La procédure et les usages de la Chambre des communes
Sous la direction de Robert Marleau et Camille Montpetit
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18. Les procédures financières

Les comptes du Canada

Le rôle financier de la Chambre des communes ne se termine pas avec le vote de crédits ou de mesures autorisant la création de recettes. La Chambre veille également à ce que les fonds fédéraux soient dépensés selon les montants et les fins autorisés par le Parlement [398] . Cette fonction de contrôle (souvent appelée « boucler la boucle ») est essentiellement assurée par le Comité permanent des comptes publics, qui examine les Comptes publics du Canada, ainsi que tous les rapports du vérificateur général du Canada, et qui fait rapport de ses constatations [399] .

Les comptes publics du Canada

En vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques, le receveur général [400]  doit s’assurer que des comptes sont tenus pour chaque ministère et organisme du gouvernement. Ces comptes doivent indiquer toutes les dépenses effectuées au titre de chaque crédit, les recettes de l’État et les autres versements portés au crédit ou au débit du Trésor [401] , ainsi que les ressources, les charges et les réserves correspondantes qui sont jugées nécessaires à une présentation fidèle de la situation financière du Canada [402] . Les comptes de chaque ministère et organisme sont consolidés dans les comptes du Canada.

Chaque année, le président du Conseil du Trésor dépose un rapport détaillé des opérations financières de tous les ministères et organismes, qui s’intitule les Comptes publics du Canada. Le rapport doit être déposé [403]  au plus tard le 31 décembre suivant la fin de l’exercice visé par les comptes; ou si la Chambre ne siège pas, dans les 15 premiers jours de séance de la Chambre [404] . Par pure tradition, les Comptes publics sont adressés au gouverneur général.

La raison d’être des Comptes publics du Canada est de fournir au Parlement — et partant au public — l’information qui lui permettra de comprendre et d’évaluer la position financière et les activités du gouvernement. Deux principes constitutionnels sont à la base du système de comptabilité publique : tous les droits et recettes qui échoient au gouvernement forment le Trésor et le solde de celui-ci, après diverses imputations préalables, est approprié par le Parlement du Canada pour les services publics [405] .

La forme et le contenu des Comptes publics sont la responsabilité du président du Conseil du Trésor [406]  et du ministre des Finances [407] . Les états financiers sont établis sous la direction commune du président du Conseil, du ministre des Finances et du receveur général du Canada [408] . La loi dispose que les comptes doivent comporter, pour l’exercice visé, les états de toutes les opérations financières du gouvernement, les états de toutes les dépenses et recettes; les états des ressources et charges directes ou éventuelles du Canada; l’avis du vérificateur général sur les comptes, conformément à la Loi sur le vérificateur général; et tout compte et toute information que le président du Conseil et le ministre des Finances jugent nécessaires à une présentation fidèle de la situation financière du Canada à la fin de l’exercice [409] .

Les Comptes publics se divisent en deux volumes, publiés sous forme de trois documents distincts. Le Volume I renferme l’avis du vérificateur général; les états financiers sur lesquels il donne son avis; un résumé des opérations financières du Canada depuis 10 ans; une analyse des recettes et dépenses, et des ressources et des charges; et divers résumés de recettes, dépenses, prêts et investissements à l’échelle du gouvernement. Le Volume II se divise en deux parties : la première donne le détail des opérations financières du gouvernement, réparties par ministère; la seconde fournit des informations et des analyses complémentaires, comme les états financiers des fonds renouvelables, des paiements de transfert et des frais de la dette publique [410] .

Jusqu’en 1993, les Comptes publics comprenaient un troisième volume renfermant des informations financières sur les sociétés d’État. Le Volume III a été remplacé par le Rapport annuel au Parlement : les sociétés d’État et les autres sociétés dans lesquelles le Canada détient des intérêts; il s’agit d’un rapport consolidé des activités et des opérations de toutes les sociétés d’État et de celles dans lesquelles le gouvernement du Canada a des intérêts [411] . Le rapport annuel est établi par le Secrétariat du Conseil du Trésor pour le président du Conseil du Trésor, qui le dépose à la Chambre [412] .

Le vérificateur général du Canada

Le vérificateur général du Canada est un mandataire du Parlement, nommé par le gouverneur en conseil en vertu de la Loi sur le vérificateur général, pour vérifier les comptes du Canada et enquêter sur les activités financières du gouvernement fédéral [413] . Il est nommé pour un mandat de 10 ans ou jusqu’à l’âge de 65 ans, selon le cas. Le mandat n’est pas renouvelable. Le poste a été créé par l’Acte des comptes publics de 1878 [414] . Cette loi a été remplacée en 1886 et en 1931 par l’Acte du revenu consolidé et de l’audition [415]  qui a été remplacé à son tour par la Loi sur l’administration financière [416]  en 1951. À l’origine, le vérificateur n’était responsable que de la vérification des dépenses, avant qu’elles ne soient faites (vérification avant paiement) et une fois qu’elles l’étaient (vérification après paiement). En 1977, le Parlement a adopté l’actuelle Loi sur le vérificateur général, qui élargit le mandat du vérificateur au-delà du simple contrôle de l’exactitude des états financiers du gouvernement, l’autorisant à vérifier si le gouvernement gère bien ses activités financières [417] .

En tant que vérificateur des Comptes du Canada, le vérificateur général examine les états financiers du gouvernement afin de s’assurer que l’information est présentée fidèlement, conformément aux conventions comptables énoncées et de façon cohérente par rapport à l’année comptable précédente. La Loi sur la gestion des finances publiques [418]  établit des responsabilités additionnelles dans le cas d’examens spéciaux concernant les sociétés d’État. Le vérificateur général a le pouvoir d’entreprendre les examens et enquêtes qui lui paraissent nécessaires pour lui permettre de faire rapport comme il est prévu par la Loi sur le vérificateur général [419] .

