STANDING COMMITTEE ON ENVIRONMENT AND SUSTAINABLE DEVELOPMENT

COMITÉ PERMANENT DE L'ENVIRONNEMENT ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 25 septembre 2001

• 1535

[Traduction]

Le président (M. Charles Caccia (Davenport, Lib.)): La séance est ouverte.

[Français]

Bonjour et bienvenue à tout le monde.

[Traduction]

Un grand nombre de témoins veulent prendre la parole aujourd'hui. Nous leur souhaitons tous la bienvenue. Le comité est très heureux de se réunir pour se pencher sur un sujet dont on ne discute jamais assez et qui nécessite une attention constante ainsi que l'influence des politiciens.

Le comité est prêt à commencer. Je tiens d'abord à annoncer qu'à la salle 200 se déroule une activité très intéressante qui consiste en une exposition et en la présentation d'aliments biologiques. L'objectif de cette activité, qui se déroule cet après-midi, est de renseigner le public. À 18 heures, des discours seront prononcés sous la présidence de M. Clifford Lincoln. Je crois qu'une telle activité de la sorte plaira à chacun de nous.

Je souhaite également la bienvenue à ceux d'entre vous qui sont présents, mais qui ne sont pas ici en tant que témoins. Je reconnais certains visages familiers. Le temps est toujours précieux lors des séances. Ainsi, étant donné qu'un vote à la Chambre plus tard cet après-midi, probablement après 17 heures, interrompra nos délibérations, j'invite ceux qui représentent les organismes figurant sur la liste à prendre la parole selon l'ordre établi et à s'en tenir à un exposé de trois ou quatre minutes afin que tous aient la chance de s'exprimer. Habituellement, les éléments d'information les plus importants sont abordés durant la période des questions.

Qui veut prendre la parole au nom du Conseil de la conservation du Nouveau-Brunswick? Personne?

Passons au Sierra Club-Chinook Group.

Mme Jennifer Wright (Sierra Club-Chinook Group): Oui.

Le président: Vous prendrez la parole au nom du groupe? Vous serez suivie par le Fonds mondial pour la nature au Canada. La personne représentant cet organisme est-elle arrivée? Pas encore. Y a-t-il dans la salle un représentant de la Ontario Landscape Alliance?

Mme Sheryl Shour (présidente, Organic Landscape Alliance): Ce devrait être la Organic Landscape Alliance.

Le président: Organic au lieu de Ontario. Merci.

Nous avons ensuite le représentant de la Canadian Association of Physicians for the Environment. Vous êtes là, merci. Ensuite, il y a Jean-Dominique Levesque-René. Est-il arrivé? Non, pas encore. Ah oui, il est en avant. Rod MacRae est présent. Angela Rickman du Club Sierra du Canada arrive. Julia Langer du Fonds mondial pour la nature au Canada est présente. La représentante de Nature-Action Québec est aussi présente. Le représentant de CropLife Canada est également ici. Le dernier organisme de la liste est la Organic Landscape Alliance.

• 1540

Mme Sheryl Shour: Inscrite deux fois.

Le président: Nous allons suivre l'ordre que nous venons de citer. Alors commençons par le Sierra Club-Chinook Group.

Mme Jennifer Wright: Étant la première, je ne sais quel ton donner à mon exposé. Je suppose que la plupart des personnes présentes connaissent assez bien le sujet. Sans entrer dans les détails donc, je vais me concentrer sur la ville de Calgary. C'est sans doute cela que je dois faire.

Je m'appelle Jennifer Wright et je fais partie du Club Sierra de Calgary. Notre organisme travaille avec plusieurs autres groupes à la diminution de l'utilisation de pesticides à des fins esthétiques dans notre ville. Nous avons exprimé nos préoccupations au conseil municipal et lui avons demandé de mettre en application un règlement interdisant l'utilisation de pesticides dans les parcs et les espaces verts, comme l'ont demandé à leur propre municipalité un grand nombre des personnes ici présentes.

Le conseil municipal de Calgary a décidé qu'il était un peu trop tôt pour envisager de réduire dans une large mesure l'emploi de pesticides à des fins esthétiques. Comme un bon nombre d'entre vous le sait probablement, la ville de Calgary a mis sur pied un programme de gestion intégrée des parasites dont elle fait beaucoup la promotion. Quiconque communique avec le service des parcs et des lieux récréatifs de la ville se fera probablement dire que le programme est excellent, car il permet une moins grande utilisation des pesticides grâce à l'emploi d'autres produits plus sûrs là où c'est possible. Le Club Sierra n'appuie absolument pas le programme de gestion intégrée des parasites. Nous estimons que Calgary ne l'a pas appliqué de la façon décrite dans le manuel. Le fait qu'Ottawa envisage d'examiner ce programme nous préoccupe un peu.

La ville de Calgary considère encore le pissenlit comme une mauvaise herbe nuisible. Elle est l'une des rares villes au Canada où il est illégal d'avoir des pissenlits sur sa pelouse. Cela nous préoccupe, car, comme nous le savons tous, le pissenlit est une plante relativement nutritive et extraordinairement utile. Nous savons notamment que la racine du pissenlit contient plus de calcium qu'une quantité équivalente de lait et davantage de bétacarotène qu'une carotte. C'est une plante très nutritive. L'an dernier, nous avons tenté, sans succès, de faire rayer le pissenlit de la liste des mauvaises herbes nuisibles établie par la ville.

Par contre, nous avons réussi l'an dernier à faire mettre sur pied un programme d'information grâce à une pétition comportant des milliers de signatures. À l'heure actuelle, la ville de Calgary travaille donc conjointement avec le Club Sierra et de nombreux autres groupes environnementaux en vue d'informer et de sensibiliser la population aux dangers de l'utilisation de pesticides à des fins esthétiques et aux produits plus sûrs. Nous en sommes rendus là pour le moment.

Je dois dire—j'en suis à mes dernières trente secondes j'imagine—que Santé Canada, selon nous, fait progresser le dossier à pas de tortue. Nous sommes un peu inquiets, car chaque fois que nous soulevons le problème auprès du conseil municipal, celui-ci nous dit que, tant que Santé Canada n'aura pas retiré du marché les produits en question, à savoir les herbicides 2-D et 4-D, le dicamba et le mécoprop ainsi que les insecticides comme le chloropyrophos, sur lesquels nous nous sommes longuement penchés l'an dernier, ou ne leur retirera pas leur enregistrement, la ville de Calgary les considérera comme très sûrs.

Si nous ne travaillons pas à l'échelon fédéral et si nous n'appliquons pas certaines des recommandations formulées dans le rapport, qui est excellent et fait véritablement tout le tour de la question, je ne crois pas que nous irons aussi loin que nous le voulons aussi rapidement que nous le souhaitons. Il s'agit d'une question qu'il faut régler rapidement afin de garantir la pureté de l'eau et de l'air dans les années à venir ainsi que le bien-être de nos enfants et des générations futures.

En terminant, je dirais que les pesticides devraient être utilisés en dernier recours. C'est toujours dans cette optique que nous devrions envisager leur emploi quand il est question d'esthétique.

• 1545

Je sais que dans un proche avenir nous serons confrontés au virus du Nil occidental et aux maladies transmises par les moustiques. J'ose espérer que le bon sens qui ressort du rapport prévaudra et que nous envisagerons l'utilisation d'autres produits plus sûrs pour gérer certains des problèmes auxquels nous devrons faire face dans les prochaines années.

Je vous remercie beaucoup.

Le président: Merci, madame Wright.

L'objectif de ce qui se passe cet après-midi sur la Colline est de presser le ministre de la Santé à présenter à la Chambre un projet de loi visant à modifier la Loi sur les produits antiparasitaires, qui remonte à plus d'une trentaine d'années. Vos observations à propos de la lenteur du ministère sont prises particulièrement à coeur.

Le seul député albertain à cette table est M. Mills. Peut-être entretient-il des rapports avec le conseil municipal de Calgary. Qui sait? Vous voudrez peut-être vous entretenir avec lui plus tard.

Le prochain témoin est Julia Langer du Fonds mondial pour la nature au Canada.

Mme Julia Langer (directrice, Programmes internationaux, Fonds mondial pour la nature au Canada): Merci, monsieur Caccia. Je suis reconnaissante de pouvoir témoigner à nouveau devant le comité, que je félicite d'examiner la question en détail et de tenir l'activité d'aujourd'hui qui vise à attirer l'attention du public sur le sujet. Je crois que les gens y viennent pour être informés et il est à espérer qu'ils seront convertis.

Nous avons tenu dans le passé de longues discussions avec le comité. Ce que j'espère pouvoir faire aujourd'hui, c'est m'insurger poliment contre l'inaction—l'image des pas de tortue est tout à fait appropriée. Le rapport de votre comité est suffisant en termes de contenu, de recommandations, etc. Le ministre responsable, M. Rock, n'a cessé de faire des promesses et d'exprimer des intentions. D'après ce que nous observons, il existe deux obstacles, outre les éléments considérables dont vous avez parlé en détail, que le comité pourrait contribuer à aplanir.

Le premier semble être l'absence de fonds. Que le gouvernement reconnaisse qu'il a une certaine responsabilité financière à assumer et qu'il n'adopte pas de lois à moins de détenir les fonds nécessaires à leur mise en oeuvre est logique, mais c'est un peu comme l'histoire de l'oeuf et de la poule. Nous vous exhortons tous à essayer de faire déposer le projet de loi en dépit de cet obstacle afin que nous cessions d'attendre. Il n'existe pas de budget pour l'instant. En attendons-nous un? Attendons-nous un énoncé économique? Qu'attendons-nous pour déposer le projet de loi? Je vous exhorte tous à intervenir afin que le projet de loi soit déposé et fasse l'objet d'un débat parlementaire.

Le deuxième obstacle concerne la réaction spontanée à propos de ceux qui s'opposeront au projet de loi. Nous avons entendu le point de vue des diverses parties concernées. En outre, certains membres du comité ont siégé avec moi à un comité chargé de conseiller le ministre de la Santé au sujet de la mesure législative et de la question d'aller ou non de l'avant. Toutes les parties intéressées ont indiqué qu'une modification s'impose, parfois pour des raisons différentes, mais nous sommes tous d'avis qu'il faut modifier la loi.

Je crois que la question de la concurrence entre de plus en plus en jeu. Si ce n'est pour protéger l'environnement ou la santé, comme ce devrait être le cas selon moi, ce sera pour des motifs économiques que le gouvernement modifiera la loi. Les agriculteurs affirment qu'ils doivent avoir accès à des produits et à des méthodes qui posent moins de risque afin de cultiver différemment les aliments. Il en va de même dans le domaine des herbes et dans le secteur industriel. Nous ne pouvons pas permettre que ce soit un obstacle. Il existe beaucoup de bonnes raisons. Vous ne serez pas aux prises avec un grand conflit au Parlement ni au sein d'autres comités comme le Comité de la santé.

• 1550

Ce que nous faisons entre autres—à ce propos je vous invite à vous rendre à salle 200—, c'est démontrer que nous sommes en fait sur la même longueur d'ondes que certains des organismes agricoles qui travaillent avec les pomiculteurs de l'Ontario. Nous mettons en oeuvre des initiatives en matière de réduction de l'utilisation des pesticides qui montrent qu'il est possible de réduire l'usage de ces produits. Une mesure législative ne constitue pas la solution. C'est un élément de la solution et un morceau du casse-tête.

Je vous exhorte aussi à examiner certaines des propositions que la Coalition du budget vert a formulées. J'ai témoigné devant le Comité des finances ce matin et j'ai mis l'accent sur le fonds de l'agriculture durable, qui prévoit des incitatifs, des programmes et de l'aide. Toutes ces mesures contribueront à aider le Canada à moins dépendre des pesticides, objectif que tous visent je crois.

Je suis certaine que le comité ressent un peu de frustration, ayant accompli tout ce travail intellectuel que ne s'est toujours pas concrétisé. J'espère que M. Rock respectera la promesse qu'il a faite de présenter le projet de loi. Je vous invite à faire appel au Fonds mondial pour la nature pour obtenir le soutien que nous pouvons vous offrir.

Le président: L'idée de dépendre moins des pesticides résume très bien la question. Nous la garderons en tête. Merci.

Nous sommes allés de Calgary à Toronto. Maintenant, passons au Nouveau-Brunswick et au Conseil de la conservation. Je vous invite à prendre la parole, madame Daborn.

Mme Lia Daborn (directrice administrative, Conseil de la conservation du Nouveau-Brunswick): Merci beaucoup.

