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RNNR Rapport du Comité

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LE SECTEUR NUCLÉAIRE À LA CROISÉE DES CHEMINS : FAVORISER L’INNOVATION ET LA SÉCURITÉ ÉNERGÉTIQUE POUR LE CANADA ET LE MONDE

INTRODUCTION

Le leadership du Canada dans le secteur nucléaire remonte à la Deuxième Guerre mondiale. Les Laboratoires de Chalk River, dont les travaux ont été récompensés du prix Nobel, sont à l’avant-garde de la recherche et du développement (R-D) et de l’innovation nucléaires depuis plus de 60 ans. C’est là, en 1945, qu’a été réalisée la première criticité entretenue à l’extérieur des États-Unis. Chalk River est également le lieu de naissance du réacteur Candu, de renommée internationale, ainsi que l’emplacement du premier réacteur de recherche du Canada, le réacteur national de recherche universel (NRU), qui sert à de multiples usages scientifiques, médicaux et industriels depuis 1957. Enfin, les recherches et les installations de Chalk River ont mené à des percées dans la production d’isotopes médicaux, y compris le cobalt-60, qui sert au traitement du cancer[1].

L’industrie nucléaire du Canada apporte plus de 6 milliards de dollars chaque année au produit intérieur brut (PIB) national, et elle emploie directement 30 000 Canadiens et indirectement 30 000 autres Canadiens. Elle couvre toute la gamme de l’expertise nucléaire – R-D, extraction minière de l’uranium et fabrication du combustible, conception de réacteurs, construction de centrales, maintenance, gestion des déchets et déclassement. Outre les Laboratoires de Chalk River, on trouve au Canada plusieurs réacteurs et installations de recherche qui contribuent aux progrès dans les domaines, entre autres, de l’énergie, de la physique, de l’ingénierie, de la médecine, de la chimie et de la biologie. Le Canada est aussi le deuxième plus important producteur d’uranium du monde, en plus de posséder l’un des plus riches minerais d’uranium au monde, qui est situé en Saskatchewan. Les réacteurs canadiens dépendent exclusivement de l’uranium extrait dans le Nord de la Saskatchewan et traité en Ontario, et 95 % de l’uranium de la Saskatchewan est exporté vers d’autres pays, où il sert à la production d’énergie nucléaire. Enfin, la technologie du réacteur canadien Candu et l’expertise qui s’y rapporte sont déployées dans le monde entier : on compte 19 réacteurs Candu opérationnels au Canada (ils fournissent environ 16 % de l’électricité du Canada) et 30 autres ailleurs à l’étranger[2].

Le secteur nucléaire du Canada a connu plusieurs changements majeurs ces dernières années, soit la restructuration d’Énergie atomique du Canada limitée, avec la vente de sa Division des réacteurs Candu et la création des Laboratoires nucléaires canadiens (LNC), la décision de mettre à l’arrêt de façon permanente le réacteur NRU d’ici 2018, et le lancement de bon nombre de projets et propositions ayant une incidence sur l’économie, la sécurité énergétique, l’environnement, la santé publique, le leadership international et les exportations du Canada. À la lumière de ces changements – et dans le cadre de son étude générale intitulée L’avenir des industries pétrolière et gazière, minière et nucléaire au Canada : Innovation, solutions durables et débouchés économiques – le Comité permanent des ressources naturelles (« le Comité ») souhaitait faire le point sur la situation de l’industrie nucléaire au Canada. Il a donc invité à comparaître différents experts du gouvernement, de l’industrie et de la société civile.

Dans le présent rapport, le Comité a organisé le contenu de ses conclusions sous quatre thèmes : 1) la gouvernance et la sûreté des matériaux et des installations nucléaires au Canada, et la gestion des déchets en résultant; 2) l’état de l’industrie de l’énergie nucléaire au Canada et dans le monde; 3) l’avenir de la R-D du secteur nucléaire canadien; et 4) les recommandations au gouvernement du Canada. Le Comité est donc heureux de présenter son rapport, qui conclut son étude du secteur nucléaire.

GOUVERNANCE, SÛRETÉ ET GESTION DES DÉCHETS

La réglementation des matériaux et des activités nucléaires relève de la juridiction du gouvernement fédéral, tandis que c’est aux provinces que revient la décision d’investir dans la production d’énergie nucléaire[3]. Les deux organisations ci-dessous relèvent du Parlement du Canada par l’entremise du ministre des Ressources naturelles :

  • la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) : créée en vertu de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires, la CCSN est un tribunal administratif quasi judiciaire indépendant. Il réglemente tous les produits et activités nucléaires au Canada, y compris l’extraction minière de l’uranium, la fabrication du combustible, la production d’énergie, la production et l’utilisation des isotopes médicaux, le déclassement et la remise en état des sites et la gestion des déchets nucléaires. En tant qu’agent de la Couronne, la Commission a l’obligation de consulter les peuples autochtones et, s’il y a lieu, de trouver des accommodements avec eux[4].
  • Énergie atomique du Canada limitée (EACL) : créée en 1952, EACL est une société d’État fédérale qui a un mandat à deux volets : 1) encourager les sciences et technologies nucléaires à l’appui du gouvernement fédéral et de l’industrie; et 2) gérer les responsabilités du Canada liées au déclassement et à la gestion des déchets radioactifs[5].

Les sections ci-dessous portent sur trois enjeux, discutés par les témoins, qui touchent à la gouvernance et à la sûreté du secteur nucléaire du Canada : 1) la restructuration récente d’EACL; 2) l’audit portant sur la CCSN réalisé par la commissaire à l’environnement en 2016; et 3) les principaux projets et propositions de gestion des déchets nucléaires et de déclassement des sites au Canada.

A. La restructuration d’Énergie atomique du Canada limitée

Jusqu’en 2011, EACL a mené ses activités par le truchement de trois divisions opérationnelles : la Division des réacteurs Candu, la Division de la recherche et de la technologie et le groupe Gestion du passif[6]. En juin 2011, à la suite d’un processus d’examen indépendant de différents scénarios de gestion et de restructuration d’EACL, le gouvernement du Canada a annoncé la vente de la division commerciale de la société à Candu Energy Inc., une filiale de la firme montréalaise de génie-conseil SNC-Lavalin. De plus, une nouvelle organisation, connue sous le nom de Laboratoires nucléaires canadiens (LNC), a été créée pour gérer les laboratoires nucléaires d’EACL selon un modèle d’organisme gouvernemental exploité par un entrepreneur (OGEE)[7]. Mark Lesinksi, des LNC, a décrit la structure de propriété des laboratoires comme suit :

EACL demeure propriétaire des sites, des installations, des actifs et de la propriété intellectuelle et est responsable des risques liés à la mise hors service des installations et surveille le contrat et le rendement des LNC. La Canadian National Energy Alliance, CNEA, est le propriétaire exploitant des Laboratoires Nucléaires Canadiens, dont les actionnaires comprennent CH2M, Fluor, Atkins et SNC-Lavalin Inc., les sociétés d’ingénierie et de technologie les plus importantes au monde. Ensemble, les membres de ce consortium fournissent de l’expérience dans les domaines de la gestion de site, des activités, du déclassement et de la gestion des déchets[8].

M. Lesinksi a ajouté que le consortium a une mission à trois volets : 1) réduire les responsabilités dont a hérité EACL; 2) fournir de l’expertise en matière de sciences et de technologies nucléaires afin de soutenir les missions fédérales et commerciales; et 3) reconstruire les installations des LNC et l’infrastructure de soutien[9].

Comme l’a expliqué Niall O’Dea, de Ressources naturelles Canada (RNCan), la décision de restructurer EACL a été prise dans l’intention de permettre au Canada « d’être pleinement concurrentiel sur le marché mondial du nucléaire et, ainsi, les [LNC] pourraient bénéficier de l’autre modèle de gestion [d’OGEE] » qu’on avait appliqué avec succès dans d’autres pays. Selon M. O’Dea, la vente de la Division des réacteurs Candu visait à « contrôler les coûts pour le gouvernement des activités de la division – en permettant au secteur privé de gérer les risques – tout en optimisant le rendement des investissements du gouvernement dans l’énergie nucléaire par l’entremise de la structure de redevances qui a été mise en place ». En ce qui concerne la Division de la recherche, ou les LNC, M. O’Dea a précisé que le modèle d’OGEE a été adopté afin d’« instaurer la rigueur et réduire les coûts du secteur privé pour rendre les laboratoires plus aptes à soutenir [l’]industrie nucléaire [du Canada] et réunir les conditions permettant à ce secteur de réussir et de saisir les nouvelles occasions à moyen et à long terme[10] ».

