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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 036 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 29 novembre 2010

[Enregistrement électronique]

  (1540)  

[Traduction]

    Nous souhaitons la bienvenue à tous les membres de l'équipe du commerce international qui revient au Canada.
    Nous avons quelques affaires à régler, mais nous pouvons tenter de le faire à la fin de la séance d'aujourd'hui. Ce n'est rien d'urgent. Nous nous en occuperons mercredi si nous n'avons pas le temps. Il s'agit seulement de quelques questions techniques à éclaircir.
    Il y a aussi le rapport de la visite faite au Parlement européen et à l'Union européenne. J'aimerais que le comité se réserve cinq ou dix minutes pour donner des directives plus précises aux analystes et au greffier au sujet de la préparation du rapport. Nous allons le faire s'il nous reste du temps à la fin de la réunion. Sur ce, je vais arrêter d'empiéter sur le temps de nos témoins, qui ont fait preuve de beaucoup de patience jusqu'à maintenant. Pardonnez-moi le lent départ aujourd'hui.
    Nous accueillons Jamie Kneen, coordonnateur des communications de Mines Alerte Canada.
    De Panama, nous accueillons par vidéoconférence Donald-Fraser Clarke, directeur général de Clarke Educational Services.
    Nous allons procéder comme nous avons l'habitude de le faire. Je vais demander à chaque témoin de présenter une déclaration préliminaire pour exposer son point de vue. Les témoins nous rendent un fier service lorsqu'ils le font en moins de 10 minutes. Ensuite, nous ouvrirons le dialogue en amorçant une série de questions de nos membres après cette brève introduction.
    Je vais demander au représentant de Mines Alerte Canada de commencer. Nous poursuivrons immédiatement avec M. Clarke. Ensuite, nous passerons aux questions.
    Maintenant que j'ai terminé cette brève introduction, je vais demander à M. Kneen de commencer. Vous pouvez vous présenter plus en détail si vous le voulez.
    Bonjour, mesdames et messieurs. J'aimerais vous remercier de m'avoir donné la possibilité de vous transmettre nos observations relatives à l'accord de libre-échange entre le Canada et le Panama. Comme j'ai reçu l'invitation très récemment, je suis désolé de vous annoncer que nous n'avons pas eu l'occasion de préparer un mémoire plus étoffé ou de le soumettre à l'avance pour le faire traduire. J'ai déposé une quantité imposante de documents à l'appui auxquels je renvoie dans mon mémoire et que les membres ou les attachés de recherche pourraient trouver utiles dans leurs travaux.
    Mines Alerte Canada est une coalition pancanadienne d'organismes environnementaux et autochtones, d'organismes de promotion de la justice sociale, d'agences de développement et de syndicats qui mène des travaux de recherche et milite en faveur de l'application des pratiques et de politiques d'exploitation minière responsables au Canada et par les sociétés canadiennes à l'étranger. Nous travaillons avec des collectivités touchées par les activités canadiennes d'exploitation minière partout dans le monde, avec des experts et des organismes qui tentent de s'assurer que les investisseurs du secteur minier sont comptables aux collectivités touchées et respectent les normes internationales visant la protection de l'environnement ainsi que la protection des travailleurs et la reconnaissance des droits des peuples autochtones. L'investissement canadien dans le secteur minier du Panama suscite la controverse depuis les années 1990, et Mines Alerte surveille la situation depuis sa création, en 1999.
    De toute évidence, notre propos ne se rattache pas au commerce des noix et des bananes, des services financiers ou d'un autre secteur visé par cet accord de libre-échange. Nombre de dispositions de l'accord peuvent sembler positives au néophyte. Toutefois, les dispositions de l'accord relatives à l'investissement peuvent donner lieu à de graves difficultés, surtout sur le plan de la planification et de la protection environnementales. Peu de choses donnent à penser que l'accord parallèle sur l'environnement aura une quelconque incidence positive sur ces enjeux.
    En outre, il est impossible de jauger l'incidence environnementale de l'accord en soi, puisque l'évaluation environnementale finale n'a toujours pas été publiée et n'a peut-être même jamais été terminée. On était censé la publier à la conclusion des négociations relatives à l'ALE.
    Le rapport accessible au grand public, qui traite de l'évaluation environnementale initiale, est presque dénué de tout contenu significatif. Les auteurs du rapport reconnaissent que le principal effet de l'ALE sera probablement la protection accrue des investissements canadiens existants au Panama, mais ils font complètement fi des répercussions environnementales de cette protection. Malgré une transformation des marchés des produits de base et des tendances en matière d'investissement qui étaient évidentes à l'époque, selon le rapport, « on ne prévoit pas de changements considérables dans les mouvements des investissements par suite de la conclusion de l'ALE. En conclusion, les effets environnementaux découlant de l'ALE entre le Canada et le Panama seront donc minimes, voire nuls. »
    Ces affirmations n'ont d'autre fondement que la déclaration selon laquelle il y a eu peu de changements depuis que l'Accord sur la promotion et la protection des investissements étrangers a été conclu en 1998 par le Canada et le Panama.
    Toutefois, compte tenu de la croissance du prix des produits de base — surtout dans le secteur des métaux — de l'intérêt croissant et des engagements d'investissement existants, il serait plus raisonnable de prévoir que l'ALE donnera lieu à une augmentation de l'investissement canadien dans le secteur minier au Panama, ce qui entraînera d'importantes conséquences environnementales qui auraient dû être prises en compte dans le cadre de l'évaluation environnementale.
    L'une des propositions actuelles, le projet d'extraction de cuivre à ciel ouvert Cobre Panamá de la société Inmet Mining, dans la concession de Petaquilla, à l'ouest de Panama, doit donner lieu à la déforestation de quelque 5 900 hectares, principalement dans la forêt tropicale humide primaire, au milieu du corridor biologique méso-américain. Ce projet, d'une valeur de 4,3 milliards de dollars, était connu avant les négociations de l'ALE et la fin de l'évaluation environnementale.
    Sur la même concession, la mine d'or Molejón de Petaquilla Minerals, société appartenant à des intérêts canadiens, a suscité une vive controverse en provoquant des divisions dans les collectivités avoisinantes; on l'a accusée à maintes reprises de déforestation et de contamination de rivières locales et, de fait, on lui a infligé une amende de presque deux millions de dollars pour des infractions environnementales. La concession de Petaquilla elle-même a aussi suscité une controverse, car elle accorde à ses propriétaires une série d'exemptions prévues dans la loi et le règlement.
    En même temps, une autre société canadienne, Corriente Resources, exerce illégalement ses activités sur le territoire autochtone de Ngöbe-Buglé et essaie de surmonter l'opposition communautaire à l'égard d'un énorme projet de mine de cuivre à ciel ouvert afin d'acquérir la propriété et de la vendre à une grande société minière à des fins d'exploitation.
    Il existe une poignée d'autres joueurs canadiens d'envergure dans le secteur minier au Panama, beaucoup plus importants que ceux de n'importe quel autre pays, quoique seule la mine Molejón soit en production. L'investissement canadien ne pose pas problème en soi; les problèmes découlent des conditions d'investissement et des conséquences probables de l'ALE sur ces conditions. La protection environnementale et les mesures d'exécution de la loi et de conformité en général au Panama sont notoirement faibles, même dans le cadre législatif et réglementaire actuel. La situation de la mine Molejón et de Corriente Resources en sont des exemples éloquents.

  (1545)  

    Le danger tient au fait que les dispositions de protection de l'investissement de l'ALE permettront de protéger des investissements miniers qui abusent du laxisme gouvernemental et profitent du cadre d'exploitation à faible coût qui en découle et donneront lieu à des projets qui ne seraient probablement jamais approuvés au Canada ni dans tout autre pays où des mesures de contrôle plus strictes sont en place, tandis que l'accord sur l'environnement n'offre ni protection améliorée ni recours aux collectivités touchées ou aux organismes de défense de l'intérêt public.
    L'ALE actuel est source de préoccupations importantes sur les deux fronts. Au chapitre de la protection et de la planification environnementales, l'accord sur l'environnement prévoit quelques modestes mesures en faveur de l'environnement, et l'ALE contient une clause non dérogatoire visant à faire appliquer les lois environnementales. Une clause non dérogatoire est un élément positif, mais ce n'est pas du tout suffisant dans une situation qui exige d'importantes améliorations.
    Par ailleurs, l'accord sur l'environnement suit le modèle récent des ALE conclus avec la Colombie et le Pérou en négligeant de prévoir un mécanisme de résolution de conflits environnementaux à l'intention des citoyens et en limitant les comités consultatifs conjoints et les mécanismes de plaintes prévus dans des accords antérieurs, comme l'ALENA ou l'Accord de libre-échange entre le Canada et le Chili, à un seul coordinateur ne disposant pas de pouvoirs indépendants et à un comité d'examen auquel seuls les États — et non les citoyens — peuvent faire appel.
    Cela a une grande incidence sur un pays comme le Panama, où on éprouve de sérieuses difficultés à établir la capacité institutionnelle et technique voulue pour administrer, contrôler et réglementer des activités comme l'exploitation minière à grande échelle, relativement nouvelle dans le pays — des activités qui ont mis au grand jour les limites politiques et techniques de la surveillance de l'État dans les pays avoisinants comme le Costa Rica, le Honduras et le Guatemala.
    Il existe aussi des précédents troublants au chapitre du recours abusif aux mesures de protection de l'investissement prévues dans des accords de libre-échange ailleurs dans la région. Il s'agit parfois simplement d'une menace, comme dans le cas de Glencairn Gold, aujourd'hui Central Sun Mining, qui a menacé le gouvernement costaricain de poursuites judiciaires aux termes de l'Accord de libre-échange entre le Canada et le Costa Rica si son projet Bellavista n'était pas exempté d'un moratoire sur l'exploitation minière à ciel ouvert. Le remblai de lixiviation s'est écroulé à peine trois ans après l'inauguration de la mine, qui n'a pas repris ses activités depuis.
    Il peut aussi s'agir de véritables poursuites judiciaires, comme c'est actuellement le cas de Pacific Rim Mining, société canadienne qui, par l'intermédiaire de sa filiale américaine, intente une action contre le gouvernement du Salvador aux termes de l'accord de libre-échange entre les États-Unis, la République dominicaine et l'Amérique centrale pour ne pas avoir délivré de permis, malgré la négligence de la société à déposer tous les documents exigés pour obtenir ces permis et les renseignements contradictoires qu'ils ont soumis.
    Les exemples de poursuites judiciaires aux termes de l'ALENA — toujours coûteuses, quelle qu'en soit l'issue — sont nombreux.
    Les dispositions relatives à l'investissement de l'ALE en question prévoient des mesures semblables quant à l'expropriation réglementaire à l'article 9.11 du chapitre 9, mais elles sont limitées par les exemptions prévues à l'annexe correspondante 9.11, qui tiennent à la réglementation raisonnable en vue de protéger l'environnement. Nous voyons ces exemptions d'un bon oeil, mais elles n'ont pas été mises à l'épreuve par le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements ni par un autre tribunal de commerce international. Vu la force de la protection contre l'expropriation, il y a lieu de douter que les exemptions donneront au Panama la marge de manoeuvre nécessaire pour instituer une réglementation efficace dans l'intérêt du public.
    Cet enjeu ne s'applique pas seulement à la protection de l'environnement; il revêt un poids crucial dans le cadre de tout effort visant à modifier le cadre réglementaire de façon à permettre la prise de nouvelles mesures en faveur de la responsabilisation et de la transparence ou à générer de nouvelles recettes à l'aide de redevances ou de contributions perçues par l'État dans un effort légitime pour financer ses obligations en matière de développement social.
    Cela a pour effet final d'imposer des obstacles au renforcement de ces normes nationales. Les analystes et les universitaires commencent à s'inquiéter du « [...] préjudice causé au bien-être des populations par le régime d'investissement international tel qu'il est actuellement structuré, en particulier en raison de sa capacité de limiter le pouvoir des gouvernements de réagir, au profit de leur population, aux défis liés au développement humain et au développement durable ».
    Pour conclure, bien que l'accroissement de la stabilité des investissements et l'amélioration de la protection environnementale soient des objectifs louables, le texte actuel ne contribue pas convenablement à leur réalisation — quoiqu'il soit difficile de déterminer les conséquences probables de l'accord en l'absence d'une évaluation environnementale sérieuse —, et il n'y a aucune volonté de formuler certaines dispositions de l'accord en tenant compte du développement durable. L'accord tel que négocié présente un risque très réel d'instituer un régime réglementaire inefficace et peut-être irresponsable en protégeant les investissements contre des mesures environnementales ou fiscales plus rigides.
    Merci du temps que vous m'avez accordé. Je répondrai aux questions au moment convenu.

