Monsieur le Président, je suis ravi d'avoir l'occasion d'intervenir sur le projet de loi C-59. Les députés libéraux prétendent que le projet de loi permettra d'améliorer la sécurité publique et de renforcer la capacité de nos agences de sécurité d'intervenir en cas de menace terroriste. Or, rien n'est plus faux.
Faisons un retour dans le passé pour tenter de comprendre ce qu'a fait le premier ministre au cours de la dernière campagne électorale. Peut-être était-ce à cause de sa jeunesse ou de son ignorance, mais toujours est-il qu'il a manifesté le désir de démanteler totalement l'héritage de Stephen Harper, héritage dont je suis fier, soit dit en passant. C'était l'objectif du premier ministre.
Il s'est engagé notamment à annuler les mesures prévues dans le projet de loi C-51. Il s'agit du projet de loi que le gouvernement conservateur précédent avait présenté pour réformer et moderniser les mécanismes de lutte contre le terrorisme au Canada. Nous souhaitions habiliter les agences de sécurité de l'État à intervenir de manière efficace et opportune pour protéger les Canadiens contre la menace terroriste, le cas échéant. Le projet de loi C-51 avait suscité des commentaires très positifs partout au pays. Nos agences de sécurité l'ont accueilli favorablement, car il leur permettait d'obtenir des outils supplémentaires.
Je viens d'entendre mes collègues libéraux glousser et chahuter. Les députés savent-ils qu'au cours de la dernière législature, les libéraux étaient, en fait, favorables au projet de loi C-51? Et les voilà qui disent que cette mesure législative n'a, en quelque sorte, pas eu l'effet escompté. En fait, c'est le contraire. Elle a beaucoup rehaussé la sécurité des Canadiens et a permis à nos organismes chargés de la sécurité d'intervenir rapidement pour protéger la population. Le projet de loi à l'étude ne ferait rien de tel.
Le comité responsable de ce projet de loi a tenu 16 réunions et, à la fin du processus, ses membres ont proposé 235 amendements. La mesure législative était à ce point médiocre. De ce nombre, 43 ont été proposés par les libéraux mêmes. Ils ont précipité le dépôt de ce projet de loi et fait ce qu'ils font de mieux: ils ont pris des grands airs en public et déposé le projet de loi à la hâte pour ensuite se demander « Qu'avons-nous fait? Mon Dieu ». Ils ont eux-mêmes proposé 43 amendements, qui ont tous été adoptés, bien sûr. En revanche, la vingtaine d'amendements conservateurs ont été rejetés, même s'il s'agissait d'améliorations judicieuses de ce projet de loi. Voilà le type de gouvernement auquel nous avons ici affaire. Tout était une question d'apparences pour que le gouvernement puisse dire « Nous reprenons l'ancien projet de loi C-51 dont il n'y avait rien à tirer, bien que nous ayons voté en sa faveur, et nous allons le remplacer par notre propre mesure législative ». En réalité, le projet de loi C-51 représentait une importante avancée pour protéger les Canadiens.
Cette mesure est très différente. Elle ne fait que prendre une agence et la remplacer par une autre. C’est ce que les libéraux font. Ils prennent quelque chose qui fonctionne et le remplacent par quelque chose d’autre qui coûte une montagne d’argent. De fait, on estime que mettre en œuvre ce projet de loi coûtera 100 millions de dollars. Ce sont 100 millions de dollars que les contribuables n’ont pas à dépenser, parce que ce projet de loi n’améliore en rien la protection des Canadiens contre les menaces terroristes. Il n’améliore en rien la surveillance, pas plus que les capacités de renseignement.
Ce projet de loi fait une seule chose que nous applaudissons; il réaffirme le fait que le Canada ne pratiquera pas la torture. La plupart des Canadiens seraient d’avis que c’est une chose que le Canada ne devrait jamais faire.
Les libéraux ont été plus loin. Ils ont ignoré les avertissements que leur ont donnés certaines de nos agences du renseignement, qui leur ont dit que les coûts administratifs seraient très élevés. De fait, j’ai une citation ici de notre ancien conseiller à la sécurité nationale, Richard Fadden. Il a dit, en parlant du projet de loi C-59 « [qu’]il commence à rivaliser de complexité avec la Loi de l’impôt sur le revenu. » Les Canadiens savent à quel point cette loi est devenue complexe.
