait également se demander si cette disposition nous encourage à bien défendre l'intérêt des Canadiens, au lieu de nous faire perdre du temps à solliciter indéfiniment des financements auprès des différents groupes d'intérêts. Si c'est effectivement le cas, alors la disposition mérite notre aval.

La loi comporte beaucoup de modifications auxquelles le NPD souscrit. Nous sommes d'accord avec l'interdiction faite aux tiers d'entreprendre des dépenses de publicité électorale dépassant un certain montant et avec l'obligation qui leur est faite de divulguer l'origine des financements reçus. Nous sommes d'avis qu'une publicité électorale non contrôlée est susceptible de dénaturer le vote en faveur des groupes pouvant s'offrir des campagnes électorales coûteuses au détriment de la démocratie. À défaut de cette disposition, nous nous retrouverions avec les campagnes financées à l'américaine dont j'ai parlé tout à l'heure.

Nous sommes également d'accord avec l'application d'une période d'interdiction de diffusion des sondages électoraux pendant les 48 heures précédant la tenue d'un scrutin. Les résultats des sondages sont susceptibles d'être manipulés et les parties en cause doivent disposer de suffisamment de temps pour réagir officiellement aux résultats publiés, afin que la population puisse voter en connaissance de cause.

Nous sommes aussi d'accord pour modifier les heures d'ouverture des bureaux de vote en Saskatchewan. Je suppose que les gens du Canada central qui n'ont jamais entendu parler de ma province ne savent pas qu'on observe seulement l'heure normale du Canada toute l'année, mais à tout le moins nous ne voterons pas plus tard que la Colombie-Britannique, comme ce fut le cas lors de la dernière campagne électorale.

Nous adhérons aux changements qui n'ont pas pour effet d'entraîner systématiquement la radiation des partis enregistrés et, et par le fait même, la vente forcée de biens si un parti donné, au cours d'une élection, n'a pas pu soutenir un candidat dans au moins 50 circonscriptions.

Nous sommes tout à fait en faveur de l'augmentation des limites de crédits d'impôt au titre de contribution électorale. Voilà une politique de nature inclusive. Elle s'adresse à un plus grand nombre de gens et constitue le premier changement à cet égard depuis que le NPD a obtenu ces crédits dans le cadre d'une série de mesures visant à démocratiser les finances électorales au Canada. C'était en 1974, soit il y a 25 ans.

Autre changement positif: tous les candidats ont maintenant droit à la remise du dépôt de candidature de 1 000 $ une fois que le compte exposant les dépenses de campagne a été dûment produit auprès du Bureau du Directeur général des élections du Canada. Jusqu'à présent, il fallait obtenir 15 p. 100 des voix, sans quoi on perdait son dépôt.

Les agents officiers peuvent être congédiés et remplacés au besoin durant une campagne, et l'acte de candidature peut désormais être transmis par voie électronique ou par télécopieur. Mes collègues du Yukon, de Churchill River en Saskatchewan et de Churchill au Manitoba se réjouiront sûrement de ce changement, compte tenu que leurs circonscriptions sont plus grandes que la plupart des pays européens, mais bien entendu elles ne disposent pas de bonnes routes, et il en sera ainsi tant que nous n'aurons pas un programme routier national.

En ce qui concerne nos amis des villes, le droit accordé aux candidats et à leurs représentants de frapper aux portes de condos et d'appartements est renforcé.

Nous sommes également favorables aux modifications qui rendent plus facile, sur le plan administratif, la fusion des partis politiques. Malheureusement pour le chef de l'opposition, on ne peut pas lui rendre la chose politiquement plus facile, du moins pas dans le projet de loi.

Il y a cependant deux modifications auxquelles nous nous opposons, de même que plusieurs omissions criantes. Nous ne pouvons pas approuver l'élimination de ce qu'on appelle les «répondants ruraux». Les citadins ne connaissent souvent pas leurs voisins, c'est bien connu. Cependant, les gens qui vivent à la campagne se connaissent tous les uns les autres. Ils ont grandi ensemble, sont allés à l'école ensemble, ils cultivent leurs terres ensemble et font des affaires ensemble, et ils sont habituellement parents les uns avec les autres.

Si Georgina affirme que Kaye a été rayée de la liste parce qu'elle n'habite plus sur la ferme, tout le monde la croira sur parole car les choses sont comme ça. Certains peuvent mentir à un étranger, d'autres non, mais il est à peu près impossible de réussir à mentir à un scrutateur, à un greffier du scrutin et à trois ou quatre représentants de parti de votre village, car l'un ou l'autre d'entre eux sinon tous pourraient facilement vous prendre en défaut.

Les autorités électorales ontariennes ont utilisé la liste électorale permanente fédérale au lieu de procéder à leur propre recensement et ont annoncé comment procéder pour y faire apporter des modifications. Presque tous les électeurs de certaines sections de vote de Toronto avaient déménagé au cours des deux années suivant le dernier recensement. Nous constaterons sans doute la même chose la prochaine fois dans les circonscriptions des centre-ville, notamment celle de Vancouver-Est. Si nous ne prévoyons par un recensement obligatoire de certaines sections de vote dont les habitants sont très majoritairement des locataires, nous pourrions finir par nous trouver dans la situation régnant aux États-Unis où seuls les riches et les propriétaires parviennent à s'inscrire et à voter. Cela serait honteux, injuste et antidémocratique.

L'autre disposition que mon parti et moi ne pouvons approuver a trait aux directeurs de scrutin. Ils sont maintenant autorisés à voter, ce qui est acceptable, mais ils continuent d'être nommés par le gouvernement. Cet aspect est important, car ils détiennent ce poste jusqu'à leur mort ou jusqu'au changement des limites de la circonscription. Ces postes devraient être attribués après un concours fondé sur le principe du mérite. Un tout nouveau système de nomination au mérite constituerait un agréable changement à la Chambre des communes. C'est le seul moyen de maintenir la neutralité, tant en apparence qu'en réalité.

 

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Que manque-t-il dans ce projet de loi? Plusieurs questions, donc certaines très importantes pour le Nouveau Parti démocratique, ont été omises.

À notre récent congrès, nous avons adopté un document sur la réforme démocratique contenant plusieurs recommandations, dont la promotion d'une forme de représentation proportionnelle appropriée pour notre pays. Un système de représentation proportionnelle contribuerait à donner aux Canadiens le sentiment que la Chambre des communes leur appartient ainsi qu'à réduire les tensions régionales et à faire du Canada une démocratie plus équitable et plus dynamique—une autre suggestion rafraîchissante.

Le gouvernment et le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre ont décidé de ne pas examiner la possibilité d'une représentation proportionnelle ou RP, comme nous l'appelons, en dépit des arguments détaillés présentés par mon collègue, le député de Regina—Qu'Appelle, et du vif intérêt manifesté par les personnes présentes à la table. Étant donné le cynisme manifesté de nos jours à l'égard de la politique, c'est une grave omission.

Les gens ont l'impression que leur vote ne compte pas et que l'attribution des sièges au Parlement ne reflète pas fidèlement la répartition des suffrages exprimés. Un système modifié de représentation proportionnelle, où la plupart des sièges à la Chambre des communes serait toujours basée sur le nombre d'électeurs, mais où une partie des sièges serait attribuée sur une base régionale ou proportionnelle, contribuerait substantiellement à réduire ce déséquilibre. Une représentation proportionnelle permettrait de triompher de certains arguments opposés par certains défenseurs de ce corps antidémocratique et non élu qu'est le Sénat au sujet de la représentation régionale ou provinciale.

Nous aimerions aussi que soit examinée la question d'élections à date fixe. Notre parti et les délégués à notre congrès sont en faveur de cette idée. Cela éliminerait l'un des avantages qu'a l'un des partis politiques en place sur tous les autres partis politiques du pays.

Enfin, l'âge de voter n'a pas été baissé dans cette version de la loi. Les libéraux ont claironné l'arrivée de leur prétendu programme pour les enfants. Selon moi, il faut laisser les jeunes gens voter sur le programme pour les enfants. En fait, il serait intéressant de voir si les chefs des partis politiques iraient souvent faire campagne dans les écoles secondaires si ces élèves avaient le droit de voter.

Les jeunes gens sont jugés assez responsables pour conduire à l'âge de 16 ans. On peut les tenir responsables devant les tribunaux pour adultes des actes criminels violents qu'ils ont commis. Ils devront même s'accommoder des implications à long terme des décisions prises aujourd'hui par le Parlement.

Malheureusement, ils sont bien pris au sérieux par d'autres partis à la Chambre, dont certains offrent aux enfants un voyage gratuit en autobus, de la pizza et quelques boissons alcoolisées pour manquer l'école et venir défendre les couleurs du parti. Je crois que les jeunes se montreront à la hauteur de nos attentes et ne nous décevront pas.

Bon nombre de gens, dont le député de Kamloops, Thompson et Highland Valleys ainsi que les Jeunes néo-démocrates du Canada, le NPD de la Nouvelle-Écosse et de nombreuses autres organisations dans tout le pays, sont favorables à ce qu'on baisse à 16 ans l'âge de voter.

Enfin, nous aimerions qu'un point, qui a été soulevé par mon collègue de Palliser, soit réglé: il s'agit de l'utilisation, dans une publicité pour une campagne, de l'image d'une personne sans sa permission. Cela devrait être interdit. Nous allons nous attacher à ce que ce le soit.

Je suis heureux d'entendre le leader du gouvernement à la Chambre dire qu'il est prêt à collaborer sur ces questions. Cette semaine, nous célébrons la semaine des coopératives et je suis heureux de voir le leader du gouvernement à la Chambre dire qu'il collaborera avec tous les partis pour apporter des modifications à cette loi très importante.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Madame la Présidente, c'est avec grand plaisir que je prends la parole après mon collègue. Il a abordé un point très important, à savoir que, dans un dossier comme celui-ci, il devrait y avoir un certain degré de coopération.

Par ailleurs, je suis heureux de pouvoir parler, brièvement, du projet de loi C-2, anciennement C-83, qui doit remplacer la Loi électorale du Canada. Comme l'on dit plusieurs intervenants avant moi, c'est la première fois en 30 ans qu'on essaie de s'attaquer à ce problème. La manière dont ce pays élit ses représentants est la pierre angulaire de la démocratie. Il est important d'étudier de près toutes les répercussions de ces changements sur notre système.

Reprenant ce qui a été dit plus tôt, je souligne que, même si à première vue le projet de loi semble long et maladroit, cet essai représente un exercice très important puisqu'il nous donne l'occasion d'examiner certains de ces changements. Ce genre de mesure législative est nécessaire pour moderniser le libellé de la loi, y ajouter des dispositions nouvelles, et veiller à ce que, dans sa teneur, la loi tienne compte de l'évolution du paysage politique.

Selon Roger Gibbons, éminent spécialiste des sciences politiques et auteur très respecté, dans la plupart des cas, il n'y a pas grande gratification pour un gouvernement à modifier un système qui l'a servi, qui l'a porté au pouvoir. Je félicite donc le gouvernement d'avoir pris cette initiative hardie. Le temps nous dira si certains des changements proposés pour rendre le processus plus démocratique auront l'effet désiré.

Bien que la législation électorale canadienne soit encore très efficace sa leur forme actuelle, elle a besoin d'être modernisée. Elle touche directement tous les Canadiens, et pas uniquement les politiciens. Les électeurs, les bénévoles qui travaillent pour les partis politiques ainsi que les membres du personnel électoral ont tous un intérêt tout particulier dans ce que représente ce projet de loi.

Nous savons que le gouvernement actuel a été élu par tout juste 38 p. 100 de la population canadienne, lui donnant une majorité très précaire.

 

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Je n'ai pas l'intention de consacrer beaucoup de temps à revoir ce projet de loi ici à la Chambre puisqu'il sera transmis au comité où il sera étudié en profondeur. Toutefois, j'aimerais relever certains des éléments positifs ainsi que quelques-uns des problèmes qui préoccupent le parti conservateur.

Tout d'abord, nous sommes heureux de constater qu'on a de nouveau fixé le plafond des dépenses des tiers partis à 150 000 $, prévoyant un maximum de 3 000 $ pour chacun des candidats.

Le parti conservateur est également heureux de voir que des mesures ont été adoptées en vue de contrôler la publicité sur le réseau Internet. On ne peut ignorer les progrès technologiques accomplis au pays. Si le réseau Internet est maintenant reconnu comme un outil de communication extraordinaire pour des millions de Canadiens, il y a encore beaucoup à faire pour en réglementer l'utilisation. Il suffit de souligner le problème de la pornographie enfantine et d'autres émissions particulières sur Internet pour comprendre que c'est là un domaine qui doit être étudié de près. Les risques d'abus sont énormes.

Le projet de loi C-2 empêche l'ajout ou le retrait de quelque information que ce soit sur le site web électoral d'un parti politique après une certaine période d'interdiction qui varie de 48 à 72 heures. C'est là une mesure positive puisque quelqu'un pourrait autrement soulever la confusion juste avant la tenue d'une élection, ce qui doit être pris sérieusement en compte.

Tout comme dans le cas d'Internet, l'émergence de sondages comme important outil de communication est un autre élément dont on ne saurait faire abstraction. La diffusion de sondages peu de temps avant le jour des élections est une source constante de préoccupation et de frustration, tant pour l'électeur que pour l'électorat.

Par conséquent, je suis très heureux de constater que les dispositions du projet de loi prévoient qu'une personne ou une maison de sondage qui diffuse un sondage au cours d'une période de convocation des électeurs présente une analyse approfondie du sondage qui témoigne de la véracité, de l'importance et de l'exactitude des renseignements transmis. On peut seulement espérer que cette mesure réduira considérablement le nombre de sondages qui risquent d'être fondés sur des données inexactes ou insuffisantes. À mon avis, il est également important que les médias assument une plus grande responsabilité en exposant clairement les méthodes de sondage et la façon dont ils ont fait rapport des conclusions tirées à la suite du sondage.

Une autre modification très positive à laquelle on a fait allusion est le changement des heures de scrutin, notamment en Saskatchewan. Cependant, j'estime que cette mesure est aussi importante à Chicoutimi qu'à Antigonish ou partout ailleurs dans le pays.

Une disposition qu'il serait intéressant d'ajouter à la loi, mais qui n'est pas contenue dans le projet de loi C-2, serait d'exiger que le directeur général des élections avise le chef d'un parti politique de tout document non encore déposé par ses candidats. À mon avis, cette mesure serait conforme aux efforts visant à conduire toutes les opérations financières avec plus de transparence et d'ouverture.

Le Parti conservateur appuie l'initiative du directeur général des élections qui vise à fournir aux candidats une estimation des limites de dépenses dans leur circonscription respective. Une plus grande clarté et une meilleure compréhension des règles d'engagement sont extrêmement importantes pour la tenue d'élections efficaces, peu coûteuses et honnêtes. Il s'agit certes d'un outil utile aux candidats au moment où ils se préparent pour les élections.

Les dispositions financières forment une partie extrêmement importante du projet de loi C-2. On parle d'une meilleure imputabilité, d'une plus grande accessibilité, de transparence, et tous ces mots clés doivent avoir un sens.

Pour reprendre ce que disait l'orateur précédent, la population se montre très cynique envers le processus électoral et, par le fait même, envers la politique. Si nous nous attaquons à ce problème dès le début du processus qui permet aux députés de se présenter à Ottawa en tant que représentants du peuple, cela nous aidera peut-être à atténuer le cynisme que nous observons.

Le fait de divulguer les sommes qui sont versées aux divers partis permettra une analyse plus poussée. Certains craignent que cette mesure contribue à dissuader les donateurs. Il s'agit certes d'une question importante, d'un élément du problème que nous, du Parti conservateur, avons hâte d'étudier plus en profondeur en comité.

Il convient également d'examiner l'augmentation proposée de 100 $ à 200 $ du seuil, correspondant à un taux de 75 p. 100, prévu à l'égard du crédit d'impôt pour contributions politiques. La mesure législative prévoit la divulgation du nom des donateurs et de renseignements précis comme le lieu de leurs activités, leur adresse et leurs coordonnées. Cela pourrait en dissuader certains et, si nous voulons encourager les gens à participer financièrement, il faut pouvoir leur garantir une certaine confidentialité. Toutefois, ces questions seront analysées plus à fond en comité.

 

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Je pense aussi que le fait de rembourser le cautionnement de 1 000 $ encourage la participation au processus actuel, puisque c'est une condition à remplir pour pouvoir se porter candidat. La modification prévoyant le remboursement du cautionnement de 1 000 $ est donc importante.

À l'heure actuelle, la loi exige simplement qu'un nom soit fourni lorsqu'un don est fait. Pour mieux illustrer l'argument que je faisais tout à l'heure, je signale qu'en vertu du projet de loi C-2, il faudra désormais fournir des adresses aux fins de publication. Cela risque de soulever des difficultés pour ceux qui ne voudraient pas que ces renseignements soient rendus publics. Le comité se penchera sur cette question.

Un autre sujet qui préoccupe le Parti conservateur, et l'idée est assez vague, est la fusion de partis. Je n'entamerai pas le débat sur cette question aujourd'hui. Il en a été abondamment question à l'extérieur de la Chambre, dans un contexte différent, mais ce n'est pas un sujet sur lequel s'est arrêté le Parti conservateur.

À première vue, je comprends que cet article du projet de loi C-2 sur la fusion de partis exigerait simplement la signature des chefs des deux partis désireux de se fusionner. Personnellement, je sais que, dans un cas, cela ne se produira pas. Il y a ensuite une période d'attente de 30 jours.

Cependant, on peut se demander si la fusion serait annulée, si des élections étaient déclenchées. Les dispositions de ce projet de loi à l'égard de la fusion de partis ne sont donc pas très claires. Nous pourrions nous retrouver sur un terrain glissant si nous acceptions ces dispositions telles quelles.

L'autre chose que je tiens à dire, c'est que notre parti a des réserves sur le rôle des agents enregistrés ou vérificateurs. Le principe en est sûr, mais il est impérieux que le mandat associé à ce poste soit clarifié dans la loi. Comme le rôle d'agent enregistré ou de vérificateur s'accompagne de pouvoirs d'une portée considérable, il doit être clarifié.

Nous sommes aussi conscients de la gravité de la fraude électorale. Nous savons que celle-ci peut poser un problème. Il faut donc conférer à ces agents et vérificateurs le pouvoir de superviser les élections et le pouvoir d'agir clairement et vigoureusement. Toutefois, ces pouvoirs doivent être soigneusement examinés avant d'être établis.

On a mentionné, je crois, le cas particulier des répondants en régions rurales. Nous reconnaissons que, dans les collectivités rurales, il peut arriver qu'un voisin réponde d'un électeur, mais il faudrait que cela se fasse clairement, selon une certaine méthode peut-être.

Cela m'encourage de voir que le gouvernement reconnaît qu'il y a des modifications à apporter dans ce domaine pour que notre système électoral soit plus démocratique et fonctionne mieux. Je suis impatient de participer au débat qui aura lieu au comité et de voir comment le gouvernement réagira aux propositions qu'il recevra sans doute de tous les députés de l'opposition.

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir participer au débat sur la nouvelle loi électorale du Canada. Je présidais, l'an dernier, les travaux du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre lorsque nous avons fait une étude préliminaire de la question.

Certains députés de l'opposition ont déjà mentionné le caractère volumineux du projet de loi. En fait, c'est là une des pierres angulaires de notre démocratie. Nos dispositions législatives et Élections Canada sont un modèle pour le monde entier. Des étrangers viennent régulièrement à Ottawa pour voir comment nous faisons les choses.

En réalité, il y a 30 ans que cette importante loi n'a pas fait l'objet d'une révision exhaustive. Bien entendu, au fil des ans, on a apporté à la loi toutes sortes de modifications mineures pour tenir compte des progrès technologiques et des changements en matière de communications qui sont survenus d'un océan à l'autre, pour tenter de la moderniser et ainsi de suite.

Je suis particulièrement heureux que le gouvernement ait jugé bon de ne pas simplement améliorer certaines parties de cette loi très fondamentale et ait préféré proposer un projet de loi foncièrement nouveau. Le moment est tout indiqué pour le faire, vu les changements survenus au cours des trois dernières décennies.

Certains ont mentionné la façon dont on a procédé pour arriver à ce résultat. C'est une façon de procéder inhabituelle, et je conçois qu'elle puisse être difficile à comprendre pour certains députés de l'opposition.

 

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Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, qui est responsable ici de la Loi électorale du Canada, a mené une étude approfondie à ce sujet l'an dernier. Je recommande à tous les députés et à tous ceux qui suivent nos travaux à la télévision de lire le rapport issu de cette étude. J'en recommande la lecture non pas parce que le rapport répond à toutes les questions, non pas parce qu'il s'agit du document provisoire exhaustif dont le nouveau projet de loi s'est inspiré, mais parce qu'il présente le point de vue de tous les partis enregistrés, les parlementaires, les députés et autres personnes qui ont comparu devant le comité.

Le rapport en question ne dicte absolument pas la ligne de conduite à suivre. Il présente les aspects qui sont en jeu. Il expose les points de vue qui nous ont été présentés et indique si le comité est parvenu ou non à un consensus. Le rapport, qui a été précédé de très larges consultations auprès de la Chambre et ailleurs, fournit les éléments sur lesquels les rédacteurs du projet de loi se sont fondés. Ces données leur ont été d'une grande utilité.

Nous ne sommes pas partis de zéro au cours des consultations. Nous pouvions compter sur le travail de nos prédécesseurs depuis trente ans à la Chambre des communes, comme la commission Lortie dont le ministre a fait mention. Nous avons étudié les recommandations de la commission Lortie, dont un bon nombre ont été soigneusement mises en oeuvre, et les avons ajoutées au rapport du comité.

Nous avons étudié les recommandations du comité spécial de la Chambre qui s'est penché sur les questions électorales il y a seulement quelques années. Nous avons étudié ces recommandations, qui figurent en référence dans le rapport. Les rédacteurs se sont inspirés du travail de la commission Lortie, des recommandations du comité spécial de la Chambre et du cadre général établi en fonction des consultations tenues par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre de l'an dernier.

Maintenant, poursuivant le processus, le ministre veut que le projet de loi soit renvoyé directement au comité pour une étude plus poussée et des consultations non seulement auprès des députés, mais encore, comme d'habitude, auprès du public d'un bout à l'autre du pays. D'autres points de vue seront recueillis. Je félicite le ministre à cet égard. Je pense que c'est un acte très courageux et approprié que de renvoyer le projet de loi au comité pour qu'il puisse être débattu par tous les députés.

Le ministre et un certain nombre de députés des partis de l'opposition ont exprimé leurs points de vue. Ces derniers formulent des critiques évidemment, mais ce sont des critiques constructives.

Étant donné qu'il s'agit d'un document très épais, je voudrais signaler les problèmes que ce projet de loi essaie de régler. Ce faisant, je sous-estime le projet de loi, d'une certaine façon. Ce n'est pas une mesure qui apporte simplement des corrections mineures à la loi. C'est une mesure qui reformule la loi pour la faire correspondre à l'ère moderne. Quoi qu'il en soit, je vais mentionner certains points précis.

Permettez-moi de vous donner des exemples de la façon dont les gens, en tant qu'électeurs, vont profiter de cette mesure législative. Les électeurs canadiens temporairement absents du pays seront en mesure de remettre leur bulletin à des ambassades et consulats. Cette mesure n'a pas été révisée depuis 30 ans. Il y a 30 ans, il aurait été très difficile d'administrer un tel système. Nous pouvons très bien imaginer les employés d'ambassades éloignées essayant de faire parvenir au Canada un vote valide. Cela aurait pu être très difficile et aurait pu retarder le processus. Nous avons maintenant besoin d'un procédé plus facile, afin que cela puisse se faire.

Le ministre a parlé des affiches dans les immeubles d'habitation. Nous savons que nous pouvons faire du porte-à-porte dans les immeubles qui sont comme de petites collectivités dans certaines de nos villes. Les gens vivent dans ces collectivités. Ils parcourent les couloirs, prennent les ascenseurs, etc. En ce qui concerne les affiches des partis politiques, la loi prévoyait des dispositions différentes pour ces immeubles. La réalité moderne veut que beaucoup d'entre nous vivent dans des immeubles d'habitation. Il convient tout à fait que ceux d'entre nous qui vivent dans ces immeubles aient la même chance d'afficher leurs couleurs que les gens qui vivent dans des maisons unifamiliales.

Si les députés réfléchissent aux changements survenus au cours des 30 dernières années, ils pensent au rôle des sondages. Ils font maintenant partie de notre quotidien comme tant d'autres choses. Nous aimerions peut-être revenir en arrière, à l'époque où les sondages n'existaient pas, mais c'est maintenant une réalité et il faut s'y faire. Il est possible de rejoindre un échantillon de milliers de personnes en très peu de temps et de diffuser très rapidement à la télévision les résultats de ce sondage. On reconnaît maintenant cela dans la mesure législative.

 

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Le projet de loi n'interdit pas les sondages ou quoi que ce soit de ce genre. Il précise notamment que, durant une campagne électorale, lorsque le premier sondage est publié, la première fois qu'on le mentionne durant la campagne, on devra préciser à la population la méthodologie utilisée, c'est-à-dire la façon exacte dont le sondage a été effectué. Nous saurons s'il s'agit d'un sondage informel, fait par un vendeur de hamburgers «bleus» ou «rouges» ou d'un sondage fait à partir d'un échantillon représentatif de personnes de toutes les régions, de tous les âges et de tous les groupes de revenus et le reste. Je crois que cela est tout à fait indiqué aujourd'hui et qu'il importe que la population soit informée de la méthodologie des sondages. Lorsqu'un sondage paraîtra pour la première fois lors d'une campagne électorale, la méthodologie devra être décrite pour nous permettre de juger de la fiabilité de ses résultats.

Par ailleurs, puisqu'il y a tant d'information et qu'il est si facile de la produire, il est tout à fait indiqué que le projet de loi prévoie la divulgation de renseignements plus complets sur les partis enregistrés, leurs positions et leur organisation ainsi que sur les candidats, qu'ils se présentent pour défendre les grands enjeux des partis ou des dossiers locaux. Il serait aussi normal que l'on ait plus d'information sur ce que nous appelons les tiers.

Les tiers sont des groupes qui ne sont pas enregistrés dans une campagne électorale et ne présentent pas de candidats, mais qui veulent se prononcer sur certains enjeux particuliers de la campagne. Ils veulent pouvoir faire de la publicité sur certains sujets dans certaines circonscriptions. Cela est tout à fait légitime. Si leurs activités sont normales, nous devons savoir qui sont ces gens et d'où ils viennent. Le projet de loi limiterait leurs dépenses et exigerait de ces gens la divulgation des mêmes renseignements que ce qui est exigé des candidats et des partis. Dans ce cas, ce serait 3 000 $ par circonscription.

Il s'agit d'un projet de loi capital. Jusqu'à maintenant, le processus a été juste, positif et ouvert. Je crois que, lorsqu'il arrivera devant le comité, ce projet de loi suscitera beaucoup d'intérêt et de débats parmi les membres. J'attends les discussions avec impatience. Cela étant dit, j'exhorte tous les députés à faire diligence pour que, au bout du processus, nous ayons une Loi électorale encore plus forte.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Madame la Présidente, je dois avouer que c'est un de ces jours où ça me rend malade de siéger au Parlement. Je trouve révoltant et inconcevable que le gouvernement apporte, dans son propre intérêt, des limites à la liberté de parole, comme il le fait aujourd'hui.

L'idée qu'un parti au pouvoir puisse chercher à empêcher quelqu'un ou un groupe de comptabiliser pleinement les moyens de propagande que le gouvernement emploie durant une campagne électorale, ça me dégoûte rien que d'y penser. Le gouvernement exploite abusivement sa publicité. Il s'est lancé dans toutes sortes d'activités partisanes et je pourrais en citer un grand nombre, mais je pense que cela n'est pas nécessaire. La population canadienne les connaît parfaitement.

Je n'arrive pas à comprendre comment on pourrait permettre à un gouvernement d'utiliser l'argent des contribuables pour se faire réélire. À mon avis, ce n'est pas correct.

 

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Les citoyens devraient pouvoir faire respecter les dispositions voulues en déposant des plaintes auprès d'Élections Canada afin d'empêcher les gouvernements d'utiliser de la sorte l'argent des contribuables.

J'aimerais également toucher un mot sur le favoritisme en général. Élections Canada, en tant qu'instrument de démocratie, est un organisme rempli de gens que le gouvernement a choisis afin qu'ils soient à sa disposition durant les élections. Je pense qu'on ne peut pas trouver de meilleur exemple de favoritisme au sein de l'appareil gouvernemental. Les autres pays auraient intérêt à ne jamais imiter ce comportement.

En ce qui concerne le plafond de dépenses, les tribunaux de l'Alberta, dans deux affaires distinctes, ont déclaré inconstitutionnelle la fixation d'un plafond de dépenses. Il n'appartient pas au gouvernement de restreindre le droit d'un Canadien ou un groupe de Canadiens de dépenser l'argent qui lui ou leur appartient à l'appui d'une idée. Il y a un dicton qui dit que rien n'est plus important qu'une idée lorsqu'elle est mûre, pourtant vous pouvez être sûrs que le gouvernement fera tout son possible pour empêcher qu'elle aboutisse.

Pour vous citer un exemple: l'idée de l'Accord de Charlottetown, Ces gens qui traitent les autres d'ennemis du Canada ont dépensé treize fois plus que le parti de l'autre côté et pourtant, c'est la voix des électeurs qui l'a emporté.

Le plafond des dépenses ne sert en réalité que les intérêts du parti au pouvoir. Je reviendra sur ce point tout à l'heure.

En ce qui concerne le statut de parti enregistré, un tribunal de l'Ontario a infirmé en mars certaines conditions qui obligeraient un parti à soutenir un candidat dans au moins cinquante circonscriptions pour que ses candidats soient inscrits sous le nom du parti sur le bulletin de vote. Pour quelle raison deux candidats ou plus ne sont-ils pas suffisants pour se voir accorder le statut de parti politique? Voici pourquoi. C'est parce que le parti au pouvoir de l'autre côté aime les grands partis.

Les libéraux estiment qu'on ne peut pas commencer avec un petit nombre puis s'agrandir et ils n'aiment pas la concurrence. C'est la raison pour laquelle le gouvernement au pouvoir a introduit ces règles. Il va jusqu'à exiger la liquidation des actifs d'un parti qui n'a pas soutenu un candidat dans au moins cinquante circonscriptions et l'envoi de la somme en question au receveur général. Comment ose-t-il faire une chose pareille? Pourquoi le gouvernement ne laisse-t-il pas aux électeurs le soin de décider à sa place par qui ils veulent être représentés?

Il ne faut y voir qu'une tentative manifeste de réprimer la formation et la croissance de nouveaux partis et de limiter la concurrence sur le bulletin de vote. Dans d'autres pays où s'applique la représentation proportionnelle, le bulletin de vote offre un choix de 35 partis ou plus. Toutefois, les libéraux, les membres du parti au pouvoir se trouvant en face, disent par cette mesure législative aux Canadiens qu'ils sont trop stupides pour faire le même genre de distinctions sur le bulletin de vote. C'est exactement ce que disent les libéraux en présentant cette mesure législative.

Un petit point a aussi été abordé par un autre député, soit la fusion des partis. Cette mesure législative interdira aux partis de s'entendre localement et de ne présenter qu'un candidat. Elle centralise plutôt les pouvoirs et exige la signature des dirigeants de parti pour qu'il soit possible de procéder à une fusion locale. Elle repousse les notions de décisions locales et d'autodétermination locale.

En ce qui concerne l'identification des électeurs, un fonctionnaire électoral peut actuellement demander une preuve d'identité, mais un électeur a le droit de prêter serment au lieu de fournir cette preuve. Imaginez le scénario étrange qui pourrait avoir cours dans notre pays où un ami sans abri du premier ministre peut se présenter à un bureau de scrutin et déclarer «Je ne possède pas de preuve de mon droit de vote ou de preuve de résidence.» «Quel est votre nom, monsieur?» «John Croûton.» «Où habitez-vous, monsieur?» «Au 24, promenade Sucks Us, à Ottawa, Ontario.» Cette personne pourrait avoir le droit de voter. C'est une parodie de notre démocratie.

Ce genre d'abus pourrait avoir cours dans nos bureaux de scrutin. Une pièce d'identité pourrait être présentée pour établir l'admissibilité et le lieu de résidence. Ce n'est là qu'une question d'équité. Cette mesure justifie notre droit de vote et lui confère une certaine validité.

 

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J'aborderai maintenant la question du subventionnement par les contribuables. Nous devrions nous opposer à toute forme d'aide aux partis et aux groupes de pression politiques à même les deniers publics. On ne devrait pas s'attendre à ce que les contribuables financent des activités ayant pour objet de leur dire comment voter. Aucun remboursement ne devrait être accordé pour ce genre d'activités.

En ce qui concerne les élections partielles, le projet de loi prévoit à l'heure actuelle qu'elles doivent être déclenchées, et non avoir lieu, dans un délai de six mois. La distinction tient dans le fait que cette mesure permet au parti au pouvoir de fixer la date de la tenue des élections partielles selon son bon vouloir, ce dont il ne se prive absolument pas. Avec les nouvelles listes électorales informatisées, la tenue d'élections dans un délai de six mois ne pose plus de problèmes, et cela s'est même déjà fait.

Je vais citer quelques sources différentes qui, je crois, appuient de façon éloquente certaines des choses que j'ai dites aujourd'hui au sujet de ce qu'on en train de faire à notre loi électorale et à notre démocratie.

Dave Rutherford, chroniqueur et animateur d'une émission radiophonique en Alberta, a signalé qu'un de nos anciens premiers ministres a déjà dit durant une campagne électorale que ce n'était pas le moment de discuter de questions complexes ni l'endroit pour le faire. La personne qui tient ce genre de propos est probablement le genre de personne qui veut faire adopter des mesures législatives visant à limiter la liberté de parole et la concurrence sur le bulletin de vote. Je n'en doute pas un seul instant.

Ces gens veulent contrôler le processus électoral. Ils veulent s'assurer que les partis politiques, en particulier le parti ministériel, peuvent contrôler le déroulement des élections.

Malheureusement, je remarque qu'il ne me reste qu'une minute. Je veux parler brièvement du genre de subventions qui existent et de ceux qui en profitent.

Le fait est que les libéraux avaient une limite de dépenses de plus de 30 millions de dollars en 1997, mais que, quelle surprise, 22 millions provenaient des contribuables canadiens sous forme de subventions directes et indirectes comme le crédit d'impôt pour contributions politiques et ainsi de suite.

À mon avis, c'est inacceptable. Les gens devraient faire ce qu'ils peuvent pour s'opposer à cette mesure législative. J'exhorte ceux qui seraient prêts à la contester devant les tribunaux à bien vouloir le faire. Même si des mesures législatives de ce genre ont été présentées par Trudeau en 1983, par les conservateurs lorsqu'ils étaient au pouvoir et par un gouvernement néo-démocrate en Colombie-Britannique, j'espère que cette mesure sera encore une fois jugée anticonstitutionnelle par les tribunaux de notre pays.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Madame la Présidente, c'est toujours un honneur de participer à un débat aussi important que celui d'aujourd'hui.

La grande majorité des mesures proposées dans le projet de loi découlent de consultations très longues, étendues et laborieuses. Il s'agit aujourd'hui de renvoyer à un comité avant la deuxième lecture ce projet de loi destiné à devenir la nouvelle Loi électorale du Canada. Les résultats des consultations ont été étudiés minutieusement par le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Les modifications proposées à la Loi électorale du Canada découlent directement de cette analyse qui a été faite par des représentants de tous les partis.

Notre première responsabilité de parlementaires est donc d'apporter ces améliorations à la loi et de doter le Canada d'une loi électorale bien adaptée à la société d'aujourd'hui et surtout à celle de demain. N'oublions pas que la nouvelle loi que nous adopterons régira l'élection du tout premier gouvernement du prochain millénaire.

Notre deuxième responsabilité, non moins importante, tant s'en faut, est de maintenir le rôle prédominant que joue le Canada aux yeux du monde entier en matière de démocratie. Les grandes qualités de notre régime démocratique sont connues et reconnues de par le monde. Dans ce domaine comme dans d'autres, le Canada a été un modèle, un modèle acclamé chez nous et à l'étranger.

 

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Si la réputation de notre démocratie n'est plus à faire, nous devons toutefois nous efforcer de la maintenir. Tout notre régime démocratique, dans son sens le plus noble et le plus complet, repose d'abord et avant tout sur notre processus électoral, celui-là même qu'il nous incombe maintenant de parfaire. Nous devons améliorer le processus en visant encore et toujours la perfection tout en sachant qu'elle restera toujours inaccessible.

Malgré notre meilleure volonté collective, en tant que députés solidaires d'une même cause, celle de servir la population canadienne, il y aura toujours des circonstances nouvelles, des situations particulières, des écueils imprévus et des obstacles. La simple évolution naturelle des sociétés, décuplée par l'explosion technologique, nous oblige à faire des révisions périodiques.

Les modifications dont nous sommes saisis restent fidèles aux trois grandes qualités qui caractérisent la loi actuelle: équité, transparence et accessibilité. Les modifications touchent principalement trois aspects bien distincts: des rajustements d'ordre administratif, les interdits de publication et les dépenses des tierces parties en période électorale.

Sur ce dernier point, les tribunaux ont jugé certains aspects de la loi trop restrictifs et incompatibles avec la Charte canadienne des droits et libertés. Mais, en réglant un problème, cette décision en a créé un autre: les partis officiels et les candidats doivent respecter des règles strictes en matière de dépenses, mais les tierces parties en sont exemptes. Cela nous semble foncièrement injuste.

Étant donné le solide appui dont la réglementation des dépenses électorales jouit dans l'opinion, surtout lorsque nous voyons ce qui se passe aux États-Unis, où seuls les riches peuvent se porter candidats, et vu le soutien public qui s'est manifesté pour la réglementation s'étende aux tierces parties pour que les règles soient équitables pour tout le monde, il est proposé dans le projet de loi C-2 de relever le plafond des dépenses des tierces parties à 150 000 $ à l'échelle nationale et à 3 000 $ par circonscription.

Le deuxième élément majeur du projet de loi est celui des interdits de publication, qui ont également été contestés devant les tribunaux. Les règlements concernant la publicité partisane et la publication des sondages d'opinion ont alimenté diverses causes devant les tribunaux. Là encore, dans un souci d'équité, mais aussi d'accessibilité, les nouvelles mesures suggèrent de limiter les interdits aux 48 heures précédant le scrutin et de rendre obligatoire la divulgation de la méthodologie utilisée dans les sondages d'opinion, en même temps que leurs résultats.

Comme je l'ai dit, le premier élément d'importance du projet de loi concerne divers changements d'ordre essentiellement administratif. Ici plus que partout ailleurs, les trois grands principes d'équité, de transparence et d'accessibilité s'imposent et se manifestent.

Nous avions dans un premier temps réglé le problème que posent les différents fuseaux horaires en ce qui concerne la publication des résultats et la fermeture des bureaux de scrutin. Nous avions cependant omis le cas particulier de la Saskatchewan qui, pendant l'été, n'adopte pas l'heure avancée comme le font les autres provinces de l'Ouest. Le projet de loi propose une solution.

Une autre injustice a été remarquée dans la loi en vigueur: les directeurs de scrutin n'ont pas le droit de vote sauf s'il y a égalité des voix, ce qui ne paraît pas très conforme aux dispositions de la Charte des droits et des libertés. Le projet de loi leur accordera donc le droit de voter comme à tous les autres Canadiens. En cas d'égalité, il y aurait simplement un autre scrutin.

Un troisième élément, enfin, tient compte de la concentration urbaine. Les immeubles à logements multiples, les appartements en copropriété et les foyers pour personnes âgées se multiplient dans certaines villes et un nombre croissant d'électeurs y habitent. Nous proposons donc, dans le projet de loi C-2, d'autoriser les candidats à y faire campagne, et les locataires ou propriétaires, selon le cas, à y mettre des affiches électorales.

D'après mon expérience, il arrive que des conseils d'administration prennent des règlements interdisant toute activité de campagne dans leurs immeubles et fassent appel à des gardiens de sécurité pour faire respecter ces règlements. J'ai été mêlée à une situation où un garde a été congédié parce qu'il a laissé entrer des personnes pour faire campagne.

Notre loi électorale actuelle est un outil exceptionnel, d'une efficacité remarquable, qui a bien servi la population pendant de longues années. Bien d'autres pays voudraient pouvoir en dire autant. Il n'en reste pas moins que, comme bien d'autres lois, elle a besoin de révisions périodiques. Certaines de ces dispositions ont été adoptées il y a une trentaine d'années.

Je le répète, les modifications à l'étude reposent sur une analyse approfondie de la situation effectuée au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, et je crois que tous conviendront que cette analyse s'est faite à l'abri de tout sectarisme. Elle a abouti à un certain nombre de propositions et, dans certains cas, à des conclusions insérées dans un rapport quasi unanime. C'est à partir de ce rapport que le gouvernement a élaboré les nouvelles mesures proposées ici, destinées à améliorer la Loi électorale du Canada.

Pour ma part, j'estime que ces nouvelles mesures atteindront leur objectif. Je suis persuadé que, à moyen et à long terme, ces nouvelles dispositions amélioreront encore la qualité de notre système démocratique.

 

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C'est là l'enjeu majeur d'une nouvelle loi électorale: consolider le respect démocratique des droits et libertés des citoyens et permettre à ces derniers de choisir en toute liberté ceux qui les représenteront, défendront leurs droits et, en définitive, assureront leur qualité de vie. Sans la moindre hésitation, j'invite la Chambre à adopter l'ensemble du projet de loi.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Madame la Présidente, au Canada, après la Loi constitutionnelle, la Loi concernant l'élection des députés à la Chambre des communes est sans conteste la clé de voûte de notre démocratie.

En effet, cette loi, qui encadre tout le processus électoral, vise à assurer le respect des règles démocratiques pour que la Chambre des communes reflète avec la plus grande fidélité la volonté exprimée par les électeurs et les électrices.

Cette loi n'avait pas été revue en profondeur depuis plus de 30 ans. L'exercice s'imposait, et on aurait pu s'attendre à ce que le projet de loi C-2 prenne franchement le parti de la transparence. Pourtant, à la lecture, nous sommes obligés de reconnaître que pour ce gouvernement, il y a loin de la coupe aux lèvres. La transparence est encore voilée; je dirais même qu'elle a bien au moins sept voiles.

L'actuel projet de loi électorale compte 577 articles. Pour faire l'analyse initiale des quelque 250 pages de texte, avant que le projet de loi C-2 ne soit acheminé au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, les 301 parlementaires disposeront en tout et pour tout de 180 minutes: trois heures de débat. C'est un droit de parole accordé à tout juste 6 p. 100 des élus. Quand on sait que sur 18 droits de parole, neuf sont accordés au parti ministériel, il reste le même nombre aux quatre partis d'opposition.

Déjà, le choix de cette règle, d'ailleurs tout à fait parlementaire, peut donner à penser que le gouvernement ne semble pas trop enclin à entendre ce que l'opposition pourrait avoir à dire sur le sujet.

Au cours des quelques minutes qui me sont allouées, je voudrais attirer particulièrement l'attention sur deux sujets qui nous apparaissent majeurs mais qui brillent surtout par leur absence: le financement démocratique des partis politiques et le mode de nomination des directeurs de scrutin.

Depuis plus de 20 ans, le Québec peut, à juste titre, s'enorgueillir d'avoir eu le courage d'assainir les finances des partis politiques en attribuant exclusivement aux seuls électeurs et électrices le droit de contribuer à titre personnel aux caisses électorales.

La limite de contribution est fixée à 3 000 $ par personne ayant le statut d'électeur. En application depuis plus de 20 ans, la loi québécoise a fait ses preuves et nous regrettons que le projet de loi C-2 ne démontre aucune velléité d'aller dans le même sens.

Pourtant il ne se passe pas de mois sans que des événements puissent nous donner à penser que peut-être le poids des contributeurs à la caisse électorale ministérielle est directement proportionnel au montant du chèque. Est-ce par hasard que le ministre des Transports a de bonnes relations avec le président d'Onex? La question est posée; à vous d'émettre des hypothèses.

Il est clair que le projet de loi devant nous aujourd'hui ne peut contribuer à augmenter la confiance de la population à l'endroit des partis politiques. Le vieil adage «Au plus fort la poche» n'a malheureusement pas fini d'avoir tout son sens.

Tant et aussi longtemps que les corporations, les petites comme les grosses, pourront, tout à loisir, alourdir le pécule des caisses électorales sans aucun contrôle, la démocratie sera en danger.

Pour un pays qui se veut et qui se vante d'avoir toutes les qualités, le mode de financement fédéral maintenu dans ce projet de loi est un accroc évident à la démocratie.

 

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Dans quelque 75 jours, nous serons dans le troisième millénaire. Comment ne pas regretter que ce gouvernement choisisse le statu quo plutôt que de prendre clairement le virage de la transparence? Non seulement la perception qu'ont M. et Mme Tout-le-Monde des élus s'en trouverait-elle améliorée, mais plus important encore, la démocratie ressortirait grandie d'une législation reconnaissant l'impérative nécessité de remettre à l'électeur, et à lui seul, la responsabilité de la vitalité des partis politiques.

Le deuxième sujet sur lequel je veux attirer votre attention est celui de la sélection des directeurs de scrutin.

Loin de moi l'idée d'émettre un quelconque doute sur la capacité du gouverneur en conseil à émettre des recommandations valables à ce chapitre. D'ailleurs, le nombre de nominations de tous ordres qui relève de sa compétence doit vraiment l'occuper à plein temps. Pourtant, le fait que les nominations des directeurs de scrutin soient perçues comme des nominations politiques porte en soi le germe d'un doute sur l'impartialité de ces nominations.

Le rôle de directeur de scrutin est majeur dans tout le processus électoral. Il est responsable d'appliquer la loi et de trancher en situation de conflit. Une décision, on le sait, peut satisfaire les uns et être décriée par les autres. Jusqu'à quel point est-il sage de maintenir un système de nominations discutable plutôt que de le confier à un comité qui étudierait des candidatures retenues par voie de concours?

Un candidat défait lors d'une élection fédérale antérieure pourrait-il décrocher la fonction de directeur de scrutin? Des nominations aussi étonnantes se sont déjà produites avec le mode actuel de sélection. Il n'est pas déraisonnable de croire qu'un comité choisirait parmi les candidats celui ou celle qui répondrait le mieux aux exigences de compétence et d'impartialité. Et si, par hasard, un ex-candidat bloquiste devenait directeur de scrutin, les chances sont grandes qu'il soit un excellent directeur de scrutin.

Le gouvernement avait là encore le choix de la transparence. Il a encore une fois choisi le statu quo. C'est un choix que nous déplorons.

Au XVIIIe siècle, Montesquieu écrivait: «L'amour de la démocratie est celui de l'égalité». Le Canada est un pays démocratique, mais la démocratie est aussi fragile que la porcelaine, et c'est aux législateurs qu'il appartient de la protéger. Il faut non seulement la protéger, il faut l'améliorer.

Le projet de loi C-2, en maintenant notamment les règles actuelles de financement des partis politiques et de nomination des directeurs de scrutin, nous confirme dans l'idée que le discours sur la démocratie tenu par le gouvernement n'a pas de corollaire obligé sur l'amour de l'égalité.

