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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 017 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 6 décembre 2011

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour tout le monde. Bienvenue. Il s’agit de la 17e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale, le mardi 6 décembre 2011.
    Ce matin, nous poursuivons notre examen des drogues et l’alcool dans les prisons. Nous entendrons d’abord des représentants de Service correctionnel du Canada. Vous noterez, par les différents postes qu’occupent nos témoins ce matin, qu’ils répondent à certaines des questions qui ont été posées à notre dernière séance, soit les questions de suivi sur la transformation.
    De Service correctionnel du Canada, nous accueillons M. Ross Toller, sous-commissaire, Équipe de transformation et de renouvellement, et M. Brian Wheeler, directeur du Bureau sectoriel de libération conditionnelle de London.
    Nous vous souhaitons la bienvenue ce matin. Nous vous remercions de prendre le temps de venir témoigner devant notre comité. Nous croyons comprendre que vous avez quelques déclarations à faire. Vous répondrez ensuite aux questions de notre comité.
    Monsieur Toller, bienvenue. Heureux de vous revoir. Nous avons hâte de vous entendre.
    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité. Ma déclaration ne dépassera pas cinq minutes et je la ferai au nom de M. Wheeler et de moi-même.
    Merci de nous avoir invités ce matin pour vous parler de la manière dont le Service correctionnel du Canada gère le problème de la drogue et de l’alcool dans les pénitenciers, et plus particulièrement le programme de traitement. Je suis accompagné aujourd’hui par Brian Wheeler, directeur du Bureau sectoriel de libération conditionnelle de London. Je souligne que M. Wheeler a été agent de libération conditionnelle, tout comme moi, mais il y a beaucoup plus longtemps.
    Comme le commissaire et d’autres représentants vous l’auront dit, le SCC applique une approche à trois volets pour prendre en charge les délinquants toxicomanes, soit la prévention, le traitement et la répression. Aujourd’hui, j’aimerais concentrer ma déclaration préliminaire sur le traitement et décrire certains des programmes de traitement de la toxicomanie offerts dans nos établissements fédéraux et dans la collectivité.
    Monsieur le président, le SCC offre aux délinquants des programmes intégrés de lutte contre la toxicomanie qui leur permettent de vivre une vie productive et sans dépendance dans le respect des lois. Comme le commissaire vous l’a dit lors de son témoignage la semaine dernière, nous avons récemment investi plus de 30 millions de dollars pour renforcer notre capacité à fournir des programmes aux délinquants en temps opportun et de façon efficace.
    Les programmes nationaux de traitement de la toxicomanie du SCC sont fondés sur des preuves empiriques et sur les plus récentes découvertes scientifiques. Nous évaluons régulièrement l’efficacité de ces programmes au chapitre de la prévention du crime et nous apportons les modifications qui s’imposent pour nous assurer que nos programmes donnent des résultats positifs en matière de sécurité publique pour les Canadiens.
    Dès son arrivée, le délinquant ou la délinquante fait l’objet d’une évaluation afin que les interventions soient du degré d’intensité approprié. Plus les besoins du délinquant sont importants, plus élevée sera l’intensité de l’intervention. Nos programmes sont principalement destinés aux groupes, mais nous offrons également des séances individuelles pour combler les besoins très particuliers d’une population diversifiée. Grâce aux programmes du SCC, les délinquants analysent leur toxicomanie, apprennent à se responsabiliser et prennent connaissance d’une diversité de méthodes leur permettant de prévenir les comportements susceptibles de mener à la dépendance et à la criminalité.
    Nous avons également élaboré et mis en œuvre des programmes spécialisés pour les Autochtones et les délinquantes, groupes qui présentent des profils de consommation uniques et pour lesquels des programmes propres à la culture et au sexe sont plus appropriés. Monsieur le président, les programmes de traitement de la toxicomanie du SCC sont considérés comme une norme d’excellence à l’échelle internationale. Je suis fier que d’autres pays — comme la Suède, la Norvège et la Grande-Bretagne — aient adopté les programmes du SCC en vue de les utiliser dans leurs établissements.
    La raison en est simple: nos programmes fonctionnent. La recherche démontre que les délinquants qui participent aux programmes de traitement de la toxicomanie sont 4,5 fois plus susceptibles d’obtenir une libération discrétionnaire, 45 p. 100 moins susceptibles d’être réincarcérés en raison d’une nouvelle infraction et 63 p. 100 moins susceptibles de retourner en établissement en raison d’une nouvelle infraction avec violence.
    En plus des programmes nationaux de traitement de la toxicomanie du SCC, nous offrons aux délinquants un traitement de substitution aux opioïdes comme mesure de réduction des méfaits. Bien que notre but soit certainement d’aider les délinquants à cesser de consommer des drogues injectables, nous devons également prendre des mesures pour réduire au minimum les effets néfastes lies à la consommation d’opioïdes, comme la propagation du VIH ou de l’hépatite C dans nos établissements comme dans la collectivité. Ce type de traitement s’avère également utile en combinaison avec nos programmes pour aider les délinquants à se dégager progressivement de l’emprise des drogues illicites.
    Si un délinquant répond aux critères d’admission au programme, un membre du personnel infirmier administrerait au délinquant, en présence d’un observateur, une drogue comme de la méthadone dans le secteur des services de santé de l’établissement. Monsieur le président, il s’agit d’un programme médical géré par des professionnels des soins de santé qui vise à améliorer la santé des délinquants et la sécurité de notre personnel.
    La recherche a démontré que le traitement d’entretien à la méthadone est une forme de traitement efficace pour les délinquants dépendants aux drogues injectables. Nous avons observé une réduction de l’utilisation d’opioïdes, de l’activité criminelle et du nombre de réincarcérations parmi les délinquants qui ont participé au programme. Nous constatons également qu’ils sont plus susceptibles de poursuivre le traitement une fois qu’ils se trouveront dans la collectivité. En outre, les délinquants qui ont suivi le programme d’entretien à la méthadone ne font pas aussi souvent l’objet d’accusations d’infractions disciplinaires liées aux drogues.
    Chaque jour, les employés du SCC dans l’ensemble du pays travaillent à promouvoir la réadaptation des délinquants et à créer des collectivités plus sûres pour les Canadiens. Cela comprend la prestation d’une série de programmes du SCC reconnus à l’échelle internationale qui visent à aider les délinquants à briser le cycle de la dépendance et à retourner dans la collectivité en tant que citoyens productifs et respectueux des lois.
    Je vous remercie de nous avoir offert l’occasion de vous renseigner davantage sur ce sujet, et je répondrai, tout comme M. Wheeler, avec plaisir à toute question que vous nous poserez.

  (1105)  

    Merci beaucoup, monsieur Toller.
    Nous commencerons la première série de questions avec Mme Hoeppner, pour sept minutes.
    Merci messieurs d’être ici. J’ai plusieurs questions à poser ou aspects que j’aimerais faire préciser.
    Monsieur Toller, vous avez évoqué le traitement de substitution aux opioïdes et fait un lien avec le programme d’entretien à la méthadone. Pouvez-vous nous expliquer davantage le traitement de substitution aux opioïdes?
    Certainement. Nous faisons une évaluation des détenus dépendants ou dont les antécédents de toxicomanie sont connus. Nous effectuons des examens médicaux. Essentiellement, le programme passe par les services médicaux. Si l’on juge qu’un délinquant a besoin d’un programme comme celui de la méthadone au lieu d’autres types de drogues, la méthadone est administrée dans un cadre très contrôlé.
    Ce qui arrive, essentiellement, c’est que, dans le cas de la méthadone, le délinquant se rend à l’infirmerie où on lui administre de la méthadone liquide. Il doit parler tout de suite après, afin de s’assurer qu’il n’a pas caché la méthadone, et il doit boire de l’eau pour s’assurer qu’il a bien avalé la méthadone. Il doit ensuite rester dans la pièce pendant 20 minutes sous la supervision du personnel infirmier, parce qu’il est arrivé par le passé que des délinquants régurgitent la méthadone peu de temps après l’avoir prise.
    C’est très contrôlé. Il y a une surveillance. En règle générale, le programme de la méthadone est un programme à long terme, d’une durée d’un à deux ans, voire davantage dans certains cas. Lorsqu’il est déterminé que la dépendance a été supprimée par des moyens médicaux, le traitement cesse.
    Alors, c’est administré à un détenu qui est réputé dépendant, mais qui purge aussi une longue peine, n’est-ce pas?
    Non, ce pourrait être une courte peine, parce que, dans le cas d’une courte peine, le programme de la méthadone pourrait se poursuivre dans la collectivité, en collaboration avec le personnel médical communautaire.
    Il y a un lien; il y a une communication avec la collectivité — monsieur Wheeler, si vous voulez intervenir, je ne suis pas certaine que c’est votre domaine — pour que le traitement dans l’établissement se poursuive lorsque le détenu est libéré, n’est-ce pas?
    Oui.
    Dans la même veine, nous avons entendu quelques témoins suggérer qu’on fournisse des seringues aux détenus pour réduire les méfaits. Mais nous avons aussi entendu de nombreux témoignages contraires; on nous a dit que les seringues n’étaient pas les bienvenues. Il est même arrivé lors d’une visite récente de certains de nos membres dans un pénitencier que des détenus affirment ne pas vouloir de seringues dans les prisons. Je me demande ce que vous en pensez; ce que vous pensez des seringues dans les prisons afin de réduire les méfaits.
    Oui. Notre service a adopté comme position de ne pas appuyer les échanges de seringues. Nous appuyons plutôt la capacité de réduire les méfaits.
    Je pense que vous avez entendu des témoins décrire comment la drogue ou les instruments associés à la consommation de drogues entrent dans les établissements. Je pense que vous avez entendu parler des colis volants. Parfois, le matériel caché comprend des seringues. Alors, nous offrons un programme de désinfection à l’eau de Javel à l’intention des détenus qui pourraient avoir accès à une seringue. C’est afin de prévenir le VIH ou l’hépatite C.
    Par le passé, je sais que des préoccupations ont été exprimées au sujet de la possibilité que des seringues soient utilisées comme arme. C’est aussi pour cette raison que nous avons accru notre capacité de réduction des méfaits. En outre, nous donnons plus d’information sur le traitement et la prévention des méfaits aux détenus, y compris des dépliants, et il y a un travail avec les familles, afin de réduire les méfaits.
    Notre gouvernement a adopté une politique de tolérance zéro à l’égard de la drogue dans les pénitenciers. Pouvez-vous décrire quel effet peut avoir la présence de drogues dans les prisons sur les détenus qui essaient de participer à ces programmes, de se réhabiliter et de devenir des citoyens plus productifs quand ils sont libérés? Quels sont les effets sur ces détenus lorsqu’il est possible de trouver de la drogue?
    Il y a une forte corrélation entre la drogue et la violence dans l’établissement. Je pense que vous avez entendu des témoignages sur les capacités d’extorsion et la violence infligée à cause de la drogue, par ceux qui contrôlent la drogue. Les stratégies d’interdiction de la drogue sont très utiles pour nous afin de créer un environnement propice pour les détenus qui veulent modifier leur comportement, qui sont intéressés à participer à des programmes, qui veulent se reprendre en main. Elles créent un environnement qui réduit les confinements aux cellules et accroît la capacité d’empêcher la drogue d’entrer. C’est pour cette raison que nous avons une approche à trois volets face au problème. Évidemment, la tolérance zéro est exactement ce que nous voulons. Malheureusement, comme vous l’avez entendu, il y a encore des méthodes et des moyens pour faire entrer la drogue; d’où notre approche à trois volets.

  (1110)  

    Nous avons aussi entendu des témoins affirmer qu’il y a parfois eu des problèmes parce que certains prétendent faire entrer la drogue pour leur propre consommation, mais c’est évidemment plutôt pour en faire le trafic, et qu’il n’y a pas de lois en place pour les poursuivre. Est-ce que cela vous aiderait à faire votre travail? Des gens, y compris les détenus ou d’autres, font entrer de la drogue en quantité insuffisante pour donner lieu à des poursuites, parce que les quantités sont faibles.
    Oui, beaucoup. Je pense que c’est difficile pour beaucoup d’entre nous de comprendre le contexte de notre clientèle et le contexte dans la population en général, car une petite quantité de drogue peut coûter très cher dans nos établissements et dans notre environnement. En règle générale, nous avons vu des drogues dont le prix est de trois à quatre fois plus élevé que dans la rue. Les lois de l’offre et la demande jouent là aussi.
    Je pense que tout ce que nous pouvons faire avec les procureurs de la Couronne afin de comprendre le contexte, ou même des exigences législatives afin que la Couronne soit plus intéressée à poursuivre ces types d’activités plus énergiquement, nous aideraient énormément.
    Apparemment, nous aurions pratiquement besoin d'une série de lois pour la possession de drogues à l'extérieur et d'une autre série pour la possession de drogues à l'intérieur des pénitenciers.
    Il est très important, je pense, que les procureurs de la Couronne comprennent le contexte. Ils ont évidemment leurs limitations, mais en même temps, ils comprennent que la situation est beaucoup plus complexe en milieu carcéral compte tenu de l'environnement dans lequel nous travaillons.
    En réalité, la drogue qui arrive en prison arrive d'abord dans la collectivité. Il est extrêmement important, je pense, de comprendre notre contexte. Une petite quantité est pour nous une grosse quantité.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Chicoine, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos deux témoins de s'être déplacés aujourd'hui et de nous avoir fait part de leurs expériences.
    À ce comité-ci, on a beaucoup entendu parler de l'accessibilité aux programmes dans les établissements carcéraux. J'aimerais que vous me parliez brièvement des programmes auxquels les détenus ont accès lorsqu'ils obtiennent leur libération conditionnelle, du point de vue de l'accessibilité et aussi de l'efficacité.

