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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 135 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 4 décembre 2018

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Français]

    Nous allons commencer la 135e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien. Aujourd'hui, nous continuons notre étude des modèles de rémunération pour les artistes et les créateurs.

[Traduction]

    Soyez tous les bienvenus.
    Nous accueillons aujourd’hui les témoins suivants: Ariel Katz, professeur de l’Université de Toronto, Matt Williams, représentant de la House of Anansi Press, et Monia Mazigh, auteure.
    Je vous remercie tous de votre présence. Nous allons commencer par entendre M. Katz.
    Je m’appelle Ariel Katz. J'enseigne le droit à l’Université de Toronto, où je suis titulaire de la Chaire d’innovation, commerce électronique. Je vous suis reconnaissant de l’occasion qui m’est donnée de comparaître devant vous aujourd’hui.
    Au cours de ma déclaration, j’aimerais mettre l’accent sur certaines des façons dont les droits d’auteur contribuent ou nuisent peut-être à la capacité des artistes et des créateurs à être rémunérés pour leurs oeuvres.
    La notion selon laquelle les droits d’auteur sont nécessaires pour permettre aux créateurs de bénéficier financièrement de leurs créations est enracinée profondément dans la pensée juridique actuelle et la façon dont les politiques sont élaborées depuis l’avènement des droits d’auteur, il y a quelque 310 ans de cela. Depuis l’adoption de la première loi sur le droit d’auteur, le Statute of Anne de 1709, presque toutes les réformes majeures des droits d’auteur sont fondées sur la notion et la promesse selon lesquelles les droits d’auteur apportent aux auteurs la garantie d'être rémunérés pour leurs oeuvres.
    Pendant 300 ans, l’intérêt des auteurs a été la bannière que les éditeurs et les producteurs ont brandie en demandant des pouvoirs sans cesse plus grands en vue de contrôler légalement les oeuvres de création. Des auteurs et des créateurs bien-aimés comparaissaient devant des législateurs, décrivaient leurs difficultés financières et appuyaient les demandes des éditeurs qui cherchaient à obtenir des droits supplémentaires et des outils plus robustes pour les faire respecter.
    Cette stratégie a été extrêmement fructueuse au cours des 300 dernières années. Elle s’est même accentuée pendant les dernières décennies. Il s’ensuit que les droits d’auteur ont été élargis dans presque toutes les directions. La question des droits d’auteur s’est élargie, de même que leurs conditions et leur portée géographique. Le nombre d’activités qui peuvent constituer des violations du droit d’auteur a augmenté, tout comme le nombre d’outils et de solutions d’application des droits d’auteur qui sont accessibles.
    Cependant, la grande majorité des artistes et des créateurs semblent tirer très peu de revenus de leurs créations. Par exemple, samedi dernier, l’animateur de la CBC, Michael Enright, a cité une récente enquête menée par la Writers' Union qui a révélé que l’écrivain canadien moyen touchait des recettes annuelles d’environ 9 000 $ seulement et que ces recettes diminuaient rapidement. On attribue encore une fois cet état de choses au manque de robustesse des droits d’auteur et, pour y remédier, on semble proposer de « redonner aux droits d’auteur leur grandeur ».
    Après s’être demandé pendant 300 ans si nous avions atteint notre objectif et avoir découvert que ce n’était pas le cas, il est peut-être temps de repenser à nos actions et de reconnaître que la faiblesse des droits d’auteur n’est pas nécessairement la source du problème et que leur renforcement ne réglera peut-être pas le problème. En fait, nous devrions même commencer à nous demander si l’élargissement permanent des droits d’auteur contribue au problème. C’est paradoxal, mais cela pourrait être le cas.
    Comprenez-moi bien: les droits d’auteur sont un outil juridique très efficace pour collecter des allocations découlant de l’utilisation d’oeuvres de création. Plus les droits d’auteur deviennent robustes, généraux et étendus, plus la capacité d’obtenir des loyers auprès des utilisateurs de ces oeuvres s’accroît. En effet, les droits d’auteur enrichissent certaines sociétés — ou leurs actionnaires ou leurs cadres supérieurs — et un nombre relativement faible d’artistes vedettes. C’est la raison pour laquelle ces intervenants font un lobbying aussi intensif en vue de protéger les droits d’auteur et de les rehausser, et c’est la raison pour laquelle ils sont capables d’exercer des pressions plus fortes que pratiquement tous les autres participants à ce processus législatif.
    Si nous n’avons pas pour objectif d’enrichir davantage les gens très riches, mais plutôt de faire en sorte que le créateur moyen soit rémunéré adéquatement, il serait peut-être temps de reconnaître que la stratégie visant à élargir les droits d’auteur a échoué spectaculairement.
    Je vous fais remarquer entre parenthèses que, d’un point de vue économique, il vaut mieux penser au créateur marginal qu'au créateur moyen. Cela ne veut pas dire que la personne est marginale ou que son oeuvre est sans importance; j’entends par là une personne pour laquelle un changement serait bénéfique. Si nous modifions nos politiques, comment la personne en marge que nous souhaitons toucher sera-t-elle touchée? Je qualifie donc la personne de marginale. Je tenais simplement à préciser cela.
    Si les droits d’auteur n’ont pas donné les résultats mentionnés dans leur objectif déclaré, pourquoi est-ce le cas? L’une des réponses possibles est que nous ne sommes pas encore arrivés à bon port, que les droits d’auteur ne sont pas encore suffisamment robustes. Nous devons sans cesse les renforcer et, tôt ou tard, nous atteindrons notre objectif. De façon abstraite ou théorique, cette réponse est plausible, mais, selon moi, il est peu probable que ce soit la bonne réponse.
    Songez, par exemple, aux récentes conclusions de l’enquête menée par la Writers' Union. Access Copyright et la Writers' Union citent ces chiffres ou des chiffres semblables pour étayer leurs demandes visant, par exemple, à empêcher les établissements d’enseignement de s’appuyer sur les dispositions en matière d’utilisation équitable, ainsi que leurs tentatives de rendre obligatoires pour ces établissements les tarifs approuvés par la Commission du droit d’auteur. Ils pourraient essentiellement imposer ces coûts aux établissements d’enseignement, même si la Cour suprême a jugé que les utilisateurs n’étaient pas tenus de payer les tarifs de ce genre.

  (1105)  

     Supposons que notre objectif consiste à permettre à des écrivains professionnels de tirer leur subsistance de leurs écrits. Selon Statistique Canada, le revenu médian des ménages s’élève à environ 70 000 $ par année. Il va de soi que le revenu de 9 000 $ révélé par l’enquête est beaucoup trop faible. Quelles mesures faudrait-il que nous prenions relativement aux droits d’auteur si nous souhaitions quadrupler cette somme de 9 000 $, afin qu’elle atteigne la moitié du revenu médian des ménages? Les écrivains pourraient alors tirer des droits d’auteur non pas le revenu médian, mais plutôt la moitié de ce revenu. Et pour ce faire, il faudrait que nous quadruplions le montant de 9 000 $.
    Supposons que nous soutenions la proposition d’Access Copyright, que l’utilisation équitable à des fins éducatives soit abolie et que des tarifs obligatoires soient imposés aux établissements d’enseignement, etc. Nous n’avons pas besoin de passer du temps à calculer exactement ces tarifs pour nous rendre compte que, si nous souhaitons que les droits d’auteur accroissent substantiellement les revenus de ces auteurs, il faudrait que nous imposions aux établissements d’enseignement ce qui constituerait effectivement une taxe sur l’éducation, une taxe qui les mènerait rapidement à la faillite. Si c’est notre objectif, si c’est l’outil que nous souhaitons utiliser…
    En outre, même si cette approche était viable, le recours au mécanisme des droits d’auteur n’accroîtrait pas seulement la rémunération des auteurs à faible revenu qui peuvent nous tenir à coeur, il accroîtrait simultanément de façon radicale la rémunération de ceux qui gagnent déjà beaucoup d’argent. Voilà comment fonctionnent les droits d’auteur. Vous n’en bénéficiez pas en fonction de votre revenu, vous en bénéficiez en fonction des oeuvres que vous possédez. Plus vous possédez d’oeuvres, plus vous gagnez d’argent et plus vous avez tendance à toucher des revenus supplémentaires.
    Voilà une vérité simple et dérangeante: l’utilisation des droits d’auteur pour améliorer les revenus des créateurs moyens ou marginaux enrichirait simultanément les intervenants déjà riches. Bien entendu, il faudrait que l’argent vienne de quelque part. Il faudrait que quelqu’un verse cet argent. Il pourrait être recueilli auprès des étudiants ou des contribuables, ou découler d’autres dépenses qui ne seraient plus engagées. Il faudrait qu’il provienne de fonds affectés à d’autres ressources. Cela fait ressortir le fait que l’utilisation des droits d’auteur pour améliorer les revenus des créateurs marginaux nécessiterait un transfert massif d’argent du public à des personnes déjà extrêmement riches, et que seulement une petite part de cet argent serait versée aux personnes qui peuvent nous tenir vraiment à coeur.
    Je tente de vous expliquer cela très brièvement. Je vous encourage vraiment à lire le chapitre 2 d’un nouveau livre publié par le professeur Glynn Lunney, intitulé Copyright's Excess. Il fait valoir cet argument et l’explique beaucoup mieux que moi.
    Je sais que M. Lunney serait aussi heureux de comparaître devant vous. Il est professeur de droit aux États-Unis, et il serait ravi de témoigner devant vous afin de discuter de son nouveau livre.
    Pourquoi les droits d’auteur sont-ils un tel échec pour la plupart des créateurs? Pourquoi la grande richesse qu’ils apportent à certains éditeurs, certains producteurs et certaines entreprises médiatiques ne retombe-t-elle pas sur les créateurs, même si ce sont les premiers propriétaires et les prétendus bénéficiaires des droits d’auteur?
    La réponse, c’est que, même si l’élargissement des droits d’auteur accroît la capacité des vendeurs de contenu de tirer des loyers du public, la part de ces loyers que reçoivent les auteurs ne dépend pas de la robustesse des droits d’auteur. Elle dépend plutôt de la structure concurrentielle de l’industrie et du pouvoir de négociation relatif des créateurs par rapport aux producteurs.
    J’ai presque terminé.
    Malheureusement, il y a des raisons inhérentes pour lesquelles la plupart des créateurs bénéficient très peu de leurs écrits et cela continuera probablement, en dépit de l'existence des droits d’auteur.
    Il est également possible que l’élargissement des droits d’auteur aggrave cette situation. Permettez-moi de vous expliquer très brièvement la raison pour laquelle c’est le cas. Espérons que nous aurons plus de temps pour en discuter plus tard.
    Même si les créateurs sont les premiers propriétaires des droits d’auteur, la plupart d’entre eux ne sont pas vraiment en mesure de commercialiser leurs oeuvres sur le marché. Ils ont besoin de conclure des contrats avec des producteurs ou d’autres types d’intermédiaires qui ont les connaissances, les capitaux et les aptitudes nécessaires pour tirer parti des économies d’échelle.

  (1110)  