Au cours de leur discussion portant sur la nouvelle structure de gouvernance du secteur, des témoins ont proposé des améliorations à apporter au nouveau modèle d’OGEE des LNC. Par exemple, certains ont réclamé un accès plus abordable à l’équipement et aux services des LNC, pour le bien de l’industrie nucléaire, particulièrement des petites entreprises. En effet, selon John Robinson, de Tyne Engineering, « les LNC sont désormais obligés de [louer] leurs services, au même titre qu’une entreprise privée ». D’après ce témoin, les Laboratoires ont de l’équipement et une expertise que ne peuvent pas obtenir par elles-mêmes la plupart des petites entreprises, en prenant soin d’ajouter que son entreprise ne peut pas « payer les prix des LNC, qui sont cinq fois plus élevés que les [siens] ». M. Robinson a recommandé que les LNC, au lieu de faire concurrence aux petites sociétés nucléaires, collaborent davantage avec elles[11].

Par ailleurs, Steven Schumann, de l’International Union of Operating Engineers, a reproché à la convention collective OGEE de ne pas permettre aux employés de continuer à participer au Régime de pension de retraite de la fonction publique (RPRFP). Il a déclaré que les employés des LNC « ne seront plus considérés comme des employés du gouvernement, bien que l’installation demeure la propriété du gouvernement du Canada ». M. Schumann a expliqué que les employés seront couverts par un nouveau régime de retraite en cours de négociation; s’il n’y a pas d’entente d’ici septembre 2018, ils devront cotiser à un « régime de retraite à cotisations déterminées » préétabli, alors que le RPRFP était un « régime à prestations déterminées[12] ».

B. Audit portant sur la Commission canadienne de sûreté nucléaire réalisé par la commissaire à l’environnement en 2016

En 2016, la commissaire à l’environnement et au développement durable (CEDD) a audité certaines des inspections de centrales nucléaires réalisées par la CCSN. La commissaire à l’environnement, Julie Gelfand, a résumé comme suit les résultats de l’audit :

Dans le cadre de notre audit, nous avons constaté que la Commission avait réalisé 226 inspections d’installations prévues au cours de la période de deux ans que nous avons examinée. […] Nous avons ensuite examiné de très près les 42 inspections et constaté que la majorité d’entre elles n’étaient pas entièrement conformes, si bien que nous avons conclu à la fin des inspections qu’il y avait non-conformité. Cependant, nous avons constaté que la Commission avait effectué des suivis auprès des titulaires de permis, des exploitants, dans 100 % des cas. Chaque fois qu’il y avait une non-conformité, la Commission a pris des mesures. Elle a donc veillé à ce que tous les problèmes relevés soient corrigés; c’est donc un bon point pour elle. Nous avons cependant constaté qu’il était difficile de déterminer si la Commission canadienne de sûreté nucléaire procédait au nombre et au type appropriés d’inspections, car son processus de planification n’était pas bien documenté. La Commission n’a pas pu démontrer qu’elle appliquait un processus de planification des inspections rigoureux, systématique et fondé sur les risques pour vérifier si les centrales nucléaires respectaient toutes les exigences applicables. […]
Dans l’ensemble, notre audit a conclu que la Commission n’avait pas pu démontrer qu’elle avait géré adéquatement ses inspections d’installations dans les centrales nucléaires. Nous avons formulé un certain nombre de recommandations, notamment de mettre en œuvre un processus de planification bien documenté, systématique et fondé sur les risques, un plan quinquennal prévoyant un nombre minimal d’inspections – pas une liste potentielle d’inspections – qui suivaient leurs propres procédures, c’est-à-dire avec des guides d’inspection approuvés pour chaque inspection. La Commission a accepté nos recommandations et ses réponses sont publiées dans notre rapport d’audit. J’ai aussi constaté que la Commission avait publié un plan d’action sur son site Web dans lequel elle indique qu’elle a déjà commencé à donner suite à nos recommandations[13].

Michael Binder, de la CCSN, a confirmé que la Commission « a accepté ces conclusions et a immédiatement pris des mesures correctives[14] ». M. O’Dea a précisé au Comité que la CCSN a déjà donné suite à trois des cinq préoccupations soulevées par la CEDD[15].

C. Gestion des déchets et déclassement

Le Canada est signataire de la Convention commune sur la sûreté de la gestion du combustible usé et sur la sûreté de la gestion des déchets radioactifs, qui stipule que les déchets radioactifs doivent être considérés comme la « responsabilité ultime de l’État » et qu’ils doivent être éliminés dans l’État où ils ont été créés[16]. En 2002, la Société de gestion des déchets nucléaires (SGDN) a été mise sur pied, conformément à la Loi sur les déchets de combustible nucléaire, afin d’élaborer et de mettre en œuvre un programme de gestion à long terme du combustible nucléaire irradié du Canada. En 2005, la SGDN a proposé l’approche de la « gestion adaptative progressive » (GAP), qui prévoit l’isolation à long terme du combustible nucléaire irradié du Canada dans un dépôt géologique en profondeur (DGP) situé dans « un secteur hôte informé et consentant ». Optimisés pour le combustible irradié des réacteurs Candu, les DGP peuvent être construits au Canada et les entreprises d’exportation de l’expertise et des matériaux canadiens peuvent les utiliser pour la gestion du combustible usé des réacteurs Candu ailleurs dans le monde. Le gouvernement du Canada a adopté officiellement l’approche de la GAP en juin 2007[17].

En mai 2010, la SGDN a lancé le processus de sélection du site où serait installé le DGP proposé. À la fin de 2016, neuf collectivités de l’Ontario étaient au nombre des hôtes potentiels du projet[18]. Selon un document remis au Comité par la SGDN le 30 novembre 2016 :

La SGDN mène un processus d’évaluation comprenant plusieurs étapes et qui s’étendra sur plusieurs années. Il a pour objectif de choisir un site unique qui répondra aux exigences réglementaires de sûreté ou qui les surpassera. Une démonstration convaincante doit aussi être faite [selon laquelle] la collectivité choisie est adéquatement informée et […] consent à accueillir le projet. La SGDN s’est engagée à ce que le projet ne soit mis en œuvre qu’avec la participation de la collectivité intéressée, des collectivités des Premières nations et métisses de la région et des autres collectivités environnantes dans le cadre d’un partenariat[19].

De 2002 à 2015, la SGDN a consacré 329 576 062 $ à la réalisation du plan de gestion à long terme du combustible irradié du Canada[20]. Le DGP – qui est un projet de 22 milliards de dollars – devrait être en service d’ici 2040 à 2045[21].

D’après les témoins, les DGP font l’objet d’un consensus international : ils seraient le moyen le plus efficace et le plus sûr de gérer à long terme le combustible nucléaire usé[22]. Pour Richard Wiens, de Nordion, le gouvernement devrait envisager d’intégrer à son plan de GAP un autre type de déchets, soit les sources épuisées de cobalt-60 utilisées par Nordion (volume total d’environ 15 mètres cubes). Or, le mandat actuel de la SGDN ne permet que la GAP du combustible usé[23].

Ontario Power Generation (OPG) propose la construction d’un DGP, dans le comté de Bruce, pour l’entreposage des déchets nucléaires de faible et de moyenne activité en Ontario. Selon Glen Jager, d’OPG, le projet et le site ont été assujettis à « un processus environnemental et [à] un processus d’approbation rigoureux pendant près de 16 ans, […et] depuis près d’une décennie, [le projet] fait l’objet d’un examen minutieux, d’audiences publiques et de consultations ». M. Jager a dit au Comité que diverses évaluations indépendantes avaient conclu que la construction et le plan de gestion proposés étaient sûrs, ajoutant que « [c]haque étude ou examen a conclu que le DGP n’entraînerait aucun effet indésirable pour l’environnement ou le lac Huron ». Il a déclaré que plus de 70 % des habitants des collectivités concernées étaient favorables au plan de gestion des déchets d’OPG « et, plus précisément, [au] dépôt géologique en profondeur[24] ». Mise sur pied en 2012 par le ministre de l’Environnement de l’Ontario et le président de la CCSN, la commission d’examen conjoint chargée d’étudier le projet a recommandé sa réalisation[25].

Le site proposé par OPG pour le DGP fait partie du territoire traditionnel de la Nation ojibwa de Saugeen (NOS). M. Jager a dit au Comité que les discussions en cours progressent bien avec la NOS, et que l’OPG lui a promis que le projet n’irait pas de l’avant sans son accord : « [q]uoi qu’il en soit, il demeure certain que la nation Saugeen a un droit de veto[26] ». Enfin, OPG continue de travailler à faire approuver l’évaluation environnementale du projet[27].

