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PROC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 079 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er juin 2023

[Enregistrement électronique]

  (1000)  

[Traduction]

     Bonjour à tous. La séance est ouverte.
     Bienvenue à la réunion no 79 du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.
    Le Comité se réunit aujourd'hui pour étudier la question de privilège concernant le député de Wellington—Halton Hills et d'autres députés.
     J'aimerais rappeler aux députés et aux témoins de faire très attention lorsqu'ils utilisent les écouteurs des services d'interprétation. Ne placez pas l'écouteur près du microphone, car cela pourrait provoquer un retour de son susceptible de causer un choc acoustique, qui pourrait à son tour occasionner des blessures chez les interprètes. En somme, si vous utilisez un écouteur, gardez‑le sur votre oreille ou déposez‑le à côté de vous. C'est probablement la meilleure chose à faire. Il n'est pas conseillé de jouer avec les écouteurs en ce moment.
    Je vous rappelle que les commentaires doivent s'adresser à la présidence. Le greffier du Comité et moi-même tiendrons une liste consolidée des députés qui souhaitent prendre la parole.
    Nous avons avec nous aujourd'hui Mme Jody Thomas, conseillère à la sécurité nationale et au renseignement.
    Madame Thomas, vous avez cinq minutes pour vous présenter.
    Je tiens à vous féliciter, vous et votre équipe, de nous avoir transmis si rapidement vos disponibilités. J'espère que les autres entendront ce message s'ils veulent recevoir des félicitations. Je vous suis très reconnaissante d'avoir répondu si rapidement et de venir témoigner ce matin.
     La parole est à vous.
     Merci, madame la présidente. C'est un grand plaisir d'être de retour devant le Comité aujourd'hui.

[Français]

     Les questions qu'étudie le Comité sont des plus graves, et c'est avec plaisir que je m'en entretiens avec vous aujourd'hui. Ce n'est pas la première fois que le Comité m'invite à témoigner dans le cadre de cette étude; il s'agit d'un dossier qui évolue, tout comme le débat public qui l'entoure.
    Depuis ma dernière visite, il y a eu plusieurs changements importants.

[Traduction]

    Comme vous le savez, le rapporteur spécial indépendant a présenté le 23 mai un premier rapport qui renferme un certain nombre de conclusions.
    D'abord, le rapporteur spécial indépendant a conclu que les gouvernements étrangers tentent indéniablement d'influencer les candidats et les électeurs au Canada. Beaucoup de choses ont été faites jusqu'à présent, mais il en reste encore beaucoup à faire, rapidement, pour renforcer notre capacité à détecter et à contrer les activités d'ingérence étrangère dans les élections et à dissuader ceux qui voudraient s'y livrer.
    Le gouvernement et les services de renseignement ont en effet tenu sur une base régulière des discussions sur la menace d'ingérence, qui est croissante et omniprésente. Des efforts sont déjà déployés pour l'atténuer et la contrer, mais il reste encore du travail à faire pour combattre efficacement les menaces en constante évolution que font planer sur nous nos adversaires.
    Le 6 avril, le ministre LeBlanc et le greffier du Conseil privé ont présenté au premier ministre un rapport qui décrivait les progrès réalisés jusqu'à présent dans la mise en œuvre des recommandations issues des examens précédents sur l'ingérence étrangère et la sécurité des élections. Le rapport trace ainsi la marche à suivre vers d'autres mesures.
    Ce printemps, Sécurité publique Canada a lancé et a mené des consultations publiques sur la mise en place d'un registre visant la transparence en matière d'influence étrangère.
    L'élaboration de propositions législatives visant à moderniser la loi est bien entamée afin que les services de renseignement et les organismes d'application de la loi puissent mieux détecter les menaces, aider les Canadiens à s'en protéger et demander des comptes aux acteurs de l'ingérence étrangère.
    En outre, le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections exerce une surveillance accrue et une évaluation resserrée des menaces d'ingérence étrangère, au moment où ont été déclenchées simultanément quatre élections partielles.
    Le rapporteur spécial indépendant a également découvert de sérieuses lacunes dans la communication du renseignement entre les organismes de sécurité et le gouvernement. Nous avons déjà apporté un certain nombre de changements pour améliorer les processus de communication et la coordination du renseignement au sein du gouvernement.
    Sécurité publique Canada a nommé un coordonnateur national de la lutte contre l'ingérence étrangère, qui pilotera la réponse proactive du gouvernement à la menace d'ingérence étrangère.
     Nous avons également renforcé notre gouvernance. J'ai mis sur pied un comité de sous-ministres de la réponse fondée sur le renseignement, qui aura pour mandat d'examiner le renseignement, de déterminer la réponse appropriée et de formuler des conseils à l'intention du gouvernement.
    De plus, le ministre de la Sécurité publique a publié récemment une directive selon laquelle les parlementaires doivent être informés, dans la mesure du possible et dans le respect de la loi et de l'intégrité des enquêtes, de toute menace dirigée contre eux. La directive prévoit également que le ministre de la Sécurité publique soit mis au courant en temps opportun de toutes les occurrences de menace envers la sécurité du Canada dirigée contre le Parlement ou les parlementaires.
    Comme vous le savez, les travaux du rapporteur spécial indépendant sont exécutés par ceux du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et de l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, qui ont tous deux examiné l'ingérence étrangère dans le processus démocratique du Canada. Le rapporteur spécial indépendant a également recommandé que l'annexe confidentielle de son rapport soit transmise à ces deux groupes.
    Dans le cadre de notre travail, nous appuyons sans réserve le mandat de ces deux instances et la seconde phase du mandat du rapporteur spécial indépendant. Nous savons que des changements à long terme sont nécessaires pour que le Canada et les Canadiens disposent des outils dont ils ont besoin pour juguler l'ingérence étrangère. Le travail du comité de sous-ministres, l'analyse du rapporteur spécial indépendant, qui se poursuivra, et les examens continus du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement et de l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement contribueront à orienter ces changements.
    Merci beaucoup. Je répondrai volontiers à vos questions.

  (1005)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons commencer la série de questions de six minutes avec M. Cooper, suivi de Mme Romanado, de Mme Gaudreau et de Mme Blaney.
    Monsieur Cooper, la parole est à vous.
    Merci, madame la présidente, et merci à vous, madame Thomas, d'être venue témoigner devant le Comité.
    Par votre entremise, madame la présidente, à Mme Thomas, nous sommes ici parce qu'une note de service du SCRS datée du 20 juillet 2021 indiquait qu'un diplomate de Pékin accrédité par le gouvernement libéral ciblait un député, Michael Chong, en menaçant de sanctions sa famille établie à Hong Kong.
    La note de service a été transmise au ministère du premier ministre, le Bureau du Conseil privé, mais le premier ministre n'a rien fait pendant deux ans. Le gouvernement n'a pas réagi. Le premier ministre a dit à plusieurs reprises qu'il en a été informé pour la première fois dans un article du Globe and Mail. Quand avez-vous été mise au courant de cette note de service?
     Comme je l'ai dit à M. Chong au moment où le SCRS lui a donné une séance de breffage, je l'ai su grâce au Globe and Mail. Je n'avais pas vu le rapport, et le premier ministre non plus.
    Vous l'avez appris dans le Globe and Mail et puis, soudainement, après la parution de l'article, deux autres députés, Erin O'Toole et Jenny Kwan, ont été invités à rencontrer le SCRS, qui leur a divulgué qu'ils étaient eux aussi ciblés par le régime de Pékin.
    À quel moment le premier ministre a‑t‑il été mis au courant que ces députés, dont l'ancien chef de l'opposition, étaient ciblés par Pékin?
    Le premier ministre ne savait rien des activités dirigées contre M. Chong ou contre Mme Kwan avant les événements récents et la parution de l'article. Le SCRS lui a communiqué ces informations au cours des deux ou trois dernières semaines.
    Vous avez dit que le premier ministre n'était pas au courant pour M. Chong ou pour Mme Kwan. Était‑il au courant pour M. O'Toole?
    Ou M. O'Toole... C'est ce que j'ai compris.
    Vous dites qu'il aurait appris tout cela le 1er mai.
    Oui.
    Quand avez-vous su que Mme Kwan et M. O'Toole avaient été ciblés?
    Je l'ai appris au cours des trois ou quatre dernières semaines.
    Vous l'avez appris au cours des trois ou quatre dernières semaines. Comment l'avez-vous appris?
    Je l'ai appris lors d'une séance de breffage du SCRS.
    Je trouve inconcevable qu'au moins trois députés aient été ciblés par des agents de Pékin, y compris un diplomate accrédité, et que vous n'en ayez pas été mise au courant, que le premier ministre n'en ait pas été mis au courant non plus, et que ce soit seulement maintenant que des mesures sont prises, par pure coïncidence, dans la foulée de l'article du Globe and Mail.
    Comment est‑ce possible? Comment peut‑on concevoir que la conseillère à la sécurité nationale, en l'occurrence vous, les anciens conseillers à la sécurité nationale et le premier ministre aient été tenus dans l'ignorance la plus complète à ce sujet? On dirait bien, madame Thomas — je vais vous laisser répondre ensuite —, que nous sommes témoins d'une défaillance de la machine gouvernementale pendant le règne du premier ministre.
    Êtes-vous au moins d'accord avec mon évaluation?
    Monsieur Cooper, je le répète, je n'étais pas ici en 2021. Je ne peux pas expliquer pourquoi l'information n'a été transmise ni au premier ministre ni à son bureau, et je ne vais pas émettre d'hypothèses.
    C'est vrai qu'il faut améliorer la gestion des renseignements que reçoivent les bureaux des sous-ministres, des ministres et de la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement afin d'être en mesure d'informer le premier ministre et les ministres.
    Nous avons déployé des efforts en vue de faire en sorte non seulement que l'information soit transmise, mais aussi qu'elle soit accompagnée de conseils, car le problème ne se limite pas à la lecture des renseignements; il faut aussi donner des conseils sur les mesures à prendre à leur égard. Nous avons renforcé ces deux processus.
    Madame Thomas, vous avez affirmé que ni vous ni le premier ministre n'étiez au courant. Ce n'est donc pas juste une question des mesures à prendre à l'égard des renseignements. Vous avez dit qu'il ne savait pas. Pourtant, nous savons qu'en ce qui concerne M. Chong, le SCRS a envoyé un courriel au ministre de la Sécurité publique en mai 2021. Cependant, le ministre n'avait pas les données d'accès à son compte de courrier électronique, et ce, 18 mois après son entrée en fonction. Ensuite, le SCRS a envoyé une note strictement au Bureau du Conseil privé, plus précisément au conseiller à la sécurité nationale du premier ministre.
    Je répète ma question: comment le premier ministre pouvait‑il ne pas savoir? Pourquoi les députés ont-ils été tenus dans l'ignorance? À la lumière de ces faits, n'êtes-vous pas prête à admettre, pour le moins, qu'il y a eu défaillance majeure de l'appareil gouvernemental pendant que le premier ministre était au gouvernail?

  (1010)  

    Je le répète, je ne peux pas expliquer ce qui s'est passé en 2021 et je ne vais pas émettre d'hypothèses. Je sais que vous rencontrerez mes prédécesseurs et des représentants du SCRS. Selon moi, le processus a échoué; en fait, non seulement il a échoué, mais il était insuffisant. Nous avons réglé ces problèmes.
    Quant à moi, ce n'est pas seulement que le processus a échoué; si trois députés ont été ciblés, c'est en raison d'un grave manquement de la part du premier ministre. Combien d'autres députés le régime de Pékin a‑t‑il ciblés?
    Les représentants du SCRS vous parleront des renseignements que le SCRS détient lorsqu'ils comparaîtront.
    Les députés ciblés en seront-ils informés, ou en serons-nous informés une fois que la nouvelle aura été rapportée par le Globe and Mail?
    Les instructions du premier ministre et la directive ministérielle du ministre Mendicino à l'intention du SCRS et des autres organismes du renseignement sous sa direction traduisent clairement qu'ils s'attendent à ce que les députés soient informés sur tous les renseignements les concernant, peu importe la qualité, la gravité ou la fiabilité de ces renseignements. Les députés touchés par des renseignements détenus par le SCRS recevront de l'information détaillée.
    Merci.
    La parole est à Mme Romanado.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie Mme Thomas de se joindre à nouveau à nous.
    Il a été un peu question du processus par lequel l'information est transmise et de la quantité de renseignements que le titulaire d'un poste comme celui de conseiller à la sécurité nationale et au renseignement reçoit. Globalement, quelle quantité de renseignements votre équipe reçoit-elle quotidiennement?
    À eux seuls, nos organismes de sécurité recueillent entre 3 000 et 4 000 éléments de renseignement par mois. S'ajoutent à cela les renseignements que nous recevons de la part du Groupe des cinq.
    J'ai un dossier de lecture par lequel je suis des enjeux particuliers. Bien entendu, je suis la situation en Ukraine. Je suis aussi le dossier de la Chine et de l'ingérence étrangère. Je demande qu'on me prépare un dossier de lecture, en fonction de sujets ou d'enjeux géopolitiques, ou encore par rapport aux endroits où des troupes des Forces armées canadiennes sont en garnison. Au quotidien, mon dossier de lecture peut contenir entre 50 et 100 éléments de renseignement. Parfois, il en contient plus; d'autres fois, il en contient moins. La quantité fluctue d'un jour à l'autre.
    Certains éléments de renseignement envoyés au Bureau du Conseil privé me sont destinés exclusivement, et c'est à moi de déterminer à qui les transmettre. Nous tentons de faire en sorte que, dans les cas où il faut absolument que quelqu'un prenne connaissance d'un élément de renseignement, les responsables des relations avec la clientèle du CST qui travaillent auprès des ministères et qui diffusent les renseignements veillent à ce que quelqu'un en prenne connaissance. Ils doivent également confirmer que quelqu'un en a pris connaissance. Je pense que c'est là où le processus a échoué dans le passé: personne n'a pris connaissance des éléments de renseignement.
    J'aimerais que vous nous expliquiez le processus. Vous recevez des renseignements sur une vaste gamme de sujets, comme tout ce qui concerne les Forces armées canadiennes, ainsi que des enjeux à l'étranger et au pays. Comment les renseignements sont-ils collectés et comment vous sont-ils envoyés? Quels organismes vous transmettent ce type d'information? Évidemment, il y a le SCRS et le CST, mais y en a‑t‑il d'autres? Comment le dossier se rend‑il jusqu'à vous?
    D'autres sont beaucoup mieux placés que moi pour vous expliquer le processus puisqu'ils en font partie. En un mot, les renseignements sont entrés dans un système qui s'appelle Slingshot, ou encore ils sont envoyés par méthode secrète ou très secrète à des destinataires donnés. Dans mon cas, ils sont imprimés. Je peux y accéder moi-même, mais en général, on me les imprime. Je reçois un dossier de lecture tous les jours, et je le lis.
    Il y a différents types d'éléments de renseignement. Certains sont évalués. La direction de l'évaluation du renseignement du Bureau du Conseil privé effectue des évaluations. Autrement dit, elle prend les renseignements bruts et elle les interprète pour nous au moyen de techniques qu'elle a apprises et de méthodes analytiques perfectionnées ici au Canada et en collaboration avec le Groupe des cinq.
    Nous recevons aussi des éléments de renseignement non corroborés de source unique nous informant que telle chose est peut-être arrivée.
    Les organismes du renseignement gèrent toute cette information. Leurs fonds de renseignements sont considérables. Ils ne transmettent pas tous les renseignements qu'ils détiennent. Il est essentiel de comprendre qu'ils tentent de faire en sorte que les hauts dirigeants du milieu du renseignement et de la sécurité sont au courant des renseignements qu'ils recueillent et de leur niveau de crédibilité. Ils vont dire, par exemple: « Nous croyons que ce renseignement doit être porté à votre attention, mais il n'a pas encore été confirmé. » D'autres rapports peuvent alors s'ensuivre. Un dossier est monté sur une affaire ou une personne donnée.
    Un élément de renseignement est rarement une preuve tangible. C'est plutôt une histoire qui se construit avec le temps. Il faut l'analyser et déterminer ce qu'on en fait.

  (1015)  

    Merci beaucoup.
    Ainsi, chaque élément est comme une pièce de puzzle. Vous avez une petite pièce du puzzle, et même si elle peut paraître intéressante à première vue, il n'est peut-être pas nécessaire de la renvoyer plus haut.
    Je présume que quand nous recevrons les autres témoins, nous pourrons leur demander de nous expliquer comment la détermination est faite de transmettre les renseignements à l'échelon supérieur. Je présume que la décision est fondée sur les pièces du puzzle qu'ils ont en main; une fois que l'image se précise... À moins, bien entendu, qu'il s'agisse d'un élément de renseignement capital, très crédible et urgent requérant une attention immédiate, comme vous l'avez dit.
    Est‑ce exact?
    Oui, cela résume très bien comment le système fonctionne.
    Maintenant, conformément aux directives du premier ministre, nous veillons à ce que toute mention d'ingérence étrangère et d'un député soit transmise à l'échelon supérieur, peu importe le niveau de crédibilité ou de certitude de l'élément de renseignement.
    Ensuite, nous demandons au SCRS ou au CST de nous fournir toute autre information qu'ils ont à ce sujet pour pouvoir brosser un portrait plus large de la situation et conseiller le gouvernement. Parfois, on nous conseille de ne rien faire pour l'instant ou d'attendre avant de transmettre les renseignements. D'autres fois, on nous conseille d'agir.
    Ce que vous décrivez, ce sont de nouvelles mesures que vous venez de mettre en place, n'est‑ce pas?
    Oui, c'est exact.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci.
    La parole est à Mme Gaudreau.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je viens d'entendre des propos voulant que le premier ministre ait donné des directives. On peut donc se demander pourquoi nous sommes ici, malgré les moyens mis en place pour essayer de passer les renseignements à un tamis moins étanche.
    Quelle était la directive du premier ministre quant au niveau d'alerte? J'aimerais en savoir davantage. Vous n'avez peut-être pas eu l'occasion de nous en faire part au cours de nos deux premières rencontres.

[Traduction]

    Selon moi, le premier ministre a été très clair. Il a ordonné aux organismes du renseignement de veiller à ce que lui et les députés soient informés de toute information et de tout renseignement qu'ils reçoivent concernant des menaces liées à l'ingérence étrangère dirigées contre des députés.
    Par la suite, le ministre Mendicino a produit un document officiel à ce sujet, ce qu'on appelle une directive ministérielle. En vertu de cette directive, lorsque le SCRS prend connaissance d'une menace dirigée contre un député, il est tenu d'en informer le ministre et le député ciblé, peu importe le niveau de crédibilité de la menace.

[Français]

     Dois-je comprendre que ce sera ainsi dorénavant, mais que ce n'était pas le cas avant?

[Traduction]

    Oui, absolument. C'est ce qui sera fait dorénavant.
    Ce n'était pas le cas auparavant parce qu'on reçoit des renseignements de toutes sortes. Certains ne sont pas crédibles, mais ils sont préoccupants. Ils inquiéteraient les députés s'ils en étaient informés.
    Je pense que la leçon qui a été tirée de la situation, c'est qu'il vaut mieux transmettre les éléments de renseignement rapidement, même s'ils ne sont pas crédibles ou s'ils ne peuvent pas être vérifiés.

  (1020)  

[Français]

    Je suis très consciente qu'on reçoit entre 3 000 et 4 000 alertes ou notes de service par mois, comme vous le dites. Toutefois, ce que j'apprends aujourd'hui me trouble énormément. En effet, on croyait avoir autre chose à faire, au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, alors que notre travail est extrêmement important.
    Auparavant, la communication et le traitement des alertes ne se faisaient pas de la même façon. Tous les témoins qui sont venus au Comité nous ont dit qu'il y avait une épidémie de classements secrets excessifs au sein du domaine du renseignement canadien. On nous parle même d'une culture du renseignement. D'ailleurs, si nous en parlons, c'est seulement parce que quelqu'un a osé s'exprimer dans les médias. Autrement, nous ne serions pas en train d'essayer de corriger le tir.
    Comment se fait-il que nous en soyons là aujourd'hui? Je vous offre la possibilité de répondre en toute honnêteté. C'est pour redonner confiance aux gens.

[Traduction]

    Tout d'abord, je dirais que l'évaluation effectuée par les cinq intervenants à partir des renseignements présentés par le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections — soit les deux examens réalisés après les élections, le travail du CPSNR et l'analyse du rapporteur spécial indépendant — montre que les élections étaient libres, ouvertes et sûres, et que leurs résultats ne doivent pas être mis en doute. Je trouve très important de le souligner.
    Pour ce qui est d'informer le premier ministre, les ministres et les députés touchés, d'éléments de renseignements particuliers... Dans le passé, le SCRS interprétait très strictement les dispositions de sa loi portant sur les séances d'information défensives et les mesures de réduction des menaces. Dorénavant, il devra suivre les instructions très rigoureuses que lui a données le ministre Mendicino. Je trouve cela rassurant.

[Français]

    Nous savons maintenant qu'au moins trois de nos collègues ont été visés, et c'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui, n'est-ce pas? C'est pour nous pencher sur la question de privilège concernant la campagne d'intimidation envers le député de Wellington—Halton Hills. On a agi parce que cela a été révélé publiquement.
    Cela me fait croire qu'au fond, auparavant, le gouvernement ne pouvait pas protéger adéquatement les parlementaires. Êtes-vous d'accord?

