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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 030 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 29 avril 2014

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    La 30e séance du Comité permanent des Finances est ouverte.
    Je souhaite un bon retour à tous mes collègues. Je tiens aussi à souhaiter à nos deux invités très spéciaux la bienvenue à la première partie de la séance d’aujourd’hui, qui durera une heure et demie.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le premier point à l’ordre du jour est l’étude du Rapport de la Banque du Canada sur la politique monétaire.
    Nous sommes très heureux d’accueillir cet après-midi le gouverneur de la Banque du Canada, M. Stephen Poloz. C’est bon de vous revoir, gouverneur. Nous recevons aussi le premier sous-gouverneur de la Banque du Canada, M. Tiff Macklem. Monsieur Macklem, nous sommes également heureux de vous revoir.
    Je crois comprendre, gouverneur, que vous avez une déclaration préliminaire à faire. Ensuite, nous entendrons les questions formulées par tous les membres du comité. Veuillez commencer dès que vous êtes prêt.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Tiff et moi vous remercions de nous avoir invités à vous présenter les faits saillants des plus récentes prévisions économiques de la Banque du Canada.
    La Banque s'est engagée à communiquer ouvertement et efficacement afin que les Canadiens sachent comment elle s'y prend pour réaliser son mandat, qui consiste à favoriser la prospérité économique et financière du pays. L'un des meilleurs moyens d’y parvenir consiste à témoigner devant votre comité et à répondre à vos questions.
    Dans un premier temps, j’exposerai brièvement les perspectives d'évolution de l'inflation établies par la banque, puis celles concernant la croissance de l'économie mondiale et de l'économie canadienne. J'aborderai ensuite certains travaux de recherche menés récemment par la banque, et je terminerai par les tendances observées à l'heure actuelle.
    L'inflation demeure faible au Canada. Nous prévoyons que l'inflation mesurée par l'indice de référence restera nettement en deçà de notre cible de 2 % cette année et qu'elle retournera à la cible d'ici deux ans. L'inflation mesurée par l'IPC global devrait toutefois se rapprocher de la cible au cours des prochains trimestres en raison de facteurs temporaires. Permettez-moi de prendre un moment pour vous expliquer ce que j’entends par là.
    Nous nous attendons à ce que les capacités excédentaires au sein de l'économie et la concurrence accrue dans le commerce de détail maintiennent l'inflation mesurée par l'indice de référence sous la cible jusqu'aux premiers mois de 2016. En même temps, les prix à la consommation de l'énergie plus élevés et le niveau plus faible du dollar canadien contribueront à faire remonter l'inflation mesurée par l'IPC global.
    L'inflation mesurée par l'IPC global demeurera relativement près de la cible tout au long de la période de projection, alors même que la pression à la hausse exercée par les prix de l'énergie s'estompera, car les effets de la concurrence dans le commerce de détail vont s'amenuiser graduellement, et les capacités inutilisées, se résorber. Lorsque cela se produira, l'inflation mesurée par l'indice de référence remontera graduellement à 2 % et rattrapera l'inflation mesurée par l'IPC global.

[Français]

    Passons maintenant aux perspectives économiques.
    La croissance mondiale devrait se raffermir au cours des trois prochaines années, à mesure que les vents contraires qui ont bridé l'activité vont se dissiper.
    Dans l'ensemble, le taux de croissance de l'économie mondiale devrait augmenter pour s'établir à 3,3 % en 2014 et à 3,7 % en 2015 et en 2016. Au Canada, la croissance du PIB réel devrait avoisiner 2,5 % en moyenne en 2014 et en 2015, avant de ralentir pour se situer autour de 2 % par la suite.
    Ces chiffres concordent, pour l'essentiel, avec les prévisions de la Banque du Canada publiées en janvier, mais ils ne rendent pas compte de l'aspect qualitatif des perspectives qui ont changé de façon notable, surtout en ce qui concerne les pays émergents et l'Europe.
    La croissance en Europe est modeste, mais l'inflation reste trop faible et la reprise, qui donne des signes encourageants, pourrait être compromise par la situation concernant la Russie et l'Ukraine.
    La Chine et d'autres économies émergentes affichent une croissance solide, quoique les vulnérabilités financières soient plus inquiétantes, en particulier l'intensification de la volatilité sur les marchés en raison de l'incertitude politique.
    Cependant, la reprise économique aux États-Unis se déroule comme prévu, et ce, malgré les chiffres peu élevés affichés dernièrement, qui sont en grande partie attribuables à la météo inhabituelle. De fait, la demande privée pourrait se révéler plus forte que prévu.

  (1535)  

[Traduction]

    Par ailleurs, les difficultés auxquelles l'économie canadienne est confrontée ne vous sont pas inconnues. Les défis sur le plan de la compétitivité pèsent encore sur la capacité des exportateurs canadiens de profiter du renforcement de la croissance à l'étranger.
    Compte tenu de l'importance du secteur des exportations dans une économie ouverte comme la nôtre, et du décalage grandissant entre les exportations canadiennes et la demande étrangère, la banque a approfondi son analyse du secteur des exportations, et notamment des exportations hors énergie.
    Quand on subdivise le secteur des exportations hors énergie en un grand nombre de sous-secteurs, des tendances et des faits intéressants se dégagent. Premièrement, on découvre que certains sous-secteurs, comme les machines et le matériel, les matériaux de construction, les services commerciaux ainsi que les aéronefs et pièces d'aéronefs, évoluent en phase avec les facteurs fondamentaux, ou, même que, dans certains cas, ils ont un meilleur rendement que les sous-secteurs américains correspondants. Cela donne à penser qu'à mesure que la reprise aux États-Unis gagnera en vigueur et se généralisera, beaucoup de nos exportations en bénéficieront. Le niveau plus faible du dollar canadien contribuera aussi au redressement de ces sous-secteurs.
    D'autres sous-secteurs, dont les constructeurs de camions et de véhicules automobiles, les fournisseurs d'aliments et de boissons et les fabricants de produits chimiques, profiteront eux aussi d'un dollar canadien plus faible, mais dans une moindre mesure, étant donné qu'ils doivent faire face à de plus grands défis sur le plan de la compétitivité. Leur reprise sera ainsi plus lente.
    Le portrait global de la situation laisse entrevoir une convergence graduelle entre le taux de croissance des exportations canadiennes et celui de l'économie américaine. Mais cette étude plus détaillée indique que le décalage entre les exportations et la demande étrangère est appelé à persister. Et ne vous y trompez pas. Ce décalage est réel et important.
    La bonne nouvelle, c'est que nous savons maintenant plus précisément ce qu'il touche, à savoir la moitié environ de nos exportations hors énergie. La mauvaise nouvelle, c'est que la tenue de ces sous-secteurs est pire qu'on ne le pensait précédemment. Cette compréhension plus approfondie de ce secteur est précieuse, mais elle n'atténue pas nos inquiétudes concernant les défis qui nous attendent.
    Nous croyons encore que la hausse de la demande mondiale de biens et services canadiens, conjuguée au niveau élevé postulé pour les prix du pétrole, stimulera les investissements des entreprises canadiennes et contribuera à réorienter l'économie sur une trajectoire de croissance plus soutenable.

[Français]

    Nous continuons à nous attendre à un atterrissage en douceur dans le marché du logement et à une stabilisation du ratio de la dette pour ce qui est du revenu des ménages canadiens. Néanmoins, les déséquilibres restent élevés dans le secteur du logement et ils poseraient un risque important si la situation économique se détériorait.
    Nous observons, de manière anecdotique du moins, que de plus en plus de gens sont conscients de ce risque. Les consommateurs se comportent de façon responsable. Par exemple, les acheteurs optent pour des maisons moins chères que ce que leur crédit leur permettrait, et ce, afin d'éviter de se retrouver surendettés si les taux d'intérêt montaient.
    Les banques se montrent également plus prudentes dans l'octroi de prêts. Elles veillent à ce que les emprunteurs soient en mesure d'assurer le service de leurs dettes si les taux augmentent. Ainsi, même si le risque pourrait être notable, nous sommes convaincus qu'il n'est pas démesuré.

[Traduction]

    En somme, la banque est encore d'avis que les moteurs déterminants de la croissance et de l'inflation se raffermissent graduellement au Canada. Toutefois, ce point de vue est fortement tributaire du redressement projeté des exportations et des investissements. Selon un consensus de plus en plus large, quand l'inflation aura regagné la cible, les taux d'intérêt demeureront plus bas que ce à quoi nous étions habitués dans le passé, en raison de l'évolution démographique et parce que, après s'être maintenus à des niveaux exceptionnellement bas pendant une période aussi longue, les taux d'intérêt n'auront pas à varier autant pour exercer le même effet sur l'économie.
    L'inflation sous-jacente devant rester sous la cible pendant quelque temps, les risques à la baisse entourant l'inflation demeurent importants, de même que les risques associés aux déséquilibres dans le secteur des ménages. La banque estime que la résultante de ces risques reste dans la zone pour laquelle la politique monétaire actuelle est appropriée et, comme vous le savez, elle a décidé le 16 avril de maintenir le taux cible du financement à un jour à 1 %. Le moment et l'orientation du prochain changement du taux directeur varieront en fonction de l'influence des nouvelles informations sur la résultante des risques.
    Avant que Tiff et moi répondions à vos questions, j'aimerais prendre un moment pour dire quelques mots sur l'homme assis à mes côtés.
    La relation de Tiff avec la banque remonte à loin, à l'époque où, nouvelle recrue, il venait d'obtenir sa maîtrise. Je l’ai embauché à cette époque. Les contributions qu'il a apportées tout au long de sa carrière ont été considérables. À la banque, son intelligence et ses compétences en gestion nous manqueront. Mais nous regretterons aussi l'excellent ami qu'il était pour de nombreux collègues, moi y compris. Nous savons néanmoins que Tiff continuera à contribuer au bien-être financier du Canada en tant que doyen de l'École de gestion Rotman, où il s'attachera à assurer la formation de la prochaine génération d'économistes et de chefs d'entreprises qui garantiront au Canada un avenir prospère.
    Tiff s'est acquitté de ses fonctions de premier sous-gouverneur avec un tel brio que pour le remplacer, nous avons dû scinder son poste en deux et trouver deux personnes pour lui succéder. J'ai le plaisir d'annoncer que nous serons en de bonnes mains.

  (1540)  

    Je me réjouis à la perspective de vous présenter Carolyn Wilkins, la prochaine première sous-gouverneure, qui supervisera la planification stratégique et les opérations de la banque, et partagera la responsabilité de la conduite de la politique monétaire.
    Je serai également heureux de collaborer avec notre nouveau chef de l'exploitation, Filipe Dinis, qui sera chargé de la gestion de l'ensemble des fonctions administratives de la banque.
    Cela étant dit, Tiff et moi serons heureux de répondre à vos questions.
    Je vous remercie beaucoup, gouverneur, de votre déclaration préliminaire. Nous vous en sommes reconnaissants.
    De plus, au nom de tous les membres du comité, je tiens à remercier M. Macklem du service public exceptionnel qu'il a rendu à son pays. Nous lui souhaitons bonne chance. Nous avons toujours fait grand cas de ses interventions au cours des séances du notre comité. Nous vous souhaitons beaucoup de succès dans votre prochaine entreprise, Tiff, et nous vous remercions.
    Chers membres, nous allons commencer nos séries de questions en cédant la parole à M. Cullen. Allez-y, monsieur.
    Soyez tous deux les bienvenus. Tiff, je suis un nouveau membre du comité, mais, si j'avais été au courant de cette heureuse occasion, j'aurais recommandé que le comité vous offre une montre. Toutefois, je constate que notre président est trop économe pour autoriser de telles dépenses. Par conséquent, nous devrons nous contenter de vous offrir nos meilleurs voeux aujourd'hui. Je vous félicite de votre nomination à l'École de gestion Rotman.
    Merci.
    Je vous remercie, gouverneur, de votre déclaration préliminaire.
    J'ai quelques questions initiales à vous poser, auxquelles mes collègues donneront suite.
    Je souhaite disséquer les problèmes dont vous avez mentionné l'existence dans certains de nos secteurs d'exportation. Vous avez distingué certains secteurs dont le rendement semble réagir à toute amélioration enregistrée aux États-Unis, en particulier, ou être certainement lié à ces améliorations, alors que d'autres secteurs ne semblent pas réagir autant à ces facteurs.
    Pouvez-vous dégager une tendance qui nous aiderait à comprendre ces distinctions? Instinctivement, j'aurais soutenu que certains de ces sous-secteurs bénéficiaient de ces améliorations et, pourtant, vous avez mentionné que les sous-secteurs de l'automobile, de l'alimentation et des boissons ainsi que d'autres sous-secteurs n'en profitaient pas. Vous avez aussi parlé de la compétitivité. Je me demande si vous pourriez, autant que faire se peut, nous décrire un peu plus explicitement ce qu'englobent les risques, en particulier pour ces sous-secteurs qui, selon vous, ne bénéficieront pas d'une reprise au sud de notre frontière.
    Oui, bien sûr. J'aimerais attirer l'attention du député sur un document d'information que nous avons affiché sur notre site Web la semaine dernière. Il compte quatre ou cinq pages qui résument ces concepts. Par conséquent, je vais maintenant m'efforcer de mettre en relief les points saillants de ce document.
    La méthodologie employée n'est pas très complexe. Le fait est que, dans les modèles macroéconomiques que nous utilisons pour modéliser l'ensemble de l'économie, les exportations sont regroupées sous une seule catégorie ou deux catégories selon qu'il s'agit de ressources ou non. La catégorie qui comprend les exportations non liées aux ressources englobe encore de nombreuses marchandises.
    En fait, au cours des 18 à 24 derniers mois, nous avons observé un décalage croissant entre les moteurs déterminants de nos exportations non liées aux ressources et le volume de ces exportations. À l'heure actuelle, nous avons exporté de 35 à 40 milliards de dollars de marchandises de moins que nos modèles l'avaient prévu à ce moment-là.
    En décomposant cette catégorie en ses 31 sous-secteurs, nous avons été en mesure de déterminer qu'en fait, environ la moitié d'entre eux avaient évolué grandement en phase avec leurs moteurs déterminants. Cela signifie que le terme d'erreur qui nous préoccupe se limite à un groupe plus restreint, bien qu'il comprenne tout de même près de la moitié de nos exportations.
    Parmi les exemples que vous avez mentionnés, on retrouve les exportations d'automobiles et de camions légers. En fait, ces exportations ont suivi raisonnablement bien la croissance et la demande enregistrées aux États-Unis, ce qui n'a rien de très étonnant compte tenu de l'intégration du marché automobile nord-américain. Toutefois, dans le passé, ce marché n'était pas sensible aux fluctuations des taux de change, et nous savons, en outre, qu'au cours des deux ou trois dernières années, la majeure partie des nouveaux investissements dans ce secteur n'ont pas été effectués au Canada. Nous en concluons que, bien que ce secteur se débrouille assez bien en ce moment, il ne contribuera pas à réduire considérablement ce décalage que nous avons vu naître.
    Les secteurs qui, selon nous, ouvriront la voie sont, pour la plupart, liés à l'activité d'investissement des États-Unis, qui a été relativement discrète compte tenu du stade où nous en sommes dans le cycle. La reprise aux États-Unis est principalement stimulée par la demande des consommateurs et une remontée dans le secteur du logement. Les entreprises n'ont pas vraiment commencé à suivre ce mouvement en investissant.
    Nous croyons — en fait, nous avons fait état de notre conviction à cet égard, il y a environ six mois — qu'à mesure que la reprise aux États-Unis s'élargit et englobe le reste de ses secteurs, y compris celui des investissements et des dépenses gouvernementales — chose peu surprenante, les budgets des États et des administrations locales sont très serrés depuis un certain temps —, ces restrictions s'atténuent et, par conséquent, les moteurs commencent à fonctionner pratiquement à plein régime. À mesure que cela se produit, nous observerons au Canada une reprise plus vigoureuse des exportations dans de nombreux secteurs qui accusaient du retard.

  (1545)  

    Je répète que je m'efforce de comprendre vos propos. Je vous demande pardon, mais ce dossier est nouveau pour moi. Un décalage de 35 à 40 milliards de dollars dans vos estimations me semble substantiel, compte tenu de la mesure dans laquelle ces estimations vous aident à déterminer les secteurs où vos prévisions augmentent.
    J'ai encore du mal à comprendre pourquoi vous soupçonnez que ces secteurs combleront ce manque à gagner ou ce décalage et que la tendance s'améliorera si les deux conditions suivantes sont remplies, c'est-à-dire si les consommateurs mènent la reprise et si les gouvernements américains assouplissent un peu leurs mesures d'austérité.
    Ai-je bien compris ce que vous avez dit?
    En fait, à court terme, nous ne nous attendons pas à ce que ce manque à gagner soit comblé. Nos prévisions découlent de notre analyse plus approfondie. Ce décalage persistera, mais, avec le temps, une convergence entre le taux de croissance de nos exportations et celui de l'économie américaine se produira. Ce décalage dont nous avons discuté persistera jusqu'à ce que ces secteurs surmontent graduellement leurs difficultés en matière de compétitivité ou jusqu'à ce que ces secteurs élargissent les marchés vers lesquels ils exportent. Ou, ce qui importe le plus, selon moi, c'est que de nouvelles entreprises seront créées au Canada, qu'il est presque certain qu'elles exporteront leurs produits et qu'elles permettront au Canada d'accéder à de nouveaux marchés.
    Pour citer vos rapports, la banque continue d'être d'avis que le niveau d'endettement des ménages représente un « risque important ». Je souhaite changer de sujet pendant un moment. Vous dites que les déséquilibres dans le secteur des ménages présenteraient un « risque important si la situation économique se détériorait. » Quelles conditions économiques vous préoccupent le plus lorsque vous songez au niveau d'endettement des ménages, qui a atteint un sommet historique au Canada?
    Oui, le niveau d'endettement des ménages a atteint un sommet historique. Par conséquent, nous croyons que, compte tenu des conditions actuelles et de nos prévisions, ce niveau est soutenable et qu'en fait, il retournera à des niveaux plus raisonnables quand la croissance des emplois se généralisera et que le reste que l'économie s'activera.
    Je suis désolé, mais qu'est-ce qui permet de soutenir les niveaux d'endettement actuels des ménages qui diminueront graduellement?
    Le taux d’endettement des ménages est d’environ 165 %. Les charges de remboursement sont évidemment extraordinairement faibles, en raison des très faibles taux d’intérêt. Nous sommes d’avis qu’à mesure que l’économie se redressera, ces taux s’amélioreront graduellement, parce que les exportations seront le moteur de la croissance économique.
    Cependant, lorsque nous disons que la situation risque de se fragiliser si la conjoncture économique se détériore, nous faisons allusion à une possible autre secousse économique. Par exemple, si l’économie américaine devenait chancelante et que les États-Unis retombaient en récession ou qu’il se passait quelque chose en Europe qui provoquait une autre récession économique, cette situation entraînerait la hausse du taux de chômage au Canada, et c’est à ce moment que les charges de remboursement deviennent un plus grand problème.
    Merci, monsieur Cullen.
    Monsieur Saxton, allez-y.
    Merci au gouverneur et au premier sous-gouverneur de leur présence aujourd’hui.
    Nous aimerions aussi remercier le premier sous-gouverneur d’avoir passé quelque 30 ans de sa vie au service du Canada et nous lui souhaitons bon succès dans ses nouvelles fonctions.
    Gouverneur, vous avez récemment fait une déclaration en marge du rapport sur la politique monétaire. Vous avez mentionné que la tenue du secteur des exportations du Canada est essentielle à la croissance économique. N’empêche que les exportateurs canadiens sont encore aux prises avec des défis sur le plan de la compétitivité qui nuisent à leur capacité de prendre de l’expansion à l’étranger. Pourriez-vous nous préciser ce que sont ces défis sur le plan de la compétitivité?
    Oui. Du point de vue des entreprises, il y a un grand nombre de facteurs qui entrent en jeu pour déterminer la capacité concurrentielle, mais les économistes se limitent habituellement à prendre en compte les coûts relatifs de production, et toute fluctuation des taux de change peut exercer une influence. Ces taux déterminent notamment le prix auquel vous pourrez vendre votre produit, par exemple, à un acheteur américain.
    Comme nous en avons traité dans notre allocution de la semaine dernière, l'augmentation des termes de l'échange au cours des cinq ou six dernières années a beaucoup profité au Canada. Ce sont surtout les prix des ressources naturelles, et du pétrole plus particulièrement, qui sont élevés. Lorsque des acheteurs étrangers doivent dépenser davantage pour se procurer nos produits d'exportation, c'est autant d'argent de plus qui entre au Canada.
    Ce phénomène est généralement associé à une devise plus forte. C'est un peu comme lorsque vous promenez votre chien avec une laisse extensible. Le maître représente les termes de l'échange, et le chien personnifie le taux de change. Ce dernier multiplie les zigzags, mais le maître et son chien finissent par quitter le parc ensemble. Les empreintes laissées sont comparables à un graphique d'analyse économique. Vous avez un peu l'image. Ce sont deux éléments qui ont tendance à se suivre à long terme.
    Le fait que nos termes d'échange actuels sont environ 25 fois supérieurs à leur moyenne des années 1990 change beaucoup de choses. Cela se traduit par une augmentation de revenus d'environ 7 % pour le Canada dans son ensemble. Ce n'est pas rien. L'appréciation du dollar canadien est l'une des conséquences de cette augmentation, et l'un des moyens d'en répartir les effets.
    Un manufacturier canadien peut être touché à deux niveaux par ce phénomène. D'une part, l'important ralentissement économique aux États-Unis peut lui faire perdre de 40 % à 50 % de ses commandes d'exportation. D'autre part, le dollar canadien a pris de la valeur au cours de cette récession parce que le prix du pétrole n'a pas cessé d'augmenter. Ces deux facteurs rendent la conjoncture très délicate pour le secteur manufacturier. Avec la reprise économique aux États-Unis, la moitié du problème sera réglée. À plus long terme, il restera à nos entreprises à se donner les moyens de surmonter des situations semblables grâce à une croissance plus soutenue de leur productivité ou à d'autres mesures permettant de réduire les coûts.
    C'est la raison pour laquelle nous affirmons que la moitié de notre secteur des exportations souffre actuellement d'une détérioration de sa capacité concurrentielle, et qu'il lui faudra assurément un certain temps pour replacer les choses, sans doute en trouvant de nouveaux clients au sein de marchés en pleine croissance, comme en Asie.

