Monsieur le Président, je remercie d'abord le secrétaire parlementaire de la leader du gouvernement à la Chambre des communes de partager son temps de parole avec moi et de me permettre de m'exprimer au nom du Groupe parlementaire québécois.
Malheureusement, le projet de loi C-74 est un autre projet de loi mammouth, étudié sous une autre motion d'attribution de temps.
Le gouvernement blâme l'opposition de s'être opposée à ce projet de loi, et c'est ce qui l'aurait forcé à avoir recours à une motion d'attribution de temps. Or blâmer l'opposition de faire son travail d'opposition, c'est comme blâmer l'Agence du revenu du Canada d'imposer des taxes aux gens ou blâmer les météorologues d'annoncer de la pluie.
C'est bien certain que nous nous opposons aux mauvaises politiques. Le gouvernement veut-il me faire croire qu'il n'avait pas pensé que nous poserions des questions et qu'il n'avait pas sérieusement prévu que nous nous opposerions à certains aspects?
Cela ne fait vraiment pas sérieux. Nous nous retrouvons avec 10 minutes seulement pour parler d'un immense projet de loi mammouth, qui fait 560 pages.
Je vais donc tenter d'être aussi bref que possible et d'aller à l'essentiel: ce budget ne s'adresse pas aux Québécois, c'est aussi simple que cela.
Comme je le mentionnais à l'étape de la deuxième lecture, il n'y a pas grand-chose, dans ce budget, pour les Québécois, à part plusieurs petites mesures qui permettront au ministre de se pavaner partout au Canada un peu avant les élections. Des annonces ciblées, c'est payant dans les comtés chauds lors des élections, on le sait. On le voit présentement dans le cas de l'élection partielle, à Chicoutimi. Le journaliste David Akin a dit qu'il n'avait jamais vu autant de dépenses et d'annonces dans une seule circonscription de toute sa carrière.
Ils veulent la gagner à tout prix, cette élection. Il faut quand même avoir du front tout autour de la tête. Heureusement pour nos collègues libéraux, ils n'ont pas à payer leur propre essence, sinon ils y penseraient à deux fois avant de rouler des centaines de kilomètres en limousine pour aller faire une annonce à 10 000 $.
Dans le projet de loi C-74, on voit le cadeau à la Irving de 75 millions de dollars pour contrer la tordeuse du bourgeon de l'épinette. C'est un bel exemple. Le problème de la tordeuse est aussi présent au Québec. En fait, la zone infestée chez nous est plus grande que le Nouveau-Brunswick au complet, mais il n'y a pas un sou pour le Québec. On donne tout pour aider la Irving. Cela illustre bien ce budget. Ce n'est pas un budget pour le Québec. C'est d'abord un budget pour le Parti libéral. On voit que ce vieux parti ne changera jamais.
Il faut bien me comprendre, il n'y a pas que du négatif là-dedans. Par exemple, la réforme pour l'Allocation canadienne pour les travailleurs est intéressante. Elle va donner un coup de pouce aux travailleurs à faible revenu. La diminution du taux d'imposition de 10,5 à 9 % pour les petites entreprises est aussi une mesure intéressante.
Comme on le sait, l'économie du Québec repose en grande partie sur ses petits entrepreneurs. La créativité du Québec est reconnue partout. C'est grâce à de bonnes idées qu'on développe des entreprises capables de percer le marché aux quatre coins du globe. Abaisser leur taux d'impôt va leur donner un coup de pouce qui leur permettra de créer nos fleurons de demain.
Le contexte dans lequel l'annonce s'est faite, par contre, nous avait fait sourciller. Le ministre des Finances se faisait attaquer de partout pour sa réforme fiscale annoncée l'été dernier. Il a sorti de nulle part l'annonce de la diminution du taux d'imposition pour sauver la face du gouvernement, mais au bout du compte cela reste une bonne mesure. On se rappellera que cette réforme fiscale a largement été abandonnée.
La proposition pour restreindre l'usage de revenus passifs a été préservée, mais le gouvernement l'a tellement diluée que la réforme ne donnera pas grand-chose. Le gouvernement, plutôt que de taper sur nos agriculteurs et nos petites entreprises, aurait pu saisir l'occasion de s'attaquer aux gros abus dans sa réforme fiscale. Justement, à ce sujet, il n'y a absolument rien dans le budget qui s'attaque aux paradis fiscaux.
Selon le Conference Board du Canada, chaque année, nous perdons des revenus d'au moins neuf milliards de dollars à cause de l'utilisation des paradis fiscaux.
Ce n'est pas compliqué. Récupérer ne serait-ce qu'une fraction de ces sommes aiderait sérieusement à nous donner une marge de manoeuvre pour atteindre l'équilibre budgétaire. Évidemment, Bay Street serait fâchée, ce qui ne conviendrait pas au parti gouvernemental, mais ce serait équitable pour les gens d'ici et pour les entreprises qui paient leurs taxes.
Plutôt que de multiplier les paradis fiscaux par des ententes de partage de renseignements avec des États où il n'y a même pas d'obligation de remplir des rapports d'impôt, le gouvernement devrait colmater les brèches.
Encore ici, Québec demande de percevoir la totalité des impôts, mais le premier ministre s'est plutôt moqué de la motion unanime du Québec, démontrant une fois de plus son arrogance.
Je suis convaincu que, peu importe le gouvernement en poste à Québec, personne ne cracherait sur les milliards de dollars cachés dans les paradis fiscaux, contrairement aux libéraux, qui multiplient les échappatoires. Il en va de même pour Netflix, une multinationale américaine.
Les entreprises québécoises et canadiennes qui offrent un service similaire doivent prélever la taxe de vente, mais le gouvernement fait tout pour exempter Netflix et les autres géants américains de cette obligation. C'est complètement injuste. On offre un avantage concurrentiel à des entreprises étrangères au détriment des entreprises d'ici. Il faut que cela change.
En ce qui concerne les avantages aux entreprises étrangères, parlons de l'environnement et de Trans Mountain. Le gouvernement vient de faire un cadeau de 4,5 milliards de dollars à une entreprise américaine pour développer un pipeline auquel la Colombie-Britannique s'oppose.
Voici ce que la plateforme libérale disait en 2015 à propos des projets environnementaux:
Les Canadiennes et les Canadiens s’attendent à ce que leur gouvernement [...] respecte les droits des personnes les plus touchées par ces projets [de développement des ressources] [...] Si ce sont les gouvernements qui délivrent des permis aux projets de développement des ressources, seules les communautés peuvent donner leur permission.
Le gouvernement vient de faire un virage à 180 degrés ici. Avec ce budget, c'est la même chose sur le plan environnemental: beaucoup de mots et pas grand-chose de concret. C'est tout simplement décevant.
Le Québec demande de l'aide pour l'électrification des transports, et il n'y a rien dans le budget. Dans ce coin-ci de la Chambre, on a demandé cela à plusieurs reprises.
Le temps file, alors je vais commencer à conclure mon discours. Ce budget est avant tout pour les libéraux. C'est du saupoudrage de nos taxes pour gagner des élections. Le gouvernement n'a toujours pas réglé le problème des transferts en santé qui sont sous le seuil minimal acceptable. Pendant que le Parti libéral joue au Monopoly avec notre argent, le Québec est confronté chaque année à des problèmes réels en raison d'une importante hausse des coûts en santé.
J'aimerais vraiment que le gouvernement commence à écouter, plutôt que de toujours faire preuve d'arrogance, comme on l'a vu concernant le rapport d'impôt unique et la crise des migrants. De notre côté, nous allons continuer de défendre sans relâche les intérêts de notre monde, les Québécois.