PROC Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 8 juin 2017
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue à la 64e réunion du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. La première heure de cette réunion sera télévisée.
Nous poursuivons notre étude du rapport du directeur général des élections intitulé « Un régime électoral pour le 21e siècle : Recommandations du directeur général des élections du Canada à la suite de la 42e élection générale ». Nous nous concentrerons sur les recommandations B12, « Publication de fausses déclarations pour influencer les résultats d’une élection», et B27, « Étrangers incitant des électeurs à voter ou à s’abstenir de voter ». Si nos collègues ou le commissaire désirent soulever d'autres points, je suis sûr que nous pourrons les accommoder.
Nous avons avec nous aujourd'hui pour éclairer nos délibérations M. Yves Côté, commissaire aux élections fédérales et M. Marc Chénier, avocat général et directeur principal du Bureau du commissaire aux élections fédérales.
Bienvenue, et merci d'être venus. Vous nous aiderez beaucoup.
Le commissaire vous a distribué une copie de son allocution pour que vous l'ayez sous les yeux.
Je vais maintenant passer la parole au commissaire, qui va nous présenter sa déclaration préliminaire.
[Français]
Merci, monsieur le président.
Je tiens à remercier les membres du Comité de m'avoir invité aujourd'hui à participer à l'examen du rapport du directeur général des élections, ou DGE, sur les dernières élections générales.
Comme vous l'avez mentionné, je suis accompagné de Marc Chénier, avocat général au sein de notre groupe et directeur principal des Services juridiques.
Avant d'aborder les questions d'intérêt que vous avez annoncées il y a deux minutes, monsieur le président, je tiens à souligner que le rapport du DGE renferme plusieurs autres recommandations sur lesquelles le Comité ne s'est pas encore prononcé, qui portent directement sur le mandat confié à mon Bureau.
[Traduction]
Il y en a trois: le pouvoir de demander l’ordonnance d’un tribunal afin de contraindre une personne à témoigner, le pouvoir du commissaire de déposer une accusation et le pouvoir, à tout enquêteur recruté par le commissaire, d'obtenir des ordonnances de communication en vertu du Code criminel. Ces recommandations sont extrêmement importantes pour notre bureau. J'espère de tout coeur que le Comité les appuiera.
Je vais commencer par traiter des deux questions qui intéressent particulièrement le Comité. Elles portent sur la publication de fausses déclarations concernant la réputation ou la conduite personnelle d’un candidat et sur l'interdiction à des étrangers d'inciter des électeurs à voter ou à s’abstenir de voter. Ces deux sections touchent, bien que de façons différentes, les valeurs fondamentales de la démocratie. La valeur principale d'une démocratie est la liberté d'expression qui, comme le répète continuellement la Cour suprême, a plus de poids que jamais dans le contexte électoral et démocratique. Le Parlement devra donc se prononcer avec une extrême prudence à ce sujet.
[Français]
Le but de toute modification devrait être clairement défini: qu'est-ce qui devrait être interdit ou réglementé, et pourquoi? De plus — ceci est extrêmement important —, les moyens choisis pour atteindre cet objectif doivent être les moins intrusifs possible. Autrement, les tribunaux pourraient intervenir et juger que le législateur, vous les députés, a outrepassé sa compétence.
De plus, le libellé vague et général de ces dispositions suscite de fausses attentes et crée la perception que leur application n'est pas suffisante, ce qui risque de miner la confiance des citoyens en notre système électoral.
[Traduction]
La recommandation B12 porte sur les fausses déclarations. L'article 91 de la Loi illustre ce problème, car son libellé est extrêmement vague. Il n'indique pas clairement quels types de fausses déclarations sont interdits. Le public pense que cet article s'applique à des situations très diverses, mais en réalité, son application est très limitée. En effet, les tribunaux ont toujours jugé les fausses déclarations en les mesurant à des critères très sévères. Par exemple, les juges déclarent que pour qu'un article de ce genre s'applique à une fausse déclaration, celle-ci doit exprimer une profonde « turpitude morale » — c'est le terme qu'ils utilisent pour désigner la criminalité.
De plus, le libellé actuel de l'article 91 ne s'applique qu'aux fausses déclarations prononcées sur des candidats réels ou potentiels. Comme depuis l'adoption de cet article en 1908 — il y a plus de 100 ans —, le rôle des partis politiques et de leurs chefs s'est considérablement étendu, il serait grand temps d'étendre la portée de cet article pour y inclure les fausses déclarations lancées contre ces acteurs importants.
[Français]
J'aimerais soulever un dernier point.
À l'heure actuelle, lorsqu'il y a une contravention à l'article 91 de la Loi électorale du Canada et qu'une condamnation est inscrite, la peine appropriée est infligée à l'accusé par la cour. Il n'y a aucune autre conséquence. On pourrait se demander si d'autres conséquences devraient découler d'une contravention à cette disposition. Par exemple, est-ce qu'une contravention à l'article 91 devrait être considérée comme un acte illégal ou une manoeuvre frauduleuse? Cela pourrait permettre de contester le résultat d'une élection où les fausses déclarations auraient eu une incidence importante sur les résultats. Il est intéressant de noter que c'est actuellement le cas d'une contravention à l'article 92, qui interdit les fausses déclarations au sujet du désistement d'un candidat.
En l'absence de modifications à l'article 91, j'estime que cette disposition devrait être abrogée.
Que l'article 91 soit abrogé ou non, je propose que vous considériez d'apporter des modifications à l'alinéa 482b) pour en préciser l'objet. Il s'agit d'une disposition de large application qui vise à combler de possibles lacunes concernant des comportements malhonnêtes qui ne sont pas traités ailleurs dans la Loi. Cette disposition prévoit que commet une infraction quiconque incite « par quelque prétexte ou ruse » une autre personne à voter ou à s'abstenir de voter pour un candidat donné. Or, l'objectif de la disposition pourrait être clarifié de manière à interdire, par exemple, les tentatives d'influencer les électeurs en recourant à des moyens qui font violence à nos valeurs démocratiques reconnues ou qui entravent les processus énoncés dans notre législation électorale.
[Traduction]
La rédaction de cette disposition sera extrêmement délicate. Il faudra veiller à ce qu'elle n'interdise pas des formes typiques d'expression ou de débat politique, qui comportent souvent des exagérations ou ce qu'on appelle des tactiques politiques. Cette interdiction ne doit surtout pas étouffer les débats ou limiter l'expression des politiciens sans juste cause. Elle devrait viser à protéger nos valeurs démocratiques, notamment la transparence et l'accessibilité. Elle devrait par exemple cibler les fausses nouvelles qui visent clairement à mettre le doute dans l'esprit des électeurs et à miner leur capacité de voter en toute connaissance de cause.