Nous le regrettons vivement, et avec Châteaubriand, un parlementaire lui aussi, nous sommes bien obligés de reconnaître que ce projet de loi ne répond pas à nos attentes légitimes, et je le cite: «Quels que soient les efforts de la démocratie pour rehausser ses moeurs par le grand but qu'elle se propose, ses habitudes abaissent ses moeurs.»

Dommage que les habitudes démocratiques du Parti libéral, au lieu de rehausser les moeurs de la démocratie canadienne, visent à les abaisser sans aucun remords.

[Traduction]

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Madame la Présidente, je suis heureux d'avoir l'occasion de parler aujourd'hui du projet de loi C-2, modifiant la Loi électorale. Mon intervention sera un peu différente de certaines de celles que nous avons déjà entendues et qui, je m'empresse de le dire, ont toutes été très intéressantes.

 

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Je vais aborder des points très précis. Je tiens à dire clairement que je ne parle pas nécessairement pour faire valoir des éléments de la politique du Nouveau Parti démocratique, mais plutôt des principes adoptés dans un certain nombre de nos sections. Je sais que ces principes sont partagés par plusieurs sections d'autres partis, notamment les sections jeunesse. Je veux parler en particulier de l'article 3 du projet de loi électorale qui stipule que la qualité d'électeur est reconnue à toute personne qui, le jour du scrutin, est citoyen canadien et a atteint l'âge de dix-huit ans.

À l'aube du XXIe siècle, nous entendons les partis politiques parler de plus en plus des préoccupations des jeunes. À en juger par l'évolution de la société et de l'économie, ils sont assurés d'un bel avenir. Les membres de la jeune génération seront appelés à assumer des rôles importants de direction très rapidement et dès un très jeune âge.

Nous devrions écouter les paroles du leader du gouvernement à la Chambre qui disait aujourd'hui que nous devrions tâcher d'améliorer cette loi dans l'intérêt de tous les Canadiens. Voici la première fois depuis près de 30 ans que nous avons l'occasion d'effectuer une révision importante de la loi; nous devrions donc songer à réduire l'âge de voter, de 18 ans qu'il est actuellement, à 16 ans.

Comme moi, la plupart des députés passent probablement beaucoup de temps à visiter les écoles secondaires et à parler aux jeunes. S'il est une chose qui ressort clairement, c'est que les jeunes d'aujourd'hui sont très informés, très sérieux et très travailleurs. Il ne nous arrive pas souvent d'entendre parler d'eux. Par contre, nous entendons beaucoup parler d'une petite minorité. Je pense cependant que la plupart des jeunes d'aujourd'hui sont brillants, travailleurs et très sérieux dans leurs études.

Il est évident qu'ils sont parfaitement au fait de l'actualité politique, économique et sociale. Lorsqu'il s'agit d'élections, je ne crains pas d'affirmer dans certains cas qu'un grand nombre de jeunes Canadiens âgés de 16 ou 17 ans sont probablement mieux informés que leurs parents sur certains sujets.

Je me demande s'il ne serait pas approprié aujourd'hui, pour les parlementaires que nous sommes, d'oser prendre une décision en ce sens, comme d'autres avant nous ont osé octroyer aux femmes le droit de vote, et cela en dépit de l'incroyable tollé que le projet avait suscité à l'époque. Évidemment, cela fait aujourd'hui partie de nos moeurs et penser autrement serait de la pure hérésie. Il y a quelques années de cela, on a envisagé de reconnaître le droit de vote aux peuples des premières nations. Quand on pense que le Canada n'a pas autorisé ces populations à voter aux élections générales de 1960, on en reste cois.

J'estime que nous devrions aujourd'hui donner aux jeunes de 16 et 17 ans la possibilité de prendre part au processus électoral.

L'article 215 de Code criminel dispose que toute personne est légalement tenue, en qualité de père ou mère, de parent nourricier, de tuteur ou de chef de famille, de fournir les choses nécessaires à l'existence d'un enfant de moins de seize ans.

Beaucoup de choses changent dès qu'un individu atteint l'âge de 16 ans. Ainsi, à 16 ans, un jeune peut conduire sur les autoroutes du pays, quel que soit le véhicule. Il peut intégrer les forces armées. Ils peuvent être traduits devant les tribunaux pour adultes de notre système de justice. Ils peuvent utiliser une arme à feu pour aller chasser. Ils peuvent quitter l'école, s'ils le désirent. Ils ne relèvent plus de la responsabilité légale de leurs parents. Ils ont le droit de se marier et d'avoir des enfants. Ils sont admissibles à l'assistance sociale. Pourtant, ils ne peuvent pas prendre part aux opérations électorales du Canada.

Ils n'ont pas le droit de voter. Ils peuvent aller chasser, conduire une automobile, se marier et entrer dans les forces armées, mais on ne donne pas aux jeunes gens qui le souhaitent la possibilité de voter pour le parti ou pour les orientations politiques de leur choix. N'empêche que les jeunes de 16 ou 17 ans sont ceux qui, dans notre société, ont le plus à gagner ou à perdre en conséquence des politiques présentées par les partis et les gouvernements.

Examinons ce que cela donne dans d'autres pays qui ont donné le droit de vote aux jeunes de 16 et 17 ans. Certains pays disent depuis des années qu'ils souhaitent que les jeunes participent, qu'ils soient parties prenantes, aux opérations électorales. Chez nous, c'est vrai dans certains cas. Les jeunes gens de 16 et 17 ans peuvent se joindre à un parti politique et en élire le chef. Ils peuvent participer au recensement en période électorale. Ils peuvent contribuer à l'élaboration de l'orientation du parti, chez les néo-démocrates, les réformistes, les conservateurs et les libéraux. Ils peuvent choisir les chefs, élaborer les politiques et participer au processus électoral, mais ils ne peuvent pas voter. Il semble y avoir un certain manque de logique là-dedans; notre position est légèrement hypocrite quand nous disons aux jeunes que, oui, nous voulons les faire participer au processus électoral de notre pays, nous voulons qu'ils y prennent part, mais le jour du scrutin, nous ne leur permettront pas de voter.

 

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Aujourd'hui, nous avons, en tant que députés, une occasion que nous n'avons pas eue depuis longtemps. Nous pouvons dire aux jeunes que, non seulement nous voulons qu'ils prennent part au processus électoral et qu'ils façonnent l'avenir du pays, mais nous voulons aussi qu'ils puissent voter le jour du scrutin, et pour ce faire, nous devons ramener l'âge électoral de 18 à 16 ans. Avec cette mesure, nous rajouterions presque 700 000 jeunes électeurs sur les listes. Comme leurs parents, ils n'auraient probablement pas tous envie de voter. De nos jours, il y a beaucoup d'adultes qui ne votent pas, mais c'est quand même la majorité qui se rend aux urnes.

Il y a des pays qui ont donné le droit de vote aux jeunes. Il y a plusieurs années, le Brésil a décidé de permettre aux jeunes de 16 et 17 ans de participer au processus électoral. Beaucoup d'opposants disaient qu'ils ne s'intéresseraient pas à la politique et qu'ils ne participeraient pas, etc. La réalité fut tout autre. Au Brésil, le taux de participation chez les électeurs de 16 et 17 ans est supérieur à la moyenne. En d'autres termes, lorsqu'on leur a donné la possibilité d'influer de façon utile sur l'avenir de leur pays, ces jeunes se sont ralliés à la cause comme le font les jeunes du Nicaragua. Ils ont également la possibilité de voter à 16 et 17 ans. Ils participent au processus électoral et s'y intéressent davantage que leurs parents.

Je suis persuadé que mes collègues de la Chambre des communes constatent la même chose que moi. Lorsqu'on se rend dans les classes de nos écoles secondaires et les écoles techniques et qu'on parle à ces jeunes de l'avenir, ils ont des idées. Ils connaissent la situation. Ils ont des préoccupations. Ils aimeraient bien participer au processus électoral si on leur en donnait la chance, selon moi. Si on en croit le peu de renseignements que nous avons sur les pays qui accordent ce droit, non seulement les jeunes participent, mais ils le font d'une façon enthousiaste.

Si je ne m'abuse, l'aile jeunesse de tous les partis politiques à la Chambre souscrit à cette notion, au moins en principe ou en détail. Bon nombre des sections provinciales de nos partis ont adopté l'idée de faire passer l'âge de voter de 18 à 16 ans.

Lorsqu'on examine les divers articles de la loi électorale dont nous sommes saisis, on s'aperçoit que l'article 3 précise qu'il faut être âgé de 18 ans. Lorsqu'on remonte 30, 40 ou 50 ans en arrière, lorsqu'on a décidé de faire passer l'âge de voter de 21 à 18 ans, les gens disaient à l'époque que les jeunes de 18 ans étaient beaucoup mieux informés que leurs prédécesseurs.

Nous sommes tous conscients de la révolution technologique qui a eu lieu au cours des dernières années. À l'heure actuelle, les jeunes sont probablement beaucoup plus à l'aise avec le monde électronique que nous. Ils comprennent les questions. Ils savent comment obtenir l'information. Ceux qui le désirent ont accès aux pages Web des partis politiques. Ils naviguent sur Internet et en fait, certains d'entre eux passent la moitié de leur vie à naviguer sur Internet, ce qui leur permet de s'informer au sujet de toutes sortes de questions.

Nous devons être audacieux en tant que députés alors que nous approchons du XXIe siècle. Il faut laisser les jeunes hommes et femmes âgés de 16 et 17 ans qui souhaitent participer au processus électoral le faire et leur permettre de voter s'ils le désirent.

M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, je dois dire en premier lieu qu'il est particulièrement agréable et stimulant d'amorcer une nouvelle session parlementaire avec pour première mission d'améliorer le processus démocratique de notre pays.

Le projet de loi C-2, qui vise à remplacer la présente Loi électorale du pays, résulte d'un vaste consensus parlementaire. Les mesures proposées ici émanent, en effet, d'un long et minutieux exercice de consultation, processus auquel des représentants de tous les partis de cette Chambre ont participé par le truchement du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. Cette consultation, menée dans le plus pur respect de la démocratie parlementaire, a permis de mettre en évidence maintes suggestions, voire de tirer un certain nombre de conclusions. Le projet de loi que nous étudions aujourd'hui n'est donc pas la conception exclusive du gouvernement, mais reflète au contraire, dans une large mesure, les opinions de tous les partis représentés à la Chambre.

 

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Notre système électoral a fait sa marque de par le monde. Les nouvelles démocraties s'en inspirent et le prennent comme modèle. Il est vrai qu'il a évolué au fil des ans et que jusqu'à présent, de façon générale, il a bien servi la population canadienne. Mais un système électoral, comme toute autre chose d'ailleurs dans ce bas monde, n'est jamais parfait. Étant donné qu'il est au service d'une société en constante évolution il doit, lui aussi, non pas seulement suivre cette évolution mais la devancer dans la mesure du possible.

Car à bien y penser, un système électoral n'est jamais conçu pour répondre aux besoins limités de l'immédiat. Il doit au contraire prévoir et préparer la société démocratique de l'avenir. Pour y arriver le Canada n'a pas lésiné sur les moyens. Au cours des dernières années, il a multiplié études et rapports.

La Commission Lortie, entre autres, sur la réforme électorale a fourni de nombreuses recommandations qui ont entraîné la formation d'un comité spécial de la Chambre qui, à son tour, a produit cinq rapports différents à l'intention de la Chambre.

Puis, plus récemment, le directeur général des élections, Jean-Pierre Kingsley, a soumis son propre rapport dans la foulée du scrutin de 1997. Ce travail monumental témoigne bien de l'intérêt général des parlementaires à l'égard de la réforme électorale et trouve son aboutissement dans ce projet de loi.

En fait, il s'agit surtout de parfaire ce qui a déjà fait l'orgueil et la renommée internationale de notre démocratie. Nous devons corriger quelques imperfections, combler certaines lacunes, ajuster divers éléments de la présente loi aux nouvelles réalités, et surtout, adapter chaque mesure aux exigences de la Charte des droits et libertés.

Ce dernier aspect affecte particulièrement certaines mesures financières. L'intervention des tierces parties, par exemple dans une campagne électorale. Dans quelle mesure faut-il les accepter et à combien faut-il plafonner leur engagement financier? Ces questions ont déjà soulevé passablement de controverse, y compris devant les tribunaux. À cet égard, le nouveau projet de loi propose un élargissement considérable des sommes autorisées: 150 000 $ à l'échelle nationale et 3 000 $ par circonscription.

Sur le plan administratif, le projet de loi C-2 comporte un train de nouvelles mesures destinées à faciliter bien des choses et, là aussi, à mieux respecter les droits et libertés des Canadiens.

Il stipule entre autres que les directeurs du scrutin auront dorénavant le droit de voter. Ce qui, jusqu'à présent, n'était pas permis.

Le troisième élément d'importance dans ce projet de loi, concerne les interdits de publication frappant la publicité et les sondages. Il s'agit là d'un autre aspect de la loi qui a fait l'objet de contestations devant les tribunaux. La Loi électorale de 1974 interdisait toute publicité électorale au début de la campagne électorale et avant le jour du scrutin. Jusqu'à ce qu'en 1996, la Cour d'appel de l'Alberta rejette cet interdit dans l'affaire Somerville.

Dans le cas de la publication des sondages d'opinion, l'interdit s'appliquait 72 heures avant le scrutin. Mais l'an dernier, dans l'affaire Thomson, la Cour suprême a déclaré cette mesure contraire à l'exercice des droits et libertés. La décision de la Cour posait cependant une importante condition. Elle stipulait en effet que l'électorat devait pouvoir juger de la crédibilité des sondages, par l'analyse de la méthodologie utilisée. La Cour laissait donc entendre que la restriction du Parlement serait peut-être plus justifiable si elle exigeait la publication de la méthode utilisée en même temps que les résultats du sondage.

Ainsi, dans les nouvelles mesures proposées, le gouvernement opte pour le meilleur compromis possible. En premier lieu, il élimine tout interdit au début de la campagne électorale. En second lieu, en ce qui concerne l'interdit précédant le jour du scrutin, il baisse la limite de 72 à 48 heures. En troisième lieu, il exige que la publication de tout sondage d'opinion en période électorale soit accompagnée, pendant les 24 premières heures de sa publication, de la méthode utilisée dans tous ses détails. Cette décision repose d'abord et avant tout sur un souci d'équité envers l'ensemble de l'électorat.

 

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Évidemment, d'aucuns crieront à la censure. Ils soutiendront que les électeurs canadiens sont parfaitement en mesure de faire la part des choses et de choisir l'information valable à leurs yeux. Soit. Cependant, cet interdit de 48 heures vise à donner à l'électorat un peu de répit avant le moment du vote, pour lui permettre un peu de réflexion personnelle, sans aucune influence extérieure. Il importe de noter ici que, dans son jugement de l'affaire Thomson, la Cour suprême n'a pas considéré cet aspect de la «période de réflexion». Je pense qu'il s'agit là d'un argument sérieux qui confère à cette nouvelle mesure tout le respect que mérite la Charte des droits et libertés.

Quant à la méthode de tenue de sondages d'opinion, sa publication permettra aux gens de se faire une meilleure idée du sérieux ou de l'amateurisme des résultats.

En conclusion, cette réforme de notre Loi électorale cherche encore, plus que jamais, à préserver le bien le plus précieux de toute la population canadienne: sa démocratie. Le train-train quotidien fait qu'on a rarement le temps d'y penser, ou que lorsqu'on en a le temps, on considère cette liberté démocratique comme un acquis, voire parfois comme un dû. Il suffit pourtant de jeter un bref coup d'oeil, ces derniers temps, sur l'actualité internationale pour reprendre conscience de la richesse de notre démocratie. C'est cette richesse que ce projet de loi C-2 veut préserver.

Le Canada étant un leader mondial dans ce domaine, il n'a pas de barème sur lequel se guider. Il doit, comme on dit, «apprendre sur le tas», c'est-à-dire apprendre de ses erreurs, de ses imperfections et de son évolution. C'est précisément le but de la réforme proposée: améliorer la Loi électorale de façon aussi équitable, transparente et sûre que possible, de manière à sauvegarder ce que nous, en tant que Canadiens, avons de plus précieux au monde, notre liberté démocratique.

[Français]

M. André Harvey (Chicoutimi, PC): Monsieur le Président, je pense que l'actualisation de la loi électorale canadienne est un moment important pour mettre à jour un outil indispensable à l'encadrement de la démocratie au Canada.

Je crois qu'il n'est pas abusif de penser qu'après 30 ans on doit travailler sur ce dossier de façon minutieuse. C'est un début. Un travail préliminaire très important a été fait par des députés de la Chambre des communes. Le dossier est loin d'être parfait.

On ne pourra pas sortir de cet exercice sans considérer que le travail qui a été amorcé et qui se poursuivra au cours des prochaines semaines et des prochains mois sera utile pour la démocratie canadienne, et aussi pour chaque Canadien qui doit assumer sa responsabilité de voter lors de périodes précises.

Il est important de considérer certains éléments qui nous apparaissent comme indispensable. Cet exercice en est un qui est excessivement laborieux. On aborde des questions où il est parfois difficile de faire preuve de consensus. Les nombreux articles et les centaines de pages qui contiennent les propositions qui seront soumises à cette Chambre un peu plus tard nous obligent à reconnaître que c'est un travail quasi monacal qui sera demandé aux parlementaires.

Il sera difficile de s'entendre sur tous les éléments. Quand on pense, entre autres, à tout ce qui touche la question du financement des partis politiques, il y a des questions de principe qui seront mises à jour et sur lesquelles on devra discuter. Ces questions ne seront pas faciles.

 

. 1215 + -

Il y a, par exemple, tout le volet du financement populaire qui a été instauré au Québec. Tout en étant un progrès immense sur l'exercice du droit démocratique, cette loi n'est pas parfaite non plus. Dans le cadre de la loi provinciale, il est possible, pour des sociétés, pour des membres d'une société de participer aussi au financement des partis politiques et d'être couverts, si je puis dire, par la société à laquelle ils appartiennent.

Par exemple, dans un bureau d'avocats, seuls les dons individuels sont acceptables. Rien n'empêche le bureau lui-même de demander aux membres, aux sociétaires, de participer au financement populaire et d'être quand même remboursés par la corporation. Ce n'est pas si simple que cela lorsqu'on parle de relier directement le financement à la démocratie. Ces nuances seront importantes lors du débat et en comité.

Il y a également la question de la nomination des directeurs de scrutin. On devra en arriver à une solution nous permettant d'avoir des responsables de scrutin qui, au moins en apparence, sont à l'abri d'interventions politiques trop dirigées. Je suis persuadé que dans le cadre de ce débat, il sera intéressant d'avoir les suggestions de l'ensemble des partis politiques et de tous les Canadiens, ce qui permettra d'améliorer cette façon de faire.

Il sera important de considérer aussi certaines questions, comme l'âge requis pour avoir droit de vote. Il devient incontournable de modifier l'âge requis car, comme le soulignait un de mes collègues, les jeunes sont de mieux en mieux informés—et ils le sont de plus en plus jeunes—des problèmes qu'ils ont à vivre et aussi des défis auxquels ils auront à faire face.

Je pense qu'il sera important de considérer des modifications à cet égard. La présence des jeunes lors du geste démocratique, lors des élections, va probablement forcer la très grande majorité des Canadiens à être davantage à l'écoute de ce qu'on doit considérer comme des priorités qui touchent davantage les jeunes. Nos vieux débats qui, parfois, n'en finissent plus depuis 15, 25 ou 30 ans, devront céder le pas aux intérêts des jeunes à être défendus par eux-mêmes.

Dans cet esprit, je pense qu'on devra être ouverts à la diminution de l'âge minimal requis pour pouvoir voter. On pense que 16 ans serait un âge intéressant. Déjà, à cet âge-là et même avant, les jeunes sont de plus en plus ouverts aux enjeux auxquels ils ont à faire face. Je pense que cela pourrait contribuer à apporter une bouffée d'air frais envers la démocratie canadienne que d'accepter cette ouverture d'esprit.

Il ne faut pas oublier que cette modification à la Loi électorale canadienne touche tous les électeurs canadiens. C'est pour cela qu'il faudra peut-être essayer d'aller le plus loin possible dans la recherche de consensus, pour que cette loi, je l'espère, fasse la quasi-unanimité à la Chambre des communes.

Il est évident qu'il y a des questions de principe qui devront être mises de l'avant. Chaque parti a des principes qui l'animent depuis des décennies. Lors de la révision d'une loi aussi importante que celle-ci, il sera peut-être bon de mettre un peu de côté les principes qui ont sous-tendu nos actions dans le passé et de nous s'orienter davantage vers l'avenir. Je pense que ce serait un élément important pour être en mesure d'offrir à tous les Canadiens une loi qui ferait preuve d'énormément d'ouverture sous plusieurs aspects, entre autres, le financement.

Cela a toujours été une question très polarisée au pays, entre le financement populaire pur, tel qu'on le vit au Québec, et le financement traditionnel dans le reste du pays. Entre les deux, je pense qu'il y a moyen de franchir des pas énormes et d'en venir à dire qu'il est possible d'accepter certaines formes de financement qui, sans contrecarrer le geste de la démocratie, seront acceptables par tous les Canadiens.

On a abordé et on abordera encore la question des sondages, la question de l'information électronique, Internet, etc.

 

. 1220 + -

Il est important d'encadrer de tels gestes de façon rationnelle parce qu'il est possible—la démocratie, c'est important, il faut la sauvegarder—d'en faire un usage parfois même un peu démagogique. Il faut donc encadrer les gestes concernant tous les sondages, toute l'information électronique qui va être diffusée de façon de plus en plus intensive au sein de notre population et dans chacune de nos familles.

Le fait d'être obligé de publier toute la rationalité inhérente aux sondages qui sont faits empêchera évidemment, dans le cadre d'une campagne électorale normale, la publication de certains sondages qui ont strictement pour but d'être partisans et de manipuler le geste hautement démocratique que la population doit faire périodiquement, c'est-à-dire de voter en toute connaissance de cause. C'est un aspect majeur qu'il va falloir aborder.

Le nombre d'heures où la publication des sondages, à la fois rationnels et moins rationnels, sera encadrée, est assurément une bonne nouvelle et va permettre à l'ensemble des Canadiens de poser un geste dont l'objectivité et la rationalité va être bénéfique pour l'ensemble du pays. Car je crois que notre rôle de politicien est de tout mettre en oeuvre pour que tout ce qui favorise l'application de la démocratie soit transparent.

Entre partis différents, on doit tout mettre en oeuvre, dans le cadre de la révision de la loi électorale, pour que le geste posé périodiquement par nos concitoyens le soit selon des règles objectives et non partisanes. Je suis persuadé que toute cette période consacrée à la révision de la loi électorale canadienne sera bénéfique pour les décennies à venir.

Je vous remercie de m'avoir accordé ces quelques minutes pour faire part de mes réflexions.

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais tout d'abord exprimer mon appui au projet de loi présenté par le leader du gouvernement à la Chambre et rappeler que les nouvelles mesures contenues dans ce projet de loi résultent d'un exercice de consultation effectué par les divers partis et échelonné sur plusieurs années.

Premièrement, en ce qui concerne le dilemme du décalage horaire, on s'est aperçu que la situation de la province de la Saskatchewan méritait une attention particulière. Le ministre a déjà abordé le sujet cet avant-midi. Une modification bien spéciale de la présente loi s'applique également aux multiples aspects relatifs aux publications en période électorale. Le problème des interdits se pose, non seulement au sujet de la publicité proprement dite, mais également au niveau de la publication des sondages d'opinion.

Le ministre a fort bien exprimé le raisonnement du gouvernement, à savoir que dans toute élection démocratique le dernier mot doit appartenir à l'électorat, sans intervention ni influence aucune. En vertu de la loi de 1974, les tierces parties, qui se voulaient indépendantes de toute affiliation politique, pouvaient intervenir financièrement et à volonté dans une campagne électorale.

Évidemment, l'indépendance partisane fut rapidement contestable et, en 1993, il a fallu une nouvelle loi pour limiter leurs dépenses à 1 000 $. Et c'est là que se manifeste l'effet domino de la Charte car les tribunaux ont décrété qu'une pareille limitation contrevenait à l'exercice des droits et libertés. Ainsi, une solution engendrait un nouveau problème.

 

. 1225 + -

Pourtant, l'opinion publique presse le gouvernement d'agir à cet égard.

En effet, il ressort des consultations que huit personnes sur dix au Canada approuvent l'imposition de limites aux dépenses des tierces parties. Qui plus est, 79 p. 100 des gens interrogés pensent que ces tierces parties ne devraient pas être autorisées à dépenser davantage que les candidats, comme c'est le cas actuellement.

Le gouvernement propose donc, avec ce nouveau projet de loi, de plafonner les dépenses des tierces parties, mais de porter ce plafond à 150 000 $ à l'échelle nationale et à 3 000 $ par circonscription.

Toujours en ce qui concerne les finances, un autre facteur méritait une attention immédiate, celui de l'inflation. Par une saine gestion de ses finances, le gouvernement actuel a certes réussi à en maîtriser l'impact ces dernières années.

Il n'en reste pas moins qu'au niveau électoral, depuis la dernière loi de 1974, des améliorations s'imposent. Et c'est là une autre des dispositions du projet de loi C-2.

[Traduction]

Je le répète, ce projet de loi nous permettra d'avancer dans la bonne direction. Je suis certain qu'il y aura d'autres mesures souhaitables sous peu.

Aux fins du compte rendu, je signale qu'il y a quelques mois, un groupe d'électeurs de Davenport ont proposé la possibilité du bulletin de vote refusé. Ainsi, l'électeur pourrait choisir de ne pas voter pour protester, soit pour marquer son désaccord ou son mécontentement à l'égard des candidats dont les noms figurent sur le bulletin de vote ou pour signifier qu'aucun de ces candidats ne répond à ses attentes. Cette idée nouvelle est d'ailleurs l'objet d'un projet de loi d'initiative parlementaire que j'ai présenté. J'ai hâte de pouvoir l'expliquer plus en détail quand le temps viendra.

Avant de conclure, je parlerai du financement des campagnes électorales. Ces dernières ne devraient pas entraîner autant de dépenses qu'elles le font. Elles devraient faire l'objet de budgets nettement moins élevés, nécessiter beaucoup moins de publicité, tant à l'échelle nationale que locale, et soulever un débat plus vif, surtout au niveau local.

Il ne fait aucun doute que notre système actuel est bon. Il fait l'envie de nombreuses autres administrations électorales. Mais, nous devons faire plus encore pour maintenir un processus électoral qui soit le plus indépendant possible des intérêts sectoriels.

À cet égard, j'exhorte le gouvernement à envisager sérieusement de mettre un terme aux contributions venant d'intérêts sectoriels, notamment du secteur des entreprises et des syndicats, et d'accroître les incitatifs visant les contributions individuelles.

Comme c'est actuellement le cas dans certaines juridictions, le dirigeant d'une entreprise ou d'un syndicat verse une contribution personnelle. En d'autres termes, la contribution est plutôt versée à titre personnel plutôt qu'au nom d'une entreprise ou d'un syndicat. La personne verse sa contribution à partir des fonds dont elle dispose en tant que citoyen privé, et pas au nom d'une entreprise qui a des intérêts précis à l'égard des mesures que la future assemblée législative adoptera à certaines conditions, ou qui peut aussi menacer de retirer sa contribution à l'avenir pour faire pencher le gouvernement en sa faveur.

 

. 1230 + -

Le but idéal à viser serait un système où les contributions individuelles seraient de plus en plus nombreuses. Ce serait donc un système plus démocratique, car davantage de personnes y reconnaîtraient leur obligation et leur droit civils de contribuer au parti de leur choix, sur une base privée, personnelle, individuelle. L'autre but à viser serait en même temps de supprimer les contributions du secteur des entreprises et du mouvement syndical ou de tout groupe d'intérêts restreints dans la société.

Il faut reconnaître que le gouvernement a réussi à régler ce problème, notamment, avec le projet de loi C-2, grâce aux modifications concernant les intérêts sectoriels, les intérêts spécifiques, la publicité et l'intervention au cours d'une campagne électorale.

Nous sommes sur la bonne voie. Nous prenons la bonne direction. Nous devons maintenant miser sur les mesures contenues dans le projet de loi C-2 et nous orienter vers un système qui permettra la multiplication des contributions individuelles et l'élimination graduelle sinon totale des contributions du secteur des entreprises et du mouvement syndical.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Monsieur le Président, au nom des électeurs de Surrey-Centre, je tiens à contester le projet du gouvernement de faire adopter le projet de loi C-2 à la hâte à la Chambre.

Ce projet de loi prévoit des modifications à la Loi électorale du Canada. C'est un projet de loi très important pour notre démocratie.

Comme l'ont déjà signalé mes collègues, les députés de North Vancouver et de Calgary-Ouest, un comité a examiné ce projet de loi au cours de la première session de la présente législature. Et pourtant, le projet de loi qui est présenté aujourd'hui prouve par son contenu que les libéraux n'ont tenu aucun compte des témoignages qui ont été entendus par le comité. C'est comme si ce projet de loi n'avait pas été le moindrement examiné par un comité.

Habituellement, les projets de loi sont soumis à un comité après avoir été débattus en deuxième lecture à la Chambre. Comme le gouvernement n'a pas réussi à faire adopter ce projet de loi au cours de la première session, le présente-t-il de nouveau en le renvoyant immédiatement au comité où il pourra le modifier secrètement ou cherche-t-il à empêcher toute modification du projet de loi en ne tenant pas de débat de deuxième lecture?

Ce projet de loi maintient les dispositions les plus inacceptables de la Loi électorale du Canada, notamment celles qui profitent au parti au pouvoir—en l'occurrence le Parti libéral. Les élections devraient être démocratiques, libres et équitables et offrir des chances égales à tous les candidats et à tous les partis.

Les Canadiens ont demandé des modifications au mode d'élection de leurs représentants fédéraux. Ce projet de loi témoigne encore une fois du fait que les libéraux n'ont pas répondu aux souhaits des Canadiens. Quelle belle façon d'amorcer la deuxième session parlementaire.

Cette semaine, le gouvernement libéral, qui manque de vision, est particulièrement antidémocratique avec le projet de loi C-2. Il a raté l'occasion de moderniser et de démocratiser la Loi électorale du Canada. Plus précisément, il a omis d'apporter des changements en ce qui concerne, notamment, les nominations partisanes, les exigences d'enregistrement des partis, le financement de la campagne, les questions liées aux dépenses des tiers, le remboursement des dépenses électorales, la carte d'électeur et le moment de la tenue d'élections générales et partielles.

 

. 1235 + -

Dans le peu de temps dont je dispose pour intervenir sur ce projet de loi, je dirai quelques mots sur certains éléments.

Parlons d'abord des nominations partisanes. En vertu de la Loi électorale actuelle, le système du favoritisme permet aux partis de nommer des gens à des postes. Le directeur du scrutin est nommé par le parti au pouvoir et choisit ses adjoints, son greffier et le reste de son personnel. C'est une façon de récompenser les fidèles partisans, et cela n'a pas sa place dans notre système électoral. C'est une insulte à un processus qui est censé être non partisan, neutre et impartial.

Élections Canada recommande toujours un système électoral qui n'est pas marqué par le népotisme lorsque cet organisme aide des pays en développement à mettre en place leur système électoral. Pourtant, les Libéraux maintiennent ce système, car il leur profite. Ils prêchent une chose qu'ils ne pratiquent même pas au Canada.

Élections Canada a demandé à plusieurs reprises au gouvernement de mettre un terme au système de népotisme et de lui permettre d'engager son propre personnel pour les campagnes électorales, en faisant de la publicité et en interviewant des candidats en fonction de leurs compétences, leur mérite et leur expérience. De nombreux députés réformistes ont réclamé dans le passé que ces postes soient annoncés dans le journal aux fins de dotation au lieu d'être comblés par des amis du gouvernement au pouvoir, qui sont nommés.

Dans son rapport sur les trente-sixièmes élections générales, le directeur général des élections a formulé les mêmes recommandations que nous, de ce côté-ci de la Chambre. Les députés d'opposition siégeant au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre ont défendu cette position, mais les Libéraux s'y sont opposés, ce qui prouve que les motifs du gouvernement sont simplement politiques alors que dans cette situation, on devrait mettre de côté toute partisanerie.

La limite de dépenses imposée aux tiers durant les élections générales fédérales est de 150 000 $, et on ne peut consacrer plus de 3 000 $ à une circonscription en particulier. Nous croyons qu'il n'incombe pas au gouvernement de limiter le droit de particuliers et de groupes de dépenser leur argent pour appuyer une cause ou un candidat dans le cadre d'élections fédérales.

Loin de mettre tout le monde sur le même pied, les Libéraux remettent en question les fondements mêmes de notre démocratie. Ainsi, le Parti libéral au pouvoir peut compter sur du temps d'antenne gratuit basé sur le nombre de ses députés, ce qui lui donne nettement plus de temps que tout autre parti. Les Libéraux ont-ils changé cette situation dans ce projet de loi? Non. Pas du tout. Cela donnera un énorme avantage aux Libéraux en limitant la capacité de toute personne ou de tout groupe de lutter contre la propagande gouvernementale durant la campagne électorale.

Parlons des exigences à respecter pour obtenir le statut de parti enregistré. La Loi électorale exige qu'un parti politique présente 50 candidats durant des élections pour que son nom soit inscrit sur les bulletins. Les tribunaux ontariens ont déclaré que deux candidats suffisaient pour former un parti. Ce sont les électeurs et non le gouvernement qui devraient décider si un parti ou un candidat mérite qu'on vote pour lui. La décision revient aux électeurs et non au gouvernement. C'est une tentative faite par le gouvernement pour gêner la formation et la croissance de nouveaux partis, comme le Parti réformiste. Le gouvernement essaie, en fait, de limiter la concurrence sur les bulletins de vote. C'est tout à fait antidémocratique. Il devrait avoir honte.

En ce qui concerne l'identification des électeurs, actuellement, si l'on a un doute sur l'identité d'un électeur ou sur la validité de son droit de vote, on peut demander à la personne visée de prouver son identité ou de prêter serment. C'est tout à fait ridicule. Si quelqu'un est assez malhonnête pour tenter de commettre une fraude électorale, on peut certainement supposer qu'il pourrait aisément prêter serment, mentir à Dieu ou se mentir à lui-même.

Pour ce qui est du scrutin électronique, le gouvernement libéral fait fi de l'ère informatique dans laquelle nous vivons en nous refusant le droit de recourir aux modes de scrutin électronique qui sont plus efficaces, moins coûteux et plus accessibles. En Ontario, on peut procéder à l'élection des membres de conseils municipaux pour le sixième du coût d'un scrutin conventionnel.

Parlons maintenant du remboursement des dépenses électorales d'un parti. Les libéraux autorisent le remboursement des dépenses de campagne électorale, mais restreignent ensuite à certains partis l'admissibilité à ce remboursement. Qu'est-ce à dire? Aucun candidat ou parti ne devrait avoir droit à un remboursement.

 

. 1240 + -

Le projet de loi C-2 maintient le dépôt de 1 000 $ qui est exigé d'un candidat. Ce dépôt devrait être beaucoup moins élevé afin d'encourager les Canadiens à se porter candidats indépendamment de leur situation financière.

En conclusion, il y a de nombreux autres aspects du projet de loi que l'on peut dénoncer et qualifier d'antidémocratiques, dont l'absence de dates prédéterminées pour la tenue des élections fédérales, le moment où ont lieu les élections partielles, la publicité ou la propagande gouvernementale avant les élections et bien d'autres questions, mais je ne pourrai aborder ces sujets faute de temps.

Je voudrais lire un courriel que j'ai reçu d'un électeur de ma circonscription. Son auteur, Bill Lawton, écrit ceci: «En fin de compte, j'estime que c'est tout simplement un affront à la démocratie. Ce projet de loi est complètement draconien et étranger à la culture de la démocratie.» Les électeurs de ma circonscription savent ce qu'il en est du projet de loi à l'étude. C'est une tentative de manipulation de la part d'un gouvernement avide de pouvoir. Ce n'est rien de moins qu'un exercice dictatorial, pire que celui auquel se livre le gouvernement militaire du Pakistan. Même si l'on fait abstraction des scandales, il suffit pour accuser le gouvernement de corruption. C'est un crime flagrant. Le gouvernement doit modifier le projet de loi C-2 et rétablir la démocratie au Canada. Si le projet de loi est adopté dans sa forme actuelle, les électeurs canadiens devraient refuser de voter pour les libéraux aux prochaines élections.

M. Gar Knutson (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de profiter de l'occasion qui m'est offerte de me prononcer en faveur de la nouvelle loi sur les élections que propose le gouvernement.

Je voudrais d'abord féliciter Élections Canada pour le travail qu'il a accompli dans le passé. Je suis sûr qu'il en fera autant dans le cadre de la nouvelle loi.

J'ai participé directement à deux élections. Je ne sais pas si les gens d'Élections Canada surveillent ce discours mais, le cas échéant, je tiens à dire que, de mon point de vue, ça s'est passé à merveille. Tous les agents d'Élections Canada auxquels j'ai eu affaire ont été extrêmement impartiaux et je n'ai que des félicitations à adresser à cet organisme. Je sais que dans le cadre de la nouvelle loi il continuera de faire preuve d'impartialité. Par conséquent, nous sommes convaincus que se perpétuera un tradition chère aux Canadiens: la tenue d'élections démocratiques.

Élections Canada fait vraiment fonction d'arbitre. Les élections sont meilleures quand elles passent inaperçues. C'est comme si, au cours d'un match, on ne se rendait pas compte des interventions de l'arbitre. Élections Canada accomplit tout un travail pour préparer une élection, notamment l'établissement de la liste des électeurs et l'aménagement des bureaux de scrutin. C'est un témoignage de son sérieux, tout comme le faible nombre de plaintes qui sont formulées, compte tenu de la complexité de la tâche que suppose la participation électorale dans un pays aussi grand que le nôtre.

Passons maintenant à certains points importants qui ont été soulevés par les députés d'en face. L'opposition s'est interrogée sur le pourquoi du renvoi de ce projet de loi au comité avant l'étape de la deuxième lecture. Je ferai observer aux députés et à la population qu'en renvoyant le projet de loi au comité avant qu'il ne soit lu pour la deuxième fois, on se trouve à accorder aux membres du comité plus de latitude, de façon qu'ils puissent tenir un débat plus vaste et proposer un plus grand nombre d'amendements qu'ils ne pourraient le faire s'ils étaient saisis du projet de loi après sa deuxième lecture.

Selon la procédure parlementaire, une fois qu'un projet de loi franchit l'étape de la deuxième lecture, il a été en principe approuvé. Les changements qui peuvent être apportés sont définis d'une façon plus étroite que ne le permettrait normalement le droit parlementaire en ce sens qu'ils ne peuvent aller à l'encontre du projet de loi qui a été en principe approuvé.

Le renvoi du projet de loi avant la deuxième lecture permet aux membres du comité de mieux l'examiner. Les membres du comité peut examiner les amendements proposés dans un contexte plus vaste. En tant que membre du comité, j'espère que nous aurons en ce qui concerne ce projet de loi un débat franc et détaillé qui aura un effet sur tous les élus à la Chambre et sur tous les Canadiens.

On propose d'apporter plusieurs changements d'ordre administratif et il est nécessaire d'effectuer ces changements pour certains raisons.

La Loi électorale du Canada repose sur des principes chers à notre société démocratique: l'équité, la transparence et l'accessibilité. Ces principes constituent le cadre de notre système électoral. Un comité de la chambre des communes a conclu que la loi électorale du Canada est encore valable bien qu'un certain nombre de dispositions entrées en vigueur il y a près de 30 ans nécessitent une mise à jour. Les changements d'ordre administratif proposés sont fondés sur le rapport du comité.

Le premier concerne l'ajustement des heures de vote. Nous allons permettre que les heures de vote soient ajustées dans les régions qui ne passent pas à l'heure d'été quand d'autres avancent leurs horloges d'une heure. Nous nous assurons ainsi que la Saskatchewan fermera ses bureaux de vote avant ou en même temps que l'Alberta ou la Colombie-Britannique. Et nous réglons le problème qu'a connu la Saskatchewan lors des dernières élections.

 

. 1245 + -

Nous n'avons sûrement pas oublié l'époque où, pour cause de fuseaux horaires, le soir des élections, lorsqu'ils allumaient leur téléviseur, les Canadiens de l'Ouest avaient l'impression que le reste du Canada avait déjà choisi pour eux, avant même qu'ils n'aient eu le temps d'exprimer leur suffrage. Un gouvernement pouvait avoir remporté un vote majoritaire une fois connus les résultats du scrutin dans les Maritimes, le Québec et l'Ontario. Quand les résultats du vote dans les provinces des Prairies ou en Colombie-Britannique étaient enfin connus, la majorité était déjà constituée et les habitants de l'Ouest avaient l'impression que leur vote comptait pour du beurre.

Je puis le comprendre et j'estime que le gouvernement a eu raison d'y remédier lors de la dernière législature. Nous nous contentons aujourd'hui d'affiner la loi, de façon à rendre désormais possible de découvrir au même moment le résultat du vote de l'ensemble des Canadiens. En 1997, cela nous a permis de conserver le suspens jusqu'au bout. Tous les Canadiens ont aujourd'hui le sentiment que leur vote individuel compte tout autant que celui des autres Canadiens et les résultats nous parviennent tous à peu près au même moment.

La loi harmonisera également les heures du scrutin pour une ou plusieurs élections partielles tenues dans des circonscriptions situées dans le même fuseau horaire, en les limitant à la période comprise entre 8 h 30 et 20 h 30. Ainsi, les directeurs du scrutin pourront voter eux aussi. Dans l'état actuel des choses, ils ne peuvent exprimer leur vote qu'en cas d'égalité des suffrages. La loi permettra également de mettre à profit la technologie de pointe en autorisant la communication par voie électronique des déclarations de candidature à l'ensemble des personnes se portant candidates.

Cela garantira aux électeurs le droit de placer des affiches électorales raisonnables et aux candidats le droit de solliciter des votes dans les immeubles résidentiels à logements multiples, y compris les condominiums, durant les campagnes électorales. Ayant fait campagne dans des immeubles résidentiels, comme la plupart des députés, je sais que cela donne souvent lieu à des discussions avec le concierge. Il serait bon que la Loi électorale du Canada précise clairement que les candidats ont le droit d'entrer dans des immeubles résidentiels à des heures raisonnables pour solliciter des votes.

Afin de réduire les risques de fraude, le projet de loi abolira la pratique des répondants, laquelle permettait aux électeurs, en milieu rural, de répondre de leurs voisins au bureau de vote pour que ces derniers puissent voter même s'ils n'avaient pas été recensés. Cette mesure renforcera, clarifiera et modernisera la langue et l'organisation de la loi de façon à la rendre plus facile à comprendre et à appliquer.

En ce qui concerne le financement des élections, le projet de loi apporte un certain nombre de changements, des changements tantôt mineurs, tantôt plus significatifs. Pour compenser l'effet de l'inflation, il fera passer de 100 $ à 200 $ le seuil fixé en 1974 à l'égard du crédit d'impôt pour contributions politiques au taux de 75%.

Nous comprenons tous, en tant que politiciens qui doivent réunir des fonds, ce que cela signifie, mais il se peut que le public ne comprenne pas. Actuellement, si on fait un don à un parti politique, on reçoit un crédit d'impôt correspondant à 75% des premiers 100 $. Ce niveau a été établi en 1974 et, de toute évidence, il convient de le rajuster en fonction de l'inflation. Nous proposons donc qu'il passe à 200 $.

Ainsi, le seuil à partir duquel il faut divulguer le nom et de l'adresse de ceux qui font des contributions passerait de 100 $ à 200 $. Quiconque verse à un parti politique inscrit une contribution supérieure au seuil devrait alors faire l'objet d'une divulgation.

La question de déterminer si ce seuil devrait être de 100 $ ou 200 $ est quelque peu théorique. L'aspect principal, c'est que nous avons ici un exemple d'une mesure qui rend notre système équitable. Si une personne veut faire un don à un parti politique, qu'elle s'appelle Gerry Schwartz ou qu'elle dit un autre nom semblable, cela devient du domaine public. C'est un des éléments clés de la loi électorale qui empêche la corruption de gagner notre système.

Une personne pourrait vouloir chercher à m'influencer en versant un don à mon parti ou en contribuant à ma campagne. Cependant, si cela doit être du domaine public, il existe un document. L'opposition peut se procurer ce document et soulever la question à la Chambre. Les médias locaux peuvent l'obtenir. cela contribue selon moi à limiter l'influence de l'argent.

Nous possédons au Canada un système dont nous pouvons être particulièrement fiers, surtout lorsqu'on le compare au système des États-Unis, où l'on relève souvent des accusations, fort justes d'ailleurs, selon lesquelles la politique de leur pays est soumise à l'influence de l'argent. Le montant qu'un membre de la Chambre des représentants ou un sénateur doit réunir s'il veut se présenter en vue d'être réélu au sein du système fédéral américain est scandaleux.

Ma prochaine campagne coûtera environ 50 000 $. Une personne occupant un poste équivalent au mien aux États-Unis dépenserait probablement tout près de un million de dollars. C'est là quelque chose dont nous devrions tous être fiers, une situation qui devrait nous réjouir et qui donne un message qui mérite vraiment d'être retenu.

 

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La nouvelle loi exigera que les partis inscrits fournissent un rapport financier plus détaillé. Cette mesure a elle aussi pour objet de veiller à ce que les partis mènent leurs activités de façon transparente. Si un parti reçoit de l'argent de particuliers, ceux-ci sont inscrits, et le don devient du domaine public. Cette mesure nous permettra également de savoir à quelles dépenses cet argent servira.

Pendant une campagne, les sommes qu'un candidat peut dépenser sont limitées. Le mécanisme de déclaration de ces dépenses devrait être ouvert et transparent pour nous permettre de déterminer si un candidat cherche à contourner les limites prévues pour la campagne en dépensant de l'argent avant le début de cette dernière. Un bon mécanisme de déclaration constitue une des pierres d'assise qui permettra de veiller à ce que les candidats ne dépassent pas les limites autorisées.

La nouvelle loi interdira également le transfert des fonds excédentaires d'un parti ou d'une association locale à un candidat après le jour des élections. Cette mesure a pour but d'éviter qu'une personne cherche à se porter candidate et à recueillir de l'argent à son avantage personnel.

Je me réjouis que le gouvernement aille de l'avant avec le projet de loi. En qualité de membre du comité, je suis impatient de discuter avec l'opposition du bien-fondé du projet de loi et de tout amendement qui sera présenté par n'importe quel député.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, je suis ravi de pouvoir intervenir dans ce bref débat aujourd'hui. Vous le savez, monsieur le Président, mais ce n'est peut-être pas le cas de tous ceux qui nous entendent, nous parlons indirectement du projet de loi C-2. La Chambre est actuellement saisie d'une motion proposant le renvoi de ce projet de loi au comité avant l'étape de la deuxième lecture.

J'ai eu l'expérience d'une situation semblable. Je vais d'abord utiliser une ou deux minutes de mon temps pour expliquer ce que nous sommes réellement censés faire aujourd'hui à la Chambre, c'est-à-dire décider s'il convient de renvoyer ce projet de loi au comité à cette étape-ci.

