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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 15 novembre 2005




¹ 1530
V         Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.))
V         M. Pierre Sadik (spécialiste en durabilité, Fondation David Suzuki)
V         Le président
V         Mme Jill Rutter (directrice, Stratégie et développement durable, Ministère de l'Environnement, de l'Alimentation et des Affaires rurales du Royaume-Uni)
V         Le président
V         Mme Jill Rutter
V         Le président
V         Mme Jill Rutter
V         Le président
V         Mme Jill Rutter
V         Le président
V         Mme Jill Rutter

¹ 1535

¹ 1540

¹ 1545
V         Le président
V         Mme Jill Rutter
V         Le président
V         M. Pierre Sadik

¹ 1550

¹ 1555
V         Le président
V         Mme Jill Rutter
V         Le président
V         M. Bob Mills (Red Deer, PCC)

º 1600
V         Mme Jill Rutter

º 1605
V         Le président
V         M. Bob Mills
V         Mme Jill Rutter
V         M. Bob Mills
V         Mme Jill Rutter
V         M. Bob Mills
V         Mme Jill Rutter

º 1610
V         Le président
V         M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ)
V         Mme Jill Rutter
V         M. Bernard Bigras

º 1615
V         M. Pierre Sadik
V         Le président
V         M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.)
V         Mme Jill Rutter
V         M. David McGuinty
V         Mme Jill Rutter

º 1620
V         M. David McGuinty
V         Mme Jill Rutter
V         M. David McGuinty
V         Le président
V         M. David McGuinty

º 1625
V         M. Pierre Sadik
V         M. David McGuinty
V         M. Pierre Sadik
V         M. David McGuinty
V         M. Pierre Sadik
V         M. David McGuinty
V         M. Pierre Sadik
V         Le président
V         M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD)

º 1630
V         Mme Jill Rutter
V         M. Nathan Cullen
V         Mme Jill Rutter
V         M. Nathan Cullen
V         Mme Jill Rutter

º 1635
V         M. Nathan Cullen
V         Mme Jill Rutter
V         M. Nathan Cullen
V         M. Pierre Sadik
V         Le président

º 1640
V         M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC)
V         M. Pierre Sadik
V         M. Brian Jean
V         M. Pierre Sadik
V         M. Brian Jean
V         M. Pierre Sadik
V         M. Brian Jean
V         M. Pierre Sadik
V         M. Brian Jean
V         Le président
V         M. Bernard Bigras

º 1645
V         Mme Jill Rutter
V         M. Bernard Bigras
V         Mme Jill Rutter
V         M. Bernard Bigras
V         Le président
V         L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.)

º 1650
V         M. Pierre Sadik
V         L'hon. Bryon Wilfert
V         M. Pierre Sadik
V         L'hon. Bryon Wilfert
V         M. Pierre Sadik
V         L'hon. Bryon Wilfert
V         Le président

º 1655
V         Mme Jill Rutter
V         Le président
V         Mme Jill Rutter
V         Le président
V         M. Nathan Cullen
V         Le président
V         M. Nathan Cullen
V         Le président
V         Le président
V         M. Brian Jean
V         Le président
V         Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.)
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 059 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 15 novembre 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¹  +(1530)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.)): Bon après-midi, membres du comité, mesdames et messieurs. Si les membres du comité veulent bien prendre place, nous pourrions commencer.

    Bienvenue, monsieur Sadik. Nous apprécions grandement que vous soyez là. Il s'agit de la 59e réunion du Comité permanent de l'environnement et du développement durable. Je suis sûr que cela vous intéresse de le savoir.

    Aujourd'hui, nous présentons, sous la forme d'une vidéoconférence, quelque chose qui intéressera grandement les personnes qui écoutent ces débats télévisés.

    Nous accueillons Jill Rutter, directrice de la Stratégie et du développement durable du ministère de l'Environnement, de l'Alimentation et des Affaires rurales du Royaume-Uni. Nous accueillons également Caroline Season, conseillère principale en politiques.

    Monsieur Sadik, puisque nous sommes prêts à tenir la vidéoconférence, accepteriez-vous que nous passions directement à la vidéoconférence?

+-

    M. Pierre Sadik (spécialiste en durabilité, Fondation David Suzuki): Oui.

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Est-ce que les membres du comité sont d'accord?

    Des voix: D'accord.

    Le président: Bien. Merci.

    Membres du comité, vous savez que, à la suite de la publication du rapport de la commissaire à l'environnement, nous avons examiné toute la question relative à un cadre de développement durable qui permettrait d'orienter et d'évaluer les mesures prises en ce qui concerne le changement climatique et les enjeux relatifs au développement durable. Aujourd'hui, dans le cadre de notre vidéoconférence, nous accueillons, comme je l'ai dit, la représentante du ministère de l'Environnement du Royaume-Uni. Nous parlerons de l'expérience de ce pays. Nous l'apprécions beaucoup.

    C'est la première fois que je préside une séance sous la forme d'une vidéoconférence, alors soyez indulgents; il faudra trouver la procédure adéquate.

    Est-ce que vous nous entendez bien, mesdames Season et Rutter?

+-

    Mme Jill Rutter (directrice, Stratégie et développement durable, Ministère de l'Environnement, de l'Alimentation et des Affaires rurales du Royaume-Uni): Oui, c'est absolument parfait.

+-

    Le président: Très bien. Êtes-vous prête à présenter une déclaration initiale et à répondre par la suite à nos questions? Êtes-vous à l'aise avec cette façon de procéder?

+-

    Mme Jill Rutter: C'est absolument parfait, oui.

+-

    Le président: Très bien. Nous procédons ainsi : nous écoutons votre exposé, puis il y a une période de questions et réponses de 10 minutes à laquelle participeront les divers membres, en fonction de leur parti. Je crois que nous écouterons votre exposé et que nous nous allouerons par la suite une période de questions et réponses.

    Au nom du comité, laissez-moi simplement vous dire que nous sommes absolument enchantés que vous preniez le temps de partager l'expérience vécue par le Royaume-Uni avec nous. Nous avons très hâte de discuter de cette question très importante avec vous.

+-

    Mme Jill Rutter: Nous sommes en fait enchantés que vous nous offriez cette occasion.

    Je suis désolée, votre greffier m'a informée qu'il était normal de tenir des vidéoconférences avec le comité. J'espère que cela va fonctionner, car nous pensions que nous utilisions une technique que vous connaissiez bien; nous n'avons certainement pas beaucoup d'expérience dans ce domaine. Nous croyons qu'il s'agit d'un exemple assez important pour l'avenir.

+-

    Le président: Le greffier a peut-être de l'expérience, mais moi, non. Je voulais simplement m'assurer que vous le saviez.

+-

    Mme Jill Rutter: C'est une nouvelle expérience pour nous tous.

+-

    Le président: Est-ce que l'on entend les interprètes? Bien.

+-

    Mme Jill Rutter: Je crois que je vais simplement présenter très brièvement le document d'information sur la stratégie de développement durable lancée par notre premier ministre le 7 mars dernier, simplement pour mettre la situation en contexte à l'intention des membres du comité, monsieur le président. Puis, je parlerai un peu de ce que nous considérons comme certaines des nouvelles caractéristiques clés de cette stratégie. Enfin, comme je crois que, d'après le rapport de la vérificatrice générale, certaines des questions d'intérêt du comité concernent peut-être les structures institutionnelles et les structures d'exécution au sein du gouvernement, je vais en parler un peu. Alors, je vais simplement présenter cela très rapidement. Si je parle trop vite, comme je sais que tout est traduit, n'hésitez pas à me demander de ralentir. Il est manifestement plus difficile de s'en rendre compte ici, au MEAAR.

    Qu'est-ce qui a mené à l'examen de la stratégie de développement durable? L'examen a été lancé en 2004, mais il s'agissait de l'examen d'une stratégie qui a tout d'abord été publiée en 1999 et qui représentait la deuxième stratégie de développement durable du Royaume-Uni. La première avait été publiée par l'administration précédente en 1994.

    Diverses raisons expliquaient pourquoi nous avions besoin d'examiner la stratégie en 2004. C'était en partie parce que nous avions modifié la façon de gouverner le Royaume-Uni, en raison de la délégation des pouvoirs, de la régionalisation, etc., et en partie parce que des événements externes étaient survenus, par exemple le Sommet mondial sur le développement durable. Nous avions changé notre façon d'envisager la politique énergétique en raison du livre blanc sur l'énergie et nous avions l'impression qu'il fallait assurer l'exécution au moyen d'une nouvelle méthode et de façon plus convaincante.

    Nous avons également demandé à la Commission du développement durable, qui agit à titre de conseiller indépendant du gouvernement, de passer en revue les progrès réalisés jusqu'en 2004; son verdict, qui ressemble quelque peu à un bulletin scolaire au Royaume-Uni, était le suivant : « Prometteur, mais on doit intensifier les efforts ». Alors, c'est ce que nous avons tenté de faire.

    En avril 2004, nous avons tenu une vaste consultation publique concernant la nouvelle stratégie, que nous avons intitulée « Prenez les choses en main ». Une consultation publique représentait la première phase de la consultation. Nous avons reçu beaucoup de réponses, en ligne et par courrier, puis nous avons établi un processus comprenant des groupes de travail formés d'intervenants et de représentants de ministères gouvernementaux. Essentiellement, pour élaborer cette stratégie, nous avons créé un comité responsable des programmes présidé par notre secrétaire permanent -- je ne sais pas vraiment s'il s'agit d'un sous-ministre au Canada, mais c'est le plus important représentant de notre ministère -- et auquel participaient des hauts représentants de ministères gouvernementaux clés. Ce comité avait pour tâche d'élaborer la nouvelle stratégie qu'a lancée le premier ministre le 7 mars dernier.

    En fait, ce jour-là, nous avons lancé deux documents. Nous avons lancé la stratégie du Royaume-Uni, qui concerne les enjeux dont est responsable le gouvernement du Royaume-Uni. Mais nous nous sommes également entendus avec nos collègues des administrations décentralisées, et ce document, ce que nous appelons le nouveau cadre du Royaume-Uni, a été lancé par le premier ministre écossais. C'est sur ce document que s'appuie la stratégie du Royaume-Uni, mais également la stratégie écossaise, qui sera publiée dans quelques semaines, et une nouvelle stratégie de l'Irlande du Nord, que l'on élabore actuellement. C'est également dans ce document que nos collègues du pays de Galles -- où le Welsh Assembly Government a une obligation d'origine législative à l'égard du développement durable -- énoncent leur plan qu'ils sont tenus de produire en vertu de la loi. Cela fait partie de nos ententes de décentralisation relativement complexes.

    Je vais simplement passer brièvement en revue ce qui se trouve dans ces documents. Ils ont été conçus pour énoncer une vision, des priorités et des principes communs à long terme. Nous mettons l'accent sur l'an 2020, même si, manifestement, nous ne définissons pas de façon concrète d'objectifs à aussi long terme. Nous tenterions ainsi d'aller au-delà de la durée de vie normale d'une législature.

