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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 23 juin 2005




¿ 0905
V         Le président (M. John Maloney (Welland, Lib.))
V         M. David Griffin (agent exécutif, Association canadienne de la police professionnelle)
V         Le président
V         M. Tony Cannavino (président, Association canadienne de la police professionnelle)

¿ 0910

¿ 0915
V         Le président
V         M. Larry Cohen (membre, Conseil d'administration, B.C. Civil Liberties Association)

¿ 0920

¿ 0925
V         Le président
V         Mme Patricia Begin (directrice, Recherche et politiques, Centre canadien de la lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies)

¿ 0930

¿ 0935
V         Le président
V         Dr Robert Mann (scientifique chevronné, Centre de toxicomanie et de santé mentale)

¿ 0940

¿ 0945
V         Le président
V         M. Randy White (Abbotsford, PCC)
V         M. Tony Cannavino
V         M. Randy White

¿ 0950
V         Mme Patricia Begin
V         M. Randy White
V         M. David Griffin
V         M. Randy White
V         Le président
V         M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ)
V         M. Larry Cohen
V         M. Serge Ménard

¿ 0955
V         M. Larry Cohen
V         M. Serge Ménard
V         M. Tony Cannavino
V         M. Serge Ménard
V         M. Tony Cannavino
V         M. Larry Cohen

À 1000
V         Le président
V         M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD)
V         M. Larry Cohen
V         M. Joe Comartin
V         M. Larry Cohen
V         M. Joe Comartin
V         M. John Weekes (analyste principal de la recherche, Centre canadien de la lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies)
V         M. Joe Comartin
V         M. John Weekes
V         M. Joe Comartin

À 1005
V         M. John Weekes
V         M. Joe Comartin
V         M. Tony Cannavino
V         M. Joe Comartin
V         M. Tony Cannavino
V         M. Joe Comartin
V         M. Tony Cannavino
V         M. Joe Comartin
V         M. Tony Cannavino
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         M. Joe Comartin
V         Le président
V         L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.)

À 1010
V         Dr Robert Mann
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         Dr Robert Mann
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         Dr Robert Mann
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         Dr Robert Mann
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         M. Tony Cannavino
V         M. Larry Cohen
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         Dr Robert Mann
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         M. Tony Cannavino

À 1015
V         L'hon. Paul Harold Macklin
V         M. David Griffin
V         Le président
V         M. John Weekes
V         Le président
V         Dr Robert Mann
V         Le président
V         M. Vic Toews (Provencher, PCC)

À 1020
V         M. Larry Cohen
V         M. Vic Toews
V         M. Larry Cohen
V         Mme Patricia Begin
V         M. Vic Toews
V         Mme Patricia Begin
V         M. Vic Toews
V         Mme Patricia Begin
V         M. Vic Toews

À 1025
V         Mme Patricia Begin
V         M. Vic Toews
V         Le président
V         M. Serge Ménard
V         Dr Robert Mann
V         M. Serge Ménard
V         Dr Robert Mann
V         M. Serge Ménard
V         Dr Robert Mann
V         M. John Weekes
V         M. Serge Ménard
V         Dr Robert Mann

À 1030
V         M. Serge Ménard
V         M. Larry Cohen
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.)
V         M. David Griffin

À 1035
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. David Griffin
V         L'hon. Roy Cullen
V         M. David Griffin
V         L'hon. Roy Cullen
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen
V         Le président
V         M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC)
V         Mme Patricia Begin

À 1040
V         M. Larry Cohen
V         M. Tony Cannavino
V         M. Garry Breitkreuz
V         Dr Robert Mann
V         M. Garry Breitkreuz
V         Dr Robert Mann
V         Le président
V         M. David Griffin
V         M. Larry Cohen

À 1045
V         Le président
V         Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.)
V         M. Larry Cohen
V         Mme Anita Neville
V         M. Tony Cannavino
V         Mme Anita Neville

À 1050
V         M. John Weekes
V         Dr Robert Mann
V         Mme Anita Neville
V         Dr Robert Mann
V         Mme Anita Neville
V         Le président
V         L'hon. Roy Cullen
V         Mme Patricia Begin
V         L'hon. Roy Cullen
V         Dr Robert Mann
V         L'hon. Roy Cullen

À 1055
V         M. David Griffin
V         L'hon. Roy Cullen
V         Le président
V         M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC)
V         M. Tony Cannavino
V         M. Rob Moore
V         M. David Griffin

Á 1100
V         M. Rob Moore
V         Le président










CANADA

Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile


NUMÉRO 048 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 23 juin 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¿  +(0905)  

[Traduction]

+

    Le président (M. John Maloney (Welland, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.

    C'est la quarante-huitième séance du Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile.

    Nos témoins, ce matin, sont les représentants de l'Association canadienne de la police professionnelle, David Griffin, agent exécutif et Tony Cannavino; de la B.C. Civil Liberties Association, M. Larry Cohen; du Centre canadien de la lutte contre l'alcoolisme et des toxicomanies, Patricia Begin—heureux de vous revoir, Patricia—et John Weekes et, du Centre de toxicomanies et de santé mentale, Robert Mann.

    Monsieur Griffin, est-ce vous ou Tony qui allez commencer?

+-

    M. David Griffin (agent exécutif, Association canadienne de la police professionnelle): C'est Tony qui va commencer.

+-

    Le président: Chaque intervenant dispose d'environ 10 minutes.

+-

    M. Tony Cannavino (président, Association canadienne de la police professionnelle): Merci, monsieur le président.

[Français]

    L'Association canadienne de la police professionnelle se réjouit d'avoir l'occasion de témoigner aujourd'hui devant le Comité parlementaire permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile à l'égard du projet de loi C-16, Loi modifiant le Code criminel (conduite avec facultés affaiblies) et d'autres lois en conséquence. L'ACPP est le porte-parole national de 54 000 membres du personnel policier en poste d'un bout à l'autre du Canada. Par l'intermédiaire de nos 225 associations membres, les adhérents à l'ACPP comprennent le personnel policier oeuvrant au sein de corps policiers de petites villes et de petits villages du Canada, dans les grands corps policiers municipaux et les services policiers provinciaux, ainsi que des membres de la GRC.

    Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de commenter aujourd'hui les dispositions prévues au projet de loi C-16. La consommation de drogues représente un important problème de sécurité routière, particulièrement chez les jeunes conducteurs dont les taux de consommation de drogues et d'accidents mortels par kilomètre parcouru sont tous deux les plus élevés. Le projet de loi C-16 constitue donc une réponse nécessaire et justifiée aux préoccupations suscitées par ce problème de sécurité publique.

    Les débats publics récents suscités par les modifications aux lois canadiennes sur les drogues ont amplifié la nécessité d'adopter une approche nationale à la consommation de drogues au Canada et d'assurer que les jeunes disposent d'informations exactes sur les torts découlant de la consommation de drogues, y compris la marijuana. Malheureusement, les débats portant sur la réforme des lois relatives au cannabis ont transmis des messages contradictoires à la jeunesse canadienne. En effet, toutes les études démontrent invariablement que les jeunes sont plus susceptibles de prendre le volant sous l'effet du  pot que de l'alcool.

    La conduite sous l'effet intoxicant de drogues constitue un grave danger, parce que le jugement du conducteur est affaibli et sa coordination motrice, perturbée. Les Canadiens et Canadiennes partagent nos inquiétudes à l'égard de la conduite avec facultés affaiblies par les drogues; nos compatriotes sont en faveur de la mise en oeuvre de mesures législatives permettant de repérer les conducteurs dont les facultés sont affaiblies par les drogues et de les poursuivre en justice. Lors d'un sondage d'opinion publique effectué par la Fondation de recherches sur les blessures de la route au Canada, les répondants canadiens classaient l'importance de la conduite après avoir consommé des drogues illégales au deuxième rang des problèmes ayant une incidence sur la sécurité routière. Seul l'alcool au volant fut jugé plus menaçant. Près de 82 p. 100 des répondants étaient d'avis que toute personne soupçonnée de conduire sous l'effet de l'alcool ou de drogues devrait être obligée de se soumettre à des tests de sobriété.

    Une foule de raisons expliquent cette inquiétude généralisée. En effet, des études et indices innombrables confirment que la consommation de drogues entraîne de très sérieux problèmes de sécurité routière, particulièrement chez les jeunes conducteurs.

    La loi actuelle est inadéquate. Bien que l'alinéa 253a) du Code criminel interdise la conduite lorsque la capacité du conducteur est affaiblie par une drogue, il ne prescrit aucun moyen pratique de recueillir les éléments de preuve qui s'imposent pour déposer une accusation à cet effet. Par conséquent, les personnes qui conduisent avec des facultés affaiblies par la drogue seule ou par un mélange de drogue et d'alcool jouissent largement d'immunité contre les poursuites criminelles.

    Il existe des tests d'haleine servant à dépister la présence d'alcool, mais il n'existe aucun test objectif permettant de mesurer les facultés affaiblies par les drogues. Afin de pouvoir prouver le bien-fondé d'une poursuite judiciaire pour conduite avec facultés affaiblies par les drogues, le policier doit démontrer l'affaiblissement des facultés et la présence active de drogues dans l'organisme de l'accusé. Les policiers doivent donc se fier aux symptômes de l'affaiblissement des facultés par les drogues — dont un comportement erratique au volant — et aux témoignages de tierces parties lorsqu'ils enquêtent sur une personne soupçonnée de conduire avec facultés affaiblies par la drogue. La loi actuellement en vigueur ne permet pas aux policiers d'exiger un test de sobriété ou le prélèvement d'un échantillon de fluide biologique. Alors qu'une personne soupçonnée de conduire avec facultés affaiblies par l'alcool peut être légalement sommée de donner un échantillon d'haleine de sorte qu'on puisse mesurer la concentration d'alcool dans son sang pour déterminer si elle dépasse le niveau prévu par la loi, cette obligation ne s'applique pas dans le cas d'une personne soupçonnée de conduire avec facultés affaiblies par la drogue.

    Les tests d'évaluation de la présence de drogues sont admissibles comme éléments de preuve devant les tribunaux à la seule condition que le conducteur participe de son gré à cette évaluation.

[Traduction]

    Le projet de loi C-16 conférera à la police le pouvoir d'obliger les conducteurs aux facultés affaiblies par la drogue à se soumettre à un test de sobriété normalisé ou à une évaluation par un expert en reconnaissance de drogue, sur demande, et à exiger un échantillon d'un liquide corporel, urine, salive ou sang, si le conducteur échoue ces tests. Cette nouvelle mesure législative confère aux autorités policières des pouvoirs semblables à ceux qui existent actuellement à l'égard des conducteurs en état d'ébriété.

¿  +-(0910)  

    L'épreuve de sobriété normalisée et l'évaluation par un expert en reconnaissance de drogue constituent les seules méthodes fiables pour la police de recueillir les preuves permettant de déterminer si le conducteur a les facultés affaiblies et, dans l'affirmative, par quoi. Les évaluations par un ERD ont été acceptées par les tribunaux canadiens, mais il faut néanmoins un cadre législatif pour obliger les conducteurs dont les facultés pourraient être affaiblies par la drogue de se soumettre à cette épreuve. Ce genre de test est déjà couramment utilisé en Australie, en Nouvelle-Zélande et dans certains pays européens. Actuellement, 38 États américains ont recours à cette procédure pour détecter les conducteurs aux facultés affaiblies par la drogue et les poursuivre; cette procédure a été jugée constitutionnelle par la Cour suprême des États-Unis.

    À l'heure actuelle, les services de police du Canada ne peuvent procéder à une évaluation par un ERD que si le conducteur s'y soumet de son plein gré. C'est en Colombie-Britannique, en 1995, qu'on a commencé à faire ces évaluations avec l'appui de la Société d'assurance de la Colombie-Britannique. Ce programme n'a toutefois pas permis d'obtenir beaucoup de condamnations pour conduite avec les facultés affaiblies par la drogue parce qu'on n'administrait pas d'abord une épreuve de sobriété normalisée et qu'on ne pouvait exiger un échantillon de liquide corporel. Toutefois, ce programme a permis de retirer de la route des conducteurs dont on soupçonnait que les facultés étaient affaiblies par le biais de la suspension du permis de conduire pour 24 heures, conformément au code de la route de la province.

    Pour être accrédités experts en reconnaissance de drogue, les agents de police doivent se soumettre à un programme de formation rigoureux, à huit examens et à deux tests pratiques. Il leur faut notamment faire 12 évaluations concernant quatre catégories de drogues différentes, évaluations dont les résultats doivent ensuite être confirmés par des analyses toxicologiques. Ce programme a fait l'objet d'une validation scientifique, autant en laboratoire que sur la route.

    Le programme ERD aide aussi la police à reconnaître ceux qui souffrent de troubles médicaux pouvant influer sur leur capacité de conduire, tels que le diabète non contrôlé, l'épilepsie et les accidents cérébraux vasculaires. Les procédures ERD ont été conçues pour aider les agents de police à reconnaître les troubles médicaux qui affaiblissent les facultés des conducteurs. Tout expert en reconnaissance de drogue et qui voit un conducteur souffrant de troubles médicaux prend les mesures nécessaires pour obtenir de l'aide médicale.

    Le projet de loi C-16, qui propose des modifications au Code criminel et à d'autres lois, vise à améliorer l'application des dispositions sur la conduite avec les facultés affaiblies par la drogue au Canada. Dans un premier temps, les agents de police seront autorisés à administrer une épreuve de sobriété normalisée, sur place, s'ils ont des motifs raisonnables de soupçonner la présence d'une drogue dans l'organisme du conducteur.

    Dans un deuxième temps, si le conducteur échoue à l'épreuve de sobriété normalisée, le policier a des motifs raisonnables de croire qu'une infraction de conduite avec les facultés affaiblies par la drogue a été commise et il peut escorter le conducteur au poste de police pour qu'il fasse l'objet d'une évaluation par un expert en reconnaissance de drogue.

    Dans un troisième temps, l'expert en reconnaissance de drogue accrédité fera une évaluation comprenant des entrevues et des observations physiques.

