Passer au contenu
Début du contenu

INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 024 
l
1re SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 15 juin 2020

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. La séance est ouverte.
    Bienvenue à la réunion no 24 du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 1er juin 2020, le Comité se réunit pour étudier la Loi sur Investissement Canada. Nous nous réunissons aujourd'hui par vidéoconférence, et les témoignages seront publiés sur le site Web de la Chambre des communes.
    Je rappelle aux membres et aux témoins que vous devez attendre que je vous appelle avant d'intervenir. Lorsque vous êtes prêt à parler, allumez votre microphone et éteignez-le une fois que vous avez fini votre intervention. Veuillez parler lentement et bien énoncer afin que les interprètes puissent faire leur travail. Comme d'habitude, je vous montrerai un carton jaune lorsqu'il vous reste 30 secondes, et un carton rouge lorsque votre temps de parole est échu. Veuillez respecter le temps imparti, car nous voulons donner à tous la possibilité de poser des questions.
    Je souhaite maintenant la bienvenue à nos témoins.
    Nous accueillons aujourd'hui le président du Conseil canadien des innovateurs, Jim Balsillie. Brian Facey est le président du groupe chargé de la concurrence, des affaires antitrust et des investissements étrangers de Blake Cassels and Graydon. Joshua Krane est son associé du même groupe. Nous entendrons à titre personnel M. Christopher Balding, professeur adjoint de l'Université Fulbright du Vietnam, depuis le Vietnam, et M. Omar Wakil, partenaire de Torys LLP. Chaque témoin aura droit à sept minutes pour faire son exposé, et il y aura ensuite des séries de questions.
    Sur ce, commençons par M. Balsillie, qui dispose de sept minutes.
    Madame la présidente, mesdames et messieurs, merci de m'avoir donné l'occasion de vous parler aujourd'hui. Je suis Jim Balsillie, président du Conseil canadien des innovateurs.
    Je salue l'étude du Comité sur la Loi sur Investissement Canada, car cette loi est un outil réglementaire critique pour assurer la prospérité et la sécurité du Canada. Dans notre économie moderne axée sur les connaissances et des données, les sources de prospérité et les vecteurs de risque ont évolué. La Loi doit donc être modifiée en conséquence afin qu'elle corresponde toujours à son objectif.
    Premièrement, il faut comprendre que l'investissement direct étranger ou l'IDE, sur lequel porte la Loi, correspond à l'investissement dans une production tangible. Or, cela ne tient pas compte de l'économie moderne, dans laquelle les biens nationaux les plus précieux pour l'économie et la sécurité sont la propriété intellectuelle et les données.
    Deuxièmement, la Loi repose sur la prémisse que le Canada bénéficie des connaissances et de la technologie associées à l'IDE. C'était le cas autrefois lorsque l'IDE servait à la production industrielle. Ce n'est plus le cas dans une économie d'innovation, où l'IDE a l'effet inverse.
    Troisièmement, le concept d'avantage ou de risque net pourrait être raisonnablement appliqué à l'économie industrielle compte tenu de l'importance des actifs commerciaux acquis. Dans une économie axée sur les connaissances et les données, la prospérité et le risque ne sont pas fonction du volume, mais plutôt des retombées.
    La politique canadienne demeure solidement ancrée dans des concepts de l'ère industrielle et ne prévoit aucune stratégie nationale en matière de propriété intellectuelle ou de données. Les sociétés et les pays se font maintenant concurrence au moyen d'actifs intangibles qu'ils possèdent et contrôlent. L'Union européenne est en train de construire son propre nuage, non pas parce que les Européens ne font pas confiance au système de commerce multilatéral, mais parce que les décideurs européens comprennent que quiconque détient la propriété intellectuelle et les données a la mainmise sur les interactions des gens et des entités avec ces données, ce qui a des répercussions énormes sur la prospérité, la sécurité et la démocratie de l'Union européenne.
    Le Canada se contente d'observer la concurrence mondiale dans le secteur de la PI et des données, car nous contribuons à leur création, mais nous ne nous battons pas pour en avoir la possession et en tirer des avantages. Par conséquent, nous voyons les connaissances fuir le Canada de façon régulière, cédées à des intérêts étrangers avec une simple signature sans qu'il y ait d'examen dans une optique économique ou de sécurité nationale. À titre d'exemple, la PI fondamentale de l'AI, financée par les contribuables canadiens pendant deux décennies, a été cédée par l'Université de Toronto à Google. De plus, Huawei a conclu 17 partenariats de recherche avec des universités canadiennes pour avoir un accès à une infrastructure de télécommunications tout aussi précieuse. Il y a bien d'autres exemples encore.
    Parallèlement, des pays intelligents comme l'Allemagne et ses 72 instituts Fraunhofer ont un service centralisé qui assure de façon experte l'administration et la gestion des demandes visant la PI, son exploitation et les contrats. L'Allemagne, le Royaume-Uni, les États-Unis, la France et même l'Union européenne ont mis au point des stratégies visant l'IDE, tandis que le Canada n'a rien fait. L'Allemagne a même interdit l'embauche de l'un de ses ingénieurs informaticiens, car les décideurs avaient reconnu que l'incidence négative pour l'Allemagne était supérieure aux intérêts privés de l'ingénieur informaticien.
    La PI et les données sont des biens publics puissants, ce qui fait que les décisions faites dans la sphère privée n'ont aucune incidence sur les effets externes positifs ou les dispositions contractuelles.
    Trois aspects de la Loi sur Investissement Canada en cours sont tout à fait contre-indiqués dans le contexte de l'économie moderne: premièrement, les seuils de valeur; deuxièmement, un moratoire qui cible uniquement les acquisitions par des entreprises d'État de pays autoritaires; troisièmement, la priorité économique donnée aux emplois. Très peu de transactions stratégiques nécessiteraient un examen en fonction de ces critères et les décideurs chargés d'appliquer la Loi ne tiennent pas compte des facteurs qui sont pertinents dans l'économie moderne.
    Il ne suffit pas de mettre l'accent sur les acquisitions par les entreprises d'État de pays autoritaires, car si les actifs jouent un rôle critique pour la prospérité, la sécurité et la souveraineté du Canada, nous devons continuer à en avoir la mainmise, quel que soit l'acteur étranger.
    Enfin, il faut tenir compte de nombreuses autres conséquences économiques au-delà des emplois, surtout parce que les compétences clés dans une économie axée sur la PI et les données ne courent pas les rues. Nous devons plutôt nous poser les questions suivantes: quelle en est la valeur pour notre économie; comment la valeur que nous générons est-elle liée à la prospérité et à la sécurité; la Loi est-elle structurée afin de nous permettre d'effectuer une évaluation éclairée d'un investissement donné dans une économie axée sur l'innovation, les connaissances et les données?

  (1110)  

    Notre approche actuelle consiste à gérer les actifs nationaux économiques les plus précieux du Canada en mettant un verrou supplémentaire sur la porte de devant, tout en laissant la porte de côté grande ouverte.
    Vous trouverez dans l'annexe que j'ai jointe à mon mémoire un cadre analytique à jour pour la Loi sur Investissement Canada.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Le prochain témoin est M. Wakil.
    Vous avez sept minutes.
    Bonjour à tous. Merci de m'avoir invité à comparaître. Je suis ravi d'être ici.
    Permettez-moi de vous dire d'emblée que je pense que le régime d'examen des investissements étrangers actuel fonctionne bien pour ce qui est des examens des acquisitions d'entreprises canadiennes. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire de baisser les seuils déclencheurs d'examen prévus par la Loi. Je n'estime pas nécessaire ni même souhaitable d'imposer un moratoire temporaire sur les acquisitions par les entreprises d'État.
    À mon avis, la Loi et sa mise en application actuelle par le gouvernement suffisent déjà pour répondre aux préoccupations à l'égard des investissements étrangers, même pendant la crise de la COVID-19, et ce, pour de nombreuses raisons.
    Premièrement, pour ce qui est du processus, le gouvernement détient déjà de vastes pouvoirs qui lui permettent d'examiner la quasi-totalité des acquisitions de toute entreprise canadienne. Les investisseurs étrangers risquent notamment de faire l'objet d'examens pour des raisons de sécurité nationale, quelle que soit la valeur de l'entreprise canadienne, et ce, même s'il y a eu dépréciation de l'entreprise à cause de la COVID-19.
    De plus, les entreprises d'État qui souhaitent investir sont également assujetties à des examens de l'avantage net en fonction de seuils qui sont beaucoup plus bas que les seuils auxquels font l'objet les investisseurs du secteur privé. Il convient de souligner que le seuil spécial qui est très bas dans le cas des investisseurs qui sont des entreprises d'État est établi en fonction de la valeur comptable des actifs de l'entreprise canadienne. Dans bien des cas, une dépréciation temporaire suivant la crise de la COVID-19 ne devrait pas influer sur la nécessité éventuelle d'un examen.
    Deuxièmement, sur la question du fond, le gouvernement a déjà de grands pouvoirs d'application afin de défendre les intérêts canadiens et de procéder sur une base individuelle. Dans le cas des examens pour des raisons de sécurité nationale, le gouvernement peut prendre, et je cite la Loi, « toute mesure qu'il estime indiquée pour préserver la sécurité nationale ». Cela comprend l'interdiction d'une acquisition, l'imposition d'un désinvestissement ou toute autre condition qui viserait l'investissement.
    Dans le cas des investissements faits par des entreprises d'État, les entreprises d'État doivent respecter certaines exigences spéciales afin d'obtenir une approbation attestant un avantage net. Ces investisseurs doivent s'engager à respecter les normes canadiennes en matière de gouvernance d'entreprise et ils doivent gérer l'entreprise canadienne sur une base commerciale. Ces engagements sont permanents. Ils s'appliquent pendant toute la durée de l'investissement et font l'objet d'une surveillance active par le gouvernement. En d'autres mots, une rigueur et une vigilance spéciales s'appliquent aux investissements faits par les entreprises d'État afin de s'assurer qu'elles se comportent de la même façon que les acteurs du secteur privé.
    À mon avis, il est fortement préférable de continuer à examiner les investissements en tenant compte des nuances et des faits plutôt que d'imposer une interdiction générale. Les investissements problématiques peuvent être interdits ou restructurés sur une base individuelle. Les investissements qui ne posent pas de problème peuvent être approuvés et avoir lieu.
    Il y aurait également au moins trois risques et obstacles pratiques importants si l'on baissait les seuils d'examen ou imposait un moratoire sur certains investissements.
    Tout d'abord, en règle générale, le fait de baisser les seuils ou d'imposer un moratoire pourrait décourager l'apport en capitaux des investissements étrangers. Cela pourrait nuire à notre relance économique et être préjudiciable aux Canadiens. Ainsi, certaines entreprises en détresse qui ne sont pas reprises par des acheteurs canadiens n'auront pas comme choix le statu quo; ce sera l'insolvabilité.
    Deuxièmement, un moratoire général peut être difficilement mis en œuvre. Le fait d'apposer l'étiquette « autoritaire » à certains pays pourrait accentuer les tensions diplomatiques existantes et en créer d'autres.
    Enfin, et c'est peut-être le point le plus important, il pourrait y avoir des obstacles juridiques complexes si l'on change les seuils visant l'avantage net fixés par la Loi sur Investissement Canada. Les accords de libre-échange, tel l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, prévoient des exceptions aux seuils actuels qui ont fait l'objet de négociations. En d'autres mots, au moins une partie de nos accords de libre-échange pourraient obliger le gouvernement à maintenir les seuils actuels visant l'avantage net, donc le fait d'éventuellement modifier la Loi sur Investissement Canada dans ce domaine pourrait avoir une incidence non voulue qui devrait être étudiée avec circonspection.
    En somme, je crois que le régime actuel est bien équilibré pour cerner et traiter les acquisitions d'entreprises canadiennes qui pourraient poser problème. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas moyen de l'améliorer. Il serait souhaitable d'apporter des changements graduels au régime prévu par la Loi et à son administration. Toutefois, ces mesures seraient souhaitables à long terme, à mon avis, et ne s'imposent pas de façon urgente dans la foulée de la crise de la COVID-19.

