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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 163 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 20 juin 2018

[Enregistrement électronique]

  (1240)  

[Traduction]

    Je suis étonné de voir comment vous arrivez à obtenir le silence dans une pièce. Avez-vous une technique spéciale?
    Il en va autrement à la maison.
    Je vois.
    Comme tous le savent maintenant, nous abordons l'examen prévu par la loi de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Je pense que le ministre sait que nous avons entendu de nombreux témoins et que nous nous sommes beaucoup déplacés à l'étranger pour étudier ce sujet. Les derniers témoins, du moins pour le moment, seront le ministre et d'autres personnes du ministère des Finances.
    Monsieur Morneau, ministre des Finances, je vous souhaite la bienvenue.
    Je rappelle aux membres du Comité que nous nous en tiendrons à ce sujet aujourd'hui et que nous n'aborderons pas d'autres sujets. Le sujet, c'est la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, et nous nous en tiendrons à cela.
    Monsieur le ministre, vous êtes accompagné d'Annette Ryan, sous-ministre adjointe déléguée, Direction de la politique du secteur financier. Je vous souhaite aussi la bienvenue, Annette.
    Vous avez la parole, monsieur le ministre.
    Merci, monsieur le président.
    Compte tenu de votre introduction, je suis content d'avoir apporté ce discours et non un autre.
    Oui.
    Merci à vous tous de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui de l'examen parlementaire de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.
    Pour commencer, je tiens à remercier le Comité de prendre le temps d'examiner l'administration et le fonctionnement de la loi. Je sais que les membres de ce comité prennent cette question très au sérieux et je tiens à répéter qu'il en va de même pour le gouvernement.
    Nous apprécions — et, personnellement, j'apprécie — tout le travail que fait le Comité pour étudier cette question complexe et écouter des témoignages utiles d'un large éventail de témoins pour formuler des recommandations à l'intention du gouvernement.

[Français]

     Comme vous le savez, le gouvernement s'emploie depuis près de trois ans à effectuer des investissements pour faire croître l'économie, renforcer la classe moyenne et offrir une aide réelle à ceux qui travaillent fort pour faire partie de cette classe moyenne.
    Nous avons aussi travaillé fort afin que notre régime fiscal soit équitable pour l'ensemble des Canadiennes et des Canadiens. En termes simples, l'économie ne peut fonctionner pour tous lorsque ce n'est pas tout le monde qui paie sa juste part.

[Traduction]

    Après tout, les impôts et taxes que nous payons au Canada contribuent à fournir les services sur lesquels nous comptons tous pour avoir une bonne qualité de vie. Les impôts et taxes nous aident à construire l'infrastructure qui nous permet d'acheminer nos marchandises vers les marchés et qui soutient de bons emplois bien rémunérés. Bien entendu, les impôts et les taxes que nous payons contribuent à réparer les fractures et à mettre le cancer en rémission dans tout le pays. Ils payent les programmes et les services qui contribuent à assurer la sécurité des Canadiens dans les collectivités canadiennes.
    Il est absolument important pour nous tous que tout le monde paye sa juste part. C'est la raison pour laquelle nous continuons de prendre des mesures pour lutter contre l'évasion fiscale et l'évitement fiscal. Nous avons récemment déposé une motion demandant à présenter une mesure législative qui permettrait d'inscrire dans la loi canadienne une convention internationale qu'on appelle l'instrument multilatéral et qui vise à contrer les stratégies d'évitement fiscal qui mènent à une érosion de la base et à un transfert des bénéfices et qui consistent pour des sociétés et de riches particuliers à profiter d'échappatoires dans les traités fiscaux pour transférer indûment des bénéfices à des endroits où l'impôt est faible ou inexistant pour éviter d'avoir à en payer. C'est un outil important dans notre lutte contre l'évitement fiscal international agressif.
    En veillant à ce que tous payent leur juste part, nous pouvons continuer à préserver notre capacité à investir dans les programmes et les services que nous savons que les Canadiens méritent. C'est aussi pour cette raison que nous participons activement à des efforts complémentaires par l'intermédiaire du G20 pour combattre l'évasion fiscale internationale et l'évitement fiscal agressif, notamment en accroissant la transparence quant à la propriété bénéficiaire des sociétés et des fiducies.
    Nous collaborons aussi avec nos partenaires étrangers à l'intérieur du G7 et avec l'ensemble de la communauté internationale sur plusieurs fronts pour combattre le blanchiment d'argent et les risques qui y sont associés, dont le financement du terrorisme. Ce travail comprend la modification de lois et de règlements, des évaluations de risques, des estimations et des contributions aux efforts internationaux par l'intermédiaire de groupes comme le Groupe d'action financière internationale, ou GAFI, les Nations unies, le G7, le G20 et le coalition destinée à contrer le financement du groupe armé État islamique.
    En avril dernier, j'ai eu l'occasion de prendre la parole à une conférence contre le financement du terrorisme organisé par le président Macron, à Paris, où les ministres de 70 pays se sont réunis pour discuter des obstacles complexes et changeants à surmonter pour couper l'accès des terroristes à des fonds. Ces efforts contribuent à garder les Canadiens en sécurité et, bien entendu, nous sommes fiers de faire notre part.
    Il est aussi important pour le gouvernement de s'assurer que la croissance économique profite à tout le monde et non seulement aux plus fortunés. Ce thème a été au centre des récentes réunions du G7 et reste une priorité.

[Français]

     Il est important de mentionner que l'objectif d'une croissance qui profite à tout le monde ne peut être atteint s'il l'est de façon isolée. Pour y parvenir, plusieurs éléments doivent être en place.
    Nous devons avoir des institutions démocratiques solides, une économie ouverte et stable ainsi qu'un système financier accessible et avancé. Or nous avons la chance d'avoir tous ces éléments ici, au Canada.

[Traduction]

    Malheureusement, ces points forts peuvent parfois faire de nous une cible pour ceux qui cherchent à blanchir le produit de la criminalité ou à lever, transférer et utiliser des fonds à des fins terroristes. Pour compliquer encore plus les choses, le blanchiment d'argent et le financement d'activités terroristes sont des crimes qui facilitent et récompensent la commission d'autres crimes, compromettant la sécurité de nos collectivités. Ils compromettent aussi le caractère abordable de nos villes.
    Nous savons que le blanchiment d'argent peut créer des distorsions sur les marchés immobiliers locaux, contribuant à rendre certaines villes simplement inabordables pour de nombreuses familles canadiennes. Il faut que cela cesse. Le régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes devrait mobiliser tous les outils disponibles pour détecter, stopper et juger ces activités illicites.
    Bien entendu, au Canada, nous sommes uniques à cet égard. Partout dans le monde, des pays déploient beaucoup d'efforts pour détecter et décourager les crimes financiers. Nous pouvons beaucoup apprendre des efforts des autres. Je sais que c'est ce que des membres du Comité ont entrepris de faire en allant au Royaume-Uni et aux États-Unis, deux de nos partenaires de l'alliance du renseignement constituée par le Groupe des cinq, pour en apprendre plus sur la façon dont ils ont réussi à réprimer le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.
    Ici, chez nous, je crois comprendre que le Comité a prévu d'entendre un large éventail de Canadiens qui ont intérêt à veiller à ce que le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme n'aient pas cours sous leur surveillance. Il y a, entre autres, des chefs de gouvernement provincial, des membres de forces de police, des spécialistes de la protection des renseignements personnels et de la transparence et ceux qui, dans le secteur privé, représentent des institutions financières, des associations juridiques et professionnelles, et des agences immobilières et d'autres entités qui doivent communiquer de l'information. Cette sorte de coopération est importante, puisque les activités de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme sont souvent complexes et que les techniques utilisées sont souvent très sophistiquées.
    Ceux qui financent le crime et le terrorisme exploitent le fait que ces crimes ne connaissent pas de frontières. Dans bien des cas, les personnes impliquées ont réussi à se soustraire à l'attention des autorités, protégeant dans les faits ceux qui profitent de leurs activités illégales.

  (1245)  

[Français]

    Une intervention globale efficace doit être équilibrée, assez souple pour répondre aux nouveaux défis et bien coordonnée. C'est là que le Régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes appliqué par le gouvernement entre en jeu. S'appuyant sur d'importants outils qui permettent de détecter, de décourager et de prévenir le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes, le Régime vise à protéger l'intégrité de notre système financier et à assurer la sécurité des Canadiens.