    Ils sont donc forcés de conclure ces contrats qui déterminent principalement leur rémunération, une rémunération qui dépend de leur pouvoir de négociation relatif.
    Pour des raisons que les économistes ne comprennent pas entièrement, les industries créatives ont tendance à être très concentrées. En même temps, le marché des talents créateurs a tendance à être extrêmement concurrentiel.
    Au risque de me mettre à dos les députés du Parti conservateur et dans l’espoir de séduire les députés du NPD, permettez-moi d’emprunter à Karl Marx son concept d’armée de réserve de travailleurs.
    Nous disposons donc d’une armée de réserve d’ouvriers créateurs. L’offre de talents créateurs est abondante. Les créateurs aiment créer et s’empressent de le faire et, comme ils rivalisent entre eux sur le marché et que les intervenants avec lesquels ils doivent conclure des contrats sont beaucoup moins nombreux, leur rapport de force avec les grands producteurs est essentiellement inférieur. Les créateurs sont souvent forcés de céder leurs droits d’auteur aux producteurs ou d’accepter des conditions d’exploitation de la part des éditeurs.
    De plus, une asymétrie de l’information aggrave la situation.
    Je vois que je suis…
    Oui. Je vous ai déjà permis de dépasser légèrement le temps qui vous était imparti. Je vais donc vous demander de conclure votre exposé.
    Nous ne pouvons pas faire grand-chose pour gérer l’offre. Enfin, nous pourrions faire quelque chose, mais je ne vous conseillerais pas de procéder ainsi.
    Cependant, nous pourrions prendre certaines mesures pour réduire la concentration de producteurs. Je serais heureux de m’étendre un peu plus sur ce sujet. Nous pourrions également améliorer certains aspects du pouvoir de négociation des créateurs en élargissant ou en perfectionnant les modèles prévus par la Loi sur le statut de l’artiste, à l’échelle tant fédérale que québécoise.
    En outre, certaines organisations, comme la Authors Alliance, dont je suis un membre fondateur, affectent des ressources en vue de renseigner les créateurs sur leurs droits et de les aider à négocier de meilleures ententes.
    Je vais m’arrêter ici. C’est avec plaisir que je discuterai de n’importe laquelle de ces options.
    Merci. Je me réjouis à la perspective de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre le représentant de la House of Anansi Press. Je crois comprendre que Matt Williams et Monia Mazigh se partageront ce temps de parole.
    Bonjour à tous. Je vous remercie de nous avoir invités.
    Je m'appelle Matt Williams et je suis le vice-président de House of Anansi Press et Groundwood Books, à Toronto. Nous sommes une maison d'édition indépendante, et nous publions des livres pour les lecteurs de tous âges.
    Anansi a maintenant plus de 50 ans, ce qui est un âge vénérable pour une maison d'édition canadienne. Depuis nos débuts, nous sommes reconnus pour la publication des nouveaux auteurs canadiens et pour l'aide que nous leur offrons en vue d'établir, de bâtir et de maintenir leur carrière. Nous publions de la poésie, des nouvelles, des romans, du théâtre et des essais, et nous portons une attention particulière au travail des auteurs autochtones et francophones du Canada, dont nous publions les oeuvres traduites. Nous publions la romancière Monia Mazigh, qui est ici aujourd'hui. Comme vous l'avez dit, nous allons partager notre temps de parole.
    Chez Anansi et Groundwood, nous travaillons avec quelque 500 auteurs, illustrateurs et traducteurs. La rémunération des auteurs est au coeur de notre organisation et de nos activités.
    Notre modèle est le suivant: nous versons des avances de redevances aux auteurs pour financer leur travail, et nous versons des redevances courantes sur les ventes. Nous vendons le travail des auteurs dans divers marchés — les librairies, les bibliothèques, les écoles primaires et secondaires, et les établissements d'enseignement postsecondaire — et nous les exportons. Nous publions les livres selon divers formats: imprimé, audio et numérique. Sur chaque vente, nous versons une part des revenus aux auteurs sous la forme de redevances.
    Depuis les changements apportés à la Loi sur le droit d'auteur en 2012 et l'adoption des lignes directrices sur l'utilisation équitable par les éducateurs canadiens, nous avons constaté une baisse constante des revenus provenant des sources éducatives. De 2013 à aujourd'hui, la baisse des revenus a atteint près de 200 000 $, ce qui représente une baisse d'environ 100 000 $ des redevances versées aux auteurs. Au cours de la même période, nos revenus provenant de sources éducatives à l'extérieur du Canada se sont maintenus. Nous n'avons constaté aucune diminution des redevances versées aux auteurs dans ce domaine.
    Nous sommes entièrement numériques. Nous rédigeons et vendons des livres électroniques et des livres audio. Ce sont des produits numériques distincts, chacun associé à un prix de détail et à un marché défini, et nous versons des redevances à nos auteurs sur toutes ces ventes. Toutefois, la vente au format numérique dans les salles de classe du Canada ne vise pas nécessairement à vendre des produits distincts associés à un prix: nous vendons les parties d'un livre ou des oeuvres artistiques indépendantes. Nous autorisons le contenu.
    Avant, les établissements d'enseignement payaient pour pouvoir utiliser un poème, une nouvelle ou l'extrait d'un livre par l'entremise d'un système de licences collectives, qui représentait un modèle efficace pour la gestion du paiement pour l'utilisation, mais ce système a maintenant été remplacé en grande partie par les lignes directrices sur l'utilisation équitable des éducateurs, qui ont retiré l'obligation de paiement. Nos écrits sont toujours enseignés dans les classes du pays, mais les paiements ne sont plus au rendez-vous.
    Une bonne partie des documents remis aux étudiants, surtout dans les établissements postsecondaires, sont au format numérique... par exemple des extraits numérisés distribués dans l'ensemble du système de gestion de l'enseignement d'une université. Je tiens à souligner que cela nous convient tout à fait. Nous signons des contrats avec nos auteurs en vue d'une vaste publication de leurs oeuvres et d'atteindre le plus grand nombre de lecteurs possible. Les enseignements et les étudiants canadiens ont une grande valeur pour nous. Notre objectif est de voir notre contenu utilisé pendant de nombreuses années — voire des générations — dans les salles de classe.
    L'autre partie de notre entente avec les auteurs vise à leur verser des redevances et à les aider à gagner leur vie, et c'est là que les changements de 2012 nous nuisent. L'effondrement du modèle des licences collectives après 2012 a éliminé ce que nous appelons la « partie payante » provenant du marché canadien des licences éducatives. Nous n'avons plus de mécanisme par l'entremise duquel l'utilisation et la réutilisation des documents selon une forme conviviale pour la classe moderne — et je pense particulièrement à la forme numérique — génèrent des redevances pour les gens qui ont créé ces documents. Si nous convenons que le contenu canadien a une valeur, alors nous devrions soutenir un modèle qui permet non seulement aux utilisateurs, mais aussi aux créateurs de profiter de cette valeur.
    Nous avons fait trois recommandations au Comité dans notre mémoire. Pour des raisons de temps, je vais réitérer la première recommandation seulement: que le Comité travaille avec le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie en vue de clarifier les dispositions sur l'utilisation équitable afin de rétablir notre capacité de rendement sur l'utilisation continue de notre travail. Nous croyons qu'un retour vers un système de licences collectives nous permettrait d'atteindre cet objectif.
    Je vous remercie de m'avoir écouté.

  (1115)  

    Je vous remercie de m'avoir invitée à témoigner devant vous.
    Je m'appelle Monia Mazigh. Dans mon ancienne vie, j'étais professeure de finances; aujourd'hui, je suis une auteure canadienne. J'ai publié mon premier livre en 2008 et j'ai publié deux romans depuis. J'écris en français et je fais partie des quelques auteurs canadiens qui ont la chance d'être publiés en français et en anglais. Ma maison d'édition anglaise est House of Anansi et je suis très heureuse d'être publiée par des gens aussi dévoués. Leur confiance en moi et leur grand appui m'ont été essentiels en vue de bâtir et de perfectionner ma carrière d'auteure.
    Aujourd'hui, je suis auteure à temps plein. Je rédige des chroniques, des blogues et des livres. J'ai été invitée à plusieurs salons du livre partout au Québec et à bon nombre de festivals littéraires, en plus d'autres événements au Canada. J'ai aussi participé aux salons du livre de Genève, en Suisse, et de Paris, en France. L'été dernier, j'ai passé trois mois en résidence à la Historic Joy Kogawa House, où j'ai travaillé à mon troisième roman.
    Lorsque j'ai entrepris ma carrière d'auteure, j'ai gardé mon autre emploi, à temps partiel surtout, afin de pouvoir écrire tout en profitant d'une certaine sécurité financière en recevant un chèque de paie à la fin du mois. Toutefois, il y a trois ans, j'ai pris la décision radicale de consacrer tout mon temps à l'écriture. Cette décision avait un coût: la perte de mon revenu. En plus de cela, avec la baisse des redevances, le petit chèque de quelques centaines de dollars que je recevais est aujourd'hui quasi non existant.
    Je ne peux pas dire avec certitude que la baisse de mes revenus est directement liée aux changements de 2012 à la Loi sur le droit d'auteur et à l'adoption des lignes directrices sur l'utilisation équitable; je crois néanmoins que ce lien est fort probable.
    Aujourd'hui, si ce n'était de la subvention que je reçois du Conseil des arts — que mes amis auteurs appellent l'aide sociale des auteurs — et du chèque que je reçois en vertu du Programme du droit de prêt public, mes revenus d'auteur seraient un bruit blanc, comme on le décrivait dans les modèles financiers: tous les facteurs qui ne peuvent pas être prédits et qui sont en grande partie négligeables.
    C'est ma passion pour l'éducation qui m'a amenée à l'écriture. Je crois toujours que les livres, les poèmes et les romans sont des outils qui peuvent aider les étudiants à compléter et à améliorer leur éducation. Lorsque j'ai écrit mon premier roman, Miroirs et mirages, sur les femmes musulmanes du Canada, il comportait un volet éducatif imposant. J'ai correspondu avec des élèves de 12e année d'une école secondaire d'immersion française de Vancouver qui devaient lire mon roman et rédiger leur travail final en français à son sujet. C'est toute une réussite pour un auteur de voir son roman être lu et faire l'objet de discussions et de réflexions de la part d'étudiants. Ce serait encore mieux si, à la fin de l'année, cette réussite donnait lieu à des redevances supplémentaires versées par les établissements d'enseignement à ma maison d'édition, et donc à moi.
    Malheureusement, avec les modifications apportées à la loi, on nous refuse ces redevances. Notre travail de création est utilisé gratuitement. Dans l'intervalle, les auteurs canadiens voient les trous dans leurs revenus se faire de plus en plus grands, alors que la situation devrait être inverse.
    Les auteurs canadiens sont nos ambassadeurs à l'étranger. En 2017, je me suis jointe à une délégation d'auteurs canadiens en visite au Sénégal, en Afrique de l'Ouest. Nous sommes allés dans les écoles pour parler aux jeunes. Nous avons organisé des tables rondes avec des auteurs sénégalais. Nous leur avons parlé de notre travail de création, qui leur a permis de s'imaginer notre pays, notre peuple et la couleur de notre ciel. Mais comment pouvons-nous poursuivre ce travail de création si nous ne recevons pas notre dû par l'entremise des redevances?
    L'histoire est remplie d'auteurs classiques célèbres qui sont morts dans la pauvreté, méprisés et abandonnés par la société, mais qui plus tard ont été reconnus et adulés pour leur génie, leur créativité et leur mérite artistique. Pourquoi voulons-nous perpétuer ces tragédies humaines?
    La créativité est une valeur ajoutée à un pays. Elle fait partie de notre richesse commune. Il faut la chérir, la partager et la reconnaître. Le gouvernement du Canada devrait protéger les utilisateurs et les auteurs de cette créativité.

  (1120)  

    Je suis fortement en faveur d'un réexamen de la Loi sur le droit d'auteur de 2012 afin de permettre aux auteurs de recevoir des redevances sur les livres utilisés par les établissements d'enseignement canadiens.
    Merci.
    Merci.

[Français]

    Nous commençons maintenant la période de questions et de réponses.
    Madame Dhillon, vous avez sept minutes.

[Traduction]

    Merci. Je vais commencer avec Mme Mazigh.
    En tant qu'auteure d'ouvrages fictifs et non fictifs, pouvez-vous nous expliquer les principaux enjeux auxquels vous devez faire face?
    Pouvez-vous préciser votre question? De quelle différence parlez-vous?
    Oui, quel est le principal enjeu auquel doivent faire face les auteurs d'ouvrage fictifs et non fictifs?
    Parlez-vous des redevances?
    Oui.
    Comme vous l'avez dit, j'écris des ouvrages fictifs et non fictifs. À mon avis, cela dépend. Certaines personnes préfèrent lire des biographies; d'autres préfèrent lire des romans. Je crois que lorsque j'ai commencé à écrire des romans, cela m'a permis d'atteindre un autre lectorat; j'ai aussi participé à un plus grand nombre de festivals. Je crois que les ouvrages non fictifs se limitent parfois aux histoires personnelles.
    Donc, j'aurais dû recevoir plus de redevances avec les romans. Malheureusement, je ne crois pas que... avec ces changements, nos chèques sont très petits et nos avantages diminuent.

  (1125)  

    Parfait.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Williams.
    D'autres témoins nous ont dit que les éditeurs canadiens prenaient moins de risque avec les publications. Est-ce qu'Anansi Press a fait face à un défi semblable?
    Je dirais que nos défis ne sont pas aussi importants que ceux auxquels font face les éditeurs d'ouvrages pédagogiques qui ont témoigné devant vous. Nous sommes une maison d'édition générale. Nous sommes présents dans divers marchés. Nous n'occupons pas une place importante sur le marché éducatif. Notre exposition sur le plan financier n'est pas aussi importante que celle des éditeurs de livres éducatifs spécialisés.
    Je ne veux pas dire que nous ne ressentons pas les effets de ces changements: ils touchent la presque totalité des auteurs que nous publions. Comme nous ne publions pas de manuels spécialisés, nous n'accusons pas de grandes pertes.
    Je peux dire que les auteurs dont les ouvrages sont utilisés dans les écoles ressentent les effets de ces changements, puisqu'ils ont moins de revenus par l'entremise d'Access Copyright ou par l'entremise des permissions directes que nous accordions aux éducateurs et au système lorsqu'une école nous demandait de reproduire nos ouvrages. Ces revenus ont chuté.
    D'accord.
    Ma prochaine question s'adresse à vous trois. Nous pouvons commencer avec M. Katz.
    Du point de vue des artistes et des créateurs, quels changements recommandez-vous pour améliorer les modèles de rémunération? Avez-vous en tête certaines administrations qui réussissent à aider les artistes à être bien rémunérés?
    Commençons avec vous.
    Comme je l'ai dit, je crois que nous devons faire attention lorsque nous disons que le droit d'auteur est la solution pour assurer la rémunération adéquate des artistes. Nous l'avons essayé pendant 300 ans. Nous essayons encore et encore, mais nous n'y arrivons toujours pas. Lorsqu'on y pense sur le plan systémique, il y a peut-être des raisons qui expliquent pourquoi nous n'y arrivons pas et pourquoi le droit d'auteur empire la situation des créateurs tandis qu'il profite à d'autres intervenants de l'industrie.
    Il n'y a pas de solution miracle. On peut tenir compte de certains facteurs. Lorsque l'industrie est plus compétitive et que les éditeurs doivent se livrer concurrence pour attirer les auteurs, ils ont tendance à les payer plus, ce qui profite aux créateurs. Lorsque l'industrie de l'édition ou de la production est moins compétitive, les éditeurs et producteurs ont plus de pouvoir face aux auteurs. Nous avons constaté une importante augmentation de la concentration dans bon nombre d'industries de la création. C'est une chose que nous pourrions faire.
    L'économiste Joel Waldfogel, du Minnesota, vient de publier un excellent livre. Il décrit notre époque comme étant l'âge d'or de la créativité. La production est beaucoup plus importante qu'avant, dans tous les domaines de la création. Les oeuvres sont plus nombreuses et de meilleure qualité. À son avis, c'est parce que la numérisation a réduit le coût de la création dans bon nombre de domaines. Elle a ouvert de nouveaux marchés et créé plus de possibilités de distribution et d'exploitation des oeuvres, ce qui a donné lieu à un nombre accru d'intrants dans le marché. La concurrence est plus féroce, ce qui a une incidence sur les producteurs de contenu établis, les grandes entreprises médiatiques. La concurrence ne favorise pas ces entreprises, mais favorise grandement les auteurs, les rédacteurs et les scénaristes, parce qu'ils ont plus de possibilités contractuelles qu'avant.
    Nous voyons beaucoup de lobbying contre cette tendance de la part des entreprises de télécommunications et d'autres, parce qu'elles veulent garder leur mainmise sur le marché, mais cela n'aide pas nécessairement les créateurs... c'est plutôt le contraire.