    Dans un quatrième temps, si l'ERD reconnaît la catégorie de drogues qui a influé sur les capacités du conducteur et a des motifs raisonnables de croire que la capacité de conduire du conducteur est affaiblie par une drogue ou un mélange de drogue et d'alcool, il pourra demander au conducteur de lui donner un échantillon de salive, d'urine ou de sang. Les échantillons de sang ne peuvent être prélevés que par un technicien ou un médecin qualifié convaincu que le prélèvement d'un échantillon ne sera pas préjudiciable pour le suspect.

    Aucune accusation ne sera portée tant que les résultats préliminaires de l'évaluation par l'ERD n'auront pas été confirmés par des analyses toxicologiques, mais les résultats de l'évaluation par l'ERD pourront servir de preuves dans les poursuites pour conduite avec facultés affaiblies par la drogue. Le conducteur qui refuse de se soumettre à une épreuve de sobriété ou de donner un échantillon de liquide corporel commet une infraction punissable aux termes des dispositions s'appliquant déjà au refus de se soumettre à un alcooltest ou à une analyse de sang. Toutefois, le projet de loi C-16 n'aura pas les effets escomptés si les agents de police qui travaillent en première ligne n'ont pas la formation nécessaire pour en appliquer les dispositions. Il faudra aussi suffisamment de ressources pour les analyses de laboratoire et de toxicologie pour que les échantillons de sang et autres prélevés aux termes du projet de loi C-16 soient analysés dans les meilleurs délais.

¿  +-(0915)  

    On doit aussi faire en sorte que les juges du Canada comprennent bien les éléments rigoureusement scientifiques qui constituent les fondements de l'épreuve de sobriété normalisée et de l'évaluation par un expert en reconnaissance de drogues. Le gouvernement fédéral devrait aussi appuyer la recherche sur ces tests et s'assurer que les informations à ce sujet soient largement disséminées dans les milieux juridiques de la sécurité routière du Canada.

    En conclusion, il est risqué de conduire avec les facultés affaiblies par la drogue, car la coordination moteur et le jugement sont affaiblis. La consommation de drogues constitue donc un enjeu important en matière de sécurité routière, surtout chez les jeunes conducteurs. Le projet de loi C-16 représente une mesure de sécurité publique nécessaire et justifiée. L'Association canadienne de la police professionnelle appuie le projet de loi et encourage le Parlement à l'adopter dans les meilleurs délais après l'avoir modifié. Ce projet de loi doit être adopté et mis en oeuvre avant que l'on entreprenne quoi que ce soit relativement au projet de loi C-17.

    L'ACPP recommande les amendements suivants : premièrement, une stratégie de mise en oeuvre exhaustive et s'accompagnant de suffisamment de ressources; deuxièmement, le droit, pour la police, d'enregistrer sur bande vidéo les épreuves de sobriété normalisée et les évaluations par l'ERD; troisièmement, le prolongement de la présomption temporelle de deux à trois heures; quatrièmement, le droit, pour les praticiens de la santé autorisés, de recueillir des échantillons de sang aux termes des dispositions sur la conduite avec les facultés affaiblies et, cinquièmement, la possibilité d'utiliser les résultats de l'épreuve de sobriété normalisée et de l'évaluation ERD dans les programmes de sécurité routière des provinces et territoires.

    Le gouvernement fédéral doit s'assurer qu'il y a suffisamment de fonds pour former un nombre suffisant de policiers, pour accroître les services toxicologiques et pour appuyer la recherche sur l'épreuve de sobriété normalisée et l'évaluation ERD.

    Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Merci, monsieur Cannavino.

    Je cède maintenant la parole à M. Cohen de la B.C. Civil Liberties Association.

+-

    M. Larry Cohen (membre, Conseil d'administration, B.C. Civil Liberties Association): Notre organisation est pour l'imposition de sanctions pénales contre la conduite avec les facultés affaiblies par quelques substances que ce soit, l'alcool, la drogue, l'alcool et la drogue ou quoi que ce soit d'autre.

    À l'heure actuelle, le Code criminel exige qu'on se soumette à un alcotest ou, si ce n'est pas possible, à une analyse de sang afin que soit déterminée l'alcoolémie à la demande d'un agent de police qui a des motifs raisonnables de croire que la capacité de conduire du suspect est affaiblie ou l'était dans les trois heures précédentes. En vertu du projet de loi C-16, on pourrait exiger un échantillon de salive, d'urine ou de sang aux fins de dépistage de drogues dans l'organisme du conducteur dont un policier spécialement formé a des motifs raisonnables de croire qu'il a conduit avec les facultés affaiblies par une ou des drogues ou l'effet combiné de drogues et d'alcool.

    Le prélèvement des échantillons de liquide corporel constitue une violation de la vie privée dont la gravité va grandissante à mesure qu'on va de l'haleine au sang en passant par la salive et l'urine. On exige ces échantillons parce qu'ils permettront de condamner ceux qui conduisent avec les facultés affaiblies, qu'ils constituent un danger pour les autres et doivent être punis et réadaptés.

    L'alcotest reconnu par la loi permet de déterminer avec une probabilité scientifique acceptable l'alcoolémie au moment pertinent. La recherche scientifique nous a aussi permis d'établir l'alcoolémie permise par la loi et au-delà de laquelle on juge qu'un conducteur a les facultés affaiblies. Cette concentration, 0,08 p. 100, donne une certitude aux personnes accusées de conduite avec les facultés affaiblies par l'alcool, à la police, au procureur de la Couronne, au juge et au grand public. Elle nous donne la certitude que la loi est juste et que les condamnations sont justes. De plus, l'infraction que constitue le refus de se soumettre à un alcotest est par conséquent justifiable.

    Notre association craint que les tests de dépistage de drogues proposés par le projet de loi C-16 ne donnent pas des résultats aussi certains. Nous estimons que ces tests ne pourront prouver avec certitude qu'un conducteur a conduit avec les facultés affaiblies par une drogue, des drogues ou une combinaison d'alcool et de drogues. Le projet de loi C-16 obligera les suspects à subir une violation importante de leur intégrité physique sans que les éléments de preuve que cela permette d'obtenir soient utiles. Par conséquent, on ne pourra justifier ni la loi ni la procédure.

    Nous croyons savoir que, selon les recherches faites jusqu'à présent, les résultats des tests de dépistage de drogues ne constituent pas une preuve d'une certitude scientifique acceptable d'une concentration donnée de drogues dans l'organisme du conducteur au moment où il était au volant. Par exemple, on peut généralement détecter la présence de marijuana dans l'organisme de celui qui en a consommé une seule fois trois jours après que les effets physiques aient disparu. Chez ceux qui consomment fréquemment de la marijuana, la drogue peut être détectée jusqu'à deux à trois semaines après que les effets physiques soient devenus négligeables. Les tests de dépistage de presque toutes les drogues pertinentes présentent des lacunes scientifiques semblables. Le moment de l'incapacité de conduire ne peut être déterminé par un test de dépistage de drogues comme il l'est par l'alcotest.

    Deuxièmement, le risque de faux positifs est élevé dans les drogues. Ainsi, la consommation d'héroïne et l'absorption de graines de pavot ou de cocaïne présente dans un analgésique donnent des résultats similaires. De même, la consommation active de marijuana et la fumée secondaire donnent toutes les deux des résultats positifs.

    Troisièmement, et c'est le plus important, on ne s'entend pas sur la concentration de drogues ou de mélange de drogues et d'alcool qui, du point de vue scientifique ou législatif, pourrait constituer le seuil au-delà duquel la conduite serait interdite parce qu'il aurait été prouvé scientifiquement qu'avec une telle concentration, le conducteur a les facultés affaiblies.

¿  +-(0920)  

    En absence de lien scientifiquement certain entre les résultats des tests et le moment de la conduite et d'une concentration seuil précise et étant donné que d'autres sources peuvent donner de faux résultats positifs au test de dépistage, nous n'avons pas de preuves additionnelle fiables permettant de porter des accusations de conduite avec les facultés affaiblies. On réussira donc à faire exclure les résultats des tests de dépistage de drogue comme preuve. Les procureurs de la Couronne hésiteront inévitablement à compter sur les résultats de ces tests en raison de leur manque de fiabilité comme preuve. Néanmoins, si le projet de loi C-16 est adopté, les agents de police voudront probablement recueillir des preuves aux termes des dispositions pertinentes du Code criminel et administreront des tests violant la vie privée sans fin utile.

    Notre association appuie l'alcotest et les analyses de sang qui existent actuellement, même s'ils violent la vie privée, car on a la certitude scientifique que ces tests indiquent avec précision le niveau d'incapacité au moment de la conduite. Parce que ces tests sont fiables du point de vue scientifique et qu'ils ont permis de fixer dans la loi une concentration seuil, le taux de condamnation pour conduite avec les facultés affaiblies est élevé. Mais si les tests de dépistage de drogue ne nous donnent pas des preuves scientifiques de l'affaiblissement des facultés au moment de la conduite automobile, ces tests constitueront une violation de la vie privée des Canadiens et ne seront donc pas justifiés.

    De plus, parce qu'on aura du mal à faire condamner les conducteurs avec les facultés affaiblies en se fondant sur les résultats de ces tests qui violent la vie privée, cette mesure législative et, implicitement, le système de justice pénale en ce qui a trait à la conduite avec les facultés affaiblies, seront discrédités.

    Cela ne signifie pas qu'il faille négliger le problème qu'est la conduite avec les facultés affaiblies par la drogue ou les effets combinés de l'alcool et de la drogue. Notre association, à l'instar de l'association de police, appuie le principe de précaution en vertu duquel les agents de la paix ont le pouvoir de suspendre le permis de conduire pendant 24 heures, comme le dispose la Loi sur les véhicules moteurs de la Colombie-Britannique. Grâce à ce pouvoir, les agents de la paix peuvent retirer des routes ceux qu'ils d'avoir conduit avec les facultés affaiblies par la drogue ou l'alcool sans avoir à administrer un test de dépistage de drogues qui violent la vie privée dont les résultats ne sont ni pertinents, ni probants. Le code de la route de l'Alberta confère un pouvoir semblable.

    Tant qu'il ne sera pas possible d'établir un lien scientifique entre le résultat du test de dépistage des drogues et le moment pertinent de la conduite automobile et d'établir des concentrations précises et acceptables de drogues ou de mélanges de drogue ou d'alcool dans l'organisme comme indice de l'affaiblissement des facultés, les tests de dépistage de drogues obligatoires et violant la vie privée, ainsi que la criminalisation du refus de se soumettre à ces tests ne sont pas justifiés, et ces dispositions du projet de loi C-16 ne devraient pas être adoptées.

    Enfin, la BCCLA recommande que toute mesure législative prévoyant le prélèvement de liquides corporels à des fins d'analyse qui existe actuellement ou qui serait incluse à l'avenir dans le Code criminel prévoit la destruction de ces échantillons à l'issue de toute procédure et que le fait de conserver ces échantillons après les procédures constitue une infraction.

    Merci.

¿  +-(0925)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Cohen.

    Je cède maintenant la parole à Mme Bégin du Centre canadien de la lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies.

+-

    Mme Patricia Begin (directrice, Recherche et politiques, Centre canadien de la lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies): Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, le Centre canadien de lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies apprécie l'occasion qui lui est offerte de pouvoir se présenter aujourd'hui devant vous afin de vous exposer son point de vue sur le problème de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue au Canada, et ce, dans le cadre de votre examen du projet de loi C-16.

    Je suis accompagnée de John Weekes, chercheur principal auprès du CCLAT, qui s'est récemment penché sur le problème de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue.

    Comme vous le savez peut-être déjà, le CCLAT, fondé en 1988 par une loi du Parlement, est un organisme national non gouvernemental chargé d'entreprendre des recherches et de recommander des politiques en matière d'usage et d'abus de drogue au Canada. C'est pourquoi la question de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue nous intéresse tout particulièrement et que nous croyons être en mesure de pouvoir contribuer de façon significative à vos travaux.

    Le CCLAT se déclare favorable aux grandes lignes du projet de loi et, plus particulièrement, aux dispositions visant à pouvoir imposer aux personnes suspectées d'avoir conduit avec des facultés affaiblies par une drogue autre que l'alcool le prélèvement d'échantillons de substances corporelles en vue de leur analyse. Cependant, nous aimerions attirer l'attention du comité sur un certain nombre de questions importantes liées à ce projet de loi et sur lesquelles je reviendrai plus en détail dans quelques instants.

    Mes collègues et moi-même au CCLAT sommes convaincus que la conduite avec facultés affaiblies par la drogue constitue un grave problème au Canada comme ailleurs. C'est pourquoi nous l'avons d'ailleurs inclut dans les six principaux défis que se doivent de relever les Canadiens en matière de drogue dans notre récent rapport intitulé Toxicomanie au Canada : enjeu et options actuelles. J'en ai laissé des exemplaires à la greffière. Dans un chapitre consacré à la conduite sous l'influence de drogue, traite en détail de la question et définit les principaux points devant être pris en considération lors de l'élaboration d'une politique publique en la matière.

    Les études menées au Canada comme à l'étranger confirment que les drogues jouent un rôle dans un nombre important d'accidents au cours desquels des conducteurs sont tués ou grièvement blessés. Cependant, nos connaissances en la matière sont minimes et il existe un besoin criant d'entreprendre des recherches scientifiques sérieuses afin de déterminer la nature et l'ampleur exacte du problème que constitue la conduite avec facultés affaiblies par la drogue au Canada.

    Le Road Safety Monitor publié en 2002 par la Fondation de recherche sur les blessures de la route indique que près de 18 p. 100 des conducteurs déclarent avoir pris, au cours des douze mois précédents, des drogues illégales, des médicaments sur ordonnance ou en vente libre dans les deux heures avant d'avoir conduit. La même étude révèle que près de quatre millions de Canadiens ont admis avoir conduit après avoir pris une substance pouvant nuire à leur capacité de conduire prudemment. Les jeunes hommes sont les plus enclins à conduire après avoir pris de la marijuana ou une autre drogue illégale. Le Road Safety Monitor de la FRBR démontre également que les Canadiens placent la conduite avec facultés affaiblies par la drogue en deuxième position, juste après la conduite en état d'ébriété, dans la liste des principaux risques en matière de sécurité routière.

