Attribution du droit de parole
À quelques exceptions près,
un député peut prendre la parole sur toute motion qui a
été présentée à la Chambre et qui peut faire
l’objet d’un
débat [4].
Dans
la gestion du débat relatif à une motion, le Président a la
responsabilité de déterminer l’ordre dans lequel les
députés se voient accorder la parole et d’appliquer les
règles du débat se rapportant à des questions comme la
règle d’une seule intervention sur une motion, le droit de
réplique et les interventions injustifiées.
Ordre de parole habituel
Le Règlement n’établit
pas d’ordre officiel pour l’attribution du droit de parole aux
députés; le Président s’en remet à cet
égard à l’usage et aux précédents de la
Chambre. Le Règlement autorise seulement celui-ci à donner la
parole au député qui la demande en se levant de son
siège [5] .
Le
député que le Président « aperçoit » le
premier obtient la parole. On parle communément, dans ce cas,
d’« attirer l’attention du Président ». Cette
expression, qui remonte aux premiers temps de la procédure
britannique [6] ,
s’est implantée dans la terminologie parlementaire. Les whips des
divers partis fournissent chacun au Président une liste de
députés qui souhaitent prendre la parole, mais celle-ci sert
seulement de guide [7] .
Par tradition, on donne souvent une certaine priorité de parole à
certains députés, comme les chefs de parti, les ministres lorsque
c’est à
propos [8]
et, souvent,
les porte-parole de l’opposition. Le Règlement accorde des droits
spéciaux à un nombre limité de députés, dont
le premier ministre et le chef de l’Opposition, mais ces droits ont
seulement trait à la durée de leurs
discours [9] .
Le
Président a toute latitude de donner la parole aux
députés [10] ,
mais il peut observer les dispositions non officielles éventuellement
prises [11] ,
ou encore
être lié par un ordre de la Chambre établissant un ordre de
parole
précis [12] .
Dans l’ordre de parole habituel,
après qu’une motion a été présentée
à la Chambre, le Président donne la parole au motionnaire en
premier. Si celui-ci choisit de ne pas intervenir, il est néanmoins
réputé avoir eu la parole; il est réputé avoir dit
« je propose » en faisant simplement un signe de tête, et
l’on considère qu’il est intervenu au cours du
débat [13] .
Le
député qui appuie une motion n’est pas tenu de prendre la
parole sur celle-ci à ce moment-là, mais il peut le faire plus
tard au cours du
débat [14].
Le Président
« aperçoit » ensuite les députés des
côtés opposés de la Chambre selon une rotation raisonnable,
en tenant compte du nombre de membres des divers partis reconnus qui
siègent à la
Chambre [15], du droit
de réplique [16]
et de la nature des travaux. Par exemple, au cours de la première ronde
du débat sur les Ordres émanant du gouvernement, le
Président donne la parole à un représentant du gouvernement
et à un député de chacun des partis d’opposition
reconnus s’ils se lèvent pour intervenir. Lors des rondes suivantes
du débat, il alterne entre les députés du gouvernement et
ceux de l’opposition. Par le passé, le Président a
donné la parole à des députés indépendants et
à des députés de partis non reconnus seulement après
que les députés des partis reconnus avaient participé au
débat proportionnellement à leur nombre à la
Chambre [17] .
Lors de
l’étude des Affaires émanant des députés, le
Président redouble de prudence lorsqu’il donne la parole aux
députés et s’assure que tous les partis et tous les groupes
représentés à la Chambre se font entendre et que tous les
points de vue sur la question soumise au débat sont exprimés. Les
jours réservés aux travaux des subsides, le Président peut
donner plus souvent la parole aux députés du parti qui parraine la
motion de
l’opposition [18].
Au cours de la période de questions
et d’observations de 10 minutes qui suit la plupart des
discours [19] ,
les
députés peuvent poser des questions au député qui
vient de terminer son discours, ou faire de brèves remarques sur ce
discours. Au moment de donner la parole aux députés, le
Président accorde alors la préférence à ceux qui
appartiennent à des partis autres que celui de l’orateur initial,
sans toutefois exclure les députés du parti de ce
dernier [20] .
