Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole aujourd'hui à la Chambre pour appuyer la motion du Parti libéral.
D'entrée de jeu, j'aimerais dire quelques mots sur ce dont il est question, non seulement ici, à la Chambre, mais aussi dans le cadre des discussions publiques. Je parle évidemment de la politique, mais dans son sens général, c'est-à-dire dans le contexte de ce que nous faisons ici, soit débattre des enjeux dans cette enceinte, car c'est ce qui intéresse les Canadiens.
Bien des gens pourraient dire que le sujet dont nous discutons aujourd'hui ne se rapporte pas à nos activités quotidiennes, ni à la manière dont nous vivons et nous fonctionnons en tant que membres de la société. Comme nous l'avons déjà dit, l'économie, l'emploi et la lutte contre la criminalité sont tous des sujets qu'il est important de débattre dans cette enceinte.
Toutefois, permettez-moi de dire ceci: nous obligeons également nos politiciens à se comporter en conformité avec les plus hautes normes éthiques.
Nous le savons. Au fil des ans, de nombreux députés ont déjà été accusés, traduits en justice et reconnus coupables d'infractions. Plusieurs ont admis leur culpabilité et plusieurs ont été reconnus coupables. Certains d'entre eux ont été déclarés innocents de toutes les accusations qui pesaient contre eux.
Toutefois, voilà le genre de débat que nous tenons ici. C'est le type de conversation que nous devons avoir pour découvrir tout ce qui s'est passé au Cabinet du premier ministre, lequel est financé par les contribuables. Tous les quatre ans, nous exerçons notre droit démocratique — dans ce pays qui, selon moi, est la plus grande démocratie au monde — afin de décider qui en sera à la tête.
Permettez-moi de revenir au noeud de l'affaire. Nous nous attendons à ce que les titulaires de charges publiques s'efforcent de se conformer aux plus hautes normes éthiques possibles et à ce qu'ils gèrent les finances publiques et nos impôts dans le cadre des pouvoirs conférés à ce bureau. Évidemment, leur comportement doit être conforme aux attentes qu'entretient tout Canadien raisonnable à leur égard.
Permettez-moi pendant un court instant de faire un retour en arrière. J'ai été élu pour la première fois à la Chambre des communes à l'automne de 2004. À cette époque, mon siège se trouvait de l'autre côté, car le Parti libéral formait le gouvernement.
J'ai alors fait face à une multitude de commentaires empreints de colère et de haine, ainsi que d'accusations — certaines vraies, d'autres fausses. L'ambiance était fortement marquée par les attaques haineuses et vitrioliques.
Quelques années plus tard, il y a des élections, nous sommes éjectés du pouvoir et nous nous retrouvons sur les banquettes de l'opposition.
J'en ai bien eu quelques échos à l'époque, en 2004, mais essentiellement, ces attaques vitrioliques et hargneuses nous venaient de ceux qui étaient dans l'opposition à ce moment-là et qui, dois-je le dire, relèvent aujourd'hui du parti ministériel. Je vois que plusieurs d'entre eux sont encore ici.
Je dois cependant souligner que, parmi les députés qui sont ici aujourd'hui, et je dirais même parmi ceux qui occupent actuellement les banquettes ministérielles, très peu étaient là à l'époque.
Chaque fois que nous parlons de la situation aux Canadiens et à la Chambre, on nous ressert invariablement le même argument. Chaque fois que nous expliquons que ce qui s'est passé au Cabinet du premier ministre est déplorable et va à l'encontre des normes éthiques auxquelles on s'attend dans ce pays, on nous répond qu'à l'époque, les libéraux ont fait ceci ou cela, sans jamais répondre aux questions que nous posons.
Voici ce que j'en pense, moi: si le gouvernement ne trouve rien de mieux que de ressasser le passé en faisant carrément abstraction du présent, il prouve lui-même qu'il est devenu exactement ce qu'il avait juré de ne jamais devenir.
Voilà, nous avons un portrait chronologique complet.
