Monsieur le Président, je suis très fière d'intervenir aujourd'hui à la Chambre pour appuyer notre motion de la journée de l'opposition.
Je voudrais saluer l'important travail de mon collègue, le député de Vancouver Kingsway, qui n'a pas ménagé ses efforts dans ce dossier. Je voudrais faire remarquer que ce désir de mettre sur pied un régime d'assurance-médicaments universel est au cœur de notre identité en tant que néo-démocrates.
Ce sont des néo-démocrates qui ont milité en faveur de l'assurance-maladie, des chefs comme Tommy Douglas ou d'autres chefs et militants néo-démocrates partout au pays. L'assurance-médicaments universelle fait partie intégrante de cet héritage. Il nous incombe, en tant que néo-démocrates, mais aussi en tant que Canadiens, de voir cet héritage se concrétiser. Le Canada en a désespérément besoin aujourd'hui.
Ce que nous proposons est très important. Des commissions, des comités et des conseils consultatifs ont recommandé la couverture publique universelle des médicaments dès les années 1940 pour des raisons cliniques, éthiques et économiques. Les spécialistes des soins de santé ont été on ne peut plus clairs: une approche privée et fragmentée à l'américaine coûtera plus cher et donnera un accès restreint aux médicaments sur ordonnance.
D'après le propre rapport Hoskins des libéraux, un régime public d'assurance-médicaments universel exhaustif contribuerait à réduire les dépenses annuelles liées aux médicaments sur ordonnance de 5 milliards de dollars grâce à une baisse négociée du prix des médicaments, à un usage plus fréquent des médicaments génériques et des médicaments biosimilaires et à d'autres changements comme le passage vers des thérapies médicamenteuses moins chères.
Le régime d'assurance-médicaments, pour tout dire, est un investissement dans notre avenir. Selon le rapport Hoskins, il va stimuler notre économie en réduisant le coût des médicaments sur ordonnance à hauteur de 16,6 milliards de dollars par an pour les entreprises et les employés, et de 6,4 milliards de dollars pour les familles. En outre, ce régime va soulager le système de santé publique en améliorant les résultats en matière de santé, car les gens ne seront plus confrontés à des obstacles liés au coût des traitements. Cela permettra des économies à long terme, ainsi qu'une plus grande stabilité et une meilleure résistance à des crises telles que la pandémie de COVID-19.
Nous croyons que le régime d'assurance-médicaments devrait suivre les mêmes principes qui constituent le fondement de notre système de santé publique: universalité, exhaustivité, accessibilité, transférabilité et administration publique. Ces principes forment l'essence même de notre motion d'opposition d'aujourd'hui et de ce que nous sommes en tant que néo-démocrates. Je crois qu'ils sont également au centre des valeurs de nombreux Canadiens. Voilà pourquoi j'espère que la Chambre jugera bon d'appuyer cette motion essentielle.
Nous avons actuellement un gouvernement libéral qui, bien que minoritaire, a trop souvent su utiliser les bons mots pour parler des priorités des Canadiens. Nous avons entendu les libéraux parler de leur engagement envers la classe moyenne. Nous les avons entendus parler de réconciliation. Nous les avons entendus parler de rendre la vie plus abordable pour les Canadiens. Toutefois, leurs gestes ne correspondent pas à leurs paroles.
En fait, très souvent, les libéraux affichent une sorte de façade vertueuse comme celle de la soi-disant réconciliation: ils tiennent des propos qui semblent rassurants pour tout le monde quant au travail à accomplir, mais nous les voyons faire exactement l'inverse.
En ce qui a trait à l'assurance-médicaments, ils parlent sans cesse de leur « engagement à l'égard du régime d'assurance-médicaments ». Ils nous l'ont répété à maintes reprises au cours de la dernière législature, alors qu'ils formaient un gouvernement majoritaire. Ils en parlaient aussi à l'époque où ils formaient d'autres gouvernements minoritaires, antérieurement. Nous ne voyons toujours poindre aucun régime universel national d'assurance-médicaments, alors que nous en aurions cruellement besoin.
Nous avons aussi vu les libéraux prendre des mesures concrètes qui profitent non pas aux Canadiens, mais en réalité aux plus riches d'entre nous, plus particulièrement aux grandes sociétés, y compris certainement aux grandes sociétés pharmaceutiques.
Dans un rapport publié en 2018, le Centre canadien de politiques alternatives ou CCPA, indique qu'une crise sévit dans le secteur pharmaceutique, mais ce n'est pas la rentabilité des entreprises qui est menacée.
En décembre 2015, selon la revue Forbes, les marges bénéficiaires nettes des grandes sociétés pharmaceutiques étaient de 25,5 %, celles des sociétés de biotechnologie, de 24,6 % et celles des fabricants de médicaments génériques, de 30 %. Par comparaison, les marges des compagnies de tabac, des fournisseurs de logiciels et de services Internet, des sociétés de technologies de l'information et des grandes banques étaient respectivement de 27,2 %, de 25 %, de 23 % et de 22,9 %.
