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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 074 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 8 février 2018

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Je déclare la séance ouverte. Nous en sommes à la réunion numéro 74, et, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous étudions les obstacles à la transition et les résultats mesurables d'une transition réussie.
    Nous accueillons deux groupes de témoins aujourd'hui. Le premier groupe est composé de Nora Spinks, directrice générale de l'Institut Vanier de la famille, et, par vidéoconférence, d'Oliver Thorne, directeur exécutif, Opérations, du Veterans Transition Network. Nous accueillons aussi Mark Fuchko, un colonel à la retraite.
    Nous allons commencer les déclarations des témoins avec M. Thorne, qui témoigne par vidéoconférence, parce que la connexion est excellente en ce moment.
    Merci beaucoup de l'introduction. Espérons que la transmission vidéo restera aussi bonne.
    Je vais commencer rapidement par me présenter et présenter les travaux du Veterans Transition Network, ce qui, selon moi, vous permettra de comprendre les questions auxquelles je peux répondre et les renseignements que je peux fournir.
    Merci beaucoup de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui.
    Le Veterans Transition Network est un organisme de bienfaisance enregistré au Canada qui offre des programmes de transition aux vétérans. Notre organisation termine tout juste sa cinquième année d'existence. La constitution en personne morale remonte à 2012, mais le programme que nous offrons est en place depuis environ 20 ans. Il s'agissait au départ d'un programme élaboré par un groupe de psychologues en counseling et de médecins à l'Université de la Colombie-Britannique. Au moment de sa création, le programme avait pour objectif d'aider les membres actuels et anciens des Forces canadiennes à cerner et à surmonter les obstacles à la transition et au retour à la vie civile. Le premier programme pilote a été réalisé à la fin des années 1990 et, pendant cinq ans, il a fait l'objet de recherches et a été mis au point à l'Université de la Colombie-Britannique, avec le soutien de la Légion royale canadienne et du commandement de la Colombie-Britannique. Il est offert de façon continue depuis. Le programme que nous offrons a probablement pris la forme définitive que nous lui connaissons aujourd'hui au début des années 2000, et, depuis ce temps, il a été offert de façon continue par l'intermédiaire de l'Université de la Colombie-Britannique, avec le soutien de la Légion royale canadienne.
    En 2012, le Veterans Transition Network a été constitué en personne morale, dans un premier temps, en tant qu'organisme sans but lucratif, et ensuite, en tant qu'organisme de bienfaisance enregistré, ce qu'il est encore aujourd'hui, avec comme mission d'offrir le programme à tous ceux qui en ont besoin partout au Canada.
    Depuis ce temps, notre expansion nous a menés dans sept provinces canadiennes où nous offrons le programme de façon continue. Nous offrons maintenant des programmes pour les hommes et pour les femmes des Forces canadiennes, en anglais et en français.
    Au cours des cinq dernières années, on s'est vraiment efforcé de bâtir une infrastructure opérationnelle et clinique à l'échelle du Canada pour renforcer notre capacité d'offrir les programmes qu'on nous demande constamment.
    Je vais parler rapidement du travail que nous faisons dans le cadre de notre programme. C'est un programme qui est offert à des groupes et qui prend la forme de retraites. D'une durée de 10 jours, il est séparé en trois ateliers. Nous parlons quant à nous de trois phases. Les deux premières phases durent quatre jours, et la dernière phase, deux jours. Il y a une pause de deux à trois semaines entre chaque phase.
    Le programme n'a pas été conçu ainsi pour rien, et l'idée, c'est que chaque phase ou chaque atelier met l'accent sur des enjeux précis que les participants peuvent rencontrer dans le cadre de leur processus de transition.
    Durant les phases, les participants s'efforcent de renforcer leurs compétences et d'améliorer leurs connaissances quant aux raisons pour lesquelles leur transition est peut-être difficile. Ils mettent leurs compétences en pratique et, à la fin de chaque étape, ils établissent des objectifs liés à l'application de ces compétences et aux efforts nécessaires pour surmonter les obstacles qu'ils rencontreront entre les phases.
    Ils retournent ensuite à leur vie quotidienne pendant deux ou trois semaines avec certains objectifs à l'esprit, des objectifs qu'ils ont établis en groupe. Ils s'efforcent d'appliquer les nouvelles compétences qu'ils ont acquises dans le cadre du programme, puis, lorsqu'ils reviennent pour la phase suivante, ils peuvent dire ce qui a fonctionné et ce qui n'a pas fonctionné et acquérir de nouvelles compétences et de nouvelles connaissances et ainsi continuer à tenter de réussir leur transition.
    En tout, la prestation du programme dure environ de quatre à six semaines et, durant cette période, les participants feront environ 100 heures de travaux cliniques en groupe.
    Je vais parler rapidement de nos recherches. Un aspect très important pour assurer la croissance d'un tel programme partout au Canada a été de recueillir des données de recherche sur les résultats pour montrer que le programme est sécuritaire et efficace.
    Actuellement, nous comptons sur une équipe de recherche à l'Université de la Colombie-Britannique. L'équipe est dirigée par Dan Cox, qui réalise une recherche sur les résultats pour notre programme. Nous prenons des mesures immédiatement avant et immédiatement après le programme ainsi qu'à des intervalles de 3 mois, 12 mois et 18 mois après le programme.
    Nous avons maintenant un échantillon suffisamment grand pour savoir que nos données sont significatives, et nous constatons des changements importants et durables. Nous avons constaté d'importantes réductions des agrégats de symptômes liés au stress post-traumatique, des choses comme l'anxiété, la dépression et l'hypervigilance. Nous constatons aussi une augmentation de l'estime de soi et une très importante diminution des idées et des pensées suicidaires.
    Environ le tiers des personnes qui participent à notre programme ont des idées suicidaires, soit à l'occasion, soit fréquemment, et ce chiffre diminue de 80 % après le programme. Au total, 80 % d'entre eux n'ont plus d'idées suicidaires une année et demie après la fin du programme, notre dernier point de contrôle.
    Comme je l'ai dit, notre mission au cours des cinq dernières années a été d'élargir la zone de prestation du programme, ce qui signifie qu'il a fallu trouver beaucoup de fonds, former beaucoup de cliniciens un peu partout au Canada et nous efforcer de vraiment communiquer l'existence de notre programme et sa disponibilité aux vétérans et aux militaires.
    En 2012, lorsque nous sommes devenus un organisme de bienfaisance enregistré, Anciens Combattants Canada a examiné notre programme, analysé nos recherches et nous a acceptés en tant que fournisseurs de services. Nous travaillons maintenant depuis cinq ans en tant que fournisseurs de services d'Anciens Combattants Canada. Nous sommes rémunérés pour chaque client d'Anciens Combattants qui participe à notre programme et dont la demande de participation au programme est couverte, ce qui représente environ le tiers de nos clients.
    Pour les deux tiers restants des hommes et des femmes qui participent à nos programmes, nous payons la note. Nous avons créé des partenaires avec divers commandements provinciaux de la Légion royale canadienne partout au Canada. Un certain nombre de sociétés, comme Boeing et London Drugs, nous fournissent des fonds, et des organisations comme True Patriot Love ont été d'une grande aide pour lancer ces programmes et obtenir le financement nécessaire. Voilà les renseignements contextuels que je voulais fournir sur notre organisation.
    Pour ce qui est des questions — j'ai examiné les questions qui ont été envoyées aux témoins —, je crois que, vu ce sur quoi notre organisation met l'accent, je suis probablement mieux placé pour répondre aux questions 3, 7 et 8, qui concernent la transition et la façon dont les organisations sans but lucratif et les organisations communautaires peuvent travailler en collaboration avec Anciens Combattants.

  (1110)  

    C'est quelque chose que nous avons vraiment tenté de faire au cours des cinq dernières années.
    Nous avons tous pris des notes à ce sujet, et nous y reviendrons après avoir entendu les autres témoins.
    Merci.
    Parfait, merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à Mark. Vous pouvez commencer votre déclaration.
    Je m'appelle Mark Fuchko. J'ai servi pendant 12 ans au sein des Forces armées canadiennes. J'ai passé deux périodes d'affectation en Afghanistan.
    En mars 2008, durant une opération dans la province de Kandahar, le véhicule que je conduisais a roulé sur un engin explosif improvisé. Lorsque la bombe a explosé, je me souviens d'avoir vu un immense éclair rouge, d'avoir entendu un bruit aigu et d'avoir regardé vers le bas. Mon pied droit se trouvait sur ma cuisse. J'ai su à ce moment-là que j'étais dans un gros pétrin. J'étais sûr de mourir. J'ai dû appliquer un garrot sur ma jambe droite. Je pensais que j'étais paralysé, parce que je n'arrivais pas à bouger la jambe gauche. Je me suis penché pour taper sur ma jambe gauche, et mon tibia et mon péroné ont jailli de mon pantalon. J'ai dû appliquer un garrot sur cette jambe aussi. En gros, je suis resté pris dans le véhicule pendant environ 40 minutes avant que des membres de mon équipe réussissent à me sortir de là — tous des secouristes de premier plan — et à me sauver la vie. C'est la raison pour laquelle je suis ici aujourd'hui.
    J'ai dû surmonter de nombreux obstacles et de nombreux défis durant ma transition. Beaucoup de ces problèmes sont liés à certains programmes et aux délais établis. Je participe actuellement à un programme de certification en enseignement après un diplôme universitaire offert à l'Université de Calgary. J'ai dû parcourir un chemin très long et très difficile pour me rendre là, pas seulement psychologiquement, mais physiquement, et j'ai dû composer avec tous les rouages du système pour réussir ma transition.
    Je regarde quelques-unes de ces questions; il y en a beaucoup au sujet desquels je peux seulement fournir des renseignements anecdotiques sur les problèmes auxquels mes amis ont été confrontés. Il y en a certaines dont je peux parler, surtout l'UISP et la décision de s'y rendre.
    Je sais que les membres du Comité veulent se pencher sur ces questions plus tard, mais certains des problèmes auxquels j'ai été confronté personnellement sont liés aux délais. Durant le processus, il y a un certain laps de temps durant lequel un militaire doit aller de l'avant et entreprendre sa transition s'il veut vraiment avoir accès aux programmes. C'est extrêmement difficile, surtout lorsqu'on se remet de blessures psychologiques ou physiques. On n'est parfois pas dans l'état d'esprit nécessaire pour participer à ces programmes parce qu'on n'est tout simplement pas prêt. C'est vraiment accablant. Ce peut être très difficile.
    L'autre aspect de la question, c'est que beaucoup de personnes qui entrent dans l'armée — selon leur niveau de scolarité — ont besoin de ces occasions, pour ainsi dire, afin de parfaire leur niveau de scolarité ou d'atteindre un certain niveau. C'est principalement parce que leur formation scolaire n'était pas suffisante lorsqu'ils sont partis.
    J'ai été chanceux. Ma chaîne de commandement m'a vraiment, vraiment appuyé. J'ai été affecté au Musée militaire de Calgary, en Alberta, ma ville natale. C'était fantastique. J'ai bénéficié du soutien de ma famille, de la collectivité locale et des soldats avec qui j'ai travaillé.
    L'autre élément clé, c'est que l'Unité interarmées de soutien du personnel était intégrée au Musée de Calgary. Tout était très près de ce que je faisais. Le soutien de ma chaîne de commandement était sans faille, et mes supérieurs connaissaient très bien le système. Ils ont pu me guider et veiller à ce que j'obtienne tous les avantages auxquels j'avais droit.
    Une des choses que j'ai dû faire, c'est de retourner suivre un programme de perfectionnement. J'ai dû suivre un cours de mise à niveau. Après l'avoir suivi, l'établissement que je fréquentais a déterminé que ce n'était plus une exigence pour le programme; j'ai donc perdu un semestre là-bas. J'aurais pu travailler sur d'autres choses et poursuivre mes études.
    En ce qui concerne les autres programmes auxquels j'ai eu accès, j'étais un membre de la Force de réserve, alors je n'avais pas droit à la gamme complète des prestations liées à la formation scolaire. J'ai seulement eu droit à la moitié des prestations pour poursuivre des études postsecondaires. Je crois qu'il y avait certains problèmes au sein de l'UISP en tant que tel, ce qui a fait en sorte que je ne me faisais pas toujours rembourser les coûts de ces programmes. Très souvent, j'ai dû moi-même payer la note de ma formation scolaire.
    J'ai été très chanceux, parce que j'ai pu profiter au maximum de ce qui m'était offert avant ma transition vers le RARM. Les responsables du RARM m'ont très bien soutenu. Ils m'ont fourni la lettre de parrainage d'étudiants, tout ce dont j'avais besoin, en fait, afin que je puisse terminer les deux dernières années de mon programme de premier cycle.
    Par la suite, j'ai été aiguillé vers les Services de réadaptation professionnelle pour les vétérans canadiens, le SRPVC. C'est là que j'ai obtenu l'approbation pour poursuivre un programme de formation à l'intention d'étudiants ayant déjà obtenu un diplôme. Il s'agit en fait d'un programme de baccalauréat offert à l'Université de Calgary. Les responsables ont examiné mes compétences. Ils ont évalué mon état de santé et tout le reste. Ils ont dit: « D'accord, il s'agit d'un emploi que cette personne peut raisonnablement occuper. » C'était l'un des domaines mentionnés dans lesquels je pourrais probablement réussir. Je pouvais trouver un emploi. Je pouvais aller de l'avant et faire ces choses.
    Cependant, pour me rendre là, le chemin a été extrêmement ardu. Durant tout ce processus, surtout après que j'ai quitté l'armée, une fois mon dossier transféré à Anciens Combattants, on a constamment — en fait, assez régulièrement — menacé d'interrompre mes prestations. C'est absurde, mais je dois prouver que je n'ai toujours pas de jambes; mon médecin doit remplir de volumineux rapports assortis de radiographies, de rapports chirurgicaux et de tout le reste pour montrer que mes jambes n'ont pas repoussé.
    Je suis un double amputé. J'attends une intervention chirurgicale pour réparer une grave blessure à la hanche. L'intervention doit avoir lieu au mois de mai. Anciens Combattants a déterminé qu'il fallait attendre après cette intervention chirurgicale pour prendre à nouveau une décision relativement à mon invalidité.