Lorsque le projet de loi a d'abord été présenté, j'ai pensé qu'il serait bon de le renvoyer au comité et de laisser les membres du comité se charger des premières étapes de son étude de sorte que, lorsque chacun aurait adopté une position ferme à son égard, on puisse tenir un débat et faire mutuellement des concessions quant aux divers aspects du projet de loi. J'espérais ainsi que nous pourrions adopter un projet de loi dont le libellé serait moins controversé et qui nécessiterait moins d'amendements. L'idée me paraissait vraiment excellente.

Je voudrais m'exprimer ici avec diplomatie, en respectant les règles sur le langage parlementaire. Compte tenu du Parlement actuel, les travaux des comités, c'est de la comédie. Ce n'est vraiment pas une bonne chose à dire, mais c'est malheureusement exact.

Des voix: Oh, oh!

M. Ken Epp: Il serait bon que nos vis-à-vis écoutent ce que je dis. Je sais qu'ils doivent protéger leur parti politique et le gouvernement en place.

C'est de la comédie dans ce sens. Tout le monde sait que, sous prétexte qu'ils forment le gouvernement, les libéraux dominent tous les comités. Je suppose que pour les libéraux, il est correct d'accaparer huit postes à un comité et de laisser tous les partis d'opposition combler les sept autres postes, mais malheureusement, les députés du gouvernement perdent leur liberté d'action au comité aussi bien qu'à la Chambre. Tout comme nous avons vu des députés du Parti libéral se lever les larmes aux yeux pour se prononcer contre une mesure qu'ils approuvaient au fond, il y a des membres de comité qui sont sous la férule du leader du gouvernement ou du ministre, selon le cas. Je l'ai vu moi-même.

Des voix: Oh, oh!

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le député d'Elk Island a la parole, mais la présidence a du mal à l'entendre tellement on crie fort. Je sais que c'est avec beaucoup d'enthousiasme que les députés approuvent ou rejettent ce qu'il a à dire, mais il serait bien de pouvoir entendre les sages propos du député d'Elk Island. Je suis persuadé que c'est ce que souhaitent tous les députés.

 

. 1255 + -

M. Ken Epp: Monsieur le Président, je voudrais bien que les députés écoutent attentivement ce que j'essaie de dire ici. S'ils sont, comme ils se plaisent à le dire, les champions de la démocratie, ils devraient dire la même chose que moi.

Lorsque j'ai été élu pour la première fois, en 1993, sous la bannière d'un certain parti, j'ai proposé d'apporter un amendement à un projet de loi au comité. C'était un des premiers projets de loi à être envoyés au comité avant d'être lus pour la deuxième fois. Je participais au débat et je m'attendais à quelque chose d'extraordinaire. J'ai avancé une idée.

Une nette majorité de députés, y compris des députés ministériels, était en faveur de l'amendement que je proposais. Un député libéral m'a même dit que c'était une bonne idée, en m'appelant par mon nom. Je ne peux pas prononcer mon nom ici. C'est l'une des contraintes à la liberté d'expression à la Chambre des communes. J'ai donc formulé l'amendement au libellé du projet de loi en supposant qu'il serait adopté.

Quelque temps plus tard, lorsque chacun des articles a été mis aux voix au comité, le président a demandé si l'on adoptait l'article 1, l'article 2, l'article 3. Lorsqu'on en est venu à l'article pertinent, j'ai proposé mon amendement comme le prévoyait la procédure et les députés libéraux ont tous voté contre.

Plus tard, j'ai relancé ainsi l'un d'eux: «Je croyais que vous étiez de mon côté. Je croyais que vous trouviez que ce que j'essayais de proposer avait du bon sens.» Je ne divulguerai jamais le nom du député en question, ni celui de sa circonscription, même si le Règlement me le permettrait. Le député libéral en question m'a répondu en haussant les épaules qu'ils n'avaient vraiment pas le choix.

Je présente ces données pour montrer que tout le processus n'est que du vent. Même si le comité effectuera son travail, et je doute nullement qu'il tâchera d'effectuer du bon travail, le dernier mot au comité reviendra au leader du gouvernement à la Chambre. Il dictera essentiellement la version finale du projet de loi.

Il est certes dommage que je ne dispose pas de deux heures pour aborder tous les points d'intérêt. Je dois accélérer. Je vais maintenant parler brièvement du projet de loi. Mon collègue a déjà mentionné l'ampleur du projet de loi C-2. Il est énorme. Il compte environ 250 pages. Il comporte beaucoup de dispositions détaillées prescrivant comment il faut tenir les élections. À elle seule, la table des matières compte xxii pages, et je vais m'en tenir à deux d'entre elles.

Selon le leader du gouvernement à la Chambre qui a ouvert le débat ce matin, l'un des sujets traités consiste à améliorer notre processus électoral et à améliorer la démocratie au Canada. Je veux parler plus particulièrement de l'article 39. Il est important de faire consigner au compte rendu certaines de ses dispositions. J'invite les Canadiens de partout au Canada, d'un océan à l'autre, qui suivent la transmission de nos délibérations de ce matin sur la CpaC, à faire bien attention à ces dispositions. Il existe plusieurs postes différents de fonctionnaires électoraux. Je ne peux pas citer toutes les dispositions les concernant, mais elles comportent toutes le libellé suivant:

      ...le directeur du scrutin demande aux candidats des partis enregistrés dont les candidats se sont classés respectivement premier et deuxième lors de la dernière élection dans la circonscription de lui fournir les noms de personnes aptes à exercer ces fonctions...

L'article ajoute plus loin que le directeur du scrutin veille à ce que les postes soient, dans la mesure du possible, répartis également entre les personnes recommandées par le candidat du parti qui s'est classé premier et celles recommandées par le candidat du parti qui s'est classé deuxième.

Élections Canada ne doit-il pas s'acquitter de son travail de façon impartiale? La démocratie ne devrait-elle pas se caractériser par l'impartialité? Or, nous voyons consacrée dans le projet de loi électorale proposé par le gouvernement une pratique ancrée dans nos habitudes depuis déjà trop longtemps. C'est-à-dire qu'il y a un avantage à voter du bon bord. Le premier ministre dit aux électeurs de sa circonscription que, s'ils votent pour lui, il pourra y faire dépenser par millions l'argent des contribuables. Ce sera leur récompense pour avoir voté pour lui.

Il est temps de donner aux Canadiens le libre choix de voter pour le candidat et le parti qui ont des principes et qui représentent les valeurs des Canadiens. Il ne faudrait pas que cette décision soit ternie par l'espoir de voir la circonscription immédiatement récompensée par l'investissement de fonds publics, ou par l'espoir d'obtenir des nominations par favoritisme lors des prochaines élections car tous ces postes sont rémunérés par les contribuables canadiens par le truchement d'Élections Canada.

 

. 1300 + -

La première fois que j'ai été élu, j'ai été étonné de constater que cette façon de faire existait. En fait, en 1993, j'étais un tout nouveau candidat. Je n'avais jamais participé à des élections et, un beau jour, j'ai reçu un appel téléphonique me disant que, comme le Parti réformiste s'était classé deuxième aux élections de 1988, je pouvais nommer tous les scrutateurs dans les bureaux de vote. Je me suis dit que cela ne se pouvait pas, qu'Élections Canada était sûrement un organisme impartial. Que le Parti réformiste se soit classé deuxième ne me donne certes pas le droit de décider que toutes les personnes qui ont voté pour le parti lors des dernières élections obtiendront une compensation, un emploi du gouvernement.

C'était tellement répréhensible. Je m'en suis rendu compte tout de suite, même si j'étais inexpérimenté. J'ai refusé. J'ai dit au directeur du scrutin d'Elk Island de choisir la personne qui avait été engagée la dernière fois si elle avait fait du bon travail. Je lui ai dit aussi que le parti qu'elle favorisait m'importait peu, mais que je l'autorisais à remercier de ses services la personne qui n'avait pas fait du bon travail. On aurait dû m'éviter cette corvée.

Le Parti réformiste de principes, pas celui qui agit par opportunisme politique et qui fait tout ce qu'il faut pour se faire élire, mais celui qui a des principes, appuie la proposition de conférer à Élections Canada le pouvoir de choisir et de recruter tous ses employés, y compris les directeurs du scrutin, les scrutateurs et d'autres employés sur le terrain, sans toutefois se limiter à eux. Nous estimons que cette décision devrait reposer sur le mérite et sur la capacité d'accomplir la tâche, et non sur une dette envers quelqu'un qui s'est montré favorable à un parti politique plutôt qu'à un autre.

Si j'en avais le temps, j'aimerais beaucoup parler de bien d'autres questions que soulève le projet de loi C-2, mais c'est impossible, étant donné la façon dont fonctionnent les choses. Je n'ai que quelques minutes à ma disposition, et les députés ne peuvent même pas me poser des questions. C'est assurément regrettable.

M. Randy White: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Mon collègue a parlé avec tellement d'éloquence que je me demandais si la Chambre consentirait à lui accorder encore dix minutes. C'était tout un discours, et je voudrais qu'il se poursuive.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour que le député d'Elk Island dispose de dix minutes de plus?

Une voix: Oui.

Des voix: Non.

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole sur le projet de loi C-2.

J'ai été particulièrement intéressé par l'analyse et les observations du député qui vient de parler au sujet du travail des comités. Depuis deux ans, je travaille au Comité des comptes publics, dont le président est un député réformiste, et j'ajouterai qu'il fait de l'excellent travail, qu'il est très impartial et juste et que le comité fonctionne rondement. Nous avons pour pratique que l'opposition officielle a d'office la possibilité de présider le Comité des comptes publics, si elle choisit de le faire.

J'ai également siégé au Comité de la citoyenneté et de l'immigration et au sein de quelques autres. Notre système de comités n'est pas dysfonctionnel et n'est pas une farce, n'en déplaise au député. En fait, il est représentatif de la composition de la Chambre. Pourquoi? Fait à remarquer, la majorité des Canadiens ont voté en notre faveur deux fois d'affilée.

Devrions-nous abdiquer notre responsabilité? La population canadienne a dit qu'elle voulait que le Parti libéral et le premier ministre gouvernent le pays. Nous savons que l'opposition n'aime pas cela. J'ai été moi-même dans l'opposition lorsqu'un parti travailliste était au pouvoir, celui de Bob Rae et—je le dis gentiment—son groupe de collègues. Il était quelque peu irritant, c'est le moins qu'on puisse dire, de voir un gouvernement majoritaire néo-démocrate de la grande province de l'Ontario...

M. Derrek Konrad: Monsieur le Président, il me semble qu'il n'y a pas beaucoup de députés présents pour écouter ce discours du député d'en face. Je demande que l'on vérifie s'il y a quorum.

 

. 1305 + -

Le vice-président: Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

Le vice-président: Je constate qu'il y a quorum. Le député de Mississauga-Ouest a la parole.

M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, ce n'est pas ma faute si la salle se vide lorsque je prends la parole. J'essaie de faire de mon mieux. Je vous suis toutefois reconnaissant d'avoir ramené ici certains de mes collègues qui, je le sais, travaillent très fort pour défendre les intérêts de la population canadienne et de leurs électeurs.

Les gens se demandent souvent comment il se fait que, lorsque des députés prennent la parole, il y a si peu de parlementaires à la Chambre. C'est parce que nous avons beaucoup de choses à faire, la participation aux travaux des comités n'étant qu'un exemple parmi tant d'autres. Même si les comités n'ont pas encore été officiellement formés et qu'ils n'ont pas encore commencé leurs travaux, ce qui, sauf erreur, devrait se faire d'ici un jour ou deux, les députés assistent aux séances des comités de leur caucus. Il y a des comités interparlementaires Canada-Europe qui se réunissent. En ce moment même, une réunion du comité interparlementaire Canada-Taïwan est en cours.

Hier soir, j'ai eu le privilège de souper avec des membres du groupe parlementaire de la Barbade qui sont ici en visite officielle et qui assisteront à la période des questions. Il y a énormément de travail à faire. J'ai récemment assisté à une réunion d'EACL au cours de laquelle l'organisme a fait le point sur ses travaux à l'échelle mondiale. Il est injuste de dénigrer le travail accompli par les députés. Nous n'oserions jamais agir de la sorte de ce côté-ci de la Chambre et nous nous attendons à ce que les députés d'en face fassent de même.

J'estime que le système de comités du gouvernement actuel est extrêmement transparent. Ici, à Ottawa, les députés de l'opposition ont un rôle à jouer. Parfois, je suis très étonné. Si j'étais dans l'opposition, je crois que je serais beaucoup plus agressif dans...

M. Lynn Myers: Ou efficace?

M. Steve Mahoney: Peut-être plus efficace, je l'ignore, je laisse aux autres le soin de trancher. Je trouverais certainement davantage d'occasions de soulever des questions. On laisse passer de belles occasions.

En 1992, j'ai présenté une proposition à l'assemblée législative de l'Ontario. En fait, je me suis porté candidat à la direction de mon parti. Je proposais que les projets de loi ne soient pas renvoyés aux comités, mais que les idées ou les problèmes leur soient soumis pour que ces comités partent de là pour rédiger les projets de loi ou présentent des solutions à inclure dans les projets de loi. Cela évitait que les députés se retrouvent trop souvent devant des projets de loi entièrement rédigés par les bureaucrates.

C'est la première fois que je vois un gouvernement se rapprocher d'aussi près de ce que je proposais. Le projet de loi sur la réforme de la Loi électorale sera renvoyé au comité avant même sa deuxième lecture. Si j'étais dans l'opposition, je ferais travailler mon personnel en temps supplémentaire pour passer à travers le projet de loi. À mon avis, nous voyons ici un gouvernement ouvert et responsable qui donne aux députés de l'opposition membres d'un comité la possibilité d'avoir leur mot à dire et de travailler pour corriger tout ce qu'ils jugent imparfait dans un projet de loi.

Quelle est la réaction de l'opposition? Je crains que ce soit la réaction habituelle: «S'ils font cela, nous devons nous y opposer!» C'est très malheureux. C'est une réaction à courte vue qui dénote de l'étroitesse d'esprit. C'est n'avoir guère d'égards pour les électeurs qui envoient ces gens ici, s'attendant à ce qu'ils se mettent sérieusement au travail en comité avec les représentants du gouvernement et les autres députés de l'opposition afin d'améliorer ce projet de loi. Pourquoi s'opposerait-on à ce projet de loi?

 

. 1310 + -

Aux prochaines élections, j'en serai à ma dixième campagne électorale aux niveaux municipal, provincial et fédéral. J'ai une certaine expérience. En fait, ma femme, qui est membre du conseil municipal de Mississauga, est déjà passée par trois campagnes électorales. On peut dire que la politique tient de famille. Nous nous intéressons au processus qui est en place. Nous nous intéressons aux règles. Dans ma famille et au gouvernement, nous croyons fermement à la nécessité de règles équitables pour tous.

Honnêtement, j'irai un peu plus loin dans cette réforme et, si j'en ai la possibilité en comité, il se peut même que je lance l'idée«libre aux membres du comité de l'accepter ou de la rejeter—d'imposer une pénalité à tout électeur qui ne participe pas au vote. Pensez-y. Je sais que c'est une idée qui prête à controverse, mais on le fait dans certains pays. La pénalité en Australie est une amende. On pourrait la prélever au moment de la déclaration d'impôts.

Je trouve inacceptable que, au niveau municipal, le taux de participation soit seulement de 30 p. 100. Le gouvernement municipal a, à mon avis, un impact plus direct sur la vie des gens que les autres ordres de gouvernement et pourtant moins de 30 p. 100 des gens votent. En fait, si le candidat à la mairie n'est pas une personne en vue, il arrive très souvent que le taux de participation soit seulement de 10 p. 100. En revanche, les gens n'hésitent pas à prendre le téléphone pour demander à leur représentant élu de régler les problèmes dans leur collectivité, par exemple en cas de non ramassage des poubelles, ou s'ils ont d'autres difficultés. Ils n'acceptent tout simplement pas la responsabilité de voter.

Au niveau provincial, le pourcentage augmente. Il peut se situer entre 50 et 60 p. 100, et là encore, selon, je suppose, la nature des élections. durant les élections provinciales de 1995 en Ontario, le taux de participation des électeurs a été plus important, car la population en général voulait flanquer à la porte le gouvernement de M. Rae. Cependant, le pourcentage de participation a de nouveau baissé. Au niveau fédéral, là encore, le pourcentage augmente et se situe entre 65 et 75 p. 100.

Nous vivons dans un pays où nous pouvons compter sur la liberté démocratique et nous constatons qu'à d'autres endroits dans le monde, notamment au Pakistan aujourd'hui, des problèmes se posent.

J'ai eu le privilège de faire partie d'un groupe de parlementaires qui s'est rendu en Croatie à l'occasion des premières élections libres tenues depuis la Seconde Guerre mondiale. J'ai vu des hommes et des femmes faisant la queue dans la rue, les larmes aux yeux, car ils avaient la possibilité de voter pour la première fois.

Permettez-moi de vous faire part de mon expérience. Lorsqu'on entrait dans l'isoloir, il y avait là des soldats yougoslaves l'arme à l'épaule de chaque côté de l'urne. Derrière l'urne, il y avait une photo grandeur nature du général Tito. C'était un petit peu intimidant pour les gens qui votaient. J'ai essayé de détendre l'atmosphère en accrochant une épinglette représentant le drapeau du Canada sur l'uniforme des soldats, mais je ne pense pas que cela les ait particulièrement amusés.

Lorsqu'on voit ce genre de chose, lorsqu'on voit des gens lutter et mourir pour leur liberté et la démocratie dans le monde entier comme notre génération a pu le constater, on se rend compte, en toute franchise, qu'à moins d'avoir une raison légitime, à part d'être mort en fait, un Canadien qui ne vote pas n'assume pas la responsabilité qui va de pair avec la liberté de vivre dans une société démocratique aussi remarquable.

J'irais même plus loin, mais au moins, ce projet de loi établit des règles du jeu égales pour tous, traite tout le monde de façon équitable et met de l'ordre dans la procédure électorale au Canada.

 

. 1315 + -

[Français]

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir pour la première fois dans le cadre de cette nouvelle session. Je suis heureux de le faire dans le contexte de la Loi électorale du Canada supposément refondue dans le projet de loi C-2, Loi concernant l'élection des députés à la Chambre des communes, modifiant certaines lois et abrogeant certaines autres lois.

Je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui, d'autant plus que je me suis impliqué dans la consultation qui a été effectuée au lendemain de l'élection du 2 juin 1997 par le président général d'Élections Canada qui a tenté, à cette occasion, d'améliorer les choses, parce que cette loi est pleine de fils d'araignée. Cela fait une bonne trentaine d'années qu'elle n'a pas été révisée de façon significative et le président d'Élections Canada a tenté de faire en sorte que soit modifiées les choses de façon sensible.

Compte tenu de l'expérience que j'ai vécue et de ce qu'on m'a rapporté dans mon comté, lors de l'élection, je me suis impliqué, en pouvant compter sur la collaboration d'un juriste et avocat de mon comté d'une très grande qualité, un ami à moi, Me Jean-François Lacoursière, qui a accepté, comme conseiller juridique du Bloc québécois et comme bon conseiller juridique en matière électorale—qui a développé une expertise très précieuse qui a d'ailleurs servi à quelques occasions—de produire, à ma demande, un rapport que j'ai déposé au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, un rapport sur lequel on pourra revenir. On n'en parle à peu près pas.

D'ailleurs, cela fait partie de la présentation de ce projet de loi. On s'y retrouve très péniblement. C'est une remarque que Me Lacoursière m'avait faite à l'époque, c'est-à-dire que la Loi électorale du Canada est très difficile à consulter et à digérer. Ce n'est pas normal. C'est déjà un des reproches que l'on fait au gouvernement fédéral que de manquer de transparence dans ce qui est, dans son fondement, un peu comme la constitution du processus électoral. Voilà ce qu'est la loi électorale dans un pays.

Donc, c'est important qu'on appelle un chat, un chat. C'est important qu'on puisse s'y référer de façon rapide et efficace, au lieu de se sentir toujours un peu englouti dans le charabia qu'utilisent les avocats du gouvernement—en souhaitant qu'ils s'y retrouvent eux-mêmes—pour faire en sorte que les milliers de personnes qui ont à travailler à un moment donné avec la Loi électorale du Canada puissent s'y retrouver rapidement et efficacement. Ce n'est pas évident du tout quand on consulte ce document à sa face même, compte tenu de son épaisseur, un bon pouce, il y a quelque chose qui ne va pas dans la cabane.

Les reproches de Me Lacoursière portent sur des sujets qui reviendront sans doute, et qui portent sur le vote par la poste qui est, quant à son processus, plein de trous et sur le vote itinérant où, là aussi, il faudra apporter des balises sur lesquelles on reviendra sans doute.

Mon propos portera sur trois grands éléments de reproche que nous faisons au gouvernement dans la présentation de ce projet de loi. Premièrement, il y a le financement des partis politiques, qui n'est pas un sujet nouveau, mais il n'est tellement pas nouveau que ça vaut la peine qu'on y revienne et qu'on tape sur le clou, parce que c'est de l'ordre du scandale quotidien la gestion que font les partis politiques et les accointances qui existent avec le grand capital canadien et les caisses électorales des partis traditionnels canadiens.

Le deuxième grand point sur lequel nous interviendrons, c'est la nomination du personnel électoral. Le troisième point portera sur l'identification de l'électeur qui laisse à désirer et où on a, là comme ailleurs, des exemples provenant du Québec.

Pour ce qui est du financement des partis politiques, on est encore au Moyen Âge, on est encore au niveau primaire. On sait pertinemment que la loi est pleine de trous et qu'elle permet aux corporations comme aux individus de financer les partis politiques canadiens traditionnels, et ce, sans vergogne, sans limite, sans plafond.

Quand on voit des dossiers comme celui d'Onex qui déjà, à mon avis de citoyen québécois, va à l'encontre des intérêts du Québec et peut-être à l'encontre même des intérêts du Canada et qu'on sait qu'en plus de ces faiblesses inhérentes, il y a des liens qui sont plus ou moins honorables entre le Parti libéral du Canada et le principal promoteur du projet Onex, cela désennoblit encore davantage le projet. Cela permet de faire à ce projet tous les procès d'intention que nous voulons bien lui faire.

 

. 1320 + -

Cela l'entache à sa face même, au niveau de sa crédibilité, quand on connaît les accointances qui existent entre un des principaux bailleurs de fonds du Parti libéral, d'anciens membres du Cabinet et la direction actuelle. On voit le gouvernement fédéral annoncer naïvement qu'il y aurait un moratoire, comme si c'était une nouvelle qui lui était propre dans sa gestion interne. On voit à sa face même qu'il s'agit là de l'échéancier du projet d'Onex où, à un moment donné, interviendra le gouvernement fédéral et qu'il prendra une telle mesure pour bonifier le dossier.

Le gouvernement fédéral canadien s'est apparemment beaucoup engagé dans ce dossier en faveur d'Onex pour des raisons qui sont peut-être inavouables parce qu'elles tiennent au financement du parti qui est actuellement au pouvoir.

M. Ghislain Lebel: C'est vrai.

M. Yves Rocheleau: Donc, c'est déshonorant parce que c'est primitif. Des sociétés qui se disent civilisées, comme nous le sommes, font en sorte de s'imposer des règles qui mettent les décideurs gouvernementaux à l'abri des influences indues.

C'est ça le financement démocratique. C'est ce qu'on a réalisé au Québec. Premièrement, on a limité aux électeurs uniquement le droit de financer les partis politiques en plafonnant à 3 000 $ leurs contributions financières.

Le gouvernement du Parti québécois ne dépend de personne. Il dépend de tout le monde, alors que ce gouvernement dépend de ses bailleurs de fonds, que ce soit les entreprises pétrolières et pharmaceutiques, que ce soit les banques ou les entreprises forestières. Tout ce beau monde, à coups de dizaines de milliers de dollars, vient ici et a ses entrées privilégiées avec les ministres et le premier ministre. C'est du domaine de l'inacceptable. C'est du domaine du scandale quotidien. Ne nous demandons pas longtemps pourquoi le gouvernement prend quelquefois des décisions tout à fait douteuses. C'est une relation de cause à effet.

Quand on est mal financés, on ne peut pas nécessairement, s'occuper uniquement de l'intérêt public. On doit penser à d'autres choses, parce que le téléphone peut sonner, quelqu'un peut être menaçant et dire: «On va s'en rappeler la prochaine fois. Tu te trouveras de l'ouvrage et des fonds ailleurs.»

La question publique à notre époque est déjà assez compliquée. C'est une bonne chose que le gouvernement du Québec n'ait pas à s'embarrasser des intérêts privés. C'est la force du gouvernement du Québec, compte tenu des complexités. Il a les mains libres. Il n'a qu'à être intelligent, alors qu'ici on a à composer avec toutes sortes de fantômes qu'on ne peut pas nommer.

La deuxième grande critique est la nomination du personnel électoral. C'est moins connu. Abstraction faite de la compétence des personnes qui oeuvrent, notamment, à un poste stratégique lors d'une élection, comme celui de la présidence des élections dans chacune des circonscriptions, ces postes devraient être comblés de façon à être au-dessus de tout soupçon.

Encore ici, on est dans un état primaire et primitif. On ne se met en garde contre aucun abus. Toutes ces personnes ont des qualités personnelles dont on ne peut pas douter. Il y a toutefois une condition à laquelle il faut semble-t-il satisfaire pour être président d'Élections Canada, qui n'est pas écrite dans le livre, soit celle d'être membre du Parti libéral du Canada. C'est encore mieux si on a été président ou vice-président d'une association, et mieux encore si on a été un candidat défait.

C'est inacceptable et c'est primitif. Ça fait république de bananes. Le Canada est une de ces démocraties occidentales qui donnent des leçons au monde entier quant à la façon de faire les choses. On se promène partout sur la planète pour dire aux gens comment s'administrer, et on tolère encore aujourd'hui qu'un des principaux critères cachés soit le fait d'avoir appartenu au Parti libéral du Canada, d'y avoir été actif, pour pouvoir être nommé.

Le comble, c'est que le directeur général des élections a vu le caractère incongru et inacceptable de la situation et a recommandé depuis longtemps au gouvernement canadien de changer les règles du jeu et de faire en sorte que, comme au Québec, on procède par concours pour désigner le personnel électoral, comme il se doit.

 

. 1325 + -

Enfin, et je termine là-dessus, la dernière grande faiblesse qu'on observe est qu'on ne retrouve aucun mot quant à la nécessité de s'identifier comme électeur, avec une carte d'identité ou autrement. Compte tenu du caractère impersonnel de nos sociétés et de nos grandes villes, il est tout à fait normal qu'on exige dorénavant du citoyen de s'identifier à celui qui est à la table, parce qu'on connaît toutes les malversations qu'il peut y avoir dans ce domaine.

C'est dans l'ordre des choses que l'on exige dorénavant aux électeurs et aux électrices de s'identifier à qui de droit, à une personne dûment mandatée, pour avoir le droit de voter, lequel est un des droits fondamentaux en démocratie.

Il y a, encore là, une faiblesse considérable dans ce projet de loi que nous dénonçons.

[Traduction]

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre part aujourd'hui au débat sur la Loi électorale du Canada. Je le trouve extrêmement intéressant. J'ai siégé au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre qui a fait sa part dans ce dossier. Je pense que nous avons travaillé à l'abri de tout sectarisme, de façon efficace, et que les résultats sont à la hauteur des attentes des Canadiens face à leur système électoral.

Le Canada possède un système électoral qui est une inspiration pour le monde entier. Il est à coup sûr considéré comme étant d'un grand intérêt aux quatre coins du globe. Il témoigne de la grande démocratie dont nous jouissons au Canada et je pense que nous devrions être très fiers de son efficacité et de ce qu'il représente pour les Canadiens, où qu'ils vivent dans ce grand pays qui est le nôtre. Il en dit long sur les valeurs, les institutions et les symboles qui nous unissent en tant que peuple et donnent de nous l'image d'une nation efficace, non seulement chez nous mais aussi au sein de la communauté internationale.

Je suis quelque peu étonné par les députés réformistes, notamment le député d'Elk Island, qui ont tenté de dénigrer ce que nous essayons de faire. Au lieu de se réjouir du fait que le projet de loi sera renvoyé à un comité et qu'ils feront partie d'un système où des changements concrets peuvent être apportés, au lieu de collaborer avec le gouvernement sur cette question extrêmement importante, les réformistes se contentent, comme d'habitude, de présenter des points de vue extrêmes pour tenter de saboter le système. Cela est des plus regrettables.

Il est vrai qu'il s'agit là d'un parti qui cherche toujours à opposer les régions aux autres, les gens aux autres et les groupes aux autres. Il est extrêmement regrettable que les réformistes adoptent constamment cette attitude. Cela montre bien à quelle enseigne loge ce parti. Je sais que les Canadiens refuseront de l'appuyer. Ce qu'ils appuieront, c'est la position du gouvernement sur ce projet de loi extrêmement important, car ils comprennent que c'est la voie à suivre. Nous devons nous assurer de faire ce qu'il convient pour les Canadiens, car cela s'inscrit dans notre système démocratique tel que nous le connaissons.

Je pourrais parler de bien d'autres questions, par exemple, du financement des élections. Je sais...

Le vice-président: Je suis désolé, mais je dois interrompre le député et les délibérations pour mettre aux voix la motion dont la Chambre est saisie.

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Le whip en chef du gouvernement désire faire un rappel au Règlement.

M. Bob Kilger: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Des discussions ont eu lieu entre tous les whips. Conformément au paragraphe 47(5) du Règlement, vous constaterez qu'il y a consentement pour reporter le vote par appel nominal demandé au sujet du projet de loi C-2 à la fin de la période prévue pour l'étude des initiatives ministérielles, aujourd'hui.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour reporter le vote à 18 h 30, tel que convenu par tous les whips?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: Je ferai un nouvel appel au besoin, mais je crois que cinq députés se sont levés et je suis prêt à différer le vote. Le vote est donc reporté à 18 h 30.  

*  *  *

 

. 1330 + -

[Français]

LOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET LES DOCUMENTS ÉLECTRONIQUES

 

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois, dont un comité a fait rapport avec des amendements.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le vice-président: Il y a 157 motions d'amendement inscrites au Feuilleton des Avis en ce qui concerne l'étape du rapport du projet de loi C-6.

[Traduction]

Les motions seront regroupées de la façon suivante pour le débat.

[Français]

Groupe no 1: Les motions nos 1, 2, 5, 9, 10, 27 à 33, 36 à 43, 47 à 49, 57, 59 à 97, 100 à 157.

[Traduction]

Le groupe no 2 comprendra les motions 3, 4, 6 à 8, 11 à 26, 34, 35, 44 à 46, 50 et 51.

[Français]

Groupe no 3: Les motions nos 52 à 56, 58, 98 et 99.

La façon de mettre aux voix les motifs de chaque groupe est disponible auprès du greffier. La Présidence redonnera les détails à la Chambre au moment de chaque mise aux voix.

Bien entendu, les députés savent qu'il y a beaucoup de motions à l'étape du rapport figurant au Feuilleton des Avis, relativement au projet de loi C-6.

Les motions portant les numéros 100 à 155 préoccupent la Présidence en ce qu'elles ne sont pas conformes aux pratiques habituelles de cette Chambre. Ces motions supprimeraient, en fait, tous les articles de l'annexe 1. Selon la pratique habituelle, une seule motion suffirait pour supprimer l'annexe 1.

[Traduction]

J'ai décidé d'accueillir ces motions cette fois-ci. Toutefois, à l'avenir, une seule motion sera autorisée. J'en ai informé les greffiers des Journaux. Ils feront savoir aux députés qui désirent publier de telles motions qu'elles ne seront pas acceptées.

[Français]

Je vais maintenant soumettre les motions nos 1, 2, 5, 9, 10, 27 à 33, 36 à 43, 47 à 49, 57, 59 à 97, 100 à 157 à la Chambre.

M. Pierre Brien: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement, car je voudrais un éclaircissement sur ce que vous venez de mentionner.

Ai-je j'ai bien compris que pour cette fois-ci, vous permettez que les motions nos 100 à 157 demeurent individuelles, mais qu'à l'avenir, vous souhaitez qu'elles soient dans un seul et même groupe, ce qui, de toute façon, ne changerait en rien la situation actuelle, puisque ces motions font toutes partie du groupe no 1 qui sera débattu à partir d'aujourd'hui?

Le vice-président: L'honorable député a tout à fait raison. Nous étudierons aujourd'hui toutes les motions devant la Chambre, comme le député l'a indiqué. J'ai mentionné que, pour le futur, nous n'accepterons qu'une motion au lieu de plusieurs.

MOTIONS D'AMENDEMENT

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ) propose:  

 

. 1335 + -

    Motion no 1

    Que le projet de loi C-6, dans le titre, soit modifié par suppression du titre intégral.

    Motion no 2

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 1.

    Motion no 5

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 3.

    Motion no 9

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 5.

    Motion no 10

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 6.

    Motion no 27

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 10.

    Motion no 28

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 11.

    Motion no 29

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 12.

    Motion no 30

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 13.

    Motion no 31

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 14.

    Motion no 32

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 15.

    Motion no 33

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 16.

    Motion no 36

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 18.

    Motion no 37

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 19.

    Motion no 38

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 20.

    Motion no 39

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 21.

    Motion no 40

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 22.

    Motion no 41

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 23.

    Motion no 42

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 24.

    Motion no 43

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 25.

    Motion no 47

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 27.

    Motion no 48

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 27.1.

    Motion no 49

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 28.

    Motion no 57

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 32.

 

. 1340 + -

    Motion no 59

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 33.

    Motion no 60

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 34.

    Motion no 61

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 35.

    Motion no 62

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 36.

    Motion no 63

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 37.

    Motion no 64

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 38.

    Motion no 65

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 39.

    Motion no 66

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 40.

    Motion no 67

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 41.

    Motion no 68

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 42.

    Motion no 69

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 43.

    Motion no 70

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 44.

    Motion no 71

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 45.

    Motion no 72

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 46.

    Motion no 73

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 47.

    Motion no 74

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 48.

    Motion no 75

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 49.

    Motion no 76

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 50.

    Motion no 77

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 51.

    Motion no 78

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 52.

    Motion no 79

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 53.

    Motion no 80

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 54.

    Motion no 81

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 55.

    Motion no 82

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 56.

    Motion no 83

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 57.

    Motion no 84

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 58.

    Motion no 85

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 59.

    Motion no 86

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 60.

    Motion no 87

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 61.

    Motion no 88

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 62.

    Motion no 89

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 63.

    Motion no 90

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 64.

    Motion no 91

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 65.

    Motion no 92

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 66.

    Motion no 93

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 67.

    Motion no 94

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 68.

    Motion no 95

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 69.

    Motion no 96

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 70.

    Motion no 97

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 71.

 

. 1345 + -

    Motion no 100

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.1 de l'annexe 1.

    Motion no 101

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.1.1 de l'annexe 1.

    Motion no 102

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.1.2 de l'annexe 1.

    Motion no 103

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.1.3 de l'annexe 1.

    Motion no 104

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.1.4 de l'annexe 1.

    Motion no 105

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.2 de l'annexe 1.

    Motion no 106

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.2.1 de l'annexe 1.

    Motion no 107

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.2.2 de l'annexe 1.

    Motion no 108

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.2.3 de l'annexe 1.

    Motion no 109

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.2.4 de l'annexe 1.

    Motion no 110

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.2.5 de l'annexe 1.

    Motion no 111

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.2.6 de l'annexe 1.

    Motion no 112

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'annexe 4.3 de l'annexe 1.

    Motion no 113

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.3.1 de l'annexe 1.

    Motion no 114

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.3.2 de l'annexe 1.

    Motion no 115

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.3.3 de l'annexe 1.

    Motion no 116

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.3.4 de l'annexe 1.

    Motion no 117

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.3.5 de l'annexe 1.

    Motion no 118

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.3.6 de l'annexe 1.

    Motion no 119

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.3.7 de l'annexe 1.

    Motion no 120

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.3.8 de l'annexe 1.

    Motion no 121

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.4 de l'annexe 1.

    Motion no 122

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.4.1 de l'annexe 1.

    Motion no 123

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.4.2 de l'annexe 1.

    Motion no 124

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.4.3 de l'annexe 1.

    Motion no 125

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.5 de l'annexe 1.

    Motion no 126

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.5.1 de l'annexe 1.

    Motion no 127

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.5.2 de l'annexe 1.

    Motion no 128

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.5.3 de l'annexe 1.

    Motion no 129

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.5.4 de l'annexe 1.

    Motion no 130

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.6 de l'annexe 1.

    Motion no 131

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.6.1 de l'annexe 1.

    Motion no 132

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.6.2 de l'annexe 1.

    Motion no 133

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.6.3 de l'annexe 1.

    Motion no 134

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.7 de l'annexe 1.

    Motion no 135

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.7.1 de l'annexe 1.

    Motion no 136

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.7.2 de l'annexe 1.

    Motion no 137

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.7.3 de l'annexe 1.

    Motion no 138

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.7.4 de l'annexe 1.

    Motion no 139

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.7.5 de l'annexe 1.

    Motion no 140

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.8 de l'annexe 1.

    Motion no 141

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.8.1 de l'annexe 1.

    Motion no 142

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.8.2 de l'annexe 1.

    Motion no 143

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.8.3 de l'annexe 1.

    Motion no 144

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.9 de l'annexe 1.

    Motion no 145

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.9.1 de l'annexe 1.

    Motion no 146

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.9.2 de l'annexe 1.

    Motion no 147

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.9.3 de l'annexe 1.

    Motion no 148

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.9.4 de l'annexe 1.

    Motion no 149

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.9.5 de l'annexe 1.

    Motion no 150

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.9.6 de l'annexe 1.

    Motion no 151

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'annexe 4.10 de l'annexe 1.

    Motion no 152

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.10.1

    Motion no 153

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.10.2 de l'annexe 1.

    Motion no 154

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.10.3 de l'annexe 1.

    Motion no 155

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'article 4.10.4 de l'annexe 1.

    Motion no 156

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'annexe 2.

    Motion no 157

    Que le projet de loi C-6 soit modifié par suppression de l'annexe 3.

 

. 1350 + -

[Traduction]

Le vice-président: J'aimerais rappeler aux députés qu'après le discours de 20 minutes, le débat est restreint à 10 minutes.

[Français]

M. Pierre Brien: Monsieur le Président, aujourd'hui, je prends la parole sur le premier groupe d'amendements du projet de loi C-6, qui est l'ancien projet de loi C-54 qui visait à favoriser le commerce électronique et à protéger les renseignements personnels.

D'entrée de jeu, je veux dire que nous avons beaucoup de problèmes avec ce projet de loi pour plusieurs raisons. C'est pour cela que nous avons autant d'amendements visant à demander le retrait du projet de loi, ou, à tout le moins, de suspendre son application au Québec.

Dans le deuxième groupe d'amendements, nous aurons la chance de discuter plus spécifiquement d'un amendement particulier qui permettrait de faire cela si le gouvernement en avait la volonté.

Ce projet de loi cherche, dans un contexte où tout évolue rapidement au niveau technologique, à assurer une expansion du commerce électronique tout en respectant la confidentialité des renseignements qu'on donne ou qu'on consent à donner, ou l'utilisation que pourraient faire certaines personnes des renseignements personnels qu'on donne sans savoir quel consentement on a donné.

Ce qu'il faut dire, c'est que depuis cinq ans déjà il existe au Québec une loi qui protège les renseignements personnels. L'arrivée ou la mise en application de la loi fédérale fera en sorte de créer un fouillis administratif très complexe pour les entreprises. Il y a une volonté du gouvernement fédéral que l'on peut comprendre. Les neuf autres provinces n'ont pas de loi qui protège les renseignements personnels. Donc, le gouvernement fédéral a décidé, lui, de prendre les devants et d'en faire une. Libres à elles si les autres provinces ne veulent pas avoir leur loi et veulent laisser ce champ de juridiction, qui pourrait leur appartenir, au gouvernement fédéral. Mais ce n'est pas le cas du Québec.

 

. 1355 + -

Le Québec a déjà clairement exprimé son intention, par une loi, de protéger les renseignements personnels, et il y a même des dispositions du Code civil qui y font expressément référence. Donc, les entreprises québécoises doivent respecter les dispositions du Code civil et, en même temps, une loi.

C'est la raison pour laquelle durant les audiences, de nombreux groupes sont venus témoigner devant le comité pour dire au gouvernement fédéral: «Vous êtes en train de mettre le Québec dans une très mauvaise situation, alors qu'il y a une loi chez nous qui protège les renseignements et la confidentialité. Avec votre loi, les entreprises ne sauront pas toujours quelle loi elles devront appliquer et quelle définition s'applique dans des cas particuliers. Certaines organisations devront se soumettre à la loi fédérale, d'autres à la loi provinciale, d'autres aux deux ou à une partie de la loi et certaines à une autre partie de la loi.»

Bien sûr, le gouvernement dira: «Mais cela ne s'appliquera que dans trois ans, parce que pour les trois premières années de l'application de la loi, cela ne s'étendra pas à tous les champs, à toutes les données ou à toutes les entreprises.» Mais dans trois ans, cette loi va s'étendre beaucoup plus loin que son application actuelle et va régir tout le monde.

Par décret, le Conseil des ministres pourrait décider de suspendre certains champs d'activités ou faire en sorte qu'un certain nombre de secteurs soient sous la juridiction d'une autre loi. Mais cela va dépendre—selon l'évaluation du gouvernement fédéral—si cela répond à ses objectifs, à ses critères. On sait que le Code civil et la common law n'ont pas nécessairement toujours les mêmes approches par rapport à certaines questions. Alors, il est bien évident qu'il va y avoir des divergences de vue, d'orientation et d'un certain nombre de mécanismes.

Je vais citer les propos d'un certain nombre de personnes qui se sont exprimées sur le sujet lors des audiences du comité. Je commence par le Conseil du patronat du Québec qui est venu dire: «Toutefois, dans la mesure où la compétence constitutionnelle attribuée aux provinces par l'article 92.13 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique en matière de protection des renseignements personnels et de respect de la vie privée ne fait pas de doute et que le législateur [...].»

Le Président: Je regrette de devoir vous interrompre, mais puisque vous disposez encore de six minutes, j'ai cru qu'il serait préférable de le faire à ce moment-ci. Je vais d'abord déposer un rapport sur le Bureau et ensuite, nous procéderons avec les déclarations de députés. Mais vous aurez de nouveau la parole après la période des questions orales.

*  *  *

LE COMMISSAIRE À LA PROTECTION DE LA VIE PRIVÉE

Le Président: J'ai l'honneur de déposer sur le Bureau le rapport de 1998-1999 du commissaire à la protection de la vie privée.

[Traduction]

Ce rapport est renvoyé d'office en permanence au Comité permanent de la justice et des droits de la personne.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

ALEXINA LOUIE

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour féliciter Alexina Louie de ma circonscription, récipiendaire du Prix Jules-Léger de la nouvelle musique de chambre pour son oeuvre Nightfall pour 14 cordes solo.

Établi en 1978, le Prix Jules-Léger est une récompense nationale visant à inviter les compositeurs canadiens à écrire pour des groupes de musique de chambre et à favoriser la présentation de la musique de chambre canadienne. C'est la seule récompense du gouverneur général qui est accordée pour la musique et Alexina est la première femme à la recevoir.

Le travail d'Alexina Louie est reconnu et acclamé aussi bien au Canada que sur la scène internationale. Mme Louie a déjà été nommée compositrice de l'année et ses compositions lui ont valu un prix Juno et un prix Chalmers. Mme Louie a également reçu le prix Socan accordé au compositeur canadien dont les oeuvres sont jouées le plus fréquemment. Actuellement compositrice en résidence de la Compagnie d'opéra canadienne, elle travaille à la création d'un grand opéra qui sera produit à l'automne 2000.

Toutes nos félicitations, Alexina.

*  *  *

LES DONS D'ORGANES

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement vient tout juste de réagir publiquement à la crise des donneurs d'organes au Canada. C'est un énorme désappointement. Sachant que 150 Canadiens meurent chaque année en attendant une greffe et que le Canada affiche l'un des pires taux de donneurs dans le monde industrialisé, le gouvernement a tergiversé pendant quatre mois, au cours desquels 66 Canadiens sont décédés.

La solution du gouvernement consiste à attendre, à étudier la question sous tous ses angles, même s'il existe un accord en 13 points entre le gouvernement fédéral et les provinces, et même si le comité de la santé a présenté un plan exhaustif pour sauver la vie des Canadiens.

 

. 1400 + -

Comment se fait-il qu'aucun engagement n'a été pris pour mettre en place un registre national des éventuels donneurs et receveurs? Pourquoi ne s'est-on pas engagé à former et à désigner des coordonnateurs de dons d'organes? Comment expliquer qu'il n'y ait aucun effort national pour joindre une carte de don d'organe au dossier de chaque patient au Canada?

Si le gouvernement est incapable de régler la crise des donneurs d'organes, qui est un dossier vraiment capital, comment peut-on espérer qu'il puisse venir à bout des difficultés encore plus complexes que soulèvent les soins de santé?

*  *  *

LE WOMEN'S COLLEGE HOSPITAL

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Monsieur le Président, le 12 octobre 1999, j'ai eu l'honneur de dévoiler au nom de la ministre du Patrimoine canadien une plaque des lieux et monuments historiques commémorant l'importance du rôle joué par le Women's College Hospital dans la prestation de services médicaux aux femmes, par des femmes.

[Français]

Le Women's College Hospital a toujours été un élément vital de la communauté. La commémoration d'aujourd'hui est une reconnaissance méritée de la contribution de l'hôpital au mouvement des femmes, à la communauté et à la médecine.

[Traduction]

La plaque précise ce qui suit:

    Le Women's College Hospital occupe une place de choix dans l'histoire médicale du Canada. Depuis ses débuts, en 1898, alors qu'il n'était qu'un petit service de consultations externes, jusqu'à sa transformation en un hôpital d'enseignement moderne, l'établissement symbolise la lutte menée par les femmes en vue de gagner leur place au sein de la profession médicale. L'hôpital leur a offert des débouchés dans l'enseignement et en milieu hospitalier qui étaient souvent inaccessibles ou très limités ailleurs au pays. Grâce à la vitalité avec laquelle il a mis l'accent sur les questions de santé touchant les femmes et les familles, l'hôpital a apporté une contribution innovatrice sur les plans du diagnostic et du traitement des maladies.

Je tiens également à remercier Lindalee Tracy pour le film intitulé «Passing the Flame: The Legacy of Women's College Hospital».

*  *  *

[Français]

LE RÉSEAU INTERNATIONAL SUR LA POLITIQUE CULTURELLE

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, en juin 1998, le Canada a été l'hôte de la première réunion internationale des ministres nationaux chargés de la culture. Ces derniers avaient alors créé le Réseau international sur la politique culturelle.

Après une année d'existence, le Réseau compte une quarantaine de membres représentatifs d'une grande diversité de pays tels que la France, le Royaume-Uni, la Suède, l'Afrique du Sud, l'Italie, le Sénégal, la Barbade, le Mexique et les Philippines.

La deuxième réunion informelle du Réseau sur la politique culturelle s'est déroulée à Oaxaca, au Mexique, le mois dernier. Cette réunion a permis d'assurer la viabilité du Réseau comme forum international dynamique des questions liées à la politique culturelle.