[Traduction]

    Certainement. Serait-il utile de vous parler un peu du contexte de ces programmes? Car un bon nombre d'entre eux continuent à l'extérieur, après la sortie.

[Français]

    Absolument.

[Traduction]

    Très bien.
    Un de nos programmes les plus complets est probablement notre programme de traitement de la toxicomanie qui commence en milieu carcéral. Nous faisons une évaluation au moment de l'accueil. Nous évaluons le niveau de dépendance à la drogue du détenu. Nous examinons la nature de son crime. Nous examinons la violence associée à la drogue. Nous établissons les niveaux d'intensité requis. Nous avons un programme de haute intensité pour ceux qui ont besoin d'interventions thérapeutiques beaucoup plus importantes, beaucoup plus souvent. Nous avons un programme d'intensité moyenne et un programme de faible intensité.
    Quand j'aurai terminé, je céderai la parole à M. Wheeler qui pourra vous parler de la poursuite des programmes dans la collectivité en ce qui concerne les programmes de traitement de la toxicomanie et ce que nous faisons pour les délinquants en libération conditionnelle.
    Pour revenir sur certaines questions qui ont été posées au sujet du contexte, pour les détenus qui sont motivés, qui veulent participer à nos programmes, nous créons le climat propice. Au fur et à mesure qu'ils progressent, nous établissons des rapports et nous voyons s'ils ont fait des progrès ou s'ils n'en ont pas fait. Le traitement de la toxicomanie est donc l'un de nos programmes les plus prolifiques.
    Cela s'accompagne aussi, bien sûr, de la prévention de la violence. La violence est souvent associée à la consommation de drogue et je pense que vous avez reçu certains témoignages à ce sujet. Là aussi, l'intensité des programmes varie selon la gravité du crime et ses répercussions. Le détenu est évalué et suivra un programme à haute intensité ou à faible intensité ainsi que des programmes communautaires de maintien des acquis.
    Récemment, nous avons cherché à mélanger un peu ces deux programmes dans le cadre d'un projet pilote que nous réalisons en milieu carcéral pour obtenir un certain degré d'efficacité et améliorer la participation.
    Il y a des programmes pour les délinquants sexuels ainsi que d'autres programmes, mais je vais peut-être laisser Brian vous parler brièvement de la prise en charge des délinquants lorsqu'ils quittent le milieu carcéral et de ce qui se passe lorsqu'ils retournent dans la collectivité après avoir suivi certains de ces programmes.

  (1115)  

    La plupart des personnes qui réintègrent la collectivité ont suivi un programme de traitement de la toxicomanie qui tient compte des risques et des besoins. Service correctionnel Canada a mis au point ce que nous appelons le Programme communautaire de maintien des acquis. C'est un programme générique qui vise à résoudre tous les problèmes qui ont déjà été examinés en prison comme la violence ou la violence conjugale et la toxicomanie.
    Il s'agit d'un programme d'une assez longue durée. Il assure la continuité du traitement du délinquant. Ce dernier participe au programme pendant environ trois à quatre mois. C'est un programme quotidien de peut-être deux heures par jour avec un agent de programme spécialement formé, en groupe, avec une dizaine d'autres délinquants qui cherchent à résoudre le même genre de problèmes.
    Pendant que les délinquants sont en prison, ils travaillent à un programme de maîtrise de soi ou de prévention de la récidive, un programme qui décèle quels peuvent être les facteurs déclencheurs, les attitudes, les convictions qui favorisent la consommation de drogue ou d'alcool et donc un comportement criminel et qui cible ces facteurs. Pendant cette longue période de temps, en plus du programme proprement dit, le délinquant travaille avec toute une équipe de gestion de cas, un agent de libération conditionnelle et certains organismes communautaires.
    En plus de ce programme que nous croyons très efficace, nous engageons des services de la communauté pour fournir des programmes de traitement de la toxicomanie et d'autres programmes que nous jugeons efficaces également. Là encore, selon les risques et les besoins de l'intéressé, nous le plaçons dans le programme d'intervention approprié.

[Français]

    Merci.
    On a aussi rencontré quelques détenus qui nous ont mentionné qu'ils ne récidiveraient pas et ne retourneraient pas dans les pénitenciers s'ils avaient la possibilité d'accéder à un travail convenable afin de subvenir adéquatement à leurs besoins et à ceux de leur famille. Aidez-vous les détenus, lorsqu'ils sont en liberté conditionnelle, à trouver un emploi? Assurez-vous un suivi à cet égard?

[Traduction]

    Oui, certainement. Chacune de nos unités opérationnelles a ce que nous appelons un coordonnateur de l'emploi CORCAN. CORCAN fait partie de Service correctionnel Canada. C'est un organisme de service spécial qui fait des affaires, forme les détenus dans le milieu carcéral ainsi que dans la collectivité pour qu'ils puissent profiter des possibilités d'emploi. Nous faisons de la formation et du perfectionnement professionnel et nous travaillons aussi avec nos partenaires.
    Le coordonnateur de l'emploi est principalement chargé de l'établissement d'un CV, longtemps avant le retour de l'intéressé dans la collectivité. Ce n'est pas fait le jour de son arrivée. Nous faisons beaucoup de planification avant que le détenu ne réintègre la collectivité. Par conséquent, on l'aide à préparer un CV, on l'aide à rechercher un emploi et on l'aide probablement à trouver un emploi.
    Les coordonnateurs ne le font pas forcément tout seuls. Ils travaillent avec d'autres organismes. Par exemple, la Société John Howard, qui est un organisme présent ici à Ottawa, a sans doute une dizaine d'employés qui s'occupent uniquement des personnes qui ont maille à partir avec la justice pour essayer de les aider à trouver un emploi qui leur convient et des possibilités de formation pour accéder à un meilleur emploi.
    Je vais juste ajouter quelques mots, si vous le permettez.
    Le domaine de l'emploi est un des domaines auxquels nous nous intéressons le plus lors de l'évaluation à l'arrivée du détenu. Nous recherchons quelles sont ses compétences professionnelles et ses antécédents sur le plan de l'emploi. Comme les détenus vous l'ont dit, de nombreuses études démontrent que le chômage contribue à leur criminalité.
    Nous cherchons à renforcer leurs compétences, comme l'a mentionné M. Wheeler. Dernièrement, nous avons cherché, dans le cadre de notre programme de transformation, à leur conférer une employabilité mieux orientée vers le marché du travail d'après les renseignements que nous avons sur les marchés de l'emploi. Pour vous donner un ou deux exemples, sachant qu'il y aura bientôt, dans l'ensemble du Canada, une pénurie de gens de métier, nous nous sommes associés avec un certain nombre de groupes et de collèges communautaires pour dispenser aux détenus la formation voulue pour acquérir certaines compétences. Par exemple, ils reçoivent une formation de charpentier dont ils pourront se servir. Dans certains cas, nous avons réussi à établir un programme dans le domaine du logement et les employeurs avec qui nous nous associons pendant la détention engagent nos délinquants à leur sortie.
    Plus récemment, nous nous sommes associés avec certaines communautés autochtones pour la construction de logements en envoyant les détenus construire des logements dans les communautés autochtones. Ce n'est qu'un exemple de cas où nous insistons sur l'employabilité, précisément pour les raisons que vous avez soulevées. Et je crois que vous avez entendu des détenus vous dire que ces emplois se prolongent à leur retour dans la collectivité.

  (1120)  

    Merci beaucoup.
    Nous passons à M. Norlock, s'il vous plaît, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être venus.
    Avant de parler de ma dernière visite, monsieur Toller, à la page 4, vous faites mention de la participation aux programmes de traitement de la toxicomanie. Vous dites que les délinquants qui y participent sont 4,5 fois plus susceptibles d'obtenir une libération discrétionnaire, 45 p. 100 moins susceptibles d'être réincarcérés en raison d'une nouvelle infraction et 63 p. 100 moins susceptibles de retourner en établissement en raison d'une nouvelle infraction avec violence.
    Par conséquent, je suppose que les programmes dont vous parlez sont des programmes d'abstinence. Autrement dit, les détenus ne consomment aucune drogue.
    Oui, en grande partie.
    Si je m'engage dans cette direction, c'est parce que si nous utilisons des programmes de consommation de drogue avec la bénédiction de l'État, qu'on appelle, par euphémisme, des programmes de réduction des méfaits, ils auront des effets négatifs sur les excellents résultats de ce programme de calibre mondial, comme vous l'avez mentionné. Je voudrais vous demander de le confirmer, compte tenu de vos 33 années d'expérience au sein de Service correctionnel Canada.
    Je voudrais savoir ce que vous pensez d'une politique de sites d'injection approuvés par l'État compte tenu du succès des programmes actuels. Le comité a déjà entendu dire que même si cela prévient les maladies, surtout le sida et d'autres maladies associées, cela pourrait aussi… J'aimerais donc que vous parliez de ce que j'appelle les mesures préférables de réduction des méfaits telles que l'utilisation de préservatifs et leur distribution aux personnes incarcérées.
    Merci. C'est une question très complexe et très vaste.
    Je vais seulement faire quelques observations rapides. Comme on vous l'a déjà dit, une grande proportion de nos détenus, près de 80 p. 100, arrivent avec des problèmes de toxicomanie et dans 50 p. 100 des cas, cette toxicomanie est directement reliée au crime commis. Le problème est qu'un grand nombre de ces toxicomanies ne s'arrêtent pas au moment de la condamnation. Souvent, les délinquants ont manifesté, par le passé, un comportement toxicomane. Leur désir de drogue continue.
    C'est la raison pour laquelle nous avons adopté une approche en trois volets pour pouvoir gérer et contrôler ce type de comportement toxicomane. Nos programmes fonctionnent. Je suis très fier des programmes que nous avons. De nombreuses études démontrent leur efficacité. Vous avez entendu mes remarques. Vous avez réitéré certaines des observations que j'ai formulées au sujet du succès de ces programmes.
    Les détenus ont encore envie de drogue. Vous avez raison, on s'attend à ce qu'ils ne se droguent plus et tous les programmes, des différentes intensités, cherchent continuellement à modifier leur comportement jusqu'à leur réintégration dans la collectivité. Nous préférons l'approche qui envisage la réduction des méfaits à partir des éléments qui, selon nous, ont fait leurs preuves. Nous avons une incidence du VIH plus élevée, sept à dix fois plus élevée à l'intérieur de nos établissements qu'au sein de la société. Pour l'hépatite C, l'incidence est 30 fois plus élevée en prison. Par conséquent, on a mentionné l'utilisation de préservatifs, de digues dentaires pour les détenues, l'utilisation de programmes éducatifs, l'utilisation d'eau de Javel dans le cas où quelqu'un utilise une seringue…
    Il ne faut pas oublier non plus que même si certains délinquants participent aux programmes de traitement de la toxicomanie, ce n'est pas le cas de tous. Par conséquent, tous les efforts que nous déployons visent à gérer la toxicomanie.

  (1125)  

    Merci beaucoup.
    Pour revenir sur notre dernière réunion, à l'Établissement Frontenac, vous avez mentionné certains programmes de formation qui visent à donner aux détenus un métier et une expérience de travail qui leur permettra de mener une vie meilleure grâce à un emploi. Dans certains établissements, comme l'Établissement Warkworth, on enseigne les techniques de sablage. C'est ce que j'ai toujours appelé obtenir ses papiers de sablage. Je me souviens d'avoir parlé à certains éducateurs qui m'ont dit qu'ils devaient rappeler aux détenus que c'était le temps de prendre une pause-café et qu'il leur arrivait souvent de travailler pendant l'heure du déjeuner. C'est une chose qu'on ne voit généralement pas dans le vrai monde du travail où les gens surveillent l'horloge et le moment de prendre une pause. Cela mérite donc des félicitations.
    J'aimerais que vous nous parliez des progrès de la formation des détenus qui travaillent à la blanchisserie. Vous avez élargi ce service et montré aux détenus comment administrer et gérer une blanchisserie dans un établissement en dehors d'une prison comme un hôtel, un hôpital, etc. Et où en sont les bureaux mobiles? J'en ai parlé à des gens. Ils ont hâte de savoir quand ce programme pourra être offert dans la collectivité.
    Oui, merci. Un des autres changements que nous avons apportés à l'Établissement Frontenac sur le plan du développement des compétences associées à l'emploi a été la création d'un service de blanchisserie.
    Un programme de certification professionnelle est associé à ce programme offert aux personnes qui travaillent à la blanchisserie. Chaque hôtel a des services de blanchisserie. Un grand nombre de grandes organisations ont des services de blanchisserie.
    Nous avons eu la chance, à l'Établissement Frontenac, qui est situé à Kingston, en Ontario, de pouvoir nous associer au ministère de la Défense nationale, pour la base militaire de Kingston. Nous fournissons maintenant tous les services de blanchisserie pour la base militaire. Cette dernière a été si satisfaite de nos services que nous les avons déjà étendus à la base militaire de Trenton.
    On est déjà venu frapper à notre porte pour nous demander de créer là-bas un programme de nettoyage à sec. Ce ne sera pas pour tout de suite, mais le programme de blanchisserie fonctionne bien. Il confère des compétences, non seulement dans le domaine de la blanchisserie, pour lequel il y a des marchés, mais aussi dans les domaines de la gestion des stocks, de la tenue de livres, du contrôle des stocks, des compétences qui sont génériques à bien des égards.
    J'ai également le plaisir de dire que le programme de bureau mobile a été mis sur pied. En fait, un de ces bureaux est déjà construit. Il a déjà été transporté dans la région d'Ottawa pour l'Agence de services frontaliers du Canada. Elle l'utilise comme bureau sur son champ de tir et le personnel l'utilise pour faire son travail avant de se rendre sur le champ de tir. D'autres maisons vont être construites et seront utilisées pour Grand Valley. J'étais à Frontenac il y a environ trois semaines, et on s'attendait à ce que la construction soit terminée ce mois-ci.
    Là encore, les détenus qui participent à ce programme acquièrent des compétences professionnelles, des compétences certifiables comme charpentiers-menuisiers, en travaillant de concert avec un collège communautaire local. Comme M. Wheeler l'a mentionné tout à l'heure, ils sortiront avec des compétences qui leur permettront beaucoup mieux d'obtenir un emploi.
    Merci, monsieur Toller.
    Nous passons maintenant à M. Scarpaleggia, s'il vous plaît.
    En ce qui concerne la thérapie de substitution, c'est avant tout un traitement à la méthadone? Est-ce…
    Il y a un autre type de médicament dont le nom m'échappe. Cela commence par un s et c'est un autre opiacé. Il est pris sous forme de pilule. Si vous m'accordez un instant, je peux…

  (1130)  

    Non, ça va. Ces deux médicaments visent à traiter les gens qui ont une dépendance à l'héroïne?
    M. Ross Toller: Oui.
    M. Francis Scarpaleggia: Quel est le pourcentage approximatif de ceux qui arrivent avec une dépendance à l'héroïne qui participent à un programme de traitement à la méthadone?
    J'ai le nombre de participants. Je crois que c'est environ 750 détenus. Je peux vous le confirmer d'ici deux minutes.
    Mais quel est le pourcentage de ceux qui… Cela me donnerait une idée de la demande d'héroïne dans l'établissement.
    C'est un petit pourcentage du nombre total de détenus.
    Comment pourrions-nous obtenir le pourcentage de participants? Vous dites que sur le nombre total de détenus qui ont une dépendance à l'héroïne, seul un petit pourcentage participent au programme de traitement à la méthadone.
    Oui, je pense que vous voulez savoir aussi combien il y a de détenus qui sont héroïnomanes et qui pourraient participer au programme.
    Oui, en effet.
    Je n'ai pas leur nombre exact, mais je peux vous dire tout ce qui est fait pour les encourager et les motiver. Le fait qu'il y ait une certaine participation est une bonne chose, selon moi, du point de vue correctionnel. Parfois, les détenus ne veulent pas reconnaître qu'ils sont toxicomanes, mais ils prennent quand même ces mesures.
    Comme je l'ai mentionné, notre service de santé est très actif et le personnel infirmier continue de promouvoir les soins de santé sous cet angle.
    Nous avons également des groupes de soutien par les pairs dans un certain nombre d'établissements. Des détenus parlent aux toxicomanes et comme ils voient les choses sous le même angle, ils peuvent les encourager.
    Quand à savoir si nous pouvons faire plus, je pense que nous continuons simplement de motiver, d'encourager et de convaincre les détenus qui sont toxicomanes. Si nous constatons, au moyen d'analyses d'urine ou par d'autres moyens que des détenus consomment de la drogue alors qu'ils ne participent pas à ce programme, nous les dirigeons vers le programme dans le cadre du processus de gestion de cas. Nous faisons donc beaucoup d'efforts pour favoriser leur participation.
    Y a-t-il des délais d'attente pour participer à ces programmes? Peut-on y participer assez rapidement?
    Pour le programme de traitement à la méthadone, il n'y a pas de liste d'attente. Pour certains des programmes que nous avons déjà mentionnés, il y a des listes d'attente. Nous n'utilisons pas cette terminologie comme telle; nous planifions le meilleur niveau d'intervention possible. Il y a des détenus pour qui le moment où ils participent au programme est important. Nous cherchons à donner la priorité à ceux qui seront bientôt libérés par rapport à ceux qui purgent des peines plus longues.
    Si vous aviez davantage de ressources, cela permettrait-il de faire participer les détenus aux programmes plus rapidement? Les ressources en question devraient-elles être financières? Serait-ce des ressources humaines? Vous pourriez avoir tout l'argent au monde, mais si vous ne pouvez pas trouver de gens pour occuper les postes parce que l'établissement est loin d'un centre urbain, cela peut être une contrainte également.
    Avez-vous des contraintes sur le plan des ressources? J'essaie de savoir si tout va bien ou si certaines choses pourraient être améliorées. Nous sommes ici pour suggérer des améliorations.
    Il est certain qu'un apport de ressources continu serait bénéfique. Nous avons investi près de 47 millions de dollars dans des programmes au cours des deux dernières années en profitant de certaines possibilités de réinvestissement stratégique dans les programmes.
    J'ai mentionné tout à l'heure à l'un de vos collègues un modèle de programme intégré grâce auquel nous cherchons à créer des niveaux d'efficacité qui nous aideront à atteindre notre objectif.
    Un budget plus important pourrait vous aider.

  (1135)  

    Sur le plan des programmes, certainement.
    Ma deuxième question concerne le fait que les programmes canadiens ont une bonne réputation à l'étranger et qu'ils sont adoptés par d'autres pays. Premièrement, c'est une excellente nouvelle. Je me demande toutefois comment nous sommes devenus des chefs de file dans ce domaine. Comment cela a-t-il évolué au point où notre programme de traitement de la toxicomanie est reconnu sur la scène internationale?
    Dans le contexte correctionnel, il faut sans aucun doute voir ce qui contribue à la sécurité publique, qui constitue la deuxième partie de notre mandat, soit la réinsertion des détenus. Lorsque nous avons conçu le programme, nous avons centré notre attention sur les preuves empiriques basées sur des recherches, des outils démontrant une capacité de donner des résultats, comme nous l'avons déjà mentionné. Lorsque vous pouvez démontrer le succès d'un programme avec des résultats et des preuves empiriques, les autres services correctionnels s'y intéressent.
    Depuis combien de temps accordez-vous la priorité à des programmes basés sur des preuves, 15 ou 20 ans?
    Oui, c'est à peu près cela.
    Très bien. Je pense avoir fait le tour de la question.
    En effet, monsieur Scarpaleggia. Il vous reste 30 secondes si vous voulez.
    Je vais les donner à mes collègues.
    Je pourrais peut-être intervenir.
    Je voudrais revenir sur la question que M. Scarpaleggia a posée au départ au sujet de la méthadone. C'est pour que nous puissions tous comprendre un peu mieux. Nous savons que si quelqu'un se présente avec une dépendance à l'héroïne, la méthadone peut aider à atténuer les effets secondaires du retrait et d'autres difficultés. Vous dites qu'à son arrivée, le détenu subit un examen médical. Fait-on une analyse d'urine? Fait-on une analyse de sang? Pourquoi ne savons-nous pas combien de détenus sont toxicomanes ou combien sont héroïnomanes?
    Nous soumettons les détenus à une évaluation médicale complète. Il n'y a pas d'analyse sanguine automatique pour dépister la consommation d'opiacés à l'arrivée. Nous faisons des analyses d'urine aléatoires. Si votre nom est tiré, vous faites l'objet d'une analyse d'urine. Nous avons aussi…
    À l'arrivée? C'est aléatoire à l'arrivée ou est-ce obligatoire?
    Non, vous subissez une analyse d'urine si votre nom est tiré. C'est au hasard. Il n'y a pas d'analyse d'urine obligatoire à l'arrivée.
    Donc, vous ne pouvez pas savoir exactement ce qu'il en est. Si des gens arrivent et vous disent qu'ils ont une dépendance à l'héroïne, leur donnez-vous immédiatement de la méthadone s'ils en demandent? Ou devez-vous avoir la preuve de leur dépendance à l'héroïne?
    Nous en aurons la preuve. Comme je l'ai déjà dit, ils seront renvoyés immédiatement pour un examen médical. Ils subiront tous les tests voulus pour déterminer leurs besoins, le dosage et tous les autres éléments.
    La méthadone a-t-elle un effet euphorisant? Elle atténue les effets secondaires du retrait, mais leur procure-t-elle un certain effet euphorisant?
    Je n'en suis pas certain. Bien entendu, je n'en ai jamais consommé, mais je dirais qu'elle réduit la dépendance. Pour prendre un exemple, si vous utilisez un timbre de nicotine, cela réduit au moins une partie des effets addictifs. Vous ne voyez pas de détenus qui ont l'air d'être sous l'effet d'un euphorisant ou sous l'influence de la drogue. La méthadone semble atténuer ce genre de comportement.
    Si quelqu'un n'est pas toxicomane, cela ne lui apporte aucun avantage.
    Non, absolument pas.
    J'ajouterais seulement que la méthadone expose à des effets secondaires. Si les détenus consomment d'autres drogues, d'autres opiacés ou de l'héroïne, ils seront malades. Ils connaissent très bien les conséquences de l'utilisation de la méthadone.
    J'ajouterais que l'agent de libération conditionnelle joue un rôle crucial à l'intérieur de l'établissement et au sein de la collectivité pour évaluer si l'intéressé peut prendre de la méthadone. Même si c'est une question médicale, l'agent de libération conditionnelle doit faire quelques recherches sur la toxicomanie du délinquant.
    En ce qui concerne l'utilisation d'analyses d'urine pour dépister l'héroïne, l'héroïne reste dans votre organisme pendant très peu de temps. C'est sans doute une période plus courte que pour toute autre drogue. C'est moins de 24 heures. C'est sans doute moins que pour l'alcool. C'est probablement moins de 12 heures. En conséquence, ce serait très difficile à détecter au moyen d'une analyse d'urine.
    Très bien, merci.

[Français]

     Madame Morin, vous disposez de cinq minutes.
    Je voudrais d'abord remercier les témoins d'être ici aujourd'hui. Votre présence est appréciée.
    Ma première question s'adresse à M. Toller.
    Pouvez-vous me garantir que les détenus qui ont un problème de toxicomanie et qui désirent suivre un traitement y ont accès dans un délai raisonnable?

[Traduction]

    Comme je l'ai déjà mentionné, nous établissons un ordre de priorité. Je ne peux pas garantir qu'ils l'obtiendront rapidement. Comme je l'ai mentionné, certains de nos programmes, surtout pour le traitement de la toxicomanie, visent à leur permettre plus facilement de recevoir un traitement à temps. Le projet pilote dont j'ai parlé et qui mélange différents programmes de traitement de la toxicomanie accorde aux détenus un délai plus important pour participer au premier programme à temps et le taux de participation y est également plus élevé.

  (1140)  

[Français]

    Merci.
    Lors de votre témoignage, vous avez dit que les traitements fonctionnaient réellement. Cela m'a surprise, car selon un rapport de rendement de SCC daté de 2009-2010, il y a eu une augmentation du taux de réadmission en prison. Expliquez-moi pourquoi il y a eu une augmentation du taux de réadmission en prison si les traitements fonctionnent.

[Traduction]

    Je ne crois pas que ce document se rapporte à ceux qui ont participé à des programmes de traitement de la toxicomanie. Si vous parlez du taux d'admission générale, il y a eu une certaine augmentation, ainsi que pour les mandats d'incarcération. Encore une fois, il faudrait examiner ces chiffres dans leur contexte.
    Je peux vous montrer que pour ceux qui ont participé aux programmes de traitement de la toxicomanie, il y a une forte corrélation avec l'absence de récidive, car ils ne récidivent pas autant que ceux qui n'ont pas suivi le programme, pour tous les niveaux de libération conditionnelle.

