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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 142 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 2 mai 2019

[Enregistrement électronique]

  (1135)  

[Français]

    Conformément à l'article 108(3) du Règlement, nous poursuivons l'étude sur la modernisation de la Loi sur les langues officielles.
    Je vous présente mes excuses encore une fois pour le retard qui nous a été imposé, mais nous ne contrôlons pas l'horaire des votes à la Chambre.
    C'est avec plaisir que nous recevons, ce matin, M. Graham Fraser, professionnel en résidence à l'Université d'Ottawa. C'est une nouvelle fonction pour M. Fraser.
    Monsieur Fraser, je vous souhaite la bienvenue au Comité.
    Nous allons vous écouter durant une dizaine de minutes. Comme d'habitude, nous ferons ensuite un tour de table avec les membres du Comité pour des questions et commentaires.
    Monsieur Fraser, la parole est à vous.
    D'abord, laissez-moi vous dire que c'est un honneur pour moi de comparaître devant votre comité. J'ai toujours été sensible à l'engagement de vos membres en ce qui concerne les questions qui touchent les langues officielles.
    Je ne suis plus commissaire et je n'ai pas l'intention d'agir comme si j'avais toujours ce rôle. J'ai beaucoup de respect pour mes deux successeurs, et je ne voudrais pas me substituer à Raymond Théberge, pour qui j'ai beaucoup d'estime.
    Cependant, il est possible que mon expérience pendant 10 ans en tant que commissaire puissent vous aider dans vos réflexions sur la modernisation de la Loi.
    Je vais limiter mes commentaires aux questions liées à la partie VII de la Loi.

[Traduction]

     Lorsque je suis devenu commissaire, en 2006, la partie VII de la loi avait été modifiée à peine quelques mois auparavant. Plutôt que de recommander la prise de règlements régissant l'application de la nouvelle partie VII, j'ai cru préférable de laisser les institutions fédérales innover et élaborer leurs propres pratiques concernant des « mesures positives » pour favoriser l'épanouissement des communautés linguistiques en situation minoritaire.
    D'ailleurs, bon nombre d'institutions ont pris leurs responsabilités au sérieux et ont trouvé des moyens novateurs de prendre des mesures positives: participation et soutien à des activités communautaires, espaces de bureaux offerts à des organismes communautaires en échange de cours de conversation en français, etc. Les problèmes sont survenus lorsque des institutions fédérales n'ont pas, à notre avis, interprété ces obligations d'une manière satisfaisante. Le premier cas était la décision du gouvernement progressiste-conservateur nouvellement élu — qui a été prise entre l'annonce et la confirmation de ma nomination en 2006 — d'abolir le programme de contestation judiciaire. La poursuite intentée par la Fédération des communautés francophones et acadienne, que j'ai appuyée, a abouti à un règlement à l'amiable qui a mené à la création du Programme d'appui aux droits linguistiques.

[Français]

    Le deuxième cas était l'élimination de presque toute programmation locale à CBEF Windsor. Le CRTC a accepté mes arguments et a exigé la restauration de cette programmation pour le renouvellement de la licence de Radio-Canada. Le juge de première instance a accepté mes arguments selon lesquels Radio-Canada était assujettie aux obligations de la partie VII de la Loi, mais, en appel, la décision a été rejetée pour d'autres raisons. Depuis ce temps, un modus vivendi a été établi entre Radio-Canada et le Commissariat.
    Finalement, il y a la décision de l'honorable juge Gascon de la Cour fédérale, le 23 mai 2018, dans l'affaire Fédération des francophones de la Colombie-Britannique c Canada (Emploi et Développement social).
    Comme vous le savez, et le juge l'a noté, la FFCB a soumis l'argument selon lequel le ministère fédéral et la Commission de l'assurance-emploi auraient manqué à leurs obligations linguistiques envers la minorité linguistique francophone, dans le contexte d'une entente de paiement de transfert entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Cette entente touchait l'administration de services d'aide à l'emploi en vue de réintégrer le marché du travail.
    Comme l'a dit le juge, je suis intervenu pour faire valoir quelle devrait être, selon moi, l'interprétation à donner aux articles de la Loi sur les langues officielles en cause dans le dossier en question.

[Traduction]

    La décision fait l'objet d'un appel, et je vous renvoie aux arguments avancés par l'équipe d'avocats du commissaire Théberge dans le mémoire des faits et du droit du commissaire aux langues officielles qui a été présenté à la Cour d'appel fédérale et publié sur le site Web du Commissariat aux langues officielles.

  (1140)  

[Français]

     Cependant, je pense que, comme législateurs, vous devez prendre note de l'analyse du juge Gascon. Dans sa décision exhaustive — 105 pages en anglais et 146 pages en français —, il fait une comparaison méticuleuse du poids des mots et de leur signification en anglais et en français dans les différentes parties de la Loi.
    Voici ce qu'on peut lire au paragraphe 213:
Bref, même au sein de la LLO elle-même, le législateur a voulu que le concept de « mesures » en soit un à géométrie variable.

[Traduction]

    Monsieur le président, je n'ai pas de copie de la version écrite de la déclaration préliminaire que d'autres membres du Comité ont reçue.
    C'est celle du prochain témoin.
    D'accord.

[Français]

    Continuez, monsieur Fraser.
Or, quand, dans une même loi, le législateur utilise le mot « mesures » tantôt avec l'article « les », tantôt avec les qualificatifs « voulues », « indiquées » ou « nécessaires », tantôt avec l'adverbe « toutes », on ne peut ignorer le fait qu'au paragraphe 41(2), il se soit contenté de parler « des mesures positives » à prendre par les institutions fédérales, avec l'article indéfini « des » et le qualificatif « positives », sans offrir davantage de précisions ou de caractère contraignant. Le législateur ne dit pas « mesures nécessaires »; il ne dit pas « mesures indiquées »; il ne dit pas « toutes les mesures possibles ». Clairement, le texte de la loi révèle que l'expression « des mesures positives » ne signifie pas la même chose que ces autres types de mesures. Elle ne revêt pas, à l'évidence, les mêmes attributs d'exhaustivité, de nécessité, de précision ou de suffisance qu'on retrouve ailleurs dans la LLO.

[Traduction]

    Comme vous pouvez le constater, le juge a analysé mot par mot les articles et les temps de verbe qui ont été utilisés. C'est un examen des plus méticuleux, et cela a étonné quelque peu le Commissariat aux langues officielles et les autres intervenants.
    Je ne vais pas passer en revue tous les arguments très détaillés du juge Gascon. Cependant, je souligne qu'au paragraphe 216, il affirme catégoriquement ceci: « [e]n somme, l'article 41 n'impose pas d'obligations précises et particulières aux institutions fédérales ». Dans sa conclusion, au paragraphe 293, il déclare que « la portée de l'obligation contenue à l'article 41 se trouve handicapée par l'absence de règlements » et que « les remèdes recherchés par la FFCB et le Commissaire ne trouvent pas appui dans la loi actuelle, telle que rédigée, structurée et mise en œuvre ».
    Comme je l'ai dit, le commissaire en appelle de la décision devant la Cour d'appel fédérale. Cependant, en tant que législateurs, vous n'êtes pas tenus d'attendre le résultat de la procédure d'appel. Les tribunaux interprètent l'intention du législateur telle qu'exprimée dans la loi, et c'est à vous qu'il revient d'exprimer clairement vos intentions.
    Le juge Gascon m'a contesté, il a contesté mes prédécesseurs et mes successeurs, et vous a contesté vous, les législateurs, en disant que nos espoirs et nos attentes à l'égard de la partie VII étaient davantage une question de voeux pieux que d'obligations contraignantes.
    J'espère que la Cour d'appel sera d'accord avec M. Théberge et qu'elle infirmera la décision de la Cour fédérale, mais vous êtes en mesure de réagir en vous assurant qu'en modernisant la loi, vous clarifiez vos intentions en tant que législateurs et supprimez toute incohérence et toute ambiguïté afin que les obligations de prendre des mesures positives soient contraignantes et claires.
    Je vais m'arrêter ici, et je ne répéterai pas les points que j'ai soulevés devant le comité de l'autre endroit. Toutefois, je serai ravi de répondre à toutes vos questions.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur Fraser.
    Nous allons commencer immédiatement la période de questions et commentaires par M. Clarke.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Fraser, je vous remercie d'être présent aujourd'hui et d'avoir pris de votre temps personnel pour venir nous rencontrer.
    Nous sommes tous au courant de la profondeur de votre connaissance à la fois théorique et pratique de la Loi sur les langues officielles.
    J'aimerais prendre la balle au bond, puisque vous parlez du jugement Gascon et du fait que le fédéral va en appeler.
    Vous savez tout comme nous que la FCFA...