[Traduction]

    D'abord, vous soulevez un point important. Je tiens à souligner que la sécurité physique d'aucun député n'a été compromise et qu'il n'y a pas de menace physique.
    Je comprends parfaitement que l'information divulguée par les médias ou transmise aux députés est choquante et troublante. Je reconnais que cela aurait dû se passer autrement.
    Je ne peux pas parler de ce qui est arrivé dans le passé. Dorénavant, nous allons utiliser une approche complètement différente. Selon moi, notre nouvelle approche aidera le gouvernement, l'ensemble des députés et toute la population canadienne à comprendre la menace posée par l'ingérence étrangère et les mesures que nous prenons pour y faire face. Il y aura une plus grande transparence et plus d'échanges sur ce qui se passe réellement.

[Français]

    Dans le cadre de votre travail, vous manquait-il un élément pour mieux comprendre les alertes en tant que telles?
    Les derniers témoins que nous avons entendus nous ont expliqué l'abondance d'informations et la façon dont on les traite pour déterminer ce qui est urgent ou plus urgent.
    Vous manquait-il quelque chose ou, au contraire, vous disait-on qu'il y avait tellement d'informations qu'on devait s'occuper de ce qui était le plus grave?

[Traduction]

    D'après moi, ce qu'il importe de retenir, c'est qu'il ne faut pas compter sur une seule personne pour lire tous les renseignements et pour décider lesquels doivent être transmis à l'échelon supérieur, car si un renseignement échappe à cette personne, il passe entre les mailles du filet. Disons que je ne peux pas prendre connaissance de mon dossier de lecture un jour parce que je suis en voyage; cela ne devrait pas vouloir dire que les renseignements ne seront pas transmis à la greffière du Conseil privé, aux ministres ou au premier ministre.
     Nous avons maintenant un processus plus rigoureux pour veiller à ce que les renseignements exploitables et non exploitables, en particulier ceux concernant l'ingérence étrangère, fassent l'objet de discussions et soient transmis aux ministres, à la greffière et peut-être aussi au premier ministre et à son bureau. Ce processus vise non seulement la transmission de renseignements bruts, mais aussi la présentation de conseils sur les mesures à prendre à leur égard.

  (1025)  

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    La parole est à Mme Blaney.
    Merci, madame la présidente. Merci à Mme Thomas d'être des nôtres aujourd'hui.
    J'écoute les échanges et j'essaie vraiment de comprendre parce qu'il s'agit d'une question extrêmement sérieuse. Les répercussions sont très préoccupantes; la manière dont l'information est transmise et à quels moments aussi. Quand on examine globalement la situation, on constate une méfiance grandissante au sein de la population canadienne et des parlementaires. J'espère que c'est une situation qu'on cherche à éviter.
    Il y a deux éléments que j'aimerais examiner plus à fond. Vous dites que le premier ministre et vous avez seulement été informés de la situation il y a deux ou trois semaines. Vous dites aussi que vous avez renforcé le processus par lequel les renseignements sont reçus et examinés, ainsi que la manière dont les conseils sont donnés.
    Êtes-vous réellement en train de nous dire que le processus était défaillant et que vous avez réglé le problème en deux ou trois semaines? C'est ce que j'entends, mais je ne comprends pas. Pouvez-vous m'expliquer comment c'est possible?
    Cela n'a aucun sens. Si le problème était aussi facile à régler, pourquoi n'a‑t‑il pas été réglé plus tôt? Pourquoi sommes-nous ici aujourd'hui?
    Si vous pouviez me donner une explication, cela m'aiderait beaucoup à comprendre.
    Je le répète, en 2021, je n'occupais pas mon poste actuel; j'étais sous-ministre à la Défense nationale. En juillet 2021, ma préoccupation principale était l'Afghanistan. Je ne lisais pas les renseignements sur l'ingérence étrangère. Comme je l'ai déjà dit, tout le monde reçoit un dossier de lecture différent, en fonction des enjeux qui lui sont pertinents.
    À titre de conseillère à la sécurité nationale et au renseignement, je dois manifestement avoir une plus grande vue d'ensemble et être mise au courant d'une plus vaste gamme de renseignements que dans le passé.
    Ce que mes prédécesseurs ont fait... Ils témoigneront devant le Comité. C'est avec eux que vous devrez en parler.
     Même avant que les enjeux relatifs à l'ingérence étrangère se retrouvent dans les médias et deviennent un sujet de discussion prioritaire, j'ai remarqué que nous recueillons et évaluons beaucoup de renseignements. Ce qui manque, ce sont les conseils donnés au gouvernement. Les organismes du renseignement ne fournissent pas de conseils. Ce sont les sous-ministres qui donnent des conseils aux ministres, à la greffière du Conseil privé et au premier ministre. Je voyais là une lacune. Par exemple, nous traitions les renseignements que nous recevions sur l'Ukraine d'une façon différente. Les renseignements étaient évalués suivant une méthode semblable à celle que j'ai décrite: dans le cas de l'Ukraine, les sous-ministres et le chef d'état-major de la défense échangeaient sur la signification des renseignements et sur les mesures que le gouvernement devrait prendre à leur égard. L'élément le plus important du renseignement, c'est ce qu'on en fait.
    Parfois, la réponse, c'est « rien » parce qu'il faut continuer à collecter des éléments de renseignement et poursuivre les recherches. D'autres fois...
    Je suis désolée. Il ne me reste que quelques minutes.
    Je suppose que votre réponse est que oui, nous avons réglé le problème. Je suis très intéressée de voir comment cela fonctionne. Je ne sais pas si vous allez nous le dire aussi clairement que je l'espérais.
    Vous ne cessez de répéter que vous pouvez rendre compte... et j'ai entendu dire que les personnes qui ont déjà assumé ce rôle seront là pour nous.
    Ma question pour vous est donc la suivante. Lorsque vous êtes entrée en fonction, avez-vous eu des discussions avec votre prédécesseur? Dans le cadre de ces discussions, avez-vous abordé la question des renseignements et l'incidence que cela pourrait avoir sur les parlementaires? On ne vous a exprimé aucune préoccupation. Êtes-vous arrivée avec une ardoise vierge, et tout à coup, les problèmes sont apparus?
    J'espère que vous serez en mesure de clarifier cela.
    Le directeur du SCRS m'a certainement parlé de l'ingérence étrangère, et pas seulement des menaces à l'encontre des parlementaires, mais de l'ingérence étrangère en général. Ce type d'activités menées par des adversaires dépasse largement le cadre des élections.
    Je comprends cela, mais nous parlons en fait d'une question de privilège, et je pense qu'il est important que nous soyons clairs sur ce point.
    Y a‑t‑il eu...? Là encore, on a l'impression que c'était un peu une surprise. Des courriels ont été envoyés aux ministres. Ils ne savaient pas comment les ouvrir.
    C'est tellement déroutant, mais les conséquences sont profondes. Cela crée un sentiment de méfiance. Je pense qu'en la matière, la perception est importante. Nous pouvons débattre longuement de la signification de telle ou telle chose, mais c'est la perception qui compte. Dans nos systèmes actuels, les parlementaires se sentent préoccupés par le fait qu'ils ne savent pas. Je me souviens d'avoir posé une question il y a plusieurs semaines où je disais que je pourrais très bien me promener dans la rue à faire mon travail de député, de candidat à une élection. Je pourrais être pris pour cible et personne ne me le dirait.
    Comment lutter contre une situation qu'on ignore qui nous arrive? Ce que j'essaie de comprendre, c'est comment on a laissé cela de côté. Comment se fait‑il que toutes ces choses se soient produites? Les médias en ont fait état. Nous pouvons discuter de la source de ces rapports et de leur origine, mais la vraie question pour moi est de savoir pourquoi cela n'a pas été considéré comme un problème.
    Pourquoi devons-nous être ici? Comment allons-nous régler le problème à l'avenir tout en rendant des comptes pour le passé?

  (1030)  

    Je pense que tout ce que vous dites est très important, et je ne suis pas en désaccord.
    Je ne dirais pas que les ministres sont incapables d'ouvrir leur courrier électronique. Le système de messagerie très secret signifie que nous leur faisons parvenir des courriels. C'est une responsabilité de la fonction publique.
    La transparence avec laquelle nous devons parler aux parlementaires est évidente. Je dirais que le SCRS a été limité par sa loi. Il n'est pas en mesure de communiquer tous ses renseignements, sauf dans le cadre d'une mesure officielle de réduction de la menace. Il utilise maintenant ces mesures de manière plus énergique que par le passé.
    Je vous remercie.
    M. Cooper est le prochain intervenant, suivi de M. Turnbull, Mme Gaudreau et Mme Blaney.
    On vous écoute, monsieur Cooper.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Thomas — par votre entremise, madame la présidente —, le 3 mai, deux jours après que le Globe and Mail nous a appris que le député Chong avait été la cible du régime de Pékin et que le SCRS était au courant de la situation, le premier ministre a dit aux journalistes que « le SCRS a déterminé que ce n'était pas quelque chose qui devait être communiqué à un niveau supérieur parce que ce n'était pas une préoccupation suffisamment importante ».
    Nous savons que cette déclaration n'est pas vraie. Pourquoi le premier ministre a‑t‑il dit cela?
    Au début de notre compréhension du scénario et des renseignements qui ont mené au document rédigé en juillet 2021, qui faisait référence à un député... Il ne faisait pas référence à M. Chong. Il était cependant question d'un député qui était ciblé. Nous ne savions pas que les renseignements sous-jacents avaient été transférés du SCRS dans le système et distribués. Il s'agissait d'une erreur pour ce qui est des renseignements fournis au premier ministre.
    L'avez-vous dit au premier ministre?
    Oui.
    Lui avez-vous expressément dit que la question n'avait pas été soulevée à un niveau supérieur?
    Je lui ai dit qu'il n'en avait pas été informé et que je ne savais pas ce qui avait quitté le SCRS.
    Eh bien, c'est très différent de ce que le premier ministre a dit. Il n'a pas dit qu'il n'avait pas été informé. Il n'a pas dit qu'il ne savait pas où l'information était allée. Il a déclaré très précisément que la question n'avait pas été soulevée. Il a dit plus que cela.
    Encore une fois, pourquoi n'a‑t‑il pas expliqué ce qui s'est réellement passé? Pourquoi a‑t‑il induit les Canadiens en erreur?
    Madame la présidente, je ne pense pas que ce soit une question appropriée.
    J'estime que c'est une question appropriée. Les Canadiens ont le droit de savoir pourquoi le premier ministre ferait une déclaration de la sorte, puisque cela s'est révélé totalement faux.
    Je pense que le premier ministre a tenu compte des renseignements dont il disposait à l'époque. Il nous a dit de continuer de travailler. Il a organisé une réunion avec M. Chong, et nous avons mis M. Chong au courant de la situation.
    Oui, et soudainement, 24 heures plus tard, vous avez téléphoné au député Chong et l'avez informé — contrairement à ce que le premier ministre avait dit seulement 24 heures plus tôt — que ce n'était pas le cas et que la note d'information avait en fait été transmise au Bureau du Conseil privé, plus précisément au conseiller à la sécurité nationale du premier ministre de l'époque.
    Que s'est‑il passé entre la déclaration affirmative du premier ministre selon laquelle la question n'avait pas été soulevée à un haut niveau et votre appel téléphonique à M. Chong, où vous avez dit que c'était exactement le contraire de ce que le premier ministre a dit?
    Madame la présidente, M. Chong, durant la séance d'information, m'a demandé si la note avait été distribuée et qui l'avait reçue. Je lui ai répondu que je ne le savais pas encore. Après examen, j'ai fourni des informations au premier ministre et j'ai rappelé M. Chong, comme je l'avais promis.

  (1035)  

    Qu'avez-vous appris, et comment?
    Nous avons retracé toutes les adresses. Nous avons découvert à qui les renseignements avaient été envoyés et avons essayé de déterminer pourquoi il n'avait pas été informé.
    Après avoir retracé toutes les adresses, vous avez découvert que les renseignements avaient été envoyés au conseiller à la sécurité nationale, n'est‑ce pas?
    Effectivement.
    Qui d'autre les ont reçus?
    Comme je l'ai dit à M. Chong, ils ont été envoyés à plusieurs sous-ministres. Il incombe aux ministres adjoints d'informer ces ministres.
    Ils ont été envoyés à plusieurs sous-ministres. Lesquels?
    C'était le sous-ministre de la Sécurité publique, le sous-ministre des Affaires étrangères et le sous-ministre de la Défense nationale.
    Ils ont été envoyés à trois sous-ministres, ainsi qu'au conseiller à la sécurité nationale du premier ministre.
    C'est exact.
    C'est survenu en 2021...
    Oui.
    ... et cela a mené nulle part.
    C'est exact.
    Voulez-vous que les Canadiens croient cela?
    Madame la présidente, je ne pense pas que l'intégrité de mes déclarations et de ce que j'ai dit à M. Chong soient remis en question. Il est absolument certain que la note a été distribuée et qu'elle n'a pas été communiquée au premier ministre.
    A‑t-elle été distribuée à des ministres?
    Pas que je sache.
    Eh bien, vous étiez sous-ministre.
    Je l'étais. J'étais en congé en juillet 2021 quand la note a été envoyée à mon bureau. À mon retour, je me suis concentrée sur l'Afghanistan. On ne m'a pas remis la note.
    Qui l'a reçue à votre bureau?
    Personne, c'était...
    Elle est tombée dans un trou noir.
    C'est exact.
    Est‑ce votre réponse?
    Je n'ai pas été informée. Je vous ai dit qu'il y avait une faille dans le processus. Nous l'avons corrigée.
    Une énorme faille.
    Je vais prendre une minute, car je pense que nous nous en tirons plutôt bien, mais il y a cet échange de questions et de réponses.
    Je pense que nous avons invité un témoin ici aujourd'hui qui assume un rôle très important, du moins pour moi. Madame Thomas, votre temps et votre présence ici signifient beaucoup pour moi et, je pense, pour la plupart des membres.
    Je dirais que, lorsque nous posons une question et que nous disons que nous allons donner du temps aux témoins pour répondre, nous leur accordons du temps pour répondre; nous ne fournissons pas la réponse pour eux.
    À ma connaissance, monsieur Cooper, vous n'assumez pas le rôle qu'occupe Mme Thomas, et elle est ici aujourd'hui pour nous fournir les renseignements que nous lui avons demandés.
    Madame la présidente, je respecte Mme Thomas, mais elle occupe une fonction très importante, et nous sommes saisis d'un enjeu très important. Je pose des questions sérieuses, et je pense que c'est tout à fait approprié.
    Je pense que vous devez la laisser répondre; vous ne devez pas fournir les réponses pour elle.
    Je vous remercie.
    Monsieur Turnbull, la parole est à vous.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, madame Thomas, d'être ici encore une fois aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants de participer à cette importante étude qui est en cours.
    J'ai de nombreuses questions, mais avant de les poser, je veux clarifier un point. Ce que vous avez dit jusqu'à présent, c'est qu'il y a une nouvelle directive du premier ministre qui mène à fournir des renseignements plus exhaustifs aux députés lorsque leur famille et eux sont menacés. On dirait qu'il y a un changement dans le processus. Je répète ce que vous avez dit, si j'ai bien compris.
    Vous informez maintenant les députés de ces menaces, qu'elles soient crédibles ou non, que les renseignements aient été vérifiés ou non, qu'ils soient complets ou non et qu'elles nécessitent une action de leur part ou de la part de quelqu'un d'autre. Est‑ce exact?
    Oui, c'est l'approche que nous essayons d'adopter. Elle nécessite une certaine confiance, car les enquêtes en cours concernant certains de ces renseignements signifient que les sources peuvent être compromises. Nous espérons donc que lorsque les renseignements sont communiqués, ils ne sont pas ensuite rendus publics par le député.
    Il y a une responsabilité associée à la communication de ce type de renseignements et un niveau de confiance que vous soulignez et qui est important, et je suis d'accord. La divulgation de renseignements s'accompagne d'une responsabilité, et je pense qu'il s'agit d'une responsabilité très importante lorsqu'il est question de sécurité nationale.
    Je sais aussi que les députés seraient reconnaissants de recevoir ces renseignements — je sais que je le serais si j'étais à la place de Michael Chong — et je pense que vous l'avez souligné.
    En revanche, si les renseignements et les menaces ne sont pas crédibles, ne craignez-vous pas que les députés se sentent menacés dans une situation qui n'a pas été corroborée? En fait, vous les informez d'une menace qui n'est pas réelle et qui pourrait avoir une incidence psychologique et émotionnelle sur eux et sur la façon dont ils font leur travail.

  (1040)  

    C'est un point très important. Je pense qu'il faudrait clarifier le terme « menace ». Le fait qu'un gouvernement étranger parle d'un député en particulier ne signifie pas forcément qu'il y a une menace contre lui, et je pense que l'élément critique ici sera la manière dont le SCRS transmettra l'information.
    Je pense qu'au fur et à mesure que nous adopterons un processus plus transparent, cela deviendra moins effrayant et moins inquiétant. Il y aura des situations, comme nous l'avons appris avec M. Chong, par exemple, où c'est plus sérieux, mais pour la majorité des parlementaires, s'il y a une note à leur intention, j'espère que, grâce à la pratique, à la transparence et au fait que ce soit plus courant — certainement pas un événement quotidien, mais une communication d'information plus fréquente —, si nous la remettons à un député, nous serons en mesure de réduire le niveau d'anxiété que ces renseignements suscitent.
    Je vous remercie.
    Nous avons pris connaissance du rapport de M. Johnston... et vous avez pleinement reconnu que la coordination de l'information et de la communication est un défi et qu'il y a des lacunes, et que vous avez déjà pris des mesures pour y remédier en mettant en oeuvre de nouveaux processus, ce dont je suis reconnaissant.
    Je comprends également, d'après votre autre témoignage et les questions de Mme Romanado, qu'il y a de grandes quantités de renseignements, que de nombreuses agences sont en cause, qu'il y un entonnoir d'informations assez large et que tous les renseignements ne vous sont pas transmis — le SCRS a beaucoup de renseignements qu'il peut garder pendant un certain temps.
    Je me demande comment vous percevez la relation de votre bureau avec le Cabinet du premier ministre et comment les renseignements sont idéalement censés être transmis au Cabinet du premier ministre.
    Je pense que c'est un élément important de ce processus. Le premier ministre peut recevoir des renseignements par l'entremise de la trousse de documents à lire sur les questions qu'il suit. Ces renseignements sont transmis au Cabinet du premier ministre. Ils lui sont communiqués. Comme Katie Telford l'a dit, les renseignements ne lui sont pas cachés. S'il y a quelque chose que j'estime qu'il doit voir, qu'un collègue sous-ministre ou un dirigeant d'une agence pense qu'il doit voir ou que le greffier du Conseil privé estime qu'il doit voir, nous veillons à ce que ces renseignements lui soient communiqués par l'entremise de son bureau.
    Je vous remercie.
    La prochaine intervenante est Mme Gaudreau.
    Est‑ce la fin de mon temps de parole, madame la présidente?
    Oui, monsieur Turnbull. Il a passé vite.
    En effet.
    Merci, madame Thomas.

[Français]

     Madame Gaudreau, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais revenir à la culture du renseignement au Canada, plus précisément au sein du bureau du premier ministre.
    Les gens à l'extérieur du bureau du premier ministre qui ont une connaissance fine sont-ils en mesure de comprendre toutes les informations brutes qu'il faut trier pour arriver à déterminer ce qui est vraiment grave? J'aimerais le savoir, car j'ai l'impression qu'on est dans un entre-deux, qu'on découvre qu'il y avait un espace gravement défaillant et qu'on tente de corriger le tir.
    J'aimerais vous entendre à cet égard.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Je pense qu'il convient de souligner que les hauts fonctionnaires du Cabinet du premier ministre ont des trousses de documents à lire chaque jour, semblables aux miennes, généralement sur la géopolitique — où nos troupes sont stationnées, les points d'intérêt en ce qui concerne le travail international du premier ministre —, à l'instar de tous les dirigeants du G7.
    En ce qui concerne plus précisément l'ingérence étrangère, ce qui ne s'est pas produit et ce qui se passe maintenant, c'est que les renseignements non vérifiés, ou les sources anonymes ou les personnes anonymes, sont désormais communiqués plus régulièrement.
    Le Cabinet du premier ministre reçoit des trousses de documents à lire. Elles sont préparées par les agents des relations avec les clients. C'est le même processus que tout le monde suit. Ils reçoivent également des notes d'information hebdomadaires d'un groupe qui travaille pour moi — le Secrétariat de l'évaluation du renseignement au BCP. Soit ils recevront une note d'information hebdomadaire sur une série d'enjeux, soit ils demanderont une trousse de documents sur un enjeu précis.

  (1045)  

[Français]

    Il ne reste que quelques secondes à mon temps de parole.
     Pourquoi le tri de cette information n'était-il pas fait systématiquement auparavant, alors qu'on va le faire dorénavant?

