Merci, monsieur le président.
Tout d’abord, j’aimerais exprimer ma gratitude au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pour avoir accepté d’examiner cette motion, mais aussi à M. Christopherson pour l’avoir présentée et à tous les membres du Comité qui ont fait preuve d'ouverture d'esprit. Je comprends que cela ne signifie pas que vous acceptez la motion ou que vous êtes d’accord avec tout ce qui s'y trouve, mais cela montre que vous allez l'examiner sérieusement. Je suis très reconnaissant de cette occasion. Merci.
Deux choses m’ont amené à présenter cette motion. Depuis mon arrivée ici, j’ai été choqué et je crois que tous ceux à qui j’ai parlé l’ont été aussi, par le manque de courtoisie et de décorum à la Chambre et par l’absence de débat productif. Je ne crois pas qu’il faille blâmer un parti ou une personne en particulier. Je pense que nous avons tous notre part de responsabilité.
J’ai passé les deux premières années à poser des questions, à parler aux gens et à essayer de les cajoler pour qu’ils soient un peu plus polis ou pour que les débats soient meilleurs. Et je me suis rendu compte à un moment donné que cela ne payait plus. La confrontation était préférable à la collaboration. Cela s’est produit au fil du temps. Des changements s'étaient opérés et les choses avaient évolué. La façon dont nous gérions autrefois les choses a changé et nous sommes arrivés à un point où la confrontation est devenue préférable.
Notre Règlement est sans doute à revoir. Ce phénomène de concentration du pouvoir au centre n’est pas nouveau. Ce n’est pas propre au Canada. Les professeurs vous parleront de ce qu’ils appellent la troisième vague d’autocratisation, comme nous l’avons entendu lors de l’une de nos réunions avec Mme Kusie.
Dans tout système, la démocratie est toujours en lutte contre l’autocratie. Nous le voyons aujourd'hui partout dans le monde, de nombreux grands pays basculent vers l’autocratie. Nous le voyons dans un pays où un dirigeant s’est nommé dictateur à vie. Il y a un grand pays dans lequel le dirigeant a tout d'un dictateur sauf le nom parce qu’il prétend tenir des élections et nous voyons un autre pays dont le dirigeant s’attaque constamment aux fondements mêmes de sa démocratie. Nous le constatons dans de nombreux pays.
Ici, au Canada, aucun dirigeant n'a agi de cette manière, mais au fil du temps, le pouvoir a été centralisé, il a migré vers ce que nous appelons le Cabinet du premier ministre, le CPM ou vers le Bureau du chef de l'opposition, le BCO. Cette concentration des pouvoirs a eu un certain nombre de conséquences. Le rôle du député a été légèrement modifié. Le rôle du Président a été radicalement modifié. Les citoyens ont été privés de leurs droits.
Les gens me disent souvent que c’est lorsque nous avons fait entrer les caméras que les choses ont mal tourné. Je ne le crois pas un instant. J’ai réfléchi à de nombreuses idées. Je pense, par exemple, que si des caméras étaient braquées sur tout le monde en permanence, les choses changeraient du jour au lendemain. On m'a expliqué que cela ne pouvait pas se faire parce que nous avons certaines règles selon lesquelles la caméra ne peut filmer que la personne qui parle.
J’ai examiné la façon dont est géré l'audiovisuel. Cette règle est telle que les mauvais comportements peuvent rester impunis parce qu’on ne les voit jamais.
Par exemple, le Sénat a changé cette règle et il est désormais possible d'en montrer tous les angles de prise de vue. Il a été dit que cela avait beaucoup amélioré la télévision, qu’elle est beaucoup plus intéressante, mais cela aura aussi des effets. L’une de mes idées était d’installer des caméras partout, ainsi, si quelqu’un se comporte mal en permanence, tout le monde le saura. Je n’ai pas conservé cette idée ici. Pourquoi? Parce que la politique est l’art du possible.
J’ai lu toutes les idées qui ont été présentées au cours des 12 dernières années. Puis j’ai travaillé dessus, j’y ai réfléchi et j’ai essayé de voir ce qui était faisable. J'ai regardé ce qui était facile à mettre en œuvre. Je croyais que cette motion était très simple.
Un grand nombre de gens m’ont dit que c’était beaucoup trop important, que c’était beaucoup trop ambitieux. Je ne crois pas que ce soit le cas et je vais mettre ce comité au défi d’examiner la question sous cet angle.