Je vais maintenant passer à la recommandation B27. Il sera tout aussi difficile de préciser l'application de cette disposition sur l'incitation provenant de personnes étrangères. Comme les membres du Comité s'en souviendront probablement — en fait je suis sûr qu'ils s'en souviennent —, pendant la dernière campagne électorale, de nombreux non-Canadiens ont exprimé leurs points de vue ou leurs opinions dans les médias sociaux, dans des éditoriaux, et pendant des entrevues.
Notre bureau a reçu plusieurs plaintes dénonçant des incidents de ce genre. Bien des gens pensent que quiconque n'est pas Canadien ou ne réside pas au Canada n'a pas le droit d'exprimer son soutien pour un parti ou pour un candidat. Bien qu'en interprétant cette disposition d'une façon très littérale on pourrait tirer cette conclusion, il est difficile d'imaginer qu'à notre époque, en 2017, le Parlement accepterait de promulguer une loi pour interdire qu'un étranger exprime son opinion. C'est pourquoi je pense qu'il sera nécessaire de mieux préciser ce libellé.
[Français]
Comme la Loi vise principalement à assurer l'égalité des chances, on devrait vraisemblablement y inclure des dispositions qui interdisent aux étrangers d'engager des dépenses importantes pour s'opposer à l'élection d'un candidat ou d'un parti ou encore pour promouvoir son élection. Ces dispositions pourraient interdire aux étrangers, par exemple, d'engager des dépenses pour payer les employés d'un centre d'appels ou pour organiser des activités de porte-à-porte durant une campagne.
Le DGE a également recommandé — dans la recommandation C49 — de modifier le libellé de la disposition afin d'indiquer clairement qu'il s'applique aux « tentatives d'influencer un électeur ». Dans la version anglaise de la Loi, l'utilisation du mot « induce » porte à confusion quant à la portée de l'interdiction. En effet, ce terme donne à penser que pour qu'une infraction soit commise, la tentative d'influencer doit avoir été fructueuse. Cela soulève, et vous le comprendrez, un fardeau de preuve dont le poursuivant ne pourra pratiquement pas s'acquitter.
Enfin, j'aimerais brièvement soulever un dernier élément qui mériterait d'être examiné, soit celui de la participation des tiers dans le processus électoral.
Au Canada, seules les activités de publicité électorale des tiers sont réglementées par la Loi.
Dans la mesure où les tiers agissent indépendamment d'un candidat ou d'un parti, ils peuvent engager des dépenses illimitées lorsqu'ils se prêtent à des activités comme des sondages électoraux, des services d'appels aux électeurs, ou d'autres formes de promotion. Ils peuvent également utiliser n'importe quelle source de financement, dont des capitaux étrangers, pour financer des activités qui ne sont pas de la publicité électorale.
[Traduction]
L'intensité de la participation de tiers au processus électoral du Canada augmentera très probablement au cours des années à venir. Le Parlement devrait donc envisager de réviser le niveau de participation permise de manière à égaliser les chances de tous les participants.
En conclusion, monsieur le président, je tiens à remercier le Comité d'avoir appuyé plusieurs recommandations qui concernent notre bureau. J'ai été particulièrement heureux que le Comité ait appuyé notre recommandation visant à créer un régime de sanctions administratives pécuniaires. Avec sa capacité de négocier les conditions des ententes de conformité, notre bureau disposera ainsi de la souplesse dont il a un urgent besoin pour remplir plus efficacement son mandat d'application des règlements. Plus important encore, ce régime facilitera et accélérera la résolution de plusieurs problèmes d'une manière transparente sans avoir recours aux tribunaux. Comme les cours pénales du pays se concentrent sur les façons de s'adapter à l'arrêt Jordan de la Cour suprême, je crois que cette recommandation vient à point.
[Français]
Pour conclure, monsieur le président, bien que je m'efforcerai de donner des réponses aussi exhaustives que possible à vos questions, j'aimerais rappeler aux membres du Comité que je ne serai pas en mesure de discuter des particularités de toute question qui fait ou qui a fait l'objet d'une plainte auprès de mon Bureau, ou qui fait ou qui a fait l'objet d'une enquête par mon Bureau.
C'est maintenant avec plaisir que je répondrai à vos questions.
[Traduction]
Merci beaucoup. Votre aide nous est précieuse. En outre, vous avez tout à fait raison: comme nous envisageons d'ajouter à la Loi — un peu partout dans la Loi, en fait — des pénalités qui ne seront pas d'ordre criminel, la création de ce régime sera une bonne chose.
Sachez que le Comité a déjà débattu des recommandations A33 et A34 que vous avez mentionnées au début de votre allocution. Toutefois, vous avez attiré notre attention sur la recommandation C45, que nous n'avions pas remarquée, et qui donnerait le pouvoir à tout enquêteur recruté par le commissaire d'obtenir des ordonnances de communication. Puisque vous êtes avec nous, vous pourriez peut-être brièvement nous expliquer cette recommandation et y ajouter vos observations. Après votre départ, nous étudierons donc trois recommandations: les deux que vous nous avez décrites en grands détails, et la C45 que vous allez commenter, puisqu'elle vous concerne. Dans le cours de nos débats, nous ne sommes pas encore arrivés à la section C.
Merci, monsieur le président.
La recommandation C45 est un amendement assez technique, c'est pourquoi il se trouve au chapitre C des recommandations. Notre bureau engage plusieurs enquêteurs sous contrat. Ils ne sont pas fonctionnaires, donc la loi ne leur permet pas de faire certaines requêtes comme des demandes d'ordonnance de communication en vertu du Code criminel. Ces ordonnances nous permettent par exemple d'obliger une banque à nous fournir des renseignements sur des transactions financières. Toutefois, seuls des fonctionnaires peuvent en faire la demande à un juge.
Comme je vous le disais, nous engageons plusieurs enquêteurs sous contrat, mais à l'heure actuelle ils ne relèvent pas du Code criminel. Il ne faudrait apporter qu'une petite modification pour permettre aux employés contractuels de faire la demande d'ordonnances de perquisition et saisie et de communication. Les mandats de perquisition sont déjà prévus dans le Code, mais quand on y a inséré les nouvelles dispositions sur les ordonnances de communication, je crois que quelqu'un a oublié de permettre aux enquêteurs contractuels d'en faire la demande. Il s'agit donc d'une modification plutôt technique qui ne devrait pas susciter d'opposition.