    Que comprend la nouvelle stratégie? Le premier élément de la nouvelle stratégie et du nouveau cadre concerne un objectif convenu axé sur le développement durable au Royaume-Uni. Ceux d'entre vous qui connaissent le rapport Brundtland remarqueront qu'il s'agit d'une sorte de variation sur l'un des thèmes de ce rapport. La nouvelle stratégie met particulièrement l'accent sur l'intégration de l'environnement, de l'économie et de la société, et nous l'avons élaborée en réaction à certains commentaires reçus de la part d'intervenants concernant le fait que la stratégie de 1999 présentait quatre points sur le développement durable. Mais les gens avaient beaucoup trop l'impression que les ministères avaient tendance à adopter ce que nous appelons en Angleterre une approche plutôt hétéroclite, un peu à la carte, puisqu'ils choisissaient les objectifs sur lesquels ils voulaient mettre l'accent plutôt que de tenter de tous les réaliser. Nous avons tenté de régler ce problème au moyen d'un nouvel objectif axé sur le développement durable au Royaume-Uni, énoncé dans les documents que nous avons.

¹  +-(1535)  

    Nous avons également établi cinq nouveaux principes directeurs relatifs au développement durable sur lesquels nous nous étions entendus avec les administrations décentralisées et la Commission du développement durable. Ce sont nos examens qui sont supposés s'appliquer à toutes les nouvelles politiques mises en oeuvre. Nous sommes censés appliquer ces cinq nouveaux principes directeurs. Il s'agit, dans le désordre, des principes suivants : vivre dans les limites environnementales; garantir une société forte, en santé et juste -- si vous voulez, cela représente deux des résultats escomptés. Et nous voulons les atteindre de la façon suivante : en mettant en place une économie durable; en faisant la promotion d'une bonne gouvernance; et en utilisant des principes scientifiques objectifs -- grandement définis comme des principes axés sur les résultats -- de façon responsable. Ce sont donc nos cinq nouveaux principes.

    Ils représentaient tout un gain pour nous, puisque, dans la stratégie de 1999, le gouvernement du Royaume-Uni avait 10 principes, la Commission du développement durable, six, les Écossais, trois, et les Gallois avaient une liste de critères pour leurs plans. Alors, il s'agit d'un nouveau cadre beaucoup plus unifié.

    Nous nous sommes également entendus sur des secteurs nécessitant des mesures communes. Nous avons mis l'accent sur quatre secteurs prioritaires, ce qui représente, encore une fois, une autre amélioration par rapport à la stratégie de 1999; nous avions l'impression qu'il s'agissait d'un important pas en avant dans la mesure où la nouvelle stratégie comprend à la fois les moyens et les fins. Voici nos quatre secteurs prioritaires : la consommation et la production durables, qui, en particulier et en premier lieu, dissocient la croissance économique et la dégradation environnementale, le changement climatique et l'énergie; la protection des ressources naturelles et l'amélioration de l'environnement, priorité qui ne faisait pas partie de nos consultations, mais dont nous avons parlé abondamment au cours de celles-ci; et enfin, la création de collectivités durables, à l'échelle nationale, mais également à l'échelle internationale en créant un monde plus juste et en élaborant un vaste programme axé sur le développement.

    L'une des approches de la stratégie de 2005 consiste à tenter d'intégrer les aspects communautaires, locaux, régionaux, nationaux et mondiaux au moyen de ces thèmes. Dans le document, nous énonçons trois thèmes clés. Le premier concerne la nécessité de faire participer les gens, mais le deuxième -- et il s'agit d'un message qui s'est révélé important au cours de nos consultations -- c'est que le gouvernement, particulièrement en ce qui concerne le milieu des affaires, ne doit pas s'attendre à ce que d'autres personnes soient heureuses de modifier leurs comportements et de mener des activités plus durables s'il ne prêche pas par l'exemple; il s'agit donc d'un thème très important dans notre nouvelle stratégie. Le troisième thème concerne l'amélioration du cadre d'exécution, ce que nous appelons nous occuper sérieusement de l'exécution. On exprimait souvent les commentaires suivants sur la stratégie de 1999 : les thèmes étaient appropriés, et les intentions étaient bonnes, mais il fallait élaborer un cadre d'exécution adéquat.

    La stratégie contient beaucoup d'engagements. Je ne veux pas les passer en revue. Je crois que les membres de la Commission du développement durable les ont comptés; ils en ont dénombré 250, alors nous surveillons les progrès réalisés à cet égard.

    Toutefois, pour mesurer les progrès que nous avons réalisés, nous avons établi un indicateur. Il existe 20 indicateurs convenus pour le cadre du Royaume-Uni et 48 autres indicateurs servant à mesurer le progrès réalisé à l'égard de la stratégie du Royaume-Uni. Chaque année, le MEAAR rendra compte des progrès que nous avons réalisés en fonction de ces indicateurs, et, dans le cadre de la stratégie, nous nous sommes engagés à intervenir au chapitre des politiques si nous nous dirigeons dans la mauvaise voie.

    Comme je l'ai mentionné, l'un des éléments clés consistait à élaborer un cadre d'exécution amélioré. L'un des éléments de ce cadre -- et je crois que vous remarquerez peut-être que nous prenons en fait exemple sur ce que nous considérons comme des pratiques exemplaires canadiennes-  -consiste à accroître le rôle des membres de la Commission du développement durable, qui relèvent du premier ministre, afin qu'ils ne soient plus simplement des conseillers et des « amis critiques du gouvernement », mais qu'ils deviennent des surveillants efficaces des progrès réalisés par le gouvernement. Mon équipe ne doit pas rendre compte du fait que le gouvernement remplit ou non ses promesses; nous demandons plutôt à la Commission du développement durable, formée de 20 commissaires indépendants nommés et des membres du personnel, de faire état des progrès réalisés devant le premier ministre et les premiers ministres.

¹  +-(1540)  

    Nous demandons à tous les ministères gouvernementaux et à tous les organismes de direction de préparer un plan d'action sur le développement durable avant la fin de cette année afin que nous sachions comment ils contribueront à l'exécution. Nous examinons la possibilité d'accroître les obligations d'origine législative axées sur le DD en fonction d'une étude de ce qui a fonctionné ou non en pratique. Nous avons un vaste programme axé sur l'intégration du développement durable dans les administrations locales et régionales, en collaboration avec le bureau de notre vice-premier ministre. De plus, nous mettons fortement l'accent sur les compétences relatives au développement durable et sur la collaboration avec ce qui s'appelait auparavant le Centre for Management and Policy Studies -- depuis avril, la National School of Government -- en ce qui concerne le vaste programme entourant l'intégration du DD au programme des décideurs et des gestionnaires de l'exploitation à tous les niveaux de la fonction publique. Il s'agit donc du genre de cadre que nous avons établi.

    Un dernier mot concernant la gouvernance : notre diagramme de la structure organisationnelle est très complexe. En haut de cette structure organisationnelle qui surveille les progrès réalisés se trouve un comité du Cabinet, présidé par le premier ministre, qui surveillera les politiques énergétiques et environnementales du gouvernement, surveillera les répercussions des politiques gouvernementales sur le développement durable et tiendra compte du changement climatique, de la sécurité relative à l'approvisionnement, des coûts abordables de l'énergie.

    En dessous de ce comité, il y a un comité ministériel -- où chaque ministère est représenté -- formé de ministres du développement durable, puisque chaque ministère gouvernemental a son propre ministre du développement durable. Ce comité examine particulièrement la façon dont le gouvernement contribue au développement durable au moyen de la tenue de ses propres activités; il aura également la responsabilité d'examiner les plans d'action relatifs au DD.

    Il y a également des groupes de représentants qui suivent ces comités. Nous avons demandé au comité du programme sur le développement durable, formé de hauts fonctionnaires, qui surveillaient l'élaboration de cette stratégie, de surveiller l'exécution de la stratégie. Nous avons créé un comité distinct présidé par le deuxième haut fonctionnaire en importance, je crois, du ministère de la Défense -- le deuxième secrétaire permanent du ministère de la Défense -- pour surveiller l'examen de notre cadre sur les activités durables au sein du gouvernement, que nous appelons le cadre de la succession gouvernementale.

    Alors, nous disposons maintenant d'une structure d'exécution beaucoup plus détaillée qui, nous l'espérons, garantira que les engagements énoncés dans la stratégie et, ce qui est encore plus important, les principes mis de l'avant joueront un rôle beaucoup plus important dans l'élaboration des politiques au sein du gouvernement, car il est impossible, dans le cadre d'une stratégie comme celle-là, de prévoir tous les problèmes auxquels devra faire face le gouvernement. Ce n'est pas ce que nous tentons de faire. Nous croyons que cela nous permet d'avoir un cadre bien mieux organisé en ce qui concerne l'exécution future au sein de ce cadre de coordination, que tous les ministères gouvernementaux ont approuvé.

    Lorsque le premier ministre a lancé cette stratégie le 7 mars dernier, nous avons pu remarquer qu'il était accompagné non seulement de notre secrétaire d'État, mais également du secrétaire de l'Intérieur, Charles Clarke. Des ministres de notre ministère gouvernemental local du Logement, de notre ministère des Transports, de notre ministère du Développement international étaient également présents. Si nous n'avions pas changé la date à la dernière minute, il y aurait également eu les ministres des Affaires étrangères et de l'Éducation et des ministres provenant de plusieurs autres ministères. Alors, il s'agissait d'un vaste lancement intergouvernemental pour ce qui représente, je l'espère, une vaste stratégie intergouvernementale.

    Là-dessus, je vais terminer mes observations. J'espère que je n'ai pas pris trop de temps, et je serai heureuse de répondre à vos questions.

¹  +-(1545)  

+-

    Le président: Merci beaucoup.

    Mesdames Season et Rutter, nous accueillons également M. Pierre Sadik, qui est le spécialiste en durabilité de la Fondation David Suzuki. Je me demande s'il serait approprié ou non d'écouter immédiatement l'exposé de M. Sadik et si vous seriez disposées ou non à l'écouter. Êtes-vous avec nous assez longtemps pour que nous puissions prendre trois quarts d'heure ou une demi-heure pour vous poser des questions, à vous ou à M. Sadik?

    Est-ce que cela vous va?

+-

    Mme Jill Rutter: Oui, ça nous va.

+-

    Le président: D'accord.

    Membres du comité, devrions-nous procéder de cette façon? D'accord.

    Monsieur Sadik, merci d'être présent. Il s'agit vraiment d'une occasion magnifique non seulement d'entendre l'opinion de la Fondation David Suzuki à l'égard du cadre de développement durable, mais également de la comparer à celle du Royaume-Uni. C'est vraiment une occasion extraordinaire à cet égard.

    Sans plus attendre, vous aimeriez peut-être présenter votre exposé; par la suite, nous passerons à la période de questions et réponses.

+-

    M. Pierre Sadik: Merci, monsieur le président.

    Mon exposé dure environ huit minutes. Est-ce que cela respecte l'échéancier?

    Le président: C'est bien, oui.

    M. Pierre Sadik: Le Canada est mieux placé que pratiquement toutes les autres nations pour devenir un chef de file en matière de durabilité. L'avantage potentiel du Canada au chapitre de la durabilité découle de notre immense richesse naturelle, de notre vaste superficie, de notre main-d'oeuvre instruite et compétente, de notre économie prospère et de nos systèmes sociaux bien ancrés.