[Français]

    Un peu plus tôt lors de votre témoignage, vous parliez de réduction des méfaits. La réduction des méfaits et la prévention sont deux choses totalement différentes. Lorsqu'on parle de prévention, on parle par exemple d'empêcher les drogues d'entrer dans le milieu carcéral. Lorsqu'on parle de réduction des méfaits, c'est par exemple réduire les méfaits des drogues, comme empêcher les gens de contracter le VIH, l'hépatite, etc.
    J'aimerais que vous nous parliez un peu plus de la réduction des méfaits. Vous disiez que cela se faisait en prison. Pourriez-vous décrire ce qui se fait dans les prisons relativement à la réduction des méfaits?

[Traduction]

    Oui, il existe quelques mesures.
    Dès l’admission, une évaluation initiale est effectuée relativement aux biens qui pourraient être associés à la consommation de drogues ou à une activité liée aux drogues. Dans le cadre de notre processus de gestion des cas, nous examinons notamment les cas de toxicomanie et de fréquentation de criminels, soit les renseignements qui se raccordent au processus de gestion des cas. On cerne les problèmes à régler jusqu'aux programmes. Dans les centres de soins de santé, les infirmières et les infirmiers offrent des brochures à propos de l’utilisation délétère des drogues. Ces brochures portent sur tous les aspects, des effets sur le corps aux répercussions que leur consommation peut avoir sur la famille.
    J’ai mentionné le programme de traitement à la méthadone. C’est une mesure de réduction des méfaits à laquelle nous avons recours. En outre, nous mettons de l’eau de Javel à la disposition des détenus au cas où ils réussiraient à avoir accès à des drogues injectables. On a également distribué des préservatifs, qui sont aussi offerts lors de visites familiales privées. Dans certains cas, les agents de libération conditionnelle qui se rendent dans la collectivité rencontrent les familles des détenus qui ont des taux élevés d’infection par le VIH ou qui ont l’hépatite C.
    Encore une fois, les programmes constituent essentiellement des activités de prévention qui visent à réduire la demande. Si les détenus réussissent à arrêter de consommer une drogue en particulier, la demande diminue.
    Merci beaucoup.
    Je cède maintenant la parole à M. Leef. Vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Messieurs Toller et Wheeler, je vous remercie d’être des nôtres aujourd’hui.
    Je vous félicite d’avoir investi dans les programmes correctionnels. Pour reprendre les propos de M. Norlock, d’après certains renseignements que vous nous avez fournis, je crois qu’on a affaire à un beau cas de réussite.
    Lors de précédents témoignages, nous avons déjà entendu dire qu’il était difficile de mesurer les taux réels de participation active, car il se peut que des détenus suivent des programmes juste pour dire qu’ils l’ont fait, qu’ils ont coché cette case dans la liste. Ainsi, il peut y avoir quelques difficultés à évaluer leur volonté à suivre un programme ou leur participation active dans celui-ci. Est-ce que je dresse un portrait réaliste de la situation en affirmant qu’il est difficile à obtenir exactement…? Je suis conscient qu’il ne doit pas y en avoir énormément, mais y a-t-il des détenus qui participent au programme simplement pour cocher la case?

  (1145)  

    D’après moi, il va toujours y avoir un peu de ce dont vous parlez. Certains détenus vont saisir cette occasion.
    Parmi notre personnel, les agents de libération conditionnelle sont très bien formés pour évaluer les niveaux de motivation des détenus et ils entretiennent un dialogue continu avec eux pendant toute la durée de leur processus.
    Pour revenir à la question qu’a posée le député à propos de la composante se rapportant aux ressources humaines de notre programme correctionnel, nos agents d’exécution de programmes sont hautement qualifiés. Ils sont assujettis à une procédure d’accréditation. Ils sont formés pour examiner ces éléments. Ils mesurent les résultats en cours de route.
    Qui plus est, quand on fait le tour des détenus qui participent peut-être simplement pour jouer le jeu, je dois rappeler que les membres du personnel s’échangent quotidiennement des renseignements; ils sont mis au courant lorsqu’un détenu quitte un programme. Par conséquent, il se peut que les agents d’exécution de programmes considèrent que les choses se déroulent plutôt bien dans une séance en particulier, mais les agents correctionnels vont faire rapport des comportements observés quand le détenu aura quitté le programme. D’autres membres du personnel, notamment ceux qui touchent aux questions des emplois, vont faire rapport des comportements observés qui ne sont pas cohérents par rapport à ce qui est démontré. Ces renseignements sont alors communiqués aux agents d’exécution de programmes, et des groupes multidisciplinaires se rencontrent pour discuter des niveaux d’activité en question.
    Nous avons mis en place de nombreux mécanismes de surveillance relativement aux détenus qui pourraient s’inscrire initialement pour cocher cette case. J’ajouterais même que, dans certains cas, des détenus ont reconnu l’avoir fait dans cette optique. Au départ, ils se sont inscrits dans le simple but de dire qu’ils l’avaient fait, mais grâce à certains programmes d'entraide dont j'ai parlé, ils ont parfois commencé à approfondir la question, de manière à changer leur comportement à des fins réalistes.
    D’accord. D'après ce que vous dites, vos agents de première ligne jouent donc un rôle considérable dans la poursuite de ces programmes.
    Exactement.
    Bien.
    À la page 3 de votre rapport, vous mentionnez avoir élaboré et mis en oeuvre des programmes spécialisés pour les Autochtones et les délinquantes parce que ces groupes présentent des profils de consommation uniques pour lesquels des programmes propres à la culture et au sexe sont plus appropriés.
    Pourriez-vous nous donner un aperçu global concernant les types de programmes offerts aux délinquantes pendant l’incarcération et pendant la période postcarcérale? Pourriez-vous nous fournir rapidement quelques renseignements quant aux taux de réussite auxquels vous vous attendez pour les groupes qui suivent ces programmes particuliers? Enfin, les délinquants autochtones et les délinquantes ont-ils des vulnérabilités différentes par rapport à la population carcérale composée d’hommes de race blanche?
    Je peux effectivement vous présenter un survol rapide.
    En ce qui a trait à la population autochtone, il y a effectivement des éléments culturels et contextuels qu’il faut mettre en contexte et dont nous devons tenir compte. On retrouve des détenus qui peuvent avoir été isolés dans un village traditionnel de chasseurs et de pêcheurs, dont la famille peut avoir vécu des activités liées aux pensionnats ou qui ont vécu dans une réserve n’ayant pas reçu la même instruction que les personnes de race blanche, pour ne nommer que quelques exemples. Il faut mettre en contexte leur capacité à répondre et à comprendre un certain type de programme, et nous devons tenir compte des différences culturelles. Nous avons une direction autochtone qui se consacre essentiellement aux questions autochtones.
    Au stade de l’élaboration des programmes, nous envisageons d’utiliser ces antécédents culturels, notamment en invitant des Aînés à nous fournir des renseignements pour bien comprendre la situation et déceler des lacunes qui pourraient apparaître en raison des bouleversements vécus par les femmes autochtones.
    Parmi nos nombreux établissements, on retrouve en Saskatchewan le Pavillon de ressourcement Okimaw Ohci, un centre consacré spécifiquement aux femmes autochtones. La richesse de ce pavillon de ressourcement culturel réside dans la compréhension spirituelle et culturelle des modes de fonctionnement et des enseignements autochtones que nous allons utiliser auprès des délinquantes autochtones.
    Quant aux programmes auxquels nous avons eu recours, nous avons consulté des spécialistes des questions autochtones. Comme l’a mentionné M. Wheeler, dans le cadre de certains contrats, nous allons aborder des organismes autochtones des collectivités afin de déterminer ce qui fonctionne selon eux et les changements qu’il faudrait apporter à nos méthodes classiques concernant ces activités. Dans certains cas, pour certains contrats, c'est le centre de ressourcement Stan Daniels qui élabore nos programmes. Ainsi, ce sont des Autochtones qui travaillent pour les Autochtones, et nous obtenons des résultats semblables.
    Sur le plan des résultats, je n’ai pas les données précises concernant les taux de réussite des délinquantes. Si vous me donniez une minute, je pourrais probablement les passer en revue. Je peux également vous transmettre l’information plus tard. De manière générale, elles réussissent davantage sur le plan de leur mise en liberté, concernant leur semi-liberté. Quand on les compare aux hommes, les délinquantes réussissent à rester plus longtemps dans leur collectivité. Il faut toutefois se rappeler que les chiffres sont plus petits en termes comparatifs, donc il peut y avoir une marge d’erreur.

  (1150)  

    Je vous remercie, monsieur Toller. Désolé, nous avons quelque peu excédé le temps alloué.
    Monsieur Sandhu.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs Toller et Wheeler, je vous remercie d’être ici aujourd’hui.
    Je vais vous poser des questions très courtes, qui sont plutôt directes. Je vous ai entendu parler d’eau de Javel. À quelles fins l'utilise-t-on?
    Je vais vous donner un exemple d’utilisation de l’eau de Javel. Si un détenu mettait la main sur une seringue et voulait l’utiliser pour procéder à une injection dont nous n'étions pas au courant, il pourrait la désinfecter avec de l’eau de Javel.
    Autrement dit, Service correctionnel Canada fournit de l’eau de Javel en tant que matériel de réduction des méfaits.
    C’est exact.
    D’accord.
    Vous avez mentionné qu’il y a un taux très élevé de VIH/sida dans les prisons et un taux faible en dehors du milieu carcéral, si l’on compare avec d’autres populations. Comment cela s’explique-t-il?
    Selon moi, la plupart des délinquants que nous accueillons avaient des habitudes de vie très risquées par le passé, et je crois que la proportion de ces personnes est tout simplement élevée, dès l’admission en milieu carcéral.
    Nous avons déjà établi que pour réduire les méfaits, vous fournissez de l’eau de Javel pour désinfecter les seringues qui pourraient avoir été entrées en prison. Vous avez également mentionné que vous ne fournissez pas de seringues propres dans le milieu carcéral. Comment avez-vous pris cette décision?
    Il y a quelques années, nous avons discuté de la possibilité de créer un programme à cet égard. Des consultations ont eu lieu auprès des services de santé publique, des groupes ouvriers et des collectivités médicales. À cette époque, on avait examiné les avantages et les inconvénients, et il a été déterminé qu’il ne serait pas approprié d’aller de l’avant dans notre milieu.
    Diriez-vous qu’en général, en dehors des prisons, les gens utilisent des seringues désinfectées afin de réduire les risques de transmission du VIH entre deux personnes?
    Je sais qu’on utilise effectivement les seringues dans cette optique dans certaines cliniques externes.
    J’aimerais revenir à la certification, concernant les services de blanchisserie. Qui s’occupe de la certification, Service correctionnel Canada ou des organismes externes?
    Ce sont des organismes externes. Je suis désolé, je ne connais pas le nom exact, mais c’est un groupe de certification de lingerie. Je crois que c’est fait par l’intermédiaire d’un collège communautaire.
    Quels obstacles les détenus doivent-ils surmonter en sortant de prison, relativement à l’obtention d’un emploi dans un hôtel ou diverses organisations? Étant donné que presque tous les employeurs vérifient les casiers judiciaires, est-ce qu’une personne n’ayant pas accès à la réhabilitation aura de grandes difficultés à se trouver un emploi?
    C’est un obstacle. Bien souvent, un curriculum vitae présente les activités des deux, trois ou quatre dernières années. Cependant, comme M. Wheeler et d’autres personnes l’ont mentionné, grâce à des activités que nous avons entreprises en collaboration avec des conseillers en emploi dans la collectivité et grâce à certains partenariats que nous avons conclus, les employeurs sont au courant des casiers judiciaires et saisissent quand même l’occasion de travailler avec les détenus. Notre objectif principal vise à ce que ces délinquants redeviennent des contribuables canadiens, et je crois que beaucoup d’employeurs pensent ainsi.
    Diriez-vous que le fait d’avoir un casier judiciaire représente un obstacle majeur à l'obtention d'un emploi pour les détenus qui sortent de prison? S’ils n'ont pas recours aux ressources que vous offrez, s’ils cherchent un emploi ailleurs, est-ce qu’il s’agirait d’un grand obstacle?
    Dans certaines circonstances, il s’agit effectivement d’une difficulté. J’ai précisé que certains employeurs embauchent des gens même s'ils savent que ceux-ci ont un casier judiciaire. Bien souvent, les employeurs voient le passé des détenus comme une préoccupation. Cependant, nous misons sur nos attentes et sur notre expérience, car pour certains programmes, nous avons constaté que beaucoup de détenus réussissent à changer leur comportement et à devenir des citoyens productifs.
    Si leur période de réhabilitation est plus longue, cet obstacle fera en sorte qu’il faudra plus de temps à ces détenus pour se trouver un emploi et devenir des citoyens productifs dans leur collectivité. Êtes-vous d’accord?