Merci. Vous nous aidez beaucoup.
Nous allons passer à des rondes de questions et réponses de sept minutes. Commençons par M. Simms.
Merci pour ces explications, monsieur Côté.
Voici un bref exemple un peu simplet. L'Angleterre tient ses élections aujourd'hui. Les bureaux de vote sont ouverts. J'espère sincèrement que les démocrates libéraux gagneront plus de sièges, même s'ils n'accèdent pas au pouvoir. Je viens de déclarer cela publiquement. Si je me trouvais de l'autre côté de l'océan à parler ainsi du Canada, est-ce que j'enfreindrais...
Bon, d'accord. Je me demandais simplement si j'aurais enfreint la loi en disant ces choses en Angleterre au sujet du Canada.
J'essaie de demander si, en faisant une observation au sujet de l'élection britannique comme je viens de le faire, et si un député du Parlement britannique me faisait la même observation sur le Canada, nous agirions contre la loi actuelle? Je demande simplement une interprétation.
Je ne crois pas que vous enfreindriez la Loi telle qu'elle est libellée à l'heure actuelle.
Je crois que si nous enquêtions sur un incident semblable, nous considérerions avant tout la garantie de liberté d'expression que la Charte accorde à tout le monde. Avant de décider d'appliquer une mesure disciplinaire, nous serions très conscients de ce droit. Ce serait un critère extrêmement important.
D'un autre côté, je ne pense pas que vous violeriez la Loi en faisant cela — ou si il ou elle le faisait.
[Français]
Je vous remercie d'être parmi nous. Nous sommes vraiment heureux d'entendre votre témoignage.
Ma question porte sur les enquêtes. Si vous recevez, par exemple, une plainte concernant une fraude électorale, quel processus suivez-vous? Où y aura-t-il des problèmes, surtout si on pense aux recommandations A33, A34 et C45 et aux décisions du commissaire?
Si nous recevons une plainte concernant une fraude électorale, nous présumons que c'est quelque chose de majeur et de relativement gros. Nous commencerons par faire un examen préliminaire des allégations et des faits portés à notre attention. Si nous confirmions qu'il y avait vraiment matière à aller de l'avant et à lancer une enquête, nous ouvririons une enquête formelle et une des choses que nous ferions serait de parler aux personnes qui auraient pu être impliquées, selon nous.
La raison pour laquelle nous faisons la recommandation A33 est que, dans certaines circonstances — et j'ai vécu cela au cours des quatre ou cinq dernières années, depuis que je suis en poste —, nous demandons à des personnes de comparaître parce que nous soupçonnons fortement et, dans certains cas, nous savons avec certitude qu'elles sont au courant de certaines choses et qu'elles ont de l'information. Pour des raisons qui leur appartiennent, elles refusent de collaborer. Elles nous disent ne pas avoir envie de dire quoi que ce soit.
Vous êtes vous-mêmes en mesure, en tant que députés, de bien évaluer ce que je vais dire. Souvent, dans le monde politique, on considère que la loyauté envers le parti et l'équipe est une valeur fondamentale. Pour ces personnes, collaborer et donner de l'information qui pourrait nous permettre de faire avancer notre enquête devient extrêmement difficile.
S'il arrivait, par exemple, qu'après avoir contacté toutes les personnes à qui nous voulions poser des questions, personne n'acceptait de collaborer avec nous, une disposition comme celle prévue à la recommandation A33 pourrait devenir utile. Nous pourrions aller devant un juge, une personne indépendante, et lui dire ce qui se passe, quelles sont les allégations, à quel point elles sont sérieuses et le fait que, malheureusement, nous ne pouvons convaincre personne de nous parler. Nous demandons alors au juge de donner une ordonnance forçant monsieur ou madame X à nous parler.
Évidemment, des garanties seraient rattachées à cette démarche si le juge acceptait de donner l'ordonnance. Il serait alors évident, d'entrée jeu, que ce que la personne forcée de nous parler aurait dit ne pourrait jamais être utilisé contre elle. La personne aurait le droit d'être représentée par un avocat. La rencontre se déroulerait de façon privée et non publique.
Il est important de savoir que ce genre de garanties ne nous amènera pas à utiliser ce pouvoir à droite et à gauche pour faire des enquêtes sur toutes sortes de choses mineures. Ce serait dans des circonstances où la confiance du public à l'endroit du système électoral pourrait être profondément affectée. Il est nécessaire de rassurer les citoyens sur le fait qu'une enquête a été effectuée dans le but d'obtenir de l'information dont nous avions besoin pour passer aux étapes suivantes.
Voilà mon avis à propos de la recommandation A33. La situation existe d'ailleurs dans cinq ou six provinces au pays, où le commissaire, ou la personne occupant un poste équivalent, possède actuellement ce pouvoir. J'inclus les gens du bureau du Directeur général des élections du Québec.
Au fédéral, cela existe déjà parce que le directeur du Bureau de la concurrence dispose de ce pouvoir et peut, dans certaines circonstances, demander à un juge de la Cour fédérale pour obtenir une ordonnance pour forcer quelqu'un à témoigner.
C'est le point principal que je fais valoir à l'égard de la recommandation A33.
Sur le plan pratique, votre bureau a été séparé de celui du DGE. Vous avez changé d'édifice et vos communications avec le DGE ont diminué.
Quels sont les effets réels de ce changement?
Comme vous l'avez mentionné plus tôt, depuis l'adoption du projet de loi C-23, nous sommes une entité au sein du Bureau du directeur des poursuites pénales. Officiellement et légalement, nous avons été retirés de l'organisation du directeur général des élections.
À mon avis, les choses vont relativement bien en général. En fait, elles vont très bien. Pour le directeur général des élections et pour nous, il est cependant difficile, pour des raisons d'ordre technique, d'échanger de l'information plus rapidement, étant donné que nous faisons maintenant partie officiellement de deux institutions gouvernementales différentes. Certaines règles s'appliquent, ce qui rend les choses un peu plus difficiles.
Cela dit, vous savez probablement que le projet de loi C-33 a été déposé par le gouvernement et que, s'il était adopté dans sa forme actuelle, cela aurait pour effet de nous ramener au sein du Bureau du directeur général des élections.
J'en profite pour mentionner, parce qu'il est important de le faire, que depuis notre arrivée au Bureau du directeur des poursuites pénales, ce dernier nous fournit un service et un appui exemplaires à tous égards, comme c'était le cas lorsque nous étions au sein d'Élections Canada.
[Traduction]
Monsieur le commissaire, je vous remercie d'être venu. J'ai deux ou trois questions à vous poser aujourd'hui.