    En effet, les Canadiens jugent que la conduite avec des facultés affaiblies par une drogue illégale constitue un problème sérieux. Cependant, comme les membres du comité le savent très probablement, les médicaments sur ordonnance et un grand nombre de médicaments en vente libre peuvent avoir des répercussions négatives sur l'attention, sur le jugement, sur la coordination ou sur le temps de réaction et réduire ainsi considérablement la capacité d'une personne à conduire prudemment.

    Cependant, s'il existe des dispositifs simples et précis permettant de détecter la présence d'alcool, et d'en mesurer la quantité, par une simple analyse de l'haleine, aucun dispositif ne permet d'en faire autant pour les drogues. De plus, contrairement au cas de l'alcool, ou l'existence d'une corrélation entre le taux d'alcoolémie et le degré d'affaiblissement des facultés est clairement établie, le simple fait de détecter la présence d'une drogue, illégale ou non, ne signifie pas nécessairement que sa consommation est récente ou que la capacité de la personne à conduire était réduite au moment du prélèvement de l'échantillon. Les travaux de recherche et de développement devront se poursuivre afin que puissent être mis au point des dispositifs comparables permettant de détecter la présence et de mesurer la quantité des drogues les plus couramment consommées.

    De par son mandat, le CCLAT est un organisme voué à la recherche. Vous ne serez donc pas surpris que nous soyons fermement convaincus que toute loi ou toute politique publique en la matière se doit d'être fondée sur des résultats scientifiques précis et probants. Il est d'après nous impératif d'entreprendre d'importantes recherches complémentaires afin de mieux cerner le phénomène de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue dans divers sous-groupes de la population. Comme l'ont souligné divers chercheurs et organismes de recherche, il est clair que la situation, le contexte et les circonstances associés à la conduite avec facultés affaiblies par la drogue sont quantitativement et qualitativement différents de ceux associés à la conduite en état d'ébriété et que, dès lors, rares sont les comparaisons directes qui peuvent être établies entre les deux phénomènes. En effet, le nombre de Canadiens consommant de la drogue, toute catégorie confondue, est inférieur au nombre de Canadiens consommant de l'alcool.

    Nos collègues chercheurs au FRBR ont clairement démontré que les risques associés à la drogue sont moindres, en matière de sécurité publique, que les risques que présente pour les Canadiens la conduite en état d'ébriété. J'irai jusqu'à ajouter que les recherches et les statistiques en matière d'accidents semblent démontrer que la combinaison de divers types de drogues, illégales ou non, avec l'alcool présente un danger sérieux en matière de sécurité routière. C'est pourquoi les initiatives en matière de recherche et d'élaboration de politiques sur la conduite avec facultés affaiblies par la drogue ne devraient pas être menées au détriment des initiatives similaires relatives à la conduite en état d'ébriété.

¿  +-(0930)  

    Par ailleurs, le CCLAT recommande que des recherches additionnelles soient entreprises afin de mesurer l'efficacité des mesures de dépistage utilisées sur le bord de la route en combinaison avec des mesures préventives telles que la suspension du permis par la police, le test de sobriété normalisé et le programme d'experts en reconnaissance de drogues, ainsi que celle des programmes et des services de traitement actuellement disponibles sur le marché pour les personnes qui conduisent avec des facultés affaiblies ou qui ont des problèmes de toxicomanie. Ainsi, comme vous le savez peut-être, un certain nombre d'organismes canadiens de premier plan et dont le sérieux ne saurait être mis en doute se sont affrontés sur la question de savoir quelle était, de la suspension administrative du permis ou d'une sanction pénale plus sévère, le meilleur moyen de réprimer les personnes prises à conduire avec des facultés affaiblies par la drogue. D'après nous, et comme dans le cas de l'alcool, les deux options combinées devraient permettre de dissuader les Canadiens de conduire avec des facultés affaiblies par la drogue.

    Par ailleurs, nous croyons qu'il est nécessaire d'évaluer de manière franche et objective les méthodes routières d'évaluation et de dépistage. Il est important de se rappeler que le programme d'expert en reconnaissance de drogue est à la fois lourd et coûteux. Certains de ces éléments peuvent être administrés sur le bord de la route tandis que d'autres doivent l'être dans un poste de police ou dans un autre établissement adapté.

    Si les deux études actuellement disponibles sur le programme ERD semblent indiquer que ce dernier permet d'identifier avec précision les différents types de drogue lorsqu'il est correctement administré par des agents formés, il n'est pas démontré que ce programme, dans sa forme actuelle, soit nécessaire pour fournir aux agents des motifs raisonnables d'exiger le prélèvement d'un échantillon de substances corporelles sans ouvrir la porte à des contestations fondées sur la Charte.

    Nous recommandons que des recherches complémentaires soient entreprises afin d'évaluer l'efficacité du programme d'expert en reconnaissance de drogue et de confirmer la valeur ajoutée que présente cette méthode au regard d'autres méthodes ou approches qui pourraient être disponibles. Bien que le programme ERD semble devoir constituer la procédure d'identification et d'évaluation la plus systématique actuellement disponible, nous osons espérer que les modifications proposées au texte de loi permettront une flexibilité suffisante pour que d'autres approches, moins lourdes et moins coûteuses, puissent être élaborées et mises en oeuvre pour le prélèvement d'un échantillon de substances corporelles.

    Nous vous invitons respectueusement à vous pencher, dans le cadre de vos travaux, sur les répercussions que les modifications du texte de loi envisagé pourraient avoir sur le système de justice pénale, comme nous le savons tous, ce système est déjà engorgé par le nombre de personnes accusées de conduite avec facultés affaiblies en attente d'être traduites devant la justice. C'est pourquoi le projet de loi C-16, en facilitant l'arrestation et la condamnation des conducteurs ayant des facultés affaiblies par la drogue, risque encore d'aggraver la situation d'un système judiciaire déjà surchargé par les cas de conduite avec facultés affaiblies. Nous sommes d'avis que ce fait devrait être anticipé par le gouvernement, qu'il devrait donc augmenter les ressources disponibles en conséquence et assurer un suivi de la mise en oeuvre de ce projet de loi.

    Nous croyons qu'il est également important de souligner que nous ne savons que peu de choses des différents programmes et services de traitement offerts aux conducteurs ayant des facultés affaiblies par la drogue qui souffrent de toxicomanie. Des recherches complémentaires doivent être entreprises afin de déterminer l'efficacité des services de traitement et des modèles d'intervention proposés et la mesure dans laquelle les programmes offerts respectent les critères applicables à un programme efficace, ainsi que des pratiques exemplaires faisant l'objet d'un consensus.

    Il faut mettre sur pied des initiatives qui visent à accroître le personnel de soin et à assurer le transfert des connaissances relatives aux pratiques exemplaires fondées sur l'expérience. L'élaboration d'un programme national de recherche en toxicomanie, dont le CCLAT est l'un des multiples organismes participants, constitue un excellent moyen d'encourager la recherche et de favoriser la mise en application des connaissances acquises.

    Pour conclure, il nous semble clair que toute modification de la loi canadienne qui aurait pour effet d'augmenter le nombre de personnes accusées de conduite avec facultés affaiblies par la drogue aurait d'importantes répercussions sur le système de justice pénale et sur les services connexes, à savoir le nombre d'agents qui, sur le terrain, devront être formés, les laboratoires judiciaires, publics et privés, qui analyseront les échantillons et le personnel judiciaire nécessaire à l'instruction des cas, et ce, sans compter le fardeau supplémentaire que cela pourrait constituer pour les ressources thérapeutiques dans la collectivité qui sont déjà surchargées.

    Je tiens à réitérer que nous apprécions l'occasion que nous est offerte aujourd'hui de pouvoir présenter notre point de vue sur le problème de la conduite avec facultés affaiblies par la drogue au Canada. Merci de votre intérêt. Nous serons heureux de répondre à vos questions.

¿  +-(0935)  

+-

    Le président: Merci, madame Bégin.

    Monsieur  Mann, du Centre de toxicomanie et de santé mentale, vous avez la parole.

+-

    Dr Robert Mann (scientifique chevronné, Centre de toxicomanie et de santé mentale): Bonjour. Je m'appelle Robert Mann. Je suis scientifique chevronné au Centre de toxicomanie et de santé mentale à Toronto et professeur agrégé de sciences de la santé publique à l'Université de Toronto.

    Le Centre de toxicomanie et de santé mentale ou CAMH (Centre for Addiction and Mental Health) est un organisme dont le mandat provincial consiste à effectuer de la recherche, à sensibiliser le public et à participer à l'élaboration de la politique publique en matière de toxicomanie et de santé mentale. Cet organisme compte de nombreuses années d'expérience en promotion de la santé, en traitement et en recherche en ce qui a trait à la consommation de drogues à usage récréatif ou illicites comme le cannabis, la cocaïne et les opiacés. Il dispose de l'information la plus récente concernant l'effet des drogues sur la santé, l'épidémiologie de la consommation de drogues au Canada et les effets des mesures destinées à atténuer les problèmes médicaux et sociaux créés par la consommation de drogues.

    C'est cette information, par exemple, qui permet au Centre de toxicomanie et de santé mentale d'appuyer le projet de loi C-17, qui a pour but de réduire les sanctions pénales imposées pour la possession simple d'une petite quantité de cannabis.

    Le projet de loi C-16 concerne la conduite d'un véhicule sous l'effet de l'une ou l'autre d'une grande variété de drogues, mais je me limiterais surtout à la conduite sous l'effet du cannabis, et ce, parce que c'est la drogue psychoactive la plus souvent détectée, après l'alcool, chez les conducteurs sérieusement blessés ou tués dans une collision.

    Il existe un important corpus de recherche sur les effets du cannabis sur la performance humaine et plusieurs critiques documentées de ces études ont été publiées. Les preuves sont formelles: une dose modérée ou plus grande de cannabis nuit à la conduite d'un véhicule et altère plusieurs aptitudes nécessaires à une conduite prudente. Selon certains auteurs, les lacunes les plus importantes sont observées au niveau de l'attention, du suivi visuel et des aptitudes psychomotrices. Les effets de la combinaison du cannabis et de l'alcool, fréquente chez les consommateurs de cannabis, peuvent s'additionner, les effets étant alors à peu près équivalents à ceux de deux drogues combinées, ou se multiplier, les effets étant alors supérieurs à l'addition des effets des deux drogues.

    Après l'alcool, le cannabis est la drogue psychoactive la plus consommée au Canada. Jusqu'à récemment, l'information sur la conduite sous l'effet du cannabis était rare, mais il est maintenant possible d'obtenir des données canadiennes sur ce sujet. Dans l'ensemble de la population de conducteurs, la proportion de ceux qui disent avoir conduit après avoir consommé du cannabis dans la dernière année est faible, les récentes estimations se situent entre 1,5 et 1,9 p. 100. Il est clair cependant que dans certains sous-groupes de la population de conducteurs, il est beaucoup plus courant de conduire après avoir consommé du cannabis. Quand l'échantillonnage se limite aux consommateurs de cannabis, la proportion de personnes qui disent avoir conduit après avoir consommé du cannabis est considérable, et chez les grands consommateurs de cannabis qui entreprennent un traitement, environ 50 p. 100 disent avoir conduit après avoir consommé au cours de l'année écoulée.

    Les jeunes conducteurs sont beaucoup plus susceptibles de déclarer qu'ils conduisent après avoir consommé du cannabis, et une récente étude effectuée parmi les étudiants ontariens a révélé que 19,3 p. 100 des conducteurs du niveau secondaire ont déclaré avoir conduit dans l'heure qui a suivi la consommation de cannabis dans la dernière année. Il est intéressant de noter que la proportion de personnes déclarant avoir conduit après avoir consommé était plus élevée que la proportion de personnes déclarant avoir conduit après avoir bu.

    Comme nous l'avons vu ci-dessus, après l'alcool, le cannabis est la drogue psychoactive qu'on trouve le plus souvent chez les conducteurs tués ou blessés au Canada et dans bien d'autres pays. Mais pendant bien des années, les chercheurs n'avaient pas de réponse claire à la question de savoir si le cannabis augmentait le risque de collision. Bien que les paramètres de recherche qui permettent d'évaluer l'impact du cannabis sur le risque de collision soient en principe les mêmes que ceux qui servent à évaluer l'impact de l'alcool sur le risque de collision, dans la pratique, il est beaucoup plus difficile de déterminer l'accroissement du risque de collision après consommation de cannabis. Il y a de nombreuses raisons à cela et notamment celle-ci: la quantité de cannabis présente dans le corps est bien faible que dans le cas de l'alcool de sorte qu'il est beaucoup plus difficile de mesurer la présence ou la quantité de cannabis que de mesurer l'alcool. Mais les études plus récentes, bénéficiant de méthodes améliorées, font état d'un risque de collision s'accroissant en fonction de la dose de cannabis consommée. Les résumés de ces travaux concluent donc à une plus grande probabilité de collision pour le conducteur subissant les effets aigus du cannabis.

    Il est donc logique de conclure que conduire un véhicule après avoir consommé du cannabis présente un danger et contribue aux collisions, aux blessures et aux décès sur la route. Les collisions de véhicule sont une cause majeure de décès, blessures et incapacités qu'il est possible de prévenir. Les efforts visant à empêcher les citoyens de conduire après avoir consommé du cannabis sont donc tout à fait justifiés.

¿  +-(0940)  

    Le projet de loi C-16 permettrait à un policier d'obliger un conducteur soupçonné de conduire malgré des facultés affaiblies par une substance quelconque, y compris le cannabis, de se soumettre à un test de sobriété normalisé, le refus étant puni par une déclaration de culpabilité et des amendes équivalentes. Ainsi, ce projet de loi s'inspire des lois canadiennes contre l'alcool au volant, qui contient une règle d'illégalité automatique selon laquelle quiconque conduit avec des facultés affaiblies par l'alcool au-dessus d'un seuil de 80 mg% (selon l'échantillon d'haleine) commet une infraction, et une loi qui fait équivaloir à une infraction le refus de fournir un échantillon d'haleine et fait peser les mêmes conséquences. Il est donc important de voir si ces lois ont permis de remporter un succès quelconque dans la prévention de l'alcool au volant.

