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RNNR Rapport du Comité

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Le 24 février 2016, le Comité a convenu à l’unanimité, par motion, de réaliser une étude sur l’avenir des industries pétrolière et gazière du Canada, et de se pencher particulièrement sur l’innovation, les solutions durables et les débouchés économiques. Au cours de sept réunions, le Comité a entendu 33 témoins qui ont parlé des diverses tendances actuelles ou émergentes qui opèrent des changements dans ce secteur. Le Comité est maintenant heureux de présenter son rapport.

INTRODUCTION

Le secteur pétrolier et gazier occupe une place importante dans l’économie canadienne. Selon un témoin du gouvernement, il représenterait près de 8 % du produit intérieur brut (PIB), des exportations annuelles de 137 milliards de dollars, et quelque 200 000 emplois directs partout au pays[1]. Le Canada a les 3es réserves de pétrole du monde et produit près de 5 % du pétrole brut et de 5 % du gaz naturel du monde entier, ce qui le place au 4e et au 5e rang respectivement des producteurs mondiaux de ces ressources[2]. En 2014, le taux de production du Canada était en moyenne de 4,3 millions de barils de pétrole brut par jour, et de 444 millions de mètres cubes de gaz naturel par jour[3].

Le Canada est un exportateur net de pétrole brut et de gaz naturel; 97 % de ses exportations de pétrole, et 100 % de ses exportations de gaz naturel, sont vendues aux États-Unis, tandis que le reste est expédié surtout en Europe et en Amérique du Sud. En 2014, les exportations de pétrole brut représentaient des recettes d’exportation nettes de 70 milliards de dollars, et les exportations de gaz naturel, des recettes de 11 milliards de dollars (le total des recettes d’exportation énergétique nettes du Canada était de 85 milliards de dollars[4]). La grande majorité de ces exportations se faisaient au moyen de pipelines, qui sont eux aussi des générateurs de richesse. Par exemple, l’exploitation des pipelines en 2015 a ajouté 11,5 milliards de dollars au PIB du Canada et soutenu quelque 34 000 équivalents d’emploi à temps plein[5]. Actuellement, seul le pétrole peut être expédié par navire à partir des terminaux portuaires, parce que le Canada ne dispose pas encore de l’infrastructure nécessaire (terminaux de liquéfaction) à l’exportation du gaz naturel liquéfié (GNL) outre-mer.

Les revenus d’emploi et la productivité du travail sont tous deux considérés comme relativement élevés dans le secteur pétrolier et gazier. Selon le témoin d’Unifor, la rémunération dans le domaine de la distribution du gaz naturel est de 50 % supérieure au salaire industriel moyen au Canada; dans le domaine de l’extraction du pétrole et du gaz, elle est même du double[6]. Un témoin de la Chambre de commerce du Canada a estimé que la productivité du travail d’extraction pétrolière et gazière générait une valeur ajoutée de 1,36 million de dollars par emploi et par année, ce qui est 15 fois plus élevé que la moyenne nationale de tous les secteurs[7].

Outre deux projets de croissance représentant un investissement de quelque 15 milliards de dollars, aucun nouveau grand projet d’exploitation des sables bitumineux n’est prévu dans un avenir rapproché. C’est en partie parce que l’industrie considère qu’un projet ne peut pas être rentable si le prix du pétrole brut est en deçà de 50 $ US le baril[8]. Cependant, des projets d’envergure – oléoducs et gazoducs entre l’Alberta et les côtes Est et Ouest, usines et ports qui pourraient desservir l’éventuelle industrie du GNL de la Colombie-Britannique – sont actuellement à divers stades du processus d’évaluation.

Les principaux moteurs : défis et possibilités

Les sections ci-dessous présentent les principaux facteurs qui, selon les témoignages entendus, ajoutent à l’incertitude à court, moyen et long termes que connaît actuellement le secteur pétrolier et gazier. Les arguments sont regroupés sous quatre thèmes : 1) les moteurs économiques, 2) sociaux, 3) environnementaux et 4) technologiques.

A. Moteurs économiques

1. Prix du pétrole et du gaz naturel

De 2011 à 2014, le pétrole brut s’est maintenu de manière relativement stable à un prix record de plus de 100 $ US le baril; sa chute rapide en dessous de 50 $ US le baril en moins d’un an a donc eu un impact dramatique sur l’industrie du pétrole et du gaz au Canada[9]. L’investissement a ralenti, les revenus de beaucoup d’entreprises et de gouvernements ont dégringolé, et les exploitants des sables bitumineux – un secteur aux coûts de production très élevés – ont dû réduire les coûts, désaffecter de l’équipement, faire des mises à pied et retarder ou annuler des investissements prévus. On estime que plus de 40 000 emplois directs et 100 000 emplois indirects ont été perdus à la grandeur du Canada[10].

Selon le témoin de Suncor Énergie, l’industrie se concentre pour l’instant sur sa survie, vu la faiblesse du cours du pétrole et du gaz naturel. L’intervenant a expliqué que « les nouveaux investissements reposeront sur les facteurs économiques des projets dont le principal est le prix du pétrole[11] ». À cet égard, le Comité a entendu que le prix du pétrole doit atteindre de 50 à 70 $ US le baril pour que l’investissement dans de nouveaux projets d’extraction soit justifié (dans le secteur des sables bitumineux, certains projets n’étaient même pas considérés rentables quand le baril se vendait 92 $ US[12]). Les fluctuations futures restent incertaines, mais le professeur Moore ne pense pas que le prix du pétrole dépassera 60 $ le baril[13].

2. Coûts de production

La chute du cours du pétrole cause des difficultés particulières pour les sables bitumineux parce qu’ils sont un environnement à forts coûts de production. Le Comité a appris que certains projets d’extraction des sables bitumineux ont les frais de production les plus élevés au monde, et que ces coûts de production et d’exploitation élevés sont un risque pour la compétitivité de l’industrie, surtout quand on y ajoute les dépenses de performance environnementale ou climatique. Par exemple, le prix des intrants, comme la main-d’œuvre et l’électricité, influe aussi sur la rentabilité des projets[14].