D'abord, j'ai une question sur la recommandation B27, tirée de l'article 331 de la Loi électorale du Canada qui interdit à quiconque ne réside pas au Canada ou n'est pas citoyen canadien ou résident permanent d'inciter des électeurs — et l'on cite directement le texte de la Loi — « à voter ou à s’abstenir de voter ou à voter ou à s’abstenir de voter pour un candidat donné ». Cette recommandation souligne que vous recevez de nombreuses plaintes liées à cet article, mais que le libellé est si vague que vous avez de la peine à appliquer cette règle.
Si de nombreuses personnes se plaignent, il doit certainement y avoir des problèmes graves et très réels. Cela me fait penser à l'expression « il n'y a pas de fumée sans feu ». Pourriez-vous nous donner une idée du nombre de plaintes que vous recevez généralement, surtout au cours de ces deux ou trois dernières élections?
Pourriez-vous aussi nous suggérer des moyens de renforcer cet article afin que vous puissiez veiller à l'intégrité de notre système électoral?
Monsieur le président, la formulation de cette question suggère que là où il y a de la fumée, il y a du feu. Je tiens à souligner qu'il arrive parfois qu'il n'y ait que de la fumée. Je souligne ceci parce l'article 331, comme je l'ai dit dans mon allocution, laisse penser qu'il s'applique à toutes sortes de choses.
Au cours de la dernière élection, on nous a souvent signalé des commentaires et des éditoriaux — particulièrement aux États-Unis, mais dans d'autres pays aussi —, publiés dans des journaux canadiens distribués dans tout le Canada, mais rédigés par des non-Canadiens résidant hors du Canada. Bien des gens soulignaient que cela ne devrait pas être permis.
À mon avis, je ne pense pas que l'intention de l'article 331 quand il a été adopté — comme je l'ai dit, il y a très longtemps — prévoyait ce genre de choses.
Excusez-moi de vous interrompre, mais mon temps de parole est limité.
J'essayais de me faire une idée du nombre de plaintes que vous avez reçues. Vous nous avez dit que certaines d'entre elles ne dégageaient que de la fumée sans feu, mais vous en avez probablement reçu certaines sous lesquelles un feu couvait. J'essaie de me faire une idée du nombre de plaintes que vous recevez en général. Vous pourriez peut-être nous donner une moyenne ou un pourcentage de plaintes qui étaient légitimes à votre avis, et nous suggérer une façon de resserrer l'application de cet article.
Selon les chiffres que nous avons à l'heure actuelle, nous avons reçu, au cours de la dernière campagne électorale, 14 plaintes qui frisaient la violation de l'article 331. Nous avons réglé plusieurs d'entre elles assez rapidement. J'en parle d'ailleurs dans mon dernier rapport annuel. Leurs auteurs accusaient un parti politique national de traiter avec une personne de l'étranger pour, supposément, suggérer de bonnes stratégies sur la façon de mener la campagne. Nous avons publié notre position, comme je l'explique dans mon rapport, en affirmant que ce n'était pas une violation de l'article 331.
Je vais passer à l'autre question que je voulais vous poser.
Quand vous avez témoigné devant le Comité permanent des affaires juridiques et constitutionnelles du Sénat en avril, vous avez dit que vous aviez reçu plusieurs plaintes sur des tiers. Je ne sais pas s'il s'agissait des mêmes références que ce que vous nous dites aujourd'hui, mais pourriez-vous nous dire si cela devenait problématique? Est-ce que les tiers s'ingèrent tellement profondément qu'ils risquent de fausser le résultat du scrutin?
Vous nous avez aussi dit aujourd'hui — et je crois que vous avez dit la même chose à ce comité sénatorial — que le Parlement devrait envisager de réviser le système des tiers afin d'assurer l'égalité de tous les participants. Vous avez ajouté que quand des tiers reçoivent de l'étranger des fonds qu'ils utiliseront pendant la campagne électorale, s'ils reçoivent ces fonds avant la période de six mois précédant le déclenchement de l'élection, ces tiers peuvent y injecter des sommes illimitées. Il n'y a aucune restriction sur les montants qu'ils peuvent utiliser à d'autres fins que celle de la publicité électorale. Vous nous avez dit aujourd'hui que nous devrions examiner les autres dépenses comme les sondages, les services de communication avec les électeurs, les événements promotionnels et autres.
Pourriez-vous nous donner plus de détails à ce sujet et nous suggérer d'autres moyens de resserrer le régime de financement de l'étranger par des tiers afin de garantir l'équité dont vous parliez? Pourriez-vous particulièrement nous parler du fait que d'autres types de dépenses ne sont pas restreintes à l'heure actuelle? Pensez-vous que nous devrions étendre la période de six mois pour éviter que quelqu'un, à six mois moins un jour du déclenchement de l'élection — surtout dans le cas des élections prévues à une date fixe — injecte une grosse somme d'argent et réussisse ainsi à influencer les élections au Canada?
Monsieur le président, permettez-moi d'abord de citer le juge de la Cour suprême qui a prononcé l'arrêt Harper en 2004, M. le juge Bastarache, qui a rédigé ce qui suit au nom de la majorité: « Afin que le régime de plafonnement des dépenses soit pleinement efficace, les limitations doivent s'appliquer à toutes les dépenses électorales possibles... ». Le régime établi pour les tiers a été adopté il y a plus de 15 ans, et pourtant nous savons parfaitement qu'il ne s'applique qu'à ce que la Loi nomme la « publicité électorale ». Cette notion est très étroite et limitée. Elle couvre la production de matériel promotionnel et l'achat des moyens de diffuser ce matériel. À l'heure actuelle, cette notion exclut toutes sortes d'autres choses.
Comme je l'ai dit au comité sénatorial, nous avons reçu un nombre considérable de plaintes, beaucoup plus que pendant la campagne précédente. Les gens se plaignaient du fait que des tiers agissaient de toutes sortes de manières qui, selon eux, influençaient le résultat du scrutin et que ces agissements étaient inéquitables. J'ai dit au comité sénatorial — et je l'ai aussi dit ici ce matin — que selon moi, après 15 ou 17 ans suivant l'adoption de ce régime, il est temps que le Parlement et vous-mêmes, les députés, le réexaminiez. Si nous désirons vraiment assurer l'égalité des participants, ne devrions-nous pas modifier le rôle que les tiers ont joué et, je suppose, qu'ils joueront pendant la prochaine campagne électorale? Je ne suis pas sûr du tout que l'égalité règne encore dans notre système. Je vous enjoins d'examiner cela avec une attention extrême.
