La Constitution et les lois

Les institutions parlementaires canadiennes prirent forme il y a bien au-delà de 250 ans. Des lois anglaises successives adoptées spécialement pour les colonies du futur Canada, en particulier l’Acte constitutionnel de 1791 et l’Acte d’Union, 1840, en vinrent à prescrire plusieurs procédures de base avec de plus en plus de précision12. Bon nombre de ces dispositions furent plus tard incorporées à la Loi constitutionnelle de 1867, où l’on stipule dans le préambule que le Canada aura une constitution reposant sur les mêmes principes que celle du Royaume-Uni, qui gouvernait chacune des provinces fondatrices avant la Confédération13.

Certains articles de la Loi constitutionnelle de 1867 qui remontent à l’Acte constitutionnel de 1791 stipulent que toutes les questions soulevées à la Chambre doivent être décidées à la majorité simple, le Président ayant une voix prépondérante en cas d’égalité des voix, et que tous les députés doivent, avant de pouvoir occuper leur siège à la Chambre, prêter le serment d’allégeance14. Les articles de la Loi constitutionnelle de 1867 qui remontent à l’Acte d’union, 1840 stipulent qu’à sa première réunion la Chambre doit élire un Président, qu’elle doit aussi procéder à l’élection d’un autre Président en cas de vacance dans cette charge par suite du décès ou de la démission du titulaire ou pour une autre raison, que le Président présidera à toutes les séances de la Chambre, que le quorum sera de 20 députés et que toute demande en vue de prélever ou de dépenser des fonds doit émaner de la Chambre des communes en plus d’être recommandée à celle-ci par le gouverneur général15.

Dans certains cas, l’inclusion d’une disposition constitutionnelle fut précédée d’un usage déjà établi. Par exemple, à partir de 1758, et malgré l’absence d’une disposition constitutionnelle à cet effet, la Chambre d’Assemblée de la Nouvelle-Écosse élut un Président au début d’une nouvelle législature avant de passer à d’autres travaux16. Les Assemblées législatives du Haut-Canada et du Bas-Canada adoptèrent le même usage pour l’élection d’un Président17 ; en outre, leurs règlements comportaient des dispositions sur le quorum avant que l’Acte d’union, 1840 ne vienne fixer légalement le quorum à 20 députés18.

Dans d’autres cas, des difficultés éprouvées lors de travaux antérieurs entraînèrent l’adoption de dispositions constitutionnelles précises. Par exemple, l’article 47 de la Loi constitutionnelle de 1867, prévoyant l’élection par la Chambre d’un autre de ses députés pour exercer les fonctions de Président en l’absence de ce dernier, visait à empêcher la répétition d’une situation s’étant produite à au moins une occasion entre 1840 et 1866, lorsque l’Assemblée législative de la Province du Canada avait dû s’ajourner parce que son Président était malade19.

Toutefois, les parties de la Loi constitutionnelle de 1867 qui ont peut-être le plus d’importance sur le plan de la procédure sont celles qui donnent un fondement législatif aux privilèges de la Chambre. La Loi constitutionnelle prévoit en effet que « les privilèges, immunités et pouvoirs que posséderont et exerceront » la Chambre et ses députés seront « prescrits […] par loi du Parlement du Canada », sous réserve que ces privilèges, immunités ou pouvoirs ne puissent excéder ceux de la Chambre des communes britannique et de ses députés20. De plus, la Cour suprême du Canada a affirmé que le préambule de la Loi constitutionnelle de 1867 conférait à la Chambre des communes les privilèges inhérents nécessaires à l’exercice de ses fonctions21. Par conséquent, la Chambre des communes a acquis, parmi ses privilèges fondamentaux, le droit exclusif de réglementer ses affaires internes et de contrôler son emploi du temps et ses délibérations.

Dans ce cadre constitutionnel, le Parlement du Canada a adopté des dispositions législatives importantes du point de vue de la procédure, dont beaucoup se trouvent aujourd’hui dans la Loi sur le Parlement du Canada22, entre autres : le pouvoir de la Chambre et de ses comités de faire prêter serment à des témoins qui comparaissent soit à la barre de la Chambre soit devant un comité23 ; les procédures à suivre lorsque des députés démissionnent ou lorsque des sièges deviennent vacants pour d’autres raisons24 ; les règles sur les conflits d’intérêts applicables aux députés25 ; la suppléance du Président lorsque celui-ci doit s’absenter26 ; la nomination et la rémunération des secrétaires parlementaires27 ; la rémunération des parlementaires28 ; l’existence et la gestion de la Bibliothèque du Parlement29 ; et la constitution du Bureau de régie interne chargé de régler toutes les questions financières et administratives concernant la Chambre30. Outre la Loi sur le Parlement du Canada, d’autres lois autorisent la Chambre à prendre certaines mesures ou prévoient certaines formes particulières pour ses délibérations31.