Le rapport du CCPA dit encore ceci: « [...] la crise dans le secteur pharmaceutique est causée par l'augmentation en flèche du prix de certains médicaments surtout aux États-Unis, mais pas exclusivement là-bas [car c'est bel et bien une réalité également au Canada], ainsi que par le nombre peu élevé de nouveaux produits qui sont nettement plus efficaces que les médicaments existants. Ces problèmes sont d'autant plus difficiles à tolérer que les profits de l'industrie sont faramineux. »
Nous savons qu'entre 2006 et 2015, les 18 entreprises pharmaceutiques comprises dans l'indice S&P 500 ont dépensé 465 milliards de dollars en recherche et développement, 261 milliards de dollars en rachats d'actions et 255 milliards de dollars en paiements de dividendes. Ces sociétés s'enrichissent sur le dos des gens ordinaires de nos collectivités. Nous savons que les grandes entreprises pharmaceutiques se sont mobilisées pour contrer les régimes d'assurance-médicaments proposés.
Je veux attirer l'attention de la Chambre sur le travail de PressProgress, qui a publié ceci le 10 mars:
Le secteur pharmaceutique et le secteur des assurances préparent discrètement une campagne pour s'opposer à une coalition de 150 organisations canadiennes qui poussent le gouvernement fédéral à suivre les recommandations de son propre groupe d'experts et à instaurer un système universel d'assurance-médicaments à payeur unique.
La Chambre de commerce du Canada a lancé un « plan d'action » au nom des « acteurs du monde des affaires à travers le pays », à savoir les « fournisseurs de prestations » et les « entreprises pharmaceutiques ».
La Chambre de commerce a l'audace d'appeler cela un « mouvement populaire ». Elle affirme vouloir « défendre le modèle privilégié d'assurance-médicaments auprès de dirigeants fédéraux, provinciaux/territoriaux et municipaux » et « se concentrer sur les principaux décideurs politiques à Ottawa. »
Ce message est troublant. Les Canadiens n'envoient pas les députés à la Chambre des communes pour prendre des décisions qui profiteront aux sociétés les plus grosses et les plus riches du pays.
Nous représentons tous des personnes qui sont dans une situation difficile parce qu'elles n'ont pas les moyens de se procurer des médicaments d'importance vitale. Nous représentons tous des familles qui doivent faire passer l'achat d'aliments et le paiement du loyer avant l'achat des médicaments dont elles ont besoin. Nous connaissons tous des gens qui ont ignoré leurs problèmes de santé, qui se sont passés des médicaments dont ils avaient besoin et qui, dans bien des cas, ont vu leurs problèmes de santé s'aggraver considérablement.
Je pense aux nombreux aînés de ma circonscription qui sont dans une situation difficile parce qu'ils n'ont pas les moyens de se procurer les médicaments dont ils ont besoin. Cependant, je pense aussi de plus en plus aux jeunes de ma circonscription qui travaillent dans un milieu qui, il y a quelques années, offrait un excellent régime d'assurance-médicaments. Dans certains cas, les emplois en question n'existent plus, où alors ce sont les régimes d'assurance-médicaments qui ont disparu. Étant donné que les jeunes sont de plus en plus nombreux à occuper un emploi précaire qui ne leur permet pas d'obtenir la protection dont ils ont besoin, la nécessité de mettre en place un régime national universel d'assurance-médicaments n'a rien de théorique. C'est un besoin on ne peut plus concret et urgent pour de nombreuses personnes.
Ces jours-ci, nous devons prendre des mesures pour faire face à la pandémie de COVID-19, et c'est particulièrement le cas dans les communautés vulnérables comme celles des Premières Nations que je représente. Cependant, nous ne devons pas oublier qu'il est essentiel de fournir un appui aux Canadiens jour après jour, un appui suffisant afin qu'ils soient mieux préparés lorsque la menace d'une pandémie se présente. Je pense à toutes ces personnes qui vivent aujourd'hui avec des maladies chroniques. Elles sont particulièrement préoccupées par la COVID-19. Je pense aux gens qui peinent à joindre les deux bouts, que ce soit pour acheter des médicaments ou d'autres biens essentiels. Ils ne savent pas exactement quelles pourraient être les conséquences financières d'une pandémie pour eux. Aidons-les à affronter ce genre de situation.
En tant que parlementaires, représentants et personnes qui ont le pouvoir d'améliorer le sort des Canadiens, donnons notre appui à une motion qui pousse le gouvernement à mettre en œuvre un régime universel d'assurance-médicaments, qui pousse le Canada à faire mieux en ce qui concerne le système de santé. Nous sommes fiers de ce système, mais il aura besoin d'un appui beaucoup plus grand dans l'avenir. Soyons du bon côté de l'histoire. Appuyons cette motion de l'opposition et faisons du régime national d'assurance-médicaments universel une réalité dans le Canada d'aujourd'hui.