    Il existe maintenant passablement de preuves que ces lois en général, et celle du Canada en particulier, ont réussi à contrer l'alcool au volant dans la population et à réduire les taux de collisions et de décès qui lui sont attribuables. Les preuves recueillies à l'échelle internationale sont très probantes en ce qui a trait à leur efficacité et notamment les preuves émanant des pays scandinaves, de l'Australie et des États-Unis.

    Une analyse récente des effets de la limite légale au Canada indique qu'en Ontario cette loi a entraîné une baisse de 18 p. 100 du taux de décès de conducteurs aux facultés affaiblies par l'alcool dans une collision. La recherche appuie donc solidement la stratégie générale de prévention des morts et des blessures résultants de la conduite avec facultés affaiblies à l'aide de mesures légales facilitant la détection et le traitement. Aucune loi n'est parfaite cependant. Même si la limite légale de 80 mg% a eu un effet très important et très positif sur le taux de décès attribuables à l'alcool au volant, la preuve actuelle indique que des centaines d'autres décès pourraient être empêchés chaque année au pays si la limite légale était abaissée à 50 mg%.

    Notre compréhension des effets de lois et de leurs impacts probables sera toujours imparfaite mais la preuve disponible indique que l'adoption de lois pour empêcher la conduite avec facultés affaiblies par les drogues, qui s'inspirent des lois conçues pour empêcher l'alcool au volant, est susceptible de sauver des vies sur la route.

    Par ailleurs, une fois la loi adoptée, il sera important que le gouvernement la fasse bien respecter. La recherche révèle en effet que les lois qui ne sont pas mises à exécution risquent de ne pas réduire le nombre de collisions et de décès et qu'il en va de même si l'on manque de ressources pour soutenir leur mise en application. Pour réaliser l'effet escompté du projet de loi C-16, il sera donc essentiel que le gouvernement fournisse les ressources nécessaires à sa mise en application. Si le gouvernement du Canada choisit d'adopter le projet de loi C-16, il sera important aussi qu'il en fasse une évaluation à long terme rigoureuse. Il devra déterminer si la loi réussit ou non à empêcher de conduire sous l'effet du cannabis et d'autres drogues et quelles sont les améliorations possibles. Une évaluation devra être menée tout au long de la mise en oeuvre de la loi et pendant une période donnée après son entrée en vigueur afin d'évaluer son efficacité.

    En résumé, les preuves scientifiques disponibles indiquent que les effets aigus du cannabis et des autres drogues augmentent le risque de collisions et le Centre de toxicomanie et de santé mentale appuie le gouvernement du Canada dans ses efforts pour prévenir les décès et les blessures causés par les effets de la drogue chez les conducteurs. Le projet de loi C-16 semble reposer sur des principes qui se sont révélés efficaces dans la prévention de la conduite sous l'effet de l'alcool et porte donc la promesse d'une diminution des décès et des blessures sur la route.

    Je vous remercie beaucoup de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.

¿  +-(0945)  

+-

    Le président: Merci beaucoup, monsieur Mann.

    Monsieur White, vous avez cinq minutes, pour la périodes des questions et réponses.

+-

    M. Randy White (Abbotsford, PCC): Merci à tous d'être venus comparaître. J'ai beaucoup de questions pour vous, mais je ne les poserai pas toutes, et je me contenterai donc de faire une observation.

    Je pense qu'au Canada la coordination et le fonctionnement d'une stratégie antidrogue nationale laissent beaucoup à désirer, si tant est qu'une telle stratégie existe. Voilà à mon sens qui explique pourquoi nous sommes ici aujourd'hui en train d'essayer de démêler les divers aspects d'une politique en matière de drogues.

    Dites-moi si vous souscrivez ou non à cet énoncé: il n'y a aucun rapport entre le projet de loi C-17 et le projet de loi C-16. Y a-t-il quelqu'un qui n'est pas d'accord là-dessus, ou que ces deux projets de loi sont sans lien l'un avec l'autre?

[Français]

+-

    M. Tony Cannavino: Je ne peux pas vous dire que l'un ne dépend pas de l'autre, mais je peux vous dire que l'un a déjà eu un effet dévastateur. Je ne ferai pas ce matin le débat sur le projet de loi C-17, mais depuis le dépôt du fameux rapport du sénateur Nolin, on s'est rendu compte — et je voyage régulièrement partout au pays — que les jeunes pensaient que l'on se dirigeait vers une légalisation de la marijuana et une banalisation des effets du cannabis. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les commentaires qu'a faits M. Mann ce matin. Il expliquait en gros l'effet du cannabis et le contexte actuel. Nous avons évidemment certaines appréhensions. Les 54 000 membres que je représente espèrent que le débat se fera éventuellement ou que l'on oublie tout simplement le projet de loi C-17.

    Il reste cependant que le projet de loi C-16 est essentiel. Il y a un carnage sur les routes. On se rend compte que la majorité des accidents entraînant des blessures graves ou des décès sont causés par la conduite sous l'effet de l'alcool, mais également sous l'effet des drogues. Je vous rejoins là-dessus. Lors de toutes les rencontres que nous avons avec les représentants du gouvernement, nous les pressons d'adopter une stratégie nationale soutenue contre la drogue.

    Le projet de loi C-16 est plus qu'urgent pour nous. Si vous l'adoptiez avant la fin de la session parlementaire — même s'il est utopique de penser cela —, les corps policiers et les associations que je représente devraient attendre au moins trois ou quatre ans avant d'avoir suffisamment de personnes ressources. Le processus de formation est long et nous avons besoin d'encore plus de fonds pour nous assurer d'avoir de tels experts dans tous les détachements.

    Vous avez raison de dire qu'un projet de loi peut avoir un effet considérable sur l'autre. C'est effectivement le cas, monsieur White.

[Traduction]

+-

    M. Randy White: Merci.

    Si j'ai soulevé cet aspect—qui l'a d'ailleurs été à de nombreuses reprises au comité—c'est que je vois bel et bien une contradiction, monsieur Mann, dans votre exposé. Vous avez dit à quel point la conduite sous l'effet du cannabis était dangereuse et grave, et pourtant vous préconisez l'adoption du projet de loi C-17.

    J'aimerais maintenant aborder autre chose, à propos de la définition du mot drogue. Il en est question presque chaque fois qu'un témoin comparaît ici; on parle abondamment de l'abus de café, d'aspirine et d'autres substances encore. Dans ce projet de loi, il n'y a aucune définition du mot drogue. L'un ou l'autre d'entre vous voudrait-il tenter de définir ce qu'est une drogue, et dire ce qu'on pourrait en faire dans ce projet de loi.

    En particulier, j'entrevois ici deux possibilités, soit une annexe énumérant des drogues, comme nous le ferions dans tout autre cas, soit un certain type de catégories de substances qui affaiblissent les facultés ou quelque chose ce de genre. Je pense que nous avons tous du mal à voir quelles sont exactement les drogues dont nous parlons, les quantités absorbées, si les gens qui en consomment subissent ou non un affaiblissement de leurs facultés, si la quantité qu'on trouve dans l'organisme de ces gens à ce moment-là provient ou non d'une quelconque autre utilisation à un autre moment.

    La représentante du CCLAT, par exemple.

¿  +-(0950)  

+-

    Mme Patricia Begin: Vous avez raison de dire que le projet de loi ne contient pas de définition du mot drogue, mais je m'aventurais à dire qu'il serait question d'une substance qui aurait un effet psychoactif sur le conducteur, s'il est question du présent projet de loi, une substance qui affaiblirait les facultés, la capacité d'attention et la capacité de maîtriser un véhicule.

+-

    M. Randy White: Quelqu'un d'autre veut-il répondre? David.

+-

    M. David Griffin: Je pense qu'il nous faut conserver une grande latitude. Nous parlons non seulement des drogues illicites qui sont à la mode aujourd'hui, mais aussi de la possibilité d'abus de drogues légales—des médicaments sur ordonnance et des médicaments en vente libre qui pris en dose excessive pourraient affaiblir les facultés. Nous estimons donc qu'il faudrait laisser le projet de loi en l'état. Vraiment, on traite ici de la question de l'affaiblissement des facultés.

    J'aimerais prendre le contre-pied de la déclaration qu'a faite M. Cohen au sujet de la comparaison avec l'alcool et le fait que nous ayons une limite précise quant à la consommation d'alcool, et le fait qu'il a laissé entendre parce que nous n'avons pas de limite précise concernant la consommation de drogues, nous ne sommes pas en mesure de réagir comme il se doit à la question que pose l'affaiblissement des facultés. Pour que quelqu'un soit reconnu coupable de conduite avec facultés affaiblies, la limite précise de consommation a une valeur toute relative. La tolérance à l'alcool et la capacité d'une personne de bien conduire après avoir absorbé une certaine quantité d'alcool peuvent varier grandement d'un sujet à l'autre. Un conducteur dont le taux d'alcool dans le sang dépasse légèrement les 0,08 p. 100 ou même les 0,05 p. 100 peut se trouver dans un état où ses facultés sont beaucoup plus gravement affaiblies que celles d'un conducteur dont les taux sont largement supérieurs, et cela en raison de leur niveau personnel de tolérance à l'alcool, leur consommation d'alcool ou l'effet que l'alcool a sur eux.

    De notre point de vue donc, ce projet de loi porte à juste titre sur l'affaiblissement des facultés et le fait qu'au moyen d'une série de tests on peut montrer que tel conducteur n'est pas apte à conduire, et que les analyses d'échantillons de sang ou de salive ou d'urine confirment ensuite plus ou moins cette conclusion en montrant la présence effective de cette drogue dans le sang du conducteur. Cela ressemble à ce que nous faisons actuellement dans le cas des conducteurs en état d'ébriété. Nous évaluons d'abord leur capacité de conduire puis nous confirmons, par éthylotest, que l'affaiblissement des facultés est attribuable à la consommation d'alcool.

+-

    M. Randy White: Merci.

+-

    Le président: M. Ménard.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard (Marc-Aurèle-Fortin, BQ): Je remercie tous les participants de l'éclairage qu'ils nous ont fourni. Cela a été particulièrement utile, étant donné les milieux dont vous provenez. De plus, j'apprécie toujours les exposés qui font preuve de rigueur scientifique, comme celui de M. Mann, ainsi que d'autres.

    Je dispose de peu de temps. Je vais donc vous poser quelques questions précises afin que vous puissiez nous éclairer.

    Tout d'abord, monsieur Cohen, je remarque que vous avez parlé de plusieurs tests, mais que vous n'avez pas mentionné les tests de sobriété.

    Sur le plan des libertés civiles, croyez-vous que le fait d'imposer des tests de sobriété fiables aux conducteurs que l'on soupçonne de ne pas être en état de conduire constitue un problème?

[Traduction]

+-

    M. Larry Cohen: Pour ce qui est des libertés civiles, je ne vois pas du tout pourquoi on ne les soumettrait pas à des tests de sobriété. Je trouve que c'est parfaitement acceptable, étant donné que cela permet d'évaluer la capacité du conducteur à prendre la route sans que ses facultés soient affaiblies. Cela ne me pose aucune difficulté sur le plan du respect des libertés civiles. Nous n'avons constaté aucune opposition à la pratique courante des forces policières qui consiste à effectuer des tests de sobriété.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Ils ne sont pas obligatoires actuellement. Vous êtes donc en faveur de ces améliorations de la loi. Je comprends très bien.

¿  +-(0955)  

[Traduction]

+-

    M. Larry Cohen: Je n'y vois aucun inconvénient.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Parlons maintenant des tests de sobriété. Une personne qui est soumise à certains de ces tests peut se comporter de façon différente selon son degré de nervosité. Dans certains cas, cependant, la nervosité a très peu d'influence et les tests peuvent donner des résultats fiables.

    Vous semblez partager cette analyse. Ne devrait-on pas se concentrer sur ces tests? On dit que cela a quelque chose à voir avec les yeux, qui ne sont pas affectés.

    Quant aux policiers, êtes-vous en faveur d'une utilisation préférentielle de ces tests?

+-

    M. Tony Cannavino: Je crois que cela se fait en deux étapes, monsieur Ménard. Lors de la première étape, bien sûr, on fait passer les tests de sobriété, communément appelés roadside tests. Ceux-ci fournissent les premiers éléments permettant de savoir si, oui ou non, les facultés de la personne sont affaiblies.

    Lors de l'étape suivante, les experts en reconnaissance de drogues vont plus loin et il y a d'autres tests symptomatiques. Il y a aussi une discussion, une sorte d'entrevue où on évalue la cohésion du langage de la personne qui est arrêtée.

    Je ne suis pas un expert en libertés civiles, mais la Cour suprême a récemment rendu deux décisions portant sur la question de la détention lors de deux causes liées aux facultés affaiblies au Manitoba. On constate que la Cour suprême elle aussi se demande quel est l'objectif visé par les lois. Peut-on restreindre quelques libertés afin d'assurer la sécurité des citoyens? On a statué que, pour les Canadiens, la conduite avec facultés affaiblies constituait un problème majeur. C'est un outil.

+-

    M. Serge Ménard: Monsieur Cannavino, je crois qu'on s'éloigne de la question que je posais, et mon temps est limité.

    J'aimerais vous poser une autre question. J'aimerais vraiment connaître votre opinion et celle des autres. On nous a dit qu'il était techniquement et scientifiquement possible de fournir un échantillon scellé aux individus que l'on soumet au test. Ils peuvent le conserver et le faire analyser par un autre laboratoire s'ils n'ont pas confiance dans les laboratoires gouvernementaux.

    Croyez-vous que cela améliorerait la loi? Je vous rappelle qu'en ce qui a trait à l'alcool, cette possibilité existe déjà, selon la loi actuelle, mais que cette partie n'a jamais été mise en vigueur, même si on a trouvé, depuis son adoption, une façon de conserver des échantillons. Croyez-vous que cette obligation d'offrir un échantillon de la substance devant être analysée à la personne qui se soumet au test améliorerait la loi?

+-

    M. Tony Cannavino: Je répondrai brièvement à cette question. Jusqu'à maintenant, les tests analysés en laboratoire par Santé Canada — dans les cas de reconnaissance de drogues — sont efficaces et égaux partout au Canada. Ces tests sont analysés de la même façon. Les policiers sont satisfaits du travail effectué par ces laboratoires.

    Si on permettait à quelqu'un, du jour au lendemain, d'envoyer un échantillon à un autre laboratoire, il faudrait enquêter sur la méthodologie employée lors de ces analyses. Cela voudrait dire s'engager dans un processus incroyablement lourd qui compliquerait ces causes. Il est reconnu partout au Canada que les laboratoires sont efficaces. Leur méthodologie a été reconnue partout.

[Traduction]

+-

    M. Larry Cohen: D'après notre mémoire, on ne résout pas plus facilement la question de l'affaiblissement des facultés au moment de la conduite automobile parce qu'on dispose des résultats d'analyse de consommation de drogues dont nous parlons ici. Cela n'aiderait pas non plus l'accusé ni la police que d'avoir ces résultats pas plus que d'avoir l'avis professionnel d'un agent de police ou d'un expert en reconnaissance de drogues quant à savoir si les facultés de cette personne sont affaiblies ou non. Cela ne change rien à l'affaire, puisqu'on ne s'entend pas.

    Alors en tout état de cause, peu importe que dans la loi on ajoute la possibilité aussi pour l'accusé de faire prélever lui-même son échantillon. Je ne pense pas que cela ait une incidence sur le plan des libertés civiles.

À  +-(1000)  

+-

    Le président: Quelqu'un d'autre voudrait-il répondre à cette question?

    Dans ce cas, merci, monsieur Ménard.

    Monsieur Comartin, s'il vous plaît.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—Tecumseh, NPD): Merci, monsieur le président.

    Merci à tous les témoins d'être venus comparaître.

    Monsieur Cohen, nous avons entendu d'autres témoignages—et je pense que la question a été soulevée aujourd'hui par vous et par l'Association canadienne de la police provinciale—au sujet du recours aux experts en reconnaissance de drogues aux États-Unis. Dans votre document, vous mentionnez des cas dans les États du Nevada et de Washington, et de la façon dont les tribunaux les ont jugés.

    Je n'ai pas bien saisi. Jusqu'à maintenant, d'après les témoignages que nous avons recueillis—et je pense que c'est ce que disaient les représentants des forces policières aujourd'hui—les tribunaux américains l'ont essentiellement accepté. Toutefois les deux cas que vous mentionnez ici semblent indiquer le contraire.

+-

    M. Larry Cohen: Oui, effectivement. D'après ce que je comprends de la loi américaine, on reconnaît que les experts en reconnaissance de drogues sont en mesure d'évaluer l'affaiblissement des facultés, mais on reconnaît aussi que cette évaluation ne présente pas de certitude scientifique. Autrement dit, on n'a pas de certitude quant à cette opinion, parce que c'est l'opinion de quelqu'un. C'est comme si un médecin vous dit qu'il pense que vous avez peut-être telle maladie et avec le temps son diagnostic pourrait se révéler erroné tout simplement parce qu'on disposera alors d'autres tests ou parce que vous n'aurez pas cette maladie. Ce n'est donc pas prouvé scientifiquement; c'est une question d'opinion, que je respecte.

    La difficulté, comme le souligne notre mémoire, c'est que des études scientifiques montrent par exemple qu'un expert en reconnaissance de drogues peut avoir un taux de 34 p. 100 de faux positifs. C'est-à-dire qu'il conclut en s'appuyant sur les symptômes que présente une personne qu'il y a des drogues dans son organisme alors que ce n'est pas le cas.

    Cela pose donc un problème.

+-

    M. Joe Comartin: Je ne veux pas vous interrompre, mais nous n'avons que peu de temps.

    Ce que j'aimerais savoir c'est si ces deux États, ou d'autres encore, ont le droit de demander un échantillon?

+-

    M. Larry Cohen: J'ai bien peur de ne pas pouvoir répondre.

+-

    M. Joe Comartin: Je pense que M. Weekes veut prendre la parole.

+-

    M. John Weekes (analyste principal de la recherche, Centre canadien de la lutte contre l'alcoolisme et les toxicomanies): Le programme d'expert en reconnaissance de drogues (PERD) est structuré en 12 étapes, paradoxalement. La 12e étape est la fourniture d'un échantillon, d'urine, de salive ou de sang. En somme, donc, l'étape de la confirmation c'est l'analyse. Je pense que c'est la procédure normalisée.

    J'aimerais ajouter que la recherche que j'ai examinée au sujet du programme d'expert en reconnaissance de drogues, notamment les deux premières études—une effectuée en 1995 à la Johns Hopkins University, qui compte parmi les toutes premières études effectuées après la mise au point de ce processus par le LAPD (Los Angeles Police Department) révèle d'assez grands écarts quant à l'exactitude des évaluations de l'affaiblissement des facultés, notamment en ce qui a trait à l'identification de la catégorie de drogues. En fait, l'exactitude de l'identification se situait autour de 50 p. 100. Autant s'en remettre au hasard. Et cette recherche incluait deux instructeurs du programme d'expert en reconnaissance de drogues.

+-

    M. Joe Comartin: Je pense que ce qui m'inquiète dans tout ça c'est que... Disons que je suis juge. Je suis en train de siéger et j'écoute l'expert en reconnaissance de drogues et le rapport de toxicologie qui est à la base d'une cause. Cependant, personne ne peut me dire combien de THC ou de cocaïne ou de toute autre drogue qu'elle soit par ordonnance ou non doit se trouver dans le système d'une personne pour que celle-ci ait des facultés affaiblies.

    J'essaie de comprendre ce qui se passe aux États-Unis s'il s'agit d'un État où à la fois à la demande d'experts en reconnaissance de drogues et de toxicologie est accepté et présentée. Quel en est l'impact à ce moment-là?

+-

    M. John Weekes: D'après ce que je peux comprendre dans les causes où l'accusé a été trouvé coupable, le rapport de toxicologie correspondait à l'analyse de l'expert en reconnaissance de drogues qui estimait qu'il y avait effectivement facultés affaiblies.

+-

    M. Joe Comartin: Ce qui me dérange en tant qu'avocat, monsieur Weekes, c'est que puisque le lien de causalité ne peut pas être établi, pourquoi devrais-je me fier sur ce pourcentage de tant parties par milliard d'une drogue donnée dans l'échantillon sanguin qui sous-tendrait le témoignage de l'expert en reconnaissance de drogues?

À  +-(1005)  

+-

    M. John Weekes: Oui, c'est effectivement difficile de faire ce lien entre l'évaluation et l'analyse. Comme on l'a mentionné plus tôt, et comme l'ont dit d'autres témoins que vous avez rencontrés, qu'est-ce qui constitue les facultés affaiblies par une drogue donnée. Je sais qu'on s'inquiète des libertés civiles, et je crois que vous devez presque avoir l'appui de l'analyse de drogues, l'évaluation des facultés affaiblies, qui est faite de façon satisfaisante par l'expert en reconnaissance de drogues. Je pense que ce n'est pas très exact quand il s'agit d'identification d'une catégorie particulière de drogue. Et je ne suis pas convaincu que ce soit nécessaire d'ailleurs.

+-

    M. Joe Comartin: L'essentiel pour moi...et encore une fois j'en reviens aux États-Unis parce qu'il me semble que ce soit le territoire de compétences le plus près qui nous permette de comparer les choses quand il s'agit d'une loi de la preuve. Ont-ils tendance à se fier trop au rapport de toxicologie comme confirmation?

    Disons que vous êtes juge et vous êtes en train de siéger et vous vous dites « je ne suis pas vraiment sûr de ce témoignage de l'expert en reconnaissance de drogues, mais j'ai ici devant moi une preuve scientifique, et c'est sur quoi je vais fonder ma décision ». Existe-t-il des études qui démontrent qu'on a tendance à trop se fier à ce genre de rapport?

+-

    M. Tony Cannavino: Si vous me permettez, monsieur Comartin, je pense que le processus est en trois étapes. Il y a d'abord le test routier, et ensuite cela est quelque peu confirmé par l'évaluation de l'expert en reconnaissance de drogues, et ensuite il y a l'échantillon de salive, d'urine ou de sang. Il s'agit de trois étapes. Ce n'est pas parce que le type était fatigué, disons, ou qu'il était distrait parce qu'il parlait sur son téléphone cellulaire. Ces trois étapes réunies permettent au juge d'évaluer la nature de la preuve.

    C'est tout cela ensemble. Je pense qu'il faut que la preuve soit appuyée par ces trois étapes.

+-

    M. Joe Comartin: Mais si je suis là à siéger en tant que juge, qu'est-ce qui devrait me porter à croire que cette troisième étape confirme les deux premières?

+-

    M. Tony Cannavino: Pour une raison : même si la personne refuse la troisième étape, je pense que ça devient évident pour le juge. C'est au-delà du doute raisonnable.

    La première étape : il y a doute raisonnable que les facultés de cette personne soient affaiblies. L'évaluation de l'expert en reconnaissance de drogues va encore plus loin. La troisième étape : aucun doute, il y a présence de drogues dans son système.

+-

    M. Joe Comartin: Pour ce qui est de cette troisième étape, tout le monde nous a dit, y compris M. Mann aujourd'hui même, que nous ne connaissons tout simplement pas l'impact des drogues...

+-

    M. Tony Cannavino: Ah, non.

+-

    M. Joe Comartin: ...autant que celui de l'alcool, ou du moins pas avec le même degré de certitude.

+-

    M. Tony Cannavino: Tout d'abord, si le rapport sur l'échantillon de sang ou d'urine ou de salive indique la présence de drogues dans le corps, ou indique un certain niveau de drogues, à ce moment-là comme je vous le disais, le test routier serait la première indication que les facultés de cette personne sont affaiblies. La deuxième partie consiste non seulement à des tests physiques, mais également à une entrevue entre l'expert en reconnaissance de drogues et la personne arrêtée. Cela ira un peu plus loin— par exemple, en confirmant que le dialogue n'est pas tout à fait cohérent. La troisième partie, avec la présence des drogues...

+-

    M. Joe Comartin: C'est ce qui me dérange...

+-

    Le président: Monsieur Comartin, je pense que nous allons devoir passer à autre chose. J'ai été un peu indulgent avec vous.

+-

    M. Joe Comartin: Je vous en remercie, monsieur le président.

    Une voix: Devons-nous aller voter?

+-

    Le président: Je pense que ce n'était que l'ouverture du Parlement. Nous allons continuer jusqu'à ce que la sonnerie se fasse entendre. S'il s'agit d'une sonnerie de 15 minutes, nous continuerons probablement pour les 15 premières minutes.

    Monsieur Macklin.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin (Northumberland—Quinte West, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Je remercie les témoins pour leur comparution ici aujourd'hui. Vous avez soulevé tellement de questions, mais j'aimerais en revenir à une en particulier.

    De plus en plus de gens comparaissent devant nous et nous disent recherche, recherche. Tout ça c'est très bien, sauf que—et j'aimerais que vous m'expliquiez ça—comment fait-on la recherche sur les drogues illégales, en les donnant aux gens et ensuite en procédant à des tests pour ce processus?

À  +-(1010)  

+-

    Dr Robert Mann: Nous n'avons pas nécessairement à administrer ces drogues afin d'examiner l'épidémiologie de l'utilisation des drogues et leur impact sur le risque de collision. Le test normalisé pour évaluer l'impact d'une drogue comme le cannabis ou l'alcool pour le risque de collision ressemblerait à ceci : vous prenez un échantillon des conducteurs blessés ou morts, vous évaluez la présence du cannabis dans leur système, par exemple, et ensuite vous examinez un échantillon témoin. Vous pouvez même assortir une victime de collision individuelle à une personne témoin. Donc vous vous rendrez à l'endroit où la collision a eu lieu, à environ le même moment de la journée, et vous trouvez quelqu'un qui est prêt à fournir un échantillon témoin. Ensuite, vous cherchez la présence de cette substance dans leur système.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Mais en théorie, quand nous utilisions l'éthylotest, les gens consommaient de l'alcool pendant un certain temps et étaient soumis à des tests de conduite automobile, et nous obtenions finalement un résultat arbitraire, une ligne de démarcation qui signifiait, d'accord, une fois qu'on franchit cette ligne, pour la plupart du temps on est dans un état où les facultés sont affaiblies.

    Comment allons-nous finir par établir ce genre de ligne de démarcation si nous voulons le faire dans le cas des drogues illégales?

+-

    Dr Robert Mann: Il est possible d'obtenir la permission de faire consommer du cannabis en situation de laboratoire.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Je pense aussi aux drogues dures.

+-

    Dr Robert Mann: Les opiacés aussi.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Ce que vous dites, donc, c'est que vous pouvez obtenir la permission d'effectuer les tests nécessaires, même avec les plus dures des drogues illégales.

+-

    Dr Robert Mann: Je crois que c'est possible, en principe. C'est difficile, et il vous faut tout mettre en oeuvre pour prouver que ce faisant on ne cause pas de préjudice à qui que ce soit. Mais c'est possible.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Tout le monde dit qu'il faut davantage de recherche, mais quant à moi je me demande comment on va vraiment pouvoir l'effectuer sans causer de préjudice aux sujets qui se prêteront à ces recherches—c'est-à-dire, ceux qui vont prendre ces drogues?