    Toutefois, malgré nos fortes valeurs et nos extraordinaires ressources naturelles, le Canada connaît des difficultés sur le plan environnemental. Le mois dernier, la Fondation David Suzuki a publié un rapport intitulé « La feuille d'érable au sein de l'OCDE », qui se fonde pratiquement à 100 p. 100 sur les données de l'OCDE. Malheureusement, les résultats ont révélé que, parmi les 30 pays de l'OCDE, le Canada se classe au 28e rang en ce qui concerne l'environnement. Ce classement a été établi au moyen de 29 indicateurs environnementaux; le Canada a obtenu d'assez mauvais résultats pour certains d'entre eux. Par exemple, en ce qui concerne la consommation d'énergie, le Canada se classait au 27e rang; en ce qui concerne la consommation d'eau, nous étions les avant-derniers; quant aux émissions de composés organiques volatils, nous étions derniers; pour les déchets nucléaires, nous étions également derniers; et en ce qui concerne le nombre d'espèces en danger, nous nous classions au 26e rang. Le rapport a également déterminé que le classement du Canada par rapport aux autres pays de l'OCDE n'avait pas changé au cours d'une décennie, soit de 1992 à 2002. De plus, la semaine dernière, une étude commandée par le premier ministre révélait que le Canada est plus vulnérable au changement climatique que l'un ou l'autre des principaux pays industrialisés de la planète et que le Canada n'est pas préparé à faire face aux conséquences inévitables du changement climatique, ce qui représente un danger.

    Alors, il existe un écart perturbant entre les valeurs environnementales des Canadiens et la performance environnementale de notre pays. Pour combler cet écart, nous devons élaborer et mettre en oeuvre un nouveau programme économique et environnemental pragmatique au moyen de la création d'un plan national de durabilité, le genre de choses mises en oeuvre par le Royaume-Uni un peu plus tôt au cours de cette décennie dont nous a parlé Mme Rutter.

    L'année dernière, la Fondation David Suzuki a publié un document intitulé « La durabilité en une génération », que nous vous avons apporté aujourd'hui. Il comprend beaucoup d'éléments importants relatifs à un plan national de durabilité pour le Canada. Le document « La durabilité en une génération » consiste à faire du Canada un chef de file mondial en matière de durabilité avant l'année 2030, soit dans 25 ans.

    Les hauts dirigeants du gouvernement du Canada ont bien accueilli le rapport. En fait, à la suite de la publication de « La durabilité en une génération », on a présenté un Cadre pour la compétitivité et la durabilité de l'environnement, dont une version préliminaire s'intitulait « La durabilité en une génération », ce qui n'est pas une coïncidence.

    Le Cadre pour la compétitivité et la durabilité de l'environnement cherchait à intégrer les priorités économiques et environnementales. L'idée consistait à faire de l'environnement une préoccupation de chaque ministère au moyen de l'élaboration d'un cadre axé sur les problèmes environnementaux qui tient compte des problèmes de compétitivité du Canada. À de nombreux égards, il s'agit d'un cadre juste, car si on ne prend pas de bonnes mesures au chapitre de l'environnement, cela aura des répercussions sur le pays et nuira à sa compétitivité économique.

    Malheureusement, à un moment donné, on a fait avorter le cadre, et il est devenu, au mieux, un programme non cohérent qui, selon la commissaire à l'environnement et au développement durable, affecte malheureusement le Canada.

    Certains pensent que le cadre et ses ramifications, c'est-à-dire les tables sectorielles sur la durabilité, représentent en fait un pas en arrière au chapitre de l'environnement et que les tables pourraient anéantir en pratique bon nombre des protections de l'environnement et des mesures de protection dont dispose actuellement notre gouvernement.

    C'est pourquoi nous avons établi un vrai plan national de durabilité. Le Canada doit modifier sa gouvernance environnementale en adoptant une approche systémique, à long terme et axée sur les résultats. Un plan national obligatoire de durabilité facilitera cette modification puisqu'il orientera la mise en oeuvre d'un plus grand nombre d'initiatives et assurera une approche coordonnée. Il n'est pas nécessaire de réinventer la roue en ce qui concerne certains programmes dont dispose actuellement le gouvernement du Canada, mais les programmes doivent être coordonnés et améliorés au moyen d'autres mesures.

¹  +-(1550)  

    On reconnaît grandement qu'un plan à long terme bien défini accompagné d'objectifs et d'échéanciers précis et d'une reddition de comptes représente la mesure la plus importante que les gouvernements peuvent prendre pour faire progresser la durabilité. À cet égard, la Fondation David Suzuki prépare actuellement un modèle de loi nationale sur la durabilité, qui devrait être disponible en janvier de l'an prochain.

    L'OCDE et la commissaire à l'environnement du Canada ont, de façon répétée, demandé avec insistance l'adoption d'une stratégie fédérale de développement durable. Une stratégie fédérale permettrait d'orienter les stratégies ministérielles de développement durable, qui manquent actuellement de cohérence, et de régler des problèmes relatifs au développement durable à l'échelle du gouvernement fédéral. On doit souligner qu'une telle stratégie contraste avec un plan national de durabilité, que le Canada s'est engagé à mettre en oeuvre au sommet mondial de Johannesburg en 2002. Un plan national de durabilité semblable à celui mis en oeuvre par le Royaume-Uni permettrait de régler des problèmes relatifs au développement durable à l'échelle fédérale et provinciale et à l'échelle du secteur privé, tandis qu'une stratégie fédérale de durabilité fonctionne principalement par l'entremise du gouvernement fédéral et au sein de son administration.

    En ce qui concerne la mise en oeuvre au Canada, les éléments clés d'un plan national de durabilité comprennent une vision convaincante de l'avenir, un ensemble de principes directeurs, des objectifs précis comprenant des indicateurs pour mesurer les progrès réalisés, un échéancier précis présentant chaque étape, de même qu'un processus de reddition de comptes à chaque étape. Le Cadre pour la compétitivité et la durabilité de l'environnement aurait pu -- et aurait dû -- représenter la première étape menant à l'élaboration d'un plan national de durabilité. Toutefois, il manque plusieurs éléments fondamentaux d'un plan de durabilité efficace, notamment les objectifs, les échéanciers et les indicateurs servant à mesurer le succès.

    Certains des éléments sont plutôt évidents. La vision représente simplement ce qui séduit l'imagination des Canadiens. Les principes directeurs sont les principes fondamentaux, conformes à ceux que tous les autres éléments d'un plan national de durabilité énonceraient et mettraient en oeuvre. Certains des principes éventuels, et certains des principes sans aucun doute adoptés dans le cadre de la stratégie de durabilité du Royaume-Uni, concernent par exemple l'utilisation du principe de précaution, ou le principe selon lequel nous tentons de vivre selon nos moyens et dans nos limites environnementales; l'application du principe pollueur-payeur; et l'application du principe de l'équité transgénérationnelle.

    Les objectifs et les indicateurs représentent d'autres éléments importants de tout plan. Cela comprend des objectifs précis et mesurables -- il s'agit probablement du plus important élément d'un plan national de durabilité. Les objectifs fournissent une orientation. Ils permettent une planification stratégique. Ils offrent une certitude pour les entreprises et le secteur privé et ils font la promotion de la transparence et de la reddition de comptes. Les nations que l'on considère comme des chefs de file mondiaux en ce qui concerne des stratégies ou des plans nationaux de durabilité ont établi des objectifs à long terme ambitieux. Par exemple, la Suède a établi 16 objectifs généraux concernant la qualité de l'environnement et 71 objectifs intermédiaires. Le Royaume-Uni, comme l'a mentionné Mme Rutter, possède 20 catégories générales d'objectifs.

    D'autres nations à l'avant-garde de ce type de plan, notamment le Royaume-Uni, la Suède, le Costa Rica, le Danemark, l'Allemagne et les Pays-Bas, nous ont appris, après des années d'expérience, dans certains cas, que, en raison de la mise en oeuvre de ce genre de choses, on observe les effets positifs en ce qui concerne la protection de l'environnement, la compétitivité économique et la santé des citoyens de ces nations.

    La Suède, par exemple, a un plan national de durabilité en place depuis longtemps. Elle dépassera probablement son objectif en matière de changement climatique découlant du protocole de Kyoto. Elle émet 4 p. 100 moins de gaz à effet de serre qu'en 1990. La Suède a réduit son utilisation de pesticides de 80 p. 100 depuis 1980. Elle a réduit sa consommation d'eau de 34 p. 100 au cours de deux décennies et ses émissions de dioxyde de soufre de 80 p. 100 depuis 1980.

¹  +-(1555)  

    Il existe d'innombrables autres exemples de la façon dont les plans nationaux de durabilité qui coordonnent les politiques et les programmes environnementaux et politiques de gouvernement ont apporté des avantages positifs pour les pays de partout dans le monde.

    Pour terminer, il est évident que, d'après l'expérience d'autres pays et d'après ce que nous pouvons observer, compte tenu des problèmes que le Canada a rencontrés au cours des progrès environnementaux qu'il a tenté de réaliser, il est essentiel, si nous voulons connaître du succès, de mettre en place un plan de durabilité directeur obligatoire à l'échelle nationale.

    Merci.

+-

    Le président: Merci, monsieur Sadik.

    Madame Rutter, est-ce que Mme Season et vous êtes toujours avec nous?

+-

    Mme Jill Rutter: Nous sommes toujours là. Nous vous avions mis en sourdine, mais nous sommes toujours là.

+-

    Le président: Bien.

    Passons maintenant à la période de questions et réponses. Nous allons commencer par M. Jean, puis nous allons passer à M. Bigras, à M. McGuinty et à M. Cullen.

    Oh, M. Mills va commencer et probablement que M. Jean pourra poursuivre.

+-

    M. Bob Mills (Red Deer, PCC): Merci beaucoup.

    Madame Rutter, j'ai quelques questions à vous poser.

    Tout d'abord, j'ai remarqué que, dans le cadre de la stratégie de durabilité du Royaume-Uni, vous encouragez le gouvernement à travailler avec les collectivités locales à mener bien des consultations publiques et ainsi de suite. Une des choses que j'aimerais souligner, c'est que, au Canada, nous manquons d'une certaine forme de leadership dans bon nombre de domaines liés à la durabilité, que nous parlions de l'eau, de la qualité de l'air ou même des déchets.

    Je vais utiliser les déchets pour donner un exemple. Ici, nous nous renvoyons la balle: ce n'est pas un enjeu fédéral, c'est un peu un enjeu provincial, mais, en réalité, il s'agit d'un enjeu municipal. Au bout du compte, nous ne faisons pas beaucoup de choses durables et nous finisson par placer nos déchets dans un site d'enfouissement.

