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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 012 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 27 novembre 2020

[Enregistrement électronique]

  (1305)  

[Traduction]

    Chers collègues, je vous souhaite la bienvenue.
     Nous avons droit aujourd'hui à quelque chose d'unique, puisque nous recevons deux témoins. Je dis que c'est unique parce que nous avons tenu beaucoup de séances sans aucun témoin. Nous sommes donc heureux de les accueillir.
    Notre premier témoin sera le commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, M. Mario Dion, qui sera avec nous de 13 heures à 14 heures.
    Monsieur Dion, nous allons vous laisser faire votre exposé. Veuillez vous en tenir à sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur.

[Français]

    Je tiens d'abord à remercier le Comité de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui.
    Ma dernière comparution a eu lieu il y a un an et demi. Cet après-midi, les membres de votre comité et moi, nous aurons enfin l'occasion d'échanger des renseignements et des points de vue.
    La motion traite de questions liées aux conflits d'intérêts relativement aux dépenses engagées dans le contexte de la pandémie.
    Je suis commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique depuis janvier 2018. J'ai posé ma candidature à ce poste, parce que j'y croyais et que je voulais contribuer à améliorer la confiance de la population canadienne envers ses élus et les dirigeants du secteur public. J'y crois toujours, et même encore plus, maintenant que je comprends pleinement la nature et le potentiel de mes fonctions.

[Traduction]

    Notre mandat comporte deux volets. Comme plusieurs membres du Comité sont de nouveaux députés, je vais profiter de l'occasion pour vous en parler brièvement.
    Nous aidons la Chambre des communes à administrer le Code régissant les conflits d'intérêts des députés, adopté en 2004. Nous faisons également presque le même travail en ce qui concerne la Loi sur les conflits d'intérêts, qui est entrée en vigueur en 2007.
    La Loi vise à établir des règles claires en matière de conflits d'intérêts et d'après-mandat pour les titulaires de charge publique, soit les ministres, les secrétaires parlementaires, les membres de leur personnel ainsi que les personnes nommées par le gouverneur en conseil. Il y a actuellement quelque 2 400 titulaires de charge publique, dont 1 300 sont titulaires de charge publique principaux, ce qui signifie qu'ils ont des obligations supplémentaires beaucoup plus strictes. Parmi ces derniers, 700 sont membres du personnel des bureaux de ministres.
    La pandémie a eu et continuera d'avoir des répercussions sur le travail du Commissariat en raison des deux enquêtes très médiatisées liées à la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. De plus, comme nous en discuterons dans quelques instants, la pandémie a eu une incidence dans le cadre de l'affaire mettant en cause M. MacNaughton, ce qui a évidemment généré une certaine quantité de travail. C'était lié à la pandémie. En ce qui concerne ce dossier, j'ai fini par émettre une ordonnance à l'encontre de neuf hauts fonctionnaires impliqués dans l'affaire, en somme, pour leur interdire de communiquer avec M. MacNaughton tout au long de la prochaine année.
    Si la charge de travail du Commissariat a considérablement augmenté au cours de la dernière année, ces facteurs n'en sont pas la cause principale; cette situation est plutôt attribuable à une hausse importante du nombre de membres du personnel exonérés. En effet, il y a eu une augmentation de 65 % du nombre de personnes qui travaillent dans les bureaux de ministres par rapport à l'année dernière. Cela s'ajoute aux 98 nouveaux membres de la députation à la suite de la dernière élection générale. Il s'agit donc de nouveaux députés par rapport à la dernière législature. Je crois qu'il est juste de dire que les nouveaux membres du personnel ministériel et les nouveaux députés ont besoin d'un soutien accru, car ils doivent se familiariser rapidement avec un ensemble de règles complexes et fournir beaucoup d'informations au Commissariat.
    À leur nomination, en vertu de la loi, tous les titulaires de charge publique sont informés de leurs obligations, et un processus de conformité s'amorce alors. Essentiellement, il s'agit du même processus que celui que vous suivez conformément au Code. Lorsque les titulaires de charge publique complètent le processus initial, nous analysons cette information. Nous veillons également à ce que chaque titulaire de charge publique principal soit soumis à un examen annuel. Tout au long de leur mandat, les titulaires de charge publique doivent agir avec prudence à l'égard de toute récusation ou de tout cadeau d'une valeur de 200 $ ou plus, ou encore, de tout changement important dans leur situation, auquel cas ils doivent en faire la déclaration au Commissariat dans les meilleurs délais.
    Notre rôle ne consiste pas simplement à conseiller, à vérifier les exceptions ou à expliquer les exigences, mais aussi à mener des activités de surveillance pour veiller au respect de la Loi et du Code. Notre rôle consiste à guider les députés et les hauts fonctionnaires de façon individuelle et indépendante, avec rigueur et cohérence. Voilà à quoi sert la majeure partie de nos ressources.
    Il y a eu une diminution importante du nombre de conseils fournis par le Commissariat au cours de la première partie de cet exercice financier, car l'arrivée soudaine de la pandémie a bouleversé les activités dans tous les domaines. C'est, du moins, mon diagnostic. La situation s'est redressée depuis. Je suis heureux de dire que nous prévoyons une hausse marquée d'une année à l'autre. Les gens viennent nous demander conseil. C'est ainsi que les choses devraient se passer. Bien que je n'hésite pas à recourir aux pouvoirs d'application prévus dans la Loi, je préfère bien davantage que les personnes concernées comprennent leurs obligations et s'y conforment.
    Par exemple, en pleine pandémie, au début du mois de novembre, nous avons organisé une téléconférence d'information sur l'obligation de récusation, parce que j'ai estimé que cela pourrait s'avérer nécessaire. Il est très important d'être en mesure de reconnaître les situations où l'on doit se récuser. Le nombre de personnes qui se sont inscrites était supérieur au nombre de places autorisées en vertu de notre licence d'utilisation de Zoom. En effet, plus de 200 personnes se sont inscrites à cette séance d'une heure sur les récusations.

  (1310)  

     Je compte organiser d'autres téléconférences à l'avenir sur des questions [Inaudible] les domaines récurrents où il est vraiment important de comprendre vos obligations.
    En ce qui concerne la pandémie, j'ai mentionné trois enquêtes, dont deux qui ne sont pas encore terminées. Nous avons également reçu quelques dizaines de demandes de conseils ayant trait à la pandémie. C'est assez marginal.
    Pour ce qui est de l'après-mandat — et nous allons parler de l'affaire MacNaughton —, il y a une partie de la Loi qui porte là-dessus. C'est très court. Il s'agit de 10 articles, qui prévoient, en gros, que les ex-titulaires de charge publique ont des obligations, dont certaines s'imposent pour toujours et d'autres, pour une période limitée d'un ou de deux ans après la fin de leur mandat.
    J'invite toujours les gens à lire ces dispositions lorsqu'ils deviennent titulaires de charge publique, parce qu'ils doivent se préparer mentalement à s'y conformer lorsqu'ils quitteront leur poste. Toutefois, les anciens hauts fonctionnaires nous demandent rarement des conseils.
    Il leur est interdit de faire un certain nombre de choses. Mon but aujourd'hui n'est pas d'en dresser une liste exhaustive, faute de temps, mais je pense qu'il est important de remettre en contexte l'affaire MacNaughton pour comprendre que M. MacNaughton, en sa qualité de titulaire de charge publique principal, avait quitté ses fonctions depuis quelque temps et avait essentiellement participé à des activités assujetties aux exigences prévues dans la partie 3 de la Loi, exigences qu'il n'avait d'ailleurs pas respectées. M. MacNaughton a enfreint certains aspects de ses obligations d'après-mandat et il a reconnu, en rétrospective, que certaines des communications et réunions, dans la mesure où elles auraient pu avantager les intérêts de son nouvel employeur, Palantir Technologies, étaient contraires à l'article 33.

[Français]

    Si j'aborde la question des enquêtes, c'est parce que je sais que vous comprenez que j'ai le pouvoir de mener des enquêtes, que ce soit en vertu de la Loi ou du Code. Généralement, cela découle d'une plainte faite par un député. Je peux également lancer des enquêtes de mon propre chef, lorsque des renseignements me fournissent des motifs raisonnables de croire qu'une contravention a eu lieu.
    Je vais sauter quelques étapes, parce que je vois que j'ai peut-être déjà dépassé mon temps de parole.
    En ce qui concerne le dossier de M. MacNaughton, au lieu de continuer à faire une enquête sur une affaire où il y avait un enjeu évident et un certain nombre de contraventions, j'ai plutôt décidé de rendre une ordonnance qui visait à empêcher la répétition de ces événements. Ainsi, neuf titulaires de charges publiques se sont vus interdire d'avoir des rapports officiels avec M. MacNaughton. Je me suis ainsi assuré que la situation ne se reproduise plus. L'ordonnance est consignée dans notre registre public.
    Depuis que je suis en fonction, c'est-à-dire depuis bientôt trois ans, nous avons pour objectif de terminer les rapports d'enquête dans un délai d'un an, à moins de complications extraordinaires. Depuis ma nomination, nous avons été en mesure d'atteindre cet objectif, et nous avons produit 18 rapports en vertu de la Loi ou du Code.
    L'intérêt est variable selon la personne en cause ou selon la gravité des infractions. Cela joue un rôle éducatif important...

[Traduction]

    Monsieur le commissaire, je...

[Français]

    Oui, monsieur le président?

[Traduction]

    Je regrette toujours d'avoir à interrompre quelqu'un, mais nous vous avons déjà accordé quelques minutes de plus. Je sais que mes collègues ne manqueront pas de me demander des comptes. Il faut donc que nous passions aux questions. S'il y a d'autres points que vous voulez soulever, vous pouvez certainement le faire durant la période des questions.
    Oui, bien sûr. Je m'en tiendrai à moins de deux minutes, comme vous le verrez, monsieur le président.
    Non, monsieur, vous avez déjà dépassé vos deux minutes.
    Ah, vous voulez dire qu'il ne nous reste plus de... Bon, d'accord. J'aborderais les autres aspects durant la période des questions et réponses.
    Le temps est toujours notre ennemi, monsieur.
    Oui, je sais.
    J'en suis désolé. Nous allons maintenant passer aux questions.
    Je regarde parfois vos délibérations sur la chaîne CPAC.
    Très bien.
     Monsieur Barrett, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous, monsieur le commissaire, d'être des nôtres aujourd'hui.
    Parlant de temps, monsieur le commissaire, je me demandais si vous pouviez indiquer au Comité le délai prévu pour que votre bureau fasse rapport de ses conclusions sur les enquêtes concernant le premier ministre et les manquements au paragraphe 6(1), à l'article 7 et à l'article 21 de la Loi sur les conflits d'intérêts.
    Non, je ne peux pas, et ce, pour deux raisons. Premièrement, la Loi m'interdit d'échanger tout renseignement lorsqu'une enquête est en cours. Deuxièmement, même si j'en avais le droit, je ne saurais franchement pas, à ce stade-ci, combien de mois il nous faudrait encore pour achever les enquêtes que nous avons lancées au sujet de M. Trudeau et de M. Morneau.

  (1315)  

