Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Windsor-Ouest.
Comme toujours, c'est un grand honneur pour moi de prendre la parole à la Chambre au nom des fantastiques résidants de Cowichan—Malahat—Langford, surtout au sujet d'une motion très importante.
En tant qu'ancien porte-parole de notre parti en matière de justice, j'ai eu de très bonnes relations de travail avec la députée de Vancouver Granville lorsqu'elle était ministre de la Justice et procureure générale. Bien que nous ne nous entendions pas sur certains aspects stratégiques, je savais qu'elle était une personne de la plus grande intégrité, une femme qui défend ses principes et qui a une longue et vaste expérience en tant que procureure générale et chef régionale en Colombie-Britannique. Elle jouit d'un grand respect dans ma province, la Colombie-Britannique.
C’est pourquoi, avec son rôle de première femme autochtone ministre de la Justice, j’ai été si surpris quand j’ai vu dans les nouvelles en janvier qu’on lui avait enlevé son poste et qu’elle avait été rétrogradée au ministère des Anciens combattants. Normalement, je dirais que servir nos vétérans est l’une des vocations les plus nobles dans notre pays. C’est en effet ce que cela devrait être pour la ministre des Anciens combattants. Mais c’est une rétrogradation au sein du gouvernement, parce que nous avons vu les politiques du gouvernement à l’égard des vétérans et que nous savons qu’il ne joint pas le geste à la parole en ce qui concerne les personnes qui ont déjà porté l’uniforme. Je l’entends des vétérans dans ma circonscription et je sais que le député de Courtenay—Alberni, qui est notre porte-parole pour les affaires des anciens combattants, l’entend aussi des vétérans d’un bout à l’autre du pays.
L’autre chose étrange à propos de cette rétrogradation était la lettre qu’elle a rendue publique, dans laquelle elle s’est exprimée sur la vérité à dire aux gens qui sont au pouvoir et sur le fait que notre système de justice doit toujours être à l’abri de l’ingérence politique. Ces observations, présentées sans aucun contexte, en ont surpris plusieurs, qui se sont demandé pourquoi l’ancienne procureure générale prendrait la peine de faire ces déclarations évidentes. Nous avons commencé à faire les rapprochements le 7 février lorsque le Globe and Mail a publié sa nouvelle qui a produit l’effet d’une bombe.
Comme je l’ai dit dans mes questions et mes observations envers l’intervenant précédent, le secrétaire parlementaire, Robert Fife et le Globe and Mail ne mettent pas une histoire de cette ampleur en première page à moins d’avoir retourné toutes les pierres pour vérifier les sources de l’histoire. Ils ne mettent pas leur carrière et, en fait, la réputation d’un de nos plus vieux journaux en jeu avec des rapports non corroborés. Il est évident qu’ils ont parlé à quelqu’un qui sait de près ce qui s’est passé dans le bureau du premier ministre.
Il se trouve que bien que le premier ministre et différents libéraux aient dit qu’il n’y a eu en aucun moment d’instructions données à l’ancienne procureure générale, le Globe and Mail n’a jamais utilisé ce terme. Il a plutôt parlé de pressions exercées, ce qui peut signifier bien des choses et prendre bien des formes. C’est inquiétant parce que l’un des piliers de notre système démocratique est la séparation entre les organes du gouvernement, et l’organe exécutif du gouvernement en particulier avec l’impressionnant pouvoir qu’il exerce, et notre système judiciaire. Il doit pouvoir fonctionner de manière claire et sans entrave pour assurer l’exécution des principes de la justice.
Il y a d’autres points à relier dans cette histoire.
Examinons le fait que la disposition du Code criminel relative aux accords sur la suspension des poursuites a été ajoutée en douce. Les libéraux ont beau dire qu’il y a eu beaucoup de consultations, il était extrêmement antidémocratique de leur part d’insérer cette modification majeure au Code criminel à la fin d’un projet de loi omnibus sur le budget de plus de 550 pages. Même les députés libéraux qui siègent au comité permanent des finances ont demandé à leur propre gouvernement ce que cette disposition faisait là. Le gouvernement a utilisé l’attribution de temps pour forcer l’adoption rapide de ce projet de loi. Par conséquent, cette disposition a-t-elle obtenu l’attention et fait l'objet des discussions qu’elle méritait? Je dirais que non, et la plupart des Canadiens seraient sans doute d’accord avec moi. Tout ceci a été fait par le parti qui avait promis aux Canadiens qu’il mettrait un terme aux projets de loi omnibus, car ceux-ci étaient antidémocratiques. Quelle hypocrisie! Voilà une autre promesse non tenue qui s'ajoute à la longue liste de promesses brisées par le gouvernement.