  (1115)  

    J'en ai parlé à tous les représentants du gouvernement qui ont bien voulu m'écouter. Vous n'imaginez pas le nombre de fois qu'on m'a remercié de mon service, et, essentiellement, les remerciements de certains intervenants du système politique canadien ne veulent plus rien dire. Je n'ai pas besoin qu'on me remercie de mon service. Des Canadiens ordinaires me remercient pour ce que j'ai fait. J'ai travaillé bénévolement pour des organismes de bienfaisance, j'ai fait toutes sortes de choses et, cependant, quand j'ai entendu les nouvelles l'autre jour... C'est assez troublant pour un vétéran d'entendre ça. Que peuvent-ils faire de plus? Il y a beaucoup d'autres choses qu'il faut faire, et il faut aller de l'avant.
    Je commence à devenir un peu émotif, parce que les dernières années ont été très difficiles. Le fait que je dois prouver que je n'ai pas de jambes, le fait que j'ai oublié de signer un document d'Anciens Combattants, ce qui a fait en sorte qu'on m'a envoyé une lettre arbitraire m'informant que toutes mes prestations allaient être arrêtées dans les jours qui suivent et que je ne respectais pas les conditions de mon programme de réadaptation professionnelle... J'avais présenté une demande dans le cadre du programme.
    Je vais à des rendez-vous médicaux. J'ai souvent des séances de physiothérapie. Je coordonne tout ça avec mon médecin de famille. En fait, j'ai dû me trouver un nouveau médecin de famille parce que mon médecin a éliminé certains des services qu'il offrait, peut-être parce que mon dossier était trop exigeant, vu que j'étais constamment dans son bureau, simplement pour obtenir telle ou telle preuve ou confirmation pour Anciens Combattants, afin que je puisse continuer de participer aux programmes de transition.
    Jusqu'à présent, j'ai réussi à aller de l'avant et à obtenir toutes les prestations possibles, mais le processus a été extrêmement difficile. Je ne peux qu'imaginer à quel point ce doit être difficile pour des personnes qui ne bénéficient pas du même soutien que celui dont j'ai bénéficié de ma chaîne de commandement ou dont les supérieurs ne connaissent pas aussi bien le système que les miens, ce qui leur a permis de vraiment m'aider à m'y retrouver.
    Je crains que beaucoup de soldats, surtout ceux qui sont blessés ou ceux dont les blessures ne sont pas nécessairement graves, soient laissés pour compte, parce qu'ils n'ont tout simplement pas d'occasions. Les occasions pour eux d'avoir accès à ces services sont trop restreintes. Vu que je dois régulièrement prouver que je n'ai pas de jambes, quelle chance ont les autres dont les blessures ne sont pas visibles?
    Pour moi, le processus a été très difficile. Je vous remercie beaucoup de m'avoir donné l'occasion de témoigner aujourd'hui. Il y a une longue liste de questions, ici, et j'ai hâte de répondre à chacune d'elles pour vous, si vous me les posez. Je crois qu'il est probablement temps pour moi de m'arrêter et de céder la parole aux autres témoins qui sont là aujourd'hui.
    Merci de votre témoignage.
    Nous passons maintenant à Mme Spinks.
    Je vous remercie de l'occasion de comparaître devant le Comité. Je suis toujours heureuse d'être ici. Je vais vous parler du processus de transition du point de vue de la famille. Je vais vous faire part de certaines constatations sur la transition du travail à la retraite et de la façon dont tout ça s'applique, ou non, aux familles des militaires et des vétérans.
    Comme vous m'avez déjà entendu le dire, la famille est autodéfinie. C'est une notion dynamique et diversifiée, mais la famille joue un rôle important dans la transition. Il y a trois caractéristiques, comme vous l'avez entendu à plusieurs reprises, qui sont uniques aux familles des vétérans: elles sont exposées à des déménagements, des périodes de séparation et des risques comme aucune autre. Lorsqu'arrive la transition vers la retraite, les déménagements cessent. Il faut alors prendre une décision sur l'endroit où l'on veut s'installer. Les périodes de séparation cessent elles aussi, et il faut alors déterminer si on veut continuer de vivre ensemble et la forme que cela prendra. Puis, troisièmement, le niveau de risque diminue, ce qui change la façon d'interagir avec le monde et modifie l'état émotionnel.
    Lorsque les militaires prennent leur retraite, ils doivent déterminer où ils vont rester. La plupart d'entre nous, lorsque nous prenons notre retraite, avons une bonne idée d'où nous allons. Nous avons eu beaucoup de temps pour nous préparer et tisser des liens. Dans le cas des militaires, pas tant. De plus, nous n'avons pas à nous inquiéter de certaines des caractéristiques uniques des familles de militaires, comme la façon dont les autres personnes vont nous voir ou ce qu'elles penseront de nous.
    Les familles de militaires et de vétérans sont les seules familles au Canada qui s'auto-identifient elles-mêmes comme étant des familles « militaires ». Vous n'entendez jamais quelqu'un dire qu'il fait partie d'une famille « minière » ou « du secteur bancaire ». On fait alors tout simplement partie d'une famille. Lorsqu'on est dans l'armée, on fait partie d'une communauté. Ce n'est pas seulement un emploi, c'est notre identité, notre communauté. Il y a un sentiment d'appartenance. On a des expériences communes et des intérêts communs. Tout cela fait en sorte que la transition pour ce groupe est très différente.
    Dans le passé, il y avait beaucoup de soutien sur les bases et autour de celles-ci. Maintenant, on est plus susceptible de vivre à l'extérieur des bases et d'avoir un époux ou un partenaire membre de la population active rémunérée que jamais. Le fait de vivre dans la collectivité change la dynamique de la transition. Ce que nous savions et comprenions au sujet de la transition, même durant les années 1970 et les années 1980, ne s'applique plus nécessairement à l'expérience d'aujourd'hui. Dans la plupart des carrières, lorsqu'on prend notre retraite, c'est qu'on faisait ce travail ou ce genre de travail ou on qu'on poursuivait notre carrière depuis 35 ou 40 ans. Dans l'armée, on peut prendre sa retraite après quelques années ou quelques décennies. Une bonne partie des recherches réalisées sur la transition vers la retraite à l'extérieur de l'armée ne peut pas toujours s'appliquer non plus. Lorsque la plupart des Canadiens prennent leur retraite, ils sont dans la soixantaine. Pour les hommes et les femmes, l'âge moyen de la retraite est d'environ 63 ans. Dans le cas des travailleurs autonomes, c'est 69 ans. Pour les militaires, l'âge de la retraite a tendance à être beaucoup moins élevé. Beaucoup des personnes qui sont formées pour fournir un soutien aux personnes qui vivent de telles transitions ne possèdent pas l'ensemble précis de compétences pour aider.
    L'autre chose qui rend la situation unique, c'est que, lorsque la plupart des personnes prennent leur retraite, c'est un choix. Pour certains militaires, c'est aussi par choix, mais pour d'autres, c'est une question de circonstances, comme le récit de la libération pour raisons médicales que Mark vient de raconter. Si un tiers des vétérans ont de la difficulté durant leur transition, les deux tiers de ceux-ci sont ceux qui ont été libérés pour des raisons médicales, parce qu'ils doivent non seulement faire face aux défis liés à la transition, mais aussi composer avec des changements indépendants de leur volonté.
    Je veux souligner huit domaines clés du processus de transition des vétérans. Ce sont des domaines dont il faut tenir compte dans le cadre de l'élaboration de programmes et de politiques fondés sur des données probantes. Les voici sans ordre particulier: les domaines financier, physique, émotionnel, social, professionnel, psychologique, familial et, pour certains, médical.
    Pour qui veut assurer une transition harmonieuse en ce qui a trait à l'aspect financier, la littérature révèle que la littéracie financière est d'une importance cruciale. La plupart des gens obtiennent cette littéracie financière à l'extérieur du milieu militaire, auprès de conseillers financiers. Un conjoint ou un partenaire peut obtenir un tel soutien d'un service communautaire ou d'une institution bancaire ou financière qui n'a aucune idée, compréhension, ni même connaissance des réalités de la retraite des militaires.

  (1120)  

    Les programmes et services de littéracie financière adaptés aux militaires, comme le RARM, sont offerts, et, lorsqu'ils sont efficaces, ils peuvent faciliter la transition.
    L'aspect physique concerne l'endroit où l'on vit, notre état de santé et notre bien-être et la façon dont on réussit à s'adapter. Certains occupaient peut-être dans l'armée un poste très physique et, une fois à la retraite, ils doivent se réengager.
    Le domaine émotionnel est vraiment lié à l'attachement, à l'appartenance, au deuil et à la perte. Pour assurer une transition harmonieuse, il faut une importante conscience de soi et une bonne capacité de maîtrise de soi.
    L'aspect social est une composante importante de la transition militaire, parce que les liens qu'on tisse lorsqu'on est dans l'armée sont très différents des liens auxquels on peut avoir accès à l'extérieur du milieu militaire. Le fait de nouer, de conserver et de cultiver de nouvelles relations en plus de toutes les choses avec lesquelles il faut composer — comme Mark l'a si bien décrit — peut être très difficile, tant pour les militaires que pour les membres de leur famille.
    Sur le plan professionnel, les vétérans doivent décider s'ils vont trouver un nouvel emploi, s'ils assumeront un nouveau rôle ou de nouvelles responsabilités, s'ils participeront au marché du travail autonome ou s'ils pénétreront le marché du travail. À cela s'ajoute tout ce dont vous avez déjà entendu parler au sujet de la transition.
    L'aspect psychologique est de loin la composante la plus importante de la transition, peu importe la situation d'emploi au moment du départ à la retraite, mais c'est tout particulièrement le cas pour les militaires. Lorsqu'on choisit une carrière militaire, ce n'est pas seulement un emploi, pas seulement une carrière: ce choix nous donne un but, une orientation dans notre vie. Il y a une signification, on fait une contribution. On change les choses pour des personnes et pour les autres et, dans certains cas, pour le monde entier. Cela nous donne non seulement une raison de nous lever le matin, mais aussi un sentiment d'identité et de bien-être général. Une des composantes psychologiques de la transition consiste à se départir de cette identité et à en adopter une nouvelle, qui n'est pas aussi étroitement définie ni nécessairement aussi respectée.
    Pour ce qui est de l'aspect familial, les rôles doivent être redéfinis. Les relations doivent être rétablies et renégociées. Il faut réinventer la routine. Tout ça est assez normal au moment du départ à la retraite, mais si on le fait alors qu'on a plus de 60 ou de 70 ans, c'est un peu différent de lorsqu'on a encore des enfants d'âge préscolaire ou des adolescents à la maison, ce qui complique encore plus les choses. C'est quelque chose dont il faut tenir compte.
    Il y a l'aspect médical. On est plus susceptible d'être forcé à la retraite par les circonstances et d'avoir à composer avec des maladies et des blessures, qu'elles soient physiques ou psychologiques.
    Puis, il y a le travail après la retraite. Pour bon nombre d'entre nous qui prenons notre retraite d'un emploi ou au terme d'une carrière, lorsque nous quittons un emploi, nous pouvons choisir de demeurer au sein de la population active rémunérée ou de continuer à travailler d'une façon ou d'une autre pour gagner un revenu pour notre famille. Assurément, c'est quelque chose qu'on constate un peu partout au pays. Pour la plupart des gens, il est possible de décider de travailler pour la même organisation ou dans la même profession ou d'essayer quelque chose de complètement nouveau.
    Les options pour les militaires sont très différentes. Ils ne peuvent pas retourner dans l'armée. Ils peuvent peut-être aller dans la réserve, mais ce n'est pas là le même genre d'options de retraite que celles auxquelles le reste d'entre nous avons accès. La plupart des conseillers en retraite n'ont pas le niveau de connaissances ou de compétence culturelle voulu pour soutenir les membres des familles militaires qui font la transition vers la retraite. Le processus peut devenir très difficile, surtout lorsqu'on prend sa retraite en raison de circonstances, et pas par choix ou décision, parce que, dans une telle situation, il faut s'inventer un tout nouvel ensemble de rêves, d'objectifs et d'aspirations. Il faut composer avec la nouvelle réalité financière. Il faut composer avec la bureaucratie. Il faut déterminer de quelle façon on dépensera son énergie, et il faut en dépenser beaucoup pour comprendre les systèmes et les services.
    Les domaines clés sont la prévisibilité, l'autonomie et l'autoréalisation. Si ces trois choses sont en place et sont soutenues, alors la transition vers la retraite est beaucoup plus harmonieuse. La plupart de nos programmes, politiques et mesures de soutien visent une ou deux de ces choses, sans comprendre les interactions plus générales.

  (1125)  

    Un élément important, particulièrement pour ceux qui sont libérés pour des raisons médicales, c'est le choc, le deuil et la perte de l'emploi, de la carrière et des rêves. Il n'y a pas beaucoup de soutien à cet égard, sauf si le processus est plus médicalisé grâce à des services de psychiatrie ou de psychologie, mais il y a très peu de mesures qui tiennent compte de toute la famille et assurent sa participation.
    Quand on pense à la retraite imposée et l'ensemble des adaptations et rajustements avec lesquels les familles doivent composer, ce qui rend le processus particulièrement difficile — et je vais vous laisser là-dessus —, c'est l'ignorance de ce qui nous attend. Il y a beaucoup d'inconnu pour les familles militaires au moment de la retraite. Il faut s'adapter de façon continue, non seulement à la retraite, mais à une toute nouvelle façon de vivre, à une toute nouvelle façon d'être. Le troisième élément, c'est l'adaptation aux huit choses dont j'ai parlé et, en dernier lieu, et c'est probablement l'une des choses les plus difficiles, surtout si on déménage à l'extérieur d'une collectivité où il y a beaucoup de familles militaires, c'est l'assimilation, l'assimilation dans la société. Il faut donc composer avec l'ambiguïté, l'adaptation, le besoin de rajustement et l'assimilation.
    Si nous avons une meilleure compréhension du processus et de la façon dont il est similaire ou différent de ce que vivent les autres personnes en transition, alors nous pourrons créer une plateforme pour accroître les chances de réussite du processus de transition.
    Merci beaucoup. Je suis ravie d'être ici. Je répondrai volontiers à vos questions.