Il faudrait malheureusement que les politiciens d'aujourd'hui — moi y compris, parfois — apprennent à ne pas renier les éléments négatifs de leur bilan. Il faudrait qu'ils prennent conscience qu'il vient un temps où ils doivent réfléchir à ce qu'ils ont dit, ou fait, et se demander si leurs paroles et actions correspondent aux attentes que le contribuable ou le citoyen moyen peut avoir. Force est de constater que, dans bien des cas, la réponse est « non », mais qu'ils font comme si de rien n'était.
Ce qui me dérange le plus, c'est que, quand une personne fait comme si de rien n'était, évite le sujet et détourne la conversation, elle peut seulement espérer que les citoyens qui suivent le débat n'ont rien remarqué ou qu'ils s'en moquent assez pour ne pas écouter attentivement les questions qui sont posées. Nous nous retrouvons alors dans la situation affligeante où, que ce soit lorsque nous faisons campagne, que nous diffusons des publicités à la télé ou que nous répandons des méchancetés sur Twitter, le gros du débat se résume à ceci: « Ah, tu crois que j'ai gaffé? Regarde donc ce que tu as fait de ton côté. » Et il n'y a alors plus moyen d'en sortir. On croirait entendre des enfants de 4 et 5 ans: « Celui qui le dit, celui qui l'est. » Nous faisons semblant que les Canadiens ne remarquent rien, mais nous nous trompons. Nous ne prêtons même pas à M. et Mme Tout-le-Monde assez d'intelligence pour savoir lire entre les lignes.
Et avant qu’on ne me pose la question, je dis que je vais suivre mon propre conseil et que je vais m’efforcer de respecter les principes qui s’appliquent à ceux qui siègent à la Chambre des communes. Savez-vous combien de Canadiens rêvent de pouvoir un jour se trouver ou même siéger dans cette enceinte, chers collègues? Faisons porter le présent débat sur des normes d'éthique qui n’ont pas été respectées, sur des normes d'éthique que nous devons tâcher d'appliquer. Mais il faut bien reconnaître qu’il y a des gens, dans tous les partis, qui ne répondent pas aux attentes du public. Il y a des gens qui reçoivent la confiance du public et dont il faut examiner le comportement. Il faut scruter leurs actes pour trouver des explications. On parle d’enquêtes judiciaires, qui sont longues et coûteuses, mais qui sont parfois nécessaires. N'oublions pas que la Chambre des communes est une tribune qui est financée par les contribuables. Il importe que la voix de la population puisse se faire entendre.
La motion d’aujourd’hui a été présentée par le député de Beauséjour, au Nouveau-Brunswick. Il y est question des déclarations sous serment du caporal Greg Horton, de la GRC, qui révèlent un grand nombre de manquements à l’éthique, c’est le moins que l’on puisse dire. Dans certains cas, il semble que les normes d'éthique ont été perverties.
Le 21 février, le Cabinet du premier ministre avait accepté, eu égard aux dépenses controversées de Mike Duffy, que le Parti conservateur du Canada le soulage du remboursement. Voilà le genre de conversation qui a eu lieu. Mais qu’est-ce que cela signifie exactement? Nous essayons de trouver des explications, tout comme le Canadien moyen, j’en suis sûr. Autrement dit, comment peut-on protéger quelqu’un qui a commis de sérieuses entorses aux normes d’éthique?
Le 22 février, le chef de cabinet du premier ministre a voulu « parler au PM avant que tout soit considéré final ». Plus tard dans la journée, il a confirmé que « nous avons le feu vert du premier ministre une fois que Ben aura reçu confirmation de Payne ».
Mes collègues ont déjà parlé des détails, des noms et des personnes, notamment le député de Saint-Laurent—Cartierville. Ce sur quoi j’aimerais revenir encore une fois, c’est la suite des actes commis, et le fait qu’ils ne respectent pas les normes d’éthique.
Une entente a été conclue entre Benjamin Perrin et Janice Payne, les avocats du premier ministre et de Mike Duffy. Mais comme la somme nécessaire pour soulager Mike Duffy du remboursement était plus élevée que prévu, ce n’est plus le Parti conservateur du Canada qui allait payer, mais Nigel Wright, à même ses fonds personnels. L’arrangement a été conclu, et les dépenses de Duffy ont été remboursées.
Revenons un instant en arrière. À titre de citoyens, nous avons le droit, dieu merci, parce que nous vivons dans la plus belle démocratie au monde, non seulement de voter pour le parti de notre choix, pour ses convictions, ses idéaux et son idéologie, mais aussi de lui donner de l’argent pour l’aider à communiquer son message à la population.
Si je recueillais des fonds pour le Parti conservateur, et encore plus si je lui faisais des dons, je serais absolument scandalisé de voir que mon argent a permis à Mike Duffy de s’en sortir la tête haute, malgré ce qu’il a fait. C’est absolument choquant, c’est le moins que l’on puisse dire. À telle enseigne que même le sénateur Gerstein n’a pas pu le supporter. Il y avait des limites qu’il ne pouvait pas dépasser. Il était prêt à verser une certaine somme, mais pas plus, c’était trop.
Puis la somme grimpe à près de 100 000 dollars, et un chèque personnel est signé. Imaginez un peu le scénario, et j'invite les gens qui nous regardent chez eux ou à la tribune à l’imaginer avec moi: quelqu'un que vous connaissez à peine, qui a fait quelque chose de mal et que vous allez rembourser avec un chèque de presque 100 000 dollars, et soit dit en passant, c'est un chèque sur votre propre compte. Imaginez cela. C'est quelque chose qu'on ferait pour ses propres enfants, mais certainement pas pour quelqu'un qu'on connaît à peine. Le rapport indique bien qu'il n'y a pas qu'un coupable, mais que c'est tout un réseau de personnes qui ont essayé d'étouffer l'affaire. Et c'est ça qui déçoit grandement les Canadiens.
Je sais que les conservateurs vont reparler du passé et de certains événements qui se sont produits dans mon propre parti, mais ce que nous voulons, c'est essayer d'obtenir des réponses, tout comme nous nous sommes efforcés, en 2004, d'obtenir des réponses pour empêcher que ça ne se reproduise.
Ce matin, j'ai assisté à une séance d'information avec le vérificateur général, et ce fut un exercice extraordinaire, où l'on a souligné l'inefficacité du gouvernement, malgré ses meilleures intentions. Par exemple, il a été question de l'inspection de la viande, des gardes-frontières, des services en ligne qui ont besoin d'être centralisés et rendus plus accessibles à toutes les couches de la population, partout au Canada, que ce soit dans les zones urbaines ou rurales, dans l'Est, dans l'Ouest ou dans le Nord. Mais c'est l'inefficacité d’un système qu’au départ on a mis sur pied avec les meilleures intentions.
Nous invitons tous les citoyens du Canada à utiliser les ressources en ligne. Non seulement ses services coûtent moins cher, mais ils sont accessibles à n'importe quelle heure. Nous savons que les Canadiens passent beaucoup de temps à se rendre au travail et à en revenir. Certains, comme c'est le cas de nombreux travailleurs dans ma circonscription, font la navette entre Terre-Neuve et l'Alberta tous les 15 jours, et d'autres vont même jusqu’en Russie et en Afrique. Ils ont besoin d’avoir accès à des services en ligne.
Je donne ces exemples d’inefficacité pour montrer qu’au départ, les intentions étaient bonnes. Mais quel est le rapport avec le débat en cours, me direz-vous? Il y en a un. La situation dont nous discutons aujourd’hui n’était pas le fruit de bonnes intentions, et ensuite, cela n’a fait qu’empirer. Un nombre croissant de personnes s’y sont enlisées, si bien que ce n’est plus un problème d’inefficacité mais un problème d’éthique.
J’estime que la motion déposée aujourd’hui décrit bien cet état de choses, et surtout, qu’elle propose des mesures à prendre.