    Je me demande comment le Royaume-Uni, à l'échelle fédérale -- et je sais qu'il s'agit d'une structure différente -- assume ce leadership pour les municipalités. Vous avez mentionné que, en 1999, tous les gouvernements travaillaient de leur côté, que ce soit celui de l'Écosse, du Pays de Galles, ou n'importe lequel. Je me demande si vous pourriez nous donner des conseils en ce qui concerne le leadership fédéral dans des domaines liés à la durabilité, comme l'eau, l'air, les déchets et ainsi de suite.

º  +-(1600)  

+-

    Mme Jill Rutter: Notre système est très différent, notamment parce que, en ce qui concerne des enjeux comme l'eau, la qualité de l'air et les sites d'enfouissement, un grand nombre de nos lois proviennent en fait de l'Union européenne. Il y a des domaines de compétence communautaire, alors nous travaillons à l'intérieur d'un cadre que l'on a déjà négocié à l'échelle européenne.

    Nous pourrions prendre les déchets comme exemple. Je ne suis pas experte en la matière, alors tenez-en compte en m'écoutant. En ce qui concerne les ordures ménagères, une des questions que nous abordons dans cette stratégie du Royaume-Uni est celle du changement comportemental. Nous avons réalisé des progrès puisque nous avons abordé le grave problème de la pollution ponctuelle. M. Sadik a mentionné la réduction des pluies acides et des émissions de dioxyde de soufre. Nous y sommes arrivés principalement en réglant les graves problèmes de pollution ponctuels provenant des complexes industriels. Nous nous attaquons maintenant aux domaines où les problèmes découlent du comportement des particuliers.

    Si nous analysons la façon dont nous nous attaquons aux déchets, nous nous heurtons à tout un impératif sur les déchets au Royaume-Uni. Nous avons des cibles -- pour réduire la quantité de déchets expédiés vers des décharges -- qui ont été établies par l'UE. Elles font partie des lois de l'UE, et nous devons, en tant que gouvernement, atteindre ces cibles.

    Nous accomplissons diverses choses. Si vous prenez par exemple notre stratégie de développement durable, nous énonçons les diverses choses qui doivent être mises en place afin que les gens modifient leur comportement. Comparativement à bon nombre de nos collègues européens, nous affichons un faible taux de recyclage. Cela concerne le volet des ordures ménagères. Mais nous avons actuellement en place une stratégie qui se fonde sur une activité de financement à l'échelle locale et, un peu plus tard au cours de cette décennie, nous présenterons un plan dans le cadre duquel les autorités locales recevront des allocations déterminant la quantité de déchets qu'elles peuvent expédier vers des types d'enfouissement. Si elles ne réduisent pas la quantité de déchets expédiés vers des décharges, elles devront acheter des allocations échangeables. Alors, nous avons quelque chose qui ressemble à un plan d'échange des droits d'émissions, mais il s'agit dans ce cas d'un plan d'échange d'allocations relatives à un site d'enfouissement.

    Nous prenons également des mesures -- et cela faisait partie du manifeste du gouvernement au cours des dernières élections -- pour permettre aux gens de recycler davantage leurs déchets. Nous avons effectué certaines recherches sur les comportements qui laissaient croire que l'un des plus importants facteurs de motivation pour les gens en ce qui concerne les déchets était le fait que leurs voisins recyclaient ou non, et que vous n'aviez pas à changer l'attitude des personnes, vous n'aviez en fait qu'à leur offrir de meilleures installations.

    Alors, nous réalisons des progrès de ce côté et nous accroissons massivement l'accessibilité -- et les autorités locales s'en chargent, mais il s'agit de cibles précises du gouvernement -- à ce que nous appelons la récupération « à la source ». Vous n'avez pas à transporter vos déchets. Essentiellement, vous les placez dans un sac à l'extérieur, et l'autorité locale vient le ramasser. Ce sont des cibles gouvernementales.

    À l'heure actuelle, nous passons en revue la stratégie relative à la réduction des déchets. Nous collaborons avec les autorités locales et d'autres intervenants du gouvernement pour atteindre les cibles établies par l'UE. Cette stratégie relative à la réduction des déchets applique les principes de la stratégie de développement durable. Nous mènerons des consultations à cet égard au début de la nouvelle année et nous la parachèverons dans la deuxième moitié de l'année prochaine. Nous tiendrons compte de ces principes et les appliquerons à ce problème difficile que représentent les déchets.

    De plus, nous passons actuellement en revue notre stratégie sur la qualité de l'air, car nous avons raté quelques cibles de l'UE dans ce domaine. Nous accomplissons beaucoup de travail en collaboration avec le ministère des Transports, car notre plus grand problème concernant la pollution de l'air découle des émissions des moyens de transport.

    C'est donc la situation actuelle du travail conjoint interministériel. Il s'agit d'un domaine où les ministères de l'Environnement et des Transports partagent ce que nous appelons une entente de la fonction publique. C'est-à-dire que vous recevez de l'argent du Trésor si vous acceptez de faire ce que vous devrez accomplir en échange. Nous partageons une entente de la fonction publique sur la qualité de l'air, mais encore une fois, ces cibles sont par la suite imposées aux autorités locales.

º  +-(1605)  

+-

    Le président: Madame Rutter, M. Mills aimerait formuler un commentaire.

+-

    M. Bob Mills: Pour poursuivre sur cette question des déchets que vous avez soulevée, vous avez mentionné que l'UE établit ses cibles et ainsi de suite. Je trouve intéressant que vous parliez toujours de sites d'enfouissement alors que l'Allemagne, par exemple, possède 4 400 usines de gazéification où on traite les déchets. Les Pays-Bas en ont un nombre semblable, si l'on tient compte de la population. Manifestement, des villes comme Berlin le font depuis 70 ans. Je trouve intéressant que vous disiez que votre pays est lié aux règles établies par l'UE, mais vous ne semblez pas en parler.

    Nous pouvons même retourner encore plus en arrière. Notre plus grande ville, par exemple, a un problème d'enfouissement des déchets, et nous les expédions par camion vers le Michigan. Notre problème semble encore plus grave que le vôtre.

    Je m'intéresse personnellement à cette question puisque j'ai réussi à convaincre les dirigeants du pays dans lequel j'habite à se rendre en Allemagne, à observer une usine de gazéification et même à planifier la construction d'une telle usine pour traiter tous les déchets municipaux du Canada. Je me demande simplement pourquoi vous ne pouvez pas aller de l'avant, plutôt que de parler de recyclage à la source et d'autres choses comme celles-là, c'est-à-dire d'enjeux passés.

+-

    Mme Jill Rutter: Nous parlons de la réduction de la quantité de déchets expédiés vers des sites d'enfouissement. C'est notre plus grand objectif. Il s'agit d'un domaine où nous reconnaîtrions...

+-

    M. Bob Mills: Pourquoi avoir recours à un site d'enfouissement?

+-

    Mme Jill Rutter: L'énergie dérivée des déchets constituera l'un des thèmes du nouvel examen de la stratégie relative à la réduction des déchets. Nous nous sommes rendu compte que nous avions beaucoup à apprendre d'autres personnes à ce sujet et nous sommes prêts à le faire. Encore une fois, je ne possède pas d'expertise particulière dans ce domaine.

    Au Royaume-Uni, nous faisons face à un problème difficile à régler. Nous n'avons pas beaucoup d'espace, comme au Canada, et nous éprouvons particulièrement de la difficulté à faire accepter l'établissement de sites d'enfouissement et d'usines d'incinération près des quartiers résidentiels. Ce sont des enjeux que nous devons également aborder.

+-

    M. Bob Mills: Vous ne pouvez pas utiliser le terme « incinération ». J'ai fait très attention d'utiliser le terme « gazéification », ce qui diffère totalement des anciens incinérateurs qui laissent échapper une fumée noire et des dioxines et qui causent des cancers. Ne dites pas incinération, dites plutôt gazéification. La technologie est dépassée. D'importantes entreprises mondiales mettent en place de telles usines en Allemagne et en Italie.

    Je trouve étonnant qu'une partie de votre stratégie de durabilité n'engloberait pas cela. Nous invoquons le prétexte selon lequel nous avons beaucoup d'espace, c'est pourquoi nous avons des sites d'enfouissement. Vous prétextez que vous n'avez pas beaucoup d'espace et que vous avez beaucoup de difficulté à trouver de sites d'enfouissement. Laissez-moi vous dire que, au Canada, nous avons également de la difficulté à trouver des sites d'enfouissement.

    Je me demande simplement pourquoi nous ne pouvons pas aller de l'avant. Je dois admettre que je visite des installations de traitement des déchets depuis 30 ans, alors j'en connais beaucoup sur de telles installations de partout dans le monde. Mais ce n'est qu'une question.

    En dernier lieu, j'aimerais connaître la mesure dans laquelle vous avez recours à des sanctions et à des mesures incitatives pour modifier les habitudes comportementales des gens.

+-

    Mme Jill Rutter: En ce qui concerne les déchets, l'un de mes collègues vient de terminer une étude sur l'énergie dérivée des déchets, ce qui constituera un thème de la nouvelle stratégie relative à la réduction des déchets. Nous reconnaissons que cette question touche grandement au développement durable, alors nous garderons certainement l'oeil là-dessus. Je suis certaine que nous examinerons l'expérience canadienne à cet égard.

    En ce qui concerne les sanctions et les mesures incitatives, nous avons recours aux deux. Nous devons connaître les instruments qui seront adaptés au comportement que nous tentons de modifier. Manifestement, une sanction imposée à une personne correspond à une mesure incitative pour une autre. Nous avons mis en place quelques plans d'échange. Nous voyons les avantages qu'ils apportent. Nous avons lancé le plan d'échange des droits d'émissions au Royaume-Uni il y a quelques années, et le plan européen d'échange des droits d'émissions l'a remplacé. Nous avons beaucoup de règlements environnementaux et, afin qu'ils soient efficaces, nous devons les appliquer de façon adéquate et imposer des sanctions appropriées. Actuellement, nous passons en revue notre politique d'application de la loi et ses sanctions pour garantir qu'elles correspondent au but visé.

    Les mesures incitatives, leur attrait et des choses comme des plans d'échange incitent à l'innovation et à l'adoption de nouvelles méthodes de travail, tandis que les sanctions sont plus appropriées lorsque vous devez exercer un contrôle et faire cesser l'activité. On n'offre pas de grandes mesures incitatives pour améliorer l'innovation de façon continue. Dans notre stratégie de développement durable, il y a une section qui décrit notre vision du rôle de ces divers mécanismes. Il y a également le rôle auquel nous n'avons pas pensé, mais auquel nous devrions nous attacher: l'utilisation de la pression sociale -- comme des listes de «déshonneur » et des choses comme ça. La reconnaissance est importante.

º  +-(1610)  

+-

    Le président: Madame Rutter, je suis désolé de vous interrompre, mais nous avons un échéancier très serré, car nous avons à voter ce soir. Alors, si je vous presse quelque peu, c'est parce que j'aimerais que tous les membres puissent poser leurs questions, dans l'ordre. Je suis désolé de vous interrompre.

    Monsieur Bigras, vous avez maintenant 10 minutes pour poser quelques questions.

    Monsieur Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras (Rosemont—La Petite-Patrie, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Au Canada, il y a beaucoup de discussions autour de l'application du Protocole de Kyoto. Qui devrait jouer un rôle? Les provinces doivent-elles jouer un rôle plus important? Est-ce le rôle du gouvernement fédéral?