  (1145)  

    Je ne suis pas certain que c'est le fédéral qui en appelle du jugement. C'est le commissaire.
    Oui, pardon, c'est le commissaire.
    Je ne sais pas quelle position le ministère de la Justice a prise dans cette cause.
    Oui, tout à fait. Je vous remercie.
    Vous savez que la FCFA demande que le libellé de la Loi soit renforcé, notamment en remplaçant tous les mots « peut » par « doit », et « can » par « shall ».
    Considérez-vous qu'on devrait également appliquer ce changement lexical à la partie VII?
    Si oui, quelles seraient d'après vous les conséquences pour la séparation des champs de compétence constitutionnels?
     C'est une très bonne question.
    Je ne suis pas avocat et, contrairement à lorsque j'étais commissaire, je suis venu seul aujourd'hui, sans équipe d'avocats.
    Je ne sais pas si le remplacement de « peut » par « doit » — et leurs équivalents en anglais — est la meilleure façon de procéder ou s'il serait possible d'arriver au même résultat au moyen d'un règlement.
    En 2006, j'avais sciemment évité la piste réglementaire en partie parce que j'avais l'impression que le nouveau gouvernement ne serait pas très enthousiaste à l'idée d'une telle approche. Je n'en avais pas discuté avec des membres du gouvernement à l'époque, mais mon intuition de journaliste me disait que le nouveau gouvernement conservateur choisirait instinctivement de réduire le fardeau réglementaire plutôt que de l'accroître.
    Je me rappelle qu'il y a eu une discussion au Commissariat aux langues officielles portant sur le Règlement sur les langues officielles. La Direction des affaires juridiques avait soulevé l'idée de modifier ce règlement, mais ma première réaction avait été de dire que le nouveau gouvernement ne savait même pas que ce règlement existait et que je ne voulais pas être la personne à le lui apprendre.
    Vous parlez d'un règlement pour l'application de la partie VII comme il en existe déjà un pour la partie IV.
    Oui.
    Pour ce qui est des autres parties de la Loi, verriez-vous un changement lexical de « peut » à « doit »?
    C'est une possibilité à étudier. J'hésite à vous donner une opinion tranchée parce que je ne peux pas vous dire quelles seraient les conséquences d'un tel changement. L'avantage de l'approche réglementaire est qu'il est plus facile de modifier un règlement que de réviser la Loi.
    D'accord.
    À preuve, la Loi sur les langues officielles n'a été modifiée que deux fois. Il y a eu une révision approfondie en 1988...
    La Loi a été révisée en 1988 et en 2005.
    La partie VII l'a été en 2005.
    Vous constatez aujourd'hui à quel point il est compliqué d'entreprendre la modernisation de la Loi.
    J'ai une deuxième question, monsieur Fraser.
    Que pensez-vous de l'instauration un tribunal administratif qui se pencherait uniquement sur des dossiers en lien avec les langues officielles? Serait-ce une bonne idée?
    Il faudrait d'abord déterminer les types de causes qui pourraient être portées devant un tel tribunal. Dans le domaine des langues officielles, le grand défi auquel font face le commissaire, les champions et les parlementaires est de changer le comportement des institutions assujetties à la Loi. Le meilleur moyen d'y arriver est-il d'imposer des peines, ou y a-t-il d'autres façons d'y parvenir?
    Quelles seraient ces autres façons de changer le comportement des institutions?
     D'abord, il s'agit d'en faire une meilleure promotion. J'ai trouvé que les célébrations du 150e anniversaire de la Confédération ont été une occasion ratée de vraiment promouvoir les deux langues officielles comme composantes essentielles de l'identité canadienne. Quand j'étais commissaire, je disais souvent que le succès est invisible et l'échec, évident. Je pense parfois que l'engagement du gouvernement à faire la promotion des deux langues officielles manque de visibilité.
    Dans un autre ordre d'idées, les changements administratifs liés à la formation linguistique ont fait en sorte qu'il est souvent plus difficile pour des fonctionnaires d'obtenir la formation linguistique dont ils ont besoin. Je comprends les raisons de ces changements, mais ils ont eu pour résultat que, maintenant que les coûts de la formation linguistique sont imputés au budget global de formation d'un ministère, chaque gestionnaire fait face à un dilemme lorsque vient le temps de gérer les coûts de formation de ses employés. S'il accorde une formation linguistique à un employé, il se trouve à le préparer pour son prochain emploi au lieu de son emploi actuel. Le gestionnaire a donc naturellement tendance à réagir comme suit.

  (1150)  

[Traduction]

    Le gestionnaire dira à son employé « Harvey, tu es un excellent employé, tu as un brillant avenir dans la fonction publique et il faut que tu suives une formation linguistique, mais présentement, tu dois acquérir des compétences en ressources humaines pour pouvoir améliorer ton travail dans ton emploi actuel ».

[Français]

    Il est très difficile pour un gestionnaire, étant donné les limites de son budget, de faire preuve de bienveillance à l'égard de ses employés et d'investir dans leur avenir professionnel au lieu de leur emploi actuel.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à vous, monsieur Arseneault.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous souhaite à nouveau la bienvenue, monsieur Fraser. Il est toujours intéressant de vous entendre, car tout est tellement clair et simple lorsque nous vous écoutons.
     Après tous les témoins qu'il a déjà entendus, le Comité commence à avoir une idée de la direction que devraient prendre ses recommandations sur la modernisation de la Loi.
    Je vous écoute et cela vient — je répète ce qu'ont dit d'autres témoins — un peu confirmer ce que nous disait votre ancien homologue M. Michel Carrier, commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick par intérim. Il nous a déclaré qu'il ne fallait pas nécessairement viser plus de mordant ou un tribunal fort, mais plutôt commencer par clarifier l'interprétation de la Loi en en enlevant toutes les ambiguïtés. Selon lui, les objectifs de la Loi sont tellement clairs, mais la façon de les atteindre est tellement nébuleuse.
    Étant donné toute la jurisprudence canadienne sur la Loi sur les langues officielles, de la Cour d'appel du Nouveau-Brunswick, ma province, jusqu'à la Cour suprême du Canada, j'aimerais votre point de vue. Nous connaissons les objectifs de la Loi. Ils sont énoncés à l'article 2, je crois.
    Il faut aussi se référer au préambule.
    Vous avez raison.
    Le fait de maintenir l'ambiguïté actuelle en ne remplaçant pas « peut »  par « doit » dans la Loi est-il incompatible avec les buts énoncés dans le préambule?
    Effectivement.
    En écoutant les témoignages d'autres gens qui ont comparu devant votre comité et devant le Comité sénatorial permanent des langues officielles, je constate que des experts juridiques ont analysé les ambiguïtés et les contradictions entre les parties IV et VII de la Loi et j'en conclus que l'une de vos responsabilités les plus importantes est de clarifier la Loi.
     Par ailleurs, je suis heureux de partager l'opinion de mon ancien collègue M. Michel Carrier, pour qui j'ai beaucoup d'estime et qui s'est toujours prononcé avec sagesse sur ces questions.