Bonjour. Je m'appelle Lia Daborn et je suis directrice administrative du Conseil de la conservation du Nouveau-Brunswick, qui est un organisme à but non lucratif. Je tiens à vous remercier de m'avoir invitée à témoigner devant vous à propos du travail que nous avons accompli dans le domaine des pesticides et de la réaction à votre rapport de l'an dernier que nous avons observée.

Je vais me concentrer sur deux de nos projets. Le premier concerne l'agriculture. J'abonde dans le même sens que Julia Langer à de nombreux égards. Nous avons mis en oeuvre un projet d'agriculture durable. Nous avons travaillé avec un grand nombre d'agriculteurs afin de leur faire adopter des méthodes de culture qui font moins appel aux produits chimiques, comme la culture biologique. Nous avons appris qu'il ne suffit pas de seulement demander aux agriculteurs de pratiquer la culture biologique. Il faut mettre en place une certaine infrastructure, comme du financement et du soutien, afin d'aider les agriculteurs à effectuer la transition. En Europe, une forme d'assurance-revenu était offerte aux agriculteurs pendant une période de trois ans pour qu'ils puissent passer lentement à la culture biologique sans mettre en péril leur ferme familiale. Nous estimons qu'une telle mesure serait véritablement efficace au Nouveau-Brunswick et partout au Canada, mais elle doit être mise en oeuvre sur une longue période et les fonds doivent être garantis.

En informant les familles agricoles au sujet des perturbateurs endocriniens, nous avons découvert qu'elles souhaitaient en savoir davantage à propos des répercussions sur la santé. Lorsque nous nous sommes entretenus avec elles, nous avons constaté qu'elles ne connaissaient pas les risques liés aux pesticides qu'elles utilisent et à ceux auxquels elles sont exposées quotidiennement. Il faut donner davantage d'information qu'en fournissent les étiquettes des contenants de pesticide, bien que les renseignements qui y figurent sont absolument souhaitables. Nous devons connaître tout ce que contiennent les pesticides. À l'heure actuelle, les matières inertes ne sont pas inscrites sur les étiquettes.

Les familles—frères, soeurs, épouses et enfants—doivent savoir comment réduire leur risque d'exposition aux pesticides. Au Nouveau-Brunswick, par exemple, nous avons constaté que tous ne suivent pas les instructions sur les étiquettes. Bien qu'une personne doive détenir un permis pour acheter un pesticide et l'utiliser, il arrive que l'achat soit effectué par une personne possédant un permis, mais que ce soit une autre personne, non autorisée légalement à utiliser des pesticides, qui épandra le produit. Je crois que cela se produit assez souvent partout au Canada, quoique personne ne vous l'avouera probablement.

Nous avons aussi appris que les agriculteurs qui demandent un permis doivent suivre un cours et subir un examen. Certains font faire leurs devoirs par leur épouse. Ils se présentent donc à l'examen sans connaître toutes les procédures à suivre.

Les préoccupations des familles agricoles sur le plan de la santé étaient très variées. On nous a posé beaucoup de questions à propos de statistiques, de problèmes de santé et de l'état de santé de la population agricole. Je crois que l'étude qu'a menée l'Ontario sur la santé des familles agricoles est excellente. Nous voudrions qu'une telle étude soit effectuée au Nouveau-Brunswick et à l'échelle du Canada.

Des études menées dans les années 70 et 80 auprès des familles agricoles du Nouveau-Brunswick ont révélé que les cas de spina bifida et de malformation du tube neural étaient plus nombreux dans la province qu'ailleurs au Canada. Nous n'avons toutefois pas de données actuelles. Nous n'en avons aucune portant sur les années 90 ni sur les dernières années. Nous ne savons donc pas si la situation est pire, identique ou meilleure. La population agricole est très préoccupée, car elle sait que les pesticides causent le cancer. Elle ne sait cependant pas si le cancer est causé par les pesticides ou par d'autres produits dans l'environnement. Elle veut réellement savoir.

• 1555

Si nous avons effectué ce travail à l'origine, c'est entre autres à cause de la région de la pomme de terre, cette région hautement agricole où l'on cultive la pomme de terre au Nouveau-Brunswick, qui s'étend de Edmundston à Grand Falls. Pour lutter contre la brunissure de la pomme de terre, on utilise dans la région des fongicides qui ont été identifiés comme perturbateurs endocriniens. À la suite de cette étude, nous avons donc recommandé de s'intéresser de près au développement des enfants, particulièrement dans cette région de la province.

Enfin, dans le domaine agricole, mais il faut absolument que cela soit aussi applicable dans d'autres domaines, il importe de trouver des solutions de rechange rentables aux pesticides disponibles à l'heure actuelle. C'est le voeu des agriculteurs ainsi que des simples citoyens, mais dans le domaine agricole, cela revêt une importance cruciale.

J'ai d'abord parlé d'agriculture parce que le comité sénatorial a évoqué le sujet dans son rapport. Mais nous n'avons pas reçu de réponse tangible du gouvernement fédéral et j'estime que c'est très important. Cet aspect du dossier des pesticides ne saurait être ignoré. Le Conseil de la conservation du Nouveau-Brunswick serait tout à fait disposé à vous entretenir plus longuement des travaux que nous avons effectués dans ce domaine ainsi que des travaux menés par d'autres intervenants également.

En deuxième lieu, nous nous inquiétons évidemment de l'usage des pesticides employés à des fins esthétiques. Je tiens à féliciter les membres du comité permanent de leur excellent travail, qui a débouché sur le rapport de mai 2000. Ce document a constitué une excellente référence pour ceux qui d'entre nous qui sont actifs dans l'arène publique. Nous avons pu le distribuer aux dirigeants municipaux et aux simples citoyens et leur expliquer que c'était là un document de recherche disponible.

Je représente aujourd'hui la Coalition de lutte contre les pesticides du Nouveau-Brunswick, qui a été constituée l'an dernier. Il s'agit d'un regroupement d'organisations soucieuses de la santé et de l'environnement au Nouveau-Brunswick.

Nous avons formulé une résolution dans laquelle nous demandions au ministre de l'Environnement de la province de restreindre l'approvisionnement, la vente et l'utilisation des pesticides à des fins esthétiques au Nouveau-Brunswick en vertu du pouvoir qui lui est conféré par la Loi sur le contrôle des pesticides du Nouveau-Brunswick. Nous avons fait circuler cette résolution et elle a recueilli l'appui de plus de 275 000 résidents de la province. Par conséquent, le tiers de la population environ appuie un moratoire sur l'utilisation des pesticides employés à des fins esthétiques. J'ajouterai que c'est là un indice d'un soutien qui prend dans la population les proportions d'une lame de fond. Un grand nombre de citoyens souhaitent que le dossier progresse davantage. Pour nous, du Nouveau-Brunswick, ce n'est pas une mince affaire. Notre ministre hésite à agir et elle attend de voir l'orientation du gouvernement fédéral. Nous appuyons l'idée proposée par le comité permanent, selon laquelle la nouvelle loi concernant les pesticides interdirait l'enregistrement et le réenregistrement des pesticides employés à des fins esthétiques.

Dans la foulée de l'arrêt Hudson de la Cour suprême, de nombreuses collectivités du Nouveau-Brunswick et d'un peu partout au Canada envisagent d'adopter des arrêts municipaux en vue de limiter l'application de pesticides. Bien que ce soit un pas en avant, cela débouchera sur une approche fragmentaire, sur une myriade de différents règlements municipaux à l'échelle du pays. Les compagnies d'entretien de pelouse nous ont dit que tant que ces produits chimiques seraient disponibles, ils en feraient usage. En fait, ils nous ont rapporté que s'ils étaient forcés, par voie réglementaire, de modifier leurs pratiques, ils le feraient, mais que tant que ces produits chimiques seraient disponibles et qu'ils seraient autorisés à les employer, ils le feraient, car c'est la solution de facilité. Je pense qu'à un moment donné, il faudra envisager le problème dans une perspective nationale. Des représentants de l'industrie nous ont aussi dit qu'ils souhaitent que ce soit partout la même chose. Ils ne veulent pas qu'un produit chimique soit interdit dans une municipalité et autorisée dans une autre, car cela n'a pour eux aucun sens sur le plan commercial.

Le président: Je suppose que c'était là vos derniers mots.

Mme Lia Daborn: Oui. Merci.

Le président: Merci, madame Daborn.

Lori Stahlbrand est-elle dans la pièce? Si elle n'y est pas, nous passerons à l'Association canadienne des médecins pour l'environnement avec le Dr Kapil Khatter.

M. Kapil Khatter (Association canadienne des médecins pour l'environnement): Merci beaucoup. Je m'appelle Kapil Khatter et je représente l'Association canadienne des médecins pour l'environnement. Je voudrais moi aussi remercier le comité de l'excellent rapport qu'il a rédigé concernant l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire et de ses propositions en vue d'une nouvelle mesure législative.

Je passerais volontiers des heures à parler de l'ARLA mais je ne ferai qu'exposer brièvement certains aspects techniques de ce que nous voudrions voir dans la loi, ce que nous trouvons de très bien au sujet du rapport et ce qui, pour nous, est important. Premièrement, l'objet de la loi est très important. La loi ne peut pas viser une gestion des pesticides qui ne nuise pas à l'économie; elle doit plutôt enchâsser le principe de précaution et viser à nous faire progresser vers une forme d'agriculture durable.

Si nous regardons la manière dont les pesticides sont évalués, dont est faite l'évaluation du risque tant au niveau de l'homologation que des réévaluations, nous pensons que l'ARLA doit amener l'évaluation des risques au niveau des normes actuelles. Les évaluations des risques doivent être fondées sur la population la plus vulnérable.

• 1600

Il nous faut prendre un risque global. Je veux dire par là que lorsque nous savons que les effets des pesticides sont similaires, ou lorsque nous savons que les pesticides ou d'autres produits chimiques sont souvent utilisés en combinaison, ou encore lorsque nous savons qu'il y a une espèce d'effet composé ou synergique entre eux, ces produits chimiques devraient être examinés en combinaison et non pas individuellement. De plus, il nous faut suivre l'exemple américain, avec la Food Quality Protection Act, et ajouter en supplément ce facteur décuplé de sécurité qui y est prévu pour protéger les enfants. Si nous appliquions une méthode modernisée d'évaluation des risques comme celle-là, n'importe quel pesticide qui présente un risque important devrait être banni ou son usage limité.

Où le principe de précaution s'insère-t-il dans tout cela? Lorsque nous examinons des pesticides qui présentent un risque mais que ce risque n'est pas jugé important ou qu'on n'en est pas sûr, il faut appliquer le principe de précaution, et ce doit être une décision démocratique à laquelle participe le public, pour déterminer quand il convient d'appliquer le principe de précaution. Nous sommes d'avis que de principe est particulièrement pertinent lorsqu'il existe d'autres choix jugés potentiellement plus sécuritaires et lorsque les avantages d'un produit pour la société sont jugés insignifiants. Pour ces raisons, nous appuyons aussi votre proposition d'interdire l'utilisation des pesticides à des fins esthétiques, conformément au principe de précaution.

Nous appuyons vigoureusement votre recommandation relativement au délai législatif s'appliquant aux réévaluations. L'ARLA se traîne les pieds au plan de réévaluations et on nous dit qu'elles sont en cours, mais nous sommes d'accord que tous les pesticides qui ont été homologués il y a plus de cinq ans devraient être assortis d'un délai législatif pour la réévaluation, d'ici cinq ou sept ans, un peu comme les délais qui s'appliquent à la Liste intérieure des substances en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.

Nous félicitons aussi le comité pour la recommandation qu'il a fait au sujet d'un registre électronique. La caractéristique importante du registre électronique est son exhaustivité, qu'il est prévu que tous les documents remis aux fins d'homologation soient publics et que les données confidentielles soient définies de façon étroite et explicite dans la loi, plutôt que d'en laisser l'interprétation au gré de l'organisme.

Enfin, nous pensons qu'il est important qu'une participation importante du public soit prévue pour tous les enregistrements et les réévaluations et que cette participation aille au-delà de la consultation des intervenants qui se fait actuellement, et qu'elle reconnaisse qui, dans le processus, a un intérêt financier direct et qui n'en a pas.

Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup. C'était très concis et exhaustif. Si vous en avez le temps, nous aimerions avoir un document plus détaillé de votre intervention, surtout sur le dernier sujet, ce serait très utile.

[Français]

Le prochain orateur est Jean-Dominique Levesque-René. À vous la parole.