Les ministres de la Culture du Québec et de Terre-Neuve faisaient partie de la délégation canadienne à Oaxaca, ce qui a enrichi notre participation et les discussions en général.

Enfin, le Canada est heureux de fournir à ce regroupement le Bureau de liaison permanent qui fera le suivi des activités du Réseau.

*  *  *

[Traduction]

LE TRANSPORT DU GRAIN

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, le Saskatchewan Wheat Pool exerce un quasi-monopole sur l'achat des grains, pour les subdivisions ferroviaires d'Altawan et de Notukeu dans ma circonscription.

Étant donné qu'en modifiant les règles de répartition des wagons le pool peut utiliser ailleurs ses wagons à grain autorisés, les silos élévateurs situés le long de cette ligne sont combles depuis plus de deux semaines.

La société ferroviaire ne fournira pas de wagons aux quelques silos élévateurs concurrents ou aux producteurs qui souhaitent charger leur propre grain, car la concurrence ne peut à elle seule former un train de 50 wagons. Les agriculteurs de la région sont donc forcés de transporter leur grain sur une distance pouvant atteindre 80 kilomètres sur de mauvaises routes pendant que leurs silos élévateurs locaux sont inactifs.

Je ne veux pas laisser entendre que le pool et la société ferroviaire font collusion, mais ils ont un intérêt commun à limiter la quantité de grain expédié à partir de cette ligne. Lorsque les expéditions de grain diminuent, la ligne devient moins viable et l'abandon de celle-ci devient plus facile à justifier.

Comme d'habitude, les intérêts des agriculteurs sont subordonnés à ceux des entreprises céréalières et des sociétés de chemins de fer.

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[Français]

M. ROBERT MUNDELL

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, la semaine dernière, Robert Mundell, professeur à l'Université Columbia, recevait le prix Nobel d'économie. L'Académie royale des sciences de Suède soulignait les travaux de cet économiste canadien, un des précurseurs de l'union monétaire européenne, et ce, quelques mois à peine après l'implantation de l'euro.

Dès le début des années 1960, le professeur Mundell faisait porter plusieurs de ses travaux sur l'union monétaire et économique, alors que personne n'osait remettre en cause l'existence des monnaies nationales.

D'ailleurs, l'Académie déclarait: «Robert Mundell a réfléchi avec une acuité peu commune, quasi prophétique, aux problèmes de l'évolution future des dispositions monétaires internationales et des marchés des capitaux.» Dommage que le gouvernement libéral refuse de s'inspirer de ce grand économiste et de faire comme le Bloc québécois, se pencher sérieusement sur l'union monétaire nord-américaine.

Une des meilleures façons d'affronter l'avenir, c'est de le construire et non de le subir passivement comme le fait ce gouvernement, dans un dossier qui relève pourtant de sa compétence.

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. 1405 + -

[Traduction]

LE PRIX ENDICOTT-PEABODY POUR ACTIVITÉS HUMANITAIRES

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'insigne honneur de féliciter le ministre des Affaires étrangères, le député de Winnipeg-Centre-Sud, qui a reçu le prix Endicott-Peabody pour ses activités humanitaires; ce prix, qui est décerné pour la première fois, lui a été attribué en reconnaissance de son action visant à débarrasser la planète des mines anti-personnel. Notre ministre recevra son prix vendredi de l'association de Boston pour les Nations Unies.

Ancien gouverneur du Massachusetts et vice-président de l'association bostonienne, Endicott Peabody a consacré la dernière partie de sa vie aux activités d'un certain nombre d'associations pacifistes oeuvrant pour la suppression des mines anti-personnel.

Le traité d'interdiction des mines anti-personnel a eu force de loi le 1er mars 1999; il a été signé par 135 pays et ratifié par 86.

Ce n'est pas la première fois qu'un tel hommage est rendu au ministre pour son action dans le domaine. En effet, il a également reçu en octobre dernier le prix nord-sud de la paix décerné par le Conseil de l'Europe. Qu'il en soit félicité.

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L'INDUSTRIE DU CAMIONNAGE

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de signaler à la Chambre que les principaux représentants de l'industrie canadienne du camionnage sont nombreux à nous rendre visite aujourd'hui.

Il convient de rappeler que le commerce est l'un des moteurs de la croissance économique au Canada. Relativement peu populeux mais très vaste, le pays ne peut se permettre de négliger ni les transports ni le commerce.

Ma circonscription d'Etobicoke-Nord est voisine de l'aéroport Pearson et des autoroutes de la série des 400. Nous savons pertinemment pourquoi l'industrie du camionnage est vitale pour l'économie en Ontario. Les entreprises de camionnage comptent pour environ 400 000 emplois.

[Français]

Je suis heureux de voir l'industrie du camionnage et l'industrie ferroviaire travailler ensemble pour assurer un système de transport efficace et sûr qui continue d'améliorer les commerces locaux et nationaux et, par la même occasion, garder l'économie forte.

[Traduction]

C'est ce qui explique que nous devions travailler en étroite collaboration avec l'industrie nationale du camionnage, pour nous garantir un système national des transports qui soit à la fois respectueux de l'environnement et viable dans le nouveau millénaire. En faisant l'effort de collaborer, nous permettrons à cette industrie de garder le Canada sur la voie du progrès.

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L'AGRICULTURE

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour condamner l'attitude du gouvernement face à la crise actuelle que connaît l'agriculture dans l'ouest.

Les agriculteurs de ma circonscription, Dauphin—Swan River, et du reste des Prairies sont menacés de faillite parce que le gouvernement ne présente pas de solutions réelles.

Aujourd'hui, le gouvernement continue de négliger la situation désastreuse que connaît l'agriculture dans l'ouest du Canada. L'agriculture, qui est un secteur important de l'économie canadienne, connaît de graves problèmes. La semaine dernière, les agriculteurs de la Saskatchewan et du Manitoba sont venus à Ottawa afin d'exprimer leur mécontentement. Au cours de l'été, ils ont tenu des manifestations non violentes afin d'attirer l'attention sur leurs difficultés.

Étant donné les récentes controverses dans la question des pêches du Canada Atlantique, le gouvernement a demandé que les négociations se déroulent dans le calme. Les agriculteurs des Prairies ont tenté de tenir des négociations dans le calme. Cependant, le gouvernement ne les écoute pas. La communauté agricole implore qu'on l'aide.

Je demande à la Chambre de m'appuyer en exhortant le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire à prendre la décision qui s'impose. Les agriculteurs de l'Ouest ont besoin d'aide et ils en ont besoin maintenant.

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[Français]

LA LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ

Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Monsieur le Président, le 17 octobre marquait la Journée internationale de la lutte contre la pauvreté. Au Canada, malheureusement, un grand nombre de personnes vivent encore dans la pauvreté.

J'aimerais souligner le travail extraordinaire accompli par des groupes communautaires d'Ahuntsic, entre autres, Solidarité Ahuntsic, avec qui je suis ambassadrice pour la lutte contre la pauvreté, le Carrefour d'aide aux nouveaux arrivants, qui a organisé, jeudi dernier, un colloque sur la pauvreté, ainsi que le SNAC et la Corbeille Bordeaux-Cartierville, avec lesquels j'organise, à l'occasion de Noël, une collecte de denrées non périssables.

[Traduction]

Par le passé et dans le récent discours du Trône, notre gouvernement a pris des mesures positives afin d'aider les familles canadiennes qui vivent dans la pauvreté et, plus important encore, afin d'aider les enfants, à l'aide de programmes tels que le programme national Bon départ, la nouvelle Prestation nationale pour enfants et le Programme de la prestation fiscale pour enfants. Toutefois, nous devons unir nos efforts pour faire plus encore. Nous devons aux générations futures de veiller à ce qu'aucun de nos enfants n'ait faim, ne soit sans abri ou ne vive dans la pauvreté.

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LE DÉCÈS DE FERNAND DUBÉ

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, tous les habitants du Nouveau-Brunswick déplorent la disparition de l'honorable Fern Dubé, décédé récemment.

Élu pour la première fois à l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick en 1974, il a été au service de sa province pendant 13 ans à titre de ministre du Tourisme et de l'Environnement, de ministre des Finances et de l'Énergie, de procureur général et ministre de la Justice et enfin de ministre du Commerce et de la Technologie. Il a joué un rôle particulièrement important pour amener francophones et anglophones de la province à se comprendre.

Ceux d'entre nous qui ont connu Fern Dubé se souviendront de lui comme d'un vrai gentilhomme. Il n'a jamais rompu le contact avec les petites gens. Au moment de son décès, il était toujours à leur service, cette fois à titre de maire de sa chère ville de Campbellton.

 

. 1410 + -

Fern laisse dans le deuil sa femme, Monique, ses filles, France et Anik, et ses garçons, Pierre et Jean, notre collègue, le député de Madawaska—Restigouche.

Je suis persuadée que tous les députés se joignent à moi pour exprimer leur condoléances à la famille de Fern Dubé.

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[Français]

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, au nom du Bloc québécois, je félicite M. Robert Rabinovitch pour sa nomination au poste de directeur général de la Société Radio-Canada.

M. Rabinovitch a certainement les qualités et les compétences pour s'acquitter honorablement de ses nouvelles fonctions. Il devra toutefois relever un défi de taille, soit d'assurer l'indépendance de la Société Radio-Canada, pilier sur lequel repose la confiance de la population et qui en justifie l'octroi de fonds publics.

Or, l'indépendance de la Société est menacée par la volonté de Patrimoine Canada de mettre Radio-Canada au service des objectifs politiques de son gouvernement.

Reconnu pour sa volonté d'avoir les coudées franches dans l'exercice de ses fonctions, souhaitons que M. Rabinovitch se sente libéré de ces vieux démons trudeauistes qui voulaient faire de Radio-Canada l'instrument de l'unité canadienne.

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[Traduction]

LES PARCS NATIONAUX

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, il y a dix ans, le gouvernement s'est engagé à parachever le réseau des parcs nationaux au plus tard en l'an 2000. À ce jour, seulement quatre des 15 parcs nationaux ont été créés.

Il y a deux ans, Parcs Canada disait qu'un seul parc n'était exposé à aucun danger. Les 38 autres sont menacés par l'exploitation forestière et minière, la construction de routes et les aménagements hydroélectriques et touristiques. En outre, huit parcs nationaux ne sont pas protégés par la Loi sur les parcs nationaux. Il va sans dire que les parcs nationaux du Canada sont plongés dans de graves difficultés, au moment où le groupe dirigé par Jacques Gérin, consultant de réputation internationale, s'apprête à déposer son rapport.

Le discours du Trône parle de façon très constructive des parcs nationaux. Je félicite le gouvernement et je l'exhorte à donner la protection de la loi à tous les parcs nationaux, à parachever le réseau des parcs nationaux et à mettre en oeuvre les recommandations du rapport Gérin.

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L'AGRICULTURE

M. Myron Thompson (Wild Rose, Réf.): Monsieur le Président, le week-end dernier, le ministre de l'Agriculture nous invitait à participer à la Fête à la Ferme, une célébration de l'agriculteur canadien. Tous mes collègues à la Chambre ont reçu cette invitation sous la forme d'une luxueuse trousse d'information distribuée par le ministre.

S'il s'agit là de la réponse du ministre à la crise agricole dont presque tous les Canadiens, sauf le gouvernement, semblent être au courant, alors tout espoir est perdu pour nos localités agricoles.

Je mets le ministre au défi de remettre personnellement son joli petit calendrier à une famille agricole qui gagnera vraiment moins que rien cette année. Pour l'agriculteur de l'Ouest qui est sur le point de perdre la terre qui appartenait à sa famille depuis plusieurs générations, il n'y a pas de fête à sa ferme.

Depuis juin, le ministre a déclaré à maintes reprises que le programme ACRA était presque prêt. Je sais bien que le secteur agricole ne représente que 3 p. 100 des Canadiens, mais espérons que les agriculteurs recevront de l'aide avant la Fête à la Ferme d'octobre prochain.

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LA SEMAINE SANS VIOLENCE

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, la YWCA tient cette année la quatrième édition annuelle de sa Semaine sans violence. Cette manifestation est devenue, à l'échelle du pays, un outil important dans nos efforts pour faire du Canada une société moins violente. Elle nous invite chaque année à réfléchir aux répercussions de la violence sur nous tous.

Cette année, à Peterborough et partout au Canada, cet événement met entre autres l'accent sur les jeunes. Il s'agit de faire participer les jeunes et de les encourager à réfléchir à la richesse et à la joie d'un style de vie non violent.

J'exhorte les jeunes et les moins jeunes à visiter le site Web www.7wv.com, un site Internet conçu par les jeunes pour leur permettre d'échanger leurs réflexions sur la non-violence.

J'invite tous les députés et tous les Canadiens à contribuer à la Semaine sans violence de la YWCA.

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LA DÉPUTÉE DE DARTMOUTH

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, c'est avec un immense plaisir que j'informe la Chambre que la députée néo-démocrate de Dartmouth est aujourd'hui le premier député fédéral en poste à jamais être sélectionné pour le Prix littéraire du Gouverneur général.

Sélectionnée dans la catégorie Pièces de théâtre en langue anglaise pour sa pièce intitulée Corker, la députée de Dartmouth allie sa passion pour son travail de parlementaire à son talent de dramaturge pour créer une pièce puissante sur l'importance de soutenir les familles et d'édifier des communautés, qui apprécie et célèbre la contribution de tous.

 

. 1415 + -

Je demande à tous les députés de féliciter avec moi notre artiste, notre parlementaire dramaturge, notre bien-aimée députée de Dartmouth.

[Note de la rédaction: Les députés se lèvent et applaudissent.]

Le Président: Il est rare que l'un d'entre nous soit reconnu de cette manière. Aujourd'hui, vous pouvez bien sûr arborer un accessoire à la Chambre. Au nom de vos collègues députés, je vous souhaite bonne chance, Wendy, et je vous remercie pour ce que vous faites pour la Chambre en étant une aussi grande artiste et une aussi bonne parlementaire.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

L'INDUSTRIE AÉRIENNE

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, il y a quelques heures à peine, Air Canada et ses partenaires ont annoncé leur proposition de restructuration de l'industrie aérienne. Onex et les Lignes aériennes Canadien International ont annoncé leur proposition il y a déjà quelques semaines. Nous connaissons maintenant la position des deux transporteurs aériens, mais n'avons encore rien entendu de la part du gouvernement. Cette question n'a même pas été mentionnée dans le discours du Trône.

Maintenant que tous les autres ont abandonné le statu quo, le premier ministre nous dira-t-il ce qu'il entrevoit pour l'industrie canadienne du transport aérien au XXIe siècle?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme on l'a dit, certaines offres ont été faites aujourd'hui par Air Canada, tout comme Onex a déjà fait une offre aux actionnaires de la société. Ceux-ci décideront de ce qui est le mieux pour eux.

Le ministre des Transports a énoncé très clairement les six conditions que le gouvernement exige dans les circonstances, mais nous devons connaître le résultat du dépôt des soumissions avant d'assurer le maintien de notre politique, qui est de voir à ce que nous ayons au moins un transporteur aérien national au Canada.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement reste immobile alors que toute l'industrie du transport aérien est en mouvement. Le gouvernement a certainement la responsabilité d'être plus précis au sujet d'un cadre stratégique pour l'industrie du transport aérien. Par exemple, la proposition Onex-Canadien et la proposition Air Canada-Lufthansa-United entrevoient toutes deux un rôle majeur pour les transporteurs aériens et les investisseurs étrangers.

Quelle est la position du gouvernement à l'égard des règles actuelles sur la propriété et la participation étrangères pour cette industrie? Maintiendra-t-il les règles actuelles ou a-t-il l'intention de les réviser?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, j'ai toujours dit que le gouvernement envisagerait toute modification des lois ou des règlements pouvant accroître la viabilité et la compétitivité de l'industrie canadienne du transport aérien, et c'est exactement ce que nous ferons.

Nous sommes convaincus que non seulement le gouvernement doit énoncer les cinq principes, comme je l'ai fait l'autre jour, mais que nous devrions aussi demander l'avis des parlementaires sur cette très importante question. C'est pourquoi le comité se réunit. Nous serons guidés dans ce dossier par les parlementaires de la Chambre et du Sénat.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, il n'est pas encore arrivé le jour où le gouvernement nous parlera et demandera l'avis de la Chambre.

Des centaines de milliers d'utilisateurs du transport aérien veulent être assurés qu'ils continueront d'avoir un service de qualité au plus bas prix possible. Des dizaines de milliers de travailleurs de l'industrie veulent être assurés qu'il y aura une place pour eux à l'avenir. Toutes les régions du pays veulent être assurées que les liaisons et les services qui sont importants pour elles seront maintenus.

Où est le cadre stratégique du gouvernement pour voir à ce que tous ces intérêts soient pris en considération?

 

. 1420 + -

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux que le chef de l'opposition adhère aux cinq principes que le gouvernement a énoncés il y a quelques semaines. Ce sont là les grandes lignes de notre politique, dont nous préciserons les détails au cours des prochaines semaines, et c'est quelque chose que nous ne ferons pas de façon unilatérale. Le chef de l'opposition serait le premier à nous critiquer si nous présentions une politique toute faite à la Chambre des communes sans avoir tenu compte des opinions des députés.

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L'ÉQUITÉ SALARIALE

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, la Cour fédérale a aujourd'hui rendu sa décision et elle ordonne au gouvernement de verser cinq milliards de dollars à la suite du différend sur l'équité salariale. Nous savons que le gouvernement risque fort d'être débouté en appel.

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Le gouvernement dispose-t-il d'un fonds pour éventualités qui suffira à couvrir cette somme de cinq milliards de dollars ou cette décision sonne-t-elle le glas de tout allégement raisonnable du fardeau fiscal des Canadiens?

[Français]

L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, nous avons pris connaissance de ce jugement ce matin même et nous sommes en train de l'analyser.

Ce jugement est très important pour l'ensemble des employés de la fonction publique. Nous allons prendre le temps nécessaire avant de rendre une décision.

[Traduction]

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, je vais poser de nouveau ma question au ministre des Finances.

Le gouvernement savait depuis des années que le jour du jugement allait arriver. A-t-il prévu un plan? Non. Dispose-t-il d'un fonds pour éventualités? Évidemment pas. Cela signifie-t-il que les contribuables sont pris au piège? J'en ai bien peur.

Pourquoi le ministre ne reconnaît-il pas simplement que le gouvernement a mal géré le dossier et que ce sont les contribuables qui devront payer pour ce fiasco?

L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, comprenons-nous bien. Nous venons tout juste de recevoir la décision. Nous sommes en train de l'étudier.

Il y a une énorme différence entre la position du parti ministériel et celle du Parti réformiste. Le Parti réformiste ne croit pas à l'équité salariale. Nous y croyons.

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[Français]

LES PRODUCTIONS AUDIOVISUELLES

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le scandale des droits d'auteur ne se limite pas seulement à la maison de production CINAR.

Beaucoup de personnes seraient impliquées dans cette affaire et des millions de dollars auraient été soutirés illégalement au gouvernement fédéral.

Est-ce que le ministre du Revenu national ne considère pas qu'il devient impérieux que son ministère intervienne dans cette affaire et qu'il déclenche une enquête spéciale de son ministère sur les pratiques illicites dans cette industrie?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, pour ce qui est de l'interrelation entre le ministère, un simple contribuable ou encore un contribuable corporatif, il s'agit d'information confidentielle, donc je ne peux commenter.

Si jamais des événements sont portés à la connaissance de mon ministère et de moi-même, évidemment, on verra à prendre les procédures qui s'imposent, mais pour l'instant, l'information est confidentielle.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, je ne demande pas de révéler l'information, je demande une enquête spéciale. Je pense que les journaux sont suffisamment éloquents.

On sait que des prête-noms ont été utilisés, que des sociétés bidon auraient été enregistrées illégalement par des firmes d'avocats pour détourner impunément des fonds publics fédéraux.

Est-ce que le ministre du Revenu national ne comprend pas que c'est son devoir à lui de faire enquête?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, ma collègue, la ministre du Patrimoine, ayant fait état des démarches qui ont été entreprises, je pense qu'ici, on fait référence à quelque chose de fondamental, c'est-à-dire le lien de confiance qui existe entre l'ensemble des contribuables et Revenu Canada. Je pense qu'il existe un grand lien de confiance.

Ici, on fait référence à de l'information qui, fondamentalement, est confidentielle, et cela va demeurer confidentiel.

Au risque de me répéter, si jamais des éléments sont portés à notre connaissance, nous agirons.

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, le chef du Bloc québécois dévoilait hier que Thomas LaPierre, fils du président du conseil d'administration de Téléfilm, avait servi de prête-nom à CINAR pour retirer illégalement des subventions fédérales d'aide à la production.

Ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine. Comme le nom d'Erica Alexandre, un pseudonyme fictif combinant les prénoms des enfants de Mme Charest, présidente de CINAR, a déjà été identifié comme prête-nom possible pour le même genre de fraude, la ministre du Patrimoine a-t-elle demandé à ses fonctionnaires de faire les vérifications nécessaires pour confirmer ou infirmer cette information?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, vendredi dernier, à la suite des allégations mises de l'avant par le Bloc québécois, j'ai demandé une enquête de la GRC.

 

. 1425 + -

Je sais, entre autres, que des représentants de la police de la CUM seront à Ottawa jeudi pour rencontrer les fonctionnaires du ministère du Patrimoine canadien et ceux du ministère du Revenu national. Ils sont informés de toutes les allégations qui existent. C'est justement pour cela que nous avions demandé une enquête de la GRC.

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, pour le bénéfice de la ministre, est-elle également informée que le nom de Patricia Lavoie, vice-présidente de la production et du développement-fiction chez CINAR, aurait également été utilisé comme prête-nom pour retirer illégalement des subventions pour le film Who gets the house, dont le scénario aurait plutôt été écrit par l'Américain Thimothy Neilson?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, si le député a des allégations à faire, qu'il les fasse et je vais le mettre directement en rapport avec la GRC.

Le gouvernement du Canada prend ces allégations très au sérieux. C'est pour cela que nous avions demandé une enquête de la GRC. Cette enquête donnera un éclaircissement sur tous ces faits, et si le député le désire, je le mettrai en rapport avec la GRC.

*  *  *

L'ÉQUITÉ SALARIALE

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, la bataille pour l'équité salariale dure depuis 15 ans. Jugement après jugement, les tribunaux déboutent le gouvernement.

Malgré tout, appel après appel, le gouvernement fédéral continue de nier le droit des femmes à un salaire égal pour un travail comparable.

Quand le gouvernement va-t-il cesser les appels et enfin payer son dû à ses employées?

L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, il est très clair que le gouvernement s'est engagé à respecter le principe de l'équité salariale pour les femmes et pour les hommes.

Il est très clair aussi que nous avons reçu ce jugement aujourd'hui. Il est tout à fait normal que nous prenions quelques jours pour l'analyser, pour consulter les différents intervenants et la procureure générale afin que le gouvernement prenne la décision la plus éclairée possible.

[Traduction]

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le gouvernement appuie le principe de l'équité salariale pour autant qu'il n'ait pas à traiter les femmes comme des êtres égaux ni à leur verser quelque somme que ce soit. Cependant, lorsqu'il lui faut se conformer à la loi et dénouer les cordons de sa bourse, ses beaux principes ne tiennent plus. Le gouvernement se dit d'accord, mais il n'agit pas en conséquence.

Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de traiter les femmes comme des êtres égaux?

[Français]

L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, ce jugement est très important pour tous les employés de la fonction publique fédérale. Il est donc normal qu'en tant que gouvernement responsable, nous prenions le temps de l'analyser. Je peux vous assurer que nous allons passer à l'action.

Je comprends aussi que les employés visés ont une certaine anxiété par rapport à la décision que va prendre le gouvernement. Je leur demande d'être patients encore quelques jours, ce qui nous permettra en conséquence d'avoir une bonne orientation.

*  *  *

[Traduction]

L'INDUSTRIE AÉRIENNE

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. Air Canada a annoncé aujourd'hui sa proposition de restructuration de l'industrie aérienne du Canada dans laquelle elle demande la tenue d'un examen complet de la fusion par le Bureau de la concurrence.

Le ministre exigera-t-il que toutes les propositions, présentes ou futures, soient soumises au même processus afin d'être traitées de la même façon?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, comme le député le sait, en vertu de l'article 47, le Bureau de la concurrence est très engagé. En fait, je lui ai demandé son avis sur la restructuration et il devrait me remettre son rapport d'ici quelques jours. Ce dernier sera rendu public et fera l'objet de discussions au Comité permanent des transports.

Le bureau se penche sur les questions liées à la concurrence, mais la loi ne lui confère pas la responsabilité de se pencher sur les niveaux de service, la protection des employés, les prix excessifs ou la question de savoir si le transporteur aérien est contrôlé par des intérêts canadiens ou non. C'est pourquoi nous avons adopté l'article 47 afin que les représentants élus règlent la question.

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): En fait, monsieur le Président, le Bureau de la concurrence a pour fonction de protéger les consommateurs. Il protège les consommateurs pour une bonne raison et il sert bien le pays.

Ma question est simple. Dans une proposition, on demande la tenue d'un examen complet par le Bureau de la concurrence. Le ministre exigera-t-il que toutes les propositions soient soumises au même processus ou y a-t-il un traitement qui soit favorisé?

 

. 1430 + -

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le processus traite tout le monde de la même façon aux termes de l'article 47, comme je viens de l'expliquer.

*  *  *

LES PÊCHES

M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Monsieur le Président, dans les événements découlant de la décision Marshall, le gouvernement se cache derrière les toges des juges de la Cour suprême et derrière son nouveau représentant.

Le capitaine Canada lui-même, le premier ministre libéral de Terre-Neuve, a déclaré que la Cour suprême du Canada devait assumer la responsabilité de l'anarchie qui règne dans les Maritimes. La décision Marshall doit être revue, pas inscrite dans les politiques gouvernementales. Les troubles pourraient cesser immédiatement sur la côte est si le gouvernement agissait.

Pourquoi le gouvernement ne rejette-t-il pas l'idée d'une politique des pêches qui attribue les emplois en fonction de la race?

L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, il est évident que le député ne comprend rien à la situation. Il est ici question de droits issus de traités et reconnus par la Cour suprême du Canada.

Nous avons à maintes reprises déclaré que nous reconnaissions et respections ces droits. Nous travaillons dans l'esprit de la décision de la Cour suprême.

C'est ce que nous faisons. Nous avons nommé un représentant fédéral, qui discute avec tous les groupes en présence. Nous recherchons une solution à long terme.

M. John Cummins (Delta—South Richmond, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Pêches s'abuse lui-même. La Cour suprême a maladroitement déterminé que les pêches au Canada devaient être réglementées en fonction de critères raciaux. Je trouve cela choquant et le gouvernement aussi devrait trouver cela choquant.

La West Nova Fishermen's Coalition a demandé des éclaircissements sur la décision Marshall. Le gouvernement refuse de lui accorder son appui. Pourquoi le ministre ne dit-il pas combien d'emplois de pêcheurs il est prêt à sacrifier dans les Maritimes pour respecter la politique des pêches fondée sur la race?

L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, en tant que ministre des Pêches et des Océans, je tiens à affirmer que nous créons des emplois.

Si le député écoutait, il saurait que nous parlons de nouveaux produits et de commercialisation de ces produits. Nous parlons d'aquaculture. Tout cela va créer des emplois dans le domaine des pêches.

*  *  *

[Français]

LES PRODUCTIONS AUDIOVISUELLES

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, en mars 1997, suite à la première enquête de la GRC, le procureur général décidait de ne pas porter d'accusations contre CINAR. À peine un mois plus tard, la présidente, Mme Charest, présidait un souper-bénéfice du Parti libéral avec le premier ministre.

J'aimerais que le premier ministre nous explique la coïncidence entre la décision bienveillante du procureur général à l'endroit de CINAR, une décision qui s'explique difficilement, et l'implication de Mme Charest au sein du Parti libéral.

Le Président: Je vais permettre la question, mais il faut se rappeler que les questions à propos d'un parti politique ne sont pas permises à la Chambre.

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député fait encore des allégations ici à la Chambre. Ce sont des allégations très sévères et je pense que s'il a justement des allégations à faire, il devrait les faire auprès de la GRC.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, la présidente de CINAR est impliquée au sein du Parti libéral du Canada. Le premier ministre l'a nommée lui-même pour siéger à la Fondation des bourses du millénaire. Téléfilm Canada doit faire une enquête sur toute cette affaire alors que le fils du président sert de prête-nom, et que M. Macerola, un ex-candidat libéral et directeur général de Téléfilm, déclare qu'il s'agit d'une légende urbaine.

Ce qu'on veut savoir, c'est qui tient le rôle principal dans la légende urbaine qu'on pourrait intituler «Au royaume des petits copains»?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je trouve cela regrettable parce qu'on sait qu'actuellement il y a une enquête qui se fait auprès de la SODEC. Je ne serais pas la personne à lancer de la boue à un parti politique parce qu'il y a une enquête qui se fait.

Les enquêtes s'imposent et, justement, c'est pour cela que nous avions demandé l'implication de la GRC. Si le député et le Bloc québécois ont des allégations, qu'ils en fassent part directement à la GRC.

*  *  *

 

. 1435 + -

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes et du Nord.

La Cour suprême du Canada a suscité un sérieux conflit et une grave confrontation en reconnaissant aux autochtones un droit de pêche spécial sur la côte est du Canada.

Malgré les problèmes on ne peut plus manifestes que pose un traitement inégal des Canadiens, le ministre est sur le point de ratifier l'entente conclue avec les Nisga'as, créant ainsi le même droit de pêche autochtone spécial sur la côte ouest du Canada.

Mais pourquoi donc le ministre promeut-il pareil concept dans le traité des Nisga'as alors qu'il connaît très bien les problèmes que cela va engendrer?

L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, la raison en est que c'est ce qu'il convient de faire pour la Colombie-Britannique et pour le Canada.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement a eu une merveilleuse occasion de négocier l'égalité dans le cadre de l'accord avec les Nisga'as, mais il a plutôt opté pour un statut spécial et pour des droits juridiques spéciaux. C'était l'occasion rêvée pour promouvoir l'unité, mais il a opté pour la division. Plutôt que de bâtir des ponts il a érigé des murs.

Ce sont les gens ordinaires de la nation Nisga'a qui, en bout de chaîne, feront les frais de cette sottise. Pourquoi le ministre et le gouvernement s'apprêtent-ils à promouvoir la désunion, la division et la discorde plutôt que l'égalité?

L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, cela apportera certitude et développement économique dans la cour du député.

Je suggèrerais au député, compte tenu qu'il a 24 Premières nations à sa disposition et qu'il ne leur parle pas, de solliciter leur avis. Voici ce qu'ils lui diraient: c'est ce qu'il convient de faire pour la Colombie-Britannique, par la région visée de la Colombie-Britannique et, en définitive, pour le Canada. Il devrait y souscrire.

*  *  *

[Français]

LES ALIMENTS MODIFIÉS GÉNÉTIQUEMENT

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, un grand désordre règne au gouvernement dans le dossier des aliments génétiquement modifiés.

Le ministre de l'Industrie veut les promouvoir à tout prix, le ministre de l'Agriculture veut les exporter sans en connaître les effets, le ministre de la Santé n'a pas la capacité de les évaluer et le ministre de l'Environnement bloque l'adoption d'un protocole international sur la biosécurité.

Le premier ministre va-t-il enfin siffler la fin de la récréation et faire de la qualité des aliments sa priorité dans ce dossier?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens et les consommateurs de produits alimentaires canadiens du monde entier peuvent être très fiers du système de réglementation qui garantit la sûreté de nos produits.

Tous les produits alimentaires génétiquement améliorés sont soumis à un processus de réglementation très strict qui nous permet de nous assurer qu'ils sont sûrs pour les humains, les animaux et l'environnement avant de les approuver.

[Français]

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre réalise-t-il que si l'on ne peut garantir la sécurité des aliments génétiquement modifiés, cette industrie perdra la confiance des consommateurs au pays comme à l'étranger?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, les processus de réglementation et d'approbation utilisés pour déterminer la sûreté des produits alimentaires qu'on souhaite mettre sur le marché au Canada sont fondés sur les meilleures données scientifiques disponibles à l'heure actuelle.

Le processus scientifique est approuvé par l'Organisation mondiale de la santé, la FAO et tous les organismes internationaux. On s'appuie sur des données scientifiques fiables pour juger de la sûreté de tout produit alimentaire qu'on souhaite mettre sur le marché. Aucun produit n'est approuvé sans avoir été soumis à ce processus d'évaluation très strict.

*  *  *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le Président, l'accès à l'information est un droit fondamental de tous les Canadiens.

J'ai en ma possession une lettre du commissaire à l'information révélant que le ministre de la Défense nationale a régulièrement retardé la publication de documents pendant plusieurs mois pour que ses collaborateurs puissent préparer des notes lui permettant de répondre aux questions qu'on pourrait lui poser.

Pourquoi le ministre de la Défense nationale fait-il passer ses propres intérêts politiques avant les droits que la loi confère à tous les Canadiens?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je veux m'assurer que les gens ont accès à l'information à laquelle ils ont droit le plus rapidement possible.

Je n'ai fait que demander d'être informé afin de pouvoir répondre à toutes les préoccupations qui pourraient être soulevées par des députés ou des citoyens. J'ai certes précisé très clairement au ministère de la Défense nationale et à tous mes collaborateurs que les règlements sur l'accès à l'information doivent être respectés à la lettre et que les renseignements doivent être transmis le plus rapidement possible. C'est ce qui est fait.

 

. 1440 + -

M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le Président, le ministre a dit à son chef de cabinet de demander à tous les fonctionnaires du ministère de ne pas répondre aux demandes d'accès à l'information tant que les doreurs d'image libéraux n'auraient pas préparé le terrain.

Le commissaire à l'information a dit dans sa lettre que cela constituait une ingérence inopportune. C'est très grave de la part d'un ministre.

Je répète donc ma question au ministre: pourquoi a-t-il fait passer ses propres intérêts politiques avant le droit d'accès à l'information des Canadiens? Pourquoi?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le député est tout à fait dans l'erreur. Si le député le souhaite, je serai très heureux de lui transmettre la lettre que j'ai envoyée à mon ministère et à mes collaborateurs et qui démontre exactement le contraire.

*  *  *

[Français]

L'ÉQUITÉ SALARIALE

Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, les fonctionnaires fédéraux attendent depuis 15 ans leurs paiements en équité salariale.

En 1993, le premier ministre s'engageait à respecter le jugement du Tribunal des droits de la personne. Par ailleurs, le gouvernement a l'argent pour payer ses fonctionnaires. Enfin, aujourd'hui, le Conseil du Trésor essuie son quatrième revers juridique dans ce dossier. Assez, c'est assez.

La présidente du Conseil du Trésor prend-elle aujourd'hui l'engagement formel de cesser d'utiliser les tribunaux et de payer sans autres délais ses fonctionnaires?

L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, je prends l'engagement formel de respecter le principe de l'équité salariale.

Cela étant dit, il faut nous donner le temps de bien analyser le jugement pour en comprendre les conséquences et faire les consultations nécessaires. Mais je peux dire aux fonctionnaires qu'ils connaîtront l'orientation de ce gouvernement d'ici quelques jours.

*  *  *

LE SOMMET DE LA FRANCOPHONIE

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Monsieur le Président, à titre de pays hôte du huitième Sommet de la Francophonie, le Canada a accueilli des chefs d'État et gouvernement de plus de 40 pays.

Est-ce que le secrétaire d'État à la Francophonie peut dire à la Chambre dans quelle mesure le Canada a profité du forum du Sommet pour amener certains pays à prendre des engagements dans le dossier des droits de la personne?

L'hon. Ronald J. Duhamel (secrétaire d'État (Diversification de l'économie de l'Ouest canadien) (Francophonie), Lib.): Monsieur le Président, le Canada a pu échanger sur de nombreux de sujets, tels que la démocratisation et le respect des droits de la personne.

Le Canada a aussi retrouvé, à l'intérieur de la Déclaration de Moncton, ses préoccupations et ses intentions vis-à-vis de ces sujets.

Le Canada a partagé la documentation du sommet parallèle avec toutes les délégations présentes au Sommet. Je peux assurer mes collègues que le Canada a fait progresser la démocratie au Sommet de Moncton.

*  *  *

[Traduction]

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. John Nunziata (York-Sud—Weston, Ind.): Monsieur le Président, voilà que ça recommence, les tarifs de la télédistribution augmentent encore. Roger's Cable a annoncé une augmentation de 1,90 $ par mois, nettement plus que le taux d'inflation. C'est ce qui arrive quand nous avons affaire à des monopoles. Les consommateurs se font estamper, ils se font escroquer.

Ma question s'adresse à la ministre responsable du CRTC, la ministre du Patrimoine canadien. Va-t-elle intervenir et empêcher cette augmentation déraisonnable? Va-t-elle intervenir en faveur des consommateurs et s'assurer que les compagnies de câbles n'augmentent pas leurs tarifs à leur gré au détriment des consommateurs?

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question. En tant qu'avocat, le député sait qu'il existe un processus pour protester contre ces augmentations de tarif. Je l'invite à passer par la voie légale.

M. John Nunziata (York-Sud—Weston, Ind.): Monsieur le Président, la ministre est responsable du CRTC. Cet organisme est connu pour prendre la défense des compagnies de câbles de préférence à celle des consommateurs.

Je demande à la ministre d'user du pouvoir qui lui est conféré en tant que ministre du Patrimoine canadien pour mettre fin à augmentations déraisonnables des tarifs de télédistribution.

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, en tant qu'avocat, le député sait très bien que le CRTC est un organisme quasi-judiciaire et qu'il serait déplacé de ma part de m'immiscer dans ses affaires.

*  *  *

L'IMMIGRATION

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, après avoir examiné le cas de seulement quatre des 600 migrants qui ont débarqué sur nos côtes cet été, la CISR a rejeté les quatre demandes de statut de réfugié, puis a libéré ces personnes. Je répète que la CISR a estimé qu'elles n'étaient pas des réfugiés, puis les a libérées.

Il semble que le gouvernement soit déterminé à soutenir les efforts du crime organisé en libérant des demandeurs de statut de réfugié, qu'ils soient ou non de véritables réfugiés. Comment la ministre peut-elle autoriser la libération au Canada de prétendus réfugiés, puisqu'elle sait qu'ils sont susceptibles de disparaître?

 

. 1445 + -

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à ce qu'il soit très clair pour le député et pour tout le monde que je déplore le passage clandestin de personnes. Je prends très à coeur le bien-être de ceux qui sont entre les mains de passeurs.

La CISR est un organisme quasi judiciaire indépendant. Elle m'a assuré qu'elle accélérera la procédure de détermination du statut de réfugié. Le ministère lui présente des arguments pour qu'elle détienne ces personnes, en raison des risques de fuite tant que nous ne connaissons pas leur identité, ou encore au cas où des poursuites au criminel sont engagées. C'est la loi qui l'exige.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement devrait prendre ce dossier en main. Un des quatre prétendus réfugiés a déjà disparu et les autres vont sûrement suivre son exemple. La ministre estime qu'il est acceptable de détenir des demandeurs jusqu'à ce qu'ils soient considérés comme n'étant pas des réfugiés, puis de les libérer.

Cela n'a pas de sens, ni à mes yeux, ni à ceux de la plupart des Canadiens. La ministre peut-elle expliquer comment cela a du sens à ses yeux?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, contrairement au Parti réformiste, le gouvernement est déterminé à faire appliquer la Charte des droits, pas seulement au profit de quelques personnes à certains moments, mais au profit de toutes les personnes qui se trouvent au Canada, en tout temps. Cette démarche consiste entre autres à laisser la CISR accomplir son travail et prendre ses décisions.

Le ministère continuera de demander à un arbitre de détenir une personne lorsque nous croyons qu'une détention est justifiée. Toutefois, comme il s'agit d'un organisme quasi judiciaire indépendant, nous n'allons pas nous ingérer dans ses travaux.

*  *  *

L'AGRICULTURE

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Il semble que le ministre envoie des messages contradictoires quant à la possibilité que des fonds s'ajoutent aux subventions du programme ACRA qui sont versées aux agriculteurs en difficulté des Prairies. Par exemple, après la réunion de la semaine dernière avec ses homologues de la Saskatchewan et du Manitoba, le ministre a laissé entendre que l'aide financière généreuse en Europe et aux États-Unis pourrait se solder par de l'argent neuf pour les agriculteurs canadiens.

Y aura-t-il de l'argent neuf d'ici Noël, pour aider les agriculteurs des Prairies à passer au travers de la pire crise financière depuis plus de 60 ans?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, j'ai apporté des modifications au Compte de stabilisation du revenu net et au Programme d'assurance-récolte et, avec le temps, nous avons modifié le Programme d'aide en cas de catastrophe liée au revenu agricole.

Le député sait que j'ai eu des pourparlers avec le Comité consultatif sur les programmes de protection du revenu. Nous allons apporter d'autres changements à ces programmes éventuellement.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, cette question revêt réellement une importance cruciale dans toutes les régions rurales et urbaines du Manitoba et de la Saskatchewan. Elle est assez importante pour que deux ministres de l'Agriculture soient venus rencontrer le ministre à Ottawa la semaine dernière. Elle est assez importante pour que les premiers ministres du Manitoba et de la Saskatchewan viennent faire valoir leur position à Ottawa la semaine prochaine.

Ma question va bien au-delà de la politique et mérite une réponse claire et directe. Y aura-t-il de l'argent neuf pour les agriculteurs des Prairies d'ici la fin de l'année, oui ou non?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, il est évident que le député n'écoute pas. Je viens de dire que nous avons consulté les deux ministres nouvellement entrés en fonction, d'autres ministres provinciaux et les membres du Comité consultatif sur les programmes de protection du revenu. Nous examinons des modifications qui, si elles sont apportées, viendront certainement en aide aux agriculteurs d'ici Noël, comme le fait d'ailleurs le programme ACRA. Nous voulons que cette aide soit la plus souple et la plus innovatrice possible.

*  *  *

LES MARINS MARCHANDS

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Anciens combattants.

Il est temps de rendre justice aux marins marchands. La marine marchande a connu le ratio de pertes de vie le plus élevé par rapport à tout autre secteur des forces armées pendant la Seconde Guerre mondiale. Si ces marins avaient touché une prestation de 1 000 $ en 1946, celle-ci vaudrait aujourd'hui 21 000 $.

Quand le ministre accordera-t-il une indemnisation juste et empreinte de dignité aux marins marchands afin qu'ils n'aient pas à se livrer à une autre grève de la faim?

L'hon. George S. Baker (ministre des Anciens combattants et secrétaire d'État (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): Monsieur le Président, j'ai discuté de cette question avec la Coalition de la marine marchande, avec l'Association des anciens combattants de la marine marchande, avec la Légion royale canadienne et avec le Conseil national des associations d'anciens combattants.

 

. 1450 + -

Cette question fait l'objet de discussions, comme c'est d'ailleurs le cas de tout ce qui a trait aux anciens combattants, parce que nous voulons maintenir à l'échelle internationale la réputation d'accorder à nos anciens combattants les meilleurs services qui soient par rapport à tout autre pays dans le monde.

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, j'ai déjà entendu cette ritournelle de la part de l'ancien ministre.

Les médias nous apprenaient la semaine dernière que le gouvernement envisage de verser à chaque marin marchand une indemnisation se situant uniquement entre 5 000 $ et 14 000 $. Ces 5 000 $ ne représentent que 25 cents pour chaque jour où ces hommes ont attendu au cours des 54 dernières années. C'est là une insulte à leur endroit.

Le ministre annoncera-t-il aujourd'hui à la Chambre qu'il accordera une indemnisation de 20 000 $ aux marins marchands?

L'hon. George S. Baker (ministre des Anciens combattants et secrétaire d'État (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): Monsieur le Président, lorsque le gouvernement conservateur était au pouvoir, il a dit non aux anciens combattants de la marine marchande lorsqu'ils ont réclamé ce que le présent gouvernement leur a accordé en vertu du projet de loi C-61. Il a dit non aux anciens combattants de la marine marchande lorsqu'ils ont demandé de discuter des sujets dont nous traitons aujourd'hui.

La députée devrait changer de parti et remercier le premier ministre pour le oui des libéraux qui a remplacé le non habituel des conservateurs.

*  *  *

[Français]

LE TRANSPORT AÉRIEN

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Monsieur le Président, quand Onex a fait une offre pour acheter les actions d'Air Canada, le ministre des Transports a énoncé cinq principes qui guideraient le gouvernement dans l'approbation de toute fusion éventuelle. Aujourd'hui même, Air Canada vient de faire une offre.

Que ce soit l'une ou l'autre qui fonctionne, est-ce que les Canadiens et les Canadiennes auront la garantie d'avoir accès à un service aérien bilingue au Canada, d'un océan à l'autre?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, les cinq principes que j'ai déjà mentionnés, c'est-à-dire la protection des consommateurs, la protection des niveaux de services aux petites collectivités, la protection des droits des employés, la promotion de la concurrence et du contrôle efficace par des intérêts canadiens. Il y a un autre principe qui est incontournable et non discutable, c'est-à-dire l'application de la Loi sur les langues officielles.

*  *  *

[Traduction]

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, le solliciteur général écoute-t-il? Le sous-financement persistant de la GRC aide et encourage les escrocs. La GRC a écrit à un couple de Kamloops pour lui dire qu'en raison du manque de ressources, elle se trouvait dans l'incapacité de poursuivre son enquête sur une escroquerie de 450 000 $. Le Canada et des Canadiens se font escroquer.

Quand le ministre va-t-il présenter des fonds destinés à financer la GRC?

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement est conscient de certains problèmes qu'a connus la GRC. C'est pourquoi le Conseil du Trésor a mené une étude.

À la suite de cette étude, le gouvernement a pu accorder 10 millions de dollars à la Division «E» en Colombie-Britannique. Il a accordé 115 millions de dollars au CIPC. Le gouvernement a consacré des fonds importants à aider la GRC.

*  *  *

 

. 1455 + -

[Français]

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, la ministre du Développement des ressources humaines, lorsqu'elle était titulaire de son ancien ministère, se disait pleine de compassion pour les femmes autochtones.

Or, celles-ci n'ont cessé de se plaindre de son incapacité à régler leurs problèmes. Aujourd'hui, la même ministre affirme avoir de la compassion pour les femmes exclues de l'assurance-emploi.

Maintenant qu'elle s'occupe de l'assurance-emploi, va-t-elle agir de la même façon que dans son ministère précédent, ou va-t-elle enfin comprendre que la grande majorité des femmes sont exclues de l'assurance-emploi à cause des règles d'admissibilité? Peut-elle comprendre cela?

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, que les choses soient claires. Le gouvernement a proclamé vigoureusement son appui envers les femmes. La semaine dernière, le premier ministre a doublé les prestations parentales dont pourront bénéficier les familles en 2001. Il a dit qu'il rendrait les prestations plus flexibles et plus accessibles. Le gouvernement agit.

[Français]

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, l'étude du Congrès du travail confirme ce que l'on sait depuis longtemps: les femmes sont pénalisées par la réforme de l'assurance-emploi.

Le gouvernement disait vouloir répondre aux nouvelles réalités du marché du travail. Mais les femmes, les jeunes, les travailleurs saisonniers, les travailleurs indépendants et à temps partiel ont tous été abandonnés par la réforme de l'assurance-emploi. Le gouvernement libéral a vraiment manqué le bateau.