Merci, monsieur le commissaire.
Nous passons la parole à M. Stewart. Bienvenue au Comité, monsieur Stewart.
Merci beaucoup de m'avoir invité.
Je vous remercie de votre témoignage.
J'avais une question au sujet de l'influence étrangère et de la façon de la réglementer. Je discutais avec les représentants d'une firme de publicité sur Internet et ils me disaient qu'ils ont la capacité de faire ce que l'on appelle du géoblocage, qui consiste à prendre une zone géographique et à acheter toute la présence sur les médias sociaux et toute la présence publicitaire en ligne dans une zone géographique donnée, par exemple, une circonscription. Pour nous, cette pratique est très utile, parce que nous savons que pendant notre campagne nous pourrions peut-être consacrer une partie de notre publicité à saturer notre zone locale de promesses électorales et de choses du genre.
Par contre, mon inquiétude est que cette technique peut également être utilisée par des non-Canadiens. Il vient d'y avoir une élection en Colombie-Britannique, qui était très serrée. La balance du pouvoir ne tient qu'à un siège. Il se pourrait qu'une personne voie venir cette situation et décide d'acheter toute la présence sur les médias sociaux et toute la présence en ligne dans la circonscription en question et essaie de favoriser un parti ou un autre.
Disons qu'une entreprise chinoise décide qu'elle veut faire cela. Elle inonde la circonscription en question pour des centaines de milliers de dollars de publicité en ligne. Quel est le recours en vertu de la loi actuelle? De toute évidence, il s'agit d'argent étranger qui s'en vient dans notre système électoral, mais parce que cela se fait en ligne, comment vous y prendriez-vous pour déposer des accusations ou même pour faire enquête sur cette situation?
Comme vous l'avez dit, cela soulèverait des questions très compliquées et très difficiles. Par souci de simplicité, je supposerai qu'il n'y a eu aucune collaboration de la part d'un parti ou d'un intervenant canadien, de sorte que nous avons une société chinoise qui fait cela de sa propre initiative. Premièrement, il devient très difficile de mener une enquête, comme vous l'avez laissé entendre. Deuxièmement, même en supposant que vous pourriez obtenir l'information dont vous avez besoin pour déposer une accusation, je pense que la seule chose que vous pourriez envisager, compte tenu du libellé actuel de la Loi, serait essentiellement de déposer une accusation au Canada. Si l'entreprise a une présence au Canada en ce moment ou plus tard, vous pourriez la poursuivre devant les tribunaux et peut-être agir au niveau de ses actifs si elle est reconnue coupable. Par contre, si elle est en exploitation uniquement ailleurs qu'au Canada — en Chine, dans l'exemple que vous utilisez —, il serait extrêmement difficile de faire appliquer la Loi dans une telle situation.
Disons qu'il s'agit d'un journal en ligne qui offre de la publicité dans ses colonnes, et que c'est ce que cette société achète. Pourriez-vous modifier la Loi de façon à pouvoir effectivement poursuivre le site Web sur lequel cette publicité est présentée, site qui serait hébergé au Canada?
En supposant qu'il existe une véritable connexion canadienne dans l'exemple que vous avez donné, selon les faits de l'affaire, vous pourriez vraisemblablement mener une enquête et déposer des accusations contre l'organisation ou entreprise canadienne qui a fait cela puisqu'elle est devenue partie à une infraction commise par la société chinoise, encore une fois, en utilisant votre exemple. Donc, en supposant que vous pourriez démontrer qu'elle a conseillé, encouragé la perpétration de l'infraction, alors, sur un plan technique, juridique, ce sont là des mesures qui pourraient être prises.
Est-ce que la Loi, dans son libellé actuel, facilite cela? Nous venons d'entendre toutes sortes de témoignages aux États-Unis au sujet de la façon dont la Russie influe apparemment sur leurs élections. Nous avons entendu que cela s'est maintenant répandu au Royaume-Uni et au référendum sur le Brexit. La plus grande partie de cela se ferait sous la forme de dépenses en ligne. Une partie se ferait par d'autres mécanismes, comme le piratage ou ce genre de choses, mais la majeure partie se ferait sous la forme de publicité.
Pensez-vous que l'on pourrait améliorer la Loi afin de vous aider de mettre un frein à ce qui, je pense, pourrait constituer une menace dans les années à venir?
Oui, des améliorations pourraient être apportées à la Loi afin qu'il soit plus facile de faire cela. En même temps, si l'on considère que très souvent pour nous, les Canadiens, les entreprises ou les intervenants sur Internet concernés, si vous voulez, se trouvent à l'extérieur du Canada, qu'il s'agisse de Google ou de Facebook, toutes sortes de problèmes surviennent à essayer de prendre des mesures juridiques à l'endroit de ces entreprises pour les amener à collaborer ou à cesser de faire ce qu'elles font.
À cet égard, monsieur le président, je dirais qu'en Allemagne, tout récemment, au cours des derniers mois, le gouvernement a pris des mesures pour mettre en oeuvre un système qui assujettirait des sociétés comme Facebook et Google à des amendes considérables — et je pense que l'amende maximale est de 45 millions d'euros —, si elles ne réussissent pas, lorsqu'elles sont tenues de le faire, à éliminer les fausses nouvelles de leurs réseaux. Il semble que les Allemands aient choisi cette façon de faire pour régler le problème. La question est très compliquée.
Vous savez peut-être que ce matin, le comité sénatorial devant lequel Marc et moi-même avons comparu il y a quelques mois vient de publier son rapport, que je n'ai pu que feuilleter, parce qu'il a été publié seulement quelques minutes avant notre comparution devant votre comité. Les membres de ce comité ont énormément réfléchi à ces problèmes, et ils ont formulé des recommandations que vous pourriez trouver utiles et intéressantes.
D'accord, merci.
J'ai une autre question au sujet des fausses déclarations. Pourriez-vous nous donner des exemples de fausses déclarations? Pourriez-vous, disons, donner une déclaration réelle que l'on disait fausse, mais que vous n'avez pas jugée fausse et à l'égard de laquelle vous n'avez pas mené d'enquête, et un exemple d'une déclaration qui était jugée fausse? Avez-vous de tels exemples?
