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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 027 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 31 mars 2021

[Enregistrement électronique]

  (1430)  

[Traduction]

     La séance est ouverte. Bienvenue à la 27e réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie de la Chambre des communes.
     La réunion d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 janvier 2021. Les délibérations seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre informatif, la diffusion Web ne montrera que la personne qui s'exprime plutôt que l'ensemble du Comité.
     J'aimerais présenter les règles habituelles pour assurer le bon déroulement de la réunion.
     Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Des services d'interprétation sont offerts et vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le son du parquet, l'anglais ou le français. Veuillez choisir la langue de votre choix. Avant de parler, veuillez attendre que je vous donne la parole et, lorsque vous ne parlez pas, veillez à ce que votre microphone soit en sourdine. Je rappelle à tous que les commentaires des députés et des témoins doivent être formulés par l'entremise de la présidente.
     Comme je le fais habituellement, je montrerai un carton jaune lorsqu'il vous restera 30 secondes et un carton rouge lorsque votre temps de parole sera écoulé. Puisque nous avons un horaire chargé aujourd'hui, je vous demande de respecter les limites de temps afin que tout le monde puisse poser des questions.
     Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le vendredi 19 mars, le Comité poursuit aujourd'hui son étude sur l'acquisition proposée de Shaw par Rogers.
     J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins.

[Français]

    Nous recevons M. Pierre Karl Péladeau, président et chef de la direction de Québecor Média, ainsi que M. Jean-François Pruneau, président et chef de la direction de Vidéotron.

[Traduction]

    Nous accueillons aussi M. Jay Thomson, directeur général de Canadian Communication Systems Alliance. Je présenterai notre deuxième groupe de témoins lorsqu'ils se joindront à nous à 15 h 30.
     Chaque témoin fera un exposé de trois minutes, qui sera suivi d'une série de questions. Je crois comprendre que M. Péladeau prendra la parole pour Québecor et Vidéotron, et que ce temps peut être partagé.
     Sur ce, je vais céder la parole à M. Péladeau.

[Français]

    Vous avez la parole pour six minutes.
    Messieurs et mesdames les députés, bonjour. Je m'appelle Pierre Karl Péladeau et je suis président et chef de la direction de Québecor. Je suis accompagné de mon collègue Jean-François Pruneau, président et chef de la direction de Vidéotron.
    Constatant que l'absence d'une réelle concurrence dans le domaine du sans-fil plaçait le Canada parmi les pays industrialisés où les prix de ces services étaient le plus élevés, le gouvernement fédéral a poursuivi avec diligence et discipline dès 2007 une politique visant à permettre l'émergence et la pérennité d'un quatrième joueur dans le domaine du sans-fil qui serait solide et doté de ses propres installations dans toutes les régions du pays. Les conditions établies lors de la mise aux enchères relatives aux services sans fil évolués en 2008 ont permis la réalisation de ces objectifs. Vidéotron, au Québec, ainsi qu'Eastlink, dans les provinces maritimes, ont été les chevilles ouvrières de cette politique couronnée de succès.
    Depuis 2008, nous avons investi plus de 2 milliards de dollars afin d'offrir les meilleurs réseaux et les services les plus innovants au Québec. Le résultat en est que les Québécois disposent aujourd'hui des tarifs les plus bas au Canada pour des services sans fil, payant jusqu'à 40 % moins que les autres Canadiens. Ce n'est pas moi qui le dis, mais bien le Bureau de la concurrence et le CRTC. Cela favorise non seulement de meilleurs tarifs, mais également un meilleur service à la clientèle. Tous connaissent le peu de considération que portent les trois géants à cet égard.
    Tout cela a été rendu possible lorsque le gouvernement fédéral a compris, il y a près de 15 ans, qu'une concurrence vigoureuse n'émergerait pas d'elle-même, mais que des mesures concrètes devaient être mises en place afin de briser l'oligopole des trois géants. Je fais référence à trois mesures: le spectre réservé; le partage obligatoire des tours, pour éviter leur prolifération et la pollution visuelle ainsi que pour accélérer le déploiement du sans-fil; et enfin l'itinérance obligatoire.
    Le succès n'a toutefois pas été au rendez-vous partout, et le Canada a dû vivre le fiasco de Wind Mobile, dont le financement par des étrangers n'avait pas pour objectif de bâtir un réseau, mais plutôt de verser dans la spéculation. Entretemps, deux nouveaux arrivants, Public Mobile et Mobilicity, ont été avalés. Wind Mobile a finalement bénéficié du soutien solide de Shaw, qui s'est montrée parfaitement capable de faire trembler les trois géants en Ontario et dans l'Ouest du pays.
    La transaction proposée par Rogers visant à acquérir Shaw nous fera retourner à la case départ en éliminant le quatrième joueur essentiel au maintien d'une réelle concurrence.
    Vous, les députés, ainsi que les différents organismes de réglementation, avez à vous poser la question suivante: les consommateurs des autres provinces méritent-ils de vivre la même expérience que celle vécue par les consommateurs québécois et ceux des provinces maritimes, c'est-à-dire de pouvoir acheter leurs services d'un fournisseur de confiance et innovant comme Vidéotron qui n'est pas membre de l'oligopole des trois géants?
    Une chose est certaine: les conséquences dramatiques qu'a entraînées l'abandon de cette politique favorisant une réelle concurrence ne pourront pas être contrecarrées par les exploitants de réseaux mobiles virtuels, communément appelés les ERMV dans notre jargon, soit des entités qui n'existent que par leur accès aux réseaux des autres. Étant essentiellement des revendeurs de services, les ERMV n'auront jamais la même influence sur le marché que les fournisseurs dotés de leurs propres installations, puisqu'ils n'ont pas réellement les moyens d'innover. C'est en me basant sur notre expérience que je peux faire une telle affirmation, puisque Vidéotron a elle-même été un ERMV avant 2010. De toute évidence, ce modèle ne permet pas les attributs et la flexibilité nécessaires pour concurrencer l’oligopole des trois géants, lequel contrôle plus de 90 % du marché canadien du sans-fil.
    Dès lors, si nous voulons une concurrence durable qui avantage les consommateurs à long terme, il faut non seulement maintenir et renforcer le modèle de la concurrence fondée sur les installations, mais aussi garder le cap avec la politique du quatrième joueur dans le domaine du sans-fil.

  (1435)  

    Rogers et Shaw ont d'ailleurs fait valoir devant vous que les investissements dans la 5G justifiaient la concentration du marché. Cette affirmation est assez surprenante, car, pas plus tard qu'en décembre dernier, Shaw écrivait au présent comité pour lui dire que cet argument des trois géants était en fait « une tentative manifeste et désespérée de contrecarrer l’entrée et l’expansion de concurrents régionaux tels que Shaw, afin de maintenir et de consolider leur position dominante sur le marché [de la] 5G ». Ce n'est qu'un très court extrait du mémoire déposé par Shaw le 18 décembre.
    En conclusion, nous vous invitons à avoir le courage d'assujettir la transaction principale, celle du regroupement des réseaux filaires, à la cession des actifs de Freedom Mobile en y incluant les conditions nécessaires à l'exploitation efficace d'un réseau sans fil, dont la détention du spectre, des ententes d'itinérance, le partage des tours et une entente équitable pour l'utilisation du réseau de transport filaire, le fameux backhaul.
    Merci de votre attention.
    Merci beaucoup, monsieur Péladeau.

[Traduction]

    Nous allons maintenant passer à M. Thomson.
     Vous avez la parole pour trois minutes.
    Merci, madame la présidente et membres du Comité.
     Je m'appelle Jay Thomson et je suis le directeur général de Canadian Communication Systems Alliance, ou CCSA.
     CCSA représente des entreprises de communication indépendantes qui offrent des services groupés de télévision, d'Internet et de téléphonie aux Canadiens qui vivent surtout dans de petites collectivités et des régions rurales.
     Les familles Rogers et Shaw sont des collègues de longue date de l'industrie, et nous avons le plus grand respect pour les entreprises qu'elles ont établies. Cependant, nous craignons que la transaction entre Rogers et Shaw risque d'aggraver certains problèmes actuels, tant dans le domaine de la radiodiffusion que des télécommunications.
    La semaine dernière, nous avons comparu devant le Comité du patrimoine dans le cadre de son étude du projet de loi C-10 qui vise à modifier la Loi sur la radiodiffusion. Nous avons souligné que Rogers, tout comme Bell et Québecor, sont déjà des entreprises si grosses et si puissantes que le CRTC a dû adopter des mesures réglementaires de protection afin d'empêcher ces géants d'utiliser leur taille pour augmenter les coûts pour les consommateurs et réduire les choix. Nous avons informé les membres du comité que ces géants nationaux des communications ont utilisé leur taille et leur influence pour affaiblir les mesures de protection des consommateurs adoptées par le CRTC, et nous les avons prévenus que ces géants ne feront qu'intensifier leurs efforts en ce sens si aucun contrôle n'est exercé. Indépendamment de cette transaction entre Rogers et Shaw, la compétence qu'a le CRTC d'établir et d'appliquer ses mesures de protection des consommateurs doit être confirmée et renforcée. Avec cette transaction, un géant deviendra encore plus gros.
    Le nombre d'abonnés au câble et à Internet de Rogers sera presque doublé, ce qui doublera le nombre d'abonnés garantis aux services de télévision de Rogers, notamment Sportsnet, à ses propres tarifs préférentiels. Sans les mesures de protection du CRTC, Rogers pourrait utiliser sa présence accrue dans le secteur de la câblodistribution pour contraindre les petits fournisseurs à payer des tarifs de distribution plus élevés pour ses services, et obtenir d'autres concessions, ce qui se traduirait par une augmentation des prix et une réduction des choix pour les Canadiens des régions rurales.
    De plus, sans les mesures de protection du CRTC, Rogers pourrait utiliser sa présence accrue dans le domaine de l'Internet pour s'avantager en prenant des ententes d'accès exclusif pour son service de diffusion de sportif en ligne, Sportsnet Now. Qu'arrivera-t-il avec les nombreux services offerts par Corus TV qui appartiennent maintenant à la famille Shaw? Personne ne le sait.
     Si un des géants grossit, cela ne fera qu'accroître la nécessité de s'assurer que le CRTC a la compétence de mettre en oeuvre des mesures réglementaires pour protéger les consommateurs contre le géant national. Dans une industrie dominée par quelques grands acteurs, la protection des consommateurs est également assurée par des décisions réglementaires qui favorisent la concurrence provoquée par d'autres acteurs. La plus importante de ces décisions dans ce contexte est maintenant la décision en instance du CRTC de créer de la concurrence parmi les grands fournisseurs de services mobiles par l'entremise des exploitants de réseaux virtuels mobiles, les ERMV. Comme dans le cas des autres mesures de protection des consommateurs, la concurrence assurée par les ERMV est nécessaire, peu importe ce qui se produira entre Rogers et Shaw, mais encore plus si la transaction est conclue.
    Je vais terminer sur une note positive. En tant qu'industrie engagée à élargir l'accès aux services à large bande à tous les Canadiens, peu importe l'endroit où ils vivent, nous sommes heureux que Rogers se soit engagée à créer un fond d'un milliard de dollars pour développer les services à large bande. Cependant, le diable sera dans les détails à savoir si Rogers atteindra réellement ses objectifs, et c'est pourquoi une surveillance plus étroite s'impose.
     Je vous remercie encore de m'avoir donné cette occasion et je serais heureux de répondre à vos questions.

  (1440)  

    Merci beaucoup, monsieur Thomson.
     Nous allons commencer notre première série de questions de six minutes.

[Français]

    Monsieur Généreux, vous avez la parole pour six minutes.
    Je remercie MM. Péladeau et Thomson de leurs présentations.
    Monsieur Péladeau, vous venez d'avouer candidement que votre entreprise a déjà été un parasite — c'est l'expression que vous avez utilisée lors de notre dernière rencontre. En effet, lorsque vous avez débuté dans le domaine, vous étiez l'une de ces entreprises qui profitaient des infrastructures des autres. Depuis, votre entreprise est devenue un joueur extrêmement important, particulièrement au Québec, mais aussi ailleurs au Canada.
    À la fin de votre présentation, vous avez dit que cette transaction devrait contenir des conditions minimales, par exemple en ce qui a trait au spectre réservé et au partage des tours. Les représentants de Shaw et de Rogers n'ont pas voulu s'avancer davantage sur la question du spectre, étant donné que les licences du spectre devraient normalement être attribuées ou vendues d'ici la fin juin.
    Pourriez-vous nous en dire davantage en ce qui a trait à cette transaction particulière?
    Merci de la question.
    Je pense qu'il y a quand même une nuance importante: même quand on parle de parasite, il est question de tarification réglementée. À l'époque, lorsqu'il était devenu opportun pour Vidéotron de se lancer dans la téléphonie sans fil, nous avions négocié une entente avec Rogers, notamment, de manière à faciliter les démarches par la suite.
    C'est intéressant de parler de cela. C'est un peu les mêmes choses que je vais répéter. Lors de l'enchère de 2008, nous avons fait d'énormes pressions. Nous avons été en mesure de convaincre feu Jim Prentice, à l'époque ministre de l'Industrie, que ces conditions devaient exister pour qu'il y ait une concurrence. Essentiellement, il y avait trois conditions importantes, notamment celle liée au spectre. Je vais en parler en dernier, puisque vous l'avez déjà mentionnée.
    La première condition, c'était l'itinérance obligatoire. Un réseau ne se construit pas en une fin de semaine. Au contraire, il se construit au fil des années. Ainsi, avant de pouvoir compter sur votre propre réseau, vous devez compter sur le réseau des autres. Il en va de même pour tous les opérateurs internationaux. Par exemple, que vous soyez abonné chez Telus ou ailleurs, lorsque vous êtes aux États-Unis ou en France, vous êtes sur le réseau d'un autre opérateur et vous avez convenu d'une entente d'itinérance. C'était ce qui était souhaité et nécessaire ici, au Canada, pour les entreprises entrant sur le marché.
    La deuxième condition, c'était le partage des tours. À juste titre, pour éviter la pollution visuelle créée par une multitude de tours les unes à côté des autres, le législateur a obligé les opérateurs à s'entendre pour que tous installent leurs antennes dans une seule infrastructure.
    Finalement, la troisième...

  (1445)  

    Excusez-moi de vous interrompre, monsieur Péladeau, mais est-ce que je me trompe en disant qu'au moment où on se parle, au Québec, Québecor ne partage pas nécessairement toutes ses tours avec l'ensemble des partenaires de l'industrie?
    Nous avons des tours que nous partageons avec d'autres opérateurs, notamment avec Rogers. En fait, nous avons une entente avec elle, que nous appelons Teamnet, tout comme Bell et Telus ont une entente ensemble, qu'elles appellent Bellus. Nous allons continuer de cette façon. Je présume qu'une entente d'itinérance existe présentement du côté de Shaw, alors nous espérons qu'une telle entente fera partie des nouvelles conditions pour l'acquisition de Shaw.
    La troisième condition concerne le spectre. Vous avez raison de le souligner, et je ne pourrai que répéter ce qu'ont mentionné mes collègues de l'industrie, dont MM. Natale et Shaw: nous ne pouvons faire quelque commentaire que ce soit à propos des enchères qui auront lieu d'ici quelques semaines. Toutefois, si nous voulons avoir un quatrième joueur solide, nous devons exiger, parmi les conditions de la transaction, le transfert du spectre détenu par Shaw depuis les enchères précédentes, afin de procurer aux clients un service de qualité à des prix extrêmement concurrentiels.
    Monsieur Péladeau, votre entreprise est extrêmement présente au Québec. Cela dit, avez-vous déjà eu des visées sur l'Ouest canadien pour le développement de vos affaires?
    En fait, ce qui est bon pour minou est bon pour pitou, dans plusieurs cas. Si on ne permettait pas la fusion de ces deux géants, ce ne serait pas à la faveur de Shaw, mais ce serait une bonne affaire pour Québecor, si jamais vous vouliez vous installer dans l'Ouest canadien et avaler Shaw. Si on permettait la fusion, ce serait l'inverse.
    Monsieur le député, on parle ici de l'acquisition de Shaw par Rogers. Comme vous le savez probablement, Rogers est déjà un opérateur et fait partie de l'oligopole des trois géants, ce qui n'est pas notre cas. Cela m'apparaît assez évident.
    Je comprends.
    Madame la présidente, est-ce qu'il me reste du temps de parole?
    Il vous reste 15 secondes.
    Je vais donc laisser la parole aux intervenants suivants.
    Merci, monsieur Péladeau.

[Traduction]

    La prochaine série de questions sera celle de Mme Lambropoulos.
     Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Je remercie nos deux témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
     Ma première question s'adresse à M. Thomson.
     Vous avez parlé de l'importance des services à large bande en milieu rural et du fait que, même si la transaction n'est peut-être pas idéale, vous êtes heureux de voir que ces entreprises s'engagent à investir dans les services à large bande en milieu rural. Vous avez dit que le diable est dans les détails.
     J'espérais que vous pourriez nous expliquer que vous considéreriez être une transaction acceptable. Vous savez certainement que l'une des priorités de notre gouvernement est de brancher le plus grand nombre possible de Canadiens dans les collectivités rurales et autochtones. Depuis plusieurs années, je pense, le gouvernement tente d'inciter les entreprises à s'y rendre et à mettre en place l'infrastructure nécessaire. Évidemment, cela est considéré comme un aspect positif de la transaction.
     Pouvez-vous commenter cet aspect et nous donner votre point de vue?

  (1450)  

    Nous appuyons l'importance de déployer les services à large bande dans les collectivités rurales, et c'est exactement ce que font nos membres, souvent avec l'aide des programmes gouvernementaux offerts et qui sont grandement nécessaires. Nous accueillons favorablement tous les investissements dans les services à large bande en milieu rural.
     C'est simplement que, par exemple, Rogers appelle cela un « fonds pour la large bande ». Il ne s'agit pas d'un financement comme dans le cadre du Fonds pour la large bande universelle ou des programmes Un Canada branché ou Brancher pour innover qui sont accessibles à tous les fournisseurs admissibles. Ces formes de financement comportent des règles très claires quant à l'admissibilité et aux objectifs, ainsi qu'en ce qui a trait à la transparence du processus et à la vérification des résultats finaux afin de s'assurer que l'argent a réellement servi à l'atteinte des objectifs.
     À notre connaissance, nous n'avons appris aucun détail sur le « Fonds Rogers », comme on l'appelle. Rogers s'est engagée à donner cet argent pour rendre la transaction plus intéressante, mais au-delà de ça, elle en assurera le contrôle et nous ne savons pas nécessairement où l'argent sera dépensé et comment son succès sera mesuré.
     L'une de nos préoccupations, c'est que, bien que les représentants de Rogers aient laissé entendre au départ que l'argent serait consacré à 600 000 clients de l'ouest du Canada qui ne sont pas desservis ou qui sont mal desservis, lorsqu'ils ont comparu devant vous lundi, ils ont ajouté l'objectif de desservir les collectivités dans lesquelles il y a déjà un fournisseur. Si les collectivités mal desservies ou les petites collectivités rurales ont déjà un fournisseur, c'est habituellement parce qu'elles ont obtenu l'aide financière du gouvernement.
     Ce que Rogers semble maintenant proposer, c'est de reconstruire des infrastructures dans des collectivités où le gouvernement a déjà participé à l'établissement de la large bande. Il ne nous semble pas que de rebâtir ce qui a déjà été construit par l'argent des contribuables soit la meilleure façon d'utiliser les ressources disponibles et une bonne politique d'intérêt public.
    Je vous remercie beaucoup.
     Ma prochaine question s'adresse aux deux témoins.

[Français]

    Selon vous, quel rôle des organismes gouvernementaux comme le CRTC et le Bureau de la concurrence devraient-ils jouer dans cette transaction? Comment devraient-ils aborder le sujet?
    Madame la députée, est-ce que la question s'adresse à M. Thomson ou à nous deux?

[Traduction]

    Aimeriez-vous commencer, monsieur Thomson? Avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Merci.
     Je dirai simplement que le mandat du CRTC est établi dans la Loi sur la radiodiffusion et sa propre législation et que celui du Bureau de la concurrence est semblable, mais distinct, et que les deux s'acquittent des rôles qui leur sont confiés.
    Je suppose que je parle davantage des aspects sur lesquels, selon vous, il faudrait surtout se concentrer avant de prendre une décision.
    Rapidement, si cela va être avantageux pour les consommateurs canadiens en fin de compte...
    Je suis tout à fait d'accord avec M. Thomson.
     J'aimerais ajouter que, du point de vue d'ISDE, il serait important de s'assurer que le spectre est bien réparti, car il s'agit d'un bien public, afin que tous les exploitants soient en mesure d'offrir un service de grande qualité. Il faut s'assurer qu'il n'y aura pas un manque de spectre pour les nouveaux joueurs, car ils n'ont pas eu la chance d'être dans le marché depuis 30 ans et ils n'ont donc pas la même quantité de spectre dont profitent actuellement les titulaires de licence.

[Français]

    Monsieur Péladeau, j'aimerais clarifier un élément. Vous avez mentionné que les clients du Québec jouissaient de tarifs plus favorables que les clients dans le reste du Canada. Vous pensez que c'est attribuable à la meilleure concurrence qu'on retrouve au Québec, où plus de joueurs peuvent contribuer.
    Pensez-vous vraiment que cette transaction défavorisera le reste des Canadiens en affaiblissant la concurrence? Comment pourrait-on aller à l'encontre de cela?

  (1455)  

[Traduction]

    Comment peut-on s'assurer que cette transaction n'affaiblisse pas la concurrence?
    Madame la présidente, puis-je répondre?
    Je vais vous donner un peu de temps. Vous avez 15 secondes.
    On a déjà dit que le quatrième exploitant, Freedom Mobile, disparaîtra parce que le cartel ou l'oligopole avec lequel les Canadiens devaient composer sera essentiellement reconstruit.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Lemire, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Péladeau, dans votre allocution d'ouverture, vous avez parlé de l'importance d'avoir un quatrième joueur sur le marché. Selon votre expérience au Québec, quel effet a eu la présence d'un quatrième joueur sur le marché?
    J'ai tenté de le mentionner dans mon intervention. Évidemment, pour s'installer sur le marché, le quatrième joueur a dû se montrer encore plus combatif. Notre participation à la première enchère, en 2008, a été extrêmement coûteuse. Cela nous a coûté près de 500 millions de dollars. Il nous a donc fallu amortir ce montant sur le plus grand nombre possible de clients, d'autant plus que nous avions également l'obligation de construire le réseau. Comme je l'ai mentionné, nous avons investi 2 milliards de dollars à cet égard.
    Tout cela nous a amenés à être extrêmement compétitifs et à proposer des prix et des forfaits plus concurrentiels que ceux qui existaient précédemment. De plus, il est de notoriété publique au Québec que nous avons accordé une attention particulière au service à la clientèle. Dieu sait que de plus en plus de Canadiens sont sensibles à cela. Ils veulent faire affaire avec un fournisseur qui sera à l'écoute de leurs besoins, tout en sachant qu'il y aura quelqu'un au bout du fil pour répondre à leurs demandes. C'est le besoin auquel Québecor s'est efforcée de répondre dès qu'elle a fait l'acquisition de Vidéotron, en 2000. C'est probablement l'une des raisons pour lesquelles Vidéotron a été considérée, pour la 15e année consécutive, comme le fournisseur de services de télécommunications préféré des Québécois, parmi de nombreux autres fournisseurs. En effet, il y a aussi Rogers, Telus et toutes les sous-marques, ainsi que d'autres fournisseurs d'accès Internet, c'est-à-dire ceux qui offrent un accès Internet de tiers.
    Si l'objectif est de faire baisser les prix, pourquoi demandez-vous aux autorités d'investir autant d'efforts dans un modèle de concurrence basée sur quatre joueurs?
    Conséquemment, comment ce modèle devrait-il fonctionner au Canada?
    Je ne crois pas qu'on demande au gouvernement ou à l'État d'investir dans un quatrième joueur. Ce que nous croyons être la solution pour le gouvernement afin de maintenir la concurrence, c'est de s'assurer que les conditions nécessaires sont en place pour qu'un quatrième joueur puisse exister. C'est ainsi qu'on créera la concurrence de façon systématique et quotidienne.
    C'est la raison pour laquelle nous sommes intervenus auprès du ministre de l'époque, M. Prentice. D'ailleurs, nous n'étions pas les seuls à le faire. Nos interventions l'ont convaincu de mettre en place certaines conditions afin d'inciter les entreprises à s'engager dans les enchères et, par la suite, dans la construction d'un réseau. Nous étions d'avis que ces conditions, c'est-à-dire la mise en réserve d'une partie du spectre, le partage des infrastructures et les ententes d'itinérance obligatoire, allaient assurer la longévité et la pérennité de la concurrence.
    L'histoire a démontré que, puisque ces conditions étaient remplies, la concurrence a pu exister. Le résultat en est qu'au Canada, ce sont les Québécois qui bénéficient des tarifs les plus bas dans le domaine du sans-fil.
    Lors de l'intervention précédente de mon collègue Bernard Généreux, une porte a été ouverte. Je me permets donc de vous poser la question suivante.
    Admettons que, pour que la transaction soit autorisée, on oblige Rogers à céder un actif comme Freedom Mobile. Pourrait-il être dans l'intérêt de Vidéotron d'acquérir cette compagnie et de renforcer sa position en tant que quatrième joueur partout au Canada?
     Déjà en 2008, nous avions entrepris des démarches auprès de certains opérateurs pour nous assurer une présence nationale. Or, cela n'avait pas fonctionné, pour toutes sortes de raisons. Tout d'abord, nous n'avions pas la même capacité financière à l'époque. En outre, la présence d'un groupe nommé Globalive avait fait monter extrêmement rapidement les prix de l'enchère. Il s'est avéré par la suite que cette entreprise était financée par des intérêts étrangers. C'est ce que j'ai appelé tout à l'heure le fiasco de Wind Mobile. Cet événement a malheureusement retardé de façon importante l'entrée sur le marché d'un joueur sérieux disposant de la surface financière requise pour investir dans un réseau. Heureusement, Shaw a acquis Wind Mobile plusieurs années plus tard, l'a renommée Freedom Mobile et en a fait un véritable quatrième joueur. Si Rogers achète aussi Freedom Mobile, il va sans dire que ce quatrième joueur va disparaître.
    Pour répondre à votre question, j'aurais tendance à dire que nous étions déjà intéressés, en 2008, à prendre de l'expansion. Aujourd'hui, notre surface financière, notre expérience et notre expertise, que ce soit dans le domaine des télécommunications ou de la commercialisation, font de nous un candidat qui satisfait aux critères nécessaires pour réussir.

  (1500)  

    Seriez-vous d'avis qu'il faudrait repousser la mise aux enchères du spectre de la bande de 3 500 mégahertz ou retirer Shaw du processus? Qu'en pensez-vous?
    Il y a des règles très bien définies sur les enchères. À ce sujet, je vous renvoie au paragraphe 261 du cadre politique et de délivrance de licences concernant le spectre de la bande de 3 500 mégahertz. Il y est clairement indiqué que, dans les circonstances, Shaw ne pourrait malheureusement pas être privilégiée ni être candidate à l'enchère pour ce qui est du spectre réservé.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Notre prochain intervenant sera M. Masse.
     Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, madame la présidente, et merci à nos deux témoins d'être ici.
     Je vais d'abord m'adresser à M. Péladeau.
    L'un des défis que nous avons, c'est que le spectre qui avait auparavant été réservé est maintenant en train d'être acheté bien qu'il s'agissait d'une réserve. J'aimerais vous poser une question au sujet de la licence de services sans fil évolués de Vidéotron qui a été vendue à Rogers. Il s'agissait également d'un marché réservé. Combien Rogers a-t-elle payé pour cette licence et quel fût l'incidence sur la concurrence? Pourquoi avez-vous accepté de le faire?
    Tout d'abord, comme je vous l'ai dit, monsieur Masse, en 2008, nous voulions établir un réseau national, mais malheureusement, pour différentes raisons... L'une des raisons, c'est que le prix à l'enchère était très, très élevé. Compte tenu de notre capacité financière, nous avons conclu que nous ne serions pas en mesure de bâtir ce réseau national. Dans le cadre de l'enchère, nous avions soumissionné sur 10 mégahertz dans la région de Toronto. Malheureusement, à la fin de l'enchère — appelons cela ainsi — la licence nous appartenait et ensuite nous avons été obligés de payer...
    M. Brian Masse: D'accord.
    M. Pierre Karl Péladeau: ... mais au début, l'objectif était de bâtir un réseau. Malheureusement, nous n'avons pas pu le faire.
    Si j'ai posé cette question, c'était pour que les choses soient claires. Merci.
     À mon avis, l'une des erreurs que nous avons faites avec nos enchères, c'est de simplement de tenter d'obtenir le plus d'argent possible — environ 25 milliards de dollars au cours des dernières années depuis l'an 2000 — et je préférerais que nous ayons des enchères de spectre avec des normes de déploiement plus élevées, une protection des prix plus bas pour les services de base et l'attente selon laquelle si la bande n'est pas utilisée, elle est perdue. Cela ressemblerait beaucoup au processus de demande de propositions. Nous autoriserions un meilleur accès afin que des mesures plus rentables deviennent des incitatifs pour l'utilisation du spectre par opposition à simplement faire un coup d'argent, pour ainsi dire.
     S'il s'agissait d'une politique comme dans d'autres pays, pensez-vous que votre entreprise, ainsi que d'autres qui tentent d'élargir leurs marchés, pourrait mieux réussir plutôt que d'être obligée d'emprunter sur le marché et d'assurer ensuite le service de cette dette à mesure qu'elle élargit sa clientèle cible?

  (1505)  

    C'est une question très intéressante. Évidemment, nous ne sommes pas ISDE. Ce n'est pas nous qui allons élaborer une politique publique, mais vous savez probablement qu'au début, tôt dans le processus de mise en oeuvre des services sans fil, le spectre a été donné aux premiers exploitants. Au fil des décennies, il y a eu des changements d'idées à ce sujet. Le gouvernement a décidé qu'il s'agissait d'un bien public et que, par conséquent, nous devions nous assurer de monétiser cet actif le mieux possible, ce qui est limité et nécessaire pour un service sans fil public.
     La politique actuelle est-elle parfaite? Probablement pas puisque la perfection n'existe pas. Est-ce l'une des meilleures? Je pense qu'ils ont pu analyser toutes les enchères tenues dans le monde et, au bout du compte, ils ont décidé qu'il y aurait différents exploitants au Canada, et que ces règles s'appliqueraient à l'enchère.
     Pour assurer la continuité de la concurrence — car la taille du quatrième exploitant est loin de celle des trois plus grands, l'oligopole — nous devons donc veiller à ce qu'il soit protégé et que des réserves lui soient accordées.
    Je sais tout cela. J'essayais d'entrevoir un différent processus et une différente priorité. À l'heure actuelle, nous en sommes à un point où notre marché est protégé de la concurrence étrangère — et je vais peut-être donner la parole à M. Thomson pour qu'il participe également à la conversation. L'utilisation de notre spectre a aussi... Le résultat final, c'est que certains de nos prix sont parmi les plus élevés. Je ne pense pas qu'il s'agisse d'une coïncidence. Nous avons entendu des témoignages à ce sujet.
     Rapidement, monsieur Thomson, le moment choisi semble très louche. Rogers a récemment tenté une prise de contrôle hostile envers Cogeco, et soudainement, à la dernière minute, il y a cette transaction concernant ce spectre.
     Avez-vous une opinion sur la question de savoir si nous devrions retarder le spectre ou, ce que je préfère actuellement, mettre un frein à tout cela en disant que nous ne sommes pas intéressés parce que les répercussions seront importantes.
     Pourriez-vous me dire ce que vous en pensez?
    Franchement, monsieur Masse, même si nous observons la vente aux enchères du spectre avec intérêt, elle n'a pas beaucoup d'incidence sur les petites collectivités et les petits fournisseurs. Cela se passe entre les gros joueurs. Les coûts sont beaucoup trop élevés pour les autres, et le fait que la transaction se produise ou non aura très peu d'incidence sur la concurrence ou l'accès aux services mobiles dans les petites collectivités. Seul le processus des ERMV peut aider à cet égard.
    D'accord.
     C'est là où je veux en venir: changer la façon dont nous gérons le spectre pour permettre à ces nouveaux venus d'entrer sur le marché.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup, monsieur Masse.
     Nous allons maintenant passer à notre deuxième série de questions en commençant par M. Poilievre, pour cinq minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Mes questions s'adressent à M. Péladeau.
    Je veux d'abord vous remercier de la contribution de votre famille au domaine des affaires et vous féliciter du succès de Vidéotron.
    Vous avez mentionné que, dans l'éventualité d'une fusion de Rogers et Shaw, il faudrait absolument protéger le principe d'un quatrième joueur. Je suis d'accord que cette approche a bien fonctionné à ce jour et qu'elle a été avantageuse pour les consommateurs.
    Si l'entreprise Freedom Mobile est dissociée de Shaw ou qu'on la vend comme actif pour qu'elle ne fasse pas partie de la fusion, croyez-vous que cette transaction pourra se faire sans nuire aux intérêts des consommateurs?
    Je vous remercie de la question.
    Parlez-vous de la possibilité que Freedom Mobile fasse partie des actifs acquis par Rogers lors de la fusion? Est-ce bien le sens de votre question?
    Si Shaw vend l'entreprise Freedom Mobile et que celle-ci ne fait plus partie de la fusion, par exemple si quelqu'un l'achète ou qu'elle devient une entreprise complètement indépendante, est-ce que la fusion pourra se faire sans que cela nuise aux intérêts des consommateurs?

  (1510)  

    Oui, tout à fait. J'ai même tendance à penser que, au contraire, la concurrence va demeurer et que le quatrième joueur sera dynamique. Évidemment, il faut la surface financière pour acquérir les actifs, mais aussi pour élaborer les activités de l'entreprise, construire un réseau et participer aux enchères. Les enchères du spectre de la bande de 3 500 mégahertz s'en viennent. Ensuite, il y en aura d'autres. Les enchères de ce type sont assez récurrentes, car elles permettent de s'assurer que les Canadiens bénéficient des meilleurs services.
    Avant, nous n'utilisions les téléphones que pour parler à d'autres personnes. Maintenant, de plus en plus de gens ont des téléphones intelligents et ne peuvent plus s'en passer dans la vie de tous les jours, comme vous le savez. Les citoyens du Canada qui n'ont pas de téléphone intelligent sont assez rares. La téléphonie sans fil est donc devenue un service essentiel. Selon moi, pour assurer une concurrence, il est incontournable d'avoir un quatrième joueur.
    Je comprends. Vous pensez donc que, si cette condition est respectée, la fusion pourrait être acceptable pour les Canadiens.
    Oui. À vrai dire, Rogers et Shaw ne sont pas concurrentes. Toutes les entreprises dans le domaine de la câblodistribution, que ce soit Eastlink, Vidéotron, Cogeco, Shaw ou Rogers, ont connu une croissance grâce aux acquisitions. Tout cela s'inscrit dans un mouvement qui existe depuis 30 ans. C'est le cas également aux États-Unis pour Cox, Charter Communications et Comcast. Historiquement, les fusions ont déjà permis à des entreprises de câblodistribution de maintenir ou même d'augmenter la qualité des services en câblodistribution. Les fusions ont également permis aux entreprises d'augmenter la qualité, la vitesse et le débit de l'accès Internet, ainsi que de s'engager dans la téléphonie sans fil.
    Merci.
    Vous avez qualifié le marché au Canada d'oligopole, et je suis d'accord sur cette description.
    À part cette fusion et la nécessité de préserver la présence d'un quatrième joueur, y a-t-il d'autres réformes que vous nous suggéreriez de poursuivre pour libéraliser le marché et permettre davantage de concurrence?
    Les règles édictées par le gouvernement en 2008 se sont avérées fructueuses, selon moi. Aujourd'hui, la concurrence existe non seulement dans les provinces maritimes et au Québec, mais également en Colombie-Britannique, en Alberta et en Ontario. Il est donc important de maintenir ces règles. En outre, il faut bien s'assurer dorénavant que les entreprises ne participent pas à une enchère de spectre dans le but de faire de la spéculation, mais bien de s'engager à construire un réseau au bénéfice des Canadiens. C'est la seule et unique façon d'être en mesure d'offrir des services à la fois de qualité et à juste prix. Certes, les investissements sont importants, mais les résultats le sont également pour les Canadiens.
    Merci.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    La parole est maintenant à M. Ehsassi.
     Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Permettez-moi de me joindre à nos collègues pour remercier les deux témoins de comparaître devant nous aujourd'hui.
     Ma première question s'adresse à M. Péladeau.
     Comme vous le savez, en 2017, Bell a fait l'acquisition de MTS. Je suppose que vous suivez ce qui se passe dans d'autres provinces également. À votre avis, quelles ont été les conséquences de cette acquisition?
    Je vais peut-être poser la question à mon collègue Jean-François Pruneau, parce que je n'étais pas PDG à l'époque, mais je dirai que, avec tout le respect que j'ai pour le Manitoba — en fait, nous avions quelques journaux là-bas, surtout à Winnipeg —, c'est une plus petite province. Nous étions dans un environnement dans lequel MTS, une entreprise active depuis plusieurs années dans cette province et dont les liaisons étaient différentes de celles des autres exploitants, ne permettait probablement pas d'avoir un environnement très concurrentiel. Je dirais que ce n'était pas le cas ailleurs. Cette concurrence est d'autant plus forte puisque la technologie permettait à Bell, ainsi qu'à Shaw, de diffuser en vidéo par satellite, et ensuite avec la fibre optique.
     Nous évoluons dans un environnement très concurrentiel. Nous devons donc nous assurer qu'il demeurera concurrentiel. Le Manitoba n'est probablement pas la province où la concurrence est la plus forte au Canada.
     Je ne sais pas si M. Pruneau a quelque chose à ajouter.

  (1515)  

     Si vous me permettez d'ajouter quelque chose, je dirais que ce qui est certain, c'est que dans le cas de Xplornet, le résultat n'a pas été très bon. Évidemment, ils ont acquis des abonnés, mais comme M. Péladeau l'a mentionné, il doit y avoir des conditions pour que ce genre d'entreprise soit viable. Nous parlons ici du transfert du spectre, du transfert d'ententes d'itinérance ou de la conclusion d'un accord d'itinérance satisfaisant.
     De toute évidence, avec les liaisons terrestres et tout le reste, ce n'est certainement pas ce que Xplornet a obtenu lorsqu'elle a commencé à évoluer en Colombie-Britannique. Je pense que même s'il semblait qu'une certaine concurrence persistait avec Xplornet à cet égard, le résultat ne fut manifestement pas satisfaisant pour Xplornet parce qu'elle n'a pas obtenu les actifs qui lui auraient permis de s'assurer que l'aventure devienne viable.
    Merci.
     Quelqu'un a dit qu'advenant l'approbation de cette fusion, le rideau tombera sur les acteurs régionaux.
     Monsieur Péladeau, seriez-vous préoccupé par le fait qu'une entreprise puisse acquérir Quebecor si cette fusion était approuvée?
    Je peux vous répondre très simplement que Québecor n'est pas à vendre, tout comme Cogeco n'était pas à vendre, comme la famille de Louis Audet nous l'a appris. Ce n'est certainement pas le cas.
     Personnellement, j'en ai hérité de mon père, comme Louis Audet. Mon objectif est de m'assurer que cette entreprise demeure une entreprise familiale et continue d'offrir un bel avenir aux Québécois et aux Canadiens peu importe ce que seront les résultats de cette transaction, surtout pour les services sans fil.
    Nous vous le rappellerons, monsieur Péladeau.
     Merci. Monsieur Thomson, supposons que cette fusion soit approuvée. Craignez-vous qu'elle entraînera la création d'autres regroupements parce que d'autres acteurs feront la même chose?
    Il y a toujours des regroupements dans cette industrie. Ce n'est qu'une autre étape, et nous nous attendons à ce que cela se poursuive.
     Comme je l'ai dit au début, à mesure que les grandes entreprises prennent de l'expansion, il est plus difficile pour les petites entreprises de se faire entendre et de veiller à ce que leurs clients conservent des tarifs abordables et aient autant de choix que les personnes qui vivent dans les grands centres où les plus importants joueurs sont présents.
    Si la transaction était approuvée, cela enverrait-il un mauvais signal, à savoir que d'autres peuvent faire la même chose?
    Tout dépend des conditions qui sont assorties à ce genre de transaction, qui sont celles que j'ai décrites.
    Absolument.
     Je vous remercie, mon temps est écoulé.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Monsieur Lemire, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais poursuivre mes questions à M. Péladeau.
    Rogers affirme qu'elle investira plus de 6 milliards de dollars dans l'Ouest canadien pour bâtir son réseau 5G, en mettant évidemment l'accent sur tous les avantages que cela apportera aux communautés rurales et éloignées ainsi qu'aux communautés autochtones.
    Vivant moi-même dans une région éloignée, j'avoue que je n'attends pas particulièrement la 5G. On sait qu'il s'agit d'ondes à plus courte portée. À mon sens, c'est beaucoup moins pertinent dans de grands territoires très peu peuplés.
    La 5G est-elle vraiment la panacée, comme Rogers essayait de nous le faire croire la semaine dernière? Hier, pendant que je regardais la partie de hockey, un nombre incroyable de publicités sur la 5G de Bell ont été diffusées. La 5G est-elle à ce point importante pour l'avenir?
    Depuis que la téléphonie sans fil existe, elle a évolué, comme n'importe quelle autre technologie ou n'importe quel autre produit. Par exemple, les voitures de 1910 ne sont pas celles de 2021. C'est la même chose pour la téléphonie. Nous sommes passées de la 1G à la 2G, puis à la 3G, puis à la 3,5G, puis à la 4G, c'est-à-dire la LTE puis la LTE Advanced. Nous passons maintenant à la 5G. Par la suite, il y aura la 6G, puis la 7G. C'est un peu comme les versions de Microsoft.
    Est-ce que les nouvelles technologies procurent de meilleurs services? Oui. Nous sommes quand même passés de la voix aux données, et bientôt nous aurons l'internet des objets. Est-ce que ce sera le Grand Soir? Non, ce ne le sera pas; c'est l'évolution naturelle des technologies qui s'implantent, comme c'est le cas dans toutes les autres industries.
    Ce qu'il est important de dire, c'est que les télécommunications sont une industrie à haute intensité capitalistique. Autrement dit, elles requièrent des investissements. Nous investissons entre 800 et 900 millions de dollars chaque année, sans compter les enchères du spectre. C'est vous dire à quel point cela fait partie de notre métier. En effet, nous générons beaucoup d’argent, mais nous en investissons énormément, justement pour que les Canadiens puissent bénéficier des meilleurs services de communication. D'ailleurs, durant la pandémie, nous avons constaté que, si les réseaux canadiens étaient aussi solides, c'était parce que les investissements demeuraient.
    Il est important d'avoir de la concurrence. Si ma mémoire est bonne, monsieur le député, vous représentez une circonscription en Abitibi. Auparavant dans cette région, il n'y avait pas de concurrence; il n'y avait que Bell. Maintenant, il y a de la concurrence. D'ailleurs, depuis que nous nous y sommes installés en compagnie d'un autre joueur, les prix ont baissé. Encore une fois, cela démontre hors de tout doute que la concurrence entraîne une baisse des prix.

  (1520)  

    Je l'ai constaté, en effet.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Notre prochain intervenant sera M. Masse. Vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente.
     Ma question s'adresse à M. Thomson. Ce qui me préoccupe au sujet de la myriade de façons possibles de résoudre cette question, c'est que tout le monde semble avoir un plan sur une façon de faire un genre de chirurgie sur la fusion afin d'en détacher quelque chose — un composant —, ou veut que ce soit fait avec autre fournisseur et ainsi de suite. Puisque ces propositions pourraient toutes finir par être des échecs — et c'est ce qui sera décidé plus tard par le marché —, nous pourrions tout de même nous retrouver sans quatrième fournisseur de services.
    Ne serait-il pas préférable de rejeter essentiellement la fusion, de poursuivre le plan et peut-être d'envisager des solutions de rechange sur la façon d'appliquer la réglementation pour répondre aux attentes des clients? Je crains que tout le monde ait une idée de la façon de retrancher certaines parties de cette transaction pour ensuite tenter de les rattacher à d'autres choses, un peu comme un monstre Frankenstein, pour ensuite prétendre que cela fonctionnera bien pour les consommateurs. Nous verrions ensuite le quatrième joueur disparaître.
    Cela fait des années que nous essayons de stimuler la concurrence sur le marché des services sans fil au Canada. À un certain moment, l'approche choisie fut le quatrième exploitant. Même si nous avons des acteurs régionaux, tels que Freedom, les consommateurs et les groupes de consommateurs se sont quand même présentés en grand nombre devant le CRTC, il y a un an, pour tenter d'accroître la concurrence par l'entremise du processus des ERMV. C'est en fin de compte là que réside la solution pour la concurrence. Il ne s'agit pas de savoir qui obtiendra les entités qui seront exclues de cette transaction.
    Vous y croyez toujours. D'accord. Je pense toutefois qu'il est important de noter que, quand l'un ou l'autre de ces quatre joueurs est réduit et réassemblé, il y a encore moins de concurrence.
     Merci, madame la présidente. Je n'ai pas d'autres questions.
    Je vous remercie beaucoup.
     Notre prochain intervenant sera M. Généreux.

[Français]

    Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je rappelle à tous mes collègues que nous recevons trois témoins. On semble avoir oublié M. Pruneau depuis le début.
    Je vais donc poser une question aux trois témoins.

[Traduction]

    On donne le feu vert? Si oui, comment ou pourquoi?
     Monsieur Pruneau.

[Français]

    Comme M. Péladeau l'a si bien mentionné, je pense que la disparition d'un quatrième joueur doté d'installations dans le marché de l'Alberta, de la Colombie-Britannique et de l'Ontario n'est pas souhaitable. Si cette transaction devait avoir lieu, je pense qu'elle devrait être assortie de conditions fermes quant à la disposition de cet actif. À cet égard, on ne doit pas seulement considérer le nombre d'abonnés, mais aussi tout ce dont on a besoin pour exploiter une entreprise de services sans fil. On doit évidemment considérer l'entièreté du portefeuille de spectre, mais aussi vérifier la présence d'ententes convenables et équitables en ce qui a trait à l'itinérance, à l'utilisation du réseau de transport filaire et au partage des tours. Il faut considérer l'ensemble de ces conditions.
    Je pense que c'est une des erreurs qui se sont produites dans la transaction entre Manitoba Telecom Services et Bell. Effectivement, on a réparti la concurrence un peu partout en dirigeant certains abonnés vers Xplornet et d'autres vers Telus, mais sans nécessairement imposer à ces transferts d'autres conditions permettant d'assurer une concurrence viable et durable.

  (1525)  

    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Thomson, qu'en pensez-vous? Est-ce acceptable ou non?
    Excusez-moi, mais pourriez-vous répéter la question?
    Pensez-vous que nous devrions accepter la transaction? Si oui, pourquoi?
    Encore une fois, tout dépend des conditions qui s'y rattachent. Si, au bout du compte, il y a des règles pour assurer la protection des consommateurs et que la transaction est dans leur intérêt, alors oui, je suppose que vous devriez aller de l'avant. Mais il y a beaucoup de choses à faire, beaucoup de règles à mettre en place pour veiller à ce que ce soit bel et bien le cas.

[Français]

    Êtes-vous du même avis, monsieur Péladeau?
    C'est exact, monsieur le député. Je pense que M. Pruneau a très bien résumé notre position.
    D'accord.
    J'aimerais vous poser ma dernière question, monsieur Péladeau.
    Permettez-moi de revenir sur la question des revendeurs de services. J'ai trouvé spécial que vous les qualifiiez de parasites, puisque vous avez candidement avoué que vous en avez vous-même été un, au départ. Je crois même vous avoir entendu dire, par le passé, qu'il n'était pas nécessaire d'avoir des revendeurs.
    Aujourd'hui, ces revendeurs vendent des services équivalents aux vôtres à moindre coût, parce que le CRTC leur a accordé une diminution des coûts de base. En quoi cela vient-il nuire à l'implantation de vos technologies, particulièrement en ce qui concerne la 5G?
    Je me permets de vous dire que c'est inexact. Nous n'avons jamais dit que nous étions contre les revendeurs. Au contraire, nous pensons qu'ils stimulent la concurrence. Nous sommes donc plutôt favorables à leur présence sur le marché.
    Il faut voir cependant quelles sont les conditions de la revente. Comme vous le savez, une décision a été rendue et le gouvernement a dit souhaiter la revoir. Il a demandé au CRTC de revoir sa copie, si je peux me permettre l'expression.
    Dans toute chose, il y a un équilibre. Si on tire trop l'élastique d'un côté ou de l'autre, il risque d'être trop tendu. Les prix exigés précédemment étaient-ils trop élevés? Je ne le crois pas. Il faut prendre en considération beaucoup de facteurs et effectuer un calcul complexe pour établir les prix. N'oubliez jamais que, lorsqu'on parle d’AITP, cela concerne d'abord et avant tout l'accès Internet, et non les services sans fil. Ces derniers sont présentement couverts par une instance. Nous verrons donc de quelle façon les choses vont se dérouler.
    Il faut savoir également que les actifs dans le domaine du sans-fil ne sont pas les mêmes que dans le secteur des services filaires. En effet, on ne retrouve pas dans le domaine filaire toute la composante du spectre.
    Il est donc inexact de dire que nous sommes contre l'AITP. Nous y sommes favorables, mais il faut que le prix juste soit établi en fonction de l'investissement que les constructeurs de réseaux ont fait par le passé. Il ne faut pas non plus qu'on crée un environnement qui n'incitera pas les opérateurs à investir pour maintenir la qualité du réseau que nous connaissons au Canada et qui est parmi les meilleures. Les citoyens et les entreprises doivent continuer de bénéficier d'un réseau qui permet un niveau très élevé de productivité. N'oublions jamais qu'un réseau de télécommunications est un outil nécessaire à la productivité d'un pays.
    Merci beaucoup, monsieur Péladeau.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Le dernier intervenant pour ce groupe de témoins sera M. Erskine-Smith. Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je vous remercie beaucoup.
     J'aimerais commencer par M. Péladeau. Des dirigeants de Rogers et de Shaw ont comparu devant le Comité il y a quelques jours, et ils ont dit que la transaction aurait pour effet d'augmenter la concurrence, et non de la réduire, en insistant sur l'intensité de la concurrence.
     Que pensez-vous de ces commentaires?
    Je dirais que l'histoire montre que si vous avez quatre exploitants, vous aurez une meilleure concurrence. Cette concurrence se reflétera donc dans les prix et les différentes options offertes aux consommateurs. Autrement, moins de joueurs veut dire moins de concurrence.
     C'est vrai au Canada, mais c'est également vrai ailleurs. Il y a eu beaucoup de débats en Europe sur la nécessité d'avoir trois ou quatre exploitants. La plupart des entreprises concurrentes étaient d'accord. Elles avaient tout simplement constaté qu'un quatrième exploitant stimulerait davantage la concurrence. C'est comme ça que cela fonctionne.

  (1530)  

    Pour poursuivre dans la même veine, vous avez dit en réponse aux questions de mon collègue, le député Poilievre, que si cette transaction est approuvée, elle doit à tout le moins être assortie d'une condition selon laquelle Freedom doit être détachée et continuer de fonctionner en tant que quatrième entité concurrentielle.
     Y a-t-il d'autres conditions qui, selon vous, devraient être imposées si la transaction était approuvée?
    L'objectif de mon intervention est de m'assurer que nous obtiendrons et que nous offrirons un environnement concurrentiel aux Canadiens dans le secteur des services sans fil. Nous ne faisons pas concurrence à Shaw dans les domaines de la câblodistribution, de l'accès Internet ou de la téléphonie filaire. Je pense que Shaw a réussi à offrir un très bon service. Dans tous ces services, Shaw est en concurrence avec une très grande entreprise dans l'Ouest du pays, Telus, qui offre également des services de télédiffusion depuis plusieurs années.
     C'est ainsi que les choses fonctionnent. L'entreprise a fourni des services adéquats au marché, surtout si l'on tient compte de la présence de plus petites entreprises de câblodistribution et de services d'accès Internet de tiers qui établissent un environnement concurrentiel.
    C'est moins vrai dans l'Ouest du pays où il y a moins de services d'accès Internet de tiers qu'au Québec, ce qui est probablement une autre raison pour laquelle le marché des lignes filaires est très concurrentiel. Si vous voulez vous assurer qu'il y ait de la concurrence sur le marché des services sans fil, la meilleure formule et la meilleure solution seraient d'avoir un quatrième exploitant.
    Je comprends.
     Monsieur Thomson, je vais vous poser la même question. Lorsque nous examinons les conditions, il semble qu'à tout le moins, il ne faudrait pas que Freedom soit intégré aux trois géants si cette transaction était approuvée. Quelles autres conditions, le cas échéant, seraient absolument nécessaires pour qu'une transaction soit approuvée?
    Notre position est que le fait d'avoir quatre joueurs n'est même pas suffisant, compte tenu du nombre de concurrents qui existe, pour s'assurer qu'il y a des prix moins élevés et plus de choix partout au pays. En nous concentrant sur l'aspect sans fil de cette transaction, nous oublions qu'elle a une incidence sur le secteur de la câblodistribution, ainsi que celui de l'Internet, en raison de la croissance que connaîtra Rogers en prenant le contrôle de Shaw.
    Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, cette taille a une incidence sur les prix des services de câblodistribution. Nous avons besoin que la compétence du CRTC en matière de protection des consommateurs soit confirmée dans la Loi sur la radiodiffusion. Des règles semblables doivent s'appliquer à l'Internet afin de protéger les consommateurs contre un exploitant qui utiliserait sa taille pour réduire le choix et l'accès aux services Internet, ce qui est une réelle possibilité.
    Monsieur Thomson, nous avons entendu dire que trois examens sont menés. ISDE examine cette acquisition. Le CRTC examine cette acquisition. Le Bureau de la concurrence examine cette acquisition. Il me semble que le rôle le plus important est celui du Bureau de la concurrence. Pourtant, bien qu'il se soit prononcé en mars contre la fusion entre Air Canada et Transat, le gouvernement l'a quand même approuvée. Craignez-vous que, peu importe ce que pense le Bureau, son avis ne sera pas pris en considération?
    Le Bureau a un rôle à jouer. Il est impossible de savoir à l'avance comment les gens vont réagir aux décisions du Bureau, mais nous sommes convaincus qu'il remplira son mandat.
    Finalement, monsieur Péladeau, si Freedom est cédée, êtes-vous ouvert à l'idée d'une acquisition par des intérêts étrangers du quatrième joueur sans fil afin de préserver la concurrence?
    Vous savez, les entreprises de télécommunications étrangères ont malheureusement prouvé... Nous avons vu ce qui s'est passé avec Wind Mobile au début de la mise aux enchères en 2008. Ce fut un échec. Il faut être un exploitant et bénéficier d'une solide base financière pour réussir. J'imagine que les télécommunicateurs étrangers ne sont pas en mesure d'assurer ces conditions actuellement.
    Merci beaucoup.
    Voilà qui met fin à notre premier groupe de témoins pour aujourd'hui.

[Français]

     Messieurs Péladeau, Pruneau et Thomson, je vous remercie de votre témoignage et de votre présence aujourd'hui.

[Traduction]

    Nous vous sommes très reconnaissants de votre présence parmi nous aujourd'hui.
    Sur ce, nous allons suspendre la séance un bref moment, le temps de permettre au premier groupe de témoins de quitter, et au deuxième groupe de se joindre à nous.

  (1535)  


  (1535)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Merci à nos trois témoins de leur participation aujourd'hui.
    Nous accueillons Laura Tribe, directrice exécutive d'OpenMedia. Nous sommes heureux de vous revoir. Du Centre de défense de l'intérêt public, nous recevons John Lawford, directeur exécutif et avocat général; et de TekSavvy Solutions, nous accueillons Andy Kaplan-Myrth, vice-président, Affaires réglementaires et distributeurs.
    Chaque témoin dispose de trois minutes pour présenter son exposé. Les exposés seront suivis de périodes de questions.
    Sur ce, nous allons commencer par Mme Tribe.
    Vous avez la parole pour trois minutes.
    Je m'appelle Laura Tribe. Je suis la directrice exécutive d'OpenMedia. Je m'adresse à vous aujourd'hui depuis Ottawa, à titre d'hôte sur les territoires non cédés de la nation algonquine.
    Aujourd'hui, alors que nous sommes en train de discuter de l'avenir des systèmes de communication du Canada, j'aimerais vous rappeler que les Autochtones des quatre coins du pays tentent toujours d'obtenir l'accès à Internet à leurs propres conditions. Et cela, tout en continuant de compter parmi les populations les plus mal desservies sur le plan de l'accès Internet, et dans bien des cas, mal desservies par les entreprises dont il est question aujourd'hui.
    C'est la troisième fois que je m'adresse à ce Comité depuis l'année dernière. Lors de mes deux précédentes comparutions, nous avions discuté de la nécessité de prendre des mesures pour que tous les citoyens du Canada puissent bénéficier d'une connectivité à un prix abordable, surtout pendant la pandémie. Malheureusement, aujourd'hui, plutôt que de parler des progrès que nous avons accomplis depuis, nous sommes ici pour discuter d'un dramatique recul dans cette lutte. Pour dire les choses simplement: les Canadiens ne peuvent pas se permettre d'accepter cette transaction. Vous devez vous opposer à la vente de Shaw à Rogers.
    Vous devez vous opposer à cette transaction s'il vous tient à coeur d'offrir un accès Internet abordable au Canada. Vous devez vous opposer à cette transaction s'il vous tient à coeur d'offrir un plus grand choix et plus de concurrence sur le marché des téléphones cellulaires au Canada, si vous croyez en l'amélioration du service à la clientèle, si vous croyez en la protection des emplois dans l'Ouest du Canada, si vous croyez que les petits fournisseurs et les fournisseurs locaux méritent d'avoir une chance. Vous devez vous opposer à cette transaction si vous croyez en la possibilité d'instaurer une connectivité adéquate dans les collectivités rurales, éloignées et autochtones de partout au Canada.
    Les grandes sociétés de télécommunications sont déjà trop imposantes. L'éventail de choix des Canadiens est déjà trop restreint. Nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre de faire cet énorme pas en arrière.
    Le communiqué de presse de Rogers sur la transaction était émaillé de promesses sur tout ce que le Canada souhaite obtenir: des emplois, le réseau 5G et la connectivité dans les régions rurales, éloignées et autochtones. Lorsque Bell a fait l'acquisition de MTS en 2016, nous avions entendu des promesses semblables. Et nous avons aussi constaté des résultats comparables à ce que nous verrons dans le cas présent: les prix ont monté, il y a eu des mises à pied et la concurrence a été piétinée. Les promesses n'ont pas été tenues.
    Aussi séduisantes que puissent paraître les grandes promesses de Rogers, il n'existe aucun moyen de lui demander de rendre des comptes. Nous n'avons aucune garantie de ce qui se passera si cette transaction est autorisée, sauf une: les Canadiens vont en souffrir.
    Près de 19 000 Canadiens ont déjà signé une pétition pour s'opposer à cette transaction. Cessez de permettre aux grandes sociétés de télécommunications de tenir les Canadiens en otage, et désespérés d'obtenir quelque connectivité que ce soit. Le moment est venu de leur tenir tête, je vous en prie.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Tribe.
    Nous allons maintenant passer à M. Lawford.
    Vous avez la parole pour trois minutes.
    Le Centre pour la défense de l'intérêt public se porte à la défense des intérêts des consommateurs depuis plus de 40 ans dans le domaine du droit et de la politique des communications. Ce Comité ne peut pas empêcher Rogers de faire l'acquisition de Shaw. Les fusions sont régies par la Loi sur la concurrence. Le CRTC approuve les transactions dans le domaine de la distribution de radiodiffusion et ISDE approuve les transferts de spectre sans fil. Ce que ce Comité peut faire en revanche, c'est stopper la prochaine transaction et contribuer à freiner celle-ci jusqu'à ce qu'une réglementation visant à soutenir une nouvelle concurrence voie le jour.
    Si ce Comité est troublé par les témoignages entendus concernant cette transaction, il peut formuler des recommandations, et le Parlement peut promulguer des modifications clés susceptibles de stopper la prochaine fusion. Il suffit de révoquer l'article 96 de la Loi sur la concurrence, la soi-disant disposition relative à la « défense fondée sur les gains en efficience ».
    La défense fondée sur les gains en efficience est une source d'embarras pour le Canada. Aucun autre pays comparable sur le plan économique n'a adopté ce type de défense pour les sociétés, une défense qui leur permet effectivement de fusionner, et ce, même si la concurrence s'en trouve réduite. La défense fondée sur les gains en efficience est une disposition indépendante dans la loi. Elle peut être éliminée de la Loi sur la concurrence sans que cela n'entraîne aucun effet, hormis celui d'exiger simplement des entreprises qui veulent fusionner de montrer que leur fusion n'empêchera ou ne réduira pas la concurrence. Abrogez l'article 96.
     Quant à cette transaction, ce Comité peut recommander que le ministre de l'ISDE et le commissaire de la concurrence tiennent des examens et approuvent les transactions d'ici à ce que deux décisions importantes en matière de réglementation soient prises par le CRTC. Ces décisions devraient mettre la table pour les prochains concurrents et probablement contribuer à réduire les effets anticoncurrentiels de cette transaction.
    La première décision porte sur les exploitants de réseaux mobiles virtuels ou ERMV. Si le CRTC autorise de tels concurrents chez les ERMV, les consommateurs auront la possibilité de changer de fournisseur et d'aller vers un concurrent autre que l'un des trois plus grands fournisseurs de services mobiles. Toutefois, si cette décision impose aux ERMV des restrictions inacceptables, alors il n'y aura pas de concurrence dans les services sans fil pour remplacer Shaw et Freedom dans une bonne partie du Canada.
    La deuxième décision porte sur les services filaires de gros qui distribuent Internet par le biais de lignes d'abonnés en fibres optiques. Le CRTC a fixé un tarif pour cette nouvelle méthode de distribution qui permet aux concurrents offrant des services sur lignes filaires de s'attaquer aux entreprises dominantes fournissant des services Internet comme Rogers. En son absence, la concurrence de Rogers va fléchir, surtout dans l'Ouest.
    Merci beaucoup, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

  (1540)  

    Merci beaucoup.
    Notre prochain témoin est M. Kaplan-Myrth.
    Vous avez la parole pour trois minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente et mesdames et messieurs. Je suis ravi de l'occasion de m'exprimer devant vous.
    Je m'appelle Andy Kaplan-Myrth, et je suis le vice-président, Affaires réglementaires et distributeurs de TekSavvy, un fournisseur canadien indépendant de services Internet, de téléphonie et de télédiffusion avec des équipes qui travaillent maintenant à partir de leur domicile dans le sud-ouest de l'Ontario et depuis Gatineau, au Québec.
    TekSavvy offre ses services à ses clients depuis plus de 20 ans. Aujourd'hui, nous comptons plus de 300 000 clients dans chaque province, et nous sommes fiers d'offrir d'excellents services abordables et axés sur la clientèle.
    Je suis heureux de revenir devant le Comité aujourd'hui pour vous faire part du point de vue de TekSavvy sur les effets et les conséquences de la fusion de Rogers et de Shaw.
    En l'absence d'une surveillance et d'une application rigoureuses de la réglementation, il est clair qu'une réduction de la concurrence et une consolidation plus poussée de la position dominante sur le marché entraîneront des résultats encore pires pour les utilisateurs d'Internet et de la téléphonie mobile aux Canada. En fin de compte, cette fusion proposée souligne l'importance de la réglementation et de la surveillance du contexte canadien des télécommunications afin de protéger et de promouvoir la concurrence.
    Cela étant dit, ce bouleversement titanesque dans l'industrie canadienne des télécommunications se présente avec des occasions d'améliorer les choses. De manière générale, les préoccupations suscitées par cette fusion tiennent à l'apparente tension qui existe entre les investissements et la concurrence, mais il s'agit d'une fausse dichotomie. Ce dont il est vraiment question ici, c'est de deux aspects différents: bâtir des réseaux et fournir des services. Les mêmes entreprises font souvent les deux, mais il s'agit de deux secteurs d'activité distincts associés à des considérations différentes sur le plan des investissements et de la concurrence, et bon nombre de ces enjeux deviennent plus clairs lorsque l'on réfléchit bien pour déterminer s'ils ont trait à la construction de réseaux ou à la fourniture de services.
    Les préoccupations relatives à la concurrence eu égard à cette fusion concernent principalement l'assurance de pouvoir offrir des services concurrentiels aux consommateurs. À ce titre, la fusion de ces deux entreprises énormes et intégrées verticalement doit être subordonnée à des mesures réglementaires efficaces et efficientes qui favorisent la concurrence pour des services et qui protègent les intérêts des consommateurs dans le secteur canadien des télécommunications. Plus précisément, le CRTC doit prendre ses décisions, les faire respecter et s'engager à protéger la concurrence axée sur les services en mettant en place les tarifs de gros de 2019, en assurant l'accès à la fibre optique et en réglementant les services mobiles de gros.
    Finalement, le Bureau de la concurrence doit se montrer vigilant en protégeant les consommateurs et la concurrence contre les abus de ceux qui occupent une position dominante sur le marché. Plus précisément, la défense fondée sur les gains en efficience ne fonctionne que si le Bureau veille à ce que les parties qui possèdent le pouvoir de marché n'en abusent pas et ne se servent pas de cette efficience pour évincer la concurrence.
    En terminant, pour accélérer la construction de réseaux pour les gens qui vivent dans des régions mal desservies, le plan du Canada pour la large bande universelle doit comprendre la concurrence par définition, et il doit rejeter la fausse dichotomie entre investissements et concurrence. Comme continue de le démontrer TekSavvy, il est possible d'avoir les deux.
    Merci encore. Je suis impatient de répondre à vos questions.

  (1545)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant commencer les séries de questions. Le premier tour de questions d'une durée de six minutes commence par M. Dreeshen.
    Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci beaucoup à nos témoins. Cet après-midi nous apprenons des choses très intéressantes.
    Nous nous penchons sur le plus important accord de fusion de toute l'histoire du Canada. Il aura des répercussions profondes pour tout le monde.
    J'aimerais commencer ma série de questions par OpenMedia. En 2018, le vice-président de Rogers Communications, Phil Lind, a déclaré aux médias d'information que le secteur des télécommunications du Canada était mûr pour une consolidation dans le contexte de transactions se chiffrant en milliards de dollars conclues par ses pairs de l'industrie. Il faisait allusion à ce qui se passait au sud de la frontière.
     Il a poursuivi en ajoutant que le gouvernement canadien avait conservé un trop grand nombre de joueurs dans l'industrie en offrant des incitatifs tels que le spectre sans fil à bon marché. Il a aussi [Difficultés techniques] en raison de notre population laquelle, selon lui, est insuffisante pour justifier un si grand nombre de distributeurs de services de télécommunication.
    Je me demandais ce que vous pensiez de ces commentaires. Peut-être pourriez-vous nous faire part de votre point de vue quant à la tendance vers la consolidation et à ce que disait M. Lind au sujet du trop grand nombre de joueurs dans l'industrie pour une si petite population, étant donné que les témoins que nous avons entendus lundi ont exprimé le même avis.
    Permettez-moi respectueusement d'exprimer mon désaccord. Si on regarde le marché des services sans fil du Canada en particulier, dans un rapport qui vient tout juste d'être publié cette semaine, on apprend encore une fois que nous payons les tarifs les plus élevés dans le monde, et que la corrélation directe est le nombre de fournisseurs que nous avons.
    Laisser entendre que le fait d'avoir trois fournisseurs d'envergure nationale et un quatrième distributeur qui éprouve de la difficulté à survivre est un trop grand nombre de joueurs révèle qu'ils sont à l'aise avec le monopole. Je ne pense pas que ce soit le genre de monde que nous essayons de bâtir. Je ne pense pas que ce soit le réseau de télécommunications et le système dont nous avons besoin.
    Lorsque l'on regarde ce qui s'est passé avec la consolidation aux États-Unis, ainsi qu'avec la fusion de Sprint et T-Mobile, je trouve que c'est un autre bon exemple de ce à quoi on peut s'attendre ici. Nous avons vu les pertes d'emplois. Nous avons vu la hausse des prix, et aucune des promesses qui ont été faites n'a été tenue. Un thème récurrent de ces fusions est qu'il y a beaucoup de discussions pour les justifier au moment où elles sont en train de se réaliser, mais au bout du compte, c'est uniquement une question d'argent.
    Je pense qu'ils ne seraient pas d'accord. Ils laissaient entendre que les prix ne sont pas les plus élevés, mais qu'ils se situent au milieu de peloton, mais je vais réserver cet exemple pour une autre discussion.
    Cette question s'adresse, encore une fois, à OpenMedia. Quelles leçons les Canadiens devraient-ils tirer, selon vous, de l'acquisition de Manitoba Telecom Services par Bell en 2017? Dans ce cas, bien entendu, on s'était dessaisi de certains actifs comme certains points de vente et le spectre à rabais. Vous aviez mentionné à l'époque que cette transaction allait contribuer à l'érosion de la concurrence dans le secteur des télécommunications et, en définitive, contribuer à la hausse des prix des services.
    Quels ont été les résultats tangibles de cette acquisition, et qu'elle a été l'incidence globale sur les prix et sur la disponibilité des services?
    À l'époque, le Bureau de la concurrence avait déclaré que cette transaction aurait une incidence négative, mais il avait néanmoins laissé la transaction se réaliser. En ce qui a trait à certaines des questions dont vous avez discuté avec le précédent groupe de témoins concernant les modifications qui pourraient être apportées à la transaction pour la rendre acceptable, je trouve que la transaction entre Bell et MTS constitue un vrai bon exemple de ce qui ne fonctionne pas. C'est comme réarranger les fauteuils de pont sur le Titanic. Autrement dit, essayer de voir comment tripatouiller les marges de profit suffisamment pour se sentir plus à l'aise avec la décision, tout en sachant qu'au bout du compte, elles vont descendre.
    Lorsque l'on voit ce qui s'est produit avec Bell MTS.... Nous avons constaté les pertes d'emploi. Nous avons constaté qu'ils avaient promis qu'il n'y aurait pas de hausse de prix, mais pourtant, les prix ont monté. Toutes ces promesses visaient uniquement à favoriser la conclusion de la transaction. Les légères modifications qui ont été apportées en vue d'essayer de faire de Xplornet un concurrent n'ont rien donné parce que vous demandez même aux plus petits fournisseurs d'essayer de faire concurrence aux grands, alors que même le fournisseur régional n'y arrive pas. Je pense qu'essayer de découper la concurrence en entités toujours plus petites pour justifier la consolidation jusqu'à la limite maximale permise par la loi revient à faire exactement le contraire de ce que l'on veut faire, qui est de déterminer quel sera le résultat final que nous souhaitons obtenir en réalité et c'est un marché vigoureux.
    Lorsque vous parlez des fournisseurs régionaux, y compris de Shaw, vous oubliez de dire qu'ils ont bénéficié de la possibilité de faire l'acquisition de bandes du spectre à faible coût grâce aux portions du spectre mises de côté. Malheureusement, ces fournisseurs affichent parfois des antécédents décevants lorsque vient le moment d'investir et de déployer ce spectre dans les collectivités rurales. De fait, nous comprenons que Shaw a, jusqu'à maintenant, déployé seulement environ 8 % de ses avoirs en fréquences du service mobile, et ce, même après avoir acquis pour plus de 1,7 milliard de dollars de spectre à des prix fortement réduits en partant de l'hypothèse que l'entreprise allait entrer en concurrence avec les trois plus grands fournisseurs de services sur le plan des prix.
    Je suis curieux de connaître votre position à ce sujet. Devrait-on associer à la délivrance des licences une condition obligeant les fournisseurs à déployer le spectre sous peine de le perdre afin de voir à ce que les fournisseurs qui font l'acquisition de bandes du spectre les mettent au service de tous les Canadiens, y compris de ceux qui vivent en milieu rural? Que pensez-vous du principe « le spectre inutilisé sera perdu »?
    Je pense que cette disposition est vraiment importante, mais elle ne devrait pas s'appliquer seulement aux fournisseurs de bandes du spectre mises de côté. Au contraire, elles devraient s'appliquer à tous les fournisseurs. Si nous faisons en sorte que ces bandes du spectre deviennent disponibles, c'est en partant de l'hypothèse que ces collectivités seront desservies. Qu'il s'agisse du service 4G ou 5G, nous constatons que les gens sont très intéressés à acheter ce spectre, et pourtant nous ne voyons pas nécessairement les résultats dans toutes ces collectivités de manière générale. Je pense que c'est une chose que l'on devrait examiner de plus près à l'avenir.

  (1550)  

    Monsieur Kaplan-Myrth, vous avez dit « concurrence par définition ». Je me demande si vous ne pourriez pas nous fournir quelques exemples à ce sujet.
    Merci.
    Trop souvent, les politiques sont élaborées en ayant à l'esprit les grands titulaires, et le système que nous imaginons. Comment encourager la concurrence vient, dans bien des cas, comme une réflexion après coup. Concernant le modèle que nous avons actuellement, il existe bien des exemples individuels, mais les politiques s'appliquent au modèle en entier. Nous parlons à grande échelle des moyens d'encourager la construction de réseaux, mais en réalité ce dont il est question, c'est des grands titulaires plutôt que de la conception d'un système qui encourage la concurrence par définition, de sorte que les petits fournisseurs puissent eux aussi bâtir des réseaux et...
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    La prochaine série de questions commence par M. Jowhari.
    Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à tous les témoins. Vos interventions ont été très instructives.
    J'aimerais commencer par M. Kaplan-Myrth et TekSavvy, et poursuivre sur le sujet de la concurrence.
    Comme vous avez certainement entendu les précédentes interventions de Rogers et de Shaw devant notre comité — ou pris connaissance de ces interventions — vous savez probablement qu'ils ont déclaré que cette fusion ne contribue pas seulement à accroître la concurrence, mais qu'elle leur permettra aussi de prendre de l'expansion et d'investir dans les régions rurales, éloignées et autochtones.
    Voici ma question... Vous avez mis en opposition investissements et concurrence. Que pensez-vous que Rogers veut dire lorsque l'entreprise déclare que la concurrence est en hausse, et quel est votre point de vue à ce sujet?
    C'est la raison pour laquelle j'insistais sur la différence qui existe entre deux entreprises qui exercent leurs activités véritablement en parallèle, en bâtissant des réseaux d'un côté et en faisant concurrence à d'autres entreprises pour offrir des services de l'autre.
    Lorsque la majorité d'entre nous parle d'encourager la concurrence, je pense que l'on veut parler de l'expérience du point de vue de l'utilisateur final. Est-ce que les consommateurs ont le choix? Les prix sont-ils abordables? Les entreprises sont-elles concurrentielles du point de vue des prix, et est-ce qu'elles exercent véritablement une influence sur les prix des autres entreprises sur le marché?
    Lorsque Rogers et Shaw parlaient de la construction de réseaux et des gains en efficience résultant de la construction de réseaux, elles faisaient allusion à un autre genre de concurrence. Elles voient les autres fournisseurs intervenir et peut-être même accélérer les plans de construction des réseaux de sorte qu'elles puissent maintenir leur vitesse au fil du temps.
    Il est clair qu'il s'agit d'enjeux importants du point de vue de la concurrence, mais ce sont des enjeux différents. Lorsque vous élaborez des politiques et que vous réfléchissez aux mesures de protection à mettre en place pour protéger la concurrence, il est important de faire la distinction entre le genre de concurrence dont vous parlez afin que les politiques permettent d'atteindre les objectifs que vous vous étiez fixés.
    Plus précisément, je ne pense pas que le genre de concurrence que Rogers et Shaw voyaient à titre de résultat de cette fusion... Je ne pense pas que ce genre de concurrence entraînera de meilleurs services pour les Canadiens, des prix plus abordables et une plus forte concurrence pour les services. Il s'agit d'un élément différent.
    Merci. Je vais revenir vers vous, monsieur Kaplan-Myrth.
    Il a beaucoup été question de la décision prochaine du CRTC concernant les ERMV. Votre entreprise s'est beaucoup exprimée sur cette question. Théoriquement, si Rogers était disposée à laisser tomber son opposition à l'accès réglementé, est-ce que votre organisation appuierait cette fusion?
    Je suis désolé. Est-ce que vous voulez dire que l'une des conditions pour autoriser la fusion serait que Rogers accepte l'accès réglementé des ERMV?
    M. Majid Jowhari: Oui.
    M. Andy Kaplan-Myrth: Eh bien, je ne pense pas que premièrement nous soyons opposés à la fusion. Mais nous n'y sommes pas favorables non plus.
    Je m'inquiète plutôt du fait qu'une fusion de ce genre puisse se concrétiser et entraîner l'élimination d'un quatrième joueur et la création d'une autre société géante de télécommunications dotée d'un incroyable pouvoir de marché. Cela devrait servir à nous rappeler à tous pourquoi la vente de gros joue un rôle tellement important dans la promotion de la véritable concurrence en matière de couche de service et encourager le CRTC à élaborer des politiques qui encouragent vraiment la concurrence liée aux couches de services de communications.
    Pour ma part, il ne s'agit pas tant d'une condition pour que Rogers puisse concrétiser son projet, si elle était favorable aux ERMV. Je pense que ce serait formidable et que bon nombre d'entreprises verraient cela probablement comme une occasion favorable. Mais ce qui est plus important encore, c'est le simple fait que nous réalisons tous à quel point la situation de la concurrence dans les télécommunications est précaire. Cela me donne à penser que, vraiment, la seule solution à envisager est celle des ERMV.

  (1555)  

    J'aimerais vous poser une dernière question, monsieur Kaplan-Myrth.
    Du point de vue des investissements, lorsque cette fusion se concrétisera, si elle se concrétise, quelle incidence aura-t-elle sur les décisions d'investissement de votre entreprise dans les diverses régions du Canada?
    Je tiens à vous dire clairement que nos principaux investissements sont réalisés dans les environs de notre siège social qui est situé à Chatham-Kent, dans le sud-ouest de l'Ontario. Cette fusion n'aurait aucune incidence directe sur nos plans d'investissement qu'il s'agisse de bâtir un réseau de fibre ou un réseau fixe sans fil, mais il y a un aspect où Shaw et Rogers sont effectivement en concurrence l'une avec l'autre pour l'attention des concurrents et l'énergie des concurrents, et c'est sur les lignes filaires.
     Il ne s'agit pas seulement de Shaw et Rogers, mais de toutes les autres sociétés exploitantes de télécommunications sous-jacentes, les fournisseurs titulaires. Dans la mesure où certains fournisseurs nous offrent de meilleurs services ou de meilleurs tarifs, susceptibles d'attirer notre attention à cet égard, nous pourrions consacrer plus d'énergie en vue d'une expansion dans cette région du pays ou sur leur réseau.
    Donc cela contribue effectivement à stimuler la dynamique de la concurrence au Canada. Par ailleurs, il existe un risque très réel que cela puisse aplatir une partie de ce marché, et il n'y aurait pas ce genre de concurrence entre les régions ou encore entre Rogers et Shaw.
    Merci. Mon temps est écoulé.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Lemire, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais commencer par Mme Tribe, d'OpenMedia.
    D'abord, que pensez-vous de la 5G, chez OpenMedia? Cette technologie apportera-t-elle véritablement les solutions de branchement innovatrices qu'on nous annonce pour les communautés rurales, les communautés autochtones et les régions éloignées? La 5G comporte-t-elle des avantages réels pour ces régions?

[Traduction]

    Merci.
    Je pense qu'il y a un monde où le réseau 5G pourrait mener à beaucoup d'innovation pour les collectivités autochtones, éloignées et rurales. Il y a beaucoup de discussion quant à ce que ce réseau pourrait faire pour les collectivités agricoles, par exemple, et comment il pourrait véritablement aider nos industries agricoles. Je pense que l'inquiétude que j'entretiens, à l'instar d'autres personnes, concernant le réseau 5G, c'est que les promesses de ce qu'il pourrait faire pour le Canada rural sont très éloignées de l'étape à laquelle nous nous trouvons en réalité dans sa mise en oeuvre dans les régions rurales du Canada.
    De la même manière que nous avons vu toutes les autres technologies Internet démarrer dans les régions les plus densément peuplées et se déployer à partir de là, le réseau 5G suivra le même chemin et aura la même présence sur le marché. Les entreprises elles-mêmes nous ont confié avoir l'intention de mettre en place leur technologie 5G à partir de villes comme Toronto, Vancouver et Montréal, et de se déployer à partir de là.
    Une bonne partie de la conversation au sujet de ce qu'il peut faire dépend non seulement du fait que la technologie sera d'abord offerte à ceux qui disposent déjà du meilleur accès Internet mais aussi du fait que l'on dépendra de facteurs tels que la fibre optique en tant qu'ossature de base pour y arriver. Comme nous le savons d'après des conversations tenues antérieurement au sujet de l'infrastructure Internet, c'est loin d'être la réalité dans bon nombre de ces régions. Il y a loin de la coupe aux lèvres.

[Français]

    Conséquemment, vous craignez très concrètement que la fusion de Shaw et Rogers n'ait des répercussions majeures et négatives sur le prix des services.
    Pouvez-vous tenter de chiffrer les répercussions de cette fusion sur la facture des citoyens?

[Traduction]

    Il est difficile de prévoir des prix précis, même si tout le monde voudrait bien pouvoir le faire. Ce que Rogers a promis pour les téléphones cellulaires avec Freedom, par exemple — et cela ne concerne pas seulement les téléphones cellulaires, mais aura aussi une incidence sur les services Internet résidentiels — c'est qu'au cours des trois prochaines années, le prix pour les téléphones cellulaires avec Freedom demeurera exactement le même. Cependant, lorsque l'on regarde vraiment ce qui se passe sur le marché global de la téléphonie cellulaire, on constate que les prix ont commencé lentement à baisser au Canada, plus lentement qu'ailleurs dans le monde, mais tout de même, ils sont en baisse. Par conséquent, même en demeurant exactement là où nous sommes, les prix reculent et continuent de reculer. Freedom elle-même a contribué à pousser Bell, Telus et Rogers à réduire leurs prix.
    S'ils sont verrouillés, alors, et s'il n'y a aucune pression pour que les autres entreprises réduisent leurs prix, je pense que vous serez à même d'en voir les effets.

  (1600)  

[Français]

    Quelles sont vos attentes envers le CRTC et le Bureau de la concurrence quant à la possible acquisition de Shaw par Rogers?

[Traduction]

    J'espère qu'ils se pencheront sur cette question de près, et j'espère qu'ils comprendront à quel point cette décision est importante, et les répercussions qu'elle aura.
    Si on regarde en arrière comment la transaction Bell MTS s'est déroulée, ce n'est pas encourageant, parce que même si tous les signaux d'alerte sont apparus quant aux dommages que la transaction entraînerait, on l'a laissée se faire quand même.
    Toutefois, j'espère vraiment que le CRTC, le Bureau de la concurrence et le ministre et son cabinet vont tirer des enseignements des décisions précédentes et des erreurs passées.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je poserais la même question à M. Lawford, du Centre pour la défense de l'intérêt public.
    Quelles sont vos attentes envers le CRTC et le Bureau de la concurrence, dans le contexte actuel?
    Je m'attends à ce que le Bureau de la concurrence fasse une enquête assez approfondie. Pour notre part, nous serons là pour défendre les intérêts des consommateurs. Comme je l'ai indiqué dans mes remarques, au moyen d'un test assez rigoureux, il a été prouvé que cette grande transaction défavoriserait les consommateurs plus qu'elle ne favoriserait des gains en efficience pour les deux entreprises.
    Pour ce qui est du CRTC, son champ d'action dans le dossier est très limité: en fait, il ne doit que statuer sur la question cherchant à savoir si les deux compagnies peuvent échanger leurs services filaires. Cela ne change pas grand-chose. Il s'agit vraiment d'une revue de la distribution de radiodiffusion. Je ne m'attends donc pas à ce que le CRTC intervienne. J'espère surtout qu'il rendra plus tôt sa décision sur l'examen des services sans fil mobiles.
    C'est parfait, je vous remercie. Merci aussi de votre effort pour répondre en français.
    J'ai une deuxième question pour vous.
    Aucun signe ne démontre que Shaw se trouve en difficulté financière. Même si nous ne connaissons évidemment pas les raisons de la vente de l'entreprise, quelles raisons incitent Shaw à vendre ses activités à Rogers, selon vous?

[Traduction]

    Je vais répondre en anglais, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    La famille Shaw, bien entendu, est arrivée à une étape où elle pourrait vouloir retirer ses billes, et elle s'est assurée d'une place au conseil d'administration. Cela montre aussi, malheureusement, à quel point il est difficile d'attaquer le marché et d'être un quatrième joueur en importance au Canada. Je pense que c'est épuisant et que cela exige énormément de capitaux. Et même avec tous les avantages que cela représente d'être une entreprise de câblodistribution solide et imposante, on sent la pression. Toutefois, au bout du compte, ce n'est qu'une question de gros sous, c'est une énorme transaction, et ils souhaitent probablement seulement retirer leurs billes.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Notre prochaine série de questions commence par M. Masse.
    Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    J'ai déjà vu ce scénario auparavant, à commencer par le ministre Rock. Puis ce furent les ministres Robillard, Emerson, Bernier, Prentice, Clement, Paradis, Moore, Bains et maintenant, le ministre Champagne qui ont dû lutter contre cette menace depuis que je siège ici.
    Dans les années 1990, le Canada disposait d'un processus réglementaire. Est-ce que ce ne serait pas logique aujourd'hui de reprendre les rênes, et de remettre de l'ordre dans cette industrie, en ramenant — un peu comme dans d'autres services publics tels que les services d'approvisionnement en eau, puisqu'il s'agit d'un bien public — une certaine forme d'approche réglementaire pour certains services de base afin de calmer le jeu. D'autant plus que nous nous trouvons dans une période où il s'agit évidemment d'un service essentiel, comme on l'a compris avec la pandémie de COVID-19, pour l'éducation, l'inclusion sociale, et ainsi de suite.
    Comme l'a souligné Mme Tribe, on constate une grande disparité entre les collectivités autochtones aussi. Est-ce que ce ne serait pas une bonne idée de faire une pause et de s'assurer que des prix de base soient insérés dans nos processus réglementaires?
    Je vais m'adresser d'abord M. Lawford, puis à Mme Tribe.

  (1605)  

    Soulever la question, à savoir s'il est préférable d'adopter une réglementation des prix, et je pense que c'est ce que vous êtes en train de suggérer, ou au moins d'imposer un forfait abordable pour les Canadiens à faible revenu n'a pas été retenu par le CRTC depuis que la nouvelle loi est entrée en vigueur, en 1993. Il y a eu de nombreuses audiences depuis que le CRTC a affirmé ne pas vouloir se lancer dans la fixation des prix. Je pense que ce serait un choc, et que cela exigerait du gouvernement qu'il fasse savoir au CRTC que cette politique doit être envisagée de nouveau. Dans la mesure où vous pouvez faire cela au Parlement, je serais très favorable à ce que le gouvernement fasse cet énoncé de politique, peu importe qui formera le gouvernement.
    Pour ce qui est des forfaits abordables, nous les réclamons depuis des années parce que les services cellulaires, en particulier, sont hors de portée de nombreux Canadiens, et qu'il nous faut une subvention pour ces gens.
    Madame Tribe.
    Je pense que vous avez soulevé deux importantes questions. La première est le prix, et la seconde est le service. Lorsque l'on regarde les collectivités éloignées et les collectivités autochtones, ces dernières vont souvent de pair, mais très souvent, les services sont très coûteux parce que ces régions sont tellement mal desservies. Le service proprement dit n'est pas disponible. Je pense que c'est à cet égard que nous souhaitons que le gouvernement appuie la construction de l'infrastructure.
    Dans cette transaction, il y a beaucoup de discussions et de promesses, mais absolument aucune reddition de comptes. Il n'y a aucune transparence quant à ce qui est prévu actuellement ou à ce qui pourrait être différent si cette transaction était acceptée, si ce n'est que cela pourrait être avantageux et que c'est une chose dont nous avons désespérément besoin.
    L'une des choses les plus importantes que nous pourrions faire au sujet des prix dans les collectivités mal desservies ce serait de veiller à ce qu'elles aient au moins l'accès. Une fois que vous avez l'accès, si on regarde le nombre de fournisseurs dans le régime de services de gros qui sont désormais disponibles, les genres de choix différents que les gens peuvent faire, c'est très différent que d'en être réduit à un service d'accès par réseau commuté ou à un fournisseur unique de services par satellite. Je pense que cela pourrait faire une grande différence, en plus de faire en sorte que l'on mette en place des mécanismes liés à l'abordabilité dans les régions urbaines aussi.
    Ce que l'on perd souvent de vue dans cette conversation, c'est que l'utilisation d'un droit de passage public, que ce soit sur terre ou dans les airs, est un privilège et non un droit. Il appartient à la population canadienne et, en fin de compte, nous contrôlons entièrement la façon dont nous voulons l'exercer dans notre société et nos collectivités.
    Monsieur Lawford, vous avez parlé en particulier de la défense fondée sur le gain en efficience. Je ne suis pas sûr que tout le monde soit conscient de cela, mais c'est archaïque. Si je ne m'abuse, je pense que nous sommes l'un des derniers pays à avoir cette relique, car c'est vraiment une excuse. Nous l'avons vu dans l'affaire du propane, par exemple, où les consommateurs ont vraiment été lésés en fin de compte et où la concurrence a été supprimée à cause, essentiellement, de ce nettoyage indispensable de la loi.
    La défense fondée sur le gain en efficience est une mesure que le Conseil canadien des affaires a demandée instamment d'inclure dans la Loi sur la concurrence lorsqu'elle a été révisée dans les années 1990. C'est un appendice malheureux que nous devrions vraiment supprimer, car nous sommes à peu près le seul pays de l'OCDE à avoir ce genre de défense.
    Ce qu'elle fait, c'est... Même si nous réagissons et prouvons qu'une fusion à quatre contre trois est mauvaise, même si nous nous présentons et déclarons que le contrôle des services filaires va maintenant être entre les mains de Bell, Telus et Rogers à l'échelle nationale et que ce n'est pas bon pour la concurrence, si Rogers démontre qu'elle va, en fait, économiser de l'argent en combinant les deux, avec ses dépenses en capital et ainsi de suite, elle gagne. C'est comme appuyer de la main sur la balance. Il nous est impossible de contrer cela à moins de faire un exercice de preuve assez difficile, et la Cour suprême a rendu les choses encore plus difficiles récemment dans une affaire appelée Tervita.
    Nous essaierons, mais c'est un sujet que le Parlement devrait réexaminer.
    À Mme Tribe, j'ai une grande confiance dans les capacités du Bureau de la concurrence. Il y a des femmes et des hommes excellents qui y travaillent et qui font un travail formidable.
    Cependant, ils se sont présentés à différents moments — je n'ai pas besoin de relire tous les ministres — pour demander plus de ressources ou de meilleures ressources.
    Je m'inquiète du fait qu'ils ne disposent pas des outils nécessaires pour approfondir leurs connaissances et être respectés. Avez-vous des préoccupations à ce sujet, ou suis-je simplement du mauvais côté sur ce point particulier?
    Non, je suis d'accord avec vous.
    Je pense qu'il est plus que temps de se pencher sur la Loi sur la concurrence, sur les pouvoirs du commissaire à la concurrence et sur ce que le Bureau est en mesure de faire pour examiner ce que signifie réellement la concurrence dans ce pays.
    Lorsque vous regardez un certain nombre d'industries, les télécommunications étant un excellent exemple, il y a une longue histoire d'oligopoles ou de monopoles sanctionnés par le gouvernement qui ne fournissent pas la concurrence que nous aimerions croire que le Bureau est là pour soutenir.
    Je sais que je vais manquer de temps, alors très rapidement, M. Andy Kaplan-Myrth, est-ce que TekSavvy va participer à la vente aux enchères du spectre qui aura lieu prochainement? Avez-vous une opinion sur la question de savoir si cela devrait être retardé?

  (1610)  

    Je pense que mon temps est écoulé, et je ne suis pas sûr de pouvoir en parler. Je vais en rester là, et nous pourrons peut-être y revenir.
    Je vais essayer de revenir à vous la prochaine fois.
    Merci, madame la présidente. Je vous en remercie.
    Je crois que c'était un cas « sauvé par la carte ». Je pense qu'il jouait cette carte.
    Pour notre prochaine série de questions, nous allons commencer par M. Kelly.
    Bienvenue à INDU. Vous avez la parole pendant cinq minutes, monsieur.
    Merci. C'est un plaisir d'être ici aujourd'hui.
    Je suis député de Calgary et j'ai reçu des dizaines de courriels d'électeurs qui s'inquiètent de cette transaction. Certains d'entre eux sont préoccupés par la concurrence. D'autres s'inquiètent de l'impact que cette transaction aura sur l'économie locale et l'emploi à Calgary. De nombreuses personnes qui travaillent pour Shaw vivent dans ma circonscription et dans toute la ville. Je dirais cependant que la majeure partie des courriels expriment des préoccupations au sujet des deux.
    J'aimerais demander à n'importe lequel de nos témoins aujourd'hui de commenter l'argument public avancé par les partisans de la transaction. Il a été dit et soutenu que le bilan de l'entité fusionnée aura la force de faire les investissements nécessaires pour fournir la 5G, que l'emploi sera maintenu à Calgary et, en fait, qu'il y aura toutes sortes de nouvelles possibilités d'emploi et qu'en fin de compte, dans cet accord, les consommateurs seront protégés. En particulier, les forfaits de base ne pourront pas augmenter pendant trois ans. Certains diront cependant que toute annonce de fusion en présente naturellement un portrait positif.
    Je demanderais à l'un ou l'autre de nos témoins de commenter la crédibilité de ces affirmations et de dire si une fusion de cette nature est nécessaire pour que cette entité ait le pouvoir financier de faire les investissements nécessaires dans la 5G.
    Vous pouvez commencer, monsieur Lawford.
    Si vous le permettez, je dirais simplement que la plupart du temps, lorsque les entreprises fusionnent et qu'elles parlent de gains en efficience, cela touche les emplois. Des gens seront licenciés. Cela ne se produira peut-être pas au cours des deux ou trois prochaines années, mais c'est le temps qu'il faut généralement à deux organisations pour s'unir, donc je ne pense pas que l'emploi sera garanti, quoi qu'on dise.
    En ce qui concerne les économies qu'elles pourraient réaliser sur le plan du matériel et ce genre de choses, on ne fait en réalité que remplacer une chose par une autre.
    Vous vous êtes également interrogés sur les personnes qui appelaient et disaient s'inquiéter de la hausse des prix. Il faut aussi prendre en compte le fait que les prix vont aussi augmenter pour les utilisateurs de Telus et de Bell, car lorsqu'il n'y a que trois entreprises sur le marché, rien ne les lie aux prix plus bas que Freedom offrait. Les gens de Freedom seront gelés à cette offre, mais vous ne l'obtiendrez jamais. Ce sera seulement pour les gens qui l'avaient déjà. Je pense que peut-être certains de vos électeurs réagissent à cela.
    Je suis d'accord.
    Nous avons entendu je crois des promesses de création de nouveaux emplois. Je serais curieuse de savoir s'il s'agit d'emplois permanents, à temps plein, sur lesquels les gens peuvent compter pour faire carrière, ou s'il s'agit d'emplois temporaires contractuels servant à faire la transition de certains éléments de matériel pour rendre leur réseau compatible.
    Nous avons une grande collectivité dans l'ouest du Canada à OpenMedia, et nous avons reçu des milliers de lettres de personnes qui s'inquiètent beaucoup par ce que cela signifie pour les emplois et l'accessibilité financière. Je pense que c'est une préoccupation assez universelle, en particulier dans l'ouest du Canada, sachant qu'il est très peu probable que les entreprises soient disposées à maintenir deux services financiers et tout le reste de leurs activités en double.
    Pour ajouter à l'argument de M. Lawford sur la signification des fusions, elles sont à la recherche d'efficiences. Elles ne génèrent pas de nouveaux emplois.
    Je me demande à quel point les commentaires des électeurs seraient différents si nous avions une concurrence robuste fondée sur le commerce de gros, c'est-à-dire si nous avions beaucoup de fournisseurs différents offrant des services aux clients, de sorte qu'ils ne se contentent pas d'acheter leur service chez Shaw ou Telus en se demandant où ils vont se retrouver. Pour être clair, TekSavvy a des clients à Calgary et dans toute la zone de couverture de Shaw, tout comme d'autres fournisseurs de gros, mais toute cette structure s'est vraiment effondrée au cours des cinq dernières années. Nous avons essayé d'obtenir du CRTC qu'il la consolide. Nous avions une concurrence beaucoup plus forte, des prix plus bas et beaucoup d'options réalistes, alors je crois que vous n'entendriez probablement pas les mêmes préoccupations de la part des électeurs du côté de la concurrence.
    Je ne pense pas pouvoir me prononcer autant sur l'emploi, ou du moins je n'ai pas grand-chose à ajouter à ce que M. Lawford et Mme Tribe ont déjà dit à ce sujet.

  (1615)  

    Je vous remercie. Ce sont d'excellentes réponses. Oui, aucune annonce de fusion n'a jamais commencé par: « Super, nous avons l'occasion d'augmenter nos prix et de faire profiter nos actionnaires de ces revenus supplémentaires. » Je pense que c'est de là que viennent beaucoup de ces préoccupations.
    Je ne sais pas si j'ai le temps de poser une autre question, madame la présidente.
    Malheureusement, il ne vous reste que trois secondes.
    Très bien, je vous remercie.
    Merci beaucoup, monsieur Kelly.
    Notre prochaine série de questions va à Mme Jaczek.
    Vous avez la parole pendant cinq minutes, madame.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos témoins de se présenter une fois de plus devant notre comité.
    Je vais revenir un peu sur ce que disait M. Kaplan-Myrth. Lorsque nous avons écouté Rogers et Shaw plus tôt cette semaine, il était clair que ce que j'avais toujours considéré comme de la concurrence, et ce que je pense que la plupart des consommateurs considèrent comme de la concurrence, c'est-à-dire que de nombreux joueurs se font concurrence pour le même bassin de clients, était considérée de façon très différente par Rogers et Shaw. En fait, l'un des représentants de Rogers a utilisé le terme « concurrence dynamique ». J'ai essayé de faire des recherches à ce sujet. Je trouve cela assez déroutant.
    Monsieur Lawford, pourriez-vous peut-être développer ce concept de concurrence dynamique? Rogers semblait l'utiliser pour affirmer qu'il y avait une concurrence accrue.
    À mon avis, c'est un terme de charabia commercial. Il n'y a pas vraiment de signification. Je crois qu'ils pensent qu'ils seront plus grands et mieux capitalisés et, par conséquent, qu'ils pourront déployer des services au rythme qu'ils veulent, où ils veulent et quand ils veulent, parce qu'il y a moins de joueurs et qu'ils n'ont pas à se tourner vers un quatrième concurrent sur le marché et à détourner des ressources.
    C'est ce que ces gars-là appellent la concurrence dynamique, je crois. C'est un contrôle accru de la concurrence.
    En d'autres termes, avec moins de joueurs, ils peuvent éventuellement accéder à une plus grande part du gâteau qui est là, essentiellement. C'est ainsi que j'ai fini par l'interpréter. Diriez-vous que c'est ainsi que cela pourrait se terminer?
    Je pense que vous avez interprété ce terme aussi bien que quiconque.
    Je vous remercie.
    Étant donné que la défense fondée sur le gain en efficience existe toujours dans la Loi sur la concurrence, et étant donné que Rogers affirme qu'en tant que société plus grande et mieux capitalisée, elle sera en mesure d'investir dans la 5G, avec tous les engagements qu'elle a pris et qui se trouvent sur son site web, etc., comment...
    Y a-t-il une façon pour le Bureau de la concurrence, nonobstant cette défense fondée sur le gain en efficience, de poser comme condition que Rogers déploie effectivement les engagements en matière de 5G qu'elle a pris envers les collectivités éloignées et les communautés autochtones? Serait-ce une condition qui pourrait être imposée dans le cadre de cette acquisition?
    Oui. Le Bureau de la concurrence, lorsqu'il conclut un accord avec des sociétés qui fusionnent, peut poser des conditions. Il peut faire un suivi habituellement jusqu'à cinq ans après. Il pourrait imaginer n'importe quelles conditions à mettre ici.
    Je dirais simplement qu'en ce qui concerne la défense fondée sur le gain en efficience, le Bureau de la concurrence pourrait également l'emporter. Si les prix augmentent dans l'ensemble de l'industrie, c'est ce que l'on appelle une perte de poids mort et cela va du côté du consommateur dans cette balance des gains en efficience. De plus, si les actionnaires de Rogers obtiennent beaucoup plus d'argent, eh bien, qui possède les actions au Canada? Ce sont généralement les personnes qui se trouvent dans le quintile supérieur des revenus. Cela est considéré comme une perte pour les Canadiens à faible revenu. Cela vaut aussi pour les consommateurs.
    Le Bureau de la concurrence pourrait conclure que le gain en efficience est en fait du côté des consommateurs et refuser l'entente. C'est ce qu'il a fait avec Bell et MTS, mais à la fin, il a négocié une entente de façade avec Xplornet, qui était une parodie. Il pourrait adopter une ligne dure. Votre comité, s'il mentionne quelque chose au sujet de la défense fondée sur le gain en efficience, pourrait armer d'acier l'échine du Bureau de la concurrence.
    C'est rassurant pour nous, dans une certaine mesure. Il est difficile de voir qui diable est pour cette fusion, à part les actionnaires et les familles concernées. Comme Mme Tribe l'a montré avec sa pétition et tout cela, c'est clair. Je n'ai entendu personne se prononcer pour. Il est rassurant de constater que le Bureau de la concurrence peut, dans une certaine mesure, équilibrer les intérêts divergents.
    Madame Tribe, comment vous sentiriez-vous s'il y avait des conditions comme celles que M. Lawford a décrites? Seriez-vous satisfaite d'une manière ou d'une autre?

  (1620)  

    Il faudrait que je sois très créative dans le nombre de conditions que je pourrais proposer pour trouver quelque chose qui compenserait suffisamment pour que cela vaille la peine. Je crois que nous sommes tellement loin de là où nous devons être dans les circonstances actuelles qu'essayer de prendre autant de mesures créatives pour éviter de reculer est un peu excessif.
    Je suis désolée. Nous n'avons plus de temps.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup. C'est la première fois qu'un témoin me dit que son temps est écoulé. C'est rafraîchissant.
    Notre prochaine série de questions va à M. Lemire.

[Français]

    Vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, madame la présidente. Je vais tenter d'avoir la même rigueur.
    Ma question s'adresse à M. Kaplan-Myrth, un autre habitué de notre comité. Je vais lui poser une question que je lui ai posée en décembre.
    Comment le gouvernement fédéral pourrait-il favoriser le maintien ou la croissance d'un quatrième joueur dans les différents marchés de télécommunications au Canada? Je parle évidemment du gouvernement, et pas nécessairement du Bureau de la concurrence ou du CRTC.

[Traduction]

    Le quatrième joueur est vraiment la mauvaise stratégie. Tant que nous aurons cette stratégie consistant à favoriser un quatrième acteur pour introduire un certain degré de concurrence, nous vouons vraiment le système à l'échec. Nous serons à une fusion près de l'effondrement complet de la concurrence. Un quatrième acteur peut suffire à influencer les prix dans une certaine mesure, mais ce n'est pas une concurrence robuste qui peut survivre à des transactions majeures comme celle-ci. Ce ne sera certainement pas la seule transaction de ce genre à l'horizon.
    Que peut faire le gouvernement pour encourager un quatrième acteur? Je pense que c'est la mauvaise stratégie. Ce n'est certainement pas ce que j'ai décrit comme une concurrence à dessein. Je pense plus tôt que le gouvernement doit consacrer son énergie à encourager d'autres formes de concurrence pour les services, afin que la question du quatrième acteur ne devienne pas un obstacle. Ce n'est vraiment pas l'objectif.

[Français]

    Alors, quel rôle veut jouer TekSavvy pour favoriser la meilleure offre de services et la meilleure abordabilité possible dans la situation présente? Quelles possibilités voyez-vous dans le contexte des possibles conséquences de cette fusion?

[Traduction]

    Le CRTC examine actuellement les tarifs finaux qui représentent la majeure partie de ce sur quoi une entreprise comme TekSavvy compte actuellement. Ce sont les tarifs de gros réglementés pour la plupart de ces services. Ces tarifs font l'objet d'un appel depuis des années. Je n'ai pas le temps d'entrer dans les détails, mais si le CRTC finalise ses tarifs pour 2019, TekSavvy et beaucoup d'autres concurrents utiliseront ces tarifs pour baisser leurs prix, ce qui aura un effet sur les prix d'Internet dans tout le Canada. Cela fera baisser les prix dans l'ensemble du pays.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Notre prochaine série de questions va à M. Masse. Vous avez deux minutes et demie, monsieur.
    Merci.
    À monsieur Lawford, puisque vous avez mentionné la décision du CRTC concernant les exploitants de réseaux mobiles virtuels, ou ERMV, vous pourriez peut-être souligner un peu plus l'importance de cette décision.
    Je ne blâme pas Rogers. La compagnie a décidé ici même qu'elle allait acheter ou lieu de construire. C'est pourquoi elle s'en est prise à Cogeco, et cette décision est pertinente à cet égard. Vous pourriez peut-être souligner cela un peu. Je ne pense pas qu'on y prête suffisamment attention. Cela pourrait apporter une certaine concurrence, mais je pense que la vraie raison pour laquelle elle a tenté le coup avec Cogeco était de l'amener dans le giron avant qu'elle ne devienne un joueur.
    Oui, vous avez raison. La décision du CRTC sur les ERMV va probablement autoriser les exploitants de réseaux mobiles virtuels, mais ce sont les détails qui font la différence. Au cours de l'audience, on a laissé entendre que cette décision ne s'appliquerait qu'aux joueurs qui ont déjà des installations, comme Cogeco et TekSavvy, qui possèdent leur propre matériel et non à quiconque viendrait lancer un véritable réseau mobile virtuel, un ERMV léger.
    Si c'est le cas, je crois qu'il aurait été judicieux d'essayer d'éliminer Cogeco, qui possède des installations, puis Shaw, qui a également des installations. Ensuite, il ne resterait plus que de très petits ERMV à concurrencer, voire aucun. C'est peut-être la stratégie à adopter.

  (1625)  

    Oui, et cette décision va soit ouvrir... Je ne m'étais pas rendu compte que c'était en cours avant que vous ayez leur... Je ne suis pas toujours les audiences. Je vous en remercie.
    Madame Tribe, en ce qui concerne le groupe de témoins précédent, nous avons accueilli Vidéotron. La société a en fait vendu une partie de son spectre. Elle a accordé la licence de Toronto qu'elle avait à Rogers. Mobilicity a également disparu. Nous avons été en fait entourés de naufragés au cours des 10 dernières années avec des entreprises en démarrage et ainsi de suite. Vous dites en ce moment ne même pas fournir un certain type de... Je suppose que je l'utiliserai comme une approche de type Frankenstein: essayer de fractionner Shaw et espérer que les morceaux se collent à d'autres composants et créent de la concurrence, et nous aurons toujours moins... Est-ce bien cela?
    Oui, c'est exact. Lorsque nous regardons la façon dont les entreprises se présentent, vous pouvez les découper et essayer de les rétrécir en quelque chose qui n'est pas tout à fait trop grand, selon les normes, mais si elles sont déjà trop grandes au départ et que vous les laissez combiner leur capacité d'une façon ou d'une autre, cela mène quand même à un problème. Je pense que c'est la raison pour laquelle toute l'approche — lorsque vous parlez de Mobilicity ou de Wind, qui est maintenant Freedom, qui pourrait bientôt être Rogers... Tout cela repose sur cette approche de la concurrence fondée sur les installations, c'est-à-dire qu'une société doit elle-même construire pour pouvoir être concurrentielle.
    Je comprends les difficultés de la famille Shaw. Il est difficile de se mesurer à des entreprises comme Bell, Telus ou Rogers qui ont des décennies d'avance, et de repartir à zéro. C'est pourquoi, pour ce qui est de la vente en gros, c'est si important.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup.
    Notre prochaine série de questions s'adresse à M. Kelly.
    Vous avez la parole, monsieur, pendant cinq minutes.
    Je vous remercie.
    J'aimerais que les témoins nous disent dans quelle mesure cette transaction est soit un problème en soi — deux grandes entreprises qui fusionnent et qui risquent de réduire la concurrence —, soit plutôt le symptôme d'un problème plus vaste qui existait avant et qui existera après. Je parle du système de vente aux enchères de spectre de bandes et d'autres aspects de notre cadre réglementaire des télécommunications qui nous ont conduits à ce point.
    Vous pouvez tous les trois commenter ce sujet si vous le souhaitez.
    Puis-je commencer par dire que c'est à la fois oui et...? C'est à la fois le fait que l'accord précis est un problème et le fait qu'il montre la destruction de 15 ans d'efforts en vue d'avoir un quatrième acteur du sans-fil. C'est le dernier chapitre, et il va tuer la politique s'il est adopté. Cet accord particulier est mauvais, car en passant à trois acteurs, les prix vont augmenter. Il y a eu une fusion en Autriche, par exemple, qui a réduit les acteurs de quatre à trois, et les prix ont augmenté de 95 % les clients de celui qui a été racheté.
    D'accord.
    Je vais laisser les deux autres témoins s'exprimer rapidement, puis j'espère pouvoir poser une autre question.
    Je pense aussi que c'est les deux, mais ce qui m'inquiète le plus, c'est que c'est un problème systémique — ou des questions systémiques, je suppose — dans la mesure où, du côté du réseau, les entreprises peuvent profiter de gains en efficience parce qu'il vaut mieux qu'une seule entreprise construise un réseau plutôt que plusieurs, ou deux entreprises dans des régions différentes. Cela va certainement continuer à se produire. Ces réalités commerciales pourraient bien être le cas et il semble que cette industrie tende vers les monopoles et les duopoles, donc je pense que cela continuera à se produire.
    Du côté des services, si c'est un problème, c'est que nous n'avons pas vraiment soutenu la concurrence fondée sur la vente en gros pendant longtemps dans ce pays.
    Allez-y, madame Tribe.
    Je ne sais pas combien de temps nous avons, mais je suis d'accord pour dire que c'est les deux.
    Je crois que l'accord lui-même est un problème, et je pense que les résultats de l'accord sont un problème. Le fait que cet accord soit même proposé montre à quel point nos entreprises sont grandes et à quel point elles pensent qu'elles doivent devenir plus grandes encore pour pouvoir continuer à croître. C'est l'objectif de ces entreprises: la croissance et le profit continu. C'est ainsi qu'elles pensent. Elles pensent que c'est ce qu'elles doivent faire ensuite, d'après le système actuel.
    Elles pensent aussi que c'est bien. Elles pensent que c'est raisonnable, et elles pensent qu'elles peuvent réussir à le faire, ce qui est la raison pour laquelle elles s'y mettent en premier lieu et pourquoi elles en parlent avec autant de certitude. Je crois que c'est une autre chose qui soulève des préoccupations concernant notre Loi sur la concurrence et le Bureau de la concurrence. C'est le fait qu'elles ne pensent même pas qu'il y a des questions à se poser lorsqu'elles proposent une chose de cette envergure.
    Je fais de mon mieux pour essayer d'avoir l'esprit assez ouvert pour entendre tous les arguments pour et contre cette transaction. Je partage certainement les préoccupations que je reçois dans des courriels au sujet de la concurrence et de l'impact sur l'économie locale dans ma circonscription. La promesse avait été, je crois, de créer 500 nouveaux emplois dans le domaine de la recherche chez Shaw, mais en même temps, je suis vraiment frappé par le fait qu'il n'est pas possible de faire respecter par une entité quelconque ce qu'elle a déclaré au début d'une fusion.
    Le dernier mot sur la difficulté est l'investissement énorme qui est nécessaire pour nous permettre d'avoir un système 5G dans tout le Canada, un système qui se rend dans les collectivités qui sont si mal desservies et qui crée de la concurrence partout afin que nous puissions obtenir de meilleurs tarifs.
    Est-ce qu'une entité plus grande encore qui fera concurrence aux autres entités...? Devrait-on s'attendre à ce que cette grande et nouvelle entité puisse faire concurrence aux deux autres?

  (1630)  

    Je vais être brève et essayer de laisser du temps à M. Lawford.
    S'il y a des zones non desservies actuellement dans les régions rurales, éloignées et autochtones du Canada, c'est parce que les entreprises ont explicitement dit qu'elles ne trouvaient pas ces zones rentables. Il n'y a rien dans cet accord qui rende soudainement ces zones rentables à desservir, et c'est pourquoi nous avons le fonds universel pour la large bande. C'est pourquoi nous avons besoin de subventions et de soutien pour garantir la connectivité de ces régions.
    En fin de compte, il y a toujours des zones que ces entreprises ne voudront pas desservir, donc je crois que la taille de cette entreprise est une sorte de mégafusion ne change absolument rien à l'incitation financière à construire dans ces zones. C'est pourquoi nous avons besoin de programmes supplémentaires pour cela.
    Un mot rapidement. J'ajouterais que nous ne savons pas, si ces deux entreprises fusionnent, combien Shaw et Rogers auraient dépensé collectivement. Ce n'est pas clair d'après ce que les entreprises ont dit. Elles viennent de dire qu'elles allaient dépenser 2,5 milliards de dollars pour la 5G, mais combien Shaw et Rogers auraient-elles dépensé en l'absence d'un tel accord? C'est peut-être le même chiffre.
    Merci beaucoup.
    Notre dernière série de questions va à Mme Lambropoulos.
    Vous avez la parole pendant cinq minutes, madame.
    Merci, madame la présidente. Je n'utiliserai probablement pas la totalité de mes cinq minutes.
    J'aimerais poser une question à Mme Tribe. OpenMedia a commenté par le passé la transaction de Bell et MTS. Je me demandais si vous pouviez nous parler de ce qui s'est passé depuis en matière de concurrence au Canada et si nous avons vu une différence notable. Commençons par cette question.
    Le cas le plus clair que l'on puisse observer est celui des services de téléphonie cellulaire et des services sans fil au Canada. Quand on regardait les prix provinciaux comparativement à ceux ailleurs dans le pays, on constatait tout de suite une particularité dans certaines provinces, à savoir que là où il y a un transporteur régional ou un quatrième fournisseur, les prix sont plus bas. C'était le cas au Manitoba, en Saskatchewan et au Québec. Ensuite, on pouvait le constater dans certaines poches où Wind, ou alors Freedom, évoluaient à l'époque dans les zones urbaines de l'Ontario et de la Colombie-Britannique en particulier.
    Avec la vente de MTS à Bell, le Manitoba ne fait plus partie de cette catégorie. Il ressemble à toutes les autres provinces du pays qui ont Bell, Telus et Rogers et toutes leurs marques secondaires, et rien d'autre.
     Même dans les centres urbains où Freedom a cette empreinte, si l'on regarde Vancouver ou Toronto, on peut obtenir des offres différentes selon la région du pays où l'on vit. La même chose s'est produite au Manitoba, mais dès que MTS n'a plus été la quatrième option, les prix sont montés très rapidement.
    Pouvez-vous parler des obstacles qui existent actuellement pour les nouveaux concurrents? Pourquoi est-il si difficile pour eux de percer sur le marché?
    Cela dépend du type de nouveau concurrent. En ce qui concerne les services de téléphonie cellulaire en particulier, c'est la stratégie du quatrième transporteur qui s'appuie vraiment sur l'idée de la concurrence fondée sur les installations. Si l'on veut être un concurrent sur les réseaux de téléphonie cellulaire au Canada à l'heure actuelle, jusqu'à ce que le CRTC en décide autrement concernant les ERMV, il faut arriver au pays avec des milliards de dollars, il faut trouver un moyen de soumissionner sur le spectre pour pouvoir acheter les ondes hertziennes elles-mêmes afin de pouvoir construire le réseau, puis il faut commencer à construire des tours de téléphonie cellulaire d'un bout à l'autre du pays afin d'avoir un service à vendre aux clients. Il est impossible de gagner de l'argent avant d'avoir construit ce réseau.
    C'est pourquoi nous avons vu tant d'entreprises suivre la voie tracée par Wind, qui a été vendue à Shaw. Il est très difficile de décoller lorsque le délai entre le démarrage et le premier client est si long.
    Je sais, monsieur Kaplan-Myrth, que vous avez peut-être des commentaires à faire sur ce sujet également. Si vous voulez intervenir, vous pouvez le faire. Sinon, c'est tout pour moi.
    Du côté du mobile, d'une certaine manière, à cause de cette stratégie d'encouragement d'un quatrième acteur, il y a une surconstruction inefficace qu'il n'y a pas du côté du filaire. Avec la ligne filaire, pour surconstruire, il faudrait que plus de fils entrent dans une maison. À l'heure actuelle, il y a une compagnie de téléphone et une compagnie de câble. Cependant, si Rogers déployait un réseau à Calgary et faisait de la surconstruction, elle installerait de nouveaux fils dans les maisons des gens à Calgary. Ce serait clairement inefficace.
    D'une certaine manière, ce que nous avons fait sur le mobile, c'est encourager ce modèle de surconstruction très inefficace du quatrième acteur, comme si cela allait encourager suffisamment de concurrence. Comme Mme Tribe vient de le dire, cela fait baisser les prix sur certains marchés où un quatrième acteur devient assez puissant pour influencer les prix. Cependant, il est clair qu'en raison de la situation que nous observons actuellement avec Freedom, cela ne crée pas un modèle de concurrence durable et robuste, capable de survivre à la simple fusion de deux entreprises. Nous serons toujours à une transaction commerciale de la fin de la concurrence si c'est notre seule stratégie.

  (1635)  

    Merci beaucoup.
    C'est tout le temps dont nous disposons aujourd'hui. J'aimerais remercier les témoins...

[Français]

    Madame la présidente, si vous me le permettez...
    Voulez-vous invoquer le Règlement, monsieur Lemire?
    Oui. En fait, j'aimerais juste faire une intervention.
    Je sais que c'est théoriquement une semaine de relâche parlementaire, mais à un certain moment j'ai observé que près de la moitié des députés membres du Comité avaient leur caméra désactivée. Je nous invite donc à faire preuve de plus de rigueur. À un moment donné, un député conservateur qui n'est même pas membre du Comité était le seul conservateur à avoir sa caméra en fonction lorsqu'il a pris la parole.
    Je comprends que certains se trouvent dans un contexte familial. Cependant, par respect pour les gens que nous invitons, nous devons nous assurer que cela ne deviendra pas une habitude. Nous devons faire preuve de rigueur et nous montrer très présents et attentifs aux témoins.
    Je n'en fais pas une plainte, mais je pense que c'est important pour notre comité.
    Merci beaucoup, monsieur Lemire. C'est bien noté.

[Traduction]

    Sur ce, je remercie les témoins d'être à nouveau parmi nous aujourd'hui. C'est toujours un plaisir de vous avoir ici. Vous êtes presque des membres honoraires d'INDU à ce stade. Merci encore pour votre temps. Nous vous en sommes reconnaissants.
    J'aimerais féliciter tout particulièrement tous ceux qui nous aident à organiser ces réunions dans les semaines de circonscription.
    Mesdames et messieurs les députés, comme vous l'avez dit, je sais à quel point il est difficile de jongler entre le temps de circonscription et le temps de comité, etc.
    Cela étant dit, je vous rappelle gentiment que si vous n'avez pas remis les détails de vos témoins au greffier pour la prochaine étude, veillez à le faire, sinon nous aurons des réunions plus courtes.
    Sur ce, la séance est levée. Merci beaucoup.
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