  (1550)  

    Merci, monsieur Kneen.
    Nous allons maintenant nous rendre à Panama pour entendre Donald-Fraser Clarke, directeur général de Clarke Educational Services.
    Monsieur Clarke, je vous remercie de votre patience. La parole est à vous, pour un maximum de 10 minutes, puis nous passerons aux questions. Merci.
    Bonjour, monsieur le président. Merci beaucoup.
    Pour commencer, j'aimerais donner une brève explication des activités de la société que je représente. Clarke Educational Services est un cabinet de services professionnels des Premières nations qui travaille avec les collectivités, les gouvernements et les sociétés autochtones au Canada et en Amérique latine en vue de créer des entreprises inclusives en faveur d'une exploitation des ressources naturelles adaptée à la culture et responsable sur le plan de la société et de l'environnement.
    Notre société travaille au Panama depuis environ deux ans et demi et est composée d'une équipe de professionnels spécialisés qui travaillent avec le peuple ngöbe, groupe autochtone local, afin de promouvoir l'exploitation socialement inclusive et économiquement viable du projet d'extraction du cuivre Cerro Colorado.
    Notre société est axée sur les droits des Autochtones. En vertu de l'article 48 de la loi 10 du Panama, le peuple ngöbe doit être informé de toute forme d'exploitation des ressources naturelles sur le territoire de la comarque et pouvoir y participer. Cerro Colorado est un projet d'extraction du cuivre de classe internationale établi sur le territoire ancestral du peuple ngöbe.
    Le peuple ngöbe représente environ 10 p. 100 de la population panaméenne, et ils sont 160 000 à vivre à l'intérieur des frontières de la comarque. La comarque s'étend sur un territoire de 650 000 hectares, et les Ngöbes de la comarque, selon les données de la Banque mondiale et nos propres observations, sont parmi les citoyens les plus pauvres du Panama. Quelque 90 p. 100 d'entre eux n'ont pas accès aux produits de première nécessité et ont moins de 2 $ par jour pour subvenir à leurs besoins quotidiens.
    Avant de travailler avec les collectivités ngöbes et de leur fournir une formation, notre société a mené une série de rencontres avec des collectivités situées près du territoire du projet Cerro Colorado pour déterminer si les gens étaient intéressés à en apprendre davantage au sujet des pratiques d'exploitation minière responsable et de l'expérience des peuples autochtones du Canada au chapitre de l'exploitation minière et de notre relation avec le Canada.
    En outre, notre société a étudié le droit des comarques pour s'assurer que nos activités étaient conformes aux lois nationales du Panama et aux coutumes traditionnelles du peuple ngöbe.
    Jusqu'à maintenant, nous avons travaillé avec environ 2 000 Ngöbes de la région de Cerro Colorado et leur avons offert une formation. Ces personnes sont des propriétaires de terrains et des gens de la collectivité qui vivent à des endroits directement ou indirectement touchés par l'éventuel projet d'extraction minière du cuivre.
    Notre expérience du Panama nous a donné un aperçu de la façon dont on a mené les affaires par le passé dans la comarque. On a l'habitude d'imposer aux gens des initiatives commerciales ou de mise en valeur des mines sans leur plein consentement, sans qu'ils soient correctement renseignés ou informés et sans qu'ils soient intégrés à ces initiatives. Notre intention depuis toujours est de respecter les lois locales et nationales et de promouvoir des pratiques commerciales et le développement équitables dans la région au moyen de l'information et du consentement préalable.
     Du côté gouvernemental, il y a longtemps que les gouvernements profitent des lacunes sur le plan de la capacité qui existent dans la comarque des Ngöbe-Buglé. À notre avis, la création de nouveaux échanges avec le Panama en vertu de l'ALE pourrait s'avérer très positive. J'ai une liste des choses qui, selon nous, aideraient beaucoup ici à définir la façon dont les affaires doivent être menées.
    Dans le monde des affaires canadien, le concept de RSE est bien défini, et des normes élevées de RSE sont en vigueur; cette culture pourrait être exportée par les entreprises canadiennes qui font affaire ici au Panama, surtout dans les secteurs et les régions où le concept est ni mis en pratique ni bien défini. Bien sûr, notre expérience touche la comarque des Ngöbe-Buglé, et nous avons observé très peu de RSE dans le cadre des différentes activités qui se sont déroulées par le passé. La région de Cerra Colorado a une très longue histoire. Un certain nombre de sociétés canadiennes y ont travaillé par le passé, mais elles n'ont jamais invité la population locale à participer et ne l'a jamais tenue au courant.
    Les entreprises canadiennes, surtout celles du secteur des ressources, ont une grande expérience de la collaboration avec les peuples des Premières nations pour le bien de toutes les parties concernées. Les sociétés canadiennes pourraient exploiter cet avantage concurrentiel au moment de travailler avec les peuples autochtones ici au Canada et partout dans la région. L'emplacement géographique du Panama est aussi stratégique, et, fort d'une infrastructure de pointe, le Panama est extrêmement propice au commerce comparativement à beaucoup de ses voisins. Le Panama pourrait être un choix logique pour les sociétés canadiennes souhaitant faire affaire dans la région.
    Selon notre expérience, l'industrie canadienne est généralement bien accueillie par les Panaméens, particulièrement dans la comarque des Ngöbe-Buglé, et nous croyons que c'est là l'argument le plus lourd en faveur de l'ALE. Dans le cas de l'exploitation minière, il faut asseoir, établir et légitimer l'industrie au Panama. Pour ce faire, il est essentiel que nous ayons des exemples de bonnes pratiques commerciales, des institutions fortes et une culture de responsabilisation. À notre avis, il existe de nombreuses sociétés au Canada qui déploient constamment des efforts pour réaliser ces objectifs.

  (1555)  

    Mon collègue a parlé d'Inmet. Inmet a eu quelques bonnes expériences de collaboration avec les peuples des Premières nations de la province du Québec. Je n'ai pas une connaissance approfondie des activités d'Inmet, mais je suis ses activités de temps à autre. Elle met en oeuvre le principe de RSE dans une bonne mesure. Nous la voyons offrir un soutien aux collectivités. Nous la voyons informer la population locale de ses projets d'avenir. Nous croyons que nous faisons exactement la même chose. Peut-être que nous en faisons un peu plus, car nous sommes dans la comarque, mais, à notre avis, nous respectons les lois traditionnelles et nationales.
    Merci.
    Merci, monsieur Clarke.
    Sur ce, nous allons procéder aux questions.
    Mme Hall Findlay va commencer.
    Merci, monsieur le président. Merci, monsieur Clarke et monsieur Kneen.
    À vous deux, vous avez mis en lumière l'un des principaux enjeux de toute la discussion au sujet du libre-échange: soit on adopte la philosophie voulant que le libre-échange et l'engagement accru aient une incidence positive pour la population des deux pays concernés, soit on voit la chose d'un mauvais oeil.
    Je dois dire, monsieur Kneen, que j'estime que la démarche de M. Clarke et le travail qu'accomplit son organisation au Panama contribuent grandement à l'investissement des sociétés minières canadiennes en vertu de l'ALE. D'emblée, je crois que c'est une très bonne chose et j'estime que ce genre d'investissement peut avoir des retombées encore plus positives pour les résidents du Panama.
    J'aimerais vous poser une question au sujet de votre interprétation des préoccupations. Je ne veux pas minimiser les préoccupations légitimes que nous partageons tous au sujet de la responsabilité sociale des entreprises et de la dégradation de l'environnement. Par le passé, il y a eu beaucoup d'abus, et il y en a peut-être encore, mais, en général, l'investissement et l'engagement accrus peuvent contribuer au renforcement de la capacité locale et aider à mettre en lumière toute l'importance de la protection de l'environnement.
    Nous essayons de décider si nous allons approuver l'accord de libre-échange. Croyez-vous que les conditions difficiles des Panaméens dont vous avez parlé s'amélioreront si le Canada refuse cet accord de libre-échange?
    Une voix: Bonne question.

  (1600)  

    J'essaie de démêler la double négation. Est-ce que...
    Est-ce que ce serait mieux si le Canada disait non?
    J'essaie de faire valoir que l'accord actuel pose problème du fait qu'il ne prévoit pas les mesures de protection qui devraient être en place pour encadrer l'investissement. Certes, un investissement accru pourrait avoir des avantages, mais seulement dans certaines conditions qui ne sont pas apparentes en l'occurrence. C'est là le problème que je soulève. Je ne vois pas de mesures tangibles. C'est l'autre idée que j'essaie de mettre en lumière. C'est une question de croyances philosophiques ou idéologiques, et non pas de faits.
    Le comité a le mandat de dire oui ou non à l'accord. Nous ne sommes pas habilités à apporter d'importantes modifications au projet d'accord de libre-échange.
    Je comprends qu'il existe des préoccupations. Je serais la première à dire qu'il faut s'assurer que toutes les activités qu'entreprennent des sociétés canadiennes à l'étranger doivent être conformes aux normes les plus élevées, mais l'accord a été négocié entre des grandes personnes. Je ne dis pas cela pour être drôle. Le Panama et le Canada ont affecté des équipes d'envergure à la négociation de l'entente. Si les mesures de protection que vous aimeriez voir sont absentes, alors je crois que vous devriez poser des questions au gouvernement du Panama. Je crois aussi beaucoup en l'importance de la capacité locale et des lois locales. Si vos préoccupations se rattachent aux conditions au Panama, alors le premier gouvernement responsable serait celui du Panama. On doit un certain respect aux Panaméens qui ont négocié l'accord et l'ont amené où il est aujourd'hui.
    Je n'en dirai pas plus. Je vais en déduire de votre réponse que, s'il fallait choisir sans nuance de dire oui ou non, vous seriez prêt à dire que c'est une bonne chose à faire. En partant du principe que l'on ne peut pas apporter de modifications, estimez-vous que le fait de dire non serait une bonne chose?
    J'estime qu'il y a d'importants dangers, et je ne vois pas pourquoi il faudrait se presser d'adopter quelque chose que nous ne comprenons pas. Je ne comprends pas pourquoi ces équipes d'envergure qui ont accompli tout le travail dont vous avez parlé ne peuvent pas nous montrer ce qu'elles ont fait ou pourquoi elles ne peuvent pas présenter une justification ou des détails relatifs à certaines des mesures que nous examinons. Si les mesures de protection ne sont pas là, pourquoi? N'a-t-on pas envisagé de telles mesures? Ont-elles été rejetées pour une raison particulière? Ont-elles même fait l'objet d'une analyse? C'est ce que nous ignorons.
    Oui, mais je vous répondrais que c'est la responsabilité du gouvernement panaméen. Si le gouvernement panaméen a consenti aux conditions de l'entente de libre-échange, c'est parce qu'il a décidé qu'il était dans l'intérêt supérieur du Panama de le conclure, tout comme nous sommes placés pour déterminer ce qui est dans l'intérêt supérieur du Canada.
    À mon avis, les deux témoignages illustraient très bien la vision négative et la vision positive, et je vous félicite d'avoir adopté le point de vue positif. Pourriez-vous parler de possibilités précises qu'offre l'accord de libre-échange à l'égard des préoccupations soulevées par M. Kneen, à juste titre, au sujet de certaines des conditions? Je sais que vous avez abordé un peu la chose dans votre témoignage, mais si vous pouviez approfondir, cela nous aiderait beaucoup.

  (1605)  

    Bien sûr. Comme nous le savons tous, nous vivons à l'ère de la mondialisation. Si on regarde les sociétés canadiennes dans notre industrie, si nous commençons à mal faire les choses, les gens le savent tout de suite. Internet est un outil très puissant. Le savoir est un outil très puissant.
    Si nous regardons notre industrie, notre secteur minier — et je vais m'en tenir à ce que je sais —, plusieurs milliers de sociétés minières canadiennes mènent des activités aux quatre coins du monde, partout en Amérique latine et ici au Panama. Ce que je constate, c'est que ces sociétés établissent au Panama des normes plus strictes en matière de RSE, de travail avec les collectivités et de participation communautaire. Je crois que cette tendance est extrêmement positive, et, à mes yeux, l'ALE ne ferait que permettre à d'autres entreprises canadiennes de venir au Panama et donnerait lieu à de nouveaux investissements.
    C'est quelque chose qui suscite beaucoup d'enthousiasme chez nous. Je parle au nom d'une société appartenant aux Premières nations, d'une entreprise canadienne. Notre investissement ici dans la collectivité est considérable... [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    Il semble que nous ayons perdu le signal pendant quelques secondes, mais rien ne nous empêche de passer aux suivants. Le temps de Mme Hall Findlay vient tout juste de s'écouler. Nous allons poursuivre avec M. Guimond.
    Oh, permettez-moi seulement de dire bonjour à M. Clarke.
    Nous avons perdu le signal pendant quelques instants. Je vais vous laisser terminer votre réponse, puis nous allons donner la parole au prochain membre.
    Bien sûr. Notre vision des choses est très simple: si nous augmentons la quantité d'échanges commerciaux et le montant des investissements, alors nous aurons une meilleure influence au Panama. Si nous décidons de nous placer du côté de l'opposition et de ne pas approuver l'ALE, alors comment parviendrons-nous à améliorer la situation au Panama?
    Il y a des problèmes ici au Panama. C'est un pays qui gravit les échelons sur le plan économique, mais nous avons eu beaucoup de difficultés dans le domaine de la RSE et de la participation communautaire. Je crois que c'est quelque chose que les entreprises canadiennes et les investissements canadiens apportent au pays, et, à mes yeux, c'est très positif, très puissant. C'est quelque chose de durable à long terme.
    C'est ce que nous a révélé notre expérience ici. C'est ce que nous a révélé notre expérience de travail avec les intervenants de la comarque. Notre entente se limite à la formation à l'heure actuelle, et ce sont les gens qui décideront ensuite s'ils veulent ou non que le projet d'exploitation minière ait lieu, mais, à l'heure actuelle, c'est ce que nous a révélé notre expérience ici.
    Merci.
    Merci. Il est fantastique d'entendre le témoignage de quelqu'un sur le terrain.
    Allez-y, monsieur Guimond.

[Français]

    Je ne veux pas contrarier ma collègue Mme Hall Findlay, mais je crois que les parlementaires peuvent toujours présenter des amendements pour améliorer une entente. J'espère que Mme Hall Findlay pourra appuyer les amendements que nous présenterons en vue d'améliorer une entente, comme tout le monde le veut.
    Monsieur Kneen, vous qui êtes un expert, quelles sont les possibilités réelles de développement du Canada au Panama dans le domaine minier?