  (1550)  

    Ne convenez-vous pas également que la réduction du fardeau fiscal des entreprises canadiennes aide aussi nos exportateurs à mieux soutenir la concurrence sur les marchés internationaux?
    Oui. Comme je le disais en préambule à ma réponse précédente, il y a de nombreux facteurs qui entrent en jeu pour déterminer la capacité concurrentielle. Si l'on peut réduire les coûts assumés par les entreprises à tous les égards, qu'il s'agisse de fiscalité, de tracasseries administratives ou de liens logistiques, il va de soi que la capacité concurrentielle globale du secteur s'en trouvera améliorée. On ne peut toutefois cibler un élément qui serait plus important que les autres, à l'exception peut-être des taux relatifs de croissance de la productivité entre nos entreprises et leurs concurrentes, et le Canada a toujours accusé du retard à ce chapitre.
    Merci.
    Lors de sa rencontre tenue récemment à Sydney, le G-20 s'est engagé à faire grimper le PIB mondial de 2 % en éliminant les obstacles à la croissance. On s'assurera notamment de supprimer les barrières tarifaires et de favoriser la conclusion d'ententes de libre-échange comme celles récemment signées par notre gouvernement avec l'Union européenne et la Corée du Sud, sans compter le Partenariat transpacifique à venir. À ce titre, il est également important de noter que, depuis l'arrivée au pouvoir de notre gouvernement en 2006, nous avons signé des accords de libre-échange touchant plus de 40 pays.
    Dans quelle mesure cette facilitation du commerce international contribue-t-elle à la croissance économique et à la création d'emplois au Canada?
    Ces avancées contribuent directement à élargir le champ des perspectives qui s'offrent aux entreprises canadiennes. L'engagement pris à Sydney se veut ambitieux. Le fait demeure que dans la plupart des pays, on a déjà optimisé les effets des politiques fiscales et monétaires, et que la croissance est dans une certaine mesure plutôt décevante à l'échelle mondiale par rapport aux attentes que nous avions. C'est ainsi que le G20 a déclaré que d'autres mesures seraient prises pour éliminer les obstacles à la croissance, notamment via le libre-échange et la suppression des tarifs, afin de permettre cette hausse de niveau d'environ 2 % en cinq ans, soit 0,4 % par année.
    J'estime cet objectif tout à fait raisonnable. Des simulations effectuées au moyen de modèles très complexes tant par le FMI que par l'OCDE l'ont démontré, et le Canada a certes l'occasion d'y contribuer.

  (1555)  

    Il vous reste une minute.
    Merci, monsieur le président.
    Dans un récent discours, vous avez fait remarquer que les ménages canadiens de tous les groupes d'âge s'enrichissent malgré la crise financière et la grande récession. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
    Les Canadiens ont effectivement pu continuer à améliorer leur situation financière malgré la conjoncture défavorable. Même en tant que simple observateur, on peut constater que le Canada a mieux géré la crise que la plupart des autres pays. Nous avons bien sûr connu nous aussi un ralentissement, mais il a été moins prononcé qu'ailleurs.
    En outre, bien des ménages possèdent une résidence et l'augmentation du prix moyen des maisons a aussi contribué à leur enrichissement. La vigueur des marchés boursiers est un autre des facteurs qui ont permis aux Canadiens de mieux s'en tirer financièrement
    Je vous parlais en outre tout à l'heure des termes de l'échange et de la hausse annuelle de 7 % des revenus de notre pays, un autre élément clé qui dépend, bien évidemment, du maintien de prix élevés pour les ressources énergétiques.
    D'accord, merci.
    Merci, monsieur Saxton.
    Monsieur Brison.
    Bienvenue à vous, messieurs le gouverneur et le sous-gouverneur.
    Je m'interroge au sujet du risque de bulle immobilière au Canada étant donné que les points de vue exprimés à partir de l'étranger, que ce soit par l'Economist Intelligence Unit, Paul Krugman ou l'OCDE, diffèrent grandement de ce que nous disent les banques canadiennes. L'OCDE estime que nous sommes vulnérables à une correction des prix, alors que les banques se veulent très rassurantes à l'égard de toutes ces questions.
    Comment expliquez-vous l'écart entre l'évaluation de notre situation immobilière par ces experts étrangers et la perception qu'en ont les banques canadiennes, et quel est votre point de vue à ce sujet? Qui a raison?
    Comme c'est toujours le cas, il y a un certain degré de vérité dans toutes ces analyses. Il est important de l'établir dès le départ.
    À quoi vous attendiez-vous?
    Bon nombre des paramètres utilisés pour déterminer s'il y a surévaluation sur un marché peuvent être tout à fait pertinents dans une conjoncture que l'on pourrait qualifier de normale. Mais on se rend compte tout de suite que la conjoncture actuelle n'a rien à voir avec la normale. De fait, nous avons réagi à la crise en laissant les taux d'intérêt atteindre des creux historiques, ce qui a notamment eu pour effet d'inciter plus de gens à s'acheter une maison, ou à l'acheter plus tôt dans leur vie. Dans une certaine mesure, cela a contribué à la hausse des prix des maisons existantes.
    Comme nous l'indiquions tout à l'heure, nous estimons la situation actuelle viable et propice à un atterrissage en douceur, pour autant que les autres indicateurs réagissent comme prévu. Néanmoins, comme nous l'écrivons dans notre rapport, l'économie demeure fragile. Ainsi donc, s'il y a ralentissement assorti notamment d'une hausse du chômage, nous serions effectivement vulnérables à une correction quelconque des prix sur le marché immobilier. Si les banques se montrent aussi optimistes, c'est assurément parce qu'elles peuvent miser sur des garanties solides et que les Canadiens n'ont pas tendance à simplement quitter leur maison parce que sa valeur a chuté. C'est une situation qu'ils ont déjà vécue de temps à autre. Ce n'est bien sûr pas le résultat souhaité, mais notre économie serait assez forte pour s'en tirer.
    Vous disiez la semaine dernière à Saskatoon que les spécialistes s'entendent de plus en plus pour dire que les taux d'intérêt vont demeurer à un niveau plus faible que ce que nous avons connu par le passé. La Presse canadienne écrivait pour sa part que les Canadiens pouvaient s'attendre à ce que les taux d'intérêt demeurent faibles pendant quelques années encore. Votre prédécesseur semblait vouloir diluer le punch par la voie de ses mises en garde, mais n'y a-t-il pas un risque que vous corsiez à nouveau le mélange en créant un environnement qui pourrait se traduire en lendemains douloureux pour les familles canadiennes, si jamais on doit procéder à la correction dont vous parliez?
    Il y a effectivement un risque, mais nous nous y connaissons bien en la matière et je dirais qu'il s'agit d'un risque faible à long terme. Il faut donc considérer dans leur ensemble les risques de bulle financière, de fluctuations indues des prix sur le marché immobilier ou d'augmentation des niveaux d'endettement, autant d'éléments qui ne doivent pas se manifester à long terme. C'est ce que nous appelons des risques faibles à long terme, mais plus longtemps la situation perdure, plus ces risques s'intensifient.
    Il faut se demander si on est prêt à accepter des risques semblables. Le fait est que nous ressentons encore les effets du ralentissement dû à la crise. Si nous n'avions pas baissé nos taux d'intérêt et pris certains de ces risques, la récession nous aurait touchés beaucoup plus sévèrement. Les régimes de pension auraient pu être grandement affectés. Il y aurait pu y avoir bien des effets néfastes de la sorte pour notre économie. Il y a un risque, mais il est jugé acceptable comparativement à ceux auxquels nous nous serions exposés en agissant à l'inverse, c'est-à-dire en essayant d'augmenter les taux d'intérêt.
    Je crois qu'il faut tenir compte de l'ensemble des variables et nous faisons de notre mieux pour assurer le juste équilibre nécessaire.

  (1600)  

    Certains ont soutenu avoir besoin de données de meilleure qualité sur le logement. C'est notamment le cas de Benny Tal, économiste à la CIBC. Convenez-vous avec Benny Tal qu'il serait bon de rendre publiques des données de meilleure qualité sur le logement afin d'aider les Canadiens à prendre des décisions éclairées sur le marché immobilier?
    Je suis économiste depuis plus de 30 ans, et j'adore les données. Si quelqu'un est capable de me fournir des données plus détaillées sur le logement, je vais donc m'empresser de les analyser. Nous pouvons déjà compter sur d'excellentes données. Nous estimons qu'elles nous permettent de bien saisir la conjoncture économique, mais il y a toujours moyen d'améliorer les choses en s'appuyant sur davantage de données.
    Ne pourrait-on pas rendre publiques une plus grande partie de ces données? Est-ce que cela serait utile? Par exemple, avons-nous des données au sujet des acheteurs et des vendeurs étrangers sur le marché immobilier canadien? Dans quelle mesure est-il important de savoir ces choses?
    Je ne sais pas si quelqu'un recueille vraiment des données à ce sujet. Il faudrait faire enquête. S'il était possible de rassembler des données semblables, nous nous ferions un plaisir de les analyser.
    Nous avons des données éparses à ce sujet, mais rien de systématique. Nous n'avons pas cherché à déterminer qui étaient les propriétaires. Grâce à nos entretiens avec les constructeurs, nous avons une idée de ce qui se passe sur le marché, mais nous n'avons pas de données recueillies de façon systématique.
    C'est exact.
    Vous pourriez peut-être aller voir sur Kijiji ou un truc de la sorte; c'est simplement une suggestion.
    Vous avez déjà parlé du vieillissement de la population, mais j'aimerais savoir dans quelle mesure nous devrions nous inquiéter des répercussions de ce phénomène pour notre économie. Est-ce que le vieillissement aura pour effet de freiner la croissance de notre productivité comme ce fut le cas au Japon dans les années 1990 et en Allemagne plus récemment?
    Vous avez 20 secondes pour répondre.
    Vous pourriez lire à ce sujet le texte de l'allocution que j'ai prononcée à Halifax où nous avons traité en détail de cette problématique. Je vous répondrais très brièvement par l'affirmative. Ces éléments moteurs que sont la croissance de la population et l'augmentation de la main-d'oeuvre ont tendance à voir leur effet s'atténuer avec le vieillissement.
    La productivité est un facteur beaucoup plus complexe qui dépend à la fois des mesures que nous prenons et de l'ampleur de nos investissements. Il nous est donc possible d'exercer une certaine influence à cet égard.
    Merci beaucoup, monsieur Brison.
    Nous passons à M. Allen.
    Messieurs le gouverneur et le premier sous-gouverneur, je vous remercie de votre présence aujourd'hui. Nous vous en sommes reconnaissants.
    J'aimerais poursuivre dans la veine démographique. À la page 22 de votre rapport sur la politique monétaire, on indique que la croissance du PIB se situe aux alentours de 2 %. On ajoute qu'une hausse de croissance tendancielle de la productivité est contrebalancée par un nouveau recul de la croissance tendancielle du facteur travail, associé aux forces démographiques à l'oeuvre, avec renvoi à votre rapport d'octobre 2013.
    Vous nous parlez de la reprise qui s'amorce aux États-Unis et ailleurs dans le monde. Compte tenu des possibilités de croissance qui pourraient s'ensuivre pour notre économie, croyez-vous que les entreprises canadiennes pourraient avoir de la difficulté à recruter les nouveaux travailleurs dont elles auront besoin?
    Oui, si on se projette dans l'avenir, on peut affirmer avec assez de certitude... S'il y a une chose dont on peut être certain en démographie, c'est que l'an prochain on aura tous vieilli d'un an. Cela peut sembler banal, mais si l'on insère ces variables dans un modèle économique, cela devient très révélateur. Il en ressort que notre main-d'oeuvre commence à s'amenuiser de telle sorte que notre croissance ralentit progressivement pour tendre vers ce niveau de 2 %.
    Comme je le disais tout à l'heure, nous avons la possibilité d'étendre nos activités de telle manière que la productivité alimentera une croissance encore plus soutenue. Il faut cependant dire que nous prévoyons déjà une croissance assez forte de la productivité en raison de l'état d'avancement du cycle et de la recrudescence des investissements qui devraient se concrétiser avec la reprise des exportations.
    Si l'on ajoute à cela l'arrivée de nouvelles entreprises, un phénomène qui s'amorce à peine et qui est porteur de gains considérables au chapitre de la productivité, nous devrions pouvoir atteindre cet objectif de 2 %. Avec un peu de chance, nous espérons même pouvoir aller jusqu'à 2,2 %. C'est essentiellement ce qu'on recherche.
    Il ne faut pas oublier que les excellents résultats auxquels nous nous sommes habitués étaient le fruit de la présence simultanée au sein de la population active de l'équivalent d'un demi-siècle de baby-boomers. Nous sommes simplement en train de dévaler cette pente.

  (1605)  

    Je voudrais ajouter quelque chose. Nous croyons qu'il y a actuellement sur le marché du travail une certaine capacité inutilisée, une marge de manoeuvre en quelque sorte. Il y a certes possibilité de créer de nouveaux emplois pour mettre à profit cette situation et faire ainsi baisser le taux de chômage. Comme nous l'indiquons dans notre rapport, nous estimons qu'il faudra environ deux ans pour que l'économie absorbe cette capacité excédentaire.
    Lorsque nous atteindrons ce que nous estimons être le plein potentiel de notre économie, le taux de croissance de l'emploi sera à peu près équivalent au taux de croissance de la main-d'oeuvre. À partir de ce moment-là, si vous voulez que l'emploi puisse continuer à croître, il faut assurer une participation plus soutenue de nouveaux segments de la population active. Il faut alors inciter les groupes comme les travailleurs âgés, les Autochtones et les jeunes à être plus actifs sur le marché du travail.
    Pour l'instant, il y a encore une certaine marge de manoeuvre. Selon nos propres projections, il faudra environ deux ans pour que les capacités excédentaires se résorbent.
    D'accord.
    J'ai discuté aujourd'hui avec des gens du secteur forestier. Entre 2000 et 2012, le taux de croissance annuel composé de la productivité de la main-d'oeuvre s'est situé autour de 2,5 % dans cette industrie. Leur plan stratégique prévoit toutefois le recrutement de 60 000 nouveaux travailleurs d'ici 2020. Nous constatons que la dépréciation de notre dollar va bien évidemment accroître les coûts de l'achat d'équipement aux États-Unis.
    Voyez-vous les difficultés qui peuvent se pointer à l'horizon? Parmi les principaux gains réalisés par l'industrie, certains découlaient de la modernisation de l'équipement et de l'amélioration des processus. Pensez-vous que le dollar canadien va se déprécier au point de rendre la situation problématique?
    Voyons voir... À la marge, je pourrais vous répondre par l'affirmative. Si notre dollar perd 10 % de sa valeur, il deviendra plus dispendieux d'importer certains équipements. Mais si l'on considère les choses dans une perspective historique, la valeur de notre dollar demeure relativement élevée par rapport à ce que l'on a déjà connu. Si l'on compare à la situation d'il y a 5 ou 10 ans, l'acquisition de cet équipement devient une véritable aubaine par rapport au prix que l'on devait payer lorsque notre dollar était au plus bas. Je ne pense vraiment pas que cela va influer beaucoup sur les projections que nous avons établies en matière d'investissement.
    La question d'une pénurie de main-d'oeuvre vaut toutefois davantage la peine qu'on s'y arrête. Il est toujours possible pour une économie d'ajuster ses niveaux d'immigration ou de prendre des mesures de la sorte. Les entreprises ont en outre plusieurs options et peuvent répartir leur production dans différents pays. Ainsi, les activités exigeant d'importants investissements peuvent se faire au Canada, un pays où la main-d'oeuvre est relativement rare et plus onéreuse, alors qu'il est préférable d'opter dans d'autres cas pour des pays où c'est l'inverse qui est vrai.
    En fait, les entreprises utilisent un modèle de production qui est planétaire. C'est ce que l'on peut constater par exemple dans le secteur du textile. Même s'il y a maintenant beaucoup moins d'emplois que par le passé dans ce secteur au Canada, nous demeurons l'un des leaders mondiaux de l'industrie. Il y a notamment tout le travail de conception qui se fait encore au Canada.
    Il est important d'éviter les généralisations, car ce sont des situations bien particulières qui diffèrent les unes des autres.
    Je dirais que le secteur forestier a toujours bien fait en matière de productivité. C'est l'une des industries où les taux de change pourraient influer sur la demande. Il y a donc des jours meilleurs à l'horizon.
    Gouverneur, vous avez indiqué que la demande privée pourrait se révéler plus forte qu'escompté.
    Avez-vous mené des travaux en ce sens afin de déterminer ce que cela pourrait représenter pour le Canada, si la demande privée devait être légèrement supérieure ou inférieure à vos prévisions?

  (1610)  

    Cette allusion à la demande privée est un euphémisme d'économiste. C'est ce que notre ancien économiste Keynes appelait « l'esprit animal ».
    Ce que nous savons, c'est qu'il y a toujours cette étape inexpliquée de prise de décisions majeures dans une économie. C'est un peu comme un effet d'entraînement: tout le monde est optimiste, alors tout le monde devient optimiste. On a tendance à stimuler l'économie. C'est exactement quand ça se produit que les économistes sous-estiment ce qui arrivera par la suite. Évidemment, le contraire s'est produit au cours des trois ou quatre dernières années, étant donné que l'esprit animal a été complètement anéanti par l'expérience que nous avons vécue.
    Puisque bon nombre de nos modèles surévaluent ce qui se produit actuellement, nous avons la conviction que cet esprit animal reprendra vie et que nous assisterons à cette reprise économique. C'est aux États-Unis que ce redressement devrait se manifester en premier. Ils ont été durement touchés et attendent ce moment depuis si longtemps. De plus, tous les ingrédients sont alignés. C'est la raison pour laquelle on a souligné ce risque dans notre rapport sur la politique monétaire. À cette étape du cycle économique, nous avons toujours fait des sous-estimations à cet égard.
    Merci beaucoup, monsieur Allen.

[Français]

    Monsieur Caron, vous avez la parole.
    Monsieur le gouverneur, monsieur le premier sous-gouverneur, je vous souhaite la bienvenue. Monsieur Macklem, je veux d'abord vous féliciter pour votre nomination. Cela signifie sans doute que nous aurons l'occasion de vous revoir à ce comité de temps à autre.
    Mes questions vont d'abord porter sur l'émission d'obligations du gouvernement dont le terme est de 50 ans. La réaction du gouvernement a été rapide. Le matin, on a entendu dire que le gouvernement considérait l'émission de ces obligations et, à la fin de l'après-midi, on a appris qu'un montant de 1,5 milliard de dollars avait été émis et vendu sur les marchés.
    On a entendu la version du ministre des Finances, mais pourriez-vous me dire quelle est la position de la Banque du Canada quant à l'émission d'obligations dont le terme est si long? On parle en effet de 50 ans.
    Dans ce domaine, la Banque du Canada agit à titre de conseiller auprès du gouvernement. Nous gérons pour lui le stock de la dette. En ce qui concerne cette situation, il est évident que sur le marché, les investisseurs désirent accéder à des termes plus longs. Du même coup, cela peut permettre au gouvernement de minimiser le coût de sa dette pendant une longue période. Compte tenu de cette combinaison, il a été suggéré de procéder à cette émission, qui s'est avérée une grande réussite, hier.
    J'aimerais savoir ce que cela veut dire.
    Au printemps de 2012, le vérificateur général a fait une étude sur la dette portant intérêt. Il a étudié les modèles utilisés par les gestionnaires de la dette. Je cite ce qu'il disait à ce sujet:
Les résultats fournis récemment par le modèle révèlent qu’il est avantageux d’émettre plus d’obligations à court terme et à moyen terme, plutôt que des obligations à long terme. Le modèle fait ressortir qu’une telle stratégie permet d’améliorer la structure de la dette à long terme, tout en réduisant les risques de devoir assumer des frais d’intérêt plus élevés.
     Cette recommandation du vérificateur général a été faite en tenant compte du risque de refinancement.
    Je comprends que le gouvernement veuille assurer un financement à plus long terme avec des taux d'intérêt relativement plus faibles. Dans ce cas, devrait-il adopter une composition différente de la dette portant intérêt en allant davantage vers une dette à long terme, ou devrait-il être toujours aussi prudent et diversifier la dette comme il l'a fait jusqu'ici?
    C'est une question très difficile. Le stock de la dette est élevé. Il faut choisir une séquence d'émissions qui satisfait à la demande et garder des liquidités dans tous les domaines de la courbe du taux d'intérêt.
    Il y a beaucoup de facteurs qui entrent en ligne de compte dans cette recommandation. C'est très complexe. Il faut tenir compte à la fois des conditions du marché et des besoins du gouvernement, tout en gardant à l'esprit le portrait plus général du stock de la dette.