  (1130)  

    Monsieur Williams, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Je crois que le modèle des licences collectives pour la rémunération des artistes est très bon. Il représente une manière efficace d'offrir au marché éducatif des ouvrages pratiques, qui seront utilisés à maintes reprises. Le principe du paiement à l'utilisation profite aux artistes et aux éditeurs par l'entremise du modèle des licences collectives.
    Vous avez parlé des autres administrations. Je sais que l'Australie et le Royaume-Uni ont des systèmes de licences collectives associés à des exceptions plus restreintes relatives à l'utilisation à des fins éducatives, et je ne suis pas ici pour dire qu'il ne devrait y avoir aucune exception à cette fin; je crois qu'il en faut. Je crois que selon la situation actuelle, les exceptions ne sont pas assez claires et que nous ne profitons pas de l'utilisation répandue des ouvrages.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Shields.
    Merci, madame la présidente. Je vais partager mon temps de parole avec M. Blaney.
    Monsieur Williams, avant 2012, aviez-vous un lien avec le collectif CANCOPY dans le domaine de l'éducation? Avez-vous travaillé avec lui?
    CANCOPY est l'ancien nom d'Access Copyright.
    C'est exact. Vous avez travaillé avec ce collectif avant 2012.
    Oui, c'est exact. Notre entreprise avait une licence avec le collectif.
    Oui.
    Vous avez dit que les auteurs communiquaient directement avec vous. Est-ce que c'est arrivé depuis?
    Les contacts directs dont je parlais étaient habituellement avec les enseignants. Si l'école voulait utiliser les ouvrages d'une façon qui n'était pas visée par sa licence avec le collectif, notamment pour utiliser plus qu'un certain pourcentage du livre, elle pouvait nous le demander, puisque nous en détenions les droits. Nous accordions une permission, une licence transactionnelle.
    D'accord. Merci.
    Monsieur Katz, vous avez commencé par expliquer les raisons pour lesquelles le système ne fonctionnait pas. Vous avez dit qu'il pourrait peut-être fonctionner, mais que nous n'avions pas encore réussi. J'aimerais savoir ce qui pourrait fonctionner, selon vous.
    Je suis très sceptique en ce qui trait à l'utilisation du droit d'auteur et encore plus sceptique au sujet des licences collectives. Je pourrais vous en parler pendant des heures.
    Nous n'avons pas suffisamment de temps. Passons au prochain point.
    Le public profite grandement de la créativité. Une certaine partie de cette créativité passe par le marché; les entreprises jouent un certain rôle à cet égard. C'est bien; nous avons déjà cela.
    Au Canada, nous avons de nombreuses possibilités de financement du gouvernement fédéral et des provinces et nous pourrions en avoir plus. Nous pourrions faire preuve d'un plus grand leadership et accroître le financement offert par l'entremise du prêt public. Ce sont toutes des décisions, et l'argent ne vient pas... Si nous améliorons une chose, c'est toujours aux dépens d'une autre, alors ce sont des décisions que devra prendre le Parlement de façon collective.
    Donc, vous songez à une approche incitative plutôt qu'à une approche réglementaire.
    Je pense au recours à des mesures incitatives, à des subventions ou à des mesures indirectes... Si, par exemple, on accroît les possibilités d'enseignement ou autres, alors on peut accroître l'emploi des créateurs de manière à compléter leur travail de création.

  (1135)  

    D'accord. Merci.
    La parole est maintenant à M. Yurdiga.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de leur présence.
    Ma première question s'adresse à M. Katz.
    De nombreux témoins ont tenté d'expliquer la cause du déclin de la rémunération des créateurs. On nous a dit que les plateformes numériques étaient un problème, puisqu'elles donnaient lieu à une concurrence accrue. Certains ont dit que la Loi sur le droit d'auteur ne protégeait pas efficacement les artistes. Nous avons entendu parler de piratage et de la concurrence mondiale. Nous avons aussi entendu dire que les créateurs signaient de très mauvais contrats et ne se protégeaient pas bien.
    À votre avis, quel est le catalyseur du déclin de la rémunération des créateurs?
    Hier, j'ai témoigné devant le Comité de l'industrie et c'était l'objet de mon témoignage.
    Je crains que beaucoup de fausses informations aient circulé et j'aimerais beaucoup passer plus de temps avec Matt et Monia, peut-être plus tard, parce que je crois — sans vouloir être condescendant — qu'ils sont victimes de mésinformation.
    En ce qui a trait à l'éducation supérieure, la réalité est que les universités n'utilisent que très peu d'oeuvres littéraires canadiennes dans leurs programmes. En fait, j'ai apporté ce livre publié par Anansi et écrit par Nick Mount, un professeur d'anglais et un historien de la littérature canadienne à l'Université de Toronto. Il souligne que dans la plupart des facultés d'anglais de la plupart des universités, vous pouvez obtenir un baccalauréat sans avoir lu un seul auteur canadien.
    En gros, les universités canadiennes n'enseignent pas la littérature canadienne. Des Canadiens enseignent peut-être dans les facultés d'anglais, et Nick Mount est professeur... mon fils suit son cours. Il donne une liste de livres et les étudiants les achètent. Ce sont 400 étudiants par année qui s'inscrivent à son cours; les auteurs des livres recommandés vendent donc 400 copies. M. Mount m'a dit que l'un de ces auteurs lui avait dit que son cours avait permis une réédition de son livre.
    En fait, les professeurs adorent cela. Lorsque le contenu est offert, nous ne voyons aucun problème à demander aux étudiants de l'acheter, s'il n'est pas trop cher. La raison pour laquelle les professeurs préparent leurs propres trousses et créent leur propre méthode d'enseignement, c'est que nous ne sommes pas payés pour le faire. C'est un travail difficile et nous ne sommes pas payés directement pour le faire. Si nous avions accès à des documents pédagogiques de qualité, nous les utiliserions volontiers. L'une des raisons pour lesquelles les grands éditeurs d'ouvrages pédagogiques font autant d'argent est que ce ne sont pas les professeurs qui les recommandent qui doivent les payer. C'est pourquoi le prix des manuels a augmenté de manière importante au cours des 40 dernières années. Nous sommes paresseux. Si le livre existe déjà, nous allons le recommander.
    La deuxième fausse information, à mon avis, a trait à la façon dont Access Copyright distribuait son argent. Je crois qu'une grande partie des fonds que ne reçoivent plus Matt et Monia n'a pas trait à l'utilisation de leurs oeuvres, mais bien au fait qu'Access Copyright perçoit toutes les sommes, sans tout avoir dans son répertoire. Il recueille toutes les sommes et les distribue aux détenteurs des droits, mais il garde une partie de l'argent qu'il distribue parmi ses membres. Il y a divers noms associés à cela... le système de remboursement pour l'auteur, le répertoire et une partie pour l'éditeur. C'est le montant d'argent qu'Access Copyright versait à ses membres, mais selon la définition, ces fonds ne visent pas l'utilisation des oeuvres de ces membres, mais bien l'utilisation des oeuvres d'autres titulaires de droits d'auteur, qui ne sont pas membres d'Access Copyright.
    Je crois que c'est en grande partie ce qui se passe aujourd'hui.

[Français]

    Nous passons maintenant à M. Nantel pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à tous d'être ici ce matin.
    Je commencerai par vous, monsieur Katz. Vos interventions sont souvent assez provocantes. Je regarde notamment votre dernier gazouillis, en date du 17 octobre:

[Traduction]

La liberté, comme la liberté d'expression ou la liberté de changer les choses, est la base. Le droit d'auteur, qui restreint cette liberté, est l'exception; il devrait être justifié et ne pas dépasser la limite nécessaire à l'atteinte de son objectif.
    Pourriez-vous nous expliquer ce que vous voulez dire?

  (1140)  

    Oui. Vous faites référence à mon gazouillis.
    La base de notre société démocratique est la liberté; c'est un principe de notre société libérale. Les gens sont libres de faire ce qu'ils veulent, à moins qu'une loi valide les empêche de le faire. Certaines libertés sont aussi inscrites dans la Constitution, comme la liberté d'expression. Le droit d'auteur restreint la liberté d'expression.
    Que voulez-vous dire?
    Je vais vous l'expliquer. Lorsque nous donnons à quelqu'un un droit exclusif à l'égard d'une oeuvre, cela veut dire que nous empêchons d'autres personnes de faire certaines choses avec cette oeuvre. Si Matt est le titulaire du droit d'auteur à l'égard d'une oeuvre et que je souhaite m'en inspirer, le droit d'auteur limite ma capacité d'utiliser l'oeuvre de Matt dans ma propre création.
    La définition de la Cour suprême du Canada de ce qui constitue la liberté d'expression inclut non seulement la liberté de s'exprimer soi-même, mais aussi la liberté de recevoir ce qui a été créé par d'autres et d'y avoir accès. Je répète qu'en accordant des droits exclusifs et en restreignant l'offre le droit d'auteur, par définition et à dessein, limite notre capacité de recevoir l'information et d'y avoir accès.
    Cela ne signifie pas que ce n'est pas une bonne idée ou que c'est anticonstitutionnel — c'est seulement la première étape de notre analyse constitutionnelle —, mais cela signifie qu'il faut que ce soit justifié. C'est correct d'imposer certaines restrictions si nous avons des raisons valides de le faire et si nous le faisons de manière proportionnelle pour éviter de restreindre cela plus que nécessaire, par exemple.
    Nous pourrions avoir un droit d'auteur qui est totalement conforme à notre liberté d'expression et qui limite à certains égards notre capacité de nous exprimer et notre capacité d'avoir accès aux moyens d'expression des autres. Néanmoins, si nous le faisons à des fins légitimes et de manière proportionnelle pour éviter de restreindre cela plus que nécessaire, c'est absolument correct. Nous avons une panoplie de restrictions qui sont...
    Voilà pourquoi vous avez l'impression que l'exception relative à l'utilisation équitable aux fins d'éducation devrait être maintenue, que son utilisation devrait être aussi vaste qu'actuellement et que nous devrions peut-être demander à l'État ou

[Français]

aux Canadiens de compenser la perte de revenus qui en découle par un soutien aux créateurs, plutôt que d'augmenter les frais dans les matières de base en enseignement.

[Traduction]

    Vous allez devoir répéter la dernière...
    Certainement. Je ne suis pas constant avec mon anglais et mon français.

[Français]

    C'est ce qui vous permet de dire que, selon vous, l'exception applicable au secteur de l'éducation doit être maintenue et qu'il faut demander à l'État ou aux citoyens d'offrir une compensation aux pauvres petits créateurs qui se font enlever le pain de la bouche par les universités.

[Traduction]

    Je ne suis pas d'accord pour dire que les créateurs se font voler par les universités. Le droit d'auteur a toujours été un droit limité; cela ne vous donne pas le droit absolu de contrôler chaque aspect de chaque utilisation d'une oeuvre. Le droit d'auteur a toujours été un droit limité qui accorde aux titulaires certains droits limités. Il définit aussi les droits des utilisateurs.
    Une solide exception relative à l'utilisation équitable fait partie de ces garanties. Si vous voulez vous assurer que le droit d'auteur est valide sur le plan constitutionnel, c'est-à-dire que c'est une restriction valide de la liberté d'expression, votre loi doit inclure une solide exception relative à l'utilisation équitable.

  (1145)  

    Merci.