Dans certains cas, les coûts d’exploration et d’exploitation élevés font en sorte qu’il est plus difficile pour les entreprises d’attirer des investisseurs qui perçoivent un risque accru de s’engager dans de nouveaux projets[15]. Ainsi, des gisements prometteurs, comme les réservoirs étanches des Territoires du Nord‑Ouest, restent inexploités parce que ces « projet[s] qui présente[nt] un risque élevé » nécessitent non seulement de l’infrastructure lourde comme des routes, mais aussi de l’infrastructure légère pour soutenir une population de travailleurs. Or, c’est seulement « [u]ne fois qu’on pourra faire valoir cette ressource ou réduire les risques qui y sont associés[16] » que les investisseurs sont prêts à construire ce second type d’infrastructure.

3. Capacité d’exportation

Certains témoins ont fait valoir que la croissance future de l’industrie pétrolière et gazière en amont dépend de sa capacité d’expédier ses produits sur les marchés internationaux, que ce soit par pipeline, chemin de fer, camion ou navire. Les intervenants ont convenu dans l’ensemble que les pipelines sont l’option optimale, vu qu’ils permettent le transport à un coût relativement faible et offrent une meilleure performance environnementale que les autres moyens terrestres de transport, comme le rail. Le témoin de l’Association canadienne des producteurs pétroliers (ACPP) a avancé que les producteurs canadiens de pétrole et de gaz d’amont continueront de vendre leurs produits à rabais s’ils ne se dotent pas d’une infrastructure pour exporter vers les marchés étrangers[17].

Plusieurs projets d’oléoducs entre les sables bitumineux de l’Alberta et les marchés d’exportation ont été proposés ces dernières années. Comme l’a signalé le témoin de l’Association canadienne de pipelines d’énergie (ACPE), plusieurs pipelines, dont la canalisation 9 et le premier pipeline Keystone, ont été construits ces 10 dernières années au terme du processus réglementaire de l’ONE[18]. Mais les pipelines sont récemment devenus un sujet d’appréhension accrue dans la population. C’est que, selon la professeure Gattinger, des questions relatives aux politiques, comme le changement climatique, la réconciliation avec les Autochtones et l’impact cumulatif de la construction des infrastructures, demeurent non résolues[19].

4. Demande future

La demande pour les produits pétroliers et gaziers du Canada augmentera-t-elle au cours des années à venir, ou diminuera-t-elle? Qu’en sera-t-il à long terme? Les avis des témoins étaient partagés. Certains ont avancé que le pétrole et le gaz naturel resteront des éléments majeurs du mixte énergétique mondial à moyen et à long termes, alors que d’autres croyaient que le ralentissement de la croissance économique à court terme en Asie[20] – marché sur lequel le Canada fonde beaucoup ses espoirs d’exportation de GNL – et la réduction de la demande américaine de pétrole et de gaz auraient probablement un effet à la baisse sur la demande des ressources pétrolières et gazières du Canada[21].

5. Investissement

On a dit au Comité que les investissements dans le secteur continueront probablement à décliner à moins que le cours ne se redresse. Le témoin de l’ACPP a estimé que les investissements de capitaux dans le secteur pétrolier du Canada en 2016 seraient de 62 % inférieurs à ceux de 2014 – une baisse d’environ 50 milliards de dollars[22]. Il en résulte que 3 500 nouveaux puits seront forés en 2016, alors que 10 000 l’ont été en 2014[23].

D’autres facteurs jouent dans les décisions d’investissement, comme l’accès aux marchés, l’infrastructure de transport, la responsabilité pour les émissions de carbone, la réglementation sur l’environnement et le climat, les droits Autochtones et la confiance du grand public. C’est pourquoi, comme l’a avancé le représentant de l’ACPP, les entreprises canadiennes à la recherche d’investissements doivent, depuis quelques années, « passer beaucoup de temps à vanter les mérites du Canada, plutôt que d’avoir seulement à vendre leur projet[24] ».

Selon certains témoins, ces difficultés relatives à l’investissement portent particulièrement préjudice aux petites ou aux nouvelles entreprises qui ont un accès limité aux ressources financières[25]. D’autres ont dit craindre l’impact négatif de la baisse de l’investissement sur les industries secondaires et tertiaires qui approvisionnent en produits et services le secteur pétrolier au gazier[26].

6. Concurrence

Des témoins ont dit au Comité que certains pays producteurs de pétrole ou de gaz naturel jouissent d’avantages concurrentiels – par exemple, un accès géographique plus stratégique aux marchés, une meilleure infrastructure d’exportation, des coûts d’opération plus faibles, etc. – par rapport au Canada. Par exemple, les nouvelles technologies qui ont permis l’exploitation de ressources gazières jusque-là inaccessibles aux États‑Unis (à savoir la fracturation hydraulique) ont modifié la balance commerciale canado-américaine pour ce qui est de certains produits gaziers[27]. De plus, il sera difficile pour les entreprises canadiennes de conclure des contrats d’exportation de GNL avec les pays asiatiques si d’autres pays réussissent à développer leurs infrastructures d’exportation avant que le Canada le fasse. Le témoin de Woodfibre LNG a dit ce qui suit :

« Les Américains, qui étaient nos clients par le passé, sont maintenant nos concurrents. Ils ont été en mesure de vendre du gaz de la Louisiane, du Sud-Est, et du golfe du Mexique à des taux très bas. […] Au plan économique, nous sommes avantagés par la distance. Nous sommes plus proches qu’eux des marchés asiatiques, mais notre situation économique est très cruciale[28] ».

Le professeur Elgie, signalant que l’industrie pétrolière et gazière voit dans la performance environnementale une menace majeure pour sa compétitivité, a dit : « [N]ous devons cesser de considérer que la performance environnementale est une menace à la compétitivité, mais [la considérer] plutôt comme une opportunité[29]. » De même, le représentant de RNCan a dit : « Nous comprenons qu'il faut relever la barre beaucoup plus haut sur le plan de la performance environnementale et des coûts afin d'assurer la survie de l'industrie, pas seulement dans l'immédiat, mais aussi à long terme[30] ». Par contre, le témoin de la Chambre de commerce du Canada a averti que certaines politiques environnementales, en l’occurrence la tarification du carbone, pourraient saper la compétitivité du Canada : « [À] moins d’être aligné sur celui de nos partenaires commerciaux, le prix du carbone [pourrait] entraîner une perte de compétitivité[31] ».

B. Moteurs sociaux

Le Comité a entendu que l’avenir des industries pétrolière et gazière du Canada est indissociable de la perception qu’en a la société. À cet égard, les aspects les plus importants sont l’intégration des Autochtones et l’appui du public aux projets d’exploitation des ressources.

Les gouvernements étant tenus par la loi de consulter les collectivités autochtones et, s’il y a lieu, de trouver des accommodements avec elles, l’adhésion des Autochtones est un facteur de succès essentiel de nombreux projets. Le témoin de l’Indigenous Health Alliance a dit que, en 2013, « les tribunaux avaient donné raison aux collectivités autochtones dans plus de 150 affaires concernant le secteur des ressources du Canada, et ce nombre a probablement augmenté depuis ». Il a ajouté que, dans le contexte de la revendication, fondée sur les traités, des droits aux terres et aux ressources, « l’obligation de consulter et d’accommoder les groupes autochtones a une incidence très concrète sur les résultats des projets de mise en valeur des ressources. Les Autochtones ne confèrent pas une acceptation sociale à des projets d’exploitation des ressources; ils donnent un permis en bonne et due forme[32]. »

Les particuliers et les collectivités qui croient que leurs intérêts seront brimés par la réalisation d’un projet d’exploitation des ressources peuvent s’y opposer de nombreuses manières. Certains témoins ont signalé que, ces dernières années, les controverses relatives à l’énergie se sont accrues, et que les inquiétudes que la population peut avoir à propos d’autres aspects de l’exploitation des ressources ont commencé à davantage s’infiltrer dans le mécanisme d’approbation réglementaire[33]. La professeure Gattinger a décrit les tendances qui ont sapé l’appui public aux projets énergétiques, notamment : la baisse de confiance « générale » dans les institutions publiques et privées, les autorités et les experts; le désir de la population de participer davantage à la prise de décisions; la montée de l’opposition au « corporatisme » et aux carburants fossiles, une préférence pour les projets locaux à petite échelle; et une diminution de la tolérance au risque, ainsi que de la confiance dans la capacité des gouvernements et de l’industrie d’atténuer ou de gérer le risque[34].

C. Moteurs environnementaux

De nombreux témoins ont mentionné que les préoccupations environnementales – comme la pollution de l’eau, la perturbation des espèces naturelles et des écosystèmes, et les émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur et de ses produits – sont une menace sévère et constante pour la réputation et la compétitivité de l’industrie. Par exemple, le professeur Elgie a dit que la « mauvaise réputation environnementale » imputée à l’industrie pétrolière et gazière du Canada constitue une importante barrière à l’approbation des projets de pipelines au pays ; le coût économique de cette mauvaise réputation serait de 10 à 15 milliards de dollars par année, « montant largement supérieur à ce que paieraient les producteurs à la suite de l'application d'un régime de tarification du carbone dans les années à venir[35] ».

Toutefois, selon certains intervenants, c’est probablement la crainte du changement climatique qui aura l’effet le plus déterminant sur l’avenir du secteur. Par exemple, on a dit au Comité qu’étant donné que les sables bitumineux ont des niveaux d’émission de GES plus élevés que la moyenne, la production accrue de pétrole et de gaz résultant de l’accès à de nouveaux marchés pourrait empêcher le Canada de réduire ses émissions de GES. Pour certains intervenants, le Canada ne réussira probablement pas à respecter ses engagements internationaux de réduction des GES à moins que de nouvelles technologies ne puissent diminuer radicalement l’empreinte carbone des sables bitumineux[36]. Les régions à fortes émissions industrielles, comme les sables bitumineux de l’Ouest, devraient de fait se ressentir davantage des efforts de décarbonisation[37].

D. Moteurs technologiques

Les industries pétrolière et gazière ne pourront conserver leur compétitivité sur la scène mondiale que si elles améliorent les technologies et les processus de manière à réduire le coût économique et environnemental de leurs activités. Certains témoins ont parlé notamment de technologies qui pourraient être appliquées directement à l’extraction des ressources, ou encore de techniques qui pourraient réduire la dépendance à l’égard des produits pétroliers. Les nouvelles technologies ouvriront la voie à de nouveaux modèles d’affaires et services, lesquels susciteront probablement une évolution du comportement des consommateurs. De ces changements découlera un bouleversement des structures et des relations au sein du système énergétique et avec celui-ci.

La voie de l’avenir : Innovation, solutions durables et débouchés économiques

À la lumière des témoignages entendus, le Comité aborde dans les pages qui suivent cinq thèmes qui joueront pour beaucoup dans la viabilité et la compétitivité de l’industrie pétrolière et gazière du Canada : 1) Favoriser l’investissement et les débouchés commerciaux; 2) Promouvoir une nouvelle ère de participation des Autochtones et la confiance du grand public; 3) Tarifier le carbone; 4) Investir dans l’innovation technologique; 5) Adopter les politiques appropriées.

A. Favoriser l’investissement et les débouchés commerciaux

Comme on l’a vu dans les pages qui précèdent, l’investissement direct étranger dans le secteur pétrolier et gazier dépend de plusieurs facteurs, dont les coûts de production, la performance environnementale, la disponibilité de ressources humaines qualifiées et la réputation globale du Canada auprès des investisseurs (« l’image de marque du Canada »). De nouvelles possibilités d’exportation peuvent aussi être créées par la production et l’exportation de nouveaux produits, ou l’accès à de nouveaux marchés.