  (1115)  

    Le gouvernement devrait notamment s'assurer que la Division de l'examen des investissements et ses collaborateurs reçoivent un financement suffisant afin d'effectuer rapidement et efficacement les examens visant l'avantage net et la sécurité nationale. Ensuite, on pourrait songer à fournir des conseils supplémentaires adaptés à certains cas dans le cadre des examens visant la sécurité nationale. Troisièmement, il serait peut-être intéressant de permettre aux investisseurs de déposer les formulaires d'avis lorsqu'il y a acquisition d'intérêts minoritaires significatifs, ou encore de les y obliger, non pas lorsqu'il y a des acquisitions de contrôle, ou comme l'a dit M. Balsillie, pour donner au gouvernement davantage de compétence pour ce qui est des transactions qui ne portent pas sur les acquisitions de contrôle ou la participation dans des entreprises canadiennes.
    Sur ce, je vais terminer. Je demeure à votre disposition si vous avez des questions.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Le prochain témoin représente Blake, Cassels and Graydon. Vous avez sept minutes.
    Madame la présidente, honorables membres du Comité, merci beaucoup. Je suis reconnaissant d'avoir l'occasion de témoigner ce matin. Je comparais à la fois en mon nom et celui de mon associé, Brian Facey, qui est le président du groupe responsable de la concurrence, des activités antitrust et des investissements étrangers de notre cabinet. Il regrette de ne pouvoir être des nôtres ce matin.
    Nous offrons régulièrement des conseils à la fois aux investisseurs étrangers et aux entreprises canadiennes sur tous les aspects de la Loi sur Investissement Canada. Nous sommes également les coauteurs de Investment Canada Act: Commentary and Annotation, 2020 Edition, publié annuellement par l'éditeur juridique LexisNexis. Nous en sommes à la huitième édition et le livre connaît un franc succès auprès des juristes, des entreprises canadiennes et des investisseurs étrangers qui cherchent à comprendre la façon dont la Loi s'applique aux investissements au Canada.
    Je comparais à titre personnel et mon avis ne représente pas celui de notre cabinet ou de ses clients.
    Je vais commencer en donnant un aperçu d'ensemble des questions soulevées par le Comité et je ferai ensuite trois recommandations, fort de notre expérience. Bref, nous pensons que la Loi sur Investissement Canada et les mécanismes d'examen ne doivent pas être modifiés et qu'il ne devrait pas y avoir de modifications ou de politiques générales en ce moment. La Loi est un cadre législatif qui offre une grande discrétion au ministre pour ce qui est d'approuver, rejeter ou modifier les investissements étrangers sur une base individuelle. Nous croyons que c'est un domaine prioritaire qui s'avère critique en ce moment et que la Division de l'examen des investissements devrait notamment être dotée de suffisamment d'employés et de fonds afin de mener à bien son mandat important.
    Les défis découlant de la crise de la COVID-19 auxquels font face les entreprises et le gouvernement sont sans précédent, et même si nous reconnaissons les risques potentiels associés à l'acquisition par des intérêts étrangers des entreprises canadiennes qui occupent un rôle essentiel pour la sécurité nationale, la Loi confère déjà des pouvoirs étendus au gouvernement afin qu'il effectue des examens en profondeur des investissements étrangers et puisse interdire ou modifier tout investissement qui soulève des préoccupations sur le plan de la sécurité nationale.
    Dans bien des cas, les examens peuvent durer plus de 200 jours, mais selon notre expérience et ce que nous avons observé au cours des derniers mois, l'interdiction générale des investissements par certaines catégories d'investisseurs ou dans certaines industries ne se justifie pas, et il faudrait plutôt procéder au cas par cas. Le fait d'imposer des obligations supplémentaires aux investisseurs, surtout en l'absence de ressources supplémentaires pour la Division de l'examen des investissements et ses collaborateurs et de mesures supplémentaires de transparence, pourrait signaler à la communauté des investisseurs qu'ils risquent probablement d'être confrontés à plus de bureaucratie s'ils cherchent à investir au Canada. Or, le Canada a besoin d'investissements étrangers directs pour alimenter sa reprise économique.
    Il faut également se souvenir que le Parlement a modifié la Loi en profondeur en 2009 pour mettre en œuvre des mesures de protection de la sécurité nationale, et qu'il a augmenté les montants seuils et a réduit le nombre d'examens de l'avantage économique ou net en 2015. Ces changements ont permis de trouver le juste équilibre pour ce qui est d'encourager les investissements de nos partenaires commerciaux et veiller à la propriété intellectuelle et à la capacité manufacturière canadiennes, afin qu'elles ne soient pas reprises par des investisseurs dont les intentions ne concordent pas forcément avec les intérêts des Canadiens. Le fait de baisser les seuils déclencheurs d'examen serait un pas en arrière pour ce qui est d'ouvrir le Canada aux investissements étrangers directs dont il a grandement besoin.
    Voici maintenant nos recommandations.
    À l'heure actuelle, la Loi n'exige pas que les investisseurs avisent le gouvernement avant de clôturer l'acquisition, à moins que l'investissement porte sur l'acquisition directe d'une entreprise canadienne dont la valeur est supérieure au montant seuil applicable. Toutefois, les investisseurs ont comme pratique usuelle d'aviser les gouvernements avant de conclure l'acquisition lorsqu'un investissement a une incidence potentielle sur la sécurité nationale.
    À notre avis, cette pratique fonctionne bien, mais s'il faut apporter des changements, on devrait se limiter aux investissements dans les industries qui sont d'une importance critique pour la sécurité nationale canadienne, et les investisseurs assujettis à un accord commercial devraient également être exemptés de l'obligation de déposer un avis avant la clôture. La liste des industries critiques devrait être précise, afin que les investisseurs et les entreprises canadiennes puissent vérifier facilement si un avis s'impose. De plus, le gouvernement ne devrait pas rallonger le délai, déjà lourd, de 200 jours dans le cas des examens visant la sécurité nationale. La Division de l'examen des investissements doit détenir les ressources et avoir les directives nécessaires afin de faire le tri des cas rapidement. Permettez-moi de m'y attarder un peu.

  (1120)  

    Nous avons également observé que lorsque les investissements font l'objet d'un examen, notamment lorsqu'il s'agit de sécurité nationale, les délais peuvent être assez longs, ce qui cause des problèmes surtout lorsque les investisseurs prévoient établir, au Canada, de nouvelles entreprises qui créent des emplois, qui mènent de nouvelles recherches et qui mettent au point des produits et services au profit de l'économie canadienne. Une personne devrait être nommée prochainement à la direction permanente des investissements, et le gouvernement devrait ajouter, aux équipes d'examen, du personnel technique qui a l'expertise nécessaire pour évaluer plus rapidement si les investissements posent ou non des problèmes de sécurité nationale.
    Enfin, nous encourageons les membres de votre comité à prendre des mesures pour améliorer la transparence dans le processus d'examen. Selon notre expérience, les investisseurs se demandent souvent pourquoi leurs investissements sont pris dans les méandres d'un examen lié à la sécurité nationale. De plus, pendant ce processus, on ne les informe presque pas des préoccupations soulevées et des mesures qui pourraient être nécessaires pour les régler. Il est dans l'intérêt de tous les Canadiens de disposer d'un cadre d'examen solide en matière de sécurité nationale, mais sa mise en œuvre doit être transparente et fondée sur des principes. Les investisseurs doivent avoir la possibilité de répondre de manière significative aux préoccupations qui ont été soulevées, et ce processus doit être intégré dans les lois et les règlements.
    Nous vous remercions de nous avoir donné l'occasion de vous parler de ce sujet très important qui est lié à l'avenir économique du Canada. Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Je vous remercie beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Balding. Il a sept minutes.
    Je vous remercie.
    Je dirai d'emblée que, bien que je ne sois pas un expert du droit canadien de l'investissement, je pense avoir l'expertise nécessaire pour parler de la menace représentée par les investissements d'État.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, je vous remercie de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui d'un sujet qui, à mon avis, revêt une grande importance dans le monde actuel. Je dis cela à titre d'économiste et de citoyen d'un pays démocratique préoccupé par l'influence des États autoritaires dans divers secteurs.
    Par conviction intellectuelle, les obstacles au commerce, à l'investissement et à la libre circulation des travailleurs sont pour moi un anathème. J'ai passé la plus grande partie de ma carrière à travailler en Asie et à enseigner dans des universités qui font la promotion de ces idéaux et de ces valeurs. Je crois que les démocraties libérales ouvertes tirent profit de leur ouverture.
    Toutefois, après avoir travaillé pendant neuf ans comme employé de la fonction publique à la Peking University HSBC Business School — l'École de commerce HSBC de la Peking University, en Chine —, j'ai été assailli par la réalité de la Chine moderne et de l'autoritarisme musclé. La Chine moderne, sous le président Xi, est en opposition totale avec les valeurs auxquelles le Canada, à titre de démocratie libérale ouverte, a à cœur.
    Comment pouvons-nous concilier les exigences des marchés ouverts avec la menace très réelle des entreprises d'État subventionnées et prédatrices? Pour répondre à cette question, nous devons d'abord répondre à la question sur la menace que représentent les entreprises d'État à contrôle autoritaire et expansionniste. Il s'agit d'entreprises qui utilisent des fonds publics pour cibler des entreprises stratégiques et contrôler des ressources, des actifs ou des technologies clés.
    En Chine, nous voyons de nombreux exemples d'entreprises d'État ou d'entreprises qui sont liées à l'État et qui reçoivent les largesses de l'État pour les aider à se développer à l'étranger. Qu'il s'agisse de fournir un financement accordé par le vendeur qui ne serait pas autorisé en vertu des règles de l'OCDE, d'un financement soutenu par l'État pour effectuer des acquisitions ou d'industries ciblées par les dirigeants politiques, des entreprises d'État et des entreprises liées à des États autoritaires reçoivent des avantages importants que les entreprises privées du reste du monde ne reçoivent pas. Elles ciblent également des actifs, qu'il s'agisse de ressources naturelles ou de technologies, qui sont privilégiés par les dirigeants politiques plutôt que les forces du marché. Nous avons vu des exemples où la Chine achète des entreprises de technologies étrangères et tente ensuite de rapatrier l'ensemble des activités de l'entreprise en Chine. Ce n'est pas le comportement des forces du marché ou même celui d'une contrepartie digne de confiance.
    Plus inquiétant encore, nous avons vu des exemples où la Chine essaie différentes méthodes pour éviter le contrôle de ses activités d'investissement et utilise diverses mesures pour dissimuler ses activités, qu'il s'agisse d'investissements de tiers par l'entremise de divers fonds ou qu'il s'agisse de l'omission de soumettre les investissements étrangers à un contrôle réglementaire, ce qui nécessite ensuite un désinvestissement obligatoire. Dans d'autres exemples, la Chine a encouragé la signature d'ententes, par exemple en proposant d'ouvrir le marché chinois si la technologie lui était transférée.
    Nous avons des preuves selon lesquelles la Chine tient des registres détaillés sur la propriété intellectuelle détenue par les entreprises, avec une série de renseignements connexes qui évaluent l'actif. Il est évident que la Chine dispose d'une liste ciblée avec une hiérarchie des actifs en matière de technologies et de propriété intellectuelle. Tous ces comportements soulèvent des inquiétudes justifiées quant à la question de savoir si l'État autoritaire chinois est une contrepartie digne de confiance dans les investissements internationaux.
    Étant donné les risques évidents liés aux investissements de la Chine, je crois qu'il est dans l'intérêt du Canada de réfléchir sérieusement aux risques liés à un pays qui a démontré un comportement d'investissement visiblement menaçant et prédateur.
    Je suis prêt à répondre aux questions des membres du Comité.
    Je vous remercie beaucoup.

  (1125)  

    Je vous remercie beaucoup.
    Nous entamons maintenant nos séries de questions. Pour la première série de questions de six minutes, nous entendrons d'abord Mme Gray.
    Vous avez la parole. Vous avez six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais remercier les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Mes premières questions s'adressent à M. Balding.
    Certains experts en politique étrangère ont écrit au sujet des inquiétudes que soulève la stratégie de l'État chinois visant à dominer par l'acquisition de grandes entreprises dans d'autres pays. J'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec cette évaluation, monsieur Balding.
    J'adopterais un point de vue un peu plus nuancé, mais en général, je suis d'accord. Les priorités générales établies par la Chine sont définies assez régulièrement, chaque année, par les hauts dirigeants, et elles ont des objectifs industriels très précis. Avec le rationnement des devises qui se produit en Chine, lorsque les entreprises s'installent à l'étranger, soit elles obtiennent des capitaux en dehors des marchés chinois pour qu'ils soient en devises fortes, soit elles se font attribuer ces devises par le SAFE, c'est-à-dire l'administration d'État des contrôles des changes en Chine, qui contrôle les dollars américains. Elles ont essentiellement une liste d'objectifs industriels et sectoriels à l'échelle mondiale, de sorte que les principales entreprises d'État ou les grandes sociétés liées à l'État en Chine ont leur liste d'achats, faute d'un meilleur terme.
    Je pense que c'est un peu plus nuancé que cela, mais elles ont certainement une liste précise d'objectifs à l'échelle mondiale, que ce soit dans le secteur de la technologie ou celui des ressources naturelles.