[Traduction]

    Les possibilités sont importantes. Comme je l'ai signalé, Inmet a un engagement de plus de quatre milliards de dollars dans le cadre du projet Petaquilla. Il y a encore de huit à douze volets importants du projet. Comme l'a fait valoir M. Clarke, certains ont été très mal gérés par le passé et ont suscité une vive controverse.
    Les possibilités sont là, mais j'ai tendance à me trouver en désaccord sur une chose. Je crois comprendre — et c'est ce que nous avons observé — que, selon le mouvement des investissements à l'échelle mondiale, l'investissement canadien peut contribuer de façon importante à faire avancer la responsabilité sociale des entreprises, la formation et l'éducation et la participation sociale, mais seulement dans certaines conditions, notamment lorsqu'il y a un cadre de gouvernance et de réglementation solide.
    Le genre d'accords que nous avons vus se conclure dans le nord — par exemple, les ententes sur les répercussions et les avantages — sont fondés sur un cadre juridique qui n'existe pas dans la plupart des autres pays dans le monde. Ce modèle peut être mis en oeuvre et utilisé ailleurs dans le monde, mais il est coûteux et va à l'encontre des intérêts des actionnaires, alors la direction judicieuse d'une société ne suffit pas tout à fait à le mettre en oeuvre.
    Les possibilités existent, mais, malheureusement, elles risquent d'entraîner l'affaiblissement des normes de protection environnementale et de protection de la santé publique auxquelles on s'attendrait au Canada. Nous ne voyons pas en quoi il serait bénéfique d'encourager une telle concurrence.

  (1610)  

[Français]

    Dans votre introduction, vous avez beaucoup parlé des problèmes environnementaux. Je suis étonné de voir que chaque fois qu'on commence à parler d'une entente, c'est toujours très beau et il n'y a jamais de problèmes. Cependant, quand on invite des témoins comme vous, qui voient ce qui se passe sur le terrain, ils arrivent toujours avec des choses négatives.
    D'après vous, quels sont les problèmes réels sur le plan environnemental au Panama?

[Traduction]

    Je vais évoquer l'exemple de la mine Molejón, car la plupart des projets miniers actuellement en cours au Panama sont à l'étape de l'exploration. Dans certains cas, il y a du forage, tandis que dans d'autres, on ne fait que de la reconnaissance. La mine Molejón est la seule à avoir amorcé la production à l'heure actuelle.
    Il y a eu par le passé des expériences — qu'on pourrait qualifier de négatives — concernant des sociétés canadiennes comme Greenstone Resources, mais la mine Molejón est une société canado-panaméenne. Au départ, c'était une coentreprise entre les Panaméens, Inmet et Teck. L'exploitation en soi a suscité des bouleversements considérables dans l'environnement local, et les autorités panaméennes ont infligé des amendes à l'organisation. Elle a refusé de payer, ce qui m'abasourdit, et elle continue à prospérer à titre de société canadienne au Panama. Vous trouverez des données contextuelles dans la documentation que je vous ai fournie.

[Français]

    En juin dernier, le gouvernement panaméen a instauré la Loi 30, qui a été jugée antisyndicale par beaucoup de gens. Le Parlement canadien, il y a quelques semaines, a présenté le projet de C-300, qui a été défait.
    Que reste-t-il aux travailleurs panaméens pour avoir accès à des emplois le moindrement de qualité? Ces gens ont-ils encore des moyens?

[Traduction]

    Je crois comprendre que le gouvernement panaméen se penche de nouveau sur le projet de loi C-30. En revanche, nous avons perdu le projet de loi C-300. La possibilité est là. Comme je l'ai dit, la question qui s'impose est la suivante: quel genre d'investissement feraient les sociétés canadiennes en l'absence d'exigences particulières?
    Au Canada, les accords sur une revendication territoriale, par exemple, confèrent un pouvoir précis aux Premières nations et aux Inuits, qui peuvent exiger une entente sur les répercussions et les avantages prévoyant le partage des profits et des mesures d'emploi et de formation, entre autres. Nous avons d'autres exemples de sociétés minières dans les provinces qui se sont investies dans d'importants projets de planification et de formation en vue de permettre aux gens de la collectivité d'accéder à de meilleurs emplois.
    En Amérique latine, cette démarche a été moins fructueuse. Même dans des pays qui ont l'expérience de l'exploitation minière — ce qui n'est pas le cas du Panama —, les choses ont été plus difficiles. Dans des pays comme le Pérou, on a réussi à procurer de meilleurs emplois aux gens, mais seulement après un certain temps et moyennant un certain coût. Selon moi, le problème, c'est que l'apport d'un investissement de ce type dans un territoire vierge —passez-moi l'expression — ne portera pas de fruits à court ou même à moyen terme.

  (1615)  

[Français]

    Merci, monsieur.

[Traduction]

    Merci.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Julian.
    Allez-y, monsieur Julian.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis ravi de vous voir de nouveau après quelques jours d'absence.
    Monsieur Kneen, je vous remercie beaucoup d'être ici aujourd'hui. Le comité ETRA revient tout juste d'Europe, où il a rencontré des parlementaires européens, au Parlement européen et ailleurs. Nous avons tenu des rencontres privées avec des parlementaires européens qui sont très préoccupés par les dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État, enjeu qui, bien sûr, touche autant l'accord entre le Canada et le Panama que les négociations en cours avec l'Europe.
    Vous avez parlé de certains cas où des sociétés ont invoqué des dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État pour faire annuler des décisions rendues par le gouvernement dans le but de protéger l'environnement et de promouvoir le développement social. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Êtes-vous préoccupé par la multiplication des sociétés de façade, des sociétés qui n'ont plus aucun lien avec l'accord proprement dit, mais qui invoquent leur constitution à l'étranger pour faire appliquer les dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État des accords canadiens pour poursuivre les administrations locales ou les gouvernements nationaux? Particulièrement dans le cas du Panama, selon les témoignages que nous avons entendus, il y a quatre fois plus de sociétés qu'au Canada. Je pourrais donner un simple coup de fil et me constituer en personne morale demain à titre de société panaméenne afin de me placer sous la protection des dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État — quel que soit le véritable emplacement de mon siège social —, et je peux me mettre à intenter des poursuites contre toute administration locale dont la décision me déplaît. À quel point êtes-vous préoccupé par cet aspect de l'accord?
    Je dois dire que ce problème n'est pas nouveau, mais il est important, et, à ce qu'il semble, on ne le réglera pas de si tôt. Mes amis avocats en droit commercial parlent de « magasinage du territoire de constitution des personnes morales », et la plupart des grandes sociétés ont une structure assez complexe pour faire cela. Elles peuvent sélectionner la combinaison de territoires qui servira le mieux ses intérêts, que ce soit sur le plan fiscal, aux fins des investissements ou en fonction des dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État qui lui permettront de poursuivre un gouvernement en justice.
    Pacific Rim est l'exemple actuel. Une autre société américaine utilise la même...
    Qu'est-ce que Pacific Rim?
    Pacific Rim est une société canadienne qui, par l'entremise de sa filiale américaine, intente une poursuite contre le gouvernement du Salvador pour avoir négligé de lui délivrer les permis d'exploitation minière qu'elle voulait.
    Même si, auparavant, les dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État ne l'auraient pas protégée, en obtenant une case postale aux États-Unis, elle peut invoquer les dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État pour intenter une poursuite contre le gouvernement du Salvador?
    Oui, tout comme l'a fait Glamis Gold par le passé: elle a invoqué les dispositions de l'ALENA pour poursuivre le gouvernement américain en justice. Même si le siège social de la société était situé au Nevada, elle détenait une filiale canadienne qui lui a servi d'intermédiaire pour poursuivre le gouvernement américain. Alors, comme je dis, c'est un phénomène qui existe depuis un certain moment, et je ne vois pas comment il disparaîtra.
    Le problème ne tient pas seulement aux accords, car le problème lié à la définition de ce qui constitue une société canadienne est un peu plus complexe. Pour le meilleur ou pour le pire, nous n'examinons pas la Loi sur les corporations. Nous ne nous penchons pas sur les exigences de la commission des valeurs mobilières et les conditions qui régissent la propriété canadienne, le domicile canadien et l'administration canadienne de ces sociétés. Une société qui a un bureau, un avocat, une case postale et paie de l'impôt — le moins possible, idéalement — au Canada peut être une entreprise canadienne socialement responsable.
    Me permettez-vous de résumer? J'ai également quelques questions pour M. Clarke.
    Vous dites que, même si le comité a le droit de modifier la législation de mise en oeuvre — ce que nous avons fait pour deux accords, soit les deux derniers accords qui ont été soumis au comité. Avant la conclusion de l'accord avec la Jordanie, on a apporté des modifications. Alors, nous avons le droit de le faire. Mais, si nous rejetions cet accord, ce que nous éviterions — et le commerce se poursuivrait quand même —, c'est d'aggraver une situation qui est déjà mauvaise, où toutes les sociétés jouissent d'un droit de dérogation aux lois environnementales grâce aux dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État. À votre avis, y a-t-il un lien entre cette situation et le fait que l'évaluation environnementale n'a jamais été publiée?

  (1620)  

    Je n'ai aucune idée pourquoi l'évaluation environnementale n'est pas disponible. Si je regarde les évaluations environnementales menées dans le cadre d'autres accords de libre-échange, je dois dire qu'elles ne sont pas terriblement informatives. Elles présentent très peu de données probantes, dans le meilleur des cas. Alors, même si on l'avait, j'ignore si cela serait bien utile.
    À mon avis, le problème, c'est que nous ne sommes pas...
    Excusez-moi, je vais devoir vous interrompre.
    M. Jamie Kneen: D'accord.
    M. Peter Julian: Je fais très attention à mon temps.
    J'aimerais passer à M. Clarke. Merci d'être venu ici aujourd'hui, monsieur Clarke.
    J'ai deux questions pour vous. Premièrement, combien d'argent votre société a-t-elle investi pour faire avancer le développement social et la gérance de l'environnement? Je crois que vous aviez commencé à répondre à cette question lorsque l'on vous a interrompu. Peut-être pourriez-vous nous donner le montant exact d'argent qui est véritablement allé...
    Le président: Peter, qu'est-ce que cela a à voir avec le traité?
    M. Peter Julian: ... au peuple ngöbe.
    Merci, monsieur le président.
    Et, deuxièmement...
    Non, pas question. Monsieur Julian, nous sommes ici pour discuter d'un accord de libre-échange et non pas des affaires d'une société privée.
    Ma deuxième question, monsieur Clarke...
    Monsieur Clarke, répondez aux questions comme vous voulez.
    M. Peter Julian: ... se rattache aux dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État...
    Le président: Vous n'avez pas besoin d'exposer votre situation financière pour M. Julian.
    ... dont il était question plus tôt avec M. Kneen. Beaucoup d'organismes autochtones au Canada et en Colombie sont préoccupés par les dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État. Voyez-vous chez les Autochtones du Panama une préoccupation concernant ces dispositions? Elles permettraient, bien sûr, aux sociétés de faire fi de décisions rendues par des dirigeants autochtones de leur collectivité. Avez-vous observé des préoccupations à ce chapitre?
    Permettez-moi de répondre tout d'abord à votre deuxième question. Il va s'en dire que, dans la comarque, il y a un certain nombre de préoccupations. Vous devez comprendre que la comarque est un véritable pays de cocagne ici au Panama. Sept des treize plus grandes rivières au pays sont situées dans la comarque. La comarque contient beaucoup de cuivre... [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    Nous avons encore perdu le signal.
    Il était probablement si outré par la question, monsieur le président, qu'il l'a coupée.
    C'est une question très légitime.
    Ce n'est pas une question légitime du tout, Peter.
    Elle est tout à fait légitime. Il avait abordé le sujet. Il a dit que des ressources ont été investies. Je voulais tout simplement savoir combien. C'est très légitime. Nous sommes en trêve.
    Je suis désolé, mais notre connexion est rompue.
    Cerro Colorado est un projet historique qui revêt une grande importance au Panama. Il remonte aux années 1970, sous le règne d'Omar Torrijos.
    Notre travail dans la comarque est très simple. Nous offrons de la formation en vertu d'une entente. Nous avons dispensé une formation relatives aux pratiques minières responsables. Mon estimé collègue, M. Kneen, a parlé des ERA. Nous offrons une formation au sujet des ERA. Nous parlons abondamment des exemples des hauts, des bas et des fiascos de l'exploitation minière avec le peuple parce que, au bout du compte, le projet Cerro Colorado durera 70 ans. Et n'oubliez pas que la population avoisinante est entièrement ngöbe — 160 000 âmes — et qu'une seule route permet d'y accéder. Alors, si les gens ont l'impression de s'être fait mentir ou cacher la vérité ou s'ils estiment qu'ils n'ont pas eu leur mot à dire ou n'ont pas pu participer aux activités dans le cadre de ce projet particulier, ils ont le pouvoir de bloquer le projet à tout moment. Ils vont s'asseoir sur la route, et c'est quelque chose dont nous leur avons parlé.
    Nous voulons nous assurer que le promoteur qui arrive sur place — s'il s'agit d'une société canadienne — soit une société socialement responsable, et nous apprenons aux gens ce qu'ils doivent rechercher dans une société minière canadienne.
    Nous ne sommes pas arrivés, comme ça, avec notre projet. Tout d'abord, nous avons dû enseigner aux gens ce que suppose l'extraction minière, pas seulement en espagnol, mais dans leur langue traditionnelle. Il y a là-bas une population énorme qui ne peut même pas lire ni écrire, alors nous devons faire des dessins et tracer des diagrammes. Nous offrons de la formation aux gens depuis deux ans et demi, semaine après semaine, et nous veillons à ce qu'ils possèdent les bons renseignements et nous leur expliquons à quoi ressemble un projet en déroute. Nous leur parlons, par exemple, du projet Greenstone et des raisons de son échec.
    Nous avons invité nos intervenants à se rendre à la mine d'or de Petaquilla. Ils en sont revenus très enthousiasmés par ce qu'ils ont vu.
    Alors, nous leur avons appris ce qu'ils devaient rechercher pour détecter les mauvais projets et pour savoir comment agir auprès des grandes sociétés minières, et nous croyons que la population est maintenant bien renseignée.
    Nous espérons que, dans l'avenir, ils voudront que le projet évolue. Mais n'oubliez pas qu'ils sont protégés par une loi très puissante selon laquelle ils doivent être renseignés et informés et ils doivent participer. Ils exercent actuellement des pressions sur le gouvernement panaméen afin de pouvoir participer, et ils veulent toucher un pourcentage de la concession.
    Quant à la deuxième partie de votre question, nous avons probablement investi presque un million de dollars en formation jusqu'à maintenant — seulement en formation.