Les libéraux disent que rien de mal n'a été fait, qu’ils n’ont rien à cacher, mais le fait que leur récit change sans cesse ne fait que corroborer les allégations. Nous savons que le premier ministre s’est entretenu avec des journalistes et qu’il a déclaré que la présence continue de l'ancienne procureure générale au Cabinet parlait d’elle-même. Toutefois, il a eu l'air bien ridicule le lendemain, le jour où elle a remis sa démission. Pourquoi une personne démissionnerait-elle d’un poste d’avocat du Cabinet et trouverait-elle conseil auprès d’un ancien juge de la Cour suprême s’il n’y avait rien à cacher? Nous devons relier les points en ce qui concerne le récit changeant et la démission de l’une des principales ministres du gouvernement et nous demander si ce sont là les actions et les paroles d’un gouvernement qui n’a rien à cacher.
Cela m’amène au Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Mes collègues libéraux d’en face ne cessent de parler de sa prétendue indépendance. J’ai siégé à ce comité à titre de vice-président en 2017 et j’ai beaucoup de respect pour tous ceux qui en font partie. Cependant, j’ai été extrêmement déçu de leurs actions la semaine dernière.
La semaine dernière, les libéraux membres du comité n’ont pas fait preuve d’indépendance. Ils ont démontré qu’ils étaient les loyaux fantassins du Cabinet du premier ministre. Il ne s’agit pas d’un gouvernement par cabinet, mais plutôt d'un gouvernement mené par le Cabinet du premier ministre. C’est précisément la raison pour laquelle les représentants de SNC-Lavalin ont rencontré pas moins de 14 fois des représentants du Cabinet du premier ministre. Pourquoi perdre son temps à s'adresser ailleurs quand on sait que c'est là où tout se décide? On ne s’adresse pas au ministre de la Justice ni à tout autre ministre. On s’adresse au Cabinet du premier ministre afin de pouvoir parler à Gerald Butts, à Katie Telford et aux autres hauts dirigeants qui s'y trouvent. Voilà comment s'y prendre pour faire bouger les choses avec le gouvernement.
La réunion de la semaine dernière avait un peu l'air d'une farce. Malgré ce que prétendent les libéraux au sujet de l'indépendance du comité, ils ont rejeté tous les témoins clés qui auraient eu quelque chose de pertinent à dire sur cette affaire sordide. Oui, le comité se réunit maintenant, mais il se réunit à huis clos. Par conséquent, le public canadien ne pourra pas savoir ce qui se dit à ce comité. Nous ne pourrons pas savoir comment les libéraux ont voté. Nous pouvons dire au public quelles motions le NPD a l’intention de proposer au début de la séance, mais les Canadiens devront lire le procès-verbal pour savoir quelles motions ont été adoptées. Nous ne pouvons parler de ce qui se passe dans ce comité ou de ce qui se passe maintenant, car nous risquerions de violer le privilège parlementaire. Il est ridicule de dire que c’est un processus ouvert et transparent.
Je suis très déçu par mes anciens collègues du comité de la justice. J’ai encore beaucoup de respect pour eux. Je donne à chaque député ici le bénéfice du doute. Nous venons tous ici pour servir nos concitoyens et faire de notre mieux pour le pays. Cependant, les députés libéraux d’arrière-ban doivent se demander s’ils ont été élus pour les idéaux que nous voyons aujourd’hui. Sont-ils ici pour protéger leurs maîtres politiques au Cabinet du premier ministre, ou sont-ils ici pour se joindre à nous dans l’opposition afin de faire la lumière sur cette question, pour appuyer la motion du NPD visant à ce que le premier ministre lève le secret professionnel pour permettre à l’ancienne ministre de la Justice et procureure générale de parler, de donner sa version des faits? Tout ce que nous avons entendu, ce sont les libéraux qui parlent pour elle; nous ne l’avons pas entendue, elle. C’est son droit et son privilège de parler ou non, mais nous devrions au moins lui offrir l’occasion de le faire.
J’ai été très surpris, la semaine dernière, par le nombre de personnes de ma circonscription qui m’ont parlé de cette question. Les libéraux doivent être très prudents parce que c’est le type d’actions qui ont un effet très dévastateur sur la politique: la nature changeante des faits, les réactions au scandale et le manque d’honnêteté envers les Canadiens. C’est dévastateur pour toute cette entité. Je demande aux libéraux d’arrière-ban, s'ils veulent sauver ce qu'il reste de leur réputation sur cette question, de ne pas se ranger du côté du Cabinet du premier ministre, mais de voter avec nous pour obliger le premier ministre à lever le secret professionnel et demander la tenue d’une enquête publique pour accorder à cette affaire toute l'attention qui s'impose.