    D'accord. Merci beaucoup.
    Pour la gouverne des membres du Comité, pouvez-vous résumer l'article 9 de la Loi sur les conflits d'intérêts?
    Je vais essayer, même si parfois c’est plus complexe qu’il n’y paraît. Je vais essayer. Je vais faire de mon mieux.
    Voici l'article 9. J’utilise toujours le papier, parce que j’ai commencé en 1980, monsieur Barrett. Je vais aller à la bonne page. Essentiellement, l'article dit ceci: « Il est i?nterdit à tout titulaire de charge publique de se prévaloir de ses fonctions officielles pour tenter d'influencer la décision d'une autre personne dans le but de favoriser son intérêt personnel ou celui d'un parent ou d'un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne. »
    L’accent est mis sur le fait de chercher à influencer une décision qui doit être prise par une autre personne. Vous occupez un poste. Vous essayez d’influencer une autre personne qui doit prendre une décision afin de faire en sorte que cette décision favorise les intérêts privés d’un parent ou d’un ami, ou favorise indûment les intérêts privés d’une autre personne.
    Je sais que je vous relis plus ou moins l'article, mais j’essaie de mettre l’accent sur les aspects essentiels.
    Merci beaucoup.
    L’article 9 de la Loi est un article auquel vous avez estimé que le premier ministre Justin Trudeau avait contrevenu. Est-ce exact?
    Dans le Rapport Trudeau II, oui, c'est ce que nous avons soutenu.
    Il était dans l’intérêt personnel du premier ministre de tenter d’interférer dans la poursuite pénale de SNC-Lavalin. C’est un très bref résumé de la conclusion de votre rapport, mais serait-il juste d'affirmer cela?
    Nous avons constaté qu’il avait indûment favorisé les intérêts de SNC-Lavalin en cherchant à influencer la décision du procureur général.
    Je ne suis pas avocat, mais à première vue, cela ressemble à l’article 139 du Code criminel, qui stipule que « quiconque volontairement tente de quelque manière d’entraver, de détourner ou de contrecarrer le cours de la justice dans une procédure judiciaire » est coupable d’entrave à la justice.
    Ce ne sont pas vos mots, monsieur. C’est la lecture que je fais de cet article du Code criminel.
    La raison pour laquelle j’en parle, c'est que je me demande si vous êtes en mesure de dire au Comité si vous avez été en contact avec la GRC en ce qui concerne le Rapport Trudeau II.
    Je ne suis pas en mesure de dire au Comité si j’ai été en contact avec la GRC.
    D’accord. Merci beaucoup.
    Nous savons que vous avez eu des problèmes. C’est ce que vous avez déclaré dans le Rapport Trudeau II. Vous avez eu du mal à obtenir les renseignements qu'il vous fallait et vous avez été bloqué à certains moments de l’enquête. Ces problèmes étaient-ils particuliers à cette enquête? Ces entraves ou ces obstructions sont-elles des choses que vous avez constatées lors d'enquêtes passées et actuelles, ou lors d'enquêtes plus récentes?
    C’était particulier à cette enquête et c’est pour cette raison que j’ai décidé d’en parler en détail dans le rapport lui-même. J’ai été surpris et j’ai voulu prendre des mesures dans le rapport pour essayer de limiter la possibilité qu'une telle situation se reproduise.
    Vous a-t-on déjà donné des raisons? Le greffier du Conseil privé y a fait référence lors de son témoignage très médiatisé devant le comité des finances, l'été dernier. En tant qu’auditeur assidu de CPAC, avez-vous obtenu des précisions au sujet de cette obstruction ou de ces difficultés en entendant le témoignage de M. Shugart?
    Non, ça n'a pas été le cas.
    Je pense que mon temps est presque écoulé.
     Je vais demander comment les réunions et les communications de M. MacNaughton pourraient favoriser les intérêts de Palantir, son employeur. Il a dit qu’avec le recul, il a reconnu qu’elles auraient pu agir en ce sens.
    Vous avez lu l’ordre, j’en suis sûr, monsieur Barrett. Bien entendu, je devrais vous répondre par l'intermédiaire du président. Nous avons eu 17 conversations avec ces 9 personnes qui ont reçu l’ordre de ne plus parler à M. MacNaughton. On leur a essentiellement proposé les services de Palantir à titre gracieux. Le fait d'offrir ces choses gratuitement est souvent un tremplin vers un arrangement plus lucratif, c’est donc sur cette base que nous avons décidé d’imposer l’ordre.

  (1320)  

    Merci beaucoup, monsieur Dion et monsieur Barrett.
    Nous allons maintenant passer à M. Fergus.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Dion, c'est un plaisir de vous revoir, tout comme cela a été un plaisir la première fois que nous avons eu un entretien. Vous aviez généreusement accepté de me rencontrer et de me conseiller lorsque je vous l'avais demandé.
    Mes questions sont d'ordre général. J'aimerais savoir pourquoi vous croyez important qu'il y ait un agent du Parlement, comme vous, qui soit indépendant, pour travailler sur des questions d'éthique concernant les députés, en particulier, et les titulaires de charge publique.
    Je pense que c'est important sur le plan de l'objectivité, comme vous l'avez dit, et sur celui de l'expertise. C'est une tâche qui exige une certaine expertise, et celle-ci s'acquiert au fil de nombreuses années.
    C'est bon d'avoir quelqu'un qui ne fait que cela. C'est bon d'avoir quelqu'un qui n'a aucune attache partisane, qui va donc traiter chaque dossier de la même façon, que ce soit un député du parti x ou du parti y — cela n'a aucune importance lorsqu'il s'agit de rechercher de la vérité.
    C'est important aussi du point de vue de la crédibilité, vis-à-vis du public, de tout le processus visant à régir les conflits d'intérêts. Il faut que ce soit quelqu'un qui a la tranquillité d'esprit, qui est nommé pour sept ans et qui est inamovible, qui ne peut donc pas être renvoyé facilement. Cette personne doit décider si quelqu'un a violé ou non les dispositions de la Loi ou du Code, cette personne occupant, bien souvent, un poste très important, par exemple le premier ministre ou un sous-ministre.
    Je crois que, pour toutes ces raisons, c'est bon d'avoir un agent du Parlement dans ce dossier-ci. Auparavant, comme vous le savez peut-être, jusqu'en 2007, il y a eu des prédécesseurs, mais ils ne jouissaient pas de la même indépendance formelle, légale en fait.
    Effectivement.
    Peu importe que nous ayons les meilleures intentions qui soient, moi-même et mes collègues, nous attendons le résultat de toute enquête de façon intéressée, alors que vous travaillez de façon désintéressée quant au résultat. C'est l'avantage que vous avez, n'est-ce pas?
    Comme je le disais tantôt, les députés sont les seuls qui peuvent légalement déposer une plainte. C'est donc souvent un député qui vient nous voir, et c'est évident que ce député, qui allègue quelque chose, est convaincu que c'est ce qui est arrivé. Je pense que le député est souvent soutenu par les instances de son parti.
    C'est donc quelqu'un d'objectif qui doit recevoir la plainte et décider, tout d'abord, si oui ou non il va amorcer une enquête. S'il amorce une enquête, il s'assurera qu'elle est faite de façon impartiale vis-à-vis de la personne qui fait l'objet de la plainte.
    D'accord.

[Traduction]

    Si vous deviez arriver à une conclusion et que le Comité en arrivait à une autre sur le même sujet, considéreriez-vous que cela serait utile pour votre travail?
    Pensez-vous que cela pourrait...
    Je pense que la réponse est...
    Tout d’abord, nous avons différents forums et différents ensembles de règles, donc même si tout le monde a fait son travail de manière très compétente, il est absolument possible que les résultats dans un forum soient différents de ceux d’un autre forum. Je pense que cela ne serait pas particulièrement bon pour la crédibilité vis-à-vis du public dont je parle si le décideur indépendant prenait une décision alors qu'un comité — qui, par définition, est partisan et fait preuve de partisanerie — en prenait une autre. Je ne pense pas que cela serait un résultat positif pour les personnes concernées, sans parler de l’impact que cela aurait sur la personne faisant l’objet d’une double enquête.

[Français]

    Voilà.

[Traduction]

    Cela devrait-il être confié à d'autres parlementaires ou à vous en tant que commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique?
    Je vous remercie pour cette réponse. Cela m’amène à des constatations intéressantes, car je me demande qui, à votre avis, serait le mieux à même de mener ce type d’enquêtes pour discuter du comportement éthique des parlementaires.

  (1325)  

    Je pense que le Parlement s’est prononcé, en 2004, et jusqu’à ce que le Parlement n'ait modifié le code, c'est lui qui s'applique. Essentiellement, le code stipule que c'est le commissaire qui doit s'en occuper.
    Est-ce la personne qui convient le mieux pour cette tâche?
    C’est ce que pensait le Parlement en 2004, et j’espère que cela est toujours le cas.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t-il?
    Vous avez moins d’une minute.
    Voyons si je peux poser une petite question.
    Est-ce que nous entravons votre travail en nous adressant aux mêmes personnes que vous pour tenter d’évaluer équitablement si elles ont enfreint le code mis en place en 2004?
    Cela n’entrave pas notre travail. En fait, nous suivons avec intérêt ce qui se dit dans chaque comité, et je cherche présentement à obtenir du comité des finances la permission d'utiliser les témoignages qui y sont prononcés pour éviter d'avoir à interroger ces témoins de nouveau.
    Merci beaucoup, monsieur Fergus et monsieur Dion.
    Je vous remercie.
    Nous passons maintenant à Mme Gaudreau.

[Français]

    Madame Gaudreau, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Bonjour, monsieur Dion. C'est un plaisir de m'adresser à vous en français.
    Je vais utiliser mon temps de parole pour revenir sur ce que nous avons vécu. Je suis tout à fait consciente que vous êtes en train de faire votre rapport, mais je vais poser quelques questions pour essayer de comprendre un peu mieux ce qui se passe actuellement.
    Nous nous rappelons tous que, lors d'un point de presse, le premier ministre s'est excusé publiquement de ne pas s'être récusé lorsque le Conseil privé a pris la décision concernant l'attribution de la gestion du programme de Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant. Or, il aurait dû le faire.
    De quelle façon allez-vous tenir compte de ces allégations dans le cadre de votre examen? S'agit-il d'une admission?
    Nous allons évaluer si cela constitue un aveu complet, un aveu qualifié ou un aveu limité. Il faut, de façon très rigoureuse, analyser ce qui a été dit et ce qui n'a pas été dit, puis en arriver à une conclusion. Il est évident que nous allons traiter de cette question dans notre rapport.
    C'est excellent.
    Il s'agit ici d'une enquête déclenchée en vertu du paragraphe 44(3) de la Loi sur les conflits d'intérêts à l’égard de possibles contraventions, notamment à l'article 21. Cet article est ainsi libellé:
21 Le titulaire de charge publique doit se récuser concernant une discussion, une décision, un débat ou un vote [...]
    En vous fondant sur votre expertise, diriez-vous s'il pourrait y avoir des exceptions à cette règle si, par exemple, en raison de l'importance d'une décision, le titulaire de charge publique était avisé de ne pas respecter cet article?
    L'obligation décrite à l'article 21 est absolue. Si les conditions sont remplies, ce n'est pas l'importance de la décision qui compte. L'obligation s'applique à toute discussion. Il ne s'agit pas seulement des décisions. Je vais vous lire cet article, qui compte quatre lignes:
21 Le titulaire de charge publique doit se récuser concernant une discussion, une décision, un débat ou un vote, à l’égard de toute question qui pourrait le placer en situation de conflit d’intérêts.
    Autrement dit, cela s'applique à toute décision, discussion, et ainsi de suite, sans égard à l'importance relative de ce qui est en cause.
    Je vous remercie.
    Ma prochaine question concerne les critères qui définissent la connaissance raisonnable. Il en est question au paragraphe 6(1) de la Loi. Ce paragraphe dit qu'un titulaire de charge publique devrait raisonnablement savoir, lorsqu'il participe à la prise de décision, qu'il se trouve en situation de conflit d'intérêts.
    Par exemple, si un élu titulaire d'une charge publique décide d'attribuer un contrat à un organisme et qu'il peut se trouver en situation de conflit d'intérêts, peut-on parler de connaissance raisonnable, selon vous? Dans ces conditions, devrait-il éviter d'attribuer ce contrat?
     Je lis l'article différemment de la députée, monsieur le président.
    Encore une fois, je vais lire rapidement quelques passages:
6 (1) Il est interdit à tout titulaire de charge publique de prendre une décision [...] s'il sait ou devrait raisonnablement savoir [...] ».
    C'est ce qu'on fait quand on est appelé à prendre position. C'est ce que je fais, dans un rapport: j'analyse les faits et je dois arriver à une conclusion. Lorsqu'on est dans une situation comme celle-là, on doit donc voir si c'était raisonnable de penser que la personne aurait dû savoir, selon les faits.

  (1330)  

    D'accord.
    De nombreux facteurs sont pris en considération, et il y a des moments où il ne serait pas raisonnable de penser que quelqu'un savait absolument tout sur les membres de sa famille ou sur ses amis.
    D'accord. Je vous remercie.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président? J'aimerais poser une autre question.
    Il vous reste deux minutes, madame Gaudreau.
    Monsieur Dion, à la rencontre de mardi dernier, on a parlé de votre rôle en tant que commissaire aux conflits d'intérêts, mais aussi comme commissaire à l'éthique.
    Par vos propos, j'ai cru comprendre que le volet éthique est, en fait, inscrit dans votre titre, mais qu'en est-il de l'éthique dans vos fonctions de commissaire?
    Mon rôle en matière d'éthique est relativement limité. Dans la Loi, il y a un article ou deux où figure le mot « éthique ». L'une des fonctions qui m'incombent, qui n'est pas très bien connue du public, est mentionnée à l'article 43 de la Loi.
    La Loi énonce ce qui suit:
43 En plus d'appliquer la présente loi relativement à ses fonctions, le commissaire donne, à titre confidentiel:
a) des avis au premier ministre, notamment, à sa demande, sur l'application de la présente loi à un titulaire de charge publique;
b) des avis au titulaire de charge publique sur les obligations de la présente loi qui lui incombent.
    Je souligne que le commissaire donne des avis au premier ministre à sa demande, mais pas nécessairement à sa demande. J'ai donc le droit de prendre les devants et de donner des conseils non sollicités, et je pense que cela me confère un certain rôle en matière d'éthique, mais c'est à peu près tout.
    En tout respect, monsieur le commissaire, je me posais la question suivante.
    Considérant le fait que cette pandémie a le dos large, et considérant l'augmentation de la charge de travail dont vous nous avez fait part plus tôt dans votre allocution, qu'en est-il de la relation que vous avez établie avec le premier ministre pour prévenir ce genre de situation, sachant que vous êtes là, entre autres, pour prévenir?
    En effet, vous venez de dire que le premier ministre peut vous adresser une requête et que vous pouvez aussi assurer une vigie.
    C'est cela, et nous avons un dialogue constant avec les titulaires de charge publique. Plus le poste est élevé, plus la fréquence des consultations est élevée.
    Je comprends donc que ce qui est apparemment arrivé n'aurait pas dû arriver.
    Nous verrons.

[Traduction]

    Votre temps est écoulé.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup, monsieur Dion et madame Gaudreau.
    Je vous remercie.
    Monsieur Angus, vous avez maintenant la parole pour six minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président, et merci, monsieur Dion, d’être revenu devant notre comité. C’est bon de vous voir en si bonne santé.
    Je vous remercie.
    Lorsque nos comités parlementaires — le comité des finances et celui de l’éthique — ont commencé à examiner les questions entourant l'organisme UNIS et l’octroi de ces 912 millions de dollars, le premier ministre a déclaré que lorsque cela lui a été présenté, il s’est rendu compte qu’il y avait possibilité de conflits parce qu’il était si étroitement lié à eux, et il a demandé un délai pour leur permettre d'exercer une diligence raisonnable.
    Pendant cette période, est-ce que quelqu’un du bureau du premier ministre ou du bureau de Bill Morneau vous a contacté pour savoir s’il était question de conflit d’intérêts ou d'une obligation de récusation?
    Les conseils que nous donnons à des gens comme M. Morneau, M. Trudeau ou à l’une des 2 400 personnes dont je parlais sont confidentiels. Aux termes de cette loi, je ne peux tout simplement pas discuter du fait qu'on nous ait approchés ou non.
    Je comprends tout à fait. Cependant, pour l'enquête parlementaire, il serait très important de savoir si cette diligence raisonnable a été exercée ou non. Nous continuerons à chercher.
    Avec cette question d'UNIS, ce qui a été particulièrement ardu pour les parlementaires réside dans le fait que nous avons affaire à un organisme qui a une structure d’entreprise très complexe constituée de multiples sociétés. Nous essayons d’avoir une idée claire d'un organisme qui est difficile à cerner.
    Quand on nous a parlé pour la première fois du rôle de Margaret Trudeau et de Sacha Trudeau, on nous a dit qu’ils n’étaient pas payés. Le conseil d’administration s'est fait dire qu’ils n’étaient pas payés. C’était faux. Le témoignage livré au comité a révélé que plus de 350 000 $ avaient été payés, mais les Kielburgers ont déclaré qu’ils n’étaient pas payés pour faire des discours en public, mais bien pour participer à des événements d’entreprise auxiliaires. Il s'agit du gros travail qui doit être fait après coup relativement aux commandites d’entreprises, c'est-à-dire de ce travail qui serait très lucratif pour leur organisation.
    Je sais que vous êtes limité dans ce que vous pouvez dire, mais est-ce que la question des événements auxiliaires et le fait d’être payé pour participer aux événements d’entreprise d'un organisme seraient des choses que vous considéreriez comme faisant partie de votre enquête?

  (1335)  

    Nous allons examiner tout ce qui est lié à cette question, même si c’est un peu lointain — et je ne dis pas que ce l’est. Notre approche est très large, et il ne fait aucun doute que c'est quelque chose que nous allons examiner.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je crois savoir que Mme Grégoire Trudeau, qui a défendu la jeunesse avec ferveur, a été dispensée de jouer le rôle d'ambassadrice de bonne volonté chargée de gérer le blogue d'UNIS. Savez-vous si elle a reçu l’autorisation de travailler sur des événements d’entreprise au nom du groupe UNIS?
    Je ne suis pas au courant. Si j’étais au courant de quelque chose en raison du travail que nous avons fait jusqu'ici, je ne pourrais pas vous en parler de toute façon.
    Je comprends tout à fait. Je vous remercie.
    J’ai lu avec grand intérêt votre enquête sur M. MacNaughton, et je vous remercie beaucoup d'avoir donné une réponse positive à ma demande d'enquête. J’ai trouvé cela très troublant, car M. MacNaughton a une expérience de longue date en matière de lobbying à Ottawa, et il connaît donc très bien les règles.
     Il a dit qu’il avait réglé cette question avec vous. Or, au paragraphe 4 de votre rapport, vous indiquez que M. MacNaughton, à la suite de consultations auprès du Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique, a été nommé président de Palantir Technologies Canada, et que cette nomination était entrée en vigueur le 4 septembre 2019.
    A-t-il discuté avec vous des paramètres de son rôle? S’il vous avait parlé, n’aurait-il pas été établi clairement qu’il ne devait pas faire de lobbying?
    Chaque fois que je rencontre quelqu’un qui souhaite discuter d’une offre d’emploi aux termes de la loi alors qu’il est encore fonctionnaire et qu’il planifie son avenir, je passe invariablement en revue la partie 3 dans son intégralité. Je suis sûr que j’ai fait la même chose avec M. MacNaughton, que j'ai examiné chaque article, dont l’article 37, qui était essentiel dans ce cas.
    Je ne remettrais jamais votre travail en question, et je suis convaincu que vous avez été très consciencieux. Je voulais simplement clarifier ce point.
    J'ai lu votre ordonnance et je la trouve très intéressante, car elle interdit aux personnalités publiques de parler avec M. MacNaughton. La raison donnée pour Rick Theis, qui est l’un des principaux conseillers du premier ministre, c'est qu'il a participé à une discussion sur les Centers for Disease Control en s’entretenant avec d’autres hauts fonctionnaires, et que la discussion aurait porté sur la COVID.
    Palantir se présente comme étant un entrepreneur dans le domaine de la défense. Y a-t-il eu des discussions avec le chef d’état-major de la défense? Quel serait le rapport avec la COVID? Savez-vous s'ils parlaient de la COVID ou d’autres contrats?
    Je ne suis pas au courant. Quand je dis que c’est lié à la COVID, je parle de la période et non du thème. L’ordonnance elle-même devrait en tenir compte, mais je ne peux pas répondre à votre question aujourd’hui. Je ne m’en souviens tout simplement pas.
    D’accord, c’est de bonne guerre.
     Une chose que je remarque, c’est qu'il semble que les portes se sont ouvertes très rapidement. Il a rencontré tous les hauts fonctionnaires, mais il n’a jamais rencontré qui que ce soit du bureau de la ministre de la Santé, ce qui est surprenant. S’il proposait de travailler gratuitement pour la COVID, il est surprenant qu’il n’ait pas pris la peine de rencontrer la ministre de la Santé, cependant qu'il rencontrait le chef d’état-major de la défense et même la vice-première ministre.
    Ce qui m’inquiète au sujet de M. MacNaughton, c’est que son parcours est un parcours inquiétant sur lequel nous ne voulons pas revenir. Il s'agit d'une personne très puissante qui a des liens avec le premier ministre, qui a travaillé comme lobbyiste et qui devient titulaire d’une charge publique, puis qui revient et se fait inviter directement dans le bureau de la vice-première ministre.
    Comment pouvons-nous faire en sorte que les gens respectent la loi et n’abusent pas de leurs relations politiques et des connaissances qu’ils ont acquises en tant qu’ambassadeurs?
    Monsieur Dion, vous devrez garder cette réponse pour un autre membre. Le temps est écoulé.
    Merci, monsieur Angus.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Gourde, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le commissaire, de comparaître devant le Comité.
    Au Comité, au cours des dernières semaines, nous avons eu un très grand débat. Un point a été soulevé selon lequel nous ne pouvions pas parler de certains sujets parce que votre enquête était en cours.
    Tenez-vous compte des témoignages fournis dans le cadre des comités au sujet d'une affaire qui est en cours ou qui vous intéresse? Suivez-vous le travail de notre comité? Si vous y trouvez des éléments intéressants, pouvez-vous les prendre en considération?

  (1340)  

    Nous suivons très attentivement le travail du Comité, étant donné que son mandat central est d'étudier les questions liées à l'éthique. C'est mon comité, si je peux le dire ainsi. En ce qui concerne la Loi, c'est à ce comité que je me présente. Nous suivons les travaux du Comité et ceux d'autres comités, mais dans une moindre mesure. Nous suivons, par exemple, les travaux du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, qui gère le Code régissant les conflits d'intérêts des députés.
    Nous prenons bonne note des témoignages, mais nous ne pouvons pas les utiliser directement, car ils sont protégés par le principe du privilège parlementaire. Comme je le disais tantôt, nous avons demandé la permission au Président de les utiliser, et il nous a renvoyés au Comité permanent des finances pour solliciter cette permission, ce que nous avons fait il y a trois jours.
    S'il s'avère que quelque chose a été dit devant le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique, nous entreprendrons la même démarche que celle effectuée au sujet de votre comité.
    Je vous remercie.
    Toutefois, nous ne pouvons pas utiliser directement ce qui est dit par un témoin pour en faire état dans notre rapport. L'une des différences fondamentales, c'est que, lorsque je parle à un témoin, le témoignage de ce dernier est invariablement fait sous serment, ce qui n'est pas le cas pour ce qui est des témoins comparaissant devant un comité parlementaire.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Dion. Cela va clarifier certains aspects d'une grande discussion que nous avons eue, ici même, au Comité.
    Par ailleurs, un ancien député est parti lors de la dernière élection, en 2019. Il aurait obtenu un contrat de plus de 200 millions de dollars lors de la crise liée à la pandémie.
    Compte tenu des renseignements privilégiés auxquels il avait accès, cela peut-il être considéré comme un conflit d'intérêts?
    Ce qui distingue le Code de la Loi, c'est qu'au moment où l'on cesse d'être un député, on n'est plus régi du tout par le Code.
    Vous n'avez pas nommé le député en question, mais je vais le faire. L'ancien député Baylis n'est plus soumis au Code régissant les conflits d'intérêts des députés et il ne l'était pas au moment où les discussions et l'attribution du contrat ont eu lieu, bien que le contrat n'ait pas été conclu avec lui.
    En ce qui concerne le Code, cela ne s'applique simplement pas à M. Baylis. Nous avons aussi jeté un regard sur les titulaires de charge publique qui étaient impliqués dans l'attribution du contrat et nous avons décidé que, à ce stade-ci, il n'y avait aucun motif raisonnable de croire qu'on avait peut-être violé la Loi.
    L'été passé, au mois d'août, nous avons reçu au Comité le greffier du Conseil privé. Au cours de différentes discussions au sujet de l'organisme UNIS, je lui avais demandé d'où venait l'idée de faire appel à cet organisme et de quelle façon ce dernier était apparu sur le radar. Il nous avait confié que cela avait été fait à la demande du bureau du premier ministre.
    La journée où le premier ministre a annoncé publiquement le programme de Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, l'organisme UNIS avait déjà déposé une offre et il avait pratiquement le contrat en poche, quelques heures plus tard.
    J'avais demandé de quelle façon l'organisme UNIS avait obtenu les informations, et le greffier du Conseil privé nous avait dit que les gens de l'organisme UNIS étaient au courant, parce qu'ils avaient participé à l'élaboration des critères d'admissibilité au programme avec les instances du Conseil privé et celles du bureau du premier ministre.
    Quand un architecte fait les plans d'un pont, est-ce normal qu'il reçoive aussi le contrat pour le fabriquer?
    Il faudrait regarder la situation et, surtout, connaître les faits réels. Je ne me prononce pas sur des situations hypothétiques. Nous examinons évidemment les aspects entourant la genèse de l'attribution du contrat. Je suis sûr que vous lirez notre rapport avec intérêt l'an prochain.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Dion.
    Je vais céder le reste de mon temps de parole à mon collègue M. Chris Warkentin.

[Traduction]

     Merci beaucoup, monsieur Gourde. Je vais ajouter 30 secondes à votre prochain collègue.
    Nous allons passer à M. Dong pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, commissaire Dion, d'être parmi nous aujourd'hui. C'est la première fois que je m'adresse à vous en personne ou virtuellement.
    Tout d'abord, pourriez-vous préciser aux membres du Comité et aux personnes qui nous regardent en ce moment s'il y a des indications que des mesures ont été prises par des députés ou par un membre de la fonction publique, travaillant dans le secteur des services exécutifs ou d'autres services, des mesures qui vous ont empêché d'accomplir pleinement votre travail dans le cas présent?
    Il n'y a aucune indication de ce genre à l'heure actuelle.

  (1345)  

    Merci.
    Monsieur Dion, pensez-vous avoir le plein pouvoir d'enquêter sur des questions par vous-même?
    Oui. Je suis parfaitement satisfait des pouvoirs dont je dispose en ce moment, tant que je ne me heurte pas à un énorme obstacle.
    Vous n'avez pas besoin d'une lettre de l'opposition ou d'une suggestion de ce genre pour vous indiquer sur quels articles enquêter, n'est-ce pas?
    Non. En fait, il serait contraire à la loi que je lise même votre lettre — pendant la séance du Comité, je veux dire.
    En tant que nouveau député, j'ai la chance de ne pas avoir eu besoin jusqu'à maintenant de vos services et de ceux de votre bureau, si ce n'est que pour déposer ma déclaration annuelle. Je sais que, pour certains de mes collègues, c'est une pratique régulière, une habitude peut-être, de communiquer avec votre bureau afin d'obtenir des conseils, la plupart du temps juste pour des raisons d'ordre pratique.
    Comment fournissez-vous vos conseils aux députés? Est-ce par écrit, par téléphone, par courrier électronique ou au moyen d'un site Web? Comment fournissez-vous ces conseils?
     Nous n'avons jamais vraiment calculé le mode de communication préféré, mais j'ai la très nette impression que c'est le courrier électronique, suivi du téléphone, suivi de très loin du courrier postal. Les gens n'aiment plus écrire des lettres. Nous communiquons donc surtout par courrier électronique, ce qui est bien, parce qu'il est bon d'avoir une trace écrite des conseils que nous vous donnons, et il est bon pour nous d'avoir une trace de ce que vous nous avez dit lorsque vous avez demandé des conseils, afin que nous puissions tous les deux nous souvenir de la même chose si un problème survient dans un an.
    Par exemple, disons qu'un membre d'un parti d'opposition ou du grand public pense que votre conseil consistait à mettre en place un écran, et le grand public estime que cela n'est pas à la hauteur de l'examen public. Vous sentiriez-vous obligé de défendre votre recommandation, surtout si cela peut avoir des répercussions importantes sur la réputation de la personne concernée? Pourquoi, ou pourquoi pas?
    Notre rôle est de conseiller les députés et les titulaires de charges publiques. Nous ne discutons en aucune façon, ni ne façonnons les conseils que nous leur donnons avec les médias ou le public. Le seul organe devant lequel je dois défendre mes conseils et mes décisions est le Parlement lui-même, et peut-être la Cour d'appel fédérale, si quelqu'un demande une révision judiciaire. C'est tout.
    Nous n'avons pas à nous justifier, et il nous est pratiquement interdit de révéler des informations, sans lesquelles il est de toute façon impossible de comprendre les conseils.
    Merci.
    Je voudrais revenir sur la conversation que vous avez eue avec mon collègue, M. Fergus.
    J'ai écouté attentivement les observations qui ont été formulées au sujet du rôle du Comité et de votre rôle. À votre avis, le Comité devrait-il éviter de mener ce type d'études?
    Par « ce type d'études », entendez-vous l'étude d'aujourd'hui, la motion d'aujourd'hui?
    Oui, je veux dire la présente étude, ou le fait de mener une enquête parallèle à ce que vous faites.
    Je pense que la motion d'aujourd'hui est très différente. Elle n'équivaut pas à une enquête. Bien sûr, je ne serais pas heureux... le Comité est libre de faire ce qu'il veut, mais je ne serais pas heureux qu'il enquête sur un sujet identique à celui sur lequel j'enquête. Cependant, le Comité est libre de le faire.
    Merci.
    Je pose la question parce que, si l'étude du Comité et votre enquête sur la même affaire aboutissaient à des résultats, des décisions ou des recommandations différents, je me demande si, dans ce cas, vous auriez le sentiment qu'il vous faudrait défendre publiquement votre décision ou votre raisonnement.
    Je suis désolé de devoir vous interrompre, mais votre temps de parole est écoulé.
    Je dois maintenant céder la parole à Mme Gaudreau. Vous disposez de deux minutes et demie, madame.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    J'ai trois questions pour vous, monsieur Dion.
    Je voudrais que nous puissions préciser quelque chose. Tantôt, vous avez dit que le témoignage d'un témoin qui comparaît devant un comité n'est pas nécessairement fait sous serment, contrairement à un témoignage fait devant vous, qui est d'emblée fait sous serment.
    Ai-je bien compris?

  (1350)  

    C'est bien ce que j'ai dit.
    D'accord.
    En pratique, la rédaction d'un rapport est une tâche ardue, nous en convenons tous. Vous avez dit que nous recevrons les résultats de votre enquête l'an prochain.
    Considérant que nous sommes dans un contexte de pandémie, où tout va vite, considérant la nécessité de redonner la confiance à nos concitoyens et considérant aussi le devoir de reddition de compte en lien avec la pandémie, ne serait-il pas possible d'avoir le rapport plus tôt, compte tenu de tout cela?
    Quand je parlais de l'an prochain, j'utilisais un langage juridique. Cela pourrait être aussi tôt que janvier 2021. Cela ne veut pas dire dans un an, mais bien l'an prochain, donc au cours de l'année prochaine.
    Nous pouvons donc avoir de belles surprises tôt en début d'année. Est-ce exact?
    Mon but, c'est d'être juste, de faire du travail de qualité et de respecter la Loi dans la façon de faire le travail. Plus tôt nous arriverons au résultat, mieux cela sera.
    Ma dernière question concerne l'article 44 de la Loi, car je veux bien comprendre. On parle de possibilités de contravention au paragraphe 11 (1), où l'on dit notamment ce qui suit:
11 (1) Il est interdit à tout titulaire de charge publique et à tout membre de sa famille d'accepter un cadeau ou autre avantage, y compris celui provenant d'une fiducie [...]
    J'aimerais que vous m'expliquiez ce paragraphe et particulièrement ce l'on entend par « un avantage ».
    Le mot « avantage » est défini dans la Loi, il ne sera donc pas trop difficile pour moi de vous l'expliquer.
    En fait, je pensais qu'il était défini, mais il ne l'est pas. Toutefois, il y a une définition de l'expression « cadeau et autre avantage », laquelle peut renvoyer à une situation où une somme d'argent est prêtée et que son remboursement n'est pas obligatoire.
    Il s'agit aussi « de tout service ou de tout bien ou de l'usage d'un bien ou d'argent, s'ils sont fournis sans frais ou à un prix inférieur à leur valeur commerciale. » Autrement dit, si l'on vous loue un condo à Mont-Tremblant, par exemple, pour la somme de 19 $ la nuit, cela constitue un avantage par rapport au montant exigé normalement.
    J'espère que cela répond à votre question.
    Donc...

[Traduction]

     Monsieur Dion, madame Gaudreau, merci. Ces deux minutes et demie se sont écoulées à une vitesse fulgurante.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur Dion.
    D'accord.

[Traduction]

    Monsieur Angus, vous avez la parole pendant deux minutes et demie.
    Monsieur Angus, voulez-vous que je finisse de répondre à la question de savoir ce que nous pouvons faire pour empêcher les anciens titulaires de charges publiques...?
    Monsieur Angus, c'est à vous de décider de la façon dont vous souhaitez utiliser vos deux minutes et demie.
    Je vais utiliser mes deux minutes et demie pour m'exprimer.
    Je pense qu'il est très intéressant que mes collègues libéraux essaient de faire dire à M. Dion que nous ne devrions pas mener nos enquêtes parce que, bien sûr, ce sont leurs députés qui font l'objet d'une enquête. C'est une vieille norme.
     Comme vous avez dit que les témoignages vous intéressaient, je vous renvoie au témoignage du 22 juillet de M. Bill Morneau. Deux points fascinants sont ressortis de ce témoignage. Premièrement, je lui ai demandé s'il avait déjà lu la Loi sur les conflits d'intérêts, et il a semblé très étonné. Il a dit qu'on lui avait remis un tas de documents lorsqu'il a été élu pour la première fois. Je suis donc surpris qu'il n'y ait pas eu de suivi sur les conflits d'intérêts auprès de lui. C'est à ce moment-là qu'il a déclaré au public — et vous avez pris connaissance de ce fait pour la première fois — qu'il avait reçu 40 000 $ sous forme de frais de voyage.
    Vous avez innocenté M. Morneau. Je le comprends — en fait, je ne comprends pas cette décision —, mais c'est la décision que vous avez prise, et je l'accepte. Le problème, ce n'est pas tant le fait que cette somme constitue un cadeau, mais le fait qu'elle crée une relation avec les Kielburger.
    Le 10 avril 2020 — et je vous ai écrit à ce sujet le 17 novembre —, Craig Kielburger a écrit un message qu'il a envoyé directement à Bill Morneau, dans lequel il s'est enquis de sa famille et a adopté un ton très familier. Onze jours plus tard, on lui adjugeait un contrat de 12 millions de dollars. Je trouve cela extraordinaire.
    Ne pensez-vous pas que ce genre de relations, dans lesquelles des gens sont choyés et reçoivent des billets d'avion et des cadeaux... M. Morneau a peut-être oublié qu'il avait reçu 40 000 $, mais cela a créé une relation qui aurait pu influencer sa décision. Je pense qu'à la lumière de l'article 7, qui traite de l'obligation de ne pas accorder des traitements préférentiels, il s'agit d'une somme extraordinaire qui a été accordée en très peu de temps.
    En 2021, nous publierons un rapport intitulé le « Rapport Morneau II », dans lequel nous discuterons de tous les différents aspects de ce qui s'est passé entre l'organisme UNIS et M. Morneau. Cette question sera abordée dans le rapport lui-même, y compris la raison qui m'a amené à interrompre cette partie de l'enquête. Cette raison figurera également dans le rapport.

  (1355)  

    Je vous remercie de votre réponse.
    Je suppose que ma préoccupation est liée au fait que nous avons affaire à un groupe politique d’un genre très différent. Tous les ministres clés impliqués dans la décision ont été fêtés et invités à participer aux événements de l’organisme UNIS. Les Kielburger avaient noué des relations très étroites qui leur permettaient de demander des faveurs. Cela n’a jamais été considéré comme du lobbying. Je n’ai jamais observé une situation comme celle-là auparavant, une situation où les gens reçoivent en cadeau des invitations à participer à de grands rassemblements et où ils ont l’occasion de prendre la parole et de rencontrer toutes sortes de personnes célèbres...
    Pardon, monsieur Angus, mais vous avez largement dépassé votre temps de parole, et je dois passer au prochain intervenant.
    Merci.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Warkentin. Comme il s’agit de la deuxième série de questions, vous disposez de cinq minutes, monsieur Warkentin.
    Je sais que je vais manquer de temps.
    Monsieur Dion, nous vous sommes reconnaissants de votre participation et de votre témoignage. Vous avez un travail difficile à accomplir, et je le comprends. J’ai appris un peu à quel point ce travail doit être difficile.
    Lorsque nous avons commencé à entendre parler de l’organisme UNIS et à écouter les témoignages des différents acteurs, nous avons reçu quelques renseignements. Ensuite, ils ont été contredits par d’autres membres de l’organisme.
    Vous ne voulez peut-être pas faire des commentaires sur les personnes que vous écoutez ou sur la manière dont vous corroborez les témoignages dans cette affaire, mais lorsque vous obtenez des informations contradictoires auprès de différentes sources, quel processus entreprenez-vous pour aller au fond des choses et pour découvrir les faits réels? Il est évident que c’est le travail que notre comité réalise. Nous demandons des documents supplémentaires pour corroborer les témoignages. Alors, comment procédez-vous?
    Nous faisons la même chose, et parfois nous finissons par interviewer quelqu’un que nous ne pensions pas devoir interviewer lorsque quelque chose comme cela se produit. En fin de compte, s’il y a des versions contradictoires, il m’incombe de déterminer, selon la prépondérance des probabilités, qui dit la vérité et qui ne la dit pas.
    C’est ainsi que les choses se passent en pratique. Ce n’est pas toujours facile. C’est un travail ardu, mais c’est essentiellement ainsi que nous résolvons le problème. C’est en demandant des documents supplémentaires, comme vous l’avez mentionné, et en interrogeant d’autres personnes. Au bout du compte, je détermine qui je crois et qui je ne crois pas.
    En ce qui concerne les témoignages, il est évident que la version des événements d’une personne peut être assujettie au code et à la loi d’une façon qui diffère de la façon dont une autre personne interprète les événements. Je pense en particulier aux témoignages de la famille Trudeau, qui a déclaré avoir été payée pour prendre la parole à des événements, alors que l’organisation a déclaré qu’en fait, elle n’avait pas été payée pour prendre la parole, mais plutôt pour nouer des relations avec des sociétés que, dans de nombreux cas, le gouvernement réglemente ou avec lesquelles il entretient des liens.
    Dans ces cas-là, comment déterminez-vous s’ils ont enfreint ou non le code et la loi, alors que l’un des témoins soutient qu’il s’adressait simplement à une bande de jeunes et que l’autre témoin soutient qu’il était là pour servir les intérêts des sociétés?
    J’ai examiné l’ensemble des faits, et je suis parvenu à une conclusion, que je communique dans mon rapport au Président de la Chambre dans le cas du code et au premier ministre dans le cas de la loi. C’est ainsi que les choses fonctionnent.
    La façon dont j’interprète la loi est essentiellement inattaquable — elle est définitive — même s’il reste plusieurs zones d’ombre. Comme dans tout autre domaine lié au droit, les questions ne sont pas toujours tranchées nettement.
    Vous êtes l'arbitre final en ce qui concerne bon nombre de ces questions. Nous comprenons cela.
    Monsieur le président, avez-vous indiqué que mon temps de parole était écoulé?
    Non. Il vous reste moins de deux minutes maintenant.
    D'accord, je m'excuse. Je pensais que vous interveniez peut-être à ce moment-là.
    Compte tenu du tableau d'ensemble, des sommes d'argent que le gouvernement s'était engagé à verser à l'organisme UNIS et de la décision que l'organisme a prise par la suite non seulement de rompre ses relations lorsqu'elle a commencé à faire l'objet d'un examen minutieux, mais aussi de fermer ses bureaux au Canada, y a-t-il un risque que la cessation de leurs activités au Canada ait une incidence sur la poursuite de votre examen de ces événements?
    Vous voyez, il y a un risque, mais nous n'avons pas encore rencontré cette situation en tant que telle.
    Il y a un risque que, s'ils réduisent complètement les activités...