Quand la ministre du Développement des ressources humaines va-t-elle changer l'assurance-emploi pour vraiment répondre aux réalités du marché du travail pour tout le monde?

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le CTC soutient énergiquement l'engagement du gouvernement à doubler les prestations parentales. Le CTC est également, tout comme nous, très heureux de voir les dernières statistiques de la population active, qui montrent que le taux de chômage des femmes adultes est actuellement, à 5,9%, le plus faible qu'on ait connu depuis 20 ans.

*  *  *

[Français]

L'ÉQUITÉ SALARIALE

Mme Angela Vautour (Beauséjour—Petitcodiac, PC): Monsieur le Président, la Cour fédérale est claire et précise: le gouvernement fédéral doit payer ce qu'il doit à ses fonctionnaires en vertu de l'équité salariale.

Est-ce que la présidente du Conseil du Trésor va respecter cette décision et finalement rendre justice à ses fonctionnaires qui sont en majorité des femmes? Ce gouvernement va-t-il respecter sa propre loi et payer ses fonctionnaires, ou va-t-il encore faire appel?

La ministre est une femme. Je suis convaincue qu'elle comprend les difficultés que les femmes rencontrent aujourd'hui. Aujourd'hui, elle a la chance de démontrer qu'elle peut prendre des décisions qui seront bénéfiques et équitables envers les femmes.

L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Encore une fois, monsieur le Président, je répète que nous sommes pour le principe de l'équité salariale, pour un salaire égal pour des fonctions équivalentes.

Cela étant dit, nous venons de recevoir le jugement aujourd'hui même. Il me semble qu'il est tout à fait normal pour un gouvernement responsable de prendre le temps, non seulement de lire le jugement, mais d'en analyser les impacts et d'en arriver à une décision éclairée. Et c'est ce que nous allons faire dans les prochains jours.

*  *  *

[Traduction]

LE SIERRA LEONE

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État chargé de l'Amérique latine et de l'Afrique.

Compte tenu des très nombreux conflits qui font rage dans le monde, on a fait peu de cas de la terrible tragédie du Sierra Leone. Maintenant qu'un fragile accord de paix est en place, que fait le Canada pour appuyer la paix et la stabilité dans cette région?

L'hon. David Kilgour (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique), Lib.): Monsieur le Président, le Canada appuie la proposition d'établir une présence onusienne au Sierra Leone en y envoyant une autre force de maintien de la paix comprenant 6 000 casques bleus. Nous avons collaboré étroitement à la rédaction de la motion qui devrait être mise aux voix vendredi au Conseil de sécurité. Nous avons donné quelque 10 millions de dollars au cours des deux dernières années. Le député de Carleton—Gloucester est allé là-bas récemment en tant que notre envoyé spécial pour expliquer l'importance que nous accordons au processus de paix. Au fond, nous faisons tout ce que nous pouvons et nous espérons faire encore davantage.

*  *  *

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, 10 millions de dollars, c'est à peu près ce que le ministre se vantait d'envoyer en Colombie-Britannique. Sept de ces dix millions de dollars ont servi à accorder des hausses salariales bien méritées aux officiers de la GRC. Une autre partie de cette somme a servi à absorber le déficit, de telle sorte qu'il n'est resté que 1,5 de ces 10 millions de dollars. La somme de 10 millions de dollars n'existe pas.

 

. 1500 + -

Nous avons un problème. La fraude et l'exploitation commerciales ne font pas l'objet d'enquêtes parce que la GRC manque de ressources. Quand le ministre va-t-il accorder à la GRC les ressources dont elle a besoin pour protéger les consommateurs canadiens?

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai énuméré de nombreuses mesures que le gouvernement a mises en place, y compris la banque de données génétiques.

En fait, des 500 cadets qui sont entraînés à Regina à l'heure actuelle, 164 seront envoyés en Colombie-Britannique. Le gouvernement investit dans la GRC.

*  *  *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Nous avons aujourd'hui à notre tribune deux présidents d'assemblée parlementaire de la Barbade et accompagnés d'une délégation. Je voudrais présenter aux députés l'honorable sénateur sir Fred Gollop, président du Sénat de la Barbade, et l'honorable Ishmael Roett, président de la Chambre d'assemblée de la Barbade, ainsi que leur délégation.

Des voix: Bravo!

*  *  *

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Jim Hart (Okanagan—Coquihalla, Réf.): Monsieur le Président, durant la période des questions, j'ai parlé du rapport du commissaire à l'information. Je voudrais obtenir le consentement unanime pour déposer ce rapport.

Le Président: Le député a-t-il le consentement pour déposer le rapport?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

 

. 1505 + -

[Français]

LOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET LES DOCUMENTS ÉLECTRONIQUES

 

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois, dont le comité a fait rapport avec des amendements; ainsi que du groupe de motions no 1.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, je continue là où j'étais rendu plus tôt. Je rappelle, pour ceux qui se joignent à nous maintenant, que l'on parle du projet de loi C-6, qui vise à favoriser le commerce électronique et la protection des renseignements personnels. J'expliquais qu'au Québec, nous avons déjà une loi qui régit ce secteur d'activités et qui fait en sorte qu'avec la nouvelle loi fédérale, il y aura une très grande complexité pour les organisations à s'y conformer, étant donné la double juridiction qui existera puisque le gouvernement fédéral n'a pas cru bon de reconnaître la primauté de la loi québécoise dans ce secteur.

D'ailleurs, le Conseil du Patronat disait, dans un mémoire de mars 1999, et je cite: «Toutefois, dans la mesure où la compétence constitutionnelle attribuée aux provinces par l'article 92.13 de l'Acte de l'Amérique du Nord Britannique en matière de protection des renseignements personnels et de respect de la vie privée ne fait pas de doute, et que le législateur québécois a déjà édicté sa loi en la matière dans les limites de ses compétences et de son territoire, il est à prévoir que de nombreux conflits juridictionnels émergeront.»

Évidemment, il disait cela dans la perspective où la loi fédérale serait adoptée telle que proposée maintenant. Il rajoute plus loin dans son mémoire: «Quant aux consommateurs québécois, ils auraient toujours à identifier la loi qui s'applique et à choisir entre deux types de recours selon que leurs renseignements sont protégés par l'une ou l'autre des lois.»

C'est important de bien comprendre cela parce que les consommateurs auront des recours lorsqu'ils sentiront que leurs renseignements personnels n'auront pas été bien protégés. Ils devront savoir si c'est la loi fédérale ou la loi du Québec qui aurait dû les protéger.

D'ailleurs, la Commission d'accès à l'information du Québec est venue se faire entendre et a souligné tous les problèmes qu'il y aurait dans la pratique avec ces deux lois et, qu'en bout de ligne, les consommateurs québécois pourraient se retrouver grands perdants d'une telle complexité juridique, alors qu'à l'heure actuelle ce sont les consommateurs les mieux protégés. Après l'adoption de cette loi, pour atteindre un objectif qui est de protéger les gens vivant ailleurs au Canada, c'est-à-dire des neuf provinces qui n'ont pas de loi, ceux du Québec vont s'en trouver pénalisés parce que le gouvernement fédéral n'a pas su reconnaître dans sa loi l'existence et le champs de juridiction que le Québec exerce dans ce domaine.

D'autres groupes sont venus se faire entendre. Je pense, entre autres, au Barreau du Québec qui explique lui aussi dans son mémoire la complexité qu'aura une telle loi. Le Barreau du Québec disait: «Cela signifie qu'un nombre considérable d'entreprises établies au Québec seront dorénavant assujetties à la loi fédérale plutôt qu'à la loi québécoise, ce qui n'est pas de nature à faciliter la tâche pour le citoyen qui cherche à connaître ses droits dans ce contexte de changements législatifs. En outre, les entreprises établies au Québec auront l'obligation de maîtriser un nouveau régime de protection des renseignements personnels qui diffère sensiblement de celui établi au Québec.»

Évidemment, il y a beaucoup de différences parce que, comme je l'expliquais tantôt, c'est le droit civil au Québec qui est en cause. Il y a une autre approche, celle de la Common Law, qui inspire le gouvernement fédéral. Le Barreau du Québec poursuivait en disant qu'il appuyait la recommandation de la Commission d'accès à l'information, et je cite: «Pour éviter toute confusion et s'assurer que les Québécois puissent continuer à bénéficier d'un régime complet en matière de protection des renseignements personnels, nous soumettons que le projet de loi C-54 devrait être amendé afin de prévoir explicitement que la loi fédérale ne s'appliquera pas aux entreprises assujetties à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.»

Les entreprises seraient donc plutôt assujetties à la loi qui existe déjà. Le gouvernement fédéral pourrait accomplir son objectif, à savoir qu'il y ait une loi en vigueur partout au Canada, mais qui pourrait différer dans le cas du Québec. Les entreprises la connaissent déjà et elles s'y conforment. Le Barreau du Québec va même plus loin en disant: «Le projet de loi devrait, selon nous, incorporer par référence la loi québécoise, même dans les champs de compétence fédérale, afin d'éviter la confusion, les chevauchements et les dédoublements de législation au Québec.»

C'est un point de vue très intéressant. L'approche du gouvernement fédéral est habituellement le contraire. C'est lui qui vient se substituer aux compétences provinciales. Le Barreau du Québec dit que pour éviter toute confusion, il y a déjà une loi. Il veut qu'on lui donne une portée telle qu'elle s'applique même là où ce serait la loi fédérale qui devrait normalement s'appliquer. C'est un modèle intéressant, qui est appuyé par différents groupes qui sont venus se faire entendre, mais qui se sont tous heurtés à l'insensibilité du gouvernement fédéral. Ce même gouvernement qui, il y a une semaine, nous a offert un beau discours du Trône rempli d'objectifs nobles sur papier. En pratique, quand ce gouvernement dit, par exemple, qu'il entend collaborer avec les provinces afin d'améliorer la qualité de vie des citoyens, ce n'est pas cela qui l'intéresse.

 

. 1510 + -

Il veut étendre son champ de juridiction, contrôler de plus en plus et davantage de choses, être le gouvernement qui planifie notre développement économique et social et qui va contrôler aussi la protection des renseignements personnels, etc.

Jour après jour, dossier après dossier, ce gouvernement avance comme un bulldozer et vient accaparer les compétences les unes après les autres. C'est, encore une fois, ce qui va se passer dans ce domaine-là si personne ne fait de changements.

Nous sommes à l'étape du rapport du projet de loi. Il est encore temps, pour le gouvernement, de le modifier. Il pourrait y incorporer des dimensions qui font en sorte de reconnaître l'existence de la loi québécoise et d'y accorder toute la portée juridique nécessaire pour qu'on ait un cadre qui s'assure que le développement des commerces électroniques—et on ne parle pas seulement des renseignements personnels dans le domaine électronique dans ce projet de loi, c'est beaucoup plus large—et la protection des renseignements personnels se fassent en vertu de la loi qui existe déjà au Québec.

De cette façon, on pourrait trouver un équilibre intéressant et une solution d'avenir. J'espère qu'il y a encore des gens sensés de ce côté-là et que les mots qu'ils mettent dans leurs beaux discours pourront aussi trouver une portée dans la réalité. Cela, on le verra au cours du débat et on aura l'occasion d'écouter plusieurs de mes collègues en parler cet après-midi.

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de parler aujourd'hui du premier groupe d'amendements au projet de loi C-6, qui était précédemment le projet de loi C-44.

Nous reconnaissons qu'il doit y avoir une certaine certitude en ce qui concerne le respect de la vie privée. Nous croyons qu'il doit y avoir des règles bien précises s'appliquant à tout le commerce électronique, un domaine assez nouveau. Nous craignons quelque peu que le gouvernement ait été légèrement insouciant en n'essayant pas de parvenir à une meilleure coopération avec les provinces avant de se lancer dans son expérience en ce qui concerne la protection de la vie privée dans le domaine commercial, mais nous reconnaissons que cela s'impose.

Si je ne m'abuse, les provinces ont trois ans pour présenter leur propre loi sur la protection de la vie privée. Je crois qu'il est regrettable, cependant, qu'on ne soit pas parvenu à consensus pour permettre aux provinces de participer à un programme leur donnant la possibilité de présenter leur propre projet de loi. Le gouvernement a décidé d'aller seul de l'avant et notre collègue me rappelle qu'il est question de mise en oeuvre progressive sur trois ans.

La réponse, c'est que les provinces auront trois ans pour présenter leur propre mesure législative dans ce domaine de la protection de la vie privée. Cependant, si elles en sont incapables, ou choisissent de ne pas le faire, cette mesure législative aura préséance et deviendra la loi appliquée au Canada en ce qui concerne le respect de la vie privée dans le cadre du commerce.

Cela nous laisse encore les autres modifications que nous allons aborder à l'article 2 dont je vais parler plus tard. Nous reconnaissons qu'il doit y avoir des règles et une loi s'appliquant à la protection de la vie privée. Même si nous aurions préféré une approche coopérative, la plupart des provinces vont présenter leur propre mesure législative pour couvrir ce domaine dans les trois prochaines années. Ainsi, la loi fédérale n'entrera probablement même pas en vigueur. Les provinces ont peut-être une meilleure loi dans ces domaines qu'elles veulent mettre en place et je les encourage à le faire durant ce délai.

Le Parti réformiste appuie les modifications de la partie 1.

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Madame la Présidente, je suis vraiment ravi d'aborder l'étude du projet de loi C-6, Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques.

Je le suis pour la bonne raison qu'il s'agit sans doute aujourd'hui de l'éclosion d'une économie entièrement nouvelle au Canada. Depuis hier, le commerce électronique est qualifié par certains de nos collègues de système nerveux central des entreprises, de la société et même du gouvernement.

 

. 1515 + -

Nous vivons vraiment une révolution commerciale dont les conséquences sont à toutes fins pratiques imprévisibles. La croissance phénoménale de l'utilisation de l'Internet pour les échanges entre les entreprises et les échanges entre entreprises et consommateurs est ahurissante. Pour vous en donner une idée, le trafic sur le réseau Internet double tous les 100 jours et, à toutes les secondes, 7 nouveaux clients s'y abonnent. C'est vraiment un phénomène révolutionnaire.

Comme pour toute révolution, nous sommes loin de nous rendre compte de la situation, puisque nous la vivons au quotidien. Un beau matin, nous nous apercevons que le monde a changé. Je parie que, lors de la révolution industrielle, personne n'en parlait, que c'est seulement plus tard que les gens ont constaté en rétrospective l'ampleur des changements survenus.

À l'instar du ministre de l'Industrie, du premier ministre et d'autres porte-parole du gouvernement, qui le font observer depuis quelques semaines, je suis convaincu que le Canada est en voie de devenir, d'ici à l'an 2000, le pays le plus informatisé de la planète. L'autre jour, le gouvernement s'est engagé à installer 600 sites Internet au Canada et à y affecter 10 000 jeunes gens pour nous assurer que les Canadiens d'un bout à l'autre du pays, où qu'ils soient, quelle que soit l'importance de leur localité, et quelles que soient les ressources à leur disposition, aient tous d'une façon ou d'une autre accès au réseau.

Bien entendu, il demeure une question cruciale qu'il convient de régler. Et le projet de loi C-6 s'y attache. Je fais allusion à ce qui s'est produit le mois dernier chez Microsoft quand des pirates informatiques ont pénétré dans son service Hotmail, menaçant ainsi la confidentialité de 40 millions de comptes et l'intégrité du système de courrier électronique. Ce genre d'infraction à la sécurité sur une vaste échelle a de quoi inquiéter les consommateurs.

Madame la Présidente, je sais que vous êtes une adepte du commerce électronique et je suppose que lorsque vous parlez de commerce électronique à vos électeurs, les propos que vous entendez s'apparentent à ceux que le reste d'entre nous entendent: les gens se préoccupent de la sécurité des renseignements qu'ils fournissent.

Quand on transmet le numéro de notre carte de crédit, quand on effectue une transaction commerciale, qu'en est-il de la sécurité? A-t-on la certitude que la personne qui reçoit cette information est bien celle à qui on la destine?

Au Canada, le chiffre d'affaires du secteur du commerce électronique s'élevait à 1 milliard de dollars en 1997 et atteindra 13 milliards de dollars d'ici l'an 2002. Nous sommes confrontés à une vague de changements économiques incroyable. En 1998, on comptait 414 000 sites Web commerciaux actifs et on prévoit que d'ici l'an 2002 ce nombre sera porté à 1,6 million. C'est une activité économique étonnante qui se développe sous nos yeux. Le projet de loi C-6 vise à renforcer la sécurité des renseignements personnels.

C'est le groupe de motions no 1 qui est à l'étude aujourd'hui. Au nom du Nouveau Parti démocratique, j'annonce que nous nous opposerons aux motions du groupe no 1 qui sont présentées par le Bloc québécois. La raison est évidente. Les bloquistes tentent résolument de faire valoir qu'il devrait y avoir un système pour le Québec et un autre pour le reste du Canada. On s'acheminerait alors évidemment vers un système de protection disparate à souhait. Les députés à la Chambre représentent l'ensemble des Canadiens et nous voulons une politique qui protègent tous les Canadiens d'un océan à l'autre.

Mes amis du Bloc québécois arguent qu'il existe déjà une loi pour protéger les consommateurs au Québec. Ils ont raison. La plupart des autres provinces n'en ont pas. Cependant, adopter une loi fédérale qui n'inclut pas toutes les provinces et tous les territoires serait à mes yeux une folie. Nous ne voulons pas de normes disparates. Il est essentiel d'avoir des normes nationales. C'est la raison pour laquelle nous estimons devoir nous opposer à ce groupe de motions.

 

. 1520 + -

Il n'est pas juste que certains Canadiens n'aient pas droit à la protection des renseignements personnels les concernant parce que le gouvernement de leur province a été lent à prendre des mesures. Certaines provinces font preuve de mauvaise volonté à l'égard de cette question. Je suppose que l'une des raisons pour cela, c'est qu'il ne savent pas que faire. Les provinces attendent de la part du gouvernement qu'il dise qu'au lieu que chaque province ait une loi afin de protéger les consommateurs, pourquoi ne pas établir des normes applicables d'un océan à l'autre, comme celle proposées par le gouvernement fédéral dans le projet de loi C-6?

Dans d'autres secteurs où la loi provinciale et la loi fédérale se chevauchent, les deux ordres de gouvernement devront coopérer pour assurer une protection maximale aux Canadiens et pour réduire les risques de confusion.

J'ai écouté avec attention ce qu'a dit mon collègue du Bloc Québécois qui soutient qu'à son avis la loi actuellement en place au Québec est adéquate. Assurons-nous que quelle qu'elle soit, ce sera la meilleure mesure législative qui aura le dessus.

Pour conclure, je précise que nous soutenons le gouvernement fédéral dans ses efforts en vue d'assurer la protection des renseignements personnels. Nous appuyons l'intention générale du projet de loi et je crains fort que, pour cette raison, nous ne devions nous opposer aux motions du groupe no 1.

M. John Cannis (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.) Madame la Présidente, en guise de préambule et en ma qualité de nouveau secrétaire parlementaire, je tiens à remercier le premier ministre de m'accorder l'occasion de participer à des activités de ce niveau du gouvernement.

Le parti au pouvoir s'oppose aux motions du groupe no 1 déposées par le Bloc Québécois. En effet, ces motions s'en prennent à l'essence même du projet de loi C-6 et sapent effectivement l'aptitude du gouvernement à présenter une mesure législative d'application nationale qui protégera les droits à la vie privée de tous les Canadiens, et je dis bien de tous les Canadiens. Ces motions remettent en question la compétence du gouvernement de modifier des lois fédérales qui l'empêchent de recourir à des dispositifs électroniques et de dispenser des services par des moyens électroniques à tous les Canadiens.

À l'occasion des consultations du Comité de l'industrie, des groupes de consommateurs et l'industrie ont dit que le gouvernement a réussi à atteindre le bon équilibre dans le projet de loi C-6 entre le droit des particuliers d'exercer un certain contrôle sur les renseignements personnels qui les concernent et d'avoir accès à des moyens pour obtenir un redressement efficace, et le besoin de l'industrie de recueillir et d'utiliser des renseignements personnels qui sont essentiels à la réussite au sein de l'économie de l'information.

Pour ces motifs, des groupes de consommateurs comme le Public Interest Advocacy Centre, la British Columbia Civil Liberties Association et l'Association des consommateurs du Canada ainsi que des groupes industriels comme l'Association canadienne de la technologie de l'information, l'Association canadienne du marketing et les entreprises de câblodistribution et de téléphone ont tous réclamé l'adoption rapide du projet de loi C-6.

Si le projet de loi C-6 est adopté rapidement, il contribuera à susciter la confiance des consommateurs et à instaurer un climat de certitude sur les marchés, nécessaires pour veiller à ce que le Canada soit un leader mondial dans les domaines du commerce électronique et de l'économie mondiale de l'information.

Les motions déposées par le Bloc sont inacceptables et doivent être rejetées. Avec l'adoption du projet de loi C-6, les citoyens du Québec bénéficieront du meilleur régime de protection des renseignements possible au pays. Le projet de loi C-6 offrira à tous les Canadiens et je dis bien à tous les Canadiens, y compris ceux de la province de Québec, un régime complet et global de protection des renseignements personnels partout au pays.

En toute franchise, je m'attendais à ce que le Bloc fasse mieux que de déposer des amendements qui empêchent tous les Canadiens, qui ne bénéficient pas de la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, de tirer parti de cette loi d'application nationale.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole sur ce projet de loi, pas tellement parce qu'il revient à l'ordre du jour, mais parce que cela va nous permettre de clarifier encore une fois la situation.

Le projet de loi C-6 est la reprise du projet de loi C-54. Ce projet de loi vise à créer une loi de protection des renseignements personnels au niveau fédéral, alors qu'au Québec, il y a déjà une loi de ce type. Cette loi permettra au gouvernement fédéral d'intervenir dans le champ de juridiction provincial, alors qu'au Québec, il y a déjà une loi qui couvre tous les renseignements personnels. Cela me semble être une situation un peu aberrante.

 

. 1525 + -

J'aimerais citer une lettre adressée à M. John Manley, ministre de l'Industrie, qui nous a été transmise par la Chambre des notaires du Québec, et signée par M. Denis Marsolais, président de la Chambre des notaires. On y dit ceci:

    Le chevauchement de régimes est, à notre avis, générateur de méprises et de complications indues, tant pour le consommateur que pour les organisations soumises pour un même sujet à deux séries de règles.

On ne parle pas d'un séparatiste, il s'agit du président de la Chambre des notaires du Québec. Je dis ceci en réponse au précédent intervenant qui disait qu'on ne pouvait pas s'étonner que le Bloc québécois ait pris l'attitude qu'il a prise. Ce n'est pas le Bloc québécois qui prend cette attitude, c'est un consensus à la grandeur du Québec.

Le président de la Chambre des notaires dit aussi:

      [...] plus préoccupante encore est la partie 2 du projet de loi. L'article 38 assujettit la validité sur support électronique des actes notariés au Québec dont il ferait mention dans un texte législatif, non seulement sa reconnaissance à tel titre dans une loi québécoise, mais aussi à son inclusion dans une annexe au projet de loi. Or, ces annexes seraient gérées par un ministre, un organisme ou toute personne désignée autorité responsable qui aurait toute latitude pour modifier les annexes. Pour toutes ces raisons non exhaustives...

Cela veut dire qu'on ne les a pas toutes mentionnées

      [...] nous croyons...

Et là, c'est le président de la Chambre des notaires du Québec qui parle, ce n'est pas un député séparatiste, comme le député d'en face argumentait plus tôt, c'est le président de la Chambre des notaires qui représente tous les notaires du Québec. Et c'est le même genre d'attitude qu'on retrouve à la grandeur du Québec. On retrouve cette attitude chez tous les intervenants du Québec, pas seulement chez les souverainistes, pas seulement chez les séparatistes ou chez les fédéralistes du Québec, mais tout le monde au Québec sait que depuis cinq ans, on a une loi qui protège les renseignements personnels, pas seulement gouvernementaux, mais aussi privés.

Tout ce qu'on demande, par nos amendements, c'est que la situation du Québec soit respectée dans ce Parlement. Je trouve donc cela un peu méprisant quand l'interlocuteur précédent dit: «On sait bien, eux autres, les députés du Bloc, ils veulent quelque chose, parce qu'ils ne veulent pas que le Canada marche». Ce n'est pas cela. C'est dans la notion même de la façon dont cela doit fonctionner.

Il y a déjà une loi dans un champ de juridiction qui est la responsabilité du Québec. La moindre marque de respect qui pourrait être présentée pour les Québécois aurait été que le gouvernement n'ait tout simplement pas présenté à nouveau ce projet de loi ou l'ait amendé, de telle façon qu'on soit sûrs et certains que la loi du Québec pourra s'appliquer au Québec et que la loi fédérale s'appliquera dans les autres provinces, si les gens le veulent ainsi, mais qu'on donne préséance à la loi du Québec dans son entier et que, de cette façon, on puisse avoir un traitement des renseignements personnels qui correspond à celui qu'on veut.

On est une société différente. On l'a reconnu ici dans une motion adoptée par le gouvernement fédéral, une motion sur la société distincte. Mais à partir du moment où cela a été adopté, ce n'était que de la fumée. On ne retrouve cela dans aucun projet de loi, et chaque fois qu'on a un projet de loi qui devrait tenir compte de la personnalité distincte du Québec, du fait qu'on est une société distincte et du fait qu'on est un peuple distinct, on ne retrouve rien de ça dans les projets de loi.

Lorsque les députés libéraux disent: «Ça, c'est la position du Bloc, la position des séparatistes», j'invite l'ensemble de la population à juger de la situation.

D'un côté, il y a le gouvernement fédéral qui dépose un projet de loi sur le commerce électronique et qui, en même temps, va chercher le secteur des renseignements personnels, et de l'autre côté, il y a le gouvernement du Québec qui a une loi avant-gardiste qui a été reconnue par l'ensemble des intervenants dans ce secteur à la grandeur du monde. Mais le gouvernement fédéral arrive avec ses gros sabots, plusieurs années après que le Québec ait mis sa loi en vigueur et qu'elle soit opérationnelle, et soudain, il faudrait se tasser parce qu'il ne s'agit que d'une province. Il semble dire au Québec: «Vous n'êtes que des gens qui pensent différemment.»

Le député a utilisé l'expression «loi nationale». C'est comme l'histoire de la capitale nationale. C'est la prétention du gouvernement fédéral d'être le gouvernement national. C'est bien dommage, mais dans la Constitution canadienne, il n'est que le gouvernement fédéral et il doit agir comme gouvernement fédéral dans le respect des champs de juridiction. Le Québec a une responsabilité en matière de renseignements personnels et, en plus, il l'exerce de façon exemplaire depuis 15, 20 ans, depuis qu'on a une législation dans ce domaine, depuis qu'on applique la loi.

On n'en est pas à la première version au Québec. Il y a déjà eu une autre version qui fait qu'on a ajouté la protection des renseignements privés.

Donc, quand on regarde l'ensemble de cette situation, il faut bien comprendre que la position que le Bloc québécois défend est le consensus du Québec. C'est une position qui regroupe des représentants d'organismes de toutes sortes. On parle par exemple de la lettre de la Chambre des notaires qui était adressée à M. Manley, le 7 avril 1999, et qui disait...

 

. 1530 + -

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député sait très bien qu'on ne doit pas mentionner le nom des ministres ou des députés.

M. Paul Crête: C'est un oubli malheureux et je m'en excuse.

Le ministre de l'Industrie du gouvernement du Canada recevait cette lettre le 7 avril 1999. Dans cette lettre, le président de la Chambre des notaires,—qui n'est pas député et que je peux donc nommer—M. Denis Marsolais, concluait en disant «Pour toutes ces raisons non-exhaustives, nous croyons qu'un amendement est nécessaire afin d'exclure de son application les professionnels notaires, de même que toute personne ou organisation par ailleurs assujettie à la législation québécoise».

Est-ce que cela peut être plus clair? La personne qui nous parle est président de la Chambre des notaires. C'est un représentant de personnes qui, à tous les jours, ont à jouer avec une loi comme celle de l'accès à l'information. Ils font des contrats et sont en contact régulier avec les gouvernement. Ils sont également en contact avec les entreprises privées quand ils signent des contrats. Ils savent que la loi du Québec s'applique aussi au secteur privé. Le président de la Chambre des notaires du Québec dit que cette loi ne peut être adoptée telle quelle, sans un amendement qui donne une exception au Québec pour qu'elle ne s'applique sur son territoire.

Donc, quand les députés libéraux mettent de l'avant ce projet de loi devant cette Chambre, je conviens qu'ils peuvent bien défendre le bien fondé de leur loi. Je n'ai rien contre le fait qu'ils nous disent que ça pourrait être une bonne loi. Ils ont le droit de dire toutes ces choses-là, mais ils n'ont pas le droit de dire cependant qu'on est contre parce qu'on sera toujours contre ce que le gouvernement fédéral fait.

Nous avons un taux d'appui au gouvernement sur les mesures que l'on trouve raisonnables et qui sont intéressantes dans ce Parlement qui se compare très bien à tous les autres partis de l'opposition. Toutefois, nous nous opposons quand les intérêts du Québec sont sur la table, quand il faut les défendre, quand il faut s'assurer que chacun des Québécois et des Québécoises soient couverts le mieux possible par la loi. Cela inclut aussi de ne pas être trop couverts. Parce que dans le passé, on en a vu une quantité de champs de juridiction où les deux gouvernements intervenaient.

Si on pense, par exemple, à une compagnie d'assurances qui pourrait avoir son siège social au Québec et qui a des relations d'affaires avec les autres provinces, qu'on imagine l'imbroglio administratif dans lequel on pourra se retrouver s'il y a deux lois qui s'appliquent avec des principes de base différents. Cela va entraîner des coûts de fonctionnement pour les gens du secteur privé qui ne seront pas intéressants.

Cela va entraîner aussi des problèmes pour les citoyens qui sont touchés par l'application de ces lois. Tout cela, parce que le gouvernement fédéral s'entête à adopter une loi qu'il considère comme nationale. Il semble que la seule solution pour le gouvernement, c'est toujours le mur-à-mur. Il faut toujours qu'il puisse rejoindre l'ensemble du Canada. Il faut que les problèmes puissent être abordés de la même manière à Vancouver ou à Québec, comme ils peuvent l'être à Saint-Jean, Terre-Neuve.

Mais ce n'est pas là la réalité. Nous avons au Québec un Code civil particulier. Il est important que les députés libéraux fédéraux sachent cela. Surtout ceux qui sont à l'extérieur du Québec. Ceux du Québec, j'espère qu'ils le savent tous depuis bien longtemps. Mais je ne vois pas pourquoi ils ne sont pas à la Chambre pour dire que cela n'a pas de bon sens de voter en faveur de ce projet de loi.

Pourquoi ne se lèvent-ils pas pour dire «Moi, comme député du Québec, je suis un fédéraliste mais, dans ce cas-ci, il faudrait que l'on respecte la loi du Québec». Je suis absolument incapable de comprendre comment c'est la loi du parti qui joue tout simplement à cet égard.

Je vais conclure là-dessus. Le gouvernement fédéral essaye de nous faire avaler un projet de loi sur la protection des renseignements personnels depuis plus d'un an. Nous assumons ici la défense de tous les intérêts des Québécois et des Québécoises en ce qui trait à la question des renseignements personnels. Nous allons les défendre jusqu'au bout. Nous allons tenir notre bout jusqu'à ce qu'on obtienne satisfaction de la part du gouvernement. Si jamais la Chambre adopte ce projet de loi, cela s'ajoutera à toutes les autres interventions du gouvernement fédéral qui font partie des raisons essentielles pour lesquelles nous voulons sortir de ce pays qui ne nous comprend pas, de ce pays qui ne veut surtout pas nous comprendre à cause de son action envahissante.

[Traduction]

M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir parler de ce projet de loi, maintenant appelé projet de loi C-6. Lors de la dernière session, avant que nous ne partions pour l'été, il s'appelait projet de loi C-54.

En tant que précédent porte-parole en matière d'industrie, j'ai passé beaucoup de temps à étudier ce projet de loi en comité et à m'entretenir avec les représentants de l'industrie et aux membres du public qui s'intéressent particulièrement à la protection des renseignements personnels. Je suis heureux de pouvoir en parler aujourd'hui.

J'aimerais préciser que mon collègue de Peace River, qui est l'actuel porte-parole en matière d'industrie et qui le mérite bien, je crois, va représenter de façon excellente le Parti réformiste pour les questions liées à l'industrie. J'aimerais le féliciter de tout ce qu'il a réalisé dans la fonction qu'il occupait précédemment dans le commerce international. Je suis impatient de travailler avec lui afin de poursuivre notre tâche qui consiste à créer un cadre juridique pour le commerce électronique.

 

. 1535 + -

J'avais, tout comme le Bloc québécois, de nombreuses réserves, particulièrement sur la question de la compétence et sur le fait que la protection des renseignements personnels relève de la compétence provinciale. Mes discussions au comité et avec les résidents de l'Alberta me portent à croire que le conflit signalé par le Bloc sur ces questions n'existe peut-être pas.

Pendant que je parle des motions du groupe no 1, j'aimerais préciser que nous nous opposons aux motions de ce groupe présentées par le Bloc. En fait, nous appuyons l'orientation du gouvernement sur cette mesure législative. Mon collègue de Peace River réitérera cela lorsque nous passerons au groupe no 2.

Pour récapituler, le projet de loi C-6 permet de créer la structure législative et réglementaire sur laquelle s'appuiera l'utilisation commerciale d'informations confidentielles et secrètes dans tous les domaines où des échanges sont effectués. Le parti réformiste se félicite de cette initiative tendant à protéger la vie privée de l'individu. Notre parti est favorable à une faible intervention du gouvernement et privilégie la libre entreprise; il reconnaît néanmoins le rôle important que le gouvernement est appelé à jouer pour favoriser le contexte économique au Canada, en mettant en place des règles équitables et transparentes destinées à protéger les consommateurs et les entreprises.

C'est précisément là l'objet de la seconde question qui m'est venue à l'esprit lors de l'examen de ce projet de loi, notamment en comité. En mettant en place cette infrastructure législative et en élaborant ce projet de loi, le gouvernement ne risque-t-il pas de se montrer trop sévère à l'endroit des entreprises qui pratiquent le commerce électronique tout en respectant la vie privée de leur clientèle, et de dissuader ainsi l'industrie de poursuivre les efforts accomplis à ce jour pour favoriser l'expansion du commerce électronique au Canada?

Il convient de distinguer entre respect de la vie privée et commerce électronique. Cela prête souvent à confusion, car les deux éléments sont l'un et l'autre tout aussi importants. Nous devons leur attribuer la même importance, bien que le commerce électronique ne puisse pas nécessairement être concilié avec les impératifs de la protection de la vie privée.

Il m'a été signalé au comité que le commerce électronique s'était développé pratiquement sans aucune intervention du gouvernement avant ce jour. Qu'il s'agisse de l'Internet ou d'une autre forme de commerce électronique, les échanges commerciaux effectués par voie électronique au Canada dépassent déjà le milliard de dollars en valeur. La confiance des consommateurs dans ce mode d'échange s'est, à toutes fins pratiques, installée sans que le gouvernement y soit pour quelque chose, ce qui me paraît phénoménal, à bien y songer.

Voilà pourquoi, je le répète, nous devrions éviter de traiter trop sévèrement les entreprises canadiennes. Nous devons mettre au point un certain type de loi qui pourrait favoriser la poursuite du commerce électronique. C'est l'un des points que j'ai tenté de soulever en comité.

Comme je l'ai déjà souligné, la question de la protection des renseignements personnels ne peut être prise à la légère. Certaines des compagnies qui font des affaires sur Internet ont pris cette question très au sérieux. C'est pourquoi les clients qui font actuellement des affaires sur le réseau Internet font suffisamment confiance à ce réseau pour communiquer des renseignements et acheter des biens et services. C'est un aspect qui me semble très positif puisque l'industrie fait visiblement sa part.

La question de la protection des renseignements personnels dépasse de beaucoup les frontières provinciales, particulièrement dans le cas des mécanismes commerciaux fonctionnant au niveau international. Il est donc important de pouvoir compter sur un certain cadre juridique qui prouve que le Canada a établi certaines normes au chapitre de la protection des renseignements personnels et que le reste du monde doit en tenir compte.

[Français]

C'est pour cette raison que j'aimerais partager, avec mes chers collègues du Bloc québécois, mon opinion et celle de mon parti par rapport aux renseignements personnels.

Les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral devraient travailler ensemble dans ce domaine et en partager les responsabilités, parce que le commerce électronique ne se limite pas aux provinces, il dépasse les frontières des provinces et de la nation. C'est vraiment une chose globale.

 

. 1540 + -

[Traduction]

C'est la raison pour laquelle je voulais soulever précisément ce point au cours de ma rencontre avec le Commissaire à la protection de la vie privée de l'Alberta, par exemple, parce que le Bloc se préoccupait de la façon dont cette loi fédérale pourrait combiner ses ressources au niveau provincial.

Le commissaire à la protection de la vie privée de l'Alberta a déclaré que cet automne le gouvernement albertain allait présenter une mesure législative qui va précisément renforcer la Loi sur la protection de la vie privée dans cette province. On juge qu'ainsi, cette nouvelle loi va compléter la loi fédérale. Le gouvernement fédéral a précisé que, une fois cette mesure législative adoptée, les provinces qui n'ont pas à l'heure actuelle une loi sur la protection à la vie privée auront trois ans pour en adopter une, aussi stricte qu'elles le souhaitent. Le gouvernement fédéral collaborera avec les provinces pour respecter cela.

Même si la loi provinciale sur la protection à la vie privée est plus stricte à certains égards que la loi fédérale, elle aura préséance sur cette dernière. Cela est encouragé, en fait, par le gouvernement fédéral qui souvent ne respecte pas beaucoup la législation provinciale. Cependant, dans ce cas-ci, le gouvernement fédéral est plus large d'esprit et je veux féliciter le ministre à cet égard.

C'est là où nous devons concentrer nos efforts plus particulièrement relativement à cette question. J'encourage mes collègues bloquistes à examiner cette question, car si le Québec a une loi sur la protection de la vie privée très forte, et je sais que les Québécois sont très fiers de leur loi actuelle à cet égard, elle viendra compléter la loi fédérale. C'est une des principales raisons pour lesquelles le Parti réformiste souscrit à cela. Même en Alberta, le commissaire à la protection de la vie privée et d'autres personnes intéressées par cette loi affirment qu'elle va dans la bonne direction et que nous devrions l'appuyer sous sa forme actuelle.

J'ai parlé d'autres groupes qui examinent cette mesure législative, qu'il s'agisse de groupes industriels ou de groupes de défense à la vie privée. Il y a un consensus général voulant qu'on soit parvenu à un équilibre jusqu'à maintenant surtout grâce à nos délibérations en comité et grâce aux amendements qui ont été proposés à la Chambre ici aujourd'hui. On est arrivé à un équilibre jusqu'à maintenant pour ce qui est de concilier les préoccupations sérieuses en ce qui concerne la protection de la vie privée d'une part et les activités reliées au commerce électronique d'autre part. Il ne faut pas être trop interventionniste. Le Parti réformiste souscrira à cette mesure législative tant qu'il ne verra pas que le gouvernement devient trop interventionniste.

Je ne vais pas commencer à parler des motions du groupe no 2, mais nous espérons qu'à cette étape du rapport, le gouvernement examinera certaines des propositions faites par le Parti réformiste lorsqu'il s'agit de modifier les dispositions sur la protection de la vie privée, surtout dans les domaines des services de santé et de l'information sur la santé, alors que la plupart des Canadiens reconnaissent que cette information est très importante et devrait être traitée comme telle.

J'espère que les amendements que j'ai proposés au nom du caucus réformiste et sur lesquels je travaillerai maintenant en compagnie de mon collègue, le député de Peace River, seront pris au sérieux parce que nous aimerions que cet aspect de la protection de la vie privée soit renforcé.

Le projet de loi C-6 prévoit un échéance d'introduction graduelle de deux ans, après quoi les provinces qui n'ont pas de législation comparable seront assujetties à la législation fédérale. À l'heure actuelle, seul le Québec possède une loi d'ensemble en matière de protection de la vie privée. L'Alberta aura la sienne cet automne. Les autres provinces ont conclu qu'elles n'avaient ni les ressources ni le goût de créer leur propre législation en matière de protection de la vie privée et elles s'en remettent à la législation fédérale. Le Bloc voudrait que soit totalement exemptée toute province qui a une telle législation ou qui s'apprête à en créer une. Cet aspect est pris en compte dans cette mesure législative.

Le problème avec les lois provinciales sur la protection de la vie privée c'est que, pour des raisons de commerce international et interprovincial, il faudrait une norme nationale dans ce domaine. Les milieux d'affaires canadiens l'ont réclamée pour simplifier les règles commerciales.

Ce sont les points les plus importants à signaler dans le débat sur les motions du groupe no 1. Nous ne nions pas qu'il faille assurer un équilibre. Cette loi y parvient. Mais il nous faut également envisager le commerce électronique dans un contexte global et voir comment on pourrait élaborer une loi qui soit en harmonie avec les provinces. Cette mesure législative l'est et c'est pourquoi j'encourage mes collègues du Bloc à examiner la chose et à chercher des moyens de renforcer cette relation, particulièrement en ce qui a trait au commerce électronique.

M. Jim Jones (Markham, PC): Madame la Présidente, au nom du Parti progressiste-conservateur du Canada, je suis heureux de participer au débat sur les amendements du groupe no 1 au projet de loi C-6, Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je tiens à remercier les nombreux témoins qui ont pris le temps de comparaître devant le Comité permanent de l'industrie ou de lui faire parvenir un mémoire. Leurs mémoires et leurs témoignages nous ont permis de mettre en lumière de nouvelles questions.

 

. 1545 + -

Je rends hommage à tous mes collègues anciens membres du comité et à tous mes collègues qui vont prendre leur place car c'est vraiment une question très importante. Je félicite le gouvernement d'avoir proposé en comité un amendement à l'article 18 du projet de loi identique à celui que j'avais proposé.

Nous, députés conservateurs, croyons dans la nécessité de mettre en place une loi pour la protection des renseignements, mais estimons que le gouvernement n'a pas suffisamment tenu compte des points de vue et des préoccupations des gouvernements de l'Ontario et du Québec.

Nous estimons qu'il n'a pas suffisamment tenu compte de l'impact financier sur le secteur privé du nouveau régime de réglementation prévu dans le projet de loi C-6. Nous ne voyons pas la nécessité d'adopter une loi pour satisfaire à une directive de l'Union européenne quand notre principal partenaire commercial, qu'il s'agisse du commerce électronique ou du commerce en général, a adopté une approche diamétralement opposée. Quatre-vingt-dix-neuf pour cent du commerce électronique dans ce pays se fait avec les États-Unis. Je ne vois donc pas la nécessité de se précipiter pour battre de vitesse les Américains sur ce plan parce qu'ils pourraient bien plus tard adopter une norme différente et nous obliger à revoir notre réglementation.

Je parlerai des amendements du Groupe no 1, qui ont tous été proposés par le député de Témiscamingue. Pour lui rendre justice, je note que le comité de l'industrie et le député bloquiste avaient alors présenté la motion suivante:

    Attendu les récents témoignages entendus au Comité de l'industrie sur le projet de loi C-54, lesquels faisaient état de grandes difficultés dans son application;

    Attendu la demande renouvelée du gouvernement du Québec de retirer le projet de loi C-54; Il est proposé:

    Que le comité suspende l'examen article par article du projet de loi C-54 et demande au ministre de l'Industrie d'entreprendre des consultations auprès de toutes les provinces, afin de prévenir toute contestation constitutionnelle pouvant compromettre l'atteinte de ses objectifs.

Cette motion avait été rejetée par sept voix contre quatre. C'est la majorité libérale qui l'a essentiellement remporté ce jour-là, mais la motion était appuyée par tous les députés de l'opposition membres du comité.

Ayant entendu les nombreuses préoccupations exprimées par les témoins, les libéraux ont eu le temps par la suite d'apporter des modifications significatives au projet de loi C-6. À titre d'exemple, l'article 11 permet à tout intéressé de déposer une plainte s'il estime qu'une organisation donnée contrevient à l'une des dispositions de la loi, ou omet de mettre en oeuvre une des pratiques commerciales recommandées. Le Bloc, le Parti réformiste et le Parti conservateur étaient prêts à unir leurs efforts afin de rédiger un projet de loi plus satisfaisant. Il faut reconnaître que les libéraux ont permis que quelques remaniements soient apportés au projet de loi C-54, qui s'appelle maintenant C-6. Par exemple, ils ont appuyé deux des seize amendements que j'ai présentés, mais sur la question importante de la réglementation générale qui accorde au commissaire à la protection de la vie privée un pouvoir excessif qui provoque des batailles entre les gouvernements de l'Ontario et du Québec, ils sont restés inébranlables. Ils ont refusé de coopérer ou de faire des compromis.

Au nom du Parti conservateur, je refuse d'appuyer aveuglément le projet de loi C-6 simplement pour qu'il existe une loi, n'importe quelle loi, sur la protection de la vie privée et sur le commerce électronique. Le paragraphe 18(1), qui accorde au commissaire le droit de procéder à la vérification d'une société en raison d'une mésentente concernant l'application des pratiques commerciales recommandées dans l'annexe 1 du projet de loi, constitue un exemple flagrant des défauts de cette mesure législative.

Les pratiques commerciales recommandées ne sont que cela, des recommandations. Ce ne sont pas des lois et elles ne devraient donc pas être imposées. Le commissaire à la protection de la vie privée ne devrait pouvoir procéder à une vérification que lorsqu'il existe de véritables raisons de croire que la loi a été enfreinte. Les vérifications sont abusives et placent un poids administratif énorme sur les opérations commerciales des sociétés canadiennes. On ne devrait recourir au pouvoir de procéder à une vérification en vertu du projet de loi C-6 que pour traiter les présumées violations des obligations établies dans le projet de loi.

Le commissaire à la protection de la vie privée ne devrait pas pouvoir décider lui-même si une société respecte les pratiques commerciales recommandées, telles que le type de mots de passe ou de cryptage utilisés. Le paragraphe 18(1) tel qu'il est actuellement formulé n'est donc pas nécessaire étant donné que le projet de loi C-6 prévoit déjà les outils qui sont nécessaires au commissaire à la protection de la vie privée pour qu'il puisse veiller à la conformité à l'annexe 1.

En outre, l'article 12 donne au commissaire à la protection de la vie privée le pouvoir de procéder à l'examen de toute plainte, y compris une plainte à l'effet qu'une organisation néglige d'observer une pratique commerciale recommandée.

Je reprends les objections de longue date formulées par différents témoins à l'égard des trop grands pouvoirs accordés par les articles 12 et 18 au commissaire à la protection de la vie privée. Bien que je ne voie pas d'inconvénient à ce que le projet de loi C-6 lui accorde le pouvoir de procéder à des perquisitions et des saisies, il est dans l'intérêt de toutes les parties prenantes qu'il soit tenu d'obtenir une autorisation judiciaire préalable.

 

. 1550 + -

Je trouve extrêmement préoccupant qu'aucune obligation ne soit faite au commissaire à la protection de la vie privée d'obtenir l'autorisation des tribunaux avant d'exercer son pouvoir de perquisition et de saisie.