  (1615)  

    J'aimerais ajouter quelque chose à cet égard.
    La stratégie au sujet de la dette est établie par le ministère des Finances. Comme le gouverneur l'a mentionné, nous sommes des conseillers.
    L'autre facteur, c'est que la situation change. Durant la crise, le gouvernement a lancé un grand plan de stimulus budgétaire, ce qui a fait augmenter la dette. Aujourd'hui, la situation est inversée, de sorte que nous devons examiner et ajuster la stratégie en fonction des besoins.
    Cela représente-t-il l'explication de la réaction du gouvernement par rapport à la décision antérieure? Selon le rapport du vérificateur général, les participants aux marchés veulent que le gouvernement augmente la quantité des obligations de 30 ans, mais les gestionnaires de la dette ont préféré ne pas aller dans cette direction. Dans le cas des obligations à long terme de 30 ou de 50 ans, ce sont souvent les fonds de pension et les régimes de retraite.

[Traduction]

    Est-ce la raison pour laquelle les gestionnaires de la dette ont accepté cette fois-ci?

[Français]

    Il faut qu'il y ait un équilibre. Les gestionnaires des fonds de retraite ou les grandes compagnies d'assurances aiment beaucoup les obligations à long terme parce que leurs liabilities sont à long terme. Toutefois, ils ne constituent qu'une partie du marché.
    Pour le gouvernement, en moyenne, la courbe monte. S'il prête à plus long terme, cela lui coûte plus cher, et s'il prête à court terme, cela lui coûte moins cher. Effectivement, il y a une certaine demande pour des obligations à long terme, mais le gouvernement ne veut pas émettre toutes ses obligations à long terme parce que cela lui coûterait plus cher. C'est une question d'équilibre. Pour le gouvernement, il est bon qu'il y ait une forte demande d'obligations, mais nous lui avons conseillé de trouver un équilibre. Il y a donc plusieurs objectifs.

[Traduction]

    Somme toute, quelle serait votre recommandation à l'égard de la composition de la dette par rapport aux obligations à court, à moyen et à long terme?
    Comme je l'ai indiqué, les besoins du gouvernement évoluent, et parallèlement aux nouvelles normes imposées aux banques, cela a une incidence sur les liquidités des marchés mondiaux. Dans le cadre de la stratégie de gestion de la dette, il sera donc important de s'assurer d'avoir suffisamment de repères clés, de sorte qu'on ait des marchés liquides qui fonctionnent bien au Canada et une courbe très bien définie pour le gouvernement, parce que c'est à partir de ces repères qu'on établit le prix des émissions d'obligations des sociétés.
     Il s'agit d'un nouveau facteur qui entre en jeu et qui devra être pris en considération dans le cadre de la stratégie.
    Avez-vous une autre question, monsieur Caron?
    Je peux essayer rapidement. Ma question s'adresse à M. Macklem.
    La dernière fois que vous avez comparu, vous nous avez parlé du manque de compétitivité de nos exportations et de notre production. Vous avez indiqué que la valeur du dollar canadien et la faible croissance de la productivité contribuaient aux deux tiers et au tiers respectivement de ce manque de compétitivité.
    Défendez-vous toujours ces chiffres?
    Les chiffres changent constamment. Depuis ma dernière comparution, le dollar canadien s'est en quelque sorte affaibli; par conséquent, sa contribution pourrait être légèrement inférieure à ce qu'elle était. Toutefois, comme la situation n'a pas énormément changé, on n'est pas loin du chiffre exact.
    Merci.
    Monsieur le président, il y un graphique dans le rapport sur la politique monétaire qui illustre ce calcul, et on peut voir une légère baisse.
    Merci.
    Je cède maintenant la parole à M. Adler. Allez-y, je vous prie.
    Merci, messieurs les gouverneur et premier sous-gouverneur.
    J'aimerais parler un peu de la scène internationale. Il va sans dire que les événements en Ukraine ont bouleversé certains projets économiques. En Europe, la reprise demeure très fragile. Les Européens sortent du plus profond de leur récession. Dans quelle mesure la crise économique en Ukraine nuit-elle à l'économie européenne? Quelle sera l'incidence de cette crise sur notre reprise ici, en Amérique du Nord?

  (1620)  

    Il est un peu trop tôt pour répondre à cette question. À l'heure actuelle, cette situation fait peser un risque de ralentissement. Comme vous l'avez décrit, le rendement économique de l'Europe est beaucoup plus faible que ce qu'il était avant la crise. La reprise y est encore très jeune et fragile.
    Comme nous le savons, d'après notre expérience, ici et aux États-Unis, l'incertitude est l'une des variables qui a freiné la reprise. Le manque de confiance est sans aucun doute un facteur de ralentissement. Dans le contexte actuel qui n'a rien de rassurant, nous considérons que c'est un élément que nous ne pouvons pas encore mesurer. On ne peut pas encore établir de liens directs. Il peut peut-être y avoir des conséquences pour le système bancaire européen, les sanctions et ainsi de suite. On peut prévoir des répercussions sur certains marchés des produits de base, mais ce sont les effets indirects qui sont les plus préoccupants, à mon avis. Cette confiance peut être abîmée très tôt dans la reprise européenne, et la taille de leur économie est semblable à celle des États-Unis, c'est-à-dire près de 30 % de l'économie mondiale. Ce serait donc un risque de ralentissement que nous prendrions très au sérieux.
    J'aimerais maintenant parler d'un autre pays.
    La Nouvelle-Zélande a augmenté son taux d'intérêt; c'est la première économie à le faire depuis quelques années.
    Aux États-Unis, le taux d'intérêt est proche de zéro. Le Federal Open Market Committee a indiqué qu'il n'augmentera pas le taux d'intérêt tant que le taux d'inflation ne remontera pas au-dessus de 2,5 % ou que le taux de chômage ne baissera pas en dessous de 6,5 %. Le taux d'inflation ne se situe pas loin de ce chiffre. Le taux de chômage aux États-Unis s'élève à 6,7 %, et maintenant, ils examinent d'autres indicateurs économiques pour savoir s'ils augmenteront les taux d'intérêt ou pas.
    On discute donc de toutes ces questions; vous avez tous lu à ce sujet. La Réserve fédérale cessera bientôt d'acheter des obligations. Dans quelle mesure est-ce un problème pour ces prévisions? Est-ce que cela aura une incidence sur notre situation ici au Canada? Le cas échéant, serez-vous forcés de hausser le taux d'intérêt au pays?
    Tout d'abord, nous estimons que l'économie américaine se porte mieux; il est donc tout à fait normal qu'il y ait des ajustements à la politique monétaire. On comprend maintenant beaucoup mieux ce qui a ébranlé les marchés financiers l'an dernier. Je pense que les marchés font clairement la distinction entre la réduction graduelle des achats de dette de la Réserve fédérale et un changement éventuel aux conditions monétaires, sans que ce soit nécessairement lié à une variable en particulier, comme le taux de chômage, par exemple. Ce sera en fonction des conditions économiques générales et de leur cible d'inflation.
    Dans notre cas, notre politique monétaire sera établie en toute indépendance, selon l'état de notre économie et, par le fait même, les répercussions sur notre cible de maîtrise de l'inflation.
    Tout comme la Nouvelle-Zélande l'a fait de façon indépendante, la Banque du Canada pourrait ajuster ou non son taux d'intérêt, quelle que soit la politique de la Réserve fédérale. Cela pourrait évidemment avoir une incidence sur notre marché des obligations et ainsi de suite, mais si c'est bien expliqué, les marchés comprendront. Je pense que notre taux d'intérêt actuel n'est pas le même qu'aux États-Unis. Nous avons un taux de 1 %, pas de zéro.
    Cela dit, vous avez indiqué plus tôt que la politique budgétaire et monétaire avait fait tout ce qui était en son pouvoir jusqu'ici. Vous avez déclaré il y a quelques semaines, le 16 avril précisément, lors d'une conférence de presse, que vous n'écartiez pas la possibilité de réduire les taux d'intérêt afin de stimuler l'économie. Qu'est-ce qui vous inciterait à le faire?

  (1625)  

    Oui, c'est ce que j'ai dit, et la question demeure pertinente. Ce que nous avons fait, dans cette zone d'incertitude, c'est que nous avons essayé de réduire le risque que le taux d'inflation atteigne un niveau trop faible sans toutefois alourdir l'endettement des ménages, qui est déjà trop élevé. Nous avons décidé qu'il convenait d'équilibrer ces risques.
    Ce qui changerait, par exemple, c'est si la reprise des exportations dont nous avons parlé plus tôt n'était pas à la hauteur de nos prédictions. Si l'économie américaine ne reprend pas aussi rapidement qu'elle le devrait et que nos exportations ne se redressent pas, nous pouvons envisager une plus longue période de ralentissement économique et la possibilité que le taux d'inflation se retrouve nettement en dessous de la cible.
    Il nous faudrait ensuite réévaluer cet équilibre des risques en fonction de ces nouvelles données. C'est pourquoi j'ai dit à ce moment-là que si une telle chose arrivait, je ne pourrais pas écarter l'idée de la réduction du taux d'intérêt parce que je ne peux pas tout prévoir.
    Si la situation inverse se présentait, ce serait le contraire qui se produirait. Ce serait une histoire tout à fait différente.
    Cet équilibre des risques n'est pas quelque chose de précis, mais plutôt une zone dans laquelle nous essayons de gérer les risques auxquels nous sommes confrontés et aussi les prévoir.
    Merci beaucoup, monsieur Adler.
    Je cède maintenant à la parole à M. Rankin.
    Je tiens à souhaiter la bienvenue au gouverneur et au premier sous-gouverneur au sein du comité. À titre d'ancien étudiant de l'Université de Toronto, je sais que la Rotman School est très heureuse de vous avoir, monsieur. Merci beaucoup.
    On m'a dit que la banque a régulièrement surévalué le rendement en matière d'exportations et d'investissement par le passé. Si oui, pourquoi? Et pourquoi le rendement des exportations a-t-il finalement été revu à la baisse?
    Ce n'est pas seulement la banque qui a fait de mauvaises prévisions. L'économie a donné des résultats inférieurs à ceux escomptés à ces deux égards, quel que soit le modèle économique utilisé. Quand nous nous demandons pourquoi il en est ainsi, c'est évidemment notre question la plus importante. Nous nous penchons sur ces éléments, comme nous en avons discuté plus tôt, notamment le phénomène de l'esprit animal, c'est-à-dire la mesure dans laquelle il faut dissiper l'incertitude pour qu'une entreprise investisse.
    Étant donné ce que nous avons vécu ces cinq dernières années... De nombreuses entreprises ont dû fermer leurs portes; quelque 9 000 entreprises du secteur manufacturier ont disparu. Celles qui ont survécu ont peut-être réduit leur effectif pendant cette période. À quel moment ces entreprises seront-t-elles prêtes à réinvestir afin de répondre à la demande, disons, des États-Unis ou d'autres marchés étrangers?
    La réponse est que les entreprises ont besoin de plus d'assurance aujourd'hui qu'il y a cinq ou dix ans dans une situation semblable. Il est très difficile de mettre le doigt sur cette confiance, et pourtant, vous savez intuitivement que c'est vrai. Vous pouvez parler à des gens; ils vous diront tous que c'est vrai.
    Nos modèles n'englobent pas ce genre de choses; c'est aussi simple que ça. Du côté des exportations, comme je l'ai dit, il y a certains éléments que nous sommes désormais en mesure d'examiner plus en profondeur. Nous comprenons mieux quels secteurs — nous savons qu'ils ont longtemps eu du mal à maintenir leur compétitivité — ont perdu des parts de marché aux États-Unis.
    Nous avons beau les connaître et les comprendre; est-ce que nous comprenons réellement ce qui fera renverser la situation? C'est ce que nos modèles prévoient, mais dans la réalité, ce sont de vraies personnes qui prennent de véritables décisions; par conséquent, les tendances historiques n'ont pas été un bon guide de ce que nous voyons en ce moment. Et c'est ainsi que nos modèles fonctionnent.
    C'est juste. Merci.
    Selon le directeur parlementaire du budget, les trois derniers budgets d'austérité présentés par le gouvernement conservateur ont donné lieu à la perte de 46 000 emplois et ont fait en sorte que le PIB était inférieur d'un demi pour cent.
    Partagez-vous cet avis?
    Je n'ai pas examiné de près cette analyse, et je considère que cette question s'adresse à quelqu'un d'autre.
    Pourquoi, selon vous, la croissance de l'emploi a-t-elle été aussi faible pendant la deuxième moitié de 2013?
    Je pense que cela revient à ce que nous disions plus tôt. Le principal facteur de croissance du Canada a toujours été la demande extérieure, qui favorise les exportations, les ventes, les investissements et la création d'emplois, étant donné que les entreprises prennent de l'expansion pour répondre à la demande. Ce phénomène ne s'est tout simplement pas manifesté dans l'économie canadienne. On croyait que cela allait se produire, mais les attentes ne se sont pas réalisées. Pour ce qui est des plans d'emploi, je crois qu'il faut attendre que cela se concrétise.
    Je vais de nouveau poser ma question. Êtes-vous d'accord avec le directeur parlementaire du budget pour dire que les « compressions des dépenses gouvernementales ont pour effet de freiner l’essor économique et la création d'emplois »?

  (1630)  

    Si vous me demandez si les restrictions budgétaires ralentissent l'économie, oui, absolument; toutefois, je ne pourrais pas me prononcer sur les chiffres que vous avez évoqués. Nous n'avons pas fait d'analyse en ce sens. En revanche, l'affirmation générale est juste.
    J'ajouterais que lorsque nous établissons la politique monétaire, nous tenons compte de tout ce qui touche l'économie canadienne. Évidemment, la politique budgétaire en fait partie. Nous prenons en considération les plans du gouvernement, tels que publiés dans les budgets, dans le cadre de nos décisions. Compte tenu du faible rendement en matière d'exportations et de tous les autres facteurs en jeu, nous avons maintenu nos taux d'intérêt très bas dans le but de stimuler l'économie canadienne.
    Êtes-vous d'accord avec le C.D. Howe Institute et Statistique Canada pour dire que le Programme des travailleurs étrangers temporaires a contribué à l'augmentation du taux de chômage au Canada? Est-ce quelque chose que vous avez examiné?
    Non, pas du tout. C'est loin de la politique monétaire.
    J'aimerais obtenir une précision. Dans votre déclaration, vous avez dit que vous vous attendiez à ce que les capacités excédentaires au sein de l'économie et la concurrence accrue dans le commerce de détail maintiennent l'inflation mesurée par l'indice de référence sous la cible jusqu'aux premiers mois de 2016. Quand vous parlez des « capacités excédentaires au sein de l'économie », faites-vous allusion à la marge notable de capacités excédentaires dont il est question dans le graphique 12, à la page 14?
    Exactement. Il s'agit d'une des mesures, et le taux de chômage en serait une autre, ou plutôt la capacité d'emploi. On retrouve de multiples mesures, mais c'est ce que cela signifie.
    Vous faites donc référence à la capacité excédentaire notable...
    C'est exact.
    D'accord.
    Si les risques à la baisse que vous avez cernés dans le rapport sur la politique monétaire se concrétisaient, quelle serait l'intervention de la banque et, selon vous, quelles mesures le gouvernement devrait-il prendre en conséquence?
    Si un important risque de ralentissement devait se concrétiser et modifier l'équilibre des risques dont nous avons parlé plus tôt... Nous estimons que notre taux d'intérêt de 1 % est adéquat au moment où l'on se parle, compte tenu du fait que l'endettement des ménages est élevé, que l'inflation est en deçà de la cible et qu'elle pourrait l'être davantage dans le cas d'un ralentissement.
    Si un important risque à la baisse venait modifier la situation, il faudrait non seulement envisager un taux d'intérêt plus bas, mais aussi équilibrer une toute une nouvelle série de risques et déterminer la meilleure stratégie de minimisation du risque pour la banque centrale.
    Merci beaucoup, monsieur Rankin.
    Je cède maintenant la parole à M. Van Kesteren.
    Merci à vous deux de témoigner.
    Tiff, vous allez nous manquer. Cela fait quelques années que nous vous voyons siéger aux côtés du gouverneur. Vous avez toujours magnifiquement contribué à la cause. Nous vous remercions du service rendu. Vous nous manquerez.
    Merci.
    Je veux poser une question. J'ai toujours été un grand défenseur de notre système bancaire. Je crois sincèrement que la dernière grande récession, dont nous tentons encore de nous remettre complètement, comme le gouverneur l'a fait remarquer, est le résultat du comportement imprudent des banques. J'ai lu ce matin un rapport de la Deutsche Bank indiquant qu'elle avait détenu jusqu'à 75 trillions de dollars en produits dérivés. Or, nous savons que la dernière grande récession est en grande partie attribuable aux produits hypothécaires dérivés toxiques aux États-Unis.
    J'aimerais tout d'abord savoir si vous surveillez nos banques et aussi si vous pouvez faire rapport sur la manière dont nos banques s'en sortent dans ces domaines qui ont causé des problèmes il y a cinq ans.

  (1635)  

    En fait, c'est notre rôle de comprendre ces questions; il revient toutefois au BSIF de réglementer nos banques pour veiller à ce qu'elles respectent ses exigences. Selon moi, un examen d'ensemble de ce qui n'allait pas avant la crise financière montre que le problème est venu de l'effet de levier. On jouait tant sur l'effet de levier que cela a dopé les marchés financiers et engendré un effet domino quand la situation a commencé à se dégrader.
    Les leviers financiers ne disparaissent pas simplement parce que la crise est terminée. Au printemps dernier, quand on a commencé à parler de repli et que les marchés financiers étaient très instables, c'était encore une fois l'effet des leviers financiers dans certains segments au marché où il semble facile de faire des gains si le risque est faible, car on peut renforcer sa position en faisant jouer l'effet de levier afin de multiplier le rendement.
    L'effet de levier est un fait de la vie sur les marchés financiers. Le Comité de Bâle du Conseil de stabilité financière, ou CSF, est en train d'élaborer un ensemble de mesures pour instaurer un ratio de levier pour les banques. Ces ratios imposeront de réelles limites, contrairement à ce qui s'est passé avant la crise.
    Nous sommes en train de mettre sur pied une architecture financière internationale entièrement nouvelle qui semble déjà bien plus sécuritaire que celle que nous avions avant. Ce n'est pas encore chose faite. En vue du sommet qui aura lieu en Australie plus tard cette année, je dirais qu'environ 80 % du travail devrait être accompli, et c'est un pas de géant en avant. Il y a encore du travail à faire sur le plan de la réglementation.
    Tiff, voudriez-vous ajouter quelque chose?
    J'aimerais ajouter qu'au Canada, nous imposons depuis longtemps un ratio capital/actif de 20 à 1 sur les leviers financiers. C'est une raison importante, parmi plusieurs autres, qui explique pourquoi les banques canadiennes ont mieux traversé la crise. En raison de ce ratio de levier, l'achat de prêts hypothécaires à risque titrisés pour faire de l'argent en faisant jouer l'effet de levier ne constituait pas pour elles une solution intéressante, puisqu'elles ne pouvaient pas dépasser leur ratio de levier. Grâce à cette mesure et à une saine gestion du risque, les banques canadiennes n'ont pas beaucoup acheté de ces produits; ainsi, quand le marché s'est effondré, notre système n'en a pas trop souffert. Ce concept a été importé dans les règles internationales.
    Ce que je voulais vraiment entende et que je crois entendre, c'est que les bons instituts écossais gardent encore les institutions canadiennes en bonne santé et que nous ne nous engageons pas dans des entreprises risquées qui ont provoqué tous ce grabuge par le passé.
    Suis-je dans le juste? Je pense que c'est ce que les Canadiens veulent entendre et je veux certainement que ce soit le cas.
    Il faudra passer par une très généreuse et fort longue période d'application graduelle pour mettre en oeuvre les nouvelles normes du Comité de Bâle en matière de capital d'ici 2019. Le BSIF a eu la grande intelligence d'imposer ces normes dès maintenant aux banques canadiennes, et toutes les grandes banques canadiennes se conforment aujourd'hui à ces normes supérieures.
    Bien, merci.
    Dans le passé, la valeur du dollar était moins élevée. Notre illustre président et moi-même avons eu le privilège de faire partie du Comité de l'industrie, et nous avons découvert que l'un des problèmes que nous avions par le passé, c'est que nous ne profitions pas de la faiblesse du dollar. Vous avez beaucoup parlé du besoin d'améliorer notre productivité. Observe-t-on les mêmes tendances à cet égard? Ces dernières années, bien des voix se sont élevées pour affirmer qu'il fallait faire diminuer la valeur de notre dollar. J'ignore comment on est censé s'y prendre. J'ai toujours interprété cela comme un signe de faiblesse de notre économie. La valeur du dollar a toutefois baissé de 10 ¢. Faisons-nous les bons choix actuellement? Je ne sais pas si la Banque du Canada surveille ces facteurs, mais n'allons-nous pas refaire la même erreur que la dernière fois et profiter de cet avantage? Je sais que les coûts de l'équipement ont légèrement augmenté, mais comme les commandes devraient affluer, profitons-nous de la situation?

