Madame la Présidente, je serai heureux de parler du projet de loi C-93. Toutefois, avant de le faire, je tiens à féliciter tous mes concitoyens albertains qui célèbrent la Journée d’affranchissement de la taxe sur le carbone. Je tiens également à remercier le nouveau gouvernement provincial de l’Alberta d’avoir tenu sa promesse, ce dont mes collègues d’en face sont incapables. Ils peuvent peut-être attendre la traduction. Le gouvernement albertain a tenu sa promesse électorale d’abroger ce projet de loi. Je profite également de l’occasion pour souhaiter un joyeux anniversaire à notre nouveau premier ministre, Jason Kenney.
Le projet de loi C-93 prévoit essentiellement la suspension rapide et sans frais du casier judiciaire de ceux qui ont été condamnés pour possession de marijuana. Il propose d’apporter des changements au processus de pardon afin de lever les frais pour les condamnations pour possession antérieures. Il aidera les Canadiens qui ont été criminalisés pour possession de marijuana, qui est maintenant légale, il éliminera le temps d’attente habituel et modifiera aussi d’autres lois.
De façon générale, nous appuyons le projet de loi, mais je dois dire que je suis d’accord avec mon collègue de la circonscription de Victoria, et c’est une blague de père, lorsqu’il a parlé de demi-mesure. Nous appuierons le projet de loi. Il n’est pas parfait, mais il s’agit d’un pas en avant. Je suis certain que lorsque les conservateurs seront de retour au pouvoir, nous prendrons le temps de corriger les lacunes de cette mesure.
En comité, les conservateurs ont présenté plusieurs amendements valables, dont je vais parler maintenant.
Premièrement, nous avons proposé un amendement pour que les demandes de suspension de casier judiciaire puissent être faites dans un portail en ligne, de manière à ce que ce soit plus facile et plus économique pour les Canadiens. Malheureusement, les libéraux ont voté contre cet amendement.
Nous avons proposé un amendement pour permettre au demandeur dont le dossier concernant une infraction a été supprimé de signer une déclaration sous serment où il explique ce qui s'est passé et il atteste qu'il est admissible. Cela aurait amélioré l'équité procédurale, à propos de laquelle plusieurs témoins ont formulé des critiques. Le comité a adopté cet amendement, mais les libéraux ont voté contre à une étape subséquente.
Nous avons proposé un amendement pour redonner à la Commission nationale des libérations conditionnelles le pouvoir de mener des enquêtes pour déterminer quelle a été la conduite du demandeur depuis qu'il a commis l'infraction lui ayant valu un casier judiciaire. Malheureusement, les libéraux ont voté contre.
Nous avons proposé un amendement pour que la Commission nationale des libérations conditionnelles ait le pouvoir de faire enquête sur tout facteur qu'elle estime devoir prendre en considération pour éviter que la suspension du casier judiciaire ne jette le discrédit sur l'administration de la justice. Les libéraux ont aussi voté contre cet amendement lors des travaux du comité.
Enfin, nous avons proposé un amendement pour que la Commission nationale des libérations conditionnelles inclue dans son rapport annuel une section sur les résultats obtenus dans l'application de la loi et sur les coûts en ayant découlé. Cet amendement a été retenu.
L'Association canadienne des policiers a elle aussi présenté un amendement, et nous espérons que les libéraux l'envisageront. Elle demande que la Commission des libérations conditionnelles conserve un pouvoir limité de mener des enquêtes afin que le petit nombre de demandes provenant de récidivistes soient examinées avec soin. Cela permettrait de s'assurer que ces individus ne chercheraient pas à profiter d’un processus qui n’a clairement pas été établi à leur intention.
Le projet de loi comporte certaines répercussions financières.
Le ministère de la Sécurité publique et le ministre de la Sécurité publique estiment que le coût du projet de loi sera d'approximativement 2 millions de dollars. Ils n'ont pas mené d'étude exhaustive à ce sujet, mais c'est là leur estimation. Le ministre a choisi un drôle de moment pour avancer une telle estimation, presque en même temps que le Sénat a forcé l'adoption du projet de loi C-81, qui vise à rétablir en douce le registre des armes d'épaule.
Je rappelle aux gens que le gouvernement libéral, et plus particulièrement Allan Rock, avait dit il y a des années que le coût du registre des armes d'épaule s'élèverait à seulement 2 millions de dollars. Il a fini par coûter plus de 1 milliard de dollars. En tout, il a coûté approximativement 1,3 milliard de dollars aux contribuables canadiens. Qu'a fait le gouvernement libéral de l'époque quand il a constaté cette erreur monumentale? Tout comme le gouvernement libéral actuel le fait aujourd'hui lorsqu'on le confronte à toutes ses erreurs et son incompétence, il a rejeté le blâme sur d'autres. Il a blâmé les provinces et les propriétaires d'armes à feu.
[Le député s'exprime en latin et fournit un texte en anglais dont voici la traduction:]
Je crains les Grecs, même lorsqu'ils font des cadeaux.
[Le député s'exprime en latin et fournit un texte en anglais dont voici la traduction:]
Je crains les libéraux, même lorsqu'ils promettent qu'il n'en coûtera pas plus de 2 millions de dollars.
[Traduction]
Apparemment, le gouvernement n'a pas fait une étude adéquate des coûts et des échéanciers. Auparavant, les frais étaient de 631 $ et, si j'ai bien compris, ils avaient été haussés en 2012 sur les conseils des fonctionnaires, selon qui ce montant correspondait au coût général d'une suspension de casier judiciaire. Or, le gouvernement dit maintenant qu'il s'attend à ce que ce montant soit de 250 $. D'où vient cette somme, 250 $ tout juste? Nous ne le savons pas parce que les libéraux n'ont pas fait leurs devoirs à ce sujet.
Il faut actuellement de 5 à 10 ans pour obtenir une suspension, mais le ministre de la Sécurité publique a dit qu'il ne pouvait pas fournir d'échéancier. Il a précisé que l'essentiel n'avait pas été de définir les coûts ou l'échéancier en vue d'aider les Canadiens, mais bien de déposer le projet de loi. Il ne s'agissait pas d'en arriver à une solution pour aider les Canadiens, mais bien d'annoncer le dépôt de ce projet de loi.
Cela me porte à demander: pourquoi maintenant? Le gouvernement a également dit qu'il s'agit d'une transformation fondamentale. Or, s'il s'agit d'une transformation critique et fondamentale, je me demande pourquoi il a attendu jusqu'aux trois dernières semaines pour inscrire le projet de loi à l'ordre du jour. De toute évidence, il expédie le processus pour des raisons politiques.
J'ai examiné les plans ministériels. Je rappelle que ces plans sont signés par un ministre et déposés à la Chambre. Ce n'est pas seulement de la propagande pour jeter de la poudre aux yeux. Ce sont des documents qui ont été déposés à la Chambre et qui présentent les plans du gouvernement pour les ministères.
Je vous présente les objectifs des libéraux pour cette année. Le pourcentage des suspensions de casiers qui sont traitées dans le délai fixé est de 95 %, mais le ministre de la Sécurité publique affirme qu'il n'y a pas d'échéancier. Pourquoi s'engager à atteindre l'objectif de 95 % et déposer ces chiffres à la Chambre tout en disant aux Canadiens qu'ils ne savent pas en quoi ce sera utile? Je ne sais pas si les libéraux sont perdus, s'ils ignorent ce qu'ils font avec leurs plans ministériels ou s'ils sont simplement de mauvaise foi.
Je remarque également que les plans ministériels pour l'exercice 2019-2020 concernant la Commission des libérations conditionnelles portent sur trois ans. Si l'on tient compte d'un taux d'inflation de 2 % à peine, cela signifie que le gouvernement réduira le financement accordé à la Commission des libérations conditionnelles de 8,6 %. Il est possible de constater ces réductions dans les plans ministériels, présentés à la Chambre pour faire état des prévisions à long terme.
Lorsque le député de Yellowhead a présenté un amendement en comité pour autoriser la soumission de demandes en ligne, la Commission des libérations conditionnelles a signalé aux députés qu'en raison de contraintes techniques, ce ne serait pas possible. Apparemment, la Commission n'a pas les moyens de développer cette technologie, mais, parallèlement, nous irons de l'avant avec ce nouveau processus en vue de traiter pas moins de 250 000 demandes.
Il suffit d'examiner les plans ministériels de la Commission des libérations conditionnelles, qui doivent entre autres faire état des effectifs, pour voir que pas un seul corps chaud n'a été ajouté par rapport à l'exercice 2016-2017. L'année prochaine, elle comptera cinq employés de plus que l'an dernier. La Commission devra traiter jusqu'à 250 000 demandes sans personnel supplémentaire. Comment le gouvernement peut-il croire que la Commission sera en mesure d'absorber ce surcroît de travail sans l'aide de ressources supplémentaires, sans compter un budget amputé de 8,6 %?
Si la présentation de ce projet de loi est aussi essentielle que le ministre le dit, et si le projet de loi est si transformationnel, pourquoi le gouvernement n’a-t-il pas prévu un financement à long terme dans les plans ministériels? On n’en fait même pas mention dans le plan ministériel du ministre de la Sécurité publique. Je rappelle aux députés que toutes les demandes de pardon relatives à la criminalisation injuste des activités homosexuelles seront aussi traitées en même temps, sans aucune ressource supplémentaire.
Cette information est tirée du plan ministériel de la Commission des libérations conditionnelles, qui a été approuvé par le ministre de la Sécurité publique. On indique que le nombre de demandes qui devraient être reçues cette année et l’an prochain demeure le même. Or, il y aura toutes les demandes liées à la criminalisation injuste des activités homosexuelles, qui remonte à loin, puis les demandes de pardon liées à la possession de cannabis, que 250 000 Canadiens pourraient présenter. Le gouvernement ne prévoit ni ressources ni effectifs supplémentaires, et il a même affirmé qu’il n’y aurait pas d’augmentation du nombre de demandes comparativement à l’année dernière.
Encore une fois, je me demande à quel point les députés libéraux prennent cela au sérieux. Ils disent que ce projet de loi est transformationnel et crucial, mais comme tant d’autres choses, ils le laissent de côté jusqu’à la dernière seconde avant d'en précipiter l'adoption. Cherchent-ils à le faire adopter à toute vapeur uniquement à des fins politiques? Tout porte à croire que oui. S’ils se souciaient vraiment des Canadiens, ils auraient présenté ce projet de loi en même temps qu’ils ont légalisé le cannabis. Ils auraient peut-être alors pris le temps d’examiner les amendements proposés par notre parti, par le NPD ou par les membres des forces de l’ordre.
Bien que nous appuyions le projet de loi, nous y voyons un autre exemple des mesures législatives nonchalantes du gouvernement.