Les articles 12 et 18 du projet de loi C-6 sont profondément conflictuels en ce qu'ils permettent au commissaire à la protection de la vie privée, d'une part, de décider s'il y lieu d'exercer son pouvoir de perquisition et de saisie et, de l'autre, de procéder à l'exécution de ce même pouvoir. L'autorisation devrait lui en être accordée par une tierce partie qui serait neutre, comme dans le cas des enquêtes judiciaires.

Le projet de loi C-6 accorde déjà au commissaire à la protection de la vie privée de vastes pouvoirs d'enquête et de vérification. Le commissaire peut assigner et contraindre des témoins à déposer sous la foi du serment, s'entretenir avec toute personne, exiger que soient produits les documents qu'il juge bon de réclamer, et recevoir les éléments de preuve ou les renseignements voulus, aux mêmes conditions que la Cour supérieure.

C'est pour ces raisons que des dispositifs de protection supplémentaires s'imposent dans le projet de loi C-6 lorsque le commissaire à la protection de la vie privée ou son représentant doivent se rendre sur les lieux pour saisir les documents d'un organisme privé.

La question ne préoccupe pas uniquement des sociétés qui chercheraient à défendre leur chasse gardée. Bill R. Mackenzie, de l'Association canadienne des éditeurs de journaux, a dit au comité de l'industrie que ces dispositions du projet de loi C-6 sont «effrayantes».

Toujours à propos de ces dispositions de la loi, d'autres témoins ont prédit des contestations en vertu de la Charte des droits et des libertés si le commissaire à la protection de la vie privée agissait conformément à l'article 12 ou à l'article 18.

J'ai également du mal à comprendre que le gouvernement n'ait pas présenté d'étude ou de rapport sur l'effet de coût du projet de loi C-6. Sur les plans juridique, constitutionnel et économique, ces pouvoirs absolus de vérification entachent cette mesure législative d'un vice énorme.

Malheureusement, la majorité libérale, faisant fi des craintes des défenseurs de la liberté de parole et des préoccupations du secteur privé, a décidé de rejeter mes amendements visant à obliger le commissaire à la protection de la vie privée à obtenir une ordonnance judiciaire avant de procéder à une saisie.

Si j'hésite à appuyer le groupe no 1 des amendements, c'est à cause des motions no 56 et suivantes qui ont trait aux Parties 2 à 5. La plupart de mes objections concernent la Partie 1 du projet de loi C-6.

Malheureusement, les deux marques de commerce des libéraux, à savoir l'arrogance et l'entêtement, ne me laissent pas d'autre choix que d'appuyer, au nom du caucus conservateur, le groupe no 1 des amendements.

Les libéraux ont eu l'occasion de collaborer avec nous à l'étape de l'étude en comité en vue d'améliorer considérablement ce projet de loi, mais ils ont préféré ne pas s'en prévaloir.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Madame la Présidente, c'est avec beaucoup d'intérêt que je participe aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois.

Le projet de loi que nous étudions aujourd'hui à l'étape du rapport n'est rien d'autre que l'ancien et fameux projet de loi C-54 qui, malgré le fait qu'il soit la démarche la plus significative du gouvernement fédéral pour la protection des renseignements personnels depuis 1983, nous oblige à constater qu'il ne réalise pas sa mission première qui est de protéger les citoyens. Dans ce cas-ci, on a accouché d'une souris.

Le ministre ne nous présente pas un projet de loi qui aurait pour réel objectif de protéger la vie privée des citoyens dans le secteur privé. Dans un univers technologique qui remet en cause ce droit fondamental, le ministre de l'Industrie nous propose une législation fragile et confuse dont l'élément central est l'annexe. Celle-ci reprend sans aucun changement le code de l'Association canadienne des normes.

Le ministre nous propose une loi qui donne un pouvoir discrétionnaire énorme au gouverneur en conseil mais ne donne aucun pouvoir au commissaire à la protection de la vie privée. C'est un projet de loi qui met l'accent sur le commerce électronique en reléguant au second plan la notion fondamentale de droit à la vie privée, qui fait fi de l'expérience unique du Québec dans le domaine de la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et qui, finalement, risque de faire la vie dure à l'actuelle législation du Québec.

Avant d'aborder de plein fouet quelques unes des faiblesses majeures du projet de loi qui est soumis à notre attention, je vais aborder la notion de vie privée, qui est au coeur de ce projet de loi, dans le contexte de la législation canadienne et québécoise.

 

. 1555 + -

Le droit à la vie privée est un droit humain au même titre que le droit à l'égalité et à la justice. La Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée par l'Organisation des Nations Unies, qui fête cette année son 50e anniversaire et à laquelle le Canada a adhéré, précise que chacun a droit à la vie, à la liberté, à la sécurité de sa personne. Elle dit encore: «Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation.»

Au Canada, cette protection est inscrite implicitement aux articles 7 et 8 de la Charte des droits et libertés. De plus, le gouvernement canadien s'est doté, en 1983, d'une Loi sur la protection des renseignements personnels qui s'applique à plus d'une centaine d'organismes gouvernementaux sous sa juridiction.

Le gouvernement fédéral promettait, depuis ce temps, une loi-cadre pour assujettir le secteur privé à l'obligation de protéger la vie privée. Le projet de loi C-6 en représente le triste aboutissement.

Au Québec, le droit à la vie privée est reconnu explicitement dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne et dans le Code civil du Québec.

Plus encore, le gouvernement du Québec est le seul gouvernement en Amérique du Nord à s'être doté de lois pour régir la protection des renseignements personnels dans les secteurs publics en 1982 et dans les secteurs privés en 1994. Des experts s'entendent même pour dire que la loi québécoise qui s'applique au secteur privé serait l'une des meilleures au monde.

Voilà que le fédéral, une fois de plus, vient mêler les cartes, et par cette loi, donnera un sens différent à l'application de la Loi sur les renseignements personnels, tout comme le projet de loi C-68 le fera à l'égard des jeunes contrevenants. On va à l'envers de ce que le Québec a mis en oeuvre. C'est donc une loi qui a plusieurs faiblesses, une loi fragile dont le coeur est une annexe, une petite annexe. L'essentiel des dispositions qui régiront la protection des renseignements personnels est donc présenté en annexe du projet de loi.

D'autre part, cette annexe n'est que le code type sur la protection renseignements personnels qui a été élaboré par le secteur privé et les consommateurs en vue de servir de cadre pour protéger les renseignements personnels sur une base volontaire.

En se limitant à ce texte, le ministre n'a ni souscrit aux recommandations des consommateurs ni à celles des commissaires à la vie privée qui ont reconnu que le code type de l'Association canadienne des normes constituait une bonne base de réflexion, mais qu'il devait être revu et corrigé s'il allait au sein de la loi.

Cet état de fait démontre hors de tout doute, que le ministre a priorisé les valeurs économiques aux valeurs sociales, alors que ce droit fondamental est si fragile dans le développement du commerce électronique.

C'est une loi qui donne un pouvoir discrétionnaire énorme au gouverneur en conseil. Avec l'alinéa 27(2)b), le gouvernement fédéral se donne le droit de modifier la loi par simple décret, sans avoir à revenir devant le Parlement.

On sait que le gouvernement libéral est passé maître dans l'art de ne pas rendre compte au Parlement. La loi pourra donc être amendée au gré des lobbies exercés par les grandes compagnies qui financent les caisses électorales des partis traditionnels canadiens. Le Parti libéral sait ce que cela veut dire.

C'est une loi qui ne donne aucun pouvoir au commissaire à la protection de la vie privée. Malgré le fait que les autres provinces canadiennes aient suivi le modèle québécois en accordant un pouvoir d'ordonnance au commissaire, la loi fédérale fait exactement l'inverse. Ainsi, le commissaire ne pourra pas rendre d'ordonnance, ce qui aura pour effet de rendre cette loi difficile d'accès pour les consommateurs et sans effet sur les entreprises.

C'est une législation qui fait fi de l'expérience unique du Québec. Cette loi fait fi de l'expérience unique du Québec dans le domaine de la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Voici quelques exemples: les objectifs de la loi sont mieux définis dans la loi québécoise, puisqu'il s'agit de protéger la vie privée indépendamment de toute considération commerciale; la loi québécoise couvre clairement toutes les entreprises à but lucratif ou non, alors que la législation fédérale ne prévoit la protection des renseignements personnels que dans le cadre des transactions commerciales; la loi québécoise prévoit qu'un groupe de personnes puisse nommer un représentant dans une cause commune. Aucune disposition équivalente ne se retrouve dans le projet de loi fédéral.

 

. 1600 + -

Donc, on le voit bien, c'est une loi qui risque de faire la vie dure au Québec. En plus de toutes les lacunes soulevées, il existe une inquiétude encore plus grande. En effet, la seule garantie dont dispose le Québec qu'il sera exempté de cette loi est un timide communiqué du ministre de l'Industrie. Cette méfiance est largement motivée par certains engagements formels envers le Québec que le fédéral a trop souvent tus ou reniés.

À titre d'exemple, qu'il me soit permis de rappeler à ce gouvernement les promesses de l'actuel premier ministre à quelques jours du référendum de 1995 à l'auditorium de Verdun.

Donc, les enjeux sont clairs. Pour le ministre de l'Industrie, il s'agit de s'assurer que le Canada participe pleinement au développement fulgurant du commerce électronique sans se soucier outre mesure des inquiétudes des citoyens aux droits à leur vie privée. Le ministre de l'Industrie ne se gêne pas non plus pour adopter une position centralisatrice qui va à l'encontre, à plusieurs égards, de ce qui devrait se faire dans les provinces canadiennes et qui aurait pu servir de modèle, en particulier au Québec.

Comme le disait si justement le vice-premier ministre du Québec: «Si le Québec participait de plain-pied au concert des nations, sa culture et sa politique en matière de protection des renseignements personnels, concrétisés dans sa Charte, son Code civil et ses deux lois sur la protection des renseignements personnels, auraient été mis de l'avant par son gouvernement lors de la rencontre de l'OCDE en octobre à Ottawa.»

D'ici là, le Bloc québécois demande le retrait immédiat du projet de loi C-6.



AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

TRANSPORTS

M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour que je présente la motion suivante concernant la télédiffusion des audiences du Comité des transports. Je propose:  

    Que la Chambre, en vertu du paragraphe 119.1(1) du Règlement, autorise le Comité permanent des Transports à télédiffuser les séances du 20 octobre 1999 au 19 décembre 1999, durant son étude portant sur l'avenir de l'industrie aérienne au Canada, conformément aux lignes directrices relatives à la télédiffusion des délibérations des comités.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI SUR LA PROTECTION DES RENSEIGNEMENTS PERSONNELS ET LES DOCUMENTS ÉLECTRONIQUES

 

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois, dont le comité a fait rapport avec des amendements, ainsi que du groupe de motion no 1.

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-6 qui touche une valeur fondamentale dans notre société, soit la protection de la vie privée.

Ce débat dépasse considérablement notre enceinte. Le 2 novembre 1998, les parlementaires et aussi la population du Québec ont eu la chance de lire dans le quotidien Le Devoir un article intitulé: «Les pressions se font de plus en plus fortes pour protéger la vie privée des consommateurs».

On traite, dans cet article, des menaces qui pèsent sur notre vie privée et de la nécessité des citoyens à être bien informés de leurs droits. On y parle aussi du projet de loi et des éléments du projet de loi dont nous discutons aujourd'hui à la Chambre, en spécifiant clairement dans cet article que les provinces qui n'adopteront pas de législation dans ce secteur se verront imposer et appliquer la loi fédérale dans un délai de trois ans.

Pourtant, la nécessité d'adopter un projet de loi qui protège les renseignements personnels et la vie privée ne date pas d'hier.

 

. 1605 + -

La plupart des provinces se sont déjà dotées d'un tel projet de loi. C'est le gouvernement fédéral qui, dans ce cas-ci, a longtemps tardé à prendre ses responsabilités en proposant une loi qui ne s'appliquerait qu'aux entreprises qui relèvent de sa juridiction.

En fait, on s'attendait à une chose de la part de ce gouvernement, c'est qu'il s'inspire des lois provinciales déjà en place pour présenter un projet de loi cohérent, efficace, clair et en harmonie avec les juridictions de ces mêmes provinces. Malheureusement, pour tous les Québécois et les Québécoises, et aussi les Canadiens et les Canadiennes, ce projet de loi rate lamentablement la cible.

Au lieu de protéger la vie privée, ce projet de loi se limite à protéger le droit des grandes entreprises privées et à faire des profits avec le moins de contraintes possibles. C'est totalement inacceptable. Le gouvernement fédéral doit retourner faire ses devoirs au plus vite. Il doit présenter un projet de loi qui vise véritablement la protection de la vie privée.

S'il n'est pas encore convaincu de l'urgence d'agir, de l'urgence de la situation, qu'il communique avec le président de la Commission d'accès à l'information du Québec. À ce moment-là, le ministre de l'Industrie constaterait assez rapidement que le gouvernement du Québec reçoit 2 000 appels par mois de personnes qui sont préoccupées par la protection de leur vie privée.

Le Parti libéral ajoute au cynisme contre la classe politique en se servant de cette initiative vide et confuse pour tenter de convaincre nos concitoyens et concitoyennes que la protection de la vie privée les intéresse. Mais ce que le gouvernement ne dit pas, c'est qu'il a présenté un projet de loi simplement en faveur du commerce. Un projet de loi qui se base sur le volontariat sympathique des entreprises pour protéger la vie privée.

Ce que le ministre responsable ne dit pas, c'est que le projet de loi est plein de trous et laisse plusieurs secteurs sans aucune protection. Les secteurs qui sont couverts par ce projet de loi le sont au conditionnel. Cela veut dire qu'on dit aux entreprises qu'elles devraient, si possible, faire attention à la vie privée de leurs clients. Cette situation est totalement inacceptable.

Je voudrais d'abord insister sur le caractère fondamental du droit à la vie privée. On en a déjà parlé avant moi, mais il est important de rappeler dans cette Chambre que le Parti libéral place le droit de faire des profits avant le droit à la vie privée.

Le droit à la vie privée est assimilé par les experts à un droit humain, au même titre que le droit à l'égalité et à la justice. Ainsi, la Déclaration universelle des droits de l'homme—qui a été citée par plusieurs de mes collègues qui m'ont précédé—, adoptée par l'Organisation des Nations Unies il y a 50 ans, et à laquelle le Canada a adhéré, précise que chacun a le droit à la vie, à la liberté, à la sécurité de sa personne et prévoit, et je cite:

    Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation.

Au Canada, la Charte des droits et libertés a aussi fait écho à la protection de la vie privée, même si cette protection n'est pas inscrite comme telle dans la Charte.

À cet égard, je prends la peine de mentionner qu'au Québec, comme on le sait fort probablement, ce droit à la vie privée est reconnu explicitement dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne promulguée en 1975. Au regard de l'article 5, aucune ambiguïté à la vie privée n'est discutable. Je cite ici l'article 5:

    5. Toute personne a droit au respect de sa vie privée.

 

. 1610 + -

Ce droit est également reconnu dans le Code civil du Québec au chapitre 3 intitulé: «Du respect de la réputation et de la vie privée». J'indique surtout le point 35. Ce n'est pas seulement le Bloc québécois qui l'indique. Je rappelle que la Chambre des notaires du Québec adressait une lettre au ministre responsable, le 7 avril dernier, qui mentionnait cette particularité eu égard au Code civil du Québec.

Le point 35 est clair. Il dit:

    Toute personne a droit au respect de sa réputation et de sa vie privée. Nulle atteinte ne peut être portée à la vie privée d'une personne sans que celle-ci ou ses héritiers y consentent ou sans que la loi l'autorise.

Il me semble que c'est clair. Le respect de la vie privée est un droit fondamental reconnu autant sur le plan international que sur la scène canadienne et québécoise. Il est aberrant que le gouvernement fédéral nous propose un projet de loi qui ne protège pas ce droit fondamental.

Comme le mentionnait l'article du Devoir que j'ai déposé et dont j'ai parlé à la Chambre—je constate que le leader du gouvernement à la Chambre m'écoute avec attention—, il était clair que le gouvernement du Québec était le seul gouvernement en Amérique du Nord à s'être doté de lois pour régir la protection des renseignements personnels dans les secteurs publics et privés. De plus, de nombreux experts affirment que la loi québécoise qui s'applique au secteur privé serait l'une des meilleures au monde. On est loin du projet de loi fédéral qui ne couvre que le secteur public.

Mais, il n'est pas si étonnant de constater que le gouvernement fédéral ne se soit pas inspiré de la loi québécoise. Il aurait ainsi atteint deux objectifs simultanément. D'une part, il aurait assuré aux consommateurs une protection exemplaire et, d'autre part, il aurait évité les échappatoires et les difficultés inévitables d'application de la loi quand les lois fédérales et provinciales ne sont pas harmonisées.

C'est ce qui nous pousse à croire que l'objectif véritable de ce projet de loi n'est pas la protection de la vie privée mais un pauvre exercice de relations publiques. Le gouvernement voudrait se servir de ce projet de loi pour faire croire qu'il répond enfin aux préoccupations de la population. Mais rien n'est plus faux. Ce projet de loi ne répond pas aux attentes des citoyens qui désirent voir leur vie privée protégée. Il se limite plutôt à satisfaire des intérêts commerciaux.

Même le commissaire à la protection de la vie privée du Canada note que le document de travail proposé par le ministère de l'Industrie et le ministère de la Justice est orienté avant tout vers le commerce et non vers la protection de la vie privée.

C'est pour ces raisons que nous rejetons catégoriquement le projet de loi C-6. Le gouvernement fédéral a refusé de s'inspirer de la loi québécoise, alors que celle-ci est reconnue comme étant exemplaire dans ce domaine. Ce n'est pas surprenant car la loi québécoise vise avant tout la protection de la vie privée des citoyens, alors que le projet de loi du gouvernement fédéral vise essentiellement à plaire aux grandes entreprises privées.

PROJET DE LOI C-6—AVIS DE MOTION CONCERNANT L'ATTRIBUTION DE TEMPS

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, il a été impossible d'en arriver à un accord en vertu des dispositions du paragraphe 78(1) ou 78(2) du Règlement relativement aux délibérations, à l'étape du rapport et à l'étape de la troisième lecture, du projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois.

En vertu des dispositions du paragraphe 78(3) du Règlement, je donne avis qu'un ministre de la Couronne présentera une motion d'attribution de temps à la prochaine séance de la Chambre afin d'attribuer un nombre spécifié de jours ou d'heures aux délibérations à ces étapes et aux décisions requises pour disposer de ces étapes.

 

. 1615 + -

M. Réal Ménard: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement pour m'adresser à vous sur une question de directives. Doit-on comprendre—et on voudrait que les Canadiens le réalisent—que nous sommes en présence d'une tentative qui va certainement réussir à imposer le bâillon à l'opposition?

Donnez-nous une directive, monsieur le Président. S'agit-il de cela et est-ce que vous assumez qu'il s'agit là d'une pratique démocratiquement acceptable?

Le vice-président: Il ne revient pas à la Présidence de décider si quelque chose est démocratique ou non. La responsabilité de la Présidence consiste à déterminer si quelque chose est contraire aux Règlements de cette Chambre.

Évidemment, ce que le leader du gouvernement a indiqué est tout à fait normal et conforme aux Règlements sur la question de la procédure seulement. C'est un avis de motion, et peut-être que nous aurons une motion, peut-être pas. On ne sait jamais. Ou peut-être que nous compléterons le débat cet après-midi, on ne sait jamais.

[Traduction]

M. Charlie Penson: Monsieur le Président, j'aimerais que le leader à la Chambre nous précise si c'est la 65e ou la 66e fois que le gouvernement a recours à la clôture depuis son arrivée au pouvoir en 1993.

Le vice-président: Je ne crois pas qu'il s'agisse d'un rappel au Règlement. C'est peut-être une question intéressante à laquelle quelqu'un, j'en suis sûr, pourrait répondre.

[Français]

M. Réal Ménard: Monsieur le Président, juste pour que l'on comprenne bien, sur le plan des directives, voulez-vous confirmer aux députés et à ceux qui nous écoutent que nous pourrions être privés, comme parlementaires, de notre droit de nous exprimer sur un projet de loi d'importance qui concerne la protection des renseignements personnels?

Pouvez-vous nous dire si, à terme, les parlementaires pourraient être privés du droit de s'exprimer? Pouvez-vous nous rappeler l'article qui permet au gouvernement de le faire, et est-ce que vous trouvez comme Président, gardien de nos droits, qu'il s'agit là d'une pratique démocratiquement acceptable?

J'attends de vous une directive, monsieur le Président.

Le vice-président: L'honorable député de Hochelaga—Maisonneuve sait très bien que c'est presque impossible pour quelqu'un de priver les députés du droit d'exprimer leurs opinions. Sauf que, selon les Règlements de la Chambre, il y a des règles qui permettent au gouvernement de mettre fin à un débat après un certain temps.

Le Président, en tant que serviteur de la Chambre, doit s'assurer que les Règlements sont toujours suivis et que la procédure adoptée par le gouvernement ou par l'opposition est en accord avec ces Règlements. C'est tout ce que le Président peut faire et doit faire.

Alors, peut-être devrions-nous continuer le débat pour ne pas gaspiller du temps et pour donner aux députés le droit de parler et de s'exprimer sur cette question importante.

M. Réal Ménard: Monsieur le Président, j'invoque à nouveau le Règlement. Est-ce que vous seriez assez aimable pour nous rappeler que du temps où le leader du gouvernement siégeait de ce côté-ci de la Chambre et qu'il faisait partie de l'aile «rat pack» de l'opposition, il n'aurait jamais accepté une telle pratique, et nous lui disons aujourd'hui que nous non plus, nous ne l'acceptons pas.

Le vice-président: C'est peut-être un argument, mais je ne crois pas que ce soit un rappel au Règlement.

ÉTAPE DU RAPPORT

La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-6, Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés ou communiqués dans certaines circonstances, en prévoyant l'utilisation de moyens électroniques pour communiquer ou enregistrer de l'information et des transactions et en modifiant la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les textes réglementaires et la Loi sur la révision des lois, dont le comité a fait rapport avec des amendements, ainsi que du groupe de motions no 1.

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, après ce que le leader du gouvernement à la Chambre vient de faire aujourd'hui, soit nous imposer le bâillon, c'est avec tristesse que je prends la parole dans le cadre du débat à l'étape du rapport du projet de loi C-6, dont le titre abrégé est la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques.

Ce projet de loi n'est qu'une réincarnation du projet de loi C-54 que le ministre de l'Industrie avait présenté lors de la première session de cette législature, projet de loi qui avait réussi à faire l'unanimité contre lui au Québec.

 

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Puisque le gouvernement fédéral refuse de retirer son projet de loi, le Bloc québécois et son porte-parole dans ce dossier, le député de Témiscamingue, présentent aujourd'hui une motion d'amendement qui vise à supprimer des articles de ce projet de loi parce que son adoption représenterait un recul en matière de protection des renseignements personnels au Québec. Rappelons que le ministre de l'Industrie a déposé son projet de loi sur les renseignements personnels sans attendre les résultats d'une consultation qu'il avait lui-même amorcée.

Le ministre a déposé son projet de loi en octobre 1998 sans attendre les commentaires de ses homologues provinciaux à qui il venait tout juste de faire parvenir sa proposition de projet de loi. Pourtant, lors d'une rencontre des ministres responsables de l'autoroute de l'information tenue à Fredericton, en juin 1998, ces derniers avait convenu de se consulter au moment d'examiner l'opportunité de légiférer en matière de protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Encore une fois, le gouvernement fédéral a adopté son approche unilatérale et paternaliste pour imposer son point de vue aux provinces. Ce n'est pas surprenant.

Le Bloc québécois a demandé le retrait de ce projet de loi pour des raisons de principes, notamment parce qu'il a été déposé sans consultation préalable et parce que ce projet de loi empiète sur les compétences provinciales en matière de droit civil. Si le Bloc québécois exige le retrait de ce projet de loi, c'est également parce qu'il imposerait des reculs considérables en matière de protection des renseignements personnels au Québec. Ce projet de loi comporte beaucoup de lacunes sur le plan juridique. Sa mise en application au Québec entraînerait des dédoublements et beaucoup de confusion. Ce gouvernement libéral n'en est pas à son premier dédoublement depuis qu'on siège dans cette Chambre.

Les lois du Québec se sont inspirées de la Charte des droits de l'homme qui considère la protection des renseignements personnels comme un droit fondamental. D'ailleurs, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, en vigueur depuis 1975, stipule à l'article 5 que «toute personne a droit au respect de sa vie privée». Ce droit est également défini et encadré dans le Code civil du Québec qui énonce les principes fondamentaux régissant la collecte, la détention et l'utilisation de renseignements concernant les personnes.

Enfin, une excellente protection des renseignements personnels des citoyennes et citoyens du Québec est garantie par deux lois: une loi, adoptée en 1982, protège la vie privée dans le secteur public; l'autre, adoptée en 1994, élargit la protection des renseignements personnels au secteur privé.

Il semble que ce gouvernement fédéral ne puisse accepter que le système québécois soit le plus évolué au Canada et tient absolument à imposer sa législation, quitte à amoindrir la protection offerte à la population québécoise.

Pourtant, en mai 1998, le ministre fédéral des Affaires intergouvernementales déclarait dans un de ses discours qu'il fallait, et je cite:

      [...] proscrire l'excuse trop facile qui veut que telle ou telle initiative gouvernementale réponde à un besoin trop pressant pour se laisser arrêter par des questions de juridictions [...] les empiétements de compétences créent une confusion nuisible à la qualité des politiques publiques.

Visiblement, le ministre ne pratique pas ce qu'il prêche, ou alors, il ne parle pas souvent à son collègue de l'Industrie puisque celui-ci invoque l'urgence de légiférer pour protéger les droits des Canadiens, empiéter sur les juridictions du Québec et tenter de lui imposer un régime qui est décrié par l'ensemble de la société québécoise.

En effet, lors des audiences du comité chargé d'étudier ce projet de loi, tout ce que le Québec comporte d'organisations professionnelles, patronales, syndicales et de consommateurs ont signifié leur préférence à l'endroit du régime québécois. C'est pourquoi ces organisations ont unanimement réclamé de soustraire le Québec de l'application du projet de loi dont nous débattons aujourd'hui, et ce, afin que le gouvernement fédéral ne leur impose pas un régime de protection des renseignements personnels différent de celui qui existe depuis cinq ans sur le territoire québécois.

 

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Dans une lettre adressée au ministre de l'Industrie, le 4 février dernier, le Barreau du Québec affirmait, et je cite:

    La protection des renseignements personnels repose sur la compétence provinciale en matière de propriété et de droits civils. [...] Par ailleurs, de façon générale, nous sommes d'avis que le régime fédéral d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels n'est pas suffisamment efficace [...] le projet de loi [...] devrait être amendé afin de prévoir explicitement que la loi fédérale ne s'applique pas aux entreprises assujetties à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

De son côté, la Chambre des notaires du Québec, qui représente plus de 3 000 professionnels du droit, écrivait au ministre de l'Industrie, le 7 avril dernier, pour dénoncer les dédoublements qui seraient causés par l'imposition de ce projet de loi au Québec et demander que le projet de loi soit amendé pour éviter cette situation. Je cite un extrait:

    Ce chevauchement de régimes est à notre avis générateur de méprises et de complications indues, tant pour le consommateur que pour les organisations soumises pour un même sujet à deux séries de règles [...] nous croyons qu'un amendement est nécessaire afin d'exclure de son application les professionnels, notaires, de même que toute personne ou organisation par ailleurs assujettie à la législation québécoise.

Enfin, le Conseil interprofessionnel du Québec, fort de 260 000 membres provenant de 43 ordres professionnels du Québec, écrivait également au ministre de l'Industrie, le 23 mars dernier, afin de lui dire, et je cite:

    Les professionnels québécois sont déjà régis par un ensemble articulé et hiérarchisé de lois et de règlements que l'on a voulu adapté aux valeurs de la société québécoise [...] Nous croyons que la superposition de plusieurs régimes ayant un même objet et un même sujet ne peut qu'entraîner de la confusion et de l'incertitude à l'égard des droits du citoyen [...] La venue d'un autre régime général viendrait compliquer inutilement la vie des citoyens.

Un autre sujet d'inquiétude est que la deuxième partie du projet de loi, qui traite des documents électroniques, pourrait retirer aux provinces leurs droits en matière de définition de notions comme la signature, les contrats et autres formalités qui tombent actuellement sous la gouverne du droit civil.

Face à toutes les lacunes du projet de loi C-6 et à la menace qu'il représente pour le système actuellement en place au Québec, le Bloc québécois a présenté un amendement qui vise à limiter les dégâts que pourrait causer l'adoption de ce projet de loi. Il vise à exclure explicitement du champ d'application du projet de loi les provinces qui possèdent déjà une loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Un autre amendement vise à maintenir la protection du droit à la vie privée garantie par la loi provinciale aux Québécois et aux Québécoises dans leurs relations avec des entreprises fédérales qui font des affaires au Québec.

Mais je crains qu'encore une fois, on n'écoute pas la volonté du Québec et que le gouvernement fédéral lui impose un carcan. Je dénonce l'attitude dominatrice du gouvernement fédéral, qui veut dicter sa volonté à toutes les provinces en imposant, d'un océan à l'autre, des mesures «made in Ottawa», sans souci d'efficacité et sans considérer leur impact négatif sur les droits des citoyens et des citoyennes.

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui sur ce projet de loi. Je trouve même qu'après l'avis de motion pour limiter la durée des débats, c'est un privilège que de pouvoir parler à l'étape du rapport du projet de loi C-6, dont le titre abrégé s'intitule, Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques.

Ce projet de loi est identique au projet de loi C-54 qui nous avait été présenté lors de la dernière session de cette législature.

Je tiens à m'opposer fermement à ce projet de loi que le ministre de l'Industrie a déposé sans consulter les provinces. Il constitue un empiétement inacceptable dans les juridictions provinciales en matière de droit civil.

D'ailleurs, les gouvernements de toutes les provinces et des territoires, réunis les 29 et 30 octobre 1998, avaient dénoncé l'intrusion considérable dans les domaines de compétence provinciale et territoriale que représentait le projet de loi C-54. Le gouvernement tente de le recycler tant bien que mal par le projet de loi C-6.

 

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La motion d'amendement dont nous discutons aujourd'hui vise à supprimer des articles de ce projet de loi dont l'adoption représenterait un recul en matière de protection de renseignements personnels au Québec. Ce projet de loi est déficient sur le plan juridique et son application, sans harmonisation avec la législation québécoise, sèmerait la confusion.

Le projet de loi, tel que rédigé, comporte trop de lacunes sur les aspects constitutionnel, démocratique et juridique. Il est loin d'améliorer la protection des renseignements personnels car, au contraire, il les menace.

C'est pourquoi nous demandons, et nous avons demandé à maintes reprises, que le gouvernement fédéral retire son projet de loi et reprenne ses consultations avec les provinces afin de présenter un projet de loi respectant les juridictions des provinces.

Je profite de ce débat pour rappeler au ministre de l'Industrie et aux députés gouvernementaux que mon collègue de Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques avait présenté, lors de la 35e législature, une motion demandant que le gouvernement assujettisse les sociétés de la Couronne à la Loi sur la protection des renseignements personnels. Cette motion avait été adoptée à l'unanimité avec l'appui de tous les députés libéraux, y compris les ministres.

Malheureusement, le gouvernement n'y a pas donné suite. Pourtant, c'est ce même gouvernement qui veut maintenant s'ingérer dans les compétences provinciales, alors qu'il est incapable de mettre d'abord de l'ordre dans sa propre maison.

Face au refus du gouvernement fédéral de retirer son projet de loi, le Bloc a demandé que des amendements soient apportés afin que cette loi ne s'applique pas au Québec où les renseignements personnels sont déjà protégés efficacement.

En effet, le gouvernement du Québec a adopté, en 1982, une loi qui protège la vie privée dans le secteur public et le Québec est le seul État en Amérique du Nord à posséder une loi qui protège les renseignements dans le secteur privé et ce, depuis 1994.

La Charte québécoise des droits et libertés de la personne, promulguée en 1975, stipule que toute personne a droit au respect de sa vie privée. Le Code civil du Québec traite également du respect de la vie privée et l'encadre en ce qui a trait aux principes fondamentaux régissant la collecte, la détention et l'utilisation de renseignements concernant une personne.

Les deux lois que je viens de citer viennent compléter l'ensemble législatif québécois en prévoyant les droits, les obligations et les modalités en ce qui a trait à la protection des renseignements personnels détenus par les organismes publics ainsi que dans le secteur privé.

On ne peut que constater que le Québec est à l'avant-garde dans le domaine de la protection des renseignements personnels et que le projet de loi fédéral menace d'amoindrir la protection offerte à la population québécoise. Le projet de loi C-6 dont nous discutons, n'est même pas, comme nous aurions pu le croire, l'extension au secteur privé des principes régissant la protection des renseignements personnels dans le secteur public sous juridiction fédérale. Le projet de loi va beaucoup moins loin. Voyons quelques exemples des lacunes de ce projet de loi.

Selon la loi fédérale actuelle, les institutions fédérales ont l'obligation d'informer les individus auprès desquels elles recueillent des renseignements personnels les concernant et des fins auxquelles ils sont destinés. Dans le projet de loi C-6, il s'agit pour le secteur privé d'une simple recommandation et non d'une obligation. La loi québécoise est bien plus précise et exigeante et stipule que le consentement à la communication ou à l'utilisation d'un renseignement personnel doit être manifeste, libre, éclairé et donné à des fins spécifiques.

Le projet de loi C-6 s'appuie sur le code volontaire CSA qui n'a pas pour objectif de protéger la vie privée, où la notion d'informations personnelles est moins bien définie et dont la définition de consentement est évasive. Il semble ainsi que le projet de loi vise surtout à favoriser le commerce électronique au détriment de la protection de la vie privée dans le secteur privé. Cela n'est pas étonnant quand on sait que le ministre de l'Industrie a toujours ignoré la partie de son mandat qui touchait la protection du consommateur.

De plus, les recours prévus dans le projet de loi sont longs, coûteux et inefficaces, car le commissaire fédéral ne peut rendre d'ordonnances et ne fait que des rapports. Les citoyennes et les citoyens devront aller en Cour fédérale pour régler les litiges, mais seulement après que le commissaire ait rendu son avis, qui n'est pas exécutoire, et après que tous les recours soient épuisés. Enfin, contrairement à loi québécoise, le projet de loi ne prévoit pas de sanctions pénales en cas de violation des principes de protection des renseignements personnels.

Face à toutes ces lacunes du projet de loi C-6 et à la menace de recul pour le Québec, le Bloc québécois a présenté plusieurs amendements qui tendent à limiter les dégâts que pourrait causer sa superposition à la législation actuelle.

 

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Un des amendements déposés par le Bloc québécois vise à exclure explicitement du champ d'application du projet de loi les provinces qui possèdent déjà une loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Un autre amendement que nous avons déposé vient retirer au gouverneur en conseil le pouvoir de décider unilatéralement à qui s'applique la loi fédérale.

Un autre amendement proposé par le Bloc québécois vise à maintenir le droit à la vie privée offert par la loi provinciale aux Québécoises et aux Québécois dans leurs relations avec des entreprises fédérales qui font des affaires au Québec.

Enfin, un amendement déposé par notre parti a pour objectif d'éviter la création de nouvelles règles au sujet de la définition juridique de signature et des droits au contrat pour le secteur électronique, car ces questions reposent sur la compétence provinciale en matière de propriété et de droit civil.

Le Bloc québécois et le gouvernement du Québec sont loin d'être les seuls au Québec à s'opposer à l'adoption du projet de loi C-6. Ils sont appuyés notamment par le Barreau du Québec qui, le 4 février dernier, écrivait à propos du projet de loi C-54 d'alors:

    L'approche du législateur québécois nous semble préférable en ce qu'elle précise davantage les droits et les obligations dans un texte législatif relativement clair et simple d'application [...] Nous croyons que le régime québécois de protection des renseignements personnels dans le secteur privé est préférable à celui qui est proposé dans le projet de loi C-54.

Quant à la Chambre des notaires, elle écrivait ceci, le 7 avril dernier:

    Ce chevauchement de régimes est à notre avis générateur de méprises et de complications indues, tant pour le consommateur que pour les organisations soumises [...] Nous croyons qu'un amendement est nécessaire afin d'exclure de son application les professionnels, notaires, de même que toute personne ou organisation par ailleurs assujettie à la législation québécoise.

Enfin, le Conseil interprofessionnel du Québec, qui regroupe les 43 ordres professionnels du Québec et compte 260 000 membres, écrivait, le 23 mars dernier:

    Nous croyons que le projet de loi C-54 et le régime qu'il propose sont hautement inopportuns en contexte québécois et vous demandons de l'amender, afin de prévoir explicitement qu'il ne s'applique pas aux personnes ou organisations assujetties à l'ensemble législatif québécois en la matière.

À la suite du référendum de 1995, le premier ministre présentait sa motion sur la société distincte et affirmait qu'il allait tenir compte de cette notion lors de l'adoption des lois. Le 2 juin dernier, le ministre du Commerce international affirmait, dans un article paru dans le quotidien La Presse, que:

    Le Canada a décidé de ne pas éliminer les différences, mais de se construire sur un régime d'accommodements entre majorités et minorités.

Le ministre ajoutait que le Canada n'a pas voulu qu'un droit s'impose à tous.

Je demande donc au premier ministre de respecter la société québécoise et de retirer ce projet de loi qui, sous sa forme actuelle, n'est pas acceptable au Québec.

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Madame la Présidente, il m'apparaît spécial qu'un projet de loi qui traitera de la protection des renseignements personnels soit déjà mis sous bâillon, alors même qu'on vient d'entamer les travaux de la session.

On est ici dans un haut lieu de débats et de démocratie, et aussitôt qu'on commence à le faire, parce que nos électeurs nous demandent de le faire—301 députés sont élus ici, à la Chambre, pour venir porter le mot des électeurs—le gouvernement libéral a la fâcheuse habitude de sortir immédiatement le bâillon, une motion d'attribution de temps, et d'y mettre un terme.

Il faut qu'on s'interroge très sérieusement sur ces stratégies. D'ailleurs, le gouvernement libéral est devenu le champion du bâillon, et certains de mes collègues du Parti réformiste l'ont soulevé. Cela nous préoccupe aussi au plus haut point. Il y a beaucoup de choses qui nous préoccupent du côté de la démocratie parlementaire.

Sans révéler les secrets des caucus, je peux dire que chez nous, on s'est interrogés sur ce type de mesures expéditives et souvent dilatoires, où on dit: «Le débat, on le lance dans le fond de la garde-robe. Nous, on vient de décider que cela va se terminer à tel moment.»

Il faut s'interroger: est-ce que c'est l'endroit, ici, où doit s'exprimer le point de vue des électeurs, oui ou non? Je rappelle que le droit de parole n'est pas juste le fait de donner à quelqu'un la permission de parler pendant dix minutes, c'est aussi combien de temps cela va durer.

 

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Effectivement, je me rappelle que les libéraux dénonçaient de telles procédures du Parti progressiste-conservateur lorsque celui-ci était au pouvoir. Aujourd'hui, ils sont au pouvoir et appliquent exactement le même principe, sinon pire.

Il y a beaucoup d'autres choses qui nous énervent, comme les débats sans vote. Je me rends compte qu'il y a ce qu'on appelle maintenant des débats exploratoires. Il y a un droit fondamental pour les députés, soit le droit de vote. Au lieu de demander aux députés de se prononcer et de voter, on va leur dire: «Vous pouvez parler pendant trois ou quatre heures, pendant deux jours, mais il n'y aura pas de vote par la suite.»

Il faudrait que les parlementaires du gouvernement puissent nous appuyer et dénoncer aussi ces stratégies. J'espère que dans leur caucus, sans qu'ils nous révèlent ce qui se dit, que ce type de discussion a lieu également. C'est un droit fondamental.

On entend souvent dire aussi que le pouvoir est entièrement concentré au bureau du premier ministre. Ici, il y a des gens qui apprennent les positions du gouvernement. Ce sont des questions démocratiques fondamentales. Encore aujourd'hui, on a eu l'exemple en se voyant brimer des valeurs démocratiques fondamentales des parlementaires.

C'est tout à fait déplorable. C'est spécial que cela se passe au sujet d'un projet de loi qui parle de la protection des renseignements personnels. C'est un dossier fondamental pour une société. Les gens sont un peu tannés que les renseignements personnels soient manipulés et propagés partout.

C'est une préoccupation importante de nos électeurs et, aujourd'hui, on vient nous dire: «Contentez-vous d'une limite de débat sur ce sujet.» C'est tout à fait déplorable. Je pense que je me devais de commencer en dénonçant cette mesure du gouvernement.

J'ai regardé le titre. La dernière fois, lors du débat sur l'ancien projet de loi C-54, on voyait que dans le titre il y avait des différences fondamentales entre celui de la loi du gouvernement du Québec et celui du gouvernement fédéral.

Je rappelle que la loi du Québec a pour titre: Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Il est clair que la prérogative du gouvernement du Québec est d'abord la protection des renseignements personnels. Ce n'est pas tout à fait la même chose. Je pense que c'est même l'antithèse du titre du projet de loi fédéral qui est devant nous aujourd'hui. Le titre est assez long, mais il en dit assez long aussi.

Le début du titre de ce projet de loi est: Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique. Donc, la première partie vise vraiment à promouvoir le commerce électronique. Ensuite, ce titre dit: «[...] en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés [...]».

Je ne veux pas lire le titre en entier car il quand même assez long. On voit que l'intention du gouvernement, et c'est toujours la même chose, c'est la business d'abord. Les renseignements personnels, les droits de l'homme, les droits de la personne, cela vient après. Ce n'est pas important et on l'a d'ailleurs dénoncé souvent.

Si on regarde aussi de quelle façon les contributions à la caisse électorale sont faites, on comprend que le gouvernement fédéral veuille protéger ses amis. En même temps, il va s'ingérer dans des champs de compétence du Québec. Encore une fois, on veut favoriser les gros donateurs à ces caisses.

Je rappelle que nous n'avons pas les mains liées face à ce problème. Ce sont les électeurs, des gens de chez nous, qui donnent de petits montants. On fait beaucoup d'efforts pour que cela reste ainsi. On va dans les campagnes, dans les rangs et au bout de nos villes pour aller chercher des montants de cinq ou dix dollars. Cela nous permet de parler librement comme nous le faisons aujourd'hui.

Cela nous permet aussi de ne pas toujours, et rarement même, être d'accord avec le gouvernement fédéral. Aujourd'hui, nous en avons un exemple typique.

Beaucoup de gens ont pris position là-dessus au Québec. Mes collègues en ont parlé un peu. Le Barreau du Québec, par la voix de son bâtonnier, a pris une position fort intéressante et très significative. Voici ce qu'il dit:

    Le régime québécois s'applique au Québec depuis bientôt cinq ans; ce régime est connu et les entreprises s'y sont adaptées. En conséquence, le Barreau du Québec souscrit à l'essentiel de la recommandation formulée par la Commission d'accès à l'information.

Voici ce que dit cette commission:

    Pour éviter toute confusion et s'assurer que les Québécois puissent continuer à bénéficier d'un régime complet en matière de protection des renseignements personnels, nous soumettons que le projet de loi [...]

Il s'agit aujourd'hui du projet C-6, son prédécesseur étant C-54,

      [...] devrait être amendé afin de prévoir explicitement que la loi fédérale ne s'appliquera pas aux entreprises assujetties à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Elle va encore plus loin:

    Nous allons même plus loin; le projet de loi devrait, selon nous, incorporer, par référence, la loi québécoise, même dans les champs de compétence fédérale, afin d'éviter la confusion, les chevauchements et les dédoublements de législation au Québec.

 

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On comprend que pour le ministre et le gouvernement fédéral, qui est toujours aussi centralisateur et paternaliste, c'est tout à fait le contraire qui se passe, parce que dans le cheminement chronologique des événements, il faut voir comment ça s'est passé. Il y a eu une réunion des ministres responsables de l'inforoute à Fredericton le 12 juin 1998; et là, les ministres de toutes les provinces se sont entendus pour dire: «S'il y a quelque chose qui concerne la protection des renseignements personnels, il faudrait nous en aviser.»

Je vais vous expliquer comment le ministre fédéral considère ce que cela signifie «aviser les provinces». Le 21 septembre, deux ou trois mois après la réunion, le ministre a fait parvenir aux ministres concernés le projet de loi à peu près dans la même forme qu'aujourd'hui. Le 1er octobre, soit quelques jours plus tard, il a déposé son projet de loi qui venait passer complètement par dessus la juridiction de chacune de ces provinces, y compris la juridiction très explicite du Québec où il est clair que la loi a fait ses preuves.

Le bâtonnier du Québec n'était pas le seul à s'y opposer, il y a aussi d'autres organisations qui se sont exprimées. On peut penser à la Commission d'accès à l'information, qui a fait un bilan extrêmement positif de la loi québécoise cinq ans après qu'elle ait été mise en vigueur.

Quand une loi d'une province est adoptée et que sa juridiction est respectée, Ottawa veut toujours essayer de vouloir passer par dessus et d'imposer une politique «coast to coast», d'un océan à un océan. Plusieurs députés ajoutent le troisième océan.

C'est comme pour les bourses du millénaire. C'est quelque chose qui fonctionne bien au Québec; on a d'excellentes façons de procéder au Québec. Eh bien, il y a un ministre fédéral qui veut passer par dessus la tête du Québec et imposer sa façon de voir.

On est un peu tannés de la façon de procéder de ce gouvernement, et mon collègue qui pilote le dossier actuellement a tout à fait raison de dire que ce qu'il faut que le ministre fédéral fasse maintenant, c'est de se retirer complètement de cela et de retirer le projet de loi.

Mais encore une fois, on a vu de quelle façon se chauffe ce gouvernement. Non seulement je ne pense pas qu'il ait l'intention de retirer le projet de loi, mais il a l'intention d'abréger la période d'examen de ce projet de loi qui concerne au premier plan l'ensemble des électeurs.

L'attitude adoptée par le gouvernement est tout à fait déplorable, non seulement dans la conduite du dossier du projet de loi C-54, mais dans l'ensemble des dossiers que j'ai énumérés plus tôt.

Dans cette perspective, je me joins à mes collègues pour demander à ce gouvernement de retirer le projet de loi et de laisser les provinces gérer le dossier de la protection des renseignements personnels.

Au Québec, on le fait très bien. Qu'il donne une preuve de sa bonne foi et qu'il se retire de ce dossier. On reviendra sur la façon de procéder de ce gouvernement pour essayer de faire taire la démocratie et l'opposition, car ce sont des choses qu'on ne laissera pas passer.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable députée de Vancouver-Est, La garde d'enfants; et l'honorable député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, Les pêches.

M. Yvan Bernier (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, BQ): Madame la Présidente, c'est toujours avec tristesse que nous intervenons à la Chambre lorsque nous avons le sentiment que c'est la dernière fois que le gouvernement nous permet de nous exprimer sur un projet de loi. Permettez-moi d'indiquer, d'entrée de jeu, mon indignation par rapport à la situation.