  (1640)  

    Répondez brièvement, je vous prie.
    Brièvement, je répondrais oui et non, parce que pour chaque entreprise qui n'en profite pas, il y en a une qui en profite. Dans l'ensemble, nous sommes moins concurrentiels, et c'est dans la moitié du secteur des exportations dont j'ai parlé plus tôt que la situation est la plus grave. Mais l'autre moitié a accompli un travail admirable. Habituellement, il convient de profiter de la force du dollar pour acheter de l'équipement parce que les coûts sont moins élevés. Cependant, si on est au milieu d'une récession et que l'entreprise est durement touchée, il est très difficile d'obtenir le genre de financement nécessaire pour faire ces achats au moment opportun. C'est facile à expliquer, mais pas à prévoir.
    Merci, monsieur Van Kesteren.
    À titre de président, c'est moi qui vais maintenant intervenir.
    Je voulais commencer par la question des prix des produits de base, notamment celui du pétrole. En page 6, vous traitez des prix du Brent, du WTI et du pétrole de l'Ouest canadien en indiquant qu'ils se rapprochent. Votre prédécesseur a souvent parlé des contraintes, particulièrement en ce qui concerne l'accès aux pipelines. Comme les prix évoluent, êtes-vous moins préoccupé par les contraintes avec lesquelles vous devez composer pour transporter ces produits jusqu'au marché?
    Il est vrai que la situation actuelle semble moins préoccupante qu'elle ne l'était il y a un certain temps. Par contre, la tendance n'est pas très claire en périodes difficiles, alors que c'est le contraire quand tout semble bien aller. Je doute que nous puissions tout expliquer, mais nous considérons que les liens logistiques et les goulots d'étranglement qui ont provoqué cette situation dans le passé jouent un rôle essentiel. Au fil du temps, il semble que la courbe de tendance s'atténue parce qu'on livre davantage par train et parce que certains pipelines ont été agrandis ou réparés. Les contraintes relatives à la capacité semblent s'atténuer avec le temps; on assiste donc à une convergence graduelle, mais pas totale, des prix.
    D'accord.
    J'aimerais également aborder la question de la compétitivité et de la productivité, pour faire suite à certaines questions posées par M. Van Kesteren et d'autres membres. J'aimerais particulièrement savoir si les entreprises canadiennes sont capables de tirer le maximum de la situation quand la valeur du dollar est élevée plutôt que faible. Vous venez de répondre fort bien en ce qui concerne les défis que pose la force du dollar, en indiquant que c'est le moment propice pour profiter du fait que les coûts des intrants sont plus faibles. Mais comme vous l'avez souligné, il est très difficile de le faire pour une entreprise en difficultés financières.
    J'aimerais que, comme l'a fait votre prédécesseur, vous parliez du fait que ces derniers mois ou peut-être ces dernières années, les entreprises canadiennes sont restées assises, pour prendre un terme péjoratif, sur un joli pactole sans s'en servir.
    Voulez-vous formuler un commentaire à ce sujet? Considérez-vous toujours qu'il soit problématique pour l'économie canadienne que les entreprises canadiennes soient peut-être encore trop prudentes et n'investissent pas assez dans leurs propres activités et dans l'économie en général?
    Je passe beaucoup de temps à parler aux entreprises comme telles au lieu de me fier à nos modèles pour expliquer ce qui se passe, et je trouve que c'est fort utile. J'en ai conclu, comme je le disais précédemment, que les entreprises et leurs conseils d'administration en ont vu de toutes les couleurs au cours de cette période; ils se montrent donc plus circonspects quand vient le temps de prendre une décision, compte tenu de la confiance que leur inspirent les perspectives.
    Quand l'économie américaine passe un assez bon été, mais connaît ensuite un hiver difficile, est-ce à cause de la température ou de la crise qui refait surface? Ces soubresauts d'incertitude incitent vraiment les entreprises à la prudence, et c'est tout à fait compréhensible. Il est vrai que les bilans sont bons. Nous considérons que c'est excellent, parce que c'est un des ingrédients importants de la reprise que nous décrivons.
    Selon nous, tous les éléments sont en train de se mettre en place, car l'économie américaine est plus forte, les exportations augmentent, les bilans sont positifs et, bien entendu, les coûts de financement sont faibles s'il est nécessaire de recourir à cette solution.
    Tous les ingrédients sont prêts. Tout ce qu'il faut, c'est que les entreprises aient davantage confiance dans le fait qu'il s'agit d'une reprise durable et non d'un autre feu de paille. Je suis convaincu que c'est ce qui se passe et qu'on observera une différence notable au cours des deux prochaines années. Mais c'est une prévision, et cela ne paraît pas encore dans les chiffres.

  (1645)  

    Pour que tout soit clair, alors, les entreprises canadiennes se sont montrées prudentes dans leurs actions en maintenant des bilans équilibrés au cours des derniers mois et peut-être des dernières années. Elles ont envisagé de nombreuses démarches à court terme et elles ont réagi raisonnablement à la situation au lieu de...
    Je considère qu'elles sont prêtes et que leur capacité n'est pas encore tellement restreinte. Elles peuvent effectuer les livraisons demandées avec ce qu'elles ont. Les investissements viendront à la prochaine étape, et nous observerons une augmentation substantielle à cet égard, comme en témoigneront les chiffres sur la productivité également.
    Le troisième et dernier point que je voudrais aborder, c'est que si nous étions en 1994 et que nous dressions une liste des mesures que le gouvernement devrait prendre du point de vue fiscal et monétaire concernant la productivité et la compétitivité, je me doute que tout serait fait maintenant.
    Ce que je veux dire par là, c'est que je pense qu'au cours des 20 dernières années, le gouvernement a mis en oeuvre un grand nombre de mesures sur les plans fiscal et monétaire afin d'améliorer la compétitivité et la productivité. Mais le problème persiste et semble refuser de disparaître. À dire vrai, les mesures que nous avons instaurées ne semblent pas avoir eu autant d'effet qu'elles auraient dû en avoir.
    J'ai moins d'une minute et demie, si chacun d'entre vous veut dire quelque chose à ce sujet.
    Tiff, c'est peut-être à vous qu'incombera le gros travail de comprendre exactement pourquoi ces mesures n'ont pas eu l'effet prévu.
    Je n'ai pas d'explication satisfaisante pour ce qui s'est passé ces 20 dernières années. Il est très difficile d'expliquer la manière dont l'économie s'est comportée à cet égard. Le fait est que quand on parle aux entreprises, elles ont de belles histoires à raconter au sujet de la productivité; or, ce n'est pas ce qui paraît dans les statistiques.
    Je pense qu'en agrégeant les chiffres, nous obtenons un portrait du Canada qui diffère de ce qu'est souvent la vérité sous-jacente. Par exemple, le secteur des ressources connaît un bel essor en raison de l'augmentation du commerce, particulièrement dans le secteur du pétrole. Les chiffres indiquent cependant que c'est un secteur peu productif. Il faut effectuer beaucoup de forage, et certains puits produiront et d'autres pas. Ce n'est pas une usine réglée au quart de tour où on peut stimuler la productivité avec une nouvelle machine.
    Cette variation du poids économique modifie le portrait global de la productivité d'une manière qui peut être difficile à expliquer. Pourtant, quand on examine ce qui se passe au sein des entreprises, tout va bien.
     Je n'essaie pas de mêler les cartes. Je fais seulement remarquer qu'il n'est pas si facile pour nous d'expliquer ce qui se passe, même après coup.
    Voulez-vous intervenir brièvement?
    Comme le gouverneur l'indique, c'est un mystère constant. Je conviens que les gouvernements successifs ont pris un grand nombre de mesures appropriées. Je pense qu'il faut garder à l'esprit que si la productivité a connu une croissance décevante, elle a au moins augmenté de 1 % au cours des 20 dernières années, et il faut évidemment faire la bonne chose pour obtenir ce résultat.
    Si on revient aux périodes où la productivité augmentait plus rapidement, on sait que ce résultat n'était pas gratuit non plus. Le fait que la productivité n'augmente pas de façon notable ne signifie pas que les politiques sont sans effet. Elle augmente quand même de 1 %.
    Cela dit, c'est un mystère qui nous intrigue depuis longtemps. Peut-être pourrais-je demander à quelques érudits de la Rotman School de se pencher sur la question.
    Merci. Je comprends.
    Nous laissons maintenant la parole à M. Caron.

[Français]

    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je voudrais parler de la question de la modélisation à la Banque du Canada. On a beaucoup fait référence aux esprits animaux dans les temps difficiles et un peu erratiques.

[Traduction]

    À Montréal, je pense que vous avez fait référence à ces esprits animaux dans ce sens, quand vous avez parlé de... Je finirai bien par trouver de quoi il s'agit, mais vous avez fait référence à la difficulté et au fait que les modèles que la banque utilise soulèvent plus de questions qu'ils n'apportent de réponses, parce que ces périodes sont difficiles à prévoir. C'est essentiellement la même analogie.
    Vous avez également fait une métaphore en indiquant que le chien va parfois dans toutes sortes de directions quand on essaie de le diriger. Mais après un certain temps, on connaît son chien, on commence à déceler des tendances et on voit dans quelle direction il se dirige.
    Sur le plan de la modélisation, selon ce que nous avons observé au cours des trois, quatre ou cinq dernières années et après ce que nous avons vécu au cours de la dernière récession ou de la dernière période de chaos, ne pourrions-nous pas adapter nos modèles à cette réalité, à ces esprits animaux? Je ne dis pas qu'il faudrait que ces modèles soient parfaits, parce qu'une bonne part d'inconnu subsiste, mais nous devrons un jour y inclure ces facteurs afin d'avoir une meilleure idée de ce qui nous attend au cours de ces période difficiles.

  (1650)  

    La réponse est oui. Les données économiques se fondront toujours sur des modèles, car on ne peut évidemment pas tout faire. Nous tentons donc de faire des abstractions, de résumer ou de simplifier.
    Le problème, c'est que nous ne sommes pas réellement sorti de l'auberge. J'aime simplifier les choses en disant qu'il avait une bulle. Nous connaissons l'histoire: cette bulle a éclaté. Les bulles laissent derrière elles des cratères, et cette bulle-là a mis sept ans à se former. Il semble qu'il faudra vraiment sept ans pour réparer les dommages provoqués à l'époque; nous ne pourrons donc pas affirmer être sortis d'affaire avant un ou deux ans. Nous aurons appris beaucoup sur les comportements sous-jacents au cours de cette période, ce qui nous incitera à concevoir nos modèles différemment et peut-être même à redéfinir ce que font les banques centrales en pareil cas. Comme l'invention naît du besoin, nous avons considérablement modifié ce que les banques centrales font dans ces situations.
    Tout cela pour dire que oui, il y aura une nouvelle génération de modèles au sortir de la crise, mais les modèles actuels reposent encore sur ce que je considère comme des vérités fondamentales auxquelles nous retournerons. Elles sont si fondamentales que nous croyons qu'elles existeront encore. Il faut simplement que nous passions au travers de cette période et que nous unissions nos efforts jusqu'à ce que nous revenions à la normale. Même si nous avons indiqué que la normale peut changer ou évoluer, elle conserve encore un grand nombre de propriétés auxquelles nous sommes habitués et que nous avons appliquées au cours des 30 dernières années.
    Je comprends ce que vous dites et que c'est la réalité. Je conviens avec vous que nous avons encore quelque chose à apprendre de la situation dans laquelle nous nous trouvons.
    D'un autre côté, nous avons vu les esprits animaux, au cours de la bulle technologique, par exemple. Diriez-vous que les modèles utilisés par la banque et le secteur privé également ont depuis été modifiés, changés et adaptés en fonction de la réalité? Cela nous porte-il à être optimistes à cet égard?
    Le parallèle est intéressant, car la bulle technologique que nous connaissons tous, particulièrement au Canada, a éclaté en ayant très peu d'effet à l'échelle macroéconomique. Mais cette bulle était bien plus circonscrite.
    Au cours de celle dont nous parlons, qui s'est formée pendant la présente décennie, on a davantage fait un usage débridé de l'effet de levier.Cette bulle a touché le système financier, pas seulement un secteur particulier du marché boursier. Partout où on pouvait faire une mise, on pouvait faire jouer l'effet de levier pour obtenir les fonds pour miser; on le voyait à la bourse des marchandises, sur des marchés de l'immobilier ou chez les intermédiaires dans le marché immobilier des États-Unis. Cette bulle a réellement pris des proportions mondiales. Les efforts pour réparer les pots cassés sont donc bien plus vastes et touchent bien plus d'aspects. Comme vous le savez, il faut instaurer une toute nouvelle architecture pour le système financier.
    Cette bulle était bien plus importante que la bulle technologique. Fondamentalement, par contre, son effet sur les citoyens ordinaires n'a pas été tellement différent. Elle a fait chuter les bourses, a eu un effet sur la richesse et a envoyé une petite onde de choc dans l'économie. La dernière bulle était vraiment plus importante et elle était synchronisée.
    Merci.
    Je laisse la parole à M. Keddy pour une brève intervention.
    Je souhaite la bienvenue au gouverneur et au sous-gouverneur.
    Nos discussions portent en bonne partie sur quelques aspects qui reviennent sans cesse. Nous avons notamment discuté de la relation entre la compétitivité et la productivité, comme le président l'a indiqué, et les défis que pose la croissance, et je ne suis pas entièrement certain de la réponse. Vous avez fait mention, dans une de vos interventions, du lien qui existe entre la valeur du dollar et la compétitivité et la productivité.
    Je pense que nous n'avons pas examiné suffisamment le lien entre... vous savez, quand le dollar valait 36 ou 38 ¢ de moins que le dollar américain. Trop de petites entreprises ont pensé que c'était une affaire de profit, de devise, et c'est quelque chose d'entièrement différent. Je pense que cela s'inscrivait simplement dans un processus d'éducation, peut-être une occasion manquée. De plus, quand le dollar était faible, le profit excédentaire n'a pas été investi dans la machinerie. On l'a plutôt investit en grande partie dans les gens et les salaires. Les salaires ont grimpé de façon exponentielle alors que la productivité, bien franchement, a diminué.
    Voulez-vous expliquer ce lien? Je pense que c'est un lien très difficile et qu'on peut difficilement le contrôler.

  (1655)  

    La manière la plus simple de considérer cette question consiste peut-être a voir comment une entreprise envisagerait les choses. Est-ce que cette entreprise est concurrentielle et est capable de faire une vente contre un concurrent qui fait presque ou exactement la même chose? Si cette entreprise est située au bout de la rue, le taux de change n'entre même pas en jeu. Si votre productivité est meilleure que celle du concurrent au bout de la rue, vous pouvez offrir au consommateur la même chose à prix moindre.
    Mais si le concurrent moins productif du bout de la rue bénéficie d'un meilleur système de livraison qui fait qu'il peut livrer le produit deux jours avant vous? C'est un autre élément qui entre dans l'équation de la compétitivité, et le taux de change n'entre toujours pas en jeu.
    Disons maintenant que ces deux entreprises sont en concurrence avec une compagnie des États-Unis qui fait la même chose; les prix qu'elles proposent aux acheteurs étrangers sont maintenant soumis aux effets des fluctuations du taux de change en plus des autres facteurs. Voilà pourquoi il y a des superpositions. Si vous regardez le graphique du rapport sur la politique monétaire dont Tiff a parlé, on prend les coûts relatifs entre le Canada et les États-Unis et on se demande comment ils se sont convertis en une devise commune, en prenant en compte des effets du taux de change.
    La hausse de la devise au cours des 10 dernières années a eu une influence notable sur ce graphique. Pour atténuer cette hausse, il faudrait réellement accroître la productivité du travail ou faire quelque chose de complètement différent pour compenser le désavantage relatif au coût. Voilà pourquoi nous avons parlé de vents contraires. J'ai indiqué que l'appréciation de la devise était associée aux conditions de l'augmentation des échanges commerciaux; il n'y a donc rien que nous puissions faire. Cela s'inscrit dans le portait global.
    Vous pouvez poser une brève question.
    Il existe un autre lien à cet égard. Nous savons que les ménages sont endettés, à hauteur de 165 %, selon ce que vous avez indiqué En même temps, la valeur nette de ces mêmes ménages a augmenté au fil du temps. Ici encore, tout cela a encore un lien avec la valeur du dollar — qu'on exporte à l'étranger ou qu'on vende à son voisin — et avec la demande mondiale en marchandises. Or, notre économie est axée sur les marchandises. Vous savez, il y a tout cet enchevêtrement intérieur de questions, et alors que nous pensions qu'il y avait des problèmes sur les plans de la valeur nette et de l'endettement des familles canadiennes...
    D'accord.
    ... ce n'est pas vraiment là que les choses dérapent. Tout semble assez solide.
    Vous pouvez faire un bref commentaire.
    Eh bien, la réponse est oui. C'est exact.
    D'accord. Merci.
    Vous avez bien résumé la situation.
    Merci, monsieur Keddy.
    Nous entendrons M. Brison. Veuillez rester bref, je vous prie.
    Je sens que j'ai la responsabilité d'ajouter que ce que vous avez observé aux États-Unis est une évolution rapide de la valeur nette. La valeur des maisons a chuté, le marché des titres a dégringolé et tout à coup, leur réseau est effondré, sans que leurs dettes ne disparaissent pour autant. Voilà d'ou vient le problème.
    Vous avez raison, mais cela ne veut pas dire qu'on n'est pas vulnérable. C'est ce qui explique pourquoi il y a une vulnérabilité.
    Merci.
    Monsieur Brison, je vous prie.
    Parlant de la valeur nette et du capital, si on s'intéresse au livre de Thomas Piketty intitulé Le capital du XXIe siècle et au risque qui se pose quand le taux de croissance du capital dépasse celui du revenu du travail, conviendriez-vous avec M. Piketty que les inégalités risquent d'augmenter si, de fait, la faible croissance se maintient pendant que le rendement du capital est élevé?
    J'ai téléchargé ce livre sur mon iPad, mais je ne l'ai pas encore lu. C'est une hypothèse historique fort intéressante. D'après ce que je sais, la question repose sur ces facteurs économiques fondamentaux. Si le rendement du capital est depuis longtemps supérieur au taux de croissance du revenu, alors il existe ce que nous appelons un clivage ou un déséquilibre à long terme entre les deux, ce qui explique la persistance ou peut-être même la croissance de l'inégalité. C'est la conclusion que l'auteur dégage.
    Selon les modèles que nous utilisons, nous croyons que ces deux facteurs convergent. Voilà pourquoi nous indiquons que le taux d'intérêt à long terme réel décroîtra à mesure que ces données démographiques diminuent. C'est une hypothèse que je dois mieux comprendre. Elle aurait certainement très peu à voir avec la politique monétaire. Dans cette politique, nous considérons que nous faisons une contribution à cet égard en maintenant un taux d'inflation faible et stable, et c'est tout ce que nous pouvons faire pour permettre aux gens de prendre les bonnes décisions.

