Principes généraux relatifs aux délibérations en comité plénier

Les travaux en comité plénier sont réputés être moins formels que ceux se déroulant à la Chambre et, bien que certaines règles spécifiques s’appliquent à ce forum, ses présidents font habituellement preuve d’une plus grande flexibilité dans leur application80.

Les délibérations en comité plénier sont régies par le Règlement, dans la mesure où il est applicable, sauf pour quatre exceptions notables, à savoir l’appui des motions, la limitation du nombre de discours, la durée de ceux-ci et, finalement, la place d’où les députés peuvent prendre la parole.

Premièrement, les règles et pratiques qui régissent les motions présentées à la Chambre s’appliquent aussi en comité plénier, excepté qu’il n’est pas nécessaire que les motions soient appuyées81. Toutefois, une fois qu’elles sont proposées, elles ne peuvent être retirées qu’avec le consentement unanime du comité82.

Deuxièmement, contrairement aux règles qui interdisent à un député de faire plus d’un discours au cours d’un débat à la Chambre, le nombre d’interventions que peut faire un député en comité plénier sur un sujet donné n’est pas limité83. Comme une des fonctions principales des comités pléniers est de délibérer, il s’agit d’une des raisons pour lesquelles il est interdit d’y proposer la question préalable. Cette règle s’applique d’ailleurs à tout autre comité parlementaire84.

Troisièmement, les interventions en comité plénier n’ont pas à respecter les nombreuses dispositions du Règlement concernant la durée des discours pour les différents types de débats ayant lieu à la Chambre. Les comités pléniers disposent de règles spécifiques à cet égard, et ce, en fonction du genre d’étude qu’ils réalisent85. Par contre, contrairement à ce qui a cours à la Chambre, les députés n’y sont pas autorisés à partager leur temps de parole86.

Quatrièmement, puisqu’ils siègent en comité, les députés ne sont pas tenus d’être à leur siège désigné pour prendre la parole87. Ils doivent toutefois attendre que le président leur donne la parole avant d’intervenir ou de proposer une motion. En outre, comme à la Chambre où ils doivent s’adresser au Président, les députés doivent faire part de leurs commentaires au président du comité88. Il est arrivé, toutefois, que les députés s’adressent les uns aux autres, posent des questions et reçoivent des réponses directement89. Au cours de ces échanges, les députés doivent néanmoins se désigner par le nom de leur circonscription comme il est d’usage à la Chambre90.

En vertu de la règle de la pertinence, les discours en comité plénier doivent porter précisément sur la question, l’article ou l’amendement à l’étude91. Si le discours d’un député est sans rapport avec le débat, le président peut rappeler le député à l’ordre92. Le débat général sur l’article 1 d’un projet de loi (ou l’article 2 si l’article 1 se résume au titre abrégé de la loi) constitue une exception à la règle de la pertinence93. Certaines restrictions ont néanmoins été imposées pour l’étude de l’article 1, dont l’interdiction de reprendre le débat en deuxième lecture et d’anticiper sur le débat article par article94. Le débat doit en outre se limiter au contenu du projet de loi95. Une autre restriction s’applique lorsqu’un amendement est proposé à l’article 1 : les interventions doivent s’y limiter tant que la Chambre ne s’est pas prononcée sur celui-ci96.

Si un député persiste à s’éloigner du sujet de la discussion ou à répéter des choses déjà dites, s’il refuse de retirer des propos non parlementaires ou de se rasseoir lorsqu’il est prié de le faire, ou si les délibérations deviennent désordonnées et que le président est incapable de rétablir l’ordre et le décorum en comité, le président peut se lever et faire rapport de l’incident au Président de la Chambre sans demander la permission du comité. Le Président reprend alors le fauteuil, reçoit le rapport du président du comité, traite la question comme si l’incident s’était produit à la Chambre et peut donc désigner le député par son nom, si nécessaire97. Pour des propos non parlementaires, le Président peut simplement demander au député de retirer ses paroles. Dans les cas d’un grave désordre en comité plénier, il est même arrivé que le Président de la Chambre reprenne le fauteuil sans attendre que le président en fasse rapport98. Dans tous les cas, une fois la question réglée, le comité peut reprendre ses travaux, le cas échéant, sans qu’une motion ne soit proposée pour ce faire.