Si la
période de questions et d’observations est interrompue par
d’autres travaux, lors de la reprise du débat sur la motion, cette
période se poursuit seulement si le député qui a
prononcé le discours initial est
présent [21] .
Comme aucun temps précis n’est réservé pour la
durée de chaque question ou observation, le Président
détermine parfois combien de députés souhaitent participer
à la période de questions et d’observations, puis
répartit le temps alloué à chaque intervention en
conséquence. Les députés qui se voient accorder la parole
au cours de la période de questions et d’observations n’ont
pas le droit de présenter des motions
dilatoires [22] ,
de
proposer des
amendements [23] ,
ou de
présenter des motions tendant à prolonger les heures de
séance [24] .
Motion portant qu’un député soit maintenant entendu
La décision du Président sur
la question de savoir qui a le droit de parole au cours d’un débat
peut être modifiée par la Chambre sur une motion portant
qu’un autre député « soit maintenant entendu ». La
décision prise sur cette motion règle immédiatement
l’ordre du débat.
Lorsque deux députés se
lèvent en même temps pour « attirer l’attention du
Président », celui-ci donne la parole à l’un
d’eux. En invoquant le Règlement, un autre député
peut proposer que le député qui ne s’est pas vu accorder la
parole
l’obtienne [25] .
La présentation de la motion portant « qu’un
député soit maintenant entendu » est une exception à la
règle selon laquelle une motion ne peut être proposée sur un
rappel au Règlement. Cette motion ne peut être
présentée si le député à qui le
Président a donné la parole en premier lieu a déjà
commencé à
parler [26] .
Si le
Président déclare la motion recevable, celle-ci est mise aux voix
aussitôt sans débat. Un vote par appel nominal peut avoir lieu. Si
la motion est adoptée, le député qui y est
désigné peut prendre la
parole [27] .
Si elle
est rejetée, le député qui avait obtenu la parole à
l’origine conserve son droit de
parole [28] .
Une
deuxième motion portant « qu’un député soit
maintenant entendu » peut seulement être présentée
après que celui qui a obtenu la parole a terminé son
discours [29] .
Il est
donc impossible de présenter une série de ces motions dans le but
d’empêcher un député particulier de prendre la parole.
De plus, la motion ne peut être présentée :
- si la Chambre n’est saisie d’aucune motion sujette à
débat [30] ;
- si personne ne s’est encore
vu donner la
parole [31] ;
- si le député
désigné dans la motion ne s’est pas levé à
l’origine pour demander la
parole [32] ;
- pour donner la parole à un
député dont le discours aurait pour effet de clore le
débat [33] ;
- au cours de la période de
questions et d’observations consécutive à un
discours [34] ;
- si la Chambre a adopté un
ordre précisant l’ordre des interventions au cours du
débat [35] .
Octroi de la parole lors du rappel d’un ordre
Un député dont le discours
est interrompu soit en vertu d’un article du Règlement ou
d’un ordre
spécial [36] ,
soit par l’adoption d’une motion d’ajournement du
débat, peut poursuivre son intervention jusqu’à
l’expiration du temps qui lui est alloué, lors de la reprise du
débat sur la motion. De même, si les travaux sont suspendus, le
député qui a la parole à ce moment-là conserve le
droit d’intervenir lors de la reprise des
travaux [37] .
Si ce
député n’est pas présent à la Chambre lorsque
celle-ci reprend le débat, il est réputé avoir perdu la
parole et avoir terminé son
intervention [38] .
Ce
principe s’applique également à la période de
questions et d’observations, à savoir que, si le
député qui a prononcé le discours n’est pas
présent au moment de la reprise du débat, la période de
questions et d’observations ne se poursuit pas, et un autre
député obtient la
parole [39] .
Conservation du droit de parole après une cérémonie de sanction royale
Si l’huissier du bâton noir se
présente à la Chambre muni d’un message du gouverneur
général convoquant celle-ci au Sénat pour une
cérémonie de sanction royale, les travaux de la Chambre sont
interrompus [40] .
