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HERI Rapport du Comité

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ANNEXE F

LE RILE DE LA LOI SUR LA CONCURRENCE

Cette annexe examine le rôle éventuel de la Loi sur la concurrence et du Bureau de la concurrence dans l'évolution de l'industrie du livre au Canada et, par ricochet, la place de la Loi et du Bureau dans l'étude entreprise par le Comité du patrimoine.

Il y aurait deux questions incontournables que doit poser cette étude de l'édition au Canada. La première a trait à l'impact de Chapters (et autres grandes chaînes de librairies et, éventuellement, des nouvelles technologies) sur l'accès aux ouvrages canadiens par le public canadien. La seconde a trait à la viabilité des libraires canadiens indépendants face à la nouvelle concurrence. Les deux ne sont pas nécessairement liées. Le Bureau de la concurrence ne s'intéresse qu'à la seconde, et uniquement si la concurrence de Chapters était déloyale, au sens juridique du terme.

Le mandat du Bureau de la concurrence est de préserver et favoriser une concurrence loyale au Canada et de veiller à ce que les entreprises canadiennes se conforment aux lois qui relèvent de sa compétence. La loi dont le Bureau se préoccupe au premier chef est la Loi sur la concurrence1, dont l'article 1.1 dispose :

La présente loi a pour objet de préserver et de favoriser la concurrence au Canada dans le but de stimuler l'adaptabilité et l'efficience de l'économie canadienne, d'améliorer les chances de participation canadienne aux marchés mondiaux tout en tenant compte du rôle de la concurrence étrangère au Canada, d'assurer à la petite et à la moyenne entreprise une chance honnête de participer à l'économie canadienne, de même que dans le but d'assurer aux consommateurs des prix compétitifs et un choix dans les produits.

L'accent est mis sur la concurrence, et par concurrence le Bureau entend le processus de concurrence. Plutôt que de tenter de garantir une place aux petites et moyennes entreprises biens établies, le Bureau s'efforce de refréner les pratiques anticoncurrentielles de la part des grandes entreprises qui pourraient désavantager les petits acteurs -- qu'ils soient bien établis ou des acteurs éventuels.

Quiconque souhaite faire intervenir le Bureau doit pouvoir prouver l'existence de pratiques anticoncurrentielles au sein de l'industrie. Il ne suffit pas d'attirer l'attention sur la grande taille d'un acteur et de faire valoir qu'il pourrait abuser de sa position (bien que le Bureau surveillera sûrement les pratiques d'un participant ayant une large part du marché2, qui continue de croître).

Aux termes de la Loi sur la concurrence, le Bureau de la concurrence s'occupe de questions aussi bien criminelles que civiles. Celles qui pourraient intéresser cette étude sont indiquées dans le tableau 3.2.

 

Suite aux modifications apportées à la Loi en 1999, la publicité trompeuse peut aussi être considérée comme de nature civile, ce qui implique un critère moins sévère pour établir l'existence d'une infraction.

Encore une fois, la seule taille de la part du marché ne suffit pas à démontrer l'existence d'abus. Les entreprises de grande taille sont souvent dynamiques et innovatrices -- deux caractéristiques que le Bureau de la concurrence souhaite favoriser. Par ailleurs, une grande entreprise pourrait le devenir davantage en évinçant des concurrents du marché, situation qui relève de la Loi sur la concurrence. Des situations énumérées ci-dessus, les détracteurs et concurrents de Chapters évoquent souvent comme préoccupation majeure l'abus possible de sa position dominante.

Pour qu'il y ait abus de position dominante, trois conditions doivent être réunies3 :

1. Une ou plusieurs personnes contrôlent sensiblement ou complètement une catégorie ou espèce d'entreprises à la grandeur du Canada ou d'une de ses régions.

2. Cette ou ces personnes se livrent ou se sont livrées à une pratique anticoncurrentielle.

3. Cette pratique a ou aura vraisemblablement pour effet de diminuer sensiblement la concurrence dans un marché (art. 79).

L'article 78 énumère des « agissements anticoncurrentiels », mais la liste n'est pas exhaustive, de sorte que le Bureau de la concurrence a la latitude d'examiner toute pratique d'une entreprise qui pourrait avoir des effets négatifs sur la concurrence. L'abus de position dominante étant une affaire civile, la preuve est fondée sur la « prépondérance des probabilités » plutôt que sur une preuve « hors de tout doute raisonnable » comme dans le cas d'une affaire pénale. Il est à noter que pour la troisième condition, la clé est la diminution « sensible » de la concurrence. Il est possible qu'un nouvel arrivant dans une industrie élimine des concurrents en étant plus efficace; il s'agit certes d'un effet « sensible » pour les entreprises évincées du marché, mais on ne saurait automatiquement présumer que la cause en est l'abus de position dominante.

 


1 Les autres sont la Loi sur l'emballage et l'étiquetage des produits de consommation, la Loi sur l'étiquetage des textiles et la Loi sur le poinçonnage des métaux précieux.

2 Pour le Bureau, 35 % du marché est le seuil habituel à partir duquel la surveillance serait de mise.

3 Ces idées sont tirées du document de Margaret Smith, Les fusionnements et l'abus de position dominante, Bibliothèque du Parlement, Bulletin d'actualité 91-3F, révisé le 10 septembre 1998; et de Robert S. Nozick, The 2000 Annotated Competition Act, Toronto, Carswell (Thomson Professional Publishing), 1999.