Questions de privilège

Lorsque la Chambre siège en comité plénier, les délibérations, surtout si elle examine un projet de loi, ne prennent habituellement que quelques minutes. Il est donc rare de nos jours que des questions de privilège soient soulevées en comité plénier. La procédure suivie est néanmoins la même que dans tout comité permanent, législatif ou spécial. Le président n’est pas habilité à décider s’il y a eu atteinte au privilège99. Il entend la question de privilège et peut accepter qu’on présente une motion lui demandant de faire rapport à la Chambre de certains événements qui se sont produits en comité100. Si le comité décide qu’il faut faire rapport à ce sujet, le président se lève, le Président de la Chambre prend le fauteuil et le président du comité fait rapport sur la question de privilège101. Le Président examine alors la question. S’il juge que la question de privilège paraît fondée de prime abord, un député peut présenter une motion à ce sujet102.

Le Président acceptera d’entendre une question de privilège à l’égard d’une affaire qui s’est produite en comité plénier seulement si ce dernier l’a d’abord examinée et en a fait rapport à la Chambre103.

Lorsque la Chambre est constituée en comité plénier, aucun député ne peut soulever une question de privilège qui a trait aux privilèges de la Chambre dans son ensemble. Un député peut toutefois proposer une motion demandant au comité de suspendre ses travaux et de faire rapport afin que le Président de la Chambre puisse être saisi de la question de privilège104.

Interruptions

Lorsque les travaux d’un comité plénier sont interrompus pour que la Chambre puisse passer aux affaires inscrites à l’ordre quotidien des travaux ou encore pour tenir un vote par appel nominal prévu, ou s’il est impossible au comité de terminer ses travaux avant la fin de la période prévue pour les Ordres émanant du gouvernement105, le président du comité interrompt les travaux et lève la séance. Le Président réintègre le fauteuil et le comité fait rapport à la Chambre sur ses travaux en demandant l’autorisation de les reprendre plus tard dans la journée ou à la prochaine séance. La Chambre reçoit alors le rapport et autorise le comité à siéger à nouveau plus tard dans la journée ou à sa prochaine séance106. Le comité peut reprendre ses travaux après l’interruption si l’ordre est remis en délibération107. Il peut également arriver que la Chambre, par ordre spécial, prévoie elle-même l’interruption des travaux du comité et leur reprise à un moment précis de la même journée ou lors d’une séance ultérieure108.

Si une affaire qui exige l’attention de la Chambre surgit, comme une cérémonie de sanction royale, le Président reprend le fauteuil immédiatement sans attendre que le comité interrompe ses travaux et fasse rapport109. Lorsque cette affaire est réglée, le comité reprend ses travaux. Ces derniers ne sont pas interrompus par les messages reçus du Sénat puisque le Président ne fera rapport à la Chambre qu’une fois que le comité aura levé la séance et dûment fait rapport, mais avant de passer à tout autre point de l’ordre du jour110.

Prolongation du débat

Lorsque la Chambre siège, un député peut proposer, sans préavis, une motion visant à prolonger la séance au-delà de l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien pour poursuivre l’étude d’une affaire précise111. Toutefois, lorsque la Chambre siège en comité plénier, un député doit d’abord signaler son intention de proposer une telle motion ; le président interrompt alors les travaux et, sans faire rapport de l’état de la question, se lève afin que la motion puisse être présentée selon les règles et que la Chambre puisse se prononcer pendant que le Président occupe le fauteuil112. La motion ne peut faire l’objet d’un débat ou d’un amendement113. Elle est adoptée automatiquement à moins que 15 députés qui s’y opposent se lèvent à leur place lorsque le Président met la question aux voix, auquel cas la motion est réputée retirée114. Par ailleurs, il est arrivé que la Chambre adopte des ordres spéciaux visant à prolonger une séance afin de terminer l’étude d’un projet de loi en comité plénier115.