[Traduction]

    Le régime est efficace et conforme aux normes, mais cela ne veut pas dire qu'il ne peut pas être amélioré. Comme gouvernement, nous ne perdons pas de vue la nécessité de protéger les droits des Canadiens et de respecter la séparation des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux tout en réduisant au minimum le fardeau sur le secteur privé.
    Nous savons qu'il y a un équilibre délicat à atteindre ici. J'invite le Comité à consulter les personnes qui peuvent dire comment nous pouvons améliorer le régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité tout en protégeant les droits des Canadiens. Notre commissaire à la protection de la vie privée, par exemple, serait une personne à consulter sur cette question.
    La triste réalité, c'est que les criminels trouvent sans cesse de nouvelles façons d'exploiter le système financier et de se servir d'entreprises légales à des fins criminelles. Nous devons réagir à leur créativité avec fermeté. Depuis la dernière étude, en 2013, le contexte dans lequel sont menées les activités de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme a évolué considérablement. Je sais que cinq ans, cela paraît bien court, mais nous devons prendre en considération ce qui a changé. Les produits financiers complexes, dont la monnaie virtuelle qui assure l'anonymat des utilisateurs, se sont multipliés. Les technologies financières émergentes, comme les services bancaires mobiles, qui changent la façon dont les Canadiens accèdent au système financier, ont aussi été largement adoptées.
    Ces dernières années, nous avons vu l'usage continu d'arrangements juridiques et corporatifs complexes pouvant servir à camoufler le produit de la criminalité et les véritables propriétaires des sociétés. Les systèmes d'identification numériques qui peuvent contribuer à mieux protéger l'identité des consommateurs se sont aussi améliorés.

[Français]

    Il vaut la peine de rappeler que le gouvernement compte sur des partenaires importants dans sa lutte contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes. Au Canada, les entreprises ont, elles aussi, un rôle essentiel à jouer. Voilà pourquoi les activités de sensibilisation et de conformité menées par le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, le CANAFE, sont cruciales.
    Je sais que le Comité a entendu parler de l'importance d'offrir une formation conviviale et du besoin de simplifier la tâche des entreprises canadiennes de respecter leurs obligations. J'espère que le Comité prendra ces recommandations au sérieux et qu'il songera à ce que nous pourrions faire de plus pour minimiser le fardeau des entreprises.

[Traduction]

    Aussi, les partenaires du régime au sein du gouvernement doivent continuer de collaborer pour assurer l'intégration harmonieuse de la politique et des activités opérationnelles. Nous pouvons ainsi contrer le plus efficacement possible les nouvelles menaces dès leur apparition. Nous ne pouvons pas lutter efficacement contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes sans une collaboration étroite entre les entités tenues de faire des déclarations, les organismes de sécurité nationale et les responsables de l'application de la loi, fédéraux, provinciaux, territoriaux et municipaux.
    Cela dit, même s'il est crucial que les partenaires du régime échangent de l'information de façon rapide et fiable, il est également essentiel que nous respections collectivement les droits des Canadiens, y compris leurs droits à la vie privée, qui sont garantis par la Charte des droits et libertés. Le respect de la vie privée et la protection des renseignements personnels sont très importants pour le gouvernement. C'est pourquoi les rapports requis au titre de la loi dont nous discutons aujourd'hui sont remis au CANAFE, et non directement aux organismes d'application de la loi. Les rapports et les autres renseignements soumis au CANAFE, que ce soit au sujet d'opérations financières douteuses ou de mouvements transfrontaliers de fonds, font l'objet d'une analyse et d'un examen indépendants menés par le Centre. Le régime compte de nombreux freins et contrepoids, y compris les mécanismes qui protègent l'indépendance et l'impartialité du CANAFE en ce qui concerne l'application de la loi et les enquêtes de sécurité nationale.
    Je sais que vous avez entendu les témoignages du commissaire à la protection de la vie privée et d'autres personnes, qui nous rappellent que ces freins et contrepoids servent à protéger les droits à la vie privée des Canadiens. Je me réjouis à l'idée de lire l'ensemble des recommandations que vous présenterez, mais j'attends particulièrement vos conseils sur la façon d'accroître l'efficacité du régime dans la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes tout en réduisant le fardeau pour les entreprises et en continuant de respecter les droits et libertés des Canadiens.
    Alors que nous nous préparons à prendre de nouvelles mesures, nous devons également chercher des façons de combler les lacunes réglementaires et législatives relevées dans le rapport d'évaluation mutuelle du Canada, que le Groupe d'action financière a publié en 2016. Il faut aussi s'occuper des nombreuses questions soulevées par les intervenants et les partenaires du régime. Parmi ces lacunes, on a souligné la collecte de l'information sur la propriété bénéficiaire et l'accès à ces renseignements, c'est-à-dire les données sur les véritables propriétaires des entreprises au Canada. Comme vous le savez, le gouvernement travaille déjà d'arrache-pied avec les provinces et les territoires pour améliorer l'accessibilité à l'information sur la propriété bénéficiaire. Ce dossier illustre bien la valeur de la collaboration dans les efforts visant des problèmes complexes.
    Au sujet des entités tenues de faire des déclarations, on a également soulevé le fait que les professions juridiques ne font pas partie du régime du Canada. Comme nous le savons, la Cour suprême du Canada a récemment statué dans une décision juridique que certaines dispositions de la loi touchant les avocats sont inconstitutionnelles. Nous sommes conscients des risques associés au fait que les professionnels du droit ne fassent pas partie du régime canadien de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes. À cet égard, nous sommes ouverts à vos suggestions pour une meilleure intégration au régime des professionnels du droit, d'une façon qui soit constructive et respectueuse des décisions de la cour.
    Ces deux lacunes, qui portent respectivement sur l'information sur la propriété bénéficiaire et sur les professionnels du droit, sont évidentes dans le secteur immobilier, qui est vulnérable aux manoeuvres de blanchiment d'argent et d'évasion fiscale en raison du nombre de transactions financières importantes qui s'y déroulent.
    Au fédéral, le CANAFE et l'Agence du revenu du Canada ont tous les deux intensifié leurs activités pour améliorer le respect des obligations en matière d'impôt et de lutte contre le blanchiment d'argent. Il faut toutefois en faire plus. Comme vous le savez, les blanchisseurs d'argent et les financiers du terrorisme se tournent vers de nouvelles activités, comme les cryptoactifs et le blanchiment d'argent par voies commerciales, ce que le gouvernement cherche également à combattre. J'ai hâte d'entendre vos conseils sur ces enjeux.
    Monsieur le président, avant de conclure, je tiens à assurer aux membres du Comité que le gouvernement prend ces préoccupations, le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes, très au sérieux. Pour être franc, ces questions constituent une menace à la sécurité des Canadiens, et le gouvernement sait qu'assurer la sécurité des Canadiens doit être une priorité absolue.

  (1250)  

[Français]

     Je tiens à remercier encore une fois le Comité du travail ardu qu'il a accompli pour maintenir les Canadiens en sécurité. Je suis reconnaissant de l'attention minutieuse et réfléchie qu'il a portée à ce sujet complexe et je compte recevoir ses recommandations très bientôt. Je les recevrai en étant sincèrement reconnaissant pour la large portée de la tâche qu'il a entreprise.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer aujourd'hui. Je serai très heureux de répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le ministre.
    Nous procéderons par tranches de cinq minutes afin de permettre à tout le monde de participer.
    M. Fergus a la parole.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le ministre et madame Ryan, d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur le ministre, la façon franche dont vous dites vouloir vous attaquer à ce problème m'inspire. C'est rare, mais je crois qu'il y a unanimité chez les membres du Comité, qui s'entendent pour dire que les recommandations devront repousser un peu les limites. Nous irons ainsi très loin.

[Traduction]

    Monsieur le ministre, vous avez affirmé que nous devons mobiliser tous les outils disponibles pour détecter, stopper et juger les cas de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Vous avez dit qu'il est possible d'améliorer le régime, mais vous avez également souligné avec raison l'existence d'enjeux: le partage des pouvoirs dans le pays en ce qui concerne les relations fédérales-provinciales, les questions de vie privée et le droit constitutionnel de protéger le secret professionnel de l'avocat. Nous sommes bien conscients de tous ces aspects. À la lumière des discussions avec les témoins et des mesures que prennent d'autres pays comme les États-Unis et le Royaume-Uni, je dois vous dire que nos façons de faire peuvent être grandement améliorées.
    L'un des principaux aspects, monsieur le ministre — et j'aimerais savoir ce que vous en pensez —, c'est la transformation de la relation que le CANAFE entretient non seulement avec les institutions financières qui soumettent des rapports sur des opérations douteuses, mais également avec les organismes d'application de la loi ou d'autres organismes gouvernementaux. Il s'agit de réinventer cette relation à sens unique, qui semble prévaloir en ce moment, pour que le CANAFE s'engage dans un dialogue.
    Les institutions financières n'ont aucun moyen d'obtenir des commentaires réguliers et précis. En fait, il n'existe pas de cadre prévu dans la loi qui permettrait aux institutions financières d'avoir des discussions approfondies entre elles au sujet des activités suspectes qu'elles ont relevées.
    Je me demande ce que vous pensez de l'idée de transformer la relation à sens unique du CANAFE en un dialogue dynamique avec les institutions financières.

  (1255)  

    Permettez-moi d'abord de répéter, comme vous l'avez souligné, qu'il y a toujours du travail à faire dans ce dossier. C'est un monde où les malfaiteurs consacrent temps et argent pour trouver des façons de contourner les lois du Canada et d'autres pays partout sur la planète. Il est encourageant de constater l'unanimité qui règne autour de cette table au sujet de ces initiatives. Nous devons demeurer vigilants.
    En ce qui concerne le CANAFE, j'aimerais entendre des recommandations du comité, à la suite des témoignages présentés, sur les aspects qui peuvent être améliorés. Nous devons évaluer constamment nos façons de faire actuelles et confirmer que nous avons les effets recherchés tout en respectant les lois qui protègent les Canadiens.
    Dans le cadre de cet examen, nous devons penser, d'abord et avant tout, aux lois sur la protection des renseignements personnels: il faut atteindre un équilibre entre la protection de la vie privée et le besoin de communication entre les institutions, le cas échéant, ou entre le CANAFE et l'institution. Il faut aussi prendre en compte que l'organisme chargé d'appliquer la loi doit parfois orienter la relation d'une certaine manière.
    Je n'ai pas la réponse. Il me tarde de recevoir vos observations sur les possibilités d'amélioration. Je suis ouvert à vos recommandations.
    Vous disposez de moins de 30 secondes.
    Je serai bref. En ce qui concerne le registre de propriété bénéficiaire et les négociations avec les provinces, selon votre meilleure estimation, quand pouvons-nous nous attendre à l'établissement d'un registre national? Quand pensez-vous qu'il y aura une entente avec les provinces à propos du partage de l'information sur la propriété bénéficiaire?
    Ce dossier — et je crois que je dois répondre rapidement — avance très bien. Si quelqu'un d'autre a une question, je suis ravi de donner plus de détails. Nous travaillons déjà...
    Vous avez plus de temps que moi.
    ... avec les provinces à ce sujet. Les provinces ont affirmé qu'elles collaboreront avec nous afin de rendre l'information sur la propriété bénéficiaire accessible. Il faut donc chercher à établir un processus dynamique qui nous offrira l'information nécessaire pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés, c'est-à-dire prévenir les comportements problématiques. Pour y arriver, je lirai le rapport du Comité avec attention.
    Merci à vous deux.
    La parole est à vous, monsieur Albas.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, vous avez récemment apporté des changements au Code criminel en ce qui concerne le blanchiment d'argent au Canada. Ce n'est pas la ministre de la Justice qui l'a fait. En réalité, vous avez créé une échappatoire pour les grandes entreprises qui font du blanchiment d'argent.
    Comment pouvez-vous penser que ces changements contribuent à assurer la sécurité des Canadiens?
    Vous pourriez peut-être expliquer comment vous en êtes arrivé à cette conclusion.
    Dans le projet de loi C-74, à la section 20, vous avez modifié une partie du Code criminel portant, entre autres choses, sur le recyclage des produits de la criminalité, une modification qui, dans les faits, donne une échappatoire aux grandes sociétés. Ne vous rappelez-vous pas votre propre projet de loi?
    Comment arrivez-vous à la conclusion que cela donne une échappatoire aux sociétés? C'est ce que j'essaie de comprendre.
    Un accord de suspension des poursuites permet en réalité aux sociétés dont on sait qu'elles sont coupables de recyclage de produits de la criminalité de ne pas se voir imposer de conséquences par les tribunaux. C'est votre mesure législative, monsieur le ministre. En quoi cela améliore-t-il la sécurité des Canadiens?
    Je pense que vous vous méprenez peut-être sur l'objectif visé.
    Une organisation qui n'obéit pas à la loi doit répondre de ses actes, et ce, d'une manière qui permette de protéger les Canadiens. C'est ce que nous essayons de faire. À cette fin, nous voulons nous assurer d'employer une méthode qui fait en sorte que ces organisations subissent les conséquences de leurs actes criminels ou de leur mauvaise conduite sans que cela n'ait quelque répercussion négative sur leurs employés ou d'autres personnes qui, il se trouve, travaillent dans l'organisation, mais n'ont rien à voir avec la situation. La stratégie de l'accord de suspension des poursuites — une stratégie qui, comme vous le savez probablement, est employée par d'autres pays, les États-Unis et le Royaume-Uni notamment — est à notre avis une façon prudente de veiller à ce que les sociétés qui ont commis des actes répréhensibles en subissent les conséquences d'une manière qui ne nuise pas à l'économie et qui fait en sorte que ce sont les vrais responsables de la mauvaise conduite qui subissent les conséquences et non pas des personnes qui ne sont pas responsables de la situation, comme celles qui travaillent pour ces sociétés sans être au courant de ce qui se passe. Nous pensons que c'est une façon de faire judicieuse.

  (1300)  

    Comme cette mesure législative n'a pas pu être étudiée par le Comité de la justice — en fait, monsieur le ministre, l'amendement a été apporté dans le cadre de l'étude article par article —, nous n'avons pas pu obtenir d'explications du gouvernement à ce sujet. Je suis très déçu que vous ne puissiez simplement pas nous dire en quoi cette mesure accroît la sécurité des Canadiens.
    Je vais toutefois revenir à la question de la propriété bénéficiaire. Vous travaillez avec les provinces — c'est bien — pour créer un registre. Les gouvernements provinciaux et fédéral y auront évidemment accès. Cela comprend-il l'Agence du revenu du Canada.
    Monsieur le ministre, voulez-vous d'abord terminer votre autre réponse? J'ai l'impression que vous n'aviez pas complètement fini...
    J'ai le temps?
    Oui, vous avez le temps. Ensuite, vous passerez à celle-ci.
    Nous pouvons passer à la nouvelle question, cela me va.
    Allez-y.
    Si vous me le permettez, monsieur le ministre, le registre n'existe pas encore. L'entente entre les ministres ferait en sorte que les sociétés détiennent la propriété bénéficiaire selon les modifications apportées aux lois sur les sociétés fédérales, provinciales et territoriales. Nous allons poursuivre les discussions sur les avantages des différents types de registres.
    Les renseignements contenus dans un tel registre seraient-ils mis à la disposition de l'Agence du revenu du Canada. C'est une question très simple.
    Bien, comme vous venez de l'entendre je pense, nous n'en sommes pas encore là. Nous allons poursuivre nos discussions avec les provinces dans l'optique de faire en sorte que la disponibilité de l'information cadre avec le but visé.
    Il est question ici d'évasion fiscale, monsieur le ministre, de moyens pour s'attaquer à ce problème. La question est assez simple. Pourquoi créer un registre fédéral sur la propriété bénéficiaire si on ne le met pas à la disposition de l'Agence du revenu du Canada?
    Je pense qu'il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs. Il est clair que...
    D'accord.
    ... collaborer avec les provinces signifie que nous devons bel et bien travailler avec elles pour parvenir à une solution.
    En fait, nous percevons déjà des impôts pour bien des provinces, mais poursuivons.
    Laissez d'abord le ministre terminer sa réponse.
    M. Dan Albas: Bien, il...
    Le président: Non. Vous allez avoir le temps.
    Le but de cette décision est, bien sûr, de faire en sorte que nous puissions avoir l'information dont nous avons besoin pour mettre nos lois à exécution de manière efficace. Cela comprend nos lois fiscales, ce qui veut dire que l'Agence du revenu du Canada aura probablement un rôle à jouer. Nous voulons toutefois agir en collaboration avec les provinces pour arriver à une solution de la manière appropriée.
    Très bien. Donc, l'Agence du revenu du Canada aurait accès à l'information pour pouvoir s'attaquer au problème de l'évasion fiscale — et les provinces veulent évidemment contribuer à cet effort —, mais je pense aussi que ce serait bon pour notre régime ici à Ottawa. Comme nous le savons, nous fournissons tous des renseignements au commissaire à l'éthique à propos de nos avoirs, etc., et ce serait peut-être plus facile d'éviter les omissions dans les déclarations sur les avoirs transmises au commissaire par les titulaires de charge publique. J'espère que vous y songerez pour les futurs titulaires de charge publique.
    Voulez-vous répondre, monsieur le ministre?
    Non, je n'ai pas entendu de question.
    D'accord.
    Vous avez la parole, monsieur Dusseault.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur le ministre, d'être parmi nous.
    J'aimerais revenir sur la propriété bénéficiaire ainsi que sur la déduction que vous avez établie avec les provinces et qui a mené à un accord visant à tout le moins à rendre l'information accessible dans les entreprises, à la demande des autorités.
    Discutez-vous de mesures pour l'avenir?
    Dans le cadre de ses discussions avec les provinces, le gouvernement fédéral a-t-il favorisé un registre public?

  (1305)  

    Comme vous le savez, nous travaillons en ce moment avec les provinces pour nous assurer de disposer de l'information nécessaire. À notre avis, cet objectif est central. Il y a presque deux ans et demi, j'ai commencé à travailler avec les provinces pour trouver une solution. Environ 7 % des sociétés sont fédérales. Les autres sont donc enregistrées dans les provinces. C'est pourquoi il est nécessaire de travailler avec les provinces pour trouver une solution.
    Nous ne savons pas encore exactement comment cela va être considéré. Il y a des gens qui pensent qu'un registre public est nécessaire tandis que d'autres pensent qu'il est possible d'atteindre nos objectifs et d'améliorer la situation en utilisant des moyens un peu différents de ceux des autres pays. Avec les provinces, nous sommes en train de considérer l'approche à adopter.
    Lors de vos discussions avec les provinces, êtes-vous simplement à l'écoute?
    Pour ma part, je vais consulter le rapport de votre comité et prendre en compte votre avis. Nous allons poursuivre les discussions pour trouver une solution qui fonctionne.
    En outre — et c'est étroitement lié à cela —, les structures sont de plus en plus complexes. En effet, comme vous l'avez vous-même souligné, les structures des compagnies sont reliées à des entreprises partout dans le monde.
     Que faites-vous pour vous assurer qu'il y ait un registre ou une forme d'accessibilité à la propriété bénéficiaire pour les entreprises à l'étranger?
    Je crains que les efforts déployés par le Canada soient un peu vains. Les structures utilisent maintenant des compagnies à l'étranger qui ne sont pas soumises aux mêmes règles en matière de propriété bénéficiaire. J'ai peur que le registre, au Canada, ne serve à rien en fin de compte. Les gens malhonnêtes vont recourir à des structures complexes qui vont permettre de camoufler la propriété bénéficiaire.
    Comment pourra-t-on faire en sorte que tous les pays s'unissent pour utiliser conjointement un registre de propriété bénéficiaire de façon à empêcher les gens malhonnêtes de recourir à des structures à l'étranger?
    Il est difficile de trouver une façon d'améliorer notre situation. Nous avons travaillé avec les autres pays de l'OCDE pour nous assurer que des accords pourront améliorer la situation.
    Comme vous le savez, nous avons fait deux choses importantes au cours des deux dernières années: nous avons adopté la Norme commune de déclaration, qui nous permet d'accéder à l'information des autres pays, et nous avons signé l'accord sur l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices pour s'assurer que les compagnies ne peuvent pas trouver d'endroits où les impôts sont très bas et où on ne fera aucune retenue sur leurs profits.
    Madame Ryan, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Nous travaillons aussi avec nos partenaire du Groupe d'action financière sur le blanchiment de capitaux, le GAFI, dont le but est également de lutter contre le blanchiment d'argent.

[Traduction]

    Vous pouvez poser une question, mais soyez bref.

[Français]

    Un autre sujet a été évoqué à plus d'une reprise lors des discussions avec les témoins. Il semble que la question des valeurs mobilières dans les endroits à risque ne soit pas mentionnée dans le document de discussion que vous avez publié en février 2018. Des témoins ont dit que le Canada était peut-être un endroit à risque, mais que cela n'avait été mentionné ni par le ministère des Finances ni lors des témoignages.
    Peut-être aimeriez-vous corriger le tir et préciser qu'il y aurait peut-être un risque du côté des valeurs mobilières pour ce qui est du blanchiment d'argent.
     Votre rapport est très important pour nous. Il nous permettra de connaître les défis auxquels on fait face et les façons de faire les choses dans les autres pays, ainsi que les risques pour l'avenir. À notre avis, c'est important d'en prendre connaissance.

  (1310)  

[Traduction]

    Je vous remercie tous les deux. Nous avons beaucoup entendu parler de valeurs mobilières pendant nos déplacements, alors je m'attends à ce qu'il en soit question.
    Vous avez la parole, monsieur Sorbara.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à vous, monsieur le ministre.
     Nous avons probablement entendu plus de 100 témoins dans le cadre de notre étude, dont les représentants de certains organismes. Je dois dire que, quand nous nous sommes rendus à New York et à Toronto, et à Londres pour ceux qui sont allés, la rétroaction a vraiment... le niveau de détail que nous ont donné les organismes d'ailleurs, de pays autres que notre merveilleux pays, nous a été extrêmement utile. Les renseignements qui nous ont été fournis et leur niveau de détail ont été très appréciés, que ce soit par FinCEN, le département de la Justice, le Trésor ou le bureau du procureur général de l'État de New York, et je pense que cela va contribuer à la qualité de notre rapport. Parfois, je me dis que j'aurais bien aimé que les organismes de notre propre pays nous donnent autant de détails, mais de nombreuses personnes ont néanmoins contribué à notre étude.
    Ma question est liée à l'article qui a été publié par le Hill Times sur l'éventuelle création d'un registre sur la propriété bénéficiaire envisagée par le gouvernement fédéral dans le cadre de l'examen de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité entrepris par le Comité des finances de la Chambre des communes. On y indiquait que le Canada était considéré comme accusant un retard au chapitre de la transparence des sociétés.
    Vous avez amorcé un dialogue avec les provinces en décembre 2017 et, grâce à cette initiative, nous sommes parvenus à une entente visant à renforcer la transparence relative à la propriété bénéficiaire. Voici ma question, monsieur le ministre: quelle est la situation au Canada et quelles mesures prenons-nous pour dissiper l'impression que le Canada accuse un retard en matière de transparence des sociétés?
    Je pense qu'il faut d'abord reconnaître que la structure d'enregistrement des entreprises présente des défis particuliers au Canada. Le fait que les entreprises soient enregistrées à l'échelle provinciale et à l'échelle fédérale partout au pays nous pose un important défi que nous devons surmonter. Toutes choses étant égales par ailleurs, il serait nul doute plus simple d'avoir un seul processus d'enregistrement, mais ce n'est pas notre réalité.
    Pour ce qui est des affirmations selon lesquelles nous devrions faire plus que ce que nous faisons — et je n'ai pas vu l'article auquel vous faites allusion —, il faut reconnaître qu'il reste encore du travail à faire. Il nous faut cette information et c'est le seul moyen pour nous de faire face à certains de ces problèmes. C'est exactement la raison pour laquelle nous mettons l'accent sur cet élément depuis le début.
    Je tiens à souligner que les provinces n'ont manifesté aucune réticence. Le Canada compte 10 provinces et 3 territoires, et il n'est pas toujours facile de parvenir à une entente, mais, sur cette question, il y a entente. Les provinces ne fonctionnent pas toutes avec la même rapidité; les choses n'avancent donc pas toujours, tout à fait, aussi vite que nous le souhaiterions. Nous allons gérer la situation de près. Nous estimons qu'il est essentiel de pouvoir obtenir l'information et de veiller à ce que les autorités compétentes y aient accès lorsqu'elles en ont besoin. Les choses avancent. Nous n'y sommes pas encore complètement, mais nous allons continuer d'y travailler.
    Évidemment, la question de la propriété bénéficiaire a été soulevée à quelques reprises durant l'étude. Les États-Unis font face à un problème semblable.
    Par exemple, un condominium à New York peut être vendu pour 100 millions de dollars sans que personne connaisse l'identité de l'acheteur ou la provenance des fonds. La même situation pourrait se produire ici, à West Vancouver ou à Toronto: l'achat d'une maison de plusieurs millions de dollars pourrait être fait au nom d'une personne morale ou d'une fiducie, ce qui permettrait de taire l'identité de l'acheteur ou la provenance des fonds. Selon moi, l'entente de décembre constitue un pas important vers l'établissement d'une forme de registre, dont il restera à régler les détails, comme établir si l'information doit ou non être publique, et ainsi de suite.
    Au troisième point de l'entente de décembre, il est indiqué que les modifications aux dispositions législatives touchant la transparence en matière de propriété bénéficiaire pourraient entrer en vigueur le 1er juillet 2019. Pourriez-vous nous dire où on en est par rapport au point 3 de l'entente de décembre?