  (1625)  

    Merci, monsieur Clarke.
    J'ignore si nous sommes toujours sans signal, mais c'est tout le temps qui était réservé à M. Julian, avec un supplément pour compenser mes interventions.
    Maintenant, nous allons donner la parole à M. Keddy.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à nos témoins. Je constate que nous avons une connexion vidéo ici et que je ne peux pas regarder directement de l'autre côté de la table. Il faut que je regarde en bas pour voir nos témoins, excusez-moi.
    J'ai quelques brèves questions, monsieur Kneen.
    Premièrement, seulement pour le compte rendu, je faisais partie de la même délégation qui s'est rendue en Europe pour discuter de l'accord de libre-échange avec ses homologues européens. J'essaie tant bien que mal de me souvenir des réunions où l'on a parlé des dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État et toutes les discussions qui s'en sont suivies, mais j'ai un mal fou. À vrai dire, je ne me souviens pas du tout qu'on en ait parlé, et je crois qu'il importe que cela figure au compte rendu.
    J'aimerais vous demander — car vous avez présenté plusieurs exemples de pratiques d'exploitation minière tout sauf exemplaires — si, à tout le moins selon vous, il y a des entreprises d'exploitation minière en Amérique centrale qui font bien les choses.
    Non.
    Vous ne pouvez en nommer aucune. C'est intéressant.
    J'ai posé cette question à maintes reprises sur d'autres tribunes, et j'ai demandé aux gens s'ils pouvaient donner des exemples de projets positifs, et...
    Je ne suis pas certain du nom exact, mais vous pourriez peut-être m'éclairer. Je crois que c'est Goldcorp, une société au Honduras qui exploite la mine de San Andrés.
    Connaissez-vous cette mine?
    Oui, je la connais.
    Et vous ne considérez pas qu'elle fait bien les choses non plus?
    [Note de la rédaction: difficultés techniques]

    


    

    ... je dirais qu'il existe un certain nombre de sociétés qui essaient de gérer les aspects environnementaux et sociaux de leurs activités.

  (1630)  

    J'aimerais aussi poser la même question, mais sur le plan de la gouvernance — et je veux une réponse, car j'aimerais qu'il reste assez de temps pour que M. Clarke réponde. Nous savons que, dans nombre de ces pays, la fonction publique et le régime de réglementation — tels que nous les concevons — sont sous-développés. Or, on met cette situation sur le dos du promoteur, en l'occurrence, une société minière.
    Oui, et même la gouvernance est, en quelque sorte...
    Une description flatteuse?
    Non, le problème tient presque exclusivement à la capacité. Il n'y a aucun besoin d'invoquer la corruption ou l'influence ou quelque chose comme ça si la capacité technique n'est pas là. Nous nous sommes entretenus avec le ministre des Mines au Guatemala — et j'essaie encore de me souvenir de la citation —, et il a dit, à un certain moment, que le gouvernement a tout simplement de la difficulté à suivre les progrès et à analyser les répercussions sur l'environnement. Alors, oui, c'est la responsabilité de la société, et il n'y a de communication ni avec les universitaires ni avec l'administration.
    Je comprends cela.
    Je n'ai pas beaucoup de temps, alors j'aimerais aller à M. Clarke.
    Monsieur Clarke, comprenez-vous...
    Vous savez, il est très facile de...
    ... ce que je dis au sujet de la gouvernance locale? D'après ce que je comprends de votre témoignage, c'est exactement ce qu'essaie de faire votre société: renforcer la capacité de la population locale et, j'imagine, assurer une liaison auprès des représentants gouvernementaux locaux.
    Je crois qu'il ne vous entend pas du tout. Son téléphone cellulaire ne semble pas fonctionner non plus.
    Pouvons-nous essayer encore, monsieur Clarke? Avez-vous...
    Non.
    J'ignore s'il me reste du temps, monsieur le président.
    Eh bien, nous y reviendrons. Qu'en pensez-vous? Nous allons essayer de rétablir la communication.
    Monsieur Cannis, vouliez-vous poser des questions à M. Clarke aussi?
    Eh bien, s'il peut revenir, mais...
    Nous allons poursuivre, alors, car nous n'obtenons pas de signal de Panama à l'heure actuelle.
    Nous allons devoir conclure, toutefois, après une brève intervention.
    Monsieur Cannis, je m'excuse de devoir écourter votre intervention. Votre question devra être la dernière.
    Je serai bref, monsieur le président. Il y a seulement deux ou trois choses que j'aimerais...
    Êtes-vous allé à la mine Molejón, Jamie? Vous avez parlé de la mine Molejón.
    Oui.
    Vous y êtes allé?
    Je ne me suis pas rendu sur le site d'exploitation; je suis allé dans la collectivité.
    Mais vous ne vous êtes pas rendu à la mine. Vous avez seulement entendu...
    Nous avons rendu visite à la collectivité avant l'ouverture de la mine, et je n'y suis jamais retourné.
    J'ai entendu le témoignage de quelques-uns de mes amis aussi, et ils m'ont dit le contraire.
    Par ailleurs, vous avez parlé des dispositions. Vous avez abordé certaines dispositions, dont la structure actuelle. Vous avancerez qu'il n'y a aucune donnée probante, vous n'y voyez pas de problème; vous avez dit que c'était une question de croyances idéologiques ou philosophiques. Je vous cite. Par conséquent, à mon avis — et j'ajouterais du point de vue de n'importe quelle personne logique —, peu importe les dispositions, je conclus que, si vous n'y croyez pas sur le plan idéologique ou philosophique, c'est sans importance. Et je crois comprendre — si je ne m'abuse — que votre coalition n'y croit pas.
    Alors, d'une part, vous dites que ces dispositions sont les bienvenues — et c'est ce que vous avez dit —, mais elles n'ont pas été mises à l'épreuve. Quel message devons-nous en tirer? Il y a deux choses, à mon avis: si elles n'ont pas été mises à l'épreuve, c'est peut-être que tout va bien; sinon, nous les condamnons sans même devoir les invoquer.
    Est-ce que cela a du sens?
    Et ma dernière question, monsieur le président, est la suivante: votre coalition a-t-elle déjà été en faveur d'un accord? Vous venez ici, dites que vous n'êtes pas en faveur de l'accord, mais vous n'avez jamais vraiment proposé de solutions ou de conditions qui vous permettraient d'être en faveur d'un accord grâce à l'ajout de certaines dispositions.
    Alors, votre allocution était merveilleuse, mais vous ne nous avez rien proposé.

  (1635)  

    Pouvez-vous me donner un exemple d'accord de libre-échange qui n'a pas ces...
    Non, je vous pose la question. C'est vous, le témoin. Dites-moi quel accord vous avez appuyé.
    Nous n'avons jamais appuyé un accord de libre-échange qui contient de telles dispositions.
    Cela vient de votre désapprobation sur le plan idéologique ou philosophique.
    Non, c'est parce que nous observons constamment des cas d'abus découlant de ces dispositions et parce que les mesures de protection prévues...
    Pourquoi diriez-vous...
    ... n'ont pas été mises à l'épreuve...
    Pourquoi diriez-vous, et je vous cite, que vous voyez « ces dispositions d'un bon oeil, mais qu'elles n'ont pas été mises à l'épreuve »?
    J'estime qu'il est problématique de mettre tous ses oeufs dans le panier que constitue cette seule clause, qui va à l'encontre du modèle établi pour les dispositions touchant la relation entre l'investisseur et l'État...
    Mais, si vous avez une disposition, monsieur Kneen, qui a pour objectif de dissiper une préoccupation donnée, et, si la disposition n'est jamais invoquée, cela signifie que le problème n'est jamais survenu, n'est-ce pas?
    Non, la disposition préventive a été mise en oeuvre récemment. Elle est inscrite dans le modèle canadien, l'APIE.
    Monsieur le président, ma collègue, une invitée, n'a qu'une question, alors, je vous en prie. C'est une invitée qui n'a qu'une seule question.
    Monsieur Cannis, si la réponse ne vous intéresse pas, c'est très bien. Allez-y.
    J'ai terminé.
    Vous vous êtes exprimé; si vous me permettiez d'en faire autant, je vous en saurais gré.
    Je vous en prie.
    Je ne crois pas vraiment que nous ayons le temps. Je crois que M. Cannis s'est fait comprendre. Je ne crois pas qu'il voulait vraiment une réponse.
    Quoi qu'il en soit, M. Clarke est-il de retour?
    Monsieur Clarke, pouvez-vous nous entendre à Panama?
    [Note de la rédaction: difficultés techniques]
    Eh bien, je suis désolé, nous ne pourrons pas non plus entendre la réponse à votre question, monsieur Keddy, alors il y a une occasion pour chacun des témoins où nous n'aurons pas pu entendre la réponse à la dernière question.
    Quoi qu'il en soit, nous allons devoir quitter ces témoins et les remercier. Je suis désolé que nous n'ayons pas eu le temps de terminer les questions, et d'autres intervenants auraient aussi aimé avoir leur tour.
    Sur ce, je vais remercier M. Clarke — que vous m'entendiez ou non — de sa participation aujourd'hui.
    Du reste, monsieur Kneen, vous pourrez sûrement poursuivre la discussion dans le couloir. Merci.
    Merci.
    Nous allons prendre un moment pour faire entrer les prochains témoins.

    


    

  (1640)  

    Notre prochaine série de témoins est divisée en deux groupes, et je suis désolé de ne pas avoir plus de temps, mais nous allons leur donner la parole immédiatement.
    Joy Nott — je vous souhaite la bienvenue — est la présidente de l'Association canadienne des importateurs et exportateurs, et Carol Osmond en est la vice-présidente, Politique.
    Nous accueillons encore une fois Carlo Dade, directeur exécutif de la Fondation canadienne pour les Amériques, FOCAL — ravi de vous revoir — et Marina Connors et Mark Richards, attachés de recherche, accompagnent M. Dade.
    Je suis certain que vous connaissez bien la formule, alors je vais vous laisser commencer.
    Je donnerai tout d'abord la parole à Mme Nott, si vous aimeriez faire une déclaration préliminaire.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs.
    Je m'appelle Joy Nott, et je suis présidente d'I.E.Canada, l'Association canadienne des importateurs et exportateurs. Carol Osmond, notre vice-présidente, Politique, m'accompagne aujourd'hui. Nous aimerions vous remercier de nous avoir donné l'occasion de comparaître ici aujourd'hui pour manifester notre appui à l'égard du projet de loi C-46, l'Accord de libre-échange entre le Canada et le Panama.
    D'abord, quelques mots sur notre organisme. I.E.Canada est un porte-parole de premier plan du milieu commercial depuis 1932. Nous représentons de petites, moyennes et grandes entreprises de partout au Canada: des fabricants, des importateurs, des exportateurs, des grossistes, des distributeurs et des fournisseurs de service à l'intention du milieu commercial dans tout un éventail de secteurs industriels, dont les cabinets de services professionnels, comme les cabinets juridiques et comptables, les courtiers en douanes et les compagnies de transport.
    I.E.Canada est née sous le nom d'Association canadienne des importateurs et exportateurs, en 1932, dans la foulée d'une recrudescence des obstacles tarifaires et des mesures protectionnistes. Un pourcentage important de nos membres se décrivent toujours comme étant principalement des importateurs, mais un pourcentage encore plus grand sont à la fois importateurs et exportateurs. Nos membres reflètent la réalité d'aujourd'hui.
    Le commerce mondial est plus intégré que jamais, et les sociétés partout dans le monde s'efforcent de demeurer concurrentielles et productives. Les négociants chez nous et à l'étranger sont constamment à affût de nouvelles sources d'approvisionnement rentables, que ce soit aux fins de la vente de produits finis à des consommateurs ou de l'approvisionnement en pièces et en composantes pour leurs activités de fabrication.
    Les consommateurs canadiens profitent d'un meilleur choix de produits à des prix moins élevés, tandis que nos fabricants sont capables de soutenir la concurrence en recherchant des marchés émergents pour leurs produits. En sa qualité d'association représentant à la fois les importateurs et les exportateurs, I.E.Canada milite en faveur de la libéralisation et de la facilitation du commerce. Nous avons aussi pour objectif de fournir aux entreprises l'information et les outils dont elles ont besoin pour demeurer concurrentielles à l'échelle internationale.
    I.E.Canada et ses membres sont en faveur de l'accord de libre-échange entre le Canada et le Panama et de l'adoption rapide du projet de loi C-46. Le Panama est un marché relativement modeste, dans l'ensemble, pour les exportateurs canadiens, mais, comme l'ont fait valoir d'autres témoins devant le comité, pour des entreprises et des secteurs particuliers, le Panama offre un marché important qui prendra probablement de l'envergure une fois l'accord de libre-échange mis en oeuvre.
    L'économie du Panama repose principalement sur le secteur des services. Il s'agit de l'une des économies qui enregistre la plus forte croissance en Amérique latine. Par conséquent, elle présente des débouchés pour les exportateurs canadiens. Par exemple, vu le boum actuel de la construction au Canada, la Société canadienne d'hypothèques et de logement et Exportation et Développement Canada voient d'un oeil optimiste les débouchés pour les fournisseurs de produits du bâtiment canadiens. Les grands projets d'infrastructure, comme le projet d'expansion du canal de Panama, les investissements dans la zone économique spéciale Panama-Pacifique à l'ancienne base aérienne de Howard et les projets touristiques ainsi que l'accroissement de la demande de logements résidentiels, alimentée par l'augmentation des revenus, créent une demande pour un large éventail de produits du bâtiment de qualité, dont la majeure partie sera importée.
    Comme vous le savez, Minera Panama S.A., filiale à 100 p. 100 d'Inmet Mining Corp., société canadienne, a récemment attribué un grand contrat d'ingénierie à SNC Lavalin et à ses partenaires en vue de l'élaboration d'un projet d'extraction du cuivre au Panama. Le projet offrira aussi des débouchés aux exportateurs canadiens de matériaux du bâtiment et d'équipement d'exploitation minière.
    Bien sûr, l'accord de libre-échange entre le Canada et le Panama s'inscrit dans une stratégie plus générale visant à promouvoir le commerce entre le Canada et l'Amérique latine et à diversifier les marchés d'exportation du Canada. Par exemple, nous étions heureux de voir l'adoption de projets de loi portant sur la mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et le Pérou, au cours de la dernière session parlementaire, et de l'Accord de libre échange entre le Canada et la Colombie, durant la présente session. Vu son emplacement stratégique, le Panama peut servir de tremplin aux sociétés canadiennes qui souhaitent accéder à des marchés à l'échelle de l'Amérique latine.
    De récents événements économiques aux États-Unis ont servi à nous rappeler, de façon éloquente, la nécessité de diversifier nos marchés d'exportation en Amérique latine et ailleurs et notre besoin de nous affranchir de notre dépendance à l'égard de notre voisin du Sud. En mettant en oeuvre un accord de libre-échange avec le Panama avant les États-Unis, nous permettons aux Canadiens de prendre de l'avance sur leurs concurrents américains et de s'approprier une part de marché. Toutefois, nous risquons peut-être de rater cette occasion. On a récemment signalé que les États-Unis et le Panama sont sur le point de conclure une entente d'échange de renseignements fiscaux qui pourrait ouvrir la voie à l'approbation de l'accord de libre-échange entre les États-Unis et le Panama par le Congrès américain.

