Madame la Présidente, je suis ravie de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui au sujet du projet de loi C-57, Loi modifiant la Loi fédérale sur le développement durable.
Pour ceux qui ne sont pas familiers avec le projet de loi et ce qu'il tente d'accomplir, précisons qu'il donnera un cadre juridique à l'élaboration et à la mise en oeuvre d'une stratégie fédérale de développement durable qui obligera le gouvernement à rendre davantage des comptes au Parlement relativement à la prise de décisions d'ordre environnemental, économique ou social.
Le projet de loi propose d'étendre la portée de la Loi fédérale sur le développement durable en facilitant l'adoption d'une approche pangouvernementale qui prévoit de nouvelles mesures obligatoires et élargies en matière de reddition de comptes et d'application de la loi. Ces amendements découlent en partie du rapport unanime présenté en 2016 par le Comité permanent de l'environnement et du développement durable, intitulé « La durabilité fédérale pour les générations futures ». Dans son rapport, le Comité a recommandé l'adoption d'une approche pangouvernementale pour les projets de développement durable. Comme la ministre l'a indiqué précédemment, il s'agit d'un rapport unanime du Comité qui contient des recommandations visant à essayer de faire avancer le dossier du développement durable.
Cependant, si nous voulons faire progresser un dossier, il est important de le comprendre. Je vais donc lire la définition du développement durable:
Le développement durable est le principe organisateur visant à atteindre des objectifs de développement humain tout en soutenant la capacité des systèmes naturels de fournir les ressources naturelles et les services écosystémiques dont l'économie et la société dépendent. Le résultat souhaité est une société où les conditions de vie et l'utilisation des ressources répondent aux besoins des humains sans miner l'intégrité et la stabilité du système naturel. Le développement durable peut être considéré comme un développement qui répond aux besoins présents sans compromettre la capacité des futures générations à satisfaire les leurs.
On note quelques points importants dans cette définition. Je veux attirer l'attention sur la première partie, dans laquelle il est question d'avoir des objectifs. Il est important d'avoir des objectifs lorsqu'on veut un développement durable. La deuxième partie qui est très importante à mes yeux, c'est celle qui dit que nous devrions répondre aux besoins présents sans compromettre la capacité des futures générations à satisfaire les leurs. Je vais mentionner quelques domaines qui pourraient soulever des préoccupations à cet égard.
Si, comme je l'ai dit, nous avons besoin d'objectifs pour le développement durable, quels sont les objectifs du gouvernement libéral à cet égard?
Environnement et économie vont de pair: c'est une idée que nous avons tous entendue à de multiples reprises. De toute évidence, le gouvernement tient à ce qu'elle devienne réalité ici, au Canada. Nous savons aussi qu'il a à coeur de réduire les émissions de gaz à effet de serre afin de contrer les changements climatiques. Si ce sont là les buts visés, il est important de les examiner de plus près.
Regardons tout d'abord le rapport du vérificateur général, qui a examiné ce que fait le gouvernement et a commenté ses progrès. Alors qu'environ 65 % de la législature actuelle est déjà écoulée, le rapport du vérificateur général n'est malheureusement pas très flatteur pour la ministre de l'Environnement. Ce rapport parle des progrès qui auraient dû être réalisés en matière de réduction des gaz à effet de serre. Les députés se souviendront que, pendant la dernière campagne électorale, le Parti libéral se vantait d'être le seul à pouvoir relever le défi que posent les changements climatiques au Canada. Il a eu deux ans pour agir depuis, et le vérificateur général lui donne un F, un échec. Voici ce que dit son rapport:
Nous avons conclu qu'Environnement et Changement climatique Canada avait collaboré [...] à l'élaboration d'un nouveau plan national [...] Cependant, les mesures pour réduire les émissions de gaz à effet de serre qui y sont présentées n'avaient pas encore été mises en oeuvre.
Ces recommandations n'ont toujours pas été mises en oeuvre, et les deux tiers du mandat du gouvernement sont déjà écoulés.
Voici ce qu'on peut lire ensuite dans le rapport du vérificateur général:
Nous avons conclu qu'Environnement et Changement climatique Canada [...] n'avait pas réalisé de progrès en vue d'honorer les engagements du Canada consistant à réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Le rapport ne dit pas que les progrès sont insuffisants, mais bien qu'ils sont inexistants.
Il faut dire que la ministre et le gouvernement ont tout de même fait quelque chose pendant ce temps: ils ont imposé aux Canadiens une énorme taxe sur le carbone qui aura des répercussions pendant plusieurs générations. Le vérificateur général a néanmoins conclu qu'Environnement et Changement climatique Canada n'avait pas fourni un leadership adéquat pour faire progresser l'adaptation aux impacts des changements climatiques.
Les progrès sont inexistants, et les libéraux n'ont pas mis de plan en oeuvre. Par conséquent, les choses ne vont pas très bien.
Examinons comment se porte l'économie. Au cours des deux tiers du mandat des libéraux au pouvoir, 80 milliards de dollars d'investissement dans le secteur de l'énergie ont quitté le Canada, 100 000 travailleurs du secteur de l'énergie ont perdu leur emploi, 400 000 travailleurs du secteur forestier ont payé les frais de l'inaction du gouvernement dans le dossier du bois d'oeuvre, et qui sait quelles seront les conséquences des droits de douane annoncés tout récemment sur l'acier et l'aluminium, deux industries énormes au Canada.
En outre, il y a tout le fiasco entourant le pipeline de Kinder Morgan. Le gouvernement est intervenu et a dépensé 4,5 milliards de dollars des contribuables pour acquérir des infrastructures vieilles de 65 ans qui ne se traduiront pas par l'aménagement du moindre pouce de nouveau pipeline. Au lieu d'encourager l'investissement privé au pays, comme envisageait de le faire Kinder Morgan en dépensant des milliards de dollars et en créant des milliers d'emplois canadiens, le gouvernement a donné à Kinder Morgan de l'argent que la société emportera avec elle aux États-Unis et dont elle se servira pour créer de l'emploi là-bas. Nous ne créons pas ces emplois ici au Canada. Rien ne prouve que le gouvernement a réuni les conditions requises pour empêcher le gouvernement néo-démocrate de la Colombie-Britannique de protester contre le projet d'expansion et de s'y opposer, ni pour obtenir le consentement des Autochtones afin de le concrétiser.
C'est l'un des pans de l'économie.
Un autre pan est celui du déficit. Ce qui devait d'abord être un déficit de 10 milliards de dollars — la promesse électorale faite par les libéraux en 2015 — a soudainement doublé dès la première année. La deuxième année, c'était encore le double. Maintenant que nous en sommes à la troisième année, le déficit a triplé, et rien n'indique que cela va s'arrêter. Les libéraux ne produiront pas un seul budget équilibré au cours de leur mandat. Selon les prévisions, ils n'y parviendraient qu'en 2045. Les libéraux ont ajouté 1,5 billion de dollars à la dette. C'est ridicule.
Les principes du développement durable veulent qu'on réponde aux besoins actuels sans compromettre l'avenir des générations futures. Or, ce sont les générations futures qui devront assumer les coûts de la dette que le gouvernement a gonflée. J'ai fait quelques calculs hier pour voir ce que cela représentait. Eh bien, chaque contribuable canadien devra payer 5 000 $ pour couvrir seulement les intérêts de la dette engendrée par le gouvernement.
Cette façon de dépenser ne constitue certainement pas du développement durable et elle n'aide en rien l'économie. La réalité, c'est que les gens sont en train de perdre confiance dans l'économie, pas le contraire.
Pire encore, on a mis en place une réglementation environnementale qui prolonge le processus d'approbation, ce qui crée de l'incertitude et décourage les investissements au Canada. Sous le gouvernement libéral, le promoteur privé du projet d'oléoduc Énergie Est s'est retiré du projet. Le projet d'usine de gaz naturel liquéfié de Petronas a connu le même sort. Le gouvernement a pris la décision arbitraire de ne pas approuver la réalisation du projet Northern Gateway. Les investisseurs d'autres pays qui examinent la situation au Canada seront portés à croire que le développement n'y est pas durable, ni même possible. Le gouvernement doit faire quelque chose pour changer ces conditions.
Comme les députés le savent, je ne suis pas du genre à critiquer sans faire de propositions constructives. J'ai effectivement quelques suggestions utiles que le gouvernement devrait envisager.
Parlons d'abord du plan de lutte contre les changements climatiques. Le Canada ne compte que pour environ 2 % de l'empreinte carbone mondiale. Même si on abandonnait le plan en entier, cela ne ferait pas une si grande différence dans la lutte contre les changements climatiques. Cependant, nous pouvons prendre certaines mesures.
Si nous pouvions aider d'autres pays comme la Chine, l'Inde, les pays d'Europe et les États-Unis à réduire leur empreinte — soulignons que ces quatre régions sont responsables de 60 % de l'empreinte carbone mondiale —, nous pourrions vraiment faire une différence dans la lutte contre les changements climatiques. Comment pourrions-nous faire cela?
Nous avons la technologie et les ressources nécessaires. Si nous pouvions transporter le pétrole jusqu'à la côte et le vendre à la Chine, l'Inde, la Corée et d'autres pays qui veulent acheter le pétrole canadien, ils pourraient cesser de dépendre du charbon. Ce serait un progrès énorme pour réduire l'empreinte carbone dans le monde. De plus, le Canada est bien connu pour ses technologies de production d'énergie renouvelable. L'un des plus grands parcs d'éoliennes d'Amérique du Nord se trouve dans ma circonscription, Sarnia—Lambton. Nous avons de l'énergie éolienne. Nous avons un centre de bio-innovation qui s'emploie à trouver de nouvelles façons de générer intelligemment de l'énergie dans le monde.
