Merci, madame la présidente. J'ai quelques remarques à faire, puis je présenterai une motion par la suite.
Nous sommes de retour ici et bon nombre de députés sont revenus juste pendant la fin de notre pause estivale. Depuis que je siège au Parlement, je n'ai jamais ressenti autant le besoin de convoquer une réunion d'urgence que depuis que cette question s'est présentée la semaine dernière. Depuis toutes les années que je suis en politique, c'est la première fois que j'estime qu'une réunion d'urgence s'impose et que nous ne pouvions vraiment pas attendre pour la tenir. Je veux remercier tous ceux qui sont ici aujourd'hui et mes collègues, tant du Parti conservateur que du NPD, qui ont jugé que la question était suffisamment critique pour rédiger une lettre afin de demander la tenue de cette réunion d'urgence pour discuter du projet d'agrandissement de Trans Mountain.
La semaine dernière, la Cour d'appel fédérale a conclu que Justin Trudeau n'a pas consulté les peuples des Premières Nations. Mardi, nos collègues au Comité des ressources naturelles ont demandé de voir le plan de Justin Trudeau pour la construction du pipeline Trans Mountain, mais il s'est servi de sa majorité pour couper court aux questions. Le lendemain, Justin Trudeau s'est défilé en lançant de belles paroles. Un gouvernement qui a promis d'être ouvert et transparent ne fait que continuellement tourner le dos aux Canadiens et créer de l'incertitude, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui: pour donner à Justin Trudeau et à son gouvernement l'occasion d'expliquer ses plans pour la construction de ce pipeline et de redonner du travail aux Canadiens.
De plus, nous sommes ici pour discuter de l'énorme perte de perspectives pour les Premières Nations si le gouvernement Trudeau ne va pas jusqu'au bout avec ce projet. La Cour fédérale n'aurait pas pu être plus claire la semaine dernière. Les libéraux n'ont pas respecté leurs propres normes en matière de consultation avec les peuples autochtones au Canada ainsi que le processus qu'ils ont eux-mêmes annoncé, et c'est un échec personnel de la part de Justin Trudeau. Le premier ministre et son gouvernement ont laissé tomber les plaignants des Premières Nations en tenant des consultations bâclées. Il a laissé tomber les Premières Nations qui ont signé d'importantes ententes sur les répercussions. Il a laissé tomber les Albertains. Il a laissé tomber les Britanno-Colombiens. Il a laissé tomber les Canadiens en continuant de nous faire perdre plus de 40 millions de dollars en revenus parce que nous ne pouvons pas acheminer nos ressources jusqu'aux côtes.
La Chambre de commerce du Canada a dit qu'en ne construisant pas le pipeline, on enverrait un message dévastateur aux investisseurs canadiens et étrangers. Depuis plus d'un an et demi, les Canadiens attendent que le premier ministre présente un plan concret pour assurer la réalisation de ce projet de pipeline. Quarante-trois Premières Nations en Alberta et dans ma province natale de la Colombie-Britannique attendent que le premier ministre veille à ce que les ententes sur les répercussions qui ont été laborieusement négociées avec Trans Mountain se concrétisent. Ce sont des ententes qui auraient généré plus de 400 millions de dollars pour les Premières Nations pour de la formation professionnelle, des emplois, des entreprises et des marchés publics, de même que pour des améliorations grandement nécessaires aux infrastructures locales. En ne menant pas à bien son propre processus de consultation, le gouvernement n'a pas tenu sa promesse qu'il a faite aux Premières Nations. Le premier ministre est responsable de ces ententes et perspectives perdues.
Le 13 juin de cette année, Justin Trudeau a déclaré dans cette enceinte que notre gouvernement a « mené les consultations les plus poussées jamais tenues avec les détenteurs de droits pour un grand projet au pays ». Le 30 avril, le ministre des Ressources naturelles a déclaré pendant la période des questions que « nous avons procédé à la consultation la plus exhaustive de l'histoire du Canada sur les oléoducs ». En fait, nous avons ajouté des étapes additionnelles de consultation, principalement auprès des populations autochtones. Le juge a écrit la déclaration suivante dans le jugement qu'il a rendu jeudi dernier:
[...] le cadre de consultation sélectionné par le Canada était raisonnable et suffisant. Si le Canada l'avait appliqué adéquatement, il se serait acquitté de son devoir de consulter. Cependant, si je me fonde sur l'ensemble des preuves, je conclus que le Canada n'a pas dialogué sérieusement avec les demandeurs autochtones et n'a pas pris en considération les préoccupations qu'ils ont exprimées de bonne foi pour explorer des mesures possibles afin de régler ces préoccupations.
Il y avait clairement un cadre approprié en place, mais les libéraux en ont bâclé l'application.
Comme les Canadiens le lisent dans les journaux depuis maintenant plus d'une semaine, la cour a renversé le feu vert accordé par le gouvernement Trudeau pour le projet de Trans Mountain et lui a ordonné de recommencer ses consultations.
Le jugement dit précisément ceci:
Le projet ne peut être présenté au gouverneur en conseil pour approbation que lorsque les consultations sont terminées et que des mesures sont prises.
Les libéraux de Trudeau avaient un objectif clair imposé par la cour à atteindre et ils n'y sont pas arrivés. L'incapacité du premier ministre de faire le travail qui s'impose a mis en péril des millions de dollars en ententes sur les répercussions pour des communautés des Premières Nations et d'autres communautés, et ces fonds sont maintenant en jeu.
Chers collègues, si je suis venue à Ottawa aujourd'hui, ce n'est pas seulement en tant que ministre des Affaires autochtones et du Nord du cabinet fantôme du Parti conservateur, mais aussi en tant que députée de Kamloops—Thompson—Cariboo. Une portion importante du pipeline passe directement dans la circonscription que je représente. Je suis ici aujourd'hui en tant que porte-parole de mes électeurs et de nombreux citoyens de la Colombie-Britannique pour raconter leurs histoires au gouvernement du Canada et au premier ministre.
Je suis ici pour vous rapporter les propos du chef Mike LeBourdais de la Première Nation de Whispering Pines, qui a dit qu'ils recevaient 300 000 $ annuellement parce que le pipeline Trans Mountain passe directement sur leurs terres. Il traverse leurs terres depuis plus de 60 ans. Le financement qu'ils recevaient allait doubler, et ce n'était pas le seul avantage. On peut imaginer que pour une petite communauté des Premières Nations, un montant additionnel de 300 000 $ est énorme. En 2014, sa communauté s'est prononcée à l'unanimité en faveur d'une entente sur les répercussions, qui incluait un paiement forfaitaire de 5 millions de dollars conservés en fiducie — la Première Nation était unanime.
Permettez-moi de vous faire part de quelques autres déclarations qu'il a faites:
Ce que nous voulions et ce que je voulais dans l'entente, c'était des avantages économiques, des emplois. Je voulais que les jeunes et la classe moyenne de ma communauté travaillent au projet de pipeline, et les sortir de l'Alberta et du Dakota du Nord où ils travaillent actuellement.
Nous avons négocié une résolution qui, nous l'espérions, offrirait des avantages à nos enfants, à nos petits-enfants, à nos aînés et à notre communauté. Nous avons fourni de nombreuses occasions pour entendre l'opinion des membres de la communauté durant les négociations. Notre communauté s'est prononcée en faveur de l'entente lors d'une réunion communautaire.
Le chef Ernie Crey de la Première Nation Cheam est un fervent défenseur. Il a répété à maintes reprises que la communauté en sortira perdante si le projet de Trans Mountain ne va pas de l'avant. Il a dit que l'annulation de la construction du pipeline Trans Mountain coûterait aux Premières Nations de la Colombie-Britannique des centaines de millions de dollars en avantages, en emplois, en formations et en possibilités d'emploi et d'affaires.
Il a également dit ceci:
Ce que nous avons négocié sera des formations et des emplois durables et [...] pendant toute la durée où le nouveau pipeline passera par l'Alberta jusqu'aux côtes de la Colombie-Britannique.
Notre communauté est déjà enthousiasmée par le projet. Chaque jour, des jeunes viennent me voir et me disent qu'ils veulent suivre une formation et trouver un emploi et qu'ils ne veulent plus avoir recours à l'aide sociale [...] Cela représente pour nous des millions de dollars [par année].
Ce sont des histoires que nous n'avons pas entendues très souvent, et elles doivent être entendues. Ce sont certaines des personnes qui ont été laissées pour compte en raison de l'incapacité du gouvernement de consulter adéquatement.
Je suis ici aujourd'hui en raison du silence de l'un des députés de Justin Trudeau, le député de Mission—Matsqui—Fraser Canyon, où la Première Nation de Matsqui a également signé une entente sur les répercussions négociée pour Trans Mountain.