    J'aimerais que vous m'expliquiez exactement comment, à l'Union européenne, vous avez réussi à arriver à un objectif de flexibilité parmi les États membres, en appliquant un modèle triptyque de répartition des objectifs négocié au sein des pays membres de l'Union européenne. Le Canada a négocié un objectif de répartition globale, mais il n'y a pas de répartition par province. De quelle façon êtes-vous arrivés à ce modèle de répartition négocié au sein des 25 pays membres de l'Union européenne?

[Traduction]

+-

    Mme Jill Rutter: Je ne veux pas sembler inutile, mais c'est de cette façon que les États membres ont conclu l'entente sur les objectifs. C'est une question sur laquelle nous pourrions envoyer une note au comité, mais je ne possède pas les compétences nécessaires dans ce domaine pour décrire le processus que l'on a suivi.

    En Europe, nous négocions traditionnellement des choses comme celles-là. Nous négocions des entente internationales en nous fondant sur la compétence communautaire, puis les États membres s'entendent collectivement sur la façon de procéder. Mais le processus était déjà enclenché avant que je n'entre au ministère. Alors, nous pourrions vous faire parvenir des renseignements à ce sujet, mais je ne crois pas être en mesure de pouvoir répondre à la question ce soir.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: J'aimerais poser quelques questions à M. Sadik, afin qu'il ne soit pas venu à notre comité pour rien. Lorsque je regarde votre rapport, je me rends compte que, dans vos indicateurs, vous classez le Royaume-Uni au 18e rang parmi les 30 pays de l'OCDE que vous avez classés. Comme vous avez souvent donné en exemple le Royaume-Uni, j'aimerais que vous nous disiez comment vous en êtes arrivé à le classer au 18e rang.

    J'aimerais aussi que vous nous parliez de vos indicateurs environnementaux et que vous nous disiez quels sont les paramètres que vous avez choisis pour arriver à ceux-ci. Sont-ils si différents de ceux développés par la Table ronde sur l'environnement et l'économie? Sont-ils semblables? Tiennent-ils compte des études faites par celle-ci?

º  +-(1615)  

[Traduction]

+-

    M. Pierre Sadik: Merci, monsieur Bigras.

    Le Royaume-Uni s'est classé au 18e rang, probablement en grande partie parce que le classement se fonde sur les plus récentes données de l'OCDE, c'est-à-dire celles de 2002. Le Royaume-Uni a commencé à mettre en place de façon dynamique une stratégie nationale de développement durable, comme nous l'a mentionné Mme Rutter, aux alentours de l'an 2000, au début de la décennie. Alors, j'imagine qu'une certaine période s'écoulera avant que le Royaume-Uni ne ressente les effets d'une telle stratégie et qu'il puisse en tirer parti.

    Toutefois, j'aimerais souligner que le Royaume-Uni, classé au 18e rang, se trouve tout de même 10 rangs au-dessus du Canada, classé 28e. Je crois qu'on pourrait dire, avec une certaine confiance, que le fait de se classer avant le Canada et certains autres pays qui n'ont pas obtenu un très bon résultat découle de la mise en oeuvre d'un modeste plan de durabilité, qui a eu lieu au début des années 90 au Royaume-Uni.

    En ce qui concerne les indicateurs, faites-vous allusion aux 29 indicateurs environnementaux utilisés dans le rapport de l'OCDE?

    M. Bernard Bigras: Oui.

    M. Pierre Sadik: Comme je l'ai mentionné, ces indicateurs sont établis, en grande partie, par l'OCDE; ce ne sont que des données simples que l'OCDE recueille auprès de divers pays au moyen d'une méthode très crédible, qui consiste à vérifier et à recueillir des données provenant de sources critiques. Il existe des données simples concernant tout ce que vous pouvez lire dans le rapport, qu'il s'agisse des émissions, de la consommation ou du nombre d'espèces en danger dans un pays à un moment donné. C'est donc un portrait général de la situation.

    Nous avons donc une vue d'ensemble de la situation en 1992 et une vue d'ensemble des données de 2002. Dans certains cas, ces données représentent probablement le genre d'éléments que la table ronde utilise à l'égard de ses indicateurs. Actuellement, elle reçoit du financement pour trois indicateurs : l'air, l'eau et les émissions de gaz à effet de serre. En ce qui concerne le fait de recueillir des données du Canada, je ne serais pas surpris si, à un certain moment dans l'avenir, l'OCDE se fondait sur les indicateurs établis par la table ronde, et maintenant utilisés par Statistique Canada et Environnement Canada, et qu'elle les intégrait au recueil de données biannuel qu'elle prépare et sur lequel nous nous fondons pour classer les divers pays de l'OCDE.

    Au bout du compte, il faudrait des indicateurs que nous pourrions utiliser à l'échelle nationale pour évaluer le rendement du Canada sur le plan environnemental. Il faudrait probablement qu'ils soient un peu plus détaillés et adaptés à l'utilisation nationale, surtout à l'échelle régionale. Vous voulez être en mesure de régler certains problèmes liés aux bassins atmosphériques et hydrographiques. Vous voulez un certain degré de précision qui ne serait probablement pas nécessaire pour le type de classement effectué par l'OCDE, puisque les données de l'OCDE vous donnent une vue d'ensemble du pays. Comme je l'ai dit, nous aimerions examiner les écarts régionaux et être en mesure de modifier notre politique nationale en conséquence.

+-

    Le président: Merci, monsieur Bigras.

    Monsieur McGuinty.

+-

    M. David McGuinty (Ottawa-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président, et bonsoir aux témoins qui se trouvent à Londres, en Angleterre.

    J'ai une question pour Mme Rutter. Tout d'abord, avez-vous eu l'occasion d'examiner en entier le plan de Kyoto du Canada?

+-

    Mme Jill Rutter: Non, je ne l'ai pas fait.

+-

    M. David McGuinty: D'accord. Pouvez-vous nous donner une idée, du point de vue du Royaume-Uni, de nos bons coups? Dans le contexte canadien, avez-vous observé quelque chose qui vous a aidé à régler les problèmes auxquels vous faites face, problèmes que nous éprouvons également?

+-

    Mme Jill Rutter: Je m'occupe de la stratégie nationale de développement durable du Royaume-Uni, alors j'ai surtout mis l'accent sur les actions du Royaume-Uni, qu'elles soient bonnes ou mauvaises. Comme je l'ai mentionné, dans ma section du ministère de l'Environnement, de l'Alimentation et des Affaires rurales, nous avons examiné, au Canada, vos accords de vérification concernant le développement durable et le rôle de votre vérificatrice générale, de même que celui des plans ministériels de développement durable. Mes collègues responsables du changement climatique discutent évidemment avec leurs homologues canadiens de façon très, très régulière. Et c'est pourquoi nous avons intégré cette question à la nouvelle stratégie de DD du Royaume-Uni.

º  +-(1620)  

+-

    M. David McGuinty: D'accord. Merci beaucoup.

    De temps à autre, au Canada, on exprime des commentaires sur le système d'échange des droits d'émissions de l'Union européenne et on entend beaucoup de critiques concernant ce système d'échange. Par exemple, on mentionne souvent qu'il ne sert qu'à créer qu'une vaste bureaucratie, qu'il nécessite beaucoup de personnel et qu'il s'agit d'un environnement difficile à surveiller et où il est difficile d'appliquer la loi.

    D'après l'expérience vécue par le Royaume-Uni, pouvez-vous commenter l'importance que prendra l'échange des droits d'émissions en tant que mécanisme du marché pour atteindre les objectifs liés à la réduction des gaz à effet de serre?

+-

    Mme Jill Rutter: Nous espérons manifestement des réductions d'émissions dans divers secteurs, dont celui des affaires. L'important mécanisme d'exécution dans le milieu des affaires découle du plan d'échange des droits d'émissions et du plan national d'allocation.

    Nous croyons que l'échange de droits d'émissions représente une façon très positive et rentable de réduire les émissions, même si vous avez raison de dire que vous devez garantir de réduire au minimum les frais administratifs connexes, principalement parce que cela permettra d'offrir le genre de mesures incitatives menant à l'innovation dont j'ai fait part à votre collègue un peu plus tôt.

    En assumant ce rôle au sein du MEAAR, je n'ai jamais discuté avec des collègues de l'UE et je ne m'occupe pas des affaires relatives à l'UE. Ma collègue responsable du changement climatique dans l'UE participe ce soir même à une réunion de l'UE; autrement, elle se serait probablement jointe à nous et aurait été en mesure de répondre à vos questions.

    Dans le cadre de mon emploi précédent, je travaillais à British Petroleum -- BP, comme on l'appelait à cette époque -- une importante société pétrolière. J'ai travaillé à son système pilote d'échange de droits d'émissions. Nous reconnaissons certainement que le système que nous avons mis en place au sein de BP a permis d'économiser beaucoup d'énergie, beaucoup d'argent et qu'il représentait une façon très efficiente de réduire les émissions. Nous croyons que l'échange de droits d'émissions a le même potentiel.

    Le gouvernement du Royaume-Uni a hâte de voir la portée du plan d'échange des droits d'émissions amplifiée. Dans le cadre de notre stratégie de développement durable, vous constaterez que nous nous engageons à intégrer l'aviation au plan d'échange de droits d'émissions de l'UE. Nous avons également hâte de voir si nous pouvons appliquer ce plan au transport terrestre.

+-

    M. David McGuinty: Merci.

    Monsieur le président, puis-je poser une question à M. Sadik?

+-

    Le président: Oui, bien sûr.

+-

    M. David McGuinty: Merci de vous joindre à nous, monsieur Sadik.

    J'aimerais poser quelques questions concernant votre rapport.

    Je félicite particulièrement la Fondation David Suzuki d'avoir avoué d'emblée qu'il s'agit d'un amalgame d'idées émises par la fondation et par une pléthore d'organismes et d'intervenants canadiens de ce secteur.

    En parcourant le rapport, j'ai également été étonné par la mesure dans laquelle ce que vous demandez dans le rapport se trouve dans le rapport intitulé « La durabilité en une génération : une nouvelle vision pour le Canada », rédigé par David Boyd, et par la mesure dans laquelle il correspond au travail qu'a effectué notre gouvernement pendant plus d'une décennie. Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'autres options. Il y a certaines options extraordinaires dont on doit tenir compte pour approfondir la question dans chacun des neuf domaines critiques.

    J'aimerais revenir sur une question et je crois que mon collègue, M. Wilfert, aimerait poursuivre dans un moment.

    J'ai passé beaucoup de temps à travailler sur les indicateurs. J'ai mené le projet national de table ronde, qui a permis d'établir six indicateurs. Il existe toutes sortes d'indicateurs. Les indicateurs de Davos énoncent que le Canada se classe au 5e et au 49e rang. Les indicateurs de l'OCDE classent le Canada au 28e rang sur 30. L'indicateur de progrès réel de la Nouvelle-Écosse, qui n'a jamais été vérifié sur le terrain, énonce que nous ne paraissons même pas sur l'écran radar. Je sais que, en établissant une série d'indicateurs et en tenant compte de la façon dont ces indicateurs sont mesurés, on peut facilement placer un État-nation dans un certain ordre.