  (1130)  

    Cela m'amène à ma prochaine question. Certains experts ont également affirmé que l'objectif de ces prises de contrôle n'est pas le profit, mais plutôt l'élargissement de l'influence à l'échelle internationale.
    Monsieur Balding, êtes-vous d'accord avec cette affirmation, et si oui, quel préjudice cela pourrait-il avoir sur l'économie canadienne si ces prises de contrôle étrangères ne tiennent pas compte du bien-être économique?
    Je pense qu'il est juste de dire qu'un grand nombre de ces investissements sont effectués beaucoup plus à des fins d'influence ou à des fins stratégiques pour l'État chinois. Par exemple, une entreprise britannique de semi-conducteurs a été vendue à un conglomérat chinois, et une partie de l'accord prévoyait que l'entreprise resterait en Grande-Bretagne. Une dispute liée à la sécurité nationale est en cours. Essentiellement, les Chinois cherchent à faire sortir l'ensemble de l'entreprise de la Grande-Bretagne et à ne laisser que peu ou pas de personnel dans ce pays.
    Ce n'est pas seulement une question d'influence, mais on cherche visiblement à acquérir une certaine influence. Il y a aussi des considérations stratégiques... Cela répond-il à l'objectif stratégique de la Chine et dans ce cas précis, à l'objectif de la Chine pour 2020 à 2025, et à son désir d'améliorer la production de fabrication de semi-conducteurs?
    Il est également très important de souligner qu'il existe de nombreux autres exemples dans le monde d'investissements ayant pour objectif ce que vous avez appelé « l'influence ». Au fond, ces investissements semblent moins axés sur les rendements économiques et financiers, mais plutôt sur les politiques de l'État.
    Si un examen est déclenché maintenant par la Loi sur Investissement Canada actuelle, il faut prouver qu'il y a un avantage net pour le Canada.
    Monsieur Balding, selon vous, les paramètres qui sont actuellement exposés et énumérés sont-ils suffisants pour afficher un avantage net?
    En précisant que je ne suis pas un expert du droit canadien de l'investissement ou de la définition exacte de « l'avantage net » au Canada au fil du temps, je pense qu'il serait judicieux d'examiner la question de plus près et, plus précisément, les exigences qui sont imposées aux acquéreurs étrangers.
    Il existe de nombreux exemples où des entreprises chinoises ont agi de manière... Visiblement, non seulement elles ne respecteraient pas nécessairement un accord après l'approbation d'une attribution, mais elles organiseraient également des entreprises de différentes manières et réaffecteraient les actifs d'une façon qui ne serait pas dans l'intérêt du Canada.
    Nous avons vu quelques exemples d'une entreprise d'État chinoise, China Communications Construction Company, qui mène des projets de construction dans le monde entier, par exemple la cale sèche de Malte, les infrastructures du corridor économique Chine-Pakistan et une ville portuaire du Sri Lanka. De nombreux chercheurs appellent cette situation la « diplomatie du piège de la dette ».
    À votre avis, quelles seront les conséquences et est-ce quelque chose qui devrait nous préoccuper ici, au Canada?
    Vous avez soulevé deux questions distinctes. Je pense que c'est probablement moins un problème pour le Canada, car les prêteurs chinois ne font pas nécessairement de prêts importants, à ma connaissance, aux gouvernements locaux chinois ou aux grands industriels canadiens [Difficultés techniques].
    L'autre chose qu'il faut souligner, selon moi, au sujet de la Chine, c'est que cela n'a probablement pas été planifié en détail. En effet, je doute que Pékin ait concocté un plan de piège de la dette. Je pense plutôt qu'ils ont tout simplement reçu l'ordre d'aller prêter à des entreprises à l'étranger dans des pays ciblés le long de la route de la soie.
    Je vous remercie.
    Je crois que mon temps est écoulé, madame la présidente.
    Oui, votre temps est malheureusement écoulé.
    Nous entendrons M. Erskine-Smith pour la prochaine série de questions.
    Vous avez la parole. Vous avez six minutes.

  (1135)  

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Avant de m'adresser aux témoins, j'aimerais préciser que le greffier a distribué un avis de motion. Je tiens seulement à m'assurer qu'elle est inscrite au compte rendu public. Je la proposerai jeudi, mais pour que tout le monde soit informé, voici la motion:
Que, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie invite les dirigeants des Compagnies Loblaw Ltée, de Metro inc. et d'Empire Company Ltd. à justifier leur décision d’annuler, le même jour, la légère augmentation de salaire de leurs employés d’épicerie de première ligne durant la pandémie, et d’expliquer comment cette décision est conforme aux lois régissant la concurrence.
    Je sais qu'un certain nombre d'entre nous ont éprouvé une grande frustration lorsque cette décision a été prise, et je pense qu'il est important, pour les Canadiens, que les représentants de ces entreprises viennent s'expliquer. Il faut espérer qu'ils ne se parleront pas entre eux au préalable.
    Ma question sur la Loi sur Investissement Canada s'adresse à tous les témoins. Selon des témoignages précédents, les orientations politiques publiées à la mi-avril par le cabinet du ministre prévoient une surveillance accrue des entreprises d'État ou des entreprises associées à un régime autoritaire. Une surveillance accrue est actuellement exercée au cas où ces acquisitions sont proposées. Toutefois, des témoins précédents ont affirmé qu'à la place de ces orientations politiques, on devrait formuler des directives plus fermes et plus précises. Cette recommandation qui provient des témoignages semble raisonnable.
    J'aimerais savoir si vous pensez que nous devrions appuyer cette recommandation. J'aimerais d'abord entendre la réponse de M. Wakil.
    Oui, je crois que nous devrions l'appuyer. J'aimerais ajouter que selon moi, le gouvernement a fait du bon travail, au fil des années, pour accroître la transparence des examens de sécurité nationale dans le cadre de la Loi sur Investissement Canada. Le rapport annuel que publie la Division de l'examen des investissements est une source d'information précieuse pour les membres du Barreau, les investisseurs étrangers et les entreprises canadiennes à la recherche d'investissements étrangers en ce qui concerne les informations statistiques sur les types de valeurs mobilières nationales qui ont été entreprises, les résultats des examens, les recours et les échéanciers. Il existe également des lignes directrices sur les examens de sécurité nationale qui sont utiles.
    Toutefois, comme je l'ai dit dans mon exposé, je crois qu'il serait nécessaire de fournir des orientations supplémentaires. Les investisseurs dans les entreprises canadiennes ne sont pas contre l'imposition de règles, mais ils aiment avoir le plus de certitude possible à l'égard de ces règles.
    En ce qui concerne les orientations supplémentaires qui peuvent être utiles, on pourrait, dans la mesure du possible, offrir des orientations précises pour chaque cas. Parfois, ces examens liés à la sécurité nationale, en raison de leur nature, empêchent la divulgation de renseignements qui peuvent être précieux. Je pense que le gouvernement pourrait donner des orientations supplémentaires à mesure qu'il acquiert une plus grande expérience en matière d'examen de la sécurité nationale dans des cas précis, par exemple des renseignements supplémentaires sur l'industrie à laquelle s'intéresserait le gouvernement ou des renseignements sur les résultats de l'examen.
    Monsieur Krane, vous pouvez répondre à la question.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je suis d'accord avec M. Wakil lorsqu'il affirme que le gouvernement a fait du bon travail pour accroître la transparence, surtout par l'entremise du rapport annuel. Toutefois, selon mon expérience, on donne très peu de renseignements aux investisseurs au sujet de la préoccupation de sécurité nationale précise qui est soulevée par leurs investissements. En fait, on ne leur dit rien avant le 90e jour d'un examen, et même à ce moment-là, on leur donne seulement un énoncé sommaire de deux ou trois phrases de nature générale et on leur demande ensuite de formuler une réponse. Il n'existe aucun processus officiel par lequel on fournit aux investisseurs une explication complète de la préoccupation en matière de sécurité nationale à l'étude, et on ne leur donne aucune orientation précise sur le type de mesures qu'ils pourraient prendre pour répondre à cette préoccupation.
    Sachant que les entreprises ont besoin de certitude pour leurs investissements, comme le dit M. Wakil, vous appuieriez, pour conforter la justesse de l'orientation stratégique publiée à la mi-avril — qui, je crois, est la bonne, dans une certaine mesure —, la production de lignes directrices complètes et plus précises.
    Absolument. Même durant le processus portant sur un cas précis, des mesures favorisant plus de transparence seraient utiles pour que les investisseurs sachent si le résultat est prometteur ou simplement décevant. Entraîner les investisseurs dans un processus d'une durée de 200 jours, uniquement pour leur annoncer qu'on est désolé, qu'on ne peut pas arranger les choses, ça n'envoie pas nécessairement le meilleur message aux autres investisseurs.

  (1140)  

    Monsieur Balsillie, qu'en pensez-vous?
    Je répéterai simplement ce que j'ai dit dans ma déclaration. Notre système est périmé depuis des décennies et il ne correspond plus aux structures économiques et sécuritaires de l'économie contemporaine. Toutes les nations qui réfléchissent un peu ont actualisé depuis longtemps leur approche dans ce domaine. Actuellement, même les États-Unis épluchent différents secteurs généraux pour en recenser les diverses techniques et entreprises et déterminer les modalités de leur examen.
    Nous sommes terriblement dépassés, et notre système ne cadre pas avec les enjeux actuels de l'économie contemporaine.
    Le carton jaune vient d'apparaître. Je prends les dernières secondes pour affirmer que j'adore tous mes collègues, mais vous, monsieur Morrissey, c'est vous qui me manquez le plus. Quel plaisir de vous voir en ligne.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Monsieur Savard-Tremblay, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Balding, vous nous avez brossé principalement le portrait de la puissance chinoise, qui parviendrait à profiter de certaines failles. Or, même si le modèle chinois est celui d'une économie de marché, c'est quand même un régime de collusion entre les grands groupes industriels et l'État. C'est donc un modèle très agressif.
    Cependant, il y a également une forme de collusion avec de grands groupes industriels issus de ces mêmes démocraties libérales. Le modèle chinois, par exemple, travaille souvent de concert avec des multinationales étrangères.
    Au fond, le problème n'est-il pas que nous sommes dépendants de la Chine? On a pu le constater dans le cas des médicaments ou des métaux rares, entre autres.
    Ne s'agit-il pas également d'un problème de collusion entre l'État chinois et les entreprises de chez nous et des États-Unis?

[Traduction]

    Il y a beaucoup de vérité dans ce qui vient de se dire. Par exemple, dans les secteurs les plus stratégiques, le plus souvent on verra que le président-directeur général de la première entreprise de télécommunications de Chine, par exemple, deviendra celui de China Unicom, qui deviendra celui de la prochaine entreprise chinoise de télécommunications. Ce sont toutes en réalité une seule entreprise.
    Il importe beaucoup, d'après moi, de le remarquer. Souvent, quand une entreprise chinoise, quelle qu'en soit la taille, investit notablement au Canada, c'est visiblement avec la bénédiction de l'État et elle aura été diversement financée par des banques chinoises, tout en accédant à des capitaux étrangers.
    Il est assez juste d'appeler collusion ce mariage de l'État et de l'entreprise. Voilà pourquoi j'ai dit que, essentiellement, on leur désigne des industries comme champs d'action, et que leurs investissements à l'étranger sont censés se faire dans des industries dont on a dressé la liste.

[Français]

    Que peut-on faire maintenant?
    Par exemple, même si la Chine est membre de l'Organisation mondiale du commerce, elle n'en est pas un membre fondateur, et même si elle en fait partie, on peut dire que son fonctionnement en soi fait mentir le modèle de l'Organisation mondiale du commerce. Alors, que peut-on faire?
    Les relations entre le Canada et la Chine ont beau avoir déjà été excellentes, ce n'est plus le cas. Il y a quelques années à peine, il était question de conclure une entente de libre-échange entre le Canada et la Chine, et maintenant, il n'en est plus du tout question. Les relations sont devenues exécrables. Cependant, malgré tout, cette forme de collusion continue.
    Encore une fois, que peut-on faire?

[Traduction]

    Si nous nous focalisons sur les investissements au Canada, la question essentielle est « qu'est pour nous la sécurité nationale? ». Tous les pays, particulièrement à la suite de la COVID, y reviennent. Il y a six mois, on n'aurait pas pris au sérieux celui qui aurait annoncé que l'équipement médical de base comme l'équipement de protection individuelle serait considéré comme un enjeu de sécurité nationale. Maintenant, ça obsède tout le monde.
    L'un de nos premiers sujets de réflexion... Je remarque que, aujourd'hui, nous sommes sur Zoom, essentiellement une entreprise chinoise. Tout son cryptage, tout passe par la Chine actuellement. À ce que je sache, cette vidéo sera rendue publique, mais si nous préférions le huis clos ou sécuriser nos discussions d'une manière ou d'une autre, ça pourrait causer de véritables problèmes au gouvernement du Canada.
    Je pense que, notamment — et je serais d'accord avec certains des témoins qui en ont parlé — nous manipulons une lame à deux tranchants. Il faut de la transparence sur les règles et la procédure. Il faut aussi noter que la Chine se sert de la transparence contre des gouvernements comme celui du Canada et qu'elle a pris des mesures pour s'assurer que ses investissements échapperont à l'examen ou à la détection réglementaire et ensuite, quand elle est obligée de s'en défaire, elle possède déjà les données nécessaires ou la propriété intellectuelle lui permettant de partir et de fabriquer son propre produit.
    Il faut concilier la transparence nécessaire, sur laquelle, avec les autres témoins, je suis d'accord, et le maintien de la confidentialité de certains renseignements pour le gouvernement.