  (1155)  

     Pas toujours.
     Pour ma part, j'ai toujours pensé que tous les éléments de la Loi, surtout le préambule, représentaient une valeur. Si on les perçoit comme une valeur canadienne, et non comme une série d'obligations, de fardeaux, il est beaucoup plus facile d'adhérer aux objectifs de la Loi. J'ai dit à maintes reprises, quand j'étais commissaire, qu'il est souvent plus efficace d'inspirer que d'obliger.
     Je fais un peu de caricature, mais c'est comme si on donnait aux langues officielles une auto, un véhicule obligatoire. On reconnaîtrait la nécessité du véhicule, mais on ne poserait pas de pneus sous la voiture. Dans un tel cas, il est difficile de rouler et d'arriver à destination. Donc, plus nous clarifions la Loi, plus elle nous permet d'atteindre clairement les objectifs et de fournir les outils nécessaires reliés à cette loi. Les objectifs sont atteints, évidemment, et on a évité les procès, les tribunaux, les obligations de s'adresser ailleurs, et ainsi de suite.
    Passons maintenant à la question du tribunal. Supposons que la Loi soit claire, non ambiguë, peu sujette à interprétation — il faut dire cependant que certains avocats et avocates, en s'ingéniant, arrivent à tordre des dispositions de la Loi —, mais qu'il faille malgré tout recourir au tribunal. Nous avons entendu ici une experte du pays de Galles. Je n'en croyais pas mes oreilles lorsqu'elle a dit que, après seulement sept ans d'existence, le tribunal administratif chargé des langues officielles au pays de Galles était en avance sur nous, qui avons dans ce domaine plus de 50 ans d'histoire. D'après ce que j'ai compris, ce tribunal administratif a plutôt tendance à taper sur les doigts des responsables qui n'appliquent pas la loi, alors que, chez nous, c'est le justifiable qui doit payer un avocat ou faire l'effort lui-même. Par exemple, c'est la société d'État fautive qui, si elle n'est pas d'accord avec le commissaire, doit porter l'affaire en appel devant les tribunaux.
    Comment voyez-vous cela?
    Je trouve qu'il serait intéressant de regarder de près cette approche. Il y a en anglais un dicton qui me fait parfois réfléchir lorsqu'il est question de donner du mordant à la Loi ou de créer un tribunal. Il dit ceci:

[Traduction]

    « When all you've got is a hammer, everything looks like a nail. »

[Français]

    Ici, c'est le « non-avocat » qui parle. Si un gouvernement n'a pas la volonté de faire avancer ce dossier, ce n'est ni la Loi ni un tribunal qui va transformer ces objectifs et ces valeurs en réalité. Pendant tout ce temps où les commissaires se sont succédé, c'est Air Canada qui a suscité la plus grande attention...
    La pauvre Air Canada.
    Excusez-moi de vous interrompre, mais je n'ai pas beaucoup de temps.
    Combien de temps de parole me reste-t-il, monsieur le président?
    Il est déjà écoulé.
    Je vais donc céder la parole à l'intervenant suivant, M. Choquette.
    Merci beaucoup, monsieur Fraser, d'être parmi nous aujourd'hui et de nous faire profiter de votre expertise, de votre sagesse. À ma connaissance, vous êtes l'un des rares commissaires à avoir occupé ce poste pendant 10  ans. En effet, si mes souvenirs sont exacts, la plupart des commissaires avaient un mandat de sept ans. Vous possédez une expertise très importante.
    Vous avez dit que la partie VII n'était pas à jeter à la poubelle, loin de là. Vous avez dit que, durant votre mandat, elle avait servi à quelques reprises de la bonne façon. Pourriez-vous nous dire quels sont les aspects positifs de la partie VII et pourquoi ils sont si importants?

  (1200)  

     C'est tellement important, d'abord parce que c'était une innovation. Pour une rare fois, dans une loi, il y a eu une obligation de mesures positives sans que ces mesures positives soient définies clairement par règlement ou dans la loi elle-même.
    Souvent, les réussites de la partie VII ont été réalisées en région, là où il y avait des directeurs de ministère sur place. Ceux-ci ont étudié cette obligation et se sont demandé ce qu'ils pouvaient faire pour la communauté de langue officielle en situation minoritaire dans leur région.
    Il y a eu souvent des consultations. Pêches et Océans Canada a participé à des célébrations à Gaspé. Parcs Canada, en Alberta, avait offert un bureau aux communautés francophones locales si, en échange, elles organisaient des classes de conversation en français pour ses employés. C'était donnant, donnant, et c'était un plus grand engagement du ministère sur le plan local, avec la communauté. Le président de VIA Rail a pris connaissance de cette obligation et n'a pas vu quelle communauté il pouvait consulter. Il a affirmé à la FCFA qu'il prenait cette obligation au sérieux. Il ne voyait pas quelle communauté minoritaire VIA Rail pouvait aider, mais la FCFA lui a proposé de contribuer au transport des gens pour la réunion annuelle de l'organisme.
    Tous les succès ont donc été le fruit de consultations et de plus grands engagements de la part des ministères auprès des communautés, souvent sur le plan très local.
     Je me disais que ce n'était pas le genre de réussite qu'on pouvait imaginer provenir du bureau d'un sous-ministre, c'est-à-dire une directive adressée à tous les bureaux régionaux d'un ministère. Cela découlait plutôt de l'imagination, de l'innovation et de l'esprit d'ouverture des employés fédéraux sur place.
    Il faudrait donc trouver le moyen de continuer à promouvoir ces réussites et de les faire se multiplier. C'est un peu l'esprit de la partie VII.
    Oui.
    Il y a eu un petit débat — et vous en avez glissé un mot à des collègues — sur les fameux pouvoirs du commissaire, à savoir si l'on doit donner plus de pouvoirs au commissaire, entre autres.
    Monsieur Fraser, j'aimerais savoir si, durant votre mandat comme commissaire, vous avez eu à utiliser les pouvoirs coercitifs que vous aviez. Je m'explique: si une agence ou un ministère refusait de vous fournir des documents, vous aviez le pouvoir d'exiger de les recevoir. Si quelqu'un refusait de témoigner ou de répondre à vos questions, vous aviez le pouvoir d'exiger que cette personne vienne témoigner devant vous.
    Vous aviez déjà des pouvoirs coercitifs. Avez-vous eu à les utiliser et l'avez-vous fait?
    On parle de donner plus de pouvoirs au commissaire, mais celui-ci a déjà certains pouvoirs. Toutefois, à ma connaissance, on dirait que ces pouvoirs ne sont pas utilisés.
    Si vous ne les avez-vous pas utilisés, pourquoi?
     Il y avait un pouvoir d'exiger des témoignages sous serment, par exemple, qui n'avait jamais été utilisé par un commissaire, contrairement à d'autres agents du Parlement. Dans le contexte du rapport spécial sur Air Canada en 2016, nous avions constaté l'éventail de ces pouvoirs d'autres agents du Parlement.
    Je ne sais pas si c'est mentionné dans le rapport, mais, par la bande, nous avons appris que certains agents du Parlement, qui utilisent souvent ce pouvoir d'exiger un témoignage sous serment, le font implicitement à la demande, ou selon la préférence, des institutions. Certaines vont dire que ce serait mieux pour elles qu'un témoignage soit exigé. Elles n'auraient alors qu'à dire qu'elles n'avaient pas le choix. L'impression que j'avais relativement aux ministères avec lesquels je faisais affaire, c'était qu'on était de bonne volonté.
    Il y a une organisation qui fait exception. C'était évident lorsque les gens d' Air Canada ont témoigné devant votre comité. La position d'Air Canada, c'est qu'elle est en concurrence avec d'autres compagnies aériennes qui n'ont pas ces mêmes obligations, et que ce n'est pas juste. Air Canada a une obligation que West Jet n'a pas, par exemple. Il y a une certaine résistance, qui était parfois reflétée dans nos rapports avec Air Canada.
    Quand je réfléchis à la question, je ne sais pas si le fait d'imposer à Air Canada une amende de 25 000 $, par exemple, pour un incident ou un autre en vaudrait la peine. Ce montant représente le coût de deux billets d'avion en classe affaires jusqu'à Pékin. Pour Air Canada, c'est une bagatelle. Cela ferait la manchette, mais je ne sais pas si c'est un moyen efficace de changer un comportement.
    La FCFA a suggéré que toutes les peines soient utilisées pour créer un fonds dédié à la formation linguistique. Cependant, on pourrait créer pareil fonds sans imposer des amendes. L'idée d'imposer une amende à Services publics et Approvisionnement Canada parce qu'il n'y a pas d'affiche bilingue dans un chantier de construction est peu utile. Qu'est-ce que cela peut donner à une institution fédérale que d'imposer une amende à une autre institution fédérale? Est-ce que cela va vraiment changer le comportement?
    Je n'en suis pas certain.