Je vous mentionne quelques idées. L'une d'entre elles est la machine à vortex qui pourrait être utilisée aux endroits où l'eau de mer est chaude. On peut générer de l'énergie et de l'électricité avec de l'eau de mer chaude. C'est une excellente technologie. Les députés qui ne savent pas très bien ce dont il s'agit devraient chercher sur Internet « Lambton College » et « centre de bio-innovation de Sarnia—Lambton ». Ils devraient jeter un coup d'oeil à cette technologie.
Il existe aussi d'autres technologies, comme la séquestration du carbone. Les Canadiens sont réputés dans le monde entier pour leur maîtrise de cette technologie, dont l'usage pourrait aussi aider grandement le monde à réduire son empreinte carbone, ce qui est important. Cependant, bien que nous puissions agir sur certains facteurs, d'autres nous échappent.
En quelques jours, le volcan d'Hawaii génère une empreinte carbone pratiquement plus importante que la planète en entier. Nous n'y pouvons rien. C'est la même chose pour les feux de forêt. Les feux qui consument les forêts d'Amérique du Nord chaque année neutralisent totalement le travail que nous faisons pour réduire l'empreinte carbone, alors nous devons nous doter d'un plan à ce sujet.
L'autre élément auquel doit s'attarder le gouvernement en matière de changement climatique est la création d'un plan de réponse aux impacts du changement climatique. Par exemple, le Canada connaît de plus en plus d'épisodes d'inondation. Il y a eu des inondations monstres à Calgary, à Winnipeg, à Toronto et dans les provinces de l'Atlantique. Nous avons vu des feux de forêt sans précédent en Colombie-Britannique.
Porter secours aux sinistrés lors de ces catastrophes coûte de l'argent. Certains problèmes peuvent être anticipés. Par exemple, la fonte du pergélisol dans le Nord a des effets sur les infrastructures comme les routes et les autoroutes. Que fait le gouvernement pour répondre à ce problème et où sont ses plans de réponse d'urgence à toutes ces catastrophes? Le gouvernement doit se préparer.
En ce qui concerne l'économie et les efforts pour que l'environnement et l'économie aillent de pair, les libéraux doivent revoir les conditions qu'ils créent en matière d'investissement au Canada. Je leur suggérerais de prendre exemple sur nos voisins du Sud. Là-bas, on réduit l'impôt des sociétés et il n'y a qu'en Californie qu'une taxe sur le carbone a été créée. Les Américains cherchent à réduire le fardeau réglementaire plutôt que de toujours créer plus de processus qui demandent du temps et qui ne font qu'accroître la bureaucratie, les coûts et l'incertitude à l'égard des projets. Les libéraux devraient s'en inspirer pour favoriser la compétitivité du Canada.
Le Canada est capable d'affronter la concurrence. Nous disposons de grands talents et de grandes ressources. Cependant, si nous ne créons pas un climat où les investisseurs voudront faire des affaires au Canada et où ils seront en confiance, nous serons perdants.
Nous ne pouvons pas mettre tous nos oeufs dans le même panier, alors le gouvernement doit envisager le développement durable dans une optique plus large que celle qui se limite aux changements climatiques. Nous devons nous intéresser à divers problèmes qui existent au Canada, mais qui ne retiennent pas assez l'attention aujourd'hui, selon moi.
Dans l'Ouest, le dendroctone du pin ponderosa est en train de dévorer les forêts, qui constituent l'une de nos grandes ressources naturelles. Les forêts sont au coeur d'une industrie et elles créent des emplois au Canada en plus d'absorber du dioxyde de carbone. Nous devons trouver une solution à cette crise.
Il faut aussi régler le problème des algues qui prolifèrent dans le lac Érié. Je sais que des plans ont été mis en oeuvre et que des gens se concertent avec l'industrie agricole et d'autres acteurs pour tenter de réduire la charge en polluants phosphorés, mais il faut en faire davantage.
L'agriculture canadienne est un secteur d'intérêt également. Il est important d'appuyer les agriculteurs non seulement pour que nous puissions tous nous nourrir, mais aussi pour que la production agricole constitue un puits de carbone. Au Canada, le secteur agricole est mis à mal. Le gouvernement le soumet à une réglementation qui interdit certains pesticides sans qu'il y ait de solution de rechange, mais qui permet l'importation au pays d'aliments produits avec les mêmes pesticides. Voilà encore un domaine où le Canada n'est pas compétitif.
En ce qui concerne l'élevage, le gouvernement est en train d'interdire la vente de moulées contenant des antibiotiques. On s'en sert pour nourrir les animaux malades, et non tous les animaux. C'est encore le même genre de problème: d'autres pays permettent l'utilisation de ces moulées et sont ainsi plus compétitifs que le Canada, puis ils exportent leurs produits ici.
Je pourrais parler également de l'eau, qui figure aussi parmi les grandes ressources naturelles du Canada. Je suis terriblement déçue de la démarche du gouvernement pour éliminer les avis d'ébullition de l'eau au pays.