[Traduction]

    Encore une fois, je ne peux pas avancer d'hypothèses sur la pratique antérieure, et vous entendrez les témoignages de mes prédécesseurs.
    À mon avis et conformément à la directive du premier ministre, il veut recevoir des renseignements, point final, qu'ils soient crédibles ou non, si bien qu'il les obtiendra.
    Je vous remercie.
    Mme Blaney est la prochaine intervenante.
    Merci, madame la présidente.
    Je veux revenir à la discussion que nous avons eue à propos du fait que vous avez donné l'exemple d'un congé d'un mois au cours duquel des renseignements ont été fournis, mais personne n'était là pour les lire, si bien qu'ils sont tombés dans un trou noir. Je me demande si vous pouvez nous expliquer si cela a été corrigé, s'il y a un processus en place pour remédier à cette situation, mais aussi si ce n'est pas une question de sécurité en soi. N'est‑ce pas une situation qui vous a inquiétée lorsque vous êtes revenue après un certain temps d'absence et que vous avez constaté qu'il y a ces renseignements...?
    Je comprends ce que vous dites. Il se passe des choses importantes dans le monde entier et il faut réagir, et l'Afghanistan était un sujet d'actualité, mais on ne sait pas quels sont les sujets d'actualité dans les documents restants qui n'ont pas été lus, alors j'essaie juste de comprendre... N'y avait‑il pas là quelque chose de préoccupant pour la sécurité? Encore une fois...

[Français]

     Madame la présidente, j'invoque le Règlement.
    Je suis désolée, mais je n'ai plus accès à l'interprétation.

[Traduction]

    Merci.
    Est‑ce que cela fonctionne maintenant? M'entendez-vous, maintenant? Cela fonctionne à nouveau.
    Je pense qu'il est juste que Mme Blaney recommence du début. Merci.
    Eh bien, j'espère que vous avez compris la majeure partie de la question, mais je sais que mon amie n'a pas entendu, alors je vais la répéter.
    J'essaie simplement d'avoir des éclaircissements. Dans votre témoignage, vous avez dit que vous étiez en congé pendant un mois. Pendant ce temps, des renseignements ont été transmis, mais sont en quelque sorte tombés dans un trou noir. Je suis consciente qu'à votre retour, il se passait dans le monde des choses importantes qui ont évidemment été portées à votre attention.
    Ma préoccupation est la suivante: lorsque des choses sont laissées derrière, cela ne risque‑t‑il pas de devenir une question de sécurité nationale? Si personne ne lit ces renseignements, si le groupe ne les lit pas et que personne ne peut attirer l'attention sur ces choses, je trouve cela préoccupant.
    J'aimerais aussi savoir si cela a été corrigé ou est en voie de l'être. Si oui, comment?
    Je pense que c'est une question très importante.
    Premièrement, comme je l'ai dit plus tôt, il ne devrait pas y avoir de chaînon manquant en ce qui concerne le renseignement. Voilà pourquoi les renseignements critiques sont maintenant transmis aux sous-ministres pour qu'ils les analysent et présentent des conseils à cet égard.
    En juillet 2021, l'élément de renseignement en question comportait la liste des personnes autorisées à le lire, à savoir, dans ce cas, uniquement la sous-ministre de la Défense. Ce n'est pas la même chose que la mention « lecture obligatoire ». Il arrive, pour certains éléments de renseignement, que les collecteurs — généralement le SCRS ou le CST, mais parfois la GRC ou le Commandement du renseignement des Forces canadiennes, COMRENSFC — m'indiquent que je dois les lire, puis l'information m'est présentée.
    Cet élément de renseignement précis était moins pertinent pour mon travail de sous-ministre de la Défense. J'étais la seule au ministère à pouvoir le lire, mais il n'était pas nécessaire que je le lise pour exercer mes fonctions de sous-ministre de la Défense. Il y a une différence.
    Donc, ce que je comprends de vos propos, c'est que des choses peuvent se perdre. C'est ce qui me préoccupe. Cela me ramène encore une fois au même point. Nous discutons d'une question de privilège concernant un membre de cet endroit qui ignorait ce qui se passait. Voilà comment je perçois la chose, essentiellement. Il y a d'autres noms qui s'ajoutent à cette liste.
    Puisque ce n'était pas pertinent pour vous, où est le mécanisme visant à s'assurer que rien ne passe entre les failles du filet? Ce que j'entends, encore une fois, c'est qu'il y a un trou noir. Si personne n'indique que quelque chose doit être lu, la situation va perdurer. Il est à espérer qu'un jour, quelqu'un découvrira ce qu'il en est.
    Merci.
    Ce n'est pas exactement ce que j'ai dit. J'ai dit que nous avons réglé ce problème pour l'avenir. Quant aux éléments de renseignements qui concernent des parlementaires... Le nom de M. Chong ne figurait pas dans celui de juillet. À l'avenir, toute référence à un parlementaire sera portée à l'attention des sous-ministres. L'information sera lue par moi ou par la personne qui me remplacera en mon absence, et par les autres sous-ministres. Elle fera l'objet de discussions et un plan d'action sera préparé en conséquence. Souvent, le député concerné en sera informé. Évidemment, les ministres et le premier ministre en seront informés, conformément à leurs instructions.

  (1050)  

    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Calkins, suivi de M. Fergus.
    Monsieur Calkins, la parole est à vous.
    Merci, madame la présidente. Par votre intermédiaire, je remercie Mme Thomas de sa présence aujourd'hui.
    J'aimerais parler un peu de Zhao Wei. Quand le premier ministre a‑t‑il été mis au courant que Zhao Wei était le diplomate accrédité du consulat chinois à Toronto qui était impliqué dans les activités d'ingérence étrangère?
    Je ne peux pas vous donner de date précise. Dans le cadre de l'analyse et de la discussion sur les renseignements concernant M. Chong, on a découvert qu'il y avait un individu en particulier. Il faudrait que je consulte mes notes pour vous donner la date exacte.
    Pourriez-vous transmettre ces renseignements au Comité après la réunion d'aujourd'hui?
    Je pourrais vous indiquer la date à laquelle j'en ai discuté. Je ne saurais dire si cela a fait l'objet de discussions précédemment.
    Merci.
    Nous savons que Zhao Wei ciblait un député en fonction et sa famille. Il espionnait des Canadiens d'origine chinoise.
    Le 12 mai 2023, le Globe and Mail rapportait que le SCRS a fourni au ministère des Affaires mondiales, dès 2020, des informations sur les activités de Zhao Wei. Selon ce même reportage, Dan Stanton, un ancien directeur du contre-espionnage au SCRS, a indiqué que cette information a été communiquée au Bureau du Conseil privé.
    Pourquoi le gouvernement a‑t‑il jugé pertinent d'expulser Zhao Wei seulement après que le Globe and Mail a rapporté que Zhao Wei ciblait M. Michael Chong et sa famille?
    Je pense qu'il vaudrait mieux poser cette question à Affaires mondiales Canada.
    Il me semble qu'il s'agissait surtout de limiter les dégâts sur le plan politique. J'ai beaucoup de mal à croire, madame Thomas — et vous pourrez peut-être nous éclairer à ce sujet — qu'un seul diplomate accrédité de Pékin agit actuellement de cette façon. Pouvez-vous dire au Comité si, à votre connaissance, d'autres diplomates agissent ainsi?
    Je ne pense pas pouvoir aborder la question sur cette tribune publique.
    Les postes de police illégaux... Le gouvernement a également affirmé... Nous avons déjà entendu M. Cooper parler d'une affirmation qui a été faite par le premier ministre et qui n'était tout simplement pas vraie, comme nous l'avons appris le lendemain. Il semble avoir déclaré qu'il savait que l'information n'avait pas été communiquée aux échelons supérieurs, puis il a essayé de faire croire aux Canadiens qu'en fait, il n'était pas au courant. Il a fait une déclaration très précise sur quelque chose, puis le lendemain, alors que cela s'était révélé faux, il a déclaré pour se défendre qu'il n'était pas au courant.
    On voit exactement la même chose dans le cas des postes de police illégaux. Le gouvernement a dit qu'ils ont été fermés. Lors de sa comparution au Comité, le ministre de la Sécurité publique a indiqué que les postes de police sont fermés. Presque immédiatement après cette déclaration, nous avons appris qu'il reste deux postes de police clandestins de Pékin au Canada.
    Vous êtes conseillère à la sécurité nationale. Combien de postes de police illégaux sont toujours en activité au Canada? Pouvez-vous nous le dire? Le gouvernement refuse de nous le dire.
    La GRC enquête de façon continue sur ces postes de police. Nous savons qu'il y en a deux à Montréal, et des mesures sont prises pour faire cesser leurs activités. Malheureusement, ce ne sont pas des postes de police, et les individus qui y travaillent et assurent leur fonctionnement sont souvent des citoyens canadiens. Ce qu'il faut faire, c'est mettre fin à leurs activités.
    S'ils mènent des opérations pour le compte du Front uni, qu'ils emploient des citoyens canadiens ou non... Êtes-vous en train de dire qu'en raison des individus qu'ils emploient pour ces activités, ils n'exploitent pas un poste de police clandestin au Canada?
    Je dis que parfois, les gens se livrent à ces activités à leur insu ou sont contraints ou forcés de le faire.
    Est‑ce parfois le cas, ou est‑ce vraiment ce qui se passe? Je ne veux pas vous interrompre, mais est‑ce vraiment ce qui se passe, madame Thomas?
    Chaque situation est différente. Il n'y a pas de modèle unique.
    Les outils utilisés par la GRC pour fermer les postes de police et réduire leur incidence et leur crédibilité varient selon la situation et le contexte. Il serait utile de pouvoir procéder à des arrestations à cet égard, et ces enquêtes sont en cours à la GRC.

  (1055)  

    Au début de votre présentation, vous avez fait une déclaration — et nous pouvons nous référer au document préparé par le ministre de la Sécurité publique — concernant un changement de directive. La directive indique maintenant que les parlementaires doivent être informés de tout renseignement relatif à l'ingérence étrangère dont ils devraient être au courant. Vous n'avez toutefois pas parlé des partis politiques et de l'infiltration des partis politiques. Je ne vois aucune directive du gouvernement à cet égard. Y aura‑t‑il — à moins que je ne sois tout simplement pas au courant — une directive selon laquelle les partis politiques seront informés de toute infiltration dans leurs processus de nomination ou leurs mécanismes de financement?
    Je pense que la question des mécanismes de financement relève d'Élections Canada et non de la conseillère à la sécurité nationale et du comité de la sécurité.
    Élections Canada obtiendrait ces renseignements de vous...
    Je suis désolée. Le temps est...
    ... n'est‑ce pas, madame Thomas?
    Il faut que cela mène à des mesures, afin qu'on puisse faire quelque chose.
    Quant au processus de nomination, il s'agit d'un problème distinct sur lequel il faut se pencher, et je pense que des discussions importantes s'imposent avec les partis. Dans un premier temps, nous avons mis en place le processus d'analyse des élections partielles, une nouvelle mesure qui vise à assurer l'intégrité des élections partielles.
    Merci.
    Monsieur Fergus, la parole est à vous.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Thomas, je vous remercie de votre présence aujourd'hui et de votre service à titre de conseillère à la sécurité nationale et au renseignement, et, auparavant, à titre de sous-ministre de la Défense nationale.
    Selon votre témoignage d'aujourd'hui et des témoignages précédents, on retient que tout le monde s'entend pour dire que la présentation d'informations et de renseignements partiels — avec multitude de mises en garde et d'avertissements, etc. — ne raconte parfois qu'une partie de l'histoire, et que cela peut même être erroné. Comment peut‑on brosser un tableau complet pour évaluer les informations que nous recevons, il est vrai, de manière fragmentaire?
    C'est une question très importante.
    Comme je l'ai indiqué, le SCRS et le CST détiennent d'importants fonds de renseignements dont la majeure partie, de loin, n'est pas communiquée à des fonctionnaires comme moi. Au fil du temps, ces organismes collectent des renseignements de façon continue par des techniques qui doivent demeurer très sécurisées afin de protéger à la fois la méthodologie et, parfois, les individus. Souvent, l'action découlant d'un élément de renseignement est simplement de continuer à collecter des renseignements.
    Le SCRS a un processus d'analyse pour déterminer ce qui fera l'objet de divulgation et ce qui fera l'objet d'une enquête continue ou sera simplement conservé. Je pense qu'il est juste de dire que l'on vise à divulguer des éléments pertinents dans un contexte géopolitique donné ou pour d'autres enquêtes et préoccupations du gouvernement. Cela dit, c'est un art et non une science.
    Je suis féru de politique publique. À partir de maintenant, vous informerez le ministre de la Sécurité publique et le premier ministre de tout renseignement concernant un député, ou un sénateur, j'imagine. Ces renseignements, par leur nature même, seront partiels ou incomplets.
    Lorsque vous viendrez me voir pour me présenter des renseignements que vous avez recueillis, j'aurai beaucoup de questions. Je me demande si vous ferez les mêmes mises en garde comme celles que vous feriez habituellement à tout parlementaire, en précisant que vous avez connaissance de certaines choses, mais en vous assurant que je comprends que ces renseignements sont fondés sur un élément d'information — peut-être deux — que vous ne pouvez ni confirmer ni évaluer, et que vous n'avez pas un portrait complet. Est‑ce là le genre de séance d'information que recevront les députés et les sénateurs?
    Oui, il s'agit d'un élément essentiel dont on doit discuter. Une transparence accrue peut augmenter le degré d'anxiété, mais j'espère que nous parviendrons à normaliser le genre de séances d'information offertes aux parlementaires, qu'il s'agisse de séances d'information à l'intention des caucus ou de l'ensemble des parlementaires ou simplement de séances d'information individuelles sur des renseignements qui ont été recueillis. Nous comptons sur les parlementaires pour préserver la confidentialité de ces renseignements afin que les enquêtes puissent se poursuivre.
    C'est beaucoup demander. Comme nous l'avons vu depuis que ces éléments d'information partiels se sont retrouvés dans les médias, certains prennent cela pour paroles d'évangile.

  (1100)  

    La transparence comporte certainement des risques, mais il est encore plus risqué de ne pas parler de l'ingérence étrangère.
    Examinons la question d'un autre angle. Pouvez-vous énumérer certains des obstacles systémiques qui empêchent l'échange fluide de renseignements entre les organismes et les acteurs? Quels freins et contrepoids seront nécessaires à l'avenir? Comment pouvons-nous mieux rationaliser la collecte et l'échange de renseignements à l'avenir?
    Pour ce qui est de la collecte de renseignements, je pense qu'il est important d'obtenir les observations des organismes du renseignement plutôt que les miennes. La collecte de renseignements est un travail difficile et très technique. Les gens se mettent en danger, et il est primordial, pour la sécurité du Canada, qu'ils puissent continuer à faire ce travail.
    Quant à l'analyse et aux conseils qui sont donnés en fonction des renseignements recueillis pour protéger la sécurité nationale du Canada, protéger les gens et permettre aux enquêtes de se poursuivre, je pense que certains processus que nous avons établis seront utiles et contribueront à corriger certaines lacunes que nous avons constatées.
    Nous ne comptons pas en rester là. Je vais retenir les services d'experts en sécurité pour examiner notre processus et nous conseiller sur les façons de l'améliorer davantage. Je travaille certainement avec mes collègues du Groupe des cinq pour améliorer notre processus, en fonction de leurs expériences.
    Merci, madame Thomas.
    Merci, madame la présidente.
    Merci.
    Madame Thomas, nous commençons la deuxième heure. Avez-vous besoin d'une pause? De notre côté, nous avons au moins l'occasion de nous lever entre les questions.
    Vous pouvez continuer. C'est parfait. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, nous vous l'apporterons après la deuxième heure.
    Nous poursuivons avec des interventions de six minutes, ce qui est mieux, à mon avis, pour que tous puissent tirer parti le plus possible de leur temps ici.
    Nous commencerons par M. Cooper, suivi de Mme Sahota, Mme Gaudreau et Mme Blaney.
    Monsieur Cooper, vous avez six minutes, par l'intermédiaire de la présidence.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Madame Thomas — par votre entremise, madame la présidente —, veuillez me corriger si certains de mes propos sont erronés. Ce que je comprends, c'est que la note de service du Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, du 20 juillet 2021 qui dressait la liste des députés ciblés par un diplomate de Pékin — sur laquelle figurait Michael Chong — vous a été envoyée, en votre qualité de sous-ministre de la Défense nationale de l'époque. Elle était ultra confidentielle et destinée à vous seulement. En d'autres mots, aucun autre employé de votre ministère n'avait l'autorisation de lire cette note de service, mais vous étiez en vacances.
    Est‑ce exact?
    Oui.
    D'accord.
    On peut présumer que vous êtes revenue de vacances. Qu'est‑il arrivé à la note de service?
    Elle a été détruite en vertu des processus de destruction. Elle n'est pas restée sur un bureau, ce qui aurait représenté un risque. Si elle avait été pertinente aux activités du ministère de la Défense nationale, ou s'il s'était agi d'information à fournir au ministre de la Défense nationale de l'époque, quelqu'un d'autre que moi au ministère de la Défense nationale l'aurait lue et aurait pris des mesures.
    D'accord. La note de service a été détruite avant votre retour. Elle a été envoyée à la personne qui était à l'époque le conseiller à la sécurité nationale et au renseignement du premier ministre.
    Qu'est‑il advenu de la note de service lorsqu'elle s'est retrouvée sur son bureau? S'est-elle encore une fois engouffrée dans un trou noir? Le savez-vous?
    Non. Comme je vous l'ai dit, je ne vais pas me prononcer sur ce qui est arrivé à l'époque de mes prédécesseurs.
    Nous savons que, pour différentes raisons, ce n'est qu'à la mi‑août que la note de service a été présentée à un conseiller à la sécurité nationale et au renseignement, et je ne... Je le sais simplement en raison des pavés de documents à lire.
    Qui occupait le poste?
    À ce moment, David Morrison occupait le poste de façon intérimaire.
    Vous dites qu'il a fallu près d'un mois pour que la note de service se rende au Bureau du Conseil privé, ou BCP.
    Non. Elle est arrivée au BCP en juillet.
    Elle serait arrivée en juillet. À qui était-elle adressée, et qui était l'expéditeur? J'essaie simplement de comprendre où se rend ce type de correspondance. Il est question d'une note de service des plus importantes. L'information qui s'y trouvait a entraîné l'expulsion d'un diplomate du Canada.
    Où la note de service s'est-elle retrouvée?
    En août, elle a été présentée au conseiller à la sécurité nationale et au renseignement par intérim.

  (1105)  

    C'était en août. D'accord.
    Vous avez pris connaissance des registres d'expédition, n'est‑ce pas?
    Nous avons étudié le fil des événements.
    Pourriez-vous vous engager à fournir les registres d'expédition à ce comité, ou à tout le moins à...
    Je ne suis pas certaine que je les appellerais des « registres d'expédition. » Nous fournirons ce que nous avons.
    J'aimerais savoir où la note de service a été envoyée, à qui, quand, à quelles dates...
    D'accord.
    Je vous en remercie.
    Avez-vous accès au réseau de courriels très secret? Avez-vous des identifiants de connexion?
    J'ai des identifiants de connexion jusqu'au niveau secret. Tout ce qui est très secret m'est présenté.
    Jugez-vous qu'il est approprié que, parce qu'il n'avait pas ses identifiants de connexion, le ministre de la Sécurité publique de l'époque, Bill Blair, n'ait pas vu la note d'avertissement du SCRS envoyée en mai 2021 et qui indiquait que Michael Chong était la cible de Pékin?
    Croyez-vous que c'est acceptable?
    À vrai dire, je ne crois pas que cela correspond à la réalité.
    Quelle est la réalité?
    Le ministre Blair aurait reçu un pavé de documents à lire.
    Je ne peux me prononcer sur ce qui s'est passé pendant cette période au ministère de la Sécurité publique. Il vous faudra discuter avec les fonctionnaires qui y travaillaient à l'époque.
    Le ministre Blair ne se promène pas tout bonnement avec un portable contenant des communications secrètes pour s'y connecter. Aucun ministre n'agit ainsi. Nous leur donnons l'information dont ils ont besoin pour qu'ils la lisent.
    À l'époque de la note de service de juillet 2021 concernant les députés ciblés par Pékin, Mike MacDonald était le directeur par intérim. Est‑ce exact?
    Oui.
    Jeudi dernier, une possibilité d'emploi a été affichée pour le poste de Mike MacDonald au bureau de la conseillère à la sécurité nationale.
    Pourquoi a‑t‑il quitté votre bureau?
    Après avoir occupé son poste — qui est un emploi qui accapare le titulaire 24 heures sur 24, sept jours sur sept — pendant trois ans, Mike MacDonald le quitte pour saisir une autre occasion dans le monde de la sécurité nationale.
    D'accord.
    Convenez-vous que l'omission d'avoir alerté Michael Chong que lui et sa famille étaient la cible du régime de Pékin constituait un manquement grave? Concéderez-vous au moins ce point?
    Je reconnais que M. Chong aurait dû être avisé.
    Au bout du compte, qui est responsable de ce manquement?
    On ne peut pointer du doigt une personne en particulier. Il n'y a pas de point de défaillance unique. Je l'ai déjà dit.
    Reconnaissez-vous que le premier ministre est responsable de l'appareil gouvernemental?
    Oui.
    Reconnaissez-vous que le premier ministre détient des responsabilités particulières en matière de sécurité nationale?
    Oui.
    Reconnaissez-vous que le premier ministre détient des responsabilités particulières entourant la relation entre le gouvernement et le Parlement?
    Oui.
    Dans ce cas, vous devez reconnaître que ce manquement repose, au bout du compte, sur le premier ministre. Ne le croyez-vous pas?
    Le premier ministre ne peut informer les parlementaires d'enjeux dont il n'est pas mis au courant.
    D'accord, merci.
    Merci.
    Madame Sahota, vous disposez de six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je m'adresse au témoin par votre entremise: je suis certaine qu'elle a parcouru le rapport du rapporteur spécial indépendant. Dans son rapport, le rapporteur spécial note, au sujet de l'ingérence étrangère: « Il y a eu trop d’attitudes affectées et de situation où on a préféré des slogans aux faits [...] »
    En votre qualité de fonctionnaire non partisane et la plus haut placée responsable des enjeux de sécurité nationale, croyez-vous que la polarisation à laquelle nous assistons actuellement à ce sujet a complexifié votre travail et celui de nos agences de sécurité?
    Je ne sais pas exactement comment je qualifierais la situation. Je crois que la nature partisane de la discussion en cours mine notre capacité à discuter d'ingérence étrangère de façon mature, comme un pays du G7 devrait le faire. J'espère que le travail de ce comité mettra en lumière la gravité de l'ingérence étrangère et les efforts nécessaires à l'avenir pour prémunir le Canada contre l'ingérence étrangère.
    Je vous remercie de cette réponse. Je vous suis reconnaissante de votre honnêteté.
    On s'est demandé à maintes reprises quel forum serait optimal pour cette question. Que l'on pense à une enquête indépendante, comme celle que vient de mener le rapporteur spécial, ou même à toute autre circonstance, la polarisation persiste à un point tel qu'il est difficile de trouver un forum qui en est exempt. Je trouve qu'il est ardu, même pour nous en tant que députés, de fouiller le sujet et de trouver un espace, comme vous l'avez dit, où nous pouvons en discuter de façon avertie.
    Le très honorable David Johnston a aussi écrit: « Le Canada a besoin d’une approche plus moderne en matière de sécurité nationale [...] » Nous venons d'en prendre conscience étant donné les défis que nous vivons.
    Souscrivez-vous à cette affirmation? Selon vous, quels types de changements devrions-nous apporter, mis à part ceux que vous avez mentionnés et qui ont été effectués récemment, dans les semaines précédant votre comparution?

  (1110)  

    J'ai décrit des changements qui ont été apportés au processus afin de garantir que les documents soient présentés aux décideurs pertinents. Ainsi, on pourra prendre les décisions qui s'imposent pour intervenir à la lumière du renseignement. Je crois également qu'il est temps, comme l'ont dit le ministre Mendicino et d'autres, que nous nous dotions d'un régime de transparence sur l'ingérence étrangère et que nous nous penchions sur des changements à la Loi sur la protection de l'information et au SCRS. La Loi sur le SCRS est entrée en vigueur avant l'arrivée d'Internet et avant la diffusion de l'information, avant la polarisation et avant la montée de la Chine telles que nous les connaissons aujourd'hui. Par conséquent, je crois qu'il est également temps de réfléchir à la façon de moderniser le SCRS afin d'être en mesure de réagir aux menaces modernes.
    Avez-vous des idées quant à la façon de nous moderniser? Quels changements précis pourraient être apportés à la loi, étant donné que les derniers remontent à un passé lointain?
    Certains éléments précis pourraient changer.
    Tout d'abord, en ce qui a trait au régime de transparence sur l'ingérence étrangère, il faut modifier le Code criminel pour ériger en infraction criminelle le fait de ne pas divulguer d'information. D'autres pays qui se sont dotés du même régime ont mis cette mesure en œuvre, ce qui a renforcé le pouvoir du régime.
    Du côté du SCRS, certains changements peuvent être apportés. Le SCRS ne peut transmettre d'information protégée aux autres ordres de gouvernement ou aux partis d'opposition. La règle était justifiée à l'époque où elle a été créée, mais je pense qu'elle n'est plus nécessaire. Ces intervenants en marge du gouvernement doivent être en mesure de discuter d'information classifiée.
    Il serait très utile que le SCRS ait un mécanisme pour communiquer cette information à un moment entre ses breffages défensifs — c'est ainsi qu'on appelle les séances où le SCRS informe de façon générale les parlementaires d'une menace — et les mesures de réduction de la menace, qui constituent un processus très formel qui a lieu quand une menace précise vise quelqu'un en particulier, par exemple.
    Il devrait y avoir un entre-deux pour permettre aux employés du SCRS de discuter de façon générale d'information protégée, classifiée, sans nécessairement en divulguer l'intégralité. Ils pourraient ainsi entrer un peu plus dans les détails.
    Les députés nous disent entre autres, après avoir discuté avec le SCRS: « Je ne comprends pas vraiment si je fais l'objet d'une menace en ce moment. » Le flou ne persiste pas parce que le SCRS ne veut pas transmettre d'information, mais plutôt parce qu'il peut seulement communiquer une partie limitée des renseignements. Pour cette raison, la modernisation de la Loi sur le SCRS serait extraordinairement utile.
    Votre réponse m'éclaire beaucoup. Je vous en suis reconnaissante et je crois que vos conseils permettront à ce comité de passer à l'action et de recommander des mesures que le gouvernement pourra appliquer.
    Je ne me rappelle plus si vous avez dit qu'il faudrait moderniser le rôle du conseiller à la sécurité nationale et au renseignement. Avez-vous des commentaires à ce sujet?
    Je ne pense pas être la personne la mieux placée pour analyser ce qu'il devrait advenir de ce poste. Dans d'autres pays, il se pourrait que ce poste soit assorti de plus de pouvoir. Le Bureau du Conseil privé convoque le personnel. Je ne donne pas d'instructions aux agences de sécurité, quoique nous leur en donnions un peu plus maintenant au sujet de la communication et de la diffusion et la gestion des documents.
    J'ai entendu M. Wernick dire que le mandat devrait durer cinq ans. Je ne crois pas que quiconque devrait occuper ce poste pendant cinq ans parce que, comme je le disais, c'est un emploi qui accapare le titulaire 24 heures sur 24, sept jours sur sept. De plus, il faut être un fonctionnaire chevronné pour l'occuper. Cela dit, je suis convaincue que des recommandations seraient très utiles.
    Nous vous remercions de votre service. Nous espérons que vous continuerez à bien vous porter pendant l'exercice de vos fonctions.
    Merci.
    Nous passons à Mme Gaudreau.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Madame Thomas, nous vous souhaitons surtout d'être présente le plus longtemps possible pour tous les changements que vous êtes en train d'apporter.
    Nous étudions le dossier de l'ingérence étrangère depuis le mois de novembre, au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, et je suis arrivée à trois conclusions. Plusieurs des témoins nous ont dit et confirmé que les seuils à atteindre pour que les cas d'ingérence soient signalés étaient beaucoup trop élevés. Ils nous ont dit que la culture du renseignement, dont nous avons parlé tantôt, était inexistante. En tout cas, il est évident qu'au Canada, ce n'est pas notre leitmotiv. Ils nous ont aussi dit que l'analyse du renseignement au sein des différents ministères et mécanismes était chaotique, ce dont nous avons parlé.
    Nous voulons faire la lumière là-dessus et légiférer pour préserver une démocratie légitime et fiable. Or nous apprenons ce matin qu'il y a un nouveau protocole et de nouvelles mesures, parce qu'on ne veut plus revivre ce qui est arrivé dans le passé. Nous l'apprenons parce que nous avons demandé à la témoin ici présente de comparaître.
     Je veux aussi parler de la culture du silence. Grâce à nos médias, qui nous écoutent, nous allons pouvoir informer les gens. C'est un fait, deux personnes sur trois au Canada pensent que le gouvernement chinois tente de s'ingérer dans notre processus électoral.
    Pensez-vous qu'il est normal que les parlementaires demandent une enquête publique indépendante pour vous permettre d'entériner tout le processus que vous êtes en train d'entreprendre et, finalement, pour rassurer la population?

  (1115)  

[Traduction]

    Il y a là de nombreuses questions, madame la présidente.
    Tout d'abord, notre seuil est potentiellement trop élevé. Il faut se pencher sur cette question. Je le répète: le SCRS est contraint par la loi. Je sais que le directeur de l'organisation vous fera part de son avis lorsqu'il comparaîtra devant vous.
    La culture dans la communauté du renseignement consiste à protéger l'information tout en continuant à en recueillir davantage. Je crois que nous serons plus en mesure de bien optimiser le renseignement lorsqu'on modifiera la Loi sur le SCRS, lorsqu'on collaborera, potentiellement, avec la GRC et lorsqu'on sera en mesure de transformer notre renseignement en preuves.
    Je ne qualifierais pas la situation de chaotique. Des esprits extraordinairement talentueux et capables d'excellentes réflexions analysent le renseignement au SCRS, au Centre de la sécurité des télécommunications Canada — ou CSTC —, au Bureau du Conseil privé et dans d'autres ministères. C'est à l'étape suivant l'analyse que nous devons parfaire notre travail et renforcer la clarté.
    Je reconnais que nous devons parler davantage de sécurité nationale. Nous devons le faire de façon transparente, claire et compréhensible en français, en anglais et dans d'autres langues. Nous ne réussissons pas à l'heure actuelle, parce que nous protégeons constamment l'information, ce qui m'amène à ma préoccupation entourant une enquête publique. Dans le cadre d'une enquête publique, je pourrais divulguer à peine plus d'information que ce que je vous ai communiqué aujourd'hui. La Loi sur la protection de l'information protège cette information. Il est essentiel de protéger les sources de renseignements. Il est primordial de protéger les techniques par lesquelles le renseignement est recueilli.
    Dans le cadre des audiences que M. Johnston a recommandées et qu'il entreprendra, il est vraiment important que les intervenants, les communautés des diasporas et vous obteniez des explications aussi ouvertes et transparentes que possible quant aux prochaines étapes.
    Selon moi, si une enquête a lieu, nous pourrions nous retrouver à examiner cette question plutôt qu'à apporter des changements. Je crois que nous avons en ce moment une occasion de modifier nos façons de faire. Ces changements favoriseraient grandement notre discussion sur la sécurité nationale et la compréhension des Canadiens sur les subtilités de la sécurité nationale.

[Français]

     Madame la présidente, je veux simplement préciser que, quand je parle de chaos, je parle vraiment de chaos. Je ne parle pas de la compétence des gens, mais d'un chaînon manquant, d'un vide ou d'une perte de documents pendant des vacances bien méritées, comme cela s'est produit pour notre témoin. Quand les gens entendent cela, ils se disent qu'il faut non seulement apporter des changements, mais il faut aussi que la population en général soit bien au courant de tout cela.
    Or, je suis une parlementaire, et je ne suis même pas au courant de ce qui se passe présentement. C'est pour cela que je lance un cri du cœur et que je dis qu'il est normal, pour nous, de penser qu'il faut aller jusqu'au bout et de demander une enquête publique et indépendante pour vraiment faire la lumière sur la situation. Quand je parle à mes concitoyens, ils me disent savoir ce qui se passera et que, au bout du compte, cela ne changera rien. Cela me trouble énormément. Il y aura des élections, et ce ne sera pas dans quatre ans. Cela me préoccupe beaucoup.
    Comme il ne me reste que quelques secondes, j'aimerais vous poser une question. Comme vous aurez droit à d'autres vacances prochainement, quel moyen allez-vous prendre pour vous assurer que cela sera sans conséquence?

  (1120)  

[Traduction]

    Comme je l'ai dit, si les renseignements qu'on m'a fait parvenir pendant mes vacances avaient été pertinents à notre travail en défense, des actions auraient été exécutées.
    Il y a une différence entre la mention « à lire » et « peut être lu, » et il importe vraiment de la saisir. Je me fais transparente lorsque je vous dis que je figurais sur cette liste en juillet 2021.
    Je crois qu'il est important que les Canadiens comprennent que les agences de sécurité et nos hauts fonctionnaires — au sein du Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignement visant les élections et au sein du groupe de cinq membres — accomplissent un travail critique pour garantir que les élections sont sûres et valides. Le groupe a aussi conclu qu'il n'y a pas...
    Je suis désolée, madame la présidente. Je vais conclure. Je dirai que les parlementaires détenant l'habilitation de sécurité au Secrétariat du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, ou CPSNR, ont accès à ces documents. Le CPSNR devrait être écouté et mis à contribution au profit de tous les parlementaires.
    Merci.
    Madame Blaney est la prochaine intervenante.
    Merci, madame la présidente.
    Vous avez mentionné tout à l'heure que M. Wernick a proposé que le gouvernement légifère le poste et vous avez ajouté juger qu'un mandat de cinq ans serait un peu trop long. Je comprends.
    Vous avez aussi dit que, dans d'autres pays, le rôle s'accompagne d'un peu plus de pouvoir. Il me semble que M. Wernick, à ce sujet, parlait d'une reddition de compte accrue, surtout pour la transmission et la réception d'information, qui semble faire défaut dans le système.
    En vous inspirant de la situation dans d'autres pays — et j'imagine que vous vous concentrez sur nos partenaires du Groupe des cinq — quels types de changements à ce rôle seraient appropriés pour nous à l'avenir?
    J'aimerais tout d'abord dire que je rends des comptes et que je prends ma reddition de compte très au sérieux. Si un manquement survient...
    Je suis désolée, mais j'aimerais vous interrompre. Pardonnez-moi. Je ne parle pas de votre reddition de compte.
    Je crois que M. Wernick disait que le fait de légiférer le poste impliquerait un processus formel de reddition de compte qui garantirait un suivi de l'information reçue et de la façon dont elle est reçue. Un des défis qui a nous a été très clairement décrit, dans votre témoignage et ceux d'autres témoins, est que l'information ne se rend pas toujours où elle est censée aller, ce qui entraîne le problème dont nous sommes saisis.
    Vous dites aussi que vous vous efforcez avec diligence à régler ce problème. Je veux exprimer clairement que je ne vous reproche rien personnellement par rapport à votre reddition de compte. Nous pourrions en discuter une autre fois.
    Ce que je cherche à savoir concrètement, c'est ce qui doit composer le rôle que vous occupez maintenant pour que la reddition de compte soit mesurable. J'ai l'impression que nous essayons en ce moment d'atteindre une cible mouvante plutôt que d'atteindre un objectif très clair et précis qui nous permettrait d'obtenir une reddition de compte fiable.
    J'espère avoir clarifié ma question.
    Oui, merci.
    Les sous-ministres doivent rendre des comptes à titre d'agents comptables au ministère. La situation est bien sûr différente au Bureau du Conseil privé, puisque le greffier est le fonctionnaire le plus haut placé. Dans mon rôle, j'estime qu'il serait utile de disposer d'une plus grande capacité à diriger au sein de la communauté de la sécurité nationale.
    Le Conseil privé fonctionne en vertu de la prérogative de la Couronne. Il y a toute une série de choses à examiner, et le greffier nous a demandé de le faire.
    J'ai écouté le témoignage de M. Wernick, mais je n'ai peut-être pas encore assez de recul pour en parler, puisque c'était il y a deux jours. Cela dit, je serais heureuse d'en discuter ultérieurement avec vous, lorsque nous aurons eu l'occasion d'explorer les diverses options pour ce poste.
    Je note que le premier ministre a annoncé hier la création du poste de conseiller adjoint à la sécurité nationale et au renseignement, qui nous permettra d'agir à l'échelle tactique et stratégique.

  (1125)  

    Merci.
    J'aimerais clarifier une chose. Vous avez dit dans vos remarques liminaires qu'il y aura une nouvelle équipe chargée de l'examen des renseignements et de l'octroi de conseils. Cela semble être l'une des lacunes à l'heure actuelle. On n'a pas nécessairement pu bénéficier de conseils.
    Je tente de mieux comprendre la structure. Est‑ce votre équipe? Allez-vous travailler avec plus de gens directement? Comment fonctionne cette relation? Je reviens à la façon d'évaluer la reddition de comptes.
    La situation n'est pas claire en raison de la façon dont on transmet l'information. Où va‑t‑elle, quand arrive‑t‑elle, qui la voit, pourquoi quelqu'un n'y a‑t‑il pas accès? Est‑ce que cela va fonctionner? L'équipe arrive‑t‑elle à faire son travail? Quel est votre rôle au sein de cette équipe?
    Il est vrai que la collecte, la diffusion et l'analyse de renseignements au Canada et avec nos alliés du Groupe des cinq demandent des efforts concertés. Diverses agences recueillent et analysent ces renseignements pour ensuite prendre des décisions à cet égard.
    Au sein de mon équipe, nous avons relevé les renseignements à transmettre aux sous-ministres aux fins de discussion et de conseil, afin qu'il n'y ait pas un seul point d'échec — comme je l'ai dit — lorsqu'une information n'a pas été transmise, et qu'une seule personne ne décide pas quoi faire avec cettedite information.
    Nous avons également donné récemment — aujourd'hui, en fait — des instructions aux agences et aux organismes de collecte de renseignements sur la manière dont les renseignements seront diffusés et enregistrés selon les gens qui y auront eu accès. Nous sommes en train de mettre en place un cadre de reddition de comptes pour les personnes désignées pour lire des documents de renseignements pour veiller à savoir si elles ont lu tel ou tel document. L'idée est d'avoir un rapport hebdomadaire qui nous dira qui a lu un document précis, et ce qui s'est passé avec ce document.
    Nous avons un système en place depuis des années; nous travaillons maintenant à le rendre plus structuré.
    Merci.
    L'une des choses que nous tentons de comprendre... Vous avez dit que les députés seront avisés immédiatement. Je le comprends. Ma question porte plutôt sur le seuil. Nous avons entendu à maintes reprises que le seuil est parfois beaucoup trop élevé et ne correspond pas vraiment aux besoins de nos systèmes.
    Les députés seront avisés immédiatement. Cela signifie‑t‑il que vous changez le seuil, ou cette mesure concerne‑t‑elle seulement l'enjeu dont il est question? Comment allez-vous vous y prendre pour éduquer les députés et les autres parlementaires à recevoir ces informations d'une manière qui leur soit utile?
    Je m'excuse si j'ai utilisé le mot « immédiatement ». Ils seront avisés, mais pas avant une période d'analyse pour déterminer quoi transmettre comme renseignement. Le seuil peut être trop élevé, et c'est une limite de la Loi sur le SCRS. Comme je l'ai dit, il y a du travail à faire à cet égard.
    Vous avez parlé d'éducation, et j'estime que c'est le point le plus important dans ce dossier. Nous n'informons pas assez les députés sur les enjeux de sécurité nationale, l'ingérence étrangère et les menaces qui pèsent contre eux.
    La CBC a publié un article sur la sécurité des ministres et des fonctionnaires hier. Les ministres sont loin d'être les seuls concernés.
    De plus, nous ne parlons pas suffisamment des menaces physiques proférées envers des députés.
    Nous sommes en train d'adopter une approche de transparence pour transmettre plus d'information et aborder ces enjeux différemment au Canada.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Berthold.

[Français]

    Il sera suivi de Mme Romanado.
     Merci, madame la présidente.
    Bonjour, madame Thomas.
    Madame Thomas, mon collègue, M. Cooper, vous a demandé tout à l'heure qui était ultimement responsable de l'échec du système relativement à l'information qui n'a pas été transmise à M. Chong. Vous avez répondu, si je ne me trompe pas, que

[Traduction]

    ... personne n'est responsable de cet échec.
    Est‑ce exact?
    Je suis désolée, mais je n'ai pas entendu la fin de votre question.
    Vous avez dit que personne n'est responsable de cet échec.
    Est‑ce exact?
    J'ai dit qu'il n'y avait pas eu « un seul point d'échec. »

[Français]

    J'ai déjà entendu les mêmes propos, madame Thomas.
    Je suis le député de la circonscription Mégantic—L'Érable, où a eu lieu la tragédie de Lac‑Mégantic, dans laquelle 47 personnes ont perdu la vie. Il y a eu des études et beaucoup d'analyses, et le Bureau de la sécurité des transports du Canada a établi qu'il y avait eu une foule d'erreurs de processus, mais personne n'a assumé la responsabilité finale de l'échec de tous ces systèmes.
    Comment en sommes-nous venus, dans ce pays, à manquer autant de courage et à ce que personne n'accepte d'assumer la responsabilité de ses échecs?

[Traduction]

    Si jamais de l'information ne se rendait pas au premier ministre pendant que je suis sa conseillère à la sécurité nationale et au renseignement, je considérerais avoir des comptes à rendre.
    Je ne vais pas parler de ce qui s'est passé auparavant, mais je peux parler de ce qui se passe pendant mon mandat alors que je travaille pour le greffier du Conseil privé et le premier ministre.

  (1130)  

[Français]

    Cependant, vous reconnaissez qu'ultimement, certaines personnes sont responsables de ces échecs. Imaginons que quelque chose soit arrivé à M. Chong ou à sa famille pendant la période où il n'a pas été informé de cette menace. Nous nous sentirions tous coupables, aujourd'hui, de ne pas avoir agi.