J'ai d'autres histoires à raconter, chers collègues.
L'entente signée avec la Première Nation de Simpcw dans ma circonscription fournira au peuple de Simpcw des paiements annuels, de la formation professionnelle, des occasions d'affaires, de la formation en intervention d'urgence, de l'équipement et des infrastructures.
La bande de Lower Nicola près de Merritt a acheté 51 % des parts de la société de pipeline qui assure l'entretien à Kinder Morgan. Cela créera jusqu'à 40 emplois en haute saison pour les membres de la bande, ce qui donnera un énorme coup de pouce à une communauté aux prises avec un taux de chômage élevé.
Le chef Casey Bird de la Première Nation de Paul a dit ceci:
Le soutien continu de Kinder Morgan à la formation, à l'emploi et aux avantages pour les communautés qui découlent de partenariats bilatéraux respectueux est ce dont nous avons besoin pour faire avancer notre communauté.
Bien sûr, beaucoup de Premières Nations de partout en Colombie-Britannique ainsi que des communautés non autochtones étaient susceptibles de profiter de retombées importantes. Encore une fois, dans la circonscription que je représente, il s'agit de 700 000 $ pour la communauté de Kamloops et de 300 000 $ pour les pistes cyclables et pédestres ainsi que la formation aux métiers, aux technologies et à l'environnement à Barriere; de 845 000 $ pour les infrastructures communautaires, l'amélioration des parcs et le financement de l'éducation dans le district régional de Thompson-Nicola et, à Clearwater, de 300 000 $ destinés aux projets communautaires, à l'éducation et aux occasions de formation.
Hier, le président de la chambre de commerce de Kamloops a déclaré que si Justin Trudeau ne réussissait pas à parachever le pipeline Trans Mountain, les répercussions financières à l'échelon local seraient importantes. Il a ajouté:
Hier, un hôtelier m'a dit que le bruit courait dans le secteur hôtelier que 60 % des chambres d'hôtel seraient réservées pendant les deux prochaines années, compte tenu des éventuels besoins de Kinder Morgan. [C']est un morceau vraiment difficile à avaler, et ce n'est que le début.
Mardi dernier, j'ai visité la pépinière d'un entrepreneur des Premières Nations, qui a un contrat de végétalisation du tracé du pipeline, après son enfouissement. Des milliers d'arbres y poussent. Il a planifié leur croissance pour qu'ils se trouvent dans un état optimal au moment prévu de leur transplantation sur les lieux de loisirs longeant le tracé du pipeline. Il est mort d'inquiétude pour l'important investissement qu'il a consacré à sa pépinière. La transplantation lui semblait très prometteuse d'occasions à saisir.
Nous pourrions multiplier les exemples à l'infini, depuis les ouvriers de la construction aux cuisiniers des camps de travailleurs en passant par la surveillance de l'environnement et les travaux de génie et beaucoup d'autres. La liste des personnes touchées est sans fin. Tant mieux si, peut-être, nous avons un répit en Ontario ou dans d'autres provinces. C'est un peu loin, et je comprends, mais les répercussions sur des personnes comme mon entrepreneur des Premières Nations qui, de bonne foi, a cultivé des arbres pour les transplanter sont réelles et importantes. Ce n'est pas une décision sans conséquence. Elle est importante, elle a des effets considérables. Ces groupes ont consacré des années de travail acharné à négocier des accords et ce sera en pure perte si nous ne faisons pas notre travail. Nous méritons un plan.
Pour être francs, nous devons convenir que ce que nous avons entendu hier était plus déroutant que rassurant. Le gouvernement doit éviter de diffuser des messages confus sur ce qu'il fait. À tout prix. Il doit donner l'impression qu'il est à son affaire, qu'il reconnaît le problème et qu'il s'en occupe.
Entretemps, madame la présidente, alors que le gouvernement tarde à agir et qu'il est obligé de reprendre ses propres consultations ratées, il se pose un autre problème dont on parle peu. Plus de 300 wagons-citernes, chaque jour, circulent le long de la Thompson et du Fraser, et leur nombre augmente. Les trains sont relativement sûrs, mais, il s'agit de wagons-citernes. De gros incendies ont ravagé nos forêts. L'avez-vous remarqué? Les pluies ont causé des glissements massifs de terrain. Ces dernières semaines, on a fermé un nombre important de routes à la circulation. Il suffirait de peu de chose. Bientôt, ce sera la fraie. Nous espérons connaître la meilleure campagne de pêche du saumon sockeye depuis de nombreuses années, et, pendant ce temps, ces wagons traversent des brûlis et des zones bouleversées par des glissements de terrain.