Mon premier exemple remonte à l'élection générale de 2000 et il concerne une personne du nom de Shannon Jones. Pendant une campagne électorale, elle a déclaré que le député sortant, qui était de nouveau candidat, présentait, je pense que c'est ainsi qu'elle l'a dit, un des pires dossiers de présence au Parlement, seulement 53 %, et elle disait quelque chose comme, « Eh bien, si quelqu'un se présentait à son travail seulement 50 % du temps, il serait congédié. »
Elle a été accusée d'avoir commis une infraction en vertu de la disposition dont il est question ici, et le juge a conclu que cela ne suffisait pas pour justifier une condamnation en vertu de la disposition. Le juge a dit que l'on devrait recourir à la disposition lorsque la candidate ou le candidat est supposé être, et je cite les motifs du juge, « un voleur, un criminel, ou lorsque ce genre de turpitude morale était en cause ».
Je pense aussi qu'il y a des affaires... En passant, je pense que six ou sept provinces ont essentiellement la même disposition que nous et que le libellé est presque identique, au sujet de la réputation ou de la conduite personnelle de la personne.
Dans une autre affaire, qui s'est déroulée au Manitoba, la personne a dit que son adversaire était « un menteur, un voleur, un trafiquant de drogues ». Dans ce cas, le juge a conclu que cela suffisait à... et, de fait, elle a plaidé coupable et a dû payer une amende assez importante.
À ce sujet, je dirais que je pense qu'il est nécessaire, parce que beaucoup de Canadiens le pensent, lorsqu'ils examinent cette disposition, chaque fois qu'une fausse déclaration est faite au sujet d'un candidat ou d'une candidate, disons, que cela suffit à déclencher ce mécanisme, et qu'il n'est absolument pas question des tribunaux. Ils comprennent que la liberté d'expression dans le monde politique est passablement vaste, et, comme je l'ai dit dans mes propos liminaires, des manipulations partisanes, des insinuations et des exagérations font partie de la façon, pour le meilleur ou pour le pire, dont les campagnes électorales sont menées ici et dans bien d'autres pays. Les tribunaux le reconnaissent et feront preuve de prudence avant d'intervenir.
Cela dit, lorsqu'une personne franchit la ligne et accuse quelqu'un, comme je l'ai dit, de conduite criminelle ou de fraude ou de quelque chose du genre, alors les tribunaux seraient plus ouverts à peut-être envisager un verdict de culpabilité.
Je pense que ce que j'ai dit dans mes remarques liminaires, c'est que je pense qu'il y a un rôle pour cette disposition, et je pense que le défi pour vous, les députés et le Parlement, est de trouver une façon de la peaufiner, de la rendre mieux adaptée à la réalité afin qu'il soit plus facile pour nous de la mettre en application et aussi pour que les citoyens, lorsqu'ils examinent la disposition, comprennent que cette dernière ne vise pas n'importe laquelle de ces fausses déclarations.
Merci d'être venu aujourd'hui, monsieur le commissaire.
Mes questions se fonderont sur la recommandation B12.
Je suis un peu confuse par votre déclaration. Je sais que vous voulez que la disposition soit plus claire et que si ce n'est pas le cas, vous voulez alors qu'elle soit abrogée, mais dans vos remarques écrites, dans le premier paragraphe concernant la recommandation B12, vous avez dit que « la formulation de cette disposition est très générale ». C'est ce que je crois comprendre qu'elle doit être, mais j'ai ressenti un peu de confusion en lisant, au troisième paragraphe, « il est peut-être temps d'élargir sa portée, de manière à englober les fausses déclarations concernant ces principaux intervenants ».
Je suis un peu confuse. Je pense vraiment que les fausses nouvelles et toutes ces choses doivent être réglées dans le monde d'aujourd'hui. Nous voyons énormément de problèmes dans les campagnes électorales un peu partout dans le monde, mais nous avons déjà un problème avec les dispositions qui sont trop générales, de sorte que je ne sais pas si en ajoutant d'autres éléments, cela élargira effectivement la portée de la disposition ou la rendra encore plus difficile à mettre en oeuvre.
Je suis confuse. Pourriez-vous clarifier? Quant à moi, je pense qu'elle devrait être renforcée, en particulier en raison du climat actuel. Je pense que les fausses déclarations concernant la réputation personnelle sont vraiment importantes pour moi, en tant que femme, parce que je crois que l'on remet plus souvent en question la réputation des candidates qu'on ne le fait pour les candidats. Cela me préoccupe donc un peu.
Si vous vouliez répondre à cette question, j'aurai une question de suivi.
Oui.
Je ne me suis probablement pas exprimé de façon assez claire. Je vais donc essayer de clarifier ce que je voulais dire lorsque j'ai dit qu'il y aurait peut-être un problème quant à savoir si on devrait en élargir la portée.
L'article 91, dans son libellé actuel, s'applique uniquement aux candidats ou aux candidats éventuels, et pourtant des personnes pourraient formuler des commentaires très préjudiciables au sujet, par exemple, d'un parti politique ou d'un organisateur en chef d'un parti politique qui, de par la nature même de ces mots, pourraient avoir une incidence très dommageable sur le résultat d'une élection.
La question que je vous pose est la suivante. Lorsque cette disposition a été adoptée en 1908, nous n'avions peut-être pas la même implication de la part des dirigeants de parti, ou des partis, de sorte que ce problème, pour moi, est une question ouverte à savoir si vous aimeriez ou non que la disposition soit élargie. Voilà la raison pour laquelle je dis cela.
Pour ce qui est de la diminuer, je suggère de regarder de quelle façon les tribunaux et les juges ont appliqué cette disposition dans diverses affaires judiciaires. Vous vous rendez compte qu'ils cherchent quelque chose de passablement étroit. Par exemple, un des juges a dit que si vous faites un commentaire sur la façon dont une personne s'est acquittée de ses fonctions officielles, on serait très indulgent envers les personnes qui font ce genre de déclaration. Par contre, si vous attaquez la réputation d'une personne, ce n'est plus la même chose. Voilà pourquoi je vous dis que les fausses déclarations... Vous souhaitez peut-être ajouter des mots à des fins de clarification pour que les tribunaux aient une idée de ce que le Parlement aimerait qu'ils fassent, ou aimerait que la Loi dispose.
Comme je l'ai dit dès le départ, nous sommes à l'ère de la liberté d'expression de sorte qu'il est extrêmement important pour une nouvelle loi — si vous décidez de l'ouvrir et de la modifier — d'en tenir compte. Le tribunal accordera toute la latitude voulue aux personnes qui s'expriment dans le cadre d'un débat politique. Vous devez donc vous assurer que vos objectifs décrivent et définissent clairement l'objectif, et que les mécanismes que vous utilisez sont aussi étroits que possible pour l'atteindre.