  (1145)  

[Français]

     Je vois que mon temps de parole tire à sa fin.
    Je tiens quand même à dire que vous avez donné un exemple assez évocateur. Alors qu'on agite le drapeau de la menace chinoise depuis si longtemps, le Parlement canadien se réunit en utilisant une application chinoise. Voilà un doux paradoxe.
     Je vous remercie.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Masse, vous disposez de six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Rapidement, mais je tiens à le dire, je remercie M. Erskine-Smith de sa motion. Je l'appuierai.
    N'est-il pas irréel que, dans la période que nous traversons, alors que notre système monopolistique a permis aux épiceries d'engranger des revenus importants, cette décision ait été prise. J'espère que nous pourrons approfondir l'analyse dans une circonscription comme la mienne, où la réduction du service dans les secteurs pauvres ou éprouvés, présente un écart démesuré avec les secteurs économiquement favorisés. Ça se reflète également dans l'embauche, le soutien aux consommateurs, l'établissement des prix, l'apparence des magasins et le plan régional global d'affaires. De fait, certaines de ces chaînes ne desservent même plus certains de ces quartiers, en raison des difficultés qu'ils présentent. J'espère que nous pourrons avoir une bonne discussion sur ce phénomène, parce que l'alimentation est importante pour l'égalité et qu'il existe un problème de discrimination systémique parmi ces chaînes, en ce qui concerne certains des services fournis dans certains quartiers.
    Sur ce, voici ma première question à MM. Wakil et Krane: Vous préconisez en grande partie le statu quo. Alors précisément, qu'est-ce que le Canada a réussi à faire que d'autres pays ratent? Je le demande, parce qu'une analyse révèle notre différence. Quels résultats tangibles et quelles statistiques précises pouvez-vous désigner, qui nous ont avantagés sur le plan économique, soit par la création de produits et de services, le PIB, notre type de système différent de ceux des autres pays?
    Vous, d'abord, monsieur Krane, puis vous, monsieur Wakil.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Vous savez, notre processus de sécurité nationale existe depuis environ 11 ans, et, jusqu'ici, il a donné d'excellents résultats. Le gouvernement a publié des conseils à répétition, à l'intention des investisseurs, pour qu'ils se manifestent tôt, quand leurs opérations soulèvent des inquiétudes pour la sécurité nationale, et, pour la plupart, les investisseurs en ont tenu compte.
    Désolé de vous interrompre. Possédez-vous des statistiques qui le confirment? J'en cherche.
    On m'a dit que plus de la moitié des investissements étaient l'objet d'un préavis avant la fin de la période, mais vous devriez essayer d'obtenir le chiffre de la direction de l'examen des investissements, parce que c'est le genre de renseignements qu'elle suit. Ce n'est pas publié, mais elle vous les communiquera si vous en avez besoin.
     À noter aussi qu'on notifie au Canada un millier d'investissements chaque année, et seulement une poignée d'entre eux sont finalement examinés pour des motifs de sécurité nationale, ce qui montre que l'immense majorité des investissements étrangers directs au Canada ne sont pas assujettis à cet examen. Ça me porte à croire que soit les choix des investisseurs sont prudents, soit le gouvernement a bien cerné les types d'investissements qui soulèvent des questions de sécurité nationale.

  (1150)  

    Je suis désolé, mais ce n'était pas vraiment ce que je cherchais.
    Monsieur Wakil, peut-être pouvez-vous essayer de répondre. Je le dis en tout respect pour M. Krane. Je posais une question sur ce que le Canada faisait de différent des autres pays et comment l'avantage net se serait vraiment révélé dans les statistiques, pour soit les investissements ou les occasions d'investir.
    Monsieur Wakil, pouvez-vous, s'il vous plaît, essayer de répondre?
    Certainement. D'abord, le Canada se distingue beaucoup des autres pays en s'étant doté d'un type d'examen des investissements étrangers axé sur l'avantage économique net. L'immense majorité des pays soit examine ces investissements en fonction de la sécurité nationale, soit n'en fait pas de cas. Le Canada, l'Australie et une poignée d'autres pays font figure d'exceptions en examinant les avantages de certains investissements.
    Ensuite, sur les renseignements que vous demandez, le gouvernement, à ma connaissance, ne les a jamais rassemblés ni analysés, ce qui serait très difficile ou très peu simple. La difficulté, en partie, proviendrait de notre ignorance des conséquences de l'absence d'investissement étranger pour l'entreprise canadienne, de ce qui lui serait advenu faute d'investissement.
    D'après mon expérience personnelle, mais c'est anecdotique, beaucoup d'investissements ont eu d'excellents résultats. L'autre partie de l'alternative, pour beaucoup d'investissements, était l'insolvabilité, tandis que l'investissement a permis un apport de connaissances de l'étranger, de capitaux étrangers, qui ont aidé l'entreprise canadienne et sauvé des emplois, ce qui...
    Merci. Je suis désolé, monsieur Wakil. Je dois poursuivre, parce que je tiens à questionner M. Balsillie...
    Très bien.
    J'en suis reconnaissant, et c'est une juste évaluation de ce que je demande. Seulement, les arguments pour le maintien du statu quo n'ont souvent rien d'évident. On ne les analyse pas de manière empirique et, souvent, ils se résument à la crainte du changement, à la violation des accords commerciaux et ainsi de suite.
    Très rapidement, monsieur Balsillie — quelques secondes —, le Canada peut-il faire quelque chose pour, dès maintenant, profiter de l'occasion la plus favorable pour au moins inverser l'exode massif de certaines des compagnies étrangères qui se trouvent à un tournant tout en étant de taille modeste?
    Absolument. Il faut se donner un cadre d'action actualisé qui tient compte de la nature des effets secondaires et des conséquences intersectorielles de l'économie contemporaine, et faute de l'utiliser, actuellement, notre calcul de l'avantage n'est pas juste parce qu'anachronique.
    Merci beaucoup. Nous passons maintenant à la deuxième série d'interventions.
    Notre premier intervenant sera M. Dreeshen. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente. J'espère que ma connexion Internet ne flanchera pas.
    Je m'adresse à vous, messieurs Balsillie et Balding. Le reste du monde semble comprendre l'importance de ce qui se passe, dans la mesure où la propriété intellectuelle est concernée. Peut-être que, après le vote de mercredi sur la composition du Conseil de sécurité de l'ONU, nous pourrons revenir aux emplois au Canada et nous soucier comme il se doit des politiques destinées aux Canadiens.
    Monsieur Balding, vous avez écrit dans un tweet: « Pékin, depuis quelque temps, annonce qu'elle veut en finir avec l'ordre mondial libéral. Les petits pas multilatéraux conduisant à plus d'ouverture et au respect des droits de la personne sont vains si vous acceptez cette vision chinoise ».
    Vous qui avez une connaissance intime du gouvernement chinois et de l'économie de la Chine, je me demande si vous pouvez situer cette déclaration dans le contexte de notre étude de la Loi sur Investissement Canada. Selon certains témoignages, par exemple, le Canada doit clarifier ses règles sur les investissements étrangers et, comme la pandémie de COVID-19 expose notre pays à un risque accru de prises de contrôle stratégiques par des acteurs étrangers agressifs comme la Chine, il a été avancé que les prises de contrôle faites notamment par des entreprises d'État chinoises pouvaient servir à promouvoir les intérêts stratégiques étrangers du Parti communiste chinois.
    Sur le court comme le long terme, pourriez-vous en dire un peu plus sur ce que vous croyez être les intérêts stratégiques du gouvernement chinois à l'étranger? Quels sont les risques pour les actifs canadiens? Devrions-nous imposer un moratoire complet à ces investissements ou, à tout le moins, sensiblement renforcer les dispositions de cette loi qui concernent la sécurité nationale?

  (1155)  

    Merci beaucoup pour la question.
    Je pense que mon tweet a visé juste. Permettez-moi d'abord d'expliquer un peu comment fonctionne l'économie chinoise et quels objectifs d'investissement stratégique de ce pays entrent en jeu.
    Chaque année, les Chinois se voient remettre une liste de secteurs prioritaires. Actuellement, il y en a neuf. Nous voyons qu'ils obtiennent beaucoup d'argent à investir à l'étranger et en Chine. Les secteurs sont hiérarchisés selon des critères politiques. Nous le constatons essentiellement dans les performances des entreprises. Croyez-le ou non, le rendement des capitaux propres et de l'actif des sociétés chinoises, des entreprises d'État, notamment, est très faible, parmi les plus faibles dans le monde. Les sociétés à forte capitalisation de la bourse chinoise ont produit des rendements annuels d'environ 1 % au cours des 25 dernières années.
    Nous le voyons aussi dans la façon dont le capital est alloué à l'intérieur du pays et à l'étranger. Un exemple simple le montrera: les Chinois ont accordé la priorité à des secteurs comme les mégadonnées et la reconnaissance faciale, principalement pour des motifs de sécurité intérieure. Ils utilisent des techniques comme l'intelligence artificielle, à l'Université de Toronto et dans certains autres pôles très spécialisés, d'une manière qui pourrait répugner aux démocraties libérales.
    Même si l'entreprise n'est pas nécessairement achetée, la délocalisation des emplois hors Canada, du moins très probablement, mérite un deuxième coup d'œil sur ce que ces compagnies chinoises fabriquent, particulièrement avec les ressources technologiques, et sur leur façon de s'en servir dans des endroits comme le Xinjiang.
    Les méthodes par lesquelles les sociétés chinoises investissent à l'étranger présentent des exemples très évidents de leur infiltration d'entreprises à capital-risque pour accéder à la technologie d'une firme ciblée, accéder à sa technologie, la copier ou en obtenir une licence d'exploitation — façon de faire qui possède plusieurs variantes — pour essentiellement l'exporter et l'utiliser en Chine. Nous avons vu des exemples aux États-Unis et dans d'autres pays où ils ne se sont pas soumis à un examen axé sur la sécurité nationale.
    Nous considérons que c'est le comportement auquel nous avons affaire. Quant à l'ordre fondé sur les règles et aux pratiques économiques normalisées que nous tenons pour acquises, d'habitude la Chine ne les respecte pas.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vois que la présidente a levé le carton jaune. Je voulais interroger également M. Balsillie au sujet de ses préoccupations concernant une loi sur les entreprises d'État, que nous estimons nécessaire, mais je vais devoir attendre plus tard.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Ehsassi pour la prochaine série de questions.
    La parole est à vous pour cinq minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins. J'ai trouvé vos exposés très instructifs.
    Je vais m'adresser d'abord à M. Balding. À plusieurs reprises durant votre témoignage, vous avez fait savoir que vous ne connaissez pas très bien la Loi sur Investissement Canada. Est-ce exact?
    Oui, c'est exact.
    D'après vos propos, vous avez des préoccupations relativement au comportement prédatoire d'entreprises d'État chinoises. Est-ce exact? Je pense que vous insistez continuellement sur le fait que ces entreprises d'État tentent de se soustraire à un examen rigoureux de leurs investissements.
    Tout cela pour dire que le gouvernement du Canada, précisément le ministère de l'Industrie, a publié un énoncé le 18 avril. Je vais vous en lire un extrait, et vous pourrez me dire si ces entreprises d'État pourraient éviter un examen rigoureux: « [...] le gouvernement soumettra à un examen approfondi [...] tous les investissements étrangers réalisés par des investisseurs publics, quelle que soit leur valeur [...] ».
    Est-ce que cela atténue certaines des préoccupations que vous avez exprimées?

  (1200)  

    Je vous remercie pour cette information.
    Non, cela n'atténue pas vraiment mes préoccupations, et permettez-moi de vous expliquer pourquoi.
    En Chine, une entreprise d'État constitue une personne morale très précise; comme une société à responsabilité limitée ou un partenariat, par exemple. Les entreprises d'État sont un type de personne morale très précis.
    Monsieur Balding, connaissez-vous les dispositions sur la sécurité nationale qui existent dans la Loi sur Investissement Canada? Ces dispositions peuvent être utilisées. Le savez-vous?
    Oui, et je vais vous expliquer où je veux en venir. Il y a de nombreuses entreprises qui ne peuvent pas être considérées comme des entreprises d'État, mais qui agissent sur l'ordre de...
    Cependant, monsieur Balding, même si c'était le cas — même si, disons, pour une raison quelconque, le gouvernement ne sait pas qu'il s'agit essentiellement d'une entreprise d'État — il existe des dispositions sur la sécurité nationale qui nous permettent d'examiner chaque investissement. Le savez-vous?
    Oui, je l'ai appris aujourd'hui. Je voudrais seulement...
    Si vous me le permettez, je vais maintenant m'adresser à M. Wakil.
    Je vous souhaite la bienvenue, monsieur Wakil. Je sais que vous avez beaucoup d'expérience. Vous êtes l'un des plus éminents avocats dans ce domaine. Dans votre [Difficultés techniques] la propriété intellectuelle pourrait tomber entre de mauvaises mains. Est-ce que la Loi sur Investissement Canada fournit une protection adéquate?
    J'ai seulement entendu la dernière partie de votre question. Pardonnez-moi, mais j'éprouve des problèmes de son.
    Je suis désolé.
    Monsieur Ehsassi, pourriez-vous répéter votre question? Il y a eu une coupure. J'ai arrêté le chronomètre.
    Oui, bien sûr.
    Monsieur Wakil, je sais que vous avez énormément d'expérience dans ce domaine; plus de 20 ans, je dirais. M. Balsillie a exprimé des préoccupations à propos des actifs incorporels, de la propriété intellectuelle et ce genre de choses. Croyez-vous que la Loi sur Investissement Canada, telle qu'elle est rédigée actuellement, offre une protection contre l'acquisition d'éléments de propriété intellectuelle?
    À l'instar de M. Balsillie, je m'inquiète qu'il y ait des lacunes dans la loi. Je pense que la loi, tel qu'elle est rédigée actuellement, est très efficace pour surveiller la prise de contrôle d'entités canadiennes. Dans certains cas, sa portée juridique peut faire en sorte que l'acquisition d'un élément de propriété intellectuelle soit visée par la Loi sur Investissement Canada et fasse ainsi l'objet d'un examen.
    Je crois qu'il pourrait être utile de faire exactement ce que propose M. Balsillie et déterminer si la loi comporte ou non des lacunes. Je pense qu'en ce qui concerne sa portée, il y a sans doute des lacunes, précisément en ce qui concerne les transactions qui n'impliquent aucune prise de contrôle ou acquisition de titres de participation dans d'autres entités ou éléments d'actifs. Il pourrait y avoir des situations où des transferts de technologie portent atteinte à la sécurité nationale, mais ils ne sont pas visés par la loi en raison de sa portée juridique.
    Je crois que la loi est très efficace. Pour répondre à la question que se pose le Comité dans le cadre de la présente étude, c'est-à-dire s'il devrait ou non y avoir des seuils d'évaluation ou s'il faudrait imposer un moratoire, je dirais qu'il n'est pas nécessaire de modifier la loi.
    En ce qui concerne des questions qui ne sont pas liées à la crise de la COVID, des questions plus vastes, à savoir s'il faudrait réévaluer la loi périodiquement et si la loi doit être actualisée, je dirais qu'il faudrait le faire, à mon avis.
    Très brièvement, monsieur Balsillie, en ce qui concerne les préoccupations que vous avez soulevées, pouvez-vous me dire si vous souhaitez que tous ces changements figurent dans la Loi sur Investissement Canada, ou si certaines de vos préoccupations peuvent être réglées en dehors de la Loi sur Investissement Canada?
    La loi doit être profondément modifiée pour tenir compte de la nature de l'économie contemporaine.
    Merci.