Par un heureux hasard, vous venez de faire une étude sur les secondes chambres et l'essentiel de cette motion tourne autour de la mise en œuvre d’une seconde chambre. Je ne pense donc pas que nous ayons besoin de refaire une étude là-dessus. Je crois que vous avez fait du bon travail. Puisque vous avez fait une étude sur une seconde chambre, vous pouvez maintenant vous demander s'il conviendrait d'essayer ou non. Vous pourriez aussi dire: « Procédons à une autre étude au cours de la prochaine législature », mais si vous estimez devoir refaire une étude au cours de la prochaine législature, je vous mets au défi, dans le cadre de l'étude qui nous occupe aujourd'hui, de poser les questions restées en suspens. Je crois que nous sommes prêts à essayer quelque chose.
Quelles sont mes propositions et comment en suis-je arrivé à cet ensemble de mesures? Il y a trois domaines dans lesquels je veux m'attaquer au pouvoir qui a été centralisé au fil du temps et le décentraliser. Pour l’instant, je tiens à dire qu’aucune de ces idées n’est nouvelle, à l’exception d’un point, à l'encontre duquel se manifeste d'ailleurs le plus de résistance. C’était mon idée, alors je suis à peu près certain qu'elle ne sera pas retenue. À part cela, aucune de ces idées ne vient de moi.
Deuxièmement, la majeure partie de cette motion n'a pas été rédigée par mes soins.
J’aimerais m’arrêter ici pour remercier ceux qui l’ont fait. Tout d’abord, je voudrais remercier Scott Reid et surtout son adjoint, Dennis Laurie. Ils ont fait le gros du travail de rédaction de toute la section concernant une seconde chambre.
J’aimerais remercier Michael Chong, parce qu’il a beaucoup participé et qu’il connaît très bien les questions de décorum, de pouvoirs du Président et la façon dont les choses ont changé au fil du temps.
J’aimerais remercier Daniel Blaikie et Murray Rankin, parce qu’ils ont repris les idées qui avaient été proposées par Kennedy Stewart, qui s'est inspiré d'idées venant du Royaume-Uni sur la façon de donner aux citoyens le droit de porter des sujets au Parlement pour qu'ils y soient débattus.
J’aimerais remercier David Graham, parce qu’il a travaillé sur des idées visant à rendre les choses plus équitables pour ceux qui mènent des initiatives parlementaires. Il arrive parfois que des députés qui ont été élus trois fois ne se lèvent jamais, mais que quelqu’un qui a été élu une fois se lève. Il y a une injustice fondamentale dans la façon dont nous traitons les affaires émanant des députés et M. Graham avait des idées à ce sujet, que j’ai intégrées.
J’aimerais remercier Scott Simms, parce qu’il a étudié la façon dont le Royaume-Uni a renforcé ses comités et intégré ces idées à l’ensemble.
Évidemment, j’aimerais remercier Elizabeth May, parce que, comme chacun le sait, elle a été une voix forte pour renforcer le Parlement dans son ensemble et pour changer — ou même, je dirais, faire respecter — nos règles. Elle parlera un peu de cette idée dans un instant.
Je remercie tous ces gens. Je reconnais également qu’aucune de ces idées n’est nouvelle; elles ont toutes déjà été étudiées et débattues. À propos de l’argument selon lequel c’est trop ambitieux, j'affirme que si vous voulez créer une seconde chambre aujourd’hui, demain, dans un an ou dans 10 ans, ce sera une motion très ambitieuse. C'est inévitable. Il faut la rédiger.
Qu’y a-t-il dans la motion actuelle? Il s'agit tout d'abord du Président, des pouvoirs du Président. Il porte le titre de « Président » pour une raison bien simple: dans tous les systèmes de Westminster, y compris le nôtre, jusqu’aux années 1980 et au début des années 1990, c’est le Président qui décidait qui prenait la parole. Cela semble assez raisonnable. Il ne s’appelle pas « le lecteur de la liste »; il s’appelle le Président, parce que son travail consiste à décider qui a la parole. C’est aussi simple que cela. J’aimerais qu’il fasse son travail. Je pense que nous voulons tous qu’il fasse son travail. S’il fait son travail, deux choses vont se produire. D'abord le décorum va s’améliorer, parce qu’il aura une carotte et un bâton pour faire en sorte que seuls les gens qui se comportent correctement puissent avoir la parole. Ensuite, le débat s’améliorera. C’est ainsi que cela se passe dans tous les autres systèmes de Westminster. Nous sommes uniques: nous avons tort.
J’ai eu de longues conversations avec d’autres Présidents — j’ai parlé longuement avec M. Peter Milliken, qui a le plus d’ancienneté en qualité de Président — et ils s’entendent tous pour dire qu’il s’agit d’une perversion du système et que celui-ci devrait être rétabli dans son fonctionnement antérieur.