  (1700)  

    À titre d'économiste, considérez-vous qu'il y ait un risque économique si, par exemple, les Canadiens n'économisent pas suffisamment pour leur retraite? Seulement 38 % des Canadiens participent à des programmes, comme les REER. Ce sont habituellement les mêmes personnes qui cotisent à un CELI ou à un REER. C'est environ le même groupe de personnes. Mais la majorité de Canadiens qui n'ont pas les moyens de contribuer ou qui n'économisent pas suffisamment en vue de la retraite risquent-ils de se retrouver le bec à l'eau? Si la thèse veut que les périodes où la croissance des gains en capital est supérieure à la croissance économique aggraveraient l'inégalité, n'y a-t-il pas un risque pour l'économie?
    Comme vous le soulignez, il semblerait en effet qu'un risque se pose au cours des prochaines années si les retraités, de plus en plus nombreux, ne peuvent maintenir leur niveau de vie. Dans le contexte global, on pourrait croire qu'en investissant ses économies dans les marchés financiers, on pourra tirer parti du rendement du capital au lieu de grever ses revenus. C'est pourquoi notre modèle à long terme repose sur la présomption de convergence.
    Bien des familles canadiennes n'ont pas de marge de manoeuvre pour investir.
    C'est exactement ce que je comprends. Les économies ne sont effectivement pas aussi élevées que nous voudrions qu'elles soient dans ce contexte de base.
    J'ai une question sur les prix de l'énergie. La banque a-t-elle cherché à déterminer quel serait l'effet sur l'économie canadienne si nous pouvions obtenir le prix mondial pour notre pétrole, par exemple?
    Pour notre pétrole?
    Pour le pétrole, oui.
    Nous obtiendrions quelques dollars de plus par baril. Je n'ai pas effectué de calcul à ce sujet, mais ce serait une somme substantielle.
    Nous avons fait des calculs de temps à autre. Si on dit que l'écart entre le WCS et le WTI est de 40 $, ce qui serait considérable — il y a bien moins d'écart actuellement —, et qu'on multiplie ce montant par les exportations de pétrole, on peut obtenir un nombre assez impressionnant de plusieurs milliards de dollars. Si l'écart est moins important, le nombre bien plus petit. Il faut retenir que les prix fluctuent beaucoup.
    Pourquoi ne pas leur demander de nous envoyer de l'information complémentaire?
    M. Saxton dispose de quelques minutes; nous voulons ensuite entendre le directeur parlementaire du budget.
    Merci beaucoup, monsieur Brison.
    Merci.
    Monsieur Saxton, je vous demanderais de rester bref.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai juste une dernière question que j'aimerais poser au gouverneur et du premier sous-gouverneur.
    Vous avez indiqué aujourd'hui que le Canada a assez bien traversé la tourmente économique au cours et au sortir de la récession. Relativement parlant, en fait, nous nous en sommes extrêmement bien tirés; nous ne sommes toutefois pas immunisés contre les forces extérieures qui pourraient encore affaiblir notre économie. Je suis intéressé à savoir quelles forces extérieures peuvent, selon vous, nous rendre vulnérables. J'aimerais particulièrement savoir quelle influence le repli de l'assouplissement quantitatif aux États-Unis pourrait avoir sur nos marchés et notre économie?
    Nous restons certes vulnérables à l'environnement extérieur. Notre principale faiblesse, c'est que nos perspectives d'exportation sont essentielles pour que l'inflation revienne conforme à la cible, et il faut pour cela que la reprise se fasse à plein régime aux États-Unis. Si cette reprise connaît des ratés, le reste de nos perspectives en pâtiraient.
    Nous sommes également préoccupés par ce qui se passe en Chine, où la croissance connaît clairement un ralentissement. Nous pensons toujours qu'elle serait d'environ 7 %, mais ce pays a des vulnérabilités financières qui nous inquiètent. Comme nous l'avons dit plus tôt au sujet de l'Europe, la reprise est particulièrement fragile et pourrait avoir une influence sur la situation entre la Russie et l'Ukraine. Ce sont des facteurs externes auxquels nous devons toujours porter attention.
    Pour ce qui est du repli, je ne pense pas que cela soit un gros problème pour nous. La Réserve fédérale américaine est en train de se réajuster à une économie qui se normalise, et dans la mesure où elle s'adapte à la situation, la normalisation de l'économie sera bénéfique pour le Canada. Oui, il ne fait aucune doute que les taux d'intérêt commenceront à augmenter à un certain moment aux États-Unis afin de devenir plus normaux. Cette augmentation s'effectuera dans le contexte de l'augmentation de la croissance aux États-Unis et de la hausse des exportations du Canada qui, nous présumons, en découlera. L'économie canadienne sera donc plus forte. Quand cela se produit, ce n'est pas sous l'effet d'une force externe, mais bien dans le cadre d'un même contexte.

  (1705)  

    Enfin, un économiste américain a prédit aujourd'hui que le repli de l'assouplissement quantitatif aura un effet notable sur la valeur des actifs aux États-Unis. Partagez-vous cet avis?
    Je pense que le repli comme tel a été pleinement pris en compte dans l'établissement des prix sur les marchés actuels. Je doute que le reste du programme de repli aura d'autres effets sur les prix des actifs. La courbe a déjà permis de fixer les prix.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier le gouverneur, M. Poloz, d'avoir témoigné.
    Monsieur Macklem, je vous remercie beaucoup, une fois de plus, d'avoir comparu une dernière fois devant notre comité. Nous espérons vous revoir encore dans un autre rôle. Merci beaucoup d'avoir témoigné et d'avoir répondu à nos questions. Si vous voulez ajouter quoi que ce soit, veuillez transmettre l'information au comité. Nous la transmettrons à tous les membres.
    Pas de problème. Cela nous fait plaisir. Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Chers collègues, nous suspendrons la séance quelques instants pour que le directeur parlementaire du budget fasse son entrée.
    Merci.

  (1705)  


  (1710)  

    La séance reprend. Messieurs, je vous demanderais de vous asseoir, si vous le voulez bien.
    Avant d'entendre le directeur parlementaire du budget, nous examinerons le premier rapport du Sous-comité des finances, dont vous devriez tous avoir un exemplaire. Ce rapport concerne la manière dont le comité procédera pour examiner le projet de loi C-31, les dates auxquelles il fera l'étude de l'emploi chez les jeunes, le Budget principal des dépenses et les consultations prébudgétaires. Vous devriez avoir également un calendrier devant vous. J'espère bien que nous pourrons régler cette affaire rapidement.
    Monsieur Cullen sera le premier à intervenir à ce sujet.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je m'excuse auprès des témoins. Nous tentons de nous avancer dans les travaux du comité avant de passer à vos témoignages. Je tenterai d'être aussi bref que possible.
    Nous avons analysé ce rapport sur l'approche recommandée pour l'étude du dernier projet de loi omnibus conservateur. Les députés ministériels ne seront pas surpris d'apprendre qu'en vertu de cette motion conservatrice, le défi du comité sera de confier à d'autres comités l'étude nominale de divers éléments de ce projet de loi, étant donné la complexité de celui-ci. Toutefois, aucun de ces comités ne pourra proposer d’amendements au projet de loi en fonction des témoignages qu'ils entendront. Comme vous le savez, monsieur le président, cette responsabilité nous revient, et nous n'avons pas le pouvoir de permettre à d'autres comités de proposer des amendements à ce projet de loi.
    En vertu de ce processus, les autres comités renverront leurs sections à ce comité et, si l'on en juge par ce qui s'est passé auparavant, le comité mettra rapidement aux voix les amendements proposés à ce projet de loi complexe, alors que presque aucun membre de ce comité n'aura rencontré ni même entendu les témoins. Il s'agit d'une mauvaise façon d'établir des politiques et d'une mauvaise façon pour le gouvernement de se comporter. Cette pratique a causé des problèmes par le passé. On serait porté à croire que l'expérience est le meilleur des enseignants. Ce n'est pas le premier projet de loi omnibus que propose le gouvernement. Il adopte cette approche de demi-mesure en raison de la complexité et des nombreux éléments non financiers qui figurent dans cette mesure législative.
    Je me souviens de l'époque où, alors qu'ils étaient dans l'opposition, les conservateurs se répandaient en injures contre cette tactique. Depuis, ils l'ont gonflée aux stéroïdes; celle-ci est maintenant pratique courante, mais elle ne devrait pas l'être. Ce n'est pas la façon habituelle de procéder.
    Cette mesure législative contient un traité fiscal énorme, la soi-disant FATCA, qui risque de placer jusqu'à un million de Canadiens dans une situation précaire, ainsi que des mesures relatives aux travailleurs étrangers temporaires et à la réduction des frais hospitaliers, notamment.
    Ces mesures méritent toute notre attention. C'est pour cette raison que les citoyens nous ont élus.
    Cela dit, monsieur le président, nous soutenons que si un compromis ne peut être trouvé sur la façon de formuler cette mesure législative, le lien entre le travail des comités et des députés sera rompu. Les comités ont d'abord été créés pour étudier les projets de loi, entendre les témoignages et modifier les lois par l'entremise d'amendements que les membres jugent viables. L'histoire nous apprend également que dans le cadre des études sur ces projets de loi omnibus — et je ne me souviens pas qu'un seul amendement proposé par l'opposition ait été adopté par le gouvernement malgré les centaines et les centaines de pages de projets de loi omnibus —, le gouvernement a rejeté pratiquement tous les amendements proposés en fonction des témoignages d'experts. Tout cela, jumelé au fait qu'avec ce projet de loi omnibus, le gouvernement tente de corriger les erreurs du dernier projet de loi omnibus, qui lui comportait des mesures visant à corriger les erreurs du projet de loi omnibus précédent, montre que ce modèle à ses défauts.
    J'implore le gouvernement de revoir son approche. Elle ne fonctionne pas pour lui, ni pour l'opposition et certainement pas pour les citoyens que nous sommes censés servir.
    Pour le bien des témoins, monsieur le président, je ne m'étendrai pas davantage sur le sujet. J'ignore si mes collègues voudront intervenir, mais cette motion, telle que présentée par les députés ministériels, fait peu de choses outre contrarier un processus parlementaire essentiel à l'étude d'un projet de loi de quelque 300 pages qui aura un impact sur de nombreux aspects du droit canadien.
    Je soupçonne que le prochain projet de loi omnibus devra corriger les erreurs qui se trouvent dans celui-ci. C'est toute une façon de diriger un pays. Ça ne fonctionne pas. J'aimerais que les conservateurs reviennent à leur ancienne position alors qu'ils étaient dans l'opposition et qu'ils détestaient ce genre de tactique.
    C'est tout ce que j'avais à dire, monsieur le président.

  (1715)  

    Merci, monsieur Cullen.
    Monsieur Brison, vous avez la parole.
    Je partage certaines des inquiétudes soulevées par M. Cullen.
    Cette mesure législative comprend une multitude de mesures n'ayant aucun lien avec les finances et qui sortent nettement du champ d'expertise du Comité des finances. Voici quelques exemples: l'indemnité versée aux vétérans pour la récupération fiscale précédente devrait être évaluée par le Comité des anciens combattants; les règles relatives aux produits chimiques devraient être étudiées par le Comité de la santé; les règles relatives à la suspension des députés devraient être étudiées par le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre; les titres et les grades des militaires devraient être étudiés par le Comité de la défense nationale; la section concernant les produits importés devrait être confiée au Comité de la sécurité publique ou au comité responsable de l'ASFC; le transfert des pouvoirs dans le portefeuille du patrimoine devrait être étudié par le Comité du patrimoine; les règles concernant les frais relatifs à l'inspection des aliments devraient probablement être étudiées par le Comité de l'agriculture; le transfert des pouvoirs du ministre de l'Immigration au ministre de l'Emploi concernant les travailleurs étrangers temporaires devrait être étudié par le Comité de la citoyenneté et de l'immigration ou le Comité des ressources humaines.
    Idéalement, le comité responsable de l'étude du sujet devrait également voter sur la section du projet de loi correspondante. Il est préférable de confier l'étude de ces sections aux comités appropriés pour obtenir leur point de vue que de les exclure du processus, mais c'est loin d'être une demi-mesure. J'aimerais proposer un amendement. Est-ce le bon moment?
    C'est le bon moment.
    Je propose que le rapport soit modifié en ajoutant à l'alinéa (a)(i), après « 175-192  », « les articles 206-209 »; à l'alinéa (a)(iii), après « 212-233 », « les articles 308-310 »; et, après l'alinéa (a)(iii), « (iv) le Comité permanent des anciens combattants, articles 102-107; (v) le Comité permanent de la santé, articles 110-162; (vi) le Comité permanent de la justice et des droits de la personne, articles 164-165 et 376-482; (vii) le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, articles 166-167 ;(viii) le Comité permanent de la défense nationale, articles 168-171; (ix) le Comité permanent de la sécurité publique et nationale, articles 172-174; (x) le Comité permanent du patrimoine canadien, articles 193-205; (xi) le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, articles 234-236 et 252-253; et (xii) le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, articles 299-307 ».
    Monsieur le président, puis-je expliquer cet amendement?
    Allez-y.
    Cet amendement est conforme à l'intention du gouvernement de séparer les sections du projet de loi afin qu'elles soient étudiées par les comités appropriés. Il ne fait qu'augmenter le nombre de comités pour procéder à l'étude du projet de loi. Il est tout à fait conforme à l'intention du gouvernement proposée dans la motion principale de M. Saxton.
    Merci, monsieur Brison.
    Nous allons procéder de la façon suivante. Nous aurons une discussion sur l'amendement et celui-ci sera ensuite mis aux voix. Ensuite, nous aurons une discussion sur la motion principale qui sera ensuite mise aux voix, qu’elle ait été ou non amendée.
    Monsieur Saxton, vous avez la parole.
    Monsieur le président, j'aimerais revenir sur certains points soulevés par mes deux collègues d'en face.
    D'abord, M. Cullen a parlé de compromis. J'aimerais lui rappeler que nous avons accepté beaucoup de compromis dans le cas de ce projet de loi. Par exemple, nous avons doublé la période d'étude relative à la FATCA. Nous avons prolongé les heures consacrées à l'étude de ce rapport. Nous avons augmenté le nombre de comités qui participeront à l'étude du rapport avec ce comité. Nous avons accepté beaucoup de compromis. J'espère qu'il en est conscient.
    En ce qui a trait aux amendements, nous croyons qu'ils sont inutiles. Selon nous, la recommandation du sous-comité est claire, tout comme la liste des comités qu'il recommande pour l'étude du projet de loi et le nombre d'heures à consacrer à cette étude.
    Par conséquent, nous rejetons cet amendement.

  (1720)  

    Merci.
    Monsieur Caron, s’il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    En fait, cela rejoint le commentaire que je voulais faire avant que l'amendement soit proposé.
     La partie 6 comporte 30 sections. Sans l'amendement, le comité en étudierait probablement 23 ou 24. Trois groupes de témoins ont été proposés. Compte tenu du nombre de témoins que les partis d'opposition pourraient suggérer, on parle probablement de 5 à 8 témoins pour environ 20 ou 25 sections disparates qui traitent de sujets extrêmement différents.
    Pour un comité qui est censé superviser les dépenses gouvernementales, le fait d'agir de cette manière n'est pas responsable. Il y a des situations où l'on peut recourir à des projets de loi omnibus, mais si on le fait de façon systématique et qu'on enfouit à peu près tout au sein d'un seul projet de loi, ce comité ne peut pas fonctionner de manière adéquate.
    Si l'opposition et le gouvernement veulent entendre des témoins, c'est pour les interroger et scruter le plus attentivement possible les forces et les faiblesses de chacun des éléments proposés. Or compte tenu du temps dont nous disposons présentement, il est impossible de le faire adéquatement.
    La proposition d'amendement présentée par mon collègue est, selon moi, une façon d'assurer une meilleure supervision de ce que propose le projet de loi budgétaire, mais ce n'est pas suffisant pour nous permettre de faire le travail que les Canadiens et Canadiennes attendent de nous.

[Traduction]

    D'accord, merci.
    J'aimerais maintenant passer au vote afin d'amorcer les témoignages dès que possible.
    Monsieur Cullen, vous avez la parole.
    Encore une fois, je tiens à m'excuser auprès des témoins. Votre témoignage est important. Toutefois, je suis convaincu que le Bureau du directeur parlementaire du budget se réjouira de nos efforts visant à comprendre cette mesure législative complexe.
    Pour revenir à ce que M. Saxton disait au sujet du compromis et des heures, je suis un peu confus, simplement parce que l'amendement proposé par M. Brison me paraît tout à fait raisonnable. Il ne prolonge pas le processus, il ne nuit pas au programme du gouvernement conservateur, ni à la tenue des votes. Comme l'a souligné M. Caron, cet amendement ne fait que permettre à d'autres comités d'étudier des sections complexes du projet de loi et d'entendre des témoignages. Les conservateurs remarqueront que si nous n'avons que deux ou trois groupes de témoins pour discuter de 30 sections individuelles du projet de loi, des éléments entiers de cette mesure législative ne seront pas abordés. Je n'argumente pas simplement pour faire opposition, monsieur le président, mais les membres du comité n'arriveront pas à comprendre l'impact de ce projet de loi simplement parce que nous n'avons pas suffisamment de temps pour l'étudier.
    Je suis conscient que la FATCA retiendra l'attention. J'imagine que tout le monde s'intéressa à ce dossier, car il s'agit d'un traité fiscal majeur avec les États-Unis, notre principal partenaire commercial. Certains diront que ce traité devrait être présenté dans le cadre d'un projet de loi distinct, mais un fait demeure — et je vais m'arrêter ici, monsieur le président —, ce sont les conservateurs qui ont créé cette situation. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi ils sont frustrés ou non disposés à faire le meilleur travail possible dans ce dossier, puisque ce sont eux qui ont choisi de présenter un projet de loi omnibus. Cette décision a des conséquences. Nous tentons de faire tout en notre pouvoir pour éviter ces conséquences afin de bien comprendre cette mesure législative. Donc, s'il est préférable que le Comité des anciens combattants étudie une section de ce projet de loi, alors, il devrait l'étudier.
    Nous allons appuyer l'amendement proposé par M. Brison. Je suis un peu surpris de voir que les conservateurs ont l'intention de le rejeter.
    Merci.
    Nous allons maintenant mettre l'amendement aux voix.
    (L'amendement est rejeté.)
    Le président: Nous allons maintenant voter sur l'adoption du premier rapport du sous-comité.
    Je demanderais un vote par appel nominal, s'il vous plaît.
    D'accord, nous aurons un vote par appel nominal.
     (La motion est adoptée par cinq voix contre quatre. [Voir le Procès-verbal])
    Le président: Chers collègues, le premier rapport est adopté et le calendrier sera mis à jour.
    Sans plus tarder, j'aimerais passer à notre prochain groupe de témoins.
    Merci beaucoup de votre patience. Nous devions absolument régler ce dossier. Nous étions censés le faire avant la pause, mais, malheureusement, un de nos amis et collègues est décédé.
    Nous sommes au point deux: Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, étude des perspectives économiques et financières. Dans le cadre de cette étude, nous sommes heureux d'accueillir M. Jean-Denis Fréchette, directeur parlementaire du budget, et plusieurs de ses collègues de la Bibliothèque du Parlement.

  (1725)  

[Français]

Je vous souhaite la bienvenue à ce comité.

[Traduction]

    Monsieur Fréchette, je vous laisse la parole pour votre exposé. Je vous demanderais également de nous présenter vos collègues. Ensuite, nous passerons aux questions des membres.
    Inutile de vous excuser. La procédure relative aux travaux du comité m'est très familière. C'est encore de la musique à mes oreilles et, d'ailleurs, c'est une très bonne introduction.
    Merci encore de nous avoir invités.
    Je suis accompagné aujourd'hui de Mostafa Askari, directeur parlementaire du budget; de Peter Weltman, directeur parlementaire adjoint du budget par intérêt; et des auteurs de ce merveilleux rapport, Scott, Randall et Helen.
    Je suis heureux d'être ici pour vous présenter les perspectives économiques et financières du Bureau du directeur parlementaire du budget publiées hier. Depuis notre dernier témoignage devant le comité, notre équipe a publié 15 rapports et nous continuons d'être très attentifs aux besoins du Parlement qui relèvent de notre mandat.
    En ce qui a trait aux perspectives économiques, l'activité économique mondiale s'est raffermie au deuxième semestre de 2013 et l'embellie devrait se poursuivre en 2014 et en 2015 à la faveur d'un léger assouplissement de la rigueur budgétaire combiné à une politique monétaire encore très accommodante dans les économies avancées. Cela dit, cette situation peut se dégrader, du fait que les risques liés à une faible inflation attirent l'attention dernièrement.
    Aux États-Unis, l'économie a affiché une croissance nettement plus vigoureuse au second semestre de 2013 que ce que l'on prévoyait en octobre 2013. Malgré cet essor supérieur aux attentes, le DPB a maintenu à 2,7 % sa prévision du taux de croissance de l'économie américaine pour 2014, en grande partie en raison des difficultés causées par le mauvais temps au premier trimestre de l'année. Pour le reste de la période de projection, la croissance attendue varie peu par rapport à ce que prévoyait le MPEF 2013.
    Les projections du DPB concernant l'évolution des prix des produits de base, fondées sur l'indice des prix de produits de base de la Banque du Canada, sont légèrement supérieures à celle de la MPEF d'octobre 2013. Toutefois, les projections du DPB relatives à l'évolution de cet indice demeurent supérieures au cours de l'horizon à ce que les prix des contrats à terme laisseraient envisager, mais sont inférieures aux projections inchangées qu'a présentées la Banque du Canada dans son Rapport sur la politique monétaire d'avril 2014. C'est pour cela que le DPB a, par rapport à sa MPEF d'octobre 2013, révisé à la hausse ses perspectives concernant l'économie canadienne.
    Actuellement, il prévoit que le PIB réel progressera de 2,1 % cette année, de 2,7 % l'an prochain, et de 2,5 % en 2016.
    En 2017 et 2018, alors que l'activité économique atteindra son niveau potentiel, le PIB réel devrait être de moins de 2 %. Le DPB tient compte dans ses perspectives des mesures de stimulation et des mesures d'économies présentées à partir du Budget 2012. Il projette qu'en 2016, le niveau du PIB réel sera inférieur de 0,5 % à ce qu'il aurait été si ces mesures n'avaient pas été prises.
    Cela se traduira par la création de 46 000 emplois de moins cette même année. Pour que ce soit bien clair, je ne parle pas d'une perte concrète de 46 000 emplois, mais, si ces mesures n'avaient pas été prises, il y aurait eu 46 000 emplois de créés.
    La projection du DPB pour le PIB nominal, soit la mesure la plus large de l'assiette fiscale du gouvernement, est plus basse de 17 milliards de dollars annuellement, en moyenne, que la projection fondée sur les prévisions du secteur privé. Le DPB estime que la résultante des risques associés à la division du secteur privé pour le PIB nominal est orientée à la baisse, ce qui reflète probablement une incidence plus forte de compressions des dépenses gouvernementales, ainsi que des divergences d'opinions sur les prix des produits de base et leur impact sur la croissance du PIB réel et l'inflation du PIB.
    En se fondant sur sa projection du PIB nominal, le DPB estime toutefois que le risque de dégradation des prévisions du secteur privé pour le PIB nominal concorde en gros avec l'ajustement annuel en fonction du risque du gouvernement de 20 milliards de dollars.