  (1205)  

    La parole est maintenant à M. Patzer pour la prochaine série de questions.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais m'adresser d'abord à M. Balsillie. J'aimerais revenir sur ce que vous nous avez dit il y a quelques semaines. Je vais vous citer:
... nous devons être francs à propos de la mesure dans laquelle nos décideurs sont tombés sous l'emprise d'intérêts étrangers... La souveraineté du Canada ne les concerne pas et ne les intéresse pas, alors nous devons être très prudents en ce qui concerne la mesure dans laquelle des intérêts étrangers se sont emparés des mécanismes de réglementation et du processus décisionnel de notre pays. Je le vois tous les jours...
    Nous nous penchons là-dessus attentivement en ce moment. Pourriez-vous être beaucoup plus précis? Que font les entreprises étrangères et les décideurs qui portent atteinte à notre souveraineté?
    Je vois nos décideurs inviter des entreprises étrangères à s'emparer de notre souveraineté et de notre prospérité. C'est pourquoi, durant mon exposé, j'ai dit que nous mettons un verrou supplémentaire sur la porte de devant, tout en laissant la porte de côté grande ouverte. Nous ne disposons d'aucune politique efficace adaptée à la nature de l'économie contemporaine, alors, j'estime que le gouvernement devrait dresser en premier lieu une liste des technologies stratégiques, comme le font tous les pays avancés.
    Les États-Unis sont en train de revoir cette liste dans les secteurs clés de leur économie. Nous n'avons rien fait de tel. Ils ont dressé une liste des technologies, une liste des entreprises et une liste des chercheurs, et ensuite, ils révisent ces listes très attentivement. Les États-Unis se sont dotés aussi d'un cadre global concernant les retombées, qui fait en sorte que la nature de tout investissement est examinée dans l'optique de la nature des retombées de ces technologies. Voilà deux choses que le Canada aurait dû faire il y a 20 ans.
    Le gouvernement a parlé de soumettre les investissements dans des entreprises liées à la santé publique et dans des entreprises fournissant des biens et services essentiels à un examen approfondi en vertu de la Loi sur Investissement Canada. Certains secteurs devraient être considérés comme essentiels, mais le gouvernement ne les a pas déclarés essentiels ou ne les considère pas ainsi.
    Serait-il logique de qualifier d'essentiels nos secteurs de l'énergie et de l'agriculture? Si oui, est-ce qu'on inclurait les secteurs du pétrole et du gaz?
    Il faut se pencher sur la nature des technologies qui ont des répercussions économiques et non économiques, en raison de leurs multiples facettes. Je ne parlerais pas des secteurs de l'agriculture ou de l'énergie au sens large, mais je dirais que certains aspects de l'énergie renouvelable, de l'agriculture propre et de l'intelligence artificielle entrent en jeu. Si nous voulons que le pays soit souverain, sécuritaire et prospère dans ces domaines, nous devons établir quelles sont les technologies ciblées et les structures des retombées.
    J'ai élaboré un cadre qui est plutôt simple et qui est considéré comme une convention par les économistes de l'innovation du monde entier et d'autres pays. Je suggère que nous emboîtions le pas aux autres.
    Étant donné que c'est propre à un secteur particulier, y a-t-il d'autres industries qui pourraient être considérées comme essentielles ou non, et qui devraient être protégées dans l'intérêt du Canada?
    Bien sûr. Nous pourrions prendre l'exemple des États-Unis en ce moment. Cette semaine, le pays étudie le traitement et l'assainissement des eaux. La semaine prochaine, il va se pencher sur les nouvelles technologies financières. La semaine dernière, c'était l'intelligence artificielle et la quantique. Savons-nous qui est le principal détenteur des technologies quantiques au Canada? Savons-nous combien de brevets il possède? Va-t-il atteindre notre seuil? Dans deux semaines, les États-Unis examineront l'espace et la technologie spatiale.
    Avons-nous fait le même exercice pour certains de nos secteurs qui ont une incidence économique ou non? Je m'intéresse grandement à ces dossiers, et la réponse est non.
    Monsieur Balding, certains craignent que nos ressources naturelles, que le gouvernement ne semble pas vouloir exploiter de toute façon, soient susceptibles de tomber entre les mains d'acquéreurs étrangers. Je voulais toutefois aborder le passage imminent à la 5G.
    Les Canadiens étaient déjà inquiets à propos de Huawei avant la situation économique attribuable à la COVID, mais nous devons désormais y réfléchir encore plus sérieusement. Vous avez dit que la Chine a dressé une liste de secteurs ciblés. Quelle est la probabilité que nos entreprises de communication s'y trouvent? Pourrait-il y avoir des méthodes subtiles ou indirectes de prise de contrôle?
    Les Chinois ont bel et bien une longue liste non seulement d'entreprises, mais aussi de propriété intellectuelle précise qui les intéressent, et ils ont recours à toutes sortes de méthodes. Par exemple, même si nous utilisons Zoom, la Chine a… En résumé, la technologie sous-jacente de Zoom est largement utilisée par les entreprises chinoises et passe essentiellement par le même réseau exactement. Même si vous délaissiez Zoom, il y a des entreprises canadiennes qui utilisent en fait le même ensemble de codes sous-jacents qui fera passer la communication par la Chine.
    Il ne s'agit pas que d'acquisitions par investissement direct. Il y a de nombreux moyens par lesquels la Chine cherche à obtenir ce qui l'intéresse, et les télécommunications sont un secteur clé pour elle.

  (1210)  

    Je crois que mon temps de parole achève, alors je vais céder ce qu'il en reste.
    Merci beaucoup, monsieur le député Patzer.
    Pour la prochaine série de questions, c'est le député Jowhari qui a la parole.
    Vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je souhaite encore une fois la bienvenue aux témoins qui participent au Comité. Vos propos sont fort intéressants.
    Monsieur Balsillie, je vais consacrer les cinq minutes qui me sont imparties à poser des questions sur la propriété intellectuelle et l'économie contemporaine dont vous avez parlé, à savoir la propriété intellectuelle et les mégadonnées.
    En me préparant à la réunion, je me suis penché sur le nombre de demandes qui ont été soumises, leur valeur monétaire, le seuil, et ainsi de suite. Je n'ai toutefois trouvé nulle part les chiffres sur la propriété intellectuelle associée à ces investissements. Je regardais les 428 millions de dollars d'actifs, et j'essayais de trouver la définition d'un actif pour savoir si la propriété intellectuelle englobe cet élément. J'ai examiné différentes entreprises d'État, pour lesquelles les chiffres s'élèvent à 1,6 milliard de dollars, ou 1,07 milliard.
    Je viens du secteur de la consultation en gestion. J'ai travaillé avec beaucoup d'entreprises du palmarès Fortune 500, ainsi qu'avec des petites entreprises. Même au ministère de l'Industrie du gouvernement canadien, qui dépense 2,2 milliards de dollars pour mettre à niveau des organisations — il y a beaucoup de propriété intellectuelle de ce côté —, je n'ai pu trouver aucun chiffre relatif à la propriété intellectuelle qui passe à des investissements étrangers ou à des pays étrangers, peu importe.
    Je sais que la majeure partie de nos investissements vont aux États-Unis, c'est-à-dire 54 %. L'Union européenne en reçoit 24 %, et la Chine, 5 %. Je n'ai toutefois pu obtenir aucune donnée sur la propriété intellectuelle. Pouvez-vous nous dire où aboutit notre propriété intellectuelle?
    Oui, une étude récente de l'Institut de recherche en politiques publiques, ou IRPP, dit essentiellement qu'une proportion énorme de la propriété intellectuelle canadienne quitte le pays. De plus, l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, ou OMPI, a récemment indiqué que nous sommes le seul grand pays dans le domaine de l'intelligence artificielle à avoir enregistré une baisse du nombre de brevets déposés au cours des trois dernières années.
     Depuis 20 ans, les contribuables canadiens financent la propriété intellectuelle fondamentale derrière l'intelligence artificielle qui est transférée à Google sans aucune révision. D'ailleurs, Google a dit que la technologie se trouve dans tous ses produits et lui vaut des milliards de dollars de profits chaque année. Il y a 17 de nos meilleurs chercheurs en télécommunications stratégiques qui travaillent avec Huawei, sans aucune forme de révision stratégique ni des fonds de recherche ni de notre Loi sur Investissment Canada.
    Comme je l'ai dit, nous avons une grande porte-moustiquaire sur le côté accompagnée d'un écriteau qui indique « Veuillez entrer par ici », alors que nous parlons d'ajouter un autre verrou à la porte d'entrée.
    Que pouvons-nous changer à court et à long terme? Vous parlez de moderniser un nouveau cadre. Vous dites que nous devons l'actualiser et immédiatement y intégrer la propriété intellectuelle et les mégadonnées. Je suis tout à fait d'accord. Que pouvons-nous faire à court terme, sous forme d'amendement ou de recommandation, ainsi qu'à long terme?
    À court terme, comme je l'ai dit, il y a deux choses que vous devriez faire dès maintenant. Premièrement, il faut dresser la liste des technologies stratégiques et les évaluer, comme l'ont fait d'autres nations en 2019 et en 2020. Les États-Unis sont en train d'examiner des secteurs donnés, et tout est sur le Web.
    En deuxième lieu, je mettrais en place un cadre actualisé qui codifie les répercussions réelles. Il ne suffit pas de s'intéresser à des sommes arbitraires et aux emplois, quand il s'agit de remanier des emplois dans des secteurs dont le taux de chômage est nul ou négatif.
    Le gouvernement a relevé six secteurs, que nous appelons des tables. Nous en avons récemment ajouté deux autres sur la distribution alimentaire et la santé. Cet outil suffit-il, ou devons-nous encore le modifier? Selon vous, quel serait un exemple de technologie stratégique qui n'est pas couverte par la loi?
    Je suis parfaitement conscient du mandat de ces tables. Elles n'ont d'aucune façon envisagé ce genre de rôle dans le but de nous conférer une protection stratégique nationale, en fonction de nos domaines géostratégiques d'investissement dans les technologies. Si ce volet est ajouté à leur mandat, c'est très bien. Les tables reviendront ensuite nous dire exactement la même chose: il faut dresser la liste des technologies et des secteurs qui comptent, créer un cadre pour l'évaluation, et s'assurer qu'il s'agit d'une méthode convenable pour la plupart...
    En 30 secondes, pourriez-vous me donner vos trois principales recommandations?
    Parlez-vous des technologies? Il ne fait aucun doute que l'intelligence artificielle et la quantique doivent faire partie de la liste. Il faut aussi y inclure d'autres secteurs comme les télécommunications, l'énergie renouvelable, tout le volet biomédical et biotechnologique, les nouvelles technologies financières et la technologie spatiale. Ce sont d'ailleurs les huit domaines qui intéressent les États-Unis.