  (1130)  

    Merci.
    Nous allons commencer la période de questions par Mme Wagantall. Vous avez jusqu'à six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous d'être là aujourd'hui.
    Monsieur Thorne, pour commencer, en écoutant les huit aspects de la transition dont Mme Spinks a parlé, puis en examinant les phases de votre programme, je constate qu'un grand nombre d'aspects s'appliquent à ce que vous faites durant vos phases 1, 2 et 3.
    Quand établissez-vous vraiment un lien avec les vétérans? Se pourrait-il qu'une des meilleures choses que nous pourrions faire pour eux serait de les faire participer à un genre de programme comme celui que vous offrez bien avant que la situation ne devienne plus critique?
    Merci de la question. Vous savez, c'est quelque chose que j'allais essayer de dire moi-même, mais vous venez de très bien l'expliquer pour moi. Vous avez tout à fait raison. C'est quelque chose que nous tentons vraiment de faire en tant qu'organisation, de trouver les vétérans et même les militaires qui sont en voie de libération afin de communiquer avec eux plus rapidement.
    Nous savons qu'un certain nombre de personnes qui demandent notre aide le font lorsqu'elles perdent leur conjoint, lorsqu'elles n'ont plus de lien avec leur famille ou lorsqu'elles craignent d'avoir des idées suicidaires, ce que reflète le fait que le tiers de nos participants ont des idées suicidaires, soit à l'occasion, soit fréquemment. Nous interagissons avec beaucoup de personnes beaucoup plus tard que nous le voudrions.
    Pour ce qui est du moment où nous interagissons avec les gens, nous en voyons certains — environ de 15 à 20 % de nos participants — qui sont en voie de libération ou qui oeuvrent encore activement dans les Forces. La majeure partie, environ 80 % des personnes qui participent à nos programmes, sont des vétérans, et certains viennent d'être libérés tandis que d'autres... Je crois que, l'année dernière, un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale a participé à notre programme.
    Nous rejoignons vraiment des gens à différentes étapes du processus. Bien sûr, notre objectif, c'est de les atteindre plus tôt. L'un de nos espoirs — et, assurément, c'est une chose sur laquelle nous travaillons depuis un certain temps —, c'est que nous aimerions être un fournisseur de services du ministère de la Défense nationale, comme nous le sommes pour Anciens Combattants. Nous pourrions communiquer avec ces gens beaucoup plus rapidement dans le cadre du processus de transition, pendant la transition, tout juste après ou dès qu'ils commencent le processus et qu'ils se rendent compte qu'ils sont aux prises avec certains de ces problèmes.
    Plus particulièrement, Nora a parlé de la question de l'identité durant le processus de transition. C'est l'une des choses sur lesquelles nous travaillons activement, et je suis tout à fait d'accord avec ce qu'elle a dit. La transition de la vie militaire à la vie civile ne consiste pas à se trouver une nouvelle carrière. C'en est, bien sûr, une des composantes, mais il s'agit de trouver une nouvelle identité et un nouveau sentiment d'utilité. Souvent, cette épreuve ne répond pas aux critères diagnostiques d'un problème médical ou psychologique, et ainsi...
    J'ai seulement quelques minutes, mais c'est très important. C'est quelque chose que j'ai écrit. L'objectif, c'est de leur donner des occasions de formation et de trouver un travail, parce que nous savons à quel point ces choses sont importantes elles aussi. En même temps, je pense à ces circonstances et à ce qui a été dit, soit que beaucoup d'entre eux ne sont pas prêts à suivre une formation professionnelle immédiatement alors que c'est une exigence et que nous les bousculons avant de leur fournir ce type de service...
    Absolument.
    J'aimerais vous dire quelque chose, Mark. Et dans les notes de notre préambule, il est écrit: « sur le plan opérationnel des FAC, le lien entre la condition médicale et le service militaire n'est donc pas pertinent ». Par conséquent, si une personne subit une blessure en raison du service ou pour une autre raison, le motif de la libération pour des raisons médicales n'est pas pertinent. Ce lien devient pertinent lorsque la personne est soudainement prise en charge par ACC: « puisqu’il engage la responsabilité du gouvernement du Canada de soutenir et de compenser les personnes dont les capacités physiques, mentales et professionnelles ont été affectées par le fait qu’elles aient porté l’uniforme au service du pays ».
    Ça, pour moi... Je ne sais pas de quelle façon comprendre ça. Il me semble tout à fait inapproprié qu'une personne qui a servi doive ensuite prouver et prouver sans cesse qu'elle a été libérée des Forces armées pour des raisons médicales, sans que les responsables des Forces aient affirmé, avant la libération — ce serait là une des exigences — que la personne en question a tel ou tel problème de santé et est admissible à tout ce qu'ACC a à offrir.
    Avez-vous des commentaires à formuler à ce sujet? Est-ce que je me trompe?

  (1135)  

    Ce qu'on remet en question, ce n'est jamais ma libération pour des raisons médicales. L'argument est lié aux blessures et au fait que j'ai arrêté de compter le nombre de fois où j'ai dû prouver mon incapacité. J'aurais pensé que, une fois, c'était assez, surtout qu'il n'y a pas de solution miracle permettant de faire repousser mes pieds et de faire soudainement disparaître mes blessures. On m'a aussi attribué un taux d'invalidité pour l'indemnité d'invalidité, le fameux montant forfaitaire qui est versé. On m'a attribué une cote de plus de 100 %, alors j'ai obtenu en fait une cote d'invalidité de 108 %, ce qui, selon moi, signifie que je suis complètement et totalement invalide. Eh bien, ce n'est pas la définition que m'en ont donnée les responsables d'Anciens Combattants, et j'ai donc dû fournir d'autres preuves que, en fait, j'étais bel et bien invalide, et ce, même si on m'avait attribué une cote d'invalidité de plus de 100 %.
    Selon moi, le fait qu'il y ait cette étape supplémentaire et qu'il faille que je prouve mon handicap total est tout simplement très démoralisant et absolument absurde. Le stress que j'ai éprouvé et qui a été imposé à ma famille est tout simplement ridicule. Chaque fois que je soulève cette question et que j'en parle aux gens, tout le monde est un peu stupéfait, et pourtant, nous voici ici, des années plus tard, les visages consternés sont encore là, mais rien n'a changé.
    C'est ce dont il est vraiment question, ici, aujourd'hui. Nous entendons toutes ces histoires. Combien de fois avez-vous témoigné?
    C'est la deuxième fois que je témoigne devant un comité.
    Bon nombre de personnes qui témoignent l'ont fait de nombreuses fois pour parler de problèmes clairs, et, malgré tout, rien n'a été fait, alors où est notre problème?
    Je dirais que, lorsque quelqu'un se présente à Anciens Combattants et qu'il a une blessure complète comme la mienne, eh bien, j'estime qu'il s'est déjà acquitté du fardeau de la preuve. J'ai déjà prouvé que j'ai cette blessure. Le problème, c'est que, chaque fois qu'il y a un petit changement ou que j'ai besoin d'un autre programme ou qu'il y a une situation similaire ou que j'ai besoin d'ajouter un service, je suis de retour à la case départ. Tous mes autres antécédents sont essentiellement rejetés. C'est problématique. C'est quasiment comme si Anciens Combattants était amnésique quant aux raisons pour lesquelles je traite avec eux au départ.
    Merci.
    Madame Lambropoulos.
    Merci d'être parmi nous aujourd'hui, de répondre à nos questions et de nous donner une idée de ce avec quoi vous devez composer au quotidien.
    Ma première question est destinée à M. Fuchko. Vous avez dit qu'il y a une certaine période durant laquelle on peut présenter des demandes pour obtenir des services de transition. Je ne le savais pas. Savez-vous de façon détaillée combien de temps les gens ont pour présenter des demandes?
    D'après ce que j'ai compris, essentiellement, il faut lancer les choses dès qu'on connaît sa date de libération. Si mes souvenirs sont bons, on a environ de 18 à 24 mois pour bénéficier des Services de réadaptation professionnelle pour les vétérans canadiens lorsqu'on quitte l'armée. Il y a aussi un programme en place offert par le RARM, qui, en fait, dure une certaine période aussi, mais, encore une fois, avec le même délai, et il faut s'organiser à cet égard avant sa date de libération; il y a une certaine période durant laquelle on peut avoir accès à tout ça.
    Selon ce que j'avais compris, je devais intégrer le système immédiatement. Si je ne le faisais pas à ce moment-là, je perdais complètement l'occasion de le faire et je n'aurais plus la possibilité d'y avoir accès. L'autre problème, aussi, c'est que si on ne participe pas à ces systèmes, on n'a aucun soutien financier. Actuellement, si je ne bénéficiais pas des Services de réadaptation professionnelle pour les vétérans canadiens, c'en serait pas mal fini pour moi. Je recevrais l'allocation pour déficience permanente, si je ne m'abuse, elle n'est pas très élevée, et je serais laissé à moi-même pour me trouver une place dans le monde civil, obtenir un emploi et faire toutes ces autres choses, plutôt que de pouvoir acquérir les compétences dont j'ai vraiment besoin pour réussir.
    De ce que j'ai compris, ce sont là les occasions qu'on a, et on a très peu de temps pour en tirer profit.
    Je vais assurément me pencher là-dessus, parce que ça ne me semble pas approprié.
    Vous avez mentionné que vous devez continuer de prouver votre situation. Est-ce principalement parce que le ministère de la Défense nationale ne communique pas l'information à ACC? Est-ce la raison pour laquelle vous devez fournir des preuves? Je sais que le ministère ne communique pas d'information liée à vos documents médicaux à ACC. Est-ce que le problème est lié à cette situation ou est-ce vraiment que vous avez déjà fourni l'information plusieurs fois aux mêmes personnes?
    Je dirais que cette situation concerne Anciens Combattants à 100 %. En 2008, j'ai reçu une indemnité d'invalidité, un montant forfaitaire. J'ai reçu le montant maximal, ce qui reflète en fait ce qui est offert par le RARM. Beaucoup de programmes pour vétérans semblent être le reflet du RARM. Un des problèmes qu'on peut avoir, c'est que si notre demande est refusée par le RARM, par exemple, une demande liée à une invalidité de longue durée et qu'on se tourne vers Anciens Combattants — parce que c'est vers ce ministère qu'on est censé se tourner et qu'on nous dit de le faire — les responsables d'ACC utiliseront le refus du RARM pour refuser de verser des prestations.
    À quoi cela sert-il d'avoir en place ce système qui est censé être une mesure de protection? Je paie pour cette assurance qui ne me couvre pas parce qu'on estime que je suis maintenant le problème d'Anciens Combattants, que je suis client d'ACC. Puis, je me tourne vers Anciens Combattants, et le fait que le RARM a refusé ma demande peut être retenu contre moi.
    L'armée n'a pas empêché les données sur mes blessures d'être communiquées à Anciens Combattants. Anciens Combattants m'a donné mon indemnité d'invalidité en 2008. L'organisation a reconnu mes blessures. Elle m'a donné une cote fondée sur le montant de l'indemnité d'invalidité. J'ai obtenu une cote d'invalidité de 108 %, c'est plus que 100 %. Lorsque je suis devenu un client d'Anciens Combattants, après ma retraite, encore une fois, j'ai dû prouver pourquoi. J'ai dû expliquer pourquoi mes pieds manquent et de quelle façon j'ai eu telle et telle blessure. J'ai dû passer en revue toute la liste et demander encore une fois à un professionnel de la santé de fournir les éléments de preuve requis à cet égard. Je dirais donc que le problème ne tient pas au fait que le MDN ne fournit pas l'information.

  (1140)  

    Merci de votre réponse.
    J'aimerais maintenant poser une question à Mme Spinks.
    J'imagine que vous êtes membre d'une famille militaire. C'est exact?
    Non.
    Non? D'accord, laissez tomber.
    J'allais vous poser une question plus poussée. Vous savez peut-être beaucoup de choses au sujet des gens qui sont membres d'une telle famille.
    Quels services les gens que vous connaissez ont-ils reçus s'ils ne sont pas directement des militaires — si ce sont des membres de la famille — et de quelle façon peut-on améliorer ces services?
    Nous sommes effectivement en train d'élaborer une importante initiative pour les familles des anciens combattants. De nombreuses familles militaires ont affirmé être réticentes à accéder aux services offerts par le MDN ou ACC parce qu'elles veulent éviter d'être étiquetées ou, comme une autre personne l'a décrit, de se perdre dans tout ce tourbillon. Donc, elles évitent tout cela, et il arrive parfois qu'elles deviennent inadmissibles involontairement en conséquence.
    Les membres de la famille vont consulter des médecins extérieurs, des médecins de famille, ils ont accès à des services dans la collectivité et à toutes sortes de services de soutien, mais ils ne semblent pas savoir ou comprendre ce que les Forces armées peuvent faire pour eux. Il arrive, lorsqu'un des conjoints a été pris en charge par ACC et l'autre non, que les deux reçoivent des renseignements contradictoires, ce qui cause énormément de difficultés. Les membres de la famille n'ont pas accès au même genre d'information ou de soutien que les militaires, ce qui peut parfois créer de la confusion.
    Pour reprendre ce que Mark disait plus tôt, les familles nous ont dit qu'on réserve un traitement identique à tous les militaires déclarés malades ou blessés ou libérés pour raisons médicales. Cependant, le fait est qu'il y aura toujours des différences entre deux blessures ou deux maladies. Dans certains cas, le problème est épisodique, d'autres sont à long terme, et d'autres encore s'améliorent au fil du temps. Certaines blessures ou maladies ne guérissent jamais et ne s'amélioreront pas au fil du temps, comme Mark l'a déjà dit. Il y a des maladies chroniques, le genre de problèmes qui restent dans votre corps et dont vous ne vous débarrassez jamais. D'autres encore sont dégénératives et vont graduellement devenir plus graves.
    Donc, la nécessité de rendre compte de votre état de santé dépend de votre maladie ou de votre blessure. Cependant, nous n'avons toujours pas de mécanismes adéquats pour trier les cas. Pour l'instant, nous n'avons en quelque sorte qu'une seule catégorie où tout est emmêlé.
    D'accord.
    Merci.
    Monsieur Johns.
    Merci à tous de nous avoir présenté vos témoignages. Ils ont une grande importance, au même titre que le travail que vous accomplissez. Nous vous sommes extrêmement reconnaissants de votre service.
    Mark, merci d'être venu et de nous avoir raconté votre histoire. Je trouve extrêmement troublante la façon dont le gouvernement a manqué à son devoir à votre égard.
    Quelle est la réaction d'ACC lorsque vous lui présentez la situation? Que vous répond-on lorsque vous dites que vous avez déjà répondu à ces questions? Quelle est la réaction?
    J'ai été suivi par plusieurs gestionnaires de cas dans la région de Calgary. J'ai l'impression d'être un cas lourd, et j'ai aussi l'impression que mes gestionnaires de cas sont surmenés, qu'ils doivent s'occuper d'un trop grand nombre de dossiers. Ils sont responsables d'un grand nombre de membres dont le dossier est probablement moins difficile que le mien. Parfois, je ne sais plus où j'en suis avec tout cela, et il suffit que j'oublie de signer une seule fois pour qu'on arrête mes prestations dans les jours suivants. Même si j'essaie de tout faire parfaitement en ce qui concerne mes services de réadaptation professionnelle, on ne cesse de me citer la loi ou de me dire: « Vous devez faire cela », « Vous devez respecter les délais », « Vous devez continuer de faire ceci », ou « Malheureusement, vous n'avez pas fait cela ». Le fait est qu'un très lourd fardeau incombe aux vétérans. En gros, je dois m'y retrouver seul dans les méandres du système. Je n'ai pas l'impression que mon gestionnaire de cas m'aide beaucoup. J'ai presque le sentiment qu'il travaille contre moi. Il faut en tout temps que j'aie diverses composantes et sous-composantes du programme sauvegardées dans mon téléphone. De cette façon, si jamais je suis en désaccord avec mon gestionnaire de cas, je peux consulter le programme pour savoir exactement à quoi j'ai droit.
    Le problème, c'est que c'est moi qui dois lui dire: « Est-ce que j'ai droit à cela? Est-ce que cela fait partie de mes droits? Est-ce que je peux me procurer cela ou ceci? » Jamais un gestionnaire de cas ne prend l'initiative de dire: « Bonjour, Mark. Voici la liste des services auxquels vous êtes admissible. » Ça ne m'est jamais arrivé. La plupart du temps, c'est moi qui dois faire mes propres recherches, puis je dois me démener pour obtenir ces services. C'est éreintant. J'ai l'impression que c'est ce qui décourage bon nombre d'anciens combattants. Le système les démoralise, puis, au bout du compte, ils disparaissent dans la nature. Voilà pourquoi je me dis qu'il y a probablement beaucoup de personnes qui tombent entre les mailles du filet.