Ajournement du débat

En général, un comité plénier n’est pas habilité à ajourner sa propre séance ou à reporter l’étude d’une question à une autre séance116. S’il n’a pas terminé l’étude d’une question à l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien, ou si l’ordre du jour prévoit que la Chambre passe aux Affaires émanant des députés ou au Débat d’ajournement, le président interrompt les travaux et se lève. Le Président de la Chambre reprend le fauteuil et le comité fait rapport de l’état de la question à la Chambre et lui demande de poursuivre ses travaux à la prochaine séance117. Le Président demande alors, pour la forme : « Quand le rapport sera-t-il reçu ? ». Si la réponse est « Maintenant », il demande « Quand le comité pourra-t-il siéger de nouveau ? ». Si la réponse est « À la prochaine séance de la Chambre », il en est ainsi ordonné.

Par ailleurs, un député peut se lever lors de délibérations en comité plénier et proposer que le président fasse rapport de l’état de la question118. Cette demande, traduite par la motion demandant « Que le président fasse rapport de l’état de la question » équivaut en fait à une motion d’ajournement du débat119. Elle est mise aux voix sans débat ni amendement. Si elle est adoptée, elle met un terme au débat sur l’affaire à l’étude ce jour-là. Si elle est rejetée, le comité continue de siéger et une nouvelle motion dans ce sens ne pourra être proposée que si le comité procède, dans l’intervalle, à une autre opération120.

Après qu’un comité plénier a interrompu ses travaux, fait rapport de l’état de la question et obtenu l’autorisation de siéger à nouveau à la prochaine séance, la Chambre se forme en comité plénier quand l’ordre est appelé à nouveau. Le comité reprend alors ses travaux121.

Conclusion du débat

Un député peut mettre immédiatement fin aux délibérations en comité plénier s’il propose une motion demandant « Que le président quitte le fauteuil » et que cette motion est adoptée. Une telle motion est toujours recevable ; elle ne peut faire l’objet d’un débat ni d’un amendement et, si adoptée, elle remplace la question dont le comité est saisi122. Le comité lève alors la séance sans faire rapport à la Chambre et l’affaire dont le comité était saisi disparaît du Feuilleton123. Si le comité rejette la motion portant que le président quitte le fauteuil, la question ne pourra être mise aux voix de nouveau si le comité n’a pas, dans l’intervalle, procédé à une autre opération124.

Clôture

Le Règlement prévoit une procédure qui permet au gouvernement de limiter le débat et d’amener la Chambre à se prononcer sur n’importe quel projet de loi ou motion à la fin d’un jour de séance donné. Ce mécanisme s’appelle la clôture125. Bien que le recours à la clôture pour les délibérations en comité plénier soit moins fréquent aujourd’hui du fait que peu de projets de loi ou de motions y sont renvoyés, il est encore possible d’invoquer la clôture dans ce cadre particulier.

Une fois qu’un débat est amorcé en comité plénier, la clôture peut être imposée à l’égard d’une motion, de l’ensemble de l’étude d’un projet de loi à l’étape du comité, de son titre, de son préambule ou de ses articles, pris séparément ou regroupés, ou encore à l’égard d’amendements ou de sous-amendements. La clôture peut en outre être proposée pour les articles d’un projet de loi dont l’étude n’a pas encore été entreprise126.

Toutefois, avant qu’on puisse proposer la clôture sur une question à l’étude en comité plénier, un ministre doit en avoir donné un avis oral lors d’une séance antérieure. Cet avis est normalement donné pendant l’étude de la question en comité plénier127. Une fois l’avis oral donné, un ministre peut proposer lors de toute séance ultérieure du comité plénier « Que le comité procède en premier lieu au nouvel examen de toute résolution ou tout article, paragraphe, préambule ou titre, et que cet examen ne soit pas différé davantage128 ». Une telle motion de clôture est proposée avant que le comité ne reprenne l’étude de la question visée par cette motion.

Une fois proposée, une motion de clôture est décidée sans débat ni amendement129. Toutefois, avant la mise aux voix, le comité plénier tient une période de questions et réponses d’au plus 30 minutes afin de permettre aux députés de poser de brèves questions au ministre responsable de l’affaire visée par la clôture ou au ministre qui le représente130. Si la motion est adoptée, la durée des interventions des députés est limitée : chacun ne peut prendre la parole qu’une fois sur la question, et ce, pendant au plus 20 minutes131. Nul ne peut prendre la parole après 20 heures le même jour. À cette heure ou un peu plus tard, dans le cas où un député a commencé son discours avant 20 heures, le président met aux voix toutes les questions nécessaires pour terminer l’étude de la question132.