M. Jean-Dominique Levesque-René (témoignage à titre personnel): Bonjour. C'est un honneur pour moi d'avoir été invité cet après-midi par l'honorable Charles Caccia. Monsieur Caccia, je tiens à vous remercier de cette invitation en cette journée de sensibilisation aux pesticides sur la Colline du Parlement.

Je m'appelle Jean-Dominique Levesque-René et je demeure à l'île Bizard, en banlieue ouest de Montréal. J'ai maintenant 18 ans et je fréquente l'école Jeanne-Sauvé, à Dorval.

Aujourd'hui, je viens vous parler d'un sujet qui me tient à coeur depuis maintenant sept ans. Ce sujet est d'un grand intérêt pour moi parce qu'il s'agit des enfants, de leur santé et de leur environnement. Je vais vous raconter en quelques mots mon expérience personnelle ainsi que les effets que les pesticides chimiques ont eus sur ma santé.

Je vais vous parler des démarches que j'ai entreprises pour protéger la santé de tous les enfants de ma communauté. Je suis parti en croisade pour un meilleur environnement d'une façon inattendue, un soir du mois de janvier 1994. J'écoutais Les Simpson à la télévision quand j'ai senti une bosse sur le côté droit de mon cou. J'ai montré ça à ma mère, qui s'est empressée de m'amener à l'hôpital Sainte-Justine de Montréal. Je ne me doutais pas à ce moment de ce qui m'attendait. J'ai subi des examens médicaux pendant deux semaines à l'hôpital Sainte-Justine afin qu'on trouve ce que j'avais. Je me suis rendu compte que j'étais prisonnier d'un corridor d'hôpital. J'étais effrayé et inquiet, en plus de ressentir une grande fatigue. Ce n'était pas normal pour un jeune de 10 ans.

Après que j'aie eu subi une biopsie de cette bosse, un médecin est venu m'annoncer la mauvaise nouvelle. C'était le 11 février 1994. Je m'en souviens très bien. Il m'a dit: «Jean-Dominique, tu as une maladie qui s'appelle le cancer. Le type de cancer que tu as porte le nom de lymphome non hodgkinien à grandes cellules. Ce cancer rend tes ganglions malades, ainsi que tout ton système de défense qui te protège des bactéries et des virus.» À l'âge de 10 ans, on ne s'attend pas à de telles nouvelles. Auparavant, je pensais retourner à la maison et jouer avec mon chien et mes amis. C'est là que j'ai pensé à la mort. Je ne voulais pas mourir, pas à l'âge de 10 ans. J'ai pleuré; mes parents et ma soeur aussi. Ils étaient dévastés. Ce fut la journée la plus triste de ma vie.

• 1605

Avant que je ne commence mes traitements de chimiothérapie, le médecin oncologue est venu m'expliquer comment ça fonctionnerait. J'ignorais que ma vie serait perturbée et que je devrais me battre pour rester en vie. J'ai décidé de participer à un protocole de traitement de recherche expérimental nord-américain qui me donnerait de meilleures chances de guérison. Je faisais partie d'un groupe de 33 enfants américains et canadiens. J'ai reçu des traitements intensifs de chimio à toutes les trois semaines pendant une durée de 49 semaines.

Mes chances de survie s'établissaient à 50 p. 100. Le médecin m'a averti que je perdrais tous mes cheveux et que je serais probablement stérile à l'âge adulte. Deux semaines après le début des traitements de chimiothérapie, j'ai perdu tous mes cheveux. J'étais chauve et j'avais l'air d'un vieux monsieur. Je portais une casquette pour cacher mon crâne dénudé.

Durant ma maladie, je me sentais très seul. Je passais mes journées entières couché dans un lit d'hôpital. Je m'ennuyais de ne pas aller à l'école et de ne pas jouer avec mes amis. Tout ça m'a permis de réfléchir et de me poser des questions.

Au début de mon séjour à Sainte-Justine, j'avais remarqué que nous étions plusieurs enfants de l'île Bizard à être traités pour un cancer. C'était bizarre. Je veux que vous sachiez que j'ai constaté que la moitié de l'île Bizard est constituée de terrains de golf où on utilise des pesticides pour l'entretien des greens. Dans ma ville, il n'y a pas d'industries lourdes ni de lignes à haute tension; il y a seulement des zones résidentielles entourées par trois clubs de golf. Ma ville a une population de 13 500 personnes, dont 4 000 enfants.

Pendant mon séjour à l'hôpital, je me suis rappelé qu'alors que j'avais environ deux ans et demi, j'avais été transporté d'urgence par ambulance à l'hôpital pour un saignement de nez très grave. J'ai le souvenir d'être retourné souvent à l'hôpital pour des saignements de nez. Les médecins ne trouvaient pas la cause de mes symptômes. À un moment donné, j'ai eu une importante éruption cutanée après avoir joué sur ma pelouse, qui avait été traitée avec des pesticides deux jours auparavant. Mon cas a été soumis à un médecin dermatologue, qui a tout de suite établi un lien entre cette éruption cutanée et mon exposition à des pesticides sur mon gazon.

Au printemps 1987, mes parents ont cessé l'utilisation de ces produits chimiques pour l'entretien des pelouses. Mes symptômes ont complètement disparu. Ils réapparaissaient quand j'étais exposé aux pelouses traitées des terrains de jeux publics et quand j'allais jouer chez un ami dont la pelouse avait été traitée.

Pendant mes traitements de chimiothérapie, j'ai pensé qu'il devait exister un lien entre mon cancer et mon exposition aux pesticides. Après un mois de recherche, je suis tombé sur un feuillet d'information de la Société américaine du cancer. Sur le feuillet, il y avait un dessin d'un enfant portant un masque qui jouait avec son petit chien. Ce feuillet démontrait qu'il existait un lien entre le lymphome non hodgkinien et l'utilisation d'herbicides contenant du 2,4-D pour les pelouses. Le 2,4-D est l'herbicide le plus utilisé sur les pelouses au Canada. C'était écrit simplement, et j'ai compris rapidement que l'exposition des enfants comme moi aux pesticides était dangereux pour leur santé.

C'est à ce moment que j'ai demandé à mes parents de m'amener rencontrer le maire de l'île Bizard pour lui montrer le feuillet de la Société américaine du cancer sur le danger des pesticides. Je lui ai expliqué mon inquiétude face au nombre d'enfants malades du cancer à l'île Bizard.

• 1610

En même temps, je lui ai demandé de faire adopter un règlement interdisant tous les pesticides chimiques dans notre ville. C'était le 6 mai 1994. Le maire ne m'a pas pris au sérieux. C'est alors que j'ai organisé une manifestation avec l'aide de quelques amis et de leurs parents. Nous avons marché devant l'hôtel de ville avec des ballons colorés et des pancartes. Des équipes de télévision étaient sur place, ce qui m'a permis d'éveiller la curiosité de tous les médias. J'ai voulu sensibiliser les élus municipaux et leur démontrer ce qui se passait chez les enfants de l'île Bizard et l'importance de protéger leur santé.

C'était le temps de me battre. Presque à tous les mois, je me présentais à l'assemblée du conseil municipal et je demandais à chaque fois l'adoption d'un règlement interdisant les pesticides chimiques. Le maire me répondait à chaque fois qu'il n'y avait pas de preuve scientifique qui établissait un lien entre le cancer chez les humains et les pesticides.

Pourtant, je savais très bien qu'il y avait beaucoup d'enfants malades du cancer à l'île Bizard. C'est ainsi que j'ai compris les raisons pour lesquelles je devais me battre pour vivre. Après mon séjour aux soins intensifs, j'ai entendu un médecin annoncer à mes parents que je ne survivrais pas à une infection que j'avais contractée à la suite d'un traitement de chimiothérapie. Il faisait erreur. Pour la première fois, je me battais pour rester en vie. C'est à ce moment que j'ai eu le sentiment qu'il fallait que je m'accroche et que ma vie ne pouvait s'arrêter là. C'est ainsi que j'ai découvert le mystère de la vie et non celui de la mort.

Pendant mon séjour à Sainte-Justine, j'ai installé sur le mur une carte du Québec. Chaque fois qu'un enfant atteint du cancer arrivait à l'hôpital, je lui demandais où il demeurait. C'est comme ça que j'ai découvert que chez nous, à l'île Bizard, il y avait beaucoup d'enfants malades du cancer. Nous étions 22 enfants atteints du cancer à l'île Bizard. Tous souffraient de leucémie, de lymphome, de neuroblastome, de sarcome d'Ewing, de tumeur des os ou du cerveau. Tel était le résultat de mon enquête personnelle.

C'est là que j'ai commencé à exercer des pressions auprès des chercheurs de l'hôpital Sainte-Justine pour qu'ils fassent des statistiques officielles sur l'incidence du cancer chez les enfants de l'île Bizard. Avec la collaboration de la Direction de la santé publique de Montréal, ils ont émis des statistiques qui ont été publiées le 21 février 1998 dans le quotidien La Presse. Les statistiques démontraient clairement que le taux de cancer à l'île Bizard était de quatre fois le taux québécois.

Malheureusement, j'ai perdu beaucoup de mes amis. Plusieurs n'ont pas survécu à leur cancer. Je vais toujours me rappeler mon amie Marie-Ève, qui est décédée de leucémie le 6 novembre 1996. Elle avait 12 ans. Avant de décéder, elle m'a dit: «Jean-Do, tu dois rester en vie. Pour moi, c'est le temps de partir, mais toi, tu as beaucoup de travail à faire pour protéger les enfants.» Marie-Ève m'a aidé à trouver le courage nécessaire et à ne jamais lâcher.

Depuis sept ans, je visite des villes, des communautés partout au Canada. J'ai rencontré des enfants et leurs parents, et j'ai remarqué que les enfants souffraient beaucoup d'asthme, d'allergies, de troubles d'apprentissage et de cancer. Je ne peux rester silencieux. Chaque fois qu'il y a épandage de pesticides dans mon voisinage, mon corps réagit par des crises d'asthme, des allergies et j'ai des saignements de nez à chaque fois que je suis exposé aux pesticides chimiques. J'ai aussi des difficultés d'apprentissage à l'école et je dois travailler plus fort pour réussir.

J'ai le souvenir d'avoir donné une conférence dans une classe de sixième année dans une école primaire de Granby, au Québec. Un élève m'a demandé si j'avais manqué beaucoup l'école durant mes traitements de chimiothérapie à l'hôpital. Je lui ai répondu que j'avais manqué deux ans et demi d'école. Il m'a répondu: «Chanceux!» Je lui répliqué que j'aurais mieux aimé continuer d'aller à l'école qu'avoir le cancer.

• 1615

Mon rêve le plus précieux est que les médecins parlent à leurs patients du danger de l'exposition aux pesticides et de ses conséquences et risques pour la santé.

Je crois fermement que les villes et communautés doivent interdire l'utilisation des pesticides chimiques à des fins esthétiques sur les pelouses et dans les jardins. Les élus municipaux, provinciaux et fédéraux doivent protéger la santé des enfants contre ces poisons toxiques. Je vous encourage à prendre vos responsabilités et à faire campagne pour l'interdiction des pesticides chimiques auprès du ministre de la Santé, l'honorable Allan Rock. Tous les députés et tous les fonctionnaires doivent être sensibilisés aux dangers des pesticides chimiques dans notre environnement. Nous devons protéger la santé des enfants. C'est notre devoir à tous.

Pour terminer, je veux vous dire que je n'ai pas été malade pour rien. Je n'ai pas aimé souffrir du cancer, mais cette épreuve dans ma vie m'a appris à prendre mes responsabilités envers la collectivité. Quelque chose doit être fait pour les enfants. Vous pouvez faire la différence.

[Traduction]

Je me rappelle ce que disait Rachel Carson:

Merci.

[Français]

Le président: Merci, Jean-Dominique.

[Traduction]

Rod MacRae.

M. Rod MacRae (témoignage à titre personnel): Pardonnez-moi si je vous parais un peu confus après ce récit très émouvant.

Je voulais parler de certaines des recommandations que renferme le rapport du comité et qui sont le complément de celles qui concernent la modification de la Loi sur les produits antiparasitaires, et particulièrement celles qui se rapportent à ce que le gouvernement devrait faire pour aider les agriculteurs à effectuer la transition vers la gestion intégrée des parasites et les systèmes de culture biologique. Je travaille beaucoup avec des organisations agricoles et avec des groupes environnementaux qui appuient exactement ce programme. J'aimerais souligner deux ou trois choses qui, selon moi, ont changé dans le contexte global depuis un an et demi, depuis la diffusion du rapport, et par la même occasion demander au comité de continuer à exhorter ses collègues à créer un programme de soutien des agriculteurs qui veulent effectuer la transition.