  (1645)  

    La conclusion d'un accord de libre-échange n'a pas seulement pour objectif de réduire les droits et d'abattre les obstacles au commerce. Il accroît du coup la visibilité de chaque partie à l'entente dans le pays de l'autre. Il permet aussi de resserrer les liens entre les gouvernements et entre les milieux commerciaux et les citoyens respectifs des deux pays. Or, la signature de l'accord et l'adoption de la législation de mise en oeuvre nécessaire ne suffisent pas en soi. Pour s'assurer que les Canadiens profitent pleinement de l'accord et d'accords semblables, le gouvernement, en collaboration avec le secteur privé, doit faire la promotion des débouchés auprès des sociétés canadiennes au moyen de séances d'information et de liaison, de missions commerciales, et d'autres activités connexes. Nous considérons que l'ouverture récente, par Exportation et Développement, d'un bureau au Panama est un grand pas dans cette direction.
    En somme, I.E.Canada et ses membres sont en faveur de l'accord de libre-échange entre le Canada et le Panama, et nous demandons instamment aux députés d'adopter rapidement le projet de loi C-46.
    Au nom des membres d'I.E.Canada, nous aimerions aussi vous remercier de nous avoir donné l'occasion de comparaître ici aujourd'hui, et nous nous ferons un plaisir de répondre à vos questions au moment opportun.
    Merci.
    Merci, madame Nott.
    Si je comprends bien, monsieur Dade, vous avez une brève déclaration à faire?

[Français]

    C'est un plaisir d'être ici de nouveau devant les membres de ce comité. Cette fois-ci, je suis accompagné de deux recherchistes de la FOCAL.

[Traduction]

    Nous serons tous heureux de répondre aux questions au sujet du mémoire en faveur du projet de loi C-46 que nous avons préparé et que nous vous avons envoyé.
    Permettez-moi simplement de préciser que notre exposé différera un peu de ceux que vous avez entendus jusqu'à présent. Les témoins ont beaucoup abordé les détails de l'accord. Nous aimerions prendre du recul et regarder le contexte de l'accord, où il s'inscrit et pourquoi il est important pour le Canada.
    Comme vous le savez, nous nous sommes engagés au pays dans un processus de...

[Français]

    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. M. Dade vient de mentionner qu'il a fait parvenir un mémoire au comité, mais on ne l'a pas en main.
    Il était à la traduction. J'ai reçu un courriel du greffier du comité, ce matin, disant qu'il était arrivé.

[Traduction]

    Je suis désolé, je ne l'ai pas reçu non plus.
    Apparemment, vous ne l'avez pas?

  (1650)  

[Français]

    Je l'ai trouvé.

[Traduction]

    Eh bien, voilà.
    Il semble que nous en avons une copie.
    Oh, nous en avons d'autres. Voilà.
    Merci, monsieur Laforest. Je n'aurais pas voulu que vous manquiez cela.

[Français]

    Ce n'est pas très long.

[Traduction]

    Quoi qu'il en soit, monsieur Dade, le comité aura des devoirs à faire, et cela aidera probablement nos membres au moment des questions. Nous ne tiendrons pas compte de cette interruption pour le calcul de votre temps.
    Je dirais que, si on veut procéder rapidement, les graphiques contiennent les données les plus importantes, alors je vais souvent m'y reporter au cours de l'exposé. Le corps du texte peut être examiné plus tard.
    Quant au contexte de l'accord, nous avons entrepris le processus de diversification des échanges au pays, initiative extrêmement importante pour le Canada. Les ententes que nous avons conclues nous ont permis de franchir une étape importante à cet égard.
    En outre, à la FOCAL, nous venons d'entreprendre des travaux de recherche au sujet de la thèse de Jeff Rubin sur l'incidence de la flambée des prix du pétrole sur la compétitivité. De concert avec la Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes de l'ONU, nous nous sommes essentiellement penchés sur les conséquences de cette tendance à la hausse des prix du pétrole pour la compétitivité commerciale dans certains pays de l'Amérique latine comparativement aux pays asiatiques. Essentiellement, les travaux de recherche ont confirmé la thèse de M. Rubin, à savoir que la flambée des prix de pétrole réduira l'incidence de la mondialisation au profit du régionalisme. Nous allons importer moins de produits de l'Asie pour en importer plus dans les limites de notre hémisphère. Alors, il est d'une importance fondamentale et cruciale de conclure des traités comme celui avec le Panama, compte tenu de cette nouvelle ère du régionalisme.
    Un autre aspect au sujet de l'accord tient au fait que le Panama, comme on l'a mentionné, devient rapidement une plaque tournante au chapitre des services et des finances, en plus du commerce. Essentiellement, le pays sera le Singapour ou le Hong Kong de notre hémisphère. C'est un endroit où l'on voudra exercer des activités. C'est un endroit où l'on voudra être profondément intégré si l'on veut faire affaire dans l'hémisphère. Ainsi, voilà une autre raison pour laquelle l'accord panaméen est important.
    C'est intéressant. La semaine dernière ou la semaine d'avant, à Ottawa, nous avons accueilli Roger Noriega, ex-adjoint du secrétaire d'État des affaires de l'hémisphère occidental au Département d'État. Nous lui avons demandé, à la lumière de sa connaissance des transformations au Congrès, à quoi ressemblait le programme commercial et ce qu'il pensait du travail du Canada sur le plan des accords de libre-échange. Il a mentionné la crainte au sujet de l'accord panaméen, en raison de ce qui s'était passé avec l'accord colombien. Essentiellement, nous l'avons accueilli ici au Parlement, et, dans le cadre d'un discours prononcé en ville, il a déclaré que les États-Unis risquaient de voir des échanges d'une valeur de deux milliards de dollars leur glisser entre les doigts au profit du Canada. Et la situation avec le Panama sera la même.
    J'éprouve un peu de plaisir à l'entendre dire cela, vu que Roger est celui qui a rédigé la loi Helms-Burton lorsqu'il était membre du personnel du comité sénatorial. Alors, de le revoir grimacer ici au sujet du commerce canadien était assez agréable.
    Mais permettez-moi de vous présenter une autre citation, des U.S. Wheat Associates et de la National Association of Wheat Growers des États-Unis. Il s'agit d'une déclaration du président des U.S. Wheat Associates et du chef de la direction de la National Association of Wheat Growers:
Le Parlement canadien a ratifié un accord de libre-échange bilatéral... avec la Colombie qui, une fois mis en oeuvre, exemptera de droits de douane le blé canadien qui entre dans ce pays.
L'accord confère un avantage immédiat sur le plan du prix à un grand producteur de blé concurrent dans un marché où les exportateurs de blé américains s'étaient taillés une place dominante. Cela signifie que les producteurs de blé américains pourraient perdre des ventes d'une valeur de 70 millions de dollars aujourd'hui au profit du Canada, au moment où ils peuvent le moins se le permettre. De fait, les familles agricoles américaines risquent maintenant de perdre une part importante de leurs exportations agricoles vers la Colombie, de l'ordre de presque 1,7 milliard de dollars, dont 330 millions de dollars en exportations de blé.
    Lorsqu'on parle du Panama, la situation est très semblable. Si vous regardez le mémoire, nous avons défini les secteurs où le Canada et les États-Unis se font concurrence. Et, quant aux exportations américaines, vous avez plusieurs exemples de secteurs où on s'en sort très bien dans la région, mais pas tant au Panama à l'heure actuelle. C'est une situation qui offre des débouchés, et ils sont extrêmement importants pour nous.
    Je tiens aussi à mentionner que l'UE négocie actuellement un accord avec le Panama. Elle en a conclu un avec la Colombie.
    Nous avons un avantage sur les États-Unis grâce aux tarifs douaniers. Nous avons un avantage sur l'UE qui tient à la distance et aux coûts d'expédition. L'avantage sur l'UE s'accroîtra et deviendra permanent. Celui sur les États-Unis est temporaire. Alors, il est essentiel de battre le faire pendant qu'il est chaud.
    Autant que nous sachions, nous avons environ quatre ans avant que les États-Unis réussissent à mettre tout en place sur le plan du commerce.
    Si vous vous souvenez bien, les accords avec le Costa Rica et le Chili ont été adoptés, malgré le fait que les présidents de l'époque étaient des canards boiteux après l'élection de mi-mandat. Nous nous dirigeons probablement vers un scénario semblable où les États-Unis parviendront à faire bouger les choses dans le cadre de leur programme de libre-échange.

  (1655)  

    Je terminerai en faisant deux commentaires.
    Le premier porte sur le Panama. C'est un pays stable qui a bonne réputation et qui est considéré comme un État bien gouverné. Dans les rapports sur les risques politiques, les rapports sur les droits de la personne ou tout autre type de rapports fournissant des statistiques sur le pays, on dresse un portrait relativement favorable du Panama. C'est un bon partenaire. C'est le type de pays avec lequel on veut faire affaire, un pays qui est déterminé à faire des échanges commerciaux.
    Les négociations ont avancé à une vitesse record. Je ne me rappelle pas avoir vu d'autres négociations être menées aussi rondement. Les Panaméens sont des partenaires sérieux, et ils demeureront des partenaires sérieux lorsqu'il y aura des choses à régler. Jusqu'à maintenant, ils ont fait preuve de sérieux dans les négociations. C'est un point important.
    Deuxièmement, permettez-moi de faire un commentaire plus général au sujet du programme commercial. Nous pouvons exploiter un créneau où nous sommes dans une position avantageuse par rapport aux États-Unis, au Panama, à la Colombie et au Pérou. Nous avons conclu des accords tout le long de la côte du Pacifique. Il s'agit d'un programme qui nous occupera à court terme. Mais il s'agit aussi d'une belle occasion de penser à plus long terme. Que faire ensuite au chapitre du libre-échange?
    Le Canada est avantagé par rapport aux États-Unis parce que cela prendra environ quatre ans avant que les Américains replongent dans ce dossier. Nous avons la chance unique de profiter de la prochaine grande étape dans le domaine des échanges commerciaux. Je parle ici des négociations transpacifiques qui visent à établir des accords de libre-échange entre les pays qui ceinturent le Pacifique.
    Trois accords semblables étaient censés être conclus. Chacun d'eux est actuellement au point mort. Les Asiatiques sont visés par l'un de ces accords, les Latinos-Américains négocient l'Arco del Pacifico, et les Américains travaillent à la création du Partenariat transpacifique. Du côté des Américains, les négociations sont au point mort pour des raisons évidentes, c'est-à-dire l'opposition du Congrès. Les négociations relatives à l'accord des Latinos-Américains ont été temporairement interrompues en raison de l'intransigeance dont font preuve le Nicaragua et l'Équateur. Mais, croyez-moi, les Latinos-Américains entendent se regrouper et réorienter les négociations. Les Américains vont un jour ou l'autre se ressaisir et s'entendre sur cet important traité.
    Toutefois, nous sommes exclus et laissés en marge de chacune des initiatives en cours. Lorsque les négociations relatives à ces accords reprendront, nous ne pourrons pas nous permettre d'être encore mis de côté. Nos démarches en Colombie, au Pérou et au Panama nous ont placés dans une meilleure position que les Américains pour mener la barque et nous imposer sur le terrain.
    Lorsqu'on pense aux possibilités de cet accord, on doit savoir qu'il s'agit du bloc commercial le plus imposant du globe. On parle ici d'entreprises qui cherchent à s'établir dans le Nouveau Monde, d'entreprises asiatiques qui cherchent à s'implanter de ce côté-ci de l'océan. Où vont-elles s'établir? C'est le genre d'emplois que nous voulons attirer au pays.
    Le cabinet McKinsey a produit un rapport et mené des travaux sur le commerce avec l'Asie et sur l'importance pour le Canada de conclure ce genre d'accords. Si on regarde le transbordement, si on regarde le transport aérien, ce sont tous des domaines où nous devrions vraiment jouir d'un avantage particulier. Ce qui fait notre force, c'est que nous ne sommes ni l'Asie ni l'Amérique latine. Mais cela fait aussi notre faiblesse. Ce n'est qu'en tirant avantage de ces accords, en envisageant un programme commercial à long terme et en faisant les types d'investissements dont a besoin l'architecture institutionnelle de notre pays que nous pourrons être bien préparés pour l'avenir.
    Dans le cas du Panama, c'est une très bonne affaire. Ce ne devrait pas être bien sorcier pour le comité. Mais la question qu'il faut vraiment se poser est la suivante: que devons-nous faire ensuite? Comment continuer à miser sur cette réussite?
    Merci.
    Merci, monsieur Dade.
    Nous allons commencer la première série de questions, et j'espère que vous aurez tous la possibilité d'intervenir; peut-être que nous aurons deux séries de questions cette fois-ci.
    Nous allons commencer par M. Cannis; vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai été assez intrigué par l'expression « ce n'est pas sorcier ». J'ai bien aimé cela.
    Merci, et bienvenue à tous les témoins.