+-

    M. Tony Cannavino: Nous disposerons de nombreux volontaires, j'en suis certain.

+-

    M. Larry Cohen: Je pense que votre question est primordiale. Sans recherche scientifique, il faut s'en remettre à l'avis d'un agent quant au degré d'affaiblissement des facultés, comme c'est le cas maintenant. On n'apportera donc rien de nouveau à moins d'effectuer cette recherche scientifique.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Eh bien, si nous essayons d'établir un essai de base, je serais d'accord avec vous, mais pour revenir à ce que disait M. Cannavino, ce que nous obtenons ici en somme c'est simplement une affirmation. Autrement dit, nous avons déjà pris certaines mesures pour nous assurer que cette personne, à toutes fins utiles, a des facultés affaiblies, et que c'est probablement attribuable à une drogue. Ce dernier test vise au fond simplement à déterminer quelle est la drogue ou les drogues présentes dans son organisme, et pas nécessairement en quelle quantité. Il y a peut-être un lien alors qu'il faut établir afin de vérifier si ce lien, qu'établissait M. Comartin, est vraiment pertinent.

    Selon des témoignages que nous avons recueillis au comité, il semblerait par exemple que dans le cas du cannabis, il y ait une certaine période de temps pendant laquelle on peut effectuer un test pour dépister la présence d'un certain ingrédient actif, qui dévoilerait qu'il y a eu affaiblissement des facultés et montrerait la présence d'une drogue active, et non pas simplement d'un résidu de drogue, dans l'organisme.

    Pourriez-vous le confirmer, monsieur Mann?

+-

    Dr Robert Mann: Je ne suis pas pharmacologiste, mais à ma connaissance, la pharmacologie du cannabis, par exemple, est beaucoup plus complexe que celle de l'alcool. On peut pendant longtemps détecter la présence de métabolites du cannabis dans l'organisme. Certains cannabinoïdes peuvent être détectés dans l'urine longtemps après la consommation de cannabis. Par ailleurs, d'autres métabolites, tant qu'ils sont présents dans l'organisme, pourraient constituer de biens meilleurs marqueurs des changements de comportement attribuables à la drogue.

    Je le confirme donc, oui, c'est le cas.

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: Merci.

    Monsieur Cannavino, pour ce qui est de la formation des formateurs et de l'accréditation des experts en reconnaissance de drogues, croyez-vous que le programme des experts en reconnaissance de drogues et leur formation et leur accréditation garantisse vraiment qu'une fois qu'on a terminé le cours on est un véritable expert en reconnaissance des drogues?

+-

    M. Tony Cannavino: Étant donné la qualité de la formation et vu tous ces tests et examens—je pense qu'il y a huit examens, plus douze exemples de cas confirmés—c'est vraiment une formation solide, oui.

À  +-(1015)  

+-

    L'hon. Paul Harold Macklin: David.

+-

    M. David Griffin: J'aimerais ajouter quelque chose. J'étais auparavant technicien de l'ivressomètre, et j'ai effectué plus de 400 tests.

    La grande confirmation, c'est quand on témoigne au tribunal. Ainsi non seulement ces officiers doivent-ils respecter les normes de formation, ils devront un jour ou l'autre témoigner devant les autorités judiciaires locales et les avocats de la défense et les convaincre de leurs compétences. Je trouve un peu frustrant qu'on dise que, d'une part, nous voulons soutenir que le programme des experts en reconnaissance de drogues ne s'appuie pas sur des données scientifiques sûres, et que nous voulons supprimer le processus de confirmation qui montre que, oui, l'évaluation de l'agent était fondée, parce qu'on a trouvé qu'une certaine quantité de cette drogue était présente dans le sang de la personne en question. L'une des premières questions que posera l'avocat de la défense à l'agent, c'est combien de tests inexacts avec-vous effectués? Si cet agent n'a pas un bon rendement et ne peut pas faire état d'un pourcentage adéquat de tests confirmés au fil du temps, il perdra sa crédibilité et ne pourra plus s'appuyer sur ces cas.

    Je pense donc qu'il y a un élément de protection important dans le processus de confirmation qui garantit que nous ne nous appuyons pas que sur l'évaluation d'un seul agent mais aussi sur la preuve scientifique de la présence confirmée de cette drogue dans l'organisme de la personne en question.

+-

    Le président: Monsieur Weekes.

+-

    M. John Weekes: J'ajouterais qu'une étude effectuée en 1992 par la National Highway Traffic Safety Association—je l'ai ici—montrait que bien que la formation peut être adéquate, la fréquence à laquelle les agents recouraient à des experts en reconnaissance des drogues diminuait nettement au fil du temps, sauf exception. Il y a donc lieu de s'interroger au sujet de l'idée...ou de tenir compte dans tout ce processus des besoins potentiels en matière de ressourcement et de soutien de la formation pour les agents qui reçoivent une formation dans ce domaine technique relativement complexe.

    J'aimerais aussi ajouter qu'une autre façon de confirmer qu'un conducteur a pris de la drogue, c'est de lui poser la question. C'est peut-être parce que je suis psychologue, et que je travaille auprès de clients du service correctionnel, mais nous avons beaucoup d'indices techniques—le nystagmus latéral autour des yeux, et le nystagmus vertical—et bien souvent, surtout quand il est question de drogue, si l'on demande simplement à quelqu'un, surtout si on le fait marcher sur une ligne droite et qu'on lui demande de se toucher le nez et ainsi de suite—“allons donc, qu'est-ce qui se passe?”, ils vont tout simplement vous le dire.

+-

    Le président: Monsieur Mann, avez-vous quelque chose à ajouter?

+-

    Dr Robert Mann: Oui.

    Nous devons nous rappeler que toute mesure comporte un risque d'erreur. Et il faut tenir compte du type d'erreur en question. Je crois savoir que dans le processus proposé, de même que dans le cas de l'éthylotest et d'autres tests, on dispose de mesures très spécifiques. Par exemple, à la fin de ce processus, si vous dites que les facultés d'une personne sont affaiblies par une drogue, nous avons la preuve scientifique qui nous dit que c'est probablement le cas. L'erreur probable c'est que le processus laissera échapper des gens dont les facultés sont affaiblies par des drogues.

    Je suppose qu'au plan des libertés civiles, c'est une erreur qui peut être plus acceptable qu'un taux élevé de faux positif.

+-

    Le président: Merci, monsieur Macklin.

    Monsieur Toews, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Vic Toews (Provencher, PCC): Merci beaucoup.

    C'est bien noté. À force d'entendre tous les témoignages présentés au comité, je commence à m'inquiéter de plus en plus quant à notre capacité de conclure à l'affaiblissement des facultés par les drogues.

    Je sais que dans le cas de l'alcool, naturellement nous pouvons en confirmer la présence grâce à des tests objectifs. Je ne rejette pas le témoignage des agents ici présents, mais nous avons des tests scientifiques objectifs, qu'il s'agisse de dispositifs ALERT ou d'ivressomètres, qui non seulement vous indiquent la quantité d'alcool présent dans l'organisme et qui nous permet d'établir une corrélation avec l'affaiblissement des facultés. De façon générale, chez tout sujet pour qui le taux dépasse les 0,04 p. 100 les facultés sont affaiblies au point de réduire sa capacité de conduire un véhicule automobile, quand il est question d'alcool, mais nous n'avons pas ce genre de certitude dans le cas des drogues. Nous l'avons entendu dire à répétition par notre dernier groupe de témoins, soit que nous pouvons détecter la présence de drogues mais pas nécessairement l'affaiblissement des facultés. Nous devons donc nous en remettre aux témoignages des agents de police.

    Ce qui me préoccupe, et je parle ici en tant qu'ancien avocat de la poursuite, c'est que les procureurs ont depuis longtemps renoncé à intenter des poursuites dans le cas de mise en accusation pour conduite avec facultés affaiblies en l'absence de tests d'ivressomètre. Cela ne donne tout simplement rien. Dans de rares cas, quand un type est littéralement soûl à vomir, on conclut immédiatement à l'affaiblissement de ses facultés. Il est simplement trop soûl pour pouvoir ne serait-ce que souffler dans l'ivressomètre.

    Mais je me demande si ce projet de loi ne porterait pas sur la mauvaise question. Pourquoi nous concentrons-nous sur l'affaiblissement des facultés? Ce n'est qu'une suggestion, mais si nous pouvons détecter la présence d'une quantité substantielle de drogues illégales, que ce soit un opiacé ou de la cocaïne ou de la marijuana, dans l'organisme d'une personne qui conduit un véhicule automobile, que ses facultés soient affaiblies ou non—et c'est pour écarter tout type d'effets fortuits ou de fumée secondaire—ne serait-ce pas là une réponse? Nous dirions simplement—peu nous importe que vos facultés soient affaiblies ou non; vous avez une substance illégale dans votre organisme, vous conduisez un véhicule et c'est à une infraction. Ou quand quelqu'un est trouvé en possession d'une drogue illégale dans son organisme—qu'il s'agisse de marijuana ou de cocaïne ou d'héroïne—et qu'il conduit un véhicule automobile, c'est là l'infraction en question. Peu importe que ses facultés soient affaiblies ou non.

    Y a-t-il lieu de donner suite à une idée comme celle-là?

À  +-(1020)  

+-

    M. Larry Cohen: J'aimerais faire quelques observations à ce propos.

    Cela permettrait de résoudre certains problèmes qui se posent en matière de liberté civile en ce sens que la loi reposerait sur une certitude, et cela ne poserait aucun problème en matière de liberté civiles. L'autre problème auquel vous devez réfléchir, c'est que vous êtes essentiellement en train d'introduire une interdiction au sujet d'une drogue dans une loi qui n'a rien à voir avec les drogues. Il faudrait vraiment que j'examine cette question de près pour voir si c'est possible en vertu du Code criminel...

+-

    M. Vic Toews: Mais étant donné le danger que présente une drogue donnée, l'absorption d'une drogue donnée—que cette drogue soit absorbée ou qu'on l'ait simplement en sa possession. L'agent devrait donc prouver que la personne était en possession de drogues et se trouvait au volant d'un véhicule automobile. Je pense que cela dissuaderait les gens de monter à bord d'un véhicule automobile quand ils transportent la moindre drogue.

    Ce serait un moyen et l'autre moyen consisterait simplement à renoncer à cette idée d'affaiblissement des facultés : on déterminerait qu'il y a une quantité substantielle de drogues illégales dans l'organisme de cette personne et ce serait là l'infraction, nous n'aurions pas à nous préoccuper de savoir si ses facultés sont affaiblies.

+-

    M. Larry Cohen: Je pense que les préoccupations concernant les libertés civiles seraient dissipées si l'on examinait les limites particulières qu'on imposerait et selon la base scientifique qu'on utiliserait pour imposer ces limites. Si ces limites ne reposent pas sur une base scientifique, je ne suis pas sûr que les défenseurs des libertés civiles...seraient d'accord. Mais s'ils l'étaient, je pense que nous le serions. C'est exactement ce que nous recherchons, le même type de certitude que celle qu'offre une limite de 0,08 p. 100.

+-

    Mme Patricia Begin: Je pense qu'une des choses dont il faut se rappeler, c'est que bien qu'on puisse souhaiter faire fi de l'affaiblissement des facultés et se concentrer simplement sur la possession ou l'ingestion d'une substance illicite, il existe de nombreuses substances licites qui peuvent entraîner un important affaiblissement des facultés.

+-

    M. Vic Toews: Oui, qu'il suffise de penser à la codéine que peut contenir un sirop contre la toux.

+-

    Mme Patricia Begin: Exactement.

+-

    M. Vic Toews: C'est pourquoi je dis qu'il doit y en avoir une quantité substantielle. Si quelqu'un avale des bouteilles de codéine, ses facultés peuvent être affaiblies et il peut avoir un niveau élevé, alors je ne sais pas... Mais c'est un problème.

    L'autre question, c'est la possession simple, d'héroïne par exemple, quand on conduit un véhicule automobile. Que la personne se soit piquée à l'héroïne ou en ait ingéré ou pas, c'est ça l'infraction.

+-

    Mme Patricia Begin: Pour ce qui est de la possession, bien sûr, le Code criminel contient déjà des dispositions à ce sujet.

+-

    M. Vic Toews: Oui, mais ce que je veux c'est les empêcher de conduire un véhicule automobile. Nous pourrions faire valoir le fait que cette personne est au volant d'un véhicule automobile et elle serait automatiquement interdite de conduite. Toutes les dispositions concernant la suspension du permis de conduire qui sont contenues dans le Code seraient alors mises en application.

À  +-(1025)  

+-

    Mme Patricia Begin: On irait ainsi au-delà des dispositions existantes du Code criminel en ce qui concerne l'interdiction de conduire après avoir ingéré une drogue?

+-

    M. Vic Toews: Oui. Dès qu'on serait trouvé en possession de drogues, et ayant essentiellement la maîtrise d'un véhicule automobile. Ce serait là l'infraction. L'infraction serait établie, et les interdictions et suspensions prévues au Code criminel et dans les lois provinciales sur la circulation routière s'appliqueraient.

+-

    Le président: Merci, monsieur Toews.

    Monsieur Ménard.

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Ce ne serait pas un crime de consommer une petite quantité de marijuana, mais je ne peux m'empêcher de penser que, si on en consommait, il faudrait attendre 15 jours ou trois semaines avant de conduire une voiture. Ce serait formidable pour le transport en commun!

    Monsieur Mann, vous nous avez bien expliqué la relation entre la consommation de marijuana et la conduite automobile. Savons-nous quelle quantité de marijuana peut nous affecter, et dans quelle proportion? On connaît celle de l'alcool, et même si elle peut varier d'un individu à l'autre, on est certain que plus on en consomme, plus on est affecté.

    Enfin, je pense que vous avez bien compris ma question.

[Traduction]

+-

    Dr Robert Mann: Je dirais que les preuves dont nous disposons nous indiquent que l'affaiblissement des facultés accroît en fonction de la dose. Plus on consomme du cannabis, par exemple, ou d'une autre drogue, plus l'affaiblissement des facultés que l'on constate augmente.