Si la motion ou la résolution faisant l’objet de la motion de clôture est adoptée et que le comité consent à ce qu’il en soit fait rapport à la Chambre, le président se lève, la masse est redéposée sur le Bureau, le Président de la Chambre reprend le fauteuil et le président du comité plénier fait rapport de la résolution ou de la motion à la Chambre. Le Président de la Chambre met alors immédiatement aux voix la motion ou la résolution adoptée en comité plénier, sans débat ni amendement.

Si la motion de clôture vise plutôt un projet de loi, le président fait alors rapport à la Chambre du projet de loi, avec ou sans amendement. Puis, une motion portant adoption du projet de loi à l’étape du rapport est proposée et mise aux voix sans débat ni amendement133. Si le projet de loi est adopté à l’étape du rapport et que la période normalement réservée aux Ordres émanant du gouvernement n’est pas terminée, la Chambre peut alors procéder immédiatement à la troisième lecture134. S’il est adopté à l’étape du rapport, mais que la séance s’est prolongée au-delà de l’heure ordinaire de l’ajournement quotidien, la troisième lecture est alors fixée à la prochaine séance et la Chambre ajourne ses travaux135.

Votes

Lorsque le président met aux voix un projet de loi, une partie de celui-ci ou encore une motion, il procède à un vote par oui ou non (le président demande à tous ceux qui sont en faveur de la motion de dire « oui » et à tous ceux qui sont contre la motion de dire « non »). Le président écoute les deux réponses et exprime son avis quant au résultat. Si les députés ne s’opposent pas au résultat, le président déclare la motion adoptée ou rejetée, selon le cas. Si aucun député ne demande un vote rangée par rangée, le président déclare que le projet de loi, l’article ou la motion est adopté ou rejeté. Il arrive souvent qu’après le vote par oui ou non des députés disent « avec dissidence », afin de signaler leur opposition et d’indiquer que la décision n’a pas été prise à l’unanimité, sans toutefois réclamer un vote par rangée136. Le président déclare alors le projet de loi, l’article ou la motion adopté avec dissidence ou rejeté à la majorité.

Toutefois, contrairement aux séances de la Chambre, où au moins cinq députés doivent se lever pour exiger un vote, en comité plénier, un député peut à lui seul demander la tenue d’un vote rangée par rangée. Dans ces circonstances, la sonnerie d’appel n’est pas actionnée pour convoquer les députés à un vote137 et les noms des députés qui votent pour ou contre une mesure ne sont pas consignés. Il n’est pas nécessaire non plus que les députés soient à leur siège désigné pour voter. Les députés présents se lèvent simplement par rangée et un greffier au Bureau les compte. Les députés en faveur de la motion qui sont assis à la droite du président se lèvent en premier. Le président leur demande de se rasseoir une fois que leur rangée a été comptée. La même procédure est suivie pour les députés assis à la gauche du président et on procède ensuite d’une manière identique pour les opposants. Après le dénombrement, un greffier se place à l’extrémité du Bureau et annonce le nombre de « oui » et de « non » au président. Celui-ci déclare alors la motion adoptée ou rejetée138.

Pendant le déroulement du vote en comité plénier, aucun député ne peut entrer dans la salle, comme c’est le cas lors d’un vote à la Chambre139. De plus, le président n’accepte aucun rappel au Règlement durant le vote140. Il n’y a pas de pairage des députés pour les votes en comité plénier étant donné qu’on ne note pas les noms de ceux qui ont voté dans un sens ou dans l’autre141.

Le président ne vote pas en comité plénier, mais il dispose d’une voix prépondérante lorsqu’il y a égalité des voix ; il doit alors suivre les règles prévues pour le Président de la Chambre en pareille situation142. Ainsi, le président d’un comité plénier vote habituellement de manière à permettre aux députés de se prononcer une nouvelle fois sur la question (c’est-à-dire de façon à maintenir le statu quo)143.