  (1205)  

    Merci, monsieur Fraser.
    Nous allons passer au prochain intervenant.
    Les interventions seront de trois minutes, parce qu'il reste trois intervenants et que l'heure avance.
    Madame Fortier, vous avez trois minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci d'être ici aujourd'hui, monsieur Fraser. Je suis contente d'entendre que vous êtes à l'Université d'Ottawa, qui est mon alma mater et une excellente université de ma circonscription.
    Des représentants de l'ACUFC, l'Association des collèges et universités de la francophonie canadienne, étaient ici plus tôt cette semaine. L'Association avait un message à livrer: sans un droit à l'accès égal à l'éducation en français langue première et langue seconde, de la petite enfance jusqu'au niveau postsecondaire, on ne peut pas parler de statut égal des deux langues officielles du Canada.
     J'aimerais vous entendre à ce sujet. Y a-t-il moyen de renforcer la Loi sur le plan de l'éducation dans le cadre de sa modernisation?
     Des études ont démontré à quel point l'éducation en français de la petite enfance est importante pour la rétention des étudiants dans le système francophone. Quand Mme Meilleur était ministre de l'Éducation de l'Ontario, elle m'avait parlé de l'expérience de la ville de Windsor, qui avait créé des centres francophones de la petite enfance et suivi la trajectoire des étudiants par la suite. Un nombre impressionnant de ces étudiants avaient continué à étudier en français, contrairement aux jeunes qui n'avaient pas eu l'occasion de fréquenter un centre francophone de la petite enfance.
    Le gouvernement fédéral donne déjà un montant considérable pour l'éducation en langue première et en langue seconde à des institutions minoritaires, mais ce n'est pas très connu. J'ai découvert qu'il était difficile de savoir ce que les provinces faisaient de l'argent qu'Ottawa leur distribuait. Quand j'étais commissaire, un ministre provincial de l'Éducation m'a même dit que, quand il recevait un chèque du fédéral, il ne lisait pas la lettre qui l'accompagnait. C'était une façon de parler. C'est sûr que ses fonctionnaires la lisaient. Néanmoins, les provinces ont une façon de penser suivant laquelle ce sont elles qui décident de la façon qu'elles dépensent l'argent qu'elles reçoivent du fédéral.
    Les Pères de la Confédération ont décidé qu'Ottawa serait responsable d'aspects importants comme l'économie ou les activités internationales, et que des aspects mineurs et moins importants comme la santé et l'éducation seraient de compétence provinciale. Depuis un certain temps, la population canadienne n'est pas d'accord avec les Pères de la Confédération quant à l'importance relative de ces dossiers. Souvent, les conflits entre le fédéral et les provinces tournent autour de grandes questions d'éducation et de santé. Cela a toujours été des questions épineuses.
    Prenons l'exemple des chaires universitaires. Le gouvernement fédéral a réussi à jouer un rôle extrêmement important dans la recherche universitaire, même si l'éducation est manifestement une responsabilité provinciale.

  (1210)  

    Monsieur Fraser, je vais devoir donner la parole à M. Rioux pour deux minutes.
    Je vais poursuivre dans le même sens.
    Comme vous le dites si bien, l'éducation est de compétence provinciale. Cependant, on voit des situations, comme à Vancouver, où seulement un enfant francophone sur cinq peut fréquenter un centre francophone de la petite enfance. Il y a aussi le cas de l'Université de l'Ontario français.
    Le fédéral pourrait-il obtenir la compétence nécessaire pour assurer la vitalité du bilinguisme au Canada? Cela devrait-il être énoncé clairement dans la nouvelle mouture de la Loi sur les langues officielles?
     On pourrait essayer d'emprunter cette voie.
    On vit une période de nouvelles tensions fédérales-provinciales et même interprovinciales. Actuellement, il y a des tensions entre la Colombie-Britannique et l'Alberta. Les provinces seraient-elles près de trouver un terrain d'entente sur la question linguistique vu qu'elle ne suscite pas autant de controverses qu'il y a 50 ans? C'est possible.
    L'historien Matthew Hayday a publié un livre intitulé Bilingual Today, United Tomorrow, qui porte sur une initiative prise par le premier gouvernement Trudeau dans le domaine de l'éducation: le Programme des langues officielles en enseignement. Ce programme visait à financer l'éducation en français. Ce livre est une analyse méticuleuse de cette initiative.
    À un moment donné, il y a eu de la résistance des provinces et une pression budgétaire. Si la tendance avait été maintenue, en 2000, il y aurait eu 1 million d'étudiants en immersion, mais, à cause du plafonnement du financement, il n'y en a eu que 300 000. Cela a fini par être une question de financement.

  (1215)  

    Merci, monsieur Fraser.
    Monsieur Clarke, vous avez une minute pour le mot de la fin.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais présenter un avis de motion. C'est un avis de motion, parce que j'ai décidé de changer la motion que j'ai déposée il y a 48 heures. Nous pourrons en débattre à notre prochaine réunion, mardi prochain.
    Elle est rédigée ainsi:
Que le Comité demande à la Gendarmerie royale du Canada d'infirmer sa décision en vigueur depuis le 1er avril 2019 visant à mettre fin à la formation unilingue francophone à son école, Division Dépôt en Saskatchewan.
    Je donne maintenant avis de cette motion.
    Je profite des dernières secondes qu'il reste pour vous remercier, monsieur Fraser, de votre comparution aujourd'hui. Merci aussi pour l'excellent travail que vous avez fait et que vous allez certainement continuer à faire pour le bien-être de la dualité canadienne.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, monsieur Fraser, de votre présentation de ce matin. Continuez votre belle retraite.
    Je suspends la séance pour quelques minutes.
    Merci beaucoup.

  (1215)  


  (1220)  

    Nous reprenons la séance.
    Je souhaite la bienvenue à Mme Marie-France Pelletier, administratrice en chef du Service canadien d'appui aux tribunaux administratifs.
    Nous allons écouter votre présentation et, comme à l'habitude, nous ferons un tour de table par la suite.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de témoigner devant vous aujourd'hui sur la question des langues officielles.