[Français]

    Monsieur Williams et madame Mazigh, vous avez dit avoir eu la chance de faire la promotion de vos romans et de vos nouvelles dans plusieurs salons. Selon votre expérience respective d'éditeur et d'auteure, avez-vous le sentiment que le droit d'auteur est plus contemporain, plus moderne et plus actualisé dans d'autres pays? Par exemple, avez-vous reçu de meilleurs paiements pour l'utilisation ou la vente de vos oeuvres dans d'autres pays que le Canada?
    Voulez-vous que je réponde?
    Bien sûr, puisque vous y étiez.
    Tout d'abord, je ne peux pas répondre de façon complète, parce que je ne reçois pas de redevances d'autres pays. Le seul pays duquel j'en reçois est le Canada. Même si mes livres sont vendus ailleurs, cela se fait toujours par l'entremise de mon éditeur. C'est lui qui va percevoir les redevances et ensuite me les donner.
    Il est question ici de quantités négligeables, cependant: chaque fois que nous allons dans un salon, nous ne vendons que quelques dizaines d'exemplaires, ce qui signifie donc un montant très minime en redevances.
    J'aimerais répondre un peu à ce que M. Katz disait tout à l'heure. Je ne suis pas d'accord avec lui sur ses idées. Je suis une petite auteure; je n'appartiens pas au milieu des éditeurs comme Anansi. Je ne veux donc pas parler en leur nom. M. Williams pourrait certainement vous en parler mieux que moi. Il demeure qu'Anansi est une maison d'édition indépendante, et non une multinationale qui gagne des milliards de dollars ou qui représente des auteurs qui vendent des millions de livres.
    Je tiens à répéter que je suis d'accord qu'il faut que le gouvernement canadien réexamine le financement sous forme de subventions. Cependant, il faudrait aussi réexaminer la Loi sur le droit d'auteur. Le monde change. Il existe de nombreux auteurs. Que leurs livres soient peu connus ou encore qu'ils soient réputés et enseignés dans les universités, on leur a pratiquement confisqué leur droit d'auteur. Comment bonifier et protéger le droit d'auteur, là est la question principale, selon moi.

[Traduction]

    Monsieur Hogg, vous êtes le prochain. Vous avez sept minutes.
    Monsieur Williams, vous avez parlé de la perte de la « partie payante », et je présume que cela se rapporte aux créateurs et aux changements qui ont eu lieu.
    Pouvez-vous nous expliquer les autres éléments qui ont mené à la perte de la « partie payante » et l'incidence immédiate qu'elle a pratiquement eue?
    Avec plaisir.
    Je fais allusion par cela à un mécanisme où certains paient un montant pour utiliser des oeuvres, pour le dire ainsi, et nous pouvons en tirer des redevances.
    Pour m'assurer de bien comprendre votre question, cherchez-vous à connaître les événements qui ont peut-être mené à ce changement?
    Oui.
    Je crois que nos revenus ont diminué parce que les éducateurs ont choisi d'arrêter de payer.
    Pour revenir au point qu'a fait valoir plus tôt M. Katz, personne ne nous a informés que les gens arrêteraient d'utiliser nos oeuvres. Nous avions des rapports très détaillés d'Access Copyright concernant l'utilisation en classe de certaines histoires, de certains poèmes ou de certaines parties d'oeuvres que nous gérons. La différence, c'était que les paiements ont tout simplement arrêté après que les éducateurs ont élaboré leurs lignes directrices sur l'utilisation équitable. C'est à ce moment que tout a débuté et que nos revenus ont commencé à diminuer.
    Ai-je répondu à votre question?
    Je crois bien.
    À cette époque, la rémunération des éditeurs et des artistes était-elle assez équitable avant tout cela?

  (1150)  

    Je crois bien.
    Nous ne sommes pas titulaires du droit d'auteur des oeuvres; nous avons des ententes avec les auteurs qui en sont les titulaires. C'est notre travail de prendre des mesures pour gagner de l'argent grâce à ce droit d'auteur. Nous agissons au nom de certains auteurs, et nous en sommes toujours conscients. Pour nous, la question des revenus vise à assurer la poursuite de nos activités et à continuer de faire parvenir des chèques aux auteurs.
    Pour répondre à votre question, je crois que c'était équitable. Je crois que nous étions rémunérés pour l'utilisation qui en était faite.
    Les principes ou les valeurs que nous essayons de refléter sont ce qui me pose un problème. Qu'est-ce que l'équité en ce qui concerne les divers secteurs qui jouent un rôle dans tout cela, notamment les artistes et les éditeurs? J'essaie de comprendre ce que cela représente et si c'était équitable à l'époque et si c'était satisfaisant. Avant la perte de la « partie payante » et les changements qui en ont découlé, à quoi cela ressemblait-il?
    Je ne sais pas si l'un d'entre vous connaît la réponse. Ma question ne s'adresse à personne en particulier.
    Je souligne brièvement que les revenus provenant des marchés de l'éducation représentaient une petite part du gâteau. Nous sommes actifs dans divers marchés. C'était un élément important pour nous pour assurer la continuité de nos activités. La perte de ces revenus ne sonnera pas le glas de notre entreprise — cela ne nous touche pas de manière considérable —, mais c'était un élément important de nos activités. Cet argent faisait partie de notre...
    Cette situation a eu une incidence sur les artistes et les fournisseurs.
    Très certainement. Cela affaiblit...
    Nos discussions portent sur les modèles de rémunération pour les artistes et les créateurs. C'est le sujet de notre étude.
    Comment pouvons-nous revenir aux principes qui correspondaient...? Je présume que vous affirmez que cela en était un élément assez utile. Dans les autres pays, dont nous pouvons tirer des leçons, quelle est la situation?
    Monsieur Katz, je trouve intéressant votre désaccord concernant les licences collectives. J'aimerais vous entendre un peu plus à ce sujet. Vous pourriez répondre tout d'abord à la première question, puis nous pourrons parler de votre désaccord concernant les licences collectives.
    Il semble y avoir une impression généralisée que depuis 2012 les institutions d'enseignement ont arrêté de payer pour le contenu. C'est on ne peut plus faux. Les institutions d'enseignement paient pour le contenu. Elles n'ont pas réduit ce qu'elles dépensent pour acheter du contenu sous licence. C'est tout le contraire. C'est en hausse.
    Dans l'ensemble, ce que les institutions ont arrêté de payer, ce sont les licences par l'entremise d'Access Copyright, ce qui représente une fraction de leurs dépenses. La majorité des institutions ne paient plus pour ces licences. De manière générale, le montant que les institutions d'enseignement affectent à cette fin a augmenté. Toutefois, ce que les institutions font plus qu'avant, c'est de négocier directement avec les éditeurs et les autres intermédiaires du marché.
    Si les institutions affectent plus d'argent à cette fin, comment cet argent est-il distribué? Cette distribution est-elle équitable et conforme à ce qui prévalait auparavant?
    Cette industrie a de nombreux problèmes, comme la concurrence et probablement bon nombre d'autres enjeux, mais ce qui détermine le montant à payer...
    Lorsque l'Université de Toronto conclut un contrat de licence avec Oxford University Press ou Elsevier, elle débourse beaucoup d'argent pour obtenir ces licences. Cela lui coûte plus de 3 millions de dollars par année, si ma mémoire est bonne.
    Il y a différents prix et différents éditeurs, selon leur pouvoir de marché et d'autres facteurs.
    Au fil du temps, la majorité des éditeurs, en particulier avec la transition vers le numérique, comprennent qu'ils peuvent faire plus d'argent en traitant directement avec les utilisateurs qu'en passant par les licences collectives. Ils peuvent le faire plus efficacement et ils peuvent imposer des prix qui leur sont plus profitables. Nous sommes heureux de le faire. Nous obtenons du contenu et nous en obtenons les droits d'utilisation.
    Monia, aimeriez-vous ajouter quelque chose ou avez-vous un commentaire au sujet de la distribution?
    Je constate que les exemples donnés par M. Katz ont davantage trait aux universités et aux étudiants et aux manuels universitaires.
    L'expérience que j'ai est celle d'une auteure de livres. Certains de mes livres sont utilisés dans des universités. Cela ne se passe pas seulement ailleurs ou aux États-Unis. Premièrement, cela vise tout simplement à faire reconnaître notre travail au Canada. Nos droits d'auteur devraient être reconnus, et des redevances devraient être versées à nos éditeurs et nous revenir.
    Je crois que nous sommes étiquetés comme des victimes ici. Nous ne le sommes pas; nous sommes des créateurs. Bon nombre de mes collègues sont tout à fait conscients de ce qu'ils publient et du travail de promotion qui est fait.
    À mon avis, l'enjeu est de trouver un modèle équitable. Je ne dis pas que le droit d'auteur est la meilleure solution, mais c'est un modèle qui nous a permis jusqu'à maintenant de recevoir des redevances, et c'est déjà quelque chose qui disparaît déjà dans ce nouveau genre d'économie.

  (1155)  

    J'imagine que nous essayons de déterminer la forme que devrait prendre cette équité et les principes qui la sous-tendent, ainsi que les politiques et les mesures législatives qui permettront sa réalisation.
    Je crois que c'est l'utilisateur qui devrait payer.
    Ce sera sur cette note que prendront fin nos discussions parce que nous devons suspendre brièvement nos travaux pour passer au prochain groupe de témoins.
    Je souhaite remercier tous les gens qui sont venus témoigner aujourd'hui. C'était très utile, et nous avons eu des échanges intéressants.
    Nous suspendons nos travaux quelques minutes.

  (1155)  


  (1200)  

[Français]

    Nous allons poursuivre la séance.
    Je suis très contente que M. Pablo Rodriguez, ministre du Patrimoine canadien et du Multiculturalisme, soit parmi nous aujourd'hui. Il est accompagné de deux représentants du ministère: M. Jean-Stéphen Piché, sous-ministre adjoint, et M. Andrew Francis, dirigeant principal des finances.

[Traduction]

    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, en ce qui concerne le Budget supplémentaire des dépenses (A) 2018-2019, nous avons le crédit 1a sous la rubrique Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, les crédits 1a et 5a sous la rubrique Ministère du Patrimoine canadien, le crédit 1a sous la rubrique Office national du film et le crédit 1a sous la rubrique Téléfilm Canada, qui lui a été renvoyé le mercredi 24 octobre 2018.

[Français]

    Monsieur le ministre, vous pouvez commencer.
    Madame la présidente et distingués membres du Comité, je vous remercie de cette invitation.
    M'accompagnent aujourd'hui M. Jean-Stéphen Piché, sous-ministre adjoint,

[Traduction]

    et Andrew Francis, dirigeant principal des finances.
    C'est un réel privilège d'être ministre du Patrimoine canadien et du Multiculturalisme. Depuis ma nomination, j'ai rencontré un grand nombre de Canadiens engagés, d'entrepreneurs créatifs, d'artistes et de leaders dynamiques. Leur passion et leur énergie sont une grande source d'inspiration pour moi.
    J'aimerais commencer par souligner les progrès que nous avons accomplis ces derniers mois.

[Français]

    En tant que ministre, mon mandat est clair: renforcer et promouvoir nos industries culturelles et créatives, célébrer la diversité du Canada et favoriser l'inclusion.
    Mon ministère travaille très fort pour que notre vision d'un Canada créatif devienne réalité. Nous investissons dans le talent de nos créateurs, y compris celui des peuples autochtones et des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Nous renforçons également le réseau de radiodiffusion publique, c'est-à-dire CBC/Radio-Canada.
    De plus, comme vous le savez, nous avons commencé à examiner, en juin dernier, la Loi sur la radiodiffusion et la Loi sur les télécommunications. Il est absolument nécessaire de moderniser ces lois afin que le système fonctionne pour tout le monde, et je dis bien pour tout le monde: les artistes, les entreprises, les consommateurs et les diffuseurs.
    Mon collègue le ministre de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique et moi-même examinons actuellement la Loi sur le droit d'auteur. Il y a énormément de travail qui se fait ici là-dessus. Votre comité étudie les modèles de rémunération pour les artistes et les industries créatives.
    L'objectif de tout cela est triple: soutenir le contenu culturel canadien, rémunérer nos artistes de manière juste et en temps opportun, et garantir aux Canadiens un meilleur accès à du contenu créatif.
    Cela m'amène à l'objet de la rencontre d'aujourd'hui, à savoir le Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2018-2019 ainsi que les dépenses de Patrimoine canadien et de cinq organismes du portefeuille.

  (1205)  

[Traduction]

    Commençons par les dépenses du ministère.
    Comme vous le savez, Patrimoine canadien demande 32,4 millions de dollars supplémentaires. Cette somme comprend 25,5 millions de dollars en subventions et en contributions et 6,9 millions de dollars en fonctionnement. Cela ferait au total 1,4 milliard de dollars en autorisations pour le ministère. Ces fonds nous permettront de continuer nos travaux dans plusieurs domaines. Nous pourrons, entre autres, renforcer les langues officielles, soutenir le contenu canadien et le journalisme local, promouvoir le multiculturalisme de même que maintenir l'administration de la paye.
    Nous progressons aussi dans la réalisation de Canada créatif, une vision ancrée dans notre diversité et axée sur le talent de nos créateurs. C'est une vision qui prend en compte l'importante contribution du secteur créatif à la croissance économique et à la prospérité de notre pays. Nous investissons dans nos artistes et dans leurs créations. Nous investissons dans les espaces culturels et les pôles de créativité pour contribuer à l'épanouissement de la nouvelle génération d'artistes et d'innovateurs. Nous favorisons la découverte et la distribution du contenu canadien ici et à l'étranger. Nous nous efforçons aussi de donner plus de place dans le monde numérique à des histoires qui reflètent la diversité des voix et des cultures au Canada.
    Dans cette optique, nous avons lancé en début d'année la Stratégie d'exportation créative du Canada.