  (1215)  

    Indépendamment du seuil, de la valeur, de l'actif ou du profit, est-ce que toute organisation possédant une propriété intellectuelle dans ce domaine doit faire l'objet d'un examen?
    Oui, tout à fait.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Le prochain intervenant sera M. Lemire.
    Monsieur Lemire, vous disposez de deux minutes et demie.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Ma question s'adresse à M. Wakil.
    Dans votre allocution, vous avez mentionné la possibilité de modifier progressivement la loi. À mon avis, pour pouvoir changer la loi, il faut la comprendre, et pour la comprendre et l'évaluer, il faudra de la transparence.
    Seriez-vous d'accord pour donner accès aux archives et revoir les décisions des ministres afin de voir quels motifs ils ont invoqués et quelles conditions ils ont imposées dans le cadre de la Loi sur Investissement Canada? Seriez-vous disposé à le faire afin de mieux comprendre les faiblesses de la Loi?

[Traduction]

     Je serais ouvert à la proposition de réaliser un examen a posteriori des investissements pour mesurer l'efficacité de la Loi sur Investissement Canada.
     En ce qui concerne la proposition ou la suggestion précise d'ouvrir les archives, j'hésiterais toutefois à le faire. Des protections législatives garantissent la confidentialité des renseignements que les investisseurs ont fournis au gouvernement dans le cadre de leur examen. Je pense qu'une ouverture des archives risquerait d'enfreindre ces dispositions législatives, et les investisseurs sont très rassurés du fait que leurs renseignements commerciaux névralgiques seront traités en toute confidentialité dans le cadre d'un examen.
    Je pense que tout examen visant à évaluer la réussite ou l'échec d'une mesure devrait être accueilli favorablement et approuvé, mais je ne recommanderais pas expressément d'ouvrir les archives.

[Français]

    Néanmoins, on constate que le ministre n'a pas le devoir de rendre des comptes en ce moment.
    Pensez-vous qu'on aurait avantage à faire en sorte que le ministre doive rendre des comptes, afin qu'il fasse preuve de transparence relativement à ses obligations?

[Traduction]

    Je n'ai rien à ajouter à la réponse précédente.

[Français]

    Je pensais davantage au présent: à l'heure actuelle, le ministre devrait-il faire preuve de plus de transparence quant à ses décisions?

[Traduction]

    Non, je ne pense pas qu'il y ait un besoin urgent d'accroître la transparence dans le cadre des examens du bénéfice net.
    En ce qui concerne les examens de la sécurité nationale, comme je l'ai dit précédemment, je pense qu'il serait utile que le gouvernement se demande s'il est possible ou non de divulguer des informations supplémentaires propres à un cas donné, compte tenu de notre expérience d'un régime d'examen de la sécurité nationale...
    Malheureusement, c'est tout le temps dont nous disposons pour ce tour-ci.
    D'accord.
    Nous allons maintenant passer au député Masse.
     Vous avez la parole deux minutes et demie.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Une partie du défi que nous devons maintenant relever est attribuable au fait que la Loi sur Investissement Canada a été modifiée en 2013 par le gouvernement Harper au moyen d'un projet de loi d'exécution du budget. Cela signifie qu'il n'y a pas eu de travaux en comité sur ce dossier donné. En fait, au cours de la législature suivante, j'ai présenté une motion pour faire exactement cela, mais elle n'a pas été adoptée non plus.
    Cela signifie que nous n'avons jamais eu de discussion en profondeur ou d'occasion de discuter des ramifications, de même que des changements nécessaires à la modernisation. En fait, nous avons vu le seuil passer à 1 milliard de dollars en 2017. Tout cela s'est fait sans la moindre participation de la population à un véritable projet de loi, et sans aucune consultation ouverte nécessaire à une démocratie.
    Monsieur Balsillie, pensez-vous que les intervenants de divers secteurs souhaiteraient maintenant participer à un examen plus complet de la loi? Même si nous parlons de l'examen qui a été réalisé en 2013, il a fallu des décennies avant que le projet de loi ne donne lieu à des mesures concrètes.

  (1220)  

    Oui, les parties intéressées sont les Canadiens. Le plus important est donc de comprendre ce dont nous avons besoin pour être prospères et souverains dans une nouvelle réalité.
     C'est pour cette raison que j'ai parlé des intérêts publics par rapport aux intérêts personnels. Il y a des facteurs extérieurs au marché ou des retombées qui ne sont pas pris en compte dans la décision d'une personne. C'est pourquoi j'ai donné l'exemple de l'ingénieur en informatique qui pourrait accepter un emploi dans une entreprise d'État allemande: c'est une bonne chose pour cette personne puisqu'elle reçoit une augmentation, mais c'est néfaste pour le pays dans son ensemble.
    Je sais très précisément que ceux qui administrent ces politiques réclament des directives politiques à ce sujet. Il faut donc voir les choses dans l'optique du pays, et non d'un secteur en particulier, car celui-ci s'intéressera uniquement aux intérêts privés d'un groupe restreint, et non pas aux facteurs extérieurs au marché ou aux retombées plus larges.
    J'aimerais poser une question rapide à MM. Krane, Wakil et Balding. Avez-vous été consultés lors des changements de 2013? Pourriez-vous simplement répondre par oui ou non? Je sais que mon temps sera ensuite écoulé.
    Oui. En fait, j'ai même comparu devant votre comité en 2013 pour discuter des changements apportés aux entreprises d'État...
    C'était dans le cadre du projet de loi d'exécution du budget, oui.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entamer notre troisième tour.
     Les premières questions seront posées par la députée Rempel Garner.
    Vous avez la parole cinq minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Tout d'abord, je tiens à préciser aux fins du compte rendu que les conservateurs appuient la motion de M. Erskine-Smith. Nous nous intéressons plus particulièrement au contexte dans lequel la décision a été prise, étant donné que le gouvernement libéral a versé 12 millions de dollars à Loblaws pour des réfrigérateurs lors de la dernière législature, je crois, ou plus tôt cette année.
    Nous nous intéressons également aux conditions de travail auxquelles les travailleurs de première ligne ont été soumis pendant la crise de la COVID. Ce sera une très bonne conversation. Nous espérons que les travailleurs seront également représentés dans le cadre de cette étude. Nous allons donc appuyer la motion.
    Monsieur Balding, je vais commencer par vous adresser quelques questions. Je vais vous donner deux éléments contextuels de cette étude que j'ai trouvé intéressants en tant que législatrice.
    Premièrement, le Canada est unique, à l'instar de tous les pays. Or, nous n'avons pas le même niveau de capital à grande échelle auquel d'autres pays peuvent essentiellement avoir accès, et qui permet de tirer parti de grands gisements de ressources naturelles, si bien que nous avons souvent recours à des investissements directs étrangers pour ce type d'investissement.
     Le deuxième élément contextuel est mon expérience dans la recherche de témoins pour l'étude. Je pense qu'il y a cinq domaines différents où il peut y avoir un conflit ou une volonté de maintenir le statu quo. Je pense notamment aux sommes d'argent qui proviennent des fusions et des acquisitions entourant les entreprises d'État ou influencées par l'État dans des pays autoritaires. C'est une large part des affaires dans le milieu juridique canadien, ainsi que dans le milieu bancaire canadien.
     Je pense aussi aux universités canadiennes, où l'administration universitaire a tendance à attirer des étudiants qui proviennent de pays autoritaires, étant donné qu'ils versent beaucoup d'argent à nos universités pour y suivre des cours en tant qu'étudiants étrangers. J'ai également une formation en parapolitique, en gestion de la propriété intellectuelle et en recherche subventionnée dans diverses universités canadiennes, et il y a une incitation à participer à divers contrats de recherche subventionnés par des gouvernements autoritaires ou par leurs entreprises d'État ou influencées par l'État.
    Ensuite, notre gouvernement est en pleine campagne fort importante visant à obtenir un siège au Conseil de sécurité des Nations unies, qui s'accompagne de ses propres politiques. Je trouve donc qu'il y a une propension à ne pas en parler. C'est comme si nous voulions faire fi de toute la question en espérant maintenir le statu quo.
     Étant donné que vous n'êtes pas touché par un éventuel conflit, je me demande si vous pourriez nous nommer d'autres pays ou peut-être d'autres témoins qui ne seraient pas biaisés et qui pourraient nous aider dans nos délibérations sur les prochaines étapes, en tant que législateurs.
    Si j'ai bien compris, vous me demandez quels témoins non biaisés je pourrais vous suggérer, en particulier...

  (1225)  

    C'est exact. Aussi, quelles sont les meilleures pratiques à l'échelle internationale dont nous pourrions discuter?
    Certainement. Je serai ravi de vous fournir une liste de personnes qui pourraient vous en parler et qui ont l'expérience d'un pays comme le Canada et de ses caractéristiques uniques. Je pense pouvoir vous donner quelques noms. Je serai tout à fait disposé à vous remettre des courriels ou quelque chose de semblable, et de dresser une liste de personnes qui seraient selon moi en mesure de répondre à ces questions en particulier — comme vous l'avez dit, des personnes qui n'appartiennent pas à ces cases spéciales, ou qui n'ont pas été compromises par elles.
    Je vous remercie.
    J'aimerais profiter des dernières secondes qu'il me reste pour m'adresser à M. Balsillie.
    Je voudrais revenir sur ce que j'ai dit à propos des universités canadiennes. Nous avons de merveilleuses universités ici, mais c'est un sujet plutôt tabou et délicat. Dans quelle mesure pensez-vous que les universités canadiennes sont compromises par le désir d'attirer des étudiants étrangers et des fonds de recherche et développement, c'est-à-dire des fonds de recherche subventionnés par des pays autoritaires?
    D'après mon expérience, l'objectif des universités est de faire avancer leurs recherches et de publier leurs travaux. Elles ne se préoccupent pas de la sécurité nationale ou de la prospérité nationale. Il incombe au bailleur de fonds, c'est-à-dire au gouvernement, de fournir des conseils à ce sujet, mais il n'y en a aucun à ce stade-ci.
    Vous dites que le mariage ici consiste à regarder cela du point de vue de la responsabilité fiduciaire du gouvernement et à affecter des deniers publics aux universités qui pourraient être dans cette situation.
    En effet.
    Merci beaucoup.
    C'est juste un message pour M. Balding concernant la liste demandée par Mme Rempel Garner. Si vous pouvez la faire parvenir au greffier, il va la distribuer sans faute. Merci beaucoup.
    Sur ce, nous allons passer à Mme Lambropoulos.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à tous nos témoins de s'être joints à nous aujourd'hui pour répondre à nos questions.
    Ma première question est pour M. Wakil.
    Dans la Loi sur Investissement Canada, le concept de sécurité nationale n'est pas explicitement défini afin de donner une marge de manœuvre au ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie en consultation avec le ministre de la Sécurité publique pour signaler ou examiner des investissements qui semblent menacer la sécurité et porter préjudice au Canada.
    Par conséquent, pensez-vous que cette marge de manœuvre et le fait que ce n'est pas clairement défini ont des conséquences négatives sur notre sécurité? Croyez-vous qu'il devrait y avoir au moins certaines limites moindres dont les gens ont besoin pour s'orienter, étant donné que les gouvernements changent et que différents ministres sont responsables à différents moments?
    Je pense qu'il est important d'avoir une marge de manœuvre et qu'il est difficile de trouver un équilibre entre la nécessité de cette marge de manœuvre et le besoin de certitude. Je crois que le gouvernement a tenté de faire du bon travail en cherchant cet équilibre au cours des dernières années depuis la mise en place du processus d'examen de la sécurité nationale.
    La Loi, comme vous le dites, ne définit pas la sécurité nationale. Elle donne plutôt des lignes directrices sur ce qu'elle peut comprendre. Les rapports annuels prévus par la Loi divulguent le genre de dossiers faisant l'objet d'un examen dans le cadre du processus d'examen de la sécurité nationale, ce qui est bon et utile pour nous, mais je pense qu'un changement graduel serait mieux. Ce serait utile. Ce que je veux dire, c'est qu'une divulgation améliorée des dossiers, davantage comme ce que nous avons à mesure que le gouvernement gagne en expérience grâce au processus d'examen de la sécurité nationale, serait utile et souhaitable.
    Je ne pense pas qu'un changement global est nécessaire. Je ne crois pas que le gouvernement devrait donner une liste des 10 choses qui relèvent de la sécurité nationale et qui en relèveront toujours. C'est une liste exhaustive. Je pense qu'il devrait poursuivre dans la même voie, tout simplement.
    Vous avez mentionné dans votre témoignage que vous êtes très satisfait du libellé de la Loi et de la façon dont le gouvernement traite la question en fonction du libellé actuel.
    Avez-vous des recommandations pour renforcer la sécurité tout en continuant de nous permettre de tirer parti d'investissements étrangers?
    Oui, je crois que la Loi est bien rédigée en général. Elle porte sur beaucoup de transactions, de nombreuses acquisitions au moyen d'investissements étrangers — pratiquement toutes. Je pense toutefois qu'il y a peut-être une lacune dans certains des aspects dont M. Balsillie a parlé, en ce qui a trait aux transferts de technologie.
    Prenons par exemple les situations où l'on fait l'acquisition d'une entreprise ayant des droits de propriété intellectuelle de nature délicate. Lorsqu'une entreprise conclut une entente avec une entité étrangère pour y transférer la propriété intellectuelle, le dossier ne fait pas l'objet d'un examen. L'effet est le même — l'acheteur étranger, l'entité étrangère, exerce un contrôle sur la propriété intellectuelle ou y a accès— , mais une sorte d'accord commercial fait l'objet d'un examen, tandis que l'autre sorte de transaction commerciale, l'accord commercial, n'y est pas assujettie.
    J'estime qu'il serait prudent d'examiner la mesure législative pour voir s'il y a des lacunes à combler, comme celle que je viens de donner en exemple.