  (1400)  

    Ce sont de pures hypothèses, parce que nous n'avons pas fait face à cette situation, et nous n'avons pas... De toute façon, cette question n'est pas pertinente en ce moment.
    Je comprends cela. J'ai juste eu l'impression que lorsque des députés ont démissionné, cela a eu un effet sur vos enquêtes. Je crains donc que s'ils continuent à réduire leurs activités ici au Canada, cela puisse avoir également un effet sur votre étude. Je suppose que nous franchirons cette étape lorsque le moment sera venu.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup, chers collègues.
    Monsieur le commissaire, je vous remercie beaucoup d'avoir pris le temps de témoigner devant notre comité. Nous vous en sommes très reconnaissants. Nous avons maintenant besoin d'un peu de temps pour faire la transition vers notre prochaine rencontre, car, bien sûr, il s'agit d'une réunion hybride comme celle-ci. Cela prendra quelques minutes.
    Merci.
    Chers collègues, à moins que vous n'ayez besoin d'une pause pendant la période de transition, je souhaitais vous lire quelque chose. En raison d'une question qui a été posée par...
    Désolé, chers collègues, nous pouvons officiellement suspendre la séance.

  (1400)  


  (1405)  

    Bienvenue à la séance du Comité, madame Bélanger. Comme vous pouvez le constater, nous sommes l'un des comités les plus divertissants de la Colline du Parlement.
    Nous commencerons par entendre vos observations, puis nous passerons aux séries de questions. Je pense que vous connaissez la procédure, alors veuillez prendre la parole. Vous disposez de sept minutes pour faire votre déclaration préliminaire.
     Bonjour, monsieur le président. C'est la première fois que nous avons l'occasion de nous rencontrer. Bonjour, chers membres du Comité.
     Je suis très heureuse de comparaître devant vous aujourd'hui afin de discuter de l'administration et de l'application de la Loi sur le lobbying au cours des derniers mois.
    En tant que commissaire au lobbying, je suis responsable devant le Parlement. Mon mandat comprend les trois secteurs d’activités suivants.

[Français]

    Premièrement, je dois établir et tenir à jour le Registre des lobbyistes. En tant que principal outil permettant d'assurer la transparence des activités de lobbying, le Registre fournit aux Canadiennes et aux Canadiens de l'information sur les personnes qui communiquent avec les décideurs publics et sur les sujets consignés.
    Chaque jour, environ 6 200 lobbyistes actifs s'inscrivent. Depuis février 2020, plus de 6 000 enregistrements ont été publiés, et 1 757 d'entre eux étaient de nouveaux enregistrements. Les lobbyistes ont également fourni des renseignements au sujet de plus de 21 000 communications organisées et orales.
    Par rapport à la même période de 2018-2019, il ne fait aucun doute qu'il y a plus de communications en 2020. La santé était le principal sujet enregistré et discuté en février, en mars et en avril 2020, et le développement économique est devenu le sujet principal en mai, et il l'est resté depuis.
    Pour permettre aux Canadiens de repérer et de suivre plus facilement les activités de lobbying directement liées à la pandémie, le Commissariat a créé une fonction de recherche dans les enregistrements, qui est facile d'accès. Actuellement, 640 enregistrements correspondent à ce critère.
    Deuxièmement, mon mandat inclut la responsabilité de faire connaître aux lobbyistes, aux titulaires de charge publique et aux autres parties prenantes la Loi sur le lobbying et le Code de déontologie des lobbyistes.
    Depuis le début de la pandémie, afin d'aider ceux et celles pour qui le processus d'enregistrement est nouveau, notre équipe des services à la clientèle s'est employée à fournir de l'aide aux personnes souhaitant s'inscrire. Comme le gouvernement a annoncé des programmes de financement liés à la COVID-19, nous avons publié des lignes directrices pour assurer le respect continu des règles par les lobbyistes.
    Nous avons également fait des présentations à des lobbyistes et à des titulaires de charge publique sur le régime du lobbying. Cela veut dire que plus de 300 personnes en savent maintenant un peu plus sur les exigences de la Loi et du Code.
    Le site Web du Commissariat demeure l'outil principal pour rejoindre les lobbyistes et le public. Un nouveau site Web a été lancé en avril 2020.

[Traduction]

    Troisièmement, j’applique la loi et le code.
    Les allégations de non-conformité sont gérées en deux étapes. Tout d’abord, elles font l’objet d’une évaluation préliminaire afin d’évaluer la nature de l’infraction présumée, d’obtenir des renseignements préliminaires et de déterminer si l’objet relève de mon mandat. À la suite de cette évaluation, et lorsque cela est nécessaire pour assurer la conformité à la loi ou au code, une enquête est ouverte.
    Lorsque je termine une enquête en vertu du Code de déontologie, je dois déposer un rapport au Parlement. Lorsque j’ai des motifs raisonnables de croire qu’une infraction a été commise, je dois renvoyer le dossier à un agent de la paix, c'est-à-dire à la GRC dans la plupart des cas.
    Les infractions à la Loi incluent l’omission de s’enregistrer ou de compléter un rapport de communication mensuel, l’omission de fournir des renseignements exacts et le fait d’exercer des activités de lobbying pendant la période d’interdiction de cinq ans.
    Depuis avril 2020, j’ai ouvert 16 évaluations préliminaires, et j’ai actuellement cinq enquêtes en cours. Depuis le mois d’avril également, j’ai transmis trois dossiers d’enquête à la GRC. En date d'aujourd'hui, la GRC est saisie de 11 dossiers.
    Une fois qu'un dossier est ainsi transmis, je dois suspendre mon enquête jusqu’à ce que l’affaire soit traitée. Ce n’est qu’une fois que ce travail aura été fait que je pourrai terminer l’enquête et présenter un rapport au Parlement.
    La Loi stipule clairement que je dois mener mes enquêtes en privé, ce qui veut dire que je ne peux pas formuler des observations à leur égard. Ces affaires pourraient devenir des enquêtes criminelles, et je ne peux pas les compromettre.
    Bien que je ne sois pas en mesure de formuler des observations au sujet des cas, je voudrais souligner certains aspects de la loi relatifs à quelques-unes des questions que le Comité étudie.

  (1410)  

    En vertu de la Loi sur le lobbying, les communications relatives à l’octroi d’un contrat représentent une activité qui nécessite un enregistrement, mais seulement pour les lobbyistes-conseils, pas pour les lobbyistes salariés.
    De plus, pour les lobbyistes salariés, la Loi exige l’enregistrement du plus haut cadre payé de l’organisation ou de la personne morale lorsque l’ensemble des activités de lobbying de celle-ci représente « une partie importante de celles d’un seul employé ». Le seuil a été établi à 20 % de l’ensemble des tâches. Lorsqu’il est atteint, le haut cadre dispose de deux mois pour déclarer ces activités.
    En ce qui a trait à l’interdiction quinquennale d’exercer des activités de lobbying pour les anciens titulaires d’une charge publique désignée, la loi leur interdit d’agir à titre de lobbyistes-conseils ou de lobbyistes salariés pour une organisation. Toutefois, si un ancien titulaire d’une charge publique désignée est embauché par une personne morale, il a le droit d’exercer des activités de lobbying, à condition que les communications ne représentent pas une partie importante de son travail.
    Comme pour toute autre allégation de contravention, ces éléments sont examinés dans le cadre d’une évaluation ou d’une enquête préliminaire.

[Français]

    Comme je l'ai déjà mentionné au Comité dans le passé, le seuil de la partie importante des fonctions devrait être supprimé de la Loi sur le lobbying. D'ailleurs, ce sera l'une de mes recommandations, si la Loi sur le lobbying est révisée.
    Je recommanderais également l'élimination des divergences liées aux lobbyistes salariés, qu'ils soient employés par une entreprise ou par une organisation. Cela renforcerait l'équité et la clarté, en garantissant que les entreprises et les organisations sont soumises aux mêmes exigences.
    Enfin, en ce qui concerne les répercussions de la pandémie sur les résultats réalisés par le Commissariat, j'ai été impressionnée par la capacité des membres de l'équipe à travailler ensemble et à continuer de faire preuve d'excellence en cette période de stress et d'insécurité accrus.
    Les employés du Commissariat se sont rapidement adaptés à une nouvelle façon de travailler, et ils ont trouvé des moyens de se soutenir virtuellement les uns les autres. Ils ont aussi continué à assurer la réalisation de tous les aspects du mandat. Je leur en suis très reconnaissante.
    Je vous remercie, monsieur le président et membres du Comité. Je suis prête à répondre à vos questions.
    Je vous remercie beaucoup, madame Bélanger.

[Traduction]

    La parole est maintenant à M. Barrett, qui dispose de six minutes.
    Madame la commissaire, nous vous remercions de vous joindre à nous aujourd’hui. C’est un plaisir de vous voir, même si c’est de façon virtuelle.
    Pouvez-vous dire au Comité combien de temps il faut à votre bureau pour compiler les données et publier un rapport sur un cas de lobbying illégal présumé, une fois l’enquête lancée?
    C’est une bonne question. Parlez-vous d’un rapport au Parlement ou à la GRC?
    Je parle d’un rapport au Parlement.
    Je n’en ai pas encore fait.
    D’accord.
    Mes rapports au Parlement visaient le code de conduite.
    En ce qui a trait aux infractions à la loi, j’ai transmis 10 rapports à la GRC. Je ne peux donc pas faire rapport au Parlement avant que les personnes aient été accusées ou que la GRC ne m’avise qu’elle ne prévoit pas porter d’accusations.
    Oui. Cela varie d’une fois à l’autre lorsque vous détectez ou que vous soupçonnez un acte criminel et que vous renvoyez le dossier devant la GRC. Cela peut arriver à tout moment au cours de votre enquête.
    Si nous considérons que je suis en poste depuis un peu moins de trois ans et que j’ai remis 10 enquêtes à la GRC, je dirais qu’en moyenne, certaines ont pris trois mois et d’autres ont pris un peu moins d’un an avant d’être transmises.

  (1415)  

    D’accord.
    À votre avis, est-ce qu’on devrait élargir les restrictions d’après-mandat afin qu’elles s’appliquent aux anciens titulaires d’une charge publique comme les députés, qui ne sont actuellement pas visés?
    Je ne suis pas certaine de bien comprendre votre question. Tous les anciens titulaires d’une charge publique désignée sont assujettis à une interdiction de cinq ans, à moins qu’ils ne soient embauchés par une personne morale et que leurs activités de lobbying représentent moins de 20 % de leur travail. Une exemption est prévue dans la Loi à cet égard, et je n’arrive pas à me l’expliquer. La règle devrait être la même, qu’on travaille pour une organisation ou pour une personne morale. À l’heure actuelle, tout ancien titulaire d’une charge publique désignée est assujetti à une interdiction de cinq ans.
    Croyez-vous que tous les députés de la Chambre devraient être visés par cette interdiction?
    Les députés de la Chambre le sont.
    D'accord.
    Dans la Loi sur le lobbying, les organisations qui ont des lobbyistes salariés disposent de deux mois pour s'enregistrer à partir du moment où l'ensemble des activités de tous les employés sur une période de 30 jours correspond à au moins 20 % du travail d'un employé à temps plein. Pourriez-vous nous expliquer ce que cela signifie? Vous en avez parlé dans votre déclaration préliminaire.
    Cela veut dire que si l'on calcule le temps de tous les employés passé aux communications, on obtient à peu près l'équivalent d'une journée de travail par semaine pour un employé, ce qui représente environ 32 heures par mois.
    Ce calcul n'est pas facile à faire. C'est assez lourd, parce qu'il faut tenir compte des communications et du temps passé à celles-ci. Il faut aussi tenir compte du temps de préparation, des présentations, de la durée des communications et des réunions. Nous additionnons tout cela pour déterminer si l'organisation a consacré 30 heures aux communications en un mois.
    Comme vous le savez et comme vous l'avez dit, la Loi devait faire l'objet d'un examen en 2017. Trois ans plus tard, cet examen n'a toujours pas été fait.
    Il ne reste qu'environ deux minutes à mon intervention. Pourriez-vous nous donner vos recommandations relatives à la Loi? Parce que dans un contexte de gouvernement minoritaire, nous ne savons pas quand les prochaines élections seront déclenchées; nous aurons peut-être d'autres élections avant que cet examen — qui devait être fait il y a trois ans — ne soit réalisé.
    Si vous avez pris le temps de lire la Loi sur le lobbying, vous savez qu'elle est très complexe et qu'elle compte plusieurs petits problèmes qui devraient être corrigés. Je ne peux pas tout corriger dans le cadre d'un examen. J'ai donc adopté une approche fondée sur les valeurs, ce qui veut dire que les seules recommandations que je vais faire seront celles qui permettront d'accroître la transparence, l'efficacité, l'équité et la clarté. Sinon, je vais laisser tomber.
    J'ai préparé environ 13 recommandations relatives à la Loi. Je les révise constamment et je les adapte en fonction de mon expérience et du temps qui passe. Il faut certainement éliminer une part importante des fonctions et élargir les possibilités de sanctions, parce qu'à l'heure actuelle, nous avons uniquement le choix entre un rapport au Parlement et un rapport à la GRC. Il faut aussi harmoniser les délais d'enregistrement, puisque pour le moment, les lobbyistes-conseils disposent de 10 jours pour le faire, tandis que les lobbyistes salariés disposent de 60 jours. De plus, il faut éliminer les incohérences entre ce que doivent publier les personnes morales et les organisations sur le site Web.
    Qu'y a-t-il d'autre? J'ai...
    Permettez-moi de vous interrompre. Je crois qu'il ne me reste que 30 secondes.
    Bien sûr.
    Je vous remercie pour vos réponses. J'ai étudié vos recommandations. Je vous remercie d'en avoir partagé quelques-unes avec nous aujourd'hui.
    J'ai une dernière question, et bien que j'en connaisse la réponse, j'aimerais que vous la partagiez avec les gens qui nous écoutent. Est-il vrai que vous ne pouvez pas nous dire quelles enquêtes sont en cours dans votre bureau?
    C'est vrai. Je ne peux vous le confirmer. Je fais de mon mieux pour être aussi transparente que possible. Je vous ai donné des chiffres qui, je l'espère, vous convaincront que nous maîtrisons la situation, mais non, je ne peux vous dire quelles sont les enquêtes en cours.
    D'accord. Merci beaucoup, madame.