[Français]

    Comme vous l'avez sûrement vu, nous allons investir 125 millions de dollars sur cinq ans pour aider nos créateurs à toucher un public beaucoup plus large et à accéder à de nouveaux créneaux commerciaux et à de nouveaux marchés. De ce montant, 17,2 millions de dollars sont prévus dans le Budget supplémentaire des dépenses (A).
    De plus, nous avons annoncé des mesures à l'appui du journalisme local, dont 50 millions de dollars dans le budget de 2018 pour aider nos journaux à passer au numérique et pour donner aux communautés peu desservies un accès aux actualités locales. Il y a plusieurs communautés qui n'ont plus accès à de l'information locale.
    On se rappellera aussi que l'énoncé économique présenté le 21 novembre dernier comprend plusieurs nouvelles mesures à l'appui du journalisme, notamment celles visant à encourager des modèles d'affaires sans but lucratif et à offrir des crédits d'impôt pour renforcer les médias canadiens.
    Nous avons réussi à maintenir l'exemption culturelle dans le nouvel Accord Canada—États-Unis—Mexique. Cette clause est neutre vis-à-vis des technologies et porte sur tous les segments de nos industries culturelles. C'est un gain important et extrêmement positif pour le Canada et ses créateurs.

[Traduction]

    Je suis également fier des progrès réalisés par mon ministère à l'égard de la réconciliation. Dans le budget de 2017, nous avons alloué 89,9 millions de dollars sur trois ans aux langues et aux cultures autochtones et nous avons renforcé notre appui à l'Initiative des langues autochtones. Par ailleurs, nous déposerons très bientôt le projet de loi sur les langues autochtones afin de préserver, de protéger et de revitaliser les langues des Premières Nations, des Inuits et des Métis. C'est très important de souligner cette mesure législative. Ce projet de loi, élaboré avec nos partenaires, reflète le dialogue approfondi entretenu avec des gardiens du savoir, des linguistes et des locuteurs.
    Mon ministère fait aussi des gestes concrets pour inciter les Canadiens à s'ouvrir à la diversité et à l'inclusion. En particulier, nous nous attaquons à l'enjeu du racisme systémique à l'endroit des Noirs canadiens, ainsi que des peuples autochtones. Dans cette optique, le budget de 2018 augmente de 23 millions de dollars le financement accordé au Programme du multiculturalisme du ministère, ainsi qu'aux consultations menées à la grandeur du pays sur une nouvelle approche nationale de lutte contre le racisme.

[Français]

    Nous travaillons très activement là-dessus. J'ai eu l'occasion de me rendre dans plusieurs régions partout au pays, et nous continuons à le faire.
    Je vais maintenant parler des fonds supplémentaires mis à la disposition des organismes du portefeuille du ministère du Patrimoine canadien dans le cadre du Budget supplémentaire des dépenses (A) de 2018-2019.
    Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes va recevoir 99 196 $ pour l'aider à s'attaquer au problème que pose le système de rémunération. L'Office national du film va recevoir exactement la même somme à cet effet.
    Téléfilm Canada va recevoir un financement de 1 million de dollars dans le cadre de la Stratégie d'exportation créative du Canada.
    Le Conseil des arts du Canada, pour sa part, recevra un transfert de 127 000 $ du ministère du Patrimoine canadien. Ces fonds vont servir à soutenir des projets de théâtre francophone et à assurer la participation du Canada aux réunions de la Commission internationale du théâtre francophone.
    Le Centre national des arts recevra quant à lui un transfert de 150 000 $ du ministère du Patrimoine canadien pour soutenir la rencontre biennale Zones théâtrales qui aura lieu en 2019. Il s'agit d'une plateforme importante pour promouvoir le théâtre professionnel dans les communautés francophones du Canada.
    Ensemble, ces organismes sont essentiels à l'enrichissement de la vie culturelle, linguistique, citoyenne et économique des Canadiens.
    Je tiens aussi à souligner les efforts que nous faisons pour que les nominations par le gouverneur en conseil soient transparentes et variées. D'ailleurs, vous avez pu le constater au cours de la dernière année. Depuis octobre 2016, 126 personnes de partout au pays ont été nommées au sein du portefeuille du Patrimoine canadien. Elles représentent la diversité des Canadiens et sont de milieux, de langues, de cultures et de genres différents.
    Cela met fin à mon intervention. Je serai heureux de travailler avec vous et avec l'ensemble des collègues ici, autour de la table, à l'avancement de nos priorités.
    Je vous remercie de votre attention. Je suis maintenant disponible pour répondre à vos questions.

  (1210)  

    Merci beaucoup.
    Nous commençons maintenant la période de questions et de réponses.
    Monsieur Breton, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, je vous remercie d'être parmi nous aujourd'hui. On sent tout le dynamisme et la passion qui vous animent dans votre nouveau rôle de ministre.
    Merci aux représentants du ministère qui sont ici aujourd'hui pour vous appuyer.
    Monsieur le ministre, vous avez évoqué plus tôt, en faisant preuve d'un grand positivisme, l'exemption culturelle qui a été maintenue dans le nouvel Accord Canada—États-Unis—Mexique. Évidemment, vous en avez parlé très brièvement, puisque vous aviez beaucoup de choses à nous présenter.
    Qu'est-ce que cela veut dire concrètement pour le milieu culturel canadien? Pouvez-vous nous donner des exemples de répercussions directes que cette exemption aura sur les Canadiens et sur tout le milieu culturel?
    Merci beaucoup de la question. En fait, c'est une question extrêmement importante.
    Si nous voulons continuer à présenter des projets de loi pour protéger et promouvoir notre industrie culturelle, il faut que, à la base, nous ayons les mécanismes nécessaires pour le faire. Il nous fallait donc une clause d'exemption culturelle dans l'accord renégocié avec les États-Unis et le Mexique.
    Je vais vous dire un secret, mais ne le répétez à personne: ce n'est pas toujours facile de négocier avec les Américains. Je vous dirais que les négociations ont été assez difficiles jusqu'à la fin. S'ils l'avaient pu, ils auraient retranché cette clause. Toutefois, le premier ministre a été extrêmement clair là-dessus. Vous avez sûrement eu l'occasion de l'entendre ou de le voir à ce sujet. Il a maintenu que, sans cette clause, il n'y avait pas d'accord. C'était une ligne rouge à ne pas franchir du début à la fin, et c'est exactement sa détermination qui nous a permis d'obtenir cette clause à part, qui est une clause interprétative selon laquelle la culture est exemptée du traitement prévu pour les autres produits dans l'accord signé avec les États-Unis et le Mexique.
    Cela signifie que nous pouvons développer notre industrie et adopter des lois et des règlements qui protègent notre culture et qui en font la promotion, sans que quiconque puisse invoquer l'accord pour nous l'interdire. Cette clause particulière vient s'arrimer à l'ensemble de l'accord, et l'exemption l'emporte sur le reste de l'entente.
    Merci beaucoup.
    Dans votre présentation, vous avez également évoqué la Stratégie d'exportation créative, que vous avez annoncée en juin dernier. Cela a attiré mon attention. Ce financement représente 125 millions de dollars sur cinq ans, ce qui est quand même un montant très appréciable. Pouvez-vous nous donner davantage de détails sur cette stratégie, que je considère comme assez importante?
    Merci de la question, monsieur Breton.
    Encore une fois, vous avez tout à fait raison de dire que cette stratégie est très importante. J'ai eu l'occasion de donner une conférence là-dessus à Vancouver. C'est vraiment une ville très vibrante qui compte beaucoup sur le secteur culturel, comme d'autres grandes villes ou régions dans toutes les provinces canadiennes.
    Cette stratégie va nous permettre de sortir des sentiers battus et du marché canadien. Nous avons un marché extraordinaire qui est très intéressé par la culture et qui veut consommer de la culture, mais nous avons besoin d'aller au-delà des marchés traditionnels du Canada. Ce programme vient appuyer nos artistes, nos créateurs et nos diffuseurs dans leurs démarches visant, par exemple, à inciter des artistes et des créateurs d'ailleurs à venir se produire ici, au Canada. Cela permet un financement.
    Cela favorise aussi la réalisation de missions commerciales. L'année dernière, la ministre Joly a eu l'occasion de diriger une mission en Chine qui a eu beaucoup de succès. Je crois que les contrats que nous avons signés directement dans le milieu de la culture sont d'une valeur d'environ 125 millions de dollars. Nous préparons une nouvelle mission dans le cadre de laquelle, au mois de février, plusieurs fonctionnaires auront la chance de se rendre en Argentine, au Mexique et en Colombie.
    Tout cela est extrêmement important. Cette stratégie aide nos artistes, nos créateurs et nos intervenants du milieu culturel à aller au-delà de nos frontières.

  (1215)  

    Merci.
    Vous avez parlé des langues autochtones. Au Canada, on en compte 90. On sait que la situation n'est pas facile pour les langues autochtones. On dit même que les trois quarts de ces langues seraient actuellement menacées. Ce n'est pas une bonne nouvelle.
    Dans ce contexte, vous avez annoncé le dépôt prochain d'un projet de loi pour mieux protéger ces langues. Pouvez-vous nous décrire davantage comment se déroule le processus?
     C'est avec grand plaisir que je vais vous en parler, monsieur Breton.
    En fait, c'est une priorité absolue pour moi, et je dirais même que c'en est une pour le premier ministre, pour le gouvernement et probablement pour l'ensemble des députés ici. La langue, c'est notre identité, c'est la façon dont nous racontons nos histoires, c'est la manière dont nous transmettons nos histoires, notre vécu, nos réalités à nos enfants et à nos petits-enfants. Or, comme vous l'avez fait remarquer, les trois quarts des langues autochtones sont menacées. Plusieurs ont déjà disparu. Il faut arrêter cette hémorragie et il faut commencer quelque part.
    Nous voulions agir en collaboration avec les différents groupes. Nous nous sommes donc assis ensemble sur une très longue période. Nous n'avons pas commencé ce travail récemment; les démarches ont commencé il y a longtemps. Nous nous sommes assis avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis pour élaborer conjointement ce qui allait devenir le projet de loi sur les langues autochtones. Nous nous sommes entendus sur une série de principes qui allaient former le coeur de cette loi. Nous travaillons à ce projet de loi et j'espère le déposer très bientôt, parce qu'il faut commencer dès maintenant.
    J'ai toujours dit que la protection des langues autochtones était un processus à court, à moyen et assurément à long terme. Si nous ne commençons pas aujourd'hui, nous n'y arriverons jamais à long terme. Ce projet de loi est une priorité absolue. J'aurai l'honneur de le déposer bientôt et j'espère obtenir votre appui.
    Je vais profiter du peu de temps qu'il me reste pour vous remercier beaucoup de votre comparution aujourd'hui.
    Je remercie également les représentants du ministère de tout le travail qu'ils font dans le milieu culturel au Canada.
    Je vous remercie de votre travail.
    Merci.
    Nous continuons maintenant avec M. Blaney pour sept minutes.
    Bienvenue au Comité, monsieur le ministre Rodriguez. Bien sûr, je vous souhaite beaucoup de succès dans votre important mandat.
    Vous parliez des langues à l'instant. Je veux vous amener sur le sujet des langues officielles. Ce matin, M. Carol Jolin, le président de l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario, a demandé au gouvernement fédéral, dont vous faites partie, s'il était prêt à financer, à même les fonds disponibles, les quatre premières années de l'Université de l'Ontario français.
    Monsieur Blaney, vous savez que le dossier des langues officielles relève de ma collègue Mme Joly. Je pense qu'elle pourrait répondre à cette question.
    Ce qui est clair, c'est que nous avons fait des investissements historiques de l'ordre de 2,7 milliards de dollars, si je ne me trompe pas, en matière de langues officielles. Nous marchons côte à côte avec nos amis, nos frères et nos soeurs.
    Monsieur Rodriguez, vous avez la chance d'agir. La lettre a été envoyée hier et c'est maintenant très clair: l'Assemblée de la francophonie de l'Ontario et l'Université de l'Ontario français disent que le fédéral a déjà agi de la sorte dans d'autres projets. Vous financez les quatre premières années et, une fois que l'Ontario aura réglé son déficit, il pourra contribuer pour le reste des huit années. Si le fédéral fait preuve de volonté et de leadership, les élèves pourront être sur les bancs d'école dès septembre. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre.
    J'aimerais préciser que les langues officielles ne relèvent pas de ce ministre.
    Je m'excuse, madame la présidente, mais aujourd'hui nous parlons d'argent. Dans son discours, le ministre a bien dit qu'il voulait renforcer les langues officielles. Je suis certain que, pour le ministre Rodriguez, la dualité linguistique et l'identité canadienne sont fondamentales. Il a un rôle à jouer, il fait partie du Conseil des ministres et on s'attend à un leadership libéral.
    Madame la présidente, j'espère que le temps qu'a pris cette intervention sera retranché de mon temps de parole, parce que j'ai deux autres questions à poser au ministre.

  (1220)  

    Voyons donc.
    Monsieur le ministre, qu'est-ce que cela vous fait de voir la Citadelle de Québec...

[Traduction]

    J'invoque le Règlement, madame la présidente. Le sujet est le budget des dépenses. Cela ne concerne pas la visite du ministre.

[Français]

    Puis-je poser ma question?

[Traduction]

    Je vais attendre d'entendre sa question.
    Vous devriez attendre d'entendre la question avant de porter un jugement à ce sujet.