    M. Bigras a mentionné un peu plus tôt que la table ronde avait tenté d'établir six indicateurs compréhensibles auxquels pouvaient se fier les Canadiens afin que nous puissions élargir la notion de richesse au pays -- ce que signifie vraiment être riche. Nous espérons que ces six indicateurs seront intégrés aux processus de l'élaboration de budget à l'avenir.

    Selon votre expérience, si nous établissons six différentes séries d'indicateurs, comment pouvons-nous savoir, en tant que Canadiens, qu'une série d'indicateurs, pondérée différemment d'une autre, est réellement exacte? Pourquoi ferions-nous confiance à une série d'indicateurs plutôt qu'à une autre?

º  +-(1625)  

+-

    M. Pierre Sadik: Il existe une différence en ce qui concerne le classement du Canada dans le cadre de divers rapports d'évaluation des indicateurs, notamment dans le rapport de Davos, dont vous avez parlé, ou dans le rapport de Yale, où le Canada occupe également un rang assez élevé.

+-

    M. David McGuinty: Quelle position occupons-nous dans le rapport de Yale?

+-

    M. Pierre Sadik: Parmi les 140 pays du rapport de Yale -- la plupart des pays du plan -- nous nous classions parmi les 10 premiers.

+-

    M. David McGuinty: Nous étions en cinquième place sur 140 pays.

+-

    M. Pierre Sadik: La différence dans certains cas, à certains égards, à l'exception de la mesure des indicateurs... Dans notre rapport « La feuille d'érable au sein de l'OCDE », les indicateurs sont mesurés à partir d'un certain degré, de façon entièrement égale. Les 29 indicateurs ont exactement la même pondération. Le rapport de Yale, par exemple, et peut-être aussi le rapport découlant du Forum économique mondial de Davos, et le Conference Board du Canada tiennent compte non pas des pressions exercées sur l'environnement, mais de l'état de l'environnement au Canada. Le problème, c'est que l'état de l'environnement fausse les résultats, car le Canada est un vaste pays sur le plan géographique qui compte une petite population. Nous devons également examiner l'empreinte écologique par Canadien. C'est ce que permet de vérifier les évaluations relatives aux pressions. Elles permettent de connaître la quantité d'émissions par habitant du Canada et le nombre de Canadiens qui consomment de l'énergie et qui en utilisent. L'équité dans tout cela, c'est que la planète est une entité finie et que nous devons attribuer à chacun une certaine partie des ressources mondiales, en théorie. Cela se traduit par la méthode utilisée dans ces rapports. Nous avons des comptes à régler, pour ainsi dire, avec les auteurs du rapport découlant du Forum économique mondial et du rapport de Yale, qui ne présentent pas un portrait exact de la façon dont le Canada s'en tire réellement.

+-

    M. David McGuinty: J'ai une dernière petite question pour vous, monsieur Sadik.

    Dans l'ensemble de ce rapport, je ne connais pas le nombre exact d'options présentées ou de demandes relatives à la prise de mesures -- je ne les ai pas comptées -- mais disons qu'il y en a 70, peut-être 100. Si vous abordiez un citoyen sur 1 000 qui descendent d'un autobus dans cette ville aujourd'hui, quelles sont les trois mesures que la Fondation David Suzuki leur demanderait de mettre en oeuvre? N'est-ce pas là l'un de nos plus grands problèmes, c'est-à-dire que les Canadiens veulent faire la bonne chose? Vous avez parlé des valeurs environnementales. Que leur demanderiez-vous de faire?

+-

    M. Pierre Sadik: Nous demanderions aux gens de vivre de façon plus raisonnable. Cela représente simplement des activités très pratiques, accompagnées d'une campagne de marketing social. Au Canada, il y a une campagne de marketing social continue axée sur la consommation. Nous le savons tous. Nous demanderions aux gens de consommer plus raisonnablement. Par exemple, plutôt que de conduire un Pathfinder de Nissan, conduisez une familiale Ford Focus. Votre qualité de vie restera probablement la même, on pourrait même dire qu'elle s'améliorerait, et vous en feriez beaucoup pour notre environnement et, à long terme, pour notre économie, car celle-ci dépend d'un environnement durable à long terme. Voilà un exemple.

+-

    Le président: Nous en trouverons deux autres à mesure que nous progresserons.

    Merci, monsieur Sadik.

    Monsieur Cullen.

+-

    M. Nathan Cullen (Skeena—Bulkley Valley, NPD): Merci, monsieur le président, et merci à nos deux invités.

    Madame Rutter, juste une question potentiellement brève, même si, j'en suis sûr, la réponse est complexe. Le comité vous a invitée à témoigner parce que votre pays est un chef de file reconnu, et contribue énormément à ce que les mesures nécessaires soient prises, alors que, au Canada, nous éprouvons de la difficulté à réaliser, concrètement, les objectifs de réduction auxquels nous nous étions engagés sous Kyoto. Éprouver des difficultés, c'est un euphémisme.

    À quel point les trois facteurs que sont les échéanciers, les indicateurs et les objectifs sont-ils importants, pour ce qui est du succès que le Royaume-Uni a déjà connu?

º  +-(1630)  

+-

    Mme Jill Rutter: Voulez-vous dire à l'égard du changement climatique, ou en général? À l'égard du changement climatique en particulier?

+-

    M. Nathan Cullen: Si vous pouviez -- j'ignore l'étendue de votre expertise en matière de changement climatique -- sinon, alors parlons, de façon plus générale, des buts en matière de développement durable.

+-

    Mme Jill Rutter: Il y a une question très intéressante au sujet de la stratégie de développement durable, et je crois qu'elle est à l'origine, en partie, des réserves à l'égard de la stratégie de 1999: à quel point a-t-elle vraiment changé notre façon de faire les choses? Le gouvernement a-t-il tout simplement fait des choses qu'il aurait faites de toute façon, ou est-ce qu'il fait les choses différemment, en raison de la stratégie de développement durable?

    Je dirais que le livre blanc de 2003 sur l'énergie constitue vraiment un point tournant. Le gouvernement s'est concentré beaucoup plus sur le développement durable lorsqu'il s'est penché sur sa politiques de l'énergie. En ce qui concerne la politique de l'énergie, il y a quatre facteurs déterminants. Nous nous sommes penchés sur notre manque de combustible, sur l'abordabilité -- c'est-à-dire les aspects sociaux de l'énergie -- et sur la sécurité à long terme de l'approvisionnement, mais nous devons également tenir compte de la nécessité de tendre vers une économie faible en carbone.

    Comme vous le savez, le Royaume-Uni est en bonne voie d'atteindre ses cibles de Kyoto pour 2008-2012, mais, à l'heure actuelle -- comme vous le constaterez dans les documents plus récents du Royaume-Uni -- il accuse un retard à l'égard des cibles à court terme plus ambitieuses que le gouvernement avait prévues dans le livre blanc sur l'énergie. Nous nous fixons encore pour objectif de réduire nos émissions de carbone de 60 % d'ici 2050, et nous procédons actuellement à un vaste examen interministériel du programme en vue de cerner les mesures que nous pourrions prendre pour revenir à cette cible de 20 %. Le fait d'établir et de faire connaître ces cibles permet d'orienter l'élaboration des politiques.

+-

    M. Nathan Cullen: J'aimerais préciser un peu plus ma question. Dans notre pays, et dans notre gouvernement, nous éprouvons de la difficulté en ce qui concerne l'établissement d'échéances et de cibles précises, en ce qui concerne, pour commencer, la réduction de la création de carbone, ou une modification de l'exploitation relative des diverses sources d'énergie.

    Nous avons éprouvé beaucoup de difficulté à forcer le gouvernement à fixer une cible et une date. C'est l'objectif que nous espérons réaliser. Je suppose que le Royaume-Uni s'était fixé de telles cibles fermes, et qu'on l'a ensuite évalué en fonction de ces cibles et de l'échéancier. Si c'est le cas, et si c'était le cas, à quel point cela a-t-il contribué à votre réussite?

+-

    Mme Jill Rutter: Nous avons une cible claire pour 2010 et une cible claire pour 2050. Comme je l'ai dit, nous nous attendons à atteindre la cible de 2010. À pareille date l'an dernier -- en décembre de l'an dernier --, nous avions lancé un examen des mesures qu'il fallait intégrer au programme national sur le changement climatique pour atteindre cette cible pour 2010, car les prévisions montraient que nous n'allions pas y arriver.

    C'est une cible plus ambitieuse que notre cible liée à Kyoto. Nous sommes en passe d'atteindre la cible de Kyoto. Nous avons un but national plus ambitieux; on parle beaucoup de cela dans la presse britannique, à l'heure actuelle, et il y a de nombreuses fuites d'information et de renseignements qui sont diffusés, concernant les mesures que le gouvernement pourrait prendre en vue de corriger la situation et de remettre le cap sur cette cible pour 2010.

    L'un des problèmes tient au fait que les prévisions quant à nos résultats en 2010 fluctuent légèrement, mais il y a un engagement très clair de la part du Premier ministre, comme vous l'avez entendu récemment, à rétablir la situation en vue d'atteindre cette cible pour 2010. Cela influe énormément sur l'orientation des politiques.

    Nombre des autres indicateurs que nous utilisons dans le cadre de la stratégie de développement durable -- et, comme nous l'avons déjà dit, il y en a beaucoup -- sont liés aux ententes spécifiques dont j'ai parlé plus tôt, concernant la fonction publique. Il s'agit de buts convenus par le Trésor et les ministères dans le cadre de nos deux accords annuels relatifs aux dépenses, de sorte que nous aurons des buts qui constituent l'ensemble de l'indicateur du développement durable ou qui en font partie. Ils fixent des cibles claires, et on les utilise pour stimuler le rendement des ministères. Les contrats de rendement et la rémunération des gens sont fondés là-dessus. Nous utilisons effectivement une approche fondée sur l'établissement de cibles, et je crois que l'adoption de cibles publiques fermes permet aux gens de se concentrer beaucoup plus sur l'exécution.

º  +-(1635)  

+-

    M. Nathan Cullen: J'aimerais que ce dernier point soit clair, et ensuite, je passerai à autre chose. En ce qui concerne les lignes directrices régissant le rendement du personnel administratif, est-il vrai que la rémunération de certaines personnes clés tient essentiellement au rendement des systèmes dont elles sont responsables?

+-

    Mme Jill Rutter: Le lien n'est probablement pas aussi direct que ce que l'on verrait dans le monde des affaires, mais les gens doivent rendre compte de l'exécution, et les ministères doivent rendre compte de l'exécution de leurs ententes relatives à la fonction publique. Notre conseil de gestion tient des discussions trimestrielles sur les progrès réalisés à ce chapitre. Chaque trimestre, nous devons dire au Trésor si nous sommes sur la bonne voie ou non.