  (1700)  

    Cela signifie qu'on peut facilement comprendre.
    Des voix: Oh, oh!
    Vous avez parlé des entreprises asiatiques, des entreprises européennes et des entreprises américaines. Elles cherchent toutes à avoir leur part du gâteau, comme je le dis souvent. Permettez-moi de vous citer; vous avez dit: « Nous sommes exclus. » Je crois que c'est quelque chose que de nombreux membres du comité — tant ceux de l'opposition que du parti au pouvoir — ne cessent de répéter. Nous ne voulons pas être exclus. Nous voulons notre part du gâteau, dans les limites fixées par des lignes directrices adéquates, comme vous l'avez probablement entendu si vous étiez ici plus tôt.
    Monsieur Dade, j'étais très heureux lorsque vous avez dit que nous avons signé l'Accord de libre-échange Canada-Colombie. Même s'il subsiste des obstacles à surmonter et des préoccupations à prendre en compte, on a prévu des dispositions pour corriger la situation. Notre collègue, Scott Brison, ancien critique en la matière, a proposé une modification qui semble avoir été bien reçue.
    Malgré toutes les difficultés, vous avez dit que le Panama est un pays avec lequel on veut faire affaire. Vous avez utilisé l'expression « pays stable ». Je ne me suis jamais rendu dans ce pays — contrairement au premier témoin, qui n'a toutefois pas visité la mine —, mais certains de mes amis canadiens m'ont dit qu'ils avaient été très impressionnés par la qualité de ses infrastructures. Ils ont aussi fait remarquer que le Panama n'est pas parfait, mais trouvez-moi un pays aujourd'hui qui est parfait.
    Je veux seulement faire un commentaire avant de poser ma question à Mme Nott. Mme Nott a mentionné que les États-Unis étaient sur le point de signer un accord. Je reviens sur son affirmation parce que l'un des obstacles qu'on a évoqués devant le comité est l'instabilité financière du pays — j'essaie de trouver les termes justes ici.
    Je me demande, madame Nott, si vous pourriez fournir plus de détails à ce sujet, car, à la lumière de ce que vous avez affirmé, je présume que, une fois que les Américains auront signé cet accord — et il semble bien qu'ils sont en voie de le signer —, ils iront ensuite de l'avant avec la conclusion d'un accord de libre-échange. Ai-je raison de présumer que c'est ce qui se passera? À moins que nous ne bougions aussi rapidement que possible, nous pourrions nous retrouver dans la situation dont parlait M. Dade et manquer encore le bateau. Nous avons été un peu laissés pour compte dans le cas de l'Accord de libre-échange de l'Amérique centrale, et j'espère bien que nous nous reprendrons à ce chapitre.
    Pourriez-vous s'il vous plaît nous fournir d'autres détails à cet égard?
    Bien sûr.
    En ce qui a trait aux Américains et à la situation au Panama, j'ai récemment assisté — aux États-Unis — à une réunion de conseil de district qui se tenait à Détroit, en présence de représentants d'environ 500 sociétés américaines.
    Le secrétaire Locke était là, et il a fait des déclarations concernant divers accords de libre-échange et diverses questions liées au commerce que les États-Unis examinent actuellement. Dans l'une de ses déclarations, il a fait mention des négociations entourant un éventuel accord de libre-échange avec le Panama, et les gens dans la salle se sont mis à applaudir à tout rompre pour montrer qu'ils appuyaient sans réserve une telle idée, ce qui m'a franchement prise par surprise. Je ne m'attendais pas à une telle réaction de la part de l'auditoire.
    Cette journée-là, j'étais une conférencière invitée. Mon exposé portait sur les négociations entre le Canada et l'Europe. C'est le thème qu'on m'avait demandé d'aborder. Les membres de l'auditoire ont posé des questions, et ils ont interrogé l'un des conférenciers qui m'accompagnaient sur l'état actuel de nos négociations avec le Panama, et c'est ce qui a amené le secrétaire Locke à faire son commentaire au sujet du Panama.
    Je crois que, cette journée-là, la tension dans la salle était palpable, en ce sens que les États-Unis — du moins les Américains qui étaient présents à la réunion — avaient certainement l'impression qu'ils devaient se dépêcher parce que le Canada est en train de négocier ces accords et qu'il va les devancer.
    Madame Nott, vous avez mentionné que les États-Unis entendent se pencher sur la question du blanchiment d'argent et des comptes bancaires. Les Américains ont pris une telle direction, n'est-ce pas?
    C'est exact.
    C'est l'un des points qui ont été soulevés devant le comité. Alors, cet aspect est pris en considération.
    Oui. Les Américains prennent cet aspect en considération.
    D'accord. Bien.
    Monsieur Dade, souhaitiez-vous ajouter quelque chose?
    Je voudrais seulement faire remarquer que, pour ce qui est de l'orientation prise par les États-Unis, depuis les dernières élections, il y a de plus en plus de membres du Congrès qui s'opposent au commerce international. Je crois qu'il faudra vraiment plus que les dénonciations de la Commission canadienne du blé et d'autres organismes pour faire bouger les Américains. Mais on peut être certains qu'ils finiront par bouger. Lorsque les histoires au sujet de la Commission canadienne du blé seront révélées, lorsque l'équilibre sera rompu dans le pays et que les gens feront le lien avec l'emploi, l'aversion momentanée des Américains pour le commerce international disparaîtra, et elle disparaîtra très rapidement. Cela s'est produit par le passé aux États-Unis.
    Je dirais que, à court terme, les perspectives sont probablement nulles. Toutefois, à plus long terme, à mesure que les pertes d'emplois et les déficits commerciaux s'accumuleront, que les agriculteurs et d'autres groupes perdront des occasions d'affaires, que les faits seront révélés, les choses bougeront.
    Mais, monsieur Dade, il s'agit de manœuvres électoralistes, et les candidats ont tendance à faire pas mal de bruit durant une campagne, et, parfois, ils en disent un peu trop.
    Partout où nous allons... Nous venons tout juste de rencontrer nos homologues de l'Union européenne. Nous lisons toutes sortes d'histoires, nous entendons parler des difficultés que connaissent tous les pays, et il y a un dénominateur commun: nous croyons tous que nous allons nous en tirer parce que nous allons accroître nos échanges commerciaux. Nous allons commercer et nous allons créer des emplois.
    Je dois donc vous dire que cela me laisse perplexe lorsque j'entends des témoins dire au comité: « Non, ne faites pas de commerce. Laissez tous les autres faire du commerce parce que c'est de cette façon qu'ils se sortiront du pétrin. Mais le Canada ne devrait pas se mêler de cela. » Croyez-vous la même chose?
    Vous savez, c'est le genre de chose qu'on entend en ce moment aux États-Unis. Actuellement, les politiques américaines et le sens commun ne semblent pas aller de pair à plusieurs égards. Il semble qu'il s'agisse d'un autre de ces cas aux États-Unis.
    Cela va à l'encontre de leurs propres intérêts; ce qu'ils font est contraire à leurs propres intérêts. Mais il y a eu des élections aux États-Unis et, malheureusement, un changement de cap dans les politiques. Ce n'est pas vraiment surprenant. Les pays où on tient un discours plus sensé ont tendance à s'en sortir un peu mieux.
    Je le répète: cela s'en vient. Avec la dernière grande série de négociations, les mouvements commerciaux... Les élections de mi-mandat? Le gouvernement n'est plus qu'un canard boiteux. C'est là-dessus que nous misons. C'est le créneau que nous devons exploiter. Il n'est pas énorme, et on veut que nos entreprises participent. Vu les autres avantages que présentent les Américains, il faut profiter de la chance de passer quelques années sur le terrain pour nouer des liens, pour établir des relations.

  (1705)  

    Je vous remercie beaucoup.
    Monsieur le président, merci.
    Parfait. On est synchronisé.
    Monsieur Laforest.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vais faire un aparté sur ce que M. Cannis vient de dire. Si des gens s'opposent parfois à des traités de libre-échange, ce n'est pas qu'ils soient nécessairement contre le commerce, mais c'est parce qu'ils tiennent compte d'autre chose que de la seule libéralisation du commerce. Il y a toute la question du respect des droits de la personne et des travailleurs. En ce qui concerne le Panama, il y a aussi la question de la convention fiscale, du blanchiment d'argent et de l'évasion fiscale en particulier.
    Dans un premier temps, j'ai une question à vous poser, madame Nott. Dans votre introduction, vous avez parlé d'une zone économique spéciale au Panama. Faites-vous allusion à une fiscalité qui est avantageuse pour les entreprises canadiennes?

[Traduction]

    Je crois que, avant toute chose, je dois dire que je ne suis en aucun cas une spécialiste de la fiscalité. Je dois le dire d'emblée.
    À ma connaissance, la zone de libre-échange dont je parlais est une zone franche pour le secteur de la fabrication. Je ne suis pas en mesure de commenter toute politique commerciale s'appliquant à cette zone. Il s'agit d'une zone de libre-échange comme celles, par exemple, des États-Unis, des zones où les biens fabriqués sont exemptés de droits de douane.

[Français]

    Par la suite, vous avez fait référence à une convention fiscale ou d'échange de renseignements fiscaux qui serait signée entre le Canada et le Panama dans le cadre de cette entente de libre-échange. Par contre, nous avons questionné le ministre à ce sujet, et il a répondu avoir écrit à son homologue à Panama. Les fonctionnaires qui ont comparu devant ce comité ont dit n'avoir obtenu aucune réponse.
    Jusqu'à maintenant, les gens du Panama et ceux du Canada perçoivent le commerce international de façon fort différente. Au Canada, on veut s'entendre sur une convention d'échange de renseignements fiscaux, et au Panama, on parle d'un régime de double imposition qui ferait tomber à zéro les revenus de l'Agence du revenu du Canada dans certaines situations. On n'en est pas encore à cette étape.
    Pour l'Association canadienne des importateurs et exportateurs, est-ce vraiment une question importante? Allez-vous toujours convenir d'une telle entente, même s'il n'y a pas d'accord sur un échange de renseignements fiscaux? En fin de compte, si l'Agence du revenu du Canada perd des revenus, ce sont tous les citoyens canadiens qui doivent payer pour cela, plutôt que les gens qui sont exemptés.
    Est-ce que votre appui est inconditionnel?

[Traduction]

    Laissez-moi d'abord vous dire que je ne suis pas une experte de la fiscalité. Notre association défend les intérêts de ses membres dans des situations qui se rapportent au commerce international de produits et services plutôt que dans le domaine de la fiscalité.
    Je l'ignore. Je n'ai pas pris connaissance des procès-verbaux des réunions précédentes. Mais je suis persuadée qu'il existe des associations qui pourraient mieux répondre à la question concernant la fiscalité.
    Pour ce qui est de la question portant sur le commerce des produits et services — et si nous mettons de côté la question relative à la fiscalité —, l'entente d'échange de renseignements fiscaux dont je parlais fait actuellement l'objet de discussions entre les États-Unis et le Panama, mais, à ma connaissance, pas entre le Canada et le Panama.
    Encore une fois, à la conférence à laquelle j'ai assisté, le secrétaire Locke semblait croire qu'il s'agissait d'un grand pas en avant. Il a déclaré officiellement que les États-Unis envisageaient de conclure un accord de libre-échange. C'est dans ce contexte que j'ai fait ces commentaires, pas dans le contexte de la fiscalité.
     En ce qui concerne la position adoptée par notre association au nom de ses membres, nous n'examinons pas les questions liées à la fiscalité. Mais si on parle du libre-échange des produits et services — et strictement dans ce domaine —, nous appuyons effectivement le projet de loi C-46.