Voyons un peu les autres détails. Le premier ministre a donné des réponses contradictoires à la Chambre des communes, cela, nous le savons. À ceux qui nous regardent aujourd'hui, je tiens à dire que nous savons exactement de quoi nous parlons. A-t-il démissionné? A-t-il été renvoyé? Au départ, on nous a dit qu'il avait démissionné. Que c'était un type bien, qu'il était plein de bonnes intentions. Mais quelques mois plus tard, on nous a dit qu'il avait été renvoyé.
À Terre-Neuve, nous utilisons le mot « sleeven » pour désigner une personne qui manque d'éthique, et je suis gentil, car bien souvent, on emploie des mots beaucoup plus crus. À défaut d’autre chose, j'espère que je vous ai appris un nouveau mot du dictionnaire terre-neuvien: « sleeven », une personne qui manque d'éthique.
Eh bien, ils présentent maintenant cet homme comme le plus « sleeven », le plus amoral qui soit. Je ne sais même pas si c’est concevable. J'essaie simplement de dire que toute la population canadienne en parle. Tout le monde veut savoir ce qui s'est passé, parce qu'on ne veut pas que cela se reproduise.
Le document présenté par la GRC fait une description assez inquiétante des hauts responsables du Cabinet du premier ministre. On apprend que l’« escouade des fraudeurs » a essayé de blanchir un rapport du Sénat, que plusieurs personnes sont impliquées, et que des membres du Comité de la régie interne ont appelé le sénateur qui faisait l'objet de l'enquête.
C'est comme ça que c'est parti, et c'est pour ça que tout le monde en parle, parce que jusque là les gens comprennent à peu près. Je ne suis pas avocat, et je constate qu'une partie de ce rapport est rédigée en jargon juridique, parfois difficile à comprendre. Mais ce qui est facile à comprendre, c'est qu'ils voulaient supprimer les passages du rapport qui indiquaient que le sénateur Mike Duffy avait réclamé des indemnités comme s'il avait été à Ottawa, alors qu'il se trouvait en Floride.
Ça c'est quelque chose que j'arrive à comprendre et que la plupart des Canadiens arrivent à comprendre. Un sénateur a réclamé des indemnités parce qu'il prétendait travailler à Ottawa, alors qu'il se trouvait en Floride. Je ne pense pas qu'on puisse considérer la Floride comme la 11e province du Canada.
Mme Lois Brown: Ou le Mexique…
M. Scott Simms: D'accord, prenons l'exemple du Mexique. Ça revient au même, et la personne visée n'est plus là. C'est ce qu'on appelle de la malveillance, mais il faut s’y faire.
Que ma collègue qui a interrompu mon discours sache que je n'avais pas l'intention d'interrompre ses interruptions de mon discours. Je la prie de m'en excuser.
Quoi qu'il en soit, c’est arrivé. L'affaire est sortie au grand jour et des mesures ont été prises, mais qui est en cause?
Aujourd'hui, nous nous trouvons face à une situation où il ne s'agit plus simplement d'une personne, mais de plusieurs. Chaque jour on en apprend davantage sur toute cette histoire, avec de nouveaux détails, de nouveaux documents. De quoi s'agit-il ? De personnes qui ont eu un comportement répréhensible. De personnes qui se sont comportées d'une façon inadmissible pour les Canadiens.
Je vais vous laisser sur cette réflexion. En 2006, j'appartenais à la majorité, et le candidat conservateur de l'époque avait envoyé par la poste un dépliant à tous les électeurs de ma circonscription. Il disait que la pire chose était de ne pas tenir ses promesses. Je suis tout à fait d'accord.
Mais il y en a une qui est encore pire. Comme c'est arrivé maintes et maintes fois avec ce gouvernement, non seulement les conservateurs n'ont pas tenu leur promesse, mais ils continuent d'essayer de faire accroire aux Canadiens qu’ils l'ont tenue alors qu'ils savent pertinemment qu'ils ne l'ont pas tenue. Quand les conservateurs vont-ils mettre en pratique ce qu'ils préconisaient jadis?