Madame la Présidente, je remercie mon collègue de Winnipeg-Nord de partager son temps de parole avec moi.
Ce budget n'a rien de révolutionnaire ni même d'ambitieux. Tout ce qui ressort du budget, c'est que le gouvernement saupoudre de l'argent un peu partout, sans réel plan de retour à l'équilibre budgétaire. C'est bien bon pour des annonces préélectorales dans la banlieue de Toronto, mais sans plus.
Encore une fois le Québec n'est pas une priorité pour le Canada. Encore une fois les Québécois ne sont pas une priorité pour le gouvernement. Résumé vite, le budget de 2018 est carrément injuste envers le Québec. À titre d'exemple, prenons le nouveau cadeau fait à Irving. Avec 4 millions et demi d'acres, on peut dire que la forêt des Maritimes c'est Irving. Le gouvernement libéral a décidé d'offrir 75 millions de dollars aux Maritimes, donc à Irving, pour lutter contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Pour le Québec, il n'y a rien pantoute. Pas un sou chez nous, alors que notre zone infectée par la tordeuse est plus grande que le Nouveau-Brunswick au complet. Cela n'a pas de bon sens; cela s'appelle rire de nous autres.
La mise à l'écart de notre chantier de la Davie pour favoriser celui de la Irving est la même affaire: 800 emplois ont été perdus avant le dernier Noël parce que le gouvernement n'a rien donné au plus gros chantier naval du Canada. Pourtant, les deux chantiers qui ont reçu tous les contrats, Irving et Seaspan, sont en retard dans la construction de leurs navires. Ils sont tout le temps en retard, d'ailleurs. La Davie est en mesure de construire un deuxième ravitailleur et les brise-glaces, qui sont plus que nécessaires sur notre Saint-Laurent, mais il n'y a rien pour cela dans le budget. Comme les constructeurs actuels sont incapables de livrer les commandes, c'est I'ensemble des contrats qui devraient être redistribués, ni plus ni moins.
Je vais donner un petit truc gratis au gouvernement. Quand on a de mauvais fournisseurs, on change de fournisseurs. On le sait, le chantier de la Davie a livré à temps et dans le respect des coûts le ravitailleur Asterix. La Davie, qui est à l'agonie faute de contrat, est capable de combler les besoins. Pourtant, il n'y a rien dans le budget pour la Davie. De toute évidence, les députés libéraux du Québec dans ce dossier dorment au gaz. Le gouvernement vient de rater une belle occasion d'être un peu plus équitable en donnant des contrats à la Davie.
Quand je dis que toutes les grosses mesures de ce budget ne concernent pas le Québec, je n'exagère pas. Cela fait des années que tout le monde au Québec demande au fédéral de faire sa part dans le financement de la santé. On le sait, nos infirmières doivent travailler jusqu'à s'en rendre malades. Juste pour maintenir le système dans sa forme actuelle, cela prend une augmentation dans les transferts en santé d'au moins 5 % par année. Mais non, rien de nouveau encore ici, le gouvernement libéral ignore nos besoins et préfère créer des programmes que nous avons a déjà au Québec. Par exemple, le gouvernement libéral annonce qu'il veut créer une assurance-médicaments, mais seulement hors Québec parce que nous avons déjà la nôtre. Il annonce qu'il veut créer des congés parentaux, mais seulement hors Québec parce que nous avons déjà les nôtres depuis 12 ans. Puis, il va déposer une loi sur l'équité salariale à l'échelle fédérale alors que nous avons la nôtre depuis 22 ans. L'année passée, il a débloqué de l'argent pour créer des places en CPE, mais seulement hors Québec parce que nous avons déjà les nôtres. Ce sont tout plein de mesures qui ne nous concernent pas. C'est quand même bizarre d'avoir un gouvernement qui ignore les demandes du Québec, mais qui en même temps n'arrête pas de les copier avec 10 à 20 ans de retard. Pour ignorer nos demandes, Ottawa ne se prive pas.
Au Québec, nous demandons depuis des années des investissements dans les infrastructures en région, comme les aéroports ou les ports. Malheureusement, nous n'avons toujours rien. Les sommes sont déjà annoncées pour les infrastructures municipales, mais elles restent bloquées à Ottawa à cause de la rigidité du programme. Il n'y a encore rien de nouveau là-dessus dans le budget.
Il n'y a aucune annonce non plus dans le budget pour la question du trou noir de l'assurance-emploi. Il y a du monde, du vrai monde, qui en arrache parce que le gouvernement refuse de bouger. Malgré la demande unanime de l'Assemblée nationale, le gouvernement libéral continue à donner un avantage indu aux géants du Web. En choisissant de ne pas percevoir leurs taxes, ils leur donnent un avantage de 15 % sur nos commerces. Ce n'est pas Amazon qui crée des emplois dans nos villes ou dans nos municipalités. Ce n'est pas non plus Netflix qui crée des emplois dans notre secteur culturel, franchement. Mais le gouvernement a choisi son camp, celui d'avantager les multinationales du Web face à nos entreprises et commerces locaux. Quand on choisit les riches Américains aux dépens de son secteur culturel, si cela ne s'appelle pas être colonisé, je ne sais pas comment cela s'appelle.
On a aussi raté une occasion en ce qui concerne les paradis fiscaux. Encore ici, Québec demande à Ottawa de cesser de légaliser les paradis fiscaux. Au lieu de rendre illégal ce qui est immoral, le gouvernement libéral vient de légaliser deux nouveaux paradis fiscaux — tabarnouche.
Ce choix politique a un prix. Entre 7 et 10 milliards de dollars par année échappent au fisc. Ce sont aussi des pertes pour le fisc québécois. Il est clair plus que jamais qu'à la Chambre, la volonté unanime du Québec pèse moins que le lobby de Bay Street.
Au Québec, Desjardins et la Banque Nationale n'ont pas de filiales dans les paradis fiscaux. À Toronto, les cinq grandes banques vont continuer à cacher leurs profits dans les paradis fiscaux, pendant que la classe moyenne, celle qui travaille et paie ses impôts, va continuer à payer à leur place. C'est cela qui se passe. L'argent caché dans les paradis fiscaux correspond au déficit budgétaire. C'est cela la vision économique du gouvernement.
Il y a une autre annonce dans le budget pour faire plaisir aux banques de Bay Street. En effet, les libéraux annoncent qu'ils vont revenir à la charge pour soustraire les banques canadiennes à la Loi sur la protection du consommateur du Québec. On les attend de pied ