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JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 132 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 21 février 2019

[Enregistrement électronique]

  (1050)  

[Traduction]

    Bonjour à tous et bienvenue à la réunion du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, tandis que nous commençons nos réunions sur les accords de réparation, la doctrine Shawcross et les discussions entre le Bureau du Procureur général et des collègues du gouvernement relativement au dossier de SNC-Lavalin. Il s'agit d'une réunion importante durant laquelle les Canadiens auront l'occasion d'entendre les réponses aux questions qui ont été posées.
    Je veux définir quelques règles en vue des réunions. Puisque nous voulons donner aux gens l'occasion de poser des questions de façon équitable et que des limites de temps sont établies, je veux m'assurer qu'on répond aux questions des gens. Les témoins auront le droit de répondre aux questions, mais leurs réponses doivent être brèves afin de ne pas gaspiller le temps qu'ont les gens pour poser leurs questions. Je vais surveiller de près les limites de temps. En tant que président, je suis habituellement assez souple à ce chapitre, mais, dans ce cas-ci, je vais faire respecter les trois périodes de six minutes afin que tout le monde ait une occasion équitable d'avoir son tour et de façon à ce que tout le monde puisse poser des questions.

[Français]

    Je demanderais à tous les témoins d'être assez succincts dans leurs réponses.
    Monsieur Fortin, c'est avec plaisir que nous vous accueillons aujourd'hui.

[Traduction]

    Aujourd'hui, dans le cadre de notre première réunion sur ce sujet, nous accueillons l'honorable David Lametti, ministre de la Justice et procureur général du Canada.

[Français]

    Nous accueillons également Mme Nathalie G. Drouin, sous-ministre de la Justice et sous-procureure générale du Canada.
    Nous allons maintenant entendre les présentations des témoins, en commençant par M. Lametti.
    Merci, monsieur le président. Bonjour chers collègues.
    J'aimerais remercier le Comité de me donner cette occasion privilégiée de m'adresser à vous aujourd'hui.
    Depuis les deux dernières semaines, à la suite de la publication initiale des allégations dans The Globe and Mail concernant la nature des conversations tenues entre l'ancienne ministre Jody Wilson-Raybould et le bureau du premier ministre, les événements ont rapidement évolué.

[Traduction]

    Même si beaucoup de renseignements restent incertains et qu'ils ont été obtenus, du moins en partie, grâce à des témoignages anonymes, il est devenu évident que les Canadiens méritent et exigent un examen public et transparent des événements en cause. C'est la raison pour laquelle je soutiens le processus entrepris par le Comité.

[Français]

    Après tout, l'un des piliers de notre démocratie est que les Canadiens et les Canadiennes aient confiance dans l'administration conforme et dans la surveillance de notre système de justice. Je sais que ce comité peut aider à préserver cette confiance.
    Il ne fait aucun doute que le procureur général du Canada est important dans la défense de la primauté du droit dans ce pays, et nous ne devons en aucun cas douter de l'engagement du gouvernement envers le rôle que le procureur général doit jouer.
    Cela dit, je voudrais prendre un instant pour dire quelques mots sur ce dont je peux et ne peux pas discuter aujourd'hui. Bien que les faits demeurent incertains, ceux mentionnés à ce jour soulèvent de sérieuses questions sur la manière dont sont prises les décisions d'engager une poursuite.

[Traduction]

    Nous devons fournir aux Canadiens la transparence qu'ils méritent, mais il faut le faire d'une façon qui préserve, plutôt que de miner le droit à une audience équitable dans les affaires actuellement en cours, l'intégrité du poste de directeur des poursuites pénales et, de façon plus générale, la primauté du droit dans notre pays.
    De plus, tout examen responsable doit tenir compte du fait que SNC-Lavalin fait actuellement l'objet de deux procédures juridiques liées aux enjeux associés au sujet de l'étude d'aujourd'hui.
    En d'autres mots, il faut reconnaître que la transparence sera seulement possible si nous pouvons aborder les conversations comme celles d'aujourd'hui et celles qui suivront d'une façon réfléchie et responsable.
    Voici ce dont je peux parler. Il y a trois domaines dont je pourrai parler aujourd'hui, et les trois reflètent les trois sujets cernés dans la motion adoptée par le Comité la semaine dernière: premièrement, la doctrine Shawcross ainsi que ses répercussions générales dans le dossier dont il est question; deuxièmement, les discussions entre le Bureau du procureur général et des collègues du gouvernement; et, troisièmement, les accords de réparation.
    Premièrement, je tiens à dire clairement au Comité que, même si je possédais une connaissance générale du dossier en tant que député de Montréal, je n'ai pas parlé au premier ministre ni à aucun membre de son Cabinet avant d'être nommé procureur général.
    Deuxièmement, je suis prêt à discuter des paramètres juridiques concernant le rôle du procureur général au Canada et de la façon dont ceux d'entre nous qui ont l'honneur et la responsabilité d'occuper le poste doivent interagir au sein du Cabinet. Selon moi, même si le procureur général doit pouvoir prendre des décisions exemptes de considérations ou de directives partisanes, il n'est pas non plus coupé de toute interaction. Il ne s'agit pas là d'une décision facile, quel que soit le procureur général, et la capacité du titulaire de ce poste d'obtenir les bonnes réponses au nom de tous les Canadiens n'est qu'améliorée grâce aux discussions et débats avec les autres membres du Cabinet, dont chacun possède sa propre expérience et ses propres points de vue.
    En ce qui concerne le Comité, il est important de comprendre ce que signifie cette relation quant aux choses pouvant ou non être protégées par le privilège juridique. Des conversations confidentielles ont seulement lieu entre un avocat et un client lorsque l'objectif de la conversation est d'obtenir ou de prodiguer des conseils juridiques et que l'intention était que la communication soit confidentielle.
    Selon moi, il y aura de nombreuses situations où une conversation entre un procureur général et ses collègues du Cabinet n'auront pas nécessairement lieu dans le contexte du secret professionnel entre l'avocat et ses clients et, par conséquent, de telles conversations ne seront pas protégées par ce secret. Plus particulièrement, la doctrine Shawcross prévoit que, lorsque c'est le procureur général et non le Cabinet qui est le décideur ultime, le procureur peut consulter ses collègues au sein du Cabinet. Les conversations de cette nature ne sont pas protégées fondamentalement par le secret professionnel. Il y a toute une gamme d'avis tant du côté de la jurisprudence que dans le milieu universitaire quant aux aspects de ces conversations qui peuvent être visés, justement, par le secret professionnel.
    Permettez-moi d'être très clair. Je ne dis pas qu'il faut à tout prix lever de façon globale le secret professionnel sans tenir compte des détails et des répercussions possibles sur des procédures juridiques en cours, comme certains membres de l'opposition ont suggéré de le faire. Ce que je dis, cependant, c'est qu'un débat stratégique entre le procureur général et un collègue du Cabinet concernant une décision qu'il revient au procureur général de rendre n'est pas visé intrinsèquement par le secret professionnel, peu importe la nature des autres protections pouvant s'appliquer, selon les faits de l'affaire.
    Enfin, si cela reste utile pour le Comité, je crois que nous pouvons discuter des accords de réparation de façon générale. Il pourrait être utile pour les Canadiens de comprendre certaines des raisons pour lesquelles le Canada a mis un tel mécanisme en place, pourquoi d'autres pays, comme les États-Unis et le Royaume-Uni, les utilisent aussi, et de quelle façon ils fonctionnent concrètement. Je peux aussi parler des genres de situations où un accord de réparation pourrait être une solution accessible.
    Dans la même veine, je peux parler du mécanisme juridique qui permet au procureur général, plutôt qu'au directeur des poursuites pénales, d'assumer la responsabilité relativement à une décision précise associée à une poursuite précise. Sur ce point, je crois qu'il est important de souligner que le régime législatif est conçu pour protéger la primauté du droit ainsi que les processus décisionnels en matière de poursuite en s'assurant que toute décision du procureur général d'adopter une telle mesure soit transparente pour le public canadien et fasse l'objet d'une publication dans la Gazette du Canada.
    Voici maintenant ce dont je ne peux pas parler. Je crois qu'une discussion sur ces trois aspects constituera une pleine réponse à la motion de la semaine dernière, en plus d'un effort pour aider le Comité dans le cadre de son examen des allégations en cause. Cependant, comme je l'ai déjà mentionné, je tiens à dire clairement et d'avance qu'il y a aussi certains sujets où selon moi, il ne serait pas responsable de ma part de me lancer dans des spéculations, d'exprimer un avis ou de formuler d'autres commentaires pouvant miner la conduite de poursuites en cours ou l'institution du procureur général.

  (1055)  

[Français]

    Permettez-moi d'être plus précis. Premièrement, je ne serai pas en mesure aujourd'hui de spéculer sur les conversations auxquelles je n'ai pas participé. Je pense qu'il est pertinent que je parle du fait que la procureure générale précédente n'a donné aucune instruction dans le dossier de SNC-Lavalin ni dans le cadre de toute autre poursuite particulière, car rien n'a été publié dans la Gazette du Canada. Cependant, je ne suis au courant d'aucun détail des conversations tenues entre elle et le premier ministre ou son bureau, hormis ce que le premier ministre a déclaré publiquement.
    Deuxièmement, comme je l'ai mentionné précédemment, je ne serai pas en mesure de parler de questions couvertes par le privilège du secret professionnel de l'avocat. Comme tous les avocats, le procureur général a l'obligation légale et éthique de protéger la confidentialité des communications avocat-client. Pour tout procureur général, ces obligations sont d'autant plus cruciales qu'elles touchent à l'intérêt public. De même, je ne parlerai pas de questions couvertes par le privilège relatif au litige. Ce sont des questions qui, si elles étaient divulguées, compromettraient la capacité du gouvernement ou du directeur des poursuites pénales de poursuivre toute procédure judiciaire en cours ou envisagée.
    Troisièmement, je ne peux pas parler de sujets discutés au Cabinet ou avec mes collègues du Cabinet. Le Canada est un pays ayant une longue tradition de préservation de la confidentialité de ces discussions.
    Quatrièmement, je ne peux parler d'aucune affaire actuellement devant les tribunaux. Cette restriction, communément appelée « convention relative aux affaires en instance », est essentielle pour préserver l'indépendance constitutionnelle du processus judiciaire. En conséquence, je ne peux répondre à aucune question relative à une procédure en cours. Cela inclut toute discussion en ma qualité de procureur général sur le bien-fondé juridique de procéder, ou non, à un accord de réparation avec SNC-Lavalin.

  (1100)  

[Traduction]

    Enfin, en plus d'être ministre de la Justice et procureur général, je reste un avocat, une profession que j'ai fait de mon mieux pour honorer au cours des 25 dernières années, initialement en tant que greffier à la Cour suprême du Canada, puis en tant que professeur de droit de la faculté de droit de l'Université McGill.
    Je continue de prendre ces obligations très au sérieux. Par conséquent, je ferai de mon mieux pour m'assurer que mes réponses aujourd'hui sont le plus transparentes et franches possible tout en faisant bien comprendre les obligations de confidentialité que, selon moi, je dois à mon client, le Canada.
    Merci.
    Je vais maintenant céder la parole à ma sous-ministre.

[Français]

    Madame Drouin, vous avez la parole.
    Bonjour, monsieur le président et membres du Comité.

[Traduction]

    Avant de répondre à vos questions, je voudrais dire que mon objectif aujourd'hui, tout comme celui de mon ministre, M. Lametti, est d'être franche et transparente avec vous. Je vous fournirai le plus d'informations possible dans la mesure où je peux le faire.
    Sur le plan logistique, vous pouvez poser vos questions dans la langue officielle de votre choix, et je ferai de mon mieux pour vous répondre dans la même langue. Cependant, vous remarquerez que je suis plus à l'aise dans ma langue maternelle, et je répondrai en français si j'estime pouvoir être plus précise ainsi.

[Français]

    J'aimerais commencer par décrire mon double rôle de sous-ministre de la Justice et sous-procureure générale du Canada, un poste que j'occupe depuis juin 2017. Dans le cadre de ce double rôle, j'appuie le ministre de la Justice et procureur général du Canada dans l'exercice de ses responsabilités. Mes fonctions incluent la présentation de conseils juridiques, la coordination de conseils juridiques qui sont donnés par mon ministère, l'appui à l'élaboration de textes législatifs et de politiques qui relèvent du portefeuille de la justice ainsi que la représentation officielle de la Couronne dans toutes les procédures civiles qui mettent en cause le gouvernement du Canada. Ces fonctions s'appuient sur un certain nombre de principes, que le ministre Lametti vient d'énoncer et qui font également l'objet de commentaires publics.

[Traduction]

    Tous les jours, à titre de sous-ministre et de sous-procureure générale, je participe à des discussions qui sont protégées par le secret professionnel de l'avocat à l'égard desquelles j'ai aussi un devoir de confidentialité. Ces communications peuvent aussi être considérées comme des documents confidentiels du Cabinet. Parfois, un, deux ou même les trois principes s'appliqueront à ces communications, ou parfois aucun d'eux ne s'appliquera. Tout dépend entièrement des faits.
    J'aimerais maintenant prendre un moment pour vous parler du Service des poursuites pénales du Canada, qui est distinct du ministère de la Justice.
    Le procureur général du Canada est aussi appuyé par la directrice des poursuites pénales, la DPP, qui est également une sous-procureure générale du Canada. La DPP est responsable de lancer et de mener des poursuites criminelles fédérales au nom de la Couronne. Le rôle de la DPP est séparé et distinct du mien.

  (1105)  

[Français]

     Bien que la directrice des poursuites pénales, ou DPP, soit responsable de la conduite des poursuites criminelles fédérales, je peux appuyer le procureur général et lui fournir des avis juridiques dans l'exercice des pouvoirs qui sont prévus à la Loi sur le directeur des poursuites pénales. Un exemple récent est l'appui que le ministère a fourni au procureur général en lien avec la directive portant sur la conduite de poursuites relatives aux cas de non-divulgation du VIH.
    Je n'ai aucune implication ni aucun rôle dans les poursuites criminelles. En fait, je ne suis au courant d'aucun élément de preuve en ce qui concerne ces poursuites. Il s'agit vraiment du rôle de la DPP. Dans mon rôle de fonctionnaire et d'avocate, je soutiens mon ministère et je m'efforce de fournir aux décideurs gouvernementaux tous les conseils professionnels et non partisans dont ils ont besoin pour s'acquitter de leurs fonctions.

[Traduction]

    En gardant à l'esprit mon double rôle de sous-ministre et de sous-procureure générale du Canada et compte tenu de l'ensemble de mes fonctions et obligations que je viens de vous décrire, j'aimerais demander au Comité de faire preuve de compréhension à l'égard de l'information que je pourrai partager.
    Cela dit, je suis disposée à répondre à vos questions et je vous donnerai les meilleures réponses possible à la lumière de mes obligations.
    Merci.
    Merci beaucoup à vous deux de vos commentaires.
    La première série de questions du Comité sera de six minutes par intervenant. Nous allons commencer par M. Cooper.
    Merci, monsieur le président.
    Avant de poser mes questions de fond, j'aimerais que les témoins soient assermentés conformément au paragraphe 10(3) de la Loi sur le Parlement du Canada.
    Monsieur Cooper, cela exige l'accord du Comité. Nous ne l'avons pas fait dans le cadre des travaux du Comité. Nous avons regardé, et nous ne l'avons jamais fait depuis 25 ans, mais j'ai demandé au greffier de fournir une explication.
    Nous allons arrêter le chronomètre.
    Nous allons demander au greffier d'expliquer la différence entre un témoin qui est assermenté et un témoin qui n'est pas assermenté, parce qu'un témoin doit tout de même dire la vérité.
    Monsieur Girard.

[Français]

    Effectivement, monsieur le président, vous avez tout à fait raison.
    Peu importe si un témoin est assermenté devant un comité parlementaire ou s'il fait une affirmation solennelle. Dans les deux cas, le témoin doit absolument dire la vérité lorsqu'il comparaît devant un comité. La seule chose que peut changer l'assermentation est la situation suivante: si un comité a la preuve qu'un témoin lui a menti, il pourrait en saisir la Chambre, laquelle pourrait alors décider de retirer la protection accordée au témoin en vertu du privilège parlementaire. Le retrait de cette protection pourrait alors donner lieu au dépôt d'une accusation de parjure visant le témoin. Cela étant dit, cette situation ne s'est jamais produite en quelque 150 ans.
    En résumé, monsieur le président, un témoin doit dire la vérité, qu'il soit ou non assermenté. S'il est assermenté, cependant, le fait de se parjurer peut avoir des conséquences juridiques.

[Traduction]

    Afin que ce soit bien clair, on peut être reconnu coupable d'outrage au Parlement qu'on ait été assermenté ou non. La seule différence, c'est l'accusation de parjure si le Parlement...
    C'est vrai.
    Le Comité est au courant. Je crois que de façon à ce que M. Cooper ne soit pas... Sauf si vous voulez un long débat, le Comité peut-il tout simplement voter là-dessus? Acceptez-vous?
    C'est parfait.
    Parfait.
    La motion de M. Cooper...
    J'aimerais que ce soit un vote par appel nominal.
    Bien sûr.
    M. Cooper propose que les témoins soient assermentés. Je vais demander au greffier de procéder à un vote par appel nominal. Si vous votez oui, vous êtes en faveur de la motion selon laquelle les témoins doivent être assermentés. Si vous votez non, vous votez contre l'assermentation des témoins.
    (La motion est rejetée par 5 voix contre 4.)
    Le président: Monsieur Cooper, nous reprenons votre intervention. Vingt secondes sont écoulées.
    Merci.
    J'imagine que le fait que les députés libéraux aient voté contre l'assermentation des témoins afin qu'ils témoignent sous serment en dit long.
    Je vais commencer par M. Lametti.
    Merci d'être là. Pour commencer, avez-vous discuté de votre témoignage avec quiconque avant de venir à la réunion d'aujourd'hui?
    J'en ai discuté avec mon équipe. Les autres discussions que j'ai eues sont visées par le secret professionnel.
    Merci.
    Je crois vous avoir entendu dire dans votre déclaration préliminaire que, avant d'être nommé au sein du Cabinet, vous n'aviez pas discuté des poursuites contre SNC-Lavalin avec le premier ministre ni avec quiconque au sein du CPM. C'est exact?

  (1110)  

    C'est exact.
    Vous n'en avez pas parlé avec Gerald Butts, Mathieu Bouchard ou Katie Telford.
    C'est exact.
    D'accord. Merci.
    Avant d'être nommé au Cabinet, lorsque vous étiez député et secrétaire parlementaire, avez-vous rencontré à un moment donné des représentants de SNC-Lavalin?
     Je crois que le registre des lobbyistes révèle que j'ai rencontré des représentants de SNC-Lavalin en mai 2017. Je dois admettre que je ne me rappelle plus très bien cette réunion. Comme vous le savez, en tant que secrétaire parlementaire du ministre de l'Innovation, j'ai dû interagir avec des gens de partout au pays. J'ai rencontré des gens dans mon bureau et partout au pays. Je crois que l'entrée précise du registre des lobbyistes indique que les sujets mentionnés concernaient tous des dossiers d'ISDE et qu'aucun enjeu lié à la justice n'était associé à cette entrée précise du registre me concernant.
    D'accord. Merci, monsieur le ministre.
    Permettez-moi de vous rafraîchir la mémoire. La réunion a bel et bien eu lieu en mai 2017: le 30 mai 2017. Selon le registre des lobbyistes, les sujets incluaient l'approvisionnement gouvernemental, l'industrie et l'infrastructure. Vous rappelez-vous qui vous avez rencontré?
    Non... Je crois avoir rencontré Neil Bruce, mais, encore une fois, je ne me souviens pas très bien de cette réunion.
    Donc...
    Comme je l'ai dit, j'étais l'un des députés qui rencontraient le plus de lobbyistes en 2017. En raison de mon rôle, de grandes entreprises, de petites entreprises et des universités de partout au Canada faisaient du lobbying auprès de moi.
    Je comprends la situation, monsieur Lametti, mais avez-vous rencontré, en fait, Neil Bruce, Neil Bruce étant, bien sûr, le chef de la direction de SNC-Lavalin. C'est exact?
    C'est exact.
    Donc, c'est une assez grosse pointure. Ça doit vraiment vous rafraîchir la mémoire d'avoir...
     En fait, ça ne m'aide pas à m'en souvenir. Comme je l'ai dit, je crois que le Hill Times a déclaré que j'ai été le député le plus sollicité par des lobbyistes en 2017, plus que mon ministre, le ministre Bains, à l'époque. Encore une fois, rencontrer des intervenants faisait partie du rôle du ministre de l'Innovation...
    Le gouvernement [Inaudible]
    Eh bien, de toute façon, je comprends que...
    ... partout au Canada, il revient aux lobbyistes d'inscrire leur nom sur la liste, comme il l'a fait, dans ce cas-là, ainsi que les sujets abordés.
    J'invoque le Règlement.
    Quelqu'un invoque le Règlement.
    Monsieur le président, selon la convention, la durée de la réponse ne doit-elle pas correspondre à la durée de la question?
    Ce n'est pas quelque chose qui a été soulevé précédemment au sein du Comité, mais j'ai demandé aux témoins d'être respectueux afin que les membres profitent de leur intervention, et je vais m'efforcer de continuer à procéder de cette façon. En outre, on s'assurera que M. Cooper bénéficie du temps qui lui est alloué.
    D'accord. Merci.
    Monsieur Lametti, il est mentionné qu'un des sujets abordés était l'approvisionnement gouvernemental. Bien sûr, ce sujet est lié directement à l'enjeu qui nous occupe relativement aux poursuites contre SNC-Lavalin et l'incidence que tout cela aura sur la capacité de l'entreprise de soumissionner pour obtenir des contrats gouvernementaux.
    Permettez-moi de vous poser la question en termes simples: avez-vous discuté d'accusations de fraude et de corruption impliquant SNC-Lavalin avec M. Bruce?
    Encore une fois, je ne me rappelle pas très bien la réunion. Comme je l'ai dit, c'est aux lobbyistes de déclarer...
    Monsieur Lametti, je comprends votre réponse. Vous dites ne pas vous souvenir. D'accord, mais j'imagine qu'un membre de votre personnel vous accompagnait.
    J'avais l'habitude d'être accompagné soit de mon adjoint au secrétaire parlementaire, soit d'un membre de mon personnel de la Colline durant les réunions. Nous n'avons pas encore réussi à déterminer auprès d'ISDE qui m'accompagnait à la réunion. Nous pourrons vous fournir l'information plus tard, mais je peux vous dire que...
    Je présume, monsieur Lametti...
    Je peux vous dire...
    Oui.
    ... monsieur Cooper, qu'il n'y a pas eu — je m'en souviens — d'importante mesure de suivi découlant de cette réunion non plus.
    Monsieur Lametti, j'imagine que vos employés prennent des notes.
    Soit l'adjoint au secrétaire parlementaire, soit l'employé.
    Allez-vous tenter de déterminer qui vous a accompagné durant cette réunion et de remettre au Comité toute note prise relativement à cette réunion?
    Je vais tenter de découvrir qui m'accompagnait à la réunion ou, en fait, si la réunion a vraiment eu lieu, parce que, souvent, comme vous le savez, les lobbyistes inscrivent dans le registre de lobbying...
    D'accord. Merci.
    Mais je ne m'engage pas...
    Vous avez répondu à ma question. Vous allez faire ces deux choses.
    Non, je ne m'engage pas à faire les deux choses. Je vais me renseigner pour savoir si je peux produire les notes.
    Merci.
    Monsieur Lametti, immédiatement après les révélations du Globe and Mail relativement à ces très graves allégations, vous avez été cité ainsi par CTV — je traduis librement —: « cependant, assurément, de ce que j'ai vu et de ce que le premier ministre a dit, je peux confirmer aux Canadiens que rien d'inapproprié ne s'est produit. »
    Qui vous a demandé de dire ça?
    Cette citation date du 8 février, si je ne m'abuse, le jour après les révélations. À ce moment-là, il n'y avait que des sources anonymes et des informations non fondées dans le Globe and Mail, et le premier ministre avait nié sans équivoque que quoi que ce soit de mal s'était produit.

  (1115)  

    Mais vous avez dit « de ce que j'ai vu ».
    C'est précisément la réponse: « de ce que j'avais vu ».
    Merci beaucoup.
    Le prochain intervenant est M. Fraser.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, merci d'être là.
    Madame Drouin, merci de vous joindre à nous aujourd'hui.
    Monsieur le ministre Lametti, est-il approprié pour le premier ministre et des fonctionnaires de parler au ministre de la Justice et au procureur général d'affaires et de poursuites en cours et est-ce quelque chose que vous faites d'ordinaire dans votre rôle?
    Absolument. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, le procureur général ne vit pas en vase clos. Essentiellement, selon la doctrine Shawcross, un procureur général peut parler avec ses collègues du Cabinet d'une diversité de choses différentes pouvant être liées aux décisions qu'il doit prendre dans des dossiers précis.
    Ce que dit clairement la doctrine Shawcross, c'est que, après de telles discussions, lorsque le procureur général joue son rôle de procureur général, seules les considérations appropriées qui lui appartiennent et qu'il a à l'esprit étayeront ses décisions.
    Y a-t-il des considérations temporelles quant au moment où il serait inapproprié de discuter avec le premier ministre ou d'autres fonctionnaires ou collègues du Conseil des ministres dans le cadre de poursuites?
    Tout dépend des moments où ont lieu les discussions et où ont cours les poursuites, mais je ne peux pas vous dire, sans autres éléments de contexte, ce qui serait approprié ou inapproprié.
    Permettez-moi de vous poser la question suivante: si le directeur des poursuites pénales décide de procéder dans une cause et que le procureur général peut encore avoir l'option de demander au procureur, par exemple, d'engager des négociations ou de conclure un accord de réparation, mais que, pour ce faire, un avis public devrait paraître dans la Gazette du Canada, serait-il approprié pour le premier ministre et des fonctionnaires de discuter du dossier avec le procureur général au moment d'envisager de donner une telle directive à un procureur?
    Encore une fois, je crois que la doctrine Shawcross s'appliquerait.
    Ces genres de conversations seraient appropriés pour un procureur général qui envisage de demander ou non un accord de réparation, mais c'est au procureur général de prendre la décision en tant que telle.
    Monsieur le ministre, avez-vous déjà subi des pressions inappropriées du premier ministre ou de quiconque au sein du CPM relativement à des accords de réparation ou de tout autre enjeu juridique?
    Non.
    En ce qui concerne les types de conversation pouvant avoir lieu entre le premier ministre, son personnel ou des collègues au sein du Cabinet, vous attendriez-vous à ce que de telles conversations soient plutôt musclées au moment d'envisager l'application des politiques et de la loi?
    J'ai déclaré de façon générale que, d'après ce que j'ai compris, la doctrine Shawcross permet de telles conversations. Je dois dire que, si j'étoffe trop ma réponse, je me retrouverai dans une situation où je formule des spéculations quant à ce que d'autres personnes pourraient faire dans des circonstances similaires. Par souci de prudence, je crois qu'il ne serait pas sage pour moi de spéculer sur les types de conversation ou les perceptions que d'autres personnes pourraient avoir.
    Je peux seulement parler de ce que je pourrais faire, et, assurément, si j'avais l'impression de me faire forcer la main, je prendrais un certain nombre de mesures dans une telle situation, mais je ne veux pas et ne devrais pas spéculer quant à ce que d'autres personnes pourraient bien faire.
    D'accord.
    Madame Drouin, puis-je vous poser une question?
    En ce qui a trait au rôle du directeur des poursuites pénales et de votre rôle de sous-ministre, vous avez parlé du fait qu'il y a définitivement une distinction entre les deux rôles et les deux fonctions que vous assumez. Pouvez-vous nous expliquer de quelle façon ces rôles peuvent interagir dans le cadre d'une poursuite quelconque?
    En fait, c'est vraiment le DPP qui a le pouvoir discrétionnaire et la responsabilité de prendre des décisions relativement à des enquêtes précises quant à savoir s'il faut porter des accusations ou non. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, je n'ai pas accès... Ou je ne suis au fait d'aucun élément de preuve lié à une enquête précise.
    Mon rôle est de prodiguer des conseils juridiques au sujet des lois, et je peux prodiguer des conseils juridiques au procureur général pour m'assurer qu'il comprend de quelle façon le DPP fonctionne. Je peux aussi lui prodiguer des conseils s'il décide d'exercer l'un de ces droits.

  (1120)  

    Merci.
    Monsieur le ministre Lametti, pour revenir au caractère approprié des conversations avec des collègues du Cabinet, j'imagine que, jusqu'à présent, dans votre rôle de ministre de la Justice et de procureur général, vous avez tenu certaines de ces conversations, et il s'agirait là d'événements tout à fait ordinaires liés à votre poste.
    Absolument. Tout cela fait partie du processus de familiarisation, pour ainsi dire, avec les dossiers sur lesquels je dois travailler dans mon rôle de procureur général.
    Merci beaucoup.
    J'ai terminé de poser mes questions.
    Merci beaucoup, monsieur Fraser.
    Monsieur Rankin.
    Bienvenue, madame la sous-ministre, et monsieur le procureur général.
    Ma première question vous est destinée, monsieur le procureur général.
    Hier, dans un événement sans précédent, l'ancienne procureure générale s'est levée à la Chambre des communes et a demandé le droit de donner sa version des faits.
    Comme, dans sa lettre de démission, elle a fait allusion à l'importance de l'indépendance du procureur général lorsqu'il s'acquitte de sa fonction de poursuite, et elle a aussi fait allusion à cela dans un autre contexte, je veux savoir si on lui permettra de donner sa version des faits.
    Nous faisons de notre mieux.
    Je fais de mon mieux en tant que procureur général pour trouver une façon de le faire, de façon, bien sûr, à faire preuve de transparence à l'intention des Canadiens et d'équité à l'intention de l'ancienne procureure générale. Cependant, il ne faut pas non plus compromettre toutes les autres choses que j'ai mentionnées d'entrée de jeu — le litige, le secret professionnel, plus particulièrement — parce qu'il y a un litige en cours entre la directrice des poursuites pénales et l'entreprise en question.
    Comme elle l'a déclaré, la question du secret professionnel de l'avocat est particulièrement complexe et stratifiée.
    D'accord. Eh bien permettez-moi de...
    Nous essayons de démêler tout cela du mieux que nous pouvons.
    Permettez-moi de vous poser une question à ce sujet et d'aborder cet enjeu précis.
    Un réputé avocat de Toronto, Andrew Roman, a écrit ce qui suit dans un blogue influent, et je veux savoir si vous êtes d'accord:
Personne au sein du gouvernement n'avait le droit de donner à la procureure générale des directives lorsqu'elle ou la DPP participaient à une poursuite. Puisqu'elle ne pouvait pas suivre les directives d'un quelconque client, il ne peut pas y avoir de relation client-avocat. Et, évidemment, puisqu'il n'y a pas une telle relation, il ne peut pas y avoir de secret professionnel de l'avocat.
Il n'y a aucune raison valide pour laquelle le premier ministre ou ses hauts fonctionnaires auraient eu une telle conversation avec Jody Wilson-Raybould. La seule raison pour laquelle ces derniers auraient pu discuter de sa décision liée aux poursuites aurait été pour l'encourager à la modifier sans avoir l'air de le faire. Un tel comportement mine la primauté du droit.
    Êtes-vous d'accord?
    La question du secret professionnel de l'avocat et la question de savoir s'il s'applique à toute situation ou encore la question de savoir si on y a renoncé dans certaines circonstances précises font partie des questions générales auxquelles je dois répondre en tant que procureur général. Je ne peux pas me prononcer sur tout cela, comme vous le savez bien en tant qu'avocat, sans compromettre moi-même le secret professionnel.
    Vous êtes avocat. Je suis avocat, mais il est possible que la procureure générale n'ait pas été une avocate au moment de l'incident. C'est-à-dire que nous avons maintenant appris que, selon la profession juridique, elle n'était pas avocate lorsque la décision a été prise de maintenir les poursuites contre SNC-Lavalin pour fraude et corruption.
    Le doyen de la faculté de droit de l'Université d'Ottawa, Adam Dodek, a écrit un livre intitulé Solicitor-Client Privilege et a fait valoir ce qui suit:
En vertu de la doctrine actuelle, il est difficile d'en venir à une autre conclusion que celle selon laquelle les conseils juridiques prodigués par un procureur général qui n'est pas avocat ne sont pas visés par le secret professionnel, parce qu'un procureur général qui n'est pas un avocat ne peut pas être considéré comme un « conseiller juridique professionnel ».
    Qu'en pensez-vous?
    Je vais m'abstenir, par souci de prudence, de donner un avis à ce sujet, parce que, encore une fois, cela fait peut-être partie d'un avis que j'aurai à formuler.
    Qui est le client?
    Vous avez mentionné que c'est quelque chose que vous devez à votre client, le Canada, en tant que procureur général. Je veux savoir... si le secret professionnel de l'avocat s'applique, ce qui, aux yeux de bon nombre d'avocats, n'est pas le cas, ici, qui est le client?
    Feu le juge Rosenberg de la Cour d'appel de l'Ontario a dit que, au bout du compte, le client du procureur général est la Reine, et c'est parce qu'elle représente la primauté du droit.
    Êtes-vous d'accord avec cette affirmation et, par conséquent, qui peut renoncer au privilège dans de telles circonstances si, bien sûr, un tel privilège existe?
    Le client est le Canada. La question de renoncer au privilège, comme vous le savez très bien en tant qu'avocat, est une question très complexe dans de tels cas et, encore une fois, il est de ma responsabilité de maintenir ce secret...

  (1125)  

    C'est donc vous qui décidez? Est-ce vous qui décidez s'il y a renonciation?
    Je dis que, en raison du secret professionnel de l'avocat qui m'est imposé, je ne peux pas répondre à cette question.
    Qui peut y répondre?
    Encore une fois, pour les raisons mentionnées, c'est une question à laquelle je ne peux pas répondre ici.
    Et il n'y a peut-être donc personne pouvant renoncer au privilège.
    Vous pouvez inviter M. Dodek — et je crois que vous l'avez fait — pour connaître son avis. Vous pouvez inviter d'autres experts. Vous pouvez inviter l'ancien juge Rosenberg.
    Il est décédé.
    Oh, c'est un problème.
    Vous pouvez inviter d'autres experts. Je suis actuellement le procureur général du Canada. Actuellement, comme le premier ministre l'a dit, je le conseille sur ces enjeux, et je suis donc visé par le secret professionnel de l'avocat. Je ne peux tout simplement pas répondre à la question.
    J'admets cela, mais lorsqu'on entend constamment parler de la renonciation du privilège, si cela existe, on ne nous dit jamais qui peut y renoncer. Est-ce le premier ministre? De qui s'agit-il?
    Encore une fois, c'est une question très complexe aux multiples couches.
    Une question aux multiples couches, mais qui semble fondamentalement revenir au même.
    Puis-je poser une dernière question?
    Vous verrez dans la littérature universitaire qu'il y a un différend...
    Oui.
    ... alors je ne peux pas me prononcer à ce sujet.
    Puis-je vous poser une dernière question?
    Il vous reste 45 secondes. C'est votre dernière question.
    Vous avez aussi mentionné la confidentialité des délibérations du Cabinet. Peut-on l'invoquer relativement à des conversations entre le procureur général et les représentants du Cabinet du premier ministre, comme M. Butts et d'autres? Cette notion existe-t-elle dans un tel contexte?
    Encore une fois, comme vous le savez en tant qu'avocat, on m'a demandé de donner mon avis juridique. C'est un continuum, comme d'autres écrivains du domaine juridique ont décrit le secret professionnel de l'avocat, et ce dont on parle fait partie de ce continuum. Je ne peux tout simplement pas répondre à cette question.
    Merci.
    Monsieur Boissonnault.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, merci d'être là aujourd'hui.
    Vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire l'importance des accords de réparation et l'existence d'un tel cadre, ici, au Canada. Pouvez-vous nous dire pourquoi un cadre relatif aux accords de réparation est nécessaire au Canada et pourquoi il a été enchâssé dans la loi?
    Certainement, je peux le faire.
    Les accords de réparation sont une autre façon de régler des comportements criminels graves. C'est un autre outil auquel a accès notre directeur des poursuites pénales pour punir les comportements criminels graves sans mettre en danger d'innocentes tierces parties, comme des employés, et des retraités et d'autres tierces parties comme des entrepreneurs et des sous-traitants pouvant travailler dans le cadre de ces divers projets. Cette méthode ne remet pas en question la viabilité d'une entreprise en tant que telle, mais elle permet plutôt de poursuivre ceux qui doivent l'être, de veiller à ce que l'entreprise paie de très lourdes sanctions et d'assurer une surveillance au sein de l'entreprise afin que l'aspect criminel de sa culture puisse être évacué.
    C'est quelque chose de très important. Nos alliés l'utilisent, les États-Unis et le Royaume-Uni. L'Australie envisage de le faire. C'est un élément important de l'arsenal permettant de combattre les importants cas de fraude à l'échelle internationale.
    Je crois que c'est très intéressant que vous mentionniez les tierces parties. Je vous en remercie.

[Français]

    J'aimerais simplement clarifier vos commentaires du début.
    En ce qui concerne le dossier de SNC-Lavalin, est-il déjà arrivé, avant que vous soyez nommé procureur général, que le Cabinet du premier ministre ou des agents du Cabinet s'adressent à vous?
    Avant d'être nommé, non. J'avais une connaissance générale de la situation, étant donné que je suis un député montréalais et que les journaux en parlaient. Comme cela a été souligné déjà, j'ai participé à une réunion avec des lobbyistes en mai 2017, mais à part cela, non.
    Dans le cadre de vos fonctions de procureur général, n'avez-vous jamais ressenti de pressions inappropriées reliées à ce dossier?
    Jamais.
    Merci.
    Pendant la période des questions, mercredi dernier à la Chambre des communes, notre collègue conservatrice Mme Lisa Raitt vous a posé la question suivante, que je cite à partir du hansard:
Je tiens à demander au député, qui vient de Montréal, comme par hasard, s'il a pris une décision dans le dossier de SNC-Lavalin.
     À votre avis, que voulait-elle signaler par ce commentaire?
    Franchement, je n'en ai aucune idée. Je suis fier d'être Montréalais, et je le suis par choix. J'ai choisi Montréal. C'est à Montréal, à l'Université McGill, que j'ai reçu une formation bilingue et bijuridique, ce dont je suis très fier. Il y a une trentaine d'années, je me suis installé à Montréal. J'ai eu mes enfants à Montréal et c'est dans cette ville que je les ai fait instruire. Il est complètement fou de suggérer qu'un député de Montréal ne peut pas agir comme procureur général, peu importe la situation, mais surtout en l'espèce. Je trouve cela choquant. Je suis fier d'être Montréalais, Québécois et Canadien et fier de vivre le fait français dans une ville très dynamique comme Montréal.

  (1130)  

    Je vous félicite. Pour ma part, je suis Franco-Albertain, et ce n'est qu'à mon arrivée sur le Campus Saint-Jean que j'ai pu commencer à parler français. Je suis fier qu'un francophile du Québec occupe ce poste.
    Monsieur le ministre, saviez-vous que, dans toute l'histoire du Canada et du Parti conservateur, ce dernier n'a nommé que trois ministres de la Justice qui venaient du Québec? Je pense qu'il est important de consigner ce fait.

[Traduction]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président. En quoi est-ce pertinent?
    Revenons à des questions précises sur le sujet qui nous occupe.
    En ce qui concerne les accords de réparation, pouvez-vous en dire plus sur les genres de tierces parties qui pourraient être touchées si on n'avait pas accès à des accords de réparation au Canada?
    Selon la nature de l'entreprise, il est évident que les employés pourraient être touchés. Disons, dans un scénario quelconque, que l'entreprise cesse d'exister. Les employés perdront leur emploi. Les fonds des retraités sont menacés. C'est assurément un enjeu stratégique dont il faut tenir compte. Il y a les tiers fournisseurs, qui sont innocents, et qui vendent peut-être des matériaux ou des services à l'entreprise. Il y a les sous-traitants selon le contexte et l'industrie.
    Toutes ces personnes sont innocentes. Aucune n'a participé au genre de comportement criminel en cause. Souvent, d'autres personnes au sein de l'entreprise... Les entreprises peuvent être de grandes entités, et seulement quelques personnes peuvent participer aux genres d'activités criminelles ciblées par des accords de réparation.
    C'est logique, comme nos partenaires, le Royaume-Uni et les États-Unis, nous l'ont montré, et il y avait là une lacune. Nous avons mené des consultations relativement à ce projet de loi précis, de larges consultations, y compris avec Transparency International et d'autres organisations, qui sont venues nous dire que c'était la marche à suivre. Il s'agit d'un outil très important auquel nous avons accès pour punir la criminalité corporative sans mettre en danger d'innocentes tierces parties.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Merci. Vous êtes rendu à six minutes.
    Nous allons maintenant commencer un deuxième tour de questions.
    Pour le deuxième tour de questions, il y aura six minutes pour les libéraux, six minutes pour les conservateurs, six minutes pour les libéraux, cinq minutes pour les conservateurs et trois minutes pour le NPD.
    Monsieur Ehsassi.
    Rapidement, monsieur le président...

[Français]

    Monsieur Fortin?
    Vous aviez prévu que j'aurais...
    Lorsque nous aurons terminé la période de questions et réponses, je vais demander la permission aux membres du Comité. D'accord, monsieur Fortin?

[Traduction]

    Monsieur Ehsassi, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, j'aimerais dans un premier temps vous remercier d'être là. Je crois qu'il est crucial qu'on jette plus de lumière sur les nombreux enjeux qui préoccupent les Canadiens.
    Je vais commencer par vous poser des questions au sujet des accords de réparation.
    Vous avez mentionné aujourd'hui que, lorsqu'il est question d'accords de réparation, il y a des sanctions, des amendes importantes. Que diriez-vous aux personnes qui disent que les accords de réparation ne tiennent pas les sociétés responsables de leurs actes répréhensibles?
    Je crois que c'est tout à fait faux.
    Lorsqu'il y a accord de réparation, il y a une admission conjointe de la culpabilité, une déclaration conjointe des faits, et la culpabilité et le comportement coupables sont admis. Il y a un sursis d'instance, mais si l'entreprise ne respecte pas ce qui est prévu, les procédures pénales peuvent reprendre.
    C'est une autre façon de punir. Ce n'est aucunement un traitement de faveur ou quoi que ce soit du genre.
    La sous-ministre aimerait peut-être ajouter quelque chose que j'ai oublié.
    Non. Je crois que votre réponse est bonne.
    J'ajouterai peut-être tout simplement que l'autre objectif, c'est vraiment d'assurer la conformité au sein d'une entreprise précise tout en épargnant les victimes innocentes et les tierces parties.
    J'aimerais aussi dire qu'on ne parle pas seulement des employés et des retraités: il y a aussi les petits actionnaires.

  (1135)  

    Merci de l'avoir confirmé.
    Vous avez aussi fait allusion au fait que les accords de réparation sont des outils juridiques. Pourquoi les appelez-vous des outils juridiques? Est-il exact de dire que les tribunaux participeraient de très près à la ratification de tels accords?
    Oui, vous avez raison.
    L'accord doit être accepté par un juge. L'accord doit aussi être rendu public. C'est un aspect important. En outre, avant la conclusion d'un accord de réparation, les victimes doivent être consultées.
    Qui voudrait ajouter quelque chose, ici?
    La réponse est parfaite.
    Merci de la réponse, et merci d'avoir confirmé la participation des tribunaux.
    Un autre enjeu très préoccupant pour beaucoup de personnes, à la lumière de ce que nous avons entendu, c'est une des choses auxquelles vous avez fait allusion. Je parle de la doctrine Shawcross. La semaine prochaine, nous aurons l'occasion d'accueillir des experts. Comme vous le savez, la doctrine Shawcross réunit plusieurs principes. Pouvez-vous décrire ces principes, ceux qui, selon vous, sont pertinents?
    Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, le principe Shawcross protège le rôle unique du procureur général de rendre des décisions qui relèvent de sa responsabilité. La doctrine reconnaît aussi que le procureur général ne vit pas en vase clos, et qu'il y a une diversité de choses qu'il serait sage de prendre en considération. C'est à Lord Simon qu'on doit la fameuse citation sur le principe Shawcross selon laquelle un procureur général serait fou de ne pas en tenir compte. La doctrine reconnaît que certaines conversations devront avoir lieu sur une diversité d'enjeux différents. Une fois qu'on tient compte de ce fait, c'est une question à laquelle il faudra toujours répondre à la lumière des faits. Je ne peux pas spéculer davantage sur ce qui est approprié ou non.
    Selon ce que je comprends, il peut y avoir de nombreuses discussions, mais au bout du compte, la décision revient au procureur général?
    C'est exact. Comme l'a dit Lord Shawcross, c'est à lui que revient la décision, et je dirais que c'est à lui ou à elle qu'elle revient.
    Vous avez dit que nous n'alliez pas spéculer, mais à votre avis, la doctrine Shawcross et les principes sont-ils objectifs ou subjectifs?
    La réponse se trouve quelque part entre les deux, car les faits seront toujours, d'une certaine façon, subjectifs pour celui qui les contemple. Il n'y a pas de réponse claire à cette question. Tout bon avocat sera en mesure de transformer l'objectivité en subjectivité, et vice-versa, donc je ne vais pas le faire. Je vais dire que c'est une question difficile dans chaque cas et qu'on doit la résoudre à l'aide des divers faits présentés par les parties en cause.
    À plusieurs occasions aujourd'hui, vous avez dit que le procureur général ne vit pas en vase clos. Je crois comprendre que c'est quelque chose que vous avez soulevé auprès de l'Association du Barreau canadien la semaine dernière également.
    Nous savons que des questions complexes entrent en jeu, mais vous avez également des responsabilités diverses. Pourriez-vous nous dire quelles sont ces obligations distinctes?
    Ce que j'ai dit à l'Association du Barreau canadien est tout à fait conforme à ce que je dis ici aujourd'hui. Je suis ouvert aux conversations en tant que procureur général et membre du Cabinet. Quand je mets mon chapeau de procureur général pour prendre une décision, en ma qualité de procureur général, cette décision n'appartient qu'à moi.
    Merci beaucoup.
    Madame Raitt.
    Merci beaucoup.
    Madame Drouin, j'ai une question très rapide.
    J'aimerais que vous confirmiez pour moi qu'il n'est pas nécessaire de publier la directive dont vous avez parlé dans la Gazette du Canada avant que l'affaire soit conclue, ce qui veut dire après que le tribunal a accepté l'accord de réparation et que tout est achevé. Est-ce exact? Cela figure à l'article 11 de la loi. N'est-ce pas?
    J'aimerais m'assurer que vous parlez de la directive qui a...
    Une directive du procureur général pour renverser la décision du directeur des poursuites pénales qui est censée être publiée dans la Gazette du Canada ne doit pas obligatoirement être publiée avant la conclusion des procédures judiciaires, ce qui veut dire que le tribunal a accepté l'accord de réparation, n'est-ce pas?

  (1140)  

    Il y a toutes sortes de possibilités. Cela dépend de la nature de la...
    Ce que j'ai dit est-il vrai, c'est-à-dire qu'il n'est pas nécessaire de la publier avant...
    Cela dépend de la nature de la directive. En premier lieu, lorsqu'un procureur général décide d'émettre une directive, il doit consulter le directeur des poursuites pénales.
    Je comprends le processus, madame. Ce que je veux savoir, c'est... n'est-il pas possible qu'une directive ne soit pas publiée dans la Gazette du Canada avant la conclusion de l'affaire par le tribunal? Cela n'est-il pas possible d'après la loi?
    Je ne fournis pas d'avis juridiques au Comité.
    Bien sûr, d'accord.
    Cela dépend vraiment des faits, mais je crois que ce qu'il importe de comprendre, ce sont les étapes, et aussi le fait que toute directive doit être publiée dans la Gazette du Canada.
    Je comprends, et ce que j'essaie de vous dire, madame, c'est que cet avis ne doit pas obligatoirement être publié avant bien longtemps après une élection fédérale en 2019.
    Je ne suis pas sûre que vous pouvez parvenir à une telle conclusion, car cela dépend vraiment des faits...
    Je le dis juste aux fins du compte rendu...
    ... de la nature de la directive.
    ... pour mes fins à moi.
    Puis-je aussi vous demander... lorsque le procureur général prend la décision d'ordonner au directeur des poursuites pénales ou de le sommer de faire quelque chose, il ne le fait pas en tant que ministre de la Justice, n'est-ce pas?
    C'est seulement le procureur général qui détient le pouvoir de demander ou d'ordonner au directeur des poursuites pénales de donner suite à l'un de ces accords de réparation.
    C'est certainement ce que je comprends.
    Oui.
    C'est exact. Donc pour toute la période postérieure au 4 septembre, lorsque la directrice des poursuites pénales a pris sa décision, vous ne pouviez tenir des conversations qu'en qualité de procureur général. Vous n'étiez pas ministre de la Justice, ou personne ne le serait par rapport à ce sujet.
    Je ne peux pas spéculer là-dessus, car je n'ai pas participé à ces conversations.
    Je crois que c'est approprié et je crois aussi qu'il est approprié d'examiner le principe Shawcross comme vous l'avez souligné. Le principe Shawcross dit très clairement qu'il ne s'agit pas nécessairement de pressions de la part du premier ministre — il n'est pas nécessaire que cela soit subtil ou lourd — et que toute communication entre le premier ministre et la procureure générale pourrait être perçue comme une tentative pour influencer sa décision, comme une ingérence inappropriée, car elle n'est que la procureure générale.
    N'est-ce pas vrai?
    Ce n'est pas ainsi que j'interpréterais le principe Shawcross. La tentative d'influence est quelque chose que vous faites en tant que député, que je fais moi-même en tant que député, que nos électeurs utilisent à notre endroit en tant que députés. Cela fait partie de ce que nous faisons à la table du Cabinet. La tentative d'influence est quelque chose qui fait partie de notre...
    Permettez-moi de vous l'expliquer.
    Non, je vous prie de me laisser répondre à la question.
    Vous y avez répondu, monsieur.
    Cela fait partie de l'ADN de notre processus politique.
    Ce n'est pas votre opinion.
    Dans la citation que vous avez soulevée, la question que l'on retrouve dans le principe Shawcross est la pression, et il s'agit d'une détermination subjective. Nous ne pouvons pas en parler sans connaître les faits.
    Avec tout le respect que je vous dois, lorsque vous agissez comme procureur général et choisissez de ne pas ordonner à la directrice des poursuites pénales, à SNC-Lavalin, de faire du lobbyisme auprès du Cabinet du premier ministre ou d'autres ministres du Cabinet, ou en fait du greffier du Conseil privé, cela revient à aller dans ces lieux pour tenter de convaincre le premier ministre de demander à la procureure générale de changer d'avis. N'est-ce pas vrai?
    Je ne peux spéculer sur cette question. Je ne suis pas dans le secret de ces conversations.
    Vous devriez le savoir, en tant qu'avocate.
    Ce n'est pas une conversation. C'est la façon dont le pouvoir... Je crois que c'est une hypothèse valable, ne croyez-vous pas?
    Je ne souhaite formuler aucune hypothèse que ce soit au sujet des conversations.
    Seule la procureure générale peut prendre la décision.
    SNC-Lavalin décide d'aller faire du lobbyisme auprès des plus hautes instances du pays. On présume que c'est parce que l'entreprise veut que le premier ministre la fasse changer d'avis. Est-ce que nous ne pouvons donc pas tirer une telle déduction de la réunion du 17 septembre?
    Je crois que je n'ai pas eu connaissance... Je sais que je n'ai pas eu connaissance de ces conversations et je crois qu'il serait peu judicieux...
    Une conversation dont vous avez eu connaissance...
    ... pour tirer quelque type de déduction que ce soit.
    ... Monsieur Lametti, est-ce que... Je me rappelle la première fois que le premier ministre m'a demandé de faire partie du Cabinet. Je suis sûre que vous vous en souvenez. C'est un moment mémorable. Durant cette conversation avec le premier ministre, celui-ci a-t-il mentionné les enjeux touchant SNC-Lavalin et les difficultés auxquelles il faisait face?
    Il ne l'a pas fait.
    Pouvez-vous me dire, monsieur Lametti, si cet enjeu vous a été communiqué avant que vous deveniez ministre de la Justice et procureur général?

  (1145)  

    J'ai déjà répondu à cette question.
    Pourriez-vous y répondre encore une fois pour moi, s'il vous plaît?
    Je n'étais pas au courant. J'avais une idée générale. Je crois que vous m'avez posé cette question à la Chambre des communes. J'avais une idée générale de l'enjeu, en tant que député de Montréal.
    C'est la dernière question pour vous.
    Monsieur Lametti, le Globe and Mail fait état d'une réunion du Cabinet. Je ne vais pas vous interroger au sujet du contenu de cette réunion. C'est plutôt une question hypothétique. Supposons que vous êtes le procureur général, comme vous l'êtes. Vous siégez à une réunion du Cabinet où une ancienne procureure générale allègue qu'on a exercé, à l'époque, une influence inappropriée à son endroit.
    En tant que procureur général actuel, avez-vous l'obligation de démissionner?
    Je vais m'en invoquer le secret du Cabinet...
    Je ne vous demande pas ce qui s'est passé, mais afin d'assurer la justice dans le pays, n'avez-vous pas l'obligation de démissionner?
    Votre temps est écoulé, madame Raitt.
    Je vais donner à M. Lametti la chance de répondre à la question, puis nous passerons au prochain intervenant.
    Je ne peux pas répondre à cette question en raison du secret du Cabinet.
    Merci beaucoup.
    Madame Khalid.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins.

[Français]

    Merci, madame Drouin, de votre participation.

[Traduction]

    Je sais que nous avons beaucoup parlé de la doctrine Shawcross. J'espère que nous pouvons, à tout le moins, aider les Canadiens à comprendre en termes simples ce qu'est la norme Shawcross. Est-elle compliquée?
    Lorsque nous parlons des interactions, et précisément des pressions, parlons-nous d'une norme objective ou bien subjective?
    Madame Drouin, pourriez-vous répondre à cette question pour moi, s'il vous plaît?

[Français]

    Comme le ministre l'a dit, c'est une question relativement difficile.

[Traduction]

    J'aimerais attirer l'attention du Comité sur une affaire qui s'est produite en 2006 et en 2008 au Royaume-Uni. C'est une affaire très grave, où le directeur, dans un cas de fraude grave, était responsable de l'enquête et des poursuites. Il s'agissait d'approvisionnement militaire. Durant l'enquête, un pays et aussi le premier ministre ont communiqué avec le directeur et lui ont dit que, si le procureur général continuait l'enquête et les poursuites, du sang pourrait couler dans la rue. Enfin, le directeur a décidé de mettre fin à l'enquête et de ne pas déposer d'accusations.
    L'affaire a donné lieu à un contrôle judiciaire et s'est rendue jusqu'à la Chambre des lords, laquelle a dit que cette conversation très difficile ne contrevenait pas à la primauté du droit.
    Je crois que cela illustre vraiment le sérieux de la conversation.
    Juste à titre de précision, cela ne contrevenait pas à la primauté du droit.
    Non.
    Merci beaucoup de cette précision, madame.
Merci, monsieur Lametti, d'être ici aujourd'hui. C'est vraiment fantastique.
    Je crois savoir que vous avez, en réalité, enseigné à certains de nos collègues dans le domaine du droit.
    Nous avons beaucoup parlé de l'éthique, du caractère et de la nature de notre conduite en tant que députés, ministres et même premier ministre.
    Pourriez-vous nous expliquer, à nous et aux Canadiens, quelles sont les études ou la formation qui vous permettent d'assumer les obligations éthiques du ministre de la Justice et du procureur général du Canada?
    Merci de poser la question.
    J'ai eu bien de la chance. Mes parents sont venus dans notre pays sans études officielles, et tout ce qu'ils souhaitaient pour leurs enfants, c'était qu'ils obtiennent une éducation officielle. Cela m'a permis de faire les études de droit de la meilleure qualité qui soit au Canada et à l'étranger, grâce à des bourses d'études. J'ai vécu toute ma vie dans une faculté de droit.
    En quoi est-ce pertinent, monsieur le président?
    J'ai eu des mentors, comme le juge de la Cour suprême du Canada, Peter Cory, et Rod Macdonald, qui appliquaient les plus hautes normes en matière d'éthique. Nous vivions et enseignions l'éthique professionnelle, et ce, en tant qu'avocats au quotidien.
    Je suis membre de deux barreaux: celui de l'Ontario et celui du Québec. Je me suis acquitté de mes obligations éthiques dans ces barreaux, et je crois donc que je suis très qualifié pour accomplir ce rôle.

[Français]

    Monsieur le président, si nous avions le CV de M. Lametti, nous pourrions passer à un sujet plus pertinent, non?
    Tous les membres du Comité ont le droit de poser des questions pendant la période qui leur est allouée. C'est lié aux antécédents du témoin; s'ils veulent poser ces questions, ils peuvent le faire.

  (1150)  

[Traduction]

    Essayez de conclure dès que vous le pouvez, s'il vous plaît.
    En fait, j'avais terminé, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Madame Khalid, vous avez deux minutes et 20 secondes.
    Merci.
    Je vais rappeler que la pertinence de ma question, c'est que nous avons tenu beaucoup de conversations dans notre Parlement et entre citoyens au sujet de l'éthique et des normes qui nous gouvernent en tant que Canadiens. Comment nous gouvernons-nous et quelles normes respectons-nous?
    J'aimerais que le ministre nous dise quelles sont les qualifications et la formation qui lui donnent le droit d'occuper un poste aussi élevé et de prendre ces décisions très importantes que les Canadiens s'attendent à le voir prendre de la bonne façon.
    Monsieur Lametti, pourriez-vous répondre à la question?
    Permettez-moi de répondre autrement.
    En tant qu'enseignant, mentor et universitaire, j'ai mené ma vie en fonction des normes éthiques les plus élevées. J'ai étudié le droit, j'ai vécu le droit, si vous le voulez, et j'ai débattu de droit. J'ai débattu du bien et du mal dans le contexte d'une des plus grandes facultés de droit du Canada et du monde. C'est un privilège que j'ai pris très au sérieux.
    Permettez-moi d'ajouter que l'une des raisons pour lesquelles je me suis lancé en politique, c'est que les attaques du gouvernement précédent contre la Cour suprême...
    Des députés: Ha, ha!
    L'hon. David Lametti: ... les attaques contre le système de justice pénale m'ont poussé à dire que la vie particulière que je menais ne suffisait pas pour redonner au Canada.
    Merci.
    Monsieur le président, pourrions-nous faire preuve d'un certain décorum?
    Je demande à tout le monde d'essayer de faire preuve de respect lorsque quelqu'un a une question. Si vous voulez invoquer le Règlement, faites-le.
    Madame Khalid, vous avez 45 secondes de plus.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question très brève.
    Monsieur Lametti, depuis votre nomination en tant que procureur général, quelles conversations, le cas échéant, avez-vous eues avec l'ancienne procureure générale?
    J'ai eu des conversations initiales, mais rien d'important. Il s'agissait des types de civilités d'usage que des personnes échangent au moment de la passation des pouvoirs.
    Lorsque l'affaire a éclaté dans le Globe and Mail, j'étais d'avis que, à titre de procureur général, je devrais maintenir une position qui ne compromettrait d'aucune façon ni moi ni la fonction de procureur général. Comme on allait déjà envisager, très rapidement par la suite, des délibérations en comité et la tenue d'une enquête par le comité de l'éthique, j'ai jugé nécessaire de ne pas participer à quelque conversation que ce soit sur cette question avec ma prédécesseure.
    Merci.

[Français]

    Merci.
    Nous allons passer à M. Paul-Hus.
    Monsieur Paul-Hus, lorsque vous en serez à quatre minutes, je vous le signalerai afin de permettre à M. Barrett d'intervenir. Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Drouin, en tant que sous-ministre de la Justice et directrice adjointe aux poursuites pénales, vous devriez être en mesure de me répondre.
    Le 4 septembre, lorsque la décision a été prise de continuer et d'engager des poursuites criminelles contre SNC-Lavalin, cette société en a été informée. À quel moment le Cabinet du premier ministre a-t-il été informé: le même jour, avant, ou après?
    Je veux clarifier que je ne suis pas la directrice des poursuites...
    ... adjointe.
    Non, je suis sous-ministre de la Justice et sous-procureure générale.
    Je n'ai aucune information par rapport à des dossiers particuliers. Donc, le 4 septembre, date dont vous faites état, je n'ai pas été informée et je ne suis pas plus informée au moment où nous nous parlons.
    Ce qui pour moi est une connaissance du domaine public, c'est que, vers le mois d'octobre, je crois, SNC a annoncé publiquement que le directeur ou la directrice des poursuites criminelles et pénales avait refusé d'entrer. Ce sont les faits que j'ai à ma disposition.
    Vous-même, en tant que conseillère juridique auprès du procureur général, le rôle auquel vous avez fait référence au début, vous êtes sûrement en relation avec la direction des poursuites pénales, n'est-ce pas?
    Oui. Je devrais peut-être vous dire que la directrice des poursuites pénales a la responsabilité de tenir informé le procureur général des dossiers importants. À quelques reprises, selon les dossiers...
    Donc, le 4 septembre, lorsque la Direction des poursuites pénales a informé SNC...
    Je ne suis pas du tout au courant de cela. Ces communications ne passent pas par le ministère.
    Le procureur général n'est donc pas avisé de la situation.
    Je ne peux pas répondre à cette question, monsieur Paul-Hus. Ce sont des conversations qui peuvent, ou non, avoir lieu sur des dossiers particuliers entre la directrice des poursuites pénales et le procureur général.
    D'accord.
    Lorsque le Cabinet du premier ministre a demandé à rencontrer Mme Wilson-Raybould le 17 septembre, vous a-t-elle demandé des conseils juridiques avant cette réunion, puisque cela relève de vos fonctions?

  (1155)  

    Dans le cadre de mes fonctions, je peux avoir plusieurs conversations avec un ministre, et je vais soutenir ce ministre et le procureur général dans l'exercice de ces fonctions.
    L'on a fait état de mes obligations en matière de confidentialité. Je ne peux donc pas vous dire si j'ai été ou non informée de ces discussions ni quand, ni vous parler des conseils que j'aurais pu ou non donner dans les circonstances.
    Puisque vous êtes tenue de respecter votre obligation de confidentialité, nous ne pouvons pas savoir aujourd'hui si Mme Wilson-Raybould vous a demandé des avis juridiques avant sa rencontre avec le premier ministre le 17 septembre. Est-ce bien cela?
    C'est ce que je vous réponds.
    D'accord.
    En va-t-il de même pour la rencontre du 5 décembre avec M. Butts au Château Laurier?
    Je ne peux même pas vous confirmer si j'étais ou non au courant de discussions qu'elle aurait pu avoir. On a des conversations régulières, et j'ai la responsabilité de fournir à un ministre et procureur général les outils dont il a besoin pour remplir ses obligations. Lorsque je le fais, cependant, je dois respecter mon devoir de confidentialité ainsi que mon devoir de...
    Merci, madame Drouin.
    Monsieur Lametti, vous êtes devenu ministre le 14 janvier. Avant votre assermentation, est-ce que le premier ministre Trudeau vous a parlé du dossier SNC-Lavalin?
    J'ai déjà répondu à cette question et la réponse est non.
    Vous n'avez jamais eu de discussions à ce sujet avant, est-ce cela?
    Oui.
    D'accord. Merci.

[Traduction]

    Il reste une minute et 30 secondes.
     Madame Drouin, quand la directrice des poursuites pénales a-t-elle informé le Bureau du Conseil privé, le Cabinet du premier ministre et le ministre de la Justice au sujet du résultat de l'accord de suspension des poursuites? Quand le premier ministre en a-t-il pris connaissance?
    D'abord, il n'y a pas de communication directe, dans quelque cas donné, entre le Cabinet du premier ministre et la directrice des poursuites pénales. L'obligation de la directrice des poursuites pénales de faire rapport sur des cas précis et de fournir de l'information au procureur général ne vise que la fourniture d'information au procureur général, à ce titre, et non pas au ministre de la Justice. La directrice des poursuites pénales le fait de façon régulière pour des cas très médiatisés.
    D'accord.
    Monsieur le procureur général, vous et le premier ministre avez dit que vous préparez un avis juridique sur le secret professionnel de l'avocat lié à l'ancienne procureure générale, Mme Wilson-Raybould. Les avocats que j'ai consultés disent que le secret professionnel de l'avocat est beaucoup plus limité que ce que votre gouvernement semble comprendre: il ne s'applique qu'aux communications entre un avocat et un client aux fins de la fourniture ou de l'obtention de conseils juridiques, et non pas à chaque déclaration.
    Vous pouvez compter sur plus de 5 000 employés au ministère de la Justice, et ils sont à votre disposition. Nous croyons comprendre que l'ancienne procureure générale, Mme Wilson-Raybould, comparaîtra ici mardi. Votre avis juridique sera-t-il préparé avant cette réunion?
    Comme l'a dit l'ancienne procureure générale, la question du secret professionnel de l'avocat est complexe et multidimensionnelle.
    Sera-t-il prêt pour mardi?
    Il y a un débat important à cet égard.
    Monsieur le ministre, est-ce un non?
    C'est un continuum, et je ne peux pas répondre à la question, parce que la réponse à la question est protégée par le secret professionnel de l'avocat.
    Merci.
    Passons maintenant à M. Rankin, pour trois minutes.
    J'aimerais d'abord dire que je sais, monsieur, que vous êtes un avocat très compétent et d'une grande probité pour qui j'ai le plus grand respect.
    En réponse à ma collègue Mme Raitt, vous avez dit que vous ne formuleriez pas d'hypothèses au sujet d'une affaire particulière. Pourtant, le 10 février, à CTV, vous avez dit que le premier ministre a dit que ces allégations étaient fausses, que vous n'aviez pas eu de preuve corroborante à cet égard et que rien ne justifiait selon vous la tenue d'une enquête par le Comité.
    Monsieur, vous êtes l'arbitre de la justice dans notre pays. Une personne raisonnable dirait que vous aviez déjà décidé qu'il n'y avait rien là, qu'il fallait circuler. Comme vous avez cru sur parole le premier ministre, selon qui aucun méfait n'avait été commis, comment pouvez-vous maintenant vous acquitter de vos responsabilités dans cette affaire en tant qu'arbitre indépendant de la justice, si, comme semblent le croire les Canadiens, votre opinion était déjà faite? S'agit-il d'une déduction raisonnable?
    Je ne suis pas d'accord avec cette déduction. Je ne suis pas d'accord avec la prémisse de votre question.
    Tout d'abord, contrairement à ce qui se fait dans d'autres administrations, le procureur général n'a pas de rôle d'enquêteur. Nous déléguons ce rôle à d'autres types d'institutions.
    Ensuite, au moment de l'enregistrement de l'entrevue, le 8 février — elle a été diffusée le 10 février — tout ce dont nous disposions, c'étaient des allégations anonymes dans le Globe and Mail et un déni sans équivoque du premier ministre. Je m'en tiens à ce que j'ai dit à ce moment-là, le 8 février.
    J'ai aussi dit, dans une entrevue précédente réalisée ce jour-là à The House, qui a été enregistrée avant l'entrevue de CTV, mais a été diffusée avant... j'ai aussi dit de bonne foi que le Comité était maître de son propre dossier et que je comparaîtrais s'il m'invitait à le faire...

  (1200)  

    Bien, d'accord.
    ... et, monsieur Rankin, je suis ici.
    J'entends ce que vous dites, monsieur, mais c'est une autre affaire de savoir si vous répondez aux questions.
    J'aimerais vous présenter les faits suivants. Le 4 septembre, la DPP, la directrice des poursuites pénales, dit à SNC-Lavalin que l'affaire est réglée, que nous allons aller de l'avant avec les poursuites pénales. Le 17 septembre, le premier ministre rencontre Jody Wilson-Raybould; le 5 septembre, Gerry Butts rencontre Jody Wilson-Raybould au Château Laurier, et dans chaque cas, au sujet de SNC-Lavalin.
    Si cette décision finale de la DPP a été prise le 4 septembre, après la décision finale, qu'est-ce qui aurait bien pu être discuté avec le premier ministre ou Gerry Butts dans ces circonstances? Comment ne pouvons-nous pas raisonnablement déduire qu'il y a eu une tentative d'ingérence politique dans son rôle de procureure générale indépendante?
    Je ne peux pas confirmer que l'une de ces réunions s'est...
    Elles sont toutes du domaine public.
    Je ne peux pas confirmer que l'une de ces réunions s'est déroulée, à plus forte raison spéculer sur le contenu de ces réunions.
    Très bien. Merci.
    Merci beaucoup.
    Mesdames et messieurs, cela met fin à la deuxième période de questions, mais nous avons une demande de la part de M. Fortin.
    Le Bloc québécois n'est pas un parti reconnu, et il n'a donc habituellement pas le droit de poser des questions au Comité. Toutefois, M. Fortin a demandé, de façon exceptionnelle, qu'on lui accorde ce droit pour la présente réunion. Je ne veux pas créer de précédent, mais aux fins de la présente réunion, je serais prêt à lui accorder trois minutes. Les collègues sont-ils d'accord?
    Des députés: D'accord.
    Le président: D'accord.

[Français]

    Monsieur Fortin, vous avez la parole pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Lametti, à votre avis, le procureur général du Canada a-t-il le pouvoir d'exiger du directeur des poursuites pénales qu'il entame des négociations avec SNC-Lavalin pour conclure une entente de réparation? A-t-il ce pouvoir?
    Il y a des pouvoirs prévus dans la loi. La bonne réponse est que les pouvoirs sont dans la loi.
    La réponse est donc oui.
    Il existe des interprétations de la loi. Je ne vais pas me prononcer sur les interprétations de la loi, parce que cela peut diminuer le privilège relatif au litige et avoir des conséquences sur le litige actuel entre SNC-Lavalin et le...
    Je comprends que ce n'est peut-être pas opportun. Je n'ai pas beaucoup de temps et je ne veux pas m'étendre là-dessus. Je veux juste savoir si, à votre avis, ce pouvoir existe.
    Je ne vais pas donner d'avis. Je vais dire que la loi existe.
    Donc, la loi existe et elle permet au procureur général d'exiger du directeur des poursuites pénales qu'il entame de telles négociations.
    Je ne peux pas donner d'avis ou d'interprétation de la loi. Je vais juste souligner qu'une telle loi existe.
    D'accord.
    Si cela existe, pouvez-vous me dire pour quelle raison, à ce jour, cela n'a pas été fait? Pourquoi le procureur général n'a-t-il pas donné une telle directive au directeur des poursuites pénales?
    Je ne peux pas spéculer...
    Je ne vous demande pas de spéculer; c'est vous, le procureur général.
    Oui. À ce titre, je ne peux répondre à votre question, justement à cause du privilège relatif au litige. Une interprétation de ma part pourrait avoir un impact sur le litige actuel entre SNC-Lavalin et la directrice des poursuites pénales.
    Sans me donner d'opinion, pour quel motif n'avez-vous pas encore donné une telle directive? Pourquoi n'avez-vous pas exigé du directeur des poursuites pénales qu'il entame des négociations?
    Les avocats dans la salle comprendront que je ne peux pas vous donner une réponse, car cela aurait un impact sur ce dossier. J'aimerais vous répondre, mais ce serait contrevenir au principe du privilège relatif au litige.
    Savez-vous pour quel motif la procureure générale qui vous a précédé n'a pas donné de telles directives au directeur des poursuites pénales? Êtes-vous au courant?
    Monsieur Fortin, à ce point-ci, je dois vous conseiller: cela s'approche de la convention relative aux affaires en instance et cela pourrait avoir un impact sur l'appel de SNC-Lavalin.
    Notre témoin est très conscient des règles. Il le sait et il va m'arrêter.
    Je vous donne ce conseil pour que vous formuliez vos questions en conséquence.
    C'est la même réponse.
    D'accord, c'est la même réponse.
    Vous aviez...
    Votre temps de parole est écoulé, monsieur Fortin. Merci.
    J'aimerais remercier les témoins.

  (1205)  

[Traduction]

    Nous avons été très heureux de vous recevoir ici au moment où nous entamons cette étude.
    Nous allons suspendre les travaux pour environ cinq minutes, le temps de faire venir M. Wernick au microphone.

  (1205)  


  (1215)  

    Nous reprenons maintenant avec notre deuxième groupe de témoins du jour.
    Nous sommes très chanceux de recevoir M. Michael Wernick, greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet.
    Monsieur Wernick, nous sommes ravis de vous recevoir. Nous vous demanderons de bien vouloir maintenant présenter votre déclaration liminaire.
    J'aimerais dire clairement que je suis venu à la toute première invitation du Comité et que je me suis toujours rendu disponible pour les comités parlementaires. J'ai comparu plus de 25 fois, et tout cela figure dans le compte rendu. Je suis heureux d'aider le Comité dans le cadre de ses importantes délibérations.
    Comme déclaration liminaire, je pourrais peut-être présenter certains éléments, puis je serai prêt à répondre à toutes vos questions. Je pourrai rester aussi longtemps que le Comité le souhaite. J'ai parfois comparu dans des séances de comités qui ont duré entre quatre et cinq heures à la fois, jusqu'à ce que le comité soit satisfait. Je m'en remets entièrement au Comité.
    Si je peux m'adresser aux Canadiens par votre entremise, monsieur le président, j'aimerais dire certaines choses, car on a dit et écrit beaucoup de choses au cours des dernières semaines, et je crois qu'il est nécessaire d'en clarifier certaines.
    Je m'inquiète au sujet de mon pays en ce moment. Je suis actuellement très préoccupé par rapport à mon pays, à ses politiques et à son orientation. Je m'inquiète au sujet de l'ingérence étrangère au cours des prochaines élections, et nous travaillons d'arrache-pied à ce sujet. Je m'inquiète de la montée en puissance des incitations à la violence lorsque des gens utilisent des termes comme « trahison » et « traître » dans des discours ouverts. Ce sont les mots qui mènent à des assassinats. Je m'inquiète du fait que quelqu'un puisse se faire abattre au pays durant la campagne politique cette année.
    Je crois qu'il est tout à fait inacceptable qu'un député du Canada incite des gens à en écraser d'autres au volant d'un camion, après ce qui s'est passé à Toronto l'été dernier. C'est tout à fait inacceptable, et j'espère que vous, en tant que parlementaires, allez condamner ces propos.
    Je m'inquiète au sujet de la réputation de personnes honorables qui ont servi leur pays avant d'être souillées et traînées dans la boue sur la place publique. Je m'inquiète au sujet des trolls, qui émergent des égouts sociaux pour aller hanter l'arène des médias publics. Plus que tout, je m'inquiète du fait que des gens perdent foi envers les institutions de gouvernance du pays, et c'est pourquoi ces délibérations sont si importantes.
    J'aimerais exposer certains éléments.
    Les Canadiens devraient-ils s'inquiéter de l'état de la primauté du droit au pays? Non. Pour ce qui est de SNC-Lavalin, il faut savoir que la première descente policière dans les bureaux de l'entreprise a eu lieu il y a sept ans et que les accusations ont été portées par la GRC il y a quatre ans, et que jusqu'à présent, l'indépendance des fonctions d'enquête et de poursuites n'a jamais été menacée. L'affaire se rendra jusqu'aux tribunaux.
    La directrice des poursuites pénales a fait une déclaration le 12 février, que vous pouvez trouver sur son site Web, dans le contexte de l'affaire Norman, où elle a dit ceci: « J'ai entièrement confiance que nos procureurs, dans cette affaire et dans toutes les autres, exercent leur pouvoir discrétionnaire en toute indépendance et à l'abri de toute considération politique ou partisane. » Ce sont les mots de la directrice des poursuites pénales. Les seules communications avec la directrice des poursuites pénales au sujet de l'utilisation potentielle d'un accord de suspension des poursuites, un instrument prévu par la législation, ont été menées par le ministre, comme il se doit.
    Dans cette affaire, les lois que vous, en tant que parlementaires, avez créées au sujet de l'éthique au gouvernement fonctionnent manifestement. Le procureur est indépendant. La Loi sur le lobbying a fonctionné comme prévu. Le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique a entrepris lui-même son propre processus. Autrement dit, les boucliers ont tenu. Les logiciels qui sont censés protéger notre démocratie fonctionnent.
    Y a-t-il une justice à deux vitesses au Canada? Non, de toute évidence. Malgré l'effort de relations gouvernementales le plus considérable jamais déployé dans les temps modernes, y compris des réunions avec des représentants, des employés politiques et les chefs de l'opposition, et des publicités haineuses et les déclarations de deux premiers ministres consécutifs du Québec, l'entreprise n'a pas obtenu ce qu'elle voulait, manifestement parce qu'elle cherche à obtenir un contrôle judiciaire.
    Faisons-nous preuve de mollesse par rapport à la criminalité des entreprises? Non. Comme vous le dites, les accords de suspension des poursuites se veulent une tentative pour équilibrer les intérêts publics. C'est une préoccupation légitime pour le gouvernement, et effectivement pour tout le monde, que les travailleurs, les fournisseurs, les retraités et les collectivités dans lesquelles une entreprise exerce des activités souffrent des méfaits des dirigeants des sociétés. Un accord de suspension des poursuites ne représente pas un acquittement, une amnistie, une exonération, une carte de sortie de prison ou une tape sur les doigts. C'est ce que ça dit: c'est un accord pour suspendre les poursuites. Il est assujetti à des conditions et peut être révoqué.
    Les accords de suspension des poursuites n'ont pas été insérés en douce dans le droit canadien. Il s'agissait de consultations qui ont débouché sur le projet de loi qui a attiré 370 participants et a fait l'objet de 75 mémoires écrits avant la date limite de décembre 2017. Je suis sûr que ces mémoires seraient à la disposition du Comité. On a fait un examen approfondi des dispositions du projet de loi dans un comité sénatorial, et tout cela figure au compte rendu.

  (1220)  

    Je suis disposé à répondre à toute question que le Comité souhaite poser. Je crois que je suis heureux de faire état ou de discuter de mes communications avec l'entreprise et des réunions qui se sont tenues ces derniers temps, qui sont ressorties dans les spéculations des médias. Je suis ici pour vous dire que l'article du Globe and Mail contient des erreurs et une spéculation infondée, et dans certains cas, il est simplement diffamatoire.
    Cela dit, monsieur le président...
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à notre première série de questions, de six minutes chacune.
    Nous commençons par Mme Raitt.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie le greffier d'être ici. J'apprécie.
    Avez-vous été avisé de la décision du 4 septembre de la directrice des poursuites pénales de ne pas aller de l'avant avec un accord de suspension des poursuites?
    Non.
    Comment l'avez-vous appris?
    Des annonces dans les journaux nationaux.
    Quel jour?
    Je crois que l'entreprise a publié des annonces à la mi-octobre. Je peux vérifier les dates pour vous.
    Le 17 septembre... À la mi-octobre... les journaux nationaux... Je veux juste m'assurer...
    En fait, si vous pouviez corriger cela, je crois que... j'ai rencontré les représentants de l'entreprise le 18 septembre...
    Oui, c'est exact.
    ... et je ne me rappelle pas les détails particuliers, à savoir si cette décision de la directrice leur avait été transmise ou non.
    Il est donc possible que vous étiez au courant... Monsieur le greffier, je vais présumer que vous saviez le 18 septembre que la directrice des poursuites pénales avait dit à SNC-Lavalin que l'entreprise n'allait pas obtenir d'accord de suspension des poursuites.

  (1225)  

    Je ne sais pas si cela a fait partie ou non de la conversation. Les gens de l'entreprise sont venus plaider leur cause, ce qu'ils ont fait devant un très grand nombre de gens, disant que ce n'était pas l'entreprise qui avait commis les crimes et qui était accusée, qu'il y avait eu un changement du conseil et de la direction de l'entreprise. Ils s'inquiétaient au sujet des répercussions sur leurs travailleurs et leurs fournisseurs et ils ont plaidé leur cause en expliquant pourquoi ils étaient un bon candidat pour un accord de suspension des poursuites.
    Vous ne vous rappelez pas s'ils vous ont communiqué qu'ils avaient essuyé un refus de la part de votre propre directrice des poursuites pénales.
    Nous ne traitons pas avec la directrice des poursuites pénales...
    SNC-Lavalin ne vous a jamais mis au courant qu'elle avait essuyé un refus et que c'est ce qui l'avait poussée à vous rendre visite le 18 septembre.
    Elle faisait la tournée et rencontrait tout le monde en ville durant ce mois-là.
    Elle faisait la tournée. Je crois que nous devons présumer que tout le monde à qui on rendait visite connaissait la raison, car cela expliquerait pourquoi on organisait ces rendez-vous. Sachant qu'ils venaient vous voir pour renverser la décision de la directrice des poursuites pénales, à ce moment-là, vous auriez dû savoir que cela représentait une mesure extraordinaire pour la procureure générale, qui ne peut être exécutée que par le premier ministre.
    J'ai souvenir de la conversation: leur principal argument, qu'ils avaient présenté à tout le monde, c'est que ce n'est pas l'entreprise qui avait commis les crimes, qu'il y aurait des répercussions graves sur les fournisseurs et les travailleurs ainsi que les collectivités et qu'elle était une bonne candidate à un accord de suspension des poursuites.
    Je me souviens de leur avoir dit, avec la plus grande fermeté, de façon très franche et directe, que c'était une décision qui appartenait à la directrice des poursuites pénales, que la ministre de la Justice était investie de pouvoirs à cet égard et qu'ils devraient aller faire valoir leur point de vue devant la directrice des poursuites pénales dans le cadre du processus judiciaire.
    Y a-t-il quelqu'un qui a pris des notes lors de cette réunion, monsieur le greffier?
    Je l'ignore.
    Y avait-il quelqu'un d'autre à la réunion avec vous?
    Oui. Il y avait Neil Bruce, Erik Ryan et Sam Boutziouvis, de SNC-Lavalin, et j'étais accompagné par ma sous-secrétaire aux opérations, Catrina Tapley.
    Est-il possible que la sous-secrétaire aux opérations ait pris des notes?
    C'est possible.
    Seriez-vous prêt à les faire déposer ici?
    Si elles existent.
    Seriez-vous prêt à vous engager à les demander?
    Oui.
    Le 17 septembre, monsieur le greffier, le premier ministre avait déjà rencontré Mme Wilson-Raybould, et, au cours de cette réunion, il lui avait dit que la décision lui appartenait à elle. Pourquoi la procureure générale serait-elle tenue de prendre une décision à ce moment-là?
    Il était toujours question que cela soit sa décision, et la décision était ouverte durant les mois de septembre, octobre et novembre, et il demeure loisible à la DPP de changer d'avis et à la ministre d'exercer les pouvoirs conférés par la loi.
    Nous sommes donc clairement d'accord pour dire que la demande ou le commentaire selon lequel la décision lui appartient totalement tient au fait non pas de savoir s'il convient d'accorder un accord de suspension des poursuites, mais bien de renverser la décision de la directrice des poursuites pénales.
    Le mot « renverser » n'est pas celui que je choisirais...
    Émettre une directive...
    Il y a dans la loi adoptée par le Parlement une disposition qui confère certains pouvoirs au ministre de la Justice en tant que procureur en chef du Canada: il peut prendre en charge la poursuite ou obtenir les motifs du procureur.
    Je ne suis pas dans le secret des conversations tenues entre la directrice des poursuites pénales et la ministre de la Justice.
    Vous êtes dans le secret de la conversation avec SNC-Lavalin. Je dois dire que je trouve très étrange et effectivement bizarre que SNC-Lavalin, sachant ce qu'elle savait à ce moment-là depuis environ 13 jours, soit qu'elle n'allait pas recevoir d'accord de suspension des poursuites, ne l'ait pas mentionné au greffier du Conseil privé, qui est le sous-ministre du premier ministre du Canada et fournit des conseils au premier ministre sur des questions de grande importance.
    En fait, monsieur le greffier, je dirais que c'est très inhabituel de choisir de rencontrer les représentants d'une entreprise individuelle. Vous êtes un cadre très occupé du pays. Je juge surprenant que vous choisissiez, si rapidement après le refus qu'elle a essuyé, de rencontrer SNC-Lavalin, et pourtant, que personne ne vous dise qu'elle avait essuyé un refus de la part de la directrice des poursuites pénales.
    Est-ce votre témoignage: qu'on ne vous l'a pas dit?
    Je ne sais pas si on me l'a dit ou non. Je peux vous dire que l'entreprise a demandé à me rencontrer plusieurs fois. J'ai comme pratique de rencontrer beaucoup de gens qui demandent de telles réunions — des dirigeants syndicaux, des dirigeants d'ONG, des chefs autochtones et des représentants provinciaux. Je rencontre beaucoup de gens et aussi beaucoup d'entreprises.
    L'entreprise n'est pas un paria. Elle n'a pas été reconnue coupable. Elle va se présenter devant les tribunaux.

  (1230)  

    Je n'ai pas dit qu'elle l'était.
    Madame Raitt, vous êtes à six minutes.
    Je ne veux pas que le compte rendu donne l'impression que je crois qu'il y a quelque chose de mal au fait de rencontrer SNC-Lavalin, et je n'aime pas que le greffier me dise qu'il pense que c'est ce que j'essaie de faire, car ce n'est pas le cas. Ce que je dis, monsieur le président, c'est que cela a juste permis de tirer une mauvaise déduction.
    D'accord. Vous avez tiré au clair la déduction...
    Eh bien...
    ... et nous comprenons tous que ce n'était pas votre intention...
    Ce n'est même pas ce que j'ai dit. C'est une interprétation totalement erronée de ce que j'ai dit exactement, soit que j'étais surprise qu'elle ne lui ait pas dit.
    C'est bon. Nous ne voulons pas gruger le temps de qui que ce soit.
    Passons maintenant à M. Boissonnault, pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le greffier, merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui.
    J'aimerais d'abord reconnaître, et corrigez-moi si mes chiffres sont erronés, que vous vous dévouez à la fonction publique fédérale depuis 37 ans, période qui a vu passer de nombreux gouvernements conservateurs et libéraux. Vous et moi avons eu l'occasion de travailler ensemble dans le cadre de mes responsabilités LGBTQ.
    Monsieur Wernick, ma première question pour vous aujourd'hui concerne des conversations qui se sont tenues entre le premier ministre ou des représentants du Bureau du premier ministre et des ministres. Plus précisément, j'aimerais savoir s'il est approprié pour le premier ministre et des représentants de son bureau de parler avec la ministre de la Justice et la procureure générale d'un cas actif?
    Les frontières acceptables de ces conversations sont exactement ce dont il est question dans la doctrine Shawcross, et je renverrais tous les membres du Comité au document « Pour un gouvernement ouvert et responsable », qui est la stratégie du premier ministre. Un document du premier ministre Harper contenait un libellé semblable, et il y en a un qui a été publié par le premier ministre en novembre 2015. Il décrit précisément en détail le point de vue du premier ministre quant à ce qui est approprié ou non dans le cadre du traitement de questions juridiques.
    Merci beaucoup.
    Je reconnais que, selon le livre et ce que vous avez dit, il est approprié que de telles conversations se tiennent, mais il y a des paramètres. Dans votre rôle de greffier, avez-vous déjà été témoin de pressions inappropriées appliquées par le premier ministre ou des représentants de son bureau à l'endroit de l'ex-ministre de la Justice et procureure générale sur la question des accords de réparation ou sur toute autre question?
    Non. À chaque occasion, oralement et par écrit en décembre, le premier ministre a exprimé clairement que cette décision appartenait à la ministre de la Justice. Elle était la décideuse.

[Français]

     Je pense qu'il est important de poser la question en français.
    Oui.
    Dans votre rôle, en tant que greffier, avez-vous déjà été témoin qu'une pression inappropriée fût exercée par le premier ministre ou des agents du Cabinet du premier ministre sur la ministre de la Justice et ancienne procureure générale au sujet des accords de réparation ou de toute autre question?
    Non.
    La politique du premier ministre sur les conversations et les questions juridiques est très bien énoncée dans le document Pour un gouvernement ouvert et responsable, qu'il a achevé juste après les élections. On y décrit les politiques du gouvernement à cet égard.

[Traduction]

    Je crois qu'il...

[Français]

    À chaque occasion, le premier ministre a dit, verbalement et dans une lettre à la ministre de la Justice, qu'elle était toujours la décideuse.
     Merci, monsieur le greffier.
    Si nous voulons avoir une copie de cette lettre, est-il possible d'en obtenir une copie? Pourrait-elle être remise au greffier?

[Traduction]

    Il sera déposé, et des copies seront communiquées aux membres du Comité.
    Merci beaucoup d'avoir clarifié le fait qu'aucune pression inappropriée n'a été exercée à l'endroit de l'ex-ministre de la Justice et procureure générale par le premier ministre ou des représentants de son bureau.
    Je crois que cela aiderait les Canadiens qui n'ont pas vu le livre auquel vous faites allusion, la stratégie importante, pour reprendre vos mots. Lorsque vous participez à une conversation, lorsque vous êtes dans une salle, comment savez-vous où tracer la ligne en ce qui représente des conversations musclées et détaillées qui ne franchissent pas la frontière de la doctrine Shawcross, qui ne versent pas dans les directives et les pressions?
    Je crois que le ministre a tenté de décrire les deux fonctions qu'il exerce, et je crois que le Comité entendra des témoins plus experts que moi.
    Lorsque vous êtes premier ministre et président du Cabinet et que vous devez rendre des comptes au Parlement et vous soumettre à une période de questions, tout ce qui se passe dans l'appareil gouvernemental vous concerne ou revêt un intérêt pour vous: vous devez savoir ce qui se passe et en faire le suivi. Cela dit, chaque ministre se voit attribuer par la loi des rôles très précis pour prendre des décisions. Ce sont des décisions réglementaires sur toutes sortes de choses, des permis et des licences, qui relèvent du ministre.
    Le rôle du ministre de la Justice dans le cas des poursuites est incroyablement clair au Canada. Il y a un champ de forces législatives et juridiques au sujet de la fonction des poursuites au Canada qui n'existe pas au Royaume-Uni, soit dit en passant. Nous possédons le plus fort mécanisme de protection des poursuites indépendantes auquel je peux penser.

  (1235)  

    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit quelque chose qui m'a particulièrement touché. Vous avez dit que la primauté du droit dans notre pays était intacte et qu'il s'agissait d'un principe fondamental de notre pays.
    Pourriez-vous nous donner d'autres exemples tirés de votre expérience actuelle et de vos 37 années d'expérience afin d'expliquer votre déclaration d'aujourd'hui?
    J'ai passé du temps avec les ministres et les premiers ministres et dans leur entourage. J'ai eu ce grand honneur dans le cadre de ma carrière.
    J'ai travaillé en étroite collaboration avec trois premiers ministres actifs, des anciens ministres actifs et une douzaine de ministres. J'ai assisté aux réunions du Cabinet Chrétien, du Cabinet Mulroney, du Cabinet Martin, du Cabinet Harper et du Cabinet Trudeau. Je peux vous dire qu'ils s'efforcent toujours de faire ce qui est juste, de la bonne façon. Au Canada, les exceptions à cet égard sont extrêmement rares et sont repérées, corrigées et sanctionnées.

[Français]

    Dans les vingt secondes qu'il me reste, j'aimerais juste vous demander ceci: comment pouvez-vous dire que la règle de droit est bien en place au Canada?

[Traduction]

    Comme je l'ai dit, le législateur a créé toutes sortes de lois visant à protéger l'éthique au gouvernement, et celles-ci ont été renforcées par des gouvernements successifs. Ce n'est pas un commentaire partisan. Certaines d'entre elles viennent de différents premiers ministres à différentes périodes. Je suis un grand admirateur de la Loi fédérale sur la responsabilité du premier ministre Harper. Je suis un grand admirateur d'autres initiatives prises par d'autres gouvernements en matière de transparence et de vigilance au chapitre de l'éthique du gouvernement.
    Comme je l'ai dit, nous avons un procureur indépendant. La Loi concernant le lobbying, qui visait à favoriser la transparence, fonctionne. Toutes les communications de l'entreprise ont été divulguées et enregistrées. Le commissaire à l'éthique, haut fonctionnaire du Parlement, qui est un poste créé par le Parlement pour servir et conseiller les parlementaires, a lancé son propre processus. J'estime que c'est la tribune appropriée pour traiter cette question.
    Je souhaite, et je l'ai clairement expliqué, comme tout le monde dans cette affaire, avoir un entretien avec le commissaire à l'éthique et me soumettre à son enquête. Il a le pouvoir d'un juge d'une cour supérieure et peut exiger la production de documents et convoquer des témoins.
    Je vous recommande de faire appel au haut fonctionnaire du Parlement dont vous avez créé le poste
    Je vous remercie, monsieur.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Rankin.
    Merci.
    Monsieur Wernick, j'aimerais dire d'emblée que, avec 37 années au sein de la hiérarchie politique de toutes les allégeances — vous êtes actuellement greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet — vous êtes au service de la population canadienne, et je vous remercie, monsieur, de servir le pays.
    Je dois vous demander ceci. On a déjà mentionné une lettre du 5 décembre, dont on a fait allusion à une copie, une lettre de SNC-Lavalin...
    Du premier ministre à SNC-Lavalin...
    ... du premier ministre à SNC-Lavalin; il a refusé une demande de rencontre, mais leur a demandé d'aller voir la ministre de la Justice.
    Cela ne vous semble-t-il pas un peu étrange que ce soit le cas, compte tenu du contexte?
    Si vous lisez le texte aux fins du compte rendu, je ne pense pas qu'on y dit d'aller voir...
    Manifestement, on y dit...
    On y dit que l'affaire est devant les tribunaux et qu'il faut donc s'adresser à la ministre de la Justice, ce qui signifie traiter avec le système judiciaire dans le cadre du processus judiciaire.
    Nous attendons que des copies soient distribuées.
    J'aurai peut-être le temps d'y revenir.
    Je veux vous demander ceci. Je ne vous demande pas un avis juridique. Je vous demande plutôt, compte tenu de votre vaste expérience, quelle est la nature du privilège du secret professionnel de l'avocat dans de telles situations? J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus au sujet de vos observations.
    J'ai passé beaucoup de temps à lire des documents sur le sujet, la convention Shawcross et toutes ces questions et doctrines. Je ne suis pas avocat, mais je les utilise beaucoup. Je ne suis pas en position de fournir des avis juridiques au Comité. Vous avez d'excellents légistes et des personnes qui peuvent venir comparaître.
    Ma conclusion, en tant que personne qui consacre beaucoup de temps à la gouvernance, est que je ne vois pas où l'ancienne procureure générale jouait le rôle d'avocate. L'affaire n'a jamais été discutée au Cabinet, jamais. Elle ne donnait donc pas de conseils au Cabinet. Elle ne conseillait pas le premier ministre. Le premier ministre a déclaré à chaque occasion, verbalement et par écrit, qu'elle était celle qui prend la décision. Elle ne donnait donc pas de conseils juridiques au premier ministre. Elle était la personne qui prend la décision, la décideuse ultime à part entière. Elle ne peut être à la fois l'avocate bâillonnée et entravée et la décideuse maltraitée — dans cette caricature ignoble, horrible. C'est l'un ou l'autre.

  (1240)  

    Par conséquent, le privilège du secret professionnel de l'avocat ne pourrait s'appliquer.
    C'est ma conclusion et non mon avis.
    Je ne demande pas d'avis juridique. Vous comptez 37 années d'expérience, c'est beaucoup. C'est fascinant et très utile.
    En ce qui concerne une autre question connexe, la confidentialité du Cabinet, estimez-vous que, si une personne — par exemple, le secrétaire principal du premier ministre, M. Butts — rencontre la procureure générale dans un hôtel et discute d'une question particulière, qu'elle est soumise à la confidentialité du Cabinet?
    Le site Web contient de l'information sur la confidentialité du Cabinet. Je vous recommanderais de le consulter. C'est — et je sais que cela semble évasif — un peu obscur. La confidentialité s'applique généralement aux conversations entre ministres ainsi qu'aux conversations entre ministres au sujet de questions dont le Cabinet est saisi ou sur le point de l'être. Mais il existe des dispositions selon lesquelles les intermédiaires et les représentants des ministres peuvent être visés.
    J'ai un rôle réglementaire...
    Oui, en effet.
    ... en tant que gardien des confidences des gouvernements précédents et, en général, en tant qu'arbitre pour les questions de confidentialité du Cabinet.
    Pouvez-vous imaginer comment un membre du personnel politique pourrait d'une quelconque façon être visé par la confidentialité du Cabinet dans des conversations avec un procureur général?
    Il pourrait certainement s'agir de conseils aux ministres, ces communications pourraient être éventuellement protégées par la confidentialité du Cabinet, car ces employés seraient des représentants du ministre. À ces fins, le premier ministre est un ministre. C'est tout ce que je pense pouvoir dire avant de donner un avis juridique, ce que je ne devrais pas faire.
    Monsieur Wernick, dans votre déclaration liminaire, vous avez parlé de la directrice des poursuites pénales dans cette affaire en disant qu'elle avait écrit avoir exercé son pouvoir discrétionnaire librement et en toute indépendance. Elle n'a pas cédé lorsqu'on lui a peut-être demandé de le faire... 50 rencontres, etc. Il semble que l'ancienne procureure générale n'a pas cédé non plus. Ensuite, vous avez conclu que le système fonctionnait.
    De fait, monsieur le greffier, ne pourrions-nous pas en déduire que, lors de rencontres survenues après celle où le premier ministre aurait exercé une pression indue et franchi la ligne rouge de la doctrine Shawcross, ou après que son chef de Cabinet l'a fait, dans un hôtel situé près de la Colline du Parlement, en parlant de cette affaire une fois la décision prise, comme vous le dites, de laisser la DPP exercer pleinement son pouvoir discrétionnaire en toute indépendance... Ne trouvez-vous pas au contraire que le système n'a peut-être pas fonctionné et que les Canadiens pourraient raisonnablement conclure, compte tenu de la situation, que l'on a pu continuer à exercer des pressions politiques?
    Si vous voulez résumer, au profit des Canadiens, ce qui se passe ici, avec les faits dont nous disposons et tous les faits que je connais, étant donné ma participation à des rencontres et à des conversations... nous discutons de la défense légitime et de la question de savoir si la ministre a pris une décision légitime, qu'elle n'a finalement pas prise.
    Oui, et les pressions politiques ont continué par la suite pour qu'elle change d'avis.
    La question s'adresse au Comité et, à mon avis, au commissaire à l'éthique en tant que professionnel du droit qualifié dont la réputation ne pourrait, de quelque façon que ce soit, être ainsi entachée par des accusations selon lesquelles il agit pour des raisons partisanes pendant une période électorale, avant des élections partielles ou pendant la course à la direction d'un parti. Le poste de commissaire à l'éthique a été créé par le Parlement précisément pour régler ces questions d'éthique au sein du gouvernement. Si ce n'est pas le genre de problème pour lequel le commissaire à l'éthique est là, pourquoi en avons-nous un?
    Eh bien, il est là. Comme vous le savez fort bien, c'est une question dont est saisi le commissaire à l'éthique.
    Oui.
    Le Comité permanent de la justice a peut-être une responsabilité distincte de vérifier si la première conseillère juridique de l'État, notamment l'ancienne procureure générale, a fait l'objet d'une ingérence indue dans le cadre de son rôle indépendant requis par la Constitution au moment de décider d'engager des poursuites ou non.
    Autrement dit, nous pouvons tenir différentes enquêtes et audiences sur différentes questions. Cela me semble tout à fait approprié. En fait, nous pourrions avoir une enquête judiciaire visant à déterminer, avec un contre-interrogatoire complet et des choses du même genre, si...
    Monsieur Rankin, c'est votre dernière question.
    Je répète simplement au témoin que cela ne signifie pas que nous ne pouvons pas avoir...
    Je comprends.
    Je vais laisser le témoin répondre brièvement, puis nous passerons au prochain intervenant.
    En matière de gouvernance, je ne vois pas en quoi une enquête distincte, redondante et en parallèle avec le travail d'un haut fonctionnaire du Parlement possédant tous ces pouvoirs, jetterait un éclairage supplémentaire sur l'affaire.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Ehsassi.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Tout d'abord, permettez-moi de remercier le greffier de comparaître devant le Comité.
    Après avoir entendu vos remarques, je pense que nous devrions tous nous inquiéter. Vous avez souligné, entre autres, que vous étiez très préoccupé par les allégations des médias. À ce sujet, j'aimerais attirer votre attention sur un article du Globe and Mail du 7 février qui, comme tout le monde le sait, repose uniquement sur une source anonyme.
    Dans cet article, il est mentionné que les allocutions de l'honorable Jody Wilson-Raybould lui ont valu « un reproche privé de la part du greffier du Conseil privé, Michael Wernick ».
    Est-ce exact?

  (1245)  

    Merci de me donner l'occasion de consigner cela au compte rendu. Cela n'est jamais arrivé.
    Je peux étoffer cette réponse, si vous le souhaitez, mais cela ne s'est jamais produit. Je connais l'ancienne procureure générale depuis près de 15 ans. J'étais le sous-ministre de ce qui s'appelait alors Affaires indiennes et du Nord canadien pendant huit ans. Nous avons cheminé ensemble pendant de nombreuses années au cours de nombreux épisodes du processus menant à la réconciliation avec les Autochtones. Je la considérais comme une partenaire, une alliée et une amie, et j'ai trop de respect pour un ministre de la Couronne pour réprimander quelqu'un.
    Cela provient d'une source anonyme au sujet d'une conversation qui aurait eu lieu entre moi et la ministre, et je vous dis que cela ne s'est pas produit.
    Merci.
    Vous avez eu l'amabilité de nous présenter une lettre du Cabinet du premier ministre adressée au Bureau de la procureure générale. Je pense que certains membres du Comité ont laissé entendre qu'il y avait quelque chose qui n'allait pas avec cette lettre.
    À votre avis, à l'examen et à la lecture de cette lettre, y a-t-il quelque chose d'inapproprié?
    Une lettre en provenance de la société demandait une rencontre avec le premier ministre. Le premier ministre a refusé...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Arrêtez la minuterie.
    Oui, un rappel au Règlement.
    Je suis désolée, le député vient d'indiquer que les personnes ici présentes ont implicitement indiqué que cette lettre était... Je ne sais pas quel mot vous avez utilisé, mais personne...
    Je pense que cela sous-entendait qu'il y avait quelque chose...
    Monsieur le président, personne de notre côté n'a dit publiquement quoi que ce soit à propos de cette lettre. En fait, nous venons tout juste de la recevoir ou même d'en être informés.
    Exactement.
    Je pense que ce dont il parlait, c'est que M. Rankin, avant d'avoir reçu une copie de la lettre, avait posé une question à propos de quelque chose qui ne figurait pas dans la lettre, car M. Rankin n'en avait aucune copie. C'est probablement...
    C'est juste. C'est une erreur de bonne foi, mais je n'aime vraiment pas la nature partisane du commentaire de l'honorable député.
    Je comprends.
    Je pense que vous venez d'admettre qu'une erreur a été commise, et j'ai simplement dit que c'était sous-entendu.
    Je vais redonner la parole à M. Ehsassi, et, encore une fois, nous essaierons tous d'obtenir des réponses du témoin. C'est ce que les Canadiens veulent entendre aujourd'hui.
    Revenons au temps de M. Ehsassi.
    Monsieur Ehsassi.
    Comme tout le monde ici le sait, vous êtes essentiellement au sommet de l'appareil gouvernemental.
    Une des choses que vous avez dites, c'est que, tout d'abord, il existe de nombreuses mesures de protection dans notre système, mais vous avez également indiqué que, si quelque chose d'inapproprié se produit, ces cas sont repérés et corrigés.
    Qu'est-ce que vous entendez par là?
    Je faisais allusion à de nombreux mécanismes créés par le Parlement pour protéger la gouvernance au Canada. Je pourrais passer en revue tout un tas d'entre eux. La Commission de la fonction publique est une mesure de protection à l'égard de l'embauche et de la dotation fondée sur le mérite au sein de la fonction publique qui nous met à l'abri du favoritisme. Il existe également le directeur parlementaire du budget et le vérificateur général.
    Près de 14 fonctionnaires et agents du Parlement obligent l'exécutif à rendre des comptes. Il existe des lois sur la transparence et l'accès à l'information. Il y a des politiques sur la transparence du gouvernement. Je pourrais continuer encore et encore, mais quand on compare la gouvernance canadienne à celle d'un autre pays, je pense que les Canadiens devraient avoir l'assurance qu'ils travaillent dans une démocratie fondée sur la primauté du droit.
    Merci de votre réponse. Il existe donc des mécanismes.
    À un moment donné dans vos remarques, vous avez laissé entendre qu'en examinant les structures entourant la directrice des poursuites pénales, vous pensez que, si j'utilise les termes pertinents, comparativement à d'autres administrations, nous avons un très bon système en place.
    Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Je pense que c'est un point important et qu'il serait bon que nous entendions tous vos observations.
    Quiconque suit la politique américaine de nos jours, si vous pouvez le supporter, assistera à des débats animés sur le rôle des procureurs, des grands jurys, des organismes chargés de l'application de la loi, etc. — cela se complique passablement dans le système américain — et sur la question de savoir si des pressions ont été exercées sur les procureurs, si des procureurs généraux ont été renvoyés, qui fait quoi dans le système américain.
    Je pense que les Canadiens doivent être assurés que leur police et leurs enquêteurs, dotés des pouvoirs de l'État, fonctionnent de manière indépendante et que le service des poursuites, où l'État accuse les personnes d'infraction, est totalement indépendant. Un bouclier législatif et réglementaire protège le tout, et il fonctionne manifestement dans le dossier sur lequel se penche le Comité.
    La directrice des poursuites pénales a déclaré par écrit la semaine dernière qu'il n'y avait aucune ingérence politique ou partisane dans la fonction de poursuite.
    Étant donné que trois Canadiens croupissent dans les prisons chinoises en raison de leur détention arbitraire, il est vraiment important de montrer au monde que le Canada fonctionne dans le respect de la primauté du droit.

  (1250)  

    Merci.
    Il reste 35 secondes, monsieur Ehsassi.
    Ça va.
    Nous passons maintenant à la deuxième série de questions.
    Les libéraux disposent de six minutes, et les conservateurs auront également six minutes. Ensuite, il y a de nouveau six minutes pour les libéraux, cinq minutes pour les conservateurs et trois minutes pour le NPD.
    Nous allons commencer avec Mme Khalid.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Wernick. Votre témoignage d'aujourd'hui était très convaincant. Nous sommes reconnaissants du rôle que vous remplissez au sein de la fonction publique du Canada.
    Vous avez mentionné que vous êtes dans la fonction publique depuis plus de 37 ans. En tant que greffier, vous devez avoir vu — et je pense que vous en avez aussi parlé — de multiples gouvernements se succéder. Vous avez été au courant de la façon dont ils mènent leurs activités les uns avec les autres, en tant que collègues, ministres du Cabinet, premiers ministres et fonctionnaires du CPM.
    Pouvez-vous préciser s'il s'agit d'une pratique courante, d'avoir des discussions musclées au sein du Cabinet et entre le premier ministre, les ministres et les représentants du premier ministre au sujet de l'application des politiques et du droit dans des situations qui touchent les Canadiens?
    Je pense que les gouvernements de tous horizons se préoccupent toujours du bien-être des Canadiens et de ce qui se passe. La perte potentielle d'emplois et son incidence sur les familles et les collectivités présentent toujours un intérêt. Ce pourrait être des travailleurs du pétrole à Calgary, pour reprendre un sujet de cette semaine. Il pourrait s'agir de travailleurs de l'automobile à Oshawa.
    Ce pourrait être n'importe où au Canada. Aucun gouvernement n'est indifférent au progrès économique des collectivités du pays. La perte d'emplois est une chose dont tous les gouvernements avec lesquels j'ai travaillé se préoccupent; ils y prêtent attention et surveillent la situation.
    Dans l'affaire SNC-Lavalin, il y a clairement des pertes d'emplois potentielles et des répercussions économiques sur les travailleurs, les fournisseurs, les retraités et les collectivités. Ce n'est pas un secret. Il en est question dans la publicité placée par la société dans les journaux nationaux. C'est mentionné dans les déclarations de deux premiers ministres du Québec.
    La décision de poursuivre ou de ne pas poursuivre, de négocier un accord de réparation ou pas comporte des conséquences. Chaque décision prise par le ministre a des conséquences pour les autres. Voilà ce qu'il en est. Le poste de procureur général en est un particulièrement puissant au pays, car c'est le premier conseiller juridique de l'État, et il possède des pouvoirs très précis en ce qui concerne le rôle de l'État et la façon dont il fait affaire avec les Canadiens et les entreprises canadiennes.
    Je rappelle vos propos: vous avez dit que, quelles que soient les discussions, la décision revient en définitive au procureur et au procureur général.
    Certainement, dans le cas de la responsabilité d'engager des poursuites...
    Je vais prendre quelques secondes pour dire que je travaille en très étroite collaboration depuis trois ans, presque quotidiennement, avec le gouvernement actuel, le Cabinet actuel et le Cabinet du premier ministre actuel. D'après mes observations et mon expérience, ils ont toujours, dans l'ensemble, respecté les normes d'intégrité les plus élevées. Vous n'aimerez peut-être pas leurs politiques, leurs positions ou leurs gazouillis, mais ils se sont toujours efforcés de faire ce qui est juste, de leur propre point de vue, de la bonne façon.
    Merci.
    Un peu plus tôt, vous avez parlé des accords de réparation en tant qu'outils.
    J'espère que vous pourrez nous aider à comprendre un peu. On croit à tort que les accords de réparation peuvent être un moyen de s'en sortir les mains blanches. Pouvez-vous préciser pour nous en quoi ils consistent exactement? De quelle façon sont-ils un outil?
    Je poserai ensuite une question complémentaire.
    Je pense que vous aviez de meilleurs témoins juste avant moi pour expliquer les détails.
    Selon ce que je comprends, un accord de poursuite suspendue est exactement ce qu'il dit: le procureur suspend la tenue d'un procès et une condamnation en échange d'un accord. L'accord est contraignant; il est doté d'outils de conformité, est sous surveillance judiciaire et peut être révoqué. Il s'agit essentiellement d'une peine alternative ou d'un accord relatif à une peine alternative. C'est un peu comme lorsque des personnes sont accusées de crimes: il existe des options de justice réparatrice.

  (1255)  

    Merci.
    Est-il normal que le premier ministre, les ministres et le procureur général discutent de l'utilisation de ce type d'outils dans la conduite de leurs affaires?
    La loi qui les a créés n'a vu le jour que l'année dernière. Elle a été débattue au Parlement et est entrée en vigueur en septembre 2018.
    Existe-t-il d'autres normes dans d'autres pays?
    Son utilisation éventuelle, qui a été préconisée par cette société en particulier, constituerait une première. Une discussion animée a eu lieu pour savoir si cet instrument devrait être adopté ou non au Canada. Vous entendrez d'autres témoins à ce sujet. C'est un véritable dilemme pour les gouvernements: les travailleurs, les retraités, les fournisseurs et les collectivités devraient-ils payer le prix de la criminalité d'entreprise?
    Dans les communications avec les Canadiens pendant la campagne électorale, je pense que chacun de vos partis peut indiquer très clairement aux Canadiens si vous pensez que cet outil devrait rester dans la boîte, être abrogé, modifié ou amélioré. C'est une tentative de résoudre ce dilemme selon lequel des personnes innocentes ne devraient pas payer pour les infractions des dirigeants de société.
    Merci.
    Très brièvement, j'avais posé des questions à Mme Drouin au sujet de la norme de la doctrine Shawcross et de la mesure dans laquelle celle-ci exerçait une pression. Puis-je avoir votre avis là-dessus également? Est-ce une norme subjective ou objective, et jusqu'où va-t-elle?
    Je pense que toute communication ou conversation, verbale, par message texte ou par courrier électronique, peut être sujette à interprétation en ce qui concerne son but, son intention, s'il y avait des sous-entendus, peu importe. Je ne suis pas sûr que ce soit toujours parfaitement objectif. Vous pouvez lire la même transcription et y attribuer un motif, une intention ou un but, etc.
    Je prévois que l'ancienne procureure générale fera part au Comité de ses préoccupations concernant trois événements. Le premier est la rencontre avec le premier ministre, que je suis disposé à vous décrire en détail, car j'étais présent pendant toute la rencontre. Le deuxième est une conversation entre le personnel du Cabinet du premier ministre et l'ancien chef de cabinet de Mme Wilson-Raybould, le 18 décembre, lorsqu'elle était ministre de la Justice. Le troisième est une conversation que j'ai eue avec elle l'après-midi du 19 décembre.
    Elle pourra vous dire la semaine prochaine comment elle interprète ou perçoit ces conversations. Je peux vous dire avec conviction qu'elles étaient tout à fait appropriées, légales, légitimes. Je suis prêt à souscrire au jugement du commissaire à l'éthique à cet égard.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Cela m'amène à M. Cooper. Je suis sûr qu'il a des questions.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Wernick.
    Nous avons la lettre du 6 décembre 2018, dans laquelle le premier ministre a répondu à M. Bruce, chef de la direction de SNC-Lavalin.
    Serez-vous également en mesure de déposer la lettre du 15 octobre 2018 de M. Bruce au premier ministre?
    Je suis presque certain de pouvoir la récupérer dans la correspondance.
    Merci beaucoup.
    Je veux poser des questions sur la rencontre avec le premier ministre. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Puis-je ramener le Comité en septembre? La rencontre a eu lieu le 17 septembre.
    Je vais vous révéler un secret. N'y voyez pas de désinvolture de ma part ici. En septembre, les priorités du gouvernement et du premier ministre étaient l'ALENA, l'ALENA, l'ALENA et l'ALENA. C'était une question dévorante pour le premier ministre et ses cadres supérieurs. M. Butts et Mme Telford ont été complètement absorbés par les négociations de l'ALENA, qui ont abouti le 30 septembre, et n'étaient pas disponibles pour la plupart des activités normales.
    Je me suis engagé avec d'autres personnes du Cabinet du premier ministre à faire en sorte que le reste des dossiers du gouvernement continue de progresser afin que le gouvernement ne soit pas paralysé. L'un de ces dossiers concernait la réconciliation avec les peuples autochtones.
    Non. Je veux seulement en arriver à la rencontre du 17 septembre entre Jody Wilson-Raybould et le premier ministre.
    Oui, et j'y arrive. Le but de la rencontre, et plus de 90 % de la conversation, a porté sur la reconnaissance du cadre des droits.
    Non. Je veux savoir ce qui concernait l'affaire SNC-Lavalin. Je me fiche du reste. Je veux en savoir plus sur l'affaire SNC-Lavalin.
    Oui, et la description qu'a faite le premier ministre de cette discussion est exactement celle dont je me souviens.

  (1300)  

    En quoi cela consistait-il? Que c'était son choix?
    Il a indiqué que c'était entièrement sa décision, que c'était elle qui décidait. C'est le message...
    D'accord, merci.
    C'est le message que le premier ministre a transmis à la ministre dans chaque situation où il en a été question, à ma connaissance.
    Même si, monsieur Wernick, la décision avait déjà été prise.
    Vous avez ensuite rencontré encore une fois le lendemain des représentants de SNC-Lavalin, n'est-ce pas?
    Je leur ai dit que...
    ... le 18 septembre...
    ... je leur ai dit que la seule...
    ... et au cours de la réunion...
    Si vous me laissiez terminer...
    J'ai dit à l'entreprise que la seule option qu'elle avait, c'était ses avocats et le processus judiciaire.
    Bill Morneau assistait à la réunion, n'est-ce pas?
    À la réunion avec l'entreprise à laquelle j'ai assisté? Non.
    Le 18 septembre, Bill Morneau n'était pas présent?
    Non. Comme je crois l'avoir indiqué dans une réponse précédente, j'étais présent avec un fonctionnaire du Conseil privé et mon sous-secrétaire aux opérations, et il y avait trois personnes de l'entreprise.
    D'accord. Merci de votre réponse.
    Vous avez également dit que SNC-Lavalin vous avait envoyé plusieurs demandes et que vous aviez déjà rencontré ses représentants à cet égard. Est-ce le cas?
    Je peux vous parler de toute la chronologie de mes contacts avec SNC, si vous le souhaitez.
    Allez-y.
    Je serai heureux de le déposer.
    Déposez-le.
    Il y a eu des courriels...
    Non, je vous ai demandé de le déposer.
    Non, j'aimerais que ce soit consigné au compte rendu, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    Allez-y.
    Il y a eu des demandes par courriel pour la tenue d'une réunion en mai 2017, réunion à laquelle je n'ai pas assisté. Il y a eu des demandes par courriel pour la tenue d'une réunion en août 2017, réunion à laquelle je n'ai pas assisté. Il y a eu des demandes par courriel pour la tenue d'une réunion en septembre 2018. C'est la réunion à laquelle j'ai assisté, ce qui est enregistré.
    J'ai croisé des dirigeants de SNC au gala du CNA. Je me souviens de cette soirée. Diana Ross était là. Ils avaient acheté une table au gala. Dès que j'ai vu qu'ils étaient présents, mon épouse et moi avons quitté l'événement, sommes retournés à la maison et avons manqué un bon souper.
    J'ai reçu une demande de...
    Non. Mon temps va être écoulé...
    Non, je crois qu'il est important de consigner cela au compte rendu.
    Non. Je crois que nous pouvons le déposer.
    Monsieur Wernick, à la fin de la séance, je vais vous donner l'occasion de consigner cela au compte rendu. D'accord? Nous allons nous assurer que cela y figure.
    Monsieur Cooper, vous pouvez continuer.
    Lors de la réunion du 17 septembre entre le premier ministre et l'ancienne procureure générale, est-ce que celle-ci a informé le premier ministre de la décision prise le 4 septembre par la directrice des poursuites pénales de ne pas entamer de négociations avec SNC-Lavalin?
    Je crois qu'elle a dit au premier ministre qu'elle pensait qu'un accord de poursuite suspendue n'était pas une bonne solution et qu'elle n'avait aucune intention d'intervenir. Et, en effet, elle n'est jamais intervenue.
    Je vous ai demandé précisément si elle avait soulevé la question de la décision du 4 septembre.
    Je ne me rappelle pas que la question a été soulevée. Ce n'était pas aussi précis. C'était deux ou trois minutes au cours d'une longue réunion sur le cadre de reconnaissance des droits et l'importance d'aller de l'avant avec ce programme. Vous vous rappellerez que le premier ministre a fait un discours au Parlement le jour de la Saint-Valentin l'an passé affirmant qu'il voulait qu'on annonce un cadre de reconnaissance des droits.
    D'accord.
    Nous étions en septembre. Cela n'allait pas de l'avant. On a convoqué la réunion pour faire avancer le cadre de reconnaissance des droits...
    Quand...
    ... qui était une question dont était saisi le Cabinet à ce moment-là.
    Merci. Je comprends cela, monsieur Wernick.
    Quand avez-vous appris que le premier ministre allait renvoyer Jody Wilson-Raybould, la rétrograder...
    Le ministre...
    ... la révoquer, lui retirer son poste de procureure générale?
    La ministre a démissionné.
    Quand avez-vous appris qu'elle changerait de ministère?
    C'est la question de M. Cooper.
    En janvier.
    J'ai rencontré la ministre le 19 décembre. J'ai également dîné avec le premier ministre et un haut fonctionnaire le 19 décembre pour une synthèse de fin de session. Oh mon Dieu, ce fut une session difficile. Nous avons discuté longuement de la planification pour janvier et de la retraite du Cabinet à Sherbrooke, qui a eu lieu vers les 16 et 17 janvier.
    À ce moment-là, le 19 décembre, il n'y avait aucune intention de procéder à un remaniement ministériel avant les élections. C'est la promenade dans la neige du ministre Brison qui a déclenché le remaniement ministériel. C'est le départ du ministre Brison, qui voulait quitter ses fonctions rapidement, qui a créé le problème suivant pour le premier ministre. « J'ai besoin d'un nouveau président du Conseil du Trésor. J'ai besoin d'un ministre de la Nouvelle-Écosse. Je dois maintenir l'équilibre entre les hommes et les femmes dans mon Cabinet et résoudre ce problème en faisant le moins de déplacements possible. » Ces discussions ont eu lieu la première semaine de janvier, lorsque tout le monde est retourné au travail.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant le tour de M. Fraser.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Wernick, merci d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais revenir aux trois réunions dont vous avez parlé tout à l'heure. J'aimerais clarifier les choses à propos des trois réunions dont nous parlons, de leur nature, des personnes présentes et de ce qui a fait l'objet des discussions.
    La première réunion que vous avez mentionnée, à laquelle vous avez assisté avec le premier ministre concerne des discussions qui sont pertinentes pour la séance d'aujourd'hui. Pourriez-vous nous dire qui était présent à cette réunion?

  (1305)  

    Il y avait le premier ministre, la ministre et moi. La réunion a été convoquée concernant la question du cadre de reconnaissance des droits et une divergence marquée sur le plan politique entre la ministre Wilson-Raybould, la ministre Bennett et d'autres collègues relativement à la façon d'aller de l'avant. Le premier ministre était prêt à faire avancer le dossier et à le faire progresser et il a parlé de cette question à la ministre. La discussion a porté presque entièrement là-dessus.
    La question a fini par être renvoyée au nouveau comité du Cabinet chargé de la réconciliation peu de temps après. Elle a été présentée au Cabinet plénier. On a décidé de ne pas aller de l'avant avec le cadre de reconnaissance des droits et de mettre plutôt l'accent sur les mesures législatives sur les langues et celles sur les services aux enfants et aux familles.
    La deuxième réunion que vous avez mentionnée concernait le personnel du CPM. Quand a-t-elle eu lieu?
    Je crois que la ministre vous dira qu'il y a eu certaines discussions entre le personnel du CPM et sa chef de cabinet le 18 décembre. Je n'étais pas présent et je ne connais pas la teneur de cette réunion.
    La troisième réunion était la discussion du 19 décembre que vous avez eue avec Mme Wilson-Raybould, je suppose.
    Oui. Je l'ai appelée au cours de l'après-midi du 19 décembre pour m'informer du dossier de SNC-Lavalin et d'autres choses afin de me préparer pour le mois de janvier. Je l'appelais compte tenu de son titre de ministre de la Justice.
    Je me souviens, en pensant à janvier et aux questions qui allaient revenir, que nous devions agir rapidement en raison du retour à la Chambre et ainsi de suite. Il y avait un certain nombre de dossiers et d'enjeux juridiques qui s'en venaient. J'ai donc consulté la ministre de la Justice à propos de la question et du développement probable, et je lui ai demandé si un accord de poursuite suspendue était encore une option.
    Je lui ai dit que nombre de ses collègues et le premier ministre étaient très inquiets de ce qu'ils entendaient et lisaient dans la presse financière concernant l'avenir de l'entreprise et les options dont on discutait ouvertement en ce qui a trait à la poursuite des activités de l'entreprise ou à sa fermeture.
    Je peux vous dire avec beaucoup d'assurance que, à mon avis, ces discussions ont été tenues dans les limites de ce qui est légal et approprié. J'informais la ministre du contexte. Elle a peut-être un autre point de vue sur la discussion, mais c'est quelque chose que pourrait déterminer le commissaire à l'éthique.
    Dans cette discussion, vous a-t-on dit ou aviez-vous des raisons de croire que des pressions indues avaient été exercées sur Mme Wilson-Raybould ou qu'on lui avait donné des directives inappropriées relativement à ce dossier?
    Aucune pression indue n'a été exercée sur la ministre en aucun moment.
    Et elle ne vous a jamais fait part d'inquiétudes à ce sujet?
    Cela me donne l'occasion de soulever deux choses.
    Si elle sentait, en septembre, en octobre, en novembre ou en décembre, ou à n'importe quel moment qu'on exerçait sur elle des pressions indues, elle avait des recours. Elle aurait pu, à tout moment, appeler le commissaire à l'éthique ou communiquer avec le premier ministre.
    Le premier ministre est disponible par l'entremise de la console 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, et il travaille 7 jours par semaine. On l'interrompt tout le temps pour des appels de dirigeants étrangers, des questions de sécurité ou pour l'avertir de quelque chose.
    Tous les ministres peuvent joindre le premier ministre. À l'exception de quelques moments dans son horaire où il peut profiter de temps personnel, par exemple, chaque ministre du Cabinet peut le joindre. Il y a également plusieurs réunions du Cabinet à l'occasion desquelles les gens se trouvent dans la même pièce que lui et ont l'occasion de lui demander de discuter d'un sujet de façon informelle pour en parler. »
    La ministre aurait pu exprimer ses préoccupations au premier ministre à de nombreuses occasions, et chaque jour elle aurait pu prendre le téléphone et appeler le commissaire à l'éthique.
    Croyez-vous que l'enquête en cours du commissaire à l'éthique sur cette question examinera les discussions tenues entre l'ancienne procureure générale, le premier ministre et le personnel du CPM?
    C'est dans cette optique qu'il a demandé la production de documents. C'est une demande présentée au premier ministre qui vise le Cabinet et le ministère du premier ministre.
    Nous avons immédiatement commencé, dès que l'a demandé le commissaire à l'éthique, à rassembler les documents et à nous assurer que tous les dossiers seraient accessibles lorsque le commissaire les demanderait ou rencontrerait des gens en entrevue.

  (1310)  

    Savez-vous où en sont les choses en ce moment?
    Le commissaire à l'éthique n'a pas communiqué avec moi personnellement. La dernière chose que je vais faire, c'est m'immiscer dans le processus. Le commissaire à l'éthique établit le processus à son propre rythme et de son propre chef, et il exercera ses fonctions comme bon lui semble.
    D'accord. Merci. C'étaient mes questions.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Paul-Hus.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur Wernick.
    En tant que greffier du Conseil privé, vous devez être en mesure de savoir ceci: le 4 septembre, lorsque la direction des poursuites pénales a avisé SNC-Lavalin que l'accord de réparation ne fonctionnait pas, le Cabinet du premier ministre en a-t-il été informé?

[Traduction]

    Je ne sais pas.

[Français]

    D'accord.
    Vous ne savez pas à quel moment le Cabinet en a été informé?
    Non. Je n'ai pas connaissance de toutes les communications qu'il y a avec le Cabinet du premier ministre, mais je peux vérifier cela auprès de mon ministère.
    Monsieur le président, j'aimerais qu'il y ait une vérification pour savoir à quel moment le Cabinet du premier ministre a été informé de la décision de la directrice des poursuites pénales.
    Monsieur Wernick, vous nous confirmez que, le 17 septembre, le Cabinet du premier ministre a convoqué Mme Wilson-Raybould pour une rencontre. À ce moment-là, vous étiez présent et il n'y a pas eu de pression exercée sur Mme Wilson-Raybould dans le dossier SNC-Lavalin. Est-ce bien ce que vous nous avez dit?

[Traduction]

    Si elle pensait qu'il y avait des pressions au cours de cette discussion, elle aurait dit quelque chose dans les trois mois qui ont suivi.

[Français]

    Le 10 octobre, SNC-Lavalin a publié un communiqué destiné aux actionnaires mentionnant que, pour l'instant, elle n'était pas invitée à avoir un accord de réparation. Vous nous mentionnez que, cinq jours plus tard, SNC-Lavalin a écrit une lettre au premier ministre Trudeau.
    J'aimerais obtenir copie de cette lettre, monsieur le président.
    Continuons. Entre la lettre du 15 octobre et le 5 décembre, c'est une période où on n'a pas de nouvelles. Le 5 décembre, M. Butts rencontre Mme Wilson-Raybould au Château Laurier. On ne sait pas ce qui s'est dit à cette rencontre, bien évidemment.
    Aujourd'hui, vous nous transmettez deux lettres datées du 6 décembre, soit le lendemain de la rencontre avec M. Butts. Dans une de ces lettres, on informe SNC-Lavalin, en réponse à sa lettre du 15 octobre, qu'elle doit travailler avec Mme Wilson-Raybould, qui est la procureure générale.
    Donc, entre le 15 octobre et le 6 décembre, il n'y a eu aucune communication. À la suite de la rencontre du 5 décembre avec M. Butts, une lettre est envoyée à SNC-Lavalin, et en même temps, le premier ministre Trudeau écrit à Mme Wilson-Raybould qu'il a reçu une lettre le 15 octobre l'informant qu'il doit s'en occuper. Toute la correspondance fait suite à la rencontre avec M. Butts, parce que, entre le 15 octobre et le 5 décembre, il ne s'est rien passé. Il y a eu une rencontre le 5 décembre, et le lendemain matin, deux lettres sont envoyées.
    Me confirmez-vous cela, monsieur Wernick?
    Il n'y a aucun lien entre les deux.
    D'accord. C'est juste un hasard.
    Oui. La direction de la correspondance de mon ministère a reçu une lettre de la compagnie demandant une rencontre. Cela a pris beaucoup de temps pour rédiger une réponse et la faire signer. C'est tout à fait normal. Ce n'était aucunement une communication avec le Cabinet. C'était une correspondance de routine.
    Dans vos propos d'ouverture, vous avez été très direct au sujet de votre conception de l'état du droit. C'est pour cette raison que le Comité se rencontre et que l'opposition travaille fort ici pour faire la lumière sur ce qui s'est passé, ou se serait passé.
    Vous êtes parfois présent aux rencontres avec le premier ministre, parfois non. Vous n'êtes pas toujours présent lors des rencontres du premier ministre avec ses ministres.
    D'accord.
    Est-ce possible qu'il y ait eu de l'ingérence et que vous ne soyez pas au courant?
    C'est complètement hypothétique.
    Est-ce possible qu'il y ait eu des discussions et de l'ingérence et que vous n'en soyez pas au courant? Vous n'êtes pas au courant de tout ce qui se passe dans les bureaux lors de ces rencontres.
    S'il y a eu une autre rencontre ou une conversation entre le premier ministre et la ministre, la ministre pourra le confirmer la semaine prochaine.
    Parfait.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Barrett, vous avez la parole.

[Traduction]

    Monsieur le greffier, vous avez dit que, à votre avis, il n'y a aucun secret professionnel en jeu. Qui a dit au premier ministre que c'était le cas?
    Aucun avis juridique officiel n'aurait été émis par le Bureau du Conseil privé. Je ne sais pas comment répondre à cette question.
    D'accord, alors ni le BCP ni la procureure générale n'ont émis d'avis au premier ministre sur la question.

  (1315)  

    Je crois que c'est en réalité l'ancienne ministre qui a été la première à dire qu'il y avait des questions de secret professionnel, si vous vérifiez la chronologie.
    D'accord.
    A-t-on, à un moment donné, présenté un mémoire au Cabinet ou une recommandation ministérielle afin de diriger, d'aviser, d'encourager ou d'influencer d'une manière ou d'une autre la procureure générale pour qu'elle crée les conditions dans lesquelles SNC-Lavalin obtiendrait un accord de poursuite suspendue?
    Non.
    Comme vous le savez peut-être, M. Cooper, devant ce comité, a demandé le dépôt de documents, et cela n'a pas été approuvé par le Comité. Ce que j'aimerais vous demander maintenant, c'est ce qui suit: seriez-vous disposé à vous engager à fournir tous les documents en votre possession qui se trouvent sur des appareils personnels et gouvernementaux?
    Monsieur Barrett, je dois vous aviser que, lorsque les questions sont discutées à huis clos, seules les motions qui ont été adoptées sont publiques.
    N'était-ce pas à huis clos?
    C'est pourquoi... Je suis le président et je vous en informe.
    La motion était publique.
    Encore une fois, vous auriez pu dire que M. Cooper a présenté un avis de motion indiquant cela.
    De toute façon, je vais vous laisser terminer votre question et je vais laisser répondre le témoin, mais je veux juste souligner qu'à l'avenir, c'est...
    Merci, monsieur le président.
    Seriez-vous prêt à vous engager à fournir tous les documents en votre possession qui se trouvent sur des appareils personnels et gouvernementaux et qui sont liés à la poursuite de SNC-Lavalin, toute communication entre le bureau de la ministre de la Justice et procureure générale, le ministère de la Justice, le Service des poursuites pénales du Canada, le Cabinet du premier ministre et le Bureau du Conseil privé?
    Je vais respectueusement devoir refuser. Ces demandes ont été présentées par le mandataire du Parlement qui travaille pour vous, et je vais respecter pleinement la demande de dépôt de documents du commissaire à l'éthique.
    Merci beaucoup.
    Les membres du Comité ne peuvent-ils pas demander des documents?
    Encore une fois, vous pouvez les demander. Il a refusé. Le Comité peut procéder à un vote pour demander ces documents si une motion est présentée en bonne et due forme. Encore une fois, nous sommes présentement...
    Je crois que cette réponse parle d'elle-même.
    Nous avons fait le tour de ces questions, alors nous allons passer à M. Rankin.

[Français]

     Pouvez-vous confirmer que M. Fortin aura l'occasion de...
    Nous allons le demander après que vous aurez écoulé votre temps de parole, parce que je ne veux pas que vous le perdiez. C'est une question à laquelle devra répondre le Comité, pas moi.
    S'il est nécessaire de le faire, je suis contre.

[Traduction]

    On va arrêter le temps de M. Rankin.
    Est-ce que le Comité est d'accord pour donner à M. Fortin trois minutes supplémentaires pour ce témoin?
    Des députés: Oui.
    Le président: Monsieur Rankin, vous avez trois minutes.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Monsieur le greffier, vous avez dit que — et je cite votre réponse à une question d'un député libéral — « aucune pression indue n'a été exercée sur la ministre à aucun moment ». Toutefois, vous avez reconnu que son expérience n'est peut-être pas celle que vous avez constatée dans une réunion précise ou d'autres.
    De même, vous devez certainement reconnaître qu'elle a pu, à un autre moment et à un autre endroit et sans que vous soyez au courant, assister à des réunions avec des ministres et, en effet, avec le premier ministre et peut-être les gens du Cabinet du premier ministre, de qui elle a peut-être senti des pressions indues. Par conséquent, dire qu'elle n'a subi aucune pression indue à aucun moment est vraiment une conclusion que vous ne pouvez pas tirer.
    Ma conclusion et mon affirmation, qui sont fondées sur tous les renseignements dont je dispose, sont qu'aucune pression indue n'a été exercée sur la ministre de la Justice à ce sujet.
    Vous venez de reconnaître, cependant, que vous ne pouvez pas parler de son expérience. Elle a hâte de raconter sa version. Elle a dit aux Canadiens qu'elle voulait le faire. Également, on a invoqué des principes, comme celui du secret professionnel, qui, avec tout le respect que je vous dois, peut ne pas s'appliquer ici selon ce que vous nous avez dit. Je crois que nous devons entendre la ministre au lieu que vous nous disiez ce que vous croyez qu'elle a vécu.
    Eh bien, je crois qu'il faudra peut-être s'en remettre à l'avis du commissaire à l'éthique concernant une discussion entre deux personnes et ce qui a été envoyé et reçu. Je pense que le commissaire à l'éthique est la bonne personne pour déterminer ce qui constituait des pressions indues ou ce qui était inapproprié.
    Si on ne lui a jamais donné de directives, elle a certainement été congédiée. Voilà les faits.
    Oh, je suis désolé. Je voulais dire qu'elle a été mutée.
    Voilà les faits, alors comment pouvez-vous ne pas reconnaître qu'elle a peut-être senti un peu de pression dans ces circonstances?
    Pendant qu'elle était ministre de la Justice, elle a décidé de ne pas procéder à un accord de poursuite suspendue. Et elle n'a pas été congédiée. On lui a offert un autre poste au Cabinet parce qu'on a procédé à un remaniement au début du mois de janvier, et elle a accepté cet autre poste. Il y a eu des discussions entre le premier ministre et la ministre pendant cette semaine-là. Je crois que c'était autour du 6 et du 7 janvier. Je n'ai pas participé à ces discussions. Elles se sont tenues entre le premier ministre et l'ancienne ministre.
    Elle a eu toutes les occasions pendant ces discussions de dire si elle sentait des pressions. Elle aurait pu, à tout moment après ma discussion du 19 décembre avec elle, prendre le téléphone et appeler le commissaire à l'éthique ou le premier ministre. Elle a discuté avec le premier ministre à propos d'accepter une nouvelle responsabilité au Cabinet, et, bien honnêtement, je ne vois pas cela comme une rétrogradation. C'était un autre...

  (1320)  

    Je n'ai pas utilisé ce mot. J'ai dit qu'elle avait « été mutée ». Elle a été congédiée de son poste de procureure générale...
    On lui a offert un autre...
    On lui a retiré ce rôle, et elle a ensuite changé de poste puis quitté le Cabinet. Voilà les faits.
    Eh bien, mon point de vue là-dessus... Le fait est qu'on lui a offert un autre siège au Cabinet, c'est un privilège qui est accordé à 1 % de 1 % de 1 % des Canadiens.
    Elle ne l'a peut-être pas perçu de cette façon.
    Alors, elle aurait pu refuser l'offre de ce siège.
    Et elle l'a fait plus tard.
    Nous sommes à trois minutes.
    Monsieur Fortin.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Wernick, pouvez-vous me dire si, préalablement à votre témoignage ici ce matin, vous avez discuté avec l'un des membres du présent comité de la teneur de votre témoignage?
    Non.
    Aucun d'entre nous, jamais, n'a eu de discussion avec vous au sujet de votre témoignage avant que vous vous assoyiez dans cette chaise?
    Non, à part une plaisanterie au café, absolument pas.
    D'accord.
    Je n'ai discuté de mon témoignage avec personne, à l'exception d'un avocat du ministère de la Justice.
    D'accord.
    Êtes-vous au courant des motifs pour lesquels la précédente ministre de la Justice a été mutée au ministère des Anciens Combattants?

[Traduction]

    Cela relève de la logique d'un remaniement ministériel.
    Je ne crois pas que c'est un grand secret. La démission de Scott Brison a créé un poste vacant au Conseil du Trésor. Le problème auquel faisait face le premier ministre, c'est qu'il devait remplacer le président du Conseil du Trésor, maintenir une personne de la Nouvelle-Écosse au Cabinet et préserver l'équilibre entre les hommes et les femmes. Voilà les discussions qui ont eu lieu au cours de la première semaine de janvier.

[Français]

    Merci.
    Est-ce que vous avez discuté avec Mme Wilson-Raybould après qu'elle a été mutée au ministère des Anciens Combattants? Avez-vous discuté avec elle de la question de sa mutation?
    J'étais présent à la cérémonie d'assermentation. C'est moi dans la photo d'assermentation. Cela n'a pas été soulevé. Elle est venue à la retraite des ministres à Sherbrooke pendant trois jours. Elle n'a pas soulevé la question, ni avec moi ni avec le premier ministre, non.
    Cela n'a été fait en aucune circonstance après sa mutation?
    Elle a participé à deux autres rencontres du Cabinet et elle n'a soulevé la question ni avec moi...
    Donc, vous, personnellement, n'avez eu aucune conversation avec elle à ce sujet?
    Non.
     Vous étiez très près d'elle. Tantôt, vous nous avez dit que vous aviez occupé un certain poste pendant huit ans où vous étiez près d'elle, avant qu'elle soit ministre de la Justice. Je ne me rappelle plus exactement quel poste vous occupiez alors.
    Oui, je la connais depuis à peu près 13 ans.
    Et en aucune circonstance, après sa mutation, elle ne vous en a parlé?
    Parlé de quoi?
    De sa mutation du poste de procureure générale et ministre de la Justice à celui de ministre des Anciens Combattants.
    Non. Je pense que la seule communication qu'elle a eue était la lettre qu'elle a envoyée à ses anciens employés du ministère de la Justice.
    D'accord.
    J'ai une dernière question, monsieur Wernick.
    Êtes-vous au courant s'il y a eu des discussions entre le bureau du premier ministre et le gouvernement du Québec concernant les éventuels accords de réparation qui pourraient intervenir dans le dossier de SNC-Lavalin?
    Non, je n'en ai aucune connaissance.
    À votre connaissance, il n'y a jamais eu de discussions entre le bureau du premier ministre et des représentants du premier ministre du Québec sur cette question?
    Je ne le sais pas. Je n'ai aucune connaissance des conversations entre les conseillers politiques fédéraux et ceux des autres gouvernements.
    Votre temps de parole est écoulé, monsieur Fortin. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Wernick, merci beaucoup encore une fois de vos 37 ans de service pour les Canadiens.
    J'invoque le Règlement.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je sais que, au début, M. Wernick a été très généreux en disant qu'il serait heureux de rester ici aussi longtemps que nous le souhaitions afin d'aller au fond des choses. Évidemment, nous avons plus de questions du côté de l'opposition, et j'aimerais proposer que l'on invite M. Wernick à demeurer avec nous une autre heure.
    J'appuie la motion.
    Un moment s'il vous plaît.
    Il est 13 h 25.
    Nous pourrions peut-être poursuivre une heure de plus afin que nous puissions tenir une autre série de questions. C'est le temps que j'ai retenu.
    C'est que nous allons nous rendre à la période des questions.
    Cette motion peut-elle faire l'objet d'un débat?
    Le greffier: Oui.
    Le président: La motion est sujette à débat.
    D'accord.
    Je veux juste savoir si votre intention est de continuer jusqu'à 14 h 25. Il est maintenant 13 h 25.
    Voyons comment va se dérouler la discussion. S'il y a une négociation pour que l'on continue jusqu'à 14 h 15, je serais prête à accepter.

  (1325)  

    Je comprends.
    Monsieur Fraser.
    Évidemment, une motion a été adoptée concernant la liste des témoins, y compris une motion concernant le déroulement du témoignage du témoin. Cela devait durer une heure. Il était entendu qu'on tiendrait deux séries de questions. Ce temps est écoulé. Je pense que c'est conforme à d'autres motions qui ont été présentées, et, par conséquent, je crois que c'est la fin de la séance.
    Merci.
    Une motion a été présentée, alors vous devez la rejeter.
    Y a-t-il d'autres commentaires sur cette motion?
    Demandez la mise aux voix.
    Monsieur le président, peut-on procéder à un vote par appel nominal?
    Bien sûr.
    J'invoque le Règlement. Est-il possible de demander un vote dans le cadre d'un rappel au Règlement?
    Est-il possible d'invoquer le Règlement...
    La motion a été présentée dans le cadre d'un rappel au Règlement. Est-ce possible?
    Je suis d'accord. On ne peut pas normalement présenter une motion dans le cadre d'un rappel au Règlement, mais elle avait la parole et elle aurait pu présenter sa motion sans dire qu'elle invoquait le Règlement lorsque je lui ai donné la parole.
    Quoi qu'il en soit, nous pouvons débattre de la motion parce qu'elle aurait été présentée à un moment donné. Si Mme Raitt n'avait pas dit qu'elle invoquait le Règlement, je lui aurais quand même donné la parole par courtoisie.
    Cela dit, passons au vote.
    Pourrions-nous suspendre la séance pour cinq minutes, monsieur le président?
    Certainement. S'il faut discuter, suspendons la séance avant le vote.

  (1325)  


  (1325)  

    Mesdames et messieurs, je suis désolé, je ne vous ai pas donné une minute cette fois-ci.

[Français]

     Nous allons recommencer. Il y a une entente entre les partis pour commencer un autre tour de table de 24 minutes divisé comme ceci: 6 minutes pour les conservateurs, 6 minutes pour les libéraux, 6 minutes pour les néodémocrates et 6 minutes pour les libéraux.

[Traduction]

    Nous allons poursuivre et procéder à une série normale de questions de six minutes de chaque côté quatre fois, et je crois qu'il y a consensus, alors nous allons seulement convenir que la motion est modifiée en conséquence et qu'il y a consentement unanime à cet égard.
    Merci à tous de votre collaboration.
    Voilà, mesdames et messieurs, la façon collégiale normale dont fonctionne le Comité de la justice sur la plupart des questions.
    Il s'agit d'une série de questions de six minutes. Les conservateurs commencent, alors qui prend la parole?
    Madame Raitt.
    Monsieur Wernick, au début d'une de nos séries de questions, vous avez affirmé que vous aviez une chronologie des événements. J'aimerais l'entendre et qu'elle soit consignée au compte rendu. Je sais que nous vous avons dit que vous auriez l'occasion de le faire plus tard.
    À mon avis, les éléments d'information les plus importants que vous nous avez donnés aujourd'hui sont les trois réunions à propos desquelles mon collègue de l'autre côté vous a posé des questions plus tôt, mais vous pourriez les situer en contexte pour nous en commençant vers le milieu de l'été 2018, en parlant soit des discussions que vous avez eues avec le premier ministre et Mme Wilson-Raybould ou de celles que vous avez eues avec SNC-Lavalin. Pourriez-vous nous donner la chronologie du mieux que vous le pouvez? Cela serait extrêmement utile.

  (1330)  

    Ce qui pourrait être pertinent pour vous, c'est de savoir d'où viennent les accords de poursuite suspendue. Ils n'apparaissent pas dans le droit canadien par l'opération du Saint-Esprit. Ils découlent de projets de loi du gouvernement à la suite d'une discussion au Cabinet...
    Oui, nous avons compris cela.
    On a tenu une discussion au Cabinet au printemps. Je peux avoir les dates. Aucun ministre sauf le ministre de la Justice ne modifie le Code criminel, alors l'ancienne ministre de la Justice et la ministre responsable de l'approvisionnement ont évidemment été celles qui ont proposé les accords de poursuite suspendue et parrainé le projet de loi; au cours de cette discussion, on aurait parlé de SNC dans le contexte du genre d'entreprises et d'infractions qui pourraient justifier des accords de poursuite suspendue.
    D'accord.
    On n'a absolument jamais discuté de la poursuite au Cabinet.
    Très bien.
    Est-ce que cela vous convient? J'espère que c'est utile.
    Oui.
    Je tiens à le préciser parce que je m'inquiète des réputations. Je vais être très clair, au risque de lever un peu le voile, lorsque l'ancienne ministre s'est adressée au Cabinet plus tôt cette semaine, le procureur général actuel a constaté immédiatement le besoin de se récuser; il a quitté la pièce et n'était pas présent pour cette discussion.
    C'est très utile.
    Cela ne signifie pas que je vais vous révéler tout ce qui s'est dit dans la salle. Je crois seulement qu'il est important que vous sachiez cela.
    Non, je ne veux pas le savoir. En réalité, il importe que je le sache.
    Les Canadiens doivent savoir que le procureur général actuel a quitté la salle pour cette discussion afin de se dégager de toute responsabilité quant à ce qu'il allait faire de cette information.
    D'accord.
    J'essaie de reconstituer...
    Cet été, c'était l'ALENA, l'ALENA et l'ALENA. Il y a eu une retraite du Cabinet à la fin de l'été à Nanaimo. Je me souviens de la fumée des feux de forêt, tout comme vous j'en suis certain — sans vouloir être facétieux. On préparait beaucoup de choses pour la session d'automne et on courait plusieurs lièvres à la fois. Je ne me souviens pas d'avoir discuté de l'affaire SNC avec qui que ce soit, honnêtement. C'était entre les mains du Service des poursuites pénales et du ministère de la Justice.
    Au moment où le processus parlementaire a été engagé, je crois que le projet de loi d'exécution du budget avait été adopté à la Chambre — plutôt rapidement si vous vous en souvenez— , mais il était devant le Sénat, qui tenait des séances. J'ai probablement des transcriptions ou des résumés des discussions sur le projet de loi parce que j'en obtiens pour la plupart des projets de loi. J'effectue un suivi du processus, comme mon bureau, des projets de loi qui sont étudiés par les deux chambres du Parlement.
    Là où on s'inquiète que je puisse avoir eu une interaction avec l'ancienne ministre, c'est concernant le cadre de reconnaissance des droits, le programme relatif aux Autochtones. C'est une histoire différente que je vais essayer de reconstituer. Le premier ministre est inébranlable et poursuit sans relâche ses efforts pour faire avancer la réconciliation avec les Autochtones, et il est très impatient, comme le sont les premiers ministres, d'accomplir le travail et de faire bouger les choses. Il craignait que nous perdions notre élan et notre impulsion au moment d'entamer la dernière année du mandat relativement au cadre de reconnaissance des droits. Il savait, parce qu'il en avait été informé par le Bureau du Conseil privé et son personnel politique, que ses ministres se trouvaient dans une impasse politique. Il y avait différents points de vue sur un élément très important, et nous essayions de trouver une façon... Essentiellement, je dirais qu'il s'agissait d'une forme de conciliation ou de médiation afin de rapprocher les gens. Vous avez de l'expérience en la matière. Des ministres peuvent avoir des points de vue très différents et très légitimes sur la meilleure façon de procéder, et le Cabinet doit faire la part des choses.
    Comme beaucoup de temps était consacré à l'ALENA, on m'a demandé d'intervenir et de tenter de concilier les différents points de vue. Je tiens à dire publiquement aux Canadiens que je suis très blessé au nom de Mme  la ministre Bennett qu'on ait terni sa réputation ces derniers temps. On a dit des choses odieuses sur elle dans les médias sociaux par suite de la démission de Mme la ministre Wilson-Raybould. J'ai travaillé dans le domaine pendant la plus grande partie de ma carrière. Je tiens à dire, pour le compte rendu, qu'aucun Canadien n'a travaillé plus dur sur la réconciliation avec les Autochtones que l'honorable Carolyn Bennett, et elle mérite mieux de la part des trolls des médias sociaux.
    Il y avait un argument légitime au sein du Cabinet concernant la façon d'aller de l'avant avec le cadre de reconnaissance des droits, et on a tenu des discussions sur la bonne approche à adopter pour un projet de loi sur les services aux enfants et aux familles, qui, je l'espère vraiment, sera bientôt devant le Parlement, un projet de loi sur les langues et d'autres questions autochtones. La ministre Wilson-Raybould a joué un rôle très particulier au Cabinet. Elle n'a jamais voulu être un des ministres des Affaires autochtones. Elle a été très claire à cet égard. Elle ne voulait pas être la ministre des Services aux Autochtones, ou la ministre des RCAAN, et être considérée comme l'agent autochtone de son propre peuple. Elle a publiquement été très claire à ce sujet.
    Comme ministre de la Justice...

  (1335)  

    Je dois dire que nous sommes déjà à six minutes. Je vais vous donner une autre minute pour terminer votre réponse à la question de Mme Raitt.
    Je vais le faire rapidement.
    Elle jouait un rôle important comme ministre de la Justice parce qu'il s'agissait de questions de droit sur la façon dont le cadre des droits et tous les aspects autochtones... Et, bien sûr, elle avait énormément de pouvoir et d'influence en raison de son expérience et de ses origines.
    Nous avons tenu...
    C'est la réunion du 17.
    Le but de la réunion, la raison pour laquelle elle a été convoquée, c'était que le premier ministre voulait redonner de l'impulsion et de l'élan aux mesures relatives aux Autochtones.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Boissonnault.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, monsieur Wernick, de nous avoir offert de passer plus de temps avec nous aujourd'hui.
    Je sais que vous êtes un homme direct et j'ai été frappé par votre déclaration liminaire. Je partage certaines de vos craintes concernant l'ingérence dans le processus politique et l'état de la démocratie. Pourriez-vous nous parler un peu plus de la façon dont une gouvernance solide peut aider à atténuer certaines des craintes que vous avez mentionnées dans votre déclaration liminaire?
    C'est une vaste question et je ne veux pas utiliser tout votre temps. J'ai parlé de questions de gouvernance canadienne probablement 20, 30 ou 40 fois, et tous ces discours se trouvent sur mon site Web. Pour nos téléspectateurs, c'est greffier.gc.ca. J'ai beaucoup parlé de gouvernance au Canada.
    Je crois qu'il est important que les Canadiens — les 36 millions de Canadiens — comprennent qu'il s'agit d'une chose précieuse et je l'ai dit publiquement. Lorsque nous voyons ce qui se produit à Londres, à Washington, à Paris, à Rome, dans d'autres démocraties, sans parler de pays que je ne nommerai pas et qui sont clairement plus autoritaires, nous devrions nous réjouir d'avoir des services de police et de poursuites indépendants, des tribunaux et des mandataires du Parlement qui aident les gens qui sont élus dans le cadre d'élections libres et justes pour guider le pays. C'est un cadeau précieux, et il est menacé partout dans le monde. Je ne le tiens pas pour acquis au Canada.
    Nous pouvons poursuivre cette discussion de nombres de façons. Ce qui est pertinent pour le Comité, et je sais que vous voulez siéger au Comité de la justice parce que vous partagez ces préoccupations concernant la règle de droit au Canada, c'est l'indépendance du service des poursuites, qui constitue un des piliers de la démocratie.
    Je suis heureux de vous l'entendre dire.
    Une chose dont vous avez parlé dans une de vos réponses, c'est les mesures de protection qui sont en place. Vous avez mentionné la Commission de la fonction publique du Canada, le directeur parlementaire du budget, l'accès à l'information, le gouvernement ouvert. Pourriez-vous nous parler, à nous ainsi qu'aux Canadiens, de certaines autres mesures de protection? Vous avez mentionné une liste de 14 ou de 16. pouvez-vous nous donner d'autres exemples?
    Sans chiens de garde, sans transparence et sans un parlement vigoureux qui exige des comptes au pouvoir exécutif, vous courez un risque... Je vais essayer d'être bref.
    J'occupe un poste qui existe depuis presque 800 ans: les conseils et les conseillers du roi. C'est exactement ce qu'est le Conseil privé: un conseiller fidèle et loyal à Sa Majesté. Certains d'entre vous ont prêté ce serment, et d'autres aspirent à le faire. C'est important. Ce sont 30 à 40 hommes et femmes qui prennent les décisions en groupe dans un cabinet. C'est tout ce qui entoure cela, et les comptes qu'ils doivent rendre au Parlement, qui sont le fondement du système de Westminster sur lequel repose notre pays. Il ne s'agit pas d'un concept dans un club de lecture. Ce n'est pas une théorie. Ce qui constitue le fondement de la façon dont nous nous gouvernons en tant que peuple libre et démocratique. Il y a nombre de sujets à aborder.
    Je crois que c'est important lorsque surviennent des débats politiques où la température monte — et ils se produisent et sont légitimes. Je veux que ce soit très clair, la partisanerie dans une démocratie est tout à fait appropriée; vous devriez vous attaquer les uns les autres sans retenue pour convaincre les Canadiens de vous réélire. Mais lorsque le débat mine la confiance qu'ont les Canadiens dans leurs institutions, je crains que nous nous retrouvions sur une pente glissante comme ce que nous voyons au sud de la frontière.
    Vous avez mentionné le Royaume-Uni. Si j'ai du temps plus tard, je vais peut-être vous poser une question sur les mesures de protection que nous avons et que n'a pas le Royaume-Uni, ce qui explique peut-être ce qui se passe là-bas.
    Vous avez évoqué le conseil du roi, les 800 ans d'histoire et la nature impartiale du Bureau du Conseil privé. Pourriez-vous nous dire, à nous et aux Canadiens, quelles sont les structures de gouvernance et les mesures de protection qui sont en place afin que l'on puisse s'assurer que le Bureau du Conseil privé est impartial et indépendant?

  (1340)  

    J'invite quiconque s'intéresse vraiment à ce sujet à lire « Pour un gouvernement ouvert et responsable », qui se trouve sur le site Web, soit dit en passant. Voici un vieil exemplaire papier, mais il existe en version numérique. J'aime l'avoir avec moi.
    J'occupe trois fonctions. Le ministre Lametti en occupe deux; j'en exerce trois.
    Quelles sont-elles?
    D'abord, je suis le sous-ministre du premier ministre. Je dirige un ministère de 900 personnes qui soutient les fonctions du premier ministre — vous connaissez nombre d'entre elles — et s'assure que toutes les fonctions du premier ministre — il en a probablement six ou sept — sont bien appuyées. Je suis sous-ministre, comme tout autre sous-ministre.
    Je suis également secrétaire du Cabinet, et c'est le rôle que vous pouvez voir dans n'importe quel film portant sur l'époque des Tudor, c'est-à-dire personne qui prend des notes lorsque se réunit le conseil du roi. Il s'agit en partie de soutenir et de consigner les affaires du Cabinet et de protéger le secret de ces discussions. Le Cabinet ne travaille que lorsque ces discussions sont confidentielles. Le secret du Cabinet est une chose très importante. Autrement, les hommes et les femmes qui en font partie ne se sentiraient pas libres de s'exprimer, de discuter et de manifester leur désaccord, et on n'obtiendrait pas les meilleurs résultats pour les Canadiens. Je suis, sur le plan institutionnel, le gardien du secret du Cabinet. Je rends des décisions sur la divulgation de documents. Je protège le secret de tous les gouvernements antérieurs, pour que vous ne demandiez pas, avec votre majorité au Comité, les discussions qui ont eu lieu sous le gouvernement Harper, et le gouvernement Harper n'a pas demandé toutes les discussions du gouvernement Martin qui l'a précédé, et ainsi de suite.
    D'accord.
    Les gens peuvent parler librement au Cabinet parce que ces discussions sont protégées par le secret et sont littéralement conservées dans un coffre-fort.
    Il y a des situations où elles devraient être divulguées. Je sais que certains d'entre vous ont suivi très attentivement l'affaire Norman. J'ai décidé, de mon propre chef, avec mon propre pouvoir, que la façon la plus facile de s'occuper de l'affaire Norman, c'était de laisser le juge décider ce qui était pertinent. J'ai pris cette décision en octobre dernier. C'était une exception et une anomalie, mais c'est un exemple de notre rôle.
    Je remplis un rôle prévu par la Loi sur la preuve concernant le secret du Cabinet.
    Merci beaucoup. J'ai l'impression que vous allez constater une augmentation de l'achalandage sur votre site Web aujourd'hui.
    Plus que jamais, les gens s'intéressent au BCP.
    Monsieur Rankin, allez-y.
    Je vous remercie, monsieur Wernick, d'avoir fait référence à ce que vous avez appelé, je pense à juste titre, le « cadeau précieux » d'un service des poursuites indépendant.
    Nous avons reçu une décision finale de la part du service des poursuites. C'était le 4 septembre, puis, le 17 septembre, lors d'une réunion qui portait, selon ce que vous nous avez dit, principalement sur les questions autochtones, le premier ministre et la ministre ont parlé de SCN-Lavalin. Le 5 décembre, il y a également eu une réunion avec Gerry Butts et l'ancienne procureure générale. Nous savons cela.
    Pendant cette période, il y a eu littéralement des douzaines de rencontres — vous nous avez parlé de quelques-unes — que SNC-Lavalin a eues avec des gens du Cabinet du premier ministre, entre autres. Ma question est la suivante. Avec tout ce lobbying répété auprès des hauts fonctionnaires du premier ministre, le seul but de l'entreprise aurait pu être de passer outre la procureure générale et d'influencer la décision qu'elle refusait de prendre auparavant et que l'entreprise lui avait demandé de prendre.
    Voici ce qu'a conclu Andrew Roman, un éminent avocat de Toronto:
Il n'y avait aucune raison valable ni pour le premier ministre ni pour ses hauts fonctionnaires d'avoir entamé une telle conversation avec Jody Wilson-Raybould. La seule raison que l'un ou l'autre aurait pu avoir pour discuter de sa décision en matière de poursuites serait de l'encourager à la modifier, sans que cela ne paraisse. C'est préjudiciable à la primauté du droit.
    Qu'avez-vous à dire à ce sujet?
    Je ne souscris pas à cette affirmation. Je ne souscris ni à la prémisse ni à la conclusion.
    Pouvez-vous nous expliquer la raison?
    Parce qu'il y a des conversations appropriées que l'on peut avoir avec la procureure générale dans ce genre d'affaires, et c'est exactement la ligne établie par la doctrine Shawcross, et je pense que vous devrez déterminer si celle-ci a été franchie ou non.
    Personnellement, je souscris tout à fait à votre conclusion; c'est-à-dire qu'il y a une ligne et qu'il n'est pas approprié d'ordonner, à ce qu'on dit, et c'est pourquoi le premier ministre a d'abord utilisé le langage très prudent de cet avocat.
    Il est également inapproprié de faire pression. Vous avez dit que vous ne pensiez pas qu'il y avait eu de la pression. Pour la plupart des gens, il semblerait que notre ancienne procureure générale a certainement ressenti cette pression venant de quelqu'un, et ce n'était peut-être pas le premier ministre, mais cela aurait pu être... Souvent, les gens le font faire par d'autres, et il aurait très bien pu s'agir de personnes du BCP, que SNC-Lavalin a rencontrés des dizaines de fois. Tout n'est-il pas relié, ou du moins, ne pouvons-nous pas raisonnablement en déduire que ça l'est de cette façon?

  (1345)  

    Je crois que la question que vous devrez trancher, tout comme le commissaire à l'éthique, sera la notion de pression inappropriée.
    En effet.
    On ressent toujours une certaine pression parce qu'on tient à prendre la bonne décision: il faut décider d'approuver quelque chose ou non, d'agir ou non. Je suis certain que la ministre ressentait cette pression venant du désir de prendre la bonne décision. Pendant une partie de la conversation que j'ai eue avec elle le 19 décembre, j'ai parlé du contexte et indiqué que beaucoup de gens s'inquiétaient de ce qui allait arriver — il s'agissait de conséquences qui ne la touchaient pas personnellement, mais qui touchaient les travailleurs, les collectivités et les fournisseurs.
    Pourquoi aurait-elle dit dans sa lettre aux Canadiens, cette lettre sans précédent qu'elle a préparée lorsqu'elle a été démise de ses fonctions de procureure générale, qu'il est nécessaire d'avoir un procureur général indépendant et ensuite fait des commentaires semblables au cours des derniers jours? Comment ne pas en déduire qu'elle a dû ressentir cette pression, cette pression inappropriée, cette pression excessive du principe Shawcross? Comment pouvons-nous en déduire autre chose?
    Je pense que vous devriez lui poser directement la question.
    Nous avons l'intention de le faire si nous sommes autorisés à lui faire dire la vérité, et, après avoir entendu le procureur général aujourd'hui, nous ne sommes pas encore convaincus que ce sera permis.
    Ce sera à la ministre de décider de la façon dont elle répondra à vos questions.
    Elle se dit assujettie au secret professionnel, qui, selon vous, pourrait ne pas s'appliquer.
    Selon elle.
    Selon elle.
    M. Michael Wernick: En effet.
    M. Murray Rankin: Si on lui permet de comparaître.
    Il ne s'agit pas d'être autorisée à comparaître ou de renoncer à la confidentialité. Elle peut venir ici la semaine prochaine et répondre à vos questions et se servir de son bon sens quant à la ligne à ne pas franchir dans ses réponses.
    Je vous remercie, monsieur Rankin.
    Monsieur Fraser, allez-y.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Tout à l'heure — je crois que c'était dans votre déclaration préliminaire, ou peut-être dans une réponse que vous avez donnée à l'une des questions —, vous avez parlé des aspects positifs, et je crois que vous avez utilisé le mot « éthique » quant aux rapports que vous avez eus avec le gouvernement actuel, le premier ministre et les fonctionnaires. Comment en êtes-vous arrivé à cette conclusion et pourriez-vous nous dire en quoi cela a un rapport avec la raison de notre présence ici aujourd'hui?
    J'ai observé de près — j'ai passé beaucoup de temps avec eux chaque jour pendant trois ans — et j'ai eu beaucoup d'interactions. Je dirige le ministère du premier ministre. Je traite avec le personnel politique du premier ministre presque tous les jours et je le fais depuis trois ans. Je connais beaucoup d'entre eux. Je passe beaucoup de temps avec eux. J'ai voyagé avec eux. Je les ai rencontrés. Ils font partie de mon l'environnement.
    Je ne fais pas un commentaire partisan, parce que j'ai travaillé auprès du Cabinet du premier ministre Harper, du Cabinet du premier ministre Martin et du Cabinet du premier ministre Chrétien. Je pense que les Canadiens devraient se sentir réconfortés par le fait que les gens qui viennent ici et qui font d'énormes sacrifices pour devenir membres du personnel politique et accéder à des postes politiques essaient toujours de faire ce qui est juste, de la bonne façon. Il y a des exceptions. Nous connaissons tous les exceptions. Mais ces personnes se font prendre. Elles se font prendre au Canada.
    Sur un autre ordre d'idées, plus tôt dans votre témoignage, vous avez dit que le travail du commissaire à l'éthique et son enquête en cours devraient être respectés et que, évidemment, on devrait lui permettre de faire son travail. Certains en sont venus à la conclusion que seule une enquête publique dans cette affaire permettrait d'établir les faits de ce qui s'est passé. Je suis curieux de savoir ce que vous diriez d'une enquête publique.
    Au bout du compte, c'est aux autres de décider. Je vous dirais que je ne vois pas en quoi c'est une amélioration. Vous avez un haut fonctionnaire du Parlement doté des pouvoirs de la Cour supérieure. Vous avez une méthode. Vous avez fait vos preuves. Vous avez la formation. Il n'y a pas la moindre possibilité de partialité ou de préjugé. C'est l'instrument que vous avez choisi de créer, en tant que haut fonctionnaire du Parlement, pour traiter des questions d'éthique. De façon simple, pourquoi avez-vous besoin d'un autre instrument?
    À votre avis, allons-nous en venir aux questions essentielles qui se posent dans cette affaire?
    J'ai suivi les enquêtes publiques. Nous l'avons tous fait ces derniers temps. Elles ont une utilité. Cela ne fait aucun doute. Mais elles, eh bien, Gomery... Il y en a beaucoup, n'est-ce pas? Le BCP fournit le financement et le soutien administratif pour les enquêtes. Elles sont d'une nature particulière. Elles font intervenir une armée d'avocats. Elles sont accusatoires. Ce n'est pas toujours la bonne façon d'aller au fond des choses.
    Il s'agit d'une question relativement simple en soi. Si on enlève toute l'exagération et la démagogie, la question revient à savoir si un ministre a subi des pressions inappropriées, et cela peut être attribué aux conversations et aux réunions spécifiques, et je pense que le commissaire à l'éthique pourrait faire toute la lumière assez rapidement sur la question.
    Je vous remercie, monsieur Wernick.
    Monsieur McKinnon, il reste trois minutes. Les voulez-vous?

  (1350)  

    Oui. Je n'ai qu'une question rapide à poser.
    Mes collègues de l'opposition se sont dits très préoccupés par le fait que, une fois que la décision de la DPP a été rendue le 4 septembre, toute autre communication à la procureure générale dans cette affaire était inappropriée en soi. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Dans le contexte, si j'ai bien compris, la Loi sur le DPP elle-même prévoit des dispositions sur ce genre de suivi et ce genre de dérogation.
    Ma deuxième question porte sur les efforts de lobbying de SNC-Lavalin, dont vous avez dit tout à l'heure qu'ils étaient parfaitement légaux et pas du tout déplacés. Pourriez-vous nous en dire plus à ce sujet également?
    Peut-être sur le deuxième point. Je pense que ce n'est pas une mince affaire, mais tous les contextes entre l'entreprise et les différentes personnes ont été divulgués. Cela signifie que les structures fondamentales de la Loi sur le lobbying, qui ont été présentées en réponse à d'autres questions il y a des années, semblent fonctionner. Vous pouvez tirer vos propres conclusions à ce sujet, et les lois peuvent toujours être améliorées, mais les structures fondamentales de la Loi sur le lobbying au chapitre de la transparence semblent fonctionner.
    Je vais mettre quelqu'un de l'entreprise dans le pétrin, mais ce que les Canadiens doivent savoir, c'est que, en dépit d'un effort relationnel considérable avec le gouvernement — des rencontres avec des députés, des employés, des chefs de l'opposition, ainsi que des publicités répétées, des pressions exercées par deux premiers ministres du Québec —, l'entreprise n'a pas eu ce qu'elle voulait. Si c'était un film, il serait raté.
    Monsieur Wernick, il nous reste encore une minute pour la première question de M. McKinnon quant à savoir s'il était inapproprié d'avoir des discussions après cette première date du 4 septembre ou lorsque le CPM a pris connaissance de la situation.
    C'est une question qui, à mon avis, nécessite probablement un avis juridique de la part du greffier, des juristes ou d'experts. D'après mon interprétation, et c'est le fondement sur lequel j'ai mené toutes les conversations, ce ne le serait pas. Les mêmes principes de base et les mêmes règles fondamentales s'appliqueraient même après cela, parce que la ministre a toujours eu et a encore la possibilité d'invoquer ces pouvoirs. Qu'on soit au début du processus, qu'il soit bien entamé ou même encore aujourd'hui, c'est le même cadre Shawcross.
    Merci beaucoup.
    Chers collègues, cela met fin à la série de questions.
    Monsieur Wernick, je tiens à vous remercier de vos services envers les Canadiens et de tout ce que vous avez fait. Je pense que votre témoignage nous a beaucoup aidés.
    La séance est levée.
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