Je pense que dans l'environnement externe et, si on veut, dans le monde de l'exportation—et, bien sûr, le Canada est un gros exportateur de produits alimentaires—plusieurs choses ont changé depuis un an et demi, qui font peser sur les agriculteurs canadiens un certain péril. Nous savons déjà que les agriculteurs canadiens éprouvent de grandes difficultés financières. Ce qui me préoccupe surtout, c'est que cela continuera, parce que les marchés de l'exportation remarquent, de fait, que le Canada semble se laisser distancer par de nombreux indicateurs agri-environnementaux qui servent à évaluer dans quelle mesure les pratiques agricoles du Canada affectent l'environnement. Si vous regardez certains des rapports de l'OCDE, vous verrez que le Canada n'y a pas trop bonne cote. Il semble que les marchés de l'exportation commencent à le remarquer. Ce que je crains, c'est que cela compromettra la capacité des agriculteurs de progresser.

Un grand nombre des groupes d'agriculteurs avec lesquels nous travaillons constatent déjà qu'en adoptant des systèmes de gestion intégrée des parasites, ils s'assurent une place sur les marchés de l'exportation à long terme. L'un de mes collègues de la Norfolk Fruit Growers' Association travaille avec le Fonds mondial pour la nature. Ils exportent des fruits vers l'Europe depuis longtemps et ils se sont rendu compte que pour rester sur ces marchés, en Europe, il leur fallait adopter des systèmes de gestion intégrée des parasites. Heureusement pour eux, ils avaient déjà pris les devants et disposaient d'une gamme de soutien pour contribuer à l'atteinte de cet objectif. La plupart des agriculteurs étaient très proches d'une institution de recherche. Ils bénéficiaient de bonnes mesures de soutien de la vulgarisation offertes par le ministère ontarien de l'Agriculture, de l'Alimentation et des Affaires rurales. Cependant, beaucoup de cultivateurs du pays qui sont prêts à faire la transition ne reçoivent pas le même genre d'appui.

• 1620

Le Conseil canadien du canola a révélé dans un rapport diffusé l'année dernière après le vôtre qu'un tiers des cultivateurs de canola du pays—soit quelque chose comme 15 ou 20 000 cultivateurs au total, bien qu'ils n'aient pas tous des cultures à grande échelle—un grand nombre d'agriculteurs du Canada, donc, seraient prêts à adopter la GIP si des mesures de soutien adéquates existaient. Le grand défi qui se pose maintenant à l'industrie du canola est l'obtention de ces mesures de soutien. Il n'existe pas d'importants programmes de soutien pour les agriculteurs qui veulent faire la transition à la GIP et aux systèmes de culture biologique.

Le marché commence à le remarquer à l'échelle internationale; les agriculteurs sont prêts à agir; et la communauté de l'environnement qui, pendant des années, malheureusement, n'a pas voulu reconnaître que les aliments, les cultures et l'agriculture forment un enjeu environnemental, le reconnaissent de plus en plus et se montrent prêts à appuyer un débat positif pour trouver des moyens d'aider les agriculteurs.

Les marchés intérieurs sont prêts depuis quelque temps. Certaines études de marché révèlent qu'au moins 7 à 13 p. 100 des acheteurs canadiens sont très intéressés à acheter les produits des fermes qui pratiquent la GIP et la culture biologique. Ce n'est plus un créneau du marché. Ce n'est plus quelque chose qui n'occupe qu'un à deux pour cent du marché. C'est un marché important. Le grand problème, c'est que les mesures de soutien qu'il faut pour rendre les produits disponibles n'existent pas et que les détaillants, on peut le comprendre, sont un peu réticents à investir dans tout cela alors qu'ils ne sont même pas sûrs de pouvoir être approvisionnés. Alors tous ces éléments commencent à se mettre en place.

Je pense que ce qui est si intéressant, dans ce rapport de mai 2000, c'est qu'il exprime explicitement la nécessité de mettre en oeuvre ce genre de mesures de soutien, et il a contribué à faire passer ce sujet, qui était vu comme une stratégie de marketing de créneau par certains, au rang des sujets qui ont de plus amples répercussions sur les politiques publiques.

Bien sûr, vous êtes nombreux à savoir que les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de l'Agriculture ont annoncé la conclusion d'une entente, à la fin juin, relativement à une nouvelle vision de l'agriculture. Il me semble qu'ainsi, les ministres de l'Agriculture de tout le pays ont reconnu cette nouvelle réalité. Ils doivent concevoir des programmes qui tiennent compte non seulement des risques économiques, comme par le passé, mais aussi des risques environnementaux et pour la sécurité des aliments. Ils doivent formuler une série intégrée de mesures de soutien des programmes pour aider les agriculteurs à composer avec ces trois enjeux tout à la fois. Ne l'oublions pas, la GIP et la culture biologique y tiennent une grande place.

Pour insister un peu sur la question, il y a cinq problèmes cruciaux d'ordre public dans le secteur de l'alimentation et de l'agriculture qui sont résolus par cette transition à la GIP et aux systèmes de culture biologique. Le premier c'est que, bien sûr, cela accroît la confiance des consommateurs dans le système d'approvisionnement parce qu'une grande partie des produits et pratiques controversés de l'agriculture dite conventionnelle ne sont pas utilisés, ou sont beaucoup moins utilisés avec la GIP et les systèmes de culture biologique.

Deuxièmement, cela représente pourrait modifier les besoins du gouvernement en matière de financement d'urgence des agriculteurs à long terme parce qu'ainsi, les agriculteurs seront beaucoup plus autonomes financièrement, non seulement parce que, très souvent, ils peuvent obtenir des prix supérieurs pour leurs récoltes mais aussi parce qu'en adoptant la GIP et la culture biologique, ils réduisent largement les coûts de production. Bien entendu, cela se répercute sur leurs bénéfices nets. Si les bénéfices des agriculteurs peuvent augmenter, ils dépendront moins du soutien du gouvernement pour composer avec une grande part de ces perturbations du marché et du climat.

Le troisième problème d'ordre public très important qui, à mon avis, sera résolu, c'est qu'il y aura beaucoup moins de pollution et, aussi, d'émissions de gaz à effet de serre. Ce qui n'est pas tellement reconnu, c'est que l'agriculture est l'un des plus grands participants à l'effet de serre du pays, et qu'elle est responsable de quelque chose comme 10 p. 100 des émissions. Ce genre de système de culture comporte plusieurs caractéristiques qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre.

Quatrièmement, cela contribuera aussi à la revitalisation des communautés rurales. Si le secteur agricole devient plus lucratif, il y aura d'importantes retombées économiques pour les communautés rurales.

Enfin, je pense qu'il est possible que tout ceci réduise les pressions administratives et financières sur le système d'homologation des pesticides. Cela a été le cas en Europe. Tandis que les pays de l'Europe ont adopté la GIP et les systèmes de culture biologique, les pressions se sont atténuées sur le système de réglementation des pesticides, et les coûts de l'administration de ce genre de système ont baissé.

Alors je pense que c'est le moment d'agir. Je recommande vivement au comité de continuer d'insister là-dessus, parce que je pense que le contexte est peut-être maintenant plus favorable, particulièrement par l'entremise des ministres fédéral, provinciaux et territoriaux, à la mise en oeuvre de ces plans de transition.

Je vous remercie.

Le président: Merci, monsieur MacRae.

• 1625

Nous laissons maintenant la parole à Angela Rickman, de Sierra Club of Canada. Bienvenue madame.

Mme Angela Rickman (sous-directrice, Sierra Club of Canada): Bonjour. Merci encore de me donner cette occasion de parler devant ce qui doit être notre comité préféré. Je ne saurais assez vous remercier pour le travail que vous avez fait avec le rapport de mai 2000.

Nous travaillons sur la question avec plusieurs autres organisations, par l'entremise de ce que nous appelons la campagne de réduction des pesticides, un réseau de près de 400 personnes et organisations dans tout le Canada qui s'intéressent aux questions concernant les pesticides. Notre comité de direction est composé de représentants de diverses organisations, dont le Fonds mondial pour la nature, l'Association canadienne des médecins pour l'environnement, l'Association canadienne du droit de l'environnement, la Coalition for Alternatives to Pesticides, la Toronto Environmental Alliance et le Congrès du travail du Canada. Nous avons aussi des représentants d'organismes de santé publics et d'organisations agricoles. Nous avons une grande diversité de gens qui, depuis cinq ans, ont eu la possibilité de se réunir et de mettre en commun leurs connaissances et leurs stratégies de campagne, et cela leur a été très utile.

Cependant, l'une des choses qui a été très utile, pour ces gens, a été la justification ou la crédibilité que le rapport du comité, en mai, leur a donnée devant leur conseil municipal lorsqu'ils demandent un règlement ou des restrictions sur l'usage des pesticides. Ce rapport a été un outil très précieux pour beaucoup des activistes de tout le pays, et je ne pense pas que nous puissions assez vous remercier.

La deuxième chose qui a beaucoup aidé les gens a été la décision dans l'affaire Hudson, qui a confirmé le droit des citoyens d'exiger des règlements municipaux qui les protègent contre l'utilisation des pesticides dans leur communauté. L'inconvénient, comme l'a dit Lia et, je n'en doute pas, bien d'autres aussi, c'est que cela a donné lieu à une approche fragmentée d'étude au cas par cas et communauté par communauté de la réduction de l'emploi des pesticides. Bien que ce soit utile aux communautés qui peuvent faire adopter un règlement, dans les régions où un tel règlement n'est pas admissible ou n'est pas adopté, les enfants et les éléments les plus vulnérables de ces communautés ne sont toujours pas suffisamment protégés contre l'utilisation des pesticides, particulièrement à des fins esthétiques.

En ce qui concerne la loi, nous l'avons attendue des années et des années. Nous avons appris de l'ARLA, il y a quatre ans, que la loi était prête, et nous avons attendu qu'elle entre en vigueur. Il est certain que la santé génésique et la technologique génésique sont des sujets importants, mais à notre avis, ceci est aussi un sujet très important. C'est une chose que de faire des enfants, mais cela en est une autre que de les protéger et il faut vraiment que nous nous mettions à protéger nos enfants comme il se doit et correctement.

Parmi les éléments de la loi que nous appuyons, il y a celui de la réévaluation ouverte, publique et rapide des produits chimiques utilisés actuellement, ainsi qu'un système qui traiterait en priorité les solutions moins toxiques et les amènerait sur le marché plus vite pour remplacer les produits plus toxiques.

Bien entendu, toute loi que nous adoptons doit prévoir des mesures de précaution. Si nous attendons d'avoir la preuve irréfutable et absolue que tel pesticide est nuisible, il faudra des années et des années et peut-être y parviendrons-nous, mais nous n'aurons vraiment pas rendu service à tous ces gens que ces produits auront rendus malades entre-temps.

De plus, les pesticides doivent être intégrés au SIMDUT. Les travailleurs méritent la même protection contre les produits chimiques qui servent comme pesticides que contre les produits chimiques qui ne sont pas utilisés comme des pesticides: le fait qu'un produit chimique soit un pesticide ne devrait pas l'exempter des règles qui s'appliquent à d'autres produits chimiques toxiques.

Nous pensons, bien entendu, que l'utilisation de pesticides à des fins esthétiques devrait être interdite. Rien ne justifie l'utilisation de ces produits si ce n'est pas pour protéger des récoltes. À long terme, nous voudrions qu'il y ait utilisation la plus judicieuse et la plus limitée possible des pesticides, mais comme il n'y a vraiment pas de raison d'épandre des pesticides sur une pelouse, cette utilisation doit être proscrite.

Nous n'avons toujours pas de base de données précise, au Canada, sur le type de pesticides utilisés. Le vérificateur général a signalé il y a trois ans qu'avec la Slovénie, nous étions le seul pays du monde industrialisé à ne pas tenir de registre des ventes de pesticides. C'est tout simplement inexcusable.

• 1630

Dans une société fondamentale, nous devons réorienter nos priorités. Nous avons des valeurs. Nous tenons à certaines choses. Nous tenons à la santé de nos enfants. Nous tenons à la propreté de notre environnement. Nous tenons à l'eau propre. Ce ne sont pas uniquement des choses dont nous avons besoin, mais des choses que nous apprécions, et parfois, ces choses valent plus que les profits des compagnies qui pourraient être touchées par la restriction ou l'interdiction de certains de leurs produits.