  (1420)  

    Merci, madame Bélanger. Bien qu'elles soient du domaine public, si vous transmettez ces recommandations à la greffière, nous pourrions les intégrer au rapport qui suivra notre étude.
    Nous allons maintenant entendre Mme Shanahan. Vous disposez de six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci, madame Bélanger, de témoigner devant nous aujourd'hui.
    J'aimerais préciser une chose pour le Comité et les gens qui nous écoutent. Quelle est la différence entre un titulaire d'une charge publique désignée et un député de la Chambre? Je ne suis pas certaine de l'avoir entendu dans vos derniers échanges.
    La Loi sur le lobbying désigne deux groupes de personnes: les titulaires d'une charge publique et les titulaires d'une charge publique désignée. Les titulaires d'une charge publique, ce sont pratiquement tous les fonctionnaires, les députés du Parlement, les sénateurs et leur personnel, et les personnes nommées par le gouverneur en conseil. Les lobbyistes qui communiquent avec eux doivent être enregistrés.
    Les titulaires d'une charge publique désignée sont les ministres et leur personnel, les sénateurs et les députés du Parlement. Lorsque les lobbyistes communiquent avec eux, ils ont le fardeau supplémentaire de présenter un rapport de communications mensuel. Ils doivent consigner leurs discussions dans le système. Il est interdit aux titulaires d'une charge publique désignée de faire des activités de lobbying lorsqu'ils quittent leur poste.
    Ai-je bien compris qu'il est de la responsabilité des lobbyistes de s'assurer du respect de ces règles?
    Oui, tout à fait. Lorsqu'ils communiquent avec vous, ils doivent consigner ces communications.
    Toutefois, j'ajouterais qu'en vertu de la Loi, nous devons vérifier le contenu de ces rapports de communications mensuels. Ainsi, vous pouvez recevoir un courriel de ma part vous demandant de vérifier quelque chose, et vous avez l'obligation de me répondre et de confirmer si l'information consignée au registre est exacte. Nous procédons à un échantillonnage de 5 % chaque mois; on a donc peut-être déjà communiqué avec vous ou pas. Il se peut que vous receviez une telle demande à un certain moment. Il ne faut pas qu'elle se retrouve dans vos courriers indésirables.
    J'espère que non. Merci.
    À titre de précision, encore une fois, est-ce que votre mandat — et vous avez parlé de vos trois principales tâches — comprend la supervision de toutes les transactions d'achat et de vente du gouvernement du Canada?
    Non. L'approvisionnement ne fait pas partie de mon mandat. Toutefois, les communications au sujet de l'octroi des contrats sont des activités enregistrables pour les lobbyistes-conseils. Ce n'est pas le cas pour les lobbyistes salariés. Je ne réglemente pas l'approvisionnement gouvernemental.
    Pour le site Web Achatsetventes, par exemple...
    Non.
    Pour les entreprises qui s'y inscrivent... Vous ne supervisez pas cela?
    Non.
    Quelle note accorderiez-vous au régime de divulgation des activités de lobbying du Canada, madame Bélanger? Est-il comparable ou supérieur à celui d'autres pays?
    Je crois qu'il est supérieur, parce que nous sommes un modèle à l'échelle internationale. Les autres pays suivent notre exemple; d'excellentes personnes tiennent le registre, qui reçoit de très bons commentaires. Il fonctionne bien.
    Cela étant dit, il faut y apporter des améliorations, et je recommanderais fortement au Comité d'étudier la mesure législative adoptée par la Colombie-Britannique en mai. Cette loi a apporté certaines modifications et a corrigé certains des éléments de nos règles que je juge problématiques.
    Le registre fonctionne bien, mais il faudrait régler certains problèmes.
    Merci.
    Madame Bélanger, vous nous avez parlé du nombre d'activités que vous aviez à gérer au cours d'une année moyenne avant la pandémie. Pourriez-vous comparer ce nombre au nombre actuel d'activités pendant la pandémie, et peut-être nous parler un peu de la qualité? Vous avez clairement dit que ce nombre avait grandement augmenté.
    Il ne serait pas très juste de comparer les chiffres de cette année à ceux de 2019, parce que c'était une année électorale. Les chiffres auraient été à la baisse de toute façon. En 2018, le nombre total de communications mensuelles était de 27 000. Nous en sommes déjà à 21 000 cette année, et il reste encore quatre mois.
    Pendant l'été, on compte environ 1 500 communications par mois. L'été dernier, nous avons reçu près de 2 000 communications par mois. Je pourrais vous transmettre les statistiques mensuelles si vous le voulez, mais si l'on compare les deux étés et les totaux, on constate que les derniers mois ont été très occupés.

  (1425)  

    J'aimerais que vous nous en parliez, parce que la période était particulière, évidemment. Je me souviens de l'appel à la mobilisation pour la COVID-19. Pouvez-vous nous expliquer ce qu'ont signifié pour votre bureau tous les programmes d'urgence qui ont été lancés et aussi l'extraordinaire réponse de l'industrie et du commerce à cet appel du gouvernement?
    Mon équipe du service à la clientèle est composée de trois personnes seulement. En fait, mon équipe compte 28 employés en tout. C'est très peu. Ces trois employés ont été très occupés à aider les 1 700 nouveaux déclarants qui n'avaient aucune idée de la façon de faire. Nous étions là pour les aider à s'enregistrer.
    Nous avons aussi préparé rapidement des lignes directrices pour aider les personnes à déterminer si elles devaient s'enregistrer. Parce que si une personne présente une demande de subvention, il ne s'agit pas de lobbying; ce n'est qu'une simple demande. Il fallait clarifier cela...
    Je suis désolé de vous interrompre, madame la commissaire. Je vous ai donné plus de temps pour terminer votre réponse, qui était importante. Mais nous avons largement dépassé le temps prévu pour cette intervention.
    Nous passons maintenant à Mme Gaudreau.

[Français]

     Je vous remercie, monsieur le président.
    Bonjour, madame Bélanger.
    Bonjour.
    Nous sommes heureux de vous revoir. Vous étiez venue nous voir à la première session. C'est toujours plus facile en personne qu'en mode virtuel, non?
    Bien sûr.
    J'ai quelques questions pour vous.
    Dans le cadre de votre travail, est-ce qu'il y a de la collaboration avec les commissaires des autres commissariats? Je parle d'entraide sur le plan de la vigie afin que vous puissiez répondre à de possibles alertes. Comment cela se passe-t-il?
    Chaque commissaire a un mandat distinct et a ses propres obligations pour ce qui est de garder les renseignements confidentiels.
    Toutefois, depuis le début de la pandémie, je vous dirai que nous, les agents du Parlement, nous nous sommes rencontrés deux fois afin de prendre le pouls des employés et de savoir comment tout le monde se sentait. Nous avons aussi cherché des moyens de nous entraider, et nous avons échangé des idées.
    Par exemple, à un moment donné, j'ai produit un guide en prévision d'un possible retour au travail, que j'ai transmis à mes collègues. Si j'ai besoin de faire de la formation en français, je communique avec eux, parce que je n'ai pas assez de monde dans mon petit groupe pour la faire. Nous nous entraidons donc de cette façon.
    Excusez-moi de vous interrompre, car je voudrais revenir au concept de vigie. Vous ne parlez pas d'une vigie comme ce à quoi M. Dion faisait allusion. Il a mentionné il surveillait de façon systématique ce qui se passait au Comité.
    Je peux vous donner l'exemple de ce que nous avons vécu cet été, lorsque nous avons appris que Mme Sofia Marquez n'était pas inscrite au Registre des lobbyistes. Est-ce le genre d'information que vous obtenez systématiquement? Pouvez-vous intervenir sur-le-champ?
    Oui, tout à fait. Je m'excuse, mais je n'avais pas bien compris votre question.
    Vous avez vu mes statistiques. J'ai commencé 16 évaluations préliminaires cet été. Je suis extrêmement à l'affût de ce qui se passe dans tous les comités du Parlement. J'écoute les séances, moi aussi, et je trouve cela très intéressant. Je regarde aussi ce qui se passe dans les médias.
    Je suis donc très à l'affût de ce qui se passe au Parlement, et, très souvent, c'est ce qui m'incite à aller voir en profondeur ce qui se passe ailleurs.
    J'ai une question concernant spécifiquement Palantir Technologies. On sait que l'ex-ambassadeur du Canada aux États-Unis, M. MacNaughton, a également participé aux négociations liées à l'Accord Canada—États-Unis—Mexique, ou ACEUM. Il a été réprimandé pour des gestes de lobbyisme inappropriés.
    Je veux en venir au fait que M. MacNaughton a facilement eu accès à la vice-première ministre ainsi qu'au ministre Bains. Comment interprétez-vous cette situation? Êtes-vous surprise de la facilité avec laquelle M. MacNaughton a pu avoir de telles rencontres?

  (1430)  

    Je ne pense pas être la bonne personne pour répondre à cette question.
    Je m'occupe de savoir si un ancien titulaire de charge publique désigné, à qui il est interdit de faire du lobbying, a fait du lobbying.
    Je ne peux donc pas parler plus longuement sur ce sujet. Je suis désolée.
    D'accord.
    Je vais donc vous poser une autre question.
    L'organisme UNIS avait communiqué avec 19 entités fédérales au cours d'une période de 18 mois. Vous le savez, nous le savons tous. Mais c'est seulement en août dernier, tout juste avant que trois de ses représentants comparaissent devant le Comité, que cet organisme s'est inscrit au Registre. Depuis 2015, l'organisme UNIS a vraiment reçu des contributions de plusieurs millions de dollars.
    Comment expliquez-vous un tel manquement quant au Registre?
    Encore une fois, je ne peux pas parler directement à propos de ce dossier.
    Toutefois, voici ce que je suis prête à dire. Il semblerait qu'il y ait une mauvaise compréhension des obligations prescrites dans la Loi sur le lobbying. À quelques reprises, j'ai entendu les représentants de l'organisme UNIS dire que c'est le gouvernement qui avait communiqué avec eux, et non l'inverse.
    Qui communique avec qui, ce n'est pas vraiment pertinent pour savoir s'il y a du lobbying. En général, je pense qu'il y a peut-être une mauvaise compréhension de la Loi.
    J'ai aussi vu dans les médias que le fait qu'il y ait eu une inscription dans le Registre donnerait lieu à un possible pardon. Quelqu'un qui décide de s'inscrire doit miser sur la transparence, ce que j'encourage. Nous avons pu voir quelles avaient été les communications, mais cela ne veut pas dire que tout examen que je suis en train de faire quant à ce dossier se termine par suite de l'inscription.
    Nous vous en sommes reconnaissants. Je tiens aussi à saluer l'énorme travail que vous faites.
    Il y a beaucoup de zones grises, et nous nous rendons compte qu'il y a de l'information à transmettre aux gens, notamment le fait qu'il peut y avoir beaucoup de répercussions. Comme je le disais à M. Dion tantôt, nous gérons des fonds publics. Je pense que vos 13 recommandations devront être une priorité. Nous perdons parfois du temps dans des comités, vous le savez puisque vous les écoutez, et c'est pourquoi il faudra donner suite à vos recommandations afin de nous aider à prévenir ce que nous sommes en train de faire aujourd'hui.

[Traduction]

    Vous n'avez plus vraiment de temps, madame Gaudreau.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie beaucoup, madame Bélanger.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Nous allons passer à M. Angus, qui dispose de six minutes.
    Nous vous remercions de votre présence, madame Bélanger.
    En septembre, vous avez dit que vous aviez entrepris une enquête préliminaire sur l'affaire UNIS. Est-ce que cette enquête est terminée, ou est-elle toujours en cours?
    Je ne peux répondre à cette question, malheureusement.
    Je comprends. Je me demandais seulement si l'enquête avait été mise de côté; si vous aviez déterminé qu'il n'y avait aucun problème.
    J'aimerais préciser une chose: l'enquête ne serait jamais mise de côté sans que je fasse rapport au Parlement à un moment donné. Je veux que le Comité sache que je sais exactement ce qui intéresse ses membres et lorsque je pourrai faire rapport au Parlement sur ces questions, je le ferai.
    Je vous remercie pour cette précision.
    Pour bon nombre d'entre nous qui avons suivi l'enquête, c'était toute une surprise. L'ampleur du groupe UNIS, les multiples corporations et la complexité de l'organisation m'ont certainement déconcerté. Je croyais que l'organisme ne faisait qu'aider les enfants, mais il est très organisé.
    Les frères Kielburger interprètent la Loi sur le lobbying de façon particulière. Selon eux, comme un bon pourcentage de leurs revenus ne provenait pas de contrats gouvernementaux, ils n'avaient pas besoin de s'enregistrer. Est-ce que la Loi sur le lobbying prévoit un seuil financier en deçà duquel ils ne sont pas tenus de s'enregistrer?
    Non, il n'existe pas de seuil à cet égard. La Loi est libellée de telle manière qu'il faut que le lobbyiste soit un employé ou un consultant rémunéré qui doit communiquer au nom de son employeur. Il n'y a donc aucun seuil au chapitre du salaire. Si la personne travaille manifestement comme bénévole pour une organisation, elle n'a pas à s'inscrire.

  (1435)  

    C'était la deuxième raison. Craig Kielburger communique avec Bill Morneau le 10 avril pour lui dire: « Bonjour Bill. J'espère que vous, Nancy, Henry, Clare, Edward et Grace profitez bien d'un repos bien mérité », puis entreprend de négocier un contrat de 12 millions de dollars. Plusieurs rencontres ont eu lieu, et Craig Kielburger est un personnage central. Il affirme qu'il n'a pas à s'inscrire parce qu'il est un simple bénévole.
    Il est le fondateur. Il peut congédier son conseil d'administration. UNIS a une structure organisationnelle très complexe. Nous ignorons comment les dirigeants sont rémunérés. Serait-il raisonnable de présumer qu'il était un simple bénévole comme tous les autres — se contentant d'aider — plutôt qu'un acteur jouant un rôle clé dans la passation de ces contrats? Ses activités pourraient-elles être considérées comme du lobbying?
    Si une personne est rémunérée par quelqu'un et que le lobbying peut profiter à l'organisation qui la paie, je considérerais que cette personne doit s'inscrire.
    Je suis parfaitement au courant des faits que vous soulevez et je préférerais en rester là pour l'instant.
    Je comprends parfaitement, car, ici encore, nous tentons de comprendre, dans le dédale des structures organisationnelles, qui rémunère les frères Kielburger. Des sommes substantielles entrent en jeu.
    Sofia Marquez porte le titre de directrice des relations avec le gouvernement. Il me semble qu'elle devrait être considérée comme une lobbyiste comme tout autre. L'organisme a affirmé qu'elle n'a pas fait suffisamment de travail à cet égard pour être considérée comme lobbyiste, mais en janvier 2020, il a embauché un gestionnaire des relations avec le gouvernement.
    Si une organisation employait deux personnes pour s'occuper des relations avec le gouvernement, considéreriez-vous qu'elle pourrait hypothétiquement faire du lobbying?
    Si une organisation emploie quelqu'un pour avoir des relations avec le gouvernement, nous devrions examiner le nombre de communications que cette personne a eues, le nombre d'arrangements verbaux et de réunions qui ont eu lieu et le nombre d'exposés qu'elle a présentés pour calculer si elle atteint le seuil ou non. Un employé à temps plein qui communique quotidiennement avec le gouvernement pourrait fort bien atteindre le seuil, mais il faut procéder au cas par cas.
    Je suis ravi que vous posiez ces questions, car après que le Comité les eut posées, ils se sont inscrits, et je compte 44 réunions. Ils ont rencontré tout le monde: les sous-ministres adjoints, les sous-ministres adjoints principaux, Mme Chagger ou Mme Ng, le Bureau du Conseil privé et même le Bureau du premier ministre. Ils ont étendu leurs tentacules pour négocier un contrat de 912 millions de dollars.
    Ils affirment s'être inscrits après les faits parce qu'ils agissaient pour un organisme caritatif bénéfique. Comme ils se sont inscrits après les faits et après que le Parlement a braqué les projecteurs sur cette affaire et leur a demandé pourquoi ils ont tenu toutes ces réunions sans s'inscrire, sont-ils absous? Si une organisation s'inscrit après avoir été prise en défaut, peut-on hypothétiquement déclarer qu'elle est absoute?
    Elle ne l'est pas.
    D'accord.
    Mon temps est presque écoulé.
    Je sais que vous ne pouvez probablement pas me répondre, mais je remarque que Démocratie en surveillance a demandé que le dossier du lobbying illégal d'UNIS soit renvoyé à la GRC.
    Pensez-vous que si vous disposiez de preuves suffisantes, ce dossier pourrait être renvoyé à la GRC? Vous avez indiqué l'avoir fait pour un certain nombre d'affaires.
    Jusqu'à maintenant cette année, je lui en ai renvoyé trois.
    Si les preuves me portent à croire qu'une infraction a été commise, je lui renverrai certainement l'affaire.
    Je l'ai fait à 10 reprises depuis mon entrée en fonction. Le seuil n'est pas très élevé; ainsi, quand j'ai des motifs de croire qu'une infraction a été commise une fois que j'ai commencé à examiner les faits, je renverrai l'affaire à une autre instance.
    Je vous remercie de votre dévouement.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur Angus et madame Bélanger.
    Nous allons maintenant entamer notre deuxième tour, avec des interventions de cinq minutes.

[Français]

     Monsieur Gourde, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, madame Bélanger, d'être parmi nous. C'est toujours un plaisir de vous voir et de vous entendre.
    Je suis très heureux de savoir que le travail que nous faisons au Comité est suivi de près, parce que nous avions déjà mis en doute la pertinence de notre travail. Autrement dit, le fait d'entendre que notre travail peut apporter des éclaircissements et qu'il peut vous aider, notamment, nous est bien pratique pour la suite des choses.
    Vous avez fait une déclaration que je trouve bizarre. Je sais que vous êtes tenue, plus ou moins, de ne pas dévoiler les choses. Or, rares sont les organismes et les personnes qui entrent en contact avec les organisations du fédéral et qui ne sont pas obligés de s'inscrire au Registre des lobbyistes, peu importent les raisons. Par exemple, des organismes peuvent vouloir obtenir de l'information, faire la promotion de certains produits et services qu'ils offrent, ou encore demander à être dirigés vers les services appropriés du gouvernement.
    Le fait qu'une organisation ne se sente pas obligée de s'inscrire au Registre tout simplement parce qu'elle dit ne pas avoir sollicité le gouvernement, mais avoir été sollicitée par lui, démontre à quel point une organisation peut être proche des hautes instances du gouvernement. Cela m'inquiète beaucoup. C'est la première fois que j'entends parler d'une organisation qui n'a pas besoin de s'inscrire au Registre ou qui ne veut pas s'y inscrire soi-disant parce qu'elle est sollicitée directement par le gouvernement et qu'elle ne sollicite rien. Cette proximité vous inquiète-t-elle?

  (1440)  

    C'est certain que cela m'inquiète quand les gens ont une mauvaise compréhension des obligations prescrites dans la Loi. Heureusement, le nombre de personnes inscrites au Registre me prouve que la plupart des gens des organismes et des sociétés comprennent la Loi.
    J'entends souvent les organismes dire qu'elles sont certaines de ne pas respecter le seuil du critère relatif à la partie importante du travail, mais qu'elles s'inscrivent quand même au Registre par souci de transparence.
    Oui, cela m'inquiète quand la Loi n'est pas bien comprise. Je continue donc de travailler avec mon équipe pour mieux informer les gens.
    Certains fonctionnaires attribuent de petits contrats de moins de 25 000 $. Ils peuvent accorder ces contrats de façon directe sans passer par un appel d'offres, parce que ce ne sont pas nécessairement des contrats coûteux et que c'est parfois plus rapide de fonctionner de cette façon. Au fil du temps, on s'est aperçu que cette façon de faire était équitable.
    Au-delà d'un certain seuil, on ne peut pas donner de contrats de façon directe. Le seuil est-il toujours de 25 000 $, ou avez-vous d'autres exemples à nous donner?
    L'attribution de contrats n'est pas du tout de mon ressort. Un consultant qui a des communications avec le gouvernement concernant l'attribution de contrats a l'obligation de s'inscrire au Registre des lobbyistes. Toutefois, les organismes et les sociétés qui ont des communications concernant l'attribution de contrats ne font pas du lobbying. Ce n'est pas du lobbying, parce que je présume qu'il y a des règles en place quant à la passation de marchés, qui instaurent une certaine équité et qui exigent aussi une certaine transparence. Les communications liées à l'attribution de contrats ne constituent pas du lobbying pour les organismes et les sociétés.
    Quand le gouvernement met en place un programme ou qu'il s'agit d'un contrat d'une centaine de millions de dollars, par exemple, il y a un devis. Les soumissionnaires ou les fournisseurs doivent y mentionner certains détails. Il est vraiment important de nous assurer que le fournisseur est capable de remplir le contrat quand il s'agit de gros montants.
    Cependant, il est quand même rare de voir un fournisseur étaler ses spécialités et ses points forts dans un contrat pour que, à la fin, il n'y manque plus que le nom de l’entrepreneur, ce qui indique qu'un seul entrepreneur peut l'obtenir.
    Trouvez-vous cela étrange?
    Il y a la passation des marchés, mais il y a aussi les ententes de contribution. Ces dernières sont du lobbying. Je ne suis pas certaine si l'on parle de la même chose.
     S'il s'agit de la simple passation de marché, je vous recommanderais d'avoir des discussions avec l'ombudsman de l'approvisionnement, car c'est lui qui veille à assurer l'intégrité des règles à ce sujet.
    J'ai une dernière question. Dans votre présentation, on a vu que le Registre était très populaire et qu'il y a eu une grande augmentation du nombre de personnes qui se sont inscrites.
    Quels sont les quatre ou cinq ministères les plus populaires quant aux sujets qui sont consignés actuellement?
    La Chambre des communes n’est pas un ministère, mais elle est en première place parmi toutes les institutions. Je pense que Innovation, Sciences et Développement économique Canada arrive en deuxième place. Ensuite, il y a le ministère des Finances et Santé Canada.
    Je vous remercie beaucoup.

  (1445)  

    Je vous remercie, madame Bélanger et monsieur Gourde.

[Traduction]

     Madame Lattanzio, vous avez la parole pour cinq minutes.
     Je vous remercie, monsieur le président. Madame Bélanger, je vous remercie d’être parmi nous aujourd’hui. Étant nouvelle au sein du Comité, je dois admettre que cette séance est fascinante et fort instructive, c’est le moins qu’on puisse dire.
    Diriez-vous que les lobbyistes tentent souvent d’éluder leurs obligations d’inscription et de déclaration au Canada?
    Non. Je rencontre de nombreux lobbyistes, et ce sont des spécialistes des relations avec le gouvernement. Ils soignent leur réputation, et personne ne veut faire la une pour une potentielle infraction criminelle. Je ne pense donc pas que le problème soit fréquent.
     J’ai écouté les questions de mes collègues et vos réponses. Comme c’est le lobbyiste qui a l’obligation de s’inscrire, qui fait rapport des interactions avec quelqu’un comme moi, puisque je suis une titulaire de charge publique désignée? À qui incombe-t-il de consigner les interactions que nous avons eues et d’en faire rapport?
    Les lobbyistes sont tenus d’accéder au Registre et d’y indiquer qu’ils vous ont rencontrée en précisant le sujet de la rencontre. Ils inscrivent la date, votre nom et l’objet de la conversation.
    J’effectue des vérifications par échantillonnage; vous pourriez donc recevoir de ma part un courriel vous demandant de confirmer l’information. Chaque fois que je rencontre un titulaire de charge publique désigné, je lui recommande d’indiquer très clairement dans son calendrier ou son agenda qui il a rencontré et à quel sujet afin de pouvoir confirmer l’information, l’objectif étant de tenir les renseignements à jour sur les personnes qu’il rencontre et à quel sujet.
    De toute évidence, c’est le lobbyiste qui a la responsabilité de s’inscrire et d’entrer l’information.
    Oui, même si la Loi stipule que vous êtes obligée de me répondre quand je vous demande de confirmer l’information.
    Juste pour être certaine de comprendre, je voudrais vous soumettre le scénario suivant fondé sur ce que je comprends des réponses. Je suis manifestement une titulaire de charge publique désignée et je rencontre à l’occasion des gens, des associations et des parties qui sont intéressés et qui se considèrent comme des lobbyistes. Quand je les rencontre, je présume habituellement qu’il s’agit de personnes de bonne foi. Elles se sont dûment inscrites, comme vous l’avez indiqué quelques minutes plus tôt, et je dois consigner les interactions que j’ai eues avec elles.
    Si, en fait, elles ne sont pas inscrites et ne déclarent pas notre interaction, l’erreur ou l’omission est la leur. Cette présomption est-elle juste?
    Oui, c’est parfaitement juste.
    D’accord. Suis-je tenue de vérifier moi-même leur inscription?
    Vous n’y êtes pas obligée en vertu de la Loi, bien que je vous encourage à le faire, mais seulement parce que je reçois très fréquemment des allégations, auquel cas je communiquerai avec chacun d’entre vous parce que vous devenez des témoins dans le cadre de mes évaluations préliminaires et de mes enquêtes. Si je vous interroge à propos d’une rencontre, ce n’est pas à vous de vérifier si les personnes sont inscrites au Registre, mais je vous recommande fortement de le faire.
    En fait, quand je rencontre des membres de votre personnel — et j’en ai rencontré un certain nombre hier —, je leur conseille de consulter le Registre avant de rencontrer quelqu’un. Ils verront qui ces personnes ont rencontré précédemment et à quel sujet. C’est un intéressant...
    Je suis désolée, je ne voulais pas vous interrompre.
    En parlant de personnel, je vais aller plus loin et vous poserai essentiellement la même question. Mon personnel n'a évidemment pas cette obligation non plus, n'est-ce pas?
    En effet.
    Pour que tout soit bien clair, je vous donnerai un autre exemple. Les entreprises et les particuliers qui vendent des produits au gouvernement doivent-ils s'inscrire au registre à titre de lobbyistes? Par exemple, les agents des ventes de Microsoft doivent-ils consigner les rencontres qu'ils tiennent avec les fonctionnaires? Y sont-ils obligés?

  (1450)  

    S'ils ne font que vendre un produit, la réponse est non, puisqu'il s'agit d'une passation de contrat. S'ils vous rencontrent pour tenter de vous convaincre d'élaborer un programme ou une politique, ou pour vous parler d'un projet de règlement ou de loi auquel vous travaillez, alors la réponse est oui. Mais c'est non s'ils vendent un produit.
    Et s'ils vendent...
    Je vous remercie beaucoup, madame Lattanzio.
    Je vous remercie.
    Nous allons maintenant effectuer un tour de brèves interventions.
    Vous avez la parole, madame Gaudreau.

[Français]

     Vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Je vous remercie, monsieur le président. Vous l'avez très bien dit.
    Je vais faire un lien avec ce qui vient d'être mentionné.
    Madame Bélanger, vous parliez de recommandations. Si l'on recommandait quelque chose à un député sans charge précise ou à un membre du gouvernement ayant une charge publique énorme et devant s'assurer de la confiance du public, votre recommandation serait très valable pour démontrer la responsabilité en tant que leader. C'est ce que je comprends.
    Dans la Loi, la responsabilité n'est pas inscrite...

[Traduction]

    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je pense que Mme Gaudreau n'a pas réglé son canal au français. Sa voix est beaucoup plus forte que celle de l'interprète dans mon microphone. Je ne peux entendre les paroles de l'interprète.
    Je suis désolé de vous interrompre, madame Gaudreau.
    D'accord. Nous allons vérifier ce qu'il en est auprès de Mme Gaudreau. Je prolongerai votre temps de parole.

[Français]

    Continuez, madame Gaudreau.
    D'accord.
    Ce qui est formulé dans cette recommandation pourrait donc éventuellement avoir force de loi.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que, si l'on veut montrer sa responsabilité et donner l'exemple, on se doit de suivre cette recommandation?
    Actuellement, votre responsabilité est de me répondre et de confirmer l'information qui est dans le Registre. Pour vous acquitter de cette obligation, vous devez prendre note des personnes que vous avez rencontrées et des sujets abordés.
    En réponse à l'une de mes questions à ce propos, si l'on me dit « je n'en ai aucune idée, je ne me souviens pas de cette réunion et je ne sais pas qui était là », je dois me fier à la parole du lobbyiste qui a inscrit l'information proprement dite. Les lobbyistes le font à l'intérieur des 15 jours suivant la rencontre inscrite pour le mois. Très souvent, ils le font au sortir d'une réunion.
    Si je vous interroge, vous devez me confirmer si c'est vrai ou non. C'est pourquoi ma recommandation est de prendre de bonnes notes.
    Tout à fait. C'est noté.
    Il y a beaucoup de zones grises dans votre travail. Comment pouvez-vous démontrer ou affirmer que cela se fait en toute transparence et en toute impartialité? Y a-t-il des mécanismes qui peuvent attester votre neutralité?
    J'ai été fonctionnaire pendant toute ma vie et je suis une personne très neutre. Je n'ai aucune affiliation politique et je n'en ai jamais eu.
    De plus, j'ai énormément d'intégrité et je prends vraiment à coeur l'application de la Loi telle qu'elle est écrite. Mon travail me tient beaucoup à coeur et je travaille fort. J'ai une équipe de 28 employés, qui sont également très neutres. J'évalue la preuve telle qu'elle est devant moi, en me basant sur les critères de la Loi. Je suis aussi juriste; je suis avocate de profession. Je vous promets...
    J'ai une dernière question.
    D'accord.
    En fait, dans les sanctions...

[Traduction]

     Nous avons déjà dépassé le temps, madame Gaudreau.

[Français]

    J'ai perdu du temps à cause de l'interruption tantôt. Puis-je poser ma question? Cela ne prendra que 20 secondes.

[Traduction]

    Non. Je vous ai accordé plus de temps. J'ai arrêté le chronomètre et vous ai accordé du temps supplémentaire.

[Français]

    Je serai rapide.
    Quelles sont les sanctions possibles, madame Bélanger, si l'on enfreint la Loi, par exemple en omettant de s'inscrire ou de produire un rapport? Quel est le mécanisme de référence permettant de faire une vérification?

[Traduction]

    Répondez brièvement, je vous prie, madame Bélanger.
    À l'heure actuelle, l'affaire est renvoyée à la GRC. Il n'y a vraiment aucun autre mécanisme. Autrement, en cas de contravention au code, on fait rapport au Parlement. Je ne dispose pas d'un éventail de sanctions. Voilà pourquoi je formulerai une recommandation à ce sujet.

[Français]

    Je m'excuse d'avoir répondu en anglais. J'en suis désolée.

[Traduction]

    Ne vous inquiétez pas, nous bénéficions d'un service d'interprétation.
    M. Angus peut intervenir pour deux minutes et demie.

  (1455)  

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je suis très intéressé, madame Bélanger. Vous avez parlé des obligations, précisant quand il est nécessaire de s'inscrire ou non. J'ai rencontré toutes sortes d'organismes caritatifs locaux et nationaux. Vous avez indiqué que si un groupe rencontre des ministres ou des membres de leur personnel pour tenter d'élaborer un programme, il doit s'inscrire. Est-ce exact?
    Il doit effectivement s'inscrire s'il atteint le seuil de 20 %.
    Bien. Dans le cas du groupe Kielburger, le groupe tentait d'instaurer deux programmes. L'un était le programme d'entrepreneuriat du ministre Bill Morneau, d'une valeur de 12 millions de dollars, et l'autre, la Bourse canadienne pour le bénévolat étudiant, qui aurait totalisé 900 millions de dollars. Ce sont là des sommes substantielles.
    Nous avons discuté de la question. Ces gens se qualifiaient de bénévoles, ce qui est plutôt difficile à comprendre compte tenu de leur structure, mais ce que j'ai trouvé vraiment intéressant, c'est que vous avez affirmé que si quelqu'un est rémunéré, cette personne pourrait atteindre le seuil. Voilà qui est intéressant.
    Je vous demanderais si vous avez examiné les contrats conclus entre le gouvernement fédéral et la société de gestion qui a été mise sur pied, car les frères Kielburger ont soutenu, lors de leur témoignage, que tous les fonds allaient aux jeunes et qu'ils n'empochaient pas un centime. Ils ont été très clairs à ce sujet, mais le contrat indiquait facilement que des frais de gestion de 15 % allaient à l'organisation. Le groupe compte de nombreux employés et toutes ses organisations sont interreliées, mais le gouvernement fédéral allait en plus verser un loyer de 560 000 $. C'est un demi-million de dollars. Nous savons que les frères Kielburger possédaient à Toronto de nombreux biens immobiliers qu'ils tentaient de conserver.
    Dans l'hypothèse que des gens sont payés pour leurs biens immobiliers et pour les employés de leurs organisations, si plus de 50 millions de dollars sont versés à une organisation, quelqu'un est payé. Se peut-il que le seuil soit atteint pour la personne rémunérée et qu'elle doive s'inscrire?
    Pour être obligée de s’inscrire, il faut que la personne soit payée par quelqu’un pour faire du lobbyisme au profit de sa compagnie. Si c’est le cas...
    Oui. Je pensais précisément aux frères Kielburger ici...
    Je ne veux pas traiter de cas précis. Je ne le peux pas. Je ne le peux vraiment pas.
    Je sais.
    Je vous dirai toutefois que nous nous montrons extrêmement rigoureux dans nos enquêtes, nos évaluations préliminaires et tout ce que nous faisons.
    J’en suis sûr. Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie beaucoup, madame Bélanger et monsieur Angus.
    Monsieur Warkentin, il ne reste plus que trois minutes à notre séance. Vous disposez donc de trois minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président. Je vous remercie, madame la commissaire. Je serai bref.
    J’ai une question, et c’est la suivante: quelles conditions pourraient vous mener à abandonner une enquête à mi-chemin? Est-ce que quelque chose échappant à votre contrôle pourrait vous faire interrompre une enquête?
    Sachez que la seule fois où c’est arrivé — car c’est arrivé —, j’ai mis fin à une enquête parce que la Loi m’y autorise quand il devient extrêmement clair que nous agissons sur la foi de présomptions erronées. Par exemple, nous lancerons une enquête si nous pensons que quelqu’un a organisé une rencontre. Nous amorcerons l’enquête, mais si nous découvrons finalement que manifestement, rien n’avait été organisé, je mettrai fin aux démarches. Il est inutile de mener une enquête et de peut-être faire rapport au Parlement sur quelque chose qui n’est pas vraiment survenu.
    Cela n’arrive pas très souvent, mais cela arrive. Avec l’effectif et les ressources dont je dispose, quand il ne vaut pas la peine de faire enquête parce qu’il n’y a manifestement aucun problème et que les fondements à partir desquels nous avons entrepris l’enquête n’existent plus, je cesserai l’enquête.
    Si une entreprise ayant payé un lobbyiste sur lequel vous faites enquête cesse d’exister, mettriez-vous fin à l’enquête?
    Non.
    C’est fort utile.
    Quand vous essayez de démêler une affaire, si une entreprise est payée par une organisation au profit d’un affilié qui...

[Français]

     J'invoque le Règlement, monsieur le président.

[Traduction]

    Pardonnez-moi, je pense que quelque chose ne va pas avec mon...

[Français]

    Monsieur le président, si le micro n'est pas bien placé, qu'il n'est pas près de la bouche, le son de l'interprétation est très faible et c'est impossible d'entendre ce qui est dit.

[Traduction]

    Je vais faire un essai.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Testons le micro. Non, le problème persiste, monsieur le président.
    Il vaut probablement mieux que je m’arrête ici, alors.
    Alors je vous remercie beaucoup, madame Bélanger. Nous vous sommes reconnaissants d’avoir témoigné devant le Comité.
    J’ai une brève annonce à faire. Je pensais à quelque chose au sujet de la formation du personnel et d’autres personnes. Pendant que vous échangiez avec mes collègues, j’ai pensé que lorsque je confirme des rendez-vous, j’indiquerai peut-être dans le bas du courriel de confirmation que si la personne concernée est un lobbyiste et qu’elle n’est pas inscrite auprès du Commissariat au lobbying, elle pourrait commettre une infraction.
    Approuveriez-vous l’ajout d’un tel message dans un courriel confirmant une réunion?

  (1500)  

    Comme cela ne manquerait pas d’effrayer les gens, je l’approuverais assurément.
    Cela leur sert d’avertissement.
    Absolument
    Je vous remercie beaucoup, madame Bélanger.
    Honorables collègues, nous allons ajourner nos travaux, mais je veux que vous sachiez que notre séance débutera à midi et non à 11 heures lundi. Comme nous ne recevons qu’un seul témoin, j’ai pensé qu’au lieu de nous réunir de 11 heures à midi, nous le ferions de midi à 13 heures pour accorder à ceux d’entre vous qui se déplacent jusqu’à Ottawa une heure de plus pour voyager.
    Nous commencerons donc avec le seul témoin que nous ayons pu... Nous avons fait tout notre possible. Je félicite la greffière d’avoir tenté de convaincre et d’encourager les témoins potentiels, leur téléphonant et leur envoyant des courriels à plusieurs reprises, mais c’est le seul témoin que nous ayons pu faire venir lundi. Notre séance commencera donc à midi lundi.
    Je vous souhaite une belle fin de semaine. Faites attention à vous.

[Français]

    Bonne journée.

[Traduction]

    La séance est levée.
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