Certains témoins ont fait valoir que le secteur pétrolier et gazier gagnerait à produire et à exporter davantage de produits à valeur ajoutée : engrais, produits pétrochimiques, carburants raffinés, plastique, etc.[38]. Ces produits ont une valeur marchande plus élevée que les ressources peu raffinées (p. ex. bitume), et leur production devrait créer et soutenir des emplois stables et bien rémunérés au Canada. À ce sujet, le représentant d’Unifor a soutenu que chaque fois que l’industrie accroît sa capacité d’exportation de ressources énergétiques non raffinées et non transformées, « nous exportons de bons emplois[39] ». Le témoin de l’ACPP a avancé qu’il y a peut-être une « façon de faire optimale » pour créer un climat d’investissement qui favoriserait une production à valeur ajoutée des ressources pétrolières et gazières du Canada[40].

Les témoins ont aussi dit au Comité que la croissance et la compétitivité du secteur pétrolier et gazier du Canada bénéficieraient de sa capacité d’expédier ses produits vers de nouveaux marchés, ce qui peut, dans certains cas, nécessiter la construction de nouvelles infrastructures (pipelines desservant les ports de mer, installations pour le transport maritime du GNL, etc.). Selon de nombreux intervenants, cet objectif ne sera pas réalisé sans le leadership du gouvernement fédéral : qu’il s’agisse d’expliquer à la population pourquoi il est nécessaire et conforme à ses intérêts de construire de nouvelles infrastructures, d’approuver des projets quand la décision est dans l’intérêt supérieur des Canadiens, ou d’instaurer des politiques ou des règlements qui inspireront confiance au public et répondront aux attentes de l’industrie[41].

Selon le témoin de la Chambre de commerce du Canada, l’accroissement de la capacité d’exportation permettrait d’éliminer les goulots d’étranglement qui obligent actuellement les producteurs canadiens à accepter de vendre leurs produits à prix réduit[42]. De plus, le professeur Moore a signalé que le Canada rate des occasions parce qu’il n’est pas en mesure d’exporter le GNL :

[À] la suite du tremblement de terre et des dégâts subis par la centrale nucléaire au Japon, la demande en GNL destiné à l’industrie de l’électricité a augmenté de manière astronomique. […] Les prix ont augmenté et il était très intéressant pour nous d’envisager d’investir dans ce marché. Aujourd’hui, les installations nucléaires sont remises en activité et la demande et les marges de profit ont diminué sensiblement. […] Les marchés sont conclus longtemps en avance et leur durée d’application est d’une vingtaine d’années. Si un concurrent vous coupe l’herbe sous les pieds et emporte le marché, vous devrez attendre longtemps avant de pouvoir faire une autre soumission[43].

Le témoin de l’Association canadienne du gaz a discuté de la possibilité de développer de nouveaux marchés intérieurs pour le gaz naturel, particulièrement dans les collectivités nordiques ou éloignées qui ne sont pas desservies par le réseau de distribution actuel. Il a dit au Comité qu’au moins 23 centrales d’énergie électrique et 58 clients industriels du Nord pourraient adopter le GNL d’ici 2025[44].

Selon le professeur Michal Moore, le gouvernement devrait jouer un rôle capital dans le repérage des emprises dont auront besoin les projets énergétiques prévus (ou stratégiques) – oléoducs, câbles, voies ferrées, installations de stockage et ports de sortie. Le professeur a recommandé que le gouvernement règle proactivement les enjeux autochtones, les différends sur la propriété des terres et les questions transfrontalières, afin d’améliorer les chances de succès des projets stratégiques[45].

B. Promouvoir une nouvelle ère de participation des Autochtones et la confiance du grand public

De nombreux projets de développement ont eu du succès parce que les collectivités autochtones ont été invitées à participer au processus décisionnel. Par exemple, le témoin de Woodfibre LNG a expliqué que sa compagnie a procédé volontairement – malgré les risques pour les deux parties – à une évaluation environnementale avec la Première Nation des Squamish, et que cette initiative a permis l’obtention d’un certificat qui permettra au projet d’aller de l’avant si les promoteurs respectent les conditions convenues[46]. Ce témoin a insisté sur l’importance de respecter les éléments culturels des sites autochtones, d’éviter certaines activités auxquelles les Premières Nations s’opposent, et de les associer à la gestion des plans environnementaux et des choix technologiques[47].

Le témoin de l’Office d’examen des répercussions environnementales de la vallée du Mackenzie a aussi souligné qu’il fallait mettre à contribution les différents types de membres de la collectivité, et pas seulement les chefs. La participation des décideurs autochtones de la région permet « d’éliminer les barrières interculturelles pendant les débats et de renforcer la confiance du public dans le système en général[48] ». Par contre, le témoin de l’Association canadienne de normalisation a signalé que les petites organisations comme la sienne n’ont pas nécessairement les moyens de faire venir à leurs réunions des représentants autochtones en provenance du Nord, ni de traduire leur documentation dans les langues autochtones[49].

Le représentant de l’Indigenous Health Alliance a reproché à l’Office national de l’énergie (ONE) en particulier de trop tarder à associer les Autochtones à son processus d’approbation réglementaire. Il a recommandé les mesures suivantes afin d’améliorer l’engagement des collectivités autochtones:

  • Faire participer sans tarder les collectivités autochtones au processus de l’ONE—« faire participer, et ce, le plus tôt possible, les collectivités afin de cerner les problèmes, de trouver des solutions et d’élaborer des stratégies de mise en œuvre »;
  • Reconnaître la nature multidimensionnelle de l’exploitation des ressources—reconnaître que les projets de développement des ressources englobent des dimensions comme l’éducation, la santé, le développement économique, l’environnement, etc. Si le processus de consultation néglige de cerner clairement ces enjeux et de les prendre en considération, il ne pourra pas, selon le témoin, résoudre les vrais problèmes;
  • Faire participer les dirigeants des collectivités, c’est-à-dire les aînés, au processus décisionnel—reconnaître que les aînés forment un groupe d’intervenants qui doivent jouer un rôle direct dans l’élaboration du déroulement du projet;
  • Reconnaître que les peuples autochtones sont pragmatiques et raisonnables en ce qui concerne l’exploitation des ressources—ils appuieront probablement les processus d’approbation qui respectent leurs besoins communautaires;
  • Engager des experts en communication et consultation—qui pourront interpréter et communiquer avec exactitude, aux gouvernements et aux promoteurs, les préoccupations de la collectivité.
  • Reconnaître les peuples autochtones comme « troisième ordre de gouvernement » au Canada—ils sont reconnus comme tels, fonctionnellement, par le système judiciaire[50].

C. Tarifer le carbone

Le Comité a entendu une large gamme d’opinions qui, pour la plupart, étaient favorables à la tarification du carbone. De plus, plusieurs intervenants voulaient que le gouvernement corrige les lacunes de la politique climatique et assume un rôle de leadership dans ce dossier. Pour le représentant de Suncor, l’idéal serait que les gouvernements fédéral et provinciaux harmonisent leurs approches[51], mais pour un autre, il ne faudrait pas que le gouvernement fédéral joue un rôle prépondérant dans l’établissement du système national de tarification du carbone : Ottawa ne devrait jouer qu’un « rôle limité pour faciliter les liens interprovinciaux entre les régimes de fixation du prix du carbone[52] ».

Dans l’ensemble, les témoins préféraient la taxation du carbone à l’adoption d’un régime de plafonnement et d’échange—par exemple, le professeur Moore a fait valoir que les taxes sur les émissions carboniques donnent aux marchés des signaux clairs et transparents sur les prix, et qu’elles risquent moins d’être impactées par les changements de lois ou de politiques après leur instauration[53]. Par ailleurs, on a dit au Comité que la tarification du carbone pourrait favoriser l’atteinte de divers objectifs gouvernementaux et industriels :

  • harmoniser les objectifs du secteur pétrolier et gazier et les cibles du Canada en matière de réduction des GES—selon le professeur Plourde, « la durabilité des industries traditionnelles de l’énergie au Canada repose […] sur notre capacité à concilier leur maintien avec les objectifs du Canada en matière de politique climatique[54] »;
  • contribuer aux efforts d’atténuation du changement climatique en incitant à produire et à consommer des produits et services à intensité carbonique moindre, et en stimulant la demande de technologies à faibles émissions et d’innovations—comme le professeur Elgie l’a dit, « s’il n’y a pas de prix, il n’y a pas de demande pour l’innovation propre[55] »;
  • encourager sur le marché les approches favorables aux technologies et innovations à intensité carbonique moindre, ce qui pourrait réduire les dépenses de subventions du gouvernement[56];
  • fournir un moyen de rendre compte de l’impact économique, social et environnemental des émissions de GES du secteur pétrolier et gazier.

Par contre, le témoin de la Chambre de commerce du Canada a dit que, à moins qu’elle ne soit alignée sur celle de nos partenaires commerciaux, la tarification du carbone pourrait amoindrir la compétitivité des industries canadiennes, par exemple si elle mène à la « fuite de carbone » (situation où les industries à fortes émissions de GES se réimplantent dans les pays plus laxistes)[57]. Par ailleurs, certains témoins se sont demandés comment les différents pays rendront compte de leurs réductions des émissions dans un système mondial de comptabilisation nationale du carbone. Par exemple, si un pays réduit ses émissions de GES au moyen de produits ou technologies à faibles émissions importés d’un autre pays, est-ce lui, ou le pays exportateur, qui mérite le crédit de carbone?

Le professeur Michal Moore s’est dit d’avis que le Canada, les États‑Unis et le Mexique gagneraient potentiellement à adopter un cadre de comptabilisation régional harmonisé pour le carbone et les transferts de crédits[58]. De même, le représentant de Suncor Énergie a dit que le gouvernement devrait coordonner la comptabilisation des émissions de GES au pays afin d’éviter le « double comptage[59] ».

Le Comité a reçu trop peu d’évaluations de l’impact potentiel des différents prix du carbone sur la performance économique et environnementale de l’industrie pour en juger, mais les professeurs Plourde et Elgie ont prédit qu’un prix mondial de 80 à 100 $ la tonne pourrait suffire à susciter des changements (p. ex. des « technologies vraiment révolutionnaires[60] »). En ce qui concerne l’utilisation que les gouvernements devraient faire des revenus du carbone, les avis étaient partagés. Certains témoins voulaient que ces recettes, au moins en partie, soient retournées aux entreprises et aux consommateurs (p. ex. par des remboursements de taxe[61]), tandis que d’autres souhaitaient qu’elles financent le passage à une économie faible en carbone (p. ex. par l’investissement dans les technologies et innovations à faibles émissions[62]).

Globalement, le Comité a retenu que la tarification du carbone, si elle est nécessaire, ne suffira peut-être pas à ce que le Canada atteigne ses cibles d’émission de GES ou à ce que suffisamment de technologies transformatrices soient inventées pour réduire l’empreinte carbone du secteur pétrolier et gazier. D’autres politiques et initiatives pourraient être nécessaires.

D. Investir dans l’innovation technologique

De nombreux témoins ont répété que l’innovation technologique est essentielle au maintien de la compétitivité du secteur pétrolier et gazier du Canada[63]. Ils ont dégagé (entre autres) les domaines d’innovation suivants :

  • les solvants, qui pourraient remplacer l’usage de l’eau aux fins d’extraction et réduire de 50 % les émissions de GES, et d’environ 30 % les coûts en capital des projets[64]
  • la technologie de production de vapeur par contact direct, qui pourrait réduire les émissions de GES de la production pétrolière in situ de 70 à 80 %, et le coût de production de 2 à 8 $ le baril[65];
  • l’exploitation minière autonome et automatisée qui, appliquée à l’exploitation des sables bitumineux, pourrait en améliorer le rendement, la rentabilité et la sûreté[66];
  • les technologies gazières (p. ex. gaz naturel renouvelable, conversion d’électricité en gaz, production combinée de chaleur et d’électricité) qui visent à améliorer la performance environnementale et l’efficacité de l’industrie du gaz naturel[67];
  • les recherches sur la détection des fuites des pipelines et les technologies connexes (p. ex. positionnement GPS, contrôle de surveillance électronique et acquisition de données, ou « SCADA », diverses initiatives de R-D), qui permettront d’améliorer la surveillance et le fonctionnement des pipelines par la détection des fissures, bosses ou autres dommages ou anomalies dans la structure[68];
  • les produits et innovations à faibles émissions, p. ex. le recours à l’énergie renouvelable comme source d’électricité dans le secteur de l’extraction[69], les matériaux de construction à base d’hydrocarbures qui pourraient être moins riches en carbone que le ciment[70], l’amélioration de l’efficacité énergétique des véhicules, et les innovations en planification et transport urbains[71];
  • d’autres technologies potentielles qui pourraient convertir le dioxyde de carbone, qui est actuellement un polluant, en une ressource utile[72].

Certaines de ces technologies sont utilisées dès maintenant ou seront bientôt commercialisées, mais beaucoup – surtout les plus révolutionnaires – ne seront peut-être prêtes que dans plus d’une décennie[73]. Selon le témoin de l’AISB, l’horizon entre l’idéation et la commercialisation est d’environ 10 ans dans le secteur pétrolier et gazier[74].

De nombreuses sources de financement appuient l’innovation technologique, mais beaucoup de témoins ont souligné qu’il fallait que le gouvernement continue de faire sa part, surtout en R-D, pour que les progrès technologiques se poursuivent dans le secteur pétrolier et gazier. Le professeur Elgie a dit que « toute innovation a besoin du soutien du gouvernement », et que « [a]u siècle dernier, pratiquement aucune technologie importante n’a pu se développer sans un important investissement du gouvernement à un moment ou un autre du processus. C’est le cas […] des sables bitumineux qui ont reçu des dizaines de milliards de dollars en subventions de démarrage pour mettre au point les technologies qui les rendent viables[75]. » De même, selon le professeur André Plourde, « sur le plan économique, des arguments de poids » plaident en faveur du soutien gouvernemental à la R-D, soutien qui peut prendre la forme de subventions aux recherches du secteur privé, de recherche parrainée par le gouvernement, ou d’activités de recherche entreprises directement par le gouvernement[76]. Le représentant de l’ACPE a ajouté qu’on « ne saurait trop insister sur l'importance » de la R-D pour l’amélioration de la qualité, de la sûreté et de la performance environnementale des pipelines[77].

En plus d’offrir son appui financier et de soutenir la R-D, le Comité a entendu que le gouvernement peut favoriser une culture d’innovation dans le secteur pétrolier et gazier. Pour ce faire, il devrait :

  • Assurer une réglementation souple—divers témoins ont fait remarquer que la réglementation, lorsqu’elle est souple (ou adaptable), peut faciliter l’adoption des nouvelles technologies ou la poursuite de certaines solutions novatrices[78]. Le témoin de l’AISB a donné l’Alberta comme exemple d’une province où « [l]’organisme de réglementation tient à respecter des normes élevées de performance environnementale, mais [où] il est prêt, dans des situations uniques, contrôlées et prescrites, à autoriser les entreprises à essayer des technologies qui n’auraient peut-être pas été permises sous le régime de réglementation précédent[79] ».
  • Financer une gamme diverse de technologies—pour le témoin de l’AISB, il ne faut « pas mettre tous ses œufs dans le même panier », mais plutôt adopter une « approche de gestion de portefeuille » et investir dans des projets qui, par leur envergure, leur coût ou les facteurs de risque, sont variés[80].
  • Laisser l’industrie décider des technologies qui en valent la peine—les professeurs Plourde et Elgie ont conseillé aux gouvernements de ne pas privilégier certaines technologies au détriment des autres, mais de laisser l’industrie décider de celles qu’il vaut la peine de poursuivre.
  • Accroître la valeur marchande des technologies à faibles émissions—le professeur Elgie a expliqué que les objectifs environnementaux n’ont souvent pas assez de valeur marchande : « Vous ne pouvez pas aller au supermarché pour acheter de la faible teneur en carbone. Vous ne pouvez pas acheter de l’air propre. » Selon lui, ces « effets externes » (comme les appellent les économistes) sont principalement soutenus par la politique gouvernementale; il est donc essentiel que les gouvernements interviennent « à un certain niveau en complémentant les investissements, surtout pour les étapes du début où le capital privé ne le fait jamais[81] ».
  • Susciter l’attente d’un resserrement continu de la réglementation environnementale—selon le professeur Elgie, l’industrie sera ainsi incitée à faire des investissements à long terme dans les technologies propres[82].
  • Prioriser les technologies et les innovations canadiennes—certains témoins ont suggéré que le gouvernement soutienne en particulier les innovations canadiennes, par exemple en priorisant les enjeux propres au Canada qui n’intéresseront pas les autres pays (p. ex. les sables bitumineux[83]).
  • Jeter des ponts entre les inventeurs et l’industrie—le professeur a invité les gouvernements à mettre en contact les inventions et les technologies avec les entreprises qui pourraient s’en servir[84].
  • Collaborer avec les organisations internationales de R-D—certains témoins ont relevé la possibilité pour le Canada de participer aux initiatives de R-D internationales. Par exemple, le professeur Moore a avisé le Comité qu’il y a aux États-Unis 11 laboratoires nationaux qui sont actuellement à l’affût des possibilités de recherche pour développer de nouvelles technologies énergétiques[85].
  • Réfléchir au rôle potentiel des normes à l’appui de l’innovation—le témoin de l’Association canadienne de normalisation a parlé du rôle que les normes peuvent jouer dans la commercialisation et l’intégration des innovations. Les normes peuvent être établies pour des raisons bien précises, par exemple ouvrir de nouveaux marchés, introduire des innovations ou faciliter l’observation des règlements[86].

E. Adopter les politiques appropriées

En janvier 2016, le gouvernement du Canada a adopté des mesures provisoires exigeant de l’Office national de l’énergie, entre autres choses, qu’il approfondisse ses consultations des peuples autochtones et qu’il évalue les émissions de GES en amont de certains projets. Compte tenu de ces changements, le gouvernement a augmenté le délai d’examen des projets. Certains témoins ont dit douter que cette prolongation des consultations soit une façon efficace d’accroître la confiance publique dans le processus d’approbation des projets énergétiques[87], tandis que d’autres ont fait valoir que ces mesures provisoires ont une portée excessive puisqu’elles exigent la prise en compte de facteurs qui dépassent potentiellement les compétences fédérales[88]. D’autres encore, par contre, ont jugé que ces mesures étaient conformes aux engagements climatiques de provinces comme l’Alberta et la Colombie‑Britannique[89].

Dans l’ensemble, les témoins se sont dits favorables aux processus d’approbation « rigoureux » et « exhaustifs », pourvu que leurs objectifs soient clairs et prévisibles, et que leur échéancier soit respectueux des décisions d’affaires et d’investissement[90]. Le témoin de Suncor Énergie a mis en garde contre les retards imprévus du processus d’approbation, lesquels créent de l’incertitude et compromettent l’investissement, d’autant que la planification des projets de développement des ressources se fait souvent sur un long horizon[91]. Par ailleurs, certains témoins ont appelé le gouvernement à agir, lorsqu’il le peut, pour réduire les coûts et améliorer l’efficience et la souplesse des règlements existants[92]. Par exemple, le professeur Plourde a prôné la « souplesse appuyée par des principes », qui consiste à comprendre et conserver les objectifs du système de réglementation, mais à façonner les règlements et les processus d’approbation sans perdre de vue que l’évolution de l’environnement d’exploitation est inévitable[93]. On a fait remarquer que le processus d’approbation devait être cohérent et prévisible, et qu’il devait inspirer confiance aux Canadiens.

Les avis étaient partagés quant à la portée du processus d’approbation réglementaire. Certains témoins voulaient que l’examen englobe jusqu’aux questions sociales et culturelles, et qu’il cible l’impact cumulatif du portefeuille de projets proposés[94], alors qu’un autre intervenant préférait au contraire une portée resserrée : moins de critères, et une évaluation limitée à l’impact du seul projet visé[95].

Selon le professeur Moore, il faut une stratégie nationale de l’énergie pour harmoniser les intérêts des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et inscrire les politiques et décisions d’investissement futures dans un cadre de réglementation plus prévisible[96]. La professeure Gattinger gardait espoir que les efforts intergouvernementaux récents aboutissent à une stratégie énergétique nationale[97], mais le professeur Moore, plus sceptique, n’y voyait qu’une « série d’accords mouvants et quelques politiques fixes entre les provinces ou les parties, dont la validité n'est pas de longue durée[98] ».

Enfin, le professeur Moore a appelé de ses vœux la création d’un organisme national qui pourra offrir « des informations impartiales, précises et fiables sur l’énergie[99] » et ainsi améliorer la qualité des données du Canada à ce sujet.

RECOMMANDATIONS

À la lumière des témoignages présentés dans les pages qui précèdent, le Comité fait les recommandations suivantes :

1.    Le Comité recommande au gouvernement du Canada de continuer de faire connaître les avantages de l’investissement dans les ressources naturelles du Canada, y compris le pétrole et le gaz, et à cette fin de continuer notamment d’encourager l’innovation, la recherche et le développement.

2.    Le Comité recommande au gouvernement du Canada de collaborer avec l’industrie et les gouvernements autochtones, provinciaux, territoriaux et municipaux à la construction de l’infrastructure nécessaire à la création d’un environnement favorable à l’exploitation et au transport des ressources naturelles et à l’expédition des produits pétroliers et gaziers vers les marchés stratégiques intérieurs et internationaux.

3.    Le Comité recommande au gouvernement du Canada d’encourager la prompte participation des peuples autochtones aux décisions d’exploitation des ressources, dans le plein respect des droits aux terres et aux ressources reconnus aux peuples autochtones et conférés par traité. De plus, le Comité recommande au gouvernement de veiller à ce que les processus de consultation tiennent compte de l’impact multidimensionnel des projets d’exploitation des ressources sur les collectivités autochtones, notamment sur le plan de l’éducation, de la santé, du développement économique, de l’infrastructure et de l’environnement.

4.    Le Comité recommande au gouvernement du Canada, vis-à-vis de la question plus générale de la confiance publique envers le secteur de l’énergie, de favoriser la transparence et la participation du grand public aux décisions d’exploitation des ressources, et en reconnaissant la réglementation environnementale robuste du Canada et le travail des organismes nationaux de réglementation.

5.    Le Comité recommande au gouvernement du Canada de continuer de travailler à une Stratégie énergétique nationale en collaboration avec les partenaires autochtones, provinciaux, territoriaux et internationaux de manière à s’assurer que les normes de comptabilisation du carbone et les pratiques de transfert de crédits tiennent compte des pays voisins et que toutes les normes de comptabilisation du carbone soient transparentes et fondées sur les données scientifiques.

6.    Le Comité recommande au gouvernement du Canada, par l’entremise de Ressources naturelles Canada, d’améliorer les possibilités de mise en contact des inventeurs, des chercheurs et des entrepreneurs avec les segments de l’industrie pétrolière et gazière qui correspondent le plus à leur domaine d’expertise.

7.    Le Comité recommande au gouvernement du Canada d’encourager la collaboration, dans le cadre de groupes et de conseils, entre les gouvernements, l’industrie, les universitaires et les experts internationaux, dans le but de maximiser le potentiel d’innovation du secteur pétrolier et gazier du Canada.

8.    Le Comité recommande au gouvernement du Canada d’encourager les entreprises et les entrepreneurs canadiens à devenir des chefs de file mondiaux à l’égard de leurs innovations ou technologies respectives.

9.    Le Comité recommande au gouvernement du Canada de continuer de renforcer notre stratégie énergétique nord-américaine et la collaboration intergouvernementale à l’égard des politiques énergétiques par la prise en compte des intérêts fédéraux, provinciaux, territoriaux et autochtones, et de prendre des mesures pour améliorer la qualité et la disponibilité des données nationales sur l’énergie.


[1]              RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 9 mars 2016 (Frank Des Rosiers, sous-ministre adjoint, secteur de l’innovation et de la technologie de l’énergie, ministère des Ressources naturelles).

[2]              Office national de l’énergie, Avenir énergétique du Canada en 2016, mai 2016.

[3]              Ibid.

[4]              Office national de l’énergie, Aperçu de la situation énergétique au Canada 2014 - Note d’information sur l’énergie, 2014.

[5]              RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 2 mai 2016 (Chris Bloomer, président et chef de la direction, Association canadienne de pipelines d’énergie).

[6]              RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 16 mai 2016 (Jordan Brennan, économiste, Département de la recherche, Unifor).

[7]              RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 2 mai 2016 (Katrina Marsh, directrice principale, Politique des ressources naturelles et de l’environnement, Chambre de commerce du Canada).

[8]              RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 16 mai 2016 (Steve Reynish, vice-président exécutif, Stratégie et expansion de l’entreprise, Suncor Énergie Inc.).

[9]              Office national de l’énergie, Avenir énergétique du Canada en 2016, mai 2016.

[10]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish).

[11]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish).

[12]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Marsh).

[13]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 9 mai 2016 (Michal Moore, professeur, School of Public Policy, University of Calgary, à titre personnel).

[14]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 2 mai 2016 (Byng Giraud, vice-président, Affaires coopératives et directeur national – Canada, Woodfibre LNG Ltd).

[15]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 9 mai 2016 (André Plourde, professeur titulaire et doyen, Faculté des affaires publiques, Université Carleton, à titre personnel).

[16]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 13 avril 2016 (Alex Ferguson, vice-président, Politiques et rendement, Association canadienne des producteurs pétroliers).

[17]           Ibid.

[18]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Bloomer).

[19]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 16 mai 2016 (Monica Gattinger, professeure, présidente, Énergie positive, directrice, Institut de recherche sur la science, la société et la politique publique, Université d’Ottawa, à titre personnel).

[20]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 4 mai 2016 (Ed Whittingham, directeur exécutif).

[21]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).

[22]           RNNR, Témoignages, 13 avril 2016 (Ferguson).

[23]           Ibid.

[24]           RNNR, Témoignages, 13 avril 2016 (Ferguson).

[25]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Plourde; Moore).

[26]           RNNR, Témoignages, 13 avril 2016 (Ferguson); RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish).

[27]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Giraud).

[28]           Ibid.

[29]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 9 mai 2016 (Stewart Elgie, professeur, Faculté de droit, Université d’Ottawa, directeur associé, Institut de l’environnement, à titre personnel).

[30]           RNNR, Témoignages, 9 mars 2016 (Des Rosiers).

[31]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Marsh).

[32]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 16 mai 2016 (Alika Lafontaine, président du projet, Indigenous Health Alliance).

[33]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Gattinger); RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Elgie).

[34]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Gattinger).

[35]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Elgie).

[36]           RNNR, Témoignages, 9 mars 2016 (Des Rosiers); RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Plourde); RNNR, Témoignages, 21 mars 2016 (Wicklum).

[37]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Brennan).

[38]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 30 mai 2016 (Gil McGowan, président, Alberta Federation of Labour); RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish; Brennan).

[39]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Brennan).

[40]           RNNR, Témoignages, 13 avril 2016 (Ferguson).

[41]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Marsh; Dachis); RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore; Elgie; Plourde); RNNR, Témoignages, 13 avril 2016 (Ferguson); RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish; Brennan).

[42]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Marsh).

[43]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).

[44]           RNNR, Témoignages, 4 mai 2016 (Egan).

[45]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).

[46]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Giraud).

[47]            Ibid.

[48]            RNNR, Témoignages, 4 mai 2016 (Cliffe-Phillips).

[49]           RNNR, Témoignages, 13 avril 2016 (MacDougall).

[50]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Lafontaine).

[51]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish).

[52]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Dachis).

[53]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).

[54]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Plourde).

[55]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Elgie).

[56]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Dachis).

[57]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Marsh).

[58]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).

[59]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish).

[60]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Elgie; Plourde).

[61]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Marsh).

[62]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish).

[63]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Marsh).

[64]           RNNR, Témoignages, 9 mars 2016 (Des Rosiers).

[65]           Ibid.

[66]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 13 avril 2016 (Jeffrey Walker, gestionnaire de programme, Ressources naturelles, Association canadienne de normalisation).

[67]           RNNR, Témoignages, 4 mai 2016 (Egan).

[68]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Bloomer).

[69]           RNNR, Témoignages, 9 mars 2016 (Des Rosiers).

[70]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).

[71]           RNNR, Témoignages, 4 mai 2016 (Whittingham).

[72]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature, 21 mars 2016 (Dan Wicklum, directeur général, Alliance pour l'innovation des sables bitumineux).

[73]           RNNR, Témoignages, 9 mars 2016 (Des Rosiers).

[74]           RNNR, Témoignages, 21 mars 2016 (Wicklum).

[75]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Elgie).

[76]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Plourde).

[77]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Bloomer).

[78]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish); RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Elgie).

[79]           RNNR, Témoignages, 21 mars 2016 (Wicklum).

[80]           RNNR, Témoignages, 21 mars 2016 (Wicklum).

[81]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Elgie).

[82]           Ibid.

[83]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Plourde).

[84]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Elgie).

[85]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).

[86]           RNNR, Témoignages, 13 avril 2016 (Walker).

[87]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Marsh).

[88]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Dachis); RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish).

[89]           RNNR, Témoignages, 13 avril 2016 (Ferguson).

[90]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish); RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Giraud).

[91]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Reynish).

[92]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Elgie; Plourde).

[93]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Plourde).

[94]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Gattinger; Lafontaine); RNNR, Témoignages, 4 mai 2016 (Cliffe-Phillips).

[95]           RNNR, Témoignages, 2 mai 2016 (Dachis).

[96]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).

[97]           RNNR, Témoignages, 16 mai 2016 (Gattinger).

[98]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).

[99]           RNNR, Témoignages, 9 mai 2016 (Moore).