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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 056 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 21 avril 2023

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Chers collègues, nous avons deux affaires à régler avant de passer aux témoignages. Vous avez reçu le rapport du Sous-comité hier. Est‑ce que quelqu'un peut en proposer l'adoption?
    Un député: Je propose l'adoption du rapport.
    Le président: Vous plaît‑il d'en discuter?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Nous devons aussi adopter le budget pour la courte étude d'aujourd'hui, qui nécessitera peut-être une deuxième réunion.
    Est‑ce que quelqu'un peut proposer l'adoption du budget d'étude?
    Un député: J'en propose l'adoption.
    Le président: Vous plaît‑il d'en discuter?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Nous pouvons maintenant passer à l'ordre du jour. Il se peut que je suspende la séance cinq minutes avant la fin de la deuxième heure parce que je veux faire le point sur quelques petits dossiers.
    Le Comité connaît bien les témoins qui sont ici aujourd'hui. Nous vous sommes reconnaissants de vous mettre à notre disposition.
    Mme Kerry Buck est professionnelle en résidence au Collège des Forces canadiennes et à l'École supérieure d'affaires publiques et internationales de l'Université d'Ottawa. Elle est aussi l'ancienne ambassadrice auprès de l'OTAN.
    Nous recevons également M. Ihor Michalchyshyn et M. Orest Zakydalsky, conseiller principal des politiques, du Congrès des Ukrainiens-Canadiens.
    Comme vous connaissez tous bien le Comité, je n'ai pas besoin de vous donner des instructions. Nous allons commencer par Mme Buck.
    La parole est à vous pour cinq minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup de m'avoir invitée à comparaître devant le Comité en personne; c'est maintenant une nouveauté pour moi.
    Je témoigne à titre individuel. Je vais vous présenter mon point de vue personnel et une analyse entièrement personnelle fondée sur mes 30 années d'expérience dans le domaine de la sécurité internationale.
    Mes observations seront axées sur deux aspects de la guerre: d'abord, l'évolution de la guerre au cours de la dernière année et ma perception de la situation actuelle; et ensuite, les défis ou les risques que l'Ukraine, l'OTAN et les alliés de l'OTAN, dont le Canada, auront à surmonter dans les prochains mois.
    Les 14 derniers mois de la guerre ont apporté leur lot de surprises. Plusieurs commentateurs, moi y compris, ont été surpris que le président Poutine décide de déclencher une guerre totale contre l'Ukraine. Je n'arrivais pas à comprendre quel intérêt la Russie avait à faire une chose pareille. Selon moi, si Poutine a déclaré la guerre à l'Ukraine, c'est entre autres parce qu'il croyait que l'OTAN était affaiblie et que la réponse de l'Occident ne serait ni forte ni unifiée. Poutine a été pris par surprise: il ne s'attendait pas à ce que la réponse de l'OTAN soit aussi ferme et cohérente, et son soutien de l'Ukraine aussi grand. La réaction de l'OTAN a aussi dépassé mes attentes.
    La guerre en Ukraine est encore relativement jeune. Je vais vous présenter ma perspective de l'évolution de la guerre depuis qu'elle a été déclenchée en février 2022. Elle est passée par plusieurs phases.
    Comme vous le savez, la phase initiale était celle où Poutine et de nombreux commentateurs occidentaux pensaient que la Russie s'en sortirait bien sur le plan militaire, qu'elle arriverait vite à ses fins et qu'elle serait même en mesure de remplacer très rapidement le gouvernement du président Zelenski. Heureusement, cette phase n'a pas duré longtemps; c'était une autre belle surprise.
    La phase suivante a été marquée par une période de succès et de gains rapides du côté de l'Ukraine, rendus possibles par la résilience des troupes ukrainiennes, le leadership inspirant de l'Ukraine et la mobilisation des citoyens ukrainiens. Je ne veux rien enlever aux efforts extraordinaires faits par l'Ukraine, mais il convient de souligner que ces résultats favorables sont aussi attribuables en grande partie au soutien de l'Occident. Plus précisément, les efforts de formation déployés après 2014 par le Canada, le Royaume-Uni et d'autres pays ont été essentiels, de même que le changement rapide de politique concernant la fourniture d'armes létales.
    Depuis 10 mois environ, la guerre est dans sa troisième phase. La Russie a commencé à concentrer ses troupes et son artillerie dans le Sud et l'Est du pays afin de consolider et d'élargir son contrôle sur le Donbass, ainsi que de créer une zone tampon autour de la Crimée.
    Quand la guerre est entrée dans cette phase, M. Jens Stoltenberg, secrétaire général de l'OTAN, a déclaré qu'il s'attendait à ce que la guerre dure très longtemps. Malheureusement, il avait raison.
    Depuis le début de la tentative brutale de la Russie d'envahir tout le territoire de l'Ukraine il y a 14 mois, des millions d'Ukrainiens ont été déplacés, des dizaines de milliers de personnes blessées et des milliers de civils tués. En outre, des infrastructures essentielles et des biens du patrimoine culturel ukrainiens ont été détruits, d'innombrables crimes de guerre ont été commis, et des sanctions sévères ont été infligées à la Russie. Dans une certaine mesure, il s'agit des sanctions les plus sévères imposées à un pays depuis la Deuxième Guerre mondiale.
    Les combats se poursuivent. L'Ukraine mène une nouvelle contre-offensive dans ce qui s'annonce une terrible guerre terrestre qui sera menée tout le long d'un front s'étendant sur 600 milles. La résolution du conflit semble très lointaine.
    Maintenant, dans quels secteurs la communauté internationale, l'OTAN et les alliés comme le Canada devraient-ils axer leurs efforts au cours des prochains mois? Selon moi, il y en a quelques-uns.
    D'abord, il est essentiel que la communauté internationale continue de soutenir l'Ukraine, tant dans la sphère politique que sur le plan logistique. De mon point de vue, le président Poutine a à sa disposition un plus grand nombre de personnes à envoyer à la guerre et il a moins à perdre que l'Ukraine. Il fait peu de cas du sort des soldats russes et il est enclin à en faire de la chair à canon. Une guerre d'usure à progression lente sert les intérêts de la Russie; en fait, c'est peut-être sa stratégie. C'est ce que la Russie affirme publiquement, dans l'espoir de voir le soutien de l'Occident commencer à s'effriter.
    Que doivent faire l'OTAN et les alliés de l'OTAN? Ils doivent adopter un plan stratégique à long terme pour fournir des armes et d'autres formes de soutien à l'Ukraine. Depuis un an, l'Ukraine reçoit du soutien à un rythme irrégulier: en réponse à une demande particulière du président Zelenski, les alliés se mettent en branle — parfois rapidement, parfois lentement — pour trouver le nécessaire, pour fournir la formation requise et pour envoyer le soutien sur le terrain. Cette approche diffère d'un plan stratégique assurant un apport prévisible de soutien. Pour renforcer la défense alliée, il faut accroître la production et l'approvisionnement. L'Ukraine épuise ses munitions et ses armes plus vite que l'Occident ne peut lui en fournir.
    Le plus important, c'est de faire en sorte que les forces armées ukrainiennes répondent aux normes de l'OTAN, ce qui créera un effet dissuasif important pour la Russie. Durant et après la guerre, des efforts doivent être déployés pour aider l'Ukraine à se défaire du matériel de l'ère soviétique et pour assurer son interopérabilité au sein de l'OTAN.

  (0850)  

    Au sujet du soutien politique envers l'Ukraine, je dirai simplement qu'il faudra absolument poursuivre les efforts diplomatiques. Déjà, des alliés de l'OTAN — la Hongrie et la Turquie — commencent à prendre des positions divergentes. Toutefois, il n'y a pas juste l'OTAN; il faut aussi renforcer le soutien interrégional à l'échelle mondiale, non seulement pour isoler la Russie, mais aussi pour lui faire subir de la pression. À cette fin, il faudra discuter avec des pays dont les positions ne correspondent peut-être pas aux nôtres, car ces pays feront de bons intermédiaires avec la Russie.
    Finalement, une autre question qui figurera probablement parmi les priorités à l'ordre du jour du sommet de l'OTAN à Vilnius, c'est l'avenir de la relation de l'Ukraine avec l'OTAN. Je m'attends à de rigoureux débats à ce sujet, mais je ne crois pas que des décisions seront prises. L'OTAN offrira‑t‑elle officiellement des garanties de sécurité à l'Ukraine? Des directions précises comprenant des mesures concrètes seront-elles données à l'Ukraine pour permettre son adhésion à l'OTAN? Les alliés préféreront-ils prendre des mesures intérimaires en attendant l'issue de la guerre?
    Je vais m'arrêter là. Durant la période de questions, nous pourrons parler d'autres secteurs de la sécurité et de la défense dans lesquels le Canada pourrait intervenir.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Est‑ce M. Michalchyshyn qui fera la déclaration au nom du Congrès des Ukrainiens-Canadiens?
    Je vous remercie. Mon collègue et moi allons partager le temps de parole, mais c'est moi qui vais commencer.
    Je vous remercie encore une fois de nous avoir invités à comparaître devant le Comité. Comme vous le savez, le Congrès des Ukrainiens-Canadiens est le porte-parole de la communauté ukrainienne du Canada. Il est important de comprendre qu'en réalité, la guerre et l'invasion ont commencé en 2014. C'est donc de l'escalade du conflit et de l'invasion à grande échelle tentée il y a un peu plus d'un an dont il est question quand nous parlons de la guerre.
    Nous tenons à souligner la grande générosité et gentillesse des Canadiens à l'égard des réfugiés ukrainiens ayant fui le pays pour se rendre au Canada, et leur soutien des réfugiés qui se retrouvent en Europe.
    Nous sommes ici pour parler des plus récentes violations des droits de la personne. À nos yeux, elles représentent la prochaine étape de l'évolution de l'invasion à grande échelle. Comme vous l'avez sans doute vu dans les médias, des organisations russes de défense des droits de la personne publient des témoignages vidéo de mercenaires appartenant au groupe Wagner, un groupe qui participe aux combats dans l'Est de l'Ukraine.
    Les vidéos sont fort troublantes. Il y a des citations dans mon texte, mais je ne veux pas vraiment vous les lire. Vous savez qu'il y est question de meurtres d'enfants et de civils. D'après les témoignages, ces gens sont entrés dans des maisons, des appartements et autres, et ils ont tué toutes les personnes qui s'y trouvaient. Dans une vidéo horrible, on voit des prisonniers de guerre ukrainiens se faire décapiter ou subir d'autres actes de violence. Le Bureau du procureur général de l'Ukraine affirme qu'il possède plus de 80 000 exemples de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité perpétrés par les forces d'invasion de la Russie.
    Le viol collectif, la torture, le meurtre, la déportation forcée et l'enlèvement collectif d'enfants font partie de la litanie de crimes commis chaque jour par la Russie dans sa guerre contre l'Ukraine. Nous sommes convaincus qu'il ne s'agit pas d'actes isolés de soldats voyous. Ce ne sont pas des actes spontanés; ce sont des actes délibérés, systémiques et planifiés. Nous considérons la Russie comme un État criminel et nous croyons qu'il faut l'isoler davantage de la communauté internationale. Le Parlement a déjà accepté à l'unanimité de reconnaître que la Russie commet des actes de génocide contre le peuple ukrainien et d'inscrire le groupe Wagner sur la liste des entités terroristes. Dans le même sens, nous vous exhortons à appuyer nos recommandations de désigner la Russie comme un État parrain du terrorisme et d'expulser les diplomates russes du Canada.

  (0855)  