Les témoins ont discuté d’autres projets de gestion des déchets et de déclassement, notamment la mise hors service par les LNC de plus de 120 structures à Chalk River pour ouvrir la voie à de nouvelles immobilisations qui revitaliseront les laboratoires[28]; la construction et la mise en service d’ici 2020, par les LNC, d’une installation de stockage à faible profondeur à Chalk River[29]; les obligations fédérales (évaluées à 8 milliards de dollars) dont EACL est chargé aux sites de Chalk River et de Whiteshell, où plus de 60 ans de recherche ont contaminé à l’interne certaines structures[30]; et le déclassement de certains réacteurs comme celui de Douglas Point en Ontario, et Gentilly-1 au Québec[31]. On a proposé que le Canada profite de la mise hors service de certains de ces réacteurs pour acquérir de l’expérience dans le domaine et développer ainsi ses compétences et technologies de déclassement, qui pourront ensuite être appliquées à des projets au pays et à l’étranger[32]. M. Robinson a signalé que les réacteurs à déclasser au Canada étaient certains des plus vieux au monde, et que la même situation allait nécessairement se produire dans d’autres pays. Il s’est donc dit d’avis que « [le développement] des technologies de démantèlement maintenant [générera des] bénéfices économiques plus tard[33] ».

UNE INDUSTRIE DE L’ÉNERGIE POUR LE CANADA ET LE MONDE

La section ci-dessous porte sur trois aspects du secteur de l’énergie nucléaire canadien discutés par les témoins : 1) la production d’énergie nucléaire et les projets de réfection des réacteurs au Canada, 2) l’état de l’industrie des réacteurs Candu et 3) le rôle potentiel du Canada dans la mise au point des technologies nucléaires de prochaine génération, c’est-à-dire les réacteurs avancés (RA).

A. La production d’énergie nucléaire au Canada

L’énergie nucléaire représente environ 16 % de toute l’électricité produite au Canada; en Ontario et au Nouveau-Brunswick, elle constitue plus de 50 % et environ 30 % respectivement de l’approvisionnement en électricité[34]. En tant que source de base constante d’électricité à émissions nulles, l’énergie nucléaire est reconnue par les leaders du G7 pour sa contribution majeure à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) et à l’atténuation du changement climatique[35]. En Ontario, les six réacteurs nucléaires ont permis d’éliminer la production d’électricité à partir du charbon, ce qui a presque réduit à zéro les émissions de GES dans le secteur de l’électricité de cette province[36]. Plusieurs témoins ont souligné que l’énergie nucléaire pouvait aider le Canada à respecter ses engagements de lutte contre les changements climatiques et à répondre à sa demande de base d’électricité[37].

Actuellement, on compte au Canada 19 réacteurs nucléaires en service dans 4 centrales : Bruce Power (8 unités), Pickering (6 unités) et Darlington (4 unités) en Ontario, et Point Lepreau (1 unité) au Nouveau-Brunswick. En 2008, le Nouveau-Brunswick a remis à neuf son réacteur Candu 6 de 600 mégawatts, afin d’en prolonger la durée de vie opérationnelle de 25 à 30 ans[38]. Ce projet a connu des dépassements de coûts, mais Brett Plummer, d’Énergie Nouveau-Brunswick, a dit que la réfection de la centrale aura des retombées positives à long terme pour la province :

En ce qui concerne les travaux de réfection, le dépassement des coûts se chiffre à 1,4 milliard de dollars. Pour le remplacement de l’énergie, on parle de 1 milliard de dollars. Ces coûts seront ajoutés au coût d’exploitation de la centrale de Point Lepreau sur toute sa durée de vie. Le coût pour la durée de vie de la centrale est toujours de 8,3 ¢ le kilowatt, ce qui est très compétitif. […La centrale de] Point Lepreau […] est prête à produire de l’électricité sans émissions pour la province du Nouveau-Brunswick au cours des 35 à 40 prochaines années ou plus[39].

L’industrie de l’énergie nucléaire se concentre sur des projets visant à accroître jusqu’à 30 ans la durée de vie de 10 réacteurs aux centrales de Bruce Power et de Darlington, en Ontario. Selon RNCan, cet investissement de 25 milliards de dollars « pourrai[t] créer 14 000 emplois au cours de la prochaine période de remise à neuf de 10 ans[40] ». Les témoins ont dit au Comité ce qui suit sur chacune de ces centrales :

  • À la centrale de Bruce Power, les travaux de remise à neuf au cours des 20 prochaines années devraient créer 5 000 emplois directs et indirects par année, ce qui représente une injection de revenus du travail de 980 millions à 1,2 milliard de dollars dans l’économie de l’Ontario, à quoi il faut ajouter des retombées économiques annuelles directes et indirectes de 751 millions à 1,07 milliard de dollars (équipement, fournitures et matériaux). Enfin, la centrale devrait créer et soutenir 22 000 emplois annuels directs et indirects jusqu’en 2064, « tout en rapportant des avantages économiques annuels de 4 milliards de dollars en Ontario en dépenses directes et indirectes liées à des pièces d’équipement, des fournitures, du matériel et des revenus de main-d’œuvre[41] ».
  • À la centrale de Darlington, la remise en état à mi-vie de quatre réacteurs nucléaires, représentant 20 % de l’approvisionnement en électricité de l’Ontario, devrait coûter 12,8 milliards de dollars sur 10 ans. La prolongation jusqu’en 2055 de la vie opérationnelle de la centrale équivaut « au retrait annuel de deux millions de voitures des routes ontariennes » et apportera une contribution estimée de 89,9 milliards de dollars au PIB de la province (selon les estimations du Conference Board du Canada)[42]. Enfin, elle créera de l’emploi pour « des milliers de travailleurs qualifiés […] et donnera aux apprentis l’occasion d’acquérir une expérience de travail précieuse[43] ».

Aucun plan de remplacement n’existe actuellement pour les réacteurs de Pickering, en Ontario, dont l’utilisation commerciale est censée prendre fin en 2024. Selon M. Jager, la décision de remettre en état les réacteurs de Darlington et de Bruce Power, mais non ceux de Pickering, s’explique par des raisons économiques : les deux réacteurs précédents sont des grands réacteurs garantissant un très gros rendement de l’investissement, alors que les réacteurs de Pickering sont trop petits pour qu’il soit rentable de les reconditionner plutôt que de les remplacer. M. Jager a dit au Comité qu’OPG a un permis pour construire de nouveaux réacteurs nucléaires adjacents à la centrale de Darlington, mais qu’il reste des décisions à prendre concernant la technologie et les fournisseurs. Il a expliqué que ces décisions devront être prises dans le cadre du plan énergétique à long terme de la province, ajoutant que la perte de production à Pickering « sera largement compensée à même la capacité existante provenant notamment des centrales au gaz et des sources d’énergie renouvelable à court terme[44] ».

Les témoins ont dit au Comité que les projets nucléaires font face à des défis liés à la confiance du public, surtout en raison de considérations économiques (ampleur des dépenses en capital, risque de dépassement de coûts dans certains cas) et des préoccupations quant à la sûreté et à la sécurité des installations nucléaires et à la gestion à long terme des déchets radioactifs[45]. Selon les témoins, le manque général de connaissances sur les technologies nucléaires chez les Canadiens contribuerait à la faible confiance qu’elles suscitent dans la population[46]. Selon Dale Austin, de Cameco, contrairement à d’autres formes de production d’électricité, « le sondage illustre habituellement que l’appui pour l’industrie nucléaire est souvent à son plus fort lorsqu’il existe des activités dans ce domaine; et que plus il y a de personnes qui connaissent et comprennent le secteur nucléaire, plus ce soutien augmente[47] ». De même, les études d’OPG ont révélé qu’en Ontario, où le secteur nucléaire est le plus présent, le soutien à l’énergie nucléaire « est l’un des plus élevés au monde[48] », tandis que des sondages réalisés au Nouveau-Brunswick indiquent que la « très grande majorité des habitants de la province sont favorables à la centrale de Point Lepreau et à l’énergie nucléaire[49] ».

Colin Hunt, de la Canadian Nuclear Society, a dit que l’opinion publique en Ontario pouvait être divisée en trois principaux groupes : 1) un petit groupe qui proteste haut et fort contre l’énergie nucléaire; 2) un groupe un peu plus grand qui défend ardemment l’énergie nucléaire; et 3) « au milieu une vaste majorité de citoyens qui la soutiennent modérément, qui ne savent pas grand-chose à ce sujet, et qui ne s’y intéressent pas beaucoup à moins que quelque chose fasse les manchettes et fasse couler beaucoup d’encre[50] ». Il a ajouté que l’opposition publique à l’énergie nucléaire tend à augmenter quand de nouveaux réacteurs sont proposés, mais que cette opposition n’est pas attribuable à une peur de l’énergie nucléaire et à ses conséquences, mais plutôt à des préoccupations liées aux coûts. Par contre, M. Hunt a signalé au Comité que l’appui public à la remise à neuf des centrales nucléaires existantes de l’Ontario se maintient dans une proportion « nettement supérieure à 80 %[51] ».