Je pense que nous devons changer notre façon de penser au sujet de la loi et notre perception de la protection de notre santé et de notre environnement, et aussi de ce qui est vraiment important pour nous. Je pense que nous reconnaissons combien nos enfants sont importants, et si nous pensons vraiment qu'ils sont importants, nous devons vraiment agir en conséquence.

C'est un problème qui ne reçoit pas beaucoup d'attention. Tandis qu'il y a de grands organismes environnementaux qui s'intéressent à la question au Canada, de même que des groupes de santé et des groupes de médecins, les gens qui travaillent sur ces questions dans tout le pays sont, surtout, des mères et des pères qui s'inquiètent pour leurs enfants. Ce sont des gens qui sont devenus malades ou qui ont vu leurs enfants ou leurs voisins devenir malades parce qu'ils ont été exposés à des produits chimiques, et ces gens-là ne peuvent rient contre les pressions des grandes industries.

Hier soir, à Caledon, il y avait une séance publique sur l'utilisation des pesticides. Ils envisagent d'adopter un règlement à Caledon. Il y avait 49 conférenciers; 45 d'entre eux venaient de l'industrie et 4 n'en étaient pas. Lorsque les communautés subissent ce genre de pressions écrasantes, la plupart des gens ne se sentent pas capables de lutter communauté par communauté. Il nous faut une loi nationale qui mette en place les mesures adéquates de protection et des règles du jeu équitables dans tout le pays afin que ces 4 personnes ne se sentent pas seules au milieu de la forêt, qu'elles n'aient pas à s'attaquer seules à un grand groupe de pression. Il est grand temps qu'il y ait une loi sur les pesticides et des amendements pertinents à la Loi sur la lutte antiparasitaire au Canada.

Je sais que vous n'avez pas ménagé vos efforts relativement à cette question et nous vous en sommes grandement reconnaissants, mais nous espérons que vous continuerez à exercer des pressions auprès des diverses parties pour que cette mesure législative soit présentée dans les plus brefs délais

Le président: Merci, madame Rickman.

Nous avons trois autres témoins à entendre et nous pouvons ensuite entreprendre une courte ronde de questions avant la sonnerie d'appel. Mme Smeesters sera suivie par M. Hepworth et enfin par Mme Sheryl Shour. Madame Smeesters.

[Français]

Mme Édith Smeesters (présidente, Nature-Action Québec): Bonjour, monsieur Caccia.

Le président: Bonjour.

Mme Édith Smeesters: Je vais m'adresser à vous en français. Ce sera plus facile pour moi.

Je vous remercie de m'avoir invitée à venir parler ici au nom de Nature-Action. Également, je suis actuellement présidente d'une coalition qu'on a créée il y a à peu près un an, la Coalition pour les alternatives aux pesticides, un organisme provincial au niveau de tout le Québec. Notre but est évidemment de réduire l'utilisation des pesticides, mais notre premier but à court terme est de bannir l'utilisation des pesticides à des fins esthétiques.

Plusieurs choses nous ont beaucoup aidés dernièrement, entre autres le rapport du comité, pour lequel je vous félicite, qui nous a permis d'avoir de bons arguments. C'était très bien structuré. Il y a parfois beaucoup de recherche à lire. Cela nous faisait un bon résumé à présenter chaque fois qu'on allait discuter avec des municipalités.

Depuis un an, nous avons notamment traduit une trousse d'action de la Green Communities Association en Ontario; nous l'avons adaptée au Québec. On en a refait plusieurs éléments et on en a ajouté. On a distribué 13 000 trousses dans tout le Québec avec l'aide de 20 groupes et on va en distribuer 10 000 autres l'année prochaine. Ce genre de campagne a énormément de succès et fait vraiment boule de neige actuellement.

Au Québec, sept municipalités ont banni les pesticides à des fins esthétiques, et il y en a quatre autres qui vont faire de même d'ici le mois de janvier. Évidemment, ce serait très fastidieux s'il fallait attendre que les 1 500 municipalités du Québec le fassent. On ne peut pas attendre que cela se fasse pas par pas. Il faudrait attendre 20 ans et plus avant que toutes les municipalités comprennent. Donc, comme les autres intervenants, je pense qu'il faut agir aux niveaux provincial et fédéral, au niveau de tout le pays. On se demande toujours ce qui est du ressort fédéral et ce qui est du ressort provincial. On frappe à une porte et on nous dit qu'il faut aller frapper à l'autre porte. C'est parfois un peu frustrant.

• 1635

Le fédéral s'occupe de l'enregistrement des pesticides. Je suis étonnée, par exemple, de voir qu'il y a très peu de biopesticides de la ligne BT, etc. Il y a très peu de biopesticides qui sont homologués au Canada comparativement aux États-Unis, où il y en a beaucoup plus. Je ne dis pas qu'il faut commencer à pulvériser partout des biopesticides. C'est toujours la prévention avant tout, mais comme dernier recours, ce serait nettement plus souhaitable que des pesticides chimiques.

Qu'est-ce qui pourrait se faire au niveau fédéral? Je crois qu'il y aura sûrement une intervention à faire au niveau des produits qui sont autorisés sur les tablettes des magasins. C'est inacceptable qu'on y trouve des produits toxiques qu'un enfant de cinq ou douze ans peut aller acheter.

Il y a plusieurs choses indispensables à faire au niveau fédéral. J'étais à la réunion de l'ARLA au mois de mars, à Aylmer. Plusieurs bonnes idées sont sorties, mais, comme Mme Wright, je trouve que ça n'avance pas très vite avec l'ARLA. Cette réunion réunissait soi-disant tous les intervenants. On était 10 groupes environnementaux pour 90 personnes de l'industrie. Ce n'était pas très représentatif de la population.

Le fédéral pourrait aussi travailler au niveau de la sensibilisation. Souvent, les politiciens disent que la population n'est pas prête, mais c'est comme la poule et l'oeuf: il faut absolument sensibiliser la population, et le reste va venir. Donc, il faut absolument affecter beaucoup plus d'argent à la sensibilisation. Actuellement, dans la région de Montréal, il y a de la publicité qui est produite par l'industrie. L'industrie fait une campagne de 50 000 $ dans la région de Montréal, avec de pleines pages couleurs dans les journaux, pour montrer comment les gens seront malheureux quand ils n'auront plus de pesticides. On montre des terrains tout à fait délabrés et d'autres terrains où on peut utiliser des pesticides, où on voit la pelouse parfaite avec des gens heureux.

Il faut vraiment briser ces stéréotypes archaïques qui datent des années 1950, et il faut de l'argent pour faire ça. Je pense qu'on devrait aller à la télévision et à la radio. Il faudrait être partout avec des vidéoclips, mais ça coûte très, très cher et nous n'avons pas de tels moyens actuellement.

En ce qui concerne la lutte intégrée qui a un peu le vent dans les voiles, on en a parlé à l'ARLA et on en parle au Québec depuis plusieurs années. Plusieurs compagnies d'entretien de pelouses font actuellement de la lutte intégrée. C'est un grand pas en avant, mais il faut que les gens comprennent que ce n'est pas le but à atteindre. On a réduit la quantité de pesticides, mais on utilise toujours des pesticides chimiques. En fait, c'est plus un marketing vert qu'une véritable lutte intégrée. Qui peut savoir si la compagnie ne pulvérise pas toute la pelouse? C'est ce qui arrive généralement.

Il y a beaucoup de publicité mensongère à cet égard, parce que c'est vendu comme une approche biologique. Les gens ne savent plus sur quel pied danser. Ils attendent que le gouvernement bouge et leur dise quoi faire.

C'est un peu ça, mon intervention d'aujourd'hui. Je vous dis bravo pour tout ce que vous avez déjà fait, mais il y a encore beaucoup à faire. J'aimerais donc que ça aille plus vite au niveau de l'ARLA.

Le président: Merci, madame Smeesters.

[Traduction]

Monsieur Hepworth, vous avez la parole.

M. Lorne Hepworth (président, CropLife Canada): Merci monsieur le président, membres du comité et autres témoins. Merci de l'occasion que vous nous offrez de comparaître devant vous aujourd'hui. Depuis ma dernière comparution devant ce comité, aussi récemment que la semaine dernière en fait, notre association a changé de nom. Crop Protection Institute porte maintenant le nom de CropLife Canada. J'ai cru devoir vous en informer.

Comme j'ai examiné la liste des dix témoins qui sont ici aujourd'hui et que j'ai écouté les propos qu'ils ont tenus, je dois dire que je me sens un peu comme le loup dans la bergerie. Je vois qu'il est juste de dire que tous les témoins ici, sauf moi, sont contre les pesticides. Je ne partage peut-être pas leur point de vue, mais je le respecte. Je respecte aussi leur droit de le faire valoir.

Cela dit, toutefois, je ne crois pas que le comité soit bien servi par un processus si peu objectif. Il y a de nombreux autres points de vue tout aussi légitimes qui méritent d'être entendus dans le cadre de ce débat et qui pourraient contribuer de façon valable à l'élaboration des politiques publiques.

Le président: Je suis désolé de vous interrompre, monsieur Hepworth, mais nous n'avons pas besoin d'un discours sur la façon d'être bien servis. Les gens qui comparaissent ici aujourd'hui, y compris vous, sont ceux qui ont demandé à comparaître et s'il y a un déséquilibre, il était du côté de ceux qui ont demandé à comparaître.

Continuez, je vous en prie.

M. Lorne Hepworth: Merci de cet éclaircissement, monsieur le président.

• 1640

Je vais donc vous dire que je pense que certains groupes agricoles importants aimeraient pouvoir comparaître devant vous—et certains d'entre eux sont ici aujourd'hui—par exemple la Fédération canadienne de l'agriculture, le conseil d'horticulture, l'Association des fruiticulteurs et des maraîchers de l'Ontario, AGCare, les Grain and Oilseed Producers—et ils m'ont demandé de faire valoir ce point en leur nom—ainsi que d'autres associations. Je ne veux pas trop insister là-dessus, mais je crois qu'il est important pour le processus que les voix soient entendues, que l'invitation doive leur être envoyée ou qu'ils doivent ne pas manquer de se mettre au courant des réunions du comité.

Je dirais, monsieur le président, que nous avons entendu parler des audiences du comité par l'entremise des membres. J'ai appris que je serais témoin ici non—j'ai fait parvenir une lettre et je n'ai reçu aucune réponse que ce soit par télécopieur, par courriel ou par lettre confirmant que je comparaîtrais. Heureusement, quelqu'un a vérifié le site Web vendredi soir pour y découvrir que je témoignerais devant le comité. Je ne sais pas s'il s'agit du processus de communication habituel, mais peut-être qu'il se trouve d'autres organismes parmi ceux que j'ai mentionnés qui n'étaient pas au courant de ces audiences.

De toute façon, je ne vais pas insister là-dessus. Je voulais simplement le dire.

Le président: Vous avez raison de ne pas trop insister là-dessus parce que votre lettre porte la date du 24 septembre.

M. Lorne Hepworth: Oui, c'est-à-dire jeudi dernier.

Le président: Hier.

M. Lorne Hepworth: Il y a 16 mois le comité a publié son rapport sur les pesticides. Même si le rapport contient certaines recommandations que nous pouvons appuyer, nous estimons qu'en général il est très imparfait. L'approche scientifique y était mauvaise et on ne nous a raconté que la moitié de l'histoire; c'est-à-dire, les avantages de la technologie des pesticides n'ont pas été reconnus.

Nombreux sont ceux qui pourraient faire observer qu'une industrie qui donne son avis sur un rapport qui ne lui était pas favorable est à peine une surprise. Après tout, il s'agit d'une partie intéressée, nous le reconnaissons. Pour vérifier notre analyse selon laquelle le rapport était vraiment faible du point de vue scientifique, nous avons demandé à CANTOX Health Sciences International d'évaluer scientifiquement le rapport. CANTOX est une entreprise de consultants où travaillent plus de 50 scientifiques spécialisés en toxicologie.

Ce rapport et notre réponse, monsieur le président, ont été fournis au préalable aux membres de même qu'à d'autres députés et autres parties intéressées.

Qu'ont trouvé ces scientifiques? Premièrement, que le rapport du comité s'est attaché en grande partie à des pesticides qui ne sont plus utilisés, les organochlorés plus précisément, plutôt qu'aux pesticides présentement homologués.

Deuxièmement, les avantages pour la santé que représente l'utilisation des pesticides n'ont pas été pris en compte dans l'ensemble.

Troisièmement,

Enfin, les effets sur la santé ont été limités à des généralités.