Comment cela s’est-il passé? Il y avait une dame, Mme Jeanne Sauvé, qui ne voyait pas très bien et elle a demandé de l’aide pour identifier les gens qui se levaient pour parler et qui se trouvaient loin d'elle, alors on lui a donné quelques noms.
Il y a eu un autre Président — je ne donnerai pas son nom — qui n’était pas très intéressé à faire son travail et qui a dit: « Pouvez-vous simplement me faciliter les choses? Mettez-les simplement en ordre alphabétique, ou peu importe, et... »
Puis, avec le temps, les whips ont décidé qu'ils avaient plus de pouvoir et ils ont été plus stricts au sujet des listes, jusqu’à ce qu’il se passe quelque chose sous le gouvernement précédent et qu'il ait fallu rendre une décision sur les pouvoirs des whips, des leaders à la Chambre et du Président.
Nous devons rétablir les choses telles qu’elles étaient et telles qu’elles devraient être. C’est le premier point.
La seconde chose, ce sont les pouvoirs des citoyens — une idée simple. Bruce Stanton l’a mentionné lorsqu’il est venu parler de la seconde chambre. Au Royaume-Uni, si une pétition atteint le seuil des 100 000 signatures, elle fait l’objet d’un débat à la seconde chambre. Il est à noter que ce sont les débats que tout le monde regarde. C’est ce qui importe aux gens. C’est ce que les citoyens regardent là-bas.
Nous avons pris ce chiffre de 100 000 et l’avons augmenté de 25 % en fonction de la population, de sorte que nous n’ayons pas de débats fallacieux et nous avons veillé à ce que tout sujet qui atteindrait ce seuil soit soumis au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, pour nous assurer que ce n’est pas quelque chose de stupide, ou quelque chose qui a déjà été débattu. Si les conditions sont réunies, il y aura un débat exploratoire à la seconde chambre.
Cela permettrait de relancer la participation des citoyens s'ils se disaient: « J’ai mon mot à dire sur ce qui se passe. Ce n’est pas seulement tous les quatre ans que l'on me demande mon opinion. Si je me soucie vraiment de la migration du saumon en Colombie-Britannique, par exemple et que c’est vraiment important pour moi et que 70 000 autres Canadiens disent que c’est vraiment important, alors je veux que le Parlement s’exprime à ce sujet. » Les gens auront l’occasion de le faire. Ils vont participer. Tout comme ce qui s’est passé au Royaume-Uni, les citoyens seront plus engagés dans leur démocratie.
Troisièmement, il y a les pouvoirs des députés.
Encore une fois, au fil du temps, le pouvoir s’est dégradé et le rôle du député, qui représente ses électeurs, s’est dégradé. Lorsqu’il est élu et qu’il doit venir à Ottawa, il est élu sous une bannière. Nous devons toujours trouver le juste équilibre. Je suis élu comme député du NPD, du Parti libéral, du Parti conservateur ou du Parti vert, mais je suis aussi élu parce que je suis Frank Baylis, ou Elizabeth May ou Linda Lapointe. Je dois trouver un équilibre entre ce que veulent les citoyens que je représente, ce que je pense, parfois, être moralement juste, et ce que veut le parti.
Mais je ne suis pas élu pour faire le singe savant, pour à chaque fois faire exactement ce que le parti exige. Si c’est le cas, ils n’ont pas besoin de nous. Nous n’avons alors aucun rôle à jouer. Si tout ce que je fais dans mon travail, c’est voter à 100 % comme le parti, systématiquement, eh bien, c’est parfait, ils n’ont pas vraiment besoin de moi. Qu'ils se contentent de prendre les pourcentages, de faire les calculs et de débarrasser le plancher.
Nous avons un rôle à jouer. Nous avons parfois un rôle à jouer si un nombre suffisant de nos électeurs... Et cela m’est arrivé. Beaucoup d’entre eux m’ont écrit sur un certain sujet et je me suis dit: « D’accord, je dois les écouter. Je ne vais pas voter avec mon parti sur ce sujet, parce que je vais les représenter. »
C’est notre rôle. Nous devons redonner à nos députés leur pouvoir. Comment faire?
Nous avons tout d’abord examiné notre capacité de présenter des projets de loi d’initiative parlementaire. À l’heure actuelle, c’est fondamentalement injuste. Si vous avez de la chance, vous aurez peut-être la possibilité d'en proposer un. Si vous êtes malchanceux, vous ne pourrez pas. Si vous êtes à moitié chanceux, comme moi, vous aurez peut-être droit à votre première heure, que vous ficherez peut-être en l'air; mais c’est une autre question.
Il y a peut-être là une leçon à tirer. Je ne l’ai pas encore trouvée.
Des voix: Oh, oh!