Lorsqu'il s'agit de la protection des renseignements personnels et privés dans le cadre d'un projet de loi sur le commerce électronique, je pense que c'est quelque chose qui nous touche de très près, cela va sans dire, car c'est un sujet sur lequel les Québécois et les Canadiens sont très sensibles. C'est à se demander si le gouvernement n'a pas quelque chose à cacher.

 

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Je rappellerai que ce qu'il y a de difficile dans l'élaboration d'une loi, c'est de vraiment cerner le problème et de rendre cette loi tellement claire que son application va en découler elle aussi avec clarté.

D'emblée, le ministre cherche à créer de la cacophonie et des distorsions parce qu'il fait fi de ce premier principe. Comme mes collègues l'ont mentionné tout à l'heure, durant l'été 1998 ou à une réunion au printemps 1998, le ministre avait abordé le sujet avec ses collègues. Cependant, il leur a envoyé, si ma mémoire est bonne, un projet de loi durant le mois de septembre. Le 1er octobre 1998, il déposait son projet de loi à la Chambre. Fini les discussions.

Un peu à l'image d'un jeu ou du commerce électronique que le ministre s'apprête à faire, il fait apparaître ou voguer les choses à son gré. C'est assez pour créer des craintes auprès des citoyens.

Le deuxième point que j'aimerais soulever—on va dire que je suis un bloquiste et que je suis toujours sensible à cette question—est la question des compétences de juridiction.

Je veux bien croire que lorsque l'Acte de l'Amérique du Nord britannique a été rédigé, on ne devait pas penser beaucoup à la protection des renseignements privés ou personnels en matière de commerce électronique. Cependant, il est quand même assez clair qu'en matière de protection des renseignements personnels et du respect de la vie privée, la loi qui a été adoptée au Québec est bonne. Elle est dans son champ de juridiction. Elle s'applique pleinement.

Ce que je ne comprends pas c'est que le gouvernement canadien, par la porte arrière, par le biais de son ministre de l'Industrie, veut légiférer dans le domaine du commerce électronique. Il fait apparaître, à l'article 4 de ce projet de loi, l'application dans le champ fédéral de la protection des renseignements privés et personnels. Encore une fois, c'est chercher le trouble.

J'ai dit dans mon discours que le plus difficile était de trouver la justification pour établir une loi. Il s'agit de définir le problème tellement clairement puisque lorsque la loi est tellement claire, son application est tellement plus facile.

Parce que le ministre a cherché le trouble, si jamais la loi est adoptée, à cause de l'entêtement du ministre de ne pas modifier quoi que ce soit et de ne pas tenir compte des amendements du Bloc québécois, on va se ramasser avec une double juridiction pour gérer la même chose.

Comme tout le monde sait que les données sur l'électronique se propagent très vite, les clients ou les commerçants vont avoir à se poser la question suivante: les renseignements que je viens de recevoir aujourd'hui ou que j'ai recueillis aujourd'hui pour mes clients, est-ce que je dois les administrer selon la loi québécoise ou selon la loi fédérale?

S'ils ont à livrer des documents par la suite dans une autre province ou ailleurs, la question est de clarifier le tout avant qu'on soit en orbite.

L'autre question que je soulève concerne toujours la bonne foi du ministre de l'Industrie. Lors d'un discours dont je cherche la date, et c'était lors du dépôt de son projet de loi, il avait dit: «Si une province adopte une loi assez similaire, les organisations visées seront exemptées de l'application de la loi. La loi québécoise actuelle sur la protection de la vie privée, du fait qu'elle ressemble sensiblement au projet de loi intitulé, Loi sur la protection des renseignements personnels et des documents électroniques, le Québec sera exempté de l'application de celle-ci». Il disait cela au début. Sauf que nulle part dans son projet de loi je remarque des dispositions lui permettant d'affirmer ou de confirmer ces propos.

 

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Il faudra que le gouvernement modifie le texte, parce qu'on ne retrouve cela nulle part dans le projet de loi. Tout ce que l'on peut voir comme permission d'exemption, c'est à l'alinéa 27(2)d) où on permet l'exclusion «d'une organisation, d'une activité ou d'une catégorie de l'application de la présente partie à l'égard de la collecte, de l'utilisation ou de la communication de renseignements personnels qui s'effectuent à l'intérieur de la province en cause.»

Dans cette définition du pouvoir qui est confié au gouverneur en conseil, ce sont des organisations, des activités, mais on ne peut pas parler de tout ce qui s'exerce sur un territoire donné, dans une province donnée. Or, il faudra, d'ores et déjà, prévoir de modifier la législation ou de l'amender en conséquence.

Lorsqu'on a connu quelques ratés, comme ce fut le cas avec ce projet de loi, lorsqu'on sait que le commerce électronique n'en est qu'à ses premiers balbutiements par rapport à ce qu'il sera dans l'avenir, et que c'est toujours une question très sensible pour les Québécois et les Canadiens, pourquoi le ministre n'a-t-il pas accepté la main tendue du Bloc québécois, c'est-à-dire de retirer le projet de loi, de remettre les pendules à l'heure et de refaire ses devoirs pour s'assurer d'une harmonisation avec la loi québécoise et pour tenir compte des besoins de législation du reste du Canada?

Il aurait été facile pour le ministre de le faire, d'autant plus que l'on a retardé l'ouverture de la session. On en a même profité pour abroger le projet de loi C-54 de la précédente législature pour lui donner un nouveau numéro, le projet de loi C-6. Il a simplement avancé dans l'ordre numérique, mais il ne semble pas y avoir grand-chose qui ait avancé dans la tête du ministre...pardon, du ministère.

Pourquoi aller aussi rapidement maintenant? Serait-ce que le menu législatif, après le tonitruant, l'audacieux discours du Trône, fait en sorte que l'on est obligé de réchauffer les vieux projets de loi mal faits et d'aller aussi vite que cela? J'ai du mal à comprendre. C'est peut-être là toute l'audace que contenait le discours du Trône, c'est-à-dire l'audace de ne rien faire, de repasser pour du neuf ce qui était vieux et ce qui a presque été oublié à la dernière législature, puisqu'on n'a pas eu le temps de finir d'en débattre, le gouvernement ne l'ayant pas voulu. C'est à se poser la question: à quel type de gouvernement fait-on face?

Madame la Présidente, vous m'indiquez que mon temps de parole expire. C'est malheureux, car j'aurais aimé pouvoir discourir un peu plus longuement. Ce que j'aimerais ajouter ou ce qui devrait être compris maintenant par l'ensemble des parlementaires ici présents—je me dois de souligner le nombre de députés de l'autre côté qui sont ici, un mardi soir—c'est phénoménal de voir les banquettes du parti au pouvoir pleines...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): À l'ordre, s'il vous plaît. Je dois interrompre l'honorable député, car on ne doit pas mentionner le nombre, la présence ou l'absence des députés.

M. Yvan Bernier: Madame la Présidente, je n'ai pas parlé d'absence, du moins, je ne le crois pas. Mais enfin, je vous prie d'excuser mon enthousiasme pour un mardi soir. Je veux être bien sûr que le gouvernement sera assez responsable pour tenir compte des amendements, puisqu'il n'a pas voulu tenir compte de la main qu'on lui tendait pour qu'il reprenne le projet de loi à zéro. Que l'on respecte les champs de juridiction et le commerce en sera mieux gardé.

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Madame la Présidente, je profite de l'occasion pour souhaiter une bonne rentrée parlementaire à tous.

Il me fait plaisir, à l'instar de mes collègues et à la suite de l'excellent travail fait par la députée de Mercier sur l'ex-projet de loi C-54, de poursuivre le travail qui sera tout aussi excellent, j'en suis convaincu, de mon collègue de Témiscamingue sur le nouveau projet de loi C-6.

J'écoutais attentivement les discours de mes collègues et une remarque d'une de mes collègues m'a fait penser à changer un peu mon introduction pour vous parler d'une motion.

 

. 1700 + -

J'avais oublié d'en prendre note dans mon discours. Il s'agit d'une motion qui a été adoptée, il me semble, au début de l'année 1996 par le parti ministériel. Elle rappelait au gouvernement que dans ses politiques et ses décisions, il devrait tenir compte du fait que le Québec était une société distincte des autres provinces canadiennes. C'est une motion contre laquelle nous nous sommes opposés, est-il utile de le rappeler.

À ce moment-là, ce n'était pas parce qu'on ne le reconnaissait pas, mais parce que c'était l'aspect de dérision de la motion et de son rôle qui nous avait fait nous y opposer.

On a une preuve patente ici du non-fondement ou du non-sérieux d'une motion parlementaire lorsqu'il est question d'un sujet aussi sérieux. Le gouvernement fait fi de cette même motion pour appliquer ou pour analyser ce projet de loi qui est devant nous.

Mes électeurs et électrices me disaient «Pourquoi le Bloc québécois a-t-il voté contre cette motion puisque, enfin, on vous reconnaissait?» Je leur donnais un exemple—et on me permettra de citer l'exemple que j'utilisais auprès de mes concitoyens et concitoyennes, ça les faisait bien rire, soit dit en passant—pour illustrer le rôle ou l'importance d'une motion. Je peux l'exprimer de la façon suivante. Lorsque nous sommes arrivés ici, en 1993, plusieurs députés avaient peu ou pas d'expérience. On a adopté deux lois. En 1994 ou 1995, on a adopté une loi reconnaissant le hockey comme sport national au Canada. Moi, je pensais qu'il y avait longtemps que cela avait été fait, mais eux venaient de découvrir cela.

Là, on s'est rendu compte qu'on oubliait quelqu'un, parce qu'il faut toujours penser à tout le monde. On avait oublié les autochtones. Il fallait trouver un sport national qui regroupait les autochtones. On a donc changé la motion et on a dit que le hockey était le sport national l'hiver, et qu'on allait en trouver un pour l'été.

Au cas où les gens ne le sauraient pas, le sport national d'été des Canadiens et des Canadiennes, c'est la crosse. Ceci est une motion qui a été adoptée par cette Chambre. Une motion, c'est très important.

L'année suivante, j'étais porte-parole pour le dossier du sport amateur. J'ai reçu un appel de l'équipe nationale de crosse me disant que leur budget devait être coupé à zéro.

Le gouvernement venait de confirmer que c'était le sport national de notre pays. En 1994 ou 1995, on venait d'inventer ça. Je ne connais pas les statistiques de participation à ce sport mais, dans mon comté, elles sont relativement faibles. Ce ne sont pas des pourcentages. Ceux qui pratiquent ce sport-là sont peu nombreux. La même année, on a pris le budget de l'équipe nationale et on l'a réduit à zéro.

Si on veut savoir ce que vaut une motion, voilà deux exemples: celui du sport national et celui du projet de loi C-6. D'un côté ou de l'autre, on a adopté une motion. Je pense que le premier ministre ne se rappelle peut-être s'être prononcé là-dessus. On voit toutefois la considération que l'on porte à une motion lorsqu'il est temps de prendre des décisions.

Cela étant dit, je vais revenir au projet de loi C-6. Souvent, le parti ministériel estime, de façon un peu cavalière parce qu'il pense que nous sommes de méchants séparatistes, qu'à chaque fois qu'on analyse un projet de loi, on le fait dans une optique séparatiste. Ils se ferment donc les oreilles et n'écoutent même pas. Ils préfèrent lire autre chose comme peut-être le «Réveillez-vous».

Donc, je veux m'inspirer, pour faire cette présentation, non pas d'un document du Bloc québécois, mais d'un document de la Commission d'accès à l'information du Québec. Même s'il y a les mots «du Québec» ce n'est pas dangereux. Elle a analysé le projet de loi C-54 qui est maintenant le projet de loi C-6.

Je sais que mes collègues ont utilisé beaucoup de documents, des mémoires présentés en comité, justement pour démontrer une autre vision, un autre aspect de l'objection unanime au Québec face à ce projet de loi.

Je rappelle que le titre et l'objet de la loi sont fondés sur le pouvoir constitutionnel du gouvernement fédéral pour établir un climat de confiance auprès des Canadiens dans la façon dont les industries recueillent, utilisent et communiquent leurs renseignements personnels afin que le commerce électronique soit florissant. C'est effectivement un domaine qui est en plein essor et il faut le protéger.

Cependant, un peu plus loin, et je répète le nom de l'organisme, qui est la Commission d'accès à l'information du Québec. Elle dit, et je cite—même si c'est un peu long, je dois le citer—: «Depuis bientôt cinq ans, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé assure à tous les citoyens québécois un régime de protection de renseignements personnels qui a fait ses preuves et démontré son utilité».

 

. 1705 + -

Je continue:

    Fondée sur les compétences constitutionnelles du Québec en matière de propriété et de droit civil, la loi québécoise se veut un complément à la Charte des droits des libertés de la personne et se veut aussi un complément au Code civil du Québec. L'ensemble de la législation québécoise, en incluant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, traduit l'importance qu'accorde le législateur à la protection de la vie privée.

Plus loin, on dit:

    La Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé ne s'applique pas aux seules activités commerciales et vise également les renseignements personnels qui pourraient être recueillis, utilisés ou communiqués par des moyens électroniques.

Ce que la Commission d'accès à l'information explique dans son mémoire, c'est que, compte tenu des compétences constitutionnelles du Québec, compte tenu du Code civil du Québec, compte tenu des moeurs et des valeurs du Québec, compte tenu, aussi, comme mes collègues l'ont expliqué précédemment, de l'expérience vieille de cinq ans d'une loi qui fonctionne bien au Québec, la Commission d'accès à l'information dit non, comme nous le disons, au projet de loi C-54, aujourd'hui le projet de loi C-6.

Pour quelles raisons? C'est que l'article 4 et le paragraphe 27(2) du projet de loi définissent le champ d'application de la future loi fédérale et prévoient la possibilité, pour des organisations ou des activités, d'être exemptées de l'application des règles fédérales relatives à la protection des renseignements personnels.

Selon leur compréhension, la loi fédérale s'appliquera aux entreprises établies au Québec ou à une partie de leurs activités, à moins qu'une exemption ne soit accordée par décret du gouverneur en conseil, ce qui est peu probable.

Mais même si on accordait un décret à une entreprise québécoise qui exerce des activités à l'extérieur du Québec, la loi fédérale serait automatiquement appliquée, touchant probablement près de 28 p. 100 des entreprises du Québec faisant des affaires au niveau du commerce électronique avec les autres provinces canadiennes.

Plus loin dans son mémoire, la Commission d'accès à l'information dit:

    Au surplus, plusieurs entreprises québécoises auront sûrement l'obligation d'appliquer simultanément la loi fédérale et la loi québécoise, à moins qu'elles n'aient aucune activité commerciale ou qu'aucun des renseignements personnels qu'elles détiennent ne soit recueilli, utilisé ou communiqué à l'extérieur du Québec.

On restreint beaucoup d'entreprises québécoises qui sont ouvertes vers le commerce électronique mais qui n'auront aucun contact avec l'extérieur du Québec.

C'est dit clairement:

    Nous devons nous objecter, parce que chaque entreprise québécoise devra administrer une double juridiction, alors que la juridiction québécoise existante depuis cinq ans respecte les normes de l'OCDE qui ont été mises de l'avant par les pays industrialisés, faisant expérience des commerces électroniques, même si le Québec, depuis cinq ans, l'a bien démontré et appliqué.

Tous les témoins qui sont venus devant le comité, sur lequel siégeait la députée de Mercier, qui est maintenant remplacée par le député de Témiscamingue, ont pu le démontrer.

En conclusion, dans son mémoire, la Commission d'accès à l'information du Québec disait, et je cite:

    Pour éviter toute confusion et pour s'assurer que les Québécois puissent continuer à bénéficier d'un régime complet en matière de protection des renseignements personnels, la Commission soumet que le projet de loi C-54...

Il s'agit de l'actuel projet de loi C-6 qui s'appelait alors le projet de loi C-54.

      [...] devrait être amendé afin de prévoir explicitement que la loi fédérale ne s'appliquera pas aux entreprises assujetties à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

J'ai cru comprendre, en suivant les délibérations de ces travaux, que cet amendement avait été rejeté par le ministre de l'Industrie et par le gouvernement.

Pour cette raison, nous demandons tout simplement le retrait du projet de loi C-6 pour qu'on puisse reprendre ces travaux et mettre sur pied un projet de loi plus crédible.

M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Madame la Présidente, je veux me joindre à mes collègues pour dénoncer l'attitude du gouvernement de deux manières.

Premièrement, il a déposé ce projet de loi de façon précipitée, sans consultations avec les provinces, au détriment des droits les plus sacrés qui puissent exister au Québec. Deuxièmement, après l'avoir déposé, il ne veut même pas qu'on tienne un débat sur la question.

 

. 1710 + -

Mon collègue d'Hochelaga—Maisonneuve a bien manifesté notre désarroi et notre désapprobation lorsqu'il s'est levé, après que le leader du gouvernement à la Chambre soit venu nous signifier qu'il imposerait le bâillon. En fait, ce qu'il nous dit, c'est ceci: «Parlez pour quelque temps encore et ensuite, la loi sera adoptée, peu importe que vos arguments se tiennent ou qu'ils puissent être très acceptables pour bonifier le projet de loi.»

Je suis à la Chambre depuis plus de 15 ans et, depuis que ce gouvernement est au pouvoir, j'ai remarqué une diminution de ce que j'appelle la tradition démocratique de cette Chambre. Je suis justement à lire un document sur l'histoire de la Chambre des communes, sur les premiers débats tenus à la Chambre et sur tout ce qui pouvait exister au début en termes d'écoute entre les députés des différents partis.

Quand je suis arrivé en 1984, on peut dire que la tradition se maintenait. Il y avait souvent des amendements proposés par l'opposition qui étaient acceptés par le gouvernement et on arrivait souvent à des consensus, pas toujours à la Chambre, mais suite à un processus dans les comités.

Je me rappelle également que le leader du gouvernement à la Chambre qui a déposé ce bâillon faisait partie d'un groupe de trois députés qui s'appelait le «rat pack». Ces gens déchiraient leurs chemises et faisaient des crises d'hystérie. Ils avaient même fait étamper des gilets de leur sigle pour les distribuer aux gens dans la rue pour démontrer leur objection au fait que le gouvernement conservateur du temps ait justement utilisé le bâillon à une ou deux occasions. C'était incroyable de voir avec quelle force, et quelle sagesse aussi, ils défendaient le principe du débat démocratique ici, à la Chambre.

Or, ces gens, qui étaient justement des gardiens de la démocratie, sont devenus aujourd'hui des embaumeurs de cette démocratie. Ces gens sont devenus des moutons, alors qu'ils rugissaient comme des lions, il y a quelques années.

La ministre du Patrimoine, qui était à côté, criait aussi son indignation. Il y avait une troisième personne qui, elle, a gardé ses principes. Cette personne siège aujourd'hui comme député indépendant de la circonscription de York-Sud—Weston. Il rugissait, et quand ses principes ont été trahis, qu'a-t-il fait? Il a démissionné du parti et ses électeurs l'ont réélu. Voilà un homme de principe.

Je ne partage pas entièrement son point de vue sur tous les sujets, mais je dis que cette fois-là, il criait d'un bord, et par la suite, il ne s'est pas couché comme un mouton, il s'est levé debout et il a traversé de l'autre bord.

M. Réal Ménard: Il ne s'est pas «à-plat-ventri».

M. Louis Plamondon: «À-plat-ventri», comme me le suggère mon collègue d'Hochelaga—Maisonneuve, avec grande sagesse et grande justesse.

Je me demande ce que ces députés sont venus faire ici, si ce n'est que pour voter lorsqu'on leur en donne le signal. Tout à l'heure, j'en voyais plusieurs, et j'en vois encore plusieurs, qui ont la tête baissée. On leur a défendu d'intervenir sur ce projet de loi. Ils ont honte, et je les comprends d'avoir la tête basse. Je les comprends de se cacher derrière le rideau. Je les comprends également d'avoir fait des signes à leur leader lorsqu'il est venu nous bâillonner.

C'est difficile d'appartenir à un parti qui se dit démocratique et de se faire dire: «Fermez-vous-la. Vous n'êtes pas ici pour réfléchir, vous êtes ici pour voter quand on vous en donnera le signal. On est quatre, cinq pour penser pour vous autres.»

Or, lorsqu'ils font des discours dans leurs comtés, ce n'est pas ce que j'entends. Ils disent qu'ils iront fermement défendre les droits des individus, des associations, des commerces, des industries et des citoyens de leurs comtés. On parle présentement des droits des citoyens, et que font-ils? Ils ne réagissent pas. Ils acceptent d'être silencieux sur un projet de loi pourtant aussi important qui touche chacun des individus qui vit au Québec comme au Canada.

J'interpelle ces députés. Je me rappelle un certain discours du député de Beauce; il disait, dans son comté: «J'irai à la Chambre des communes, comme le député Bernier que je remplace», mais le député Bernier ne serait pas resté assis sur un projet de loi comme cela.

 

. 1715 + -

Le député de Beauce devrait avoir honte de son discours de cette époque. Si le député Bernier était ici, il serait debout et dirait: «Je n'accepte pas qu'on bafoue les droits du Québec avec un tel projet de loi.»

Où est-elle la députée de Laval-Ouest? Pendant la dernière campagne électorale, elle faisait des débats et n'en finissait pas de parler des droits de la personne. Elle n'a pas dit un seul mot sur ce projet de loi.

La députée de Notre-Dame-de-Grâce—Lachine nous fait toujours la morale au sujet des droits de la personne au Québec. Que fait-elle aujourd'hui? Elle reste silencieuse devant un projet de loi pour lequel nous sommes unanimes au Québec. Nous sommes contre ce projet de loi.

Que fait l'honorable député de Lac-Saint-Louis, un ex-ministre québécois de l'Environnement et grand prêcheur des droits de la personne? Il est silencieux aussi.

J'interpelle le député de Pierrefonds—Dollard. C'est un médecin. Il doit savoir ce que c'est les droits de la personne et la confidentialité dans les dossiers. Il est silencieux lui aussi.

J'interpelle le député de Anjou—Rivière-des-Prairies, un ex-syndicaliste qui était à la tête de la CEQ. Combien de discours a-t-il prononcé au sujet des droits de la personne. Je m'attendais à ce qu'il se lève et qu'il dise: «Non, non, ce projet de loi ne répond pas du tout à ce que les citoyens attendent au Québec. Il est en contradiction avec tous les organismes du Québec qui se sont prononcés là-dessus». Mais non, lui aussi, ce grand défenseur et ce grand syndicaliste d'autrefois est devenu un mouton, comme son leader, en appartenant à ce parti politique.

Qu'on parle du député de Pontiac—Gatineau—Labelle qui avait le même discours pendant la campagne électorale.

Mais pire encore, il y a le député de Brome—Missisquoi. Où est-il, cet ex-bâtonnier du Québec? Que dit le Barreau du Québec? Il dit tout cela. Pourtant, lui, lorsqu'il était le grand bâtonnier, que faisait-il? Il a dit: «Élisez-moi. Moi, j'irai défendre les droits du Québec. Je sais que la juridiction au Québec est différente de celle du reste du Canada, d'abord par notre Code civil.»

L'organisme qu'il présidait nous a dit—et le député de Terrebonne l'a cité tout à l'heure—que ce projet de loi était complètement inutile, et que si jamais on tenait absolument à l'adopter, il devrait être modifié en profondeur. Cet organisme a envoyé à chaque député une lettre de quatre pages. Où est-il l'ex-bâtonnier qui est actuellement député de Brome—Missisquoi? Il reste silencieux devant un tel projet de loi.

Qu'on parle du député de Brossard—La Prairie. Je l'ai entendu dans les débats que j'ai eus avec lui à Shawinigan, lors de la campagne électorale de 1993 et lors de la campagne référendaire de 1992. Nous avons eu des débats ensemble. C'était un grand défenseur des droits et des libertés. Aujourd'hui, il reçoit l'ordre de son chef d'être silencieux.

J'interpelle tous ces députés du Québec et leur dis de se lever et de défendre les droits du Québec. J'interpelle surtout le fameux ministre, le député d'Outremont, qui disait: «Moi, j'irai défendre les droits du Québec à l'intérieur de la Confédération.» C'est le temps. Qu'il nous prouve qu'il est capable de respecter le Québec. Non seulement le Québec, car il y a d'autres provinces qui s'opposent à cela, mais principalement le Québec qui est à l'origine de ce type de législation. Il a été la première région dans le monde occidental à proposer une telle législation et à l'appliquer depuis cinq ans.

J'interpelle tous ces ministres du Québec, celui des Travaux publics et celui du Sport amateur. A-t-il fini son régime pour pouvoir s'occuper maintenant des droits de la personne?

Je termine en souhaitant que dans les derniers instants de ce débat, les députés du Québec, quelle que soit leur appartenance politique, se lèvent tous pour dire au ministre: «Retirez votre projet de loi.»

 

. 1720 + -

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Madame la Présidente, je veux, d'entrée de jeu, remercier mon collègue de Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour pour son éloquent discours. Il nous a rappelé que les députés du gouvernement restent bien assis sur un sujet qui traite de la protection des renseignements personnels.

C'est vraiment très sérieux de voir que ces gens-là sont bâillonnés et qu'ils laissent passer, on ne sait pourquoi, un projet de loi décrié par toute la population canadienne et par les Québécois, un projet de loi qui va nuire à notre protection au niveau des renseignements personnels. C'est inadmissible, et j'espère que la population qui nous regarde en prend note.

Pourquoi sommes-nous en désaccord avec ce projet de loi? Parce que ce projet de loi, qui vise à faciliter et à promouvoir le commerce électronique en protégeant les renseignements personnels dans certaines circonstances, a été—on pourrait en faire un historique—déposé par le ministre de l'Industrie, la semaine dernière.

Il reprend le projet de loi C-54 qui avait été déposé le 1er octobre 1998. Nous avons déjà discuté de ce projet de loi. On s'attendait à ce qu'il y ait des modifications de soumises. Quand le ministre de l'Industrie a présenté à nouveau ce projet de loi, qui est devenu le projet de loi C-6, on s'attendait à avoir des modifications, parce qu'il avait été tellement décrié. Mais non, le ministre reprend exactement l'ancien projet de loi C-54 de l'époque.

Pourquoi sommes-nous en désaccord? Parce que le ministre de l'Industrie l'a déposé sans consulter personne et sans consulter les provinces. Le projet de loi empiète sur les juridictions des provinces. Il impose des reculs au Québec en matière de protection des renseignements personnels. Sa mise en application au Québec entraînera de la confusion. Ce projet de loi, s'il est adopté, va créer un fouillis administratif sans précédent. En outre, il est déficient sur le plan juridique.

On dit que ce projet de loi manque de clarté. Tous ceux qui l'on étudié et qui se sont présentés au comité permanent—ce n'est pas rien, il s'agit de membres de l'Association du Barreau canadien, de l'ACNOR, de l'Association des compagnies d'assurance de personnes, les professeurs de l'UQAM et un expert indépendant, M. Ian Lawson—donc, tous sont venus dire aux membres du comité que ce projet de loi manquait de clarté.

Je veux citer ici l'Association du Barreau canadien: «La norme n'est pas rédigée dans un style assez rigoureux pour constituer un train de règles législatives. Elle ne convient pas très bien pour définir un droit à la protection des renseignements personnels, ni pour faire comprendre aux organisations assujetties à la loi comment elles doivent protéger les droits des personnes.»

L'Association des compagnies d'assurance de personnes, elle, dit ceci: «D'autres dispositions de la loi sont très difficiles à interpréter, notamment en ce qui concerne certains aspects clés, comme l'application et la mise en oeuvre de la loi».

Les professeurs de l'UQAM, eux, ont dit: «Si vous voulez vraiment faire de la protection des consommateurs dans un domaine aussi redoutable que celui de la protection des renseignements personnels, vous devriez arriver avec certaines règles strictes, pas des conditionnels où, à toutes fins utiles, l'entreprise n'a que l'obligation de démontrer sa bonne foi. Il n'y a aucune espèce de résultat qu'on peut attendre de ça.»

Je crois qu'on ne peut pas être plus clair.

Au Québec, le droit à la vie privée est reconnu explicitement dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, promulguée en 1975. De plus, le gouvernement québécois s'est doté d'une Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, unique en Amérique, qui a été mise en application en 1994. Elle est reconnue comme un modèle à travers le monde. Je le répète, elle est reconnue comme un modèle à travers le monde et devrait servir de source d'inspiration pour la rédaction d'une législation fédérale.

 

. 1725 + -

On fait fi de cela pour on ne sait quelle raison. On essaie d'entrer dans cette loi que le Québec s'est doté et qui est considéré comme un modèle à travers le monde. Quelles sont les raisons qui motivent actuellement le ministre pour bafouer une loi du Québec qui sert de modèle à travers le monde? Peut-on m'expliquer cela?

Le ministre de l'Industrie a agi unilatéralement alors qu'il avait dit qu'il consulterait tout le monde avant de déposer son projet de loi. Il a peut-être fait quelques petites consultations pour bien paraître mais, par la suite, il s'en est lavé les mains et a déposé son projet de loi.

En effet, le 12 juin, les ministres responsables de l'autoroute de l'information, réunis à Fredericton, ont convenu de se consulter, lorsque ce serait approprié, au moment d'examiner l'opportunité de légiférer en matière de protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Le 21 septembre 1998, le ministre fédéral de l'Industrie faisait parvenir un projet de législation à ses homologues provinciaux leur demandent leurs commentaires sur un projet de loi que le gouvernement fédéral entendait déposer.

Mais il n'a pas attendu les commentaires. Il l'a déposé tout de suite, soit le 1er octobre 1998. Il leur envoie le projet de loi le 21 septembre 1998 et, le 1er octobre 1998, sans attendre les réponses, il dépose son projet de loi qui s'appelait à l'époque C-54.

Le ministre de l'Industrie crée aussi de toutes pièces un contentieux constitutionnel qui aurait pu être évité s'il avait consenti à travailler de concert avec ses homologues.

Les provinces sont les instances qui ont juridiction en matière de renseignements personnels en vertu des pouvoirs que la Constitution de 1867 leur confère sur la propriété et le droit civil. Tous les experts consultés par le Bloc québécois reconnaissent que ce champ de juridiction revient, au premier chef, aux provinces.

Or, le projet de loi C-6 stipule que la loi s'appliquera aux organisations sous juridiction fédérale dans leurs activités commerciales, aux organisations qui transfèrent des renseignements personnels d'une province à l'autre ou d'un pays à l'autre et aux employés dont les renseignements personnels sont recueillis par une entreprise sous juridiction fédérale.

De plus, l'article 30(1) prévoit que la loi fédérale s'appliquera aux organisations privées, même si elles sont sous juridiction provinciale, si le fédéral ne reconnaît pas qu'il existe dans la province une loi similaire à la sienne.

Si ce n'est pas empiéter dans les juridictions provinciales, je ne sais pas quel mot employer pour qu'on comprenne.

Le projet de loi C-6, appliqué sur le territoire du Québec, représentera des reculs importants au niveau des droits des Québécoises et des Québécois en matière de droit à la protection des renseignements personnels.

La loi québécoise prévoit, à l'article 14, que le consentement à la communication ou à l'utilisation d'un renseignement personnel doit être manifeste, libre, éclairé et être donné à des fins spécifiques.

En ce qui a trait au consentement, le projet de loi C-6 défavorise le consommateur en énonçant à plusieurs endroits des principes vagues qui laissent une large place à l'interprétation.

Malheureusement, je n'ai pas assez de temps pour bien expliquer ce qui se passe avec ce projet de loi. Je veux rappeler, en conclusion, que ce projet de loi a été déposé sans consultation avec les provinces, qu'il empiète sur les juridictions des provinces et impose des reculs au Québec en matière de protection des renseignements personnels.

La mise en application de cette loi au Québec entraînera de la confusion. Elle est déficiente sur le plan juridique. Ce projet de loi est inapplicable, manque de clarté, cause des difficultés inutiles aux entreprises du Québec et diminue sensiblement le droit des citoyens du Québec à la protection de leurs renseignements personnels.

 

. 1730 + -

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Madame la Présidente, j'allais dire que j'interviens sur le projet de loi C-54, mais à cause de l'abrogation des travaux de la Chambre par le leader du gouvernement, nous devons recommencer nos devoirs aujourd'hui. Nous devons également rebaptiser le projet de loi C-54 pour l'appeler projet de loi C-6.

Malgré les trois mois et demi dont a disposé ce gouvernement pour préparer un discours du Trône lamentable, il a quémandé trois semaines additionnelles, ce qui a évidemment entraîné l'abrogation de tous les projets de loi dont l'étude était, somme toute, très avancée ici, à la Chambre.

Donc, le projet de loi C-6 est piloté par le ministre de l'Industrie, le bon député d'Ottawa-Sud, dans la région de la capitale fédérale. Lorsqu'on voit agir ce ministre, on se demande parfois si son jugement n'est pas défaillant.

C'est le même ministre qui, il y a quelques semaines, disait du ministre Bernard Landry du Québec qu'il était insignifiant, après que ce dernier eut rencontré le maire de Boisbriand où se situe l'usine de General Motors. Il a dit: «Vu qu'il y a une bonne concertation, je vais vous aider à conserver GM» alors que tout le monde sait très bien que 95 p. 100 des usines d'automobiles au Canada sont situées en Ontario, sa province.

Le Québec en a 5 p. 100, soit 1 sur 15, et il voudrait nous la fermer. Le ministre de l'Industrie ne voudrait même pas nous aider à conserver notre usine. Et c'est lui qui présente aujourd'hui le projet de loi C-6 qui va violer l'intimité et la confidentialité des Québécois et des Québécoises.

Je lis une partie du titre du projet de loi C-6: Loi visant à faciliter et à promouvoir le commerce électronique—jusque là, ça va bien—en protégeant les renseignements personnels recueillis, utilisés, etc.

Voyez comment ce gouvernement peut être tordu et vicieux. Ils ont changé la loi sur l'assurance-chômage en assurance-emploi. Cela veut dire que vous payez des polices d'assurance, et si vous passez au feu, la compagnie d'assurance va vous dédommager pour l'incendie. Alors, les travailleurs donnent une partie de leur salaire pour se prémunir contre le chômage, contre une perte d'emploi. On a changé le nom; c'était beau «l'assurance-emploi».

La députée de Drummond sait très bien que seulement 42 p. 100 des payeurs de cotisations à l'assurance-emploi peuvent se qualifier et sont admissibles aux prestations lorsqu'ils perdent leur emploi. Pourquoi? Parce qu'on a durci les conditions d'admissibilité.

Le ministre de l'Industrie dit qu'il va protéger la confidentialité des citoyens. S'il traite la confidentialité des renseignements personnels de la même façon qu'il traite les travailleurs et les travailleuses du pays, on peut douter de son jugement. La façon dont il a traité Bernard Landry, le vice-premier ministre du Québec, démontre hors de tout doute que cet homme n'a pas de jugement.

Le ministre n'a tellement pas de jugement qu'il a agi unilatéralement en déposant son projet de loi sur les renseignements personnels sans attendre le rapport du comité de consultation qu'il avait lui-même créé. Je me demande ce que fait cet homme dans le Cabinet. Il crée un comité de consultation et, une semaine plus tard, il procède. Il n'attend même pas le rapport. Intelligent, n'est-ce pas?

Il y a pire encore. Le 21 septembre 1998, il y a 13 mois, il consulte les ministres provinciaux afin de recevoir leurs commentaires. Quelques jours plus tard, il va de l'avant et, le 1er octobre 1998, il dépose le projet de loi C-54.

 

. 1735 + -

Je ne suis pas le seul, et le Bloc québécois n'est pas le seul à dénoncer la façon de faire du ministre. Au Québec, c'est à l'unanimité qu'on s'objecte.

Il y a d'abord le gouvernement du Québec, le Conseil du patronat, la CSN, la Chambre des notaires, Option consommateurs, le Barreau du Québec, dont le député de Brome—Missisquoi est l'ancien bâtonnier en chef. Lors de l'élection complémentaire à la suite du décès du député de cette circonscription, M. Péloquin, le député qui est maintenant en poste disait: «Je vais aller à Ottawa défendre les intérêts des Québécois et des Québécoises.» Il était bâtonnier en chef au Québec. Cinq ans plus tard, son ancienne association dit: «Le projet de loi C-6, c'est de la colle, cela devrait aller à la poubelle.»

Pis encore, un groupe de constitutionnalistes affirmait que le projet de loi C-6 est un viol constitutionnel. Tout à l'heure, la députée de Drummond signalait que le Québec, en 1994, avait adopté une loi pour protéger les renseignements privés. Au Québec, cela existe déjà. Eh bien, le fédéral, quelques années plus tard, s'apprête à casser, à zigouiller, à mettre la hache dans ce qui va bien au Québec.

C'est la même chose au sujet du discours du Trône prononcé il y a deux semaines. Au Québec, nous avons l'assurance-médicaments qui va bien. Le gouvernement veut créer l'assurance-médicaments à son tour. Ce gouvernement va mettre encore le trouble, la chicane au Québec.

Le ministre de l'Industrie sait très bien qu'au Québec, nous avons ce qu'on appelle le Code civil, et dans le reste du Canada, c'est le common law. Je vais citer un article, l'article 3 du Code civil, qui est très court:

    3. Toute personne est titulaire de droits de la personnalité, tel le droit à la vie

Tout le monde est d'accord.

      à l'inviolabilité et à l'intégrité de sa personne, au respect de son nom, de sa réputation

C'est-à-dire de ne pas dire n'importe quoi de quelqu'un d'autre.

      et de sa vie privée.

Il s'agit de l'article 3 du Code civil, et c'est le plus récent volume qui vient d'être édité.

Le projet de loi C-6 devrait aller à la filière 13, sur les tablettes, et être tout simplement annulé. Nous, du Bloc québécois, souhaitons le retrait pur et simple du projet de loi C-6 pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, le ministre de l'Industrie l'a déposé sans consulter les provinces. Le projet de loi empiète sur les juridictions des provinces. Il impose des reculs au Québec en matière de protection des renseignements personnels, comme la députée de Drummond l'a si bien démontré tout à l'heure. Parce que sa mise en application au Québec entraînera de la confusion, et parce qu'il est déficient sur le plan juridique.

Finalement, il utilise le commerce électronique comme excuse pour envahir le droit civil des Québécois, des Québécoises et de tous les Canadiens.

En terminant, je souhaite que le premier ministre, le député de Saint-Maurice, essaie de raisonner le ministre—bien que je doute de ses capacités intellectuelles à l'occasion, comme il l'a démontré, il y a une semaine, une semaine et demie—et s'il n'est pas capable de le ramener à la raison, qu'il s'en départisse comme ministre de l'Industrie et le mette hors du Cabinet.

 

. 1740 + -

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole après mon collègue de Frontenac—Mégantic. J'espère pouvoir être aussi éloquent que lui sur ce sujet.

Comme tous mes autres collègues du Bloc québécois, le projet de loi C-6 me laisse un peu perplexe et même m'inquiète. Il m'inquiète, parce que nous savons très bien—et mes collègues l'ont souligné amplement aujourd'hui—que nous avons déjà au Québec une loi qui régit justement les renseignements personnels. Une loi qui fonctionne très bien et qui couvre tout les domaines, à la limite même de la loi et des pouvoirs de l'Assemblée nationale.

La loi couvre donc tous ces domaines concernant les renseignements personnels, et voici que le gouvernement fédéral présente une autre loi, le projet de loi C-6 qui, semble-t-il sur le plan juridique, est inadéquat et ne couvre pas tous les éléments qu'il devrait couvrir. De plus, il sème la confusion de façon très sérieuse chez les entreprises et ne protège même pas les personnes.

Mes collègues ont longuement parlé de plusieurs aspects de ce projet de loi. Je veux m'attarder quelques instants uniquement sur la présentation qui a été faite par le Conseil du patronat du Québec au mois de mars dernier.

Le Conseil du patronat du Québec n'est pas un organisme qui se présente sous des couleurs souverainistes. En fait, on sait très bien que le Conseil du patronat représente essentiellement les grosses entreprises au Québec et a traditionnellement eu une vision fédéraliste sur le plan politique.

Mais, dans le cas du projet de loi C-6—qui autrefois était le projet de loi C-54—ils se sont présentés avec un rapport très étoffé pour démontrer effectivement que ce projet de loi était tout à fait inacceptable pour les entreprises au Québec parce que, encore une fois, il sème la confusion.

Le projet de loi C-6 ne tient pas du tout compte de la loi québécoise et fait en sorte que les entreprises québécoises seront soumises à deux régimes juridiques distincts.

Je lis dans sa présentation que pour les renseignements recueillis, utilisés et transmis à l'intérieur de la province ce sera la loi québécoise qui s'appliquera, tandis que ce sera la loi fédérale qui s'appliquera pour les renseignements transmis à l'extérieur de la province. Sans compter bien d'autres facteurs, d'ailleurs, qui sèment la confusion par rapport aux entreprises.

Il donne quelques exemples. Des compagnies au Québec qui ont, par exemple, une compétence fédérale, qui font affaire à l'extérieur de la province de Québec ou qui sont régis par une loi canadienne ne sauront pas à quelle loi se soumettre. Effectivement, il y aura deux lois qui exigeront des éléments contradictoires et qui en plus ne protégeront pas adéquatement les gens.

Donc, c'est un conflit de juridiction qui fait en sorte que les consommateurs québécois seront mal protégés et que les entreprises auront deux types de recours. C'est carrément contradictoire. Je vais d'ailleurs donner deux exemples qui ont été soumis par le Conseil du patronat du Québec.

Dans le cas, par exemple, du consentement, on sait très bien que le consentement est extrêmement important quand on parle de renseignements personnels. À cet égard, on a une différence d'application pour ce qui est du projet de loi C-6 et pour ce qui est de la loi provinciale du Québec.

 

. 1745 + -

En vertu de la loi québécoise, le consentement doit être manifeste, spécifique et éclairé. Par contre, en vertu du principe édicté à l'article 4 de l'annexe 1 du projet de loi C-6, le consentement est requis. Voilà une contradiction.

Il y en a d'autres concernant, par exemple, la collecte des renseignements. La loi québécoise prévoit que la collecte de renseignements auprès de tiers ne peut être effectuée sans que l'intéressé y ait consenti sous réserve d'exceptions bien précises. Alors que dans le projet de loi C-6, on y dit qu'une organisation peut recueillir des renseignements à l'insu de l'intéressé et sans son consentement.

Comment voir clair dans des lois qui se contredisent, qui sont carrément opposées dans leur vision et dans leur application? Il est certain que cela ne protège pas les consommateurs québécois, mais pire encore, cela met les entreprises québécoises dans une situation extrêmement malheureuse, parce qu'elles sont incapables de savoir si elles doivent traiter leurs clients en vertu de la loi fédérale ou de la loi provinciale. La chose devient encore plus compliquée pour des compagnies qui font affaire avec des entreprises à l'extérieur de la province ou qui sont régies par la loi canadienne.

Les exemples sont très nombreux, mais je vais conclure avec une citation de la présentation du Conseil du patronat du Québec:

    Ce sont autant de questions auxquelles nous ne trouvons, pour l'instant, aucune réponse et qui, si le projet de loi C-6 est adopté tel quel, poseront de gigantesques problèmes aux entreprises.

Il s'agit d'une des conclusions du Conseil du patronat du Québec qui, je le répète, n'est pas un organisme souverainiste. C'est un organisme qui défend les intérêts des gens d'affaires du Québec et qui, souvent, se présente comme étant un organisme à couleurs fédéralistes.

Ce sont autant de questions qui se posent concernant le projet de loi C-6. C'est la raison, d'ailleurs, pour laquelle je suis inquiet. Si le Conseil du patronat se pose autant de questions concernant le projet de loi C-6, on peut se demander, effectivement, compte tenu des conflits possibles et des contradictions évidentes, si ce projet de loi est un accident de parcours de la part du fédéral ou s'il est délibéré.

Est-ce que le gouvernement fédéral, avec le projet de loi C-6, a l'intention délibérée de nuire au Québec, non seulement dans la juridiction qui est la sienne d'édicter des lois, mais de nuire aux entreprises du Québec? Est-ce que c'est une possibilité? Je pose la question: est-ce qu'il y a une intention au fédéral de nuire au Québec?

Avec le projet de loi C-6, on a le droit de poser cette question tellement c'est gros et évident, et tellement la contradiction est manifeste. Ce qui m'inquiète, c'est que, dans le fond, ce soit délibéré. On n'a pas un manque d'exemples récents concernant le gouvernement fédéral et ses actions envers le Québec, autant dans l'union sociale que dans les juridictions provinciales. On l'a vu dans le secteur de la santé, on l'a vu tout récemment dans le secteur de l'éducation quand on a mis sur pied les bourses du millénaire qui sont une insulte profonde envers le Québec. Plus insultant que ça, il y a peut-être le projet de loi C-6.

Au grand jour, on parle aux étudiants du Québec au sujet des bourses du millénaire, et même les étudiants sont révoltés de voir comment ils sont pris en otage de façon éhontée par le gouvernement fédéral.

On n'essaie pas de nuire au Québec de façon dissimulée ou hypocrite, non, on le fait au grand jour. Encore une fois, le projet de loi C-6 en est un exemple.

 

. 1750 + -

Le projet de loi C-6 est un exemple de cette tentative, qui s'inscrit sans doute dans le plan B, de mépriser tout ce qui maintient l'aspect distinct du Québec dont, par exemple, les lois qui concernent les renseignements privés.

En terminant, tout comme mes collègues, j'espère que le ministre va se réveiller et qu'il va retirer ce projet de loi, ce qui serait faire preuve de gros bon sens.

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Madame la Présidente, vous comprenez avec quelle joie je participe au débat, d'abord, parce que c'est le retour et que je me suis un peu ennuyé de vous, en pensant que la réciproque était quelque part un peu vraie. Je veux également souhaiter une bonne session à tous les pages qui se joignent à nous pour la présente année.

C'est toutefois aussi avec un fond de tristesse qu'on doit débattre aujourd'hui. Qui aurait pu imaginer en cette Chambre que ce gouvernement, dont on peut déjà «odorer» la fin du régime, aurait eu le culot de présenter un projet de loi dont personne ne veut?

Ce projet de loi a fait l'objet d'un rejet unanime au Québec. Par votre intermédiaire, madame la Présidente, je mets au défi, pas le ministre de l'Agriculture, parce qu'à cette heure-ci, il n'est peut-être pas réveillé, mais n'importe quel autre ministre de nous dire qui, au Québec, appuie un projet de loi comme celui-là.

Est-ce que vous pensez qu'il a des appuis dans le milieu syndical?

Des voix: Non.

M. Réal Ménard: Est-ce que vous pensez qu'il a des appuis dans le milieu des droits de la personne?

Des voix: Non.

M. Réal Ménard: Est-ce que vous pensez qu'il a des appuis dans la communauté juridique?

Des voix: Non.

M. Réal Ménard: Est-ce que vous pensez qu'il a des appuis au gouvernement du Québec?

Des voix: Non.

M. Réal Ménard: Et ce gouvernement est un des meilleurs à avoir jamais garni l'Assemblée nationale, comme chacun le sait.

Tous ceux qui ont pu prendre connaissance de ce projet de loi l'ont réfuté, rejeté et, je dirais même, méprisé. Pourtant, avec un entêtement à la limite du normal, on nous présente aujourd'hui un projet de loi comme celui-là.

Je crois qu'il serait de mise à ce moment-ci d'offrir une manifestation d'enthousiasme pour dire combien nous avons apprécié l'excellent et absolument éloquent discours de mon collègue le député de Frontenac—Mégantic.