CANTOX a souligné que le comité n'a fait aucun effort pour énumérer les pesticides qui seraient considérés esthétiques et en conclut, en ce qui a trait à cette recommandation, qu'en l'absence de tout effort véritable pour procéder à des analyses de risques et d'avantages l'objectivité de ce rapport est remise en question. De plus, selon CANTOX rien n'indique dans ces chapitres—et l'un des chapitres dont il parle est logé sous la rubrique «Autres groupes vulnérables»—que le comité ou ses conseillers ont bien compris le concept du risque ou les principes scientifiques en général.

Des mots assez forts, monsieur le président et membres du comité, pas de ceux que ces professionnels de CANTOX utiliseraient ou ont tendance à utiliser couramment à moins qu'ils soient absolument justifiés, mais de ceux qui font ressortir les graves lacunes du rapport qui, à mon avis, méritent un examen complet et approfondi.

Jusqu'à maintenant, monsieur le président, j'ai insisté sur les lacunes du rapport du comité. Vous savez ce à quoi nous nous opposons en matière de politique sur les pesticides. Mais vous pourriez honnêtement demander où nous nous situons lorsqu'il est question d'un nouveau cadre de réglementation pour les pesticides. On nous perçoit trop souvent comme nous opposant à la protection du public et de l'environnement lorsque nous critiquons des rapports qui sont défavorables à l'industrie, même si les critiques se fondent sur des lacunes scientifiques légitimes. Eh bien! rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité. Nous partageons le désir de tous les Canadiens: la protection du public et de l'environnement.

Je veux consacrer les quelques dernières minutes qui me restent à attirer votre'attention sur ce qu'est notre position en tant qu'industries, entreprises, professionnels qui travaillent dans ces entreprises, parents, propriétaires d'animaux de compagnie et bons voisins. Nous sommes en faveur de la protection de la santé humaine et de l'environnement. Le plus cher désir, en R-D, des entreprises membres de notre organisme, les années d'essai, l'objectif constant de tout ceci, c'est la réduction du risque, illustrée par les nouvelles molécules à faibles doses, très ciblées, très biodégradables qui caractérisent les composés modernes. Nous sommes en faveur du deuxième moyen de défense solide qu'est l'évaluation de la sécurité par voie de réglementation gouvernementale. Nos membres continuent à assumer la responsabilité de leur produit après sa vente. Le recyclage des contenants vides et le ramassage des anciens pesticides indésirables caractérisent nos programmes reconnus à l'échelle mondiale sous le nom «stewardship first».

• 1645

Nous préconisons un système de réglementation rigoureux fondé sur la science et auquel la population fait confiance, une science basée sur les résultats cliniques et scientifiques qui a fait l'objet d'une évaluation internationale fiable et impartiale du plus haut niveau, pas une science bidon, pas une science politique mais le genre de science de Santé Canada. Reconnaissant que la science évolue et n'est pas infaillible, nous appuyons les recherches qui se font pour élargir notre connaissance scientifique réglementaire. Nous sommes en faveur de la réévaluation des anciens pesticides pour s'assurer qu'ils répondent aux normes des évaluations courantes en matière de science et de sécurité.

Les détenteurs d'homologation et les organismes de réglementation, adoptant une approche de précaution, ont toujours énormément insisté sur l'évaluation et la gestion du risque. Toutefois, la troisième composante de l'évaluation du risque a souvent été laissée de côté: la communication des risques. La population n'est pas très bien servie à cet égard. Pour qu'elle prenne des décisions bien informées, il faut la mettre au courant relativement à ces trois aspects.

Nous sommes en faveur de la lutte antiparasitaire intégrée et les pratiques durables tant dans les régions urbaines que rurales, du bon outil, du moment propice, du bon endroit et de la bonne façon. La lutte antiparasitaire intégrée inclut les produits chimiques, les contrôles biologiques, les nouvelles applications biotechnologiques pour la lutte antiparasitaire de même que la rotation des cultures, les techniques de cultures, etc.

Nous préconisons une agriculture concurrentielle et l'amélioration de la qualité de vie grâce à nos technologies. Cela signifie que nos agriculteurs doivent avoir accès à point nommé aux dernières technologies.

Nous favorisons l'ouverture et la transparence. Je reconnaîtrai que ce n'est pas un domaine facile pour nous, c'est-à-dire trouver l'équilibre entre, d'une part, la protection de la propriété intellectuelle valable et coûteuse si nécessaire à l'innovation constante, ce que nous appelons les renseignements commerciaux confidentiels, et, d'autre part, le besoin du public d'être au courant. Nous avons déjà pris plusieurs mesures et nous en prendrons d'autres, par exemple, les documents proposés concernant la réglementation des pesticides, le concept d'une salle de lecture sur les pesticides et la base de données MRL. En outre, nous sommes en train de préparer un document sur le processus de divulgation des demandes qui serait utile et pour les agriculteurs et pour le grand public.

Monsieur le président et membres du comité, parce que nous voulons également un système de réglementation robuste qui protège la santé humaine et l'environnement, notre réponse à ce rapport du comité incluait non seulement l'évaluation de CANTOX mais, et cela est tout aussi important, une liste de quelques-unes de ces 18 recommandations dont j'ai parlé pour améliorer le cadre de réglementation relatif aux pesticides. Nous vous demandons de les examiner attentivement.

Enfin, l'automne dernier, environ 150 jours après la publication du rapport du comité, au nom du gouvernement, le ministre de la Santé a répondu au rapport du comité. Alors que nous étions d'avis que le rapport du comité comportait d'importantes lacunes, nous estimions très juste la réponse du gouvernement. Nous avons trouvé que nos observations et les leurs pour ce qui est d'améliorer le cadre de réglementation des pesticides se recoupaient beaucoup. Nous croyons que leur réponse peut servir de repère utile pour mesurer les progrès en matière d'amélioration du cadre de réglementation.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Hepworth.

Les allégations que vous faites aux points 1, 2 et 3 sont fausses. Le temps ne me permet pas d'entrer dans les détails mais cela suffit pour faire valoir ce point.

Quant à vos remarques concernant le risque, deux chapitres sont inclus dans ce rapport. Ils ont été écrits avec l'aide de deux chercheurs réputés, dont un toxicologue. Les chapitres eux-mêmes sont une preuve suffisante du sérieux avec lequel nous avons pris la question du risque. Leur complexité est aussi la preuve du temps que nous avons consacré à cette tâche extrêmement difficile.

Nous accueillons maintenant Sheryl Shour.

Mme Sheryl Shour: Merci de l'occasion que vous m'offrez de vous parler aujourd'hui.

J'ai une entreprise qui aide les gens à diminuer leur exposition aux produits chimiques et à cette fin, j'offre depuis 1993 dans la région de Toronto un service d'entretien de pelouse entièrement biologique—sans pesticides quels qu'ils soient. Je suis membre du Sous-comité sur les pesticides de la ville de Toronto qui surveille l'élimination des pesticides sur les terrains appartenant à la ville.

Je représente aussi l'industrie, dans ce cas l'Organic Landscape Alliance, un réseau d'arboristes et pépiniéristes dont le mandat consiste à aider à sensibiliser le public à l'horticulture biologique et à promouvoir cette industrie. OLA n'a été constituée en société qu'il y a un an et prend de l'ampleur tous les jours.

• 1650

Les méthodes biologiques travaillent de concert avec la nature plutôt que de la manipuler. Cela signifie que nous adoptons une approche à plus long terme des soins à donner à la pelouse et ne sommes pas motivés par des solutions miracles. Prendre soin du sol de façon écologique offre d'excellents résultats environnementaux et économiques aux gestionnaires immobiliers et aux propriétaires.

L'entretien du gazon en recourant à des méthodes biologiques est à long terme moins coûteux et exige moins de ressources. Cependant, l'horticulture biologique est une industrie basée sur les connaissances. Les membres de l'OLA apportent un bagage de connaissances, une liste impressionnante de références et une expérience pratique inestimable.

Sur une base volontaire nos membres ont essayé de sensibiliser le grand public, le personnel des parcs et d'autres entreprises d'entretien des pelouses au moyen d'une série de déjeuners à l'extérieur, de foires commerciales et de conférences annuelles. Cependant, changer les perceptions du public au sujet de ce à quoi devrait ressembler un gazon urbain exigera beaucoup plus qu'une ligne sans frais et quelques soirées d'information. Des initiatives de promotion exhaustives, la publicité de l'image et la disponibilité du produit ont été en grande partie responsables de l'acceptation de l'approche chimique. Par conséquent, l'acceptation sur une grande échelle d'une approche biologique exige la disponibilité de produits de remplacement et des entreprises qui sachent les utiliser.

Soit dit en passant, la plupart des membres de l'OLA connaissent en fait une croissance de 30 p. 100 par année. L'avenir est très prometteur pour les nouveaux produits et services biologiques. Par conséquent, le problème en ce qui consiste l'entretien des pelouses et des jardins sans l'aide des pesticides n'est pas de nature économique mais plutôt une question de volonté. En fait, l'un des plus grands défis que l'OLA doit relever à l'heure actuelle, c'est de répondre à la demande.

Nous avons besoin de l'appui d'une nouvelle loi sur les produits antiparasitaires qui accélérera l'approbation de nouveaux produits antiparasitaires de faible toxicité et qui encouragera la recherche de techniques écologiques. Une nouvelle loi pourrait assurer la pleine divulgation de tous les ingrédients du produit, pour que le grand public puisse bel et bien prendre des décisions très éclairées.

Les sociétés en vue résistent au changement. Je crois comprendre qu'elles organisent des cours sur la façon d'exercer des pressions contre les règlements contre les pesticides. En apportant des changements à la Loi sur les produits antiparasitaires, nous encouragerions peut-être ces entreprises commerciales d'entretien des pelouses à consacrer plutôt leur énergie au processus plus productif et sain de conversion de leur entreprise en une entreprise biologique.

L'horticulture biologique est peut-être un des meilleurs exemples d'une industrie durable tant des points de vue de l'environnement que de l'économie. Les changements proposés à la Loi sur les produits antiparasitaires contribueraient au succès de cette industrie, non seulement pour le bien-être de ses membres mais aussi pour la santé et le bien-être environnemental de tous les Canadiens.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

C'était le dernier intervenant sur notre liste. Nous allons maintenant passer à une ronde de questions, peut-être de courtes questions et réponses afin de permettre au plus grand nombre possible d'intervenir.

Jusqu'à maintenant, M. Savoy, M. Herron, M. Reed, M. Bigras, M. Mills et M. Comartin ont manifesté le désir de poser des questions.

Monsieur Savoy, une brève question s'il vous plaît.

M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Je vous remercie beaucoup de vos exposés. Ils sont assurément intéressants.

J'aimerais tout d'abord préciser quelque chose. Au Nouveau-Brunswick, la ceinture de pomme de terre est située entre Grand Falls et Woodstock et non entre Edmundston et Grand Falls. Je viens de cette région. C'est ma circonscription. Nous produisons environ 12 p. 100 des pommes de terre au Canada.

La deuxième chose dont j'aimerais faire part à Lia, qui vient de ma province, ainsi qu'à Julia, M. Khatter, Angela Rickman et bien sûr Lorne porte sur les solutions de rechange aux pesticides. J'ai de l'expérience dans le domaine des pesticides. En effet, j'ai fait de la commercialisation pour un laboratoire qui consacrait une grande partie de ses travaux aux pesticides organochlorés et organophosphorés, y compris l'élaboration d'une méthodologie relative aux nouveaux pesticides utilisant différentes matrices. En ce qui concerne les solutions de rechange aux pesticides—je suis convaincu que cette question intéressera le président—l'une des options consiste à nous tourner du côté des OGM. Je sais que beaucoup de groupes désapprouvent les OGM comme solution de rechange et je veux savoir ce que vous avez à dire là-dessus.

Personnellement, si on me demande de manger une pomme—et j'en ai dégusté une plus tôt—avec des résidus de pesticide ou sans résidus de pesticide à cause des OGM, je choisirais la deuxième.

J'aimerais donc que chacun d'entre vous donne son avis là-dessus, sur le compromis entre OGM et pesticides.

Le président: Pas chacun des groupes. Un seulement.

M. Andy Savoy: Un seulement?

Le président: Vous pouvez n'en choisir qu'un parce que le temps nous presse.

• 1655

M. Andy Savoy: Si je dois en choisir un, je prendrais Angela.

Le président: Angela n'est pas ici.

M. Andy Savoy: D'accord. Julia.

Ça vous convient?

