Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-59, la mesure législative du gouvernement libéral sur la sécurité nationale. Certains diront que ce projet de loi a été mal nommé, car il ne vise pas tant la sécurité que l'administration, la surveillance et la réglementation. Certainement, il n'a pas répondu aux attentes des experts en sécurité nationale qui ont comparu devant le comité. Peut-être qu'on pourrait l'appeler projet de loi sur les libertés civiles, puisque, en comité, nous avons entendu le témoignage de deux fois plus d'avocats et de défenseurs des droits civils que d'experts en sécurité nationale.
Comme je l'ai déjà dit à la Chambre, la sécurité publique et la sécurité nationale devraient constituer la priorité absolue de la Chambre, et avoir priorité sur la politique pour que la sûreté et la sécurité des Canadiens passent avant les intérêts politiques. Même si les libéraux ont dit que la sécurité publique est leur priorité absolue, ils l'ont aussi dit à propos de tous les autres dossiers. Or, avoir 300 priorités absolues, cela équivaut à n'en avoir aucune.
En cette absence d'orientation et de leadership, nous avons vu la sécurité nationale du Canada s'affaiblir et dérailler. Les libéraux érodent la sûreté et la sécurité de collectivités, minent la prospérité économique, et déchirent la trame sociale avec leur politique de la division. Avec leurs réformes du système de justice pénale, ils allègent les peines prévues pour les crimes comme l'agression armée, la conduite avec facultés affaiblies, être membre d'une organisation terroriste, la traite des personnes et la corruption d'un agent, pour ne nommer que ceux-là. Ainsi, sous les libéraux, les délinquants violents et dangereux purgeront des peines plus légères et seront sujets à moins de contrôle qu'un diabétique qui cherche à obtenir un crédit d'impôt du gouvernement, par exemple.
Pour lutter contre les gangs et la violence commise avec des armes à feu, les libéraux ont promis d'investir 327 millions de dollars dans des groupes de travail policiers et d'autres initiatives. Ils ont annoncé ce financement peu avant l'élection partielle de Surrey, où la violence liée aux gangs est un véritable problème. Sept mois plus tard, les services de police et d'autres entités attendent toujours d'encaisser l'argent. Ils demandent toujours où sont ces fonds. Apparemment, lutter contre les gangs et la violence commise avec des armes à feu n'est pas suffisamment prioritaire pour faire acheminer les fonds à ceux qui luttent contre les problèmes mêmes qui affligent les Canadiens, c'est-à-dire les gangs et la violence commise avec des armes à feu.
Avec le projet de loi C-59, les libéraux semblent vouloir replonger le Canada dans une époque où les organismes de sécurité nationale cachaient l'information et où le partage de l'information entraînait des catastrophes comme l'attentat d'Air India. L'ancien directeur du SCRS, Dick Fadden, a fait remarquer au comité que les nombreuses références superflues à la vie privée et à la Charte mèneraient les fonctionnaires de carrière, dont les agents de la sécurité nationale, à éviter le partage d'information. Il a décrit un scénario catastrophe où le gouvernement n'agirait pas contre une attaque parce que le secteur du gouvernement au courant n'aurait pas partagé l'information qu'il détenait. Le projet de loi C-59 ferait reculer le Canada à l'époque du travail en vase clos en plus de potentiellement exposer les Canadiens à l'espionnage, au terrorisme et au cybercrime.
Chose certaine, le projet de loi C-59 augmente les risques pour le pays. Il y a d'abord la surveillance accrue, ce qui peut être positif si elle est bien appliquée. Cependant, lorsqu'on prévoit de multiples couches de surveillance, qu'on n'établit pas clairement les liens entre ces organismes et qu'on ne prévoit aucun fonds pour la nouvelle administration créée, les ressources qui servaient à assurer la sécurité du Canada doivent être réaffectées aux tâches et aux formalités administratives.
Soyons clairs. Le projet de loi C-59 prévoit des compressions au sein des organismes de sécurité et de renseignement du Canada. Les organismes qui ont déjà affirmé qu'ils ne peuvent s'occuper que des principales menaces pesant sur notre pays et qu'ils doivent laisser de côté les menaces mineures à cause d'un manque de ressources disposeront d'encore moins de ressources. Est-ce à dire que l'une des principales menaces, qui cible nos collectivités et notre pays, devra être gérée par des ressources réduites?
En novembre dernier, j'ai demandé combien coûterait la mise en oeuvre du projet de loi C-59, et on m'a promis que je recevrais une réponse rapidement. J'ai bel et bien eu une réponse, mais j'ai dû attendre huit mois avant de recevoir ces 170 mots, après que le comité ait renvoyé le projet de loi à la Chambre. Le coût total du nouveau cadre de surveillance et de conformité s'élève à près de 100 millions de dollars: 97,3 millions de dollars sur cinq ans. Ainsi, on réattribue 100 millions de dollars qui servaient à la protection des Canadiens aux formalités administratives.
Cependant, ce n'est pas seulement l'argent qui affaiblit la sécurité communautaire du Canada. C'est l'affaiblissement des outils destinés aux forces policières. Dans le projet de loi C-59, les libéraux feront en sorte qu'il sera plus difficile pour les forces policières et la Couronne d'obtenir un mandat visant des menaces à la sécurité connues. Si les services de police sont au courant d'une menace, ils peuvent obtenir une ordonnance d'engagement, un mandat pour surveiller cette personne, qui sont émis par un juge.