  (1710)  

[Français]

    Monsieur Dade, je vais poursuivre avec vous. J'ai eu le temps de jeter un coup d'oeil au mémoire. En page 4, vous parlez des avantages de cet accord de libre-échange en disant que « le caractère stable et sophistiqué de son secteur bancaire font du Panama une destination attrayante pour les investissements ».
    Entendez-vous par là que cet accord est avantageux parce que les entreprises qui vont investir au Panama pourront bénéficier de déductions fiscales plus intéressantes? Il y a donc une forme d'évasion fiscale qui peut être avantageuse. Est-ce ce à quoi vous faites référence?
    Non. Il y a beaucoup de raisons d'investir et d'établir une entreprise financière au Panama. Il y a une infrastructure, des fonctionnaires et des employés qui sont bien éduqués et bien formés dans tous les aspects d'une entreprise financière mondiale. C'est la première chose. Aussi, le Panama est un bon transport nexus. C'est plus facile d'y voyager et l'infrastructure de communications y est supérieure.
    Il y a beaucoup de raisons pour établir une firme d'investissement au Panama. Il est certain qu'un pays voudrait renforcer ces avantages concurrentiels par des lois.

[Traduction]

    Chaque pays applique un régime fiscal différent — nous pouvons le constater à l'échelle mondiale —, y compris les pays avec lesquels le Canada a déjà conclu des accords de libre-échange, et, à ce moment-là, ce genre de questions n'avaient pas été soulevées.

[Français]

    Permettez-moi de répondre à votre question sur

[Traduction]

le phénomène de l'évasion fiscale. C'est intéressant. Nous avons examiné les activités de l'ARC. Et nous avons découvert que l'ARC menait actuellement combien d'enquêtes liées au Panama?
    Aucune. À notre connaissance, il n'y a aucune enquête en cours sur des transactions douteuses au Panama. Évidemment, il y a peut-être des enquêtes qui sont confidentielles. Il serait peut-être mieux que vous vous en informiez auprès de l'ARC. Mais nous savons tous ce qui est arrivé en Suisse l'an dernier et ce qui s'est passé au Liechtenstein. Ces questions ont certainement été soulevées. Le Canada n'a conclu aucun accord de libre-échange avec l'un ou l'autre de ces pays. C'était seulement quelque chose que nous trouvions un peu curieux.
    Cet aspect n'a pas été discuté. Les enquêtes de l'ARC étaient en cours lorsque le comité a discuté du traité avec le Liechtenstein.

[Français]

    Ces deux pays ont des populations qui sont familières à l'ARC,

[Traduction]

mais, fait intéressant, c'est seulement dans le cas du Panama, qui ne fait l'objet d'aucune enquête, où il n'y a pas 2 000 Canadiens dans la mire de l'ARC, que cet aspect a été soulevé. C'est très curieux qu'on fasse mention de cet aspect à ce moment-ci et que les gens associent le Panama au trafic de la drogue et au blanchiment d'argent, mais qu'ils n'aient pas évoqué cet aspect dans le cas du Liechtenstein et de la Suisse, malgré le fait que les négociations allaient bon train. Si on regarde les procès-verbaux du comité, on voit qu'aucun témoin n'a fait mention de cela.

[Français]

    Je dirais quasiment qu'il ne s'agit pas d'une bonne nouvelle. De toute façon, vous savez que le Panama est encore sur la liste grise de l'OCDE des pays qui favorisent l'évasion fiscale. Donc, s'il n'y a pas d'enquête, je pense que ce que vous nous dites n'est pas nécessairement une bonne nouvelle.

[Traduction]

    Je suis désolé, mais le temps est écoulé.
    Le Panama est sur le point d'être retiré de la liste. Cela prend du temps. Le Liechtenstein aussi sera bientôt retiré de la liste.
    Veuillez m'excuser, monsieur Dade.
    Désolé, mais nous avons dépassé le temps alloué et nous avons aussi utilisé le temps de M. Julian.
    C'est une blague. Allez-y, monsieur Julian.

  (1715)  

    Merci, monsieur le président.
    D'entrée de jeu, je tiens seulement à dire que c'est la quatrième fois qu'on annonce le début des négociations avec les États-Unis concernant l'entente d'échange de renseignements fiscaux, et, comme vous le savez tous, cela fait maintenant huit ans. Chaque fois qu'il y a un peu de pression pour faire adopter cette entente par le Congrès des États-Unis, le gouvernement du Panama annonce qu'il est en train de négocier une autre entente d'échange de renseignements fiscaux. Mais, depuis huit ans, les négociations n'ont abouti à rien. Alors, je crois que nous devrions cesser de faire valoir cela comme un point valable au sujet des négociations sur l'échange de renseignements fiscaux.
    J'aimerais d'abord m'adresser à Mme Nott et à Mme Osmond. À l'instar de M. Cannis, cela fait maintenant six ans que je siège au comité du commerce international, et nous accueillons souvent des gens — par ailleurs bien intentionnés — qui nous disent que la signature de ces accords de libre-échange entraînerait une hausse des exportations.
    Le problème, c'est que, lorsqu'on regarde la valeur en dollars constants de nos exportations vers ces marchés depuis la signature des accords de libre-échange, on constate qu'il y a eu une baisse des exportations, et ce, dans chacun des cas.
    Prenons juste un exemple, le Costa Rica. Avant la signature de l'accord de libre-échange, les exportations canadiennes vers le Costa Rica atteignaient 77 millions de dollars. L'an dernier, elles ont chuté à 73 millions de dollars. Elles sont donc passées de 77 millions à 73 millions de dollars, en dollars constants, et c'est pour cette raison que le ministre du Commerce international calcule souvent en dollars constants: il essaie de cacher le fait qu'il y a eu, en chiffres absolus, une baisse des exportations vers ces marchés.
    Je me demande si l'une d'entre vous souhaitait faire des commentaires, car la politique commerciale du Canada est assez dysfonctionnelle à cet égard. Qu'aimeriez-vous que fasse notre gouvernement pour accroître les ressources destinées à appuyer nos exportateurs?
    Je vais juste vous donner un autre exemple. J'ai rencontré le délégué commercial en Amérique du Sud, et il m'a dit qu'il n'avait même pas assez d'argent pour acheter une tasse de café à des clients éventuels. Le gouvernement actuel ne consacre tout simplement pas d'argent au commerce. Nous dépensons environ 13 millions de dollars à l'échelle mondiale pour promouvoir les produits et les services canadiens. À titre de comparaison, l'Australie dépense 500 millions de dollars à cette fin. Il y a donc un gros problème ici. Aimeriez-vous que le gouvernement du Canada joigne le geste à la parole et fournisse plus de soutien sur le terrain aux exportateurs canadiens?
    Je siège au comité consultatif sur les PME du MAECI. Ce comité est composé de représentants d'entreprises et se réunit deux fois par année. L'Association canadienne des importateurs et exportateurs siège au comité à titre d'observateur. Dans la salle de réunion, les représentants des PME discutent exactement de ce dossier, et, le deuxième jour — la réunion a lieu sur deux jours —, le ministre du Commerce international se joint à nous, et les membres du comité lui transmettent des recommandations.
    Je crois que, à l'heure actuelle, les commerçants canadiens reconnaissent que, bien franchement, nous avons eu la vie très facile au cours des derniers siècles parce que nous sommes voisins des États-Unis. Autrefois, nous n'avions pas vraiment besoin de nous soucier de l'exportation de nos produits et services. Nous n'avions qu'à les envoyer de l'autre côté de la clôture. Maintenant que nous évoluons dans une nouvelle réalité économique, les entreprises canadiennes essaient de trouver de nouveaux débouchés et ne veulent pas nécessairement mettre tous leurs oeufs dans le même panier. Nous menons actuellement des discussions avec le délégué commercial responsable des services pour améliorer et changer certains services. Et je dois dire que le MAECI nous envoie les signaux que nous voulions voir et qu'il offre aux exportateurs toute l'aide dont ils ont besoin, étant donné que, par le passé — et nous sommes effectivement d'accord —, il y avait un écart entre les types de services qui étaient offerts et les types de services dont nous avions besoin.
    Alors, vous croyez qu'il devrait y avoir une augmentation substantielle de l'aide qui est fournie, comme c'est le cas chez nos principaux concurrents. Les États-Unis, l'Union européenne et l'Australie investissent beaucoup plus d'argent que nous — des centaines de millions de dollars — pour promouvoir et soutenir l'exportation de leurs produits et services.
    Les types de services dont nous avons besoin sont peut-être un peu plus concrets qu'une aide financière. Je ne vais pas me prononcer sur l'utilité d'offrir un soutien financier. Les représentants des PME s'intéressent non pas tant au soutien financier qu'au soutien concret qu'ils reçoivent sur le terrain. À l'heure actuelle, nous examinons, avec le MAECI, les services qui sont offerts par le délégué commercial responsable des services. À la dernière réunion, par exemple, on a beaucoup discuté de l'information stratégique sur les marchés par opposition à l'information générale. L'information générale comprend des statistiques qui peuvent être tirées de divers sites Web et d'autres documents; nous pouvons tous débiter des pourcentages. Ce que les PME et les sociétés canadiennes cherchent, c'est de l'information stratégique sur les marchés qui indique où se trouvent les débouchés et avec qui il faut établir des liens. Je dois dire que le MAECI semble très disposé à nous aider à cette étape-ci. Je vous dirais que cela est relativement nouveau, car c'est la crise économique aux États-Unis qui a incité le ministère à écouter ce que nous avions à dire.

  (1720)  

    Merci. Je suis désolé de vous interrompre, mais il ne me reste que deux minutes.
    Je veux aborder cette autre question, c'est-à-dire la façon dont le département d'État américain a décrit le Panama. Voici un extrait de cette description:
... un centre logistique important et une plaque tournante du trafic de la drogue... Les grands cartels de la drogue colombiens et mexicains de même que les groupes armés illégaux colombiens se servent du Panama pour faire du trafic de drogue et du blanchiment d'argent...
Les fonds tirés d'activités illégales sont susceptibles d'être blanchis dans les banques du Panama, dans des projets immobiliers et d'autres secteurs.
    Récemment, un témoin nous a informés des critiques de l'OCDE à l'égard du Panama, à savoir que ce pays détrône même les célèbres Îles Caïmans dans la catégorie des paradis fiscaux. Ce témoin a aussi attiré notre attention sur l'article 9.10 de l'accord commercial avec le Panama, lequel dit ce qui suit:
Chacune des parties permet que les transferts se rapportant à un investissement visé soient effectués librement et sans délai vers son territoire et à partir de celui-ci.
    Cela signifie que le gouvernement du Panama ou tout investisseur enregistré pourrait contester les mesures canadiennes contre les paradis fiscaux en faisant valoir qu'elles constituent une violation des garanties de transfert prévues dans l'accord commercial.
    Je me demande — et cette question s'adresse aux deux organismes —, êtes-vous en train de nous dire aujourd'hui de « foncer tête première », sans tenir compte des problèmes liés à cet accord et du fait que le Panama ne s'acquitte pas de ses obligations internationales? Ou êtes-vous en train de nous dire « attendez, il faut d'abord conclure une entente d'échange de renseignements fiscaux »? Cette distinction est très importante. C'est certainement ce que pensent la plupart des Canadiens; ce sont certainement les valeurs que les Canadiens affectionnent. Ils veulent que les entreprises et les gens paient leur juste part des impôts. Je crois que la grande majorité des Canadiens pensent de cette façon. Alors, est-ce que vous nous dites de foncer tête baissée, ou est-ce que vous nous dites d'attendre, de faire d'abord preuve de diligence raisonnable et de veiller à ce que le Canada conclue cette entente d'échange de renseignements fiscaux qui a été promise, depuis au moins huit ans aux États-Unis et depuis longtemps au Canada?
    Pour ce qui est de l'échange de renseignements fiscaux, je voudrais simplement mentionner que la Suisse vient tout juste de signer une entente. C'est quelque chose qui était en préparation depuis probablement aussi longtemps que l'entente avec le Panama, alors je crois que, sur le plan international, nous commençons à voir une évolution dans ce domaine. Les pays qui faisaient preuve d'intransigeance par le passé commencent à changer leur fusil d'épaule.
    Les choses évoluent à cause des nombreux problèmes qui existent, particulièrement dans l'hémisphère ouest. Vous avez parlé du trafic de drogues. C'est un problème endémique dans l'hémisphère ouest, de la Terre de Feu jusqu'en haut. Le Canada est en train de devenir un lieu de prédilection pour la production de drogues douces, et on a constaté que, dans le pays, il y a eu une hausse de la production de méthamphétamines et d'autres drogues synthétiques.
    Le trafic de la drogue et le blanchiment de l'argent tiré de cette activité s'étendent à l'échelle de l'hémisphère. Ces problèmes touchent pratiquement tous les pays de l'hémisphère ouest, certainement les États-Unis, le Mexique, les Antilles, l'Amérique centrale et l'Amérique du Sud. Ces problèmes ne touchent pas uniquement le Panama.
    Ensuite, pour ce qui est du commerce et de l'état de nos échanges commerciaux — je reviendrai sur cette question —, la situation est très intéressante. Si on regarde les secteurs visés par des accords de libre-échange, on regarde seulement le commerce des biens. Si on regarde le commerce des services et l'investissement direct à l'étranger — les chiffres pour le stock d'IED —, le Canada obtient de très bons résultats. Bien que nous puissions constater une baisse dans le secteur des biens, celle-ci a tendance à être compensée par la hausse enregistrée dans le secteur des services et certainement par la hausse des investissements. Les services et les investissements sont plus difficiles à quantifier et à suivre, mais, à l'évidence, les données relatives au stock d'IED indiquent que nous obtenons de très bons résultats et que nous nous rattrapons grâce aux investissements.
    Je vous suggère fortement d'inviter le professeur Paul Haslam de l'Université d'Ottawa et d'autres spécialistes du domaine qui se sont penchés sur cette question et qui pourront vous en dire plus à ce sujet.
    Par ailleurs, nous nous en tirons très bien pour ce qui est de la promotion des exportations vers ces pays. Le Bureau de promotion du commerce du Canada... C'est quelque chose que les Américains ne feraient jamais: aider de petits et moyens exportateurs évoluant dans des secteurs non traditionnels, des coopératives de femmes et d'autres organisations à tirer avantage des accords et à exporter vers le Canada.
    Si on croit sincèrement à la libéralisation des échanges commerciaux, on croit à l'équivalence ricardienne et à la réalisation d'économies qui sont avantageuses pour les deux pays. Nous poussons cette logique un peu plus loin au Canada et nous prenons des mesures pour encourager le commerce plutôt que l'aide. Le commerce vient suppléer l'aide.
    Je crois que nous devrions être très fiers de cela. La question est de savoir si on croit ou non au commerce. Je crois que nous avons fait du très bon travail pour que tout cela fonctionne.
    Nous allons devoir passer à un autre intervenant.
    Monsieur Trost, vous allez peut-être devoir accélérer le tempo.