Aucun
député ne se voit accorder la parole pour faire un rappel au
Règlement ou pour soulever une question de
privilège [41] .
À son retour du Sénat, la Chambre reprend ses travaux là
où elle les avait laissés, et la séance continue; le
député dont le discours a été interrompu par
l’arrivée de l’huissier du bâton noir obtient la parole
pour poursuivre son
discours [42] .
Octroi de la parole avant et après les votes
Une fois que le Président a mis une
question aux voix, aucun autre débat n’est permis. Ni les rappels
au Règlement ni les questions de privilège ne sont
admis [43] .
En fait,
les députés doivent rester assis jusqu’à
l’annonce du résultat du vote. Toutefois, il est arrivé que
des députés invoquent le Règlement après
l’annonce d’un vote par appel nominal pour expliquer pourquoi ils
s’étaient abstenus de
voter [44] ,
ou comment
ils auraient voté s’ils avaient été présents
à la Chambre lors de la mise aux
voix [45] ,
ou comment
ils souhaitaient voir leur vote inscrit lors de votes subséquents
auxquels on devait appliquer les
résultats [46] .
À l’occasion, des députés ont invoqué le
Règlement après un vote afin de solliciter le consentement unanime
de la Chambre pour modifier leur
vote [47] .
Toutefois,
un député ne doit pas faire un rappel au Règlement pour
commenter la façon dont un autre député a
voté [48] .
Une seule intervention sur une motion
Pour accélérer la conduite
des travaux de la Chambre, le Règlement prévoit qu’aucun
député ne peut intervenir deux fois au cours du débat sur
quelque motion que ce
soit [49] .
Si, par
inadvertance, un député demande la parole une seconde fois, le
Président l’interrompt et donne la parole à un autre
député [50] .
Une motion, un amendement et un
sous-amendement constituent trois questions distinctes et sont traités
comme tels aux fins de la règle d’une seule intervention par
question [51] .
Toutefois, un amendement n’est pas une question distincte avant que le
Président le présente à la Chambre. Par conséquent,
le député qui propose un amendement est réputé avoir
pris la parole non seulement sur l’amendement, mais aussi sur la motion
principale [52] .
De
même, le député qui propose un sous-amendement est
réputé être intervenu aussi sur l’amendement et ne
peut intervenir de nouveau, mais cela ne touche pas son droit de prendre la
parole sur la motion
principale [53] .
Après qu’un amendement (ou un sous-amendement) a été
proposé, appuyé et présenté à la Chambre,
tout député qui demande la parole intervient sur
l’amendement (ou le sous-amendement). Une fois qu’un amendement (ou
un sous-amendement) a été adopté ou rejeté, tout
député qui n’est pas encore intervenu sur la motion
principale (ou l’amendement) peut le faire. Une motion principale
modifiée n’est pas considérée comme une nouvelle
question; seuls les députés qui ne sont pas encore intervenus sur
la motion principale peuvent prendre la parole sur la motion
modifiée [54] .
Tout député qui demande la
parole pour présenter une motion sujette à débat doit
donner le nom d’un deuxième député qui appuie
officiellement celle-ci. Un ordre émanant du gouvernement doit être
présenté par un ministre, mais il peut être appuyé
par n’importe quel
député [55] .
Si le
motionnaire choisit de ne pas prendre la parole immédiatement après la
présentation de la motion à la Chambre, il perd son droit d’intervenir sur
celle-ci, sauf en réplique [56] .
L’appuyeur
peut se voir accorder le droit d’intervenir sur la motion plus tard au cours du
débat [57].
Si un
député présente une motion dans le cadre de son discours (par exemple, un
amendement ou une motion d’ajournement du débat), cela met automatiquement fin à
son discours [58] .
Un député qui
est déjà intervenu sur une question ne peut demander la parole de nouveau pour
proposer ou appuyer un amendement ou pour présenter une motion d’ajournement du
débat ou de la Chambre, mais il peut intervenir sur un amendement proposé par un
autre député [59] .