  (1315)  

    Les travaux en collaboration avec les partenaires provinciaux et territoriaux vont bon train. Nous avons réglé les détails techniques et mené des consultations ciblées, dont nous ferons état auprès des ministres lors de la réunion prévue la semaine prochaine.
    D'accord.
    Allez-y, monsieur O'Toole.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur le ministre, je vous remercie de votre présence.
    Ma question porte sur la conférence « Pas d'argent pour le terrorisme ». J'imagine que vous y étiez, à l'instar de la plupart de vos homologues du G7 et du G20.
    Avez-vous signé la déclaration conjointe issue de la conférence?
    À ma connaissance, la conférence n'a engendré aucun document signé.
    Il s'agit d'une déclaration commune. J'ai peut-être quelque peu exagéré.
    Ma question porte sur le premier engagement mentionné dans la déclaration, qui est énoncé comme suit:
(1) Poursuivre le renforcement de nos cadres juridiques et opérationnels internes pour la collecte, l’analyse et le partage des informations par les autorités nationales
    Cette semaine, avec l'adoption du projet de loi C-59 qui modifie la Loi sur la communication d’information ayant trait à la sécurité du Canada, nous avons supprimé des pouvoirs en matière de communication de renseignements liés à la sécurité nationale. Voilà qui me semble contraire aux objectifs ambitieux de lutte au financement terroriste qui ont été fixés à la conférence.
    Nous allons poursuivre nos efforts afin d'obtenir les informations nécessaires au travail que nous nous efforçons d'accomplir. Je peux affirmer que le gouvernement ne détournera pas son attention de cet objectif. Nous constatons qu'il y a d'importantes étapes à franchir dès maintenant.
    Justement, il a été question de propriété bénéficiaire, un élément crucial à nos yeux, mais qui demeure nébuleux, comme on l'a souligné.
    Là n'est pas l'objet de ma question, monsieur le ministre.
    Pensons à ce qui se passe à Londres, où les banques et les institutions financières communiquent des informations entre elles et, par l'intermédiaire de la Joint Money Laundering Intelligence Taskforce et d'autres entités, les partagent aussi avec le secteur public. Au Canada, nous retirons aux autorités publiques la capacité de communiquer le même genre d'informations liées au financement du terrorisme et au blanchiment d'argent. Pourquoi accordons-nous plus de confiance aux institutions financières qu'aux ministères fédéraux en matière de communications de renseignements?
    Vous n'êtes pas sans savoir que les banques canadiennes veulent être habilitées à faire la même chose au Canada.
    Je suis navré, mais je ne vois pas où vous voulez en venir.
    Nous avons entendu dire que nos partenaires, c'est-à-dire les pays qui ont participé à la conférence « Pas d'argent pour le terrorisme », rendent leurs ministères respectifs plus aptes au partage d'informations. Or, le projet de loi C-59, que nous avons adopté cette semaine, diminue la capacité à communiquer des renseignements pertinents. Pourquoi allons-nous à contre-courant de nos alliées et partenaires du G20?
    Vous comprendrez sans doute que tous les pays présents à cette conférence ont des approches différentes pour assurer une circulation appropriée des informations dans leurs administrations respectives.
    Au Canada, nous estimons que le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, ou CANAFE, permet aux institutions financières de transmettre des informations au gouvernement fédéral. Nous allons toujours veiller à maintenir un équilibre entre la protection de la vie privée des Canadiens et l'importance d'obtenir ces renseignements. Il s'agit d'une préoccupation constante.
    Mettons de côté le CANAFE, car les experts en sécurité affirment que le maintien en vase clos de l'information rend le contexte propice au blanchiment d'argent et au financement du terrorisme. On parle de communication d'informations dans la communauté internationale et, durant la présente séance, du partage d'informations financières entre institutions, mais il semble que nous ne puissions pas compter sur les organismes de notre propre gouvernement pour faire de même.
    Pourquoi avez-vous supprimé cette capacité dans le projet de loi C-59?
    Comme je l'ai mentionné, l'approche que nous préconisons nous permet à la fois d'obtenir les informations et de protéger la vie privée des Canadiens, ce qui est un équilibre délicat à maintenir.
     Dans votre introduction, vous vous êtes exprimés en des termes très fermes, que Greg a cités. Vous avez affirmé que nous devons mobiliser tous les outils disponibles.
    En fait, vous retirez aux organismes fédéraux un outil qui leur est nécessaire pour contrecarrer le financement du terrorisme. Comment pouvez-vous faire cela tout en soutenant qu'il faut mobiliser tous les outils disponibles?
    Nous serons heureux d'entendre les idées et recommandations du Comité sur la façon de lutter contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme tout en protégeant les informations financières des Canadiens.
    Nous comptons adopter une approche qui concilie ces deux importants aspects de la question, comme le souhaitent tous les parlementaires, selon moi.

  (1320)  

    Nous allons devoir passer à un autre intervenant.
    La parole est à Mme O'Connell.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence, monsieur le ministre.
    Pour reprendre le point soulevé par M. O'Toole, je signale que des fonctionnaires fédéraux ont indiqué que le financement pour les enquêtes du ministère à ce niveau vient d'être rétabli après avoir été réduit par le gouvernement précédent. Cette soudaine préoccupation au sujet du vase clos est particulièrement intéressante, car le gouvernement précédent a coupé les effectifs qui menaient justement ce genre d'enquêtes. Je suis certaine que ce témoignage sera mentionné dans le rapport, où l'on recommandera sans doute de réinvestir dans la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, étant donné l'incurie du gouvernement précédent à cet égard.
    Je n'ai pas de questions précises sur les points abordés jusqu'à présent, car le Comité est encore à travailler sur la formulation de recommandations. M. Fergus a toutefois soulevé une question tout à l'heure qui me préoccupe un peu. Il s'agit de la communication d'informations entre les banques et le CANAFE, et le dialogue qu'ils pourraient avoir. Aux États-Unis, FinCEN a un programme accessible aux organismes d'application de la loi et à des procureurs de certains États. Le programme semble très efficace.
    Techniquement, les banques ne sont pas autorisées à communiquer des informations à l'heure actuelle, mais, dans les organismes d'application de la loi, les collègues forment une très petite communauté et partagent quand même ces informations de manière non officielle. Je m'inquiète du fait qu'en raison de la réglementation et des pénalités possibles, les banques cherchent à diminuer les risques en fermant les comptes bancaires de certains clients. Je crois que le sujet mérite une conversation.
    Il y a peut-être lieu de discuter du droit à un compte bancaire au pays. Une banque qui craint d'encourir une pénalité peut fermer le compte bancaire d'un client. Un Canadien qui n'a rien fait de mal peut se retrouver sans accès à un compte bancaire. Nous devons nous pencher sur la qualité des rapports produits par les banques. Certes, elles peuvent vouloir éviter les pénalités, mais pas au point de rejeter du système une personne innocente. Entre elles, par des voies informelles, elles décident que certaines personnes représentent un risque trop élevé et elles refusent l'accès à un compte bancaire.
    J'ignore si vous avez discuté de cette question. Selon moi, il s'agit d'un domaine qui mérite d'être étudié. Avez-vous des observations à faire sur le sujet, ou non? Je peux aborder une autre question.
    Nous serons heureux d'entendre le point de vue du Comité sur la question que vous soulevez. Évidemment, si nous axons nos efforts pour obtenir des informations et dissuader les comportements délinquants, il y aura des conséquences. Il faut réfléchir sérieusement à nos objectifs et aux répercussions.
    Merci.
    Durant les témoignages, nous avons entendu différentes perspectives de la part de représentants de nos propres organismes concernant la réputation du Canada sur la scène internationale, ce qui est intéressant. Sans contredit, les fonctionnaires font un très bon travail et nos systèmes fonctionnent. Toutefois, comme vous l'avez souligné, les choses ont changé en ce qui concerne le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme, et nous avons beaucoup de pain sur la planche. Je crains que le Canada soit en train d'acquérir une réputation de bon endroit pour blanchir de l'argent. Selon les témoignages que nous avons entendus, les gens qui se livrent à la traite des personnes et les passeurs de drogues vont là où se trouvent les blanchisseurs d'argent, qui se soucient peu des activités de leur clientèle.
    Étant donné le point de vue du Comité sur les changements et les investissements consentis pour amener notre système au même niveau que beaucoup d'autres pays, y a-t-il un engagement à cet égard de la part de votre ministère et celui de la Sécurité publique? C'est certainement ce qu'ont fait les États-Unis et le Royaume-Uni, qui ont mis sur pied un programme conjoint entre les entités responsables des finances et de la sécurité publique dans leur administration respective. Avez-vous songé à faire de même, c'est-à-dire non pas seulement discuter de la question en comité, mais aussi superviser la création de politiques dans des examens futurs?

  (1325)  

    Nous sommes d'avis que la collaboration entre différents secteurs du gouvernement est cruciale dans ce dossier. Le ministère de la Sécurité publique participe déjà à nos efforts pour assurer l'obtention des bonnes informations.
    Nous faisons aussi des progrès dans d'autres domaines que ceux que vous mentionnez. Nous sommes conscients que d'autres sources de risques représentent des enjeux critiques. Pensons notamment à la cybersécurité, dont l'importance pour la circulation des informations est évidente, ce qui est reflété dans les investissements que nous faisons dans ce domaine cette année, lesquels ont été accueillis très favorablement par le secteur bancaire, avec qui nous avons étudié la question ces dernières années.
    Merci.
    Nous allons devoir nous arrêter là.
    C'est au tour de M. Kelly d'avoir la parole.
    Lorsqu'elle a comparu devant le Comité, la directrice du Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada a parlé du fardeau administratif du Centre et de son objectif déclaré de réduire le fardeau administratif de l'observation de la loi. Appuyez-vous sa démarche?
    Je crois que nous devons constamment penser non seulement à notre objectif de posséder l'information, mais aussi à des mesures visant à garantir que les entreprises ne sont pas indûment accablées par la complexité administrative.
    Nous avons entendu que l'observation de la loi représente un énorme fardeau pour diverses industries, y compris celle de l'immobilier, dont vous avez fait mention dans votre discours d'ouverture. Nous avons également entendu que certaines des exigences de déclaration semblent arbitraires et qu'elles ciblent seulement les activités qui dépassent un seuil au lieu des activités suspectes. Êtes-vous aussi d'avis que nous devrions nous attaquer à la question et cibler les comportements suspects plutôt que juste les activités qui dépassent un seuil?
    Je pense qu'il est important d'entendre la réponse du Comité, car nous serions heureux de tenir compte de toute observation du Comité sur les types de renseignements actuellement demandés et l'approche adoptée à cet égard.
    Je veux m'assurer de vous avoir bien compris. Dans votre réponse à la question de M. Albas, vous avez indiqué que vous appuyez l'objectif d'établir un registre de propriété bénéficiaire. Est-ce exact?
    Au fil des ans, j'ai clairement indiqué que les propriétaires bénéficiaires des sociétés et des fiducies du Canada doivent nous comprendre.
    Le registre devrait-il être accessible au public? Dans la négative, qui devrait y avoir accès?
    Comme je l'ai indiqué, nous collaborons avec les provinces pour faire en sorte que l'information est accessible dans ce domaine. La première étape consiste à garantir l'accessibilité de l'information. De toute évidence, le fait de posséder cette information nous permettra de...
    Toutefois, nous la posséderons. Quelle serait votre recommandation concernant le type de registre à établir? Devrait-il être accessible au public ou non?
    Nous continuerons de travailler avec les provinces afin de parvenir à une conclusion qui pourra être mise en oeuvre dans l'ensemble du pays. Comme je l'ai mentionné, je serais heureux d'entendre les observations du Comité sur vos idées à la suite des réflexions des témoins.
    Vous avez maintenant l'occasion d'exprimer votre opinion. Vous pouvez nous dire ce que vous préférez.
    C'est vrai. Comme vous pouvez l'imaginer, je vais continuer à avoir des occasions de donner mon avis.
    L'Agence du revenu du Canada aurait-elle accès au registre?
    Nous visons clairement à disposer de renseignements sur des organismes afin de pouvoir nous assurer qu'ils respectent nos lois fiscales. Il s'agit donc évidemment de notre intention.

  (1330)  

    Le commissaire à l'éthique y aurait-il accès?
    Si vous avez des recommandations pour nous concernant l'information et son accessibilité, nous serions heureux de les entendre. Nous devrons toujours trouver un juste équilibre entre la protection des renseignements personnels et l'accessibilité de l'information et ses motifs.
    Selon vous, où se trouve le juste milieu entre la protection des renseignements personnels et l'intérêt public pour les personnes à risque sur le plan politique, comme les parlementaires?
    En tant que parlementaire, je suis convaincu que vous avez une opinion sur le sujet. Nous serions ravis de l'entendre.
    Combien de temps nous reste-t-il?
    Il vous reste environ une minute.
    Je crois que Dan souhaite poser une question.
    Oui. Je vous remercie de nouveau, monsieur le président et monsieur Kelly.
    Monsieur le ministre, vous avez imposé des normes communes de déclaration aux coopératives de crédit et elles les respectent. Lorsque je parle à un bon nombre d'entre elles, elles me disent qu'elles trouvent que les exigences en matière d'observation de la loi qui ont été ajoutées par le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada sont très encombrantes.
    Vous avez nommé la nouvelle directrice du Centre. Elle a comparu devant le Comité et a indiqué qu'elle s'efforcera de régler le problème. L'aidez-vous à améliorer le régime et à réduire le fardeau qu'il représente pour les petites coopératives de crédit? Celles-ci sont souvent les seules institutions financières dans les régions rurales.
    Je pense que vous nous avez entendus dire, y compris le premier ministre, que nous pensons qu'il est toujours possible de faire mieux. Dans la mesure du possible, nous essaierons certainement d'améliorer la situation.
    Lorsque je parle d'amélioration, je ne parle pas de l'ajout d'autres exigences. Il est question d'un bon examen et de moins de recherches... Elle l'a déclaré publiquement. Vous l'avez nommée par l'entremise du gouverneur en conseil. Il s'agissait de votre recommandation. Travaillerez-vous avec elle en ce sens?
    J'ai compris la question la première fois qu'elle a été posée. Oui, je peux confirmer que nous tenterons de continuellement améliorer la situation.
    Monsieur Grewal, vous avez la parole. Il s'agit de la dernière question.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, d'être venu ici aujourd'hui.
    Beaucoup de Canadiens à la maison respectent les règles. Ils travaillent fort et ils veulent faire en sorte que tout le monde respecte les règles et travaillent fort. Nous avons évidemment remarqué que le blanchiment d'argent a des effets négatifs sur l'économie. Je pense que de nombreuses personnes ne savent pas à quel point les opérations de blanchiment d'argent sont complexes. La plupart des gens ne font qu'ouvrir un compte bancaire et effectuer leurs transactions sans craindre que leurs renseignements soient communiqués au Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada.
    Pouvez-vous nous décrire en termes très simples comment une institution financière ferait le suivi d'une activité et acheminerait cette information au Centre et ensuite à quel point le dossier serait transmis aux autorités?
    Étant donné que vous voulez une description détaillée, je pense que je vais demander à Annette...
    Je n'ai pas besoin d'une description détaillée, mais simplement d'une description de niveau élevé, afin que la plupart des Canadiens puissent comprendre comment le projet de loi fonctionne.
    À un niveau très élevé, nous tentons clairement d'assurer la prise en considération d'activités suspectes afin que nous puissions y mettre un terme si nous concluons qu'elles entraîneront le recyclage des produits de la criminalité ou le financement d'activités terroristes, comme nous en discutons actuellement.
    Comme nous le savons, il n'est pas facile de parvenir à ces conclusions. Un seuil important que nous avons choisi est celui de 10 000 $. Cependant, bien que ce soit un seuil important, je sais qu'il ne s'agit pas du seul facteur dont nous devons tenir compte, car il y a certainement eu des activités de financement d'activités terroristes, partout dans le monde, qui ont été financées par des sources de moins de 10 000 $ ou la combinaison de multiples sources. Par conséquent, il ne peut pas être le seul seuil. Nous devons réfléchir non seulement d'une manière purement objective, mais aussi avec un certain degré de subjectivité aux moyens dont nous pouvons parvenir aux conclusions qui protègent les Canadiens.
    Nous essayons de trouver ce juste milieu. Je pense que, à un niveau élevé, je voudrais que les Canadiens sachent que nous sommes d'avis qu'il faut exercer une vigilance soutenue dans ce domaine. Nous pouvons mettre en place des seuils qui nous permettent de passer en revue les activités qui dépassent ces seuils. Nous devrons penser continuellement aux façons dont nous mettons à jour les règles pour nous protéger tout en tenant compte de la confidentialité des renseignements puisque nous ne voulons pas appréhender à tort des gens qui ne font que mener leur vie normalement.
    Cependant, ces menaces sont bien réelles. Nous les avons observées dans des pays partout dans le monde. Nous ne devrions pas croire que nous sommes à l'abri d'acteurs malveillants qui cherchent peut-être à nous déstabiliser.

  (1335)  

    Monsieur le président, je cède le temps de parole qui me reste.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence, monsieur le ministre.
    Depuis longtemps, les banques font des efforts pour lutter contre le blanchiment d'argent. L'objectif premier du secteur bancaire est de contribuer à la prévention, à la détection et au signalement de toute activité criminelle et terroriste, tout en protégeant la vie privée des clients honnêtes.
    Comment le gouvernement prévoit-il échanger de l'information avec les parties concernées tout en protégeant le droit à la vie privée des Canadiens?
    C'est le but visé. Il faut toujours évaluer si les règles ont besoin d'être changées, tout en s'assurant que les renseignements personnels des gens sont protégés.
    C'est pour cela que l'opinion et les recommandations de votre comité sont très importantes. Vous avez eu l'occasion de parler avec plus d'une centaine d'experts. Nous sommes vraiment à l'écoute de vos recommandations sur les changements qu'il faudrait apporter pour atteindre ce but.
    Je vous remercie, monsieur le ministre.