Bien que les projets nucléaires soient financièrement concurrentiels à long terme, ils sont confrontés à des coûts d’investissements initiaux élevés, qui, selon les témoins, forment un obstacle majeur à la construction de nouvelles centrales nucléaires au Canada[52]. D’après M. O’Dea, il faut, pour que l’énergie nucléaire soit concurrentielle, « une vision à long terme et des stratégies énergétiques particulières puisqu’il faut rentabiliser l’important investissement initial nécessaire pour le nucléaire ». Le témoin a expliqué que cet investissement devient concurrentiel avec le temps parce que la plupart des installations nucléaires peuvent durer plus de 60 ans[53]. Par contre, Shawn-Patrick Stensil, de Greenpeace, a dit au Comité que les coûts de l’énergie nucléaire « n’ont jamais fait qu’augmenter, [alors que] le coût des énergies renouvelables baisse rapidement ». Il a donc encouragé le gouvernement à s’engager plutôt dans le secteur de l’énergie renouvelable[54].

B. L’état de l’industrie Candu

Le réacteur canadien à deutérium-uranium (Candu) est une invention canadienne de réputation internationale mise au point dans les années 1950 par EACL, avec la collaboration de l’industrie. Il demeure un des plus importants investissements faits par le gouvernement du Canada en R-D[55]. Les témoins ont dit au Comité que la technologie Candu se portait bien tant au Canada qu’à l’étranger[56], et que de nouvelles ventes internationales de réacteurs Candu pourraient avoir des retombées économiques importantes pour le Canada. Justin Hannah, de SNC-Lavalin, a dit au Comité que son entreprise avait commandé récemment au Conference Board du Canada une étude sur les répercussions économiques potentielles de l’exportation de deux nouveaux réacteurs Candu; selon le Board, l’incidence économique pourrait « atteindre 37 000 années-personnes d’emploi, avec une augmentation nette du PIB d’environ 3,8 milliards de dollars[57] ».

La technologie Candu a été exportée en Chine, en Inde, au Pakistan, en Corée du Sud, en Roumanie et en Argentine. Par ailleurs, SNC-Lavalin poursuit actuellement des possibilités de construction de nouveaux réacteurs en Argentine (1 unité), en Roumanie (2 unités), au Royaume-Uni (4 unités) et en Chine (2 unités)[58]. Selon M. Hannah, le développement canado-chinois du réacteur Candu à cycle de combustible avancé (AFCR) présente un intérêt particulier :

Le projet vise l’adaptation du design unique du réacteur CANDU afin d’utiliser de l’uranium recyclé et, à plus long terme, du thorium. Cette innovation importante positionne le [AFCR] comme une solution nucléaire plus durable par sa capacité à consommer du combustible nucléaire usé et pour réduire le gaspillage de 30 à 40 %. Cela permettra également à la Chine de développer sa flotte nucléaire tout en réduisant leur dépendance à l’uranium importé et à la production d’électricité à partir du charbon, et tout en rencontrant les plus hauts standards de protections environnementales. [En septembre 2016], SNC-Lavalin et [la China National Nuclear Corporation] ont signé un accord coentreprise à Ottawa, en présence du premier ministre et du premier ministre chinois Li, pour signifier l’engagement [bilatéral…] à faire avancer cette technologie novatrice[59].

Selon M. Hannah, SNC-Lavalin positionne le réacteur AFCR comme une technologie synergétique avec le parc actuel de réacteurs à eau légère de la Chine. Il a expliqué que la Chine devrait construire quelque 150 réacteurs au cours des 20 prochaines années, et SNC-Lavalin a démontré que le rapport optimal pour l’utilisation des réacteurs AFCR consommant de l’uranium recyclé est de quatre pour un (c’est-à-dire de 20 réacteurs AFCR pour 100 réacteurs)[60].

Pour M. O’Dea, les meilleurs débouchés pour l’industrie canadienne se trouvent à l’étranger, particulièrement dans les économies croissantes comme l’Inde et la Chine, où de vastes systèmes de centrales nucléaires sont projetés. Il a ajouté que d’autres pays, comme la Roumanie et la Pologne, manifestent le désir d’accroître leur indépendance énergétique, et ils se sont dit intéressés à importer les technologies nucléaires canadiennes[61]. Le Canada a d’ailleurs signé des accords et des protocoles d’entente internationaux de coopération nucléaire avec plusieurs pays, dont la Chine, l’Inde, les États‑Unis et le Royaume-Uni[62].

Dans le but de maximiser les possibilités économiques internationales de l’industrie, M. Hannah a recommandé que le gouvernement accorde le crédit prévu pour les exportations de réacteurs Candu à toute la chaîne d’approvisionnement des exportations et des activités internationales de l’industrie nucléaire canadienne[63]. Il a affirmé que la disponibilité de ce crédit à l’exportation aura « une corrélation directe avec [l’]incidence économique [de l’industrie], car elle permet aux clients à l’étranger d’acheter des produits et services canadiens du Canada, et cela, pour le profit des exportateurs canadiens[64] ».

Les témoins ont aussi parlé des technologies et des industries dérivées des réacteurs Candu présentant un potentiel de R-D. Ainsi, ils ont mentionné les nouveaux modèles de réacteurs capables de recycler le combustible issu des réacteurs Candu, ainsi que les industries dérivées qui utilisent l’hélium 3, un sous-produit de la désintégration du tritium, pour créer des détecteurs de neutrons sensibles[65]. Selon M. Jager, les réacteurs utilisant le combustible issu des réacteurs Candu en sont encore à un stade de développement préliminaire; ils nécessitent des capacités de retraitement du combustible qui ne sont pas encore disponibles au Canada[66]. Rick Holt, de l’Université Queen’s, a dit au Comité que le gouvernement devra faire des investissements à long terme pour que les technologies Candu progressent au-delà des systèmes actuels[67].

C. Les technologies des réacteurs avancés

Les témoins ont dit au Comité que les technologies nucléaires ne sont pas encore pleinement développées. Ainsi, Jerry Hopwood, du Réseau d’excellence universitaire en génie nucléaire (UNENE), a fait remarquer que, même si le Canada a adopté l’énergie nucléaire au cours des années 1940, il y a encore fort à faire pour améliorer les technologies nucléaires actuellement utilisées, pour les rendre encore plus avantageuses et pour élargir leur application.[68]. Simon Irish, de Terrestrial Energy, a souligné le potentiel des modèles de réacteurs avancés (RA) mis au point par l’industrie : il a dit que ces réacteurs étaient plus petits, moins coûteux et plus faciles à construire que les réacteurs commerciaux actuels, et qu’ils pourraient réduire de plus de 95 % les déchets produits par l’industrie nucléaire civile[69]. Selon M. Irish, les RA offrent au Canada l’occasion d’accroître sa compétitivité industrielle et de soutenir la croissance de l’économie, mais aussi de faire des progrès vis-à-vis ses objectifs climatiques et de rester un chef de file international en matière de production et d’exportation de la technologie nucléaire[70]. Le professeur Glen Harvel, de la University of Ontario Institute of Technology, a dit au Comité que le succès des réacteurs nucléaires avancés dépendra au final des coûts en capital et de fonctionnement de chaque unité[71].

Les sections ci-dessous portent sur trois modèles de réacteurs avancés portés à l’attention du Comité : les petits réacteurs modulaires (PRM), les réacteurs à fusion et les réacteurs intégraux à sels fondus (RISF).

1. Petits réacteurs modulaires

Le terme « petit réacteur modulaire » s’emploie pour les réacteurs de petite taille (habituellement moins de 300 mégawatts électriques[72]), et non pour désigner une technologie particulière. On a dit au Comité que les PRM pourraient servir à produire de l’électricité à émissions nulles dans les régions hors réseau[73], ou encore à assurer une alimentation électrique stable et à faibles émissions en milieu urbain (au lieu de construire de grandes centrales coûteuses en capital)[74]. Les avantages socioéconomiques projetés des PRM sont les suivants : 1) servir de source d’énergie de base rentable et à faibles émissions dans les collectivités éloignées et nordiques, et dans les sites d’extraction des ressources naturelles partout au Canada; 2) réduire la dépendance globale du pays à l’égard des combustibles fossiles et, par le fait même, les émissions de gaz à effet de serre; 3) maintenir la position de chef de file international du Canada dans le domaine de la sûreté et de l’énergie nucléaires; et 4) aider le Canada à atteindre ses objectifs climatiques et à respecter ses engagements relatifs à la Mission Innovation dans le cadre de la COP 21[75].

Les témoins ont dit au Comité que le Canada est particulièrement bien positionné pour développer et vendre des PRM, et ce, pour deux grandes raisons : 1) il possède dès à présent de l’expertise dans le domaine des technologies nucléaires, y compris « un organisme de réglementation axé sur le rendement capable d’intégrer différents types de technologie à ses examens »; et 2) il a accès à un marché intérieur – en l’occurrence, les collectivités éloignées et les chantiers d’exploitation des ressources naturelles – où les combustibles fossiles (comme le diesel) gagneraient à être remplacés par les PRM[76]. Par ailleurs, M. Lesinski des LNC a dit au Comité que les PRM et les TPRM (très petits réacteurs modulaires produisant de 1 à 50 mégawatts électriques) gagnent en popularité dans les grands pays nucléaires, et offrent ainsi au Canada l’occasion « de jouer un rôle de leader dans le développement de cette technologie polyvalente[77] », pourvu que le gouvernement se donne comme objectif d’avoir un PRM ou un TPRM de démonstration au Canada d’ici 10 ans[78]. Par contre, M. Stensil s’est montré plus sceptique quant au potentiel de ces PRM. En ce qui concerne les collectivités éloignées, il a conseillé aux gouvernements d’envisager d’autres solutions de rechange au diesel, soit les micro‑réseaux d’énergies renouvelables, stipulant que « [p]our prendre la bonne décision, il faut que les deux options soient sur la table et à l'heure actuelle, […] les seules options sont les petits réacteurs modulaires contre le diesel[79] ».