[Français]

    Puis-je poser ma question, madame la présidente?
    Oui, allez-y.
    Je vais plutôt parler d'argent, plus exactement de ce montant de 600 millions de dollars, monsieur le ministre.
    On reconnaît que tous les secteurs dans lesquels vous intervenez sont sous haute pression. J'ai rencontré les représentants de l'ADISQ la semaine dernière. Ils sont en crise et ils font appel à vous, mais c'est le silence radio de votre côté.
    Pourtant, du côté des journalistes, voilà que vous arrivez avec 600 millions de dollars, en pleine année électorale. Pourquoi leur accorder 600 millions de dollars et pourquoi le faire maintenant? Pourquoi dépenser l'argent des contribuables, alors qu'il serait possible de recourir à des solutions audacieuses, par exemple une réforme de la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada?
    Trouvez-vous que ce montant de 600 millions de dollars est insuffisant?
    Comment se fait-il que la seule solution que vous trouviez pour venir en aide aux médias en crise soit de dépenser l'argent des contribuables? Vous savez pourtant que d'autres solutions existent. Certaines ont été proposées par les Amis de Radio-Canada, notamment celle d'éliminer les échappatoires que l'on retrouve dans la Loi de l'impôt sur le revenu. Pourquoi ne pas adopter une approche responsable, au lieu de venir puiser dans l'argent des contribuables?
    Vous avez déroulé le tapis rouge pour de grandes entreprises comme Amazon ou Google qui ne paient pas de taxes et auxquelles vous accordez même des crédits. Pourtant, tous les intervenants vous disent que vous auriez pu résoudre les problèmes dans votre dernier énoncé budgétaire, ce que vous n'avez pas fait. Pourquoi dépenser l'argent des contribuables en donnant l'impression de vouloir acheter les médias, alors que l'on respecte les journalistes? Pourquoi, monsieur Rodriguez, n'avez-vous pas de solutions plus créatives?
    Puis-je répondre?
    Oui.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Blaney, vous savez que nous sommes en train de réviser les lois qui encadrent tout le secteur des grands médias, des plateformes numériques et des géants du Web, entre autres. On peut marcher et mâcher de la gomme en même temps. Même si nous réformons les lois aujourd'hui, plein de médias vont quand même mourir. Nous croyons que le journalisme professionnel est l'un des fondements de la démocratie. Vous êtes d'accord avec moi là-dessus, n'est-ce pas, monsieur Blaney?
    Absolument.
    Un des éléments de votre question dont je conviens, c'est le fait que les médias sont en crise. C'est effectivement le cas. Trop de médias ont dû fermer, qu'il s'agisse de quotidiens, d'hebdomadaires ou d'autres. C'est probablement le cas dans votre région.
    Nous croyons que trop de régions n'ont plus de nouvelles locales. Ainsi, elles ne savent pas ce qui se passe à l'hôtel de ville ni ce que leurs élus font à Ottawa ou ailleurs. En réponse, nous offrons un financement qui leur permettra d'établir des règles et des façons de faire pour venir en aide à un pilier de notre démocratie qui est en crise.
    Comme vous le savez, monsieur Blaney, une presse qui est en faillite n'est pas une presse libre et indépendante. Une presse en faillite, c'est tout simplement une presse qui n'existe plus. Pour notre part, nous croyons qu'elle doit continuer à exister pour que se posent à nous les questions difficiles.
    Nous aussi, nous croyons que les médias doivent continuer d'exister. Vous avez cependant refusé de répondre à ma question: pourquoi, en pleine année électorale, êtes-vous arrivés avec ce cadeau aux dépens des contribuables?
    Monsieur le ministre, je suis sûr que la Citadelle de Québec est importante pour vous. Un rapport du vérificateur général révèle que Pêches et Océans Canada ainsi que le ministère de la Défense nationale n'ont pas pris de mesures suffisantes pour préserver la valeur patrimoniale des biens fédéraux.
    Comment se fait-il que vous laissiez poser de la « scrappe » sur la Citadelle, c'est-à-dire une pierre américaine non conforme à l'originale, alors que les Normes et lignes directrices pour la conservation des lieux patrimoniaux au Canada, à la page 213, exigent de recourir à la pierre d'origine si elle existe encore? Dans le cas de la Citadelle de Québec, cette pierre d'origine existe. Comment se fait-il que vous n'interveniez pas auprès de la Défense nationale pour lui enjoindre de réparer la Citadelle avec la pierre appropriée, c'est-à-dire la pierre d'origine, ce grès vert de Sillery, plutôt que de poser de la pierre américaine non conforme? Il y va du respect des normes fédérales, et vous êtes le gardien du patrimoine, monsieur le ministre.

[Traduction]

    Monsieur Blaney, pouvez-vous au moins effleurer le Budget supplémentaire des dépenses dans votre intervention?

[Français]

    Monsieur Blaney, j'ai l'impression que vous débordez un peu du sujet. Ce dossier relève de la Défense nationale. Si vous voulez inviter ce ministre à comparaître, je suis sûr que cela va lui faire plaisir de venir.

  (1225)  

    Monsieur le ministre, il est question ici du Bureau d'examen d'édifices fédéraux du patrimoine.
    La Citadelle, monsieur Blaney...
    Vous avez la responsabilité de faire respecter les normes du gouvernement fédéral en matière de patrimoine. On parle ici d'un joyau. Je suis sûr que, comme moi, vous tenez à ce que la Citadelle soit préservée comme un joyau du patrimoine canadien. Comment se fait-il que vous laissiez la Défense nationale saccager la Citadelle de Québec avec une pierre non conforme?
    La Citadelle est un bien patrimonial précieux, vous êtes d'accord avec...

[Traduction]

    Je vous demandais seulement d'effleurer le Budget supplémentaire des dépenses dans votre intervention. Si vous pouvez le faire, allez-y.

[Français]

    Madame la présidente, c'est parce que des sommes importantes sont investies actuellement. C'est l'argent des contribuables qu'on dépense de manière non avisée, parce que, plus tard, il va falloir remplacer cette pierre qui est gélive et non conforme.
    Nous avons devant nous le ministre du Patrimoine canadien. C'est le gardien de notre patrimoine.

[Traduction]

    J'invoque le Règlement, madame la présidente...

[Français]

    Nous avons un rapport du vérificateur général qui nous dit que le gouvernement fédéral devrait mieux prendre soin de ses édifices, car quand il le fait, il le fait tout croche.
    J'interpelle le ministre Rodriguez pour qu'il protège notre patrimoine, madame la présidente.
    Je suis sûr que le ministre, au fond de lui-même, est d'accord qu'on doit préserver la Citadelle de Québec, et je suis sûr qu'il va intervenir auprès du ministre de la Défense nationale pour lui dire d'arrêter d'utiliser de la « scrappe » et de plutôt utiliser la bonne pierre.
    D'accord.
    Sur ce, nous allons poursuivre avec M. Nantel pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, merci d'être ici aujourd'hui.
    Puisqu'il est question de déterminer ce qui relève d'un ministère ou d'un autre, j'aimerais parler de cette aide de 595 millions de dollars accordée aux médias écrits qui a été évoquée. Est-ce que cette aide provient des budgets de Patrimoine canadien ou de ceux de l'Agence du revenu du Canada?
    C'est un montant supplémentaire qui est alloué par le ministère des Finances spécialement à cette fin.
    Si cela est alloué par le ministère des Finances, c'est une bonne nouvelle. En effet, tout le monde dans le milieu l'a accueillie avec joie. À l'exception de certaines personnes qui étaient peut-être moins contentes, tout le monde était content de voir arriver cette aide très nécessaire.
    Par ailleurs, tout le monde reconnaît aussi que la situation précaire dans laquelle se retrouvent actuellement nos médias est liée entre autres à des avantages indus dont profitent des joueurs importants du Web en ce qui concerne la vente de publicité. Je parle de l'article 19 de la Loi de l'impôt sur le revenu, que mon collègue évoquait, à propos de l'admissibilité des dépenses publicitaires dans les médias. Alors, je suis content d'entendre cela.
    Croyez-vous qu'il y aura bientôt des changements, à tout le moins sur le plan de cette fameuse TPS, au sujet de laquelle je vous pose souvent des questions, autant à vous qu'à votre secrétaire parlementaire? Le milieu de la culture a cette dignité de dire que le premier critère est de ne pas donner des avantages à des joueurs étrangers par rapport aux acheteurs habituels de leurs productions culturelles. J'imagine que vous me suivez.
    Est-ce que vous faites pression sur le ministère des Finances ou sur l'Agence du revenu du Canada pour que soit annulée cette exemption de TPS accordée à des fournisseurs étrangers? Je parle bien évidemment de Netflix. Je ne parle plus de Facebook, qui a dit qu'elle allait bientôt ajouter la TPS à ses transactions publicitaires. Google, par contre, demeure libre de TPS.
    Faites-vous pression à ce sujet? Vous savez que le milieu est sensible à cette question.
    Oui, j'en suis très conscient, monsieur Nantel. Nous rencontrons évidemment les mêmes personnes.
    J'approuve aussi votre analyse selon laquelle il y a énormément de transferts d'achats publicitaires des médias traditionnels vers les médias numériques, d'où le problème que nous vivons actuellement. Nous en sommes conscients.
    Ce que nous faisons actuellement, c'est justement réviser le système. C'est une révision qui est beaucoup plus profonde. Cette révision que nous pouvons faire va tracer la voie pour les 20 ou 30 prochaines années.
    Vous avez raison.

  (1230)  

    Dans la situation actuelle, nous n'allons pas cibler un truc en particulier. Nous allons plutôt faire une révision complète. Comme j'ai eu l'occasion de le mentionner par le passé, ce sont des changements structurels qui vont venir modifier les règles du jeu. En effet, les règles du jeu ont changé. Ce sera donc une réponse aux changements des règles du jeu, avec des principes clairs. J'ai eu l'occasion de mentionner que ceux qui contribuent au système vont devoir participer au système.
    Merci. C'est justement la phrase que vous nous dites souvent, tout comme votre secrétaire parlementaire. À ce sujet précisément, quand j'ai dit tout à l'heure que vous aviez raison, c'est parce qu'une réforme très large du système est effectivement nécessaire, bien évidemment. Cependant, certaines choses évidentes peuvent être faites rapidement; c'est ce que le milieu demande. Combler la faille de l'article 19 sur l'admissibilité des dépenses publicitaires dans un médium américain ou international sur le Web, c'est quelque chose qui peut se faire tout de suite. S'assurer que la TPS sera finalement perçue, cela peut se faire tout de suite.
    Quand le ministre Morneau dit que l'impôt des sociétés devra faire l'objet d'une coordination internationale, je suis d'accord. Nous pourrions être des chefs de file, mais, à défaut de l'être, nous pouvons attendre un consensus international. Ce qui est triste, surtout, c'est de voir que rien n'est fait, bien que le milieu s'entende. D'ailleurs, vous avez un comité de conseillers experts très compétent sur le plan factuel.
    Y a-t-il des mesures intérimaires qui pourraient être prises tout de suite pour colmater les brèches les plus évidentes?
    Vous avez raison sur le fait que des discussions doivent se tenir à l'échelle internationale. C'est une partie de la solution. M. Morneau les a, ces solutions.
    Dans certains cas, il n'y a plus de frontières, alors nous devons choisir des solutions globales. Pour ce qui est des solutions plus particulières, rien n'est inclus ou exclu. Du travail se fait à l'interne. Nous réfléchissons, nous rencontrons des gens, nous proposons des choses.
    Oui, mais qu'y a-t-il en fait de mesures d'urgence?
    Nous voulons permettre au groupe de conseillers experts de terminer son travail. Je suis sûr que vous connaissez personnellement plusieurs membres de ce groupe. Nous allons attendre de voir le travail qui aura été effectué par ce groupe d'experts, de la même façon que nous allons attendre d'avoir complété le travail que nous faisons de notre côté. Nous pourrons ensuite prendre des décisions structurelles, globales et inclusives, et non à la pièce.
    Autrement dit, on est contraint par une date limite. Si vous me dites qu'il n'est pas possible de prendre des mesures intermédiaires en attendant, on devra attendre la date limite de 2020.
    Je me souviens des propos de Douglas Barrett, qui a été président de l'ancienne mouture du Fonds des médias du Canada. Ce dernier avait dit au Globe and Mail, je crois, qu'ultimement ce comité d'experts présenterait des recommandations en janvier 2020.
    Tout le monde ici cogne à des portes pour se faire élire. Manifestement, vous avez dit aux gens que cela allait avoir lieu après votre réélection, en leur demandant de ne pas dire un mot là-dessus et de ne pas trop chialer, sinon ce seraient les conservateurs qui se feraient élire. Je trouve cela très cynique. Disons que je passe par-dessus cela. Le milieu de la culture espérera pour le mieux à la prochaine élection, pauvre de vous!
    Le rapport sera donc déposé en janvier 2020. MM. Piché et Francis vont peut-être travailler à un texte de loi, que nous allons recevoir à la fin de la session, ou peut-être même à l'automne. Selon les meilleurs calculs, cela nous mène en 2022-2023 avant qu'il y ait des changements concrets.
    Comme je vous l'ai dit l'autre jour à la Chambre, si cela n'avait pas été de cette aide aux médias, en 2023, le National Post, Postmedia et l'Ottawa Citizen auraient déjà fermé leurs portes, tout simplement. Vous avez appliqué un bon diachylon, ce qui est très approprié, et c'est tant mieux. Par contre, il n'y aura rien d'autre entretemps. Amazon Prime et Hulu s'en viennent. Netflix continue à bénéficier de l'accord minable qui a été conclu.
    Est-ce vrai que rien ne se produira avant 2022?
    J'aimerais vous préciser que je ne donne pas de directives aux membres de mon équipe. Ils sont très compétents et ils sont capables de déterminer eux-mêmes ce qu'ils ont à dire.
    Pour le reste, monsieur Nantel, je vais reprendre mon expression et vous dire qu'on peut mâcher de la gomme et marcher en même temps. Parallèlement à cela, il se fait du travail à l'interne, des discussions se tiennent, des choses se préparent. Il n'est pas nécessaire de commencer à réfléchir à tout cela uniquement lorsque le rapport sera déposé. Nos fonctions et notre emploi du temps nous amènent à rencontrer plusieurs personnes. Nous préparons l'avènement d'un projet de loi qui sera structurant et qui proposera des changements fondamentaux, car c'est la solution. C'est une approche beaucoup plus inclusive et globale que le fait de mettre des diachylons ici et là. C'est la décision que nous avons prise.
    Je n'aurais pas dû qualifier l'aide aux médias de diachylon, car c'est bien plus que cela. Les gens des médias vous diraient que 600 millions de dollars, cela fait beaucoup de diachylons.
    Sur les faits, je suis d'accord avec vous. Cependant, il est très clair que le Fonds des médias du Canada est asséché en raison des contributions des câblodistributeurs qui sont de plus en plus basses. Vous compensez cela en accordant des crédits d'impôt, et je conviens que c'est une bonne utilisation des fonds publics. Par contre, des gens font beaucoup d'argent dans le processus actuellement et ils devraient contribuer davantage.
    Vous avez dit qu'il était possible de mâcher de la gomme et de marcher en même temps. Pouvons-nous en conclure que les décisions législatives à venir tiendront compte des consensus dans le milieu de la culture?
    Le fonds pour les journalistes...
    Je m'excuse de vous interrompre, monsieur le ministre, mais M. Nantel a déjà dépassé son temps de parole.
    Je donne maintenant la parole à M. Long pour sept minutes.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente. Bonjour à tous. Bonjour, monsieur le ministre.
    En premier lieu, monsieur le ministre, je tiens à vous féliciter de votre nomination à titre de ministre du Patrimoine et du Multiculturalisme. Je souhaite aussi vous féliciter de votre passion et de votre transparence concernant votre prise en charge des dossiers et vos réponses aux questions. C'est rafraîchissant à voir. Je vous en félicite donc.
    Je représente la circonscription de Saint John—Rothesay, dans le sud du Nouveau-Brunswick. C'est une circonscription intéressante. Premièrement, nous avons la première ville constituée au Canada. Son histoire est incroyable. C'est une ville fondée par des loyalistes. La ville et la région ont une abondance de monuments historiques qui ont une importance nationale. Avant ces trois dernières années, l'intérêt n'était pas au rendez-vous, et il y avait un manque de ressources et de moyens pour présenter des demandes de fonds pour ces monuments.
    Je suis ravi de mentionner que dans ma circonscription j'ai une tour Martello; il n'en reste que quelques-unes en Amérique du Nord. J'ai le fort Howe, qui a une importance nationale. J'ai aussi le fort La Tour, l'ancien cimetière loyaliste, le théâtre Impérial et le marché de Saint John. Ce sont tous des monuments historiques qui ont une importance nationale.
    Je suis enchanté de dire que le gouvernement a accordé du financement pour restaurer le marché de la ville et construire la tour Martello et le fort La Tour, qui est un magnifique monument qui a une importance nationale. Nous avons aussi réussi à obtenir du financement de Patrimoine canadien pour contribuer à la restauration du Théâtre Impérial, qui est l'un des premiers théâtres de style vaudeville en Amérique du Nord.
    La liste est longue. Une grande partie de mon mandat et de ce qui me passionne dans ma circonscription consiste à obtenir du financement pour ces monuments historiques qui ont une importance nationale. Je suis enchanté de dire que le gouvernement a investi considérablement dans Patrimoine canadien et que ces investissements ont été immensément utiles dans ma circonscription.
    L'autre élément de ma circonscription a trait à l'immigration, et ma circonscription devient de plus en plus diversifiée. Nous célébrons de plus en plus chaque mois des événements et des célébrations multiculturelles dans Saint John—Rothesay. Des intervenants de ma circonscription, comme l'Association multiculturelle de Saint John, par l'entremise de Mohamed Bagha, et le Centre de nouveaux arrivants de Saint John, ont présenté des demandes et ils ont reçu des fonds de Patrimoine canadien. Cela a permis une transformation pour eux et la circonscription en ce qui concerne la promotion du multiculturalisme dans Saint John—Rothesay. Cela n'avait pas vraiment été le cas avant ces trois dernières années.
    Monsieur le ministre, l'une de vos priorités est de diriger des travaux à l'échelle du gouvernement pour renforcer l'avantage multiculturel du Canada. Pour ce faire, vous comptez adopter un programme du multiculturalisme revitalisé et mettre sur pied de nouvelles initiatives pour célébrer la diversité et encourager une meilleure inclusion.
    Pouvez-vous faire le point sur le sujet?

  (1235)  

    Absolument. Félicitations pour votre excellent travail au sein de ce comité. Je dois féliciter sans faute l'ancien whip de vous y avoir affecté. Je tiens également à vous féliciter de votre appui. Je sais à quel point vous travaillez fort pour votre circonscription. J'en suis témoin. J'ai vu tous les efforts que vous déployez pour l'agrandissement du Musée du Nouveau-Brunswick, qui est dans votre circonscription. Continuez votre bon travail.
    Merci.
    Le multiculturalisme est extrêmement important, et c'est la raison pour laquelle mon titre est désormais celui de ministre du Patrimoine canadien et du Multiculturalisme. Dans le dernier budget, en 2018, nous avons ajouté un montant de 21 millions de dollars pour les programmes de multiculturalisme, ce qui ouvre la porte à de nouvelles possibilités. Je travaille là-dessus avec mon secrétaire parlementaire, M. Gary Anandasangaree.
    Monsieur le ministre, je suis tout à fait d'accord avec vous. Jusqu'à il y a trois ans, le Centre d’accueil multiculturel et des nouveaux arrivants de Saint John n'avait aucun moyen d'aller chercher ce financement, alors permettez-moi de vous féliciter encore une fois pour cela.
    Félicitons aussi l'ancienne ministre. Les gens peuvent présenter des projets de lutte contre la discrimination et les préjugés. Ce fonds a toutes sortes de fonctions. Il y aura aussi des budgets pour différentes communautés. Elles pourront célébrer leur propre identité et qui nous sommes en tant que collectivité, tout comme nous célébrons le dialogue entre différentes communautés.
    Je pense que ces choses sont absolument souhaitables. J'ai la chance de voyager beaucoup dans l'ensemble du pays, et je le dis à chacun de vous, du côté du gouvernement comme à mes collègues d'en face: dites à vos communautés qu'elles peuvent présenter des demandes pour les nombreux programmes distincts qui nous mettons à leur disposition. Nous avons d'ores et déjà des fonds pour différents événements qui permettent aux communautés de célébrer leur propre identité et de créer, si elles le souhaitent, des rapprochements avec d'autres communautés.
    Merci d'avoir soulevé cette question, car c'est quelque chose d'important.

  (1240)  

    Dans ma circonscription, Saint John est connue comme étant « la ville loyaliste ». Jusqu'à tout récemment, c'était une ville très conservatrice, mais, de toute évidence, cela est en train de changer. Plus nous accueillons d'immigrants, plus la population de Saint John-Rothesay se diversifie et plus il est important de célébrer le multiculturalisme. Un mois du patrimoine asiatique a récemment été lancé. Un autre événement a récemment été créé pour célébrer l'indépendance de l'Inde. Tous ces événements sont essentiels à l'édification de la collectivité et à l'établissement de liens solides en son sein, alors permettez-moi de vous féliciter à nouveau.
    J'ai une autre question. Combien de temps me reste-t-il?
    Vous avez 15 secondes.
    Oui, merci beaucoup.
    Passons maintenant à M. Shields, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, merci de votre présence.
    J'ai cinq minutes, alors je vais faire vite.
    Il y a un an, j'ai demandé combien allait coûter la patinoire sur la Colline et l'on m'a répondu 5 millions de dollars. J'ai demandé de nouveau en décembre et on m'a dit 8 millions de dollars. Ensuite, lorsque j'ai demandé à nouveau le coût final, on m'a dit de reposer la question en décembre 2018. Nous sommes en décembre 2018. Avez-vous le coût final de la patinoire sur la Colline?
    Si c'est important pour M. Shields, nous serons heureux de répondre.
    D'accord.
     Le coût total inclut la conception, la construction et l'exploitation de la patinoire, y compris la sécurité autour de la patinoire, la billetterie, l'entretien de la glace — parce qu'il y a toujours une Zamboni —, la programmation autour de la patinoire — qui n'était pas négligeable —, ainsi que le démantèlement de l'installation, la restauration du gazon et la préparation du site et, enfin, le déplacement ultérieur de la structure dans une collectivité donnée. Bref, en tout et pour tout, la patinoire a coûté 6 950 000 $.
    Le chiffre qu'on nous a donné plus tôt était de 8,2 millions de dollars, et cela avait été rendu public. Vous dites qu'il a été réduit?
    Oui. Le coût total de la patinoire a été de 6 950 000 $. Il y a eu des estimations au fur et à mesure que le projet avançait, et comme c'est souvent le cas avec les estimations, il faut envisager les coûts les plus élevés — surtout qu'il s'agit d'estimations. Nous devons respecter certaines balises.
    Merci.
    En 2017, le comité de l'environnement a produit un rapport sur les lieux historiques. Voici l'une des phrases de ce rapport: « Le Comité a appris au cours de son étude que le Canada était le seul pays du G7 à ne pas avoir adopté une loi pour protéger les lieux historiques [...] ». La protection des lieux historiques relève-t-elle de Patrimoine canadien?
    C'est une question extrêmement importante, monsieur Shields. Sauf erreur, je crois que c'est la raison pour laquelle, dans le dernier budget, nous avons ajouté 55 millions de dollars pour les résidences officielles. Sauf erreur, je crois cependant que les lieux historiques relèvent de Parcs Canada et non de Patrimoine canadien.
    Les lieux historiques relèvent de Parcs Canada, c'est ce que vous me dites?
    Oui. C'est Parcs Canada qui s'en occupe.
    C'est Parcs Canada qui s'occupe de tout? Votre ministère n'a rien à voir là-dedans?
    Je pense que ce qui relève de nous, ce sont les résidences officielles.
    D'accord.
    Ma prochaine question est la suivante. Au cours de l'année qui vient, lorsque nous allons parler des dépenses proposées, vous allez nous dire que certaines relèvent d'autres ministères, comme le 75e anniversaire du jour J, en 2019, et le 100e anniversaire du Traité de Versailles. Toutefois, l'année qui vient marquera le 50e anniversaire de la Loi sur les langues officielles. Cela fait-il partie des choses que vous envisagez?
    Peut-être. Nous devrons attendre une proposition d'Andrew. Avez-vous quelque chose à nous dire à ce sujet?
    Cela relève de la ministre Joly. C'est son ministère qui s'occupe des langues officielles.
    D'accord. Le 100e anniversaire du décès du premier ministre Laurier — qui est mort alors qu'il était député — aura lieu l'an prochain. Est-ce que ça concerne Patrimoine canadien?

  (1245)  

    Je présume que oui.
    Comptez-vous faire quelque chose à cet égard?
    Nous pourrions y penser. Le premier ministre Laurier était un grand premier ministre.
    La perte de l'édifice du Centre va occasionner des bouleversements majeurs. La Cité parlementaire compte un nombre considérable de statues. Lorsque nous quitterons l'édifice du Centre, allez-vous élaborer un programme pour traiter ces statues dans une optique patrimoniale? Le public ne pourra plus visiter l'édifice du Centre. Allez-vous élaborer un programme plus complet que celui que nous avons maintenant?
    Je vais devoir regarder cela de plus près. Je vous reviendrai le 2 avec une réponse.
    Merci.
    J'aimerais vraiment que vous me répondiez à ce sujet.
    Absolument.
    C'est M. Yurdiga qui va prendre la relève.
    Vous avez une minute.
    Je serai bref.
    L'un de vos objectifs est de rémunérer nos artistes équitablement et en temps utile. J'ai eu le privilège de rencontrer de nombreux intervenants et de parler avec eux de rémunération et de traitement équitable. L'une des choses qui m'ont choqué, c'est que CBC/Radio-Canada est parmi ceux qui respectent le moins les droits d'auteur et la rémunération. Ma question est la suivante: qui surveille CBC/Radio-Canada pour s'assurer que les artistes et les créateurs sont traités équitablement? Votre ministère surveille-t-il les transactions de CBC/Radio-Canada?
    CBC/Radio-Canada est une société d'État qui relève de moi, mais qui est indépendante. Je ne lui dis pas ce qu'elle doit faire ou ne pas faire.
    Ne devriez-vous pas surveiller comment l'argent des contribuables est dépensé? C'est plus d'un milliard de dollars de l'argent des contribuables qui y passe. Nous voulons nous assurer que les artistes sont traités équitablement. Ce n'est pas une chose qui est difficile à faire.
    Nous avons définitivement la même priorité. L'un de mes objectifs, c'est que les artistes et les créateurs soient rémunérés équitablement, systématiquement et à 100 %.
    Monsieur Yurdiga, permettez-moi de vous interrompre. Nous aurons le temps de revenir à vous pour un autre segment de cinq minutes.
    Je vais maintenant donner un coup de barre pour permettre à M. Boissonnault de prendre la parole pendant cinq minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, merci d'être venu à Edmonton. La rencontre avec des artistes et des gens de la communauté multiculturelle était géniale.
    J'ai une première question à vous poser.