    Les gens prétextent souvent qu'on peut demander quelle quantité de cannabis, par exemple, équivaudrait à quelle quantité d'alcool? Des études indiquent que les effets généraux du cannabis sur quelqu'un qui en consomme une quantité que pourrait prendre un consommateur de drogues social équivalent à l'effet sur le comportement, et peut-être à l'affaiblissement des facultés, qu'aurait la présence d'alcool dans le sang à un taux se situant aux environs de 50 à 100 mg p. 100. Dans des études on a tenté de mettre en rapport la quantité d'alcool présente dans l'organisme et l'affaiblissement des facultés que l'on constate chez les consommateurs de cannabis en tant que drogue sociale. Certaines études tendent à montrer que dans le cas de la consommation de cannabis en tant que drogue sociale, sans qu'on en consomme nécessairement de grandes quantités, on constate le type d'affaiblissement des facultés que l'on décèle quand le niveau d'alcool dans le sang se situe entre 50 mg p. 100 et 100 mg p. 100.

+-

    M. Serge Ménard: Oui, mais « la consommation de cannabis en tant que drogue sociale », c'est une mesure très imprécise.

+-

    Dr Robert Mann: C'est certain.

+-

    M. Serge Ménard: Avons-nous quelque chose de précis, d'aussi précis que le taux de 0,08 p. 100? Je pense que nous le mesurons à raison de quatre parties par milliard. Y a-t-il moyen de mesurer cela dans le sang d'une personne, de dire que cette substance dépasse précisément les quatre parties par milliard? Et est-il vrai de dire que si c'est en deçà de quatre parties par milliard, elle n'a pas suffisamment d'effet?

+-

    Dr Robert Mann: D'après ma compréhension de ces études, ce n'est pas aussi précis que dans les documents portant sur l'alcool. D'après les chiffres que j'ai vus, je crois que généralement on constate l'affaiblissement des facultés lorsque l'on perçoit des niveaux de l'ordre de cinq nanogrammes par millilitre, ou quelque chose comme cela. C'est donc une quantité assez faible, mais on constate l'affaiblissement des facultés à des niveaux comme ceux-là.

    Je n'en suis pas certain; je vais demander à mes collègues du CCLAT s'ils sont au courant de cela.

[Français]

+-

    M. John Weekes: Malheureusement, on n'en a aucune idée.

+-

    M. Serge Ménard: L'effet de la marijuana peut-il être mesuré de façon précise par les tests de sobriété?

[Traduction]

+-

    Dr Robert Mann: À titre d'exemple, une étude récente visait à établir la capacité des tests de sobriété normalisés sur place de détecter une consommation modérée de marijuana. L'étude a conclu que ces tests permettaient effectivement d'établir si l'état de facultés affaiblies était attribuable à la consommation de cannabis. Comme ils ne sont cependant pas aussi sensibles que d'autres types de tests, ils n'ont pas permis de détecter la consommation de cannabis chez un certain nombre de personnes. Leur spécificité toutefois excellente.

À  +-(1030)  

[Français]

+-

    M. Serge Ménard: Il y a un dernier problème qui me préoccupe, monsieur Cohen. Lors de l'évaluation pour les drogues, l'évaluateur parle à la personne, qui lui répond. Ne faut-il pas le limiter dans ce qu'il peut lui demander? On enfreint là le principe voulant qu'on ne puisse pas obliger quelqu'un à collaborer à sa propre condamnation. On ne peut pas forcer quelqu'un à faire une déclaration contre lui-même, n'est-ce pas? Ce serait de l'auto-incrimination.

[Traduction]

+-

    M. Larry Cohen: Si je ne m'abuse, la personne serait tenue de se soumettre à ces tests. Je crois qu'on vous a déjà expliqué comment ils seraient administrés. Leur administration serait régie par des conditions très précises. Je ne peux pas être catégorique à cet égard, mais je pense qu'ils comporteraient la où les questions que vous avez posées.

    Je dois avouer ne pas avoir étudié les questions précises qui sont posées dans le cadre du test, mais nous aurions certainement des réserves quant aux résultats si les mauvaises questions étaient posées. On n'accepterait pas des questions ouvertes auxquelles la personne serait tenue de répondre faute de quoi des accusations pourraient être portées contre elle.

+-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Ménard.

    Monsieur Cullen.

+-

    L'hon. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Je vous remercie, monsieur le président.

    J'aimerais remercier nos témoins d'aujourd'hui.

    Dans le monde complexe dans lequel nous vivons, nous recherchons parfois des solutions simples aux problèmes qui se posent. Nous souhaitons des solutions simples. Or, cela nous amène parfois à simplifier les choses à l'excès. J'aimerais à titre personnel remercier l'ACPP de m'avoir rappelé les points essentiels qui se rapportent à cette loi.

    Le débat scientifique m'intéresse, mais je crois que le processus qui nous occupe comporte trois étapes... il y a d'abord constatation du fait qu'une personne conduit son véhicule d'une façon qui n'est pas normale. Deuxièmement, un test de sobriété administré sur place confirme que la personne n'est pas sobre. Ce premier test est suivi d'une analyse sanguine ou d'une analyse de la salive pour confirmer ou rejeter, mais sans doute le plus souvent confirmer, les résultats du premier test. Il y a donc trois étapes.

    Je simplifie peut-être trop les choses, mais je pense que le fait d'établir le niveau de concentration ainsi que le temps depuis lequel la drogue a été consommée vise à confirmer les résultats du premier test. S'il est nécessaire que nous poursuivions les recherches sur la question de la concentration, la durée des effets ainsi que l'existence de résidus, j'aimerais que nous revenions à la façon dont vous avez présenté le processus.

    Si nous avions du temps—ce qui ne sera sans doute pas le cas—, j'aimerais que nous revenions à l'un de mes thèmes favoris, soit celui des récidivistes. Je sais que l'ACPP a sans doute fait des recherches sur cette question. Je crois qu'il appartient surtout aux instances provinciales de sanctionner les récidivistes. En fait, cette question va peut-être au-delà de la portée de ce projet de loi.

    Messieurs Cannavino et Griffin, vous avez fait certaines recommandations précises. Vous avez notamment proposé qu'on autorise la police à enregistrer sur bande vidéo l'administration des tests de sobriété et des tests de reconnaissance des drogues. Vous dites que le projet de loi C-16 ne le permet pas pour l'instant, bien que vous ne fassiez pas cette observation dans ce contexte particulier.

    Qu'est-ce qui s'opposerait à ce que le projet de loi C-16 permette cet enregistrement vidéo? Qu'est-ce qui empêcherait la police de filmer l'administration des tests et de se servir de la bande comme preuve?

+-

    M. David Griffin: Certains services policiers filment déjà l'administration de ces tests. Des questions se posent quant à la recevabilité de cette preuve. Nous voudrions que le projet de loi précise si cette preuve est recevable ou non.

À  +-(1035)  

+-

    L'hon. Roy Cullen: A votre avis, serait-il possible de le faire dans le projet de loi C-16?

+-

    M. David Griffin: Oui, nous pensons que c'est dans ce projet de loi qu'il conviendrait de le faire. Selon la situation, la preuve serait disculpatoire ou inculpatoire. De façon générale, les sondages effectués auprès des juges, des policiers et des avocats de la défense révèlent qu'ils sont tous favorables à ce genre de preuve en raison de son degré de certitude plus élevé.

    Nous nous demandons s'il convient vraiment de rendre ces enregistrements vidéo obligatoires puisque cela entraîne des conséquences au plan des ressources et que les circonstances peuvent dans certains cas ne pas s'y prêter. Nous ne voudrions donc pas que des accusations soient rejetées pour la simple raison qu'un enregistrement vidéo n'a pas été fait. Nous pensons cependant que la technologie est utile dans ce genre de cas et présente des avantages au point de vue sécurité pour les policiers et fiabilité pour la poursuite.

    Nous sommes fortement favorables à un amendement de ce genre.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Je vous remercie.

    Au point cinq de votre mémoire, vous affirmez que le projet de loi C-16, dans sa forme actuelle, empêcherait les autorités provinciales et territoriales de s'appuyer sur les tests de sobriété sur place et de reconnaissance des drogues pour suspendre immédiatement ou pour une durée de 90 jours le permis. À votre avis, serait-il possible de corriger ce problème en amendant le projet de loi C-16? Devons-nous être conscients de certains obstacles qui pourraient être créés par l'adoption du projet de loi?

+-

    M. David Griffin: Oui, et je crois que les témoins provenant de Mothers Against Drunk Driving ont déjà soulevé cette question. Nous partageons certainement la préoccupation exprimée par certains témoins étant donné les restrictions qui s'appliquent quant à l'utilisation qui peut être faite de l'information recueillie. Si nous comprenons la raison d'être de ces restrictions, nous ne pensons pas qu'il faudrait interdire que les autorités provinciales s'appuient sur ces éléments de preuve pour suspendre le permis de conduire d'une personne ou pour l'assortir de certaines conditions.

    Après avoir parlé de la question avec les représentants du ministère, je crois qu'ils ont aussi signalé le problème qui se pose à cet égard et qu'ils comprennent la préoccupation exprimée par divers intervenants.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Je vous remercie.

    Me reste-t-il deux ou trois minutes?

+-

    Le président: Non, monsieur Cullen, vous avez épuisé votre temps jusqu'à la dernière seconde.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Jusqu'à la dernière seconde? Ce sera donc pour une autre fois.

+-

    Le président: Monsieur Breitkreuz.

+-

    M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, PCC): Merci.

    J'aimerais traiter de deux questions différentes. Certains témoins ont fait valoir qu'un projet de loi devrait comporter un processus d'examen. Nous pensons que ce processus devrait être obligatoire dans le projet de loi. J'aimerais connaître votre avis là-dessus.

    À votre avis, quelle forme devrait prendre l'examen en vue d'établir l'efficacité de la loi? Quelle devrait être la portée de cet examen? Certains d'entre vous ont dit qu'il faudrait augmenter les ressources affectées à l'application de la loi. Dans le cadre d'un processus d'examen visant à établir l'efficacité de la loi, faudrait-il se demander si les ressources affectées à l'application de la loi sont suffisantes? Le rôle des tribunaux doit-il faire partie de cet examen? Si nous adoptons le projet de loi C-17, cela pourrait avoir une grande incidence sur la question de la conduite avec facultés affaiblies au Canada. Quelle devrait être la portée de cet examen et à quel intervalle devrait-il être prévu?

    Vous pouvez tous répondre à cette question.

+-

    Mme Patricia Begin: Quand il s'agit d'établir l'impact de changements législatifs, il faut notamment tenir compte de la mise en oeuvre de la loi ainsi que de ses résultats. Il est bien évident que la question des ressources influe beaucoup sur la mise en oeuvre de changements législatifs comme ceux qui sont proposés. Il faudrait prévoir une formation adéquate pour les agents de police ainsi que les ARD et il faudrait aussi veiller à ce que les tests de toxicologie puissent être faits rapidement. Il faudra ensuite établir l'impact général de la loi sur l'administration de la justice, soit sur les poursuites intentées.

    Je pense donc qu'il faudrait envisager un processus de mise en oeuvre ainsi qu'une évaluation des répercussions de la loi.

À  +-(1040)  

+-

    M. Larry Cohen: Je suis certainement d'accord avec l'idée qu'il faut évaluer les répercussions de la loi. Je ne suis pas un scientifique, et je ne peux donc pas me prononcer sur les enjeux scientifiques, mais nous présumons que les avocats de la défense vont insister sur le caractère incertain au plan scientifique des résultats des tests de consommation de drogues. Je crois que leurs efforts seront couronnés de succès étant donné l'absence de preuves scientifiques irréfutables.

    La question qu'il faudrait se poser dans le cadre d'un processus d'examen, c'est de savoir dans quelle mesure les condamnations obtenues s'appuient sur le résultat des tests de reconnaissance des drogues après que les avocats de la défense auront fait de leur mieux pour en contester la validité. Voilà ce que je suggérerais.

+-

    M. Tony Cannavino: Nous serions favorables à un examen quinquennal de la loi. Je pense qu'il importerait après cinq ans de voir quelles sont les répercussions de la loi et s'il convient de la modifier.

    Je ne sais pas ce qui se produira au moment du premier examen dans cinq ans. Comme je l'ai déjà dit, ce qui importe, c'est d'obtenir les fonds nécessaires pour former autant d'ARD que possible. Cette importante formation est longue et exigeante. Le premier examen ne sera peut-être pas très exact étant donné que nous n'aurons pas toutes les ressources voulues pendant un certain temps, mais il permettra de déceler une tendance.

    Je crois qu'il faudrait qu'il y ait un autre examen cinq ans après le premier pour que nous puissions nous faire une idée exacte de l'impact de la loi.

+-

    M. Garry Breitkreuz: Je vous remercie. Je suis sûr qu'il faudrait nous demander dans quelle mesure les tribunaux ont appuyé le travail des policiers. Cette question se pose aussi dans d'autres domaines.

    J'aimerais maintenant poser une autre question et j'espère avoir suffisamment de temps pour le faire.

    Est-il possible de concevoir des tests de sobriété pour lesquels il ne serait pas nécessaire de faire des prélèvements d'échantillons de liquides corporels? D'autres témoins nous ont dit qu'il existe d'autres signes indiquant une conduite avec facultés affaiblies. Certains d'entre vous ont dit qu'il était difficile d'attribuer l'état de facultés affaiblies à la consommation de drogues. D'autres ont dit qu'on pourrait établir l'état de facultés affaiblies par des tests comportant des mouvements oculaires, l'exécution de certaines tâches motrices simples et la réaction à des stimulus et à l'environnement.

    Pensez-vous qu'il est possible de concevoir des tests scientifiquement valables dans ce domaine sans avoir recours aux prélèvements d'échantillon de liquides corporels? Y a-t-il des recherches en cours actuellement pour concevoir ce genre de tests?

+-

    Dr Robert Mann: Je crois qu'il serait possible de concevoir ce genre de tests et que des recherches sont en cours pour le faire. Je vous signale cependant que les mesures qui sont proposées dans ce projet de loi comme les tests de sobriété normalisés sur place ainsi que les programmes d'experts en reconnaissance de drogues se fondent sur ce genre de reconnaissance. Nous savons maintenant comment ces substances influent sur diverses fonctions qui sont mesurées au moyen de ce test. C'est sur ce quoi repose...

+-

    M. Garry Breitkreuz: Les preuves recueilles de cette façon sont-elles recevables devant un tribunal?

+-

    Dr Robert Mann: Je crois comprendre qu'elles le sont ailleurs. C'est la meilleure réponse que je peux vous donner.