[Traduction]

    Si les renseignements avaient indiqué qu'il y aurait des actions immédiates, M. Chong en aurait été informé en vertu des mesures de réduction des menaces de la Loi sur le SCRS.
    Aurait‑on dû l'informer des renseignements disponibles à ce moment‑là? Je crois qu'on peut maintenant s'entendre pour dire oui. Cela dit, il n'a jamais été question de menace physique; je tiens à ce que ce soit très clair. Cela ne veut pas dire par contre que la situation n'était pas grave.

[Français]

    Toutefois, on ne peut pas présumer qu'une telle menace n'existait pas. On ne peut pas présumer que le Service canadien du renseignement de sécurité a accès à toutes les mesures et à toutes les discussions qui se déroulent sur les territoires étrangers.

[Traduction]

    Absolument. Voilà pourquoi le ministre Mendicino a clairement indiqué qu'il faudra aviser les députés.

[Français]

    Ne devrait-il pas y avoir un processus d'enquête pour déterminer, justement, qui n'a pas fait son travail?

[Traduction]

    Je crois que vous allez recevoir certains de mes prédécesseurs. Il vous faudra leur demander ce qui a motivé leur décision à l'époque et au moment où ces rapports ont été transmis.
    Avant de sauter à la conclusion de négligence, je crois qu'il est essentiel de les entendre afin qu'ils vous expliquent les décisions qu'ils ont prises à l'époque.

[Français]

    J'ai entendu les mêmes choses dans le dossier de Lac‑Mégantic. C'est pourquoi je suis un peu inquiet, madame Thomas.
    J'aimerais revenir aux postes de police clandestins du régime de Pékin. Vous avez reconnu tout à l'heure qu'il y avait deux postes de police clandestins qui opéraient à Montréal. Nous avons beaucoup de difficulté à comprendre pourquoi, le 27 avril, le ministre de la Sécurité publique a dit que ces postes avaient été fermés, alors qu'ils opèrent toujours. Nous avons tenté de savoir combien de postes de police clandestins opéraient ou avaient opéré au pays et vous avez répondu qu'il y en avait eu deux, mais nous nous sommes arrêtés à Montréal.
    Y en a-t-il d'autres qui opèrent ailleurs au pays?
    Le Journal de Montréal a fait un tableau très clair qui montrait qu'il y avait des postes de police qui opéraient à Toronto et à Vancouver. Ces postes de police opèrent-ils toujours?

[Traduction]

    À ce que je sache, les postes qui étaient opérationnels à Toronto et à Vancouver ne le sont plus au moment où on se parle.

[Français]

     Savez-vous si la diaspora chinoise est encore surveillée par des policiers, par des diplomates, ou par des gens qui bénéficient d'une protection diplomatique et sont encore en fonction? Oui ou non?

[Traduction]

    Je n'ai pas d'autres informations sur ces postes de police. Il se pourrait que j'en apprenne davantage après la réunion d'aujourd'hui, mais je n'ai pas connaissance d'autres postes à l'heure actuelle.
    Il existe effectivement des diplomates mandataires qui agissent contre les intérêts de la diaspora. C'est un élément important de...

[Français]

    Combien y en a-t-il?

[Traduction]

    Je ne pourrais pas vous donner un chiffre.
    Vous ne pouvez pas ou vous l'ignorez?
    Me demandez-vous si j'ai un chiffre exact? Non.
    Ces mandataires font toutes sortes de choses, alors je ne peux pas vous donner un chiffre.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à Mme Romanado.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Par votre entremise, j'aimerais parler de la question du privilège avec notre témoin. J'aimerais sensiblement poursuivre dans la même veine que Mme Blaney et parler de la sensibilisation des députés. Des témoins nous ont clairement dit que la communauté du renseignement ne comprend pas le milieu politique, et que l'inverse est tout aussi vrai.
    Lorsque M. Chong est venu témoigner devant notre comité, il a dit avoir eu quatre réunions avec le SCRS. La première réunion a eu lieu le 24 juin 2021 à la demande du SCRS, puis les trois réunions suivantes se sont tenues à sa demande.
    Ayant été secrétaire parlementaire au portefeuille de la défense et ayant siégé au comité de la défense, j'ai participé à diverses séances de breffage de la communauté du renseignement, alors je comprends ce qu'il en est. Ne seriez-vous pas d'accord pour que tous les députés, sénateurs et leur personnel participent à une séance de breffage pour savoir quoi surveiller et ce qu'est l'ingérence étrangère? Parle‑t‑on de quelqu'un qui tente de s'immiscer fortement dans une campagne ou qui publie des informations quelque peu erronées afin qu'on les corrige? Est‑ce le genre de choses dont il est question?
    Comme vous le savez, la communauté du renseignement cherche toujours à recueillir des renseignements. Les députés en savent probablement beaucoup, mais n'en sont peut-être pas toujours conscients, parce qu'ils ignorent quoi surveiller. S'ils comprenaient le travail des agents du renseignement, ils pourraient à leur tour donner un retour d'information aux agences du renseignement concernées. Un autre témoin nous a dit que les Canadiens en général pourraient avoir accès à des informations qui seraient également utiles à la communauté du renseignement.
    Il s'agit en quelque sorte d'une approche pancanadienne. Un État tente de miner nos institutions démocratiques, et je crois que tous les Canadiens s'entendent pour dire qu'il nous faut travailler ensemble pour contrer et dissuader cette menace. Si nous comblons toutes les lacunes, cela pourrait nous permettre de veiller à ce que les prochaines élections dans deux ans, disons, soient différentes de la situation actuelle.
    Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet? Pensez-vous qu'il serait bénéfique de veiller à tout le moins à ce que les députés, les sénateurs, leur personnel et même les Canadiens en général comprennent mieux l'ingérence étrangère? Quelle serait l'approche idéale pour leur transmettre cette information afin qu'ils puissent aider et faire partie de la solution?

  (1135)  

    Vous avez soulevé des points très importants. Le directeur du SCRS a comparu devant plusieurs comités, dont le vôtre, et a dit publiquement qu'il était nécessaire de parler de l'ingérence étrangère et de la sécurité nationale du Canada. Nous parlons de beaucoup de choses au Canada, mais rarement de cela. Il est vraiment essentiel de faire comprendre à la population quelles sont les menaces envers notre sécurité nationale, qui s'intéresse au Canada, qui pourrait potentiellement œuvrer à l'encontre des intérêts canadiens, etc.
    La communauté de la sécurité nationale critique le fait que les discussions avec les parlementaires sont potentiellement anodines, et pas assez précises ou descriptives en ce qui concerne les choses à surveiller. Nous y travaillons. Nous continuons d'évoluer quant aux élections, et je crois qu'il est très important que les Canadiens comprennent notre travail à cet égard. Le groupe d'experts et le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections sont normalement liés à une convention de transition lors des élections générales. Or, nous avons demandé au Groupe de travail d'analyser ce qui se passe présentement dans cinq élections partielles.
    M. Rosenberg a recommandé que le groupe d'experts se réunisse entre les élections. La première réunion aura lieu cet été pour veiller à ce qu'il y ait une certaine continuité d'ici les prochaines élections générales. En se réunissant ainsi, les membres du groupe comprendront les renseignements qu'ils analyseront pendant la période électorale. Ils auront une vue d'ensemble. Il est essentiel que ce travail se fasse dans la transparence. Il faut davantage sensibiliser la population, afin qu'elle sache quoi surveiller et quelles sont les techniques employées par nos adversaires. Ainsi, nous pourrons certes être à l'affût de tout cela lors des prochaines élections, mais la population sera également bien au fait de la situation. Nous pourrions assurément en faire rapport aux parlementaires.
    Merci.
    Allez‑y, madame Gaudreau.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Il me reste deux minutes et demie.
    Encore une fois, comment se fait-il que ce soit ici, au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, que l'on apprenne toutes ces choses, alors que des gens nous regardent? Je remercie les médias. Il est question de transparence, d'information à transmettre au public pour le rassurer, mais cela ne me rassure pas du tout.
    J'aimerais profiter du temps qu'il me reste pour demander au gouvernement d'annoncer les mesures qu'il prend en ce moment ainsi que son plan de match. On pourra relayer l'information ou lancer un cri du cœur.
     Je vous offre les prochaines minutes pour que vous puissiez nous parler de ce qui s'en vient dans trois mois, six mois ou un an, et non de ce que vous venez d'accomplir.

  (1140)  

[Traduction]

    Je n'ai pas de boule de cristal. J'espère que les députés et les Canadiens...

[Français]

    J'invoque le Règlement, je n'entends pas l'interprétation. Je suis désolée.

[Traduction]

    J'ai arrêté le temps.
    Avez-vous entendu la question, madame Thomas? Est‑ce que cela fonctionne, maintenant? D'accord.
    Merci.
    Je n'ai pas de boule de cristal. J'espère que vous serez rassurée d'apprendre que les efforts de communication de la communauté de la sécurité nationale augmenteront au cours des prochains mois. Il y aura un meilleur dialogue avec les Canadiens et les diverses diasporas. Nous parlerons d'ingérence étrangère de façon plus candide et transparente sans pour autant révéler des informations classifiées liées à la sécurité nationale. Nos séances de breffage avec les députés seront plus précises et vernaculaires, et nous vous donnerons des exemples de choses à surveiller et vous expliquerons les préoccupations actuelles.
    J'espère qu'il y aura des séances de breffage plus fréquemment avec les députés ciblés par d'autres États. Le ministre Mendicino a été très clair à ce sujet. Je pense au processus interne et à la dynamique. J'espère que l'information et les conseils circuleront bien au sein du gouvernement pour que les gens sachent quoi faire dans telle ou telle situation. Comme je l'ai dit, les conseils sont essentiels. J'espère aussi que nous allons commencer à aborder et changer les outils nécessaires pour que les agences de sécurité nationale puissent faire leur travail.

[Français]

     Pour terminer, compte tenu de la compétence et de l'influence dont vous disposez, j'aimerais souhaiter également qu'il y ait une vraie transparence et que la lumière soit faite afin de rassurer la population. Au moment où nous nous parlons, c'est extrêmement inquiétant.
    Merci, madame la présidente.
    Merci.
    Madame Blaney, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci.
    J'aimerais faire un bref commentaire avant de poser ma question. J'ai entendu ce que vous avez dit plus tôt sur la possibilité de tenir une enquête publique. Je pense moi aussi que la discussion est devenue beaucoup trop partisane, et c'est l'une des raisons pour lesquelles le NPD estime qu'il est important que tous les partis s'entendent sur la personne chargée du processus d'enquête. Nous devons délaisser la rhétorique pour nous attaquer au problème pour de bon. Cela dit, la confiance des Canadiens envers nos systèmes a été vraiment ébranlée. J'estime donc que la seule avenue possible est une enquête publique.
    Je vous suis reconnaissante de nous avoir fait part de votre opinion. J'ai simplement profité du moment pour faire de même.
    J'ai une question pour vous. Lors de sa comparution, M. Chong nous a dit qu'il avait participé à une séance de breffage générale sur l'ingérence étrangère il y a un certain temps. Il a dit qu'environ 40 députés auraient participé à une telle séance. L'objectif était simplement de les prévenir. La séance ne portait pas sur sa situation personnelle; on cherchait plutôt à lui faire comprendre ce à quoi peut ressembler l'ingérence étrangère autour de soi.
    Je crois que ce serait logique que tous les parlementaires reçoivent ce type de formation afin de mieux comprendre la situation. Nous avons beaucoup entendu que les parlementaires et les Canadiens doivent être mieux outillés pour faire face à l'ingérence étrangère, pour la repérer. Pensez-vous qu'il serait bénéfique d'agir en ce sens?
    Des témoins nous ont également dit que plus de parlementaires devraient passer par un processus similaire à celui du CPSNR. Ce processus permet d'avoir une cote de sécurité donnant accès à plus d'informations. Cela nous permettrait de mettre la partisanerie de côté. Je ne dis pas que plus de parlementaires seraient nécessairement mis au fait des enjeux ultra-secrets, mais nous serions plus nombreux à comprendre ce qui se passe. Nous nous engagerions officiellement à ne pas transmettre ces informations à qui que ce soit.
    N'êtes-vous pas inquiète de constater que les parlementaires ne disposent peut-être pas des bons outils pour faire face à cet enjeu et mieux le comprendre lors des séances de breffage?
    Merci.
    Vous avez posé des questions complexes. Je crois que le CPSNR peut être utilisé de manière plus efficace afin de permettre aux membres habilités de comprendre les renseignements qui sont recueillis et la façon dont ils sont utilisés au sein de la communauté de la sécurité nationale. Je crois que ce comité est essentiel.
    L'habilitation d'un plus grand nombre de parlementaires est un processus complexe. Le renseignement se fonde sur le besoin de savoir. Je ne crois pas que l'habilitation accrue de parlementaires soit la solution. Je crois plutôt qu'il faut parler des menaces de façon non confidentielle, mais plutôt très claire et très précise.
    Je ne crois pas que les rencontres individuelles avec les parlementaires soient nécessaires ou possibles, mais je crois qu'il faut changer notre façon de nous adresser aux groupes de parlementaires.

  (1145)  

    Merci.
    Nous allons entendre M. Cooper et M. Turnbull, puis nous laisserons partir Mme Thomas.
    Monsieur Cooper, vous avez la parole.
    Par votre entremise, madame la présidente, j'aimerais revenir à certains points que j'avais abordés pendant la série de questions précédente.
    Lorsque j'ai dit que le ministre Blair n'avait pas pu ouvrir une session pour accéder à la note sur la gestion des enjeux fournie par le SCRS, qui indiquait que Michael Chong était ciblé par Pékin, vous avez dit que ma question ne se fondait pas sur la réalité ou quelque chose du genre.
    À la page 31 du rapport de M. Johnston, on peut lire ceci:
Ni le ministre ni son chef de cabinet n’a reçu la note de l’UGE. Les deux ont mentionné qu’ils n’ont pas accès à la messagerie du réseau Très secret qui a servi à envoyer la note (ce que nous avons pu confirmer auprès de représentants de la fonction publique).
    Quelle partie de ma question n'était pas fondée sur la réalité?
    J'ai eu l'impression que vous disiez que le ministre n'avait tout simplement pas de nom d'utilisateur et qu'il n'avait pas accès au système. Les ministres n'ont pas accès au réseau Très secret; les documents leur sont transmis sur papier lorsqu'il est approprié de le faire.
    M. Johnston indique par ailleurs ceci:
Il s’agit sans doute de l’exemple le plus marquant, mais non le seul, d’une mauvaise circulation de l’information et d’un mauvais traitement de l’information entre les organisations, la fonction publique et les ministres.
    Contestez-vous une telle affirmation?
    Non. C'est pourquoi nous modifions le processus.
    Il est un peu tard pour le faire.
    Pour revenir à la dernière série de questions, lorsque je vous ai parlé de la note de juillet 2021 qui faisait valoir que certains députés, dont Michael Chong, étaient ciblés par Pékin, vous avez dit qu'elle avait été présentée à David Morrison, qui était le conseiller à la sécurité nationale du premier ministre.
    Vous avez ensuite dit que le premier ministre n'avait pas été informé et n'était pas du tout au courant de la situation. Je vous rappelle que la note de juillet 2021 avait été envoyée un mois avant la campagne électorale fédérale, et qu'elle visait des allégations d'ingérence ciblant des députés du Parlement élus de façon démocratique. Pourquoi une telle information ne s'est-elle pas rendue au premier ministre?
    Madame la présidente, j'ai dit que je n'allais pas spéculer et vous avez l'occasion de poser vos questions aux titulaires des postes lorsqu'ils témoignent devant vous.
    Je vous assure qu'en tant que conseiller à la sécurité nationale pour le premier ministre, il reçoit l'information nécessaire, surtout en ce qui a trait à l'ingérence étrangère, mais aussi en ce qui a trait à de nombreux autres sujets.
    Lors de votre dernière comparution devant le Comité, vous avez dit que le premier ministre était souvent informé des enjeux en matière d'ingérence étrangère. La cheffe de cabinet du premier ministre, Katie Telford, a dit que le premier ministre lisait tout et qu'aucun renseignement n'était omis. Pourtant, à un mois des élections, alors que certains députés étaient ciblés par Pékin, le premier ministre n'était soudainement plus informé. Tout d'un coup, le premier ministre qui lit tout ne lit pas cette note.
    Comment peut‑on y croire? Qu'est‑ce que cela nous dit au sujet du premier ministre et de l'importance qu'il accorde à la menace que représente Pékin pour notre démocratie et à son ingérence dans le travail des députés du Parlement? Ces députés étaient ciblés parce qu'ils faisaient leur travail, qu'ils parlaient au nom des contribuables et au nom des Canadiens. Or, soudainement, le premier ministre serait dans le noir... ce qui l'arrange bien. Que faut‑il en déduire à son sujet?
    Vous tirez des conclusions fallacieuses.
    Le premier ministre ne peut tirer de conclusions à partir de renseignements qu'il n'a pas reçus, et il n'a pas été informé de la situation, c'est tout.
    Le premier ministre, qui est responsable de la machine gouvernementale, qui décide de la façon dont l'information circule jusqu'à son bureau et qui se préoccupe grandement de la sécurité nationale, n'est soudainement plus au courant de rien? Cela tombe bien.
    Je crois que les Canadiens peuvent très facilement en venir à la conclusion que le premier ministre ne prend pas au sérieux l'ingérence de Pékin et qu'il agit comme s'il n'était au courant de rien parce que cela l'arrange bien. Je crois qu'il était au courant. Je crois aussi que la plupart des Canadiens sont d'avis qu'il était au courant et que s'il ne l'était pas, c'est la preuve de son manque total de leadership.
    Je vais maintenant changer de sujet. Est‑ce que vous participez aux discussions politiques avec le premier ministre, le bureau du premier ministre, le cabinet ou les députés libéraux?

  (1150)  

    J'aimerais vous dire deux ou trois choses.
    Je vous ai posé une question.
    Le premier ministre n'était pas au courant. Nous ne sommes pas à la période des questions. Vous tirez des conclusions d'ordre politique; elles ne se fondent pas sur des faits. L'information n'a pas été transmise au premier ministre.
    Ce que je dis, c'est qu'il n'était supposément pas au courant, alors qu'il aurait dû l'être, ce qui démontre son manque de leadership.
    Cela démontre le processus...
    Excusez-moi; je vous arrête un instant.
    Madame Thomas, veuillez garder votre idée.
    Monsieur Cooper, votre temps est écoulé. Je vous ai rendu les 12 secondes qu'il vous restait tout à l'heure.
    Sur ce, madame Thomas, vous avez la parole.
    Je ne suis habituellement pas dans la pièce lorsqu'il y a des discussions politiques.
    Merci.
    Monsieur Turnbull, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Je crois que nous avons entendu des arguments fallacieux et défaillants, de même que des conclusions indécentes de la part de M. Cooper, qu'il répète sans cesse en donnant des coups sur la table. C'est honteux, à mon avis.
    J'aimerais que nous en venions aux faits.
    Madame Thomas, dans son rapport, M. Johnston établit clairement que, selon les renseignements, rien n'indique que la RPC a posé des gestes pour menacer la famille de Michael Chong.
    Est‑ce que c'est ce que vous comprenez?
    C'est ce que je comprends.
    Il n'y a eu aucune menace ni aucune mesure prise pour exécuter cette menace.
    C'est exact. L'information qui a été transmise à M. Chong est troublante, cela ne fait aucun doute; mais aucune mesure n'a été prise.
    Nous sommes tous du même avis: il est très troublant de penser qu'un élu ou un membre de sa famille puisse être menacé ou intimidé. Je suis tout à fait d'accord avec vous.
    En ce qui a trait au courriel sur le réseau Très secret, qui semble semer la confusion, vous avez dit clairement, d'une manière qui correspond à ce qui est dit dans le rapport de M. Johnston, que selon l'orientation ministérielle en place, le SCRS aurait dû informer le ministre.
    Êtes-vous d'accord?
    Oui, le SCRS aurait probablement dû informer le ministre. Le sous-ministre avait aussi un rôle à jouer.
    D'accord.
    Vous dites que vous n'avez pas accès à ce réseau Très secret non plus. Vous avez dit que votre niveau d'accès était inférieur, je crois. Est‑ce exact?
    Je peux me connecter au réseau Secret, mais pas au réseau Très secret. Les renseignements très secrets me sont transmis par ce que l'on appelle un agent du service à la clientèle du CSE.
    Je vous remercie pour ces précisions.
    Vous avez dit qu'il aurait fallu imprimer les renseignements et les montrer au ministre dans un endroit sécurisé.
    Est‑ce exact? Il n'y aurait pas eu de courriel très secret?
    C'est exact.
    Merci.
    Après vous avoir entendue aujourd'hui, je m'intéresse aux déclarations sur la cote de crédibilité associée aux renseignements.
    Est‑ce que cette cote est toujours incluse dans les documents sur la sécurité?
    Oui. Lorsque nous recevons les renseignements bruts des organismes, ils nous informent habituellement de leur crédibilité ou de leur fiabilité.
    Quelle est l'importance de cette cote de crédibilité?
    Elle nous permet de déterminer si nous devons prendre des mesures, si nous devons attendre d'obtenir plus de renseignements et comment nous devons évaluer ce que nous lisons. S'il s'agit d'une source unique ou d'une source qui n'est pas crédible, ou s'il n'y a pas d'autres renseignements au sujet d'un élément en particulier ou d'une allégation, ou de toute mesure qui pourrait être prise, nous agissons en conséquence.
    Comme nous l'avons dit plus tôt, le renseignement ne représente habituellement pas une preuve tangible. C'est l'élément d'un tout; une pièce du casse-tête.

  (1155)  

    Oui, c'est ce que vous avez dit. Merci.
    Quelle est l'utilité, donc, des renseignements qui ne sont pas associés à une cote de crédibilité?
    Au bout du compte, ces renseignements peuvent s'avérer très importants. Ils nous donnent une idée de ce qui pourrait arriver, de ce qui se passe ou ne se passe peut-être pas. Comme je l'ai dit plus tôt, il s'agit d'un art et non d'une science.
    Ces renseignements pourraient être importants comme ils pourraient ne pas être pertinents; on ne le sait pas, puisqu'ils ne sont pas associés à une cote de crédibilité.
    Est‑ce exact?
    C'est exact, parce qu'il faut tenir compte de ce qui est arrivé avant et des renseignements que l'on continue de recueillir. La crédibilité est associée à la façon dont les organismes déterminent, à l'aide de ressources restreintes, si elles poursuivent l'enquête et la collecte de données.
    Je crois qu'il importe de souligner que les fuites dans les médias n'étaient pas associées à une cote de crédibilité, du moins à ce que je sache. Je crois que M. Johnston a parlé de certaines ébauches. Est‑ce que cela nous mène à la source des diverses fuites dans les médias, à la crédibilité de l'information et à son origine au sein de l'environnement de la sécurité et du renseignement?
    Monsieur Turnbull, en règle générale, je redonnerais la parole à Mme Thomas, mais vous n'avez plus de temps.
    Madame Thomas, vous pouvez transmettre d'autres renseignements au greffier si vous le souhaitez, et nous allons...
    Madame la présidente, est‑ce que je peux obtenir une courte réponse à cette dernière question? Elle est assez importante.
    D'accord, mais très rapidement.
    Je ne suis pas certaine d'avoir compris la question; excusez-moi.
    Je ne peux vous laisser répéter la question, monsieur Turnbull; nous n'avons tout simplement pas le temps. Je suis désolée.
    Vous m'excuserez, madame Thomas, mais nous recevons le ministre Blair pour la prochaine heure de la réunion et nos ressources sont très limitées. Je ne veux pas devoir gérer un retard.
    Sur ce, au nom des membres du comité de la procédure, je vous remercie de nous avoir accordé votre temps et votre attention. Si vous le souhaitez, vous pouvez transmettre des renseignements supplémentaires au greffier; nous les distribuerons dans les deux langues officielles.
    Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes. Nous reviendrons à midi.
    Merci et bonne journée.

  (1155)  


  (1200)  

    Nous reprenons les travaux.
    Pour cette partie de la réunion, nous recevons l'honorable Bill Blair, ministre de la Protection civile, et Tricia Geddes, sous-ministre déléguée au ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    Monsieur le ministre, nous vous souhaitons la bienvenue. Vous disposez de cinq minutes pour votre déclaration préliminaire. Allez‑y.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci, chers collègues, de m'avoir invité à témoigner devant vous aujourd'hui.
    Je vais tenter d'être bref pour ma déclaration préliminaire, afin de vous laisser amplement le temps de poser des questions et de discuter.
    Il y a un enjeu important au cœur de cette étude. Soyons clairs: aucun parlementaire et aucun membre de sa famille ne devrait être menacé pour avoir défendu ses croyances, pour avoir représenté les électeurs ou pour avoir agi en leur nom.
    Chers collègues, les Canadiens nous élisent pour parler de l'avenir de notre pays en leur nom. Nous ne sommes souvent pas d'accord les uns avec les autres, mais il est tout à fait inacceptable qu'un député du Parlement soit la cible de violences. Je tiens à vous assurer que je soutiens toutes les victimes de tels comportements.
    J'ai eu vent pour la première fois des menaces contre le député de Wellington—Halton Hills en lisant un article dans le Globe and Mail le 1er mai dernier. Les allégations étaient graves et très troublantes, puisqu'on nommait le député et les membres de sa famille.
    Bien que les considérations relatives à la sécurité restreignent les renseignements que je peux vous transmettre, je peux vous dire qu'on ne m'avait jamais informé de cette menace de violence proférée par un acteur étranger contre un parlementaire. Je vous assure que si j'avais obtenu de tels renseignements, j'aurais demandé à ce que l'affaire soit renvoyée devant les autorités policières et à ce que des mesures soient prises pour protéger le député et sa famille. Si nous avons des preuves d'une menace de violence contre un Canadien, il est essentiel de faire appel à la police immédiatement, afin que des mesures appropriées soient prises.
    L'ingérence étrangère représentait déjà une menace importante pour les intérêts canadiens, avant même que le gouvernement actuel ne soit élu, et le problème s'est aggravé au cours des dernières années. Dans le cadre de notre tout premier mandat, nous avons pris de premières mesures en vue d'aborder le problème. Nous avons notamment investi dans la capacité en matière de cybersécurité et adopté des lois pour accroître la sécurité des élections.
    Peu après ma nomination à titre de ministre de la Sécurité publique, la COVID a frappé et a complètement changé nos vies. Le paysage de la sécurité publique a évolué rapidement et de nouvelles menaces sont apparues à une vitesse sans précédent. Les activités des acteurs étrangers malveillants qui tentent de s'ingérer dans les intérêts nationaux du Canada se sont accrues.
    En guise de réponse, j'ai envoyé une lettre à chaque député en 2020 afin de les aviser de la gravité de cette menace et de leur expliquer les efforts du gouvernement pour la contrer. J'avais écrit ceci:
Le gouvernement privilégie d'abord et avant tout le bien-être et la sécurité des Canadiens. Lorsque des États étrangers malveillants cherchent à causer des préjudices à nos collectivités, à miner nos valeurs ou à compromettre les institutions sur lesquelles notre pays est bâti, nous prendrons des mesures.
    Cette déclaration est toujours vraie aujourd'hui.
    Nous savions — et c'est toujours le cas — que des acteurs malveillants étrangers tentaient d'intervenir dans la politique canadienne, d'une façon qui dépasse largement les activités diplomatiques habituelles. C'est pourquoi j'ai explicitement demandé au SCRS de sensibiliser les personnes qui pourraient être ciblées afin qu'elles comprennent les risques et qu'elles sachent comment se défendre contre ces attaques.
    Je tiens toutefois à le répéter: je n'ai jamais été informé d'une quelconque tentative par un acteur étranger d'attaquer un parlementaire ou ses proches. Bien que le SCRC était responsable de désigner les personnes à informer, je comprends que plusieurs députés l'ont été avant les élections de 2021.
    Le travail du gouvernement en ce sens est loin d'être terminé. Nous avons continué de réaliser d'importants progrès depuis les dernières élections.
    Le budget de 2023 prévoyait un investissement de 13,5 millions de dollars pour la création du Bureau national de lutte contre l'ingérence étrangère à Sécurité publique Canada. La GRC a également reçu 48,9 millions de dollars pour renforcer sa capacité à protéger les Canadiens contre les acteurs étrangers ennemis.
    De plus, mon collègue, le ministre Mendicino a tenu des consultations sur un registre visant la transparence en matière d'ingérence étrangère, et je suis heureux de vous annoncer que ces consultations ont pris fin plus tôt ce mois‑ci. Nous avons reçu l'appui nécessaire pour aller de l'avant.
    Chers collègues, comme l'a fait valoir le très honorable David Johnston dans son rapport la semaine dernière, certaines questions sont trop importantes pour laisser place à la partisanerie. Il a aussi dit ceci: « Ce qui est en jeu pour nous tous, c’est la confiance dans nos institutions démocratiques. La confiance même que l’ingérence étrangère tente de miner. »
    Nous devons continuer d'examiner ces questions de manière à respecter toutes nos obligations en matière de sécurité nationale, notamment pour ceux qui mettent leur vie en jeu pour recueillir des renseignements sur le terrain. Bien que je ne puisse aborder certains sujets de façon publique, je reconnais et je respecte le travail de sensibilisation du Comité à l'égard de cette grave menace pour tous les Canadiens et pour les institutions du Canada.
    Madame la présidente, merci. Je répondrai avec plaisir aux questions de mes collègues.

  (1205)  

    Merci, monsieur Blair, d'avoir été bref.
    Nous commençons maintenant une série de questions de six minutes. Nous allons d'abord entendre M. Cooper, puis nous entendrons M. Turnbull.

[Français]

     Ce sera ensuite au tour de Mmes Gaudreau et Blaney.

[Traduction]

    Monsieur Cooper, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente, et merci, monsieur le ministre.
    Par l'entremise de la présidence, monsieur le ministre, vous avez clairement dit que vous n'aviez pas été informé des menaces de violence contre les députés. Saviez-vous toutefois que les députés étaient victimes d'intimidation ou d'ingérence? Le mot « violence » est très précis.
    En effet. Je vous remercie pour votre question. Je suis heureux de pouvoir vous donner des précisions sur le sujet.
    J'ai discuté à plusieurs reprises avec le directeur du SCRS de la question de l'ingérence étrangère et, de façon particulière, des activités du gouvernement chinois, mais je n'ai pas obtenu de renseignements précis au sujet de certains députés visés. Je savais que le SCRS se préoccupait de l'ingérence visant certains députés, qui n'avaient pas été nommés. C'est pourquoi j'ai demandé au SCRS de tenir des séances d'information avec ces personnes.
    Merci, monsieur le ministre.
    Vous avez dit tout à l'heure que c'est dans un article du Globe and Mail que vous aviez appris que le député Michael Chong avait été la cible de Pékin, mais nous savons que le SCRS avait tenté de vous informer que certains députés étaient visés, notamment Michael Chong, dans une note sur la gestion des enjeux qui avait été transmise à vous et à votre cheffe de cabinet par courriel très secret, mais que vous n'aviez pas lu la note parce que vous et votre cheffe de cabinet n'aviez pas les données de connexion requises.
    Comment cela est‑ce possible?

  (1210)  

    Premièrement, ce que vous venez de décrire est incorrect. Vous vous trompez sur les faits, mais je vais vous expliquer avec plaisir comment tout cela fonctionne, si vous me le permettez.
    Allez‑y.
    Oui, bien sûr. Premièrement, il n'y a pas de compte courriel qui sert à transmettre les renseignements très secrets aux ministres. Il y a un terminal sécurisé dans certains bureaux, mais pas dans les bureaux politiques, et certainement pas dans le bureau du ministre. Je n'ai pas accès au terminal à partir duquel l'information a été transmise.
    C'est le directeur du SCRS qui a décidé des renseignements à transmettre au ministre. Ces renseignements ont été imprimés et le directeur du SCRS m'a rencontré dans un lieu sécurisé pour m'informer...
    Monsieur le ministre, en tout respect, dans son rapport, M. Johnston a fait valoir que le SCRS vous avait transmis l'information, à vous et à votre cheffe de cabinet, probablement parce qu'il voulait que vous la voyiez, mais vous ne l'avez pas vue, parce que vous n'y aviez pas accès.
    C'est ce qu'a dit M. Johnston. Est‑ce qu'il a tort?
    Permettez-moi de préciser que l'information ne m'a pas été transmise. Le SCRS a déterminé que les renseignements pouvaient m'être transmis, mais a déterminé... Vous devriez peut-être poser la question au directeur. Il a déterminé qu'il n'était pas nécessaire que je sois informé, alors on ne m'a jamais parlé de l'existence de ces renseignements, et on ne me les a jamais transmis.
    M. Johnston a dit que vous n'y aviez pas eu « accès ». Ce sont ses mots.
    Oui. C'est factuellement correct. Il n'y a pas de terminal permettant d'avoir accès à ces renseignements dans un bureau politique, et certainement pas dans le bureau du ministre. Le terminal se trouve dans un lieu sécurisé. Je n'y avais pas accès. Pour que des renseignements très secrets se trouvant sur ce terminal soient portés à mon attention, il faudrait que le SCRS prenne une décision en ce sens et me les montre dans un local isolé pour l'information sensible cloisonnée ou dans ses bureaux.
    M. Johnston a dit qu'il s'agissait de l'exemple le « plus marquant » d'une mauvaise circulation de l'information. Vous étiez ministre de la Sécurité publique. Cela relevait de votre compétence, en tant que ministre.
    Que signifie pour vous la responsabilité ministérielle?
    Ma responsabilité est de traiter l'information qui est portée à mon attention par nos organismes de sécurité nationale et de renseignement. Dans le cas qui nous occupe, cet organisme a déterminé que les renseignements n'avaient pas à être communiqués au ministre et il ne me les a pas transmis. C'est préoccupant et je crois que la question a été abordée de manière appropriée dans une récente directive ministérielle diffusée par mon successeur, le ministre Mendicino, qui énonce...
    Avec tout le respect que je vous dois, monsieur le ministre, votre réponse nous indique que vous n'acceptez pas la responsabilité ministérielle qui vous revient.
    Je crois que c'est complètement faux. J'assume la pleine responsabilité pour toutes les questions visées par mon mandat.
    Dans cette situation en particulier, le SRCS a pris une décision opérationnelle sur les renseignements qui devaient être transmis au gouvernement. Il a déterminé qu'il n'était pas nécessaire de communiquer l'information. Deux ans plus tard, lorsque la presse a eu vent de cette information, elle m'a été transmise.
    À ce moment‑là, je ne savais pas que l'information existait. Je ne savais pas qu'elle ne m'avait pas été communiquée, parce que je ne savais pas qu'elle était disponible. Le SCRS avait déterminé à juste titre qu'il n'était pas nécessaire de me transmettre l'information.
    Monsieur le ministre, je crois que le grand responsable, c'est vous, en tant que ministre de la Sécurité publique. Cela en dit beaucoup sur le gouvernement si vous, en tant que ministre de la Sécurité publique, le premier ministre et l'actuel conseiller à la sécurité nationale avez appris la nouvelle par le Globe and Mail. C'est assez révélateur.

  (1215)  

    Ce n'était pas une question, madame la présidente. Voulez-vous que je réponde?
    Le Comité vise à offrir l'occasion aux personnes que nous avons invitées de fournir des réponses. Parfois... Nous sommes dans le milieu politique; ce n'est pas facile. J'ai besoin de vous entendre.
    Donc, si je peux répondre...
    Rapidement.
    ... Je ne suis pas d'accord avec vous, monsieur Cooper.
    Merci.
    Monsieur Turnbull, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Par l'entremise de la présidence, monsieur Blair, je tiens à dire que ce que nous venons d'entendre est une fois de plus un argument fallacieux de la part des conservateurs; nous en entendons régulièrement. C'est malheureux.
    J'aimerais revenir à certains d'entre eux, mais d'abord, j'aimerais vous poser une question, rapidement: pouvez-vous donner suite à des renseignements qui ne vous ont pas été transmis?
    Je crois qu'il est évident, monsieur Turnbull, que je ne peux pas.
    Toutefois, je crois que la collecte de renseignements est importante, mais tout est... La GRC, par exemple, qui se rapporte à moi à titre de ministre de la Sécurité publique, ne m'informe pas des enquêtes opérationnelles en cours. Elle me présente les résultats. La situation est très similaire avec les organismes de sécurité nationale et de renseignement. Ils prennent des décisions en fonction de leur propre évaluation des renseignements.
    Les renseignements peuvent prendre diverses formes et provenir de diverses sources, et le SCRS est responsable d'en déterminer la validité et la crédibilité, et de décider si le gouvernement doit prendre des mesures pour y répondre. C'est le SCRS qui prend ces décisions.
    Évidemment, s'il juge qu'il n'est pas nécessaire de nous transmettre les renseignements et que je n'en suis pas avisé, je ne peux pas prendre de mesure à leur égard.
    C'est évident.
    Je suppose que ce qu'on dit ici, c'est que le SCRS n'a pas jugé nécessaire de vous transmettre cette information. Pourquoi a‑t‑on pris une telle décision, selon vous?
    Encore une fois, j'hésite à émettre des hypothèses. Je crois qu'il vaudrait mieux poser la question au directeur du SCRS afin de savoir pourquoi il a pris la décision de ne pas transmettre l'information au gouvernement, au ministre responsable ou à d'autres personnes. Je ne veux pas spéculer sur la façon dont le SCRS en est venu à cette décision.
    Comme je travaille dans le domaine du renseignement depuis plusieurs années, je sais qu'on procède à diverses évaluations de la validité des renseignements, de leur importance et de l'urgence de prendre d'autres mesures connexes.
    On ne peut que conclure, d'après sa décision de ne pas transmettre l'information, que le SCRS jugeait que cela n'était pas nécessaire, mais je crois qu'il faudrait poser la question au directeur.
    C'est tout à fait juste.
    Il y a d'autres allégations relatives à la surveillance d'un élu, à savoir Michael Chan. Selon les allégations, il a fallu trop de temps pour approuver la surveillance. C'est ce qu'on peut voir dans les médias. En gros, selon le Parti conservateur, vous avez tardé à agir, alors que vous auriez dû le faire plus tôt.
    Je crois que vous avez parlé d'un processus de diligence raisonnable. Il s'agit d'un enjeu très sérieux, qu'il ne faut pas prendre à la légère lorsqu'on décide de surveiller un élu provincial.
    Pourriez-vous nous parler de ce processus, sans entrer dans les détails? Je sais que vous ne pouvez pas trop en parler, mais quelle est la diligence raisonnable requise dans pareils cas?
    Je vous remercie de le reconnaître, monsieur Turnbull. En effet, j'ai prêté serment de ne pas discuter des détails des enquêtes ou des mandats qui auraient pu être délivrés ou non. Je ne vais pas briser ce serment. Ces enjeux sont confidentiels pour une bonne raison.
    Toutefois, je peux vous dire pour commencer que l'information rapportée dans le Globe and Mail est fausse. L'article contient des renseignements erronés. Je peux aussi vous dire que les demandes de mandats — de façon générale — sont associées à un processus de diligence raisonnable approprié et que l'on reconnaît toujours que le travail doit être fait rapidement.
    Je tiens à rassurer les Canadiens: nonobstant les fausses suggestions qui ont été faites dans les journaux, il n'y a jamais eu de retard inutile. Les délais décrits dans les journaux étaient loin de la réalité dans ce cas en particulier... et j'ai prêté serment de ne pas en aborder les détails.

  (1220)  

    Merci.
    Le parti de l'opposition a aussi souvent dit que le gouvernement n'avait rien fait pour lutter contre l'ingérence étrangère dans les élections, ce qui est faux. Vous avez abordé la question brièvement dans votre déclaration préliminaire... votre réponse à la motion du 18 décembre 2020 sur l'ingérence étrangère. Je l'ai lue, et elle est très détaillée.
    Afin de réfuter une fois de plus le mythe que tentent de perpétuer les partis de l'opposition voulant que le gouvernement n'ait rien fait, pourriez-vous nous parler des mesures que vous avez prises, pour démontrer que vous prenez la situation très au sérieux?
    Merci beaucoup, monsieur Turnbull.
    J'aimerais assurer aux membres du Comité, à mes collègues du Parlement et à tous les Canadiens que nous avons pris cet enjeu très au sérieux dès que nous avons formé notre gouvernement en 2015. Nous avons franchi des jalons très positifs grâce à la mise sur pied du Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, et en élargissant les pouvoirs de l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement. Des progrès ont été faits pour s'attaquer à ce problème. Un certain nombre de mesures législatives ont été proposées, ce qui, à mon avis, renforce également la résilience du Canada.
    En ce qui concerne la motion adoptée au Parlement, je crois qu'il était primordial de donner une réponse exhaustive et de nommer précisément l'enjeu de l'ingérence étrangère et les pays qui l'exercent, particulièrement la Chine. J'ai discuté à de nombreuses reprises avec le directeur du Service canadien du renseignement de sécurité sur la manière d'intervenir comme il se doit.
    Il était également primordial pour moi de ne pas me contenter de déposer le rapport, mais d'en faire parvenir un exemplaire à chaque parlementaire. À mon avis, ces renseignements étaient d'une importance critique pour l'accomplissement de leur travail. Je voulais m'assurer qu'ils étaient bien informés et, ensuite...
    Oh, c'est terminé.
    Merci.
    Allez‑y, madame Gaudreau.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Madame la présidente, serait-il possible de demander à monsieur le ministre de parler un peu plus lentement? En effet, nos interprètes, que je salue d'ailleurs, sont au travail depuis presque deux heures trente. Cela va me permettre aussi de m'assurer que j'ai tout capté.
    J'aimerais revenir aux propos précédents. Je n'ai peut-être pas bien compris ce qui a été dit concernant le temps qu'il a fallu avant d'autoriser le fameux délai de quatre mois.
    Nous avons accueilli au Comité un ancien conseiller en matière de sécurité nationale et ancien directeur du Service canadien de la sécurité et du renseignement, M. Richard Fadden. Il nous a alors mentionné qu'il trouvait ce délai très long. Que répondriez-vous à M. Fadden au sujet de ce très long délai?

[Traduction]

    J'essaierai de parler plus lentement. Je présente mes excuses aux interprètes. C'est là un point très important. Merci pour ce rappel.
    D'abord, je ne suis pas en désaccord avec M. Fadden. Le fil des événements décrit dans le Globe and Mail est très long. Je vous assure qu'il n'est pas vrai. Cela ne s'est tout simplement pas produit. Ce récit est absurde. En revanche, le SCRS, le ministère de la Justice, Sécurité publique Canada et même des membres de mon cabinet exercent leur diligence raisonnable pour garantir... La signature d'un mandat au titre de l'article 12 exige des efforts considérables en matière de renseignement, mais il s'agit également d'une intrusion importante dans la vie privée. Pour cette raison, il faut exercer une diligence raisonnable.
    La Cour fédérale a aussi soulevé des enjeux relatifs au devoir de franchise, par exemple, qui est une responsabilité du SCRS. Il faut toujours exercer le bon niveau de surveillance et de diligence. Je ne peux m'exprimer sur un cas précis — vous m'en excuserez —, mais quand ces affaires ont été portées à mon attention aux fins d'approbation, cela s'est toujours fait dans un endroit sécurisé. Honnêtement, il a fallu des heures — pas des jours, des semaines ou des mois — pour officialiser cette approbation.
    Je reconnais qu'il est nécessaire d'être diligent et d'agir rapidement. Je vous assure que je l'ai fait dans chacun des cas.

[Français]

     Je vous remercie.
    Monsieur le ministre, vous disposez d'une vaste expérience, et j'aimerais vous entendre sur l'avis des experts qui sont venus au Comité et nous ont dit qu'un excès de documents issus du renseignement étaient classés secrets. Tantôt, nous avons entendu Mme Thomas dire que cela pouvait aller de 3 000 à 4 000 informations par mois.
    La culture du renseignement est-elle déficiente au sein du Conseil des ministres? Expliquez-nous cela. Nous voulons le savoir.

  (1225)  

[Traduction]

    Je ne la qualifierais pas nécessairement de déficiente. Par contre, laissez-moi reconnaître un certain nombre d'éléments, si vous le permettez.
    Je crois que la transparence est très importante. Les Canadiens veulent avoir des preuves des mesures prises par leur gouvernement. Je crois qu'il faut donc toujours essayer d'être aussi ouvert et transparent que possible. Je sais également, ayant travaillé dans le domaine pendant de nombreuses années avant de devenir politicien, qu'il est primordial de maintenir le secret autour de la collecte de renseignements, des personnes qui effectuent cette collecte, des techniques d'enquête et de la manière dont on recueille cette information. Certains renseignements sont très délicats et pourraient entacher la réputation de notre gouvernement, de notre pays ou de citoyens canadiens.
    Bien franchement, il existe des renseignements qui doivent être classifiés, et le rester. Toutefois, il nous faut réfléchir aux éléments qui... À mon avis, nous n'avons pas un bon système de déclassification des renseignements secrets, et tous les renseignements ne sont pas aussi délicats les uns que les autres. Je crois qu'il faut mener cette réflexion et œuvrer à améliorer la situation.
    Comme le Comité l'a entendu de la part de nombreux témoins, la transparence et la confiance sont au cœur de nos activités. Il importe que nous expliquions à la population pourquoi certaines choses doivent rester secrètes et pourquoi d'autres devraient être plus facilement accessibles au public.

[Français]

    Puisqu'il me reste peu de temps, parlons de transparence et de confiance.
    Les chiffres parlent. Tantôt, je disais que deux Canadiens sur trois pensent que le gouvernement chinois tente de s'ingérer dans le processus électoral. Par ailleurs, presque la moitié des gens croient que les prochaines élections seront moins libres et justes. Cela me trouble, monsieur le ministre.
     Compte tenu de ce que nous avons entendu plus tôt, nous avons pris connaissance d'une foule de nouvelles mesures dont je ne connaissais pas l'existence.
    Évidemment, les citoyens non plus ne sont pas au courant. Que comptez-vous faire pour les tenir au courant? Pensez-vous avoir l'humilité de dire que vous avez corrigé le tir et d'annoncer ce qui s'en vient?
    Les gens ont besoin d'être rassurés parce que, en ce moment, ils s'y perdent. Que diriez-vous à ces gens de ce que vous faites, entre autres?

[Traduction]

    La question est très importante. La confiance de la population est la monnaie d'échange du travail que nous accomplissons comme politiciens, ici, au Parlement. Sans la confiance et le consentement du public, nous ne sommes pas en mesure de faire notre travail.
    J'aimerais éclaircir quelques points.
    Vous affirmez que les Chinois sont résolus à faire de l'ingérence. Mais il s'agit de la République populaire de Chine. C'est en réalité le gouvernement d'un pays étranger, un pays hostile, qui cible... et pour s'ingérer, il cible non seulement nos institutions démocratiques et nos élections, mais bien d'autres aspects de la société également. Nous avons la responsabilité absolue de protéger les institutions et la population canadiennes.
    Je crois que, pour gagner cette confiance...
    Merci.
    Madame Blaney, allez‑y.
    Je remercie la présidente. Comme toujours, tout ce que je dis s'adresse à la présidence.
    Monsieur le ministre, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui.
    À mon avis, la confiance de la population est au cœur de notre discussion. Voilà pourquoi le Nouveau Parti démocratique a présenté une motion affirmant que tous les partis doivent s'entendre sur la personne qui dirige ce processus, qui, à notre avis, doit être une enquête publique.
    Le débat s'est imprégné de rhétorique politique. L'enjeu clé, selon moi, est de protéger la confiance des Canadiens envers leurs institutions. S'ils ne leur font pas confiance, la situation devient vraiment effrayante.
    Nous sommes ici pour débattre précisément de la question du privilège, mais aussi pour tenter de comprendre ce qui s'est passé et pour cerner les lacunes.
    Ma première question concerne la façon dont vous, comme ministre, avez reçu les renseignements du SCRS. Quel est le processus, et y a‑t‑il un problème qui doit être réglé dans ce processus?
    Nous avons reçu des témoignages de la part d'experts qui ont affirmé que le renseignement est transmis... mais que les conseils opportuns ne sont pas nécessairement fournis. Quand des renseignements sont transmis à une personne, il ne semble pas y avoir un processus robuste pour s'assurer que ces renseignements sont absorbés, qu'ils sont absorbés de la bonne façon et qu'on en suit les résultats.
    Je me demande si vous pourriez parler du processus. D'après ce que vous avez vécu, dites-nous quels sont les points d'amélioration possibles et si le processus a été une source d'inquiétude pour vous à quelque moment que ce soit.

  (1230)  

    Permettez-moi de vous expliquer comment les renseignements m'étaient transmis quand j'étais ministre de la Sécurité publique. Habituellement, le directeur du SCRS ou l'un des membres de son personnel m'informait que le SCRS avait des renseignements à me transmettre. Il existe une salle sécurisée, ici, à Ottawa, pour ce genre de séance d'information — en fait, il en existe quelques-unes —, et une à Toronto. Je me rendais fréquemment, selon mon emploi du temps, à l'un de ces lieux sécurisés. Dans ce lieu, on me conduisait à une salle, où on me transmettait les renseignements en question sur papier — jamais par courriel. On me donnait l'occasion de lire les documents et de poser des questions à ce sujet.
    La question que vous soulevez, je crois, est la plus importante. On absorbe des renseignements — et les gens croient que c'est ce qui se passe, ce qui pourrait s'être passé ou ce qu'on leur dit qui se passe — et cela soulève des questions. Que se passe‑t‑il ensuite? Quelles sont les étapes suivantes? Que fait‑on de ces renseignements?
    Par exemple, M. Johnston m'a demandé quelle serait ma réponse si l'on m'informait de menaces envers un parlementaire ou sa famille. J'ai répondu que j'appellerais la police. Comment faire autrement? Notre responsabilité première est de protéger les autres, et on ne peut laisser une personne dans une situation périlleuse. Cette question se pose lors de chaque séance d'information relative au renseignement.
    À mon avis, il y a moyen d'améliorer la manière dont cette information est transmise à différentes personnes au sein du gouvernement, particulièrement au ministre de la Sécurité publique et d'autres.
    Voilà qui m'amène à une deuxième question.
    Vous dites avoir voulu appeler la police, en espérant que celle‑ci se saisisse de l'affaire; je comprends cela. Le problème, évidemment, est le suivant: nous savons aujourd'hui que des députés étaient ciblés et qu'ils ne l'ont pas su avant un très long moment. Il est difficile d'intervenir de quelque façon que ce soit si on ne sait pas qu'on est ciblé.
    L'autre difficulté, qu'ont abordée Mme Kwan et M. Chong, réside dans le fait que des communautés ethniques sont ciblées. Certaines personnes font des signalements à la GRC — à la police, comme vous l'avez souligné. Lorsqu'elles leur transmettent ces renseignements, ces personnes trouvent que leurs interlocuteurs ne savent pas trop comment réagir à la situation. Elles obtiennent un numéro de dossier, puis n'entendent plus jamais parler de l'affaire. Elles se sentent menacées. Elles continuent peut-être à vivre cette situation, mais elles ne demandent plus d'aide, parce qu'il ne semble pas y en avoir.
    Je me demande si, dans vos fonctions précédentes, il a été question de la nécessité de bâtir une infrastructure au Canada, de manière à ce que, quand des événements se produisent et que les citoyens communiquent avec la police ou la GRC, il y ait une véritable capacité et une véritable compréhension de l'ingérence étrangère et une intervention significative. Voilà ce qui me préoccupe. Je comprends ce que vous dites, mais il me semble, d'après les témoignages reçus, que la police et la GRC n'ont pas les compétences nécessaires pour intervenir. Pourquoi aurions-nous reçu tant de commentaires de communautés affirmant qu'elles ont demandé... qu'elles reçoivent des numéros de dossier, mais que personne ne les rappelle ensuite?
    Madame, je vous donne quelques éléments de réponse.
    D'abord, quand le SCRS m'a prévenu des activités d'un État étranger hostile, la République populaire de Chine, en particulier, envers des citoyens canadiens, et de la possibilité que cela concerne des parlementaires — bien qu'on n'ait nommé personne en particulier ni mentionné aucun cas d'ingérence précis ou personne précise dans la plupart des cas —, j'ai demandé, par égard pour ces parlementaires et pour ces Canadiens, à ce qu'on tienne des séances d'information de sensibilisation. Il fallait informer ces personnes des formes que prend l'ingérence étrangère, des moyens pour la reconnaître, des mesures à prendre pour se protéger contre elle. Il est inacceptable que les gens demeurent vulnérables à ces attaques, car elles peuvent être insidieuses et assez graves. J'ai demandé à ce qu'on tienne des séances d'information. Je crois que c'était une étape importante.
    Ensuite, vous avez selon moi cerné un défi considérable: le passage du renseignement à la preuve. Les organismes nationaux du renseignement de sécurité recueillent les renseignements, et il est difficile d'être en mesure, ensuite, de se servir de ces renseignements aux fins d'une enquête criminelle ou de poursuites. C'est un travail constant. Je pense qu'il existe certaines interventions et considérations d'ordre législatif et judiciaire dont il faut se préoccuper.
    Laissez-moi aussi reconnaître que je collabore étroitement avec cette diaspora partout au pays. Dans certains cas, ces personnes ont été intimidées ou menacées. Ce sont des enjeux très sérieux. Nous avons la responsabilité de protéger tous les Canadiens, et nos institutions nationales, comme la GRC et le SCRS, partagent cette responsabilité. Nous devons nous assurer qu'elles disposent des ressources adéquates.
    Vous l'avez dit, et je l'ai aussi mentionné dans mon allocution: nous consacrons des ressources supplémentaires considérables à la GRC pour lui permettre, par exemple, de mener ces enquêtes et de protéger ces Canadiens. Cela dit, je reconnais aussi qu'il y reste beaucoup de travail à faire.

  (1235)  

    Merci beaucoup.
    La parole est à M. Cooper, suivi de M. Fergus.
    Monsieur Cooper, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je m'adresse au ministre — par votre entremise, madame la présidente, comme toujours. Connaissez-vous l'arrêt Vanweenan de 1988 de la Cour suprême, aussi répertorié comme l'affaire R. c. Chesson?
    Non, je ne le connais pas.
    D'accord. Le jugement Vanweenan déclare que le SCRS doit identifier les personnes dont on interceptera, selon lui, les communications lors du processus de surveillance pendant la demande de mandat.
    Est‑ce que cela vous dit quelque chose?
    Je sais de quoi vous parlez, maintenant, en effet.
    Merci.
    Saviez-vous que le SCRS doit fournir une liste de tierces parties dont les communications avec la cible d'une surveillance pourraient être interceptées pendant le processus d'une demande de mandat?
    Oui.
    Dans sa demande de mandat visant M. Chan, que vous avez approuvée, le SCRS a‑t‑il nommé des personnes qui pourraient être interceptées pendant la surveillance, des personnes faisant partie du conseil des ministres, des députés ou des hauts fonctionnaires du gouvernement?
    Monsieur Cooper, j'ai fait le serment de n'aborder ou de ne divulguer aucun renseignement...
    Je comprends, monsieur le ministre...
    ... relatif à ces questions, et j'entends respecter ce serment.
    ... alors je vais formuler ma question de manière générale.
    Il n'y a rien de général dans votre question, monsieur Cooper, et je n'y répondrai pas.
    Je vous pose une question...
    J'arrête le chronomètre un instant. Parfois, cela peut être utile.
    Nous le savons tous, une seule personne parle à la fois.
    Monsieur le ministre, je sais que vous n'êtes pas un habitué de notre comité, mais nous vous sommes reconnaissants de prendre le temps de comparaître, et vous avez répondu rapidement à l'invitation. J'ai dit la même chose à Mme Thomas.
    En raison de la culture qui y règne, le Comité permet à ses membres de prendre leur temps. Lorsque je m'aperçois qu'on ne vous donne pas de temps, je m'assure de vous en accorder pour que vous répondiez, mais parfois, en raison de l'importance du sujet abordé, nous savons quelle direction prend l'échange.
    Je me permets de nous ramener dans la bonne direction. Je m'adresse ainsi à tous. Excellent.
    Monsieur Cooper, je vous redonne la parole.
    Je pose la question de manière plus générale.
    Dans quelque demande de mandat que vous ayez approuvée, le SCRS a‑t‑il nommé des personnes qui pourraient être interceptées pendant la surveillance; des membres du conseil des ministres, des députés ou des hauts fonctionnaires du gouvernement?
    Je regrette, monsieur Cooper. Ce sont des renseignements dont je ne suis pas prêt à discuter dans un cadre non sécurisé, simplement parce que j'ai fait le serment de ne pas le faire, et que j'ai intention de respecter mon serment.
    Avez-vous connaissance de communications qu'aurait eues M. Chan avec des membres du conseil des ministres, des députés ou des hauts fonctionnaires du gouvernement?
    Pouvez-vous mettre votre question en contexte? M. Chan est actif depuis longtemps. Je peux vous dire que, quand j'étais chef de police, j'ai rencontré M. Chan à de nombreuses occasions.
    Est‑ce là le fond de votre question?
    D'accord. Depuis quand connaissez-vous M. Chan? A‑t‑il participé à l'une de vos campagnes politiques?
    Je ne crois pas — du moins, pas directement —, mais je connais cet homme. Comme je l'ai dit, je l'ai rencontré lorsque j'étais chef de police à Toronto.
    Le considérez-vous comme un ami?
    Non, monsieur.
    Depuis combien de temps votre cheffe de cabinet connaît-elle M. Chan et travaille‑t‑elle avec lui?
    Je n'en ai aucune idée, monsieur.
    Vous n'en avez aucune idée. D'accord.
    Monsieur le ministre — par votre entremise, madame la présidente —, avez-vous reçu le bulletin quotidien de renseignement étranger du Bureau du Conseil privé, daté du 21 février 2020, qui a révélé l'existence d'un réseau actif d'ingérence étrangère, dirigé par Pékin, lors des élections de 2019?
    Je vais devoir vérifier. Je ne me souviens pas de cette date précise.
    Pour vous rafraîchir la mémoire... le 21 décembre 2022, vous auriez dit, dans un article de Global News, que vous reconnaissez avoir reçu certains renseignements au moyen de cette note de service. Je présume donc que vous avez vu cette note de service.
    Encore une fois, il s'agit d'un document classifié, et je ne peux pas discuter de documents classifiés dans le présent contexte.
    Je comprends tout à fait que vous ne puissiez pas parler de documents classifiés, mais dans la note de service qui a été remise au Comité — ce n'est donc pas un document classifié —, il est question d'un « réseau actif d'ingérence étrangère », dirigé par Pékin, lors des élections de 2019. Ce n'est pas classifié.
    Avez-vous vu ce document?

  (1240)  

    Je suis désolé, monsieur Cooper. J'ai vu un assez grand nombre de documents. Je peux vous dire qu'au cours de cette période, nous avons pris des mesures pour réagir à l'ingérence étrangère perpétrée par la République populaire de Chine contre le gouvernement canadien, mais je ne peux pas parler de ce document particulier.
    Madame la présidente, ce que j'ai dans la main n'est pas un simple accessoire. Je vais essayer de rafraîchir la mémoire du ministre. Il s'agit d'un document, d'une note de service, qui figure parmi les très rares documents qui ont été remis au Comité. La question est revenue sur le tapis à maintes reprises. Je suis surpris que vous ne soyez pas au courant, compte tenu de ce fait, sachant que vous comparaissez ici au sujet de l'ingérence étrangère, puisque vous étiez ministre de la Sécurité publique et que vous avez reconnu, le 21 décembre, avoir reçu certains renseignements.
    Je vous pose à nouveau la question. Avez-vous reçu cette note de service? Étiez-vous au courant de ce réseau d'ingérence dirigé par Pékin? Qu'avez-vous fait de cette information?
    J'aimerais avoir l'occasion de confirmer cela. Je veux donner une réponse franche et directe au Comité pour établir si cette note de service m'a effectivement été transmise. Encore une fois, je ne peux pas voir, de loin, ce que vous avez montré et, de toute façon, on dirait que le document est lourdement caviardé. Quoi qu'il en soit, je ne manquerai pas de vérifier si cette séance d'information a bel et bien eu lieu et quand elle a eu lieu, et je me ferai un plaisir de communiquer la réponse au Comité.
    Très rapidement...
    Non, il n'y a pas de « très rapidement ». Les députés qui siègent ici... Vous savez que le signal sonore a retenti, et vous savez comment je suis. Si je ne gère pas le temps d'une main de fer, vous vous plaignez que je n'ai pas été assez stricte et que nous n'avons pas eu le temps de terminer toutes nos séries de questions. Je n'endurerai plus ces bravades, car après un certain temps, cela commence à faire mal.
    Monsieur Fergus, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, madame la présidente, et, par votre entremise, j'aimerais remercier le ministre et sa sous-ministre déléguée d'être ici aujourd'hui pour répondre à nos questions sur cet enjeu important.
    Monsieur Blair, pouvez-vous nous donner plus de détails sur les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre l'ingérence étrangère?
    Nous avons déployé un certain nombre d'efforts considérables pour gérer l'ingérence étrangère, et surtout l'ingérence électorale, au pays. Ces efforts ont commencé dès 2015.
    Nous avons créé, par exemple, le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement afin de fournir aux parlementaires un aperçu de tous les renseignements que nous recevions et des mesures que nous prenions.
    J'ai d'ailleurs toute une liste ici que je me ferai un plaisir de vous remettre, mais il y a également eu un certain nombre d'investissements assez importants dans la façon dont nous réagissons à cet enjeu. En particulier, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, la GRC a reçu 48 millions de dollars pour renforcer sa capacité de protéger les Canadiens contre les acteurs hostiles. Il y a eu un investissement important de 13,5 millions de dollars dans le Bureau national de lutte contre l'ingérence étrangère à Sécurité publique Canada. Nous nous sommes également employés très fort à améliorer la collecte et l'échange de renseignements dans la mesure du possible.
    J'aimerais simplement souligner, monsieur Fergus, que, durant mon mandat à titre de ministre de la Sécurité publique, le Service canadien du renseignement de sécurité a continué de signaler une menace croissante d'ingérence de la part d'un certain nombre d'acteurs étatiques hostiles, dont notamment la République populaire de Chine. Nous avons pris la décision très consciente d'être très francs et transparents au sujet de cette menace et d'en parler publiquement aux gens. C'est l'une des raisons pour lesquelles j'ai déposé, en décembre 2020, un rapport devant le Parlement pour m'assurer que les gens étaient au courant. J'ai travaillé en étroite collaboration avec le directeur du Service canadien du renseignement de sécurité, qui a fait un certain nombre de déclarations publiques très importantes et, en juillet 2021, nous avons également publié des rapports qui précisaient la nature de cette menace.
    Pendant que le gouvernement faisait des investissements importants et prenait des mesures importantes pour protéger nos élections... De plus — comme vous le savez très bien —, j'aurais dû mentionner qu'un groupe de fonctionnaires a également été mis sur pied pour surveiller les répercussions de l'ingérence politique sur nos élections. Ils ont fait un travail important pour nous afin de déterminer ce qu'il en était. Par ailleurs, Élections Canada a reçu des renseignements pouvant également s'avérer pertinents dans le cadre de son important travail de maintien de l'intégrité de nos élections — par exemple, pour être au courant de cas éventuels de versement de fonds étrangers. Un certain nombre de mesures importantes ont été prises, et ce qui a été clairement établi — ce que nous reconnaissons pleinement —, c'est qu'il reste encore beaucoup à faire.
    C'est pourquoi j'estime, en toute déférence, que le travail important que M. Johnston accomplira à l'avenir, en examinant les enjeux et en mettant à profit son expertise et ses renseignements, nous permettra de déterminer les mesures supplémentaires que nous pourrons prendre à l'échelle nationale pour protéger ces institutions importantes.

  (1245)  

    C'est vraiment important pour ce qui est de l'avenir, mais il faut aussi tenir compte du passé. Vous avez mentionné dans votre témoignage, en réponse aux questions de certains de mes collègues d'en face, que vous n'aviez pas reçu cette information à l'avance.
    Comment pouvez-vous agir en fonction de renseignements dont vous ne disposez pas?
    De toute évidence, monsieur Fergus, c'est chose impossible.
    Je tiens toutefois à être très prudent. Je ne dis pas que le Service canadien du renseignement de sécurité m'a délibérément caché de l'information. Les gens du SCRS prennent une décision en fonction de la crédibilité et du sérieux des renseignements qu'ils ont recueillis, et ils déterminent ainsi ce qui doit être communiqué à un ministre ou au premier ministre, ou même publiquement.
    Dans le cas qui nous occupe, ils ne sont pas arrivés à cette conclusion.
    Il sera très difficile de répondre à cette question en peu de temps, mais pourquoi le système hésite‑t‑il à communiquer au gouvernement des allégations non prouvées et non corroborées en matière de sécurité nationale?
    Je pense que cette question soulève deux points très valables à prendre en considération.
    Tout d'abord, comme il s'agit de renseignements de nature délicate, cela peut avoir des répercussions importantes sur notre réputation, sur nos relations internationales et sur les intérêts des Canadiens. À mon avis, il faut toujours réfléchir attentivement à la façon dont les renseignements sont utilisés ou communiqués.
    Par ailleurs, il faut aussi éviter de compromettre les techniques d'enquête ou le travail de ceux qui risquent leur vie pour recueillir ces renseignements ou qui sont la source de ces renseignements pour le gouvernement canadien.
    Il y a un processus de collecte de renseignements. Les renseignements ne constituent pas, en soi, des faits et des preuves. Ils sont évalués par nos fonctionnaires, qui font de leur mieux pour déterminer ce qu'ils signifient.
    Je vous remercie.
    Madame la présidente, de peur de me faire réprimander, je tiens à vous remercier de m'avoir accordé ce temps supplémentaire.
    Madame Gaudreau, la parole est à vous.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, M. Michael Wernick, ancien greffier du Conseil privé que vous connaissez bien, a comparu mardi pour une deuxième fois devant le Comité.
    En répondant à la dernière question, il nous a dit que le premier ministre devrait annoncer à la Chambre des mesures législatives fortes. Il a même dit hier, pendant une réunion du caucus, que c'était urgent s'il voulait démontrer l'importance de la transparence, de la prise en compte et, surtout, de la confiance.
    Qu'en est-il? On ne peut pas savoir ce qui s'est dit durant la réunion du caucus, mais y a-t-il quelque chose en vue?

[Traduction]

    Oui, madame. C'est une question importante.
    Je pense que le Parlement a un rôle très important à jouer, et il a aussi une responsabilité. Nous avons déjà déterminé, à la suite de consultations, la nécessité d'établir un registre des agents étrangers, qui, à mon avis, sera très important et qui nous fournira des outils très importants.
    Je pense qu'il y a aussi eu une certaine réflexion au sujet de l'application de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. Cette loi a été rédigée en 1984. Le monde a beaucoup changé depuis, et nous croyons qu'il y a des solutions législatives qui seraient appropriées et qui doivent être présentées.
    Les mesures législatives de ce genre ont des répercussions importantes sur les Canadiens, sur le droit à la vie privée et sur la Charte des droits et libertés. C'est pourquoi il est si important non seulement que nous présentions un projet de loi, mais aussi que ce dernier fasse l'objet d'un débat vigoureux au Parlement et dans le cadre des travaux de nos comités. Nous devons tous nous assurer que la réponse législative à ces circonstances est robuste et efficace, mais elle doit aussi être prudente et réfléchie.
    J'espère également que l'examen de M. Johnston nous fournira des idées et des conseils provenant d'un large éventail de Canadiens et représentant des points de vue variés qui sauront éclairer le travail important que nous devons faire pour donner suite à ces enjeux. Ce n'est pas seulement un enjeu d'ordre opérationnel. Il y a une réponse législative que nous devons examiner très attentivement.

  (1250)  

[Français]

    J'aimerais dire que si un particulier, un commissaire ou un juge avait été choisi par l'ensemble des parlementaires, nous aurions été contents. On a entendu durant une réunion de comité qu'on pourrait même nommer un étranger pour s'assurer de son impartialité.
    Chaque fois que l'on parle du rapporteur spécial nommé par le premier ministre, mes concitoyens restent incrédules.
     Il y a quelque chose à faire, et je pense que le gouvernement sait de quoi il s'agit, mais qu'il ne veut pas le faire.
    Merci.
    Je cède la parole à Mme Blaney.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, lorsque vous étiez ministre de la Sécurité publique, le gouvernement a lancé la Commission des pertes massives de la Nouvelle-Écosse. Bien entendu, le mandat était de découvrir ce qui s'était passé ces deux jours‑là.
    J'aimerais en savoir plus sur le processus. Cette commission a‑t‑elle eu à traiter des documents ou des renseignements protégés qui ne pouvaient pas être rendus publics? Le cas échéant, quelles mesures de protection étaient en place pour que la Commission puisse examiner ces documents de nature délicate qui ne pouvaient pas être rendus publics?
    Dans le cadre de l'enquête publique dirigée par le juge MacDonald pour la Commission des pertes massives, un certain nombre de documents d'enquête pertinents, provenant principalement de la GRC, ont été mis à la disposition de la Commission, certains sous une forme caviardée. Les circonstances de cet événement tragique, ainsi que les éléments de renseignement et de preuve qui ont été présentés à la Commission, ne relevaient pas de ce qui serait considéré comme des renseignements très secrets et de nature très délicate. Certains des renseignements étaient de nature secrète, ce qui correspond à un niveau de classification différent, et nous avons été en mesure de travailler très étroitement, par l'entremise du ministère de la Justice, avec la Commission des pertes massives pour mettre le plus d'information possible à sa disposition.
    Je vous remercie.
    Ce sera peut-être ma dernière question, vu le peu de temps dont je dispose. Vous avez parlé tout à l'heure, dans le cadre de nos échanges, de la façon dont les renseignements deviennent des éléments de preuve. Je trouve cela très intéressant, car c'est ce qui permet vraiment de passer à l'action.
    Lorsque nous étudions des enjeux comme l’ingérence étrangère dans nos systèmes et dans nos élections, quelles sont les lacunes à cet égard, et que devons-nous examiner de façon plus générale? Est‑ce que certains de nos partenaires du Groupe des cinq, par exemple, ont pris des mesures qui méritent notre attention? S'agit‑il d'une solution législative, ou est‑ce autre chose?
    Je pense qu'il vaudrait peut-être mieux poser la question aux représentants du ministère de la Justice parce qu'il y a des obstacles juridiques assez importants à... Les modalités de collecte de renseignements, et certains des pouvoirs juridiques utilisés à cette fin, empêchent que ces renseignements servent d'éléments de preuve devant les tribunaux pour des accusations criminelles.
    Il y a des recours législatifs, mais je ne me considère pas comme un expert en la matière. C'est une question qu'il vaudrait mieux poser au ministère de la Justice.
    Je vous remercie.
    Monsieur Berthold, vous avez la parole.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Monsieur Blair, si je vous ai bien compris tout à l'heure, je résumerais vos propos en disant que vous ne niez pas que la demande de mandat de surveillance que vous avez reçue au sujet de Michael Chan comportait des références à d'autres députés et à d'autres ministres libéraux.
    Est-ce bien cela?

[Traduction]

    Je ne crois pas, monsieur. Je ne l'ai ni confirmé ni nié. C'est, bien franchement, une information dont je n'avais pas l'intention de discuter. J'ai prêté serment de ne pas le faire.

[Français]

    D'accord. Vous ne le niez pas non plus. Si cela avait été aussi facile, vous auriez pu nier.

[Traduction]

    Pour être très clair, monsieur, je ne confirme ni n'infirme rien. Je n'en parle tout simplement pas.

[Français]

    Tout à l'heure, vous avez dit que l'article paru dans le Globe and Mail au sujet du délai de quatre mois que vous avez pris pour approuver le mandat était foncièrement incorrect.
    Est-ce exact?

[Traduction]

    C'est exact. L'information rapportée était effectivement incorrecte.

[Français]

    C'est particulièrement pratique de dire qu'un article est faux et de se réfugier ensuite derrière la confidentialité quand vient le temps de parler des faits qui concernent ce mandat.
    Je vous rappelle que nier l'article du Globe and Mail a aussi été la réaction de votre gouvernement dans le dossier de l'affaire SNC‑Lavalin. Nous avons tous vu les résultats de cette affaire et nous savons comment elle s'est terminée.
    Par ailleurs, vous avez dit tout à l'heure avoir été informé que le régime de Pékin avait interféré avec des députés anonymes. Quand avez-vous été informé de cette situation?

  (1255)  

[Traduction]

    Je ne crois pas avoir vraiment dit cela. J'ai dit que les agents de Pékin entreprenaient... Ils dirigeaient un effort d'ingérence.
    Je m'inquiétais du risque que certains députés fassent l'objet d'ingérence à leur insu. Je voulais m'assurer qu'ils étaient suffisamment informés et sensibilisés en ce qui concerne cette ingérence, les façons de la déceler et les mesures à prendre pour se protéger. J'ai demandé au Service canadien du renseignement de sécurité de tenir des séances d'information, mais on ne m'a pas dit qui étaient les députés visés ni quelle était la nature de l'ingérence qu'ils pouvaient subir.

[Français]

    Alors, quand le Service canadien du renseignement de sécurité vous a-t-il informé que ces députés anonymes, comme vous l'avez vous-même mentionné tout à l'heure, pouvaient être la cible du régime de Pékin?

[Traduction]

    Soyons bien clairs: le Service canadien du renseignement de sécurité ne m'a pas donné le nom d'un député en particulier, ni même d'un certain nombre de députés. Je me faisais du souci pour nous tous, c'est‑à‑dire pour vous tous et pour nous. S'il y a un risque, nous devons vous en informer afin que vous puissiez vous protéger.

[Français]

    Vous ne vous êtes pas simplement levé un matin en vous disant qu'il faudrait avertir tous les députés. Vous avez reçu un rapport qui vous a suffisamment inquiété pour que vous décidiez de renseigner davantage les députés.
    Quand avez-vous été informé que ces opérations pouvaient se dérouler? C'est une question simple.

[Traduction]

    Vous vous en souvenez peut-être, parce que je vous ai envoyé, à vous et à tous les autres députés, une lettre en décembre 2020 dans laquelle je décrivais l'ingérence politique de la République populaire de Chine. C'était une missive de 12 pages. Je l'ai déposée au Parlement; je l'ai publiée sur le site Web, et je vous en ai envoyé une copie.
    Je sais. Quand le Service canadien du renseignement de sécurité vous a‑t‑il informé que vous deviez avertir le député de cette situation?
    Le Service canadien du renseignement de sécurité ne m'a pas dit que je devais en informer le député. Nous avons discuté...
    Non. Quand vous a‑t‑on informé qu'il fallait faire quelque chose? Quelqu'un doit vous l'avoir dit.

[Français]

     Quelqu'un a dû vous informer, monsieur le ministre de la Protection civile. Vous n'avez pas pris l'initiative, un matin, d'envoyer une lettre à tous les députés pour leur demander de faire attention.
    Que s'est-il passé? Comment en êtes-vous arrivé à cette conclusion? Qui vous a conseillé d'envoyer cette lettre?

[Traduction]

    À titre de ministre de la Sécurité publique, je recevais de l'information sur les activités menées par des acteurs étatiques hostiles, notamment la République populaire de Chine. Personne ne m'a dit de vous avertir. C'est une décision que j'ai prise. C'était mon travail de vous protéger et de protéger tous les Canadiens et nos institutions.
    Je me suis dit que la meilleure façon de le faire était de vous informer afin que vous soyez conscients de la menace. J'ai aussi suggéré à ce moment au SCRS de procéder à des séances de sensibilisation avec ceux qui, selon eux, étaient tout particulièrement vulnérables aux menaces d'ingérence. Ils ne m'ont pas dit de qui il s'agissait et les raisons, mais j'ai appris par la suite qu'ils ont tenu un certain nombre de ces séances.
    Pourquoi n'avez vous pas posé de question à ce sujet? Il s'agissait d'une menace pour notre démocratie, pour des députés. Pourquoi n'avez-vous pas demandé si des députés étaient ciblés en particulier? C'était votre responsabilité en tant que ministre. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait?
    Eh bien, il s'agit de questions opérationnelles qui relèvent du SCRS. Ils recueillaient du renseignement et travaillaient et prenaient des mesures en collaboration avec d'autres organismes canadiens de renseignement de sécurité pour protéger les députés.
    Je n'ai pas reçu d'information me disant qu'un député était ciblé ou qu'il était d'une quelconque façon menacé d'être la cible d'ingérence. Toutefois...
    Je vais vous arrêter ici. Il est parfois bon d'avoir une réponse complète sans que j'aie à interrompre les gens. Les membres savent que quand le chronomètre s'arrête, ils ne peuvent rien ajouter, mais il s'agit simplement de donner à la personne dont on dit attendre de l'information importante la chance de nous fournir cette information.
    Monsieur le ministre, je suis certaine que vous avez remarqué qu'il est presque 13 heures. Pouvez-vous m'accorder un peu plus de temps?
    Oui, madame la présidente, bien sûr.
    J'ai des obligations dans environ 15 ou 20 minutes, mais je serai heureux de vous accorder un peu plus de temps.
    Nos interprètes sont à pied d'œuvre depuis près de trois heures, alors nous ne voulons pas prolonger trop longtemps, mais je vais céder la parole rapidement à Mme Romanado pendant cinq minutes.
    Je vous remercie beaucoup, madame la présidente. Par votre entremise, j'aimerais remercier le ministre d'être avec nous.
    J'aimerais rebondir sur la précédente série de questions.
    Monsieur le ministre, je sais que l'information que vous avez acheminée aux députés est une initiative que vous avez prise à la suite de la motion sur l'ingérence étrangère qui a été déposée à la Chambre le 18 décembre 2020. Je vous remercie d'avoir pris cette initiative à ce moment pour sensibiliser les députés à ce problème en déposant un rapport à la Chambre et en faisant parvenir une missive à tous les députés directement. Si ma mémoire est bonne, je crois que nous l'avons même reçue par courrier traditionnel, avec un exemplaire imprimé du rapport, pour vous assurer que nous avions bien reçu le tout, étant donné le nombre de courriels que nous recevons. Je tiens à vous remercier d'avoir porté ce problème à l'attention des députés.
    Nous avons entendu parler un peu plus tôt, lors de mes échanges avec la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement, de l'importance de veiller à ce que les députés, les sénateurs et leur personnel comprennent en quoi consiste l'ingérence étrangère, quelle forme elle peut prendre, et quels genres de tactiques utilisent les acteurs étatiques hostiles pour soutirer de l'information aux parlementaires.
    Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de l'idée qu'il s'agit d'une responsabilité réciproque? Par exemple, les services de renseignement ne comprennent vraiment pas la politique, et les politiciens ne comprennent pas toujours les services de renseignement. Les députés peuvent être au courant de renseignements qui seraient utiles aux services de renseignement, mais nous ne savons pas que ces renseignements peuvent être utiles.
    Encore une fois, pouvez-vous nous parler de l'importance d'accroître la sensibilisation chez les parlementaires, et nous dire ce que nous pouvons faire pour nous entraider et nous assurer de collaborer pour prévenir et combattre l'ingérence étrangère?

  (1300)  

    C'est une question très importante.
    Je dirai tout d'abord que comme politiciens, nous travaillons dans des communautés très diversifiées et avec des diasporas qui sont venues du monde entier pour s'installer au Canada. Elles ont également ici des représentants gouvernementaux de leur pays d'origine. L'une de nos responsabilités en tant que politiciens est de travailler avec ces diasporas, mais aussi avec certains de ces organismes ou acteurs gouvernementaux.
     Je pense que chaque gouvernement tente, de manière positive, d'exercer une certaine influence sur le gouvernement du Canada. C'est une chose dont nous sommes tous conscients et pouvons faire l'objet, mais il est très important que les politiciens soient conscients que cette tentative d'influence peut parfois dépasser les limites et prendre la forme d'une ingérence. Il est important parfois que les gens comprennent ces intentions malveillantes et qui sont ces acteurs étatiques hostiles. Ils ne s'emploient pas simplement à avoir de bonnes relations ou à servir leur communauté; ils peuvent avoir d'autres intentions.
     Éduquer et informer les parlementaires pour qu'ils sachent quand cette tentative d'influence dont nous faisons tous l'expérience au quotidien peut se traduire par des actes d'ingérence... Nous devons en être conscients. Nous devons nous assurer de protéger l'intégrité de notre travail, l'intégrité de nos institutions et, bien sûr, l'intégrité de nos élections. Je pense que notre première ligne de défense consiste à avertir les gens de cela.
     Il y a d'autres mesures que nous pouvons prendre et prenons pour protéger nos institutions, mais notre meilleure ligne de défense est d'informer, tout d'abord, ceux d'entre nous qui travaillent dans les communautés, et aussi de communiquer l'information aux Canadiens afin qu'ils sachent comment se protéger et comment être plus résilients face à certaines tentatives d'ingérence ou même à certaines actions que nous savons d'être produites au pays. Il est très important de mettre cela en évidence, et d'informer les gens à ce sujet. Je pense que c'est un enjeu important.
     C'est ce que j'essayais de faire lorsque j'ai publié le rapport... Je l'ai rendu public. Il était sur notre site Web. Je voulais m'assurer que les Canadiens puissent le voir, mais je savais aussi que l'envoyer à tous les parlementaires était le meilleur moyen de diffuser cette information dans toutes les régions du Canada, dans toutes les communautés, par l'intermédiaire de nos collègues au Parlement.
    Je vous remercie beaucoup.
    Par ailleurs, je sais que nous avons parlé un peu plus tôt de l'allusion qui a été faite à un courriel secret auquel vous n'avez pas eu accès. Vous avez été très clair: ce n'est pas ainsi que les choses fonctionnent.
     Les informations qui doivent vous parvenir ne sont pas envoyées par courrier électronique, comme votre compte Gmail, dont vous êtes le seul à détenir le mot de passe. Il s'agit d'un terminal physique qui n'est pas situé dans votre bureau. Il est situé dans un endroit sécurisé et, pour pouvoir accéder à ces informations, quelqu'un ayant une habilitation très secrète doit les faire imprimer et s'assurer que vous en êtes informé dans un endroit sécurisé. Est‑ce exact?
    C'est exact. Il n'y avait pas de terminal sécurisé très secret dans le bureau du ministre, et il ne devrait pas y en avoir. Ces informations sont hautement classifiées et sensibles et doivent être traitées avec le plus grand soin. Le SCRS recense, en fait, ce qui doit être... En raison du principe du besoin de savoir, les organismes canadiens de renseignement de sécurité évaluent s'il s'agit d'informations que le ministre a besoin de connaître, et, le cas échéant, il me la communique. Dans le cas contraire, l'information ne me parvient pas.

  (1305)  

    Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie beaucoup de votre temps et de votre attention.
    Madame Geddes, vous n'avez pas eu de questions ou de commentaires, et le ministre n'a pas eu besoin de vous pour nous éclairer, ce qui signifie qu'il est bien au courant de son dossier. Souhaitez-vous ajouter quelque chose aujourd'hui?
    Je tiens à souligner qu'il revient au ministère et à l'organisme de renseignement d'accéder à ces réseaux pour fournir l'information. En fait, en tant que sous-ministre, je n'ai pas non plus accès à ces terminaux. Nous comptons sur notre personnel pour veiller à ce que le renseignement nous soit fourni en temps opportun.
    Si d'autres informations vous viennent à l'esprit, que ce soit plus tard ou à n'importe quel moment, veuillez les faire parvenir au greffier, qui les fera traduire dans les deux langues officielles et les communiquera aux membres.
     Sur ce, au nom des membres du Comité, je vous remercie du temps et de l'attention que vous nous avez accordés aujourd'hui. Nous vous souhaitons le meilleur pour la suite.
     Je mentionne à l'intention des membres du Comité que le mardi 6 juin, nous accueillerons le très honorable David Johnston. Notre demande de dérogation ayant été acceptée, la réunion durera trois heures ce matin‑là.
     Nous nous reverrons bientôt. Portez-vous bien et soyez prudents. À mardi prochain.
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