Bien entendu, et je suis certaine que vous avez ces situations lorsque des gens font de fausses déclarations lors d'un débat politique, mais je pense que la plupart d'entre nous autour de la table peuvent s'entendre pour dire que si vous débattez avec un adversaire et que vous parlez de la façon dont son parti a voté ou sur ce qu'il a mis en oeuvre, il s'agit de manipulations partisanes à l'occasion qui peuvent être perçues de différentes façons.
Par exemple, lors de la dernière élection, mon adversaire conservateur, M. Gill, a envoyé des lettres à chaque ménage de ma circonscription. Dans ces lettres, il laissait entendre que j'avais appuyé un projet de loi d'initiative parlementaire et que je l'avais présenté à la Chambre, mais je n'avais jamais été une députée auparavant; j'étais une nouvelle candidate. De toute évidence, il s'agissait d'une fausse déclaration, mais auparavant, il y avait eu une autre députée qui avait le même prénom que moi, de sorte qu'en éliminant le nom de famille et en envoyant une lettre à chaque ménage, on pouvait affirmer qu'une personne ayant ce prénom avait effectivement fait cela, mais il l'a fait pendant ma campagne électorale, ce qui laissait sous-entendre que j'avais déposé ce projet de loi.
C'est ici que les choses deviennent nébuleuses et il s'agit d'une fausse déclaration, mais je n'avais jamais songé à déposer une plainte à ce sujet, parce que je pense qu'il y a des façons de régler cela, par les médias, en réagissant à des allégations comme celle-là.
C'est l'aspect de la réputation personnelle qui me dérange vraiment, et comme nous voulons encourager plus de femmes à se présenter en politique, j'estime que nous ne devrions pas envoyer un message qui veut que, en tant qu'organe élu, cela ne nous dérange pas si de telles choses surviennent pendant une campagne. Nous devrions envoyer le message que oui, officiellement nous avons quelque chose, mais que c'est impossible à appliquer et je veux vous aider à faire en sorte que l'on puisse l'appliquer.
Comment nous y prenons-nous pour en faire un acte illégal ou une manoeuvre frauduleuse? Vous avez dit qu'elle ne va pas jusque-là.
Ce serait assez facile. La Loi comporte des dispositions qui énoncent les actes illégaux ou les pratiques frauduleuses. Il s'agit de l'article 502.
Si vous décidez d'adopter cette façon de faire, il suffirait d'ajouter un paragraphe à l'un de ces deux articles pour indiquer clairement que dorénavant, il en serait ainsi.
En même temps, je pense qu'il est important de souligner à l'intention du Comité, monsieur le président, que si l'on envisage d'emprunter cette voie, je vous exhorterais à y réfléchir très attentivement, parce que si vous faites cela, il pourrait alors être possible de contester les résultats d'une élection. Je pense que l'une des choses que vous souhaiteriez éviter, ou du moins examiner très attentivement, c'est d'éviter d'avoir une multiplicité de contestations après une élection si une personne dit qu'une fausse déclaration a été faite à son sujet et qu'elle veut maintenant contester le résultat de l'élection.
Je vous inciterais à penser très sérieusement à l'endroit où vous mettriez la barre pour pouvoir lancer une telle contestation, puis à donner une orientation aux tribunaux, aux juges, le plus précisément possible sur comment ils devraient décider si les résultats de l'élection doivent être annulés ou non.
D'accord. Je ne dispose pas de suffisamment de temps maintenant, mais j'aimerais avoir plus de renseignements sur la façon pour nous de rendre cette disposition applicable, mais peut-être ne pas aller aussi loin, de sorte que cette situation ne se répète pas indéfiniment.
Merci, madame Sahota.
Avant de passer à M. Richards, je tiens à réitérer ce que le témoin a dit. Il est quand même extraordinaire que pendant que nous parlons de la recommandation B27 au sujet de l'article 331 de la Loi, l'interdiction aux étrangers d'inciter des électeurs à voter, ce matin, le Sénat a déposé son rapport « Contrôler l'influence étrangère sur les élections canadiennes ».
Monsieur Richards, vous avez la parole.
Voilà une excellente introduction pour moi, parce que je voulais aussi mentionner cela et demander au commissaire des précisions à ce sujet.
Le Sénat a publié son rapport. Je ne sais pas si vous l'avez vu. Il vient tout juste d'être publié. Dans Contrôler l'influence étrangère sur les élections canadiennes, on peut lire plusieurs recommandations visant à s'assurer que les fonds étrangers ne jouent aucun rôle direct ou indirect dans les élections canadiennes.
On y propose aussi d'interdire l'ingérence étrangère, de moderniser la réglementation de la participation de tiers, d'accroître les peines criminelles et de supprimer la limite de six mois appliquée à l'obligation de déclarer les contributions. Bien entendu, on demande aussi à Élections Canada de devoir faire des vérifications au hasard des dépenses de publicité électorale des tiers et des contributions qu'ils ont pu utiliser en période électorale. Voilà quelques-unes des recommandations faites dans ce rapport.
Bien entendu, vous nous avez indiqué que vous pensez que nous devons examiner le financement par des tiers et envisager de moderniser et de mettre à jour toute la réglementation. Dans une réponse à une de mes questions, vous avez indiqué plus tôt que pour que les dispositions soient efficaces, elles doivent s'appliquer à toutes les dépenses possibles liées à l'élection. J'aimerais connaître vos suggestions quant à ce que le Comité peut faire, parce que je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire qu'il s'agit d'un aspect que nous devrions examiner. Ce problème doit être réglé. Je suppose que lorsque vous dites que cela doit s'appliquer à toutes les dépenses possibles liées à l'élection, vous indiquez que la disposition qui vise uniquement les dépenses en publicité n'est pas suffisamment large, et que vous croyez que nous devrions en élargir davantage la portée. J'aimerais connaître vos réflexions à ce sujet.
Plus particulièrement, j'aimerais connaître vos réflexions relativement à la limite de six mois. Comme je l'ai mentionné plus tôt, maintenant que les élections sont à date fixe, puisque l'on parle de six mois avant le dépôt du bref électoral, on sait très bien que si l'on veut obtenir cet argent, on peut le faire six mois plus un jour avant le dépôt du bref, et personne ne le sait. Personne ne s'en apercevra. En conséquence, il pourrait y avoir un très important financement étranger qui pourrait avoir une très grande incidence sur notre élection.
J'aimerais savoir ce que vous pensez de ces deux aspects.
J'ai trois points à souligner.
Tout d'abord, le rapport du Sénat nous a été remis en fait 30 minutes avant que nous n'arrivions ici; j'ai donc eu à peine le temps de le survoler et je ne peux émettre aucun commentaire à propos du contenu.