  (1730)  

    Je vais continuer en français.

[Français]

    Je vais aborder la question des perspectives financières.
    Le DPB projette des excédents budgétaires qui sont supérieurs aux perspectives indiquées dans sa Mise à jour d'octobre 2013 à la suite d'une embellie des perspectives économiques et des mesures annoncées dans la Mise à jour des projections économiques et budgétaires de 2014 et dans le Budget de 2014, en particulier la poursuite des compressions prévues des dépenses de programmes directes.
     Le DPB estime que le déficit se chiffrera à 11,6 milliards de dollars, soit 0,6 % du PIB, en 2013-2014, que le solde budgétaire redeviendra excédentaire en 2015-2016 à 7,8 milliards de dollars et que cet excédent se maintiendra à hauteur de 8,6 milliards de dollars, soit en moyenne 0,4 % du PIB, pendant le reste de l'horizon de projection.
    Le DPB juge que les chances d'équilibre budgétaire, voire d'excédent, sont d'environ 50 % en 2014-2015, de 70 % en 2015-2016, de 60 % en 2017-2018 et de 65 % en 2018-2019.
    Les excédents que projette le DPB à moyen terme sont essentiellement attribuables au fait que l'économie tourne à un rythme supérieur à son niveau tendanciel, et non au fait que les revenus sont structurellement supérieurs aux dépenses projetées. Il n'y a donc guère de marge de manoeuvre pour appliquer de nouvelles politiques d'allègement fiscal ou de majoration des dépenses sans risquer de recréer des déficits structurels. Cela étant, le DPB a cerné plusieurs risques pour ses perspectives financières.
    Premièrement, sa projection de l'indice des prix de base suppose qu'au bout de deux ans, les prix réels des produits de base resteront foncièrement inchangés. Par contre, la projection utilisant les prix des contrats à terme énergétiques et non énergétiques porte à croire que l'indice de prix de base baissera au cours de la période de projection. Si tel était le cas, le niveau du PIB nominal serait inférieur de 26 milliards de dollars à la projection du DPB pour 2018.
    Deuxièmement, le pouvoir discrétionnaire dont jouit le gouverneur en conseil en matière de fixation du taux de cotisation à l'assurance-emploi introduit une incertitude considérable dans les projections des revenus. Si le gouvernement décide d'établir les taux de manière à équilibrer les revenus et les charges prévues, les revenus projetés et l'excédent budgétaire pourraient décliner de 2,2 milliards de dollars en 2015-2016 et de 2,8 milliards de dollars en 2016-2017.
    Troisièmement, le DPB accepte telles quelles les projections de Finances Canada en matière de dépenses de programme directes, car le gouvernement a refusé de fournir les données nécessaires pour établir si les compressions en cours sont soutenables et pour permettre au DPB de procéder à ses propres projections des dépenses de programmes directes.
    Une austérité aussi prolongée sur le plan des dépenses de programmes ne s'est encore jamais produite depuis la création des Comptes publics modernes. En règle générale, les coupes effectuées une année donnée sont suivies l'année suivante d'un relèvement moyen d'environ 6,4 %. Comme ce sera en 2014-2015 que se feront les réductions des dépenses de programme les plus sévères d'une année par rapport à l'autre, ces charges pourraient faire l'objet de pressions importantes. Si le rebond qui suit habituellement une période de réduction des dépenses de programme directes devait se produire en 2014-2015 ou en 2015-2016, il éliminerait l'excédent attendu en 2015-2016.
    Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions sur nos perspectives économiques et financières ou sur toute autre question pertinente.
     Merci, monsieur le président.

  (1735)  

    Je vous remercie beaucoup de votre présentation.
    Nous allons commencer avec M. Cullen. Vous disposez sept minutes.

[Traduction]

    Merci d'être ici, monsieur Fréchette, en compagnie de vos collègues, les excellents auteurs, comme vous l'avez dit. Merci également pour votre rapport. C'est intéressant.
    Qu'a fait votre bureau concernant le programme des travailleurs étrangers temporaires et ses répercussions sur l'économie canadienne jusqu'à présent?
    Merci pour la question. C'est un dossier très intéressant qui est vraiment

[Français]

à la saveur du jour

[Traduction]

    si je puis dire. Nous avons produit un rapport il y a quelques semaines sur l'analyse du marché du travail. Si vous voulez parler du programme des travailleurs étrangers temporaires plus en détail, je demanderais à Mostafa de répondre à la question.
    Nous avons produit un rapport sur le marché du travail, qui visait à faire état de la situation actuelle du marché du travail. Nous nous sommes également penchés sur les pénuries de main-d'oeuvre et le déséquilibre des compétences.
    Dans ce rapport, d'après les données que nous a fournies le Conference Board du Canada sur les postes vacants au Canada, nous n'avons pas pu clairement conclure qu'il y avait des pénuries de main-d'oeuvre à l'échelle du Canada, ni même au niveau régional ou professionnel.
    Le seul endroit où nous avons relevé des signes de pénurie est en Saskatchewan. Pour corroborer cette hypothèse, nous avons aussi étudié la hausse des salaires pour diverses professions dans différentes régions, et rien ne permettait de conclure à des augmentations de salaire anormales, ce à quoi on s'attend habituellement en cas de pénurie de main-d'oeuvre.
    Dans l'ensemble, nous avons conclu qu'aucune donnée probante ne démontrait l'existence de pénuries de main-d'oeuvre. Nous n'avons toutefois pas établi de corrélation avec le programme des travailleurs étrangers temporaires. Nous ne nous sommes pas vraiment penchés sur la question, et je pense que la seule façon de produire un rapport fiable sur ce programme est de s'appuyer sur des données hautement crédibles sur les pénuries de main-d'oeuvre au Canada, ce dont nous ne disposons pas en ce moment. Ce serait la première étape. Nous sommes prêts à le faire.
    Je ne comprends pas, parce que le gouvernement, le premier ministre et différents ministres ont tous déclaré qu'il y avait une pénurie de main-d'oeuvre au Canada, et vous me dites qu'il n'existe pas de données pour l'infirmer ou le confirmer. Les données que vous avez examinées n'indiquaient pas de pénurie à l'échelle nationale ou régionale?
    Ni au niveau régional ou professionnel pour diverses professions...
    Vous avez également tenté de voir si les salaires offerts pour certains secteurs et certains domaines de compétence connaissaient des fluctuations?
    Des fluctuations.
    Et cela indique normalement — permettez-moi de suivre le raisonnement — s'il y a une pénurie de main-d'oeuvre dans une industrie ou un secteur en particulier. Un des indicateurs que vous examinez, que les économistes examinent, c'est l'augmentation des salaires, mue par le principe de l'offre et de la demande, et c'est un des signes qui indiquent la présence d'une pénurie de main-d'oeuvre dans une région géographique ou encore dans une industrie précise. Est-ce bien cela?
    Absolument.
    Et vous n'avez trouvé ni l'un ni l'autre.
    Non.
    Je comprends ce que vous voulez dire quand vous parlez de comprendre les répercussions positives et négatives d'un programme en particulier, comme celui des travailleurs étrangers temporaires, mais sans contexte, sans savoir ce qui se passe dans le marché du travail à cet égard, comme le gouverneur de la banque l'a dit plus tôt, on n'a jamais assez de données.
    Dans quelle mesure est-ce important d'avoir ces données pour un gouvernement qui met en place un tel programme de travailleurs étrangers temporaires, en réponse aux demandes des employeurs qui affirment que le programme actuel ne suffit plus à pallier la pénurie de main-d'oeuvre?
    Quelle importance revêtent ces données pour assurer l'efficacité d'un programme comme celui des travailleurs étrangers temporaires?
    Nous travaillons avec des données et nous basons nos analyses sur elles. Nous ne pouvons pas faire d'analyse en fonction des prétentions des associations d'employeurs. Pour nous, cela ne constitue pas des données crédibles.
    Pour qu'un programme soit conçu efficacement, il faut avoir les données voulues pour déterminer s'il y a effectivement pénurie de main-d'oeuvre. En fait, nous avons beaucoup de données sur l'offre de travailleurs au Canada, que le gouvernement utilise pour établir les taux de chômage régionaux aux fins de l'administration du programme d'assurance-emploi, mais nous ne recueillons pas de statistiques sur la demande de travailleurs. C'est une information absolument nécessaire dans ce cas-ci, parce qu'elle permettrait de cibler les régions et les professions pour lesquelles on enregistre une pénurie.

  (1740)  

    D'où tirez-vous cette information pour votre analyse du marché de travail, soit qu'environ un nouvel emploi sur quatre est allé à un travailleur étranger temporaire en 2012? Comment...
    C'est ce que nous avons conclu d'après le nombre d'emplois créés durant cette période et le nombre d'employés étrangers temporaires à occuper un emploi à ce moment-là. C'est une estimation on ne peut plus brute. Il est très difficile de pousser l'analyse et de faire des estimations concernant le programme des travailleurs étrangers temporaires en fonction de leur taux de chômage ou d'emploi, par exemple.
    Pour revenir au phénomène naturel de l'offre et de la demande, on pourrait voir une corrélation entre la pénurie de travailleurs et une augmentation des salaires offerts. C'est courant dans une économie de libre marché. L'Institut C.D. Howe, un groupe de réflexion de gauche, a examiné la chose et s'est demandé si un programme comme celui-là, surtout s'il est mal appliqué, pourrait avoir un effet répressif sur les salaires des Canadiens qui ne sont aucunement touchés par le programme des travailleurs étrangers temporaires, mais qui pourraient quand même en payer le prix.
    Avez-vous examiné la question ou entrepris une étude à ce sujet?
    Non, comme je le disais...
    Pourriez-vous le faire?
    Nous pourrions nous pencher sur la question et vous revenir là-dessus. En plus des données sur les pénuries de main-d'oeuvre, nous aurons aussi besoin de données détaillées du gouvernement sur le programme de travailleurs étrangers temporaires.
    Et vous n'en avez pas?
    Non, nous n'en avons pas. Nous n'avons pas fait cette demande, mais nous pouvons le faire.
    Nous allons aussi en faire la demande. Reste à voir si nous pourrons connaître le fond de l'histoire en unissant nos efforts.
    Dans votre rapport, vous faites référence aux compressions des dépenses gouvernementales, « lesquelles ont pour effet de freiner l’essor économique et la création d'emplois ».
    Quelle est l'ampleur de ces répercussions...? Je vais m'arrêter ici.
    Comme nous l’avons noté dans le rapport, nous avons étudié toutes les mesures prises par le gouvernement depuis le budget de 2012, tant les mesures de relance que les mesures restrictives. Nous avons évalué leurs répercussions, et d’après notre analyse, l’impact se mesure à 0,5 % du PIB et à environ 46 000 emplois. Je souligne encore que cela ne signifie pas qu’il y aura un déclin de l’emploi. C’est en comparaison avec la situation telle qu’elle aurait été, essentiellement, si le gouvernement n’avait pas pris ces mesures.
    Merci, monsieur Cullen.
    Monsieur Saxton, s’il vous plaît.
    Merci à nos témoins d’être ici aujourd’hui.
     Lorsque nous avons mené nos consultations prébudgétaires à l’échelle du pays, des employeurs de partout au Canada nous ont dit qu’ils avaient de la difficulté à trouver des employeurs qualifiés. Il y avait effectivement des régions plus touchées que d’autres, comme l’Alberta, la Saskatchewan et Terre-Neuve, mais c’était une réalité à la grandeur du pays et dans toutes les industries, et les employeurs nous ont répété maintes et maintes fois qu’il était difficile de trouver des travailleurs qualifiés.
    Je veux savoir si vous avez étudié les pénuries de compétences ici, au Canada.
    Comme je l’ai indiqué dans le rapport sur le marché du travail, nous avons examiné les pénuries de compétences en fonction de la courbe de Beveridge qu’utilisent les économistes. Il s’agit du rapport entre le taux de postes vacants et le taux de chômage, et comme je le disais, les données ne soutiennent pas cette information.
    Je sais que certaines associations d’employeurs ont dit cela, mais même l’enquête réalisée par la Banque du Canada, qui s’adressait à tous les types d’entreprises au pays, n’indique pas que les entrepreneurs sont inquiets ou plus inquiets concernant l’embauche et la pénurie de main-d’œuvre. Nous devons travailler avec les chiffres et les données que nous avons. Nous ne pouvons pas fonder notre analyse sur ce que disent les associations d’employeurs.
    C’est tout de même très surprenant de voir à quel point vos données diffèrent de ce que nous ont dit les intervenants du marché qui tentent de trouver des travailleurs qualifiés. Peut-être avez-vous omis d’examiner certaines données ou vous ne les avez peut-être pas incluses à votre rapport. De toute évidence, il y a divergence d’opinions, ici. En fait, il ne s’agit pas d’une opinion, mais il y a une différence entre ce que les gens voient et nous rapportent, et les conclusions de votre rapport. Je vous encourage à analyser plus de données, parce qu’il est étonnant que votre rapport ne confirme pas ce que nous avons entendu lors de nos consultations prébudgétaires.
    J’aimerais aussi revenir sur votre dernière comparution devant le comité. Vous avez indiqué qu’ « à la faveur d'un essor de l’économie mondiale et d’une demande intérieure soutenue, les perspectives économiques du Canada se sont globalement éclaircies ». De plus, le G20 s’est récemment engagé à accroître le PIB mondial de 2 % au cours des prochaines années en éliminant les entraves au commerce.
    Comme les perspectives économiques internationales s’éclaircissent, notamment aux États-Unis, pouvez-vous nous dire comment les exportateurs canadiens vont profiter de l’augmentation de la demande découlant de l’élimination des entraves au commerce?

  (1745)  

    Certainement, chaque fois qu’on élimine les entraves au commerce grâce à un accord de libre-échange, l’économie canadienne y gagne tant en ce qui a trait au niveau d’activité qu’à l’emploi. Il faut évidemment examiner les choses de plus près pour voir comment cela fonctionne exactement, mais en principe, oui, c’est bien sûr bénéfique.
    Depuis son arrivée au pouvoir en 2006, le gouvernement a négocié des accords de libre-échange avec plus de 40 pays, et plus récemment avec la Corée du Sud et l’Union européenne. Diriez-vous que les accords de libre-échange conclus au cours des huit dernières années ont été avantageux pour les exportateurs canadiens, en ce qui a trait au nombre d’emplois créés et à la croissance économique?
    En principe, oui, mais je pense qu’il y a un problème avec le commerce et les exportations au Canada. Quand on examine les tendances concernant la contribution des exportations au PIB canadien depuis 2000, on constate que le secteur de l’exportation n’a pas vraiment contribué à l’économie canadienne, ce qui semble assez étrange pour une petite économie qui est ouverte et qui est grandement dépendante des exportations. Beaucoup vont regarder le niveau d’exportations réelles de 2000 à 2013. En fait, les exportations réelles n’ont pratiquement pas bougé depuis l’an 2000. La grave récession que nous avons traversée est en partie responsable, et la situation ne s’est pas encore tout à fait rétablie.
    Depuis le début de la reprise économique à la fin de 2009, le directeur parlementaire du budget a noté que la croissance économique a modestement surpassé son taux de croissance potentiel, et l’écart de production s’est ainsi amenuisé, passant au tiers de ce qu’il était au deuxième trimestre de 2009.
    Quels autres secteurs le gouvernement peut-il améliorer pour maintenir cette forte tendance?
    Normalement nous ne formulons pas de recommandations de nature politique au gouvernement. Notre mandat n’est pas de commenter les politiques ni de dire au gouvernement ce qu’il peut ou ne peut pas faire.
    D'accord.
    J'aurais une dernière question à vous poser. Certains membres de l'opposition ont laissé entendre que nous ne devrions pas concentrer nos efforts sur l'équilibre budgétaire pour le moment. Pourtant, l'équilibre budgétaire s'accompagne d'avantages immenses, comme la réduction des impôts, des taux d'intérêt, des coûts d'emprunt et des taux d'intérêt sur les dépenses du gouvernement, ce qui permet de libérer des fonds pour les programmes. Ne devrions-nous donc pas tâcher d'atteindre l'équilibre budgétaire le plus rapidement possible?
    Ce qui compte vraiment pour la situation financière du Canada, c'est la viabilité à long terme de sa structure budgétaire.
    Les recherches que nous avons effectuées pour la production des rapports sur la viabilité budgétaire — le dernier a été publié en novembre —, montrent qu'en fait, avec les compressions appliquées par le gouvernement, la structure budgétaire actuelle est viable. Si aucune autre mesure n'est prise d'ici 2040, la structure budgétaire actuelle permettra d'éliminer la dette complètement.
    Qu'on enregistre un surplus une année ou un léger déficit une autre année, cela importe peu sur le plan de la viabilité à long terme de la structure budgétaire. Du point de vue économique, les fluctuations mineures d'une année à l'autre ont peu d'importance, parce que si la tendance pointe vers l'équilibre budgétaire et l'élimination de la dette, cela indique essentiellement que la structure financière est en bonne santé à l'heure actuelle.
    Vous dites que si rien n'est fait, nous allons rembourser la dette accumulée d'ici 2040 — je pense que c'est ce que vous avez dit. Vous voulez dire par là qu'en maintenant le statu quo — le régime fiscal actuel qui prévoit des taux d'imposition réduits pour les entreprises, les familles à revenu moyen et, en fait, pour tous les Canadiens —, nous aurons remboursé la dette d'ici 2040.
    Est-ce bien ce que vous dites?

  (1750)  

    Veuillez répondre brièvement, s'il vous plaît.
    Oui, selon une analyse de durabilité.
    Merci, monsieur Saxton.
    Monsieur Brison, s'il vous plaît.
    Je remercie toute l'équipe du directeur parlementaire du budget, ou DPB, pour son travail constant, de même que ceux qui sont avec nous aujourd'hui.
    Au début de mai 2013, soit il y a environ un an, je vous ai demandé d'analyser les mesures visant à éliminer les échappatoires fiscales des derniers budgets. Une année s'est écoulée, et j'aimerais savoir quelle est leur incidence fiscale. L'ARC vous a-t-elle fourni l'information dont vous aviez besoin pour faire cette analyse?
    Je vous remercie de votre question.
    Je n'étais pas là en mai 2013, mais j'ai suivi le dossier. C'est maintenant sous ma direction que nous continuons à travailler avec l'ARC pour obtenir ce genre d'information, et d'autres renseignements aussi. Nous avions d'ailleurs reçu une demande similaire en novembre 2012. Nous travaillons sur le dossier. La situation progresse avec l'ARC. Sans prétendre que c'est facile, je dirais que les choses avancent et que l'agence fait preuve de transparence. Nous avons une bonne relation. Devons-nous nous armer de patience? Bien sûr.
    Avant de demander à Mostafa de vous donner un peu plus de détails, je ferai remarquer que nous avons conçu une autre méthode. Nous avons créé une autre façon d'examiner ces données à partir du genre d'information que l'ARC peut nous fournir. Nous jetons des ponts ici. J'invite Mostafa à vous donner un peu plus de précisions sur la procédure.
    Pour réaliser l'étude que vous avez demandée, ainsi qu'une étude sur l'écart fiscal commandée par un sénateur, nous avons demandé des microdonnées à l'ARC. Nous voulions donc examiner les données des contribuables.
    Or, l'ARC est d'avis qu'elle ne peut pas nous fournir ce genre d'information puisqu'on y trouve des renseignements fiscaux.
    Nous ne sommes pas d'accord, car nous croyons avoir le droit, en vertu de la Loi sur le Parlement du Canada, d'obtenir l'information qui nous permettra de nous acquitter de notre mandat. Puisque l'analyse fiscale en fait partie, nous estimions y avoir droit. Mais l'ARC refuse de nous fournir l'information en vertu de l'article 241 de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui dit pourtant que l'ARC peut:
fournir un renseignement confidentiel à une personne qui y a légalement droit par ailleurs par l’effet d’une loi fédérale [...], mais uniquement aux fins auxquelles elle y a droit.
    Nous croyons que l'article 79.3 de la Loi sur le Parlement du Canada nous y autorise justement.
    Mais après environ un an d'échanges et de négociations avec l'ARC, celle-ci vient de nous informer qu'elle était prête à nous fournir les renseignements, mais qu'elle allait d'abord les anonymiser et les stratifier. L'ARC demande 141 000 $ et six mois pour le faire.
    Mais si vous êtes déjà visés par l'article 79.4 de la Loi sur le Parlement du Canada, et que vous êtes tenus de préserver la confidentialité des données financières et économiques qu'on vous remet, n'est-il pas superflu de la part de l'ARC de retarder le processus de six mois et de dépenser des deniers publics pour anonymiser une information que vous devez protéger de toute façon selon la loi?
    Nous sommes de votre avis, mais nous optons pour la solution pragmatique puisque nous voulons obtenir les données d'une façon ou d'une autre pour faire le travail que vous et le Parlement nous avez demandé. À ce stade-ci, nous n'avons pas tellement le choix d'accepter les conditions de l'ARC.
    Vous trouvez donc que les arguments de l'ARC vont à l'encontre de ses propres propositions. Ni la Loi de l'impôt sur le revenu ni la Loi sur la protection des renseignements personnels ne vous empêchent d'avoir accès aux données.

  (1755)  

    C'est exact.
    Avez-vous un avis juridique à cet effet?
    Non, pas officiellement. Nous avons réalisé certaines analyses juridiques. Jean-Denis a peut-être quelque chose à ajouter.
    Dans le cadre de nos négociations avec l'ARC, nous avons accepté de conclure une entente avec l'agence en échange d'information. C'est un début, du moins. Nous l'avons bien précisé dans nos discussions avec l'agence. Nous verrons ce que nous pourrons faire de l'information. Dans la lettre, nous précisons clairement que nous pourrions revenir à la charge et demander plus d'information afin d'approfondir l'étude.
    J'aimerais mentionner une chose. Demain, vous serez appelés à vous prononcer sur une initiative parlementaire qui a été déposée au début d'avril, et qui demande au DPB et au Bureau du vérificateur général, ou BVG, de réaliser ce genre d'étude conjointement. C'est une longue motion. Selon le journal, le vote devrait avoir lieu demain.
    Je suis d'ailleurs en train d'en discuter aussi avec le BVG. Nous échangeons puisque nous sommes des collègues, en quelque sorte. Nous voulons voir ce que le vérificateur en pense. C'est une motion intéressante, et nous verrons ce qui se passera ensuite. Quoi qu'il en soit, il y a un certain intérêt tant du côté du DPB que du BVG.
    Comme je le disais, je suis actuellement bien optimiste. C'est un grand mot, mais je suis satisfait de l'ARC. Je ne dis pas que je le serai toujours, mais pour l'instant, les choses avancent bien.
    Comparativement à la taille de l'équipe et aux ressources de l'ARC, votre organisation est plutôt modeste. L'ARC fait traîner le dossier et tarde à vous fournir l'information dont vous avez besoin pour faire votre travail, ce qui ne me semble pas être une utilisation judicieuse de votre temps.
    Êtes-vous éventuellement prêts à vous adresser aux tribunaux pour faire valoir votre droit d'obtenir de l'information de l'ARC en temps opportun?
    Veuillez répondre brièvement, s'il vous plaît.
    Je dirais simplement que j'ai le coeur qui saigne, pour faire référence à la faille Heartbleed.
    Très brièvement, notre équipe va établir cinq priorités stratégiques au cours des cinq prochaines années, et la quatrième porte justement sur la défense de notre mandat législatif d'accès à l'information, à l'aide de tous les moyens qui seront nécessaires.
    Et possiblement aller devant les tribunaux.
    La réponse est-elle oui, ou...?
    Oui. En tant que gestionnaire, je dois faire attention avant de dire oui. Nous prendrons tous les moyens nécessaires dans le cadre de la priorité, et ce sera sur le Web.
    Merci.
    C'est au tour de M. Keddy.
    Je souhaite la bienvenue aux témoins.
    C'est une discussion intéressante. Comme vous le savez, le DPB joue un rôle complexe et difficile, qui se complique davantage, je suppose, avec les diverses demandes des députés et des partis politiques. Qu'il s'agisse de motifs politiques ou de quoi que ce soit d'autre, les demandes reposent sur un fondement économique.
    Je pense qu'il faut mentionner que la responsabilité de l'ARC est prévue à la Loi de l'impôt sur le revenu et la Loi sur la taxe d'accise. Les fonctionnaires de l'ARC sont criminellement responsables de tout manquement à la confidentialité. Il ne faut donc pas prendre le tout à la légère. Cette particularité n'a assurément rien de simple lorsqu'il est question de renseignements personnels.
    L'autre aspect, c'est la question citoyenne sur l'écart fiscal à laquelle la plupart des pays du G20 ne répondent pas, puisqu'ils n'arrivent pas à obtenir de renseignements pertinents à ce sujet, surtout en raison de la confidentialité et des difficultés de traitement des données. Je ne vous demande pas d'y répondre, mais je m'intéresse simplement à la difficulté de votre rôle, si vous avez un budget limité pour tenter de répondre aux questions. Vous avez une équipe qualifiée, mais limitée, et votre rôle n'a rien de simple.
    J'aimerais revenir sur une remarque de M. Askari au sujet des exportations depuis 2000: vous dites que les exportations n'auraient pas contribué à l'économie canadienne depuis 2000. J'aimerais approfondir un peu la question. Je doute que ce soit exactement ce que vous vouliez dire, car sans les exportations... En fait, notre économie est axée sur les exportations, et plus particulièrement de marchandises. Si nous supprimions ces exportations de l'économie canadienne, je pense qu'il y aurait tout un manque à gagner. De façon approximative, 60 ou 65 % de notre économie en dépend, et le commerce avec les États-Unis représente 72 ou 73 % de ce chiffre. J'ai donc du mal à imaginer que les exportations n'aient pas contribué à l'économie depuis 2000.
    Je vais vous donner la chance d'en parler un peu.

  (1800)  

    Je suis ravi que vous ayez demandé des précisions. Je n'ai pas dit que les exportations ne contribuaient pas à l'économie canadienne, mais plutôt qu'elles n'ont pas contribué à la croissance du PIB depuis 2000. C'est complètement différent.
    Tout à fait. Merci de cette précision.
    Toujours à ce sujet, votre bureau estime que les importations de la Corée du Sud représentent environ 5 milliards de dollars par année. Il va sans dire que le cadre budgétaire de l'abolition des tarifs a un coût. Il ne s'agit pas que de bénéfices. Il doit y avoir un gain net quelque part. En comparaison, l'abolition des tarifs dans le cadre de l'accord commercial complet entre le Canada et l'Europe aura une incidence financière d'environ 50 millions de dollars. S'agit-il...?
    Scott, voulez-vous en parler?
    Nous avons des données très approximatives, mais sans évaluation officielle des coûts du gouvernement, nous parlons effectivement d'environ 50 millions de dollars.
    Tout a un coût. Tout ce que le gouvernement fait coûte quelque chose. Je n'en suis pas surpris, mais je pense que les 50 millions de dollars vont se perdre. Les gens voient ce coût et oublient le surplus de 4,95 milliards de dollars. Voilà la difficulté d'une estimation semblable. N'oublions pas que notre économie est fondée sur les échanges commerciaux. Nous sommes axés sur le commerce et essayons de faire tomber les barrières partout dans le monde. Je pense que nous avons largement réussi. D'autres gouvernements nous ont emboîté le pas, sans toutefois aller aussi loin que nous. Je crains donc qu'à la vue de ce chiffre, certains se disent qu'il y a un coût de 50 millions de dollars, en oubliant le gain net de 4,95 milliards de dollars.
    Ce que nous voulions dire, c'est que le coût est bien faible. L'accord n'a donc pas une grande incidence financière.
    Nos discussions avec le gouverneur de la Banque du Canada portaient notamment sur la difficulté du Canada, que vous connaissez très bien, entourant la croissance de l'économie, la maîtrise de l'inflation tout en conservant notre position concurrentielle, et notre compétitivité à l'échelle internationale. Je pense que nous nous en tirons assez bien, mais que nous pourrions sans contredit faire mieux.
    Quel est le rôle du gouvernement à cet égard? Nous pouvons ouvrir les portes et faire tomber les barrières, mais comment pouvons-nous avoir une incidence sur la compétitivité? Le pouvons-nous?
    Monsieur, je vais m'attirer des ennuis si je réponds à cette question.
    Je m'en suis peut-être attiré aussi en la posant.
    Ne répondez pas.
    Je ne crois pas pouvoir commenter. Il s'agit encore ici du genre de question stratégique que nous ne commentons habituellement pas.
    Je vois. Très bien.
    Pour rester dans la même veine, j'aimerais parler du dollar canadien. On a dit tout à l'heure...

  (1805)  

    Une dernière question, s'il vous plaît.
    ... qu'il valait 91 ¢. S'il baisse trop, il générera des recettes inattendues pour certains de nos exportateurs, mais il aura aussi tendance à entraîner une perte de productivité.
    Voulez-vous parler de la relation étroite entre ces deux variables?
    Bien sûr.
    Le dollar canadien joue un rôle très important, puisqu'il a une incidence tant sur nos exportations que sur nos importations, en influençant le coût de ces dernières. D'une façon ou d'une autre, il doit y avoir un taux optimal pour l'économie canadienne, mais personne ne le connaît vraiment. Certains estiment ce qu'on appelle la parité de pouvoir d'achat du dollar, qui était autrefois de 89 ou de 90 ¢. J'ignore quelle est sa valeur exacte aujourd'hui, mais il ne s'agit pas nécessairement du taux de change optimal.
    Veuillez m'excuser. J'ai hésité, mais je veux être juste à l'endroit de tous les membres du comité.

[Français]

    Monsieur Caron, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Fréchette, de votre présence parmi nous et de votre présentation.
    J'aimerais revenir sur le rapport que vous avez rédigé sur le Budget des dépenses. Vous êtes revenu sur un problème qui me semble récurrent, soit celui de la faible reddition de comptes et les différences marquées entre ce qui s'appelle « le Budget des dépenses » et le budget tel qu'annoncé par le gouvernement.
    Vous avez souligné le fait que les deux processus divergent de plus en plus et qu'on se retrouve dans une situation où seulement 85 % du budget est expliqué dans le Budget des dépenses et que ce pourcentage diminue de façon constante.
    Vous avez également souligné les méthodes comptables différentes qui sont utilisées dans le Budget des dépenses, qui est vraiment la comptabilité générale qu'on peut voir spécifiquement, et le budget tel qu'annoncé par le gouvernement.
    Pourriez-vous me dire à quoi servent actuellement les parlementaires? Est-il possible pour nous d'analyser correctement les dépenses gouvernementales ou est-ce un exercice qui devient de plus en plus futile?
    Je vais céder la parole à M. Askari, qui sera en mesure de vous fournir un peu plus de détails à ce sujet.
    Le DPB existe pour aider les parlementaires. Sa raison d'être est, justement, d'identifier ce genre de situations. On tente d'éclairer le plus possible les parlementaires, mais la situation peut devenir difficile. On l'a soulevé dans un rapport pour qu'il y ait un débat qui se fasse parmi les parlementaires.
    Cela étant dit, une fois qu'on vous a fourni l'information, je présume que vous avez les outils de travail pour faire ce débat.
    Monsieur Askari, voulez-vous répondre à cette question?
    Vous avez absolument raison.
    À l'heure actuelle, le Budget des dépenses n'est pas très utile pour analyser la situation financière du gouvernement à cause des différents systèmes comptables. Il y a deux ans, nous avons conseillé au comité parlementaire de changer le système du Budget des dépenses et nous espérons que cela sera fait éventuellement.
    Vous avez dit que nous avions les outils pour le faire, mais j'ai ici une citation de votre prédécesseur, M. Page. Il a déclaré ce qui suit, dans la Revue parlementaire canadienne:
    L'un des grands principes à la base d'un gouvernement responsable veut que la Chambre des communes tienne les cordons de la bourse. La Chambre, qui est habilitée à exiger un vote de confiance, doit être convaincue que les dépenses réalisées et les impôts prélevés sont conformes aux lois, aux intentions du Parlement et aux principes du contrôle parlementaire. C'est quand tout est conforme que le Parlement sert les Canadiens.
     Et à mon avis, c'est rarement le cas.
    Je crois qu'il voulait dire que, comme parlementaires, nous n'avons pas les outils qui nous permettraient de faire le travail de façon adéquate. Le Budget des dépenses est vraiment le rapport le plus détaillé dans lequel le gouvernement indique ce qu'il veut dépenser dans le cadre de tous ses programmes. Or il est rare que les différents comités, y compris celui des Finances, analysent rigoureusement ces intentions du gouvernement.
     Il est question du budget et nous allons bientôt étudier le projet de loi portant sur sa mise en oeuvre. Nous avons déjà déploré le peu de temps dont nous disposions pour faire une analyse appropriée et pertinente de ce projet de loi. Il en va de même pour les comptes gouvernementaux.
     Comment pourrait-on modifier les choses pour faire en sorte que le gouvernement soit redevable à l'endroit du Parlement et de la Chambre des communes?
    Je veux dire tout d'abord que je suis d'accord avec ce qu'a déclaré mon prédécesseur. Je me souviens d'avoir dit devant ce comité que j'avais la nostalgie des comités — je parle ici d'une situation qui remonte à 10 ou 15 ans — qui examinaient, par exemple, pendant deux mois le Budget principal des dépenses. Chacun des comités responsables faisait une révision approfondie de ce budget.
    Je n'ai pas de recommandations à formuler. Comme je l'ai précisé, je suis d'accord avec ce que M. Page a dit. Certains parlent de réforme, d'autres parlent d'approches différentes. Le Comité permanent des opérations gouvernementales a fait un rapport assorti de recommandations. C'est vraiment ce genre de comité qui doit faire des recommandations à ce sujet. Par exemple, ce comité recommandait qu'on applique une idée de Robert Marleau, un ancien greffier de la Chambre des communes, à savoir qu'on s'inspire de l'ancien système pour donner aux comités davantage de temps que la période d'un mois pour réviser le Budget principal des dépenses, par exemple.
    M. Marleau a poussé l'idée plus loin. Lorsqu'il a comparu devant ce comité, il a recommandé que les trois comités principaux, c'est-à-dire le Comité permanent des finances, le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires ainsi que le Comité permanent des comptes publics, aient non pas un genre de directeur parlementaire du budget, mais qu'ils aient aussi des attachés de recherche très spécialisés qui les appuieraient dans leur domaine.
    Sur ce, je vous laisse à la relecture des délibérations de ce comité.

  (1810)  

    Merci beaucoup.
    J'ai une dernière question à vous poser, mais je voudrais d'abord m'assurer qu'en réponse à ce que vous a demandé mon collègue sur les travailleurs étrangers temporaires et le rapport, vous ferez parvenir cette information au comité.
    Est-ce une demande officielle que vous faites ici en public?
    Oui.
    Nous allons procéder comme nous le faisons habituellement lorsque nous recevons des demandes de ce genre, c'est-à-dire que nous allons rencontrer le demandeur pour discuter des paramètres du rapport.
    Comme il ne me reste qu'une minute, j'aimerais maintenant parler de l'impact du Compte des opérations de l'assurance-emploi sur les finances publiques.
    Évidemment, le gouvernement tente d'atteindre l'équilibre budgétaire. Présentement, le Compte des opérations de l'assurance-emploi sert à la comptabilité du gouvernement dans le cadre de ses comptes généraux.
     Quel sera l'impact des décisions concernant le niveau de cotisations sur l'atteinte et le maintien de l'équilibre budgétaire du gouvernement fédéral? Est-ce qu'on parle d'un impact significatif? Si vous dites que la probabilité d'atteindre l'équilibre budgétaire est de 50 % et que ce pourcentage se situe entre 60 % et 70 % pour les années futures, l'impact doit être assez marqué dans le cas du compte.

[Traduction]

    Permettez-moi de répondre dans ma langue.
    Nous avons pris le taux actuel de 1,88 % que le gouvernement a gelé pendant trois ans. Or, il génère un surplus dans le compte, alors qu'il ne devrait pas en être ainsi, selon la réglementation adoptée par le gouvernement. D'après un calcul, le taux pourrait baisser en deçà du 1,88 % actuel. Voilà qui permettrait d'éliminer le surplus du compte en 2015-2016.
    Dans l'ensemble, cette application de la loi aurait une incidence de 2,2 milliards de dollars sur l'équilibre budgétaire en 2015-2016, et de 2,8 milliards de dollars l'année suivante.
    Merci, monsieur Caron.
    Monsieur Allen, allez-y, s'il vous plaît.
    Je souhaite la bienvenue aux DPB et à ses collaborateurs.
     J'aimerais revenir sur la dernière question qui concerne les cotisations d'AE. Je suis en train d'examiner le tableau qui est présenté dans le budget de 2014. Comme vous le savez, le taux de cotisation sera maintenu à 1,88 % jusqu'en 2016-2017, et à ce moment-là, on prévoit un excédent de 6,4 % pour ce qui est du Compte des opérations de l'AE, mais pour les deux années subséquentes, on prévoit une réduction du taux de cotisation. N'est-il pas prudent que nous suivions le calendrier pour faire en sorte que nous atteignons l'équilibre au cours de la période de sept ans, comme nous l'avons dit, et que nous n'accumulions pas un gros excédent dans le Compte des opérations de l'AE et qu'on vienne les prendre, comme à l'époque des libéraux?
    En fait, si le taux avait été réduit bien avant, sans vraiment susciter de hausse de déficit pour le compte — un taux réduit plus rapidement —, il en aurait résulté des économies pour les Canadiens sans que cela crée vraiment de déficit. C'est ce qui nous pose problème, et nous avons proposé un autre scénario selon lequel le taux de cotisation d'AE serait plus bas sans que cela crée vraiment de déficit, et en fait, le compte serait équilibré au cours de la période de sept ans, comme l'exigent les dispositions législatives.
    Avez-vous fait des projections qui vont au-delà de 2018-2019? Y aura-t-il une autre réduction?

  (1815)  

    Oui, nous le faisons, en fait.
    Nous nous assurons de nous conformer aux dispositions, de sorte que le taux de cotisation que nous inscrivons puisse garantir l'équilibre du compte pour la période de sept ans.
    Je veux revenir sur la situation du travail. Vous avez dit qu'aucune donnée crédible n'indique qu'il y a une pénurie de main-d'oeuvre, mais en même temps, vous dites qu'il n'y a pas de pénurie. Je ne pense pas qu'on puisse dire qu'il n'y a pas de pénurie si l'on ne peut pas déterminer s'il y en a une ou non.
    Je vais vous donner un exemple, et je vais revenir sur ce qu'a dit M. Saxton. Dans ma circonscription, le secteur du camionnage est important, et on est toujours à la recherche de conducteurs de camion sur long parcours. Dans l'ouest du Nouveau-Brunswick, la plupart des marchandises doivent être transportées par camion, car il n'y a pas de voie ferrée dans cette région. Il y a beaucoup d'annonces; on cherche des travailleurs étrangers temporaires assez souvent. Je me demande si nous pouvons en discuter, car un certain nombre de gens ont les aptitudes qu'il faut pour conduire un camion, mais pour diverses raisons, ils ne veulent pas faire de longues distances, ou ils ne satisfont peut-être pas aux exigences du transport en zone longue pour traverser la frontière.
    Croyez-vous qu'il y a ce type de facteurs, car selon des prévisions, il y a des travailleurs, mais ils ne sont vraiment pas en mesure de faire le travail?
    Normalement, dans un marché du travail dynamique, il y a toujours des inadéquations de compétences. C'est pourquoi le taux de chômage n'est jamais réduit à zéro, car c'est un phénomène qui subsiste dans le marché du travail. Des gens arrivent et l'on crée de nouveaux emplois. C'est donc en partie normal. Ce qu'il faut déterminer, c'est si les inadéquations sont plus importantes que d'habitude.
    Comme je l'ai dit, les données actuelles du Conference Board du Canada ne nous permettent pas vraiment de dire qu'il y a une pénurie généralisée au pays. Certains secteurs, certaines professions et certaines régions peuvent être touchés par des pénuries, mais il ne me semble pas y avoir de pénurie généralisée.
    Comme je l'ai dit, nous avons examiné l'éventail des professions, mais les choses ne semblent pas beaucoup bouger. S'il y a une pénurie, il faut reconnaître le signal du marché. Autrement, le marché ne fonctionnerait pas. C'est notre façon d'analyser la situation.
    Je vais dire à mes entreprises de camionnage de vous appeler.
    Vous dites ici que le DPB prévoit qu'en 2017-2018, le PIB réel progressera de moins de 2 %, l'activité économique atteignant son niveau potentiel.
    Pouvez-vous nous dire ce qui constitue un frein pour 2017-2018 et ce qui a mené le DPB à faire des prévisions aussi modestes?
    Il y a quelques aspects en cause. Normalement, la façon de faire les projections, car nous considérons toujours la production potentielle comme un élément moteur pour l'économie en quelque sorte, car à notre avis, tout doit revenir à... C'est qu'en partie, l'économie ne peut pas se maintenir longtemps à un niveau plus élevé que son niveau potentiel. Au bout d'un certain temps, les forces de l'économie ramèneront le tout à un niveau plus bas. De plus, au cours de cette période, les taux d'intérêt finissent par augmenter, car nous voyons présentement qu'en fait, les taux d'intérêt seront constants jusqu'à la moitié de 2015. Par la suite, ils commenceront à augmenter; la Banque du Canada contrôlera le taux d'inflation une fois que l'économie aura atteint son potentiel.
    Cela suffira à freiner l'activité économique. Cela s'inscrit dans le fait que l'économie revient à son niveau normal. De 2016 à 2018, l'économie canadienne aura atteint un niveau plus élevé. Cela ne peut pas durer longtemps. À un moment donné, il faut qu'elle revienne à son niveau normal.
    Dans vos projections, concernant ce que vous avez dit en répondant à la question de M. Saxton, c'est-à-dire que si le statu quo est maintenu, nous éliminerons une dette de plus de 600 milliards de dollars d'ici 2040, cela me semble beaucoup.
    Je me demande si vous pouvez concilier cela avec l'idée selon laquelle on a peu de marge de manoeuvre pour mettre en place de nouvelles politiques visant à réduire les recettes fiscales ou à augmenter les dépenses sans causer de déficit structurel. Il me semble que si en 26 ans, on est capable de rembourser 600 milliards de dollars, on peut probablement régler des questions de politique. Vous pourriez peut-être concilier les deux.
    Absolument. Si l'on regarde les choses à long terme, selon nos prévisions, concernant le PIB, nous avons une marge de manoeuvre d'environ 1,3 %, environ 25 milliards de dollars, qui permet au gouvernement d'augmenter les dépenses ou de réduire les impôts sans augmenter le ratio dette-PIB.
    Dans le rapport, il est question de la situation à moyen terme, de prévisions quinquennales. Si l'on ne veut pas qu'il y ait un autre déficit durant cette période de cinq ans, la marge de manoeuvre est très limitée et elle est restreinte par les limites structurelles dont il est question dans nos prévisions. Ce n'est pas énorme; on parle de 2 milliards de dollars en moyenne.