Mme Julia Langer: Je vais m'en remettre à Rod qui a rédigé un document précisément sur cette question. Dans le cadre de notre offensive pour la réduction des pesticides, on nous a dit: «Vous devez croire aux OGM», et nous répondons, par pure curiosité, «Est-ce que les OGM réduisent l'utilisation des pesticides?» Rod peut répondre à cette question.

M. Andy Savoy: Rod.

M. Rod MacRae: J'ai revu beaucoup de rapports qui sont encore limités, je dirais, sur le lien entre l'utilisation des OGM et ses répercussions sur les pesticides. L'histoire est décidément en demi-teintes et certainement pas aussi positive que l'industrie de la biotechnologie la présenterait. Le problème fondamental, c'est qu'en passant aux OGM, nous passons assurément à de nouveaux produits, mais cela ne mène pas nécessairement à une réduction de l'utilisation des pesticides dans le système de production agricole.

Par exemple, le conseil du canola a rendu public il y a quelques mois un rapport portant sur le canola transgénique. Il en ressort—ce qui a été particulièrement mis en relief dans les déclarations publiques à son sujet—que, si l'on se fie à la baisse de la facture des pesticides, les agriculteurs ont réduit leur utilisation de ces produits. Toutefois, en feuilletant le rapport plus attentivement, j'ai constaté que les agriculteurs qui utilisent le Roundup Ready et le Liberty Link font en réalité plus d'épandages que les autres. Ils épandent tout simplement beaucoup plus de Roundup. Ils cessent d'utiliser d'autres produits au profit du Roundup. D'après ce que j'ai lu dans le rapport, leur utilisation totale de pesticides a en fait augmenté.

C'est le même scénario aux États-Unis. Le recours aux pesticides n'a pas été bien étudié au Canada, mis à part le cas du canola. Aux États-Unis, quand on ventile les données, bien souvent, on constate que les OGM entraînent en réalité une augmentation du recours aux pesticides.

En fait, dans le cas du maïs protégé par un biopesticide, des faits plutôt solides démontrent que tout l'accent mis sur le maïs protégé par un biopesticide a incité beaucoup de producteurs à faire beaucoup plus d'épandages qu'ils ne l'auraient fait dans le passé. Auparavant, ils n'arrosaient jamais le maïs pour le protéger contre la pyrale, cible du biopesticide, alors que maintenant, ils arrosent davantage, en réalité parce qu'ils sont plus conscients du biopesticide relié à l'utilisation de la technique de culture.

À mon avis, la vague actuelle d'applications nuira en fait à long terme à la lutte antiparasitaire intégrée parce qu'elle continue de cantonner les agriculteurs dans des assolements très limités qui exigent le recours aux pesticides.

Si vous vous arrêtez à ce qui se produit, entre autres, dans le cas du canola traité au Roundup Ready et les difficultés causées par le contrôle des ressemis de canola et si vous tenez compte de l'éventuelle introduction sur le marché de blé traité au Roundup Ready—il devrait faire son entrée entre 2003 et 2005—, nous allons constater que les agriculteurs devront en réalité épandre plus de produits pour contrôler certaines effets de la technologie. Ils finiront par simplifier les assolements qui auront alors besoin également d'autres épandages de pesticides en réaction à la simplification de l'agroécosystème.

M. Andy Savoy: Je vous remercie.

Le président: Monsieur Savoy, je vous remercie.

Je vous demanderais de bien vouloir réduire vos interventions au minimum.

Monsieur Herron, puis monsieur Reed.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC/RD): Merci, monsieur le président.

Je tiens à énoncer officiellement notre position dans ce dossier particulier. Le Parti progressiste-conservateur, dans son programme de novembre dernier, a exhorté le gouvernement à déposer immédiatement une nouvelle loi sur les pesticides. Il faudrait entre autres faire en sorte que soit évaluée la toxicité de ces produits sur nos populations les plus vulnérables, c'est-à-dire les enfants, les femmes enceintes et les personnes âgées. Il faut que soient divulgués tous les ingrédients et les matières inertes entrant dans leur composition. De plus, il faudrait se doter d'une initiative visant à informer la population au sujet de l'utilisation à des fins esthétiques des pesticides, particulièrement de leur effet cumulatif.

[Français]

Mais auparavant, monsieur le président, je voudrais remercier M. Levesque-René pour sa présentation. C'était incroyable. Merci bien, monsieur.

[Traduction]

J'ai deux questions, deux très brèves questions à poser.

Le président: Vous pouvez en posez une.

M. John Herron: Une seule?

• 1700

Je crois savoir que le Comité consultatif sur la lutte antiparasitaire a à nouveau rencontré des représentants du gouvernement en avril, l'an dernier, et qu'à la suite de cette rencontre, le groupe qui défend la position des environnementalistes ainsi que de l'industrie a écrit au ministre de la Santé pour lui demander de faire adopter une nouvelle loi.

Pouvez-vous nous décrire avec concision la recommandation faite au ministre par le comité consultatif quant aux mesures requises?

Mme Julia Langer: Je n'y étais pas. C'est vous qui étiez présent.

Mme Édith Smeesters: Pouvez-vous répéter la question?

M. John Herron: Ce que j'essaie de dire en fait, c'est que le Comité consultatif sur la lutte antiparasitaire a fait une déclaration sans équivoque voulant que tous les intéressés acceptent maintenant l'idée que le gouvernement aille de l'avant avec une nouvelle loi. Il envoie ce message depuis des années, depuis trois ans.

Pourriez-vous confirmer au comité que le Comité consultatif sur la lutte antiparasitaire a clairement dit au ministre d'aller de l'avant avec la loi, de sorte que, si je pose une question à la Chambre des communes la semaine prochaine, il ne pourra pas répondre à nouveau qu'il attend de vos nouvelles?

Monsieur le président, voilà ma question.

Le président: Je vous remercie.

Répondez-vous par l'affirmative ou la négative?

[Français]

Mme Édith Smeesters: Puis-je parler en français?

Le président: Oui, certainement.

Mme Édith Smeesters: Ce n'était pas très clair. C'était juste une réunion de concertation, et il n'y a pas eu de décision par la suite.

[Traduction]

Mme Julia Langer: En tant que membre du Comité consultatif sur la lutte antiparasitaire, bien que je n'aie pas assisté à la rencontre d'avril, il est très clair d'après les lettres qui ont été envoyées au ministre que, si l'on en croit les grandes lignes du projet de loi—des modifications législatives que le ministre a proposées, dont nous n'avons pas vu le libellé, mais dont nous avons pu voir la teneur, dans la version anglaise—, tous les membres du comité représentant tous les intervenants ont effectivement donné le feu vert.

Nous n'avons pas encore vu le projet de loi et nous aimerions certes en déposer, mais c'est effectivement la recommandation qui a été faite.

M. John Herron: C'est tout?

Le président: Je vous remercie.

M. John Herron: D'accord.

Le président: Monsieur Reed, suivi de M. Bigras.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci, monsieur le président. Je vais essayer d'être le plus bref possible.

Depuis que je suis au monde, nous sommes passés de l'application de métaux lourds aux cultures—du plomb et de l'arsenic—aux pesticides, qui sont biodégradables. Je le précise pour essayer de situer en contexte les méthodes passées, les méthodes actuelles et ce que nous pouvons envisager pour l'avenir.

Je dirais aussi, à la décharge des agriculteurs, qu'ils utilisent le moins de pesticides possible, car ceux-ci sont un intrant, de sorte qu'ils n'ont pas intérêt en tant que gens d'affaires à gaspiller de l'argent en épandages inutiles. Le propriétaire urbain d'une pelouse est plus susceptible de gaspiller que l'agriculteur.

Quant à ce débat qui fait rage au sujet des OGM, je vais exprimer mon opinion personnelle. Je préfère manger un épi de maïs transgénique qu'un épi traité avec un pesticide chimique à effet durable.

C'est tout ce que j'avais à dire.

Le président: Monsieur Reed, je vous remercie.

Monsieur Bigras, suivi de M. Mills, M. Comartin, Mme Redman, M. Lincoln, M. Laliberte et Mme Kraft Sloan.

[Français]

Monsieur Bigras.

M. Bernard Bigras (Rosemont—Petite-Patrie, BQ): Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous remercie tous d'avoir accepté l'invitation. Merci à Jean-Dominique aussi.

Tout d'abord, je tiens à être clair. En ce qui a trait à cette question, le Québec exige une loi plus forte. Naturellement, on demande instamment que les recommandations du comité soient prises en considération. C'est la raison pour laquelle le ministre de l'Environnement du Québec a demandé vendredi que cette question soit mise à l'ordre du jour de la réunion du Conseil canadien des ministres de l'Environnement qui, comme vous le savez, s'est tenue il y a quelques jours au Manitoba. Donc, il y a une préoccupation évidente à cet égard.

En ce qui a trait à l'utilisation des pesticides à des fins esthétiques, il faut être clair: il n'y a aucune raison qui motive l'utilisation de pesticides domestiques. Je pense qu'il faut réaffirmer cette position sur chaque tribune, chaque fois qu'on a la chance de le faire.

En ce qui a trait aux autres utilisations, ne croyez-vous pas qu'il y a un problème évident en termes d'homologation de produits de substitution? On sait qu'il est actuellement nécessaire qu'il y ait, sur le marché, un certain nombre de produits qui pourraient venir se substituer aux pesticides chimiques. Je lisais récemment des chiffres qui disaient que dans l'ensemble du Canada, il n'y a que 37 biopesticides vendus sous 150 appellations commerciales différentes, alors qu'aux États-Unis, la population a accès à 175 biopesticides vendus sous 700 appellations commerciales différentes.

• 1705

Est-ce qu'un retard comme celui-là n'est pas néfaste quand il s'agit d'entreprendre ce virage qui nous apparaît tous nécessaire, comme c'est assez clair aujourd'hui?

Le président: Madame Smeesters.

Mme Édith Smeesters: Je peux vous répondre qu'en ce qui concerne les pelouses ou l'aménagement paysager, on peut très bien s'en sortir avec les produits qu'il y a actuellement. Oui, on pourrait avoir plus d'outils à notre disposition. Comme je le disais tout à l'heure, je pense qu'il y a un besoin pour ça, un besoin pour de la recherche. Mais c'est toujours la prévention d'abord.

En ce qui concerne l'agriculture, il y a beaucoup de gens qui ont déjà démontré que l'agriculture biologique était possible. Le problème en est toujours un de coût, de main-d'oeuvre, etc. Donc, oui, il faut sûrement aller plus loin.

M. Bernard Bigras: C'est aussi le cas pour l'homologation, pour les retards, parce qu'il y a un retard important quant à l'homologation de certains biopesticides.

Mme Édith Smeesters: Absolument.

Le président: Merci, monsieur Bigras.

[Traduction]

Monsieur Mills, suivi de M. Comartin.

M. Bob Mills (Red Deer, AC): J'aimerais essentiellement faire deux observations. Comme l'a fait remarquer M. Reed, les agriculteurs n'ont pas intérêt en tant que chefs d'entreprise à faire une utilisation excessive des pesticides. Il n'est pas non plus avantageux sur le plan commercial de nuire à l'environnement, ce dont les chefs d'entreprise ont de plus en plus conscience. Plus nous insisterons sur ce point, plus nous pourrons les en convaincre, mieux ce sera.

Les agriculteurs ne peuvent pas en réalité absorber plus de coûts qu'ils ne le font déjà. Si on leur demande de réduire leur utilisation de pesticides, d'herbicides ou de que sais-je encore, cela va avoir un impact sur leur revenu. Je crois qu'il faut y réfléchir sérieusement.

Quant à ce qu'a dit M. Bigras, il me semble—j'ignore si j'ai tort ou raison—que si nous nous fions aux études scientifiques menées aux États-Unis et en Europe plutôt que de toujours essayer de faire ces études nous-mêmes, nous pourrions sensiblement accélérer le processus grâce auquel nous pourrions moderniser l'utilisation de produits chimiques biodégradables et cesser d'utiliser certains des produits désuets que nous utilisons actuellement.

Cela vous semble-t-il raisonnable? Seriez-vous d'accord avec cette déclaration? Quelqu'un pourrait-il commenter?

Mme Julia Langer: Je crois que vous êtes vraiment dans la bonne voie. En fait, en vertu de l'ALENA, le Canada est censé par exemple chercher à harmoniser ses lois. Il existe un processus à cette fin. Je sais que cela figure au programme de l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, mais ces travaux se font au niveau bureaucratique. Nous aimerions certes voir reprise dans nos lois la norme la plus élevée qui existe ailleurs.