  (1145)  

    Mark, quelles seraient vos recommandations pour l'avenir, autant en ce qui vous concerne que pour les autres réservistes et militaires qui se retrouveraient dans votre situation? Peut-être pourriez-vous approfondir votre pensée.
    Je crois qu'il faut repenser le système de gestion des cas. Je crois qu'il faudrait mettre un peu plus l'accent sur les cas difficiles. Je me dis qu'il faut que la culture au ministère des Anciens Combattants change; il faut que le soutien vienne de l'organisation, au lieu qu'une personne vous dise « Vous n'êtes admissible à aucun avantage parce que vous avez oublié un détail ». Les restrictions sont bien trop immuables. Le fait qu'une signature oubliée ou quelque chose du genre puisse entraîner l'arrêt de toutes mes prestations financières, me laissant, pour ainsi dire, sur la paille, est beaucoup trop strict et contraignant. C'est une source de nombreux problèmes. J'ai été très troublé lorsque j'ai reçu cette lettre; je crois avoir téléphoné à tout le monde dans l'Ouest du Canada. Je ne me suis pas gêné pour interrompre des réunions, parce que c'est ce que je devais faire pour veiller à ce que mes prestations continuent. Donc, oui, je crois qu'un changement culturel est nécessaire.
    Merci. Merci de votre témoignage. J'ai espoir que ce que vous avez dit portera des fruits.
    Je l'espère bien.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Thorne.
    Monsieur Thorne, merci du travail que vous accomplissez pour les vétérans canadiens. C'est vraiment un travail remarquable.
    Vous offrez des programmes axés sur quatre volets différents: la connexion, la communication, l'autosuffisance et la carrière. Certains programmes donnent-ils de meilleurs résultats que d'autres?
    Je me demande si vous n'êtes pas en train de confondre le Veterans Transition Network et un autre organisme de transition, peut-être Transition vers la communauté.
    D'accord.
    Nous offrons un seul programme de transition pour les vétérans. Le programme est axé sur différents thèmes importants, mais il n'y a pas plusieurs programmes. Tout ce que nous faisons est compris dans ce seul programme.
    Peut-être pourriez-vous résumer comment nous pourrions soutenir davantage votre organisation. Comment le gouvernement fédéral peut-il vous aider en matière de financement? Vous avez mentionné que les deux tiers de vos fonds proviennent de la collectivité. Peut-être pourriez-vous nous parler de cela.
    Oui, sans problème.
    À l'époque où l'organisme a été constitué en personne morale, nous avons établi un plan stratégique pour les cinq prochaines années. Ce plan est arrivé à échéance à la fin de l'année dernière, et nous avons donc mis en oeuvre un nouveau plan stratégique. Parallèlement, nous avons décidé qu'un des objectifs principaux de l'organisation serait de toujours tirer son financement des Canadiens, des entreprises canadiennes et du secteur caritatif. C'est écrit dans notre énoncé de mission: prendre soin des gens qui ont servi leur pays n'est pas seulement la responsabilité du gouvernement, c'est aussi la responsabilité des Canadiens. Nous ne comptons pas du tout changer notre façon de faire.
    Je trouve excellent que le ministère des Anciens Combattants veuille mettre des fonds à notre disposition. Cela nous a aidés énormément à prendre de l'importance d'un bout à l'autre du Canada, mais faire des affaires avec un fournisseur de services comme Anciens Combattants Canada comprend son lot de difficultés. C'est très similaire à ce que Mark a mentionné relativement à l'accessibilité.
    Nous savons que du soutien est offert. J'ai travaillé précédemment avec un grand nombre de gestionnaires de cas qui étaient excellents, bien intentionnés et qui avaient à coeur le bien-être de leurs clients, mais il demeure que leurs efforts sont paralysés par un cadre bureaucratique très rigide où il faut suivre un long processus avant qu'une personne obtienne l'autorisation préalable de participer à notre programme.
    Il y a deux semaines, un ancien combattant nous a téléphoné parce qu'il voulait adhérer à notre programme qui commençait deux semaines plus tard. Il en a parlé à son gestionnaire de cas, qui lui a répondu, en gros, qu'il était impossible d'obtenir une autorisation préalable dans un délai de deux semaines, et qu'il ne pouvait pas participer au programme, à son grand désarroi. Nous lui avons retéléphoné pour lui dire que nous allions l'inscrire au programme, peu importe ce qui allait se passer, peu importe que l'argent vienne d'Anciens Combattants Canada ou qu'il provienne des fonds recueillis auprès du public.
    Environ 50 % — ou peut-être un peu moins — des vétérans qui présentent une demande à Anciens Combattants Canada pour couvrir le coût de notre programme ne réussissent pas à obtenir une autorisation à temps pour payer leur inscription. Cela nous cause énormément de difficultés.
    Lorsqu'un ancien combattant s'inscrit à notre programme, nous faisons tout en notre possible pour que sa participation soit financée par le ministère des Anciens Combattants, parce qu'ainsi, l'argent que nous recueillons auprès de la collectivité servira à financer davantage de programmes et à payer la participation des personnes qui n'ont pas cherché à présenter une demande à Anciens Combattants Canada, lesquelles comptent — je me répète — pour environ les deux tiers de nos clients des Forces armées.
    Si vous voulez soutenir notre organisation, vous pourriez voir s'il y aurait une façon de simplifier le processus d'autorisation afin que les clients qui sont admissibles à un financement l'obtiennent réellement. Cela nous aiderait grandement à élargir nos activités de sensibilisation et à utiliser davantage de fonds de la collectivité pour ceux qui n'ont pas communiqué avec Anciens Combattants Canada, parce qu'il y en a beaucoup. Notre capacité d'aider les Anciens Combattants diminue chaque fois qu'un vétéran n'obtient pas son autorisation.

  (1150)  

    Monsieur Samson, vous avez six minutes.
    Merci à tous de nous avoir présenté vos exposés.
    L'objectif de notre comité est bien sûr de cerner les véritables obstacles à la transition. Nous devons veiller à ce que tout soit fait parfaitement.
    Mark, je veux vous remercier d'avoir servi notre pays. Je sais que vous entendez cela souvent, mais je tiens à dire sincèrement que cela a été extrêmement important pour nous d'entendre directement votre histoire. Je vous suis reconnaissant d'être venu ici pour nous raconter votre histoire. C'est d'une importance primordiale, et j'ai bon espoir que nous réussirons à améliorer les choses grâce à vous.
    Je veux vous poser des questions précises. Peut-être pourrez-vous nous éclairer.
    À propos des délais, quels devraient être les délais, selon vous, dans lesquels il faudrait prendre une décision? Devrait-il même y avoir des délais, et si oui, lesquels?
    Je déteste les délais fixes. Je crois que le facteur le plus important qui devrait être pris en considération, c'est le moment où un ancien combattant est prêt à faire la transition et à suivre un programme de réadaptation professionnelle. Les anciens combattants qui ne sont pas prêts ne peuvent pas réussir. La réalité est tout autre ici. Les Forces armées, cela ressemble beaucoup à l'école, mais une école beaucoup plus stricte, différente et difficile. Elle vous prépare très bien à suivre des cours, parce que les Forces armées ont un ensemble de protocoles en place pour veiller à ce que vous appreniez et accordiez de l'importance à votre éducation. C'est nécessaire pour réussir dans les Forces armées.
    Je me rappelle que la transition a été plutôt difficile dans les premiers temps, en ce qui concerne l'école. J'ai vécu des choses très intenses dans ma jeunesse, contrairement aux personnes autour de moi, et c'est pour cette raison que la décision doit venir d'Anciens Combattants, selon moi. Peu importe ce que sont les délais actuels, ils doivent être prolongés. Il faut que l'ancien combattant soit prêt avant toute chose.
    En ce qui concerne la personne qui doit déterminer tout cela, je ne veux pas dire qu'il faut que ce soit les anciens combattants, et je ne sais pas comment nous pourrions procéder de ce côté.
    Si vous trouvez une réponse pour nous, vous pouvez nous la faire parvenir. J'aimerais connaître votre avis sur le sujet.
    Il ne devrait y avoir aucune restriction en ce qui concerne le temps. Dès qu'un ancien combattant est prêt à se lancer et à suivre une formation professionnelle — que ce soit immédiatement ou une ou deux années après sa libération ou même plus tard —, alors c'est à ce moment qu'il devrait être admissible au programme. Il devrait pouvoir participer au programme jusqu'à la fin de sa vie. Il ne devrait pas y avoir de délais.
    J'ai de la difficulté à comprendre pourquoi vous devez donner la même information plus d'une fois. Y a-t-il un problème avec notre système de suivi des dossiers? De nos jours, je m'attendrais à ce que nous soyons des experts à ce chapitre, et pourtant, nous ne savons rien de précis à propos des dossiers, aucun détail, et cela depuis des années...
    Je crois que le principal problème avec les prestations, c'est qu'il faut recommencer du tout début dès qu'il y a une nouvelle prestation; comme si l'invalidité venait tout juste d'apparaître. Par exemple, disons que j'ai besoin de quelque chose de nouveau. Je vais devoir recommencer à la case départ encore une fois et dresser à nouveau la longue liste de toutes mes blessures. Oui, c'est arrivé dans une zone de service spécial, c'est arrivé à l'étranger, oui, c'est arrivé...
    C’est un fardeau extrêmement lourd. À un moment donné, je devais faire le point sur ma situation tous les six mois, ce qui comprenait — vous l’aurez deviné — de fournir un billet de mon médecin pour confirmer que je n’avais plus de jambes. On m’a assuré que cela ne serait plus nécessaire pour le reste de ma réadaptation professionnelle, mais j’anticipe le moment où je vais recevoir un avis m’indiquant que je dois retourner voir mon médecin pour confirmer que je n’ai plus de pieds.
    Quand j'ai un rendez-vous médical, mon médecin a déjà son ordinateur ouvert, et elle peut consulter l'ensemble de mon dossier médical, depuis mon tout premier rendez-vous.
    Tout cela devrait être fait automatiquement. Il devrait y avoir une liste de vérification ou une case ou quelque chose du genre dans le formulaire pour qu'on puisse dire: « Écoutez, voilà le problème, plus besoin d'en parler. » Le système devrait être en mesure de simplement retrouver cela.
    Oui, c'est aussi ce que j'aurais cru.
    Bien. Nous sommes en train de cerner le problème, et c'est un problème de taille.
    Au sujet de la sensibilisation et de l'accessibilité relativement aux avantages auxquels vous avez droit, avez-vous eu l'impression que l'information vous a été transmise dès le début, que quelqu'un s'est empressé de venir vous voir pour vous expliquer les choses ou...?
    Non, on m'a laissé dans l'ombre. À l'époque de ma première mission en Afghanistan, j'étais admissible aux prestations de retraite traditionnelles. Si j'avais été blessé pendant ma première rotation en Afghanistan, j'aurais eu droit à un ensemble d'avantages différents.
    Dépendamment du moment où un ancien combattant a été blessé pendant une mission en Afghanistan, il est admissible à différents avantages et différents régimes d'indemnisation. Cela a une incidence sur la suite des choses.

  (1155)  

    D'accord. Si vous étiez responsable d'Anciens Combattants Canada, que feriez-vous pour corriger la situation?
    La réponse risque d'être longue, et je ne sais pas si j'aurais assez de temps, vu qu'il nous reste une minute ou deux.
    Pourriez-vous, s'il vous plaît, nous faire parvenir toute l'information pertinente après la séance afin que nous puissions prendre cela en considération pour notre rapport?
    Je le ferai avec plaisir, absolument. Vous pouvez compter là-dessus.
    Je vais me dépêcher de poser ma dernière question... je ne veux pas dire que le ministère de la Défense nationale et ACC devraient être fusionnés, mais en ce qui concerne la transition, je crois de plus en plus que les organisations devraient travailler comme une entité. Qu'en pensez-vous?
    Je crois que ce serait une excellente idée. Je n’y vois pas d’inconvénient. Personnellement, je préférerais qu’un membre des forces armées s’occupe de mon cas plutôt qu’un gestionnaire de cas du ministère des Anciens Combattants. Comprenez-moi bien, j’ai déjà eu des gestionnaires de cas dans les forces armées — il n’y en a pas seulement à Anciens Combattants Canada —, et ce n’était pas parfait non plus.
    Merci beaucoup, Mark. Je vous suis reconnaissant de votre témoignage, et j'attends avec impatience l'information supplémentaire que vous allez nous envoyer.
    Merci.
    Je vais devoir resserrer légèrement le temps de parole, monsieur Eyolfson, sinon nous allons manquer de temps. Vous disposez de quatre minutes et demie cette fois.
    D'accord. Merci, monsieur le président.
    Monsieur Fuchko, comme vous l'avez dit, vous avez suffisamment entendu des gens vous remercier de votre service. Je ne vais donc pas recommencer, parce que vous l'avez dit, cela vous est peu utile à présent.
    Je veux toutefois dire, en ma qualité de député, que je suis désolé. Je suis désolé que ce genre de choses se produisent. L’une des raisons pour lesquelles je siège au Comité — car j’ai demandé d’être membre du Comité — c'est que j’ai rencontré beaucoup d’anciens combattants au départ qui m’ont raconté leur histoire, même si les leurs n’étaient pas aussi bouleversantes que celles que j’ai entendues ici.
    Les histoires que nous entendons ici portent à réflexion, mais plus encore, elles choquent. Nous devons faire mieux. C'est pourquoi c'est un honneur pour moi de siéger au Comité: je peux ainsi faire ce qui est en mon pouvoir pour aider les gens dans votre situation.
    Il y a une question que je voulais poser, à cause de ma formation de médecin. Je me suis fait une note mentale. J'ai pratiqué la médecine pendant 20 ans avant de devenir député. Vous avez dit avoir besoin d'une opération à la hanche, mais que votre chirurgie a été remise à plus tard. Est-ce exact? Quel est...
    Oui, j'ai...
    Quel est le mécanisme utilisé qui fait que votre opération ait été reportée ou est-ce plutôt parce qu'il y a un engorgement du système de santé?
    L’explosion a causé des blessures graves à mes deux hanches. Je m’en suis plaint énormément aux Services de santé des Forces canadiennes, et on a pour ainsi dire mis mon dossier en suspens. J’ai fini par quitter les forces armées et j’ai commencé à être suivi par une équipe médicale civile. C’est elle qui a découvert le problème. On m’a aiguillé vers un chirurgien orthopédiste et je subirai en mai prochain une intervention extrêmement délicate.
    Voilà où j’en suis. Dix ans après avoir été blessé, j’ai encore besoin d’énormément de soins, et il me semble tout simplement absurde qu’on abandonne mon dossier sans bonne raison et qu’on m’oublie. Je vais avoir besoin de soins pour le restant de mes jours, à un niveau bien différent des autres anciens combattants. Je ne sais pas si c’est à cause du système médical des Forces canadiennes ou parce que ma santé s’est détériorée avec le temps… J’imagine qu’il y a de nombreux facteurs en cause.
    Qu'en était-il du ministère des Anciens Combattants? Je sais que dans les Forces canadiennes, les soins médicaux sont fournis par les forces armées. Une fois que vous êtes pris en charge par le ministère des Anciens Combattants, les soins médicaux sont fournis par la province concernée.
    Vous avez dit que vous vivez à Calgary présentement. Quand on a conclu que vous aviez besoin d'être opéré — je tiens pour acquis que cela émanait de votre médecin traitant et du chirurgien orthopédiste —, le ministère des Anciens Combattants a-t-il ralenti le processus d'une façon ou d'une autre? Votre chirurgien orthopédiste ou votre médecin de famille ont-ils eu besoin d'information difficile à obtenir?
    Entre autres choses, j'ai eu énormément de difficulté à obtenir mon dossier médical. Il a fallu vraiment beaucoup de temps pour que mon physiatre et les autres médecins l'obtiennent. J'ai fini par l'avoir, j'ai fait le suivi et j'ai fait ce qu'il fallait relativement à la continuité des soins. Le processus s'est poursuivi jusqu'à ce qu'on en arrive là. J'ai eu beaucoup de chance. L'équipe médicale qui s'occupait de mon dossier en Alberta voulait à tout prix soulager l'agonie dont je souffrais à cause de mes hanches. Les choses ont bougé plutôt rapidement quand j'ai décidé que c'était quelque chose dont j'avais besoin immédiatement.
    Je ne peux pas vraiment dire qu'Anciens Combattants Canada a ralenti ce processus, pas plus que le système de santé provincial. Dès que le problème a été trouvé, les choses se font faites vite.
    Merci.
    D’après mon expérience en tant que médecin, je peux vous dire que l’une des choses qui ont un impact sur les anciens combattants — à l’extérieur du ministère des Anciens Combattants — ce sont nos systèmes de santé provinciaux, tout simplement. C'est comme si nous avions choisi la pire façon possible de mettre en oeuvre les dossiers médicaux et électroniques. J’ai travaillé dans un important centre de traumatologie au Manitoba, et les dossiers des patients étaient encore rédigés à la main. Les patients recevant des soins de longue durée pouvaient avoir une pile de dossiers. Il arrivait parfois qu’on ait jusqu’à sept chemises remplies de documents. Je réalise que c’est le devoir des provinces d’aider à ce chapitre. Elles ne semblent pas comprendre que ce problème a une incidence sur nos anciens combattants. Je n’ai plus assez de temps pour une autre question, mais je veux encore une fois dire que je suis désolé et que nous nous engageons à réparer ce tort.

  (1200)  

    Monsieur Kitchen.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous d'être ici. Merci de vos témoignages.
    Caporal, je vais reprendre un point que mon collègue de l'autre côté a soulevé. Serait-ce préférable que les responsabilités du ministère des Anciens Combattants soient fusionnées avec celles du ministère de la Défense nationale afin que vous soyez au courant de ce qui se passe pendant le processus? Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
    Personnellement, je crois que ce serait probablement bon et avantageux de faire les choses de cette façon, d’avoir un système global pour s’occuper des anciens combattants. Je crois surtout qu’il faut que ce soit d’autres anciens combattants ou membres des forces armées qui s’occupent d’eux. Malgré tout, le système de l’UISP est loin d’être parfait. On sait qu’il y a des lacunes de ce côté. J’espère qu’elles seront corrigées, et que les choses vont pouvoir continuer. Je crois, par-dessus tout, qu’il faut qu’il y ait des normes uniformes qui s’appliquent à tous. Je crois que ce serait avantageux, probablement, que ce soit les forces armées qui s’occupent du vétéran après sa transition. Encore une fois, l’essentiel…
    D'après ce que je comprends, vous voulez éliminer une bonne partie de la bureaucratie encombrante qui fait que vous devez sempiternellement fournir la même information. La protection des renseignements personnels semble également parfois être un obstacle. Si les choses se faisaient à l'intérieur du ministère, cela ne poserait pas autant de problèmes. Êtes-vous d'accord avec moi?
    Je n'ai pas vraiment vécu de problèmes par rapport à la communication des renseignements. Le problème, c'est que le ministère des Anciens Combattants a mon dossier au complet, et pourtant, je dois fournir de nouvelles preuves sur mon état chaque fois qu'il y a une nouvelle prestation ou quelque chose d'autre. Ce n'est pas que le ministère de la Défense nationale refuse de communiquer de l'information sur mon dossier médical au ministère des Anciens Combattants. C'est que le système d'ACC ne fait pas le suivi de mon dossier au complet. L'information n'est pas utilisée logiquement pour vérifier l'admissibilité à une autre prestation ou quelque chose du même genre.
    Je siège au Comité depuis des années, et les problèmes concernant la prestation des services sont aussi quelque chose que nous avons étudié. Nous avons fait deux ou trois fois des recommandations relativement à l’information dont un militaire a besoin dès le moment où il s’engage dans les forces armées. Tout au long de votre carrière, vous continuez de recevoir de l’information à propos des avantages auxquels vous êtes admissible si quelque chose se produit. Vous continuez de recevoir ce genre d’information à mesure que vous avancez dans votre carrière. Nous avons déjà, dans le passé, fait des recommandations en ce sens, pour que ce genre de services informatifs soient fournis.
    Selon vous, est-ce avantageux ou est-ce plutôt un inconvénient?
    Je peux voir la valeur de ce genre de service. Quand j'ai été assermenté comme membre des Forces armées canadiennes, il y avait un tout autre ensemble d'avantages, et j'en étais au courant. Mais voilà, en 2016, la Nouvelle Charte des anciens combattants a été adoptée, et on a modifié, sans mon consentement, arbitrairement, les conditions de service.
    La séance d’information sur la Nouvelle Charte des anciens combattants était plutôt superficielle. On m’a dit que la Charte des anciens combattants avait été remplacée par quelque chose de mieux. Voilà toute l’information à laquelle j’ai eu droit. Je ne me souviens d’aucune autre séance d’information plus explicite. Je ne savais rien à propos de cette charte. Il y a des gens qui ont été blessés en 2006, et j’ai cru que j’allais recevoir le même ensemble d’avantages en 2008. À mon grand désarroi, ce n’était pas le cas, et je n’étais pas au courant.
    Le problème, j’imagine, c'est qu’on se sent invincible quand on est jeune. Vous ne croyez pas que vous pouvez être blessé. Les séances d’information sur les avantages auxquels vous avez droit ne sont pas vraiment ce qu’il y a de plus amusant ou d’excitant à faire dans les forces armées. Je ne me souviens pas d'avoir assisté à une séance d’information particulièrement détaillée ou exhaustive, et si c’est arrivé, je n’y ai pas prêté attention. Voilà un des problèmes, selon moi. J’imagine que cela tient aux gens qui sont là et à la façon dont l’information est présentée.
    Merci.
    Madame Spinks, je viens d'une famille de militaires. À sa retraite, mon père était major-général, et il a pris sa retraite en fonction du système dont vous avez parlé en raison de son âge. Il savait qu'il prenait sa retraite.
    Mon frère a servi en Afghanistan durant l'avant-dernière rotation dans ce pays. Moi, j'ai grandi dans ce milieu-là. Je comprends bien ces choses. Je suis ravi d'entendre que vous les comprenez aussi, n'ayant pas fait partie d'une famille de militaires.
    Une bonne partie de ce que vous avez dit est très pertinent, parce que, souvent, les familles sont laissées pour compte, et on doit les inclure. À mon avis, les huit points que vous avez présentés sont énormes, parce qu'ils décortiquent tous les aspects en cause. La chose la plus importante, c'est cette assimilation, comme vous avez dit à la fin, pour les familles et les vétérans, à mesure qu'ils s'intègrent à la vie civile. C'est un grand défi à saisir pour le public canadien.
    Si nous examinons des obstacles à cette assimilation, et je crois que c'en est un important, avez-vous des suggestions qui pourraient nous aider? Je vous prie d'être brève, parce que je vais manquer de temps.

  (1205)  

    Après avoir écouté des centaines d'histoires de famille, je dirais qu'il y a trois choses. La première, c'est qu'il faut assurément associer le recrutement et la retraite. Comme Mark l'a dit, les jeunes ne pensent pas à la retraite. Il y a les trois « i »: je suis immortel, je suis infertile et je suis invincible. C'est difficile de les amener à réfléchir à la retraite, mais extrêmement important de le faire.
    La deuxième chose, c'est qu'ACC et le gouvernement ne peuvent le faire seuls. Nous avons besoin de meilleurs partenariats avec la collectivité et les fournisseurs de services communautaires par rapport à quatre aspects: nous devons accroître la sensibilisation; renforcer les compétences; établir une capacité organisationnelle, donc une compétence professionnelle, une capacité organisationnelle; et mettre sur pied des collectivités qui reconnaissent, appuient, soutiennent et encouragent les familles de militaires et de vétérans à s'intégrer. Cela doit venir de la collectivité.
    La troisième chose, et cela revient à ce dont Mark parlait et aussi à ce qu'Oliver disait par rapport à la culture, les gestionnaires de cas doivent changer leur rôle actuel de gardien pour jouer un nouveau rôle de navigateur et de facilitateur.
    Merci.
    Nous allons terminer par M. Fraser, pour quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup à vous tous d'être ici et de nous aider à comprendre un peu mieux certaines des situations, de sorte que nous puissions formuler des recommandations afin d'essayer de faciliter un peu plus la transition entre les Forces canadiennes et la vie d'ancien combattant. Je comprends qu'il y a des obstacles importants à la transition, et vous en avez mis certains en lumière aujourd'hui.
    Mark, je vais commencer par vous. J'aimerais juste comprendre une chose. Je sais que quelques autres questions ont été posées à ce sujet, mais c'est tout à fait inacceptable. Je suis complètement d'accord avec vous pour dire que le fait de devoir prouver sans cesse votre blessure, lorsqu'elle est si évidente, est tout à fait inacceptable.
    Selon ce que je comprends, dites-vous que cela se produit à Anciens Combattants? Cela continue d'arriver lorsque vous communiquez avec le ministère pour obtenir des approbations différentes ou pour quelque chose de nouveau. Est-ce que cela se produit à Anciens Combattants?
    Oui, monsieur. Ce qui se passe, c'est que chaque fois qu'il y a une nouvelle prestation ou une date d'expiration, un examen de mon dossier, je dois aller voir mon médecin et obtenir ce bout de papier; le processus est assez lourd. Mon médecin doit agrafer chaque élément d'information qu'il possède à mon sujet sur mon dossier. Il doit physiquement écrire que je n'ai plus mes jambes gauche et droite. Il doit donner son autorisation, puis je dois présenter cela à des fins d'examen par une personne qui n'est pas un expert médical, la plupart du temps.
    Tout cela au sein de la même organisation.
    Oui, c'est exact.
    C'est inacceptable. Si je comprends bien, avec la pension à vie, il ne sera pas nécessaire de présenter quelque autre demande que ce soit. Dans son ensemble, pour toute autre prestation, une fois que cette décision a été prise, c'est absolument inacceptable qu'on vous redemande de présenter une demande. Je suis heureux que vous ayez clarifié cela.
    Vous avez soulevé la question du délai. Si vous allez suivre un programme de réadaptation professionnelle ou si vous voulez retourner à l'école ou quoi que ce soit, le délai est très court, et le vétéran ou le membre en voie d'être libéré peut ne pas être prêt à le faire. C'est un excellent point.
    En ce qui concerne la nouvelle prestation pour les études et la formation que le gouvernement a annoncée, qui peut aller jusqu'à 80 000 $ pour les prestations servant aux études et à la formation ou à la formation professionnelle, le délai est de jusqu'à 10 ans; cela vise à aborder, je pense, la question que vous avez soulevée, soit que certaines personnes ne sont pas prêtes.
    J'aimerais obtenir votre avis sur la question. Je sais que vous avez répondu plus tôt à une question sur le fait qu'il ne devrait peut-être pas y avoir de délai, mais pensez-vous à tout le moins qu'il s'agit d'une amélioration?
    Je pense que c'est un pas dans la bonne direction. Je ne sais vraiment pas assez de choses au sujet de la nouvelle prestation pour vraiment me prononcer abondamment sur celle-ci, parce que le programme que j'utilise est offert par l'intermédiaire des services de réadaptation professionnelle d'Anciens Combattants.

  (1210)  

    D'accord.
    La façon dont on m'a expliqué la chose, c'est que j'avais cette fenêtre très étroite, parce que cette nouvelle prestation n'était pas encore accessible. Si je voulais continuer de recevoir un soutien financier et toute forme de soutien, c'était essentiellement la seule occasion que j'avais de profiter de cette fenêtre et d'obtenir un certain type d'éducation, du recyclage et des compétences professionnelles.
    D'accord, merci.
    Rapidement, en ce qui concerne le point que vous avez soulevé par rapport au fait de communiquer avec un gestionnaire de cas ou de traiter avec Anciens Combattants et de presque devoir suggérer le type de prestations auquel vous pourriez avoir droit, je suis tout à fait d'accord. Je sais que notre comité a entendu d'autres témoignages similaires, et nous avons recommandé l'ajout d'un service de type concierge, ou un navigateur, comme on l'a mentionné plus tôt, pour réellement vous aider à définir les options et vous renseigner sur tout. Je pense tout à fait que vous avez bien fait valoir votre point, et je vous en remercie.
    Permettez-moi de me tourner vers Oliver, si je le peux, pour un moment.
    Grâce à la nouvelle prestation pour les études et la formation qui peut aller jusqu'à 80 000 $ — j'imagine qu'elle porte sur 10 ans et que des personnes différentes peuvent satisfaire aux critères d'admissibilité — pensez-vous qu'il est possible que le travail que vous faites permette à un vétéran d'être admissible au financement par l'intermédiaire de ce programme et ainsi d'accéder à vos services? Que pensez-vous de cette possibilité?
    Si j'ai bien compris pour l'instant, il n'y aurait pas de chevauchement entre la prestation pour les études et la formation et notre programme. Certainement, si cette possibilité existait, cela serait formidable. Si je comprends bien, cela concerne vraiment les études postsecondaires, la formation dans les métiers, quelque chose de ce genre-là. Je pense que notre programme est considéré davantage comme un programme de transition, peut-être même un programme de réadaptation. Nous misons bel et bien sur des carrières vers la troisième phase de notre programme. Cela se fait davantage dans l'optique d'une transition professionnelle, et particulièrement au sujet de cet aspect d'identité. Certes, si c'est une autre avenue de financement disponible, je ne vais pas la refuser.
    D'accord.
    Oui, c'est quelque chose que nous serions très intéressés à examiner.
    D'accord, merci beaucoup.
    Merci.
    Je suis désolé, nous manquons de temps aujourd'hui, mais au nom du Comité, Mark et Oliver, j'aimerais vous remercier des services que vous avez offerts et du service continu que vous continuez d'offrir à nos vétérans dans la collectivité.
    Nora, j'aimerais vous remercier au nom du Comité.
    De plus, Mark, je sais que M. Samson avait quelques questions auxquelles il voulait une réponse. Si vous avez d'autres réponses, prière de les fournir à la greffière, et celle-ci les distribuera à l'ensemble du Comité.
    Très rapidement, Mark, en ce qui concerne le formulaire qu'on demande à votre médecin de remplir... Si vous étiez en mesure de communiquer un exemplaire de ce formulaire ou les dates que vous avez à la greffière, je crois que certains membres du Comité aimeraient probablement voir cela.
    Absolument. Je vais devoir retourner voir mon ancien médecin, que j'ai cessé de consulter depuis, mais je suis sûr que je peux localiser ce formulaire assez rapidement.
    Si vous pouviez le faire, je pense que nous sommes tous curieux à ce propos, et cela nous aiderait.
    Nous allons suspendre la séance pendant une minute pour faire entrer le nouveau groupe de témoins, puis nous reviendrons dans quelques minutes.
    Encore une fois, merci.

  (1210)  


  (1215)  

    Nous reprenons nos travaux. Je tiens seulement à mentionner que M. Jody Mitic n'a pas été en mesure de se joindre à nous aujourd'hui. Il n'est pas dans son assiette. Nous le recevrons à un autre moment, si le temps le permet.
    Nous allons commencer. Nous accueillons Debbie Lowther, présidente et cofondatrice de VETS Canada, et Noel Lipana, lieutenant-colonel à la retraite, doctorant en travail social à la University of Southern California.
    Nous allons commencer par votre témoignage, Debbie. Merci.

  (1220)  

    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs. J'ai le plaisir de comparaître de nouveau devant vous. Merci de l'invitation.
    Je m'appelle Debbie Lowther et je suis présidente et cofondatrice de Veterans Emergency Transition Services, ou VETS Canada. Je suis aussi l'épouse d'un vétéran des Forces armées canadiennes ayant 15 ans de métier, un homme qui a fièrement servi son pays pendant 15 ans avant que sa carrière soit interrompue en raison de blessures physiques et psychologiques. On lui a diagnostiqué un trouble de stress post-traumatique en 2002, et il a été libéré en 2005. Ensemble, nous avons fondé VETS Canada en 2010.
    VETS Canada est un organisme de bienfaisance enregistré dirigé par des bénévoles qui a pour but de fournir un soutien immédiat sur le terrain à des anciens combattants en crise, à risque d'itinérance ou déjà itinérants. Nous avons plus de 800 bénévoles qui travaillent sans relâche partout au pays et qui, à ce jour, ont répondu à plus de 3 000 demandes d'aide. En 2014, nous avons obtenu un contrat auprès d'Anciens Combattants Canada et sommes devenus leur fournisseur de services dans le domaine de la sensibilisation auprès de vétérans en crise.
    Notre bassin de bénévoles comprend des membres toujours actifs et des vétérans des Forces armées canadiennes et de la GRC, qui sont équipés pour fournir du soutien par les pairs aux vétérans que nous aidons. Nous avons appris que le soutien par les pairs est un élément essentiel d'une transition réussie, pour passer non seulement d'une situation de crise à une vie plus stable, mais aussi du service militaire à la vie civile.
    Au cours de la dernière année, notre organisation a mené un projet de recherche informel dans le cadre duquel nous avons posé une série de questions à un certain nombre d'anciens combattants que nous avons aidés. Nous avons demandé quelles étaient les raisons qui, à leur avis, avaient contribué à la situation de crise suscitant le besoin qu'on les aide. Nous avons appris que les trois principales raisons étaient l'instabilité financière, des préoccupations, tant physiques que mentales, en matière de santé et l'absence de soutien social. Ce qui nous a surpris, c'est que, massivement, un plus grand nombre de gens avaient indiqué l'absence d'un réseau de soutien social comme étant leur plus grand obstacle. Un ancien combattant a formulé un commentaire qui m'a interpellée. Il a affirmé que, lorsqu'il était en service, il avait l'impression d'être membre d'une famille; puis, lorsqu'il a retiré son uniforme, il est devenu orphelin.
    Compte tenu du grand nombre de vétérans que nous avons eu le privilège d'aider et du grand nombre de vétérans dans notre de bassin de bénévoles, nous sommes dans une position privilégiée pour entendre de nombreuses histoires de transition entre la vie de militaire et la vie civile. Une chose que nous entendons souvent dire, c'est que les membres n'étaient pas prêts à être libérés, que ce soit en raison d'une blessure qui a mis fin à leur carrière et les a laissés mentalement non préparés à leur libération ou parce qu'ils n'étaient peut-être pas financièrement préparés pour la longue période d'attente avant de recevoir leur pension; et ils n'étaient certainement pas préparés pour traiter avec Anciens Combattants, ce qui peut être un processus assez lourd.
    Depuis longtemps maintenant, nous parlons d'assurer une transition harmonieuse et de combler l'écart. Même si des améliorations ont été apportées, il reste encore beaucoup de chemin à faire. Nous croyons, comme d'autres qui ont comparu devant le Comité avant moi, qu'un membre ne devrait pas être libéré avant qu'il soit prêt. Tous les documents devraient être en règle de manière à ce que les membres reçoivent leur pension en temps opportun. Ils devraient avoir établi le contact avec Anciens Combattants, et les demandes de prestations d'ACC ou du RARM devraient être remplies. Même quelque chose d'aussi simple que de trouver un médecin de famille serait une bonne chose à instaurer.
    Même si le mandat de notre organisation est d'aider les anciens combattants, nous recevons parfois des appels de membres toujours actifs qui éprouvent des difficultés. Certains vont communiquer avec nous en disant qu'ils seront bientôt libérés et qu'ils savent qu'ils auront besoin de notre aide à ce moment-là. Si ces membres se trouvent dans une situation où ils ont besoin de notre aide, ils ne devraient certainement pas être libérés.
    En avril de l'an passé, cinq membres en service ont communiqué avec nous pour obtenir de l'aide; un était itinérant — il couchait chez des connaissances et était sur le point d'être libéré —... un membre actif des Forces armées canadiennes qui était itinérant. Ce n'est pas acceptable, mais ce qui n'est pas non plus acceptable, qui est encore plus inacceptable, c'est qu'il était sur le point de sortir. La transition de ce membre était déjà vouée à l'échec.
    Le service dans les Forces armées canadiennes n'est pas seulement une carrière; c'est une culture unique. Lorsque des membres retirent leur uniforme, ils composent avec la perte d'identité et manquent de but précis. Nous avons aidé de nombreux vétérans qui ont réussi à obtenir un emploi civil au moment de leur libération, mais qui n'ont pas réussi à le conserver, car ils avaient des difficultés à s'adapter à des environnements moins structurés.
    Nous déployons beaucoup d'efforts et de ressources pour former nos hommes et nos femmes qui s'enrôlent dans l'armée, dont la plupart viennent juste d'entrer dans l'âge adulte. Ils subissent une formation rigoureuse, où on leur montre à devenir des soldats, des marins, des aviateurs ou des aviatrices. On leur enseigne à se fier à la personne qui est à leur gauche ou à leur droite. On leur dit quoi porter et quand manger, où être et quand y être. On les forme pour qu'ils suivent les ordres. À la fin de leur carrière, ne devrions-nous pas déployer tout autant d'efforts pour les aider à intégrer la vie civile... faute d'un meilleur terme, peut-être prévoir un camp d'entraînement à la sortie? Nous connaissons la valeur du soutien par les pairs, et les vétérans nous ont dit que le soutien social est important. Peut-être que les membres en voie d'être libérés devraient être associés à un pair ou à un mentor, à quelqu'un qui a déjà fait la transition, qui peut fournir ce soutien et cette orientation.
    De nombreux vétérans réussissent par eux-mêmes à effectuer la transition, et nombreux sont ceux qui ont besoin de soutien supplémentaire pour le faire.

  (1225)  

    À la fin de leur carrière, je crois que les anciens combattants veulent seulement sentir que leur service et leur sacrifice ont signifié quelque chose. Je pense que la moindre des choses que nous puissions faire pour eux pour leur montrer qu'ils ont compté, c'est de les soutenir à mesure qu'ils passent à la prochaine étape de leur vie.
    Merci, mesdames et messieurs. Je suis impatiente d'entendre vos questions.
    Le prochain témoin est M. Lipana. La parole est à vous.
    Merci, monsieur le président et mesdames et messieurs. Je suis reconnaissant d'avoir l'occasion de m'adresser à vous dans le cadre de cette enquête sur les obstacles à la transition.
    Si je laisse échapper l'une de mes expressions californiennes et que cela devient un obstacle, veuillez me l'indiquer clairement. Mon épouse me dit que je ne suis pas excellent pour percevoir les signaux sociaux. Je crois que cela fait de moi quelqu'un de passionnant, et elle me dit aussi que ce n'est pas la même chose que d'être amusant ou agréable.
    En janvier 2008, un collègue aviateur et moi-même revenions à pied d'une séance d'information concernant une mission à Kandahar lorsque nous avons rencontré sur une longue route de terre environ 300 de vos membres des FAC qui revenaient de l'aérodrome. Ayant pour seule arme vos guidons et votre drapeau canadien, vous étiez tout de même très formidables. La chose la plus puissante à propos de cette force, toutefois, c'était son silence. La chose n'aurait pas été remarquable s'ils avaient marché en formation, mais ils ne le faisaient pas. Ils marchaient plutôt simplement ensemble, près les uns des autres, avec une détermination indéniable.
    Mon collègue aviateur et moi-même avons interrompu notre propre conversation, parce que nous savions que la perte d'un camarade est la seule chose qui pourrait faire taire vos sens d'une façon si profonde et durable. Ces soldats revenaient d'une cérémonie d'adieu à l'aérodrome, où elles ont chargé les restes d'un de vos compatriotes à bord d'un avion pour leur rapatriement final.
    Je n'ai pas eu l'occasion de reconnaître officiellement et personnellement cette perte. Je sais que nos gouvernements ont eu cet échange, mais je suis ici pour vous dire, en tant que collègue aviateur et soldat, que mes compagnons d'armes et moi-même avons ressenti cette perte très profondément.
    Dans cette optique, c'est un privilège d'offrir mon point de vue, comme allié, ancien combattant et ancien combattant handicapé devenu travailleur social, et de participer à un effort conjoint visant à préserver la santé et l'âme d'hommes et de femmes qui sont encore avec nous ici aujourd'hui, peu importe le drapeau sous lequel nous avons servi.
    J'ai passé les 15 derniers mois de ma carrière de 20 ans dans la Force aérienne à faire de la réadaptation médicale et mentale pour des traumatismes cérébraux légers, des blessures au dos et au cou et des troubles de stress post-traumatique. En novembre 2016, la Force aérienne a annoncé ma retraite pour des raisons médicales, et, depuis, j'ai consacré mon temps à essayer de façonner intentionnellement l'héritage d'après-guerre des vétérans de l'OIF et de l'OEF. Je crois que cet héritage est un service continu offert à l'humanité, particulièrement aux groupes marginalisés, vu la sagesse que seules les personnes ayant subi une blessure physique ou invisible peuvent détenir. Je pense que le témoin précédent, Mark, en est un exemple parfait. J'ignore qui ne voudrait pas d'un homme ou d'une femme comme lui dans son équipe.
    Comme les membres du Comité le savent, l'affectation de ressources, l'éducation et la coordination de ces services sont compliquées. C'est comme d'essayer de souder du Jell-O. C'est frustrant, mais cela mérite nos meilleurs efforts concertés.
    En septembre dernier, l'ICRSMC m'a fait prendre conscience de l'abondance de talents que votre pays possède dans le milieu de la recherche et le milieu universitaire; vous comptez à coup sûr parmi les gens les plus gentils que j'ai eu l'occasion de côtoyer. Depuis, mon réseau a établi des relations de travail avec des membres à Ottawa, à Toronto et à Winnipeg. Ces efforts combinés continuent de s'exprimer dans ce silence pour les blessés et de lever le voile sur cette détermination que j'ai détectée chez les membres de vos FAC en 2008, à Kandahar, de façon à les aider dans le cadre de cette transition.
    Si le Comité le veut bien, à mon retour aux États-Unis, je peux vous fournir des réponses détaillées à toutes les questions que nous ne pouvons aborder dans la présente séance, particulièrement pour les équivalents américains de vos UISP, ACC et MDN. Mon étude du travail au centre d'innovation et de recherche sur les vétérans et les familles de militaires à l'University of Southern California m'a permis de me prévaloir de leur théorie sur la transition des militaires et des cinq éléments de l'effet collaboratif qui stimule un groupe de vétérans de Los Angeles. Toutefois, d'après mes recherches sommaires bon nombre des douleurs et des difficultés auxquelles vous faites tous face correspondent à celles auxquelles nous faisons également face.
    Je suis impatient de répondre à vos questions et je suis honoré d'être ici. Merci.
    Merci.
    Nous allons passer à des périodes de questions de quatre minutes qui nous amèneront directement à la fin.
    Nous allons commencer par Mme Wagantall.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous deux d'être ici. Je suis heureuse de vous revoir, Deb. Je pense qu'avec le travail incroyable que fait votre organisme de bienfaisance, et selon ce que j'entends dire concernant vos souhaits pour nos vétérans, vous ne seriez plus en affaires si nous pouvions faire ce que nous devrions faire. Est-ce exact?

  (1230)  

    Ce serait une bonne chose.
    Oui, ce serait une bonne chose.
    Merci énormément du rôle que vous jouez. Encore une fois, le fait que des anciens combattants aident d'autres anciens combattants et que des Canadiens s'unissent à eux pour faire ce qui doit être fait est remarquable.
    Maintenant, vous avez mentionné des membres actifs qui sont venus vous voir. Toutefois, ils ont déjà entamé le processus de libération, et ils font donc partie de l'environnement de l'UISP, n'est-ce pas?
    Oui.
    Donc, il y a quelques problèmes importants qui se posent pour certaines personnes, de toute évidence, à mesure qu'elles font la transition.
    J'ai aussi une question rapide en ce qui concerne l'amélioration des choses pour elles, pour qu'elles n'en arrivent pas au point où vous devez les aider.
    Nous avons entendu plus tôt le témoignage du Veterans Transition Network. Vous êtes probablement au courant des services qu'ils offrent.
    À votre avis, dans quelle mesure serait-il important que ce type de services devienne en réalité la priorité, puisque nos membres envisagent peut-être plus tôt de faire face à la décision de ne plus servir?
    Je pense qu'il est primordial que ces services soient offerts plus tôt. Je suis entièrement d'accord avec ce qu'Oliver a dit: il aimerait voir le Veterans Transition Network devenir un fournisseur de services pour le MDN ainsi que pour ACC. Je pense que ce serait une chose formidable.
    Je sais que, avec notre organisation, nous essayons aussi d'avoir accès au MDN pour le renseigner un peu plus sur les services que nous fournissons. Des membres sont libérés et semblent très bien aller. Puis, ils vivent des périodes difficiles et ont besoin de nous. Je pense qu'il est important que le MDN mette ses membres au courant des ressources qui sont offertes lorsque ceux-ci sont libérés.
    Vous avez mentionné que les raisons de leur crise ont tendance à être financières, médicales et sociales. Toutefois, les raisons sociales semblent figurer tout en haut de la liste.
    Tout à fait.
    Encore une fois, si nous nous occupions de cela davantage comme une priorité, dites-vous que cela aurait une incidence sur la façon dont ils sont en mesure d'aller de l'avant avec les autres?
    Je le crois. Comme je l'ai dit, je pense que, lorsque les membres sont libérés, ils perdent ce réseau de soutien social, particulièrement ceux qui sont libérés pour des raisons médicales. Ils se sentent un peu plus isolés. Les membres qui souffrent d'un TSPT, tout particulièrement, ont tendance à s'isoler. L'aspect social est extrêmement important, ainsi que le sentiment d'avoir un but dans la vie. De nombreux vétérans ne sont pas en mesure d'entreprendre une carrière secondaire lorsqu'ils sont libérés, mais ils ont tout de même besoin d'avoir un but précis. Ce pourrait être quelque chose d'aussi simple que de faire du bénévolat pour une organisation comme la nôtre. Bon nombre de nos bénévoles ont l'impression que c'est leur but. Cela leur offre une occasion de continuer de servir.
    Monsieur Lipana, le portrait que vous venez de brosser de nos soldats le long de cette route est puissant. Ils ont perdu un compatriote qui a protégé leurs arrières. Nous avons tendance à voir les blessures, je le crois, dans une fenêtre beaucoup trop petite. Seulement cela... Pourriez-vous expliquer un peu comment cela les touche sur le plan psychologique? Ils ne reviennent pas à la maison à ce moment-là, n'est-ce pas?
    Oui.
    Pourriez-vous nous expliquer juste un peu plus comment cela les touche maintenant et comment cela les touchera aussi lorsqu'ils feront face à un changement dans l'avenir?
    Nous appelons cela « la bombe à retardement ». Le problème avec le trouble de stress post-traumatique, c'est ce mot, « post », parce qu'il y a le moment de la blessure, qu'elle soit traumatique ou non, qui a sensiblement à voir avec l'expérience, ou la blessure morale, qui tient au lien entre les gens et la moralité de ce lien. Cette confiance entre une personne et l'institution, également, provoque un effet à retardement, parce que dans cette zone, elle n'a pas le temps de pleinement pleurer la perte et de gérer l'émotion qui en découle. Cette situation rend cette personne vulnérable dans un théâtre d'opérations de combat, et ce n'est pas bon.
    Nous devenons très bons pour ranger ces choses dans une boîte et les mettre de côté, les compartimenter afin d'exécuter la mission. Même au retour, cela a des effets négatifs. Ce que Mark disait par rapport au fait qu'un membre n'était peut-être pas prêt pour un programme particulier ni pour faire l'objet d'une intervention est tout à fait vrai. Le soutien social dont Debbie et vos autres témoins ont parlé, même M. Norris, le 1er février, le rassemblement de la famille et le fait d'examiner le membre de façon holistique et de savoir où il en est, est absolument capital.
    Ce avec quoi la personne doit composer, c'est la perte d'identité, la perte d'une personne, la perte de qui elle était essentiellement, parce que parfois l'architecture morale avec laquelle la personne va au combat ne résiste pas aux exigences de la guerre.

  (1235)  

    Merci.
    Monsieur Bratina, allez-y, pour quatre minutes.
    Monsieur Lipana, ma ville de Hamilton, en Ontario, a envoyé environ 400 soldats en Afghanistan, et si vous veniez à mon bureau, vous verriez le drapeau de la ville qui flottait à Kandahar, qui m'a été donné lorsque j'ai quitté le bureau à Hamilton pour venir ici. Je suis très fier du travail qu'ils ont fait. Certains ont perdu la vie là-bas; certains ont perdu la vie ici.
    Lorsque nous avons visité l'hôpital militaire Walter Reed — notre groupe y est allé — nous avons vu certaines des innovations qui étaient apportées au traitement. Lorsque nous entendons raconter les histoires terribles que nous avons entendues — nous parlons d'obstacles à la transition — nous voulons aussi trouver de nouvelles façons novatrices de gérer cette transition, et une d'entre elles — j'ai lu votre biographie — c'est au moyen des arts.
    Pourriez-vous en parler? J'ai encore des photos des masques que les vétérans ont faits à Washington. Ils étaient tout simplement stupéfiants. Ils nous ont renversés. Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez?
    Bien sûr. Je siège au conseil d'administration d'une fondation artistique nommée en l'honneur du soldat qui, en fait, prenait place à bord de mon véhicule et a été tué par un EEI, la David J. Drakulich Art Foundation. La fondation a pour but d'offrir l'art comme médium pour la communauté de militaires, afin de réassimiler, de réintégrer et de façonner intentionnellement l'histoire à l'intention des guerriers qui reviennent.
    Trop souvent, le soldat est campé dans l'un de deux rôles. Celui d'un héros ou celui d'une personne brisée, et peut-être les deux en même temps. Encore une fois, je vais me reporter à la situation de Mark. Ce n'est pas parce que son handicap le rend inapte au service militaire qu'il est inapte au service continu dans sa collectivité.
    L'art est un moyen thérapeutique. Les soldats, les aviateurs et les marins n'ont pas à être des artistes. Il y a des moyens tactiles. Nous fabriquons du papier de guerre, où nous transformons les uniformes en papier. C'est une façon d'attirer la collectivité et une façon pour une collectivité de s'approprier ses vétérans. Cela procure un bon médium sécuritaire pour les vétérans, peu importe leur orientation politique ou leur disposition à l'égard de la guerre. C'est un médium courant et c'est un lieu sécuritaire pour une collectivité afin qu'elle puisse se réapproprier ses vétérans à un niveau personnel.
    Je suis désolé, nous manquons de temps. Je vais passer à Mme Lowther.
    En ce qui concerne vos bases de données, comment faites-vous le suivi de vos activités et des résultats?
    Dans le cadre de notre contrat avec Anciens Combattants Canada, nous sommes tenus de produire pour eux des rapports à la fin de chaque mois. En raison de ce système de production de rapports, nous devons conserver des documents et des dossiers assez importants touchant les anciens combattants que nous aidons et les services que nous fournissons. Nous devons déclarer des choses comme le nombre de vétérans que nous aidons au cours d'un mois, en payant des arriérés de loyer pour éviter qu'ils perdent leur logement, et le nombre de vétérans à qui nous fournissons simplement du soutien par les pairs au cours d'un mois.
    Nous sommes tenus de conserver des dossiers rigoureux.
    Si j'ai bien saisi ce que vous avez dit, essayiez-vous de dire que nous formons des soldats, mais pas des vétérans? Nous vous enseignons comment être un guerrier, mais pas comment faire une transition?
    Oui. Lorsque vous regardez quelqu'un qui suit une formation de base, cette personne n'est guère qu'un enfant, vraiment, lorsqu'elle a 18 ou 19 ans. Elle n'a pas d'expérience de vie, et donc, tout ce qu'elle sait, c'est qu'on l'endoctrine pour qu'elle devienne un soldat, un marin ou un aviateur. Donc, au bout du compte, nous voyons des gens qui éprouvent des difficultés avec des choses simples comme payer leur facture de téléphone. Elles ne savent pas comment faire cela, parce que leur épouse ou leur mari, la personne qui restait à la maison, s'en est toujours occupé.
    J'ai entendu des histoires de gens qui ont dit: « Mon commandant m'a dit quand je devais me faire couper les cheveux » et d'autres choses du genre. Au bout du compte, ce sont des choses avec lesquelles les gens éprouvent des difficultés, des choses simples.

  (1240)  

    Merci.
    Monsieur Johns, allez-y, pour quatre minutes.
    Merci à vous deux de votre témoignage et du travail important que vous faites.
    Je vais commencer par vous, lieutenant-colonel Lipana. Votre histoire est si importante. Merci d'être venu au Canada et de nous avoir raconté cette histoire, et merci de votre service en tant qu'allié. J'espère vraiment que vous vous sentez comme chez-vous, parce que nous sommes tous frères et soeurs, et vous avez vraiment établi un lien avec nous. Je vous en remercie donc.
    En ce qui concerne les pratiques exemplaires au Canada, peut-être pourriez-vous parler de ce que nous faisons de bien et de ce que vous voyez comme certaines lacunes, et peut-être pourriez-vous parler de ce que vous faites bien? Je crois comprendre que, pour ce qui est du retour au travail, beaucoup de vos intervenants — 30 %, si je ne m'abuse — sont d'anciens membres des forces armées.
    Pourriez-vous parler de l'importance de cette familiarité? En ce qui concerne l'histoire de Mark, je pense que s'il avait affaire à des gens qui ont servi, il y aurait peut-être cette compréhension, cet élément important. Pourriez-vous parler du retour au travail et des gestionnaires de cas de ce point de vue?
    Un grand nombre de vos témoins ont parlé du changement de la culture. Je pense que l'appareil lui-même est bien en place et que les interventions sont bonnes. Le fait que des gestionnaires de cas soient d'anciens membres est un énorme avantage. Ils vous ressemblent, parlent comme vous, comprennent ce par quoi vous êtes passé et parlent votre langue.
    Encore une fois, selon les témoignages que j'ai entendus plus tôt, vous avez en commun un si grand nombre des mêmes problèmes. Il y a beaucoup de bonnes interventions, et le programme est conçu pour faire de bonnes choses. Mais nous payons une taxe sur la confiance à des niveaux inférieurs de bureaucratie, où une personne qui traite un document ou a besoin d'une signature — oh, cette case n'est pas cochée, il a raté une signature — n'a pas l'autorité à son niveau pour faire preuve de jugement. Cette norme doit donc être brisée. La taxe sur la confiance doit être retirée des épaules du membre, des gens comme Mark, et certainement de la personne qui s'occupe de la gestion intermédiaire dans cette intervention en personne, assurément.
    Au département des Anciens combattants des États-Unis, l'expérience varie grandement. Vous pouvez avoir d'excellents intervenants, et d'autres, terribles. C'est difficile dans une grande bureaucratie, assurément.
    Avez-vous l'impression que quelqu'un qui a servi est mieux placé pour faire ce travail dans l'ensemble? S'agit-il d'un facteur de confiance?
    Je pense que le facteur de confiance est important. En ce qui concerne la compétence, non. Je pense que tout membre d'une famille de militaires ou même juste un civil... Cela peut même être un avantage en soi. Lorsque je regarde un intervenant et que je vois un civil, cette personne s'est portée volontaire pour être là. Elle a choisi ce travail. Chaque civil avec qui j'ai travaillé m'a dit qu'il voulait être là. C'est sa façon de servir notre pays, de reconquérir et de se réapproprier ce sentiment, même s'il s'agit juste de s'occuper de paperasse administrative.
    Vous avez parlé des pratiques exemplaires. J'ai eu l'impression que vous associez votre communauté de premiers intervenants un peu plus près de votre communauté d'anciens combattants. Mon observation n'est peut-être pas juste. Et je pense que c'est extrêmement judicieux, parce que, du moins aux États-Unis, bon nombre de nos premiers intervenants — les ambulanciers paramédicaux, les pompiers, les policiers — proviennent d'un milieu militaire. Donc, lorsqu'ils font la transition vers la sortie, c'est une étape intermédiaire avant la retraite, et ils arrivent dans un autre environnement très structuré, qui est axé sur le but et la valeur. C'est un bon endroit où atterrir, si vous voulez. Mais les mêmes problèmes surgissent malgré tout lorsque cette personne sort de sa retraite de policier, de pompier ou d'intervenant médical.
    Ma vision et mon espoir plus larges, c'est que le travail que nous faisons aux États-Unis pour nos anciens combattants se répercute chez notre communauté de premiers intervenants également. Nous prenons des notes sur votre excellent fonctionnement ici, au Canada.
    Merci.
    Madame Lambropoulos, vous avez quatre minutes.
    Merci d'être venus ici et de répondre à nos questions.
    Ma première question s'adresse à l'un ou l'autre d'entre vous. Avez-vous rencontré beaucoup d'anciens combattants qui ne voulaient pas qu'on les aide lorsqu'ils quittaient la vie militaire, qui auraient préféré rester seuls et qui ne veulent pas avoir de lien avec Anciens Combattants?
    Nous avons connu certains anciens combattants qui ne veulent pas avoir de lien avec Anciens Combattants. Parfois, ils nient avoir besoin de ces services. C'est parce qu'ils ont entendu des histoires d'horreur sur le compte d'Anciens Combattants et qu'ils ne veulent pas vivre eux aussi la même chose.
    Quand nous avons l'occasion de discuter avec un ancien combattant, nous lui disons qu'il est en train de scier la branche sur laquelle il est assis. Anciens Combattants peut lui verser des prestations, et il a droit à ces prestations. Nos bénévoles vont lui expliquer toutes les étapes du processus et servir d'intermédiaires entre lui et le gestionnaire de cas du ministère; le bénévole essaiera de rendre la relation plus facile encore.