[Traduction]

     J'aimerais commencer en décrivant brièvement le rôle et le mandat du Service canadien d'appui aux tribunaux administratifs, le SCDATA, qui a été créé le 1er novembre 2014 avec l'entrée en vigueur de la Loi sur le SCDATA.
    Le SCDATA est chargé d'offrir des services de soutien à 11 tribunaux administratifs fédéraux au moyen d'un guichet unique et intégré. L'objectif de la création de notre organisation, en 2014, était de mettre en commun les ressources de plusieurs petits tribunaux au sein d'une organisation plus vaste, le SCDATA. Cela devait permettre au SCDATA d'optimiser les ressources à sa disposition pour mieux répondre aux besoins déjà connus des tribunaux, qu'ils n'avaient pas la capacité de combler dans les limites de leur budget et de leur effectif.
    Le SCDATA vise à améliorer la satisfaction des besoins des tribunaux, à réaliser des gains d'efficacité grâce à des économies d'échelle et à accroître l'accès à la justice pour les Canadiens.
    Les 11 tribunaux appuyés par le SCDATA représentent une partie de la trentaine de tribunaux administratifs fédéraux. Ce sont généralement de petites organisations dont la taille varie environ de 3 à 100 membres à temps plein et à temps partiel. Leurs mandats sont variés et couvrent une vaste gamme d'activités sociétales, allant du commerce à l'administration des sanctions pécuniaires dans certains secteurs, en passant par le commerce international, les droits de la personne et les droits autochtones, les programmes sociaux, les relations de travail, la protection des divulgateurs et celle des biens culturels.
    Le SCDATA appuie aussi le Conseil national mixte, une tribune pour le codéveloppement, la consultation et l'échange d'information entre le Conseil du Trésor du Canada, à titre d'employeur, et les agents négociateurs de la fonction publique.

[Français]

     Le Service canadien d'appui aux tribunaux administratifs, ou SCDATA, relève du Parlement par l'entremise du ministre de la Justice et procureur général, mais il n'a aucun lien de dépendance avec le ministère de la Justice.
    Dans le cadre de notre travail, nous fournissons les services spécialisés dont chacun des tribunaux a besoin pour soutenir ses activités relatives au greffe, à la recherche et à l'analyse, aux questions juridiques ou à d'autres mandats ou affaires en particulier.
    Nous fournissons également aux tribunaux des services internes comme les services de ressources humaines, les services financiers, la gestion et la technologie de l'information, les locaux, la sécurité, la planification, les communications et l'ensemble des services de soutien.
    Au quotidien, les membres des tribunaux travaillent avec les employés du SCDATA, qui les aident à traiter les dossiers, à réviser les décisions, à préparer les déplacements pour les audiences et à accomplir un certain nombre d'autres tâches requises pour que les membres des tribunaux puissent s'acquitter de leurs fonctions.
    Les présidents des 11 tribunaux soutenus par le SCDATA supervisent et dirigent les travaux de leur tribunal respectif.
    En leur fournissant des services de soutien et des installations, le SCDATA permet aux tribunaux d'exercer leurs pouvoirs et de s'acquitter des obligations et des fonctions qui leur incombent en vertu des lois, des règles et des règlements en vigueur.
    Nous travaillons activement avec les tribunaux pour définir les améliorations à apporter aux systèmes, aux services et aux processus que nous leur fournissons. Nous sommes déterminés à faire en sorte que les ressources appropriées soient disponibles pour soutenir les processus opérationnels des tribunaux et la gestion de leurs dossiers.

  (1225)  

[Traduction]

    Notre effectif compte environ 600 employés, dont la plupart travaillent dans la région de la capitale nationale. De plus, l'organisation appuie environ 200 personnes nommées par le gouverneur en conseil, qui sont les membres des 11 tribunaux administratifs.
    L'année 2019 marque une étape importante pour le SCDATA, qui célèbre sa cinquième année d'existence.
     Durant les mois à venir, le SCDATA portera son attention sur la prestation du meilleur service possible aux tribunaux que nous servons, tout en faisant la promotion d'une culture d'excellence, d'innovation et d'amélioration continue. Le SCDATA travaillera notamment à améliorer les capacités numériques des tribunaux que nous servons, en établissant de nouveaux systèmes de gestion de cas et en améliorant ceux qui existent déjà. Nous continuerons également de croître et de maintenir un milieu de travail sain et respectueux, favorisant le bien-être personnel, le perfectionnement professionnel et l'apprentissage continu des employés. De plus, nous continuerons d'évaluer et de peaufiner nos normes de service et nos modèles de prestation, afin d'obtenir des gains d'efficacité encore plus grands dans nos pratiques opérationnelles, tout en maintenant notre engagement d'excellence.

[Français]

     Maintenant que j'ai donné un aperçu du SCDATA, j'aimerais vous faire part de certains renseignements sur les modèles de tribunaux et de certaines considérations générales relatives aux coûts de fonctionnement des tribunaux administratifs.
    Comme je l'ai mentionné précédemment, les mandats des 11 tribunaux administratifs appuyés par le SCDATA varient considérablement, allant de ceux qui traitent les appels relatifs aux sanctions administratives pécuniaires à ceux qui traitent de questions qui leur sont soumises par un organisme de renvoi, comme le Tribunal canadien des droits de la personne, lequel entend des plaintes soumises par la Commission canadienne des droits de la personne.
    Chaque tribunal a un mandat particulier et remplit des fonctions très précises. Par exemple, la Commission canadienne d'examen des exportations de biens culturels examine les demandes d'attestation de biens culturels canadiens. Le Tribunal des revendications particulières entend les causes relatives aux revendications, territoriales ou autres, des Autochtones. Le Conseil canadien des relations industrielles et la Commission des relations de travail et de l'emploi dans le secteur public fédéral traitent tous les deux de diverses questions reliées aux relations de travail.
    Ainsi, le SCDATA doit fournir des ressources qui correspondent à la nature, à la portée et à la complexité des affaires traitées par chaque tribunal, ainsi qu'à sa charge de travail particulière. Un certain nombre de tribunaux que soutient le SCDATA ont une charge de travail supérieure à plusieurs milliers de dossiers par année. C'est le cas notamment du Tribunal de la sécurité sociale du Canada ou de la Commission des relations de travail et de l'emploi dans le secteur public fédéral.
    De plus, les dossiers sont portés devant les tribunaux de diverses façons, par exemple au moyen de demandes, de plaintes, d'appels et de renvois, ou ils sont renvoyés par un autre organisme. Les affaires sont jugées et, dans certains cas, l'accent est également mis sur la prestation d'une aide à la médiation à toutes les étapes de la procédure.

[Traduction]

     Compte tenu de ces considérations, les coûts de fonctionnement d'un tribunal administratif peuvent varier considérablement selon le mandat du tribunal et sa charge de travail. Il y a également des coûts pour les services administratifs, tels que les finances et les ressources humaines, par exemple, ainsi que les frais de gestion de cas et un certain nombre d'autres services de soutien dont les tribunaux ont besoin de temps en temps.
    Compte tenu de ces facteurs, les budgets annuels des tribunaux administratifs que le SCDATA appuie varient environ de 225 000 $ à 28 millions de dollars par année.
    En ce qui concerne l'ensemble des dépenses de fonctionnement du SCDATA, notre budget principal des dépenses pour 2019-2020 est de 92 millions de dollars. Le SCDATA se sert de ces fonds pour fournir toute une gamme de services aux 11 tribunaux. De ces fonds, environ 68 millions de dollars, ou 74 %, sont consacrés aux responsabilités principales qui soutiennent directement les mandats des tribunaux, tandis que les 24 millions de dollars restants, ou 26 %, sont affectés aux activités des services internes.
    Le SCDATA surveille étroitement son budget afin de répondre adéquatement aux besoins des tribunaux. Entre autres, il surveille les tendances émergentes pour évaluer leurs incidences possibles sur la charge de travail des tribunaux, ainsi que les modifications législatives pour évaluer leurs répercussions. De plus, il veille à ce que la planification et les crédits budgétaires offrent la souplesse nécessaire à une affectation adéquate des ressources.