    Je vais parler brièvement du soutien que le Canada et ses alliés devraient, et peuvent, offrir à l'Ukraine pour l'aider à gagner la guerre.
    Certes, l'aide apportée jusqu'à maintenant par le Canada et ses alliés est impressionnante. Combiné au courage remarquable du peuple ukrainien et à sa résistance acharnée à la guerre génocidaire de la Russie, ce soutien a permis aux forces armées ukrainiennes, dans un premier temps, de stopper les avancées russes; dans un deuxième temps, de renverser les gains réalisés par la Russie au début de l'invasion; et dans un troisième temps, de libérer des centaines de milliers de citoyens ukrainiens.
    Toutefois, il faut absolument accroître considérablement le soutien militaire et économique accordé à l'Ukraine pour assurer le succès de la contre-offensive qu'elle compte mener au printemps et à l'été.
    D'abord, le Canada et ses alliés doivent fournir plus d'armes lourdes à l'Ukraine. Il lui faut des chars de combat, des véhicules blindés de transport de troupes, des systèmes de défense aérienne, des systèmes de missile de plus longue portée, des systèmes de défense navale, de l'artillerie et les munitions qui vont avec ce matériel.
    Ensuite, l'Ukraine a besoin d'avions de combat à réaction pour protéger son espace aérien et pour continuer à empêcher la Russie d'acquérir la supériorité aérienne. Plusieurs de nos alliés, dont la Pologne et la Slovaquie, fournissent des MiG à l'Ukraine. Le Canada pourrait jouer un rôle essentiel en contribuant à la formation des pilotes ukrainiens sur les avions de combat de l'OTAN et en convainquant les alliés de fournir plus d'avions de combat à l'Ukraine.
    Finalement, pour assurer la sécurité du Canada, de nos alliés européens et de l'Ukraine, il faut un engagement soutenu d'augmenter la production et la fourniture d'armes et de munitions. Des investissements pluriannuels sont nécessaires pour veiller à ce que nous disposions des réserves requises pour repousser les agressions actuelles et futures de la Russie. Quand l'Ukraine aura remporté la guerre contre la Russie, la Russie demeurera un ennemi de l'Ukraine, un adversaire de l'OTAN et une menace pour la paix en Europe. Nous devons être prêts.
    En dernier lieu, je tiens à insister sur l'urgence des mesures que nous croyons que le Canada doit prendre. Plus le Canada et ses alliés attendent avant de fournir à l'Ukraine les outils dont elle a besoin pour gagner, plus de soldats et de civils ukrainiens seront tués ou blessés, et plus le prix à payer par le peuple ukrainien sera grand.
    Le Groupe consultatif sur la défense de l'Ukraine, formé des ministres de la Défense de quelque 50 pays favorables à l'Ukraine, se réunit aujourd'hui, à la base aérienne de Ramstein, en Allemagne, pour parler des prochaines mesures à prendre pour aider l'Ukraine à défendre la liberté. Nous espérons ardemment que les alliés de l'Ukraine, notamment le Canada, fourniront à l'Ukraine les outils nécessaires pour assurer sa victoire.
    Je vais m'arrêter là. Nous répondrons à vos questions avec plaisir.
    Merci.
    Je vous remercie.
    Monsieur Bezan, vous disposez de six minutes.
    Bonjour, et bienvenue aux témoins. Je suis ravi de vous revoir.
    J'aimerais approfondir un sujet que vous avez abordé tous les deux, à savoir l'approvisionnement.
    Une annonce a été faite ce matin concernant l'achat de 40 fusils pour tireur d'élite qui seront fournis à l'Ukraine. Les fusils proviendront de PGW, une entreprise de Winnipeg. Je peux vous dire que le gouvernement ukrainien a fait la demande d'acquisition pour ces armes l'année dernière. L'entreprise a suivi le processus d'acquisition, et les fusils étaient bâtis et prêts à utiliser à la fin de l'été dernier. Pourtant, il a fallu attendre presque un an avant qu'il soit annoncé que les fusils seront envoyés.
    De façon générale, l'approvisionnement... Mme Buck a mentionné qu'il fallait plus de munitions. Les installations et les capacités du Canada dans ce domaine comprennent General Dynamics Produits de défense et Systèmes tactiques Canada. Cette société, située tout près de Montréal, peut fabriquer des munitions prêtes à utiliser, y compris les cartouches de 155 millimètres allant dans l'obusier M777. Le Canada en a fourni quatre à l'Ukraine, qui en a aussi reçu d'autres alliés.
    Selon vous, devrions-nous accélérer les efforts pour régler les problèmes d'approvisionnement?
    Du point de vue de l'ancienne ambassadrice auprès de l'OTAN et des représentants du Congrès des Ukrainiens-Canadiens, qu'est‑ce qui explique les retards? Quels obstacles nous empêchent d'approvisionner l'Ukraine en munitions, en fusils pour tireur d'élite et en matériel militaire divers?

  (0900)  

    J'invite Mme Buck ou M. Michalchyshyn à répondre.
     Certainement.
    Je sais que M. Jens Stoltenberg et d'autres alliés de l'OTAN ont reconnu, à la suite de réunions de l'OTAN, qu'il faut absolument augmenter et accélérer la production.
    Le problème, comme je l'ai déjà dit, c'est que, pour de très bonnes raisons, l'Ukraine épuise ses munitions et ses armes plus vite qu'on ne peut lui en fournir. Cette situation a révélé des lacunes dans le secteur de la production de défense.
    En ce qui concerne l'approvisionnement, je le répète, je parle en mon nom et d'un point de vue extérieur. J'ai vu le processus d'approvisionnement bien fonctionner; je l'ai aussi vu très mal fonctionner. Personnellement, je serais ravie que ce processus fasse l'objet d'un examen. Un examen exhaustif et impartial est nécessaire pour éviter que les décisions soient annulées, comme c'est arrivé au cours des 20 dernières années, d'après mon expérience personnelle.
    Brièvement, je dois dire que nous convenons que le système actuel n'est pas satisfaisant. Nous avons entendu dire que l'industrie souhaite des engagements pluriannuels. C'est donc une chose à examiner. Nous nous sommes rendus à Kiev en mai et en juin, et lors de cette visite, le ministre ukrainien de la Défense nous a pressés de nous entretenir avec les parlementaires canadiens. L'Ukraine regorge de chars d'assaut russes brûlés. On peut voir l'ampleur du matériel détruit tous les jours par les Ukrainiens et les Russes; c'est beaucoup plus que ce que l'on pourrait imaginer. Je crois qu'on doit simplement…
    Je le répète, j'ignore la solution au problème d'approvisionnement, mais je peux dire que le système actuel n'est pas assez rapide, et il est inacceptable que l'Ukraine doive attendre un an avant de recevoir ce matériel, car des soldats meurent chaque jour.
    J'ai une autre question à poser aux représentants du CUC.
    Nous savons que le budget fédéral de 2023 ne prévoit pas grand-chose pour l'Ukraine du point de vue de la défense. Le gouvernement a annoncé un investissement de 200 millions de dollars pour les Forces armées canadiennes, supposément pour aider au remplacement des chars d'assaut Leopard qu'il a donnés à l'Ukraine.
    Est‑ce que le CUC et le reste de la communauté ukrainienne sont aussi déçus que je le suis en ce qui a trait au dernier budget?
    Nous sommes préoccupés et étonnés par la somme prévue dans le budget pour la défense de l'Ukraine, à savoir, comme vous l'avez mentionné, 200 millions de dollars pour les chars d'assaut Leopard; un investissement qui avait déjà été annoncé.
    Nous avons présenté — et nous serions heureux de le transmettre au Comité — notre mémoire prébudgétaire, dans lequel, comme M. Zakydalsky l'a souligné, nous mentionnons que l'Ukraine a besoin d'un grand nombre de systèmes.
    Nous espérons que les commentaires que nous avons formulés à la suite de la présentation du budget et dans le cadre du processus d'examen de la défense mettront ce besoin davantage en évidence. Nous avons entendu dire qu'il est possible que d'autres investissements soient annoncés, comme cela a été le cas l'année dernière, mais nous craignons que le budget n'ait pas envoyé le message que le Canada soutiendra fortement l'Ukraine durant la prochaine année.
    En lisant la lettre signée par un certain nombre d'éminents Canadiens, y compris d'anciens ministres du Cabinet, des dirigeants militaires à la retraite et des universitaires, on constate qu'ils soulignent à quel point les dépenses en matière de défense ont diminué au Canada et ils affirment que nous ne sommes pas en mesure de nous acquitter de la tâche à accomplir. À cela s'ajoutent les documents du Pentagone qui ont fait l'objet d'une fuite par le biais de l'application Discord.
    Nous savons que des discussions ont lieu en coulisses, particulièrement parmi des diplomates au sein de l'OTAN. Ma question s'adresse donc à l'ancienne ambassadrice, Mme Buck. À la lumière de votre expérience à Bruxelles et des discussions que vous avez actuellement avec un grand nombre de vos anciens collègues, diriez-vous que les commentaires figurant dans les documents du Pentagone reflètent ceux que vous entendez dans les cercles diplomatiques, ici, à Ottawa?

  (0905)  

    Le problème, c'est que je n'ai pas vu ces documents. Toutefois, d'après ce que je sais de leur contenu, je peux dire que j'appuie certaines des critiques, mais je suis tout à fait en désaccord avec d'autres critiques qui y sont formulées.
    Le principal message est que le Canada est un solide allié de l'OTAN. Nous bénéficions d'un énorme respect au sein de cette organisation. Nous avons contribué d'une façon ou d'une autre à toutes les opérations de l'OTAN, et j'estime que c'est important.
    Par ailleurs, étant donné que les gouvernements qui se sont succédé pendant des décennies n'ont pas investi suffisamment dans la défense, nous ne respectons pas notre engagement envers l'OTAN en matière de dépenses de défense. Nous sommes presque au fond du baril, alors nous devons en faire davantage.
    J'ai aussi signé cette lettre.
    Madame Lambropoulos, vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais d'abord remercier nos témoins de prendre le temps de comparaître devant nous aujourd'hui.
    Mes questions s'adressent principalement à Mme Buck.
    Vous avez écrit récemment qu'à mesure que la guerre s'éternise, la solidarité et la détermination des pays occidentaux risquent de faiblir. Selon ce que vous avez observé, quelles lignes de faille sont en train d'apparaître au sein de l'alliance des pays occidentaux et quel rôle le Canada peut‑il jouer pour contribuer à préserver l'unité?
    Je pense que l'unité au sein des pays de l'OTAN est extrêmement solide depuis le début, mais certaines lignes de faille apparaissent, comme vous l'avez mentionné. Certains alliés comme la Turquie et la Hongrie commencent à adopter des positions qui risquent de nuire à l'unité au sein de l'OTAN et à la solidarité des pays de l'OTAN envers l'Ukraine. Je crois qu'il faut exercer au sein de l'OTAN une pression douce et constante pour maintenir le cap. Parfois, cette pression va se transformer en pression publique.
    Ce qui sera très important, c'est le moment où la Turquie va changer son fusil d'épaule et permettre à la Suède d'intégrer l'alliance. Je suis convaincue que cela va se produire, mais j'aurais voulu que cela se produise plus rapidement.
    Il faut une diplomatie discrète, dois‑je dire honnêtement, et je peux dire que l'OTAN a bien réussi à cet égard au fil des ans, mais il faut intensifier les efforts diplomatiques. Comme je l'ai dit, le soutien politique international à l'Ukraine réside dans l'obtention d'un soutien interrégional mondial, et, à cet égard, j'applaudis le travail effectué par l'ambassadeur Rae dans nos missions diplomatiques partout dans le monde. C'est un travail qui consiste à convaincre les États de toutes les régions du monde à voter à l'Assemblée générale des Nations unies, par exemple, pour isoler la Russie, et quelques d'États ont accepté d'imposer des sanctions à la Russie et de les maintenir, mais ce travail devra être constant. Par conséquent, lorsque je demande d'accroître les dépenses de défense, je demande également d'accroître les dépenses et les investissements dans nos outils diplomatiques internationaux et dans les entités vouées à assurer la sécurité civile, car ils font partie des autres moyens utilisés pour conserver l'appui.
    Je vous remercie beaucoup.
    D'une certaine façon, vous avez déjà répondu à ma prochaine question, mais juste au cas où vous voudriez ajouter quelque chose, je vais vous la poser quand même. Est‑ce que la capacité de l'alliance à faire face au conflit dans l'avenir est chancelante? Vous avez mentionné que cette guerre pourrait durer très longtemps, et qu'elle va durer longtemps, alors pouvez-vous me dire quels sont les points faibles de l'alliance?
    Je pense que le principal point faible est d'ordre pratique et logistique à l'heure actuelle et concerne la livraison d'armes et le soutien offert à l'Ukraine. Je suis moins préoccupée par le maintien du soutien politique. Ce qui me préoccupe davantage, c'est le maintien d'une livraison constante à l'Ukraine des armes nécessaires, alors j'espère que le sommet de Vilnius donnera lieu à un plan stratégique qui comporte une approche à long terme pour assurer un approvisionnement prévisible d'armes, plutôt qu'un approvisionnement marqué d'interruptions, comme cela a été le cas au cours de la dernière année. Je crois que c'est ce qui va se produire durant le sommet; du moins c'est ce qu'indiquent les déclarations publiques du secrétaire général.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vais maintenant m'adresser aux représentants du Congrès des Ukrainiens-Canadiens. Je vous suis reconnaissante pour votre contribution aujourd'hui, et je comprends que la communauté au Canada vit des moments très difficiles depuis un an et demi environ.
    Vous avez mentionné quelques-uns des domaines où vous aimeriez que le Canada en fasse davantage, notamment enseigner à des Ukrainiens à piloter des chasseurs du Canada et de l'OTAN. Pourriez-vous nous dire plus précisément quel rôle vous souhaitez que le Canada joue à l'avenir dans le cadre de cette guerre?

  (0910)  

    Comme nous l'avons dit, il y a deux choses. L'une est d'accroître l'approvisionnement d'armes, et l'autre est d'accroître la formation.
    Comme l'a mentionné l'ambassadrice, Mme Buck, l'Ukraine est en train de mettre sur pied une armée conforme aux normes de l'OTAN, et le Canada est très bien placé pour former les militaires ukrainiens, car c'est ce qu'il fait depuis 2015. Plus de 30 000 militaires ukrainiens ont été formés, et, franchement, cela s'est avéré une très bonne chose pour l'armée ukrainienne, alors tout ce que nous pouvons faire pour accroître la formation serait bien inutile. Cependant, à l'heure actuelle, au cours des prochaines semaines et des prochains mois, l'approvisionnement d'armes sera crucial. Nous insistons là‑dessus, car c'est urgent. Des millions de citoyens ukrainiens souffrent sous l'occupation russe, et il faut les libérer. Les Ukrainiens peuvent le faire, mais nous devons leur fournir les armes nécessaires.
    Monsieur le président, combien de temps me reste‑t‑il?
    Il vous reste 45 secondes.
    Vous avez tous les deux beaucoup parlé de la nouvelle offensive qui aura lieu au printemps et à l'été, et je suis certaine que l'Ukraine se sent très en confiance à cet égard et qu'elle sent qu'elle est sur une lancée.
    Croyez-vous que cette offensive sera couronnée de succès? Pensez-vous que l'Ukraine pourra reprendre certains territoires qu'elle a perdus? Que croyez-vous qu'il risque de se passer au cours des prochains mois?
    C'est encore une fois une question importante, mais le temps de parole de Mme Lambropoulos est écoulé. Je suis certain que cette question se faufilera plus tard durant la matinée.

[Français]

     Madame Michaud, bienvenue au Comité. Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci aux témoins pour votre présence aujourd'hui, très appréciée.
    Je remarquais cette semaine que Jens Stoltenberg, le secrétaire général de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, ou OTAN, était à Kiev. On entend de plus en plus parler d'une adhésion prochaine ou future de l'Ukraine à l'OTAN, peut-être en cas de victoire. On peut comprendre que cela ne se fera pas à très court terme.
    Madame Buck, qu'est-ce que cette adhésion à l'OTAN veut dire pour les Ukrainiens? Qu'est-ce qu'elle veut dire pour les membres actuels de l'OTAN? Je sais que cela peut soulever des questions de sécurité ou des craintes pour certains alliés.
    En 2008, au Sommet de Bucarest, les alliés se sont mis d'accord sur une phrase assez importante dans la déclaration finale. Je ne me rappelle pas la traduction française, et je vais donc vous la dire en anglais.

[Traduction]

    C'était que la Géorgie et l'Ukraine deviendront des membres de l'OTAN.
    Toutefois, aucune démarche technique concrète n'a été entreprise depuis, en vue de l'adhésion à l'OTAN. La question de l'adhésion s'est complexifiée en 2014, lorsque la Russie s'est approprié une partie de l'Ukraine en annexant illégalement la Crimée, car selon certaines personnes au sein de l'OTAN, l'adhésion entraînerait l'application immédiate de l'article 5 de la charte de l'OTAN.
    Qu'est‑ce que cela veut dire? L'article 5 est ce que j'appelle la disposition des trois mousquetaires — un pour tous et tous pour un. Si un des alliés de l'OTAN est attaqué, les autres alliés doivent le défendre. La question s'est complexifiée sur le plan politique, mais ce libellé concernant l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN est demeuré. Ce qu'ont fait les alliés de l'OTAN de manière constante depuis 2008, et encore plus depuis 2014, c'est offrir un soutien considérable à l'Ukraine en matière de sécurité militaire. En outre, l'Ukraine a bénéficié d'un grand soutien de la part de la société civile.
    Que se passera‑t‑il à Vilnius? Comme je l'ai dit, je ne m'attends pas à une réponse à la question de l'adhésion de l'Ukraine, mais j'ai trouvé très significatifs les propos de Jens Stoltenberg hier, qui a dit que la place de l'Ukraine est au sein de la famille euro-atlantique et que sa place sera aussi au sein de l'OTAN avec le temps.
    Le débat qui se tiendra à Vilnius sera crucial. Je ne m'attends pas à y obtenir des réponses, à moins qu'un miracle ne se produise dans le déroulement de cette guerre d'ici la tenue du sommet de Vilnius.

  (0915)  

[Français]

    Merci.
    Messieurs du Congrès des Ukrainiens canadiens, avez-vous quelque chose à ajouter?

[Traduction]

    Il y a un excellent mème qui circule et qui dit que personne n'en a fait davantage pour accroître le soutien à l'adhésion de l'Ukraine que Vladimir Poutine. Il est très clair que l'Ukraine a décidé que son avenir se trouve au sein de l'Union européenne, au sein de l'alliance euro-atlantique d'une certaine façon, dans l'immédiat et à long terme. Vu la progression de la Finlande et la possibilité que d'autres pays deviennent membres de l'OTAN, l'Ukraine voit qu'un chemin se trace pour elle vers l'adhésion à l'alliance. Comme nous le savons, l'Ukraine entretient des relations étroites avec le Canada et d'autres pays, ainsi qu'avec des groupes internationaux pour ce qui est de la formation.
    La question demeure ouverte, comme l'ambassadrice l'a dit, mais nous voyons que le public appuie très fortement l'adhésion de l'Ukraine.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Vous parliez tout à l'heure de ce à quoi s'attendre du Canada comme aide pour la suite des choses. Vous parliez beaucoup d'armes et de formation. On sait que le Canada est présent en Lettonie. Est-ce que cette présence, à l'heure actuelle, est suffisante? On sait que les Forces armées canadiennes ont des problèmes de ressources et une pénurie de personnel. Est-ce que le passage de bataillon à brigade peut bien se faire malgré ces défis? Est-ce qu'on devrait mettre l'accent sur la formation, que ce soit en Lettonie ou ailleurs?

[Traduction]

    Je pense que le problème en ce qui concerne notre capacité d'accroître la formation est identique au problème que nous avons en ce qui a trait à notre capacité d'accroître la production d'armes. Le gouvernement doit en faire une priorité et investir les fonds nécessaires.
    Quant aux ressources disponibles actuellement pour accroître ces missions, je crois que nous avons la capacité d'accroître la formation des Ukrainiens, mais il est certain qu'il s'agit là d'un engagement à long terme, et je crois que nous devons effectuer maintenant les investissements qui s'imposent en matière de défense.
    Lors du dernier sommet de l'OTAN, tous les alliés ont convenu d'accroître la taille des groupements tactiques actuels créés en 2017 et de mettre en place de nouveaux groupements tactiques. Cet engagement a été pris par tous les alliés, et le Canada doit le respecter.
    Je ne peux pas parler de l'état de préparation en ce moment, mais je vais revenir à la lettre que moi-même et d'autres avons signée concernant la nécessité d'investir davantage. L'une des principales lacunes des FAC actuellement concerne les effectifs, alors elles travaillent très fort pour recruter davantage et favoriser le maintien en fonction. C'est un travail qui doit être soutenu, et le gouvernement est résolu à accroître la présence en Lettonie, ce qui est absolument essentiel aux fins du programme de dissuasion de l'OTAN. C'est ce qui a motivé cet engagement. J'étais là lorsque la décision a été prise au sujet de ce groupement tactique et je sais que le Canada est d'avis que la dissuasion doit être suffisamment forte.

[Français]

     Merci, madame Michaud.

[Traduction]

    Madame Mathyssen, vous disposez de six minutes.
    Je remercie tous les témoins d'aujourd'hui pour leur présence.
    L'entreprise General Dynamics Land Systems de London a fourni les VBL. Lorsque je me suis entretenue avec l'ambassadrice ukrainienne au Canada, elle m'a fait savoir que le retard dans la livraison des VBL suscitait beaucoup de frustration. Pourriez-vous faire le point concernant ce que vous avez entendu, le cas échéant, au sujet du retard dans la livraison des VBL et de leur utilisation?

  (0920)  

    Je ne connais pas les détails. Je sais qu'on misait sur ceux qui étaient presque totalement construits ou qui étaient en cours de construction très peu de temps avant l'annonce, plutôt que d'en construire de toutes pièces. Il y a eu des spéculations de la part des médias, et je pense que pour des raisons opérationnelles, les Ukrainiens et les Canadiens ne révèlent pas exactement où ils en sont. Je comprends que c'est en raison des problèmes d'approvisionnement qu'on a décrits plus tôt que la livraison n'a pas eu lieu aussi tôt que prévu.
    Vous n'avez donc pas d'informations à nous fournir à ce sujet?
    Non.
    D'accord.
    Comme vous le savez, je parle toujours de London. Dans ma circonscription, il y a une école internationale de pilotes d'essai. Elle est reconnue à l'échelle mondiale. On y a formé, comme je l'ai dit, des pilotes de chasse alliés provenant de partout dans le monde. Les pilotes s'entraînent avec des chasseurs et des simulateurs de vol. Il y a eu beaucoup de discussions pour faire en sorte que des pilotes ukrainiens soient formés au sein de cette école. Je crois que M. Zakydalsky a parlé de la transition vers l'utilisation de l'équipement et de l'armement employés par l'OTAN, alors ce type de formation donnée par des alliés de l'OTAN est essentiel.
    Malheureusement, les deux côtés ont été confrontés à des obstacles, alors j'aimerais beaucoup que vous nous parliez à nouveau de cette formation en particulier et de la nécessité de l'augmenter. Je sais que l'opération Unifier est une initiative fantastique pour les militaires en Ukraine, mais il existe de nombreuses façons différentes pour le Canada de former des militaires en Ukraine.
    L'un des aspects les plus importants à retenir concernant la formation, c'est le fait que l'armée canadienne apprend également des Ukrainiens. Nous pouvons accroître ces missions et former des pilotes de chasse, et comme nous allons le faire à un moment donné de toute façon, pourquoi ne pas le faire maintenant? Ces missions profitent toujours grandement à nos militaires également, et je crois que nous devons considérer le fait que non seulement nous aidons les Ukrainiens, mais aussi que les Ukrainiens nous aident également.
    Si vous me le permettez, j'aimerais parler des programmes de soutien. J'ai assisté hier soir aux Jeux Invictus en compagnie de certains des députés ici présents, et j'ai constaté qu'il y a plus que la formation des pilotes d'essai. Je crois qu'il y a un véritable…
    L'Ukraine est un pays d'anciens combattants et de familles dont des membres ont été blessés ou tués. Je crois que l'ensemble de la société ukrainienne a besoin en ce moment de soutien en santé mentale et de soutien pour les anciens combattants et les entrepreneurs, et ce sera le cas également après la guerre.
    Une foule de personnes se sont présentées à nos bureaux avec des propositions de toutes sortes quant à ce que le gouvernement, les entreprises, les organismes sans but lucratif et les communautés au Canada peuvent faire. Les idées et le soutien ne manquent pas. Parfois, c'est une question de trouver les fonds nécessaires et les bons partenaires.
    À ce stade‑ci, je pense que l'Ukraine est impatiente d'établir des partenariats avec des partenaires qui l'aideront à remporter la victoire le plus tôt possible. Toutefois, nous devons penser entretemps à tous ces hommes et à toutes ces femmes qui servent dans l'armée et à leurs familles.
    Madame Buck, vous avez dit que le Canada augmentait de nombreux types de dépenses.
    J'aimerais que vous précisiez ce que vous avez dit au sujet des dépenses diplomatiques, c'est‑à‑dire ce que le Canada ne fait pas et ce que nous devons faire à ce sujet.
    C'est une question de présence, de compétences et d'initiative diplomatique. Il ne s'agit pas toujours d'investir plus d'argent dans nos ministères des Affaires étrangères pour obtenir le produit, mais d'investir un peu plus d'argent.
    Je ne vais pas énumérer tous les endroits dans le monde où, selon moi, nous n'aurions pas dû fermer des missions ou où nous devrions en ouvrir. Cela dépasse probablement le cadre du Comité et le cadre de mes notes, que je dois faire moi-même maintenant que je suis à la retraite, et je dois dire que c'est tout un défi. Cependant, j'ai observé une réelle diminution de nos capacités, de notre base de connaissances et de nos compétences à l'échelle internationale sur certaines questions, et nous devons rebâtir tout cela. Lorsque nous faisons face à un conflit comme celui de l'Ukraine, il faut un effort de l'ensemble du Canada pour travailler et obtenir le soutien de nos principaux alliés, de nos partenaires aux vues similaires, afin de maintenir le soutien à l'Ukraine. Comme je l'ai dit, je félicite l'ambassadeur, M. Rae, et son équipe dans nos missions un peu partout dans le monde, mais il faudra constamment entretenir et alimenter ces efforts.
    Par ailleurs, nous devons parler à certains des pays qui ont des moyens de pression sur la Russie. Ce sera essentiel pour parvenir à une forme de paix à un moment donné, lorsque le président Zelenski estimera qu'il est temps de conclure un accord de paix. Nous avons besoin d'experts de la Chine et de personnes proches de l'Inde et d'autres pays qui peuvent aider à exercer certaines pressions sur la Russie. Il faut exercer un maximum de pressions pour convaincre le président Poutine qu'il est temps de déposer les armes et d'entamer les négociations ou… Je ne peux même pas commencer à deviner les prochaines étapes de cette guerre.
    Il faut de la diplomatie, des capacités et de l'expertise, ainsi que des intermédiaires pour parler aux méchants et aux gentils, afin de mettre en place ce soutien.

  (0925)  

    Nous devrons en rester là. Je vous remercie.
    Chers collègues, nous entamons maintenant la prochaine série de questions.
    Je vais permettre qu'il s'agisse d'une série complète de questions, car le groupe suivant est composé d'un seul témoin, ce qui nous permettra peut-être de rattraper un peu de temps.
    Madame Gallant, vous avez la parole. Vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Le secrétaire général de l'OTAN a indiqué à notre ancienne ambassadrice de l'OTAN que l'objectif ambitieux de 2 % du PIB pour les dépenses de défense deviendrait le seuil de dépense minimal. Quelles sont les mesures les plus immédiates et les plus efficaces que le Canada peut prendre pour soutenir l'Ukraine et ses forces de défense et pour se débarrasser de sa réputation de profiteur au sein de l'OTAN?
    Je pense que notre réputation au sein de l'OTAN est assez bonne, mais l'objectif de 2 % — c'est un objectif, et le Canada a clairement indiqué qu'à l'heure actuelle, il n'est pas contraignant pour les gouvernements — est une norme politique très importante, c'est‑à‑dire une mesure politique qui prend de plus en plus d'importance. Elle devient plus importante à cause de la guerre, mais pour nous, c'est aussi parce que tous nos alliés vont de plus en plus haut, ce que nous ne faisons pas. Cela s'explique en partie par le fait que notre PIB est légèrement supérieur à celui de certains de nos alliés, ce qui est une bonne nouvelle, mais ce pourcentage diminue. Cela s'explique en partie par les sous-investissements des gouvernements successifs, dont les effets se font sentir aujourd'hui.
    En 2017, dans le cadre de la stratégie Protection, Sécurité, Engagement, on avait établi un plan visant une augmentation de 73 % des dépenses, ce qui est impressionnant, mais cette augmentation, la plus importante augmentation des dépenses de défense que nous ayons connue depuis des décennies, n'a pas tout à fait été réalisée en raison d'un manque de personnel, de processus d'approvisionnement trop lents, etc.
    Il y a beaucoup à faire et nos statistiques à l'OTAN ne sont pas reluisantes. En 2022, nous étions au 25e rang des alliés pour le pourcentage du PIB consacré à la défense, et nous occupions l'avant-dernière place pour le pourcentage des dépenses de défense consacrées à l'équipement, ce qui n'est pas très fort. Nous devons faire plus, et c'est ainsi qu'est arrivée la lettre que j'ai signée, comme je l'ai dit.
    Lorsqu'il s'agit du soutien à l'Ukraine, il faut se concentrer sur les armes et la formation, encore et toujours. Lorsque la guerre prendra fin, je pense que nous pourrons jouer un rôle très utile en aidant l'armée ukrainienne à faire la transition vers une situation de temps de paix. Nous pourrons également apprendre beaucoup de leur expérience de la guerre et nous les aiderons à atteindre et à maintenir la norme d'interopérabilité de l'OTAN.
    On dirait que nous nous contentons d'aspirer à atteindre les 2 % plutôt que de reconnaître que cela deviendra un seuil minimum. Il faut aller de l'avant pour que cela devienne un seuil minimum, parce que personne n'atteindra jamais ces 2 % et que tous ne feront que s'en rapprocher. C'est comme la loi des rendements décroissants.
    Selon vous, comment pouvons-nous élaborer une stratégie à cet égard? Dans le cadre de notre rôle de soutien, quelle devrait être notre stratégie pour faire avancer la situation de l'Ukraine et l'aider à gagner cette guerre?
    Pour gagner la guerre, je répéterai seulement qu'il faut se concentrer sur les armes et les munitions.
    Nous sommes actuellement à un moment critique. Je pense que l'OTAN a fait un excellent travail pour approvisionner l'Ukraine, mais il faut absolument faire plus et plus vite.

  (0930)  

    Nous savons que des accusations peuvent être portées pour crimes de guerre. Qu'en est‑il des personnes qui influencent et encouragent le génocide en Ukraine? Existe‑t‑il des lois internationales qui permettraient de demander à ces personnes de répondre de leurs actes?
    Plusieurs processus menés par l'Ukraine et soutenus par le Canada sont en cours.
    Le premier concerne les poursuites pour crimes de guerre et génocide devant la Cour pénale internationale. Le deuxième processus mené par l'Ukraine, dont nombre d'entre vous ont certainement entendu parler, est une poursuite pour guerre d'agression. La discussion se poursuit sur la manière dont l'Ukraine peut mener ce processus, mais par l'entremise d'un processus de poursuites pénales internationales. Cela fait partie des enquêtes en cours. Nous savons que de nombreux pays ont envoyé des enquêteurs…
    Les personnes qui ont exercé une influence à cet égard seront-elles inculpées en même temps que les personnes qui ont commis ces crimes?
    Je l'espère. Je pense qu'il est facile de trouver, dans les discours et dans les médias, des preuves contre les personnes qui ont encouragé, soutenu et stimulé la perpétration de ces crimes et les ont présentés comme de grandes victoires russes.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à M. May. Il a cinq minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie tous d'être ici et de nous donner un peu de votre temps aujourd'hui.
    Madame Buck, pendant votre intervention, je pensais à la façon dont nous en sommes arrivés ici depuis les premiers jours, avant même le début de la guerre, et à toutes les hypothèses sur ce qui allait se produire. Trois théories assez répandues nous ont été communiquées et ont également été diffusées dans les médias.
    La première, c'était que rien n'allait se passer. Une grande partie de cette théorie venait en fait de l'intérieur de l'Ukraine. Ce n'était que de l'esbroufe. La deuxième, c'était que la situation allait ressembler à ce qui s'est passé en Crimée, c'est‑à‑dire qu'ils allaient faire irruption, redessiner la frontière autour des deux provinces du Donbass et s'arrêter là. La troisième, c'était que tout serait terminé en une semaine. Ils traverseraient l'Ukraine en libérateurs et tout serait terminé en quelques jours.
    Visiblement, rien de tout cela ne s'est produit. Personne, d'après ce que j'ai entendu, n'avait prévu une guerre prolongée.
    La question que je vous pose, ainsi qu'à l'ensemble des témoins, c'est comment notre mode de pensée a‑t‑il évolué avec la collecte de renseignements sur les capacités de la Russie et, ce qui est tout aussi important, sur la capacité de l'Ukraine, maintenant que ce pays profite d'un soutien aussi important de la part de l'OTAN?
    Y a‑t‑il une stratégie différente sur la façon d'envisager la question? Je sais que la question de savoir ce qui s'en vient a déjà été posée. Je sais que personne n'a de boule de cristal, mais il y a plus d'un an, tout le monde semblait avoir une boule de cristal et on avait des opinions très arrêtées sur ce qui allait se passer. Je suis donc curieux, car toutes les personnes à qui nous avons parlé sont restées très discrètes sur leurs prédictions.
    Je vais donc vous mettre sur la sellette et vous demander comment la situation va se résoudre ou si elle se poursuivra pendant de nombreuses années.
    J'aimerais d'abord entendre Mme Buck.
    Comment notre mode de pensée a‑t‑il changé?
    Lorsque j'étais à l'OTAN, tout le monde estimait que la Russie avait fait des investissements importants dans la réorganisation et la modernisation de son armée depuis 2008 et qu'elle deviendrait l'une des forces de combat les plus impressionnantes au monde. Nous avons découvert que ce n'était pas aussi vrai que nous le pensions. En effet, elles étaient médiocres et incapables d'organiser ce type d'invasion complexe et robuste d'un pays.
    J'ai pensé que cette option n'était pas un choix logique pour Vladimir Poutine parce que je me demandais, entre autres, comment il allait pouvoir tenir l'Ukraine par la suite. Je ne comprends pas ses calculs, à moins qu'il ne s'agisse uniquement de maintenir son pouvoir dans son propre pays parce qu'il a peur d'une démocratie prospère comme l'Ukraine, qui s'améliore sur le plan économique et qui se trouve juste à côté, car c'est une chose qu'il n'a pas fournie à ses propres citoyens et qu'il ne peut pas leur fournir. Cela s'explique un peu mieux de cette façon.
    Comment avons-nous changé notre façon d'envisager les capacités de la Russie? L'autre chose, c'est qu'il a aussi lancé une conscription limitée qui n'a pas bien fonctionné pour lui sur le plan politique, et c'est la raison pour laquelle il tente maintenant une offensive de charme. Il tente d'atteindre ses quotas et il tente d'obtenir de plus en plus de soldats des régions à l'extérieur de Moscou en espérant que cela permette de résoudre le problème. Il vide même les prisons.
    Il se moque que ses soldats se fassent tuer. Un jour ou l'autre, cela lui nuira sur le plan politique, mais ce n'est pas encore le cas. Il peut continuer à sacrifier de jeunes hommes russes pour tenter de résoudre ce problème pendant encore longtemps, ce qui est dommage. C'est dommage pour les Russes.
    Où cela va‑t‑il s'arrêter? Il existe différents scénarios. Je ne vois pas beaucoup de scénarios dans lesquels il serait chassé du pouvoir. Quel que soit le scénario, nous devrons tenter collectivement de résoudre la situation avec la Russie d'une manière ou d'une autre, tout en reconnaissant que ce pays est voisin de l'Ukraine, qu'il le sera toujours et qu'il fait partie de l'Europe. Un moment donné, des pourparlers de paix devront avoir lieu, mais je suis fermement convaincue que le président Zelenski devra en décider le moment venu, et que cela ne pourra se faire que lorsque l'Ukraine aura obtenu des gains territoriaux suffisants pour obliger le président Poutine à s'asseoir à la table des négociations.

  (0935)  

    Messieurs, je pense que nous vous avons laissé environ 30 secondes ou moins pour répondre.
    Avez-vous quelque chose à ajouter sur la question?
    Je dirais simplement que le cours de la guerre dépend dans une large mesure de ce que nous sommes capables de fournir aux Ukrainiens. S'ils n'ont plus d'artillerie, ils ne peuvent plus tirer.
    Je vous remercie, monsieur May.

[Français]

     Madame Michaud, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Nous parlons beaucoup de l'Ukraine et de l'aide que le Canada peut lui fournir. La Russie ne s'attendait vraiment pas à une riposte aussi robuste de la part de l'Ukraine, et la guerre dure depuis plus de 14 mois, bien que, comme cela a été mentionné, ce conflit ait commencé bien avant, dès 2014. Je me demande donc comment se portent les troupes russes, si elles s'essoufflent et si elles ont des problèmes d'approvisionnement.
     Madame Buck, vous avez mentionné que cette situation durerait probablement longtemps, mais je me demande comment, à votre connaissance, les choses se passent du côté de la Russie.

[Traduction]

    Nous avons tous vu les photos des chars et d'autres véhicules russes embourbés parce qu'ils n'avaient pas pris la peine de changer leurs pneus pendant les deux années pendant lesquelles ils étaient entreposés avant leur déploiement. Je pense que la situation est pire sur le plan du personnel. Comme je l'ai dit, avec la combinaison du groupe Wagner et d'autres, ils étirent leurs efforts de conscription dans des endroits qui ne sont pas viables pour eux, et ils s'en sortent donc vraiment très mal, mais c'est un très grand pays avec de nombreux habitants. Ils ont aussi une grande réserve d'armes. Ce ne sont pas de bonnes armes, et ils seront à court de missiles de croisière à un moment donné, mais ils ont suffisamment d'armes pour continuer à se battre pendant un certain temps dans une guerre d'usure et d'attrition sur le terrain au sud. Cela causera beaucoup de dégâts à l'Ukraine et un peu moins à la Russie, parce que le président Poutine est un dictateur et que ses actions ne lui coûtent pas autant sur le plan politique qu'elles pourraient coûter à d'autres dirigeants.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Aussi incompétents et mal équipés qu'ils soient, ils demeurent une force de combat importante que nous ne devons pas prendre à la légère. Comme je vous le disais plus tôt, la brutalité et l'ampleur de l'impact des forces russes en Ukraine, qu'il s'agisse de Wagner ou de l'armée russe, ne doivent pas être oubliées en raison des histoires qui circulent sur leur incompétence technique.
    C'est une question d'ampleur. Il s'agit d'un déploiement incessant et continu de gens et de soldats et, comme nous l'avons dit, ils vident les prisons pour créer des brigades russes. Ces gens ne sont pas des soldats professionnels et ils assassinent des civils ukrainiens. C'est ce qu'on leur a dit de faire. C'est une stratégie explicite de l'armée russe.
    Je vous remercie, madame Michaud.
    Madame Mathyssen, vous avez la parole. Vous avez deux minutes et demie.
    Tout au long de la guerre, la Russie a utilisé la nourriture comme arme de déstabilisation. Pouvez-vous nous parler de l'impact sur le terrain sur la stabilité alimentaire et sur les chaînes d'approvisionnement alimentaire de l'Ukraine?
    Certainement. Comme vous le savez, les Nations unies et d'autres organismes ont tenté à plusieurs reprises de négocier des accords sur les céréales. Le rôle de l'Ukraine à titre de fournisseur de blé, d'huile de tournesol et d'autres produits alimentaires essentiels aux pays du Sud, en particulier au Moyen-Orient et en Afrique...

[Français]

    J'invoque le Règlement, monsieur le président. Nous ne recevons plus l'interprétation en français.

[Traduction]

    Avons-nous perdu le service d'interprétation?
    Les interprètes disent que tout va bien maintenant et que le service est rétabli.

  (0940)  

    Je pense que le rôle de l'Ukraine à titre de fournisseur de produits agricoles essentiels pour les pays du Sud a été mis en évidence par cette dernière invasion. Que peut faire le Canada à cet égard? L'Ukraine tente de mobiliser ses alliés du Sud, mais c'est une tâche difficile au milieu d'une guerre.
    Encore une fois, lorsque nous parlons aux pays qui ont été touchés par la guerre et qui ont des problèmes liés au prix des denrées alimentaires et aux pénuries, nous devons présenter cet argument non linéaire aux gens et leur expliquer que les prix augmentent à cause de cette guerre.
    C'est exactement ce que disait Mme Buck lorsqu'elle parlait de convaincre des alliés potentiellement plus difficiles ou plus réticents. L'argument de la stabilité alimentaire serait un bon moyen d'y arriver.
    Oui. Je pense que de nombreuses populations ne s'étaient pas rendu compte à quel point elles dépendent de l'agriculture ukrainienne pour assurer leur stabilité et leur prospérité. Je pense que si l'on souhaite rétablir la sécurité mondiale, il faut d'abord soutenir l'agriculture ukrainienne.
    J'ai vu beaucoup de personnes acquiescer, et je vais donc vous donner le reste de mon temps pour en dire plus à ce sujet.
    Je ne pourrais pas être plus d'accord.
    Des voix: Ha, ha!
    Mme Kerry Buck: Quand on pense aux pénuries alimentaires et à l'effet sur le prix des aliments partout dans le monde et sur l'approvisionnement en céréales, cela ne nous vient pas en tête, mais Rome FAO, notre mission à Rome, aurait fait activement du lobbying auprès de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture afin de parler de la façon de stabiliser le prix des aliments et d'aider les pauvres. Nous l'aurions fait aussi en recourant beaucoup à notre aide au développement.
    Tous les secteurs responsables de l'intervention internationale, de l'aide au développement et de la diplomatie du gouvernement du Canada doivent apporter leur contribution. Nous devons également être outillés pour lutter contre la désinformation russe, car dès le début, on disait que c'était à cause de telle ou telle raison et pas le résultat de la présence russe en Ukraine. Notre capacité à réfuter cette désinformation et cette propagande diplomatiquement au Canada est donc vraiment essentielle.
    Merci, madame Mathyssen.
    Mme Mathyssen et moi-même avons vu une réponse très sophistiquée à la mésinformation et à la désinformation lorsque nous étions à Taïwan. Je pense que nous serions tous les deux d'accord pour dire que nous avons beaucoup à apprendre de leur façon de faire.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Kelly, pour cinq minutes s'il vous plaît.
    Madame Buck, j'aimerais poursuivre dans la même veine que M. Bezan lors de sa première intervention.
    L'objectif ambitieux de 2 %, si je comprends bien, a été établi en 2014. On a eu une dizaine d'années pour l'atteindre. Je ne pense pas être d'accord pour dire que les gouvernements successifs sur une longue période ne se sont pas penchés sur ce qui était vraiment un objectif précis établi en 2014. Selon une fuite, notre premier ministre a explicitement affirmé, contrairement à la politique énoncée, que le Canada n'allait pas atteindre cet objectif.
    Craignez-vous que cette affirmation porte atteinte à notre engagement envers l'OTAN à un moment où la guerre en cours met explicitement à l'épreuve l'unité de cette alliance?
    Je tiens à préciser que mon intervention portait sur le sous-investissement dans la défense par les gouvernements qui se sont succédé. D'une certaine façon, cela remonte à peu près aux années 1970. Cela se retourne maintenant contre nous.
    Pour être juste, je mentionne que les deux derniers gouvernements ont accordé plus d'attention à la défense. Comme je l'ai dit, la politique de défense « Protection, Sécurité, Engagement » représente la plus importante hausse prévue des dépenses en matière de défense.
    Y a‑t‑il pour nous une incidence diplomatique au fait que nous nous éloignions de l'objectif de 2 %? Absolument. Y a‑t‑il une incidence sur la réputation? Sans aucun doute, et nous pouvons y remédier en en faisant plus.
    En mon for intérieur, j'aimerais voir une voie pour atteindre 2 %, ou une voie vers une voie pour atteindre 2 %, si c'est possible. J'aimerais voir des investissements dans la défense, la sécurité et la diplomatie. Je serais ravie de voir une politique intégrée. On ne peut pas élaborer une politique de défense en vase clos, sans établir les priorités de notre politique étrangère. Elle doit être entièrement intégrée, comme au Royaume-Uni. Il faut investir davantage dans les Forces armées canadiennes et dans la défense nord-américaine, pas seulement dans le NORAD, mais aussi dans les forces aériennes et terrestres, dans des sous-marins, dans la cybersécurité et, surtout, dans les gens. Nous pouvons prendre les devants et en faire plus à mesure que c'est nécessaire.
    L'OTAN doit maintenant en faire beaucoup plus dans la guerre contre l'Ukraine. Tous les alliés doivent intensifier leurs efforts.

  (0945)  

    Vous avez mentionné les dépenses annoncées dans la politique « Protection, Sécurité, Engagement », mais on n'a pourtant pas donné suite aux annonces. Vous avez parlé de certaines raisons qui expliquent pourquoi ces objectifs ne sont pas atteints à certains égards compte tenu de problèmes d'approvisionnement et de personnel.
    Pouvez-vous en dire plus sur ce qui doit changer pour pouvoir remplir les engagements annoncés? Il est facile de faire une annonce, mais ce qui compte, c'est la mise à exécution.
    Je ne fais plus partie du gouvernement. Je ne suis pas vraiment au courant des mesures prises et des obstacles à l'interne. Vu de l'extérieur, c'est en partie un problème de capacité. Comme je l'ai dit, lorsqu'on n'a pas les gens, on ne peut pas suffisamment stabiliser les Forces armées canadiennes pour avoir les experts en approvisionnement et ainsi de suite.
    Pour ce qui est de l'approvisionnement, comme je l'ai dit, j'aimerais qu'un examen soit fait. Nous traînons de la patte en la matière depuis trop longtemps, et nous n'obtenons pas le nécessaire.
    C'est certainement le cas.
    On vient de m'indiquer qu'il me reste une minute.
    Il y a un élément précis. Je passais en revue la réponse à une question inscrite au Feuilleton que notre collègue, M. May, a déposée en juin dernier. Elle disait, par exemple, que 62 VBL II Coyote étaient réparables. Il faudrait 220 jours pour les réparer et les livrer, selon l'énoncé déposé. C'était il y a 305 jours. Personne n'a dit ou annoncé que ces réparations sont en cours et que ces véhicules seront livrés. C'est le genre d'écart qu'on observe entre une annonce et la mise à exécution en ayant les moyens de faire ce qui a été annoncé.
    C'est le cas pour certains véhicules, comme les Leopard. Ils ont été déterminants en Afghanistan, mais les avons-nous entretenus depuis? Non. Nous avons fait des compressions dans la défense aérienne en 2012. C'est ainsi pour toutes sortes d'équipements.
    Merci, monsieur Kelly.
    M. Sousa disposera des cinq dernières minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame l'ambassadrice, vous avez présenté la chronologie des événements des dernières années afin de présenter les raisons avancées par la Russie pour envahir la Crimée et maintenant l'Ukraine en entier.
    Monsieur Michalchyshyn, vous nous avez rappelé qu'on obtient à vrai dire l'effet opposé. On a ainsi raffermi la volonté de l'OTAN, ce qui est formidable. Par contre, des alliances géopolitiques ont aussi été créées pour la Russie — des alliances économiques —, ce qui est également préoccupant.
    Ce qui pique ma curiosité, ce sont les Russes proprement dits. Madame l'ambassadrice, vous en avez parlé un peu. Il ne semble pas y avoir de soulèvement en Russie. Nous en avons besoin d'un pour réaffirmer que la Russie est à l'origine de l'agression. Bien entendu, ce n'est pas ce que nous entendons. Il y a toutefois de nombreux Russes qui meurent, comme vous l'avez souligné, et une grande partie des ressources du pays servent à soutenir l'effort de guerre, ce qui me laisse perplexe par rapport aux alliances économiques que le pays pourrait avoir ailleurs.
    Des témoins ont parlé devant le Comité de la campagne de désinformation russe, et nous avons entendu dire que les discours anti-Ukraine visent à miner le soutien de la population pour l'Ukraine ainsi qu'à intimider et à déshumaniser les Canadiens d'origine ukrainienne. C'est ce que Marcus Kolga a dit en février 2023.
    La question que je vais poser, plus précisément au Congrès des ukrainiens-canadiens, est donc la suivante: qu'avez-vous observé dans ce dossier à propos de la campagne de désinformation de la Russie et de la façon dont ces efforts ont évolué au cours du conflit?
    Merci.
    Malheureusement, selon les chiffres qui proviennent de la Russie, une proportion de 70 % de la population appuie la guerre, et malgré le nombre de personnes tuées, nous voyons que ce chiffre ne diminue pas. Comme vous l'avez mentionné, l'ambassadeur du pays au Canada mène une vigoureuse campagne de désinformation. Nous ne comprenons pas pourquoi il est ici ni pourquoi on le voit régulièrement dans les médias canadiens. Il nous a traités de tous les noms. Il a traité des gens présents ici de tous les noms, et il insulte quotidiennement notre communauté, tout comme le gouvernement du Canada.
    C'est déconcertant pour nous. Je pense que nous ne devons pas oublier que la Russie est voisine du Canada dans le Nord, que cela nous plaise ou non, et nous devons prendre cela très au sérieux et mettre la barre plus haut pour ce qui est de nos attentes concernant ce qui s'en vient. Je pense qu'on a été un peu naïf et qu'on a espéré un peu que toute la situation se règle de différentes façons, mais nous voyons maintenant ce qu'il en est réellement. Des Canadiens, des Canadiens d'origine ukrainienne, font les frais de la situation compte tenu des actes de haine et de vandalisme qui se produisent d'un bout à l'autre du Canada. Nous entendons parler de ces actes et nous les documentons.
    J'aimerais vous montrer nos médias sociaux et les insultes adressées tous les jours à notre communauté par des robots russes. Je pense que c'est un grave problème pour lequel nous avons peut-être été naïfs en tant que société.

  (0950)  

    Madame l'ambassadrice, comment pouvons-nous lutter contre cela? Que devons-nous faire? C'est une chose pour nous de lutter contre la désinformation au Canada, mais que faisons-nous contre la propagande? Que faisons-nous aussi pour informer les Russes?
    Tout d'abord, pour ce qui est de la propagande, je crois qu'il faut une réponse à l'échelle de la société, et comme vous l'avez dit, monsieur le président, nous avons beaucoup à apprendre de pays comme l'Estonie et Taïwan, dont les voisins sont très puissants et doués en désinformation. Ils sont meilleurs que nous. C'est en partie parce qu'ils interviennent à l'échelle de la société.
    En Finlande, par exemple, les enfants apprennent à l'école comment reconnaître la désinformation afin qu'ils puissent démêler le vrai du faux sur les médias sociaux. Nous avons besoin d'une meilleure culture de la sécurité, je pense — que ce soit à l'échelle provinciale, fédérale et même parfois municipale —, pour nous permettre de mieux comprendre à quels moments nos citoyens sont victimes de désinformation.
    Il faut pour cela investir dans la cybersécurité et dans ce que j'appelle les autres fondements de la démocratie, comme les médias indépendants, les médias libres, les systèmes électoraux et ainsi de suite. Nous sommes très bons à cet égard, mais nous devons encore en faire plus.
    À propos du peuple russe, il faut se méfier des sondages. Il est un peu dangereux de donner la mauvaise réponse là‑bas, et je prends donc les sondages avec un grain de sel, mais lorsqu'on regarde certains des sondages plus crédibles menés en Russie, on voit les mêmes chiffres qu'on vient de donner.
    C'est en partie parce qu'en présence de ce genre d'approche de gouvernance qui rappelle les dictateurs tsaristes, il en faut beaucoup avant de voir un soulèvement. Il y en a déjà eu au cours de l'histoire russe, mais je pense que les Russes sont loin d'en être là, et Vladimir Poutine s'est débarrassé de ses rivaux potentiels dans une série de défenestrations, de « suicides » et d'empoisonnements.
    Je n'oserais pas prédire ce qui va se produire.
    Merci, monsieur Sousa.
    C'est malheureusement tout le temps que nous avions. J'emploie le mot « malheureusement », car vous avez tous été d'excellents témoins.
    Vous serez intéressés d'apprendre que juste avant vos témoignages, nous nous sommes entendus pour étudier l'approvisionnement. Compte tenu de vos témoignages, nous allons peut-être recommuniquer avec vous pour connaître vos réflexions à ce sujet. C'est un processus très exaspérant, et nous espérons donc apporter quelques éclaircissements.
    Je vais maintenant suspendre la séance. Nous allons passer au prochain témoin le plus rapidement possible.
    Encore une fois, au nom des membres du Comité, merci.

  (0950)  


  (0955)  

    Reprenons.
    Nous accueillons parmi nous M. Jack Watling, qui est chercheur principal pour la guerre terrestre à la Royal United Services Institute.
    Monsieur Watling, merci de vous joindre à nous.
    Je vous invite à faire votre première intervention de cinq minutes. Nous sommes impatients d'entendre ce que vous avez à dire, et nous passerons ensuite aux séries de questions.
    Merci, monsieur.
    Merci beaucoup pour cette occasion de prendre la parole devant vous aujourd'hui.
    Mon expérience par rapport au sujet provient de mon travail sur le terrain en Ukraine tout au long de la guerre, essentiellement tous les deux mois. J'ai travaillé en grande partie avec l'armée ukrainienne, pour mener des évaluations.
    Il y a des points cruciaux que je veux aborder pour vous dans ma déclaration liminaire. Premièrement, les conséquences de ce conflit ne devraient pas et ne doivent pas être sous-estimées. Le résultat de cette guerre va déterminer non seulement l'avenir de l'Europe en matière de sécurité, mais aussi les règles de fonctionnement de l'ordre international, et si ces États plus puissants peuvent exercer un contrôle et une influence sur leurs voisins dans certains domaines.
    Deuxièmement, et c'est peut-être d'une importance capitale, la capacité de l'OTAN à démontrer qu'elle peut relever le défi est non seulement importante pour nous protéger de la Russie et de l'agression russe, mais aussi pour nous permettre de remplir nos engagements en matière de sécurité. Si nous ne parvenons pas à relever le défi, nous allons faire face à de graves menaces dans d'autres théâtres d'opérations.
    Quand la guerre a commencé, et je l'ai mentionné dans une autre réunion, il n'y avait pas beaucoup de prévisions catégoriques. D'après mon expérience tout au long du conflit, il n'y a jamais eu de trajectoire très claire. Nous changeons de direction à mesure que nous réglons les problèmes opérationnels.
    La chose importante à garder à l'esprit ici, je pense, c'est que le dénouement n'est pas du tout évident; il sera déterminé par ce que nous faisons. Nous avons collectivement un très grand nombre d'organismes qui cherchent à déterminer si les forces armées ukrainiennes parviendront à atteindre ou non leurs objectifs militaires.
    Deuxièmement, il est question d'une chose pour laquelle nous nous sommes montrés beaucoup plus faibles. Nous avons maintenant une stratégie militaire claire, mais notre stratégie politique est beaucoup moins cohérente. La réalité, c'est que l'Ukraine pourrait atteindre tous ses objectifs militaires sur le terrain pour chasser les forces russes du pays, et la Russie pourrait encore bloquer Odessa, frapper de temps à autre des villes ukrainiennes avec des missiles à longue portée et maintenir l'espace aérien ukrainien fermé, ce qui empêcherait essentiellement le pays d'avoir une économie.
    À moins d'avoir une stratégie politique qui force le gouvernement russe à croire qu'il gagnera davantage à négocier sérieusement, il n'y aura pas de dénouement facile du problème. Nous devons collaborer très étroitement à cette fin en tant qu'alliés.
    Je crois que j'arrive maintenant au dernier point que je veux soulever dans ma déclaration liminaire, à savoir que même si notre soutien logistique, l'industrie de la défense et notre armée contribuent grandement aux efforts déployés, au bout du compte, beaucoup de leviers, qui ne sont pas contrôlés par l'armée, doivent encore être actionnés. La décision très récente du Canada, de concert avec un certain nombre de ses alliés, d'accroître ses activités d'enrichissement de combustibles nucléaires est un bon exemple de l'importance capitale du renforcement de la sécurité énergétique de l'alliance pour appuyer la volonté politique nécessaire à la poursuite du combat.
    Nous arrivons maintenant au moment où une grande partie des discussions sur les processus qui fonctionnent bien entre les agences et les organismes, ce qui est au premier plan des stratégies de défense nationale, seront mises à l'épreuve.
    Je serai très heureux de répondre à vos questions sur les considérations militaires — c'est mon domaine d'expertise — et plus particulièrement sur l'armée russe. Je vais conclure ma déclaration liminaire ici et je suis impatient de répondre à vos questions.

  (1000)  

    Merci, monsieur Watling. Je vous suis reconnaissant de votre économie de paroles. Je ne sais pas si mes collègues pourront en faire autant.
    Nous allons commencer les interventions de six minutes par M. Kelly.
    Merci, monsieur Watling.
    Pouvez-vous nous donner des détails sur les défis — ou peut-être même les crises, si ce n'est pas le bon mot — liés à la production de munitions au sein de l'alliance de l'OTAN, ou du moins à la capacité industrielle accessible de l'Ukraine et des alliés de l'OTAN?
     Avec plaisir.
     Les Ukrainiens doivent tirer environ 90 000 à 140 000 cartouches de 155 millimètres par mois. Avant, les États-Unis étaient en mesure de produire moins de 20 000 cartouches par mois. Ils cherchent à augmenter considérablement cette capacité. Toutefois, d'ici la fin de l'année, selon l'information publique, cette capacité devrait toujours tourner autour de 40 000 cartouches par mois. Au Royaume-Uni, selon l'information publique, l'inventaire national de munitions de 155 millimètres était inférieur à 44 000 cartouches avant ce conflit, et notre capacité à fabriquer des munitions de 155 millimètres est d'environ 5 000 cartouches par an. On prévoit porter la production à 40 000 cartouches par an, mais comme vous pouvez le constater — et je pourrais brosser le portrait de la situation dans chaque pays —, lorsqu'on fait le calcul, la capacité de l'ensemble de l'alliance ne suffit pas à répondre aux besoins mensuels de munitions.
    Selon mon expérience, il est impossible de manœuvrer dans ce conflit sans la puissance de feu. On sera immédiatement immobilisé et détruit. Le manque de puissance de feu ne peut qu'occasionner des pertes très élevées et la défaite assurée. Il est donc très important que nous générions cette capacité industrielle.
    Le fait que les États-Unis disposent de réserves importantes nous laisse du temps pour résoudre le problème, mais il est complexe, parce qu'il faut accroître la production d'explosifs; il faut développer notre capacité à couler des obus et à produire des amorces; il faut ensuite être capable de manipuler les explosifs et disposer d'installations permettant de remplir ces obus et de refroidir les charges explosives qu'ils contiennent. Cela signifie que les services gouvernementaux qui s'occupent des permis nécessaires à la planification, par exemple, sont essentiels si l'on veut que cela se produise rapidement.
    Il y a des défis à relever dans la chaîne d'approvisionnement internationale aussi. Il y a des défis réglementaires que les ministères de la Défense ne peuvent pas résoudre à eux seuls. Il est très important que les membres de l'alliance coopèrent pour combler ces lacunes.

  (1005)  

    D'accord. Comment le Canada s'en tire‑t‑il à ce chapitre? Comment le Canada peut‑il vraiment faire sa part? Connaissez-vous la capacité de production du Canada et ce que le Canada devrait faire pour augmenter sa production?
    Je ne connais pas les chiffres sur la production canadienne, mais je tiens à souligner que le Canada fait partie intégrante des efforts déployés par les États-Unis pour accroître leur production. Dans la chaîne d'approvisionnement américaine, les munitions font très souvent des allers-retours entre les États-Unis et le Canada. Cela témoigne des capacités de fabrication de pointe dont vous disposez, mais aussi de la capacité du Canada de produire des matières premières pour les explosifs auxquelles d'autres pays n'ont pas nécessairement accès. Le Canada joue en fait un rôle très important à ce chapitre.
    Je voudrais également saluer le travail de l'une de vos anciennes ambassadrices, Wendy Gilmour, qui est secrétaire adjointe de l'OTAN. Elle joue un rôle de premier plan dans la coordination des efforts au sein de l'alliance. Le Canada contribue donc de façon significative, à mon avis, à la diplomatie visant à relever certains de ces défis.
    Notre comité est sur le point d'entreprendre une étude sur les processus d'approvisionnement. Les processus d'acquisition militaire sont depuis très longtemps étonnamment lents au Canada. Il faut que cela change si nous voulons avoir la souplesse nécessaire pour réagir devant une crise comme celle‑ci. À votre connaissance ou selon vous, le Canada prend‑il les mesures qui s'imposent, ne serait‑ce que dans la chaîne d'approvisionnement nord-américaine, pour éliminer cet écart entre les dépenses et la production, parce que tôt ou tard, l'armée ukrainienne en viendra sûrement à manquer de munitions si nous ne rectifions pas le tir?
    Je pense que de nombreux gouvernements au sein de l'alliance ont du mal à voir la pertinence de cet enjeu en temps de paix et à suivre les processus habituels, surtout en dehors des ministères de la Défense. Au Royaume-Uni, en tout cas, le processus ne s'accélère pas vite, en partie parce qu'il faut obtenir l'appui d'autres organes gouvernementaux. Le ministère de la Défense n'est pas maître de tous les leviers pour débloquer les permis nécessaires pour construire une usine de munitions, par exemple.
    Il est très important qu'une autorité gouvernementale centralisée guide tous les autres acteurs dans le processus, afin qu'il n'y ait pas une accélération dans la signature des contrats de défense, par exemple, mais sans accélération dans la capacité de trouver des munitions et de nous doter d'installations appropriées pour produire plus de munitions. J'observe un sentiment d'urgence à cet égard dans les ministères de la Défense représentés à l'OTAN, mais très souvent, cela ne trouve pas écho dans l'ensemble du gouvernement.
    Merci. Je vous dois 15 secondes.
    Monsieur Watling, ce que j'ai entendu sur la façon dont un obus de 155 millimètres est fabriqué et le nombre de fois où il peut traverser la frontière pour être fabriqué en Amérique du Nord serait peut-être un élément intéressant à prendre en considération dans notre étude sur les acquisitions. Si vous avez d'autres informations à nous communiquer à ce sujet, ce serait instructif. Si vous voulez bien les transmettre au greffier, ce serait utile.
    Madame O'Connell, vous disposez de six minutes.

  (1010)  

    Merci, monsieur le président.
    Merci d'être ici, monsieur Watling.
    Pour commencer, dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de l'importance pour l'Ukraine de gagner cette guerre, et ce, de façon durable. Tous les députés, à la Chambre et au sein de ce comité en particulier, puisqu'ils étudient la question, comprennent l'importance de montrer la force de l'OTAN pour l'avenir des communautés européennes, pour les raisons que vous avez évoquées.
    Je voudrais vous demander de nous en dire plus à ce sujet. Des pressions politiques vont commencer à s'exercer. J'entends parfois, même dans ma propre circonscription, les gens se demander pourquoi nous dépensons tant d'argent en Ukraine, dans ce pays, dans ce conflit.
    Au Royaume-Uni, le taux d'inflation atteint de nouveau les deux chiffres. Des pressions vont commencer à s'exercer. Dans la zone euro, l'inflation est de 6,9 %. Il va commencer à y avoir des pressions financières dans d'autres pays.
    Pouvez-vous nous parler davantage de l'importance, et même de l'importance économique à long terme de continuer de soutenir l'Ukraine et des conséquences qu'il y aurait à ne pas le faire?
    Je pense que les exemples de la manière dont la guerre en Ukraine perturbe les affaires et nous cause des dommages économiques abondent. Il importe d'y mettre fin rapidement pour assurer la stabilité économique. L'afflux de céréales en Roumanie en ce moment illustre bien les conséquences de cette guerre en Europe actuellement.
    Il y a un autre aspect: nous continuons de considérer qu'il s'agit d'argent envoyé à l'Ukraine. Mais ce n'est pas que cela, n'est‑ce pas? Si nous y réfléchissons bien, il s'agit d'argent que nous dépensons pour créer de l'emploi et rajeunir une industrie complexe dans nos propres pays afin d'atteindre nos objectifs en matière de sécurité.
    Je vais vous donner un exemple. Au Royaume-Uni, nous ne produisons plus de canons d'artillerie. Nous devrions le faire, parce qu'il n'y a pas assez de machines à fabriquer des canons en Europe. Il y a là une occasion de passer à la vitesse supérieure, pour reprendre la terminologie du gouvernement britannique, en consacrant de l'argent à l'établissement d'installations de fabrication complexe et de forge de métaux au Royaume-Uni. Cela aura pour résultat de rendre l'artillerie ukrainienne plus durable, mais l'argent sera investi dans des collectivités défavorisées du Royaume-Uni.
    Si nous étions plus cohérents à ce sujet, je pense que nous pourrions changer le discours.
    Je vous remercie de cette réponse.
    Je pense que c'est un sujet dont nous devons parler davantage ici, chez nous, dans le cadre d'une approche coordonnée avec l'OTAN et nos alliés. Il est important, sur le plan politique, de veiller à ce que nos populations et le pays au complet comprennent bien la situation dans son ensemble et l'importance de continuer d'être un allié solide pour l'Ukraine.
    Ma prochaine question concerne la réponse de l'OTAN et la coordination au sein de l'OTAN.
    Avez-vous une opinion sur nos points forts qui ont peut-être surpris la Russie? Nous avons entendu de nombreux témoignages en ce sens. Cependant, dans une perspective d'avenir, comment le Canada peut‑il veiller à ce que les faiblesses ou les lacunes soient comblées au sein du système de l'OTAN et dans la coordination?
    Je pense que l'une des principales faiblesses au sein de l'OTAN tient à la distinction que j'ai faite entre une stratégie militaire, que l'OTAN a la mémoire musculaire et les mécanismes pour développer, et une stratégie politique. L'OTAN peut servir d'organe de coordination pour cette stratégie, et la stratégie militaire doit s'harmoniser à la stratégie politique, mais en réalité, l'OTAN n'a pas les mêmes pouvoirs sur le plan politique. J'observe qu'un certain nombre de pays de l'alliance ont une vision différente du résultat souhaité.
    Il y a de bonnes raisons pour que ce débat ne se tienne pas sous le regard du public. Cependant, je pense qu'il pourrait être très constructif que le Canada ou un autre pays organise une réunion afin de parvenir à une compréhension commune des visées de l'alliance, et pas seulement de ce que l'alliance essaie d'empêcher à court terme, sans antagoniser pour autant les différentes opinions au sein de l'alliance à ce sujet.
    Merci.
    Pour faire suite à vos commentaires sur la stratégie politique, cela fait‑il partie de la conversation sur l'avenir de l'Ukraine au sein de l'OTAN, ou s'agit‑il plutôt d'une simple coordination des forces de l'OTAN à long terme et pour assurer leur préparation, à votre avis? Franchement, l'OTAN doit toujours être prête et bien coordonnée au cas où ce genre de chose arriverait, mais vos observations sur la stratégie politique concernent-elles également l'avenir de l'Ukraine au sein de l'OTAN ou simplement l'avenir de l'OTAN en général, où il y aurait peut-être plus de travail ou plus de coordination à faire?

  (1015)  

    Je pense que ces observations sont surtout en lien avec la Russie. Si nous réfléchissons un peu à la position de la Russie, elle a déjà épuisé tout son pouvoir moral. Elle est engagée dans un conflit et selon la rhétorique russe, elle combat l'OTAN, pas militairement, mais c'est ainsi que le Kremlin parle de ce conflit.
    Peu importe où se situe la ligne de démarcation en Ukraine, l'OTAN et la Russie entretiennent une relation vivante et très dangereuse. Nous avons besoin que la Russie finisse par revenir à la table de négociations, sans penser qu'elle va obtenir tout ce qu'elle veut, mais en étant prête à faire des concessions, ce qui signifie aussi que les Russes doivent craindre l'alternative, n'est‑ce pas? Ils doivent croire que l'alternative au refus de négocier et de faire des concessions est moins positive pour la réalisation de leur vision de l'évolution du monde...
    Merci.
    M. Jack Watling: ... ce qui signifie peut-être que nous devons rendre la situation plus inconfortable.
    Malheureusement, nous allons devoir nous arrêter là.
    Je vous remercie.
    M. Jack Watling: Je suis désolé.
    Le président: Ce n'est pas grave.

[Français]

     Madame Michaud, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Watling, je vous remercie d'avoir accepté de témoigner et de répondre à nos questions.
    Tout à l'heure, j'ai demandé à d'autres intervenants comment vont les choses pour les troupes russes. Comme on le sait, il y a eu une fuite de documents secrets américains, contenant plusieurs informations relatives à la vision des États‑Unis concernant le conflit.
    Selon vous, cela a-t-il eu des incidences négatives sur le moral des troupes ukrainiennes ou sur la stratégie militaire? Cela a-t-il eu des incidences positives sur la Russie ou a-t-elle choisi d'ignorer ces documents puisqu'il aurait pu s'agir d'une tactique ou d'une stratégie des alliés? Qu'avez-vous à nous dire au sujet de cette fuite de documents?

[Traduction]

    Je crains que, pour des raisons juridiques, je ne puisse pas parler du contenu de la fuite, mais je peux vous parler de ses conséquences.
    Je pense qu'il y a eu un long processus d'établissement de la confiance avec l'Ukraine, qui a été très important pour nous assurer de l'aider comme il faut, parce qu'il y a beaucoup de choses qui ne sont pas nécessairement aussi utiles que d'autres. Il ne fait aucun doute que cela aura restreint l'accès à certains accords de partage d'informations et potentiellement ébranlé la confiance. Cette confiance peut être rétablie, mais cela ajoute des frictions. Il y a beaucoup de bonne volonté de part et d'autre pour veiller à ce que cela ne cause pas de problèmes, la situation ne me semble donc pas insurmontable, mais elle ne fait qu'ajouter des frictions.
    En revanche, les documents exposés fourniront sûrement des informations très utiles à l'armée russe, qu'elle pourra utiliser pour tenter de contrer ce que l'Ukraine essaie de faire dans ses opérations au cours des prochains mois.
    Cela dit, bien sûr, ces diapositives se rapportent à des informations datant d'un peu plus tôt cette année. Certains des problèmes peuvent donc déjà être chose du passé, ou en raison des dates indiquées sur les diapositives, l'information peut ne plus refléter la situation actuelle, mais il est certain que la pénurie de munitions de défense aérienne, dont nous avons beaucoup discuté, est un problème très critique qui doit être surmonté. Si l'armée de l'air russe peut bombarder l'Ukraine d'une altitude moyenne, elle infligera des dommages très importants aux forces ukrainiennes, c'est pourquoi la priorité est de résoudre ce problème.

[Français]

    Je vous remercie.
     Tout à l'heure, j'ai questionné les témoins sur les problèmes d'approvisionnement de la Russie. Essentiellement, on m'a répondu qu'il pouvait effectivement y avoir certains problèmes, mais que la Russie est un pays tellement grand et peuplé que cela ne risque pas, à long terme, d'être un si gros problème pour les troupes russes.
    Comme on le sait, Poutine se retrouve dans une situation de plus en plus difficile: il doit conserver l'appui de la population tout en augmentant l'effort de guerre. Récemment, la Russie a voté une loi permettant l'envoi d'ordres de mobilisation par voie électronique.
    Êtes-vous du même avis que les témoins de tout à l'heure? Pensez-vous que les problèmes d'approvisionnement ne sont pas si grands que cela à long terme? Pensez-vous que certains éléments sont bénéfiques pour les troupes ukrainiennes?

  (1020)  

[Traduction]

    La Russie est confrontée à de graves problèmes d'approvisionnement, en particulier pour certaines de ses armes complexes. Certaines composantes de ses armes sont fabriquées en Europe, aux États-Unis, en Corée du Sud, etc., et nous pourrions lui en limiter l'accès, ce qui nous permettrait de lui rendre la tâche plus difficile.
    Toutefois, jusqu'à la fin de l'année dernière, les Russes avaient beaucoup accéléré leur rythme de production de matériel de défense. Ils n'avaient pas encore commencé à cannibaliser ou à militariser leur industrie civile. Depuis le début de l'année, nous observons qu'ils commencent à convertir des installations civiles en installations de production militaire, ce qui conférera une capacité industrielle très importante à son armée.
    Il est également possible qu'ils reçoivent davantage de soutien de la Chine, sur les plans de la technique et de la main d'oeuvre, ou un soutien matériel de l'Iran et d'autres pays, ce qui élargirait l'accès de la Russie aux explosifs, entre autres, qui constituent actuellement un goulot d'étranglement pour les Russes.
    À l'heure actuelle, l'industrie russe est loin de suffire à répondre à ses besoins, mais tout dépendra de l'aptitude de la Russie à fédérer les divers pans de son industrie qu'elle mobilise. Elle pourrait commencer à se placer sur une trajectoire beaucoup plus favorable en matière de production dans le courant de l'année. Il y aura un décalage, mais cette trajectoire s'améliore.

[Français]

     Merci.
    Nous avons entendu dire que, depuis le début de la guerre environ, des enfants ukrainiens étaient adoptés par des familles russes. Selon ce que disait récemment l'Institute for the Study of War, le groupe Wagner entraînerait des enfants ukrainiens au combat. Avez-vous des informations là-dessus? Si oui, savez-vous ce que nous pouvons faire pour protéger les enfants ukrainiens de ce phénomène?

[Traduction]

    Je vous prie d'être très bref.
    La chose essentielle à faire pour les protéger consiste à empêcher les Russes d'occuper davantage de territoires et à essayer de négocier le retour des enfants qui ont déjà été saisis. Je me suis rendu dans des régions qui ont été occupées et j'ai consulté les dossiers. Il est clair que les forces armées russes ont emmené de nombreux enfants en Russie. Ce phénomène s'est produit dans toutes les zones occupées, et c'est évidemment une chose qui alarme énormément les Ukrainiens, parce qu'il y a tout un processus de filtrage qui a été mis en place pour séparer ces enfants de leur famille.
    Je vous remercie, madame Michaud.
    Madame Mathyssen, vous avez la parole pour six minutes, je vous prie.
    Monsieur Watling, je vous remercie de vous être joint à nous aujourd'hui.
    Plusieurs membres du Comité se sont rendus à Taïwan la semaine dernière. Nous avons discuté avec des représentants exceptionnels de la manière dont ils luttent contre les campagnes de désinformation menées par la Chine, et de la relation tendue entre les deux pays. Nous avons appris qu'ils étaient particulièrement proactifs dans ce dossier au sein de leur système d'éducation. Avec le dernier groupe de témoins, nous avons également appris que d'autres pays sont eux aussi très doués pour contrer la désinformation.
    Pourriez-vous nous parler des répercussions des campagnes de désinformation que mène la Russie au Royaume-Uni et des mesures prises pour s'en protéger?
    À mon avis, nous avons été témoins au cours des dernières années d'une obsession autour du phénomène de la désinformation sur les médias sociaux, comme s'il s'agissait du principal enjeu. Bien que la Russie exacerbe et instrumentalise ce problème, ce qu'elle fait en réalité, c'est manipuler des bases politiques.
    En réalité, la vraie cible des campagnes de désinformation russes, ce sont les élites de certains pays, des gens comme vous. Ce que nous observons, c'est que la Russie a mis en place une série de « centres d'influence spéciale », comme ils les appellent, à des fins de commandement et de contrôle, et qu'elle cible un certain nombre de pays, dont le Royaume-Uni, l'Allemagne, la France et les États-Unis. La Russie prend des mesures concrètes pour tenter de faire évoluer la politique de ces pays en diffusant des messages qui ciblent leurs élites.
    Aux États-Unis par exemple, ce genre de messages s'appuie sur un argumentaire selon lequel chaque dollar dépensé pour défendre l'Ukraine est un dollar qui affaiblit les intérêts américains dans la région indo-pacifique. Ce type de discours vise essentiellement à exacerber les débats politiques sur l'établissement des priorités. Un autre argument propagé par la Russie est que le gouvernement américain devrait investir pour répondre aux besoins nationaux et lutter contre l'inflation plutôt que pour soutenir l'Ukraine. En réalité, la Russie est partiellement responsable de l'augmentation de l'inflation en raison de ses politiques énergétiques et de la guerre économique qu'elle mène.
    À mon sens, nous devons absolument être plus proactifs dans l'identification des individus qui noyautent les élites des pays occidentaux afin de diffuser ce genre d'idées au sein de nos débats politiques. Nous devons cerner les individus qui ne participent pas de bonne foi à la vie politique.

  (1025)  

    Y a‑t‑il des pays qui excellent dans l'identification de tels individus? Le Royaume-Uni a‑t‑il mis en place une stratégie particulière? Pourriez-vous nous fournir quelques exemples?
    J'ai cru comprendre que l'Estonie a fait du très bon travail à cet égard. Il lui a fallu un certain temps pour cerner ce problème et pour obtenir le soutien politique interne nécessaire pour entamer le processus.
    Dans d'autres pays, cette stratégie est en train de se mettre en place, et l'on constate que les arrestations se succèdent à un rythme soutenu. Aux États-Unis, des actes d'accusation sont déposés de façon semi-régulière contre des individus soupçonnés de participer aux campagnes de désinformation russes.
     L'un des défis de ce processus est qu'il est pratiquement toujours politiquement controversé. En effet, le modus operandi des Russes est de cibler des organismes qui confèrent aux individus qu'ils recrutent une certaine légitimité politique, une forme de protection. Lorsque les gouvernements occidentaux tentent d'intervenir, la population a alors l'impression qu'ils s'attaquent à ces organismes qui mènent des débats politiques légitimes plutôt qu'à l'individu suspect lui-même.
    Je souhaite poursuivre une discussion que nous avons eue avec le groupe de témoins précédent. Mme Buck, ancienne ambassadrice du Canada auprès de l'OTAN, a parlé de la nécessité de renforcer les pays alliés moins puissants en évoquant des enjeux tels que la sécurité alimentaire et les répercussions observées partout dans le monde dans la foulée des interruptions de la production alimentaire en Ukraine.
    Pourriez-vous nous en dire plus sur la manière dont le Canada peut apporter sa contribution, et sur la façon dont les pays de l'OTAN, notamment le Royaume-Uni, peuvent renforcer les capacités de ses membres moins puissants afin qu'ils puissent tenir tête à la Russie sur le front diplomatique?
    J'imagine que vous voulez parler de nos partenaires à l'extérieur de l'OTAN plutôt que de nos alliés?
    Mme Lindsay Mathyssen: C'est exact.
    M. Jack Watling: Le problème, c'est qu'alors que nous avons concentré nos efforts directement sur notre propre écosystème politique et qu'une grande partie de nos renseignements proviennent de sources en anglais ou de médias européens, les Russes sont extrêmement actifs en Afrique et en Amérique du Sud. En vous rendant sur des groupes WhatsApp utilisés par les élites de ces pays, entre autres des députés, vous constaterez très rapidement qu'un grand nombre de documents russes traduits y circulent, et qu'aucun discours alternatif n'est activement mis de l'avant.
    Au Canada, comme un nombre important de personnes possèdent à la fois des compétences en matière de guerre à l'information et des connaissances linguistiques en français, votre population est beaucoup plus apte à comprendre la manière dont les Russes opèrent dans ce contexte. Vous devez vous mobiliser et contrer la propagande russe en veillant à mettre de l'avant une autre version des faits.
    Ce qu'il faut entre autres comprendre, c'est que du point de vue de la Russie, il s'agit d'une guerre à l'information à l'échelle mondiale.
    Chers collègues, il ne nous reste que 15 minutes pour 25 minutes de questions. Comme cela ne fonctionne pas, nous allons devoir nous contenter de séries de trois minutes chacune. Dans l'ordre, cela va être trois, trois, une, une, trois et trois minutes.
    Sur ce, madame Gallant, vous disposez de trois minutes, je vous prie.
    Je vous remercie.
    Quelle est la plus grande vulnérabilité de la Russie que nous pourrions exploiter?
    Il s'agit de l'absence de motivation de ses soldats et de la mauvaise qualité de leur formation. En fin de compte, la Russie manque de marge de manœuvre, parce qu'elle perd du terrain et des hommes sur le champ de bataille. Nous devons faire en sorte que cette dynamique se poursuive. Nous ne pouvons pas laisser la Russie tirer profit d'un cessez-le-feu, ce qui lui donnerait l'occasion de soumettre ses troupes mobilisées à un entraînement intensif et d'améliorer ainsi ses capacités militaires. Nous ne pouvons pas non plus laisser les forces russes attaquer les Ukrainiens dans des combats traditionnels, parce que l'armée ukrainienne n'a pas la puissance de feu nécessaire pour résister à son ennemi.
    C'est le moyen de maintenir la pression essentielle dont nous disposons et d'obliger la Russie à rester sur ses gardes de manière continue.

  (1030)  

    Quelles sont les capacités que vous considérez comme essentielles pour assurer la victoire de l'Ukraine dans cette guerre, et qui ne lui ont pas encore été fournies?
    Il s'agit d'un aspect ennuyeux du conflit, mais je rappelle que les Ukrainiens ne possèdent pas les droits de propriété intellectuelle pour accéder à des centaines et des centaines de très petites pièces détachées différentes. Ils ne disposent pas des dessins assistés par ordinateur leur permettant de produire ces pièces d'équipement. De plus, l'armée ukrainienne ne connaît pas le processus de traitement thermique adéquat ni la durée de vie de leurs équipements datant de l'ère soviétique, qui commence à se détériorer.
    À l'heure actuelle, les commandants ukrainiens doivent choisir entre renvoyer un obusier en Pologne sans savoir quand il leur sera réacheminé, et donc en perdre complètement la capacité, ou continuer à l'utiliser même si une partie est endommagée, ce qui risque d'entraîner une défaillance beaucoup plus grave du système.
    La mise en place d'un tel processus complexe de maintenance pour l'équipement militaire déjà fourni, qui comprend également les munitions et les canons, est un aspect du conflit trop souvent négligé. Nous devons pourtant continuer de nous y atteler.
    Existe‑t‑il un instrument législatif qui permettrait de mobiliser plus rapidement la production en ayant recours au complexe industriel civil?
    Je ne suis pas juriste, et je ne connais évidemment pas la législation canadienne, alors je crains que... Je suis un analyste militaire. J'imagine qu'adopter une loi en ce sens pourrait s'avérer très utile.
    Se pourrait‑il que contrairement au Canada, d'autres pays se soient dotés d'une politique de guerre leur permettant de faire en sorte que leurs industries civiles...
    Les États-Unis disposent d'une telle loi qui autorise le président à réquisitionner l'industrie à des fins de production de matériel de guerre, en effet.
    D'accord, j'ai terminé mon intervention, désolée.
    Je vous remercie.
    Je cède la parole à M. Fisher pour les trois prochaines minutes.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vous remercie d'avoir accepté l'invitation du Comité, monsieur Watling. Votre témoignage est absolument fascinant. Comme je ne dispose malheureusement que de trois minutes, je vais parler très vite et terminer mon préambule dès que possible pour vous laisser le temps de répondre à mes questions.
    Au tout début du conflit, les médias en parlaient 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui.
    Je pense que l'invasion russe a pris tout le monde de court. J'ai été surpris par les premiers succès des Ukrainiens, et je crois que la population canadienne l'a également été. À mon avis, nous avions tous cru le battage médiatique voulant que le mastodonte russe allait tout balayer sur son passage et remporter la victoire en trois ou quatre jours. Un analyste militaire comme vous ne croyait probablement pas à ce genre de scénario, mais nous avons tous été surpris et impressionnés par la résilience ukrainienne.
    À présent, ce conflit n'est plus un sujet d'actualité permanent. Jeme suis donc dit qu'un expert comme vous pourrait sans doute faire le point sur la situation actuelle et nous éclairer sur la manière dont vous envisagez l'évolution du conflit dans les prochains mois.
    Les prochains mois risquent de s'avérer décisifs. Si les forces ukrainiennes parviennent à faire reculer les Russes, le système de commandement russe pourrait perdre le contrôle et s'empêtrer dans une retraite chaotique. Le poste de commandement des forces russes se trouve à 120 kilomètres du front. Si cette retraite devait se produire, nous pourrions assister à un effondrement rapide des positions défensives russes.
    Inversement, si les forces ukrainiennes ne sont pas en mesure de franchir les positions défensives que les Russes ont mises en place, et qu'ils perdent beaucoup d'unités, le conflit pourrait s'enliser et devenir encore plus éprouvant.
    Nous devons faire pencher la balance du bon côté afin de déterminer la trajectoire que prend cette guerre. Plus le conflit se prolonge, plus les unités d'infanterie prennent de l'importance, et nous savons que la Russie est en mesure de remplacer ce type d'unités bien plus facilement que l'Ukraine. Les Ukrainiens auront de plus en plus besoin d'un avantage qualitatif pour être en mesure de repousser le rouleau compresseur russe.
    Il ne me reste que 45 secondes. Que pensez-vous du rôle joué par la Chine en tant que pays ami et allié de la Russie? À votre avis, la Chine fournit-elle réellement de l'équipement et d'autres ressources aux forces russes, ou se décidera-t-elle plutôt à le faire au cours des prochains mois?
    Dès les premiers jours du conflit, la Chine a commencé à fournir à l'industrie russe du matériel microélectronique et d'autres composants à machines-outils. Elle a également joué un rôle important en matière de financement, même si elle a obtenu de nombreuses concessions en retour à cet égard. La Chine fournit également de l'expertise militaire aux Russes, et je crois qu'elle organise des exercices communs de formation entre ses troupes et les forces russes.
    Ce que nous ne savons pas encore, c'est si la Chine compte construire des usines sur le sol russe et déplacer du personnel et des techniciens pour les faire fonctionner. Il s'agit là d'un risque majeur. Je pense que ce scénario est beaucoup plus probable que la fourniture directe de munitions, car la Chine tient à présenter une image de neutralité dans ce conflit.

  (1035)  

    Je vous remercie, monsieur Fisher.

[Français]

     Madame Michaud, vous avez la parole pour une minute.
    Merci, monsieur le président.
    Comme on le sait, les céréales ukrainiennes destinées à des pays étrangers transitent par l'Union européenne depuis que l'itinéraire d'exportation traditionnel passant par la mer Noire est bloqué par l'invasion russe. On peut imaginer que cela a eu des répercussions sur les délais de livraison, par exemple, ainsi que sur les coûts.
    La Russie menace de suspendre l'accord sur les exportations de céréales ukrainiennes si l'Occident ne lève pas ses restrictions sur le secteur agricole russe. Si c'est le cas, quel genre de répercussions cela peut-il avoir sur les pays qui reçoivent ces céréales, notamment le Canada?

[Traduction]

    Je pense que les répercussions les plus importantes vont se faire ressentir dans des pays comme le Liban, le Yémen et l'Égypte, dans lesquels l'acheminement en céréales en provenance de l'Ukraine est essentiel pour assurer la sécurité alimentaire des populations. Les Russes demeurent prudents sur cet enjeu précis et semblent prêts à négocier. Par contre, si la malnutrition et la famine devaient frapper les pays que j'ai mentionnés, ils ne se gêneront pas pour faire porter le blâme à l'OTAN.
    Si la dégradation de la sécurité alimentaire en vient à être perçue dans ces pays comme étant due au blocus russe en Ukraine, les relations diplomatiques risquent de s'envenimer. J'ajouterais que pour le moment, la Russie entretient de bons rapports avec l'Égypte, et se porte garant de la stabilité du gouvernement Assad en Syrie.
     Je pense que nous exerçons une certaine influence sur le front diplomatique, et que nous devons tout faire pour éviter une tragédie humanitaire dans les pays dont j'ai parlé.
     Je suis désolé d'avoir à vous couper la parole de nouveau.
    Madame Mathyssen, vous avez la parole pour une minute.
    En fait, j'aimerais revenir sur l'une des questions que Mme Gallant vous a posées tout à l'heure. Elle vous a demandé quelle était la plus grande faiblesse de la Russie, et votre réponse a porté sur le moral des troupes, sur leur formation, etc. D'autres témoins nous ont rapporté que la plus grande vulnérabilité de la Russie est le fait qu'il s'agit d'une dictature, et que l'utilisation de sanctions contre les oligarques est très efficace dans le cas de pareil régime.
    Bien que vous ayez dit que ce n'est pas l'enjeu majeur, seriez-vous d'accord pour dire que les sanctions s'avèrent efficaces? Par ailleurs, y a‑t‑il moyen de renforcer les sanctions imposées à la Russie par le Canada et le reste des pays occidentaux?
    Les sanctions représentent un outil efficace, en effet. Par contre, nous ne sommes pas très proactifs en ce qui concerne la fermeture des entreprises que possèdent les oligarques russes. Il m'est arrivé plusieurs fois de voir un oligarque sanctionné mettre sur pied une société-écran et y déplacer des actifs. Les oligarques peuvent conclure un accord privé avec une tierce partie qui détient la société en leurs noms, ce qui leur permet de poursuivre leurs activités. Ce stratagème est vraiment inquiétant.
    Nous avons lancé une vaste initiative visant à surveiller la contrebande d'équipements militaires acheminés vers la Russie à partir des pays occidentaux, et nous avons constaté au cours des derniers mois une augmentation régulière de ce genre de trafic [difficultés techniques].
    Je pense que nous venons de perdre la communication avec M. Watling.
    Il est parti. Ce doit être les Russes...
    Il savait que M. Bezan allait lui poser une question très pointue, et c'est pourquoi il a pris la poudre d'escampette.
    Je propose de passer aux travaux du Comité en attendant son retour.
    Ce serait effectivement une manière efficace de procéder.
    Une voix: Il est de retour.

  (1040)  

    Je suis désolé, je n'ai aucune idée de ce qui s'est passé.
    Ce doit être la faute de la Russie ou de la Chine. C'est l'un ou l'autre.
    Monsieur Bezan, à vous la parole pour trois minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je serai très bref, et j'espère qu'aucune opération de désinformation russe ne vienne gâcher le témoignage de M. Watling.
    Monsieur Watling, vous avez évoqué la question de la guerre d'usure à laquelle l'Ukraine est confrontée, et vous avez parlé notamment de la sanglante bataille de Bakhmut. Je m'interroge sur certains commentaires faits hier par Prigozhin, le propriétaire de Groupe Wagner, qui a déclaré que la guerre devait prendre fin et que la Russie devait se contenter des territoires qu'elle a conquis. Il n'appelle donc pas à de nouvelles avancées.
     Le Groupe Wagner a commis des atrocités de guerre, non seulement en Ukraine, mais également dans d'autres pays comme la Syrie. Quelle est, selon vous, la logique qui sous-tend ces propos, des propos qui par ailleurs continuent de mettre Prigozhin en porte-à-faux avec Poutine.
    Ensuite, pourriez-vous parler de la résilience des Ukrainiens eux-mêmes, tant dans la bataille de Bakhmut que sur d'autres théâtres d'opérations, et de leur capacité à utiliser des équipements militaires plutôt archaïques tout en continuant à surprendre tout le monde par leur efficacité au combat?
    Au cours de l'hiver dernier, les forces russes ont tenté de pallier aux pertes de ses propres unités et ont donc permis au Groupe Wagner de prendre le contrôle d'un grand nombre de prisonniers mobilisés afin de maintenir la pression sur l'armée ukrainienne en minimisant ses pertes. Par conséquent, le Groupe Wagner a reçu une grande quantité d'équipement fourni par le GRU par l'intermédiaire du ministère russe de la Défense. La livraison de cet équipement a été interrompue une fois que l'armée russe a repris les rênes de l'offensive en Ukraine. Prigozhin s'est montré critique à de nombreuses reprises non pas de Poutine, mais du ministre de la Défense, Shoigu, ainsi que du général Gerasimov, le chef de l'état-major. Il adresse ces critiques en tant que représentant d'une faction différente au sein du Kremlin. Je pourrais entrer dans les détails de leur identité, mais cela dépasserait sans doute la portée du Comité. Toutefois, nous avons observé plusieurs luttes intestines et de politiques...
    Il serait intéressant d'envoyer une réponse écrite au Comité afin de fournir ce genre de renseignements sur Prigozhin et sur le rôle qu'il joue au sein du jeu politique russe. Je pense qu'il s'agit d'un aspect du conflit qui nous intéresse tous, mais le temps ne vous permet pas de couvrir ce sujet aujourd'hui.
    Pour vous permettre de gagner du temps, je serai ravi de transmettre une réponse écrite au greffier.
    Faute de temps, nous allons devoir nous arrêter là.
    Chers collègues, j'entends du bruit. Je suis certain que la conversation que vous menez est importante, mais elle est loin de l'être autant que le témoignage de M. Watling. Ainsi, je vous demanderais de bien vouloir baisser le ton.
    Je cède la parole à Mme Lambropoulos pour les trois dernières minutes.
     Merci, monsieur le président. Monsieur Watling, je vous remercie de vous être joint à nous.
    Vous avez parlé de la nécessité pour l'OTAN de voir l'Ukraine remporter cette guerre afin de prévenir d'éventuelles menaces, et du fait que l'issue du conflit dépendait encore largement des actions que nous posons à ce stade. Les prochains mois seront déterminants, et l'OTAN doit aider l'Ukraine afin d'éviter de sombrer dans une guerre d'usure dans laquelle la Russie finirait par prendre le dessus.
    Si vous étiez présent dans une salle avec les décideurs de l'OTAN aujourd'hui, quel serait votre conseil pour qu'ils aident l'Ukraine à repousser les forces russes au cours des prochains mois?
    Je leur dirais que nous n'avons plus besoin de grandes déclarations politiques. L'important n'est pas que des ministres se mettent en scène en signant de nouveaux équipements militaires; il s'agit de revoir l'ensemble des contrats dans les moindres détails pour s'assurer que l'équipement que nous avons déjà fourni puisse être entretenu, ce qui représente un travail pénible et ingrat. Il devrait y avoir une formation spécifique pour le personnel des brigades et des bataillons afin que les Ukrainiens puissent se familiariser avec toutes les différentes capacités qui leur sont fournies. Nous devons veiller à ce que la filière de formation soit cohérente entre l'opération Interflex au Royaume-Uni, où nous assurons la formation de base, et la formation des compagnies et des bataillons dans toute l'Europe, afin que les Ukrainiens disposent d'une relève d'unités plus performantes que celles de leurs ennemis.
    Il en va de même pour les chaînes d'approvisionnement de notre infrastructure industrielle. Au lieu d'envoyer de l'équipement dispendieux et flamboyant à l'Ukraine, il s'agit d'effectuer un travail minutieux de stockage, de vérification et de livraison. Tout est une question de discipline et de suivi.
    Je vous remercie.
    Je m'en tiendrai là. Je vous suis reconnaissante pour votre témoignage. Vous nous en avez beaucoup appris aujourd'hui.
    Je tiens moi aussi à vous remercier, monsieur Watling.
    Je regrette de devoir mettre fin à cette séance. Je suis certain que nous pourrions continuer à poser des questions pendant des heures, mais ce n'est pas possible.
    Au nom du Comité, je vous remercie.
    Chers collègues, avant de nous quitter, j'aimerais d'abord que nous réglions quelques questions de régie interne, qui sont surtout des renseignements.
    Nous avons adopté le rapport du Sous-comité, et il était prévu que nous commencions par l'étude sur la santé mardi prochain. Nous pensions rencontrer des fonctionnaires, mais comme ils ne sont pas disponibles, nous pourrions mener une étude hybride mardi prochain. Si les témoins pour l'étude sur la santé ne sont pas disponibles, nous pourrons inviter un témoin américain pour discuter de l'analyse de la menace qui pèse sur l'Ukraine. Restez à l'affût, car les détails pour notre séance du mardi ne sont pas encore finalisés.
    Par ailleurs, la ministre Anand a accepté d'être présente le 2 mai pour notre séance portant sur le budget des dépenses. La séance du 5 mai sera annulée en raison de la tenue du congrès du Parti libéral. La séance du 19 mai sera annulée en raison du congrès du Bloc québécois.
    Les séances du 9, 12 et 16 mai sont réservées à l'étude sur la santé et les services de transition. Avant le 1er juin, vous recevrez une invitation de l'ambassade de France pour un souper. Le 8 mai, le vice-ministre polonais est disponible, mais ne pourra rencontrer les membres du Comité qu'à 13 h 15. Si vous pouviez m'indiquer qui pourrait être disponible à cette rencontre, le greffier prendra des dispositions à cet égard.
    Allez‑y, madame Gallant.

  (1045)  

    Merci, monsieur le président.
    À un moment donné, si aucun témoin n'est prévu à l'ordre du jour pour une séance, pourrions-nous faire savoir à l'ambassadeur de Taïwan au Canada qu'il pourrait être appelé à brève échéance à présenter une mise à jour de la situation dans la région indopacifique, notamment en ce qui concerne Taïwan? Ce pourrait être possible si nous sommes en mesure de respecter l'ordre du jour des réunions de la semaine prochaine.
    Je vous remercie.
    Je n'aurai certainement pas d'objection à ce sujet. Je m'en souviendrai. Nous verrons comment nous pouvons nous débrouiller pour mardi. Idéalement, nous devrions nous en tenir à ce dont nous avons déjà convenu, mais en cas d'écart majeur, nous allons...
     Y a‑t‑il d'autres questions ou commentaires?
     Sur ce, la séance est levée.
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