  (1245)  

    Comme vous l'avez dit, quand ils font partie de l'armée, les soldats entrent dans un moule et deviennent les soldats que l'armée recherche, que leurs commandants recherchent. Ensuite, ils sont laissés à eux-mêmes. C'est à eux de décider s'ils veulent recevoir les services ou même s'ils veulent créer leur propre Compte AAC.
    Recommanderiez-vous ou suggéreriez-vous que ce soit obligatoire et que le processus soit enclenché avant leur libération? Vous pourriez peut-être nous en parler un peu en nous donnant quelques exemples.
    À mon avis, ce devrait être fait de façon volontaire, mais je crois que la chaîne de commandement aurait son mot à dire, étant donné que certaines personnes ne comprennent pas que c'est difficile. Je crois que la chaîne de commandement devrait apprendre à déceler les symptômes précurseurs chez les gens qui ne vont pas aussi bien qu'ils le pensent. Selon notre expérience, les gens qui ont le plus de difficulté sont les soldats au grade de sergent et aux grades inférieurs. Parfois, ce sont les membres qui ont accumulé moins de 10 ans de service qui ont le plus de difficulté. Par contre, nous voyons aussi des soldats qui ont servi très longtemps qui ont de la difficulté, parce que c'est la seule vie qu'ils ont connue.
    Je crois que cela devrait être fait de façon volontaire, car je sais que bon nombre de membres refuseraient que quelqu'un, après leur libération, vienne leur dire qu'ils ont besoin de formation pour retourner à la vie civile. Toutefois, je crois que la chaîne de commandement devrait avoir son mot à dire.
    Merci.
    Monsieur Samson, vous avez quatre minutes.
    Merci à vous deux de vos exposés.
    Madame Lowther, j'apprécie vraiment que vous soyez venue et j'apprécie aussi le travail que vous faites en Nouvelle-Écosse, ma province natale. Je trouve ça extraordinaire d'entendre des histoires sur les anciens combattants et sur les moyens que vous prenez pour les aider. Je me demande parfois ce que nous ferions si vous et votre équipe n'étiez pas là.
    Vous travaillez partout au Canada. Je n'ai que quatre minutes, et j'ai déjà quatre questions de plus. En 45 secondes, pourriez-vous nous dire comment vous faites pour fournir vos services partout au Canada?
    Comme vous l'avez dit, nous avons vu le jour en Nouvelle-Écosse. C'est le pouvoir des médias sociaux, en fait, qui nous a permis d'étendre nos services partout au pays et d'encourager les Canadiens qui pensent comme nous, les Canadiens dévoués, à se lever et à faire du bénévolat.
    Nos activités sont de deux ordres: nous agissons et nous réagissons. Nous agissons quand nos bénévoles vont dans la rue et font la tournée des refuges. Vous le savez, vous l'avez déjà fait en notre compagnie. Nous cherchons activement les anciens combattants qui pourraient se retrouver en situation de crise. Et nous réagissons quand les gestionnaires de cas d'Anciens Combattants, le personnel des refuges ou les anciens combattants eux-mêmes ou des membres de leur famille nous font un signalement. Nous avons une très large portée. Nous avons aussi une très grande base de données de bénévoles, grâce auxquels nous pouvons aider des anciens combattants d'à peu près toutes les régions.
    Merci.
    Je sais que vous pourriez continuer ainsi longtemps.
    J'ai deux petites questions. Nous entendons toutes sortes d'histoires sur leurs problèmes, les raisons pour lesquelles ils se sont retrouvés là ou sont passés entre les mailles du filet.
    Premièrement, vous faites parvenir tous les mois un rapport à Anciens Combattants. Lorsque les responsables constatent que certaines situations perdurent, est-ce qu'ils apportent des changements pour rendre le processus plus harmonieux?
    Deuxièmement, je sais que vous n'êtes pas à l'aise de parler directement d'Anciens Combattants, mais pourriez-vous nous rapporter ce qu'on vous dit au sujet des causes réelles des lacunes dans le processus de transition?
    Un des problèmes les plus importants dont nous avons connaissance, c'est le manque d'uniformité des services que le ministère fournit aux anciens combattants.
    Par exemple, quand mon époux a été libéré, il avait une gestionnaire de cas fantastique. Elle s'occupait des moindres détails, discutait avec lui du service, lui parlait de toutes les prestations auxquelles il pourrait avoir droit. Nous avons reçu certains anciens combattants qui nous ont dit s'être adressés à Anciens Combattants et avoir rencontré un gestionnaire de cas qui leur a mis des papiers dans les mains en leur disant de revenir lorsqu'ils seraient remplis. Ils n'ont aucune idée de ce à quoi ils ont droit. S'ils ne le savent pas, ils ne le demanderont pas. Je crois que c'est l'un des principaux problèmes que nous avons relevés chez Anciens Combattants.

  (1250)  

    Avez-vous constaté des changements? Vous avez commencé en 2010, cela fait en gros huit ans. Avez-vous vu des changements pour le mieux? Si j'étais responsable de la prestation des services et qu'un organisme m'aidait en me renseignant sur ce qui se passe sur le terrain... est-ce que vous voyez des changements réguliers? Ou est-ce que c'est toujours la même chose: voici ce qui est offert, voici comment les décisions sont prises, voici le processus, et ainsi de suite?
    Le plus important changement que nous avons observé, c'est que le ministère a reconnu qu'il existait bel et bien des anciens combattants sans abri ou en situation de crise. Quand nous avons mis notre organisation sur pied, en 2010, nous avons communiqué avec le ministère de la Nouvelle-Écosse et nous nous sommes fait dire qu'il n'existait pas d'anciens combattants sans abri. Ils avaient fait le tour de refuges en distribuant des brochures, et personne ne les avait rappelés. Ils en ont donc conclu qu'il n'y avait pas d'anciens combattants sans abri.
    Faisons un saut dans le temps jusqu'en 2014; le ministère nous demande de fournir ces services aux anciens combattants qui n'ont pas de toit et sont en situation de crise. Je crois que c'est une amélioration importante. Je sais que lorsqu'un ancien combattant déclare au ministère qu'il est sans abri, on coche une case sur son dossier, les services lui sont offerts en priorité, et son cas est étudié d'un peu plus près, supposément. Nous savons d'expérience que ce n'est pas toujours le cas.
    Il ne me reste plus de temps, je veux seulement un chiffre. Vous travaillez partout au Canada. Combien y a-t-il selon vous d'anciens combattants sans abri au Canada?
    Je sais que le chiffre officiel qui a circulé il y a quelques années était de 2 250. Je dirais qu'ils sont plutôt autour de 5 000.
    Monsieur Kitchen, vous avez quatre minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous deux d'être venus.
    Colonel, avec les autres membres du Comité, j'ai eu la chance de visiter le centre médical militaire national Walter Reed, aux États-Unis. Il se trouve que j'ai déjà été hospitalisé à cet endroit en 1976, il y a bien des années.
    Lorsque nous avons affaire à des soldats blessés, qui ont peut-être perdu un membre, nous parlons beaucoup du fait qu'ils ont perdu des soutiens sociaux et qu'ils ont peut-être aussi perdu des camarades. Ce que nous avons appris et constaté, c'est que les États-Unis intègrent ces soldats et les gardent à leur service plus longtemps que nous, parce que ces soldats peuvent fournir un service.
    J'aimerais tout simplement que vous commentiez cela et que vous nous disiez si, à votre avis, c'est un avantage.
    Nous avons créé un système que l'on a appelé le système intégré d'évaluation de l'invalidité. Je ne sais pas si on vous en a parlé, pendant votre visite, mais il s'agit essentiellement d'un mécanisme qui permet à un service de conserver un soldat à son emploi, peu importe dans quel secteur, si ce membre désire rester. Un soldat qui perd un membre, ou qui devient invalide d'une autre façon, sera évalué en même temps par le département américain des Anciens Combattants.
    Ça ne fonctionnait pas ainsi avant. Avant, un membre pouvait être évalué différemment par le service et par le ministère, et les différences étaient parfois importantes. Nous avons intégré les deux systèmes, et le soldat aura le choix de rester, s'il le désire et si son invalidité ne l'empêche pas de faire encore longtemps partie de l'armée.
    Est-ce que c'est utile? Pourriez-vous également nous dire si, à votre avis, cela facilite la transition lorsque la personne en question décide finalement de prendre sa retraite et de retourner à la vie civile?
    Je crois que c'est utile pour plusieurs raisons, notamment parce qu'il donne à ses collègues de l'armée un modèle de persévérance à suivre. Je crois que vous utilisez ici, au Canada, le terme « universalité ». Cela donne également à ce soldat la capacité de réfléchir et de prendre des décisions relativement à sa transition, c'est-à-dire qu'il peut choisir de rester ou, plus tard, de partir.
    Les services comprennent également des services aux blessés. Une équipe m'avait été attribuée pour m'aider à naviguer dans le dédale administratif, à trouver les prestations auxquelles j'avais droit et à m'assurer un soutien dans la collectivité.
    Merci.
    Madame Lowther, nous avons présenté un rapport en décembre 2016. La recommandation no 10 visait à empêcher qu'un membre ne soit libéré avant qu'il soit prêt et que toutes les mesures nécessaires soient en place: les services de santé, de réadaptation et de réadaptation professionnelle.
    Auriez-vous quelque chose à ajouter, quelque chose que vous jugez nécessaire?
    Je crois que l'on s'efforce de respecter cette recommandation, mais il arrive encore que certains membres soient libérés avant d'être prêts, et je crois que des améliorations s'imposent encore à ce chapitre. Dans certains cas, le soldat en question est en réalité, tout simplement, très habile à cacher ses problèmes.

  (1255)  

    Je suis d'accord avec vous en ce qui concerne la notion de camp d'entraînement précédant le départ. Nous en avons très souvent parlé. Vous avez mentionné le jumelage avec un pair ou avec un mentor.
    Pendant le peu de temps qu'il me reste, j'aimerais vous laisser élaborer sur ce sujet. Que voulez-vous dire par là? Comment est-ce que ça pourrait fonctionner, selon vous?
    Je crois que les soldats qui sont libérés et qui réussissent bien leur libération pourraient faire du bénévolat ou devenir des mentors pour ceux qui participeront après eux. Les soldats pourraient, au moment d'être libérés, communiquer avec tous ces pairs prêts à les aider, même s'il ne s'agit que de se parler de temps à autre au téléphone pour savoir si tout va bien.
    Est-ce que le jumelage devrait être fait automatiquement, comme c'est le cas actuellement, ou est-ce qu'il faudrait que le membre le demande?
    Je crois que cela devrait se faire volontairement, il faudrait que le membre le demande. Cela dit, la chaîne de commandement pourrait aussi en faire la suggestion.
    Les membres en question n'en ont pas connaissance...
    Exactement.
    Lorsqu'ils amorcent leur transition, ils n'en ont pas connaissance dès le départ.
    Oui.
    Merci.
    Monsieur Eyolfson, vous avez trois minutes et 48 secondes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous deux de vous être présentés ici.
    J'ai déjà parlé du bouleversement que provoquent certains des témoignages relatifs aux problèmes que les gens vivent. J'ai pratiqué la médecine d'urgence pendant 20 ans au coeur de la capitale du meurtre du Canada, Winnipeg, pour ceux qui n'écoutent pas les nouvelles canadiennes. J'ai eu à annoncer de très mauvaises nouvelles à des gens, aux prises avec un lourd fardeau émotionnel, et c'est en réalité comparable au fardeau émotionnel que m'imposent les témoignages que j'entends au sein du Comité. C'est très bouleversant d'apprendre à quelles difficultés les gens se heurtent et quels défis ils doivent relever.
    Colonel Lipana, nous avons parlé d'une chose, entre autres, et je suis certain, encore une fois qu'étant donné votre travail au Canada... Notre armée a créé la notion de l'universalité du service. Je ne sais pas si vous savez ce que ça veut dire; ça veut dire que si vous n'êtes pas capable d'effectuer chacune des tâches d'un soldat en déploiement, vous ne pouvez pas rester dans l'armée. Nous avons eu connaissance de rapports selon lesquels il y a des gens qui ne signalent pas leurs symptômes: le parachutiste qui se met à avoir mal au dos, le soldat qui commence à ressentir des symptômes de stress post-traumatique. S'ils ne veulent pas le dire, c'est parce que, s'ils ne respectent pas le principe de l'universalité du service, ils seront mis à la porte, et la situation empirera.
    Dans l'armée américaine, y a-t-il des dispositions qui permettraient à un soldat blessé de poursuivre une carrière en service modifié si sa blessure l'empêche d'exécuter certaines tâches mais le laisse tout à faite apte à en effectuer d'autres?
    Absolument.
    Existe-t-il une telle disposition pour l'armée américaine?
    Oui, il y en a une. Vous en trouverez plusieurs, des amputés, des personnes qui ont perdu la vue ou des membres, qui ont d'autres invalidités, et même qui souffrent jusqu'à un certain point de stress post-traumatique, qui demeurent en service. S'ils ne font pas partie d'une composante active, il y a aussi aux États-Unis la Garde nationale, la Réserve et d'autres composantes actives au pays. Si ces soldats ne sont pas taillés pour l'une de ces composantes, certaines dispositions prévoient qu'ils seront employés dans une autre, et ils n'ont pas à être aptes à un déploiement pour rester.
    D'accord, merci.
    J'ai pensé à quelque chose — et, je le répète, je me fie à mon intuition, mais l'intuition n'est pas toujours juste —, par exemple au cas d'un soldat qui serait amputé, mais posséderait des aptitudes qui lui permettraient de travailler comme contrôleur aérien. Pour le moment, oui, en théorie, tous les soldats doivent pouvoir être déployés. Je n'ai en fait jamais entendu parler du cas d'un contrôleur aérien d'expérience à qui on aurait donné une carabine en lui ordonnant d'aller s'en servir sur un champ de bataille. Pensez-vous que si l'on modifiait la politique canadienne touchant l'universalité du service, si on la changeait d'une manière ou d'une autre en donnant aux gens la possibilité de rester en service sans respecter ce principe, que cela inciterait les gens à signaler leurs symptômes et empêcherait que l'on pousse à la retraite des gens qui voudraient rester dans l'armée?
    Je ne voudrais pas me prononcer sur la situation des Forces canadiennes, mais, du côté américain, je crois que les membres seraient plus portés à le faire, dans la mesure où ils sont convaincus que le système ne va pas au bout du compte leur nuire.
    Merci beaucoup.
    Madame Lowther, c'est ma dernière question.
    Nous avons discuté — et j'en ai beaucoup entendu parler quand il était question de la transition — du fait que, dans l'armée, on vous dit quand vous devez vous couper les cheveux, on s'occupe de toutes vos factures, et ainsi de suite. Au moment de la transition, vous devez vous occuper vous-même de faire assurer votre logement, de payer votre loyer, de gérer vos comptes bancaires. N'y aurait-il pas lieu de fournir un peu de formation continue tout au long de la carrière d'un soldat de façon que les membres, à chacune des étapes... Il faudrait qu'ils sachent qu'un jour ils vont quitter l'armée et devoir connaître ces choses? Il faudrait, à chacune des étapes, qu'ils aient du moins une idée de tout ce qu'ils devront savoir et qu'ils sachent le faire lorsqu'ils seront de retour à la vie civile.

  (1300)  

    Je suis entièrement d'accord avec ce que vous dites. J'en ai en fait déjà parlé. J'ai longtemps travaillé dans le domaine de la gestion du personnel, j'ai eu à faire des évaluations du rendement; pour l'armée, c'est l'occasion, quand il faut remplir le rapport d'appréciation du personnel, de discuter avec le membre et de lui donner en même temps cette formation. C'est peut-être l'occasion de leur parler d'un plan B, de leur demander « que prévoyez-vous faire lorsque vous quitterez l'armée? », ce genre de questions, et de les renseigner sur le fait que la vie après le service sera quelque peu différente. Je crois sincèrement que ce serait magnifique.
    Merci.
    Merci.
    C'est tout le temps que nous avons aujourd'hui.
    J'ai une dernière question pour vous, madame Lowther, et nous demanderons à la greffière de vous la transmettre. Je vais en faire lecture tout de suite.
    Étant donné l'augmentation récente du coût du logement, dans toutes les régions du Canada, mais surtout sur la côte Ouest et à Toronto, et dans la plupart de nos circonscriptions, avez-vous observé une augmentation du nombre de vétérans sans abri, et est-ce que cela crée une pression supplémentaire sur votre organisation? Nous demanderons à la greffière de vous transmettre la question par courriel et, si vous lui répondez par courriel, elle communiquera votre réponse au Comité.
    Au nom du Comité, je tiens à vous remercier tous les deux d'avoir pris le temps de venir ici pour offrir un témoignage et nous aider dans notre tâche, soit faciliter les choses pour nos anciens combattants. Merci beaucoup de toute l'aide que vous nous donnez.
    La séance est levée.
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