  (1230)  

[Français]

    Monsieur le président, cela conclut mon allocution. Je répondrai avec plaisir aux questions des membres du Comité.
    Je vous remercie de votre présentation, madame Pelletier.
    Sans plus tarder, je cède la parole à M. Clarke.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Pelletier, bonjour et merci d'être avec nous aujourd'hui.
    Je vous ai invitée parce que je voulais entendre une experte. C'est votre cas puisque vous êtes à la tête du Service canadien d'appui aux tribunaux administratifs.
    Je veux m'assurer d'avoir bien compris. Vous avez dit plus tôt qu'il y a de trois à cent membres. S'agit-il de votre service ou de chacun des tribunaux?
    Il s'agit de chacun des tribunaux. Notre plus petit tribunal comporte trois membres, tandis que le plus gros peut compter jusqu'à 100 membres.
    Vous comprenez très bien que nous vous avons invitée ici parce que nous étudions la possibilité d'un tribunal administratif consacré uniquement aux langues officielles.
    D'accord.
    Combien de membres juges un tribunal des langues officielles requerrait-il selon vous, en vous fondant sur un tribunal équivalent?
     Je peux vous répondre de façon générale. Il est important de comprendre, un peu comme je l'expliquais dans mon allocution, que les fonctions, le mandat et donc les ressources, à la fois humaines et financières, sont influencés par la nature même du mandat confié au tribunal. Cela provient de sa loi habilitante.
    Comme, dans ce cas-ci, le mandat n'existe pas, il vous est très difficile de nous donner des chiffres.
    Je pourrais vous donner un ordre de grandeur.
    Oui, exactement.
    Par contre, si jamais vous créez un tribunal et que vous nous le confiez, nous allons faire notre propre analyse avant que vous preniez une décision.
    Je comprends, et vous n'êtes vraiment tenue à rien, aujourd'hui. Cela dit, pourriez-vous nous donner un ordre de grandeur?
    Je suis consciente qu'il y a eu beaucoup de discussions autour d'une comparaison qui a été faite avec le Tribunal canadien des droits de la personne, notamment. Ce modèle semble intéresser certains individus. J'aimerais préciser, au sujet de ce modèle, que la Commission canadienne des droits de la personne reçoit environ 1100 plaintes par année et en réfère en moyenne entre 5 % et 10 % au Tribunal canadien des droits de la personne. Dans le cadre de ce modèle, le Tribunal fonctionne présentement avec une douzaine de membres. Certains travaillent à temps plein, d'autres à temps partiel, et ils se trouvent un peu partout au pays.
    Combien ce tribunal coûte-t-il aux Canadiens par année?
    On investit 3,7 millions de dollars par année dans le fonctionnement même du Tribunal. Il faut prendre en considération que cela ne comprend pas les frais administratifs des services d'appui. Il faut donc les ajouter dans le calcul. Les 3,7 millions de dollars couvrent donc uniquement le fonctionnement du Tribunal et les services offerts directement au Tribunal par des employés experts dans ce domaine.
    Merci beaucoup, madame Pelletier.
    Je vais maintenant m'aventurer sur un terrain que je ne connais pas très bien. Il y a l'accès direct et l'accès indirect. Est-ce que le commissaire aux langues officielles donnerait le feu vert ou déterminerait que l'individu peut s'adresser lui-même, directement, au Tribunal? Comment les choses fonctionnent-elles du côté des droits de la personne?
    Il s'agit d'un organisme de référence. La Commission canadienne des droits de la personne étudie les plaintes reçues. Dans plusieurs cas, d'après ce que je comprends — et il faudrait demander à ces gens de vous fournir plus de détails à ce sujet —, ces plaintes sont en très grande partie réglées par voie de médiation à la Commission. C'est pourquoi, comme je l'ai dit, environ 5 % à 10 % des plaintes reçues par la Commission sont transférées au Tribunal par la suite.
    J'ai cru comprendre que certains tribunaux administratifs ne sont pas sous votre tutelle. En fait, le mot « tutelle » n'est probablement pas le mot exact, étant donné que votre rôle en est un d'appui, essentiellement. Bref, j'aimerais savoir pourquoi ces tribunaux ne relèvent pas de vous.
    C'est une décision qui a été prise au moment où notre organisation a été créée. Pour ma part, je n'ai pas participé à ces discussions et on ne m'a pas fait part des raisons.
    Si un tribunal administratif était créé d'ici quelques mois, que conseilleriez-vous au gouvernement? Lui conseilleriez-vous, en tant que dirigeante actuelle, de l'intégrer dans votre organisation?
    Bien sûr, nous avons ce qu'il faut pour offrir ce genre de service. Si le gouvernement choisissait de nous accorder un tribunal de plus, nous serions aptes à assumer ce mandat. Cependant, ce choix revient au législateur, étant donné que les tribunaux qui obtiennent leurs services d'appui de mon service figurent dans l'annexe de notre loi. Un changement législatif est donc nécessaire pour pouvoir assigner la responsabilité des services d'appui aux tribunaux.
    Merci beaucoup.

  (1235)  

    Merci, monsieur Clarke.
    Monsieur Arseneault, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    C'était une bonne question, monsieur Clarke.
    Bienvenue, maître Pelletier.
     Soit dit en passant, Mme Pelletier est une ancienne collègue de la Faculté de droit de l'Université de Moncton. En fait, elle a étudié avec mon épouse. Pour ma part, j'ai étudié en droit avec la grande soeur de Mme Pelletier.
    C'est un plaisir de vous revoir ici après toutes ces années.
     Vous avez entendu les questions que j'ai posées au commissaire.
    J'ai parlé tantôt du tribunal administratif au pays de Galles. Nous avons reçu comme témoin Mme Meri Huws. La fonction de commissaire aux langues officielles au pays de Galles a été créée il y a sept ans seulement. Sauf erreur, en sept ans, seulement 13 de ses décisions ont été contestées et aucune d'elles n'a été renversée par le tribunal administratif concerné. C'est incroyable. Cela me fait dire que la loi en l'espèce au pays de Galles doit être extrêmement précise et peu sujette à interprétation pour qu'il y ait aussi peu de plaintes, et que les jugements rendus étaient très clairs.
    Je vais continuer dans la même veine que mon ami M. Clarke.
    On a souvent fait un parallèle avec le Tribunal canadien des droits de la personne, qui est un tribunal administratif. Je ne connais pas très bien la Loi canadienne sur les droits de la personne. Je connais mieux la Loi sur les droits de la personne du Nouveau-Brunswick, qui doit être similaire. La Loi est très proactive en ce qu'elle prévoit des pouvoirs d'enquête et un pouvoir de demander à un employeur de remédier à une situation. Il s'agit de pouvoirs assez coercitifs, mais c'est ce qui fait qu'il n'y a eu que 1 100 plaintes à l'échelle canadienne, toutes langues et provinces confondues. Ce n'est pas beaucoup.
    Madame Pelletier, ce nombre peu élevé de plaintes à l'échelle canadienne résulte-t-il du fait que la Loi canadienne sur les droits de la personne n'est pas ambiguë et moins sujette à interprétation que la Loi sur les langues officielles?
    Je ne peux pas me prononcer avec certitude sur cette question. Le SCDATA donne des services à 11 différents tribunaux dans 11 différents domaines, et je ne peux prétendre être experte dans chacun de ces domaines.
    Pouvez-vous nous faire parvenir une thèse, s'il vous plaît?
    Des voix: Ha! ha!
    Non. Je le ferais peut-être à titre personnel, mais pas dans le cadre de mon rôle officiel.
    Je ne peux pas me prononcer avec certitude sur les raisons de cet état de fait. Peut-être que mes collègues de la Commission et du Tribunal pourraient se prononcer là-dessus, mais encore faudrait-il qu'ils le souhaitent.