  (1230)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Balsillie, je pense que vous avez clairement indiqué les changements qui doivent être apportés selon vous, mais croyez-vous, en les imposant, que nous ne tirerions pas nécessairement parti des investisseurs étrangers, que nous pourrions nous les mettre à dos, en ne les attirant pas au Canada?
    Ce n'est pas le genre d'investisseurs que vous voulez, car les investissements étrangers directs en technologie sont principalement extractifs. C'est pour cette raison que notre productivité en matière d'innovation diminue ou stagne depuis 20 ans alors qu'elle augmente dans le reste du monde. Nous sommes les ouvriers de notre propre déclin. Nous ne voulons pas ce genre d'investissements, pas du tout.
    Il est très important de faire une distinction. Quelqu'un a dit que le Canada a besoin d'investissements étrangers directs pour avoir une solide reprise économique. Certains types d'investissements étrangers directs saperont notre reprise, et il faut donc faire une distinction quant à la nature de ces investissements. Il faut faire ressortir une nuance fondamentale.
    Je crois que c'est tout le temps que j'avais.
    Je remercie beaucoup les témoins, encore une fois.
    Merci beaucoup.
    Notre prochaine intervenante est Mme Rempel Garner. Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Pendant les délibérations d'aujourd'hui, des témoins ont fait allusion au fait que nous n'avons pas vraiment de moyen de savoir rapidement si des prises de contrôle ont lieu à moins qu'une société cotée en bourse ait dû en informer ses investisseurs ou que la prise de contrôle soit terminée. C'est une caractéristique qu'on voit à peu près seulement dans le système canadien, je crois.
    Je me demande, monsieur Balding, si vous avez quelque chose à dire sur le principe de transparence, sur un cadre d'examen mis en place par d'autres pays pour que la population soit informée des investissements effectués dans d'autres pays par des entreprises d'État ou des entreprises influencées par l'État, et plus particulièrement sur les pratiques exemplaires.
    Je pense qu'il y a deux points à aborder. Les États-Unis se sont attaqués essentiellement au même problème il y a, je crois, un ou deux ans, peut-être 18 mois. Ils se sont essentiellement retrouvés dans une situation similaire après avoir découvert un nombre important de transactions portant sur des intérêts minoritaires, des licences de technologie, comme M. Balsillie y a fait allusion, tout comme, je crois, M. Wakil, et d'autres choses du genre conçues pour éviter un examen.
    Même aux États-Unis, c'était essentiellement un système d'honneur, pour que les investissements étrangers soient présentés à l'acquéreur et soumis à un examen. Ils ont essentiellement revu ce système, trouvé une grande partie des mêmes lacunes qui ont été mentionnées aujourd'hui et resserré les règles, souvent de la même façon, que ce soit pour l'octroi de licences de technologie de nature délicate, l'acquisition d'intérêts minoritaires ou des transactions effectuées par l'entremise de fonds de capital de risque afin d'obtenir une participation en passant par des tiers. Je suis d'accord avec les témoins précédents, M. Balsillie et M. Wakil. Je pense qu'il y a probablement des lacunes et qu'il faudrait resserrer les règles.
    Je crois que surtout dans le cas de la Chine, nous devons nous assurer qu'il ne s'agit pas tout simplement d'entreprises d'État, déterminer si l'État a un intérêt en jeu ou si c'est une entreprise ayant des liens avec l'État, comme Huawei, qui n'appartient techniquement pas à l'État, mais qui est néanmoins une entreprise d'État en réalité. La définition exacte d'une entreprise d'État pose beaucoup de problèmes.
    Nous sommes aux prises avec le même problème au Canada. Je constate que l'usage penche davantage vers « influencé par l'État ». Il semble que le terme pourrait être mieux défini et utilisé.
    Je suppose que je vais aussi passer à vos connaissances des pratiques exemplaires d'application. En général, au Canada, sans tomber dans des détails techniques, lorsque l'approbation d'une prise de contrôle est assortie de conditions, notre cadre législatif offre vraiment des moyens très limités pour les faire respecter à l'heure actuelle. Je pense que cela pourrait encourager de mauvais acteurs ou, essentiellement, un désintéressement par rapport au résultat.
    Avez-vous quelque chose à dire sur les pratiques exemplaires pour resserrer les règles lorsque l'investissement est assorti de conditions? Y a-t-il d'autres pays au monde qui ont des pratiques exemplaires que nous devrions examiner en vue de renforcer cet aspect de notre cadre législatif?

  (1235)  

    Je pense que la plupart des pays européens avec qui j'ai discuté des investissements chinois sont probablement dans une situation très similaire. La plupart d'entre eux revoient leurs pratiques d'investissement. La question fait l'objet d'un débat en Europe.
    Aux États-Unis, nous avons vu quelques transactions où, par exemple, des acheteurs chinois ont fait une acquisition ou plutôt commencé à la faire — et on peut se demander s'ils s'attendaient à ce qu'elle tombe à l'eau — et où ils ont eu accès à des technologies de nature délicate et se sont ensuite retirés ou ont décidé de ne pas faire d'offre dans un cas. Dans un autre cas, il y a eu un désinvestissement forcé à cause de l'application de rencontres pour hommes homosexuels, Grindr, qui exposait essentiellement les utilisateurs de partout dans le monde aux utilisateurs du gouvernement chinois.
    À vrai dire, il y a des questions auxquelles, je crois, tout le monde fait face. À ma connaissance, il n'y a pas de pratiques exemplaires pour régler ces questions, car elles sont relativement nouvelles dans le monde.
    Merci beaucoup.
    La prochaine série de questions revient à M. Longfield.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leur comparution.
    Je vais commencer mes questions, monsieur Krane, par le thème du commerce. J'ai trouvé très intéressant ce que vous avez dit au sujet de la nécessité du commerce et des investissements internationaux. Avez-vous des observations sur l'idée d'un moratoire permanent ou temporaire sur les entreprises d'État étrangères, sur ce que cela signifierait par rapport au message que nous donnons, à savoir que nous voulons être un pays commerçant?
    J'en ai. Merci beaucoup, monsieur Longfield.
    L'un des risques des règles uniformes, c'est que nous ne voyons pas toujours les conséquences imprévues possibles. Par exemple, le Canada dépend encore beaucoup d'autres pays pour s'approvisionner en équipement de protection individuelle, et nous collaborons avec d'autres pays pour mettre au point des vaccins et des traitements pour lutter contre la COVID-19, qui touche non seulement des Canadiens, mais aussi des citoyens de partout dans le monde. Je souligne que le gouvernement a annoncé un partenariat de recherche avec une entreprise chinoise afin de travailler à la mise au point d'un vaccin contre la COVID-19 au Canada. Ce que je crains, c'est que l'imposition de restrictions uniformes visant les investissements nous empêche de profiter de ces occasions et nuit à notre capacité à collaborer avec d'autres pays pour atteindre des objectifs communs.
    Je ne suis pas en désaccord avec M. Balsillie, il y a effectivement des domaines dans lesquels nous devons accroître la surveillance et mettre l'accent sur la protection d'industries et de technologies essentielles, mais l'imposition de restrictions uniformes n'envoie pas le bon message au reste du monde et laisse entendre que le Canada n'est pas prêt à faire des affaires. Nous devons collaborer avec d'autres pays pour atteindre des objectifs communs.
    Merci.
    Plus tôt ce matin, j'ai eu une réunion Zoom avec le comité sur la recherche en santé composé de représentants de tous les partis, pendant laquelle des scientifiques de partout au Canada ont parlé de l'importance de mettre en commun l'information pour nous permette de lutter ensemble contre une pandémie mondiale et de collaborer à la reprise mondiale subséquente. Je pense que nous avons plus de liens que nous le pensions compte tenu des conséquences imprévues.
    Pour faire rapidement un suivi, le libellé actuel de notre loi prévoit un examen relatif à la sécurité nationale, bien entendu, et cet examen se prête actuellement à interprétation, ce qui nous donne une marge de manœuvre, et nous avons ensuite l'examen de l'avantage net. Pensez-vous qu'il est nécessaire de modifier ces parties de la Loi?

  (1240)  

    C'est une excellente question.
    La Loi sur Investissement Canada fonctionne très bien en ce moment. Elle couvre actuellement, du moins sur le plan de la sécurité nationale, la vaste majorité des investissements au Canada. J'admets que des situations lui échappent, mais même une situation dans laquelle une entreprise ferait l'acquisition d'une importante technologie serait considérée comme un investissement touchant la sécurité nationale qui est susceptible d'examen dans les bonnes circonstances si le bien était important et faisait partie intégrante des activités de l'entreprise. La Loi vise ce genre de situation.
    L'autre point soulevé plus tôt, c'est que rien ne prouve que des entreprises évitent de donner des avis conformément à la Loi sur Investissement Canada. Les investisseurs étrangers qui viennent au Canada ne connaissent pas les règles au pays et collaborent étroitement avec des conseillers juridiques et d'autres conseillers pour être certains de respecter la législation canadienne lorsqu'ils investissent ici. D'après mon expérience, les investisseurs font très attention de respecter les lois; ils soumettent des documents au gouvernement pour l'informer d'une transaction. Lorsque le gouvernement exprime des préoccupations, il n'hésite pas à nous en informer. Un processus d'enquête long et détaillé commence alors, comme je l'ai mentionné, et il peut s'écouler jusqu'à 200 jours avant qu'il soit terminé, soit deux fois plus de temps que la période consacrée au processus aux États-Unis.
    Parfait.
    En vertu de la mesure législative complémentaire, la Loi sur les sociétés, il faut continuer de respecter la loi même après l'investissement, et il y a des façons de faire face à la situation en cas de non-respect.
    En effet. La Loi sur Investissement Canada prévoit également des peines sévères en cas de non-respect de la part des investisseurs. On peut les forcer de vendre leur investissement sans prix plancher. Des amendes de 10 000 $ par jour sont prévues pour chaque violation, ce qui s'ajoute à toutes les autres règles provinciales et fédérales que les investisseurs doivent respecter lorsqu'ils viennent au Canada.
    Je vous remercie de votre témoignage équilibré. Je vous en suis très reconnaissant. Je crois qu'il est très bon pour notre rapport de voir les deux côtés de la médaille. Je partage votre point de vue, en passant.
    Merci beaucoup, monsieur Longfield.
    Merci, madame la présidente. Je vous redonne la parole.
    Merci.
    Notre prochain intervenant est M. Lemire.

[Français]

    Monsieur Lemire, vous disposez de deux minutes et demie.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur Balsillie, votre intervention était, ma foi, l'une des plus pertinentes que nous ayons entendues à ce comité. D'ailleurs, j'aimerais aller un peu plus loin et vous entendre sur la notion des parties prenantes dans la loi. La semaine dernière, un témoin a mentionné que la loi devrait inclure les actionnaires, les employés, les fournisseurs, les créanciers, les consommateurs, le gouvernement et l'environnement.
    Êtes-vous d'accord sur l'idée de modifier la loi et d'y intégrer ces parties prenantes?
    À la lumière de votre témoignage d'aujourd'hui, il faudrait aussi y enchâsser les brevets et les innovations, de même que les technologies stratégiques.

[Traduction]

    Je vais tenter de répondre.
    J'aimerais d'abord dire que M. Krane a décrit mon témoignage comme une approche uniforme pour tous les investissements, mais je parlais des facteurs externes et des retombées de la technologie, ce qui est absent de l'économie contemporaine.
    Pour la gouverne de M. Longfield, je signale que je suis du côté du Canada. En examinant ces questions, nous avons appris que des technologies ont une incidence sur notre santé, notre sécurité et notre économie. Par conséquent, au moment de questionner des intervenants, le plus important, c'est de ne pas oublier que c'est censé être dans l'intérêt public, un examen de l'avantage net, qui consiste à se pencher sur les effets globaux de ces mesures. Il faut rencontrer beaucoup d'intervenants, mais au bout du compte, des experts sont nécessaires pour mesurer ces différents effets. J'ai eu beaucoup d'interactions avec les gens qui appliquent la Loi sur Investissement Canada, et Huawei est considéré comme une entreprise canadienne compte tenu de sa filiale canadienne. L'entreprise nous demande de présenter des choses de notre plein gré si nous acceptons des investissements, car un problème pourrait survenir, et je suis profondément engagé auprès d'un certain nombre d'entreprises de haute technologie.
    Les gens prennent des décisions en fonction de leurs propres intérêts particuliers, et il revient aux gens chargés d'élaborer les politiques de faire en sorte que c'est dans l'intérêt de notre pays.

  (1245)  

[Français]

    Seriez-vous d'accord pour que le ministre de l'Innovation, des Sciences et de l'Industrie doive faire preuve de plus de transparence et rendre des comptes sur les décisions qu'il prend, qui doivent toujours être à l'avantage net du Canada?

[Traduction]

    Je ne peux pas parler du calcul de l'avantage. Ce que je sais, c'est qu'il ne voit pas la majorité des transactions corrélatives.
    Merci beaucoup.
    Notre prochain intervenant est M. Masse.
    Vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente.
    Je ne sais pas qui a dit cela, mais je sais que je viens de remporter un pari avec le slogan qui dit que le Canada n'est pas prêt à faire des affaires. J'avais dit à mon personnel que j'entendrais cela aujourd'hui, alors nous avons gagné un café Tim Hortons, qui sera maintenant profitable à 3G Capital, le fonds qui a essentiellement permis à l'entreprise canadienne iconique de café de passer du 13e au 67e rang des entreprises de bonne tenue du Canada, ce qui représente la pire descente de l'histoire.
    Quoi qu'il en soit, j'ai une question à poser à M. Balding. Même les sociétés de capital-investissement sont des options d'investissement inconnues dans l'optique d'un examen. Est-ce que cela devrait soulever des préoccupations? Il y a quelques facteurs à tenir en compte. Que ce soit au moyen de réductions de l'impôt des sociétés ou de subventions municipales, provinciales ou fédérales directes pour l'obtention d'emplois ou même au moyen de subventions de recherche et développement et de renonciation aux dépens, les Canadiens contribuent à la croissance économique et à l'expansion de certaines de ces entreprises par les emplois. Quand les entreprises sont rachetées, que ce soit par la Chine ou par d'autres gouvernements non démocratiques, nous ne savons pas dans quoi nous embarquons.
    Y a-t-il un avantage à déterminer qui est propriétaire en fonction d'un autre modèle?
    Il serait raisonnable d'inclure certains des investisseurs tiers, comme Intech, en Colombie-Britannique, ou des sociétés de capital-investissement bien établies, peut-être, car c'est manifestement quelque chose que les sociétés chinoises font — se servir de tiers profiteurs pour déguiser les transactions liées aux immobilisations. Je crois qu'il s'agirait d'une mesure raisonnable en quelque sorte, même si cela exige de modifier les mesures législatives ou simplement la réglementation.
    Oui, et c'est là que nous voyons peut-être d'autres royaumes ou États intervenir dans des investissements. Je crois que s'ils vont à l'encontre de certaines de nos initiatives subventionnées, même mondiales, il est raisonnable de dire que nos investissements minent nos propres pratiques.
    Trouvez-vous que c'est assez important pour justifier un examen aussi?
    Oui. Je crois que nous avons constaté une évolution des pratiques des sociétés de ce genre en fonction de la façon dont la Chine est en train de changer toute la conversation par ses investissements et ses autres pratiques.
    Merci, madame la présidente.
    C'est la fin de notre troisième tour, et nous avons assez de temps pour entamer un quatrième tour. Si j'ai bien compris, les conservateurs vont partager leur temps également avec le Bloc québécois et le NPD.

[Français]

     Monsieur Savard-Tremblay, vous disposez de deux minutes et demie.
    Je vous remercie, madame la présidente. Étant donné que mon temps de parole est partagé, je vous demanderais de me prévenir au milieu de la période et non à la toute fin.
    Monsieur Balsillie, vers la fin de votre échange avec mon collègue Sébastien Lemire, vous avez dit que la majorité des transactions ne se retrouvaient pas sur le bureau du ministre.
    Pourrait-on envisager un mécanisme pour qu'une plus grande portion des transactions se retrouvent sur le bureau du ministre?

[Traduction]

    Oui bien sûr. Si vous pouviez examiner la liste des technologies stratégiques et la liste des principaux acteurs qui interviennent dans ces technologies, et s'ils avaient comme exigence de vous informer des investissements indirects ou de certaines licences pour l'utilisation des technologies mentionnées, ou de certains partenariats de recherche, ce serait absolument possible.
    Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration, nos paramètres actuels ne couvrent pas la très grande majorité des transactions corrélatives de l'économie immatérielle, ce qui correspond à 91 % de la valeur de l'indice S&P 500. C'est la raison pour laquelle notre souveraineté est compromise, et c'est la raison pour laquelle notre productivité et notre prospérité ont pris du retard au cours des 20 dernières années dans l'économie de l'innovation.

  (1250)  

[Français]

    Vous seriez donc d'accord pour qu'il y ait un renforcement de la transparence en la matière.

[Traduction]

    Je croyais que la question sur la transparence visait l'évaluation et le calcul du critère de l'avantage net. À cet égard, je ne peux pas me prononcer.
    Cependant, je sais que la très grande majorité des transactions visées ne ressort jamais, compte tenu de l'optique et des paramètres qui sont appliqués. C'était la nature de mon témoignage aujourd'hui. Vous devez changer votre optique et vos paramètres de sorte que nous puissions bien comprendre et calculer les enjeux pour le Canada, sur le plan économique et sur d'autres plans.

[Français]

    Cela mène néanmoins à plus de transparence, à un resserrement des critères et à un élargissement de l'information qui est à notre disposition pour que nous puissions faire notre travail tous ensemble.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Les deux minutes et demie suivantes vont au député Masse.
    Monsieur Wakil, j'aimerais revenir sur notre discussion de tout à l'heure, concernant les données qui existent sur le plan des mesures. Je crois qu'il convient de dire qu'il n'y a pas assez de mesures.
    Comment pouvons-nous procéder pour changer cela? Je crois qu'il serait logique, à un moment donné, d'avoir des mesures, quand une société est achetée au Canada, concernant les brevets ou les types d'innovations qui nous arrivent de l'étranger, par rapport à ce qui sort de notre pays.
    Êtes-vous au courant d'un modèle qu'un autre pays utiliserait? Je crois que c'est une bonne façon de faire une évaluation. Autrement, quand nous regardons certaines des sociétés que nous avons perdues, on dirait que nous ne retournons pas en arrière pour déterminer si ce que nous faisons est censé ou pas. Donc, puisque nous n'avons réalisé aucun examen approfondi de la Loi sur Investissement Canada, ne serait-il pas logique de mesurer au moins le succès ou l'échec de notre modèle?
    D'après moi, c'est certainement quelque chose qu'il vaudrait la peine d'explorer, afin de déterminer s'il est possible de concevoir une méthodologie qui nous permettrait de savoir avec exactitude si le régime de la Loi sur Investissement Canada ou, du moins, la portion du régime visant l'avantage net a bien fonctionné au fil des années.
    Nous aurions le problème que j'ai commencé à vous signaler précédemment, soit celui du scénario « en l'absence de », dans la mesure où… et c'est là le problème avec l'évaluation des investissements en ce moment. Par exemple, le gouvernement essaie de prédire l'avenir. Comment seront vraisemblablement la prochaine année, puis les deux, trois ou quatre années suivantes pour l'entreprise canadienne, et de quelle façon cela s'harmonise-t-il aux plans de l'investisseur, et est-ce que c'est avantageux ou pas? Est-ce qu'il y a un avantage à procéder avec la transaction compte tenu du résultat futur vraisemblable de l'entreprise canadienne? C'est une évaluation très délicate et compliquée à faire.
    Nous avons un problème semblable concernant l'examen ex post d'un investissement qui a été fait. Qu'est-ce qui se serait produit si l'investissement n'avait pas été fait? Avons-nous accès à l'information? Théoriquement, je crois qu'il serait bon de faire un retour en arrière pour voir s'il est, oui ou non, possible de bâtir un test servant à évaluer le succès des mesures législatives, mais je vois bien qu'il y aurait de nombreuses difficultés sur le plan pratique.
    Merci. Je sais que je n'ai presque plus de temps, mais il me semble vraiment étrange que nous n'ayons qu'un processus qui mise sur le hasard et qui ne donne aucun type de preuves empiriques ultérieures, alors que nous savons que nous pouvons obtenir une partie des faits.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup.
    Pour le dernier tour, nous avons le député Ehsassi.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Merci, madame la présidente. Je vous en suis très reconnaissant.
    Étant donné que c'est le dernier tour, je crois qu'il va me servir à faire du nettoyage et à éclaircir tout ce que j'ai eu de la difficulté à comprendre.
    Un des membres du Comité a indiqué qu'après avoir examiné le rapport annuel, il ne pouvait déterminer lesquelles des acquisitions comportaient un élément de propriété intellectuelle.
    Monsieur Wakil, si vous me le permettez, c'est à vous que je vais poser ma question. Je ne crois pas que le rapport annuel serve à préciser les acquisitions qui comportent une propriété intellectuelle et celles qui n'en comportent pas. Est-ce que je me trompe?
    Vous avez raison. Je serais porté à croire que la plupart des acquisitions comporteraient l'acquisition d'une forme de propriété intellectuelle, ce qui constituerait une hypothèse raisonnable, mais non, la divulgation des acquisitions de propriété intellectuelle n'est pas requise…

  (1255)  

    Cela ne signifie pas du tout que nos organismes de réglementation — notre cadre — ne se penchent pas sur les aspects de la propriété intellectuelle d'une société qui est sur le point de faire une acquisition. Est-ce juste?
    Je suis d'accord avec vous.
    D'accord. Finalement, j'ai une autre question rapide. Êtes-vous au courant d'un autre régime, dans n'importe quel pays de l'OCDE, qui dresse effectivement une liste des actifs de propriété intellectuelle?
    Non.
    Je vais poser la même question à M. Krane, car je veux vraiment m'assurer de bien comprendre.
    Premièrement, est-il inhabituel que le rapport annuel ne précise pas les actifs de propriété intellectuelle de chacune des sociétés?
    Non. Le rapport annuel sert à fournir un sommaire de l'origine des investissements et de la valeur de l'investissement étranger direct signalés au gouvernement chaque année.
    D'accord. Encore une fois, cela ne signifie pas que nos organismes de réglementation ne se penchent pas également sur la propriété intellectuelle qui pourrait être incluse dans une acquisition.
    C'est juste. Si je me fie à mon expérience, pour tous les dossiers en matière de sécurité nationale, on demande une liste de la propriété intellectuelle de la société ciblée, laquelle liste fait l'objet d'un examen et d'une évaluation.
    Ma dernière question est la même que celle que j'ai posée à M. Wakil. Êtes-vous au fait d'un régime, dans un pays de l'OCDE, selon lequel les actifs de propriété intellectuelle seraient inclus dans une liste que n'importe qui pourrait regarder et voir s'il faut signaler quelque chose?
    Non, mais le Canada possède un registre public des brevets et des marques de commerce que tout le monde peut consulter sur Internet.
    Je vous remercie.
    Monsieur Krane, j'ai beaucoup aimé votre témoignage. À un moment donné, vous avez dit penser que notre régime profiterait peut-être d'une amélioration du système d'avis. Est-ce que vous pourriez nous en dire davantage là-dessus? Compte tenu des mesures de protection que nous avons déjà, si nous voulions un système encore plus robuste, qu'est-ce qu'il faudrait y ajouter et quelle allure cela prendrait-il?
    J'estime que le régime de la Loi sur Investissement Canada fonctionne bien et que les investisseurs divulguent l'information au gouvernement sur une base volontaire avant la conclusion d'une transaction, mais nous pourrions nous pencher sur le modèle que les Américains ont mis à l'essai en 2018 et adopté en février 2020, qui exige que certains types d'investissements liés à une liste précise de technologies critiques ou d'infrastructures critiques fassent l'objet d'un avis au moins 30 jours avant la conclusion de la transaction.
    Bien que je sois d'avis que le régime fonctionne bien, c'est un modèle que le comité pourrait examiner pour veiller premièrement à ce que nous nous attaquions aux problèmes que M. Balsillie a cernés, et deuxièmement à ce que nous agissions d'une façon qui correspond à ce que fait notre plus important partenaire commercial, afin que les examens des investissements étrangers soient harmonisés entre le Canada et les États-Unis.
    Je vous remercie, monsieur Krane.
    Monsieur Wakil, est-ce que vous pourriez aussi nous dire ce que vous pensez d'un régime qui comporterait ce que j'appellerai un avis préventif, faute d'un meilleur terme? Que pensez-vous de cela?
    Je suis d'accord. Il serait souhaitable d'explorer la possibilité de passer à un régime d'avis obligatoire avant la conclusion d'une transaction. Je crois qu'il faudrait bien réfléchir à la façon de mettre cela en place pour veiller à ce qu'il n'y ait pas d'injustice pour divers types d'investisseurs.
    Par exemple, s'il y a un régime obligatoire pour les entreprises d'État seulement, mais un régime facultatif pour les entreprises n'appartenant pas à l'État, est-ce que cela risque de décourager les investissements d'entreprises d'État qui seraient avantageux pour le Canada? En même temps, s'il existe une liste précise des technologies ou des entreprises qui seraient soumises à un régime d'avis obligatoire avant la conclusion, et si cette liste est suffisamment claire pour que tous sachent que les règles s'appliquent à eux, je crois qu'il en vaut la peine d'explorer cela, mais il y a des enjeux auxquels il faut bien réfléchir.

  (1300)  

    Je vous remercie.
    Merci beaucoup. C'est tout le temps que nous avions aujourd'hui.
    Je remercie les témoins de s'être joints à nous aujourd'hui, et je remercie bien sûr notre greffier, nos analystes, les gens des TI et nos interprètes. Merci encore infiniment de votre aide.
    Sur ce, la séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU