Monsieur le Président, comme toujours, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui, mais le problème c'est que nous aurions vraiment souhaité ne pas avoir à débattre de cet enjeu ici à la Chambre des communes.
En effet, de notre point de vue, la banque d'investissement en infrastructure que veut créer l'actuel gouvernement est une grave erreur qui n'a pas lieu d'être, puisque l'outil qu'ils veulent créer existe déjà, et de façon beaucoup plus contrôlée, pertinente et efficace. Cet outil s'appelle PPP Canada.
La réalité est que ce gouvernement est en train de créer une nouvelle patente qui va encore générer beaucoup de paperasse et beaucoup d'entraves. Comme on l'a vu depuis le début dans sa conception même, la banque d'investissement en infrastructure a le potentiel de générer un Gomery 2.0, comme l'a si bien dit le député de Richmond—Arthabaska, lors de la période des questions.
Ce projet de banque d'investissement en infrastructure est mauvais tant sur le fond que sur la forme. Rappelons que nous sommes en train de débattre en comité parlementaire du projet de loi C-44. Ce projet de loi vise à mettre en place les mesures du budget, mais c'est un projet de loi omnibus qui, en son sein, contient des éléments qui ne sont pas des mesures fiscales concernant le budget. Il porte plutôt la signature d'un projet de loi omnibus qui glisse à l'intérieur des éléments qui ne sont pas inclus dans le budget.
Dois-je rappeler à mes amis d'en face qu'ils se sont fait élire, il y aura bientôt deux ans, de triste mémoire, sur un programme qui, à la page 32, disait ceci: « Nous n'userons pas de subterfuges législatifs pour nous soustraire à l'examen du Parlement. »
Or c'est exactement ce qu'ils font avec la Banque de l'infrastructure qu'ils créent actuellement. Nous sommes dans une situation où on veut éviter les débats au Parlement, on veut faire cela à la va-vite, alors que c'est un élément fondamental qui est mauvais de notre point de vue, qui n'a pas lieu d'être et que l'on devrait immédiatement fermer. S'ils le veulent, grand bien leur fasse, mais ils devront passer par le tamis et l'examen rigoureux du Parlement auquel ils s'étaient engagés. Toutefois, c'est encore une autre des nombreuses promesses que ce gouvernement a mises de côté.
Cela n'a pas sa place en raison du fait que c'est inclus dans un projet de loi omnibus. En raison de ce fait, cette importante partie du projet de loi C-44 ne sera débattue que pendant deux heures à peine en comité parlementaire. Ce n'est pas rien: on parle de 35 milliards de dollars de l'argent des contribuables et on parle d'aller attirer du financement étranger. Or la réalité c'est que les parlementaires, qui sont les représentants de ceux qui vont payer pour cela, font cela à la va-vite. En deux heures de temps tout est réglé, merci, bonsoir.
Par contre, voilà qu'on apprend que le premier ministre, encore une fois et comme à son habitude, rencontre en cachette et à la va-vite des gens du secteur privé qui s'intéressent à cela et peut-être aussi des investisseurs étrangers. Encore une fois, plutôt que jouer à visière levée et plutôt que tenir un débat clair avec les représentants des contribuables canadiens, le premier ministre rencontre ces investisseurs dans une chambre d'hôtel, les portes fermées. On n'en parle à personne et on règle cela en cachette, merci, bonsoir.
Ce n'est pas la bonne façon de faire. C'est peut-être la façon de faire libérale qui rappelle ce qui a conduit à la commission Gomery. Nous avertissons les libéraux. Ils prennent le chemin pour se diriger encore une fois vers un méga problème. Si par malheur, ils le font, ce sont les Canadiens qui vont payer, encore une fois, pour cette mauvaise décision.
Il faut comprendre qu'il est important que tout se fasse correctement. Alors que même l'ambition de créer une banque d'investissement se fait par le bras lâche et hypocrite d'un projet de loi omnibus — je dis lâche et hypocrite parce que ces gens ont dit qu'ils ne le feraient pas et ils le font —, et malgré le fait que ce projet de loi ne soit toujours pas voté par la Chambre des communes, voilà que ces gens agissent tout de suite comme si c'était fait. On décide du lieu, on nomme les organisateurs, on nomme des responsables, on nomme des gestionnaires et on nomme des dirigeants. Halte!
Peuvent-ils au moins avoir la décence nécessaire de respecter le travail des parlementaires? Non, voilà qu'ils sont tout fiers d'annoncer que cela se passe à Toronto, non sans soulever l'ire de bien des gens du Québec.
Je tiens à faire le point là-dessus. Pour nous, il n'était pas question de dire si nous sommes pour ou contre Toronto ou Montréal: nous sommes contre la banque de l'investissement. Qu'ils fassent cela à Montréal ou ailleurs, pour nous ce n'est pas une bonne idée. C'est pour cela que nous, les députés conservateurs du Québec, ne sommes pas sortis les mains en l'air en disant que cela n'avait pas de bon sens que cela se passe à Toronto, cela n'a pas de bon sens tout court. Il ne devrait pas y avoir la Banque de l'infrastructure qui se fait là.
Sur la forme, c'est tout à fait inacceptable: on a fait un projet de loi omnibus, il n'y a pas eu de débat au Parlement, le premier ministre a eu des rencontres secrètes avec des gens qu'il a à peine osé identifier à la Chambre, et le gouvernement a déjà pris une décision, alors que le projet de loi n'est pas encore adopté.
Parlons maintenant du fond. Le gouvernement se gargarise de beaux principes et dit que cela permettra de financer des infrastructures. Les libéraux disent qu'ils sont gentils et qu'ils investissent massivement dans les infrastructures. Dois-je rappeler que, sous l'égide du député de Lac-Saint-Jean, quand nous étions au pouvoir, nous avions mis sur pied le plus grand programme d'infrastructure de l'histoire du Canada, un investissement de 80 milliards de dollars sur 10 ans. Seulement, contrairement à l'actuel gouvernement, nous l'avions fait tout en équilibrant le budget.
C'est facile d'envoyer des milliards de dollars à gauche et à droite quand on fait des déficits de 30 milliards par année et qu'on n'est même pas capable de dire quand on va revenir à l'équilibre budgétaire. Ce n'est pas grave d'augmenter la dette et de faire des gros déficits, alors qu'on s'est fait élire en disant qu'on ferait de petits déficits; la vie est belle! Il y a des limites à prendre les gens pour des imbéciles.
Notre programme d'infrastructure faisait partie d'un budget équilibré, contrairement à celui de l'actuel gouvernement. Nous sommes pour les investissements en infrastructure, bien entendu, mais cela doit être fait avec les moyens du bord, c'est-à-dire avec un budget équilibré.
Par ailleurs, l'outil que le gouvernement veut créer à des fins bassement mercantiles pour le Parti libéral existe déjà de façon tout à fait légale et correcte, et ce, sans avoir besoin d'investissements étrangers, et surtout, sans avoir à geler des milliards de dollars des contribuables. Il s'agit de PPP Canada, soit le partenariat public-privé. Cet outil créé par notre gouvernement en 2009 permet à des investisseurs privés qui le désirent d'investir dans des programmes d'infrastructure. Le député nous a mentionné certains exemples qui fonctionnent bien, tout comme la députée de Surrey-Sud—White Rock. L'outil fonctionne bien, tant mieux.
À preuve, quand notre gouvernement a créé PPP Canada, en 2009, le budget de base était de 1,3 milliard de dollars, et cet outil s'est avéré le levier économique nécessaire pour attirer des investissements de 6 milliards de dollars. A-t-on déjà entendu parler d'un scandale? Est-ce que de l'argent a été perdu? Est-ce que les Canadiens ont été mal servis par cet outil? Non. C'est une société d'État que le gouvernement conservateur a créée en 2009 et qui fonctionne.
Il n'est donc pas nécessaire de créer la nouvelle patente des libéraux, soit la banque d'investissement. Nous sommes pour l'investissement privé quand cela est bien fait et qu'il est passé au tamis par PPP Canada. Nous ne nous objectons pas non plus à ce que des étrangers fassent des investissements, dans la mesure où ils le font pour le bien des Canadiens et non pour se remplir les poches.
Il y a quelques minutes à peine, mon collègue a très bien illustré, de façon pertinente, claire et assez évidente, en ce qui concerne la banque de l'infrastructure du gouvernement, que tous les risques qui y sont associés seront assumés par les contribuables canadiens et que, s'il y a des problèmes, ce sont eux et non les investisseurs étrangers qui vont payer. Ce n'est pas une façon de faire raisonnable quand on a à coeur le porte-monnaie des contribuables canadiens.
Le gouvernement n'a de cesse de dire qu'il met plusieurs projets en marche pour les infrastructures. Dois-je rappeler que 94 % de ces projets ne se sont toujours pas concrétisés? Alors, les libéraux peuvent bien parler.
Malheureusement, on ne peut pas réécrire l'histoire, mais si, par bonheur, il y a un an et demi, les Canadiens avaient renouvelé leur confiance à notre endroit, des milliards de dollars auraient pu être investis dans nos infrastructures grâce au programme mis en place sous l'égide du député de Lac-Saint-Jean. En ce moment, on ne fait qu'écouter parler les libéraux. Dois-je rappeler que 94 % de leurs projets n'ont toujours pas été réalisés?
Je rappelle que, pour créer cette banque, on va geler 15 milliards de dollars de l'argent des contribuables, plus 20 milliards de dollars supplémentaires, pendant cinq ans. Ce sont autant de milliards de dollars que nous n'aurons pas pour répondre immédiatement aux besoins et aux demandes des petites municipalités.
L'autre élément qui n'a pas d'allure, c'est que cette banque ne vise que des investissements majeurs de plus de 100 millions de dollars. Ce matin, le député de Richmond—Arthabaska a dit qu'en moyenne, les projets d'infrastructure au Canada étaient de 6,6 millions de dollars.
Alors quand on parle de 100 millions de dollars, de quoi parle-t-on? On parle de Vancouver, de Montréal et de Toronto. Ce n'est pas vilain, mais que fait-on de toutes les autres villes canadiennes?
Voilà que l'on va prendre 15 milliards de dollars qui devraient aller directement dans les petites et moyennes villes canadiennes, et on les met dans une banque pour faire plaisir à des investisseurs étrangers, qui eux ne prendront pas de risque et, par malheur, le risque, lui, sera pris par les contribuables canadiens. Cela n'a pas de bon sens.
C'est pour cela que dans sa forme actuelle, la Banque n'a pas sa place. Comme l'a si bien dit de façon assez claire et cinglante KPMG, le groupe qui avait été sollicité par le gouvernement pour faire l'analyse, il y a péril en la demeure. Il ne faudrait surtout pas que le gouvernement aille de l'avant avec cette nouvelle créature, pour ne pas dire cette nouvelle « patente à gosses ».