  (1240)  

    Comme juriste de formation, vous traitez avec toutes sortes de tribunaux. Y a-t-il une corrélation à faire entre une loi qui est un peu mollasse sur bien des aspects et un nombre élevé d'appels devant le tribunal administratif concerné?
    Présentement, mon rôle est d'administrer des services de soutien. Ma formation juridique est un peu rouillée du fait que je n'ai pas pratiqué depuis plusieurs années.
    Évidemment, c'est au législateur de créer ou pas un tribunal. C'est d'ailleurs la tâche à laquelle vous vous affairez présentement. Ultimement, le choix de créer ou de ne pas créer un tribunal est une décision de politique publique. Ce choix devrait être fondé sur l'impératif qu'on tente de satisfaire. Il y a différents moyens pour le faire et il restera à voir lequel vous proposerez.
    Je n'ai plus beaucoup de temps et je vais aborder un angle pratico-pratique.
    Vous avez parlé d'une somme de 3,7 millions de dollars pour le Tribunal canadien des droits de la personne, plus les frais administratifs. Avez-vous une idée de ce que cela peut représenter?
    En général, c'est environ 26 %.
    En plus des 3,7 millions de dollars?
    Oui. C'est la proportion à l'échelle de notre organisation. Les frais administratifs de notre organisation sont d'environ 26 %, et 74 % de nos fonds sont directement consacrés au fonctionnement des tribunaux.
    Parmi les 11 tribunaux dont vous vous occupez, lequel est le plus coûteux?
    Celui qui a le plus gros budget est le Tribunal de la sécurité sociale à cause du haut volume de dossiers.
    Vous vous occupez d'administrer les tribunaux. Quelles questions reviennent le plus souvent devant le Tribunal canadien des droits de la personne? Pouvez-vous me le dire?
    Je n'ai pas d'information précise à ce sujet, mais je peux toujours demander au Tribunal de nous la fournir.
     Non, je le demandais par curiosité. Nous pouvons le faire nous-mêmes.
    C'est tout en ce qui concerne mes questions.
    Merci, monsieur Arseneault.
    Nous passons maintenant à M. Choquette.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup, madame Pelletier, de votre présence aujourd'hui et de l'éclairage que vous nous apportez.
    Vous avez parlé des fameuses sanctions pécuniaires imposées par des tribunaux administratifs fédéraux que vous appuyez.
    À votre connaissance, existe-t-il aussi, parmi les pouvoirs des tribunaux administratifs que vous supervisez, celui d'imposer des ordonnances exécutoires?
    Quel tribunal pourrait utiliser des ordonnances exécutoires, à votre connaissance?
    Je crois que le Tribunal canadien des droits de la personne le fait. Il faudrait que je vérifie pour m'en assurer, mais je sais que c'est possible pour certains de nos tribunaux de le faire.
    Quelle est la différence, selon ce que vous en savez, entre les sanctions pécuniaires administratives et les ordonnances exécutoires? Quels sont les avantages et les inconvénients de l'une et de l'autre?
    Encore une fois, cela revient aux impératifs que le législateur tente de satisfaire. J'ai expliqué plus tôt que des structures vont s'associer, selon le domaine et en fonction de la lacune que le législateur aurait voulu combler.
    Par exemple, la plupart de nos tribunaux qui se prononcent sur des sanctions pécuniaires agissent un peu comme des tribunaux d'appel de sanctions qui ont été établies par d'autres entités gouvernementales. Ces tribunaux ont pour rôle de décider du montant ou de l'imposition des sanctions.
    C'est en ce sens que cela est fait par certains de nos tribunaux.
    Avez-vous un exemple d'ordonnance exécutoire à nous donner?
    Je n'en ai pas qui me vient à l'esprit, malheureusement, mais je peux le demander.
    D'accord.
    À votre connaissance, y a-t-il des tribunaux qui ordonnent des sanctions administratives pécuniaires à des ministères ou à des agences fédérales?

  (1245)  

    C'est une bonne question. Il faudrait que je vérifie.
    Les exemples que j'ai à l'esprit sont plutôt ceux de ministères qui imposent des sanctions aux individus.
    Les sanctions sont imposées aux individus ainsi qu'au secteur privé.
    C'est cela. Les individus font appel aux tribunaux.
    Je n'ai donc pas d'exemple à l'esprit, mais c'est possible. Je ne peux pas le dire avec certitude.
    Ce serait assez exceptionnel, si je comprends bien.
    Ce n'est pas quelque chose dont je suis au courant de manière experte.
    D'accord.
    Combien de tribunaux administratifs fédéraux y a-t-il au Canada?
    Il y en a tout près de 30 tribunaux. Je dirais autour de 26 à 28.
    Vous supervisez 11 de ces tribunaux.
    Les autres tribunaux sont-ils autonomes? Sont-ils supervisés?
    Cela peut varier.
    Il y en a qui sont pleinement autonomes, parce qu'ils sont suffisamment grands pour mettre en place leur propre structure d'appui. Il y a en d'autres qui peuvent recevoir des services d'appui de la part de leur ministère ou d'une autre agence. Cela peut varier énormément.
    C'est le cas des 11 tribunaux qui font partie de notre organisation en ce moment. Il y a une variété de différents modèles.
    Les coûts ou l'investissement dans les tribunaux varient de quelques centaines de milliers de dollars à quelques millions de dollars.
    Quel est l'exemple type d'un tribunal qui coûte quelques centaines de milliers de dollars? Pourquoi coûte-t-il si peu cher?
    Est-ce en raison d'une plus petite équipe ou parce qu'on fait appel à ce tribunal à quelques rares occasions seulement?
    Pouvez-vous nous expliquer comment cela fonctionne?
     C'est effectivement le cas. Notre plus petit tribunal fait partie de ceux à qui on confie très peu de dossiers. Il existe parce que, lorsqu'on lui en confie, il s'agit de questions importantes à régler. Il faut quand même maintenir un certain niveau d'appui, un minimum de services, étant donné que nous ne savons pas quand les dossiers vont arriver. D'autres tribunaux peuvent avoir une charge de travail plus élevée et plus constante.
    Bien sûr, la charge de travail contribue de façon importante à générer des coûts pour ces tribunaux. Le volume de dossiers est souvent la composante la plus importante des budgets. Par contre, il peut arriver que le volume ne soit pas énorme, mais que, en contrepartie, les dossiers soient complexes. Il y a donc un certain nombre d'éléments variables qui génèrent des coûts et demandent des ressources d'un tribunal à l'autre, mais c'est en règle générale le volume de dossiers qui compte le plus.
    Merci.
    Merci, monsieur Choquette.
    Monsieur Rioux, vous avez la parole pour quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Mes questions seront surtout de nature factuelle. J'aimerais d'abord savoir à peu près combien de temps dure une cause lorsqu'elle est traitée par le Tribunal canadien des droits de la personne.
    Cela peut varier énormément. Les questions saisies par ce tribunal sont complexes et requièrent habituellement une étude prolongée. Évidemment, il y a plusieurs étapes à franchir. C'est le cas pour le Tribunal canadien des droits de la personne, mais ce l'est également pour n'importe quel autre tribunal. Les questions doivent passer par ces étapes. De plus, des retards peuvent parfois être générés par le tribunal, par l'échange de documents entre les parties ou par de la médiation. C'est difficile à déterminer.
    En un mot, on peut parler de plus d'une journée.
    Oui, absolument.
    D'accord.
    Est-ce que certaines décisions sont rendues séance tenante? En règle générale, combien faut-il de temps pour qu'un jugement soit rendu?
    Je ne peux pas me prononcer sur les pratiques d'un tribunal par rapport à celles d'un autre, mais, à ma connaissance, très peu de nos tribunaux rendent des décisions sans délibéré. Ce n'est pas impossible, mais selon moi, ce n'est pas la façon dont on procède.