Des PRM ont été construits[80], mais la technologie n’est pas encore prête à être commercialisée à grande échelle[81]. Les LNC proposent un plan sur 10 ans, qui comprend la mise en service du réacteur de démonstration au cours de la neuvième année, à un coût total d’environ 600 millions de dollars. Comme M. Lesinksi l’a expliqué :

Selon le profil de financement théorique, auquel des précisions seraient apportées si la proposition suscite de l’intérêt, le projet nécessiterait un investissement modeste d’environ 15 millions de dollars au cours des deux premières années pour effectuer une demande d’expression d’intérêt qui servirait à recueillir des renseignements concrets sur les éléments suivants, entre autres : le degré d’intérêt d’intervenants du secteur privé; les technologies existantes, de même que les avantages et les risques qu’elles présentent; la possibilité de partager le risque avec les investisseurs et les fournisseurs de technologies; les occasions de partage des coûts et les autres possibilités de financement; l’intérêt des intervenants et des membres des Premières Nations; et l’établissement de la liste des collectivités qui pourraient accueillir le projet. EACL pourrait gérer et surveiller cette démarche, et LNC pourrait agir comme fournisseur de services pour qu’EACL, à titre de conseiller du gouvernement en matière de technologie nucléaire, puisse évaluer de façon adéquate la valeur globale que représente l’initiative pour le Canada[82].

Richard Sexton, d’EACL, a dit au Comité que plus de 100 modèles différents de PRM présentaient actuellement un potentiel de commercialisation, ce qui n’est pas sans poser problème. Il a ajouté que les Laboratoires de Chalk River pourraient aider le gouvernement et les sociétés commerciales à cerner les technologies les plus prometteuses[83]. M. Binder a signalé que, à la fin de 2016, on comptait « cinq fournisseurs de ces petits réacteurs [qui] ont demandé à la Commission d’examiner leurs conceptions, afin de déterminer si, globalement, elles répondent aux exigences réglementaires et s’il existe des barrières fondamentales[84] ».

En 2016, Technologies du développement durable du Canada (TDDC) a investi 5,7 millions de dollars dans le projet de PRM de Terrestrial Energy. Par ailleurs, RNCan a conclu un partenariat avec le gouvernement de l’Ontario afin d’étudier la faisabilité des différentes technologies de PRM, et il a financé une étude du Centre Fedoruk sur les attitudes autochtones envers l’énergie nucléaire, question de mieux comprendre comment on pourrait appliquer les PRM dans les collectivités éloignées[85].

2. Réacteurs à fusion nucléaire

La fusion nucléaire est un processus au cours duquel des atomes d’hydrogène sont fusionnés à une température et à une pression très élevées afin de créer de l’énergie. Michael Delage, de General Fusion, a précisé que ce processus à émissions nulles a besoin d’une source abondante de combustible (l’hydrogène) mais qu’il produit une quantité considérable d’énergie : « un kilogramme de combustible pour la fusion produit la même énergie qu’environ 10 000 tonnes de charbon[86] ».

Dans un document remis au Comité le 16 janvier 2017, General Fusion rappelle que le Canada a une longue histoire de R‑D dans le domaine de l’énergie de fusion :

Dans les années 1960, avec la reconnaissance du potentiel de l’énergie de fusion, un certain nombre de groupes d’étude sur la physique des plasmas et l’énergie de fusion ont vu le jour, en particulier à l’Université de la Colombie-Britannique, à l’Université de l’Alberta, à l’Université de la Saskatchewan et à l’Université de Toronto ainsi qu’à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) à Montréal. Pendant les années 1970 et 1980, tous ces établissements ont joué un rôle de premier plan dans ce domaine de recherche. Par ailleurs, le groupe d’étude sur la spectroscopie laser-plasma du Conseil national de recherches (CNR) a joué un rôle de poids dans l’étude de la fusion par laser au cours de cette période. Pendant les années 1980, ces activités ont conduit à l’établissement d’un programme national sur l’énergie de fusion au Canada. On a alors assisté à la construction et à la mise en service du Tokamak de Varennes (TdeV) au Québec, de même qu’à la mise sur pied du Programme technique canadien des combustibles de fusion (PTCCF) en Ontario, dirigé par Ontario Hydro (le service public d’électricité provincial) et Énergie atomique du Canada limitée. Le Canada faisait également partie des membres initiaux du groupe de développement d’ITER[87].

On peut lire dans ce document que, bien que le gouvernement fédéral ait annulé le programme national sur l’énergie de fusion au milieu des années 1990, « quelques groupes d’étude canadiens ont conservé un précieux savoir-faire que l’on pourrait aujourd’hui mettre à profit afin de relancer les recherches et de parvenir à produire de l’énergie de fusion [au Canada] ». Par exemple, on trouve des experts de l’énergie de fusion magnétique et laser en Saskatchewan et en Alberta; des spécialistes de renommée mondiale de la technologie du tritium, des combustibles pour la fusion et des interactions neutron‑matière aux LNC et dans diverses universités de l’Ontario; et des experts de domaines connexes, comme le développement des matériaux et des nanomatériaux, dans plusieurs universités du Québec et de l’Ontario[88].

Selon General Fusion, un nouveau programme canadien sur la fusion exigerait « un investissement initial de quelque 25 millions de dollars par année pendant cinq ans du gouvernement fédéral, auquel s’ajouterait une contribution équivalente de la part des provinces ». Suivrait « une évaluation initiale afin de déterminer la voie à suivre pour construire un réacteur à fusion de démonstration technique qui serait mis en service en 2030[89] ». Le projet de réacteur de General Fusion a récemment bénéficié d’un financement de TDDC en deux phases : 13,9 millions de dollars en 2009 et 12,7 millions de dollars en 2016[90].

3. Réacteurs intégraux à sels fondus

On a également présenté au Comité un autre modèle de réacteur avancé, soit le réacteur intégral à sels fondus (RISF) – un système de réacteur à sels fluorure fondus de 400 mégawatts thermiques, à émissions nulles, alimenté à l’uranium faiblement enrichi. Selon le mémoire présenté au Comité par Terrestrial Energy le 9 décembre 2016, la principale innovation du RISF consiste en « l’intégration des principaux composants du cœur du réacteur dans une unité scellée et remplaçable dont la durée de vie utile est de sept ans ». Cette caractéristique de conception permet d’éviter les problèmes de durée de vie des matériaux qui nuisent souvent au déploiement précoce. De plus, le RISF est le seul réacteur commercial alimenté par du combustible liquide (des sels fondus, et non des combustibles solides comme dans les autres réacteurs). Cette différence rehausse la sûreté du réacteur, puisque la chaleur dégagée par le processus de fission est dissipée par convection dans le mélange de sels (et non, comme dans les autres réacteurs, par des caloporteurs à eau refroidis sous pression). Terrestrial Energy dit du RISF qu’il est sûr « à l’éloignement » : « même si toute l’alimentation du système tombait en panne, et qu’il n’y avait personne à la centrale, la réaction s’arrêterait, et le réacteur refroidirait tranquillement de lui‑même[91] ».

M. Irish a affirmé que « [g]râce aux centrales RISF, les industries bénéficieront d’un produit de meilleure qualité, une chaleur dont la production n’est aucunement tributaire d’un réseau ou d’un pipeline ». Le RISF peut servir à diverses applications dans les différents marchés du monde – par exemple, alimenter des installations d’extraction de ressources naturelles, de production pétrochimique et de dessalement, ou encore servir d’installations de secours pour des centrales éoliennes ou solaires à la place du gaz naturel. Selon M. Irish, Terrestrial Energy est en voie d’obtenir un permis pour la construction et la mise en service d’une centrale de 2 milliards de dollars, qui pourrait devenir « la première centrale nucléaire commerciale à RISF au monde[92] ».

LA RECHERCHE AU CANADA APRÈS LE RÉACTEUR NRU

Les témoins ont dit au Comité que la fermeture du réacteur NRU en 2018 pose un problème important au secteur de la R-D nucléaire du Canada[93]. En effet, le NRU, qui a près de 60 ans, est un grand réacteur de recherche qui constitue une source fiable de neutrons à flux élevé, lesquels ont de nombreuses applications médicales et industrielles (p. ex. production d’isotopes médicaux pour le diagnostic et le traitement, entre autres, de divers cancers et maladies cardiovasculaires[94], réalisation de recherches applicables aux domaines de l’environnement, de l’agriculture et des ressources naturelles[95], etc.). Selon Christopher Heysel, de la McMaster University, les neutrons sont « tout particulièrement importants dans la recherche liée à la science des matériaux à cause de leur capacité de pénétrer en profondeur dans les matériaux et ainsi de fournir de l’information à propos de la structure atomique interne de la matière ». Cette capacité est utile au développement des matériaux de pointe entrant dans la fabrication de divers produits, dont les technologies énergétiques propres, les machines à haut rendement et le matériel pour la technologie de l’information[96]. Jean Koclas, de l’École polytechnique de Montréal, a expliqué que l’accès à une source fiable de neutrons est essentiel à la survie de l’industrie Candu. Il a indiqué ce qui suit :

La seule façon d’étudier adéquatement les matériaux de pointe qui seront utilisés pour le réacteur CANDU dans l’avenir est de trouver un endroit où il y a un réacteur avec un flux élevé de neutrons qui fonctionne à haut rendement. Il ne faut pas voir trop petit; il nous faut une surface de cœur très grande où les conditions d’une centrale nucléaire peuvent être reproduites. Nous avons besoin de ce genre d’installation pour la recherche. Il faut aussi un réacteur de recherche assez grand pour recevoir le combustible produit par les réacteurs CANDU. Puisqu’il n’y a pas de réacteur de recherche assez grand dans notre pays, nous sommes obligés d’envoyer les conceptions de combustible à l’étranger. Il est toutefois évident que les installations dans les autres pays ne sont pas en mesure de fournir assez de combustible pour toute la grappe de combustible d’un réacteur CANDU. Ils peuvent seulement en fournir une petite partie. À moyen et à long terme, cela veut dire que la méthode canadienne pour les centrales nucléaires va simplement disparaître de la scène internationale. Nous ne serons pas capables de passer à la troisième génération de réacteurs – nous en sommes à la deuxième génération actuellement – et encore moins à la quatrième[97].

M. Hunt a dit au Comité qu’« [à] moins que le gouvernement du Canada se penche sur la question des réacteurs à flux neutronique élevé, cette expertise nucléaire risque de se perdre à long terme au Canada[98] ». On s’attend à ce que la mise hors service du réacteur NRU entraîne la relocalisation d’environ 250 chercheurs canadiens travaillant sur les faisceaux de neutrons, qui pourraient devoir changer de domaine de recherche ou s’installer à l’étranger pour avoir accès à des sources de neutrons[99]. Selon Ron Oberth de l’Organization of Canadian Nuclear Industries (OCNI), les membres de l’OCNI envisagent déjà de collaborer avec des installations internationales « qui sont dotées de certaines des capacités du réacteur NRU, pour pouvoir continuer d’appuyer [l’]industrie [nucléaire] grâce à des activités constructives et utiles en recherche et développement[100] ».

Les témoins ont mentionné plusieurs projets ou propositions visant à remplacer à court, à moyen ou à long terme les capacités du réacteur NRU. Par exemple :

  • Réutilisation des Laboratoires de Chalk River : En 2015, le gouvernement fédéral s’est engagé à investir 800 millions de dollars sur cinq ans pour la réutilisation des Laboratoires de Chalk River[101]. La Vision 2026 des LNC projette de transformer Chalk River en « un laboratoire nucléaire d’envergure mondiale durable ayant la taille adéquate pour offrir des activités liées aux sciences et à la technologie »; les laboratoires « seront structurés de manière à satisfaire et à s’adapter aux priorités actuelles du gouvernement fédéral, du secteur commercial et du public[102] ». Une nouvelle installation importante vient d’être inaugurée, soit l’immeuble Harriet-Brooks, nommé en l’honneur de la première femme atomicienne du Canada : on y mettra à l’essai divers matériaux et procédés[103]. D’autres installations sont également prévues aux Laboratoires[104].
  • Accroissement de la puissance et de la durée de fonctionnement des autres réacteurs : On prévoit d’accroître la puissance et la durée de fonctionnement du réacteur de la McMaster University, question de remplacer la capacité perdue en recherche nucléaire et en production d’isotopes médicaux. L’installation de McMaster abrite le réacteur de recherche le plus puissant du Canada après le NRU. Elle se complète d’un nouveau cyclotron (pour la production du fluor 18, un isotope médical servant au diagnostic du cancer) et d’un nouvel ensemble de cellules chaudes d’examen post-irradiatoire de taille industrielle, où on peut mettre à l’essai des matières hautement radioactives, comme des composants venant des centrales nucléaires du Canada. On a dit au Comité que le recours au réacteur de McMaster était une « solution à moyen terme et […] viable » pour aider le Canada à traverser la pénurie de neutrons jusqu’à ce qu’une autre source importante de neutrons soit trouvée[105].
  • Recours à d’autres technologies de production des isotopes médicaux : Le gouvernement fédéral a investi dans la mise au point d’autres technologies de production des isotopes médicaux, dont les cyclotrons et les accélérateurs linéaires. Le Centre de Sherbrooke, au Québec, a reçu une partie de ce financement, et ses technologies devraient atteindre le mode commercial d’ici le printemps ou l’été 2018[106]. Par ailleurs, Nordion et Bruce Power travaillent ensemble pour trouver d’autres façons de produire le même type de cobalt à activité spécifique élevée que celui déjà produit par le réacteur NRU[107]. Les deux entreprises prévoient remplacer « une bonne portion » de cet isotope actuellement produit à Chalk River à compter du premier trimestre de 2019. Cependant, comme les isotopes issus des accélérateurs n’ont qu’une courte période radioactive, leur utilisation se limite aux marchés locaux[108].
  • L’Institute for Advanced Medical Isotopes (IAMI) proposé par TRIUMF : TRIUMF, une entreprise de premier plan dans le domaine des accélérateurs au Canada, propose la création d’un nouvel institut qui produirait des isotopes de nouvelle génération pour le traitement du cancer et d’autres maladies[109]. Selon TRIUMF, l’infrastructure de l’IAMI permettra au laboratoire de l’organisme, et par extension au Canada, de se maintenir à la fine pointe de l’innovation en médecine nucléaire. TRIUMF et ses partenaires de recherche régionaux (University of British Columbia, BC Cancer Agency, Simon Fraser University) demandent chacun aux gouvernements fédéral et provincial des fonds d’immobilisation de 12,25 millions de dollars pour la construction de l’institut[110].
  • Demandes d’une nouvelle source de neutrons à flux élevé : Certains témoins ont recommandé au gouvernement de construire un nouveau réacteur ou de mettre à niveau un réacteur existant, afin de remplacer les capacités du réacteur NRU et de fournir aux chercheurs une source à long terme de neutrons à flux élevé[111]. Selon M. Heysel, l’installation de McMaster pourrait être transformée en une source majeure de neutrons pour appuyer la recherche au Canada. Cependant, sa demande de financement aux termes du programme d’initiatives scientifiques majeures de la Fondation canadienne pour l’innovation n’a pas été examinée « au motif que les activités de recherche neutroniques demeurent une responsabilité du gouvernement fédéral par l’entremise de RNCan[112] ». L’une des principales recommandations du Groupe d’experts sur la production d’isotopes médicaux en 2009 était de construire un nouveau réacteur nucléaire en remplacement du réacteur NRU[113].

Des témoins ont dit au Comité que des investissements à long terme étaient nécessaires dans le secteur de la R-D pour en assurer l’avenir au Canada. Mark Daymond, de l’Université Queen’s, a signalé au Comité qu’à part dans les universités, la R-D industrielle a lieu au sein de peu d’organismes et que leurs fonds « tendent à se réduire ». M. Daymond a donc incité les gouvernements fédéral et provincial (Ontario) à exprimer leur engagement à long terme envers la technologie nucléaire, afin de soutenir le développement futur de ce secteur au Canada[114]. De même, M. Austin a dit qu’« il est évident que s’il n’y a pas d’autres investissements dans l’innovation nucléaire, la R-D, et la mise au point de technologies, l’avantage concurrentiel que le Canada détient actuellement sur toute la chaîne de valeur nucléaire disparaîtra dans les prochaines années[115] ».

Les témoins ont aussi dit au Comité qu’il serait utile à l’industrie nucléaire que le financement soit plus ciblé. Par exemple, selon le professeur Harvel, les investissements actuels en R‑D sont éparpillés parce qu’ils couvrent la totalité du secteur nucléaire canadien : ils n’apportent donc que « des améliorations minimes, dans tous ces composants, alors que nous pourrions faire des progrès importants, peut-être, en nous concentrant sur des composants clés ». Pour ce témoin, il vaudrait mieux concentrer le financement, particulièrement sur les technologies compétitives qui nécessitent d’importantes dépenses initiales en capital[116]. Faisant valoir que « la force de l’industrie canadienne au cours de ces années a résidé principalement dans certains aspects de la R-D tels que le réacteur NRU et l’industrie de la fusion », M. Robinson a, quant à lui, proposé que le gouvernement concentre ses fonds sur les petites et moyennes entreprises capables de créer des produits commercialement viables[117].

Par contre, d’autres témoins ont conseillé aux gouvernements de ne pas financer des programmes ou des technologies en particulier, mais plutôt de laisser les experts de l’industrie décider des investissements les plus stratégiques[118]. Dr Éric Turcotte, de l’Université de Sherbrooke, a reconnu qu’il y a actuellement une certaine dilution du financement de la R-D et un éparpillement de la recherche nucléaire, mais il a fait valoir que la pluralité des groupes de recherche et la concurrence qui en résulte dans le secteur de la R‑D aident à maintenir le leadership : « [s]i, dans le secteur nucléaire, on choisissait de tout concentrer à l’intérieur d’un seul centre, en un an ou un an et demi, tous les autres centres fermeraient, ce qui serait catastrophique[119] ». M. Delage a abondé dans le même sens sur la question du financement des différentes technologies de réacteur avancé; il s’est dit en faveur de l’« arrosage d’un grand nombre de fleurs », puisque ce n’est que dans quelques années selon lui qu’il deviendra nécessaire de concentrer le gros des fonds sur des technologies précises[120]. Lianne Ing, de Bubble Technology Industries, s’est elle aussi dite favorable aux politiques – en l’occurrence le Programme fédéral d’encouragements fiscaux de la recherche scientifique et du développement expérimental (RS&DE) – qui permettent aux entreprises de décider quelles technologies sont les mieux adaptées à leurs marchés. Elle a indiqué ce qui suit :

Il est très difficile de prévoir ce que sera la prochaine technologie perturbatrice. Elle est perturbatrice parce que personne ne s’y attend. Lorsque le gouvernement essaie de désigner des vainqueurs en concentrant le financement sur des sélections de technologies très spécifiques, il est possible qu’il finisse par saper une petite entreprise qui est peut-être sur le point de faire une percée remarquable. Nous pensons que le programme d’encouragements fiscaux RS&DE est très bon parce qu’il nous permet de décider quelles recherches notre entreprise doit mener[121].

Le seul reproche que Mme Ing a adressé au programme RS&DE est qu’il ne couvre plus les dépenses en capital, alors que de nombreux projets de recherche sont très coûteux en matériel et en capital et nécessitent de ce fait des investissements considérables de la part des entreprises. Pour Mme Ing, « le fait qu’il n’y ait aucune aide pour les dépenses en capital fait qu’il est difficile pour les entreprises d’être compétitives dans le secteur de la haute technologie[122] ».

RECOMMANDATIONS

Compte tenu des témoignages présentés dans les sections précédentes, le Comité recommande ce qui suit :

1)    Le Comité recommande que le gouvernement du Canada travaille avec l’industrie, les gouvernements et les collectivités autochtones, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les partenaires internationaux afin d’assurer que le secteur nucléaire du Canada continue à faire progresser ses pratiques de sûreté et de réglementation rigoureuses, en :

a)    continuant d’investir dans la recherche-développement (R-D) et l’innovation à l’appui de la sûreté du secteur, y compris ses activités et ses pratiques de gestion des déchets au Canada et à l’étranger;

b)   s’assurant que des ressources financières suffisantes sont en place pour contrer les répercussions sur la sécurité publique, la santé ou l’environnement de tout incident ou accident nucléaire imprévu;

c)    se tenant au courant des faits nouveaux dans le domaine de la sûreté nucléaire et de la gestion des déchets à l’échelle internationale.

2)    Le Comité recommande que le gouvernement du Canada maintienne son appui à la R-D et à l’innovation nucléaires au Canada à court, à moyen et à long terme, en :

a)    envisageant des options à long terme visant la mise en place d’une source fiable de neutrons à flux élevé pour les chercheurs canadiens;

b)   travaillant en collaboration avec l’industrie, et particulièrement les petites entreprises, en vue de s’assurer que les chercheurs et les experts ont accès aux services et à l’infrastructure dont ils ont besoin pour exceller en matière d’innovation et de R-D;

c)    travaillant avec l’industrie, le secteur de la santé et les gouvernements provinciaux et territoriaux, en vue de s’assurer que l’approvisionnement en isotopes médicaux ne soit pas interrompu au Canada à court, à moyen et à long terme.

3)    Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue à soutenir le développement et la commercialisation des technologies nucléaires canadiennes au Canada et à l’étranger, en :

a)    continuant d’offrir du financement pour toute la gamme des activités du secteur, tout en laissant les experts de l’industrie libres d’investir ces fonds en fonction de leurs besoins commerciaux et de leurs études de marché;

b)   fournissant du soutien financier pour aider les petites entreprises à couvrir les dépenses en capital des grands projets (p. ex., dans le cadre du Programme fédéral de la recherche scientifique et du développement expérimental).

4)    Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue de travailler avec l’industrie, les gouvernements et les collectivités autochtones, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les partenaires internationaux en vue de promouvoir et de faire progresser, au pays et à l’étranger, le leadership canadien en matière de production nucléaire d’électricité, en :

a)    corrigeant les manques d’information ou la désinformation concernant les produits et les technologies nucléaires du Canada;

b)   fournissant à l’industrie les ressources réglementaires et diplomatiques nécessaires à ses exportations et activités internationales;

c)    envisageant d’offrir les crédits à l’exportation à toute la gamme des exportations nucléaires canadiennes.

5)    Le Comité recommande que le gouvernement du Canada travaille en collaboration avec l’industrie, le milieu universitaire, les gouvernements et les collectivités autochtones et les gouvernements provinciaux et territoriaux afin de soutenir et d’accroître l’expertise canadienne dans le secteur nucléaire, en:

a)    aidant les universités et les organismes de recherche et de formation du Canada à construire de nouvelles installations et à acquérir de l’équipement, ou à donner de l’enseignement ou réaliser des recherches, dans des domaines qui profitent au développement du secteur;

b)   soutenant des programmes de formation des professionnels hautement qualifiés nécessaires à la pleine gamme des activités du secteur, dont la préparation et le transport du combustible nucléaire; la construction, l’exploitation, la maintenance, la réfection et l’inspection des réacteurs; et la gestion des déchets et la mise hors service;

c)    soutenant les programmes de formation des professionnels hautement qualifiés nécessaires au développement des technologies et industries nucléaires de demain, c’est-à-dire les technologies Candu dérivées et les réacteurs nucléaires avancés.

6)    Le Comité recommande que le gouvernement du Canada continue de soutenir le développement des petits réacteurs modulaires (PRM), ceux‑ci ayant le potentiel de fournir de l’énergie propre et fiable aux collectivités éloignées et nordiques et d’ouvrir de nouvelles régions à l’exploitation des ressources et aux retombées économiques connexes.

7)    Le Comité recommande que l’industrie, en collaboration avec les universitaires et les innovateurs, établisse un conseil d’innovation nucléaire réunissant notamment des représentants des gouvernements fédéral et provinciaux; ce conseil travaillerait à faire profiter le pays tout entier des applications non énergétiques (p. ex., santé, agriculture, fabrication, etc.) du nucléaire.


[1]              Comité permanent des ressources naturelles (RNNR), Témoignages, 1re session, 42e législature, 17 novembre 2016 (Richard Sexton, agent principal de la transition par intérim, Énergie atomique du Canada limitée); Témoignages, 1re session, 42e législature, 22 novembre 2016 (Jerry Hopwood, président, Réseau d’excellence universitaire en génie nucléaire).

[2]              RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 15 novembre 2016 (Niall O’Dea, directeur général, Direction des ressources en électricité, secteur de l’énergie, ministère des Ressources naturelles); Témoignages (Sexton, EACL).

[3]              RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[4]              RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 17 novembre 2016 (Michael M. Binder, président et premier dirigeant, Commission canadienne de sûreté nucléaire).

[5]              RNNR,Témoignages (Sexton, EACL).

[6]              La Division des réacteurs Candu gérait les projets de construction/service des réacteurs nucléaires, le développement des affaires et du marketing, ainsi que la commercialisation du réacteur ACR-1000 d’EACL (réacteur nucléaire à eau lourde de génération III+); la Division de la recherche et de la technologie menait des recherches nucléaires et industrielles, produisait les isotopes médicaux et gérait les déchets nucléaires; le groupe Gestion du passif gérait deux types de responsabilités liées aux déchets et au déclassement pour le compte du gouvernement du Canada.

[7]              RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[8]              RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 13 décembre 2016 (Mark Lesinski, président-directeur général, Laboratoires Nucléaires Canadiens).

[9]              RNNR,Témoignages (Lesinski, LNC).

[10]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[11]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er décembre 2016 (John Robinson, président-directeur général, Tyne Engineering).

[12]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 8 décembre 2016 (Steven Schumann, directeur des relations gouvernementales du Canada, International Union of Operating Engineers).

[13]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 24 novembre 2016 (Julie Gelfand, commissaire à l’environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada).

[14]           RNNR,Témoignages (Binder, CCSN).

[15]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[16]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er décembre 2016 (Richard Wiens, directeur, Approvisionnement stratégique, Technologies gamma, MDS Nordion).

[17]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 24 novembre 2016 (Laurie Swami, présidente et première dirigeante, Société de gestion des déchets nucléaires).

[18]           RNNR,Témoignages (Swami, SGDN); Témoignages (O’Dea, RNCan).

[19]           SGDN, mémoire (30 novembre 2016).

[20]           Ibid.

[21]           RNNR,Témoignages (Swami, SGDN); Témoignages (O’Dea, RNCan).

[22]           RNNR,Témoignages (Binder, CCSN); Témoignages (Swami, SGDN); Témoignages, 1re session, 42e législature, 24 novembre 2016 (Glenn Jager, président et directeur général du nucléaire, Ontario Power Generation Inc.).

[23]           RNNR,Témoignages (Wiens, Nordion).

[24]           RNNR,Témoignages (Jager, OPG).

[25]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[26]           RNNR,Témoignages (Jager, OPG).

[27]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[28]           RNNR,Témoignages (Lesinski, LNC).

[29]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[30]           RNNR,Témoignages (Sexton, EACL).

[31]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 8 décembre 2016 (Gordon Edwards, président, Regroupement pour la surveillance du nucléaire).

[32]           RNNR,Témoignages (Edwards, RSN).

[33]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er décembre 2016 (Vince Robinson, Tyne Engineering).

[34]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[35]           Ibid.

[36]           RNNR,Témoignages (Jager, OPG); Témoignages, 1re session, 42e législature, 15 novembre 2016 (Colin Hunt, secrétaire, Canadian Nuclear Society).

[37]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 13 décembre 2016 (Brett Plummer, dirigeant principal de l’exploitation nucléaire et vice-président du nucléaire, Société d’énergie du Nouveau-Brunswick); Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er décembre 2016 (Justin Hannah, directeur, marketing, stratégie et relations extérieures, SNC-Lavalin International); Témoignages (Jager, OPG); Témoignages (Hopwood, REUGN).

[38]           RNNR,Témoignages (Plummer, Énergie NB).

[39]           Ibid.

[40]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[41]           Bruce Power, Le rôle du nucléaire : présent et futur, 17 novembre 2016.

[42]           RNNR,Témoignages (Jager, OPG).

[43]           RNNR,Témoignages (Schumann, IUOE).

[44]           RNNR,Témoignages (Jager, OPG).

[45]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[46]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 22 novembre 2016 (Glenn Harvel, doyen associé, Faculty of Energy Systems and Nuclear Science, University of Ontario Institute of Technology); Témoignages, 1re session, 42e législature, 17 novembre 2016 (Ron Oberth, président directeur général, Organization of Canadian Nuclear Industries).

[47]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 29 novembre 2016 (Dale Austin, gestionnaire, relations gouvernementales, Cameco Corporation).

[48]           RNNR,Témoignages (Jager, OPG).

[49]           RNNR,Témoignages (Plummer, Énergie NB).

[50]           RNNR, Témoignages (Hunt, Canadian Nuclear Society).

[51]           Ibid.

[52]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[53]           Ibid.

[54]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 8 décembre 2016 (Shawn-Patrick Stensil, analyste nucléaire, Greenpeace Canada).

[55]           RNNR,Témoignages (Hannah, SNC-Lavalin).

[56]           RNNR, Témoignages (Hunt, Canadian Nuclear Society).

[57]           RNNR,Témoignages (Hannah, SNC-Lavalin).

[58]           Ibid.

[59]           Ibid.

[60]           Ibid.

[61]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[62]           Ibid.

[63]           RNNR,Témoignages (Hannah, SNC-Lavalin); RNNR,Témoignages (Oberth, OCNI).

[64]           RNNR,Témoignages (Hannah, SNC-Lavalin).

[65]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er décembre 2016 (Mark Daymond, professeur, génie mécanique et génie des matériaux, Université Queen's); Témoignages (Robinson, Tyne Engineering); Témoignages (Plummer, Énergie NB); Témoignages (Austin, Cameco).

[66]           RNNR,Témoignages (Jager, OPG).

[67]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er décembre 2016 (Rick Holt, professeur émérite, génie mécanique et génie des matériaux, Université Queen's).

[68]           RNNR,Témoignages (Hopwood, REUGN).

[69]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 29 novembre 2016 (Simon Irish, administrateur général, directeur, Terrestrial Energy Inc.).

[70]           RNNR,Témoignages (Irish, Terrestrial Energy).

[71]           RNNR,Témoignages (Harvel, UOIT).

[72]           Terrestrial Energy, Les choix offerts aux Canadiens en matière d’énergie nucléaire, 9 décembre 2016.

[73]           RNNR,Témoignages (Hunt, Canadian Nuclear Society); Témoignages, 1re session, 42e législature, 17 novembre 2016 (John Barrett, président et chef de la direction, Association nucléaire canadienne).

[74]           RNNR,Témoignages (Jager, OPG).

[75]           RNNR,Témoignages (Lesinski, LNC); Témoignages (Hunt, Canadian Nuclear Society).

[76]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[77]           RNNR,Témoignages (Lesinski, LNC).

[78]           Ibid.

[79]           RNNR,Témoignages (Stensil, Greenpeace).

[80]           RNNR,Témoignages (Hopwood, REUGN).

[81]           RNNR,Témoignages (Jager, OPG).

[82]           RNNR,Témoignages (Lesinski, LNC).

[83]           RNNR,Témoignages (Sexton, EACL).

[84]           RNNR,Témoignages (Binder, CCSN).

[85]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[86]           RNNR, Témoignages, 1re session, 42e législature 29 novembre 2016 (Michael Delage, vice-président de technologie et stratégie d’entreprise, General Fusion).

[87]           Fusion Energy, Fusion 2030 : Une feuille de route pour le Canada, 16 janvier 2017.

[88]           Ibid.

[89]           Ibid.

[90]           RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[91]           Terrestrial Energy, Les choix offerts aux Canadiens en matière d’énergie nucléaire, 9 décembre 2016.

[92]           RNNR,Témoignages (Irish, Terrestrial Energy).

[93]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 22 novembre 2016 (Christopher Heysel, directeur, Activités et installations nucléaires, Réacteur nucléaire McMaster, McMaster University).

[94]           RNNR,Témoignages (Barrett, Association nucléaire canadienne).

[95]           RNNR,Témoignages (Heysel, McMaster University).

[96]           Ibid.

[97]           RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 22 novembre 2016 (Jean Koclas, professeur, Institut de génie nucléaire, Département de génie physique, École polytechnique de Montréal).

[98]           RNNR, Témoignages (Hunt, Canadian Nuclear Society).

[99]           RNNR,Témoignages (Heysel, McMaster University).

[100]         RNNR,Témoignages (Oberth, OCNI).

[101]         RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[102]         RNNR,Témoignages (Lesinski, LNC).

[103]         RNNR, Témoignages (O’Dea, RNCan).

[104]         RNNR,Témoignages (Sexton, EACL).

[105]         RNNR,Témoignages (Heysel, McMaster University).

[106]         RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 22 novembre 2016 (Éric Turcotte, professeur agrégé, Département de médecine nucléaire et de radiobiologie, Université de Sherbrooke).

[107]         RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 24 novembre 2016 (James Scongack, vice-président, Affaires corporatives, Bruce Power); RNNR,Témoignages (Oberth, OCNI).

[108]         RNNR,Témoignages (Scongack, Bruce Power).

[109]         RNNR,Témoignages, 1re session, 42e législature, 1er décembre 2016 (Jonathan Bagger, directeur, TRIUMF).

[110]         TRIUMF, Protéger la position de chef de file du Canada en matière d’innovation et de technologie nucléaires, 1er décembre 2016.

[111]         RNNR,Témoignages (Koclas, École polytechnique de Montréal); Témoignages (Turcotte, Université de Sherbrooke); Témoignages (Heysel, McMaster University).

[112]         RNNR,Témoignages (Heysel, McMaster University).

[113]         RNNR,Témoignages (Turcotte, Université de Sherbrooke).

[114]         RNNR,Témoignages (Daymond, Université Queen's).

[115]         RNNR,Témoignages (Austin, Cameco).

[116]         RNNR,Témoignages (Harvel, UOIT).

[117]         RNNR,Témoignages (Robinson, V., Tyne Engineering).

[118]         RNNR,Témoignages (Irish, Terrestrial Energy); Témoignages, 1re session, 42e législature, 29 novembre 2016 (Lianne Ing, vice-présidente, Bubble Technology Industries inc.); Témoignages (Delage, General Fusion).

[119]         RNNR,Témoignages (Turcotte, Université de Sherbrooke).

[120]         RNNR,Témoignages (Delage, General Fusion).

[121]         RNNR,Témoignages (Ing, Bubble Technology).

[122]         Ibid.