Les libéraux feront en sorte qu'il sera plus difficile pour les forces policières et les organismes de sécurité de surveiller les menaces connues. Qui en profitera? Je pense que les seules personnes qui en profiteront seront les criminels et les terroristes qui sont prêts à nous faire du mal. Le fait qu'il sera plus difficile pour les forces policières de contrer les menaces n'aide pas la classe moyenne, les riches ou les pauvres. Cela complique le travail des forces policières et celui de ceux qui s'efforcent de prévenir les crimes et de faire du Canada un pays sécuritaire. Je le répète, cela nuit à la sécurité publique et ce sont les travailleurs canadiens honnêtes et respectueux de la loi qui en souffrent.
Des membres de la communauté juive ont dit clairement qu'ils étaient très inquiets de l'élimination de la disposition relative à la promotion du terrorisme, qui est prévue dans le projet de loi C-59. En 2017, pour la troisième année consécutive, il y a eu un nombre record de crimes haineux contre la communauté juive. Pourtant, les libéraux sont prêts à éliminer une disposition du Code criminel qui rend la promotion du terrorisme illégale. Malgré une hausse des crimes haineux, ils sont prêts à laisser le groupe État islamique faire appel à la violence et diffuser des vidéos d'attaques de loups solitaires sur YouTube et autres tout en étant à l'abri de poursuites.
Je sais que ce n'est pas quelque chose que les Canadiens appuient. Ils ne veulent pas que le Canada devienne le nouveau foyer du terrorisme radical et des terroristes du groupe État islamique. Toutefois, à l'heure actuelle, le Canada ne traduit pas en justice les terroristes et les combattants du groupe État islamique qui reviennent ici, n'impose pas de sanctions pour les incitations à la haine et à la violence, et est le seul pays occidental dont les frontières ne sont pas protégées. Compte tenu de tout cela, nous pourrions bien à l'avenir être aux prises avec une crise majeure.
Le gouvernement libéral ne cesse de faire passer les Canadiens après la promotion de ses vertus politiques et de ses causes de justice sociale. Les libéraux ne servent pas les Canadiens; ils servent uniquement leurs propres intérêts. Dans le projet de loi C-59, les libéraux semblent constamment proclamer leurs vertus et faire la promotion de la justice sociale. Les activités de protestation, de défense d'une cause et d'expression artistique sont toutes reconnues dans la Loi antiterroriste comme des activités légitimes, tant qu'elles ne sont pas associées à des actes violents ou criminels. Toutefois, les libéraux ont jugé nécessaire de le préciser à maintes reprises dans un projet de loi omnibus.
En tout, plus de 300 amendements ont été proposés au projet de loi à l'étude, mais les libéraux ont voté en faveur d'un seul amendement de l'opposition. Il s'agissait en plus d'un amendement du NPD, qui ressemblait beaucoup à un autre amendement libéral. Nous savons donc, après avoir écouté pendant des semaines des témoignages et des débats, que les dés étaient pipés, et que la promesse du ministre d'être ouvert à tout amendement qui améliorerait la sécurité publique était une promesse creuse.
Dans le projet de loi C-59, les libéraux proposent une clause dite de Henri VIII. En vertu de ce genre de clause, l'exécutif a plein pouvoir sur le Parlement, usurpant ainsi le rôle du Parlement de parler au nom des Canadiens. De tels pouvoirs sont habituellement très rares et sont donnés dans des situations d'urgence et de crise bien précises. Ce n'est pas parce que ce serait commode qu'il y a urgence ou crise, et les libéraux devraient se rappeler que c'est la Chambre qui approuve les mesures législatives, pas l'exécutif.
Même des amendements simples et directs ont été rejetés. Le commissaire qui a été désigné pour devenir le nouveau commissaire au renseignement a mentionné que le fait que son remplaçant ne puisse être choisi que parmi les juges à la retraite réduit considérablement un bassin déjà limité de candidats et a recommandé que, comme lui, les juges fédéraux en fonction puissent être nommés à condition de prendre leur retraite.
Si ce projet de loi m'a appris une chose, c'est que les Canadiens ne peuvent pas compter sur les libéraux pour défendre leurs intérêts et faire de la sécurité publique et de la sécurité nationale une priorité et que, pour les libéraux, la politique passe avant la bonne gouvernance.
Les risques pour notre sécurité sont réels et mettent les Canadiens en danger. Les problèmes comme celui du retour de terroristes du groupe armé État islamique sont complexes et les solutions ne sont pas simples. Toutefois, nier le problème est irresponsable et négligent. À en juger par ce projet de loi, on peut facilement présumer que les libéraux s'inquiètent plus de la conformité du SCRS à la Charte des droits et libertés qu'ils tiennent à traîner en justice les terroristes qui ont commis des crimes graves.
Le Canada sera affaibli par le projet de loi C-59 et sera plus faible lorsque les libéraux quitteront le pouvoir que lorsqu'ils y sont arrivés. Leurs politiques qui divisent sur les critères liés aux valeurs et leur façon de se plier aux terroristes, d'ignorer les menaces venant de la Chine, de cibler les propriétaires d'armes à feu respectueux de la loi ainsi que leur manque de leadership dans le dossier de ceux qui traversent illégalement la frontière et leurs hésitations prendre des décisions sur l'exploitation des ressources continuent à désavantager les Canadiens.
De vraies questions concernant la sécurité nationale ont été soulevées au comité, mais, dans le projet de loi C-59, il est très peu question des menaces nouvelles et émergentes pour la sécurité publique au Canada.
Pour reprendre ce qu'a dit au comité l'ancien commandant des forces spéciales, le lieutenant-colonel Michael Day, le débat et les discussions au sujet de la façon de protéger les Canadiens étaient importants et devaient se poursuivre. Toutefois, lorsqu'on lui a demandé s'il croyait que, grâce au projet de loi à l'étude, le Canada serait prêt à faire face aux menaces nouvelles et émergentes, il a répondu « pas du tout ». Justement, je ne fais pas du tout confiance au ministre et au gouvernement libéral pour faire du projet de loi C-59 un bon projet de loi.