Le Bureau du vérificateur général effectue trois types de vérifications — soit d’attestation, de conformité et d’optimisation des ressources. La vérification d’attestation a pour but de vérifier que le gouvernement tient les dossiers nécessaires et qu’il présente fidèlement sa situation financière globale [420] . Les vérifications de conformité examinent si le gouvernement perçoit et dépense seulement les crédits autorisés par le Parlement et aux seules fins approuvées par celui-ci. Enfin, les vérifications de l’optimisation des ressources vérifient si les programmes du gouvernement ont été exécutés de manière économique et avec le souci de leurs effets sur l’environnement. Elles confirment aussi au Parlement que le gouvernement dispose des moyens voulus pour mesurer l’efficacité de ses programmes [421] . Depuis 1995, il est aussi chargé de vérifier dans quelle mesure les activités des ministères atteignent les objectifs en matière d’environnement et de développement durable [422] .

Si cela ne fait pas entrave aux attributions principales du Bureau, le gouverneur en conseil peut demander au vérificateur général de faire enquête et rapport sur toute question liée aux affaires financières du Canada ou aux biens publics, ainsi que sur toute personne ou organisation qui a reçu ou sollicite l’aide financière du gouvernement [423] .

Le Rapport annuel

Chaque année, le vérificateur doit remettre un rapport à la Chambre des communes dans lequel il porte à son attention les cas où il a constaté que :

  • les comptes n’ont pas été tenus d’une manière régulière ou qu’il n’a pas été correctement rendu compte des deniers publics;
  • les procédures comptables appliquées ont été insuffisantes pour assurer un contrôle efficace du recouvrement et de la dépense des deniers publics;
  • des sommes ont été dépensées sans souci d’économie ou d’efficience ou à d’autres fins que celles approuvées par le Parlement;
  • des procédures adéquates pour mesurer et faire rapport sur l’efficacité des programmes n’ont pas été mises en place [424] .

La Loi sur le vérificateur général dispose que le rapport annuel doit être remis au Président de la Chambre des communes au plus tard le 31 décembre de l’année à laquelle il se rapporte et que, dès réception du rapport, le Président le dépose sans délai. Si la Chambre ne siège pas, le rapport est déposé dans les 15 jours de séance qui suivent sa réception [425] . À la demande du vérificateur général, le Président a souvent accepté de déposer le rapport à une heure précise, soit juste avant les « Déclarations de députés », mais il n’existe aucune obligation à cet égard [426] . Une fois déposé, le rapport est automatiquement renvoyé au Comité permanent des comptes publics [427] . Avant le dépôt du rapport à la Chambre, le vérificateur donne habituellement une séance d’information, à huis clos, sur le contenu du rapport aux membres du Comité des comptes publics. En outre, le président du Comité invite habituellement les députés à un huis clos [428] , qui leur permet d’examiner le rapport qui sera déposé plus tard ce jour-là et d’obtenir des explications des responsables. Normalement, il se tient aussi un huis clos semblable pour les médias.

La Loi a été révisée en 1994 pour autoriser le vérificateur général à présenter jusqu’à trois rapports par année en sus de son rapport annuel, de tout rapport spécial sur une affaire très importante ou urgente ou de tout rapport spécial sur le financement du Bureau du vérificateur général [429] . Avant le dépôt d’un rapport supplémentaire, le Président doit être informé par écrit du sujet du rapport, et le rapport lui-même est remis au Président le trentième jour suivant le préavis ou à l’expiration d’un délai plus long, indiqué dans l’avis [430] . Le Président doit déposer le rapport sans délai ou, si la Chambre ne siège pas, dans les 15 jours de séance suivant la réception du rapport.

Depuis l’entrée en vigueur des dispositions de 1994, le rapport annuel du vérificateur général est déposé en plusieurs volumes, le premier étant déposé au printemps, le second à l’automne et le dernier en novembre ou décembre [431] . Le dernier volume déposé, qui est toujours désigné comme le rapport « annuel », renferme les parties portant sur les « Questions d’une importance particulière », ainsi qu’un suivi des rapports précédents. Chaque volume comprend un avant-propos du vérificateur général, ainsi que des chapitres, numérotés individuellement [432], sur les diverses études effectuées et les vérifications d’optimisation des ressources des ministères et organismes. Au besoin, des notes de vérification peuvent être incluses dans l’un ou l’autre volume.

Le Comité permanent des comptes publics

Aux termes du Règlement, tous les rapports du vérificateur général, ainsi que les Comptes publics du Canada, sont automatiquement renvoyés au Comité permanent des comptes publics dès qu’ils sont déposés à la Chambre [433] . Depuis 1987, le Comité est également chargé de l’examen du budget annuel du Bureau du vérificateur général.

Depuis 1958, le Comité est présidé par un député de l’Opposition officielle, les partis y étant représentés proportionnellement à leur nombre à la Chambre [434] . Le Comité a comme fonctions principales de s’assurer que les deniers publics sont dépensés aux fins approuvées par le Parlement, que les dépenses de luxe et le gaspillage sont strictement limités et que de saines méthodes de gestion sont appliquées dans les prévisions, les contrats et l’administration en général. Le Comité ne s’interroge pas sur le bien-fondé de la politique du gouvernement, mais il se préoccupe plutôt des aspects économiques et efficaces de son administration. Le Comité fait régulièrement part de ses constatations à la Chambre. Ses rapports renferment habituellement des conclusions et des recommandations sur des questions visant l’amélioration des méthodes et contrôles financiers et de gestion des ministères, des organismes et des sociétés d’État.


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