C'est fort bien de dire qu'on préconise l'harmonisation et l'exécution de projets communs, mais inscrivons-le dans le projet de loi. L'idée d'accepter, d'homologuer et de conditionner d'autres produits à risque moins élevé, de manière à pouvoir abaisser de plus en plus la toxicité et le recours à ces produits, est de se débarrasser de certains des vieux produits chimiques, comme vous l'avez mentionné. Je crois qu'il s'agit-là d'une approche très sensée. Mettons-la par écrit.

M. Bob Mills: N'est-ce pas en partie, cependant, une question de protéger son territoire? Manifestement, si j'étais bureaucrate, c'est ce que je souhaiterais faire, non pas simplement importer la science d'ailleurs. Cela ne pose-t-il pas également un problème?

Mme Julia Langer: L'essentiel à retenir, c'est qu'il faut avoir nos propres normes de santé et de sécurité, mais cela ne signifie pas qu'il faut ignorer ce qui se fait ailleurs dans le monde, sur le plan de l'homologation comme du retrait de l'homologation.

J'ai ici une liste de quelque 60 produits chimiques qui sont interdits ailleurs, quelle qu'en soit la raison—protection de la nappe phréatique, produits cancérigènes, et ainsi de suite—, mais qui sont homologués au Canada. Allons de l'avant avec le processus et adoptons la loi qui nous permettra de le faire.

M. Bob Mills: Je vous remercie.

Le président: Monsieur Mills, merci. Vous avez mis en relief une question qui pourrait être posée demain à la Chambre des communes.

Monsieur Comartin.

M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Pour commencer, monsieur le président, car je sais que vous n'allez me laisser poser qu'une seule question, j'aurais simplement un commentaire à faire aux porte-parole de CropLife.

Il est intéressant de voir que, dans le résumé de vos recommandations, vous proposez la formation d'un groupe d'experts scientifiques, membres entre autres de la Société royale du Canada, auxquels on demanderait de faire l'examen des orientations. Je viens tout juste d'en prendre connaissance aujourd'hui, mais vous voudrez peut-être examiner l'énoncé du principe de précaution pour voir si vous l'adopteriez comme principe de législation, si jamais nous parvenons à faire agir l'actuel gouvernement, second point que je tiens à faire valoir.

Je tiens simplement à déclarer officiellement que notre parti est manifestement en faveur également de cette loi qui, avec un peu de chance, correspondra à ce qui est dans le rapport.

Ma question, qui s'adresse à Mme Shour, vise à donner suite peut-être à certains points qu'a fait valoir M. Mills au sujet des autres pesticides qui ont été homologués sur le marché de l'OCDE et aux États-Unis. Je crois savoir qu'il existe certains nouveaux produits qui pourraient en fait être acceptables aux producteurs biologiques. Ai-je raison sur ce point? Si c'est le cas, connaissez-vous ces produits? Combien d'entre eux pourraient être utilisés par le secteur de la production biologique?

• 1710

Mme Sheryl Shour: C'est davantage selon moi une question de perception du public. Dans mon secteur d'activité actuel, c'est un intrant de très faible importance; on n'a pas besoin de pesticides. Il est aussi facile d'arracher la mauvaise herbe que de l'arroser de Roundup. Le grand public toutefois tient à avoir un produit, à voir quelque chose en bouteille. Je crois qu'en ce sens, le fait d'avoir plus d'outils rendra l'action plus concrète à ses yeux.

Quand j'ai lancé cette entreprise, nul ne le faisait vraiment. On croyait que c'était vraiment marginal. Or, à mesure que de plus en plus de centres de jardinage, par exemple, vendent des biopesticides, des nématodes pour la lutte biologique, on reconnaît qu'il existe des solutions moins toxiques. Le gluten de maïs est un parfait exemple de produit qui a été bien mis à l'épreuve aux États-Unis en tant qu'herbicide de prélevée, mais il s'agit en fait d'un aliment, d'un sous-produit de la transformation du maïs. Si j'ai bien compris, il n'y a pas moyen d'accélérer l'homologation du produit ici. On s'en sert, mais on s'en sert en tant qu'engrais ou on contourne la difficulté. On ne peut pas en réalité le vendre en tant qu'herbicide de prélevée et, pourtant, il est efficace.

On ferait certes progresser l'industrie si l'on avait plus d'outils à sa disposition. Il faut pouvoir approuver en accéléré ces solutions plus saines. Certaines huiles essentielles donnent des résultats phénoménaux, mais nous ne pouvons pas nous en servir, nous ne pouvons pas les utiliser dans notre commerce.

Le président: Monsieur Comartin, je vous remercie.

Madame Redman, suivie de M. Lincoln, de M. Laliberte et de Mme Kraft Sloan.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Par souci de clarté, madame Wright, quand vous avez brandi le premier manuel et en parliez, était-ce sa teneur qui vous préoccupait ou le fait qu'on ne se conforme pas à ce qu'il dit?

Mme Jennifer Wright: Voilà une bonne question. Voici le programme de lutte antiparasitaire intégrée de Calgary qui est cité en exemple comme norme d'excellence pour l'industrie, les parcs et les services de loisirs. Beaucoup de parcs et de services de loisirs ont choisi de l'ignorer, mais j'ai entendu d'excellentes discussions à son sujet un peu partout au Canada. Le document n'est pas mauvais, mais il laisse beaucoup de place à l'interprétation par la personne qui est chargée, dans le cas présent, des parcs et des services récréatifs de la municipalité. Donc, si nous examinons nos espaces publics, les parcs et les espaces verts où jouent les enfants, les cours d'école et ainsi de suite...

La lutte antiparasitaire intégrée repose sur d'excellents principes, mais la raison pour laquelle nous décidons de ne pas l'appuyer, c'est qu'elle semble permettre à l'industrie—sans vouloir la critiquer—de vendre et de commercialiser beaucoup plus de produits qui peuvent être remplacés, comme nous venons de l'entendre, par des produits biologiques comme le gluten de maïs. Ainsi, notre ville n'épand pas de gluten de maïs où que ce soit, sauf dans un parc que les citoyens ont réussi à faire reconnaître comme zone libre de pesticide. La Ville de Calgary effectue actuellement des essais du gluten de maïs, pour reprendre cet exemple, parce qu'il vient d'être cité comme solution de rechange aux pesticides.

Ce que je dis est peut-être ambigu, mais je crois qu'il y a beaucoup de place à l'interprétation quant à ce qu'est la lutte antiparasitaire intégrée et je ne crois pas, si nous parlons de règlements municipaux et de mettre par écrit des choses qui ont des répercussions juridiques, que ce soit une bonne façon de procéder, en raison de l'interprétation qu'on peut faire du document.

Je répète que je trouve l'idée excellente. Elle est sensée quand on en parle ici, quand on s'entend pour dire que nous ne voulons pas utiliser les pesticides, que nous allons faire de notre mieux pour ne pas le faire mais que, si nous devons absolument le faire, par exemple pour enrayer une épidémie d'insectes quelconques, nous allons le faire. L'idée est alors fantastique. Essentiellement, c'est ce que cela a tendance à dire, mais il y a beaucoup trop de place à l'interprétation, et nous savons qu'à Calgary, on a utilisé des milliers de kilogrammes d'herbicides. La situation est presque identique dans le cas des insecticides, car on pourrait remplacer ces produits par ceux dont parle Mme Shour.

Je précise officiellement que le gluten du maïs gagne de plus en plus en popularité dans l'industrie d'entretien des gazons privés à Calgary. Comme il a été question d'entretien des gazons au moyen des produits biologiques ici, je tenais simplement à dire, aux fins du compte-rendu officiel, que nous sommes vraiment contents de la réaction des propriétaires de maison de Calgary qui confient de plus en plus à des entreprises utilisant des produits biologiques l'entretien de leur gazon. Elles s'en sortent fort bien.

• 1715

Je suis un peu frustrée quand j'entends les autres entreprises d'entretien des gazons promouvoir leurs produits comme étant inoffensifs—je l'entends souvent dire, comme vous tous, d'ailleurs, j'en suis sûre—alors qu'aux États-Unis, il est illégal d'affirmer qu'un pesticide est inoffensif. Je suis un peu frustrée quand on sait qu'il existe des solutions de remplacement plus sécuritaires et qu'elles sont efficaces. Comme il en a été question ici, ce sont des solutions très réalistes qui ne sont pas plus déraisonnables sur le plan économique que le recours actuel aux pesticides.

Mme Karen Redman: Au risque de profiter indûment de la bienveillance de la présidence, je tiens seulement à dire que mon propre gazon a effectivement été arrosé d'un produit qui, selon ce qu'on a dit à mon époux, était biodégradable, ce qui à son avis était acceptable. Je vois que Susan Koswan est présente dans la salle. Ils font de l'excellent travail avec l'aide de fonds d'Environnement Canada en vue de convaincre les propriétaires de maison de cesser d'utiliser les pesticides et d'adopter des méthodes plus biologiques et conviviales. Il se fait donc beaucoup de bonnes choses, et il est merveilleux de constater que vous faites circuler ce genre d'information d'un bout à l'autre du Canada.

Le président: Le président bienveillant cède la parole à M. Lincoln.

M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): J'aimerais adresser ma question à M. Hepworth, parce que j'estime que nous avons beaucoup de travail à faire si j'ai bien saisi la colère dans sa voix. Il semblait y avoir beaucoup de colère. Je tenais également à faire suite à ce qu'à dit M. Comartin, propos qui m'ont également frappé.

Vous avez souligné, dans votre rapport, que le principe de précaution allait beaucoup trop loin. Pourtant, il respecte le libellé adopté par de nombreux pays à Rio, en 1992, et jouit d'un appui très ferme de la Société royale du Canada, l'organisme que vous préconisez pour former un groupe d'experts scientifiques chargé d'examiner les pesticides. Vous avez aussi fait des observations au sujet des enfants vulnérables. Les personnes dont vous défendez les intérêts, c'est-à-dire CANTOX, trouvent que les chapitres traitant particulièrement de la vulnérabilité des enfants et d'autres groupes regorgent de généralisations et d'affirmations non fondées.

Je me demande comment vous arrivez à concilier ces déclarations avec, par exemple, le témoignage de l'Association canadienne des médecins pour l'environnement. Sommes-nous en train de dire que la Société royale, quand elle a donné son appui ferme au principe de précaution, que l'Association canadienne des médecins pour l'environnement, lorsqu'elle dit que les pesticides ont des effets terribles sur les populations vulnérables, sur les enfants et les femmes enceintes surtout, font complètement erreur? Mettons le comité de côté—vous affirmez qu'il est partial. Toutefois, comment conciliez-vous ce que vous dites avec les positions de groupes prestigieux comme la Société royale ou l'Association canadienne des médecins pour l'environnement?

Le président: Nous vous serions extrêmement reconnaissants de répondre brièvement, car la cloche a déjà commencé à sonner.

M. Lorne Hepworth: En ce qui concerne le principe ou l'approche de précaution, je dirais que nous appuyons l'approche adoptée par Santé Canada qui, je crois, la qualifierait d'approche de précaution. Le ministère utilise une évaluation de risques scientifique fondée sur des faits, ce que nous appuyons vivement. Je suppose que l'expression que nous utilisons est l'«approche de précaution», bien qu'on utilise aussi le «principe de précaution». Je vois plusieurs façons de définir l'expression. Je ne suis pas certain de comprendre sa signification, mais je ne crois pas qu'on nie que, dans son application aux enfants et à la protection des enfants, Santé Canada tient déjà compte actuellement, dans son approche de précaution, de facteurs comme la taille de l'enfant, son régime alimentaire, les activités qui pourraient entraîner une exposition accrue comme de placer la main dans la bouche, de ramper sur une surface qui pourrait être contaminée par les pesticides.

Je crois donc que ce processus d'évaluation du risque fondé sur des faits nous a bien servi jusqu'ici. Si de nouveaux faits scientifiques révèlent qu'il faudrait faire plus, nous serions d'accord.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

Monsieur Laliberte et madame Kraft Sloan, je m'excuse, mais comme la cloche sonne, il faut partir.

• 1720

Avant de vous remercier tous, j'annonce que vous êtes tous invités au cours de la prochaine heure à vous rendre dans la salle 200 où vous attend un buffet d'aliments biologiques.

Les collègues qui tiennent à s'y rendre—je suppose que c'est le souhait de tous—s'y retrouveront après le vote.

Au nom des membres et du personnel du comité, je vous remercie beaucoup d'être venus. Nous vous en sommes extrêmement reconnaissants.

[Français]

Merci beaucoup.

[Traduction]

La séance est levée.

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