+-

    M. Nathan Cullen: Merci beaucoup, madame Rutter.

    J'aimerais seulement prendre un moment avec M. Sadik; j'ai deux petites questions. La première concerne le classement du Canada dans un récent rapport de l'OCDE. J'ai posé une question à ce sujet à la Chambre, et je crois que le ministre de l'Environnement a répondu que si la Turquie est capable de décrocher une place aussi élevée dans votre classement, votre rapport a bien peu de validité en ce qui concerne le Canada. Je me demande si vous pourriez nous expliquer, encore une fois, pourquoi vous estimez que votre rapport est pertinent.

    Deuxièmement, concernant la conversation que je viens d'avoir, comment le Canada se compare-t-il à certains de nos autres partenaires de l'OCDE au chapitre de l'établissement de cibles clés et de lignes directrices relatives au rendement?

+-

    M. Pierre Sadik: Merci, monsieur Cullen.

    La réaction du ministre, en Chambre, à notre rapport, selon lequel le Mexique occupait un rang plus élevé que le Canada -- je crois que le Mexique s'est classé 13e dans le rapport, et que le Canada occupait la 28e place -- était : « Si vous préférez boire un verre d'eau à Mexico plutôt qu'au Canada, ne vous gênez pas. »

    On peut remettre en question le fait que certains pays obtiennent un classement supérieur à celui du Canada -- la Turquie en est un autre --, et la raison, c'est qu'il y a vraiment deux types de pays au sein de l'OCDE. Il y a les pays à revenu élevé et il y a les pays à faible revenu, dont l'économie est naissante. Comme je l'ai dit à M. McGuinty, dans ce rapport, nous nous penchons sur les pressions sur l'environnement et sur la consommation par habitant. Vous constaterez que, dans les pays à faible revenu, souvent très populeux, les citoyens ne sont tout simplement pas en mesure de consommer et de produire autant d'émissions que ceux des pays à revenu élevé. Vous constaterez qu'il y a un écart. Je crois que c'est une explication très simple des écarts au chapitre des émissions.

    Pour ce qui est de la façon dont le Canada se compare à d'autres pays au chapitre de la planification nationale de la durabilité, il suffit de se pencher sur certains points saillants du classement. On constatera que nombre des pays qui font plutôt bonne figure et qui sont mieux classés que le Canada sont, de deux choses l'une, des pays à faible revenu dont l'effondrement ou l'éclosion de l'économie écarte la possibilité d'émissions par habitant élevées, ou des pays qui, au cours des cinq à dix dernières années, ont mis en oeuvre un mécanisme centralisé pour l'adoption de mesures de protection de l'environnement et de développement durable qui va bien au-delà de ce que le Canada a pu faire.

    Cela ne veut pas dire que le Canada n'a pas réalisé de grandes choses. Le gouvernement du Canada a fait de très bonnes choses au chapitre du développement durable. Nous n'avons pas besoin de réinventer la roue. Le problème, c'est que ces progrès, réalisés ici et là, ne sont absolument pas coordonnés, et ils ne se complètent pas lorqu'ils ne sont pas coordonnés.

    Deuxièmement, il faut assortir ces mesures de mesures supplémentaires. Certains des pays qui se sont relativement bien classés, comme l'Allemagne, la Suède, les Pays-Bas, la Norvège, le Royaume-Uni, et quelques autres, sont dotés de plans de développement durable nationaux depuis un certain temps déjà. C'est ça, vraiment, qui explique l'écart entre notre classement et le classement de ces autres pays.

+-

    Le président: Monsieur Cullen, je dois vous interrompre, car vos dix minutes sont écoulées.

    Monsieur Jean.

º  +-(1640)  

+-

    M. Brian Jean (Fort McMurray—Athabasca, PCC): Merci, monsieur le président. Merci à nos témoins.

    Mes questions sont pour M. Sadik. J'ai effectivement lu le rapport de la fondation, et j'ai été très impressionné. Malheureusement, j'étais très déçu du bulletin qu'a reçu notre pays.

    Vous avez dit que notre pays était bien placé à l'égard de ce genre d'initiative. Pourtant, il me vient à l'idée certains des enjeux dont je n'ai pris connaissance que tout récemment, concernant le fait que notre économie actuelle est très axée sur les ressources. Bien sûr, dans l'avenir, nous aurons la première ou la deuxième réserve de pétrole en importance dans le monde. La demande à cet égard sera énorme, surtout lorsqu'on tient compte des émissions qui découlent actuellement de notre industrie d'exploitation des ressources en Alberta. Nos déplacements sont de 25 % supérieurs à la moyenne des pays, en raison de la grande étendue de notre territoire. Nous avons davantage besoin de chauffage et nous consommons plus d'énergie, en raison de la nature de notre climat. Bien sûr, nous sommes le pays le plus vulnérable au changement climatique.

    Cela dit, de quelle façon sommes-nous bien placés? Voulez-vous dire que nous jouissons d'un avantage technologique? Je crois que notre point de départ est très différent de celui de la plupart des pays, surtout en raison de la nature relativement sauvage de la majeure partie de notre territoire. Pourriez-vous nous fournir des commentaires sur cette question? Ensuite, j'aurai d'autres questions à vous poser.

+-

    M. Pierre Sadik: Comme je l'ai dit, je crois que le Canada est bien placé parce que nous sommes très industrialisés, nous avons une économie extrêmement concurrentielle et prospère, nous sommes dotés d'une main-d'oeuvre très qualifiée, et nous jouissons de ressources abondantes. Nous avons toujours à notre disposition tous les outils dont nous avons besoin pour adopter une façon de faire durable.

    Il est intéressant de constater que, tel qu'énoncé dans notre rapport intitulé La feuille d'érable au sein de l'OCDE , même si nous avons conclu que le Canada s'est amélioré à l'égard de 17 des 29 indicateurs environnementaux, le taux d'amélioration était inférieur à la moyenne de l'OCDE. C'est surprenant, car, lorsqu'on est déjà au bas de la liste en 1992.... il est plus difficile de s'améliorer lorsqu'on est déjà efficace, mais le rendement du Canada est médiocre.

    Il y a dans le commerce des technologies que les chefs de l'OCDE utilisent déjà, des méthodes éprouvées. L'information est là: on sait ce qui va réussir et ce qui va échouer, et, de plus, lorsque le rendement est médiocre, il est plus facile de s'améliorer, tout simplement parce que vous êtes capable de cueillir le fruit qui est sur la branche du bas.

    Ainsi, pour les raisons que j'ai énoncées, et à cause du classement relativement bas du Canada au début des années 90, nous devrions être bien placés pour réaliser des progrès, en particulier par rapport aux autres pays de l'OCDE.

+-

    M. Brian Jean: Donc, essentiellement, nous sommes plus en mesure d'avancer parce que nous partons de plus loin.

+-

    M. Pierre Sadik: Oui, et les meneurs évoluent dans une sphère raréfiée, où il y a moins de marge de manoeuvre. Nous jouissons d'une imposante marge de manoeuvre, nous avons la possibilité de faire des erreurs et d'apprendre en nous améliorant, mais nous ne faisons pas cela. Notre amélioration est inférieure à la moyenne de l'OCDE.

+-

    M. Brian Jean: Maintenant, je sais que les représentants de la fondation formulent des commentaires plein de subtilité, mais je ne suis pas à la recherche de subtilité. Que pensez-vous des indicateurs et des objectifs de la table ronde nationale? Que nous réserve l'avenir, compte tenu de ce que vous avez déjà dit et de notre rendement des dix dernières années, du fait que le Canada n'a même pas su atteindre la moyenne de l'OCDE?

+-

    M. Pierre Sadik: Les indicateurs constituent un point de départ fantastique. Nous aimons bien rendre à César ce qui appartient à César. Nos yeux sont tournés vers le Canada, pour ce qui est du travail de la table ronde à l'égard des indicateurs.

    Je crains fort, à la lumière de ses antécédents, que le Canada ne s'égare en chemin. Nous serons dotés d'indicateurs décents, mais ils ne seront pas liés à un système global permettant d'optimiser leur utilisation.

+-

    M. Brian Jean: En particulier à l'égard des objectifs, par exemple, je crois qu'on a mentionné, plus tôt, que, de fait, le Royaume-Uni a établi quelque 40 indicateurs pour le Royaume-Uni, et quelque 20 indicateurs pour le reste. Ils appliquent cela à tous les ministères, et ils appliquent un quelconque indicateur de la qualité à tous les échelons, et une certaine forme de récompense ou de pénalité à l'égard de la réalisation des objectifs. Nous ne faisons pas cela, à l'heure actuelle.

+-

    M. Pierre Sadik: Il y a un système de récompense, et les indicateurs sont un élément essentiel qui s'inscrit dans une structure globale dont nous ne sommes tout simplement pas dotés au Canada.

+-

    M. Brian Jean: Merci.

    J'ai terminé mes questions, monsieur le président.

+-

    Le président: Passons à M. Bigras.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Merci, monsieur le président. Ma question s'adresse au représentant du Royaume-Uni.

    J'ai toujours cru que la base, l'élément essentiel d'une stratégie de développement durable était une évaluation stratégique environnementale. Cela veut dire que les ministères devraient avoir l'obligation de produire une évaluation environnementale des plans, des politiques et des programmes.

    On a une directive au Canada qui remonte à plus de 20 ans. Or, bien souvent, selon le constat fait par la commissaire à l'environnement et au développement durable, cette directive n'est pas appliquée.

    Ces éléments d'évaluation stratégique environnementale sont-ils intégrés à la stratégie de développement durable du Royaume-Uni? Si oui, en vertu de quelle obligation les ministères sont-ils tenus d'appliquer l'évaluation environnementale des plans, des politiques et des programmes?

º  +-(1645)  

[Traduction]

+-

    Mme Jill Rutter: J'ai une réponse en plusieurs volets. En vertu des lois de l'UE, les grands programmes -- il s'agit d'une nouvelle exigence adoptée par l'UE -- les grands programmes doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale stratégique. C'est une nouvelle exigence.

    Nous sommes dotés d'une politique selon laquelle tout ministère du gouvernement au Royaume-Uni qui émet une nouvelle politique susceptible d'avoir de grandes répercussions sur le public ou sur le secteur privé est tenu de publier parallèlement ce que nous appelons une étude d'impact de la réglementation, ou EIR. Jusqu'en avril 2004, ces EIR s'attachaient surtout à l'impact économique, en particulier l'impact sur les coûts opérationnels. Mais, en avril 2004, on a étendu la portée des EIR, et elles doivent maintenant, en plus d'examiner les coûts et les avantages économiques, se pencher aussi sur les coûts et avantages environnementaux, et les coûts et avantages sociaux. Il y a un aide-mémoire, sur le site Web du cabinet ministériel qui l'exige, un aide-mémoire assorti d'une série de questions que les gens doivent se poser au sujet de l'impact de la politique dont il est question, et cet aide-mémoire doit être diffusé.

    C'est relativement nouveau. Je ne dirai pas qu'on le fait partout, ou qu'on le fait bien partout. Mais notre bureau national de vérification s'apprête à examiner le rendement du gouvernement à l'égard de ces nouvelles études d'impact de la réglementation, afin de déterminer l'ampleur de leur utilisation.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Quelle forme cette obligation prend-elle? Est-ce une forme réglementaire? Est-ce sous la forme de directives? Y a-t-il une obligation réglementaire ou législative à l'application de l'évaluation stratégique environnementale?