  (1725)  

    Merci, monsieur le président. Si je n'utilise pas tout mon temps, je vais le partager avec M. Holder.
    À mon avis, les critiques fondamentales que j'entends à l'égard de ces accords commerciaux se résument essentiellement au fait que ces pays ne sont pas assez compétents pour protéger leur propre environnement, pour faire respecter leurs propres normes du travail, etc. J'ai entendu la même chose au sujet de la Colombie. Bien que je trouve ces critiques quelque peu condescendantes, je dois malheureusement vous poser cette question: le gouvernement du Panama, la population du Panama sont-ils en mesure de faire respecter leurs propres normes du travail et de veiller à l'application de leurs propres normes environnementales et financières? Concrètement, le gouvernement du Panama est-il capable de voir au respect de la primauté du droit, de façon à ce que les méchantes entreprises canadiennes n'exploitent pas abusivement les ressources minières du pays ou tout autre type de ressources? Quel est l'état de la société civile au Panama? Peut-elle protéger efficacement ses propres intérêts?
    J'imagine que la seule réponse que je pourrais vous donner irait dans le sens des commentaires faits plus tôt par Mme Hall Findlay, dans la mesure où je présumerais que le gouvernement en serait capable, étant donné qu'il a décidé de négocier cet accord. Encore une fois, notre association croit que ce gouvernement est assez mature. Il a pris le temps de négocier. Il joue sur l'échiquier mondial, alors nous présumons qu'il en serait capable.
    Je peux ajouter quelques détails concernant la question des normes du travail. L'été dernier, il y a eu des malentendus au sujet d'une modification que le gouvernement a apportée à la loi sur le travail. Il y a eu des manifestations. Il y a eu quelques actes de violence. Tout le monde était assez préoccupé. Je me souviens d'en avoir glissé un mot à l'ambassadeur du Panama à ce moment-là.
    Depuis, en raison des protestations de la société civile, des syndicats et des groupes d'écologistes, des membres du gouvernement — des représentants du gouvernement, le sous-ministre du Travail et du Développement de la main-d'oeuvre, le directeur adjoint du fonds de sécurité sociale —, des membres de la société civile et les dirigeants de la confédération des travailleurs de la République du Panama se sont réunis pour mener des discussions pendant 90 jours, et ils ont réglé le problème ensemble.
    Les travailleurs contestaient certaines dispositions de la loi 30. Essentiellement, ces dispositions rendaient les cotisations syndicales facultatives; elles n'étaient plus automatiquement retenues sur le chèque de paie des travailleurs. De plus, advenant une grève, la loi autorisait les employeurs à remplacer les grévistes par de nouveaux travailleurs. Il y avait des dispositions qui ne plaisaient pas du tout aux syndicats.
    Les travailleurs ont fait part de leurs préoccupations au gouvernement, et toutes ces dispositions ont été abrogées. Elles ont été retirées de la loi. Le gouvernement travaille à modifier le libellé de la loi avant de l'adopter de nouveau, et le problème devrait être réglé d'ici peu.
    C'est ce que nous voyons partout au Panama: des institutions solides, une main-d'oeuvre qualifiée, des personnes qui sont capables d'exposer et de défendre leurs intérêts — les Autochtones, les groupes de travailleurs, etc.
    Le pays a pris une décision au sujet de ses normes du travail. Il a adopté un programme favorisant les entreprises. Le gouvernement a été élu. Les élections n'ont pas été contestées; elles étaient libres et justes. La population du Panama a élu un gouvernement qui a décidé de mettre en oeuvre ces normes. On peut avoir une opinion divergente, mais, si on veut vraiment contester ces normes, on doit devenir citoyen du Panama et aller voter dans ce pays.
    Encore une fois, je suis désolé, mais je me suis dit que je devais poser ces questions.
    Cela m'amène à la dernière question que je veux poser. M. Dade a parlé du fait que le Panama est en train de devenir un centre financier. J'imagine que cela revient encore à ce que vous dites en comparaison des autres critiques stéréotypées. Vous avez traité de cet aspect dans des commentaires précédents.
    Le Panama est-il en train de devenir un centre financier de pointe qui sert à des fins légitimes, ou est-il au service du blanchiment d'argent, de la corruption, etc.? Il y a eu plus de déclarations mémorables autour de cette table que je puisse me rappeler. Qu'est-ce que c'est? Lequel est-ce? Nous avons une certaine image des banquiers suisses et du modèle du Liechtenstein dont vous avez parlé. Quelle est la situation financière au Panama, selon votre perspective?
    Au Panama, les services financiers de qualité supérieure sont en plein essor. On doit examiner la situation avec lucidité. Le trafic de la drogue et les groupes criminels qui s'adonnent au commerce de la drogue sont présents dans tout l'hémisphère ouest, y compris — et de plus en plus — au Canada. Il s'agit d'un problème qui touche tout l'hémisphère. Ce problème ne peut être associé à un seul pays. De nos jours, on ne peut pas isoler les îles Caïman, Aruba, le Panama, la Colombie, Buenos Aires ou l'Uruguay et dire, voilà, nous mettons un terme à toutes ces activités illicites, et le problème disparaît. Ce problème s'étend à tout l'hémisphère, y compris — et de plus en plus — au Canada.
    Dans l'hémisphère ouest, sur la planète, où a eu lieu le plus grand vol, le plus grand crime financier? À New York. Bernie Madoff. Combien de milliards de dollars a-t-il volés? Il s'agit d'un crime aux proportions épiques. Bernard Madoff a de loin surpassé tout autre criminel. Et on parle ici de la ville de New York. On parle ici de Wall Street. Alors, au chapitre de la malfaisance, de la piètre réglementation, du manque de surveillance, on ne peut faire beaucoup mieux qu'à Wall Street.

  (1730)  

    Je vais céder le reste de mon temps à M. Holder.
    J'ai une foule de questions à poser, mais très peu de temps. Cela dit, je vais peut-être me contenter de poser une brève question à Mme Nott et une brève question à M. Dade, et je vais simplement les laisser répondre.
    D'abord, monsieur Dade, vous avez parlé des accords multilatéraux. Vous avez mentionné le partenariat transpacifique, les préoccupations qui en découlent... Je pense plutôt à Mercosur, aux accords latino-américains. Je crois que nous voudrions voir plus d'accords multilatéraux. Nous venons tout juste de revenir d'Europe — où nous avons rencontré des représentants de l'Union européenne — et, bien que nous ayons techniquement conclu un accord bilatéral, en réalité, puisqu'il y a la participation de 27 pays membres, c'est tout autant un accord multilatéral comme, j'ose l'imaginer, nous en verrons probablement dans un avenir proche, car nous pourrions avoir des vues différentes. Mais, à mon avis, le Cycle de Doha est plus mort qu'Elvis pour l'instant. Je crois que les accords bilatéraux sont la voie à suivre.
    Ma question est donc la suivante. Comme nous avons conclu cinq accords en Amérique latine, quelle est l'occasion qui s'offre à nous? Pensez-vous qu'un accord comparable à celui de Mercosur pourrait se concrétiser? Oui serait-il mieux de conclure ces accords individuellement, comme nous l'avons fait par le passé?
    C'est une méthode que j'ai apprise de M. Julian: posons beaucoup de questions et voyons ensuite comment les choses se passent.
    Madame Nott, très brièvement, vous avez dit très clairement à M. Julian que, en fait, il ne s'agissait pas de déterminer combien d'argent de plus il faudrait consacrer aux activités de promotion... Il s'agit de conclure cet accord et d'en tirer avantage. Qu'arriverait-il si nous décidions de ne pas signer cet accord? C'est la question que je vous pose.
    J'ai souligné plus tôt le fait que, aujourd'hui, les importateurs canadiens sont, pour la plupart, aussi des exportateurs. Je travaille dans ce domaine depuis 28 ans. Il fut un temps où on pouvait faire la distinction entre un importateur et un exportateur. Ce n'est plus le cas aujourd'hui. Les entreprises font les deux aujourd'hui. Compte tenu de la situation à l'échelle mondiale, je crois que, si on se détournait d'un quelconque marché, vu certains des aspects positifs que nous avons mentionnés autour de cette table aujourd'hui, on nuirait aux intérêts des Canadiens. Je crois qu'on n'a pas le choix de faire face à cette nouvelle réalité. On doit pratiquer le libre-échange.
    Si on renonçait à cet accord, je suis persuadé qu'un membre de l'UE serait très heureux de nous inviter à dîner pour nous remercier d'avoir pris cette décision.
    On peut faire ce que les Américains ont fait et se priver de ce potentiel. On ne sait pas exactement à combien on renoncerait dans le cas du Panama, mais ce serait certainement des centaines de millions de dollars en échanges commerciaux. Dans quel but? Si le comité, le Parlement, décide de faire une croix sur ces avantages pour les Canadiens, eh bien, ce sera sa décision.
    En passant, je vous remercie de penser à l'intérêt des Canadiens.
    Je vais terminer ici, monsieur le président.
    Merci, monsieur Trost et monsieur Holder, et merci aux témoins de leurs réponses.
    Je vais laisser quelqu'un poser une autre brève question. Nous avons une invitée aujourd'hui, et je vais permettre à Mme Coady de poser une brève question.
    Je vous remercie beaucoup de me donner l'occasion de poser une très brève question. Je crois que M. Holder a raison: j'ai très peu de temps.
    Je suis une invitée ici. J'ai écouté attentivement le représentant de Mines Alerte, qui était ici un peu plus tôt et qui a parlé longuement de cet accord et des préoccupations qui en découlent. Plus particulièrement, j'ai remarqué que M. Dade, dans son rapport, traite de l'industrie minière et des activités de Clarke Educational Services. Nous avons communiqué avec eux en ligne, et ils ont répondu à certaines de nos questions, mais il y a eu des problèmes techniques.
    Dans la dernière phrase de votre rapport, vous dites que l'accord aiderait le Canada à réaliser des progrès à l'égard de certaines priorités non économiques dans les domaines de la protection de l'environnement et de la promotion des droits des travailleurs à l'étranger. Je crois que le représentant de Mines Alerte a aussi fait ressortir cet aspect.
    Je me demande si vous pourriez, le plus brièvement possible, nous faire part de votre point de vue sur l'état des activités minières au Panama et nous dire pourquoi cet accord de libre-échange devrait être conclu, même dans ce contexte.
    Vu les prix des minerais, les activités minières se poursuivront. Si vous regardez autour de la pièce, tout ce que nous utilisons ici, nos téléphones cellulaires, nos montres... Les besoins sont là, et il faudra continuer de répondre à ces besoins. Ces activités peuvent être réalisées de façon positive pour mener à la croissance économique ou pour tenter de favoriser la croissance économique, ou elles peuvent être réalisées selon une approche plus mercantile qui fait fi de l'intérêt des personnes concernées.
    On peut croire que les entreprises canadiennes — vos voisins, vos amis — de l'industrie minière débarquent dans des pays comme le Panama et essaient de rouler la population, ou on peut croire que, si elles disposent des ressources nécessaires et qu'elles ont la possibilité de s'inspirer des pratiques exemplaires en matière de responsabilité sociale et d'engagement, elles feront les choses comme il faut. Je crois que le travail accompli par M. Clarke témoigne des aspects positifs de l'industrie minière canadienne.
    Il faut miser sur les aspects positifs. Oui, nous devons punir ceux qui font du tort aux gens, et nous serons parmi les premiers à faire front commun avec Mines Alerte lorsque de graves violations seront perpétrées. Mais les entreprises qui essaient de bien faire les choses, qui essaient d'améliorer la situation...
    Encore une fois, dans cette affaire, nous sommes en concurrence avec les Chinois. Si vous croyez que vous avez vu une entreprise ayant réellement roulé la population, ayant perpétré de graves violations, eh bien, regardez du côté de nos concurrents. Vous nous affaiblissez. Vous affaiblissez des entreprises qui travaillent avec des groupes comme Clarke Educational Services. Vous les empêchez de pénétrer le marché. Vous donnez un avantage concurrentiel aux entreprises qui ne font pas de tels efforts.
    C'est la meilleure façon d'encourager les mauvaises initiatives et de freiner les bonnes. Ou on peut faire le contraire et encourager les bonnes initiatives et freiner les mauvaises. C'est ce qu'on pourra faire avec cet accord, et c'est ce que feront les entreprises comme Clarke Educational Services.

  (1735)  

    Je vous remercie.
    Et je remercie tous les témoins des réponses qu'ils nous ont fournies. Je suis reconnaissant à tous les témoins que nous avons accueillis aujourd'hui. Vos témoignages nous ont été très utiles. Nous avons pris un peu plus de votre temps que ce qui était prévu.
    Je remercie également les membres du comité de l'indulgence dont ils ont fait preuve.
    C'est tout pour aujourd'hui. Nous nous revoyons mercredi.
    La séance est levée.
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