  (1155)  

    Je n’ai pas les données à propos de la réhabilitation. En fait, dans la vaste majorité des cas, nous voulons que les détenus se trouvent un emploi immédiatement après leur mise en liberté. Quelle que soit la durée de la réhabilitation, s’il ne s’agit pas d’une journée, il y aura des répercussions.
    Ma question portait sur les obstacles. S’il faut un an avant de pouvoir obtenir la réhabilitation, la durée est d’un an. Puisqu’on parle maintenant de deux ans, diriez-vous que cet obstacle fera en sorte qu’il faudra plus de temps à ce détenu pour qu’il décroche un emploi?
    Si un détenu demande une réhabilitation, qui prendra bien sûr deux ans à obtenir, le processus pourrait durer plus d’un an.
    C’est tout ce que je voulais savoir.
    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste quatre secondes.
    Je vous rends la parole, monsieur le président.
    Allons-y rapidement.
    Monsieur Harris, je sais que vous aviez une question. Vous pouvez utiliser les cinq dernières minutes.
    Merci, monsieur le président et messieurs Wheeler et Toller.
    Existe-t-il pour chaque prison des statistiques sur le pourcentage de délinquants ayant été incarcérés à cause d’une dépendance ou parce qu’ils ont été en contact avec le milieu de la drogue? Sait-on combien d’entre eux sont en prison pour crimes liés à la drogue ou causés par la drogue?
    Oui. À partir des informations recueillies à l’arrivée des délinquants, nous estimons que près de 80 p. 100 d’entre eux ont déjà consommé de la drogue. Et dans près de 50 p. 100 des cas, nous pouvons établir un lien entre la consommation et les activités criminelles qui les ont conduits en prison.
    D’accord.
    M. Sorenson a posé une question à propos du dépistage à l’arrivée des détenus. Le dépistage n’est pas systématique à l’arrivée; il est fait de façon aléatoire. Je suis curieux de savoir pourquoi le dépistage ne fait pas partie du processus d’admission de chaque individu.
    Le délinquant doit être consentant. Il faudrait que la législation soit changée pour que nous puissions exiger une prise de sang.
    Pour m’assurer que tout le monde comprend, l’exception que j’ai mentionnée ne s’applique qu’aux individus dont le nom apparaît sur la liste des gens à soumettre au dépistage aléatoire.
    Je vois.
    Lorsque quelqu’un commet un crime, en est reconnu coupable et arrive en prison, c’est la protection de ses droits qui vous empêche de l’obliger à se soumettre au dépistage des drogues, même s’il existe une quantité de preuves suffisante indiquant que le crime était lié à la drogue?
    Oui. La législation actuelle ne nous permet pas de contraindre un délinquant.
    Je vois. D’accord.
    S’agissant de la population carcérale, vous avez une idée du nombre moyen de personnes détenues pour un crime lié à la drogue et vous savez combien, en pourcentage, sont en traitement.
    Rapidement, monsieur Harris.
    Je veux parler des autres, ceux qui n’ont pas à subir de traitement s’ils s’y opposent. Il est admis qu’il y a de la drogue en prison. Je m’interroge seulement à propos du programme de tolérance zéro. S’ils ont besoin de se procurer de la drogue, ils en trouveront par n’importe quel moyen. Quelles sont les mesures à prendre pour augmenter l’efficacité du programme de tolérance zéro concernant les drogues? C’est ce que je cherche à savoir.
    J’aurais aimé que nous ayons plus de temps.
    Vous avez 30 secondes.
    D’accord.
    Je dirais que c’est un phénomène semblable à celui que nous observons dans la société en général. Je vous dirais encore une fois que nous cherchons à éradiquer la drogue des prisons, à collaborer avec les gens qui sont motivés et intéressés à modifier leur comportement, à les éduquer sur la réduction possible des méfaits et à maintenir en place les programmes mentionnés pour leur permettre de se défaire de leur dépendance.
    C’est bien. Merci.
    Merci.
    J’aimerais aussi rappeler aux gens que c’est lorsqu’un individu est arrêté et accusé que l’analyse d’urine et le dépistage peuvent clairement révéler la présence de drogues dans son organisme. Mais le délai encouru par la procédure judiciaire est tel que les résultats obtenus au moment de l’arrivée en prison peuvent être un peu différents de ceux qui auraient été obtenus le soir même de l’arrestation. Mais nous avons déjà entendu un témoignage à ce sujet.
    Nous voulons vous remercier d’être venus ici aujourd’hui. Merci beaucoup d’avoir répondu à certaines des questions qui nous préoccupaient la semaine dernière.
    Nous allons nous arrêter quelques instants et attendre avec grand intérêt l’arrivée de M. Sapers, qui revient témoigner. Faisons donc une courte pause.

  (1155)  


  (1200)  

    Nous reprenons la séance.
    Nous demandons à nos invités de bien vouloir faire preuve de patience à notre égard. L’une des difficultés que rencontre parfois ce comité est que certains de ses membres siègent également à d’autres comités et qu’ils doivent s’empresser de venir ici sur l’heure du dîner. Je sais qu’il est parfois difficile de parler alors que les autres vont dîner. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Certains y vont, mais pas nos invités, alors nous nous excusons pour les inconvénients et les difficultés que cela peut causer.
    Pour la seconde heure, nous recevons, du Bureau de l’enquêteur correctionnel, Howard Sapers, enquêteur correctionnel, et Ivan Zinger, directeur exécutif et avocat général. Ils ont tous deux témoigné devant notre comité dans le passé et nous les remercions de revenir nous voir.
    Je sais que vous avez assisté à la discussion de la dernière heure. Des questions ont été soulevées lors des réunions du comité de la semaine dernière. Certains croient que la Commission des libérations conditionnelles pourrait nous aider à y répondre, tandis que d’autres croient que vous êtes en mesure de le faire.
    Monsieur Sapers, si vous avez des remarques initiales, nous serons heureux de les entendre d’abord, après quoi, nous passerons à la première série de questions.
    Merci beaucoup, monsieur le président. C’est un plaisir de revenir témoigner devant vous et les membres de votre comité.
    Je suis très heureux que le comité continue de s’intéresser au sujet. Les drogues, la dépendance et la contrebande sont des questions qui sont constamment d’actualité à notre bureau.
    La dernière fois que je me suis adressé à ce comité, j’ai dit que le problème des substances intoxicantes dans les prisons est difficile à mesurer et à surveiller. En clair, nous savons qu’il y a de la drogue dans les prisons; nous ignorons seulement à quel point l’usage en est répandu. Le pourcentage d’analyses d’urine positives obtenues par le dépistage aléatoire est une façon de le mesurer. C’est un bon indicateur pour savoir si l’usage des drogues en prison est à la hausse, à la baisse ou relativement stable. Le pourcentage d’analyses d’urine positives demeure en fait relativement stable d’une année à l’autre. On a fait état d’une baisse de 5 p. 100 du taux d’analyses d’urine positives, mais cette baisse est surtout due au retrait de certains médicaments sur ordonnance du protocole de dépistage et de signalement. La stabilité du taux d’analyses d’urine positives pourrait signifier que les mesures d’interdiction ont plus ou moins plafonné. En fait, l’interdiction est peut-être la seule mesure qui donne lieu à des résultats à la baisse, en termes d’investissements continus.
    D’autres moyens de détection se sont aussi avérés problématiques. Par exemple, le Service correctionnel du Canada utilise ce que l’on appelle communément des détecteurs ioniques. Or, ils sont plus ou moins fiables, selon les substances. Par exemple, ils ne détectent pas très bien la marijuana, mais ils détectent très bien la cocaïne. Leur utilisation comporte donc certaines lacunes. Aussi, l’usage de plus en plus répandu des chiens détecteurs de drogue a récemment soulevé des doutes. La présence de chiens peut avoir certains avantages, mais très peu d’études ont confirmé leur utilité. Je crois que, selon la seule étude très récente réalisée sur le sujet, en Nouvelle-Galles du Sud, en Australie, les chiens détecteurs suivaient une fausse piste dans 75 p. 100 des cas. Autrement dit, un quart seulement des détections menait à la découverte de drogues.
    Je sais que le tabac demeure la principale marchandise de contrebande dans les prisons fédérales. Pour vous donner une idée de l’ampleur du problème de la contrebande de tabac, sachez qu’une petite blague de tabac d’environ 50 grammes, qui se vend normalement entre 18 et 20 $, peut se vendre de 300 à 500 $ en prison. Les gens qui souhaitent tirer un profit de l’économie interlope des prisons ont donc tout intérêt à y faire introduire du tabac de contrebande par d’autres.
    Nous savons, et nous l’avons entendu dans des témoignages de ce matin, qu’un peu plus de la moitié des délinquants sous responsabilité fédérale admettent qu’ils étaient sous l’influence d’une quelconque substance intoxicante au moment de commettre le crime qui les a conduits en prison. Quatre délinquants sur cinq ont déjà consommé de la drogue et un important pourcentage des délinquants qui consomment de la drogue est également atteint d’une maladie mentale. En fait, jusqu’à 30 p. 100 des détenus doivent faire l’objet d’une forme de suivi concernant leur santé mentale. Il y a un lien très étroit, une comorbidité, entre les antécédents de troubles mentaux et les antécédents de toxicomanie. Les individus ayant de tels antécédents sont difficiles à aider par le biais des programmes et leur dépendance aux substances intoxicantes est généralement plus tenace.
    Au cours de l’exercice qui a pris fin le 31 mars 2010, il y a eu neuf suicides dans des établissements du SCC. Sept des neuf victimes avaient des problèmes de consommation de drogue, cinq avaient commis des crimes liés à la drogue, sept souffraient d’un trouble mental diagnostiqué et deux étaient considérées comme ayant des troubles mentaux, mais n’avaient pas été diagnostiquées officiellement. Les neuf étaient sous antidépresseurs.

  (1205)  

    Cela laisse croire que nous pourrions, et que nous devrions, en faire plus pour offrir des programmes de lutte contre la toxicomanie dans les prisons fédérales. Malheureusement, nous avons vu, par exemple, une réduction de 2 millions de dollars des investissements dans ces programmes entre 2008 et 2011.
    Lors de mon dernier témoignage, j’ai mentionné qu’à la lumière de ses propres recherches, le SCC a compris qu’il devait procéder à plus d’évaluations pour soutenir l’efficacité de ses mesures antidrogues. Il pourrait notamment s’agir de l’usage de chiens détecteurs de drogue et de détecteurs ioniques, dont j’ai fait mention. Les données empiriques sont d’une importance capitale pour la recherche.
    Toute stratégie exhaustive en matière de drogues doit être assortie d’une série de mesures: la prévention, le traitement, la réduction des méfaits et l’interdiction. Aussi, je crois que nous devons accorder plus d’importance aux programmes. Nous savons que le récidivisme peut être réduit, et le sera, si nous donnons à du personnel compétent la chance d’offrir un programme bien conçu aux détenus motivés à en bénéficier.
    Nous surveillons attentivement le projet pilote, le Modèle ou plan de programme correctionnel intégré, ou MPCI, que l’on vous a brièvement décrit ce matin et lors d’autres témoignages. Je souligne qu’il s’agit toujours d’un projet pilote. Il n’a pas été évalué et sa mise en œuvre, son format et son contenu n’ont pas été définitivement approuvés. Les résultats qui vous ont été présentés ce matin sont le fruit de l’application des programmes correctionnels de base tels qu’ils sont actuellement, et non pas du MPCI.
    Sur ce, je vais écouter vos questions. Encore une fois, merci de m’avoir invité à venir vous rencontrer de nouveau.

  (1210)  

    Merci, monsieur Sapers.
    Passons à la première série de questions. Monsieur Rathgeber.
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs Sapers et Zinger, vous avez mentionné dans vos observations liminaires que le sujet occupe les employés de votre bureau sur une base presque quotidienne. Pour que je comprenne bien, le mandat de votre bureau est d’enquêter sur les plaintes ou les questions formulées par les détenus. S’agit-il de griefs à l’égard du Service, des autres détenus ou des deux?
    Notre mandat est d’enquêter sur toutes les plaintes des délinquants sous responsabilité fédérale et de les résoudre par des recommandations. Je n’ai pas avec moi la documentation qui contient les statistiques, mais nous avons reçu des plaintes à propos d’incompatibilités entre les membres de la population carcérale.
    En ce qui concerne la question qui nous intéresse aujourd’hui, soit la contrebande de drogues et d’alcool dans les prisons fédérales, sur quel genre de dossier devez-vous enquêter lorsqu’un détenu fédéral s’adresse à vous?
    Nous recevons toutes sortes de plaintes et d'expressions de préoccupation allant de l'accès aux programmes à l'accès aux soins et aux interventions médicales, en passant par l'accès aux programmes de réduction des méfaits, comme les programmes de substitution à la méthadone ou des opiacés.
    Nous recevons des plaintes concernant l'usage de la force, la victimisation ou l'intimidation. Cela est intimement lié au trafic de drogues dans les pénitenciers.
    On nous fait également part de préoccupations relatives aux décisions prises par le SSC pour ce qui est des peines en établissement. En effet, des informations incomplètes, erronées ou non vérifiées figurent dans les dossiers de progrès des détenus et mènent à des changements dans leur niveau de sécurité ou influent sur leurs demandes de transferts.
    Je ne veux pas couper les cheveux en quatre, car je comprends tout à fait que les questions de trafic de drogue en milieu carcéral et de réhabilitation sont intimement liées. Mais vous savez certainement que, durant la dernière législature, ce comité a livré un rapport exhaustif sur les programmes de réhabilitation aux drogues et à l'alcool en prison. C'est une question légèrement différente de celle qui est examinée aujourd'hui, mais je comprends parfaitement qu'il y a beaucoup de points communs.
    Quant à l'usage de la force, je ne comprends pas ce que cela veut dire exactement dans ce contexte.
    C'est une expression pour faire référence aux comportements de détenus: intimidation, victimisation, parfois liés à l'activité des gangs. Par exemple, un détenu pourrait se voir forcer la main pour détourner des ordonnances médicales, ou se voir intimider pour encourager à son tour quelqu'un de l'extérieur à participer à un trafic ou une activité illégale. Cet usage de la force pourrait aussi servir à transférer des effets personnels obtenus à la cantine, etc.