[Traduction]

+-

    Mme Jill Rutter: Les évaluations environnementales stratégiques exigées s'appliquent à un sous-ensemble de politiques. Elles sont exigées en vertu des lois de l'UE. Mais l'obligation beaucoup plus générale de mener des études d'impact de la réglementation est une pratique exemplaire obligatoire imposée par le Cabinet aux ministères du gouvernement. C'est ça, l'exigence.

    Tout projet de politique doit être assorti d'une étude d'impact de la réglementation qui doit maintenant se pencher sur ces caractéristiques supplémentaires, soit les conséquences environnementales et les conséquences sociales, et poser d'autres questions. Par exemple, mon ministère se penche sur les préoccupations des régions rurales de l'Angleterre, et les ministères doivent également évaluer leurs projets de politique en fonction de ces préoccupations. C'est une façon de veiller à ce qu'une politique tienne compte de toutes les préoccupations.

[Français]

+-

    M. Bernard Bigras: Merci.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci.

    Merci, monsieur Bigras.

    Mesdames et messieurs, la séance tire à sa fin. Nous aimerions bien nous pencher sur les deux avis de motion qui ont été présentés, alors, monsieur Wilfert, je crois que vous serez le dernier à disposer de cinq minutes pour poser des questions.

+-

    L'hon. Bryon Wilfert (Richmond Hill, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je tiens à remercier le représentant de la Fondation David Suzuki et nos amis de l'Angleterre d'être venus aujourd'hui.

    Je tiens seulement à signaler à la Fondation Suzuki que le ministre a apprécié le rapport. Au bout du compte, je crois que vous avez formulé une distinction très importante entre l'état de l'environnement et la question des pressions environnementales. Je pourrais bien, même si cela ne serait pas très utile, être tatillon, et chercher à couper les cheveux en quatre en ce qui concerne les divers indices et le fait que nous ayons occupé la cinquième place, la quatrième, la sixième, la troisième, etc., dans les mêmes rapports où les Britanniques se retrouvent au 21e rang, au 9e, au 12e, au 18e, etc.

    Je ne crois pas que ce rapport tienne compte de tout le travail que nous avons effectué depuis 2002, car, y compris la Loi sur les espèces en péril, nous avons affecté plus de 3,5 milliards de dollars à des mesures d'atténuation liées à la santé et à la sécurité des collectivités, et nous avons déposé le budget le plus vert de l'histoire du Canada. La liste est sans fin. Il est clair, monsieur le président, que nous travaillons avec la Fondation. Nous avons apprécié le rapport. C'est le portrait d'une époque en 2002, et, manifestement, je crois qu'il nous importe de tenir compte également des grands changements apportés aux politiques du gouvernement et aux initiatives qui ont été prises dernièrement. L'un des dangers, monsieur le président, tient au fait que, bien souvent, quand nous prenons connaissance d'un rapport, ce rapport s'attache à une période bien précise, et la question qui s'impose c'est : « Qu'est-ce que nous avons fait depuis? » Si, de fait, depuis 2002, nous n'avons rien fait, j'accepterais volontiers toute critique. Mais la réalité, c'est que nous avons fait beaucoup de choses, et une grande part de cela, bien sûr, je présume, sera mentionnée dans d'autres rapports -- qu'il s'agisse du projet pilote d'« Indice de performance environnementale » ou de l'« Indice de bien-être des écosystèmes ». Ce sont des choses qui commencent à se manifester.

    J'aimerais seulement entendre votre point de vue, si c'est possible, en ce qui concerne le fait qu'un rapport n'est que le reflet d'une période précise dans le temps, et que, effectivement, nos contraintes sont plutôt différentes de celles d'autres pays que vous évaluez.

º  +-(1650)  

+-

    M. Pierre Sadik: Pour ce qui est de l'aspect temporel, le rapport examine le rendement du Canada sur une période de dix ans, soit de 1992 à 2002, et, comme je l'ai déjà dit, fait état de progrès réalisés à l'égard de 17 indicateurs sur 29 -- même si le progrès réalisé est inférieur au taux de progrès moyen des pays membres de l'OCDE --, d'un recul à l'égard de 11 indicateurs sur 29, et conclut qu'il n'y a pas eu d'évolution de la position relative au cours de cette décennie.

    Il n'est pas tout à fait juste d'affirmer que le rapport brosse un portrait d'une période. Il reflète un suivi des données recueillies auprès des mêmes sources au cours d'une décennie.

+-

    L'hon. Bryon Wilfert: Si vous le permettez, monsieur le président, j'avancerais que, si on tenait compte, dans ce rapport, des nombreuses initiatives lancées depuis 2002 -- au chapitre des politiques, des finances et d'autres aspects --, on n'obtiendrait pas le même portrait.

+-

    M. Pierre Sadik: C'est exact. Le rapport utilise uniquement les données les plus récentes dont dispose l'OCDE, c'est-à-dire les données de 2002. Nous allons déposer un nouveau rapport dans deux ans, fondé sur des données allant jusqu'à 2004, et nous avons tous hâte de prendre connaissance des progrès réalisés par le gouvernement du Canada au cours de cette période de deux ans dont vous parlez.

+-

    L'hon. Bryon Wilfert: Je sais, monsieur le président, que le gouvernement a hâte de travailler, tout comme nous l'avons fait, avec la Fondation Suzuki, et, de fait, elle s'est révélée d'un grand secours dans un grand nombre de domaines. Comme vous le savez, l'une des idées maîtresses du ministre, c'est que le développement durable et l'environnement ne sont pas incompatibles. De fait, le ministre travaille très dur pour faire un certain nombre de choses que la Fondation Suzuki, entre autres, a proposées. J'avancerais que, quand nous verrons le rapport, dans quelques années, nous constaterons certainement -- j'en suis sûr -- des progrès à l'égard d'un grand nombre d'indices, car, comme l'a signalé M. McGuinty, les indices varient d'un rapport à l'autre, et ils ne partent pas toujours du même point. Mais j'apprécie votre rapport, et je tiens à le signaler au comité.

+-

    M. Pierre Sadik: Maintenant, ce sera dans le compte rendu -- votre confiance à l'égard des progrès qui seront réalisés entre maintenant et la production du rapport.

+-

    L'hon. Bryon Wilfert: Certainement.

    Merci.

+-

    Le président: Merci, MM. Sadik et Wilfert.

    Le greffier me rappelle, mesdames Rutter et Season, qu'il est 22 h en Angleterre, alors nous tenons à vous remercier d'avoir passé tout ce temps avec notre comité. Permettez-moi donc, au nom des membres du Comité, de vous témoigner toute notre gratitude.

    Madame Rutter, M. Bigras avait manifesté le désir d'obtenir des renseignements à l'égard du processus d'établissement du cadre de durabilité pour l'UE. Vous aviez laissé entendre que vous pourriez peut-être fournir des renseignements supplémentaires à l'égard de ce processus. Vous serait-il possible d'assurer un tel suivi?

º  -(1655)  

+-

    Mme Jill Rutter: Juste pour clarifier, je crois que sa question concernait la façon dont l'UE a géré la répartition des cibles nationales liées à Kyoto.

    Nous parlerons à nos collègues et nous lui fournirons des renseignements à cet égard, mais il est bien possible qu'il s'agisse tout simplement de négociations en coulisse. Nous verrons ce que nous pouvons faire.

+-

    Le président: Quoi qu'il en soit, nous serions heureux d'obtenir de l'information, et nous vous remercions de vos efforts à cet égard.

+-

    Mme Jill Rutter: Bien sûr, et merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup, et bonsoir.

    Merci, monsieur Sadik.

    Mesdames et messieurs, passons maintenant à nos avis de motion.

    La première est l'avis de motion de M. Cullen. Puisque nous sommes en public, je devrais peut-être la lire:

Que le Comité permanent de l'environnement et du développement durable charge ses recherchistes de préparer un exposé, en consultation avec le bureau de la Commissaire à l'environnement, sur la réponse du gouvernement au septième rapport du Comité intitulé: Trouver l'énergie d'agir: réduire les émissions de gaz à effet de serre du Canada.

    Monsieur Cullen.

+-

    M. Nathan Cullen: Merci, monsieur le président.

    Cette motion découle de conversations avec divers membres du comité lorsque nous avons reçu la réponse du gouvernement à notre rapport, fruit d'un grand nombre de réunions et de mois de travail. À la lumière d'une analyse de la réponse du gouvernement, et de certaines réponses insatisfaisantes, nous avons élaboré cette motion.

    J'aimerais également apporter une légère modification favorable au début de la motion:

Que le Comité permanent de l'environnement et du développement durable charge ses recherchistes de préparer un exposé et un projet de réponse, en consultation avec le bureau de la Commissaire à l'environnement--

    Je crois que le calendrier a été remanié afin que Mme Gélinas puisse venir jeudi.

+-

    Le président: C'est exact.

+-

    M. Nathan Cullen: Ce n'est pas lié à cela. On dirait qu'il s'agit de deux événements distincts.

+-

    Le président: D'accord.

    Y a-t-il des commentaires sur cette motion? Tous ceux qui sont pour?

    (La motion est adoptée.)

+-

    Le président: Merci.

    Passons à la deuxième motion. Bien sûr, l'ordre dans lequel nous prendrons les mesures sera fonction de ce que nous pouvons faire.

    M. Jean a suggéré que les membres du comité se rendent à Fort McMurray, en Alberta, pour effectuer une tournée des usines de sable bitumineux et prendre connaissance des enjeux auxquels sont confrontées l'industrie et la collectivité en ce qui concerne l'environnement.

    Monsieur Jean.

+-

    M. Brian Jean: Merci, monsieur le président.

    Très brièvement, je crois que la réalité de la situation à Fort McMurray, c'est que les investissements dans la région sont au stade embryonnaire. Nous nous attendons à 150 milliards de dollars d'investissements au cours des quatre prochaines années. Il me semble que, du point de vue fédéral, c'est le moment idéal pour orienter stratégiquement ce développement. C'est une occasion merveilleuse, et je crois que le comité devrait se rendre là-bas et voir ce que nous pouvons faire pour aider notre environnement.

+-

    Le président: Au risque d'orienter la discussion, je dirais que c'est l'une des meilleures suggestions que nous ayons entendues. Mais quand?

    Nous vous remercions, monsieur Jean.

    Des commentaires? Est-ce qu'on s'entend pour organiser cela?

+-

    Mme Yasmin Ratansi (Don Valley-Est, Lib.): Avons-nous le budget nécessaire pour y aller en avion?

-

    Le président: Nous demanderons au greffier d'établir un budget, et nous y reviendrons. Mais nous nous entendons pour dire que nous aimerions aller dans cette direction -- c'est-à-dire vers le nord, à Fort McMurray. Évidemment, il faudra convenir d'une date.

    M. Watson invoque le règlement et demande que nous passions brièvement à huis clos. Nous avons environ cinq minutes.

    [La séance se poursuit à huis clos]