Il a dit: « Certains sous-alinéas sont exclus. S’il y a quelque chose que le comité peut faire, c’est le simplifier un peu. » Le comité l’a-t-il fait? Non, il ne l’a pas simplifié.
Il prévoit la nomination d’un nouveau commissaire au renseignement, celui-ci étant, bien sûr, le même que l’ancien, mais là encore, avec plus de coûts. Le projet de loi établit la façon dont un nouveau commissaire est nommé. Les libéraux ne permettraient pas que celui-ci soit choisi parmi les anciens juges ou les juges actuels. Comme les députés le savent, les juges actuels ou à la retraite sont experts dans l’évaluation des preuves au tribunal. C’est une compétence qu’un bon commissaire doit absolument avoir pour pouvoir traiter des questions de renseignement.
Une autre lacune du projet de loi C-59 consiste en son insistance excessive sur la confidentialité, ce qui découragerait considérablement le partage de renseignements cruciaux entre les ministères. En d’autres termes, ce projet de loi insiste tellement sur les questions de confidentialité que nos agences de sécurité et tous les ministères s’en trouveraient paralysés. Ils auraient les mains liées quand il s’agit de partager des renseignements avec d’autres ministères et nos agences de sécurité, des renseignements qui pourraient être cruciaux dans l’évaluation et la dissuasion des menaces terroristes.
Pourquoi le gouvernement fait-il cela? Les libéraux disent qu’ils veulent protéger les Canadiens, mais le projet de loi nous fait faire un pas en arrière. Il rend la tâche encore plus difficile et mettrait des bâtons dans les roues de nos agences de sécurité, les empêchant de faire le travail que nous leur avons demandé de faire, soit nous protéger. Pourquoi penchons-nous du côté des terroristes?
M. Fadden a dit, dans son témoignage, que ce projet de loi créerait encore plus de cloisonnement. Ce cloisonnement était un cauchemar pour lui quand il était directeur de la sécurité nationale. Nous avons maintenant des preuves dans le cas de l’attentat à la bombe contre Air India. L’enquête a déterminé que la tragédie aurait pu être évitée si une agence du gouvernement ne s’était pas abstenue de communiquer des enseignements cruciaux à nos forces policières et organismes de sécurité. Résultat: 329 personnes ont péri aux mains de terroristes.
Une fois de plus, pourquoi penchons-nous du côté des terroristes? Ce projet de loi est un pas en arrière. Ce n’est pas ce à quoi les Canadiens s’attendraient d’un gouvernement qui parlait de mieux les protéger.
Il y a aussi des problèmes en ce qui concerne les modifications au Code criminel proposées dans le projet de loi C-59. Le gouvernement a choisi de remplacer l'Infraction de « préconiser ou fomenter la commission d’une infraction de terrorisme » par l'infraction de « conseiller » la commission d’infractions de terrorisme. Des experts en matière de sécurité ont analysé très soigneusement la formulation et sont arrivés à la conclusion que ce changement dans le projet de loi signifierait, par exemple, qu’une propagande du groupe État islamique sur YouTube ne serait pas saisie et ne serait pas criminalisée. Le gouvernement avait-il l’intention, quand il a été élu, quand il a promis de protéger les Canadiens, de faire un pas en arrière, de réviser le Code criminel d’une façon qui le rendrait moins sévère pour les terroristes, ceux qui préconisent le terrorisme et ceux qui conseillent la commission d’infractions de terrorisme? Ce serait un pas en arrière.
Pour terminer, j’ai déjà dit que les libéraux sont prêts à pencher du côté des terroristes plutôt que du côté des organismes d’application de la loi canadiens et des équipes de sécurité internationale. Le projet de loi créerait plus de lourdeurs administratives et plus de coûts, mais il permet moins d'investissement et de sécurité pour les Canadiens.
Quand j’étais au Cabinet, nous prenions la sécurité très au sérieux. Nous faisions confiance à nos experts en sécurité nationale. Le projet de loi représente, en fait, un vote de non-confiance à l’égard de ces experts qui sont au gouvernement pour nous protéger.
Enfin, nous envoyons ainsi le message que la paperasserie est plus importante que la communication des renseignements et l’élimination du terrorisme. C’est bien triste. En tant que Canadiens, nous pouvons faire mieux.