  (1215)  

    Vous a-t-on déjà demandé d'enquêter sur des cas où l'on n’a pas accordé le droit de visite à des amis ou à la famille d'un détenu?
    Oui.
    Parce que l'on pensait qu'ils pourraient participer au trafic?
    Oui. Nous recevons des appels concernant les visites familiales. Ces appels portent sur des problèmes de procédures de fouille et les dispositions pour les visites familiales privées.
    Nous essayons de faire des recoupements. Le dossier d'un détenu peut contenir des renseignements de sécurité indiquant qu’il pourrait être impliqué dans un trafic au sein de l'établissement, et ces informations peuvent mener à un transfert forcé ou à un changement de niveau de sécurité. Dans de tels cas, il n’est pas rare que nous recevions ensuite des plaintes pour accusations non fondées figurant au dossier et ayant mené à un transfert ou à un changement de niveau de sécurité. À cause de cela, les droits de visite de la famille ou d'autres personnes venant à l'établissement auront pu être annulés. Longtemps après les faits, nous enquêtons et découvrons que le dossier contient des informations erronées. Celles-ci seront corrigées bien sûr, mais il est trop tard pour revenir en arrière sur le transfert forcé, l'annulation du droit de visite, etc.
    Vous et vos équipes parlez presque tous les jours avec les prisonniers. D'après vous, monsieur Sapers, existe-t-il une demande pour un programme d'échange de seringues en milieu carcéral?
    À ce que je sache, nous n'avons jamais reçu de plainte spécifiquement liée à l'absence d'un programme d'échange de seringues en prison. Nous avons reçu des plaintes de gens réclamant que le tatouage soit une activité plus sûre, qu’il y ait un meilleur accès à l’eau de Javel ou à des préservatifs, ou qu’on applique d’autres mesures de réduction des méfaits.
    Les questions liées à l'échange de seringues en prison nous proviennent davantage de spécialistes en médecine et en prévention.
    Je suis d'accord. J'ai rencontré une délégation représentant les prisonniers à Baie Collins et Joyceville. Je n'étais pas en mesure de suivre le groupe, mais j'y suis retourné deux semaines plus tard. J'ai rencontré les représentants. Ils m'ont confirmé ce que vous dites. Ils sont préoccupés par la sécurité entourant les tatouages, mais il ne semble pas y avoir de demande pour un programme d'échange de seringues. En réalité, ils pensent que cela présenterait une menace pour leur sécurité.
    Merci, monsieur le président. Je n'ai plus de questions ou de remarques.
    Bien. Merci, monsieur Rathgeber. Merci de vous en être tenu au temps alloué, c'est parfait.
    Monsieur Sandhu, la parole est à vous.
    Merci, messieurs Sapers et Zinger.
    Je voudrais poursuivre sur ce que M. Rathgeber disait. Nous avons entendu ce matin que l'eau de Javel est fournie comme outil de réduction des méfaits aux détenus. Nous savons, grâce à la recherche médicale et aux spécialistes, que les programmes d'échange de seringues ou le fait d'avoir des seringues propres, réduisent le taux de transmission du VIH et d’autres maladies.
    Étant donné la forte prévalence d'infections au VIH et d’autres maladies au sein de la population carcérale, ne serait-il pas bénéfique de mettre des seringues à leur disposition? En pensant à leur santé avant tout, serait-ce une bonne chose pour eux?
    C'est là un aspect très délicat de l’univers correctionnel. Il a été démontré au niveau international que les échanges de seringues en prison fonctionnent. Lorsque je dis que ça fonctionne, je parle du point de vue de la santé. Ceci sans pour autant augmenter la consommation de drogues ni accroître la violence au sein des établissements.
    En 2005, le Service correctionnel du Canada, conjointement avec l'Agence de santé publique du Canada, a commandé une vaste étude comprenant des visites de sites européens où l’on pratique l'échange de seringues. Ce rapport a été publié par l'Agence de santé publique du Canada en 2006. Ses conclusions étaient sans appel, tous les échanges de seringues en prison étudiés se révélaient être des expériences positives.
    Au sein du Service correctionnel du Canada, il y a un comité consultatif de soins de santé composé d'experts-praticiens des différentes spécialités de la médecine. En 2002 ou 2003, je crois, ce comité consultatif de soins de santé a recommandé au Service correctionnel du Canada de mettre en place un programme d'échange de seringues dans les prisons. Le comité sénatorial permanent qui a publié le rapport De l'ombre à la lumière sur la santé mentale et les dépendances a également recommandé que le Service correctionnel du Canada étende sa gamme d'initiatives proposées pour la réduction des méfaits.
    Mon bureau a eu des échanges de correspondance avec les ministres de la Santé publique et les ministres de la Santé sur cette question. Je pense que tout le monde s'accorde à dire que l'échange de seringues apporte de bons résultats en matière de santé. La difficulté consiste à intégrer un échange de seringues dans un environnement correctionnel qui tente d'appliquer la tolérance zéro dans le cas de l'usage de stupéfiants obtenus illégalement.

  (1220)  

    Merci.
    Je vais passer à autre chose.
    Dans votre rapport annuel, que j'ai lu en retournant à Vancouver, vous soulignez le fait que la double occupation de cellule est un problème. Et ce problème ne va pas aller en s'améliorant, car on pense que cette double occupation va augmenter de 30 p. 100 d'ici trois ans.
    Monsieur Sandhu, je ne vais pas attendre qu'on fasse un rappel au Règlement.
    Nous avons débuté en disant qu'on voulait se cantonner aux drogues et aux trafics, pas...
    J'y viens.
    C'est à cela que vous voulez en venir?
    Absolument.
    Bien. Alors j’ai hâte de voir comment vous allez y arriver.
    Le surpeuplement est un problème. Quel impact le surpeuplement aura-t-il sur l'accès des prisonniers aux programmes de réhabilitation?
    D'accord.
    Des voix: Oh, oh!
    Merci pour cette question.
    Le surpeuplement carcéral est lourd de conséquences. Les prisons sont conçues pour une certaine capacité d'accueil qui détermine les niveaux de dotation en personnel. C'est la même chose pour d’autres aspects, comme l’attribution des espaces consacrés aux activités. Quand une prison est à pleine capacité ou surpeuplée, les décisions prises sur ces plans sont mises à mal. On n’a tout simplement pas les ressources matérielles ou humaines qui permettent de proposer des programmes à tous ceux qui en auraient besoin.
    Permettez-moi de vous donner deux exemples très rapidement. Vous avez visité les établissements de Baie Collins et Joyceville. Dans celui de Baie Collins, il y a aujourd'hui 460 détenus. Durant l'année financière qui s'est achevée le 31 mars 2011, il y a eu 208 inscriptions aux programmes correctionnels principaux. Pour 460 détenus, 208 inscriptions. Cela ne veut pas dire que 200 personnes se sont inscrites, un seul prisonnier peut s'être inscrit à plus d’un programme. Sur ces 208 inscriptions, seules 154 ont été maintenues jusqu’au terme des programme. Donc, sur les 460 détenus, seulement 154 inscriptions à des programmes ont été suivies jusqu'au bout. Cela est en grande partie dû aux capacités de prestation du programme de la part du Service correctionnel. À Joyceville, que le comité a également visité, on dénombre 420 détenus. Pour le programme principal relatif à l'abus d'alcool ou d’autres drogues, il y a eu 21 inscriptions l'année dernière.
    Nous savons que 80 p. 100 des délinquants ont des antécédents d'alcoolisme ou de toxicomanie et que la moitié d'entre eux étaient en état d'ébriété ou avaient consommé de la drogue au moment de commettre leur délit. Nous savons qu'il y a un fort taux de comorbidité avec les troubles en santé mentale. Cependant, sur 420 détenus, une vingtaine seulement se sont inscrits à un programme principal pour l'abus d'alcool ou autres drogues. C'est à cause du manque de ressources physiques permettant de proposer ces programmes.
    Est-on en droit de s'attendre à ce que l'accès soit moindre alors que la population carcérale augmente?
    Il n'y a que deux façons de s'assurer que ce ne soit pas le cas. La première serait de répandre le modèle du MPCI qui permet d'enrôler davantage de détenus dans des programmes plus rapidement, mais nous ne savons pas quels seraient les résultats, car nous ne les avons jamais évalués. La deuxième solution serait de s'assurer que l'augmentation des capacités physiques et des ressources en personnel s'accélère pour correspondre à l'augmentation de la population de détenus. Pour le moment,ce n'est pas le cas et on ne peut pas s'en tenir au statu quo.

  (1225)  

    Dans votre rapport, vous parlez aussi de l'importance de programmes efficaces et dites en quoi cela permet de réduire les risques de récidive, de réaliser des économies sur le long terme et de renforcer la sécurité de la population.
    Actuellement, les programmes ne représentent qu'environ 1,8 p. 100 du budget du SCC. Est-ce bien cela?
    Oui. Cela représente moins de 2 p. 100 du budget de fonctionnement.
    Merci. Nous avons déjà dépassé le temps qui vous était accordé.
    Nous allons maintenant repasser du côté du gouvernement. Monsieur Aspin, si vous voulez bien?
    Merci, monsieur le président.
    Je partagerai mon temps avec Mme Hoeppner.
    Merci à vous, messieurs Sapers et Zinger, d'être des nôtres.
    Je suis curieux d'en savoir plus à propos de ces différents programmes que vous proposez. Sont-ils conçus au cas par cas pour chaque établissement, pour chaque région ou au niveau global? Quels sont les points communs?
    Les programmes correctionnels principaux dont je vous ai parlé ont été conçus grâce à des principes particuliers et ils s’adressent spécifiquement aux détenus en milieu carcéral. C'est généralement basé sur un modèle de programme cognitivo-comportemental, et les principes reposent souvent sur ce qu'on appelle RBR, à savoir le risque, les besoins et la réponse.
    Certaines des meilleures études au monde sur le RBR et les programmes de type cognitivo-comportemental ont été réalisées au Canada par des Canadiens, nous en sommes très fiers.
    Vous avez donc des programmes principaux que vous ajustez et adaptez aux différents établissements selon l'évaluation des besoins de ces établissements?
    Service correctionnel Canada offre ces programmes principaux qui ont été éprouvés, validés et évalués, et qui ont permis de réaliser les résultats escomptés. Ils modifient les comportements ce qu’on mesure le plus souvent par les taux de récidive.
    Ces programmes sont offerts dans des établissements et à des moments différents. Tous les établissements n'offrent pas tous les programmes en permanence et même ceux qui proposent une vaste gamme de programmes sur leurs catalogues peuvent parfois, pour différentes raisons, ne pas être en mesure d'en proposer certains.
    Il y a généralement en moyenne 25 p. 100 de détenus qui participent à un programme correctionnel principal. Cela tient souvent moins à la motivation du détenu qu'à la capacité du service de monter de programme et le proposer.
    Il me reste une dernière question, si vous me le permettez, monsieur le président, avant que je ne cède le reste de mon temps.
    Monsieur Sapers, évidement ce n'est pas le cas, mais si on vous allouait un financement illimité, quels seraient les deux domaines auxquels vous destineriez en priorité ces sommes pour qu’elles soient pleinement aux programmes?
     J'attribuerais certainement plus d'argent à l'évaluation et au traitement des maladies mentales et j'attribuerais certainement plus d'argent aux programmes correctionnels de base.
    Service correctionnel du Canada évalue plutôt bien les besoins. Malheureusement, il ne donne pas toujours suite à cette évaluation approfondie par une application rapide des programmes, comme en témoigne le fait que de plus en plus de délinquants demandent à être transférés d'un établissement à un autre simplement pour pouvoir accéder aux programmes. On demande à des délinquants de renoncer à leur audience devant la Commission des libérations conditionnelles ou à la reporter parce qu'ils n'ont pas pu suivre les programmes. La Commission refuse des libérations conditionnelles parce que les délinquants n'ont pas fait suffisamment de progrès dans leur plan correctionnel par manque de capacité à offrir les programmes.
    Après avoir créé de bons programmes et après avoir enseigné de bonnes compétences en évaluation, j'insisterais ensuite sur la capacité à exécuter les programmes.
    Merci, monsieur Sapers.
    Vous avez trois minutes.
    Merci.
    Monsieur Sapers, d'après le témoignage que nous avons entendu sur la fourniture de seringues aux détenus, il me semble que tout le monde n'est pas d'accord pour dire que ce serait une bonne solution. En fait, sur tous les témoignages que nous avons entendus... Le commissaire est venu témoigner deux fois, et des agents de correction de première ligne qui sont aux prises quotidiennement avec la drogue et l'échange de drogues en prison sont intervenus également, de même que des conseillers. Nous avons aussi entendu des parents et un homme dont le fils s'est suicidé.
    Un seul groupe, le réseau juridique canadien VIH/sida, pourrait être un expert dans certains domaines. Je ne suis pas sûre qu'il le soit au sujet de l'utilisation de seringues dans les prisons. C'est le seul groupe qui l'a proposé; les détenus n'en voulaient pas.
    Il n'y avait donc pas de consensus du tout.
    Monsieur Sapers, pensez-vous que les établissements correctionnels sont en soi des endroits dangereux ou sûrs?