Pour être francs, nous sommes nombreux à préconiser le transport de ce pétrole par pipeline. Non seulement ce sera plus sûr, mais il se pose aussi d'autres problèmes. Je reçois régulièrement des appels de nos agriculteurs des Prairies ou de la Saskatchewan qui se plaignent de ne pas pouvoir mettre leur produit sur le marché, faute de capacité ferroviaire. Nous recevons aussi des appels des sociétés d'exploitation forestière.
Pourquoi ne peuvent-ils pas mettre leurs produits sur le marché? Parce que les chemins de fer sont de plus en plus monopolisés par les wagons-citernes. Voilà un autre problème auquel nous ne songeons pas assez. Je pense que l'Office national de l'énergie a publié récemment des statistiques selon lesquelles il se transporte 200 000 barils de brut par chemin de fer au Canada chaque jour. 200 000! Quand on attend à une traverse de chemin de fer, impossible d'obtenir des services d'urgence et beaucoup d'autres.
Les pipelines sont sûrs et efficaces. Je pense que, il y a 10 ans, personne n'en parlait. J'ai parlé d'un pipeline qui traversait notre circonscription depuis plus de 60 ans, et la plupart des électeurs en ignoraient même l'existence. Ce n'était pas un enjeu. On savait qu'on pouvait faire le plein grâce à lui. On n'en faisait pas une histoire. Il est revenu dans l'actualité.
Tout à coup, je pense qu'un pipeline a commencé à tenir lieu de ce de quoi il n'était pas censé tenir lieu: c'est un pipeline. Qu'ont donc fait les libéraux depuis qu'ils ont approuvé la prolongation du pipeline Trans Mountain, il y a près de deux ans? Comment se fait-il qu'ils n'aient communiqué aucun plan, aucune marche à suivre concrète pour la réalisation de ce projet? Pourquoi n'ont-ils pas présenté à la Cour d'appel fédérale des preuves selon lesquelles 43 Premières Nations étaient signataires d'ententes sur les retombées locales, par suite de consultations à la fois appropriées et approfondies? La décision n'en parle pas. Le gouvernement fédéral n'a-t-il donc pas omis de faire connaître aux tribunaux certains des bons coups de son processus de consultation?
Que feront, exactement, le premier ministre et le ministre des Ressources naturelles pour assurer la prolongation du pipeline? Pendant la campagne électorale de 2015, le premier ministre a affirmé que, pour que le Parlement soit le plus efficace, les députés devaient être libres de faire ce pour quoi ils ont été élus: représenter leurs communautés... et faire rendre des comptes au gouvernement. Il a donné l'ordre à son gouvernement de respecter le travail des comités parlementaires. Nous sommes ici au Comité permanent des affaires autochtones et du Nord du Canada de la Chambre des communes. Nous avons essentiellement la responsabilité d'examiner cette crise et la réponse du gouvernement fédéral. Nous devons faire notre travail, ce pour quoi les Canadiens nous ont élus. C'est la raison pour laquelle il importe que l'étude ait lieu immédiatement et que le ministre responsable soit convoqué. Justin Trudeau et son gouvernement libéral trahissent les Autochtones du Canada qui ont saisi l'occasion que présentait le pipeline Trans Mountain, un projet indispensable à leurs communautés et à leurs jeunes. Comme le chef LeBourdais de Whispering Pines l'a récemment affirmé, si le projet ne se réalise pas, il n'y aura pas d'avantages à recueillir.
Voici donc la motion que je propose:
Que, conformément à l'article 108(2) du Règlement, le Comité étudie les actes du gouvernement fédéral en ce qui a trait à l'achat du pipeline Trans Mountain et du projet d'expansion de Trans Mountain; que six rencontres aient lieu pour cette étude; que le ministre des Finances et le ministre des Ressources naturelles témoignent devant le Comité pendant une heure chacun à la première rencontre de l'étude; que la première rencontre ait lieu au plus tard le 12 septembre 2018; que l'étude soit conclue avant novembre 2018; que les rencontres soient télévisées; et que le Comité présente ses conclusions à la Chambre.
Merci, madame la présidente.