  (1250)  

    En règle générale, y a-t-il un délai maximum pour rendre un jugement?
    Cela varie d'un tribunal à l'autre. Pour certains, un délai est prescrit dans leur loi, alors que, pour d'autres, ce n'est pas le cas. C'est vraiment au cas par cas.
    D'accord.
    Enfin, les gens peuvent-ils faire appel d'une décision auprès d'un tribunal de droit commun?
    Habituellement, lorsqu'il y a un droit d'appel, l'appel est porté soit devant la Cour fédérale, soit devant la Cour d'appel fédérale.
    D'accord.
    C'est terminé pour moi. Je peux partager mon temps de parole avec Mme Fortier. Je sais qu'elle avait des questions.
    Je vous remercie d'être parmi nous, madame Pelletier.
    J'ai deux questions, qui sont ouvertes. Vous allez comprendre pourquoi. Je pense qu'avec votre expérience et votre expertise, vous pourrez contribuer à l'étude que nous faisons présentement et qui traite de la possibilité de créer un tribunal administratif.
    Y a-t-il des questions que vous nous suggérez de sonder, en tant que législateur, pour déterminer si nous devrions créer un tribunal administratif?
    Ce n'est pas une question à laquelle j'ai réfléchi. Dans mon rôle...
    Je vous la pose.
    Oui, en effet, mais vous comprendrez que le rôle de mon organisation est avant tout opérationnel. Nous n'avons pas d'équipe d'analystes en politique qui étudient ce genre de questions. Réfléchir à ces questions ne fait donc pas partie du mandat de notre organisation. C'est pourquoi je n'ai pas eu l'occasion de me pencher sur un sujet de ce genre.
    Ce n'est pas un problème.
    D'accord.
    Je vais donc vous poser ma deuxième question. Nous nous demandons s'il serait utile de créer un tribunal administratif et, pour ce faire, nous considérons les avantages et les inconvénients. Parmi ce qui existe présentement, y a-t-il des avantages ou des contraintes que nous devrions considérer? Par exemple, devrions-nous apprendre d'une expérience comme celle du Tribunal de la sécurité sociale du Canada? Sinon, devrions-nous inclure dans notre filtre décisionnel les aspects positifs de certains tribunaux administratifs?
     De façon générale, la communauté des tribunaux administratifs est présentement en grande réflexion sur la modernisation des processus et l'utilisation de la technologie, tout en maintenant le cap sur l'accès à la justice.
     Le choix de créer un tribunal administratif repose habituellement sur la volonté d'offrir un mécanisme plus flexible que ne l'est le recours à une cour de justice. La communauté de la justice administrative est en train de réfléchir sérieusement à de nouveaux modèles de règlement des conflits — si l'on veut appeler cela ainsi — ou des plaintes, qui recourraient davantage aux nouvelles technologies, entre autres.
    Je viens de penser à une dernière question. Est-ce qu'une évaluation périodique du mandat de ces tribunaux a lieu, par exemple tous les trois ou cinq ans? Vous parliez de modernisation, mais est-il possible de réviser le mandat énoncé dans une loi ou un règlement?
    La loi habilitante de certains de nos tribunaux comporte l'obligation de réviser leur mandat, par exemple tous les cinq ans ou, à tout le moins, dans les cinq premières années d'existence du tribunal.

  (1255)  

    D'accord.
    En Ontario, par contre, une loi a été adoptée il y a environ une dizaine d'années pour régir le fonctionnement — si l'on veut appeler cela de cette manière — des tribunaux administratifs. Cette loi oblige un tribunal à se pencher périodiquement sur son fonctionnement — tous les sept ans si mes souvenirs sont fidèles — et à le modifier au besoin. Je crois me rappeler que cet examen doit comporter certains éléments, énoncés dans la loi. Cependant, cela fait déjà un petit bout de temps que j'ai lu cette dernière et je vous conseille d'aller vous-mêmes en prendre connaissance.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Fortier.
    Nous poursuivons avec Mme Boucher.
    Merci de votre présence, madame Pelletier. Votre témoignage est très intéressant.
     Ai-je bien compris que cela fait cinq ans que le Service canadien d'appui aux tribunaux administratifs existe?
    Cela ne fait que cinq ans et vous vous demandez déjà comment mieux réussir. Vous dites vouloir faire « la promotion d'une culture d'excellence, d'innovation et d'amélioration ».
    Parmi tous les tribunaux dont vous vous occupez, y en a-t-il un qui se démarque en tentant de suivre la technologie et toutes les nouveautés qui s'en viennent?
    De plus, pouvez-vous nous dire si la création d'un tribunal administratif désengorge vraiment le système judiciaire?
    Je ne pense pas pouvoir répondre de façon définitive à votre seconde question, car il faudrait d'abord effectuer une analyse assez complète du domaine de la justice administrative.
    Pour ce qui est de se démarquer, je dirais que chacun des tribunaux essaie des façons intéressantes de mieux gérer sa charge de travail. Cependant, étant donné les différences marquées entre les mandats de chacun, une solution qui fonctionne pour un tribunal ne serait pas nécessairement appropriée pour un autre. Il est donc difficile d'établir des comparaisons de cette nature, mais il est sûr que chaque tribunal souhaite moderniser ses activités et fait des efforts dans ce sens.
    Dans le cas des langues officielles, il y a souvent des « tlm », des « toujours les mêmes » que nous voyons passer à ce comité depuis 10 ans, qu'il s'agisse d'Air Canada ou d'autres ministères. La situation ne change pas.
     Depuis cinq ans, est-ce qu'on a constaté que ces tribunaux administratifs ont occasionné de grands changements dans l'appareil gouvernemental? Est-ce que l'expertise de vos différents tribunaux a contribué à améliorer la situation?
     Je ne sais pas si c'était l'objectif de la création de notre service.
    La plupart des tribunaux avec lesquels nous travaillons quotidiennement existent de longue date. Il y en a deux ou trois qui sont plus récents, mais il y en a qui existent depuis 25 ou 30 ans.
    L'idée n'était donc pas de changer le fonctionnement des tribunaux ou leur mandat. C'était tout simplement de créer une organisation qui regrouperait les services d'appui pour que ces tribunaux se concentrent sur leurs tâches, qu'ils sont les seuls à pouvoir accomplir. Ce sont les mandats qui leur sont attribués dans leurs lois habilitantes.
    Il y a trois raisons principales qui ont motivé la création de notre service. D'abord, on voulait trouver des efficiences au moyen d'économies d'échelle. C'est la raison dont tout le monde se souvient parce que c'était une mesure budgétaire, donc associée à l'argent. Ensuite, il fallait répondre aux besoins des tribunaux pour qu'ils accomplissent leurs mandats. Finalement, il s'agissait de tenter d'améliorer l'accès à la justice. Évidemment, cela n'est pas notre rôle exclusif; nous appuyons les tribunaux qui veulent apporter des améliorations sur ce plan.
    Notre mandat n'est pas de changer la structure de la justice administrative. Nous aidons les tribunaux à fonctionner.
    Vous les chapeautez.

  (1300)  

    Je dirais plutôt que nous les appuyons.
    Merci beaucoup.
    Il ne me reste qu'à vous remercier énormément, madame Pelletier, de votre présentation, de votre présence et de nous avoir fait connaître vos expériences.
    Je vous remercie.
    Pour ce qui est des membres du comité, nous nous reverrons mardi.
    La séance est ajournée à mardi.
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