Oui, il me semble que des tiers organisent des activités, des rassemblements par exemple. Pour l'instant, le Bureau et Élections Canada estiment qu'il ne s'agit pas de publicité politique ou électorale. Ainsi, dans l'état actuel des choses, un tiers peut tout à fait dépenser une somme importante pour organiser des rassemblements dans plusieurs villes au pays, y consacrer peut-être des milliers de dollars. En principe, ce n'est pas de la publicité électorale et ce n'est pas réglementé du tout.
... des personnes qui tentent par téléphone de convaincre les gens de voter de telle ou telle façon... Bien franchement, pour l'instant, c'est un champ libre et certaines activités sont permises.
J'estime qu'il faudrait absolument examiner de très près la question de la limite de six mois, voire la supprimer totalement ou faire en sorte d'aborder et de réglementer beaucoup plus d'activités que maintenant.
Oui, je le comprends et je suis tout à fait d'accord aussi.
Pour s'assurer que ce soit le cas, l'idée d'effectuer des audits aléatoires des dépenses de publicité électorale par des tiers a été soulevée. Serait-ce un moyen utile pour veiller à ce que plus d'activités soient prises en compte?
Bien, en supposant que le projet de loi, le nouveau cadre réglementaire, soit tel qu'il faut déclarer beaucoup plus d'activités et que certaines limites sont prévues, des audits ponctuels seraient certainement une bonne façon de rassembler l'information nécessaire afin de mettre au jour ou de dévoiler des activités illégales par des tiers.
Merci, je l'apprécie.
Si nous devons étudier ce scénario — et je crois fermement que nous le devrions —, avez-vous d'autres suggestions à faire pour moderniser l'approche? Devrions-nous, par exemple, hausser les pénalités ou veiller à prendre en compte davantage d'activités pour lutter contre l'ingérence étrangère dans les élections? Si vous n'avez rien à suggérer de vive voix aujourd'hui, pourriez-vous nous présenter quelque chose par écrit? Ce serait utile.
Oui, nous pourrions vous faire part d'autres idées. Je ne suggérerais pas nécessairement d'imposer des pénalités plus sévères, car je pense qu'elles le sont déjà assez. Le véritable défi, le véritable objectif pour le Parlement, c'est, à mon avis, de déterminer les mesures à prendre pour limiter les activités qui sont, en tout ou en partie, autorisées pour les tiers.
Effectivement, le juge Bastarache a dit ce que j'ai dit il y a quelques minutes, mais en même temps, les tribunaux, comme vous le savez probablement, ont invalidé les dépenses de tiers à quelques reprises dans le passé. C'est un sujet très délicat à aborder et, une fois votre objectif établi, vous devez vraiment avancer prudemment.
Monsieur le commissaire et maître Chénier, je vous remercie tous les deux d'être ici aujourd'hui.
Je veux revenir sur certaines observations de mes collègues au sujet de la recommandation B27 qui concerne l'incitation par des étrangers. J'ai un exemple précis en tête et je veux que vous me disiez ce que vous en pensez.
Dans la circonscription que je représente, un assez grand nombre d'établissements scolaires offrent des services aux étrangers, des étudiants internationaux qui viennent souvent au Canada pour terminer leurs études secondaires et peut-être se préparer à les poursuivre au Canada au niveau postsecondaire.
Souvent, ils se montrent intéressés à participer au processus politique canadien, ce qui a été le cas pour mon élection. Pour obtenir leur diplôme, ils doivent, par exemple, accumuler suffisamment d'heures de bénévolat. En Ontario, on parle de 40 heures. Ils viennent cogner à ma porte pour dire qu'ils aimeraient m'aider et demander s'ils obtiennent ainsi des heures de bénévolat. Il s'agit essentiellement d'étudiants internationaux qui ne résident pas au Canada.
D'après les dispositions actuelles de l'article 331, est-ce qu'ils enfreignent la Loi en participant à une élection canadienne?
Ce sont des non-résidents, ils sont donc ici de façon temporaire. Ils résident au Canada, mais ne sont pas... Ce sont des résidents temporaires, donc des non-résidents. Ils n'ont pas le statut de résident canadien. Sont-ils techniquement conformes parce qu'ils ont ce statut temporaire?
S'ils étudient ici, on peut clairement comprendre qu'en fait, ils résident, même si ce n'est que temporairement, au Canada.
Je le répète, j'étais simplement préoccupé par cette situation particulière... Je sais qu'il est actuellement recommandé d'abroger l'article et que la partie la plus difficile, c'est habituellement, l'application des règles, en particulier pour ceux qui résident, peu importe où. Si une personne blogue au sujet de l'élection canadienne et qu'elle vit en Birmanie, il est difficile de se faire une quelconque... On peut toujours dire que ces gens-là essaient d'influer sur les élections, mais il n'y a aucun véritable mécanisme d'application des règles.
Les questions soulevées par Blake et d'autres intervenants concernant les influences étrangères m'interpellent, mais dans l'univers des médias sociaux, je ne vois tout simplement pas comment nous pouvons, de nos jours, exercer efficacement un quelconque contrôle réglementaire sur ce type d'activité, autre qu'au moyen de ressources réelles comme monétaires.
Il est certain que cette question représente tout un enjeu. Bien des pays y sont confrontés et pas seulement dans un contexte électoral. Ce n'est assurément pas une question simple.
En passant, monsieur le président, je pense que M. Chan a dit que j'avais recommandé d'abolir l'article 331. Ce n'est pas ce que j'ai recommandé; j'ai plutôt dit qu'il faudrait examiner la question dans le but de peut-être préciser les choses et...
Si je le peux, et peut-être que cela survient à l'improviste pour les membres du Comité, nous recevons beaucoup de plaintes à propos de l'absence de titres d'appel sur les pancartes électorales pendant la campagne. Parfois, les titres y sont; ils sont simplement imprimés avec un écart de couleur et il est ainsi très difficile de les lire. Pour essayer de régler ce problème, nous devons parfois utiliser des loupes pour voir si les titres sont imprimés, et quand nous les voyons, nous mettons un terme à l'enquête. Si vous pouviez trouver une façon de recommander que les titres d'appel soient raisonnablement visibles ou de proposer un amendement à cette fin, certains d'entre nous s'en trouveraient fort aise.
C'est un point sans grande importance, mais comme dernier commentaire, c'est une demande que je vous présente.
Il s'agit de la ligne sur les pancartes indiquant que c'est autorisé par l'agent officiel d'un parti.
Merci beaucoup de vous être joints à nous. Vos commentaires sur les recommandations que nous allons maintenant étudier sont très utiles.
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