+-

    Le président: Je vous remercie, monsieur Mann.

+-

    M. David Griffin: Je ne pense pas qu'elles suffiraient à elles seules. Je crois que c'est ce que M. Toews a établi par les questions qu'il a posées.

    Je crois que c'est un peu comme un médecin du service d'urgence qui évalue l'état d'un patient à partir de certains symptômes physiques, mais qui a ensuite recours à un test pour confirmer son évaluation initiale.

+-

    M. Larry Cohen: Je reviens au problème qu'a soulevé M. Comartin. Si l'on ne peut pas établir un lien entre les résultats du test et la durée ou le niveau de l'état de facultés affaiblies, à quoi auront vraiment servi l'évaluation de l'expert en reconnaissance de drogues ou le test de sobriété sur place? À mon avis, à rien du tout, mais on aura porté atteinte à la vie privée de la personne visée.

À  +-(1045)  

+-

    Le président: Je vous remercie.

    Madame Neville.

+-

    Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Je remercie tous nos témoins de leur présence. Nous attendons tous de voir ce qui va se passer et nous attendons aussi que les cloches retentissent pour ainsi dire.

    J'ai deux questions à poser.

    J'ai lu votre mémoire avec attention, monsieur Cohen, et vous parlez à la page six de l'évaluation des ERD. Vous dites vous inquiéter du fait que cette évaluation ne se fonde pas seulement sur des données physiologiques, mais aussi sur un jugement de type moral ou autre en matière d'anormalité. Vous trouvez que c'est inacceptable. Vous ajoutez par la suite que la seule véritable façon de juger si une personne conduit un véhicule avec des facultés affaiblies est d'évaluer son comportement.

    J'aimerais savoir comment vous conciliez ces deux affirmations. Vous n'êtes pas favorable à la partie suggestive du travail des ERD, mais vous insistez ensuite sur l'importance du comportement. Pourriez-vous m'expliquer votre point de vue.

+-

    M. Larry Cohen: La façon dont je vois les choses, c'est que lorsqu'une personne évalue une situation, elle tient compte de tous les facteurs qui interviennent. Plus la personne connaît bien son domaine, plus elle peut exclure les facteurs qui n'ont pas d'importance et qui sont surtout liés à sa personnalité. Il est beaucoup plus difficile d'évaluer les facteurs psychologiques que de savoir si une personne peut ou non marcher sur une ligne droite.

    Il existe différents niveaux de certitude en ce qui touche le jugement d'un expert. Si l'on donne une formation psychologique à un agent de police pour qu'il puisse reconnaître les conducteurs en état d'ébriété, son jugement sera moins exact que si on lui donne une formation lui permettant d'établir si une personne peut marcher ou non sur une ligne droite.

    Il y a donc plusieurs facteurs qui doivent être pris en compte au moment de l'évaluation. C'est ce qui fait que ce n'est pas facile pour les agents de police ni pour les tribunaux d'établir si une personne conduisait avec les facultés affaiblies.

    Je n'ai pas de réponse à cette question. J'ai été avocat de la défense et c'est ce que j'ai constaté. C'est la meilleure façon que je peux vous expliquer ce que j'ai dit dans mon mémoire.

+-

    Mme Anita Neville: Je vous remercie.

    Allez-y.

+-

    M. Tony Cannavino: Je vous remercie.

    Vous posez la question de savoir pourquoi cette dernière étape est nécessaire. C'est comme lorsqu'une personne en tue une autre, même si le meurtrier admet son crime, les agents de police ainsi que les tribunaux doivent faire la preuve de sa culpabilité. Il y a d'abord le rapport balistique et tous les spécialistes doivent donner leur avis sur le crime. Une personne ne peut pas être condamnée pour un crime simplement parce qu'elle admet l'avoir commis.

    La même chose vaut dans ce cas-ci. Toutes ces étapes sont nécessaires. Les tribunaux sont très exigeants. Ils veulent être sûrs que leurs décisions se fondent sur une analyse de tous les faits. Ils veulent obtenir toute l'information pertinente. On commettrait une erreur en éliminant une étape. Comment pouvons-nous prouver qu'une personne a consommé des drogues? Si un test établit que des drogues se trouvaient dans son corps, cette personne ne pourra pas nier qu'elle a consommé des drogues.

+-

    Mme Anita Neville: Ce qui m'inquiète, c'est cette question d'incohérence et de subjectivité.

    J'aimerais maintenant poser une autre question, et elle s'adresse à MM. Weekes et Mann.

    Quelqu'un a fait observer que le projet de loi ne comporte pas une liste des drogues. Vos recherches ont-elles permis d'établir quelles sont les combinaisons de drogues qui créent un état de facultés affaiblies? Nous n'avons pas discuté de cet aspect-là de la question. J'ai l'impression que la combinaison de drogues ainsi que les circonstances de vie d'une personne peuvent avoir un impact. Je m'intéresse à la combinaison de drogues.

À  +-(1050)  

+-

    M. John Weekes: C'est un domaine pour lequel il nous manque des données. Que cela nous plaise ou non, les premières recherches sur l'interaction des drogues ont porté sur les interactions les plus évidentes entre les différents types de drogues illégales avec les médicaments ou les drogues légales et avec l'alcool. Il nous reste encore beaucoup de choses à apprendre.

    Je ne sais si vous voulez ajouter quelque chose.

+-

    Dr Robert Mann: Oui. On nous a posé une question plus tôt sur la difficulté qu'il y a à administrer des drogues illicites dans des conditions de laboratoire. Vous pouvez vous imaginer que c'est encore plus difficile d'administrer deux drogues illicites dans les mêmes conditions. Les recherches sont difficiles. Les recherches dont nous disposons nous indiquent que les drogues ont habituellement un effet cumulatif et parfois multiplicatif de sorte que deux drogues consommées ensemble peuvent avoir un effet plus important que l'une et l'autre consommées individuellement.

+-

    Mme Anita Neville: Il peut donc s'agir de drogues illicites comme de drogues licites.

+-

    Dr Robert Mann: C'est juste.

+-

    Mme Anita Neville: Je vous remercie.

+-

    Le président: Je vous remercie.

    La seule personne qui a dit vouloir poser une question au cours de cette quatrième ronde de questions est M. Cullen.

    Monsieur Cullen.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Je vous remercie.

    Je voulais revenir à la question des récidivistes. Comme n'importe qui d'autre, je lis parfois dans les journaux qu'une personne a été arrêtée pour conduite en état d'ébriété. Cette personne a parfois tué quelqu'un d'autre sur la route et une fois les vérifications d'usage faites, on constate que son permis de conduire a été suspendu parfois à cinq, six ou sept reprises. Il arrive aussi souvent que cette personne conduit sans permis et je ne sais pas comment on peut régler ce problème puisque c'est après coup qu'on apprend que la personne conduisait sans permis.

    La question que je pose relève sans doute davantage de la compétence des provinces, mais peut-être que l'ACPP et d'autres intervenants pourraient nous dire—peut-être que l'ACPP pourrait commencer la discussion—ce qu'indiquent leurs recherches à l'égard des récidivistes qui conduisent en état d'ébriété après avoir consommé des drogues ou de l'alcool? Les recherches indiquent-elles que les pires accidents sont causés par des récidivistes?

    Si nous sommes honnêtes, je pense que nous admettrons tous que nous avons une ou deux fois dans notre vie conduit un véhicule alors que nous n'aurions pas dû le faire. Je doute cependant que nous ayons alors dépassé le niveau de tolérance prévu. La personne qui commet une erreur une fois dans sa vie doit tout de même être sanctionnée, mais j'ai l'impression que ce sont les récidivistes qui posent vraiment des risques pour la société.

    J'aimerais connaître votre avis sur cette question.

+-

    Mme Patricia Begin: Les recherches que nous avons étudiées indiquent que le pourcentage des conducteurs qui sont des récidivistes est très faible, mais que se sont à ces personnes qu'il faut attribuer une grande partie des accidents qui surviennent sur les routes, que ces accidents soient mortels ou non.

    Quand on prend des sous-groupes de conducteurs comme les consommateurs de cannabis, je crois qu'on trouve un taux de récidive élevé chez les jeunes hommes.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Quelqu'un d'autre veut-il ajouter quelque chose?

+-

    Dr Robert Mann: Les données dont nous disposons indiquent que les personnes qui finissent par être accusées et ou condamnées pour conduite en état d'ébriété ont probablement conduit avec les facultés affaiblies des centaines de fois auparavant.

+-

    L'hon. Roy Cullen: L'information dont nous disposons montre qu'il est très difficile d'obtenir une condamnation pour conduite avec facultés affaiblies en raison de la jurisprudence qui existe dans ce domaine. Les personnes qui sont accusées de cette infraction ont parfois les moyens de se payer des avocats de haut niveau de sorte que la jurisprudence est très complexe et difficile à contourner.

    Je me demande aussi si cette difficulté est liée aux sanctions ou aux compétences provinciales. Qu'est-ce qui empêche les autorités routières provinciales non pas d'incarcérer ces gens, mais au moins de les priver de leur permis de façon graduelle? Si les gens conduisent sans permis, on n'y peut pas grand-chose. C'est habituellement après coup qu'on s'en aperçoit, à moins qu'il leur soit interdit de conduire sur l'autoroute.

    Est-ce une question de compétence provinciale, Tony ou David?

À  +-(1055)  

+-

    M. David Griffin: Cette préoccupation a certainement déjà été exprimée, mais je ne pense pas que ce soit un risque supérieur à celui que posent d'autres groupes comme les jeunes qui peuvent avoir consommé à la fois de l'alcool et des drogues.

    Il s'agit d'un défi pour tous les paliers du gouvernement. On pourrait priver une personne de son permis à vie ou on pourrait aussi recourir à des appareils qui empêchent une voiture de démarrer si son conducteur a consommé de l'alcool. Il y a toujours une solution de rechange. Si des personnes veulent cependant à tout prix conduire un véhicule quand elles ont consommé de l'alcool ou des drogues, à moins de les surveiller constamment ou de les incarcérer, il est très difficile de les empêcher de le faire.

+-

    L'hon. Roy Cullen: Je vous remercie.

+-

    Le président: Monsieur Moore posera la dernière question.

+-

    M. Rob Moore (Fundy Royal, PCC): Je vous remercie.

    J'aimerais dire à l'ACPP que les chiffres s'appliquant au Québec m'ont beaucoup surpris. Vous avez dit que parmi les conducteurs qui sont morts dans un accident, 22,6 p. 100 d'entre eux avaient consommé de l'alcool, 17,8 p. 100 des drogues, et 12,4 p. 100 des drogues et de l'alcool. On voit donc qu'un pourcentage très important de ces personnes impliquées dans un accident mortel avaient consommé des drogues.

    Certaines preuves établissent que la consommation de drogues influe sur les capacités d'un conducteur, mais il est difficile de le prouver au moyen de ces tests. Je me demande ce que vous pensez...

    M. Toews a déjà soulevé cette idée. Supposons qu'on soupçonne une personne d'avoir consommé des drogues et qu'elle ait échoué un test de sobriété sur place. Que diriez-vous si ce simple fait constitue une infraction et qu'il ne soit pas nécessaire de prouver quoi que ce soit d'autre?

+-

    M. Tony Cannavino: La raison pour laquelle nous disons qu'il est important de prouver qu'il y a conduite avec facultés affaiblies, c'est que lorsque nous interceptons une voiture, nous devons avoir des motifs raisonnables de croire que la personne qui conduit a les facultés affaiblies. Il peut s'agir de la façon dont la personne conduit sa voiture. Si nous arrêtions une personne et que nous lui faisions subir des tests simplement parce que c'est une personne que nous voyons souvent en compagnie de drogués, je ne pense pas me tromper en disant que cette décision serait contestée à tous les niveaux. Cette décision serait certainement contestée.

    Voilà pourquoi nous devons chercher à prouver qu'il y a conduite avec facultés affaiblies. C'est absolument essentiel.

+-

    M. Rob Moore: C'est qu'il semble très difficile de le faire. Il est bien évident qu'un agent de police arrête une personne pour une raison précise. C'est parce que vous soupçonnez qu'elle a du mal à conduire. Ce projet de loi semble aussi ne pas vous faciliter la chose.

    Vous recommandez « de prolonger les présomptions temporelles de deux à trois heures ». Je me suis souvent interrogé là-dessus. Lorsqu'il y a un accident majeur, et que l'on dispose de ressources limitées, deux heures c'est très court. Pensez-vous que trois heures suffiront?

    Si nous avons le temps, monsieur le président, j'aimerais savoir si quelqu'un s'opposerait à cette recommandation de l'association?

+-

    M. David Griffin: Selon nous, le délai de trois heures ferait correspondre la présomption au délai dans lequel le policier peut exiger la prise d'échantillons. On a trois heures pour l'exiger, mais seulement deux heures... Le résultat serait présumé refléter le taux de concentration au moment de l'accident, ou au moment où la personne a été arrêtée. Nous ne cherchons donc qu'à combiner et à coordonner cela.

    Nous croyons qu'il s'agit simplement d'un oubli, peut-être, le fait d'avoir prolongé le délai dans lequel on pouvait exiger la prise d'échantillons sans prolonger la présomption en même temps. Et nous n'y voyons vraiment pas de désavantage pour la personne, puisqu'en fin de compte, plus on attend, plus le taux baissera, surtout lorsqu'on compare de passer de deux à trois heures avec une prolongation d'une à deux heures.

Á  -(1100)  

+-

    M. Rob Moore: Est-ce qu'il y a quelqu'un d'autre qui s'inquiète à propos de cette recommandation?

    Très bien. Merci.

-

    Le président: Merci.

    Ceci met fin à notre séance de ce matin. Merci beaucoup d'avoir été là.

    Je demanderais aux membres de patienter. Il nous reste 19 minutes, et nous avons quelques points d'ordre administratif à traiter.

    Encore une fois, merci beaucoup à nos témoins. Nous vous savons gré de vos observations.

    [La séance se poursuit à huis clos.]