[Traduction]

     D'accord. Voilà qui met fin à la période de questions.
    Nous allons entendre les fonctionnaires dans un instant, mais tout d'abord, j'aimerais soulever quelques points que vos fonctionnaires voudront peut-être examiner. Nous avons entendu, tant ici que dans le cadre de nos déplacements, à quel point il est primordial de faciliter le respect des exigences. L'un des témoins que nous avons entendus à New York a parlé de la possibilité d'avoir un système de déclaration convivial doté d'un menu déroulant et d'une case à cocher. Ce sont des choses auxquelles il faut réfléchir.
    Par ailleurs, il a beaucoup été question des valeurs mobilières lors de nos réunions avec des représentants des États-Unis et du Canada, et selon ce qu'on nous a dit, on ne prend pas au sérieux ici la question du blanchiment d’argent en lien avec les valeurs mobilières. Ce serait donc un deuxième élément.
    La question de la transparence du commerce a également été soulevée, car il semble que les documents et les chiffres concernant les importations et les exportations ne correspondent pas nécessairement.
    On a beaucoup recours au ciblage géographique aux États-Unis, et cela a permis d'aboutir à d'importantes conclusions.
    Des deux côtés, on a parlé des fiducies et de la multiplication des fiducies.
    Enfin, on s'est également fait dire que la communication de renseignements est essentielle, surtout entre les banques. À l'heure actuelle, si une personne se livre à des activités douteuses et qu'elle se fait virer d'une banque, elle n'a qu'à s'adresser à une autre banque. Il faut qu'il y ait en quelque sorte un moyen de transmettre ces renseignements. En revanche, il faut tout de même trouver un juste équilibre entre la communication des renseignements et la protection de la vie privée.
    Il y a d'autres réflexions qui n'ont pas été mentionnées par les membres du Comité, mais dont nous avons entendu parler durant nos déplacements.
    Sur ce, monsieur le ministre, je sais que vous avez un horaire chargé, et que nous avons un peu dépassé le temps qui nous était imparti. Merci beaucoup pour votre exposé.
    Nous allons faire une pause d'une minute, le temps que les autres fonctionnaires s'installent dans la salle.
    Merci beaucoup.
    Est-ce que les fonctionnaires, M. Maxime Beaupré et M. Wright, peuvent se joindre à nous?
    Il nous reste 19 minutes tout au plus.

    


    

  (1340)  

    Oui, bien sûr.
    D'accord. Allez-y.
    Nous allons passer à des séries de questions de trois minutes afin que tout le monde puisse intervenir.

[Français]

     Je suis encore un peu surpris de la réponse du ministre sur la propriété bénéficiaire. Il rencontre les ministres des Finances provinciaux, mais ne semble pas prendre position sur la question. Ils en ont discuté et ont franchi une étape, mais lors des discussions en cours, le ministère des Finances n'affiche aucune position, il est simplement à l'écoute.
     Si vous le permettez, je vais m'exprimer en anglais.

[Traduction]

    Les observations du ministre reflètent le dialogue qu'il maintient avec ses homologues des provinces et des territoires et grâce auquel nous avons pu réaliser des progrès dans ce dossier. La première étape, qui est à l'origine de l'accord conclu en décembre dernier, mettrait en place le cadre juridique qui nous donnerait les précisions nécessaires pour déterminer ce dont nous avons besoin pour créer un registre.
    Dans le contexte d'un projet de TI, par exemple, qui pourrait réunir les compétences fédérales, provinciales et territoriales, cette façon de procéder permettrait à tous de s'entendre sur le genre d'information dont nous avons besoin et d'harmoniser et d'uniformiser le tout dans la mesure du possible. Ensuite, nous pourrions discuter de la façon de recueillir l'information et de l'accès qui devrait être accordé aux diverses personnes selon le type de renseignements.
    C'est une façon logique de procéder, et je dirais que le ministre a fait preuve de leadership dans le cadre de cette discussion puisqu'il nous a permis d'en arriver à cette première étape. Nous allons poursuivre dans cette voie.

[Français]

     Je comprends.
    Je n'ai pas eu le temps d'aborder plus tôt avec le ministre la question des cryptomonnaies. Il s'agit d'un secteur à risque qui a été également identifié par le ministère.
    Pourquoi rien n'a-t-il été fait de ce côté, jusqu'à maintenant, surtout pour ce qui est des échanges? Nous avons entendu dire que certains pays ont réglementé l'échange de la cryptomonnaie, c'est-à-dire le fait de passer d'une monnaie réelle, c'est-à-dire une monnaie fiduciaire, à une monnaie virtuelle.
    Pourquoi, jusqu'à maintenant, le Canada n'a-t-il pas réglementé l'échange entre les monnaies réelles et les monnaies virtuelles?

[Traduction]

    Je suis ravie d'informer le Comité que le gouvernement a pris une mesure importante à ce chapitre. Le 9 juin dernier, nous avons publié un projet de règlement exhaustif qui s'attaque précisément à cette question. Le règlement, qui est actuellement soumis à l'examen du public dans le cadre de consultations, nous permettrait justement de préciser que les courtiers en monnaie virtuelle, qui sont désormais définis pour la première fois au Canada dans la loi, seraient traités au même titre que les autres entreprises de services monétaires.
    Pour répondre plus précisément à votre question, cela régirait la plateforme d'échange où se déroulent les échanges entre cryptomonnaies et monnaies fiduciaires et aussi les échanges entre cryptomonnaies. C'est un sujet dont vous avez beaucoup entendu parler, j'en suis certaine.
    Merci à vous tous.
    La parole est à vous, madame O'Connell.
    Merci beaucoup.
    Il serait sans doute utile de transmettre le règlement projeté au greffier afin que tous les députés puissent en prendre connaissance.
    J'aurais une question d'ordre technique. Nous avons au pays ce qu'on appelle les déclarations d’opérations douteuses, qui sont analysées par le CANAFE. Aux États-Unis, le FinCEN reçoit des rapports d'activités suspectes. Selon les divers témoins que nous avons entendus aux États-Unis, il semble que la façon de procéder dans ce pays est beaucoup plus simple et efficace qu'au Canada. Nous avons d'ailleurs recueilli le point de vue d'une personne qui signale des opérations douteuses dans les deux pays et qui connaît les deux systèmes.
    D'un point de vue technique, le ministère a-t-il examiné les rapports qui sont déposés aux États-Unis et a-t-il envisagé d'apporter des changements techniques aux formulaires afin de les simplifier? Si les gens au sein de ces institutions ne comprennent pas le processus, ne craignez-vous pas qu'ils y consacrent plus de temps? Un témoin nous a indiqué que chaque fois qu'il a dû remplir une déclaration d'opérations douteuses pour le Canada, il a dû consulter des pages et des pages d'un manuel pour savoir comment s'y prendre, alors qu'il ne faut que 15 minutes pour remplir ces mêmes déclarations aux États-Unis.

  (1345)  

    Il s'agit d'une question très importante, et je suis contente de pouvoir y répondre aujourd'hui.
    La façon dont les États-Unis simplifient la déclaration des activités douteuses et permettent ensuite à leurs autorités de s'adresser aux banques est très efficace. C'est une bonne chose puisque cela permet d'alléger le fardeau. La situation est très différente au Canada, compte tenu de la façon dont la Charte canadienne des droits et libertés est constituée, en particulier les articles 7 et 8 concernant les perquisitions et les saisies, les droits des Canadiens et la mesure dans laquelle certains renseignements ne peuvent ou ne doivent pas être utilisés dans le cadre de poursuites. Cela nous empêche de nous doter d'un système semblable au système américain.
    Pouvons-nous améliorer les choses? Nous avons entamé des discussions avec les institutions financières canadiennes ainsi qu'avec des gens du milieu universitaire. Le Royal United Services Institute au Royaume-Uni collabore avec nous et le secteur privé pour déterminer quelles sont les pratiques exemplaires, ailleurs dans le monde, qui seraient conformes à la Charte. Nous nous penchons actuellement là-dessus et nous attendons avec impatience les réflexions et les conseils du Comité.
    Vous avez soulevé deux autres points, d'une part, la convivialité du système, et d'autre part, la façon dont on peut obtenir l'information des diverses entités du secteur privé grâce à une harmonisation avec leurs systèmes de TI. Je crois que vous avez entendu le directeur du CANAFE dire qu'en effet, il s'agit d'une nécessité. Nous devrons harmoniser nos systèmes avec ceux des entreprises pour être en mesure de recueillir cette information.
     Maintenant, la communication des diverses exigences aux entreprises — le comment, le pourquoi, etc. — cadre parfaitement avec les objectifs établis par nos collègues du CANAFE.
    Allez-y, monsieur Albas.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier chacun d'entre vous pour le travail que vous faites au quotidien. Nous sommes très heureux de pouvoir bénéficier de votre expertise au Comité.
    Votre ministère a publié un document sur ce travail, qui est très utile, et je sais que vous devrez travailler avec le gouvernement, si on veut apporter des changements législatifs, et je ne vais pas aborder cette question pour l'instant, mais à l'heure actuelle, les Canadiens ont des obligations à respecter en matière de sanctions, par exemple. Si une personne ou une entité est visée par nos sanctions économiques et qu'un institut financier ou un individu qui est assujetti au régime de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes travaille avec cette personne ou cette entité, il pourrait être poursuivi au titre de différentes lois. Évidemment, il en va de même pour le respect de la législation antiterroriste.
    L'une des difficultés qu'on a évoquées — en fonction des règles actuelles —, c'est le fait qu'il n'y a pas de liste globale. Affaires mondiales s'occupe de certaines sanctions. Vous vous occupez d'autres sanctions. Ne serait-il pas possible que votre ministère travaille de façon plus productive en vertu du cadre législatif actuel pour simplifier les choses, de sorte que ceux qui travaillent dans ce secteur puissent vérifier rapidement si les gens avec qui ils font affaire ne vont pas s'attirer des problèmes?

  (1350)  

    C'est une question très importante.
     Le gouvernement a récemment affecté de nouvelles ressources à cet effet à Affaires mondiales Canada afin de mettre sur pied les bonnes équipes et de réunir les bons experts, et ainsi de suite. Le ministère pourra ainsi appuyer le régime des sanctions d'une manière beaucoup plus concrète et tangible, en ayant les bons renseignements communiqués de la bonne façon, conformément à ses objectifs.
     M. O'Toole a parlé du projet de loi C-59 et du fait que les ministères se heurteront désormais à davantage d'obstacles au moment de communiquer de l'information. Est-ce ce qui vous empêche d'avoir une liste globale?
    Nous ne sommes pas les instigateurs de ce projet de loi. Ian, vous en savez plus que moi à ce sujet.
     Le projet de loi C-59 modifiait la Loi sur la communication d'information ayant trait à la sécurité du Canada, la LCISC, plus particulièrement la capacité à communiquer de l'information. Vous devriez donc vous adresser au ministère de la Sécurité publique ou au ministère responsable de ce projet de loi, mais que nous sachions, les changements apportés n'ont pas limité cette capacité. Je pense qu'on a enlevé un organisme de la liste, mais cela n'a pas eu d'incidence sur le CANAFE ni sur notre capacité à communiquer des renseignements en vertu de la LCISC.
    En ce qui concerne les sanctions, c'est du domaine public, de toute façon. C'est une liste qui sera publiée en bonne et due forme, et nous devrons en discuter avec nos collègues d'Affaires mondiales, mais je ne crois pas que c'est une question qui pourrait poser une menace à la sécurité nationale au titre de la loi.
    Je l'espère. Je vous remercie de votre écoute.
    Merci.
    C'est tout?
    C'est tout, en effet. Trois minutes sont vite écoulées, mais qui sait, votre tour reviendra peut-être.
    M. Sorbara est le prochain intervenant.
    Merci, monsieur le président. Je vais essayer d'être bref.
     Comment peut-on s'assurer que lorsque le CANAFE fait affaire avec des petites institutions financières, notamment les coopératives de crédit, on n'augmente pas le fardeau de ces petites institutions en les obligeant à se conformer aux exigences?
    C'est une excellente question. Le CANAFE déploie des efforts pour s'assurer que la communication avec les institutions et les moyens par lesquels ils reçoivent de l'information sont proportionnels. En revanche, on vise un objectif important, soit celui d'éliminer les échappatoires de notre régime dont pourraient profiter les blanchisseurs d'argent. Comme on l'a dit plus tôt, on cherche à atteindre un juste équilibre.
    L'une des choses très intéressantes dont nous avons entendu parler au cours de notre visite à New York, plus précisément au FinCEN, c'est l'utilisation d'ordonnances de ciblage géographique.
    Avons-nous un programme semblable? Il semble que ce soit très efficace de leur côté. Ils ont l'air d'avoir beaucoup plus d'outils à leur disposition, si je puis dire. Corrigez-moi si je me trompe. Si nous avons un programme similaire aux ordonnances de ciblage géographique, avez-vous des détails à ce sujet, et sinon, pourquoi n'est-ce pas le cas?
    Je crois que votre question renferme une partie de la réponse. Les Américains ne disposent pas d'autant d'outils que nous dans le secteur de l'immobilier; ils utilisent donc les ordonnances de ciblage géographique presque comme une mesure complémentaire là où ils n'ont pas les outils que nous avons.
    Cela dit, nous nous y intéressons comme à un outil stratégique dont nous ne disposons pas actuellement dans le régime. La question est de savoir si nous pouvons cibler concrètement les secteurs qui présentent, selon nous, plus de risques que d'autres. Nous explorons cette question dans une certaine mesure dans notre document, et nous attendons avec impatience le point de vue du Comité.
    Merci.
    Allons maintenant à M. Dusseault, puis à M. Grewal.

[Français]

     J'aimerais profiter du temps qu'il me reste pour revenir rapidement sur ce qui a été soulevé un peu plus tôt, à savoir le fait de voir son compte bancaire se faire fermer. On a dit que les autorités américaines pouvaient demander que des comptes restent ouverts. Ces autorités pourraient même indemniser ou protéger les banques du danger auquel elles s'exposent en conservant des comptes de banque aussi suspects.
    Y a-t-il le même régime au Canada? Sinon, est-ce quelque chose à envisager? Est-ce une question sur laquelle le Comité devrait se pencher?

  (1355)  

[Traduction]

    Je dirais que le régime n'est pas le même au Canada, mais que les objectifs et les contraintes sont semblables.
    D'abord, en ce qui concerne la fermeture de comptes bancaires, il y a essentiellement deux enjeux importants à prendre en considération. L'un est l'aspect social, le fait de ne pas retirer aux gens l'accès aux services bancaires, pour toutes sortes de raisons d'ordre social. L'autre concerne l'aspect de la sécurité: il faut éviter de pousser les gens dans l'ombre de sorte qu'ils s'éloignent encore plus du système bancaire officiel, ce qui présente son lot de risques. Nous tenons beaucoup à trouver un juste équilibre et à éviter que l'on ferme les comptes bancaires de personnes qui devraient absolument avoir accès au système bancaire.
    Pour ce faire, nous devons être encore plus précis et rigoureux sur ce qui constitue des opérations suspectes et le fardeau de la preuve. C'est donc très important.
    Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question qui concerne la façon dont nous pouvons collaborer avec les différentes institutions, je vais céder la parole à Maxime.

[Français]

    C'est un enjeu dont nous avons déjà entendu parler. Les institutions financières et les forces de l'ordre nous ont dit subir une telle pression. Nous nous penchons donc sur cette question.
     Vous avez entendu des témoignages et fait des voyages à l'étranger sur cette question. Si vous avez des conseils à nous soumettre, nous serons certainement disposés à les entendre.
    Il y a clairement un problème à cet égard. D'une part, les institutions doivent respecter leurs obligations lorsqu'elles soupçonnent l'existence de transactions douteuses, et d'autre part, il faut faciliter le travail des forces de l'ordre. C'est donc assez complexe, mais nous sommes certainement disposés à entendre vos suggestions à cet égard.
    J'ai mentionné l'indemnité qui serait donnée aux banques. On nous a dit qu'une lettre avait été envoyée à une banque pour lui demander de garder un compte ouvert et qu'on la protégerait si un problème surgissait. Fait-on quelque chose de ce genre au Canada en ce moment?
    Non, on ne le fait pas à ma connaissance.

[Traduction]

    C'est M. Grewal qui posera la dernière question.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les représentants du ministère.
    Se pourrait-il qu'une institution financière signale ce qu'elle estime être une opération douteuse au CANAFE, que le CANAFE lance une enquête, mais que le titulaire du compte ne soit jamais au courant de la situation?
    Ce qu'il est important de se rappeler, c'est que le CANAFE n'a pas de pouvoirs d'enquête. Il est tenu de surveiller l'ensemble du système des opérations ou des opérations douteuses. Lorsque les préoccupations atteignent un niveau suffisamment élevé, il communique l'information aux organismes d'application de la loi, aux autorités fiscales ou à d'autres instances compétentes, qui suivent alors les procédures normales d'enquête au Canada. Tout comme un voisin appellerait la GRC ou un autre service de police s'il voyait des activités suspectes, de la même façon, les droits et les protections habituels entrent en jeu.
    Allez-y, monsieur Beaupré.
    Je voulais simplement ajouter quelque chose au sujet des enquêtes.
    Comme Mme Ryan l'a souligné, le CANAFE ne mène pas d'enquêtes. Cependant, des enquêtes pourraient être effectuées lorsqu'un certain seuil est atteint et que le CANAFE communique des renseignements à un organisme d'application de la loi. Pour cette raison, il existe une interdiction — je ne me rappelle pas si c'est dans la loi ou dans le règlement — qu'on appelle « no tipping off ». Essentiellement, les institutions financières doivent veiller à ne pas révéler à la personne concernée qu'elles font une déclaration d'opération douteuse à son égard, car cette déclaration pourrait mener plus tard à une enquête. Par conséquent, il est tout à fait possible que le client ignore s'il fait quelque chose d'illégal ou non. Or, la banque trouvera peut-être cette opération suspecte, et elle transmettra alors l'information au CANAFE.

  (1400)  

    Nous allons devoir nous arrêter. Je remercie les témoins.
    Comme c'est la dernière réunion du Comité des finances, du moins pour un certain temps, au nom des membres du Comité, je tiens à remercier le greffier, les analystes, les interprètes et le personnel du Parlement qui contribuent au bon fonctionnement des séances des comités. Nous voulons également remercier le personnel de tous les partis, qui tente de garder les députés alertes et vigilants. Le personnel travaille de longues heures pour nous aider.
    Je remercie les membres du Comité de leur travail au cours des derniers mois. J'espère que vous aurez amplement l'occasion de passer du temps avec votre famille.
    La séance est levée.
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