Des voix: Bravo!

M. Réal Ménard: Madame la Présidente, il nous a rappelé que nous avions, au Québec, une loi, depuis 1994, mais également le Code civil, que vous avez certainement parcouru un peu dans vos temps de loisir. Mon collègue, le député de Berthier—Montcalm, lui-même avocat, formé ici, pas très loin de la Colline, nous l'a également rappelé. Il garde d'ailleurs, m'a-t-il confié sous le sceau de la confidence, le meilleur souvenir de ses études en droit.

Si vous vous donniez la peine de parcourir le Code civil, vous verriez ce que stipule l'article 2, comme le dit le député de Frontenac—Mégantic, mais également les articles 35 à 41—je m'excuse, mais l'article 41 parle du respect du corps après le décès, ce qui donne des idées à ceux qui veulent vraiment rendre justice à ce projet de loi. On s'arrête à l'article 40.

L'article 35 est, à mon point de vue, le plus important du Code civil quand on veut parler du respect de la vie privée. Je me permets de le partager avec vous, parce que c'est la quintessence de ce que le législateur a voulu donner comme orientation en matière de respect de la vie privée. Je vais le dédier aux ministériels.

    Peuvent être notamment considérées comme des atteintes à la vie privée d'une personne les actes suivants: premièrement, pénétrer chez elle ou prendre quoi que ce soit; deuxièmement, intercepter ou utiliser volontairement une communication privée; troisièmement, capter ou utiliser son image ou sa voix lorsqu'on se trouve dans un lieu privé; quatrièmement, surveiller sa vie privée par quelque moyen que ce soit; cinquièmement, utiliser son nom, son image, sa ressemblance ou sa voix à toute autre fin que l'information légitime du public; et sixièmement, utiliser sa correspondance, ses manuscrits ou tout autre document personnel.

Le Code civil, ce n'est pas rien. Ce n'est pas le livre rouge des libéraux. Ce sont les assises, le fondement, le socle de notre système juridique. Nous sommes, et je l'ai moi-même appris dans mes cours de droit, une province, un pays—espérons-le bientôt—dans une tradition de droit civil.

 

. 1755 + -

Quelle est la différence entre le droit civil et la Common Law? En Common Law, d'une certaine manière—on peut en débattre mais disons-le maintenant—les juges créent le droit. Dans notre système à nous, les législateurs et les parlementaires donnent des orientations dans un système de droit codifié ou à l'aide d'une législation précise.

Or, cette législation précise en matière de respect de la vie privée, nous l'avons. Nous avons été avant-gardistes, comme plusieurs de mes collègues l'ont dit avant moi, et nous ne comprenons pas l'entêtement du gouvernement à vouloir légiférer en pareille matière. On pourrait être tentés de penser que je suis un homme partisan, même si j'estime offrir toutes les garanties, par le passé comme en ce jour, que je ne le suis pas.

Je crois avoir toujours démontré à la Chambre une parfaite impartialité toute empreinte d'objectivité. Et pour montrer que le point de vue soutenu par les députés du Bloc québécois n'est pas un point de vue partisan qui s'arrête à la limite de notre programme, je pourrais très bien partager avec mes collègues la position d'une instance qui s'est toujours tenue à mille lieues de la partisanerie politique.

Je parle, bien sûr, du Barreau du Québec. Est-ce qu'on peut trouver une institution plus respectable et plus neutre dans notre société, jusqu'au jour où l'ex-bâtonnier du Québec a joint les rangs du Parti libéral. Mais nous pensons que tout cela est un cas d'espèce plutôt qu'une règle générale.

Le Barreau du Québec a appelé de tous ses voeux pour des changements, avec l'expertise juridique qu'on lui connaît. S'il y a un organisme qui peut livrer de l'expertise en pareille matière, c'est bien le Barreau du Québec. Par la voix de son bâtonnier, le 4 février 1999—on voit donc que c'est relativement récent—, Me Jacques Fournier, pour ne pas le nommer, a non seulement condamné l'étroitesse de ce projet de loi et remis en cause son caractère non fondé, mais il a appelé de tous ses voeux l'extension de la loi québécoise dans des domaines de juridiction fédérale.

J'aimerais lire ce qui se retrouve à la page deux du document:

    Pour éviter toute confusion et s'assurer que les Québécois puissent continuer à bénéficier d'un régime complet en matière de protection des renseignements personnels, nous soumettons que le projet de loi C-54 devrait être amendé afin de prévoir explicitement que la loi fédérale ne s'appliquera pas aux entreprises assujetties à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé qui est une loi québécoise. Le projet de loi devrait, selon nous, incorporer par référence la loi québécoise dans des champs de compétence fédérale, afin d'éviter la confusion, les chevauchements et les dédoublements de législation au Québec.

Je ne sais pas si je dois déposer le document pour qu'il puisse être disponible pour l'ensemble des parlementaires. Je suis prêt à le faire. Mais un fait demeure: des gens autorisés de la communauté juridique, les principaux porte-parole des avocats et le bâtonnier ont appelé de tous leurs voeux l'extension de la loi québécoise. C'est un paradoxe de ce gouvernement.

Quand on a pris connaissance du discours du Trône, nous avons pensé que le gouvernement bougerait dans un certain nombre de secteurs. Je pourrais donner l'exemple du transport aérien. On s'attendait à ce que ce gouvernement bouge.

On se rappellera qu'il y a eu un remaniement ministériel. Le premier ministre s'est dit qu'il y avait pas mal de valets dans ce gouvernement et que cela lui prenait quelques dames. Il a alors appelé au Cabinet un certain nombre de ministres féminins et on s'attendait à ce que le gouvernement bouge. Vous-même, madame la Présidente, dans votre for intérieur, c'est un peu ce que vous souhaitiez.

On s'est dit que dans le domaine du transport aérien, le gouvernement allait bouger. Que dans le domaine du crime organisé, il allait bouger, par exemple, sur la question du blanchiment d'argent. Combien d'autres secteurs auraient dû retenir l'attention du gouvernement!

 

. 1800 + -

En lieu et place d'intervenir dans des domaines pour lesquels il est mandaté de le faire, le gouvernement intervient dans un domaine de pure tradition civiliste et, par conséquent, on le comprendra, compromet l'intégrité des pouvoirs de l'Assemblée nationale.

Alors, nous n'avons d'autre choix que de combattre ce projet de loi. Tous mes collègues vont le faire avec la même détermination que notre porte-parole en matière d'industrie, et je peux vous dire que pour nous, le combat n'aura de cesse tant et aussi longtemps que le projet de loi n'aura pas été rappelé.

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Madame la Présidente, je suis très heureux à mon tour de prendre la parole, au nom du Bloc québécois, sur le projet de loi C-6, anciennement appelé projet de loi C-54.

Certains, dans la société québécoise et dans certains milieux, doutent du rôle du Bloc québécois ici, à la Chambre. Comme représentante d'un comté québécois, vous avez, madame la Présidente, une démonstration magistrale aujourd'hui du rôle du Bloc québécois en cette Chambre, qui, en plus de la promotion de la souveraineté, est ici pour prendre la défense des intérêts du Québec.

Où sont les autres députés en provenance du Québec? Où sont-ils? Imaginons si on était encore du temps de Pierre Elliott Trudeau, dont on rend encore hommage aujourd'hui. S'il y avait, à la Chambre, 74 moutons sur 75, comme le Québec avait à l'époque, que feraient ces députés aujourd'hui devant le projet de loi C-6 concernant les renseignements personnels?

Il s'agit là de façon manifeste d'une intervention indue, incontrôlée, où le ministre nous montre un caractère nombrilisque qu'on ne lui connaissait pas. On se rappelle qu'il a présenté ce projet de loi le 1er octobre 1998, c'est-à-dire quelques jours seulement avant l'ouverture de la réunion de l'OCDE à Ottawa sur le commerce électronique. Cette réunion était présidée par le ministre de l'Industrie, qui est le même aujourd'hui qu'à l'époque.

Il voulait sans doute se faire valoir, en faisant semblant de se préoccuper des vraies choses dans son domaine auprès de ses homologues internationaux, pour mieux paraître, pour une question d'image, mais qui va à l'encontre de l'intérêt public.

Il y a eu un consensus au Québec en la matière comme quoi le fédéral n'a pas à intervenir dans le champ des renseignements personnels, le dossier étant très bien couvert par la loi existant au Québec actuellement. Ce n'est pas nous qui le disons, comme mes collègues l'ont illustré déjà, c'est, notamment, le Barreau et le Conseil du patronat, dont on va s'inspirer maintenant, qui vient rappeler à l'ordre le gouvernement du Canada pour lui demander où il s'en va avec son projet.

Le Barreau, de par la plume de son bâtonnier, Me Jacques Fournier, écrivait, le 14 février—mon collègue de Hochelaga—Maisonneuve en faisait état plus tôt—ce qui suit:

    Dans un premier temps, nous sommes frappés par le peu de corrélation entre le titre du projet de loi et son contenu.

C'est le bâtonnier qui parle. C'est gênant pour le gouvernement, normalement.

    En effet, il s'agit beaucoup plus de la protection des renseignements personnels dans le secteur privé que de la promotion du commerce électronique.

Alors que la réunion avait lieu sur le commerce électronique. Mais le gouvernement voulait bien paraître. C'est comme quand on change les termes, comme mon collègue de Frontenac—Mégantic le disait tantôt, pour remplacer le terme «assurance-chômage» par «assurance-emploi». On joue avec les mots pour mieux se moquer de la population.

Le bâtonnier continue, dénonçant le projet fédéral, et je le cite:

    Le régime québécois s'applique au Québec depuis bientôt cinq ans. Ce régime est connu et les entreprises s'y sont adaptées. En conséquence, le Barreau du Québec souscrit à l'essentiel de la recommandation formulée par la Commission d'accès à l'information qui dit ceci: «Pour éviter toute confusion et s'assurer que les Québécois puissent continuer à bénéficier d'un régime complet en matière de protection des renseignements personnels, nous soumettons que le projet C-54 devrait être amendé afin de prévoir explicitement que la loi fédérale ne s'appliquera pas aux entreprises assujetties à la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé».

 

. 1805 + -

Je continue à citer le bâtonnier:

    Nous allons même plus loin. Le projet de loi devrait, selon nous, s'incorporer par référence à la loi québécoise, même dans des champs de compétence fédérale, afin d'éviter la confusion, les chevauchements et les dédoublements de législation au Québec.

Nous dénonçons ces dédoublements depuis 40 ans entre la juridiction fédérale et la juridiction provinciale, ce qui fait en sorte que c'est le fouillis et le cafouillis institutionnels. C'est ce qui nous amène a inciter les Québécois, à les convaincre de plus en plus d'ailleurs, que la meilleure solution à tous ces problèmes, c'est la souveraineté du Québec, c'est-à-dire d'en sortir pour mieux agir entre partenaires égaux.

Le bâtonnier continue:

    Nous croyons que le régime québécois de protection des renseignements personnels dans le secteur privé est préférable à celui qui est proposé dans le projet de loi C-54 devenu le projet de loi C-6, notamment au chapitre de recours et de l'efficacité du régime.

Donc, sur le fond, on voit que ce projet de loi ne résiste pas à l'analyse serrée qu'en a fait le bâtonnier et aussi la Commission d'accès à l'information qui est dûment mandatée, vu qu'on parle de renseignements personnels.

Mais c'est le témoignage du Conseil du patronat qui m'a particulièrement touché dans la lecture que j'en ai faite. Le Conseil du patronat est celui qui défend les intérêts des entreprises légitimement. Le Conseil du patronat a le plus de contacts auprès du Conseil pour l'unité canadienne qu'avec la permanence du Parti québécois, par exemple.

Il écrit quand même un chapitre qui vaut bien des discours souverainistes. Je vais le lire, vu que je dispose encore d'un peu de temps. C'est de toute beauté, parce que cela illustre, encore une fois, le fouillis canadien devenu de plus en plus institutionnalisé.

C'est le chapitre traitant de la communication de renseignements que dénonce le Conseil du patronat dans son mémoire présenté au Comité permanent de l'industrie.

Je cite un extrait de la page 5 du mémoire:

    À cause du double régime juridique, les entreprises de compétence provinciale se demanderont si les renseignements personnels recueillis chez elles, donc protégées par la loi du Québec, qui sont transmis à une entreprise de compétence fédérale ayant une place d'affaire au Québec assujettie à la loi canadienne, devront être traités en vertu des règles québécoises ou canadiennes. Bien plus, à l'intérieur d'un même dossier, certains renseignements pourraient être assujettis aux deux lois.

Cela s'administre bien, quand on est dans le domaine privé, que les journées sont vides, qu'il y a un syndicat, qu'il y a des commandes, que c'est le «just in time»—on sait à quel point c'est compliqué—et là, on vient se faire enfarger par des lois semblables qui illustrent bien les deux solitudes.

On voit qu'il n'y a personne de ce côté-là de la Chambre qui s'y intéresse, pas plus que de l'autre côté, sauf les députés du Québec qui s'intéressent à ce projet de loi. Cela illustre le drame canadien, cela illustre les deux solitudes, cela illustre qu'il y a quelque chose qui ne va pas.

Et là, on s'adresse en même temps aux Canadiens, un peu «à la Reed Scowen». Il serait peut-être temps qu'il y ait une réflexion dans ce pays-là pour savoir où on s'en va ensemble. On serait peut-être mieux de marcher parallèlement avec des ponts solides que d'essayer de se combattre sur des territoires où déjà la gestion est bien faite par une province, notamment celle du Québec qui, elle, a toute une culture pour assumer ce genre de problématique.

Je poursuis, concernant la communication des renseignements, en citant le mémoire du Conseil du patronat:

    Que dire des cas où des organisations ont des activités connexes à une compétence fédérale, comme les entreprises de crédit et les aéroports? On pourrait même concevoir que pour un même dossier, des prescriptions différentes s'appliquent, selon que les renseignements recueillis, utilisés ou détenus, sont soumis à la loi du Québec ou à la loi fédérale.

C'est le fouillis tout le temps.

    Par ailleurs, une entreprise québécoise qui a un bureau ou une succursale dans une autre province—une compagnie d'assurance par exemple—et qui doit nécessairement y acheminer des renseignements recueillis au Québec, se référera-t-elle à la loi québécoise ou canadienne pour assurer la protection? De la même façon, si ces renseignements sont stockés dans une banque de données informatisées, mais accessibles à une autre entreprise située à l'extérieur du Québec, quel régime devra-t-on appliquer?

J'arrive à la conclusion à ce chapitre:

    Ce sont autant de questions auxquelles nous ne trouvons pour l'instant aucune réponse, et qui, si le projet de loi est adopté tel quel, poseront de gigantesques problèmes aux entreprises.

Donc, c'est là le langage, la position des gens d'affaire, ceux qui administrent la valeur ajoutée dans notre société.

 

. 1810 + -

On devrait se poser des questions quand ces gens interpellent le gouvernement d'une façon aussi courageuse. Normalement, ce sont des alliés. Il ne faut pas se le cacher, ce sont des alliés naturels. Ils viennent dire au gouvernement: «Cesse, mets de côté ton projet de loi.» C'est d'ailleurs la position du Bloc québécois. C'est un projet de loi indéfendable.

Le ministre, au lieu de s'occuper de ce genre de projet de loi, devrait s'occuper un peu plus du dossier de GM. Il devrait cesser de se comporter comme le ministre de l'Ontario face aux ministres du Québec et cesser d'avoir un ton méprisant envers le vice-premier ministre et ministre de l'Industrie et du Commerce du Québec.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Madame la Présidente, il est rare que je n'ai pas de plaisir à prononcer un discours sur un projet de loi. C'est le cas aujourd'hui.

Ce projet de loi, l'ancien projet de loi C-54, qui a été dénoncé par la plupart de mes collègues, demeure un projet de loi pour lequel on devrait faire ce que le Bloc québécois propose, c'est-à-dire le prendre et le mettre de côté. Il faut renvoyer le ministre de l'Industrie à ses devoirs pour faire en sorte de satisfaire tout le monde. Jusqu'à présent, il y a un insatisfait total, c'est le Québec.

Cela fait l'unanimité au Québec. Pour ce qui est de ce projet de loi concernant le commerce électronique et les renseignements personnels, tous et toutes sont contre. Pourquoi sont-ils contre?

Premièrement, ils le sont par principe. Le gouvernement fédéral a une propension quasi légendaire de s'immiscer dans des champs de compétence qui ne sont pas les siens. Toutes les fois que le Québec a pris une longueur d'avance dans ses propres champs de juridiction, le gouvernement fédéral, par ses projets de loi mur à mur, le pénalise.

Au cours des années, on a eu des exemples assez remarquables. Par exemple, en 1994, lorsque nous venions de nous faire élire, le ministre des Finances a commencé à parler de l'opportunité de mettre en place une Commission canadienne des valeurs mobilières. Les valeurs mobilières sont un champ de compétence exclusivement québécois, pour lequel le Québec a travaillé de façon très sérieuse depuis les 30 dernières années pour établir un système tout à fait rodé, avec des niveaux de compétence extrêmement intéressants et supérieurs même à ce qu'on retrouve dans la plupart des provinces canadiennes.

Parce le Québec a pris une longueur d'avance dans le domaine des valeurs mobilières, dans son propre champ de compétence reconnu par la Constitution canadienne, le gouvernement fédéral avait décidé, parce que dans les autres provinces on est moins bien organisé qu'au Québec, d'avoir une Commission canadienne des valeurs mobilières. Il voulait une commission mur à mur, avec des dédoublements, des chevauchements et de la confusion totale dans ce secteur très sensible à l'incertitude. Le ministre des Finances faisait fi des problèmes que cela aurait pu causer au Québec.

Il y a d'autres exemples, comme celui concernant les entreprises d'assurances à charte provinciale. Au Québec, on avait un inspecteur général des institutions financières et une Commission des valeurs mobilières pour contrôler l'ensemble des transactions et minimiser le risque pour les actionnaires ou les personnes assurées. Malgré tout cela, le ministre des Finances a décidé, il y a quelques années, d'empêcher une compagnie d'assurances à charte provinciale, une compagnie de Québec, soit L'Entraide assurances, d'acquérir un bloc d'assurances d'une compagnie à charte fédérale. Tout cela parce que, disait-il, on allait créer un précédent et que, dans les autres provinces, on voudrait se baser sur ce précédent pour faire la même chose bien qu'elles n'étaient pas organisées pour le faire.

Encore une fois, avec les niveaux de protection que le Québec s'est donné dans le secteur financier en général, en particulier dans le secteur des assurances, on était pénalisés parce que les autres provinces canadiennes n'ont pas pu faire preuve de leadership comme le Québec le fait dans ce domaine.

Si on remonte un peu plus loin, on se rappelle que le projet de loi S-31, au début des années 1980, empêchait la Caisse de dépôt et placement de prendre un bloc d'actions considérable dans le Canadian Pacific. Encore une fois, parce que le Québec s'était doté, à partir des années 1960, d'une institution comme la Caisse de dépôt et placement, avec une force financière qui était déjà très grande au début des années 1980, parce que le Québec a pu prendre de l'avance et était moderne dans ses choix de gestion des fonds de pension des Québécois et des Québécoises, on l'a pénalisé. On a voulu stopper l'avance du Québec et brimer sa modernité.

Les bourses du millénaire, c'est exactement le même phénomène. À toutes les fois que le Québec est en avance, qu'il a pris un leadership—on l'a vu dans le cas des bourses du millénaire, parce que dans les autres provinces on n'a pas pu s'organiser comme le Québec—, on établit encore une fois une politique mur à mur. Avec les bourses du millénaire, on a fait fi du consensus contre ce projet au Québec.

 

. 1815 + -

Dans le cas présent, c'est la même chose. Il existe au Québec une loi de protection des renseignements personnels depuis cinq ans. Cette loi fonctionne, et tout le monde la connaît maintenant, autant les consommateurs qui peuvent se prévaloir de ses dispositions que les entreprises.

Cette loi prévoit non seulement la protection des renseignements personnels qui demeurent sur le territoire québécois, mais elle protège aussi les renseignements personnels qui partent d'une entreprise québécoise, par exemple, dirigés vers d'autres provinces canadiennes ou des renseignements personnels qui viennent d'autres provinces canadiennes et qui entrent sur le territoire québécois.

C'est tellement une bonne loi qu'elle fait l'unanimité au Québec. Elle n'est pas parfaite, toute loi est imparfaite en quelque sorte. Elle doit se moduler au gré de l'évolution de la situation. Mais elle fait l'unanimité. C'est une bonne loi qui satisfait tout le monde et qui prévoit des dispositions pour rendre hermétiques les fuites de renseignements personnels.

C'est tellement vrai que, comme d'autres l'ont dit avant moi, même le Conseil du patronat trouve que c'est une bonne loi avec laquelle les entreprises peuvent travailler et avec laquelle elles sont familières maintenant, parce que cela fait cinq ans qu'elle est appliquée. Si le projet de loi C-6 entrait en en vigueur, cela créerait une confusion totale au niveau des entreprises québécoises.

D'ailleurs, le Conseil du patronat cite la compétence exclusive du gouvernement du Québec en matière de protection de renseignements personnels à partir de l'article 92.13 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Le Conseil du patronat reconnaît que c'est de la compétence du Québec de légiférer dans ce secteur.

On dit aussi que non seulement on va mélanger les entreprises, mais on va mélanger aussi les consommateurs qui ne sauront pas à quel saint se vouer, à quelle loi se reporter pour la défense de leurs droits et la protection de renseignements les concernant.

Je cite le mémoire du Conseil du patronat où on dit: «Quant aux consommateurs québécois, ils auraient toujours à identifier la loi qui s'applique et à choisir entre deux types de recours selon que les renseignements sont protégés par l'une ou l'autre des lois.»

Ce projet de loi amènerait la confusion totale. C'est un projet de loi qui est critiqué depuis le dépôt du projet de loi initial C-54. Il est critiqué par tout ce qui bouge au Québec et tous ceux qui s'intéressent à la protection des renseignements personnels et aussi au Code civil.

Comme d'autres l'ont dit avant moi, même le Barreau du Québec dit que la meilleure façon de gérer cette situation—et prenez en considération qu'il y a neuf provinces canadiennes qui ne disposent pas d'une telle loi de protection des renseignements personnels—la seule façon de s'en sortir, de respecter les choix du Québec et de faire en sorte aussi qu'on ne brime pas les consommateurs et les entreprises après cinq années d'application de la loi québécoise, ce serait d'enchâsser une référence à la loi québécoise sur la protection des renseignements personnels dans ce projet de loi. Cela ferait en sorte que la loi québécoise remplacerait la loi fédérale sur le territoire québécois, mais aussi lorsqu'il y aurait échange de renseignements personnels d'une entreprise québécoise vers une entreprise d'une autre province canadienne et vice versa.

C'est le Barreau du Québec qui propose une telle avenue. Ce serait peut-être à considérer. Comme d'autres l'ont dit avant moi, ce n'est pas qu'on déteste ce projet de loi. S'il est appliqué dans neuf provinces canadiennes, on aimerait qu'il reste applicable dans les neuf provinces canadiennes, mais qu'au Québec, on respecte les choix et l'avant-gardisme dont on a fait preuve en adoptant une telle loi à l'Assemblée nationale du Québec, il y a cinq ans. Cela pourrait être une certaine flexibilité du régime dont on se targue de l'autre côté de la Chambre, surtout à partir du discours du Trône lu récemment par la Gouverneure générale.

Il me semble que ce serait une bonne façon de démontrer une volonté de fonctionnement un peu amélioré de ce régime. Ce serait peut-être aussi une bonne idée de démontrer pour une fois en six ans, parce que ça fait six ans que ce gouvernement est au pouvoir, un respect pour le Québec et un respect pour les choix du Québec et pour son avant-gardisme.

Depuis qu'on est ici, on demande au gouvernement fédéral d'intervenir dans des champs qui le concernent. Par exemple, on lui a demandé d'intervenir dans le secteur du transport lors du débat concernant Air Canada, les Lignes aériennes Canadien international et Onex. On a eu récemment un autre exemple de non-collaboration du gouvernement fédéral dans le secteur des transports avec le traitement qu'a accordé le ministre de l'Industrie au ministre des Finances du Québec, justement sur la proposition de restructuration de GM de Boisbriand.

 

. 1820 + -

On lui demande d'intervenir au niveau de la sécurité des citoyens. Cela, c'est de son ressort. On lui demande d'intervenir pour lutter contre le crime organisé, de réformer la fiscalité, de permettre aux personnes ayant des revenus moyens de bénéficier, dès cette année et même dès cette année financière, de baisses d'impôt substantielles. Il n'intervient pas dans ces domaines.

Il faut toujours qu'il trouve le moyen d'intervenir dans des champs de juridiction du Québec. On crée de la chicane et l'opposition se retrouve toujours en porte-à-faux par rapport à leurs actions, alors que cela aurait été si facile de dire: «Ce projet de loi va s'appliquer à notre province et, au Québec, on va enchâsser une référence à la Loi québécoise de la protection des renseignements personnels.»

Alors, pour toutes ces raisons, nous allons voter contre ce projet de loi.

M. Richard Marceau (Charlesbourg, BQ): Madame la Présidente, on comprendra que c'est avec un peu d'humilité que je prends la parole aujourd'hui sur ce sujet d'une importance cruciale, après les nombreux discours éloquents de mes collègues. Je pense, entre autres, aux députés de Saint-Hyacinthe—Bagot, Hochelaga—Maisonneuve, Rosemont, Trois-Rivières et Frontenac—Mégantic. Tous ces orateurs qui m'ont précédé ne peuvent qu'ajouter un peu à la nervosité que j'ai lorsque je vous parle.

L'attention que vous portez à ce débat et les signes de tête qui montrent que vous acquiescez à ce qu'on dit ne font que m'encourager et augmenter la détermination avec laquelle je prends la parole ici aujourd'hui.

En ce 19 octobre 1999—à quelques jours de la naissance du premier enfant d'un couple d'amis que je tiens d'ailleurs à saluer d'ailleurs—, on peut parler d'une obsession du gouvernement fédéral. C'est l'obsession de l'uniformité.

On ne peut que retourner aux sources de ce pays qu'est le Canada et parler de la Constitution de 1867. La Constitution de 1867—jusqu'au jour qui approche très rapidement où les Québécois décideront de s'en sortir démocratiquement, et on y travaille avec acharnement et avec passion tous les jours—représente les règles du jeu parmi lesquelles on doit se débrouiller.

Cette Constitution, bien que pleine de défauts, faisait à certains endroits preuve d'une certaine sagesse. Tous les collègues qui m'ont précédé le mentionnaient. L'article 92.13 de de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique donnait la propriété et les droits civils aux provinces de façon exclusive.

Mais un autre article qui est passé à peu près inaperçu jusqu'à maintenant est l'article 94. L'article 94 permettait au gouvernement fédéral d'uniformiser le droit dans les provinces de Common Law. À l'époque, il y avait quatre provinces qui se sont confédérées, soit l'Ontario, le Québec, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick. On permettait au gouvernement fédéral d'uniformiser le droit de l'Ontario, de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick, mais pas celui du Québec, parce qu'on reconnaissait de façon explicite, non seulement à l'article 92.13 mais aussi à l'article 94, que le droit du Québec était un droit distinct, d'une tradition complètement différente, qui était celle de la tradition civiliste.

La reconnaissance du caractère différent du Québec dans sa tradition légale n'est pas reprise par ceux qui se veulent les héritiers des pères de la Confédération, c'est-à-dire le gouvernement actuel.

N'importe quel observateur étranger ou venant d'une autre planète qui descendrait ici dirait: «Mon Dieu, cela n'a pas de bon sens. Ceux qui défendent le respect de la Constitution de 1867, ce sont les souverainistes, soit ceux qui veulent faire en sorte que le Québec ne soit plus lié par ce document.»

Où sont les défenseurs du fédéralisme? Où sont les défenseurs de la Constitution. Ils sont de l'autre côté? Pourtant, on ne les entend pas. Même ceux et celles qui viennent du Québec ne se sont pas levés pour dire: «Un instant, on ne permettra pas que les compétences exclusives du Québec soient ainsi bafouées, mises de côté, oubliées, voire, comme le disait si éloquemment un de mes collègues, méprisées.»

 

. 1825 + -

C'est bien entendu la position du Bloc québécois que je viens de mentionner, mais elle est largement partagée par de nombreux intervenants, et ce, à travers tout le Québec.

Encore une fois, le Bloc québécois se veut la voix du Québec sur la scène fédérale, au grand dam de mon collègue de Chicoutimi, dont d'ailleurs je n'ai pas entendu le discours. J'ignore s'il a pris la parole sur le sujet.

Une voix: Non.

M. Richard Marceau: Mon collègue de Chicoutimi n'a pas encore parlé. J'espère qu'il se lèvera et qu'il défendra, pour une fois, les intérêts du Québec dans cette Chambre, et qu'il le fera de façon vigoureuse avec ses amis du Bloc québécois.

Je voudrais citer M. Jean-Pierre Bernier qui est à l'Association canadienne des compagnies d'assurance. La dernière fois que j'ai vérifié, cette association n'était pas officiellement un supporter du Bloc québécois. M. Bernier dit:

    Il y a une question constitutionnelle ici, c'est que la question des renseignements personnels, à mon avis, relève des gouvernements des provinces sous la rubrique «Property and civil rights». Alors, c'est très difficile pour le gouvernement fédéral d'adopter, à mon avis, une loi qui s'occuperait uniquement de la protection des renseignements personnels. Si vous êtes capables de rattacher les règles sur la protection des renseignements personnels à un champ d'activité où l'autorité du fédéral n'est pas contestée, vous avez plus de chance d'occuper le terrain, si je peux m'exprimer ainsi.

C'est assez clair, mais il n'y a pas que lui. Il y a aussi Michel Venne, un journaliste très connu et très respecté de la communauté journalistique du Québec, journaliste au Devoir, le grand quotidien fondé par Henri Bourassa en 1910, dont le motto est «Fais ce que dois». Nous faisons ce que nous devons, nous prenons position contre ce projet de loi.

Il disait: «Les ministres de la Justice des provinces et territoires ont exprimé leurs vives inquiétudes au gouvernement fédéral à propos des invasions significatives dans les juridictions des provinces et territoires contenues dans le projet de loi C-54—maintenant le projet de loi C-6. Ils ont demandé que le gouvernement fédéral retire le projet de loi et consulte les provinces et territoires. Si la résolution adoptée par les Communes en décembre 1995 et reconnaissant le Québec comme une société distincte par la langue, la culture et le Code civil avait un sens, M. Manley aurait prévu l'exemption du Québec dans le texte original du projet de loi.»

C'était une citation, je lis le texte. Si on lit les Règlements de la Chambre, on peut voir que c'est permis de donner le nom d'un ministre.

Les intervenants du Québec sont unanimement contre le projet de loi fédéral. Pourquoi le sont-ils? Parce que le Québec, avant-gardiste comme il l'est depuis de nombreuses années, voire des décennies, bien avant que nous soyons en cette Chambre, vous à m'écouter, moi à vous parler, avait établi un régime particulier de protection des renseignements personnels qui avait été adopté par le Parti libéral du Québec, avec l'appui du Parti québécois, en 1994.

Donc, déjà à l'époque, cette question dépassait largement les divisions partisanes normales dans n'importe quelle société démocratique. Mais ce projet de loi, adopté en 1994 par l'Assemblée nationale, n'était qu'un ajout à l'intérêt légal qu'avait démontré le Québec pour la protection de la vie privée.

Mon collègue d'Hochelaga—Maisonneuve en a fait la démonstration plus tôt, les articles 37 à 40 du Code civil parlent déjà de protection de la vie privée et le Code civil, qui est le socle sur lequel tout le régime juridique du Québec est bâti, n'est pas à dédaigner.

Non seulement cela, un autre document qui a une valeur quasi constitutionnelle au Québec, la Charte des droits et libertés de la personne, protège lui aussi la vie privée. Donc, la Charte, qui avait été adoptée en 1974, si je me souviens bien, de même que le Code civil du Québec tout récemment adopté—c'était le Code civil du Bas-Canada qui nous régissait de 1866 à 1992 ou 1993, si ma mémoire m'est fidèle—montraient l'importance qu'avait le législateur québécois pour la protection de la vie privée.

Or, que fait ce gouvernement? Sans considération aucune, non seulement pour l'importance qu'avait mis le Québec sur la protection de la vie privée, mais également sans considération aucune pour l'opinion unanime des Québécoises et des Québécois de toute appartenance partisane, il a décidé, avec ses gros sabots, de rentrer dans son domaine. Et il le fait même de façon très malhabile.

 

. 1830 + -

Je veux simplement dire en terminant que le Bloc québécois demande au gouvernement fédéral de retirer ce projet de loi.

J'espère que les députés québécois du Parti libéral du Canada feront la même demande. J'attends de les écouter et de les entendre à ce sujet.

*  *  *

LOI ÉLECTORALE DU CANADA

 

La Chambre reprend l'étude de la motion.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé sur le renvoi au comité, avant la deuxième lecture, du projet de loi C-2.

Convoquez les députés.

 

. 1900 + -

[Traduction]

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

Vote no 5

POUR

Députés

Adams Alcock Anderson Assad
Assadourian Augustine Axworthy (Winnipeg South Centre) Bachand (Richmond – Arthabaska)
Baker Bakopanos Barnes Beaumier
Bélair Bélanger Bellemare Bennett
Bernier (Tobique – Mactaquac) Bertrand Bevilacqua Blondin - Andrew
Bonin Bonwick Borotsik Boudria
Bradshaw Brison Brown Bryden
Bulte Byrne Caccia Calder
Cannis Caplan Carroll Casey
Catterall Chamberlain Chan Charbonneau
Chrétien (Saint - Maurice) Clouthier Coderre Collenette
Comuzzi Copps Cullen DeVillers
Dhaliwal Dion Discepola Doyle
Dromisky Drouin Dubé (Madawaska – Restigouche) Duhamel
Easter Eggleton Finlay Folco
Fontana Fry Gagliano Gallaway
Godfrey Goodale Graham Gray (Windsor West)
Grose Guarnieri Harb Harvard
Harvey Herron Hubbard Ianno
Iftody Jackson Jennings Jones
Jordan Keyes Kilger (Stormont – Dundas – Charlottenburgh) Kilgour (Edmonton Southeast)
Knutson Kraft Sloan Lastewka Lavigne
Lee Leung Limoges (Windsor – St. Clair) Lincoln
Longfield MacAulay MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) Mahoney
Malhi Maloney Manley Marleau
Martin (LaSalle – Émard) Matthews McCormick McGuire
McKay (Scarborough East) McTeague McWhinney Mifflin
Mills (Broadview – Greenwood) Mitchell Muise Murray
Myers Nault O'Brien (Labrador) O'Brien (London – Fanshawe)
O'Reilly Pagtakhan Paradis Parrish
Patry Peric Peterson Pettigrew
Phinney Pickard (Chatham – Kent Essex) Pillitteri Pratt
Price Proud Provenzano Redman
Reed Richardson Robillard Rock
Saada Scott (Fredericton) Sekora Serré
Shepherd Speller St. Denis St - Jacques
St - Julien Steckle Stewart (Brant) Stewart (Northumberland)
Szabo Telegdi Thibeault Thompson (New Brunswick Southwest)
Torsney Ur Valeri Vanclief
Vautour Volpe Wappel Whelan
Wilfert – 161


CONTRE

Députés

Abbott Alarie Anders Asselin
Bachand (Saint - Jean) Bailey Bellehumeur Benoit
Bergeron Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) Bigras Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton – Melville) Cardin Casson Chrétien (Frontenac – Mégantic)
Crête Cummins Dalphond - Guiral Davies
de Savoye Debien Desjarlais Desrochers
Dockrill Duceppe Dumas Duncan
Earle Epp Forseth Fournier
Gagnon Gauthier Girard - Bujold Godin (Acadie – Bathurst)
Godin (Châteauguay) Gouk Grewal Grey (Edmonton North)
Guay Guimond Hart Hill (Macleod)
Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom Jaffer Johnston
Kenney (Calgary Southeast) Kerpan Konrad Lill
Loubier Lowther Lunn Manning
Marceau Marchand Mark Martin (Winnipeg Centre)
Mayfield McDonough McNally Ménard
Mercier Meredith Mills (Red Deer) Morrison
Nunziata Nystrom Penson Perron
Picard (Drummond) Plamondon Proctor Ramsay
Riis Ritz Robinson Rocheleau
Sauvageau Schmidt Scott (Skeena) Solberg
Solomon Stinson Stoffer Strahl
Thompson (Wild Rose) Tremblay (Rimouski – Mitis) Venne Wasylycia - Leis
White (Langley – Abbotsford) White (North Vancouver)  – 94


«PAIRÉS»

Députés

Cauchon Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière) Karygiannis Lalonde
Laurin McLellan (Edmonton West) Normand St - Hilaire
Turp Wood


Le Président: Je déclare la motion adoptée. Par conséquent, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.  



MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA GARDE D'ENFANTS

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Madame la Présidente, qu'est-ce qu'un programme national d'action pour les enfants en l'absence du moindre engagement à mettre en place un programme national de garderies? À quoi peut bien servir un programme national d'action pour les enfants si aucun objectif n'est fixé et si aucun programme concret n'est proposé pour enrayer la pauvreté des enfants et des familles dont ils font partie? Que peut bien contenir le programme national d'action pour les enfants alors que ne se profile à l'horizon aucun financement fédéral destiné à satisfaire le besoin fondamental qu'est le logement dans la société canadienne?

Ce sont là des questions primordiales qui sont restées sans réponse, bien que le premier ministre se soit exprimé sur le présumé plan national d'action pour les enfants. Je souhaitais une réponse claire et je demanderais donc directement au premier ministre s'il se rend compte que ce plan d'action est sans objet s'il néglige de prévoir la mise en place de services de garde, sachant que le gouvernement libéral n'a toujours pas tenu sa promesse de 1993 de créer 150 000 places dans les garderies du Canada.

Que peut-on nous répondre à propos de la crédibilité et de la vraisemblance du plan national d'action pour les enfants? Le premier ministre s'est contenté de prétexter que les provinces avaient rejeté ses propositions en matière de garderies. Or il se trompe. Les provinces n'ont rien eu à rejeter puisqu'il ne leur a rien été proposé de sérieux qui puisse tenir lieu de stratégie nationale et de plan d'action privilégiant le développement des jeunes enfants.

 

. 1905 + -

Où en sommes-nous maintenant? Le Nouveau Parti démocratique, le mouvement pour la promotion des services de garde d'enfants, le mouvement ouvrier et les gouvernements provinciaux qui sont désireux de voir le gouvernement fédéral faire preuve de véritable leadership souhaitent que le gouvernement libéral aille au-delà des platitudes et présente un programme national de services de garde sérieux.

Le Québec le fait et la Colombie-Britannique le fait. Pourquoi le gouvernement libéral n'agit-il pas?

Les enfants ne peuvent pas attendre. Les néo-démocrates disent au gouvernement fédéral que, s'il souhaite véritablement mettre fin à la pauvreté et améliorer la santé et le bien-être des enfants canadiens, s'il croit vraiment que le Canada devrait être l'endroit où l'on vit le mieux pour tous les Canadiens, il doit mettre un terme à la situation terrible des pauvres du Canada, commencer à bâtir des logements pour les familles qui en ont terriblement besoin, veiller à ce que toutes les familles à faible revenu puissent bénéficier de la prestation fiscale pour enfants et remplir ses engagements en matière de places en garderie.

Il semble que les libéraux hésitent entre deux voies. Certains sont tentés par l'attrait d'une réduction d'impôt, que prône l'élite des gens d'affaires, sans aide réelle aux familles à revenu faible et moyen. D'autres au sein du caucus libéral savent que, après des années de restrictions imposées par leur propre gouvernement, la grande priorité pour les Canadiens est le réinvestissement dans les programmes et services destinés à aider les familles.

J'implore les libéraux de ne pas utiliser les provinces comme écran pour masquer leur propre inaction. Le ministre responsable des garderies en Colombie-Britannique, M. Moe Sihota, a déclaré officiellement et avec force qu'il souhaitait la mise en place d'un programme national global pour le développement des jeunes enfants et la prestation de services de garde.

Alors qu'on ne blâme pas les provinces. Qu'on nous donne une réponse franche. Le gouvernement fédéral va-t-il mettre en place, en collaboration avec les provinces, un programme national global de services de garde?

Mme Bonnie Brown (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Madame la Présidente, le discours du Trône montre clairement que les enfants constituent la principale priorité du gouvernement. Élever la prochaine génération de Canadiens est le souci de tout le monde, et c'est pourquoi nous doublons la durée de la période de congé parental visée par l'AE. C'est aussi la raison pour laquelle le développement de la petite enfance est un thème clé du programme national d'action pour les enfants.

Dans le cadre de ce programme, nous nous engageons à travailler conjointement avec nos partenaires en vue d'élaborer un accord sur le développement du jeune enfant d'ici décembre 2000. Nous voulons un accord reposant sur des principes et comprenant des objectifs et des paramètres financiers ainsi qu'un calendrier de cinq ans visant à accroître les fonds qui nous permettront d'atteindre nos objectifs communs.

Nous reconnaissons que les services de garderie et, de fait, de nombreux services destinés aux enfants sont de compétences provinciale et territoriale, mais nous avons déjà beaucoup accompli avec les provinces en vue d'améliorer le bien-être des enfants. La prestation nationale pour enfants représente l'élément central des progrès accomplis. Grâce à la prestation nationale pour enfants, 2 milliards de dollars seront versés d'ici juillet 2000 aux familles à revenus faibles et moyens qui ont des enfants, de sorte que l'aide fédérale globale consentie aux familles et aux enfants atteindra près de 7 milliards de dollars par année.

Grâce à la Prestation nationale pour enfants, les provinces et territoires réinvestissent de l'argent dans des services complémentaires destinés aux enfants, et huit provinces ont déjà affecté de l'argent aux garderies. La province de Colombie-Britannique d'où vient le député a bénéficié d'un montant supplémentaire de 80 millions de dollars à consacrer aux enfants et elle a choisi d'en affecter une partie aux garderies.

Le gouvernement du Canada a également agi de son côté dans le cadre du programme de garderies pour les premières nations et les Inuit qui a permis de créer ou d'améliorer plus de 7 000 places en garderies. De plus, nous appuyons par l'entremise du programme visions des projets de recherche destinés à améliorer la qualité des services de garderies partout au pays.

Ces initiatives représentent de solides contributions aux services de garderies au Canada, et le discours du Trône offre la possibilité de faire beaucoup plus.

LES PÊCHES

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Madame la Présidente, le 14 octobre, je suis intervenu à la Chambre pour poser une question au ministre des Pêches concernant la crise du homard sur la côte est, en rapport avec la décision du juge Donald Marshall de la Cour suprême.

J'ai exposé le bilan du ministre. J'ai signalé ce que le ministre a fait jusqu'ici: aucun moratoire, des maisons incendiées, des entreprises détruites, des luttes entre voisins et deux siècles d'harmonie entre autochtones et non-autochtones qui risquent de se terminer, sans compter la crainte et l'incertitude dans l'anarchie qui continuent de régner en ce moment même.

J'ai posé la question suivante: Peut-on s'attendre à ce que le ministre continue de n'offrir ni vision, ni plan, ni le moindre espoir d'un règlement satisfaisant?

 

. 1910 + -

Le problème n'a pas été résolu mais il aurait pu l'être. Il peut encore l'être aujourd'hui mais le leadership fait défaut.

Je me préoccupe du sort des pêcheurs de la huitième et de la dixième générations. Ils me rappellent que, si aujourd'hui la pêche se porte bien et qu'elle est lucrative et bonne, c'est parce qu'elle est bien gérée. Les pêcheurs exercent de bons droits de garde, et c'est ce que nous souhaitons voir découler de cette décision. Rien n'indique que le ministre va faire quoi que ce soit pour que cela se produise.

Aujourd'hui, dans le secteur de la pêche du homard on limite le nombre de casiers. Il y a des zones où la pêche est permise et d'autres où elle est interdite. C'est ce qu'on appelle les zones désignées. On observe une saison, c'est-à-dire qu'on ne peut pas pêcher en tout temps. Des restrictions frappent également l'accès aux zones de pêche. Nous avons un accès limité à cette pêche.

Depuis plusieurs années, nous limitons l'effort dans cette pêche. C'est l'une des raisons pour lesquelles cette pêche se porte très bien et a pu rester un moyen de subsistance ces dernières années. C'est ce que le ministre doit garantir à ces gens, que leur subsistance sera toujours assurée, que leur gagne-pain ne sera pas compromis par une mauvaise gestion de la pêche. L'accès à cette pêche ne peut être illimité. Il faut que le ministre les rassure. Cela fait partie de la solution.

Quand votre gagne-pain est menacé, vous réagissez. Il est compréhensible qu'on réagisse parfois durement quand on a l'impression que son mode de vie va être détruit. C'est ce que ressentent les pêcheurs non autochtones en ce moment.

Nous voulons que le ministre fédéral prenne les devants. Quand la question aura été réglée, il conviendra alors d'envisager des indemnités. Si nous négligeons de limiter le nombre des intervenants dans le secteur des pêches, en d'autres mots, si nous permettons à de nouveaux acteurs d'y prendre part, nous compromettons l'existence même du secteur. C'est ce qui risque de se produire. Mes collègues de ce côté-ci de la Chambre craignent que ce ne soit le cas si le ministre néglige de prendre une initiative décisive.

Je pourrais peut-être demander 30 secondes de plus. Je ne veux pas que le ministre renonce systématiquement à ses responsabilités...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je dois interrompre le député. Il sait que le Règlement est très rigoureux en ce qui concerne le débat d'ajournement.

M. Lawrence D. O'Brien (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Madame la Présidente, je remercie la Chambre de me donner la possibilité de m'exprimer sur cette question qui est importante pour le Canada atlantique et qui concerne tout le monde dans ce pays. Le ministre des Pêches et des Océans a pris une mesure décisive avec son programme à court terme ainsi qu'avec son programme à long terme, que tous les partis jugeront équitables et raisonnables.

M. James Mackenzie a été nommé représentant fédéral en chef chargé de trouver, en ce qui concerne l'accès aux ressources halieutiques, des arrangements pratiques qui tiennent compte des droits conférés par traité ainsi que des intérêts de ceux qui vivent de la pêche. Originaire de Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, M. Mackenzie connaît très bien les Maritimes et l'importance qu'y revêt la pêche et il a été le négociateur fédéral principal lors des négociations des revendications globales avec les Inuit de ma circonscription du Labrador. Je suis persuadé que M. Mackenzie saura trouver un terrain d'entente sur lequel seront bâties des stratégies à long terme durables et fructueuses.

Le ministre des Pêches et Océans a rencontré les représentants des pêcheurs commerciaux et les dirigeants autochtones des Maritimes. Il a rencontré hier, avec le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et M. Mackenzie, 50 dirigeants autochtones. À la suite de cette réunion, on s'est entendu pour se pencher immédiatement sur l'accès au poisson et on est parvenu à un accord sur certains éléments d'un processus.

Beaucoup d'autres conversations devront avoir lieu, mais nous avançons dans la bonne direction. Il n'y a pas de réponses faciles, mais je suis persuadé qu'il y a une solution à long terme et que le dialogue constructif est la façon d'y parvenir.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): La motion d'ajournement étant adopté d'office, la Chambre s'ajourne à 14 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 15.)