  (1230)  

    Je ne sais pas vraiment comment répondre à cette question.
    D'accord, c'est très bien. Si vous ne savez pas répondre, ça va.
    Je pense que les établissements correctionnels ne sont ni dangereux ni sûrs; c'est seulement la façon dont ils sont gérés.
    Vous pensez donc que ce sont des situations anodines. Ils ne sont pas sûrs...
    Par exemple, je pense que nous nous sentons très en sécurité dans cette salle. Je pense qu'il est très facile de dire que nous nous sentons en sécurité dans cette salle. Dans une prison, nous sentirions-nous en sécurité ou aurions-nous l'impression d'être menacés?
    Je suis...
    Une voix: Monsieur le président...
    Mme Candice Hoeppner: Non, je suis désolée, je vais...
    Le président: Je vais vous donner un peu de latitude...
    C'est bon. Vous n'avez pas à continuer. Je comprends.
    Croyez-vous dans ce cas que les demandes — ou certains diraient le droit — des prisonniers...? Certains diraient que c'est un droit des prisonniers de disposer d'une seringue. D'autres diront que ce n'est pas un droit. Pensez-vous que cette demande met en danger les agents et les autres détenus? Même maintenant, vous avez du mal à dire si c'est une situation sûre ou dangereuse. Pensez-vous que la sécurité est menacée par ces demandes ou exigences des détenus dans ces...
    Je ne pense pas que les deux soient mutuellement exclusifs. Je pense que c'est une fausse dichotomie. Je pense qu'un établissement... Une des mesures de la sécurité des établissements est également la santé. Si je risque fort de contracter une maladie transmise par le sang en raison du taux extrêmement élevé d'hépatites C ou de VIH, alors, oui, je suis en danger. Mais je peux aussi être frappé ou piqué avec une seringue.
    Je ne pense pas que ce soit mutuellement exclusif. En fait, du point de vue de la santé publique, je pense que les avantages de l'échange de seringues ne font aucun doute. L'échange de seringues existe depuis les années 1980, au Canada, depuis 1985 ou 1988 je crois. Je pense qu'il est assez largement reconnu que les programmes d'échange de seringues sont une bonne politique de santé publique. La difficulté réside dans l'application de cette politique dans un établissement.
    Merci.
    Dans un établissement — exactement.
    Le président: Merci.
    Mme Candice Hoeppner: Excusez-moi, est-ce que je peux...
    Nous avons légèrement dépassé notre temps, je suis désolé.
    Mme Candice Hoeppner: D'accord.
    Le président: Monsieur Scarpaleggia.
    Pouvez-vous me dire encore à quoi correspond MPCI?
    MPCI est l'acronyme de « modèle de programme correctionnel intégré ». C'est une initiative du Service correctionnel du Canada qui est piloté dans deux régions, mais initialement dans la région du Pacifique, et qui associe des programmes correctionnels de base.
    Ce projet associe les éléments communs de tous les programmes correctionnels — certaines parties de ces programmes qui portent sur l'orientation — pour former un cours de six semaines. Il y a également des programmes plus spécialisés, selon qu'il s'agit de violence ou de toxicomanie, etc.
    Quel est l'intérêt? Est-ce la spécialisation que l'on n'avait pas avec les programmes de base ou...?
    Non. L'intérêt... Si vous le permettez, je vais revenir en arrière une minute. Nous nous sommes constamment plaints auprès du Service correctionnel du Canada du fait que les délinquants attendaient trop longtemps pour participer aux programmes. Pour répondre en partie à cette demande, il a créé ce nouveau modèle, qui réussit d'ailleurs très bien à faire participer plus rapidement les délinquants aux programmes. Mais le problème est d'essayer d'offrir le même contenu et de le faire de façon à obtenir les mêmes résultats positifs.
    L'intérêt est donc de faire accéder les délinquants plus rapidement au programme et de faire en sorte qu'un plus grand nombre d'entre eux le terminent avec succès. Tel qu'il existe actuellement, le projet pilote affiche certains résultats positifs: davantage de délinquants terminent le programme et davantage y participent plus rapidement. Mais nous ne savons pas quels seront les résultats.
    Est-ce parce qu'il a été sciemment décidé de ne pas mesurer les résultats ou...?
    Non, il y aura une évaluation.
    Il y aura une évaluation. D'accord. Je ne sais toujours pas très bien comment cela fonctionne.
    Nous devrions peut-être avoir plus de détails de la part d'un témoin, pour être franc, monsieur le président, parce que...

  (1235)  

    M. Zinger pourrait...
    Peut-être, parce que tout cela est très technique, comme vous l'imaginez bien. D'après ce que je comprends, nous avons de très bons programmes de base, mais il n'y a pas assez de ressources pour permettre aux détenus de participer à ces programmes, et soudainement, on crée un programme intégré qui permet la participation des détenus et les résultats sont bons. Je ne vois pas comment on va de A à B.
    Je ne sais pas si vous comprenez ma question.
    Monsieur Zinger.
    Je comprends qu'il y a une certaine confusion. Des programmes de base sont offerts dans tout le Canada, et le Service correctionnel du Canada essaie d'apporter quelques changements. Il a créé un projet pilote dans deux régions du Canada. Je pense que c'est ce qui explique la confusion.
    Les programmes de base ont été créés il y a plus de 20 ans en s'appuyant sur de très bonnes données en sciences sociales et ils ont été examinés et accrédités par des groupes d'experts internationaux. Ils ont été évalués et les résultats ont été excellents.
    Nous sommes très satisfaits des programmes de base actuels. Ces programmes portent sur quatre domaines: traitement de la violence familiale, gestion de la colère, traitement de la toxicomanie et traitement des délinquants sexuels. Chaque programme dure environ six mois. Par conséquent, si un délinquant a plus d'un problème, il doit suivre plusieurs programmes, ce qui prend du temps.
    Le Service a cherché à rendre les programmes plus efficaces, de sorte que la toxicomanie, la violence familiale et la gestion de la colère sont désormais regroupées en un programme qui dure six mois. Si un délinquant avait un problème dans les trois domaines, il lui aurait fallu un an et demi pour terminer son plan correctionnel. Maintenant, il ne lui faut plus que six mois.
    Comme M. Sapers l'a dit, les programmes réussissent à atteindre leur objectif d'une plus grande efficacité. Plus de délinquants y accèdent et les suivent de façon à terminer plus rapidement leur plan correctionnel. Mais comme ces programmes n'ont pas encore été évalués, nous ne savons pas s'ils donneront les mêmes résultats positifs que les autres en ce qui concerne la réduction de la récidive et l'amélioration de la sécurité publique.
    Voilà une excellente explication.
    Est-ce que j'ai le temps de poser une autre question?
    Oui, vous avez une minute et demie.
    On nous a dit qu'il est important que les délinquants restent en prison plus longtemps pour pouvoir terminer leur traitement. Autrement dit, cela pourrait être utilisé pour justifier des peines plus lourdes. Qu'en pensez-vous?
    Depuis dix ou vingt ans environ, la durée typique des peines a diminué et le temps passé en prison également. C'est une des raisons pour lesquelles le Service correctionnel a voulu élaboré cette nouvelle stratégie de programmes. Si les peines sont plus courtes et si l'on veut que les délinquants tirent un avantage de leur passage en prison, il faut qu'ils accèdent aux programmes plus rapidement.
    Cela me perturbe beaucoup d'entre dire que quelqu'un reçoit une peine dans un pénitencier fédéral dans le seul but de participer à un programme, de recevoir un traitement ou des soins médicaux. Il me semble que c'est un moyen très coûteux d'offrir de genre de traitement ou d'intervention. Cela pourrait même être contreproductif car il se passe beaucoup de choses dans le milieu correctionnel susceptibles d'empêcher l'application du programme.
     Je ne dirais pas que l'allongement de la peine signifie automatiquement un meilleur accès et une meilleure possibilité de terminer un programme.

  (1240)  

    Merci, Monsieur Sapers.
    Nous allons passer maintenant aux questions de cinq minutes.
    Monsieur Garrison, s'il vous plaît.
    Merci de témoigner encore une fois.
    J'aimerais commencer pas une question très précise qui a été portée à mon attention par des représentants des Premières nations. Ils m'ont dit que l'accent qui est mis actuellement sur les interdictions ne permet pas aux aînés d'accéder aussi facilement aux prisons. On sait pourtant quelle contribution très positive les aînés apportent à la réinsertion.
    Avez-vous reçu des plaintes à ce sujet? Avez-vous quelque chose à dire sur la difficulté croissante des aînés à accéder aux prisons en raison de l'accent mis sur l'interdiction des drogues?
    Nous avons reçu des plaintes au sujet du tabac et de la spiritualité autochtones. On nous a notamment parlé d'une décision qui permettait de donner en cadeau une blague à tabac à un aîné, mais sans autoriser les allumettes. Nous recevons encore des plaintes. Nous tentons de trouver un équilibre entre l'application de la politique du Service correctionnel du Canada sur l'interdiction du tabac et l'application de sa politique sur l'accès à la spiritualité autochtone.
    Merci.
    Si les aînés veulent dénoncer ce genre de chose, peuvent-ils déposer une plainte auprès de votre bureau ou bien les prisonniers sont-ils les seuls à pouvoir déposer une plainte? S'ils ne le peuvent pas, à qui peuvent-ils s'adresser?
    Ils peuvent s'adresser à plusieurs endroits, ce qu'ils font. Il existe un comité consultatif autochtone que le Service correctionnel du Canada doit réunir de par la loi. Ils adressent leurs plaintes également à notre bureau, ainsi que les préoccupations soulevées par les délinquants ou leurs familles. Les aînés ont également accès à des structures de gestion institutionnelles, régionales et nationales, qui sont assez sensibles à ces problèmes lorsqu'ils sont portés à leur attention.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais poser une question plus large. Nous avons parlé de la réputation du Canada en matière de traitement de la toxicomanie en milieu carcéral. Bien entendu, nous avons des règles minimums et des principes de base à suivre pour le traitement des prisonniers. Pour ces deux, nous avons des obligations. Nous avons parlé de la réintégration dans le marché du travail. Diriez-vous que si nous n'offrons pas un traitement aux toxicomanes, nous manquons à certaines de nos obligations concernant la réadaptation que prévoient ces conventions internationales?
    Notre système correctionnel s'appuie sur un modèle très logique, à savoir l'admission après le prononcé de la peine avec une évaluation pour déterminer le risque et les besoins criminogènes, avant de prescrire un programme correctionnel pour répondre au risque et aux besoins. La classification de sécurité est comprise dans le placement.
    Bien entendu, si nous investissons tellement de temps et d'argent dans les mesures correctionnelles, c'est pour avoir un résultat positif pour le délinquant et pour le lieu où il vit afin de contribuer à la sécurité publique. Si on se contente de l'évaluation et que l'on néglige les programmes, on n'obtient pas un bon rendement sur l'investissement. Si on constate une augmentation du nombre des délinquants qui sont libérés à leur date de libération d'office ou à leur date d'expiration du mandat, c'est que l'on ne fait pas assez pour offrir les bons programmes au bon moment.
    Nous serions donc en infraction de certains des principes auxquels nous avons adhéré, non par manque de volonté, mais par manque d'application.
    J'ai bien pris soin de ne pas parler des normes minimums de l'ONU. Je pense que même si nous devons faire attention de respecter nos obligations internationales et nationales, en particulier concernant les droits de la personne, nous devons également respecter l'intégrité de notre propre plan correctionnel. La loi et les politiques qui orientent le système correctionnel au Canada énoncent clairement la nécessité de fournir des services de réadaptation pour assurer une réintégration rapide et sûre.
    J'aimerais continuer encore un peu sur les normes internationales. On dit que la double occupation de cellule est un obstacle au traitement, or il existe des normes internationales qui concernent la double occupation de cellule. Avez-vous des commentaires sur ces normes internationales et notre performance actuelle?
    Les normes minimums des Nations Unies, de l'Union européenne et de nombreuses autres autorités, y compris le Service correctionnel du Canada, énoncent que la cellule individuelle est l'occupation privilégiée pour toute sorte de raisons.