Si la Chambre
rejette une motion d’ajournement du débat, le motionnaire est réputé avoir
épuisé son droit de parole sur la question principale [60] .
Toutefois, si
la motion est adoptée, le motionnaire est autorisé à intervenir en premier lors
du prochain rappel de l’Ordre. S’il ne prend pas la parole à ce moment-là, il
perd l’occasion d’intervenir [61] .
De
temps à autre, la Chambre autorise par consentement unanime un député à
intervenir une seconde fois sur une motion [62] .
Le Règlement
prévoit en outre des exceptions à la règle d’une seule intervention par
question. Premièrement, bien que cela se produise rarement depuis
l’instauration, en 1982, de la période de questions et d’observations de 10
minutes [63] ,
un député peut
être autorisé à intervenir une seconde fois afin d’expliquer une partie
importante de son discours pouvant avoir été mal citée ou mal
interprétée [64] .
Le député doit
pour cela invoquer le Règlement et se borner à expliquer la citation ou
l’interprétation présumée erronée; il ne peut introduire aucun élément
nouveau [65] .
Deuxièmement,
le Règlement accorde en outre aux auteurs de certains genres de motions le droit
d’intervenir une seconde fois lorsqu’aucun autre député ne souhaite prendre la
parole [66] .
C’est ce qu’on
appelle le « droit de réplique ».
Le droit de réplique
Tout
député qui a présenté une motion de fond a le droit d’intervenir une seconde
fois pour clore le débat [67] .
La coutume
s’est établie d’accorder également ce droit au député qui propose la deuxième
lecture d’un projet de loi, mais il ne s’applique pas à ceux qui proposent des
amendements, la question préalable, des instructions destinées à un comité, ni
la troisième lecture d’un projet de loi [68] .
Le droit de
réplique fournit à l’auteur d’une motion de fond une occasion de réfuter les
critiques et arguments formulés à l’encontre de sa motion et a pour effet de
clore le débat. Afin qu’aucun député désireux de participer à un débat ne soit
empêché de le faire par l’exercice subit et non annoncé du droit de réplique, le
Président doit informer la Chambre que la réplique de l’auteur de la motion
initiale clôt le débat [69] .
Si un
député présente une motion au nom d’un autre député, un discours prononcé plus
tard par l’un ou l’autre clôt le débat [70] .
Toutefois, au
cours du débat sur la motion portant deuxième lecture d’un projet de loi émanant
du gouvernement, un secrétaire parlementaire ne peut clore le débat au nom du
ministre qui a présenté la motion qu’avec le consentement unanime de la
Chambre [71] .
Bien
que les ministres puissent exercer le droit de réplique [72] ,
habituellement
seuls les simples députés s’en prévalent. En effet, ce droit est inscrit dans
deux autres articles du Règlement qui ont trait aux affaires émanant des
députés. Le motionnaire d’une mesure d’initiative parlementaire ne pouvant faire
l’objet d’un vote a le droit de prendre la parole pour répliquer pendant au plus
cinq minutes à la fin du débat [73] .
Au cours de la
période réservée aux Affaires émanant des députés, lorsque le débat sur une
motion portant production de documents sous la rubrique « Avis de motions
(documents) » a duré une heure et demie au total, un ministre peut parler pendant
au plus cinq minutes, qu’il ait déjà pris la parole ou non, après quoi le
motionnaire peut clore le débat après avoir parlé pendant au plus cinq
minutes [74] .
Interventions
Lorsqu’un député prend la parole à la Chambre, aucun autre
député ne peut l’interrompre, sauf pour soulever une question de privilège qui
surgit soudainement ou pour faire un rappel au Règlement [75] .
Avant 1982 et
l’instauration de la période de questions et d’observations consécutive à la
plupart des discours [76] ,
si un député
souhaitait poser une question au cours d’un débat, il devait d’abord obtenir le
consentement de celui qui parlait [77] .
Le député qui
admettait l’interruption n’était pas tenu de répliquer, et il hésitait souvent à
le faire, car le temps ainsi employé était soustrait de son temps de
parole.