  (1820)  

    Monsieur, Rankin, allez-y, s'il vous plaît.
    Bienvenue. Je remercie M. Fréchette et son équipe de leur présence et de leur excellent travail.
    Monsieur Fréchette, comme vous l'avez dit, le NPD réclame une stratégie contre la fraude fiscale pour l'ARC et il demande au gouvernement de mesurer l'écart fiscal, un problème qui, comme vous le savez, coûte des milliards de dollars. M. Keddy dit que cela ne se fait dans aucun pays. Eh bien, les États-Unis et le Royaume-Uni ont trouvé des modèles économétriques pour le faire, et notre parti, bien entendu, a demandé à ce que vous obteniez les données de l'ARC.
    Comme vous l'avez dit, demain, le Parlement votera sur une motion de notre collègue, M. Dionne Labelle, qui demande que l'ARC fournisse au directeur parlementaire du budget les renseignements qui lui permettront de produire une estimation du manque à gagner fiscal fédéral.
    Si vous aviez ces outils, si l'on vous fournissait les données, pourriez-vous entreprendre l'analyse?
    Oui.
    J'espère seulement que nos collègues feront comme nous et qu'ils voteront en faveur de l'accès. En fait, en parlant d'accès, M. Saxton vous a demandé d'examiner plus de données sur un sujet en particulier. Je remarque que dans le résumé, vous dites ce qui suit:
    Le DPB accepte les projections de Finances Canada en matière de CPD telles quelles, car le gouvernement a refusé de fournir les données nécessaires pour établir si les compressions en cours sont soutenables et pour permettre au DPB de procéder à ses propres projections.
    D'après ce que vous dites, il semble que le gouvernement ne vous fournit pas les données dont vous avez besoin.
    Cela concerne une demande que nous avions faite après le budget de 2012. Nous avions demandé l'accès aux renseignements sur toutes les compressions découlant de l'examen fonctionnel. Nous voulions évaluer les répercussions des compressions sur les niveaux de service pour chaque programme. Nous n'avions pas reçu les renseignements à l'époque. Si vous vous en souvenez bien, nous avons même fait appel aux tribunaux pour obtenir l'information, mais nous ne l'avons pas reçue.
    Je me rappelle que le gouvernement avait refusé de fournir au directeur parlementaire du budget les données dont il avait besoin pour faire son travail, et c'est en quelque sorte incroyable que vous demandiez d'autres données.
    Monsieur Askari, vous avez également dit quelque chose d'intéressant:
    Le DPB compte dans ses perspectives des mesures de stimulation et des mesures d'économie présentées à partir du Budget 2012. Il projette qu'en 2016 le niveau du PIB réel sera inférieur de 0,5 % à ce qu'il aurait été si ces mesures n'avaient pas été prises, ce qui se traduira par la création de 46 000 emplois de moins cette même année.
    Concernant le niveau du PIB, qui sera inférieur de 0,5 % en 2016 en raison des mesures budgétaires conservatrices, qu'est-ce que cela représente en milliards de dollars?
    Eh bien, 0,5 %, cela équivaut à environ 8, 9 milliards de dollars, je crois...
    De 8 à 9 milliards de dollars.
    ... je n'ai pas les montants ici, mais...
    Si ce n'était des trois derniers budgets du gouvernement conservateur, est-ce qu'un plus grand nombre d'emplois auraient été créés, à votre avis?
    C'est ce que nous estimons. On parle de 46 000 emplois de moins d'ici 2016.
    Oui.
    Pourriez-vous nous dire quand y a-t-il eu des compressions directes comparables dans les dépenses de programme pour la dernière fois, avant celles de 2014-2015?
    Je pense que la croissance des dépenses de programme n'a jamais été aussi faible. Nous n'avons jamais rien vu de tel auparavant.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Vous disposez de trois minutes.
    Je veux m'assurer de pouvoir céder mes deux dernières minutes à M. Caron, si possible.
    D'accord.
    Pourriez-vous nous donner votre point de vue sur le comportement du gouvernement concernant les fonds non utilisés? D'après votre expérience, est-il déjà arrivé qu'il y en ait autant?
    Les fonds qui sont utilisés ne peuvent pas être supérieurs à ce qui a été approuvé par le Parlement. Il est normal qu'ils ne soient pas tous utilisés, car les gestionnaires doivent s'assurer que le maximum ne sera pas dépassé. C'est pourquoi ils gèrent leurs finances avec beaucoup de prudence. Normalement, à la fin de l'année, il reste des fonds, mais ces dernières années, la part des fonds inutilisés a beaucoup augmenté.

  (1825)  

    Monsieur Caron

[Français]

    J'aimerais vous demander une mise à jour.
    En 2012, avant votre arrivée en poste, le chef de l'opposition officielle a adressé une requête au Bureau du directeur parlementaire du budget à propos de trois questions spécifiques.
    À l'époque, nous parlions du Budget de 2012, mais si vous avez fait des mises à jour pour les budgets de 2013 et de 2014, nous aimerions le savoir.
    Les trois questions que le chef de l'opposition a posées étaient les suivantes. Est-ce que les économies énoncées dans le Budget de 2012 étaient réalisables ou susceptibles d'être réalisées? Est-ce que le défaut de réaliser ces économies entraînerait des conséquences fiscales à long terme? De plus, il avait demandé de calculer les économies devant être réalisées au moyen d'une réduction de personnel.
    Ce sont en fait ces questions qui ont mené au recours en Cour fédérale.
    Avez-vous eu l'occasion de vous pencher sur la question depuis ce temps? Nous aimerions obtenir une mise à jour de la situation.
    Pour être en mesure faire cette étude et de répondre à ces questions, nous avions besoin de données détaillées. Comme je l'ai déjà mentionné, il n'a pas été possible de faire cette étude qui nous aurait permis de répondre complètement aux questions que vous avez posées.
    D'accord.
    Si vous me le permettez, j'aimerais ajouter un commentaire.
    Cela ne veut pas dire pour autant que la question du Budget de 2012 et des renseignements que nous avons demandés est à l'extérieur de notre radar. Nous continuons à y travailler en collaboration avec nos partenaires parlementaires, avec le commissaire à l'information et en poursuivant nos discussions.
    Vous vous souviendrez que la dernière fois que j'ai comparu devant le comité, au mois d'octobre dernier, j'ai parlé de mon approche parlementaire. Il faut que l'approche soit parlementaire. Il s'agit d'une situation qui doit être réglée au niveau du Parlement. Il me reste maintenant à rencontrer le Comité mixte de la Bibliothèque du Parlement. J'ai parlé au président, au greffier et à d'autres personnes. Le comité mixte a le droit de demander des documents et de demander la comparution de témoins. Ce comité aurait également le droit de le faire. L'approche que j'ai retenue, c'est de le faire avec le comité mixte parce que les deux Chambres y sont représentées.
    Croyez-moi, je n'ai pas abandonné le principe et l'idée d'obtenir des données sur le Budget de 2012, même s'il date de deux ans.
    Merci.

[Traduction]

    C'est maintenant au tour de M. Adler. Allez-y, s'il vous plaît.
    Monsieur le président, ai-je droit au temps d'intervention complet, ou dois-je en céder une partie à M. Van Kesteren?
    Il y a deux autres tours. Ce sera à vous, et ensuite à M. Van Kesteren, mais puisque j'aimerais avoir un peu de temps, si vous aviez tous les deux l'obligeance...
    Dans ce cas, devons-nous partager le temps d'intervention?
    Vous pouvez le faire.
    Pourquoi ne prenez-vous pas tout le temps que vous voulez, monsieur Adler?
    Merci beaucoup.
    J'aimerais vous parler d'une récente étude du Luxembourg Income Study Database, à laquelle le New York Times a fait référence. Quoi qu'en disent les partis de l'opposition de la Chambre des communes, 35 années d'études ont révélé que le revenu médian de la classe moyenne canadienne est supérieur à celui des États-Unis. Cela n'indique-t-il pas que ce que l'opposition propose, ses supposées solutions politiques aux problèmes économiques auxquels est confronté notre pays ou auxquels il sera confronté ne sont au fond que des balivernes? Pouvez-vous nous donner votre point de vue à cet égard?
    Monsieur, je ne peux pas donner mon opinion sur la politique.
    Je pense qu'il faut toujours faire attention à la période qui est utilisée dans le cadre de ce type d'études. Il est vrai que pour l'essentiel, depuis le milieu des années 1990, le revenu médian au Canada augmente, mais il avait beaucoup diminué entre le début des années 1980 et le milieu des années 1990. Au fond, nous sommes toujours dans une période de rattrapage. Je ne pense pas que nous avons atteint le niveau de 1980.
    Qui rattrapons-nous?
    Nous revenons au niveau des années 1980. Je ne dis pas que nous rattrapons d'autres pays, mais bien que le revenu médian avait beaucoup diminué et que nous avons constaté qu'il augmente graduellement depuis le milieu des années 1990. Il est vrai qu'il a augmenté récemment, mais si on le compare à ce qu'il était au début des années 1980, je ne crois pas que nous en sommes là. Ce sont simplement des observations que je fais en passant.

  (1830)  

    Pour être honnête, nous devrions comparer notre situation à celle d'autres pays pour lesquels il existe des données sur les revenus médians de la classe moyenne. Ce serait l'évaluation la plus juste pour l'instant.
    Comparativement à d'autres, oui, mais pas comparativement à...
    Oui. Nous sommes en très bonne posture alors, n'est-ce pas? Cela indiquerait que nos politiques portent vraiment fruit, parce que comme vous l'avez dit, ils ont augmenté depuis le début des années 2000, n'est-ce pas?
    Selon cette étude, il semble en effet que nous dépassions les Américains, mais je ne saurais trop dire si c'est un bon critère ou non.
    Je ne vous demande pas si c'est un bon critère, mais il semble indiquer qu'il y a quelque chose qui fonctionne bien dans ce que nous faisons.
    Je vais partager mon temps avec M. Van Kesteren, par souci d'équité.
    Merci.
    Je vous remercie tous d'être ici.
    Monsieur Askari, vous nous parlez de statistiques sur les pénuries de main-d'oeuvre, mais quelles organisations avez-vous contactées pour vérifier ces chiffres? Je suppose que je peux poser la question à n'importe lequel d'entre vous. Les tenez-vous de votre propre étude ou avez-vous consulté d'autres organisations?
    Nous avons examiné les données qui existent, et il y a trois sources de données. Il y a la FCEI, puis le Conference Board et StatCan. Nous utilisons les données du Conference Board comme principale source, et celles de la FCEI comme base de données d'appui.
    Est-ce qu'elles concordent?
    Beaucoup, oui.
    Si ma mémoire est bonne, lorsque les gens de la FCEI ont comparu ici, ils ont beaucoup insisté sur les pénuries de main-d'oeuvre.
    Nous ne comprenons pas vraiment pourquoi, parce que leurs propres données ne portent pas vraiment à tirer cette conclusion.
    En fait, l'économiste en chef de la FCEI a examiné notre rapport et n'a relevé aucun problème en ce qui concerne notre méthodologie, notre approche ou nos conclusions. Je suis un peu mystifié, parce que comme M. Saxton l'a dit, nous devrions examiner d'autres données, mais il n'y a pas vraiment d'autres sources de données.
    Permettez-moi de vous interrompre brièvement.
    Lorsque je regarde la page Web sur la création de votre bureau en 2006, pour aider le gouvernement et non pour en faire la promotion — je pense que la plupart des députés seraient fermement contre cette idée —, il devait aider le gouvernement à recueillir des statistiques, et l'un de vos énoncés constitutifs concerne la collecte de renseignements d'autres sources.
    Quelles sources utilisez-vous à part le Conference Board? Je crois que l'un de nos collègues a mentionné l'Institut Fraser. Vous arrive-t-il de communiquer avec ces chercheurs?
    Bien sûr. Nous analysons toutes les études pertinentes. En fait, nos analystes fouillent continuellement la littérature, c'est-à-dire la littérature récente, les études récentes réalisées par d'autres organisations. Nous ne sommes vraiment pas biaisés pour ce qui est de dire quelles études sont les meilleures. Nous regardons la méthodologie et...
    D'accord. Je ne veux pas vous heurter, mais je dois vous interrompre, parce que je veux faire valoir mon point de vue.
    Je serais porté à croire qu'il y a deux écoles de pensée chez les économistes. Monsieur, je n'oserais jamais même penser à me lancer dans un dialogue avec vous sur l'économie. Vous avez un diplôme en économie. Cependant, je suis contre l'idée qu'une réduction considérable des dépenses du gouvernement puisse mener aux prévisions faites par votre bureau. Je n'oserais probablement pas les contester moi-même, mais je demanderais l'avis d'une institution comme l'Institut Fraser. Croyez-vous que les chercheurs de cet institut seraient d'accord pour dire que le ralentissement de la croissance du PIB et les compressions qui en découlent, notamment la réduction du nombre de fonctionnaires, vont produire un gain négatif? Est-ce que j'ai bien compris, parce que je ne serais pas prêt à accepter cette idée.
    Quand on comprend les principes de fonctionnement du système économique, et C.D Howe serait...
    Il fonctionne selon moi. On ajoute quelque chose ici, on enlève autre chose là.
    Eh bien...
    Parfois, elles s'équilibrent...
    Un peu de silence.
    Je sais que c'est difficile...

  (1835)  

    De ce point de vue, lorsque le gouvernement dépense, la consommation du gouvernement fait partie du PIB.
    J'ai déjà entendu cette théorie, mais est-ce que tout le monde l'accepte? Je pense que l'école de pensée autrichienne la rejetterait totalement.
    Je reconnais que vous avez une fonction, je suis d'accord. Je pense que c'est admirable et que vous devez pouvoir faire votre travail, mais l'idéologie vient peut-être parfois influencer la méthodologie et du coup, les solutions avancées posent peut-être problème.
    Ce n'est pas une question d'idéologie. C'est ma formation, nous sommes formés en tant qu'économistes, et nous cumulons plus de 30 années d'expérience dans le domaine, d'où ces conclusions. Il y a aussi les études. Ce n'est pas du tout une question d'idéologie.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je sais que M. Van Kesteren essaie de faire valoir son point de vue, mais nous devons un certain respect à nos témoins. Je trouve qu'il laisse entendre, par son angle d'approche, que les rapports et leurs effets dépendent davantage d'une idéologie que des chiffres. Je pense que la limite du respect a été transgressée. Le BDPB présente les faits tels qu'ils sont.
    Je pense qu'il s'agit d'une divergence d'opinions plutôt que d'un rappel au Règlement.
    C'est seulement que...
    Ce n'est pas un rappel...
    Je conviens que vous avez un certain pouvoir discrétionnaire et je ne veux pas insulter M. Van Kesteren non plus. C'est seulement que lorsque nous avons...
    D'accord. À mon avis...
    Une voix: Vous êtes vice-président maintenant.
    Est-ce que je vous ai insulté, Andrew?
    Un peu d'ordre, s'il vous plaît.
    À mes yeux, M. Van Kesteren a posé des questions respectueusement. Je ne sais pas si le témoin a senti un manque de respect, mais j'ai trouvé qu'il a posé ses questions avec beaucoup de respect, et lorsqu'on utilise des mots comme « idéologie » il s'agit davantage de débat et de divergence d'opinions que d'un rappel au Règlement.
    J'ai quelques minutes et j'aimerais revenir un peu à une chose. Dans son rapport d'évaluation sur la situation du marché du travail au Canada en 2012, le DPB a écrit ce qui suit:
En particulier, les conditions du marché du travail était plus difficiles dans les provinces des Prairies (l'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba) que dans le reste du Canada).
    Vous dites au contraire dans l'évaluation de la situation du marché du travail de 2014:
Il ressort des données provinciales que, dans aucune province sauf la Saskatchewan, les pénuries de main-d'oeuvre et les inadéquations de compétences à l'échelle provinciale ne sont pires qu'avant la récession de 2008-2009.
    Pourquoi ce changement dans votre évaluation?
    Nous avons utilisé un plus grand nombre de sources de données dans notre analyse de la situation du marché du travail en 2014 qu'en 2012. En 2012, nous n'avions utilisé que les chiffres que de StatCan. Par ailleurs, selon les données de la FCEI, de même que du Conference Board du Canada et de Wanted Analytics, nous avons constaté qu'il y avait des pénuries de main-d'oeuvre très claires en Saskatchewan, mais que les données de la FCEI et du Conference Board n'appuyaient pas la thèse d'une pénurie de main-d'oeuvre en Alberta ou au Manitoba à ce moment-là.
    Il est écrit dans le rapport de 2014:
... dans aucune province sauf la Saskatchewan, les pénuries de main-d'oeuvre et les inadéquations de compétences [...] sont pires qu'avant la récession de 2008-2009.
    Y avait-il des pénuries de main-d'oeuvre ou des inadéquations de compétences en Alberta avant la récession de 2008-2009?
    Nous avons analysé le lien relatif entre le taux de postes vacants et le taux de chômage aujourd'hui et avant la récession pour voir comment ils avaient évolué. Nous n'avons pas pu conclure que les pénuries sont pires qu'avant en tant que telles, mais ce seuil n'est pas...
    Ce n'est pas ma question. Je vous demande s'il y avait pénurie de main-d'oeuvre ou inadéquation de compétences avant la récession de 2008-2009?
    Oh! Je suis sûr qu'il y avait des pénuries de main-d'oeuvre en Saskatchewan, cela ne fait aucun doute. En Alberta, je suis certain qu'il y avait des pénuries de main-d'oeuvre et des inadéquations de compétences ici et là, comme ailleurs au pays. Nous ne savons toutefois pas à quel point elles se sont accentuées par rapport à avant.
    Il y a donc des pénuries de main-d'oeuvre et des inadéquations de compétences dans certaines régions, comme dans les provinces des Prairies en ce moment, comme il y en avait avant la récession de 2008-2009.
    Nous n'avons pas assez de données, contrairement aux États-Unis, pour évaluer la relation de l'état stationnaire entre ces deux variables et déterminer s'il existe un seuil au-delà duquel on peut conclure à des pénuries de main-d'oeuvre ou à des inéquations de compétences dans ces provinces. Tout ce que nous pouvons dire, c'est que les taux de postes vacants et les taux de chômage ont baissé, de sorte qu'ils ne sont pas pires qu'avant.
    Ces taux ne sont pas pires qu'avant la récession de 2008.
    C'est la conclusion que nous tirons dans ce document.
    Pourtant, la pénurie de main-d'oeuvre et l'inadéquation des compétences étaient plus chroniques que jamais en Alberta, en 2007.
    Nous ne pouvons pas analyser l'état stationnaire, nous n'avons tout simplement pas assez de données pour cela.

  (1840)  

    J'apprécie ces deux rapports, mais je tique un peu lorsque vous dites que la situation n'est pas pire qu'elle ne l'était à la pire période de l'histoire de l'Alberta. Vous déplorez que le rapport sur le marché du travail qui accompagne le budget de 2014 ne se fonde pas sur une période assez longue. Malgré tout le respect que je vous dois, je crois que vous devez vous aussi utiliser une période de référence plus longue, que vous ne pouvez pas simplement faire une comparaison avec la pire pénurie de main-d'oeuvre que la province ait jamais connue.
    Ces données ne sont pas disponibles au Canada. Nous aimerions beaucoup y avoir accès, mais il n'y en a pas au Canada. Les données de la FCEI remontent à 2004, celles de Wanted Technologies à 2005 et celles de StatCan à 2011. Elles ne remontent pas plus loin. Il n'y a pas d'information sur...
    Je mentionne en passant que vous pouvez venir ratisser ma circonscription, vous allez voir un peu partout des affiches « employés recherchés ». Je suppose que cela pourra toujours servir d'analyse.
    Quoi qu'il en soit, je vous remercie. J'aimerais beaucoup pouvoir poursuivre cette discussion. Je vous remercie infiniment de tous les rapports que vous avez produits et envoyés au comité, ainsi que de votre bon travail en général. Je vous remercie d'avoir témoigné ici aujourd'hui.
    M. Randall Bartlett: Merci.
    Le président déclare la séance levée.
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