[Traduction]

    Combien de Canadiens ont utilisé la patinoire qui se trouvait sur la Colline? Connaissons-nous le nombre de Canadiens qui ont utilisé la patinoire dans le cadre de Canada 150?
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement.
    Nous avons entamé la conversation sur la patinoire.
    Comme je l'ai dit, s'il était important pour M. Shields que nous lui répondions, alors nous allons répondre à M. Boissonnault, si c'est important pour lui.
    Il y a eu 83 jours de patinage et, durant cette période, 153 000 laissez-passer ont été distribués.
    Merci beaucoup.
    Je crois savoir que la patinoire a été déménagée dans la circonscription de Gord Brown, à Gananoque, et qu'elle s'appellera la patinoire Gord Brown.

[Français]

    Je vous remercie de votre sensibilité à cet égard, monsieur le ministre et chers fonctionnaires du ministère.
    En ce qui concerne les langues autochtones, en tant que membre du caucus autochtone et Cri adopté non inscrit, je vous félicite. Je sais que le gouvernement s'intéresse grandement à cette question et qu'il a déjà entamé des discussions là-dessus.
    Pouvez-vous nous faire une mise à jour sur le plan d'investissement concernant l'avenir de toutes ces langues?
    C'est une très bonne question. Comme je le mentionnais plus tôt, c'est vraiment au coeur de mes priorités. À court terme, c'est une grande priorité non seulement pour moi, mais également pour le premier ministre, pour le gouvernement et, j'en suis certain, pour chacun d'entre nous.
    Comme on l'a dit tantôt, les langues autochtones se perdent à une vitesse vertigineuse. Beaucoup trop de ces langues ont été perdues. Nous savons tous que cela a été causé en grande partie par d'anciens gouvernements, au cours de l'histoire, qui ont voulu carrément effacer ces langues par l'entremise de différents programmes, par exemple en arrachant les enfants à leur famille et en les empêchant de parler leur langue et de préserver leur culture dans les écoles résidentielles. On a mis en place tout un système pour que ces langues disparaissent.
    Beaucoup d'efforts ont été faits pour effacer ces langues, et nous devons maintenant mettre autant d'efforts, sinon plus, pour les promouvoir, les protéger et leur permettre de rayonner. Pourquoi devons-nous faire cela, monsieur Boissonnault? C'est parce que la langue représente qui nous sommes. Regardez ce que nous faisons maintenant: nous échangeons et nous communiquons, et c'est la langue qui nous permet de le faire. En parlant notre langue, nous transmettons notre culture, notre façon de voir les choses et notre histoire.
    Vous savez, quand ma famille est arrivée au Canada, je parlais juste espagnol. Mon père m'a dit que, puisque nous étions des réfugiés politiques, nous serions ici pour un bon bout de temps, et cela a été le cas. J'avais 8 ans, je parlais juste espagnol et je ne disais pas un mot de français ou d'anglais.
    Mon père est un amoureux du français; il jouait du Molière. Il me disait d'apprendre le français, d'apprendre également l'anglais si je le voulais, mais de préserver l'espagnol et ainsi préserver qui j'étais. Aujourd'hui, c'est un grand avantage de pouvoir parler ces trois langues. J'apprends l'italien, d'ailleurs, et si j'avais plus de temps, ce serait ma quatrième langue.
    En bref, monsieur Boissonnault, c'est une priorité absolue du gouvernement. Nous avons mis des programmes sur pied pour financer certains projets. C'est bien, mais ce n'est pas assez. Il faut un projet de loi robuste, et c'est ce qu'on va avoir sous peu.

  (1250)  

    [Le député s'exprime en espagnol.]
    [Le ministre s'exprime en espagnol.]

[Traduction]

    C'est bizarre de vous entendre parler en anglais, monsieur le ministre, mais dans l'esprit des langues officielles et du multiculturalisme, j'aimerais beaucoup vous poser une question.
    Mes langues maternelles étaient l'anglais et le français. Puis l'anglais a un peu pris le dessus, mais j'ai dû récupérer mon français lorsque je suis allé à l'université. Puis j'ai ajouté l'espagnol.
    En ce qui concerne le dossier du multiculturalisme et des gens de couleur, quelles sont les stratégies que le gouvernement et votre ministère comptent mettre en oeuvre pour participer à des projets financiers concernant la jeunesse noire du Canada?
    Comme vous le savez probablement, le dernier budget prévoyait un investissement de 19 millions de dollars pour remédier aux problèmes particuliers auxquels sont confrontés les Canadiens de race noire, et plus particulièrement, les jeunes Canadiens de race noire. Neuf de ces 19 millions de dollars sont directement consacrés à l'aide aux jeunes Canadiens noirs. C'est un programme extrêmement important pour cette communauté, et c'est une question que le gouvernement prend très au sérieux.
    Parallèlement, comme vous le savez aussi, nous organisons des séances de mobilisation contre le racisme. Gary a été très actif à cet égard. En ce qui concerne le multiculturalisme, Gary fait un excellent travail, et Andy fait également un travail extraordinaire sur le plan culturel. Ils sont tous les deux très engagés.
    Pour ce dossier particulier, je me suis rendu dans de nombreuses villes et provinces, et je poursuis ces visites. Nous avons parfois des conversations difficiles, mais elles sont sincères et ouvertes. C'est grâce à ces échanges que nous pouvons aller chercher les faits, ce qui nous permettra de faire les choses comme il faut et d'élaborer pour bientôt un projet de loi antiraciste de bonne tenue.

[Français]

    Cela a été un plaisir pour moi d'agir comme secrétaire parlementaire, mais c'est un plus grand plaisir encore de poser des questions directement au ministre.
    Vous le faites très bien, merci.

[Traduction]

    J'avais M. Yurdiga sur ma liste. C'est M. Shields?
    Oui.
    Dans ce cas, nous revenons à M. Shields, pour cinq minutes.
    Merci.
    Pour la gouverne de M. Boissonnault, l'histoire du secteur d'Amber Valley, au nord d'Edmonton, est sans doute une page importante de l'histoire des Noirs. Je ne sais pas si M. Boissonnault est au courant de ce récit, mais il fait partie de cette histoire.
    J'ai rencontré le conservateur en chef plusieurs fois. À la Cité parlementaire, l'un des problèmes que nous avons, c'est qu'à l'intérieur de l'édifice du Centre, la responsabilité du patrimoine appartient au conservateur en chef. À l'extérieur, la responsabilité appartient à d'autres. Les pièces historiques de l'édifice de l'Est relèvent de quelqu'un d'autre.
    Seriez-vous disposé, comme vous le disiez, à faire ce qu'il faut pour regrouper toutes ces responsabilités éparses et ainsi nous permettre de jouir des attributs patrimoniaux de la Colline d'une façon qui ne serait pas cloisonnée? Ils ne peuvent pas se parler entre eux ou faire quoi que ce soit à propos de l'extérieur ou de l'intérieur des différents édifices.
    Tout cela a directement à voir avec notre patrimoine en 2019 — les pièces restaurées de l'édifice de l'Est, les statues à l'extérieur de l'édifice, le suffrage dans de nombreuses régions du pays. Cela occupe une partie importante du terrain à l'extérieur.
    Est-ce que vous pourriez faire quelque chose pour coordonner cette partie de notre patrimoine, qui est maintenant cloisonnée? Je rappelle que le conservateur en chef à l'intérieur de l'édifice du Centre ne peut rien faire pour le patrimoine situé à l'extérieur de notre édifice.
    Monsieur Shields, nous essayons toujours, en tant que gouvernement, d'améliorer la situation de nos édifices patrimoniaux.
    Non seulement pour nous tous qui avons le privilège de travailler ici, mais aussi pour les générations futures, il est primordial que nous puissions rendre compte de faits historiques et montrer les choses de façon très concrète. Les édifices du Parlement, si j'ai bien compris, sont sous la responsabilité des services publics, des travaux publics. Nous, comme vous l'avez justement...
    Le patrimoine est sous la responsabilité du conservateur.
    Ce que vous avez mentionné tout à l'heure au sujet des monuments et des statues, c'est notre responsabilité, et c'est quelque chose que nous prenons très au sérieux.

  (1255)  

    C'est maintenant au tour de M. Yurdiga.
    Merci.
    Je vais revenir sur ma question de tout à l'heure au sujet de CBC/Radio-Canada. Ils sont un peu... Je ne devrais pas dire « louches », mais disons qu'ils ont l'air de contourner les règles et de ne pas rémunérer équitablement les créateurs. J'ai entendu parler de certaines violations de droits d'auteur.
    Votre ministère surveille-t-il ce que fait CBC/Radio-Canada?
    Ils relèvent du Parlement.
    Ils relèvent du Parlement. Est-ce qu'ils font état des procès contre les artistes?
    Comme tous les autres médias, CBC/Radio-Canada comprend l'importance que nous accordons à nos créateurs et à nos artistes, ainsi que l'importance de les rémunérer équitablement pour ce qu'ils font.
    Ces gens ne vendent pas des voitures ou des lunettes. Ils vendent leurs histoires et ils créent, et ils doivent être bien payés pour ce qu'ils font.
    Encore une fois, CBC/Radio-Canada est une société d'État. Je n'en suis pas le patron. Je ne vais pas la voir pour lui dire ce qu'elle doit faire.
    Vous savez, dans le secteur privé, il y a des sociétés, et elles doivent suivre les règles.
    La CBC/Radio-Canada doit aussi suivre les règles. Nous devons tous les suivre.
    Exactement, alors qui surveille CBC/Radio-Canada?
    C'est le Parlement. Et la société a sa propre structure. En fait, elle a un conseil d'administration qui...
    Avons-nous un rapport à ce sujet? Avez-vous des rapports sur les activités commerciales de CBC/Radio-Canada?
    Absolument. Nous avons régulièrement des rapports de toutes les sociétés d'État. Vous pouvez y avoir accès.
    Êtes-vous au courant des violations des droits d'auteur, de la rémunération...
    Je ne dis pas que CBC/Radio-Canada serait pire ou meilleure que n'importe qui d'autre, mais c'est la première fois que j'entends parler de cela.
    D'accord. Alors, allez-vous vous pencher là-dessus?
    Oui, je vais regarder...
    Il ne s'agit pas de s'attaquer à CBC/Radio-Canada. Nous voulons simplement nous assurer que les créateurs sont rémunérés équitablement. CBC/Radio-Canada devrait être le joyau de la couronne et bien faire les choses. Nous utilisons...
    C'est un joyau de la couronne.
    Oui, et nous devrions nous assurer qu'elle traite les créateurs équitablement.
    Mais la première étape...
    Comme elle reçoit chaque année plus d'un milliard de dollars de l'argent des contribuables, CBC/Radio-Canada devrait être un exemple, pas une exception. Tout ce que nous voulons, c'est nous assurer qu'elle fait les choses comme il se doit. À mon avis, c'est à vous de veiller à ce qu'elle suive les règles et à ce qu'elle soit le joyau de la Couronne en ce qui a trait aux façons de procéder. Il ne faut pas évoquer le plus petit dénominateur en disant: « Oui, c'est bien; c'est comme ce que tout le monde fait. » Elle devrait être tenue...
    Nous recherchons toujours ce qu'il y a de meilleur.
    CBC/Radio-Canada devrait être tenue de se conformer à des normes plus élevées, parce qu'elle reçoit l'argent des contribuables.
    Je pense que vous, les membres du Comité, avez un très grand rôle à jouer pour assurer que nous aurons une bonne révision du droit d'auteur et un bon projet de loi en la matière.
    Je tiens également à vous remercier pour tout le travail que vous faites à cet égard.
    D'accord. Changeons de sujet...
    Cela vous amène à la fin de votre temps de parole, car il s'agissait cette fois-ci d'un segment de cinq minutes.
    J'aimerais remercier chaleureusement le ministre d'être venu nous parler.
    Nous allons maintenant devoir nous acquitter de notre dernière tâche.
    Comme l'a annoncé le leader du gouvernement à la Chambre le jeudi 29 novembre, c'est aujourd'hui le dernier jour désigné de la période des crédits se terminant le 10 décembre, ce qui n'avait pas été prévu au moment où le Comité a accepté d'étudier le Budget supplémentaire des dépenses.
    Par conséquent, conformément au paragraphe 81(5) du Règlement, les crédits renvoyés au Comité permanent du patrimoine canadien sont réputés avoir fait l'objet d'un rapport à la Chambre le jeudi 29 novembre 2018, à l'ajournement de cette dernière. Cette étude a donc eu lieu conformément au paragraphe 108(2) du Règlement.
    Voilà qui met fin à cette réunion.
    La séance est levée.
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