  (1245)  

    D'accord, merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons revenir à M. Leef, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos deux témoins d'être présents aujourd'hui.
    Je vais dire pour commencer que compte tenu du manque de consensus concernant l'échange de seringues en tant que stratégie de réduction des préjudices, notre gouvernement a pour position que la sécurité du personnel et des détenus demeure la priorité absolue.
    Il y a un mois, on a posé cette même question à un agent correctionnel de première ligne qui est venu témoigner. Il a répondu que ce n'était pas tellement qu'il s'opposait à l'échange des seringues comme tel, mais il a donné un point de vue que j'ai trouvé très intéressant. Outre les programmes — les programmes de base ou ceux qui sont conçus pour des détenus en fonction de leurs besoins ou du risque qu'ils présentent — l'agent a dit que les agents correctionnels faisaient eux-mêmes partie du programme ou qu'ils étaient le programme. Ce qu'il voulait dire par là, c'est que le personnel de première ligne est en contact permanent avec les détenus, 24 heures sur 24, sept jours sur sept.
    Un représentant du Service correctionnel du Canada a dit aujourd'hui que les détenus sont évalués une fois qu'ils ont suivi les programmes. Les agents présentent une rétroaction sur la volonté de participer dans des rapports d'étape et grâce à leur interaction quotidienne avec les détenus, afin de faire le lien entre ce que les conseillers ou les gestionnaires de cas voient dans leur participation à un programme et leur comportement réel pendant le reste de la journée.
    Cet agent a insisté sur le fait qu'il participait totalement à la motivation des détenus pour qu'ils adoptent des comportements positifs, en donnant l'exemple d'un comportement social et en communiquant avec les détenus à tout moment — parfois de façon très informelle en parlant des choses de la vie, des passe-temps et des intérêts. Ces interactions et rencontres très positives avec les détenus ont une très bonne influence.
    Nous lui avons posé la question sur l'échange de seringues et il a répondu que, selon lui, ce serait un recul important car les agents ne pourraient plus travailler de façon aussi étroite avec les détenus. Cela créerait une barrière qui serait liée à la sécurité. Ils seraient désavantagés parce qu'ils s'inquiéteraient pour leur sécurité.
    Si nous prenons des mesures dans les établissements qui remettent en question le sentiment de sécurité du personnel et des autres détenus, nous établirions d'autres barrières importantes qui auraient des répercussions sur un programme essentiel. Je pense que l'on ne reconnaît pas suffisamment que les interactions entre les agents et les détenus sont un facteur essentiel de changement de comportement et d'évolution importante de la population carcérale. C'était un commentaire que je voulais faire à ce sujet.
    Je voulais dire également que nous avons entendu des témoins au sujet de l'échange de seringues et que les plaintes dont vous avez parlé pourraient concerner le tatouage sécuritaire comme moyen de réduire les préjudices. Nous avons parlé à un de nos témoins qui a admis que les tatouages sont associés en partie aux gangs et que les tatouages servent à transmettre des messages.
    Un homme sur six et une femme sur dix dans le milieu carcéral appartiennent à un gang. Même si je comprends l'idée de réduction des préjudices dans la propagation des maladies et du VIH, en ce qui concerne l'échange de seringues pour que les tatouages soient plus propres, si cela doit se traduire par une prolifération des messages ou des symboles de gang, voilà encore quelque chose qui met en danger le personnel et les détenus. Cela crée une autre barrière entre le personnel et les détenus.
    Finalement, s'agissant de l'occupation double, notre gouvernement a l'intention d'investir dans de nouvelles prisons pour avoir plus d'espace, ce qui permettrait d'avoir un milieu carcéral plus sûr et plus propre. Je sais qu'au Yukon, il va y avoir un nouveau centre correctionnel en 2012.

  (1250)  

    J'ai eu l'occasion de visiter cet établissement à plusieurs reprises. Ce que j'ai vu, ce sont des cellules conçues pour une seule personne, mais aménagées pour deux et pour respecter les normes d'espace que certaines cellules individuelles ne respectent pas toujours. Ce que je vois également, c'est un nouvel établissement qui va créer un climat plus positif.
    Avez-vous des commentaires sur la construction de nouvelles prisons?
    Ce n'est pas ainsi que cela fonctionne. Votre temps est écoulé et le témoin n'a plus le temps de répondre.
    M. Sandhu a une question et il vous donnera peut-être le temps de répondre.
    Je vais donner à M. Sapers une minute pour répondre à ses questions s'il le veut.
    Merci. Je vous en remercie car votre collègue a soulevé des points très intéressants.
    Je ne veux pas que l'on se méprenne sur mon soutien au Service correctionnel du Canada et à la sécurité active. Le fait est que la sécurité active est la meilleure forme de sécurité dans l'administration d'une prison. C'est la forme de sécurité la plus efficace dans une prison. La sécurité active est tout ce dont vous avez parlé, c'est-à-dire l'interaction positive entre les agents de correction de première ligne et les détenus. Lorsque cela fonctionne bien, cela fonctionne très bien. D'ailleurs, si j'avais réfléchi un peu lorsque votre collègue m'a posé la question au sujet du sentiment de sécurité dans les établissements, j'aurais dit que lorsque la sécurité active est bien gérée, lorsqu'elle est bien appliquée et que l'exemple est donné d'en haut, les établissements sont très sûrs. Je pense que cela doit être bien clair.
    L'échange de seringues est un type de réduction des préjudices. Il y en a beaucoup d'autres. L'échange de seringues a été étudié au Canada à des fins correctionnelles par l'Agence de santé publique du Canada dans son rapport de 2006. En 2006, le ministre de la Santé m'a écrit pour me dire qu'au ministère, on se préoccupait beaucoup des programmes d'échange de seringues et que l'on comprenait le lien entre l'échange de seringues et la réduction des maladies infectieuses. Bien entendu, il faut trouver un équilibre entre cette mesure et d'autres préoccupations en matière de sécurité et de fonctionnement.
    Sur le plan de la sécurité, j'ai passé beaucoup de temps à visiter des prisons au Canada et ailleurs et je peux vous dire que les agents de correction et les autres membres du personnel ne sont pas particulièrement inquiets de la présence ou de l'absence de seringues, surtout dans le cadre de l'échange de seringues. Ce qui les inquiète, ce sont les endroits où sont cachées des seringues lorsqu'ils font des fouilles. Des études européennes ont d'ailleurs montré que les établissements sont plus sûrs lorsque l'échange de seringues est autorisé que quand il ne l'est pas pour cette simple raison. Il est plus facile de se blesser accidentellement avec une seringue cachée que si on sait où elle se trouve. Il ne faut pas oublier non plus que le programme d'échange de seringues n'est pas présent dans toutes les prisons dans l'ensemble du système, mais qu'il est très localisé, très spécialisé et très surveillé.
    Cela dit, je voudrais rapidement dire au sujet des messages de gang sur les tatouages que le tatouage illicite transmet des messages de gang et montre l'appartenance à un gang, alors que ce n'est pas le cas du tatouage supervisé. Ce dont j'ai parlé, ce sont les projets de tatouage supervisé sécuritaire du Service correctionnel du Canada qui ne permettrait pas qu'un prisonnier se fasse tatouer un symbole de gang. C'est le tatouage clandestin qui pose problème.
    Merci.
    Monsieur Sandhu, vous avez une minute et demie.
    Un montant de 122 millions de dollars a été injecté dans les programmes d'interdiction depuis 2008 sans que l'on puisse voir de corrélation avec les taux de présence de drogues dans les analyses d'urine. Ils n'ont pas monté ou descendu; ils sont restés relativement stables. Monsieur Sapers, vous avez parlé d'une baisse du rendement sur l'investissement et de nouveaux programmes d'interdiction. Pourriez-vous nous en dire plus?
    Je pense que ma réponse est déjà dans votre question.
    D'importants investissements ont été consentis dans l'application de la loi et les interdictions. La propre recherche du SCC, son rapport de vérification interne, etc., ont montré qu'on est arrivé effectivement à un plateau et que les chiffres des interdictions semblent augmenter. Il pourrait donc y avoir davantage de saisies, mais on ne sait pas vraiment si l'augmentation du nombre des saisies a permis de réduire la contrebande dans les établissements car on ne dispose pas de données de référence.
    Nous avons des chiffres sur les analyses d'urine, sur l'hépatite C et l'infection au VIH et nous savons que tout cela reste relativement stable. Il semble que l'utilisation des drogues plafonne malgré les nouveaux investissements importants consentis dans l'application de la loi et les interdictions.

  (1255)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons passer à la dernière question pour aujourd'hui, madame Young.
    Merci encore d'être venu. Je suis désolée de mon retard, mais j'assistais à une réunion d'un autre comité. J'essaie de me mettre au courant de vos présentations et de vos réponses.
     J'ai une ou deux questions au sujet de ce que vous avez dit. Excusez-moi si vous en avez déjà parlé ou si j'ai manqué quelque chose, mais je pense que ce serait bien de préciser, pour moi en tous cas.
    Vous avez parlé longuement de la présence des programmes de traitement, de l'évolution vers des programmes de traitement intégrés, etc. Le commissaire a dit que ce n'était pas simplement une question d'accessibilité...
    Vous avez mentionné les questions de places ou d'accès aux programmes de traitement. Vous avez parlé également des taux de réussite.
    Savez-vous vraiment si les taux baissent ou sont faibles parce que les programmes sont inaccessibles ou parce que les gens abandonnent ou partent dans d'autres établissements? Qu'est-ce que vous savez exactement par rapport à des conjectures?
    Nous savons qu'il existe un lien entre l'inscription et la réussite et nous savons que le taux d'inscription est bas. Nous savons qu'il existe divers...
    Est-ce que je peux vous interrompre une seconde. Je ne comprends pas bien la différence entre s'inscrire et être sur une liste d'attente. Vous comprenez ce que je veux dire?
    Oui, je pense que je comprends. La difficulté réside dans la façon dont on utilise ces termes.
    Le Service correctionnel du Canada vous dira qu'il n'y a pas de liste d'attente comme on l'entend d'habitude, par exemple lorsqu'on attend d'être opéré de la hanche. C'est qu'en réalité, les détenus ne sont pas placés sur une liste d'attente car dans le plan du programme, compte tenu de la durée de la peine, le programme peut ne pas être prescrit avant une période proche de la fin de la peine. Donc techniquement, ils ne sont pas sur une liste d'attente.
    La difficulté vient du fait qu'à cette étape de sa peine, le détenu n'est peut-être pas dans un établissement qui offre le programme qui lui convient et se voit donc refuser l'accès à ce programme, à moins qu'il ne soit transféré. S'il est transféré, il peut aller dans un établissement qui offre le programme, mais pas pendant le cycle d'admission à ce programme, et il devra attendre jusqu'au prochain cycle d'admission. Lorsqu'il est finalement admis, le programme peut être interrompu parce que le poste de la personne qui est censée offrir le programme est vacant ou la personne est en congé — ces gens prennent des vacances. Par conséquent, le programme peut être interrompu simplement parce qu'il n'y a personne pour le dispenser.
    Excusez-moi de vous interrompre...
    Très rapidement.
     ... mais il me reste très peu de temps et j'ai une autre question. Je comprends ce que vous dites au sujet des difficultés concernant l'inscription ou le fait d'être ou non sur une liste d'attente...
    Nous devons terminer.
    D'accord
    Ma deuxième question, très rapidement, porte sur le surpeuplement des prisons dont vous avez parlé. Compte tenu des montants que le gouvernement veut investir dans la modernisation des prisons — et vous avez dit que vous avez visité de nombreuses prisons — pensez-vous que c'est une bonne idée?
     Vous avez à peu près quinze secondes pour répondre.
    Je crois comprendre qu'il existe actuellement deux sortes d'investissements. On investit dans les immobilisations pour remédier à la détérioration des bâtiments ou simplement construire pour répondre à la demande actuelle et il y a ensuite les investissements qui sont faits en prévision d'une demande accrue à la suite des réformes législatives et des politiques.
    Je peux vous dire que les projets d'immobilisations qui doivent remédier à la détérioration pour que le système soit adéquat et sûr pour les détenus et le personnel sont essentiels.

  (1300)  

    C'est donc oui, alors?
    Et bien, c'est oui pour cette dernière partie.
    Je ne veux pas parler de la nouvelle capacité qui sera nécessaire en prévision des réformes législatives et des politiques, car je n'ai pas encore vu de synthèse de ce que seront les résultats de ce changement législatif et de politiques prévu sur le plan des chiffres.
    Merci beaucoup.
    Il est une heure, notre temps est donc écoulé.
    Nous tenons à vous remercier tous les deux d'avoir comparu à nouveau devant le comité. Nous vous en sommes reconnaissants, ainsi que de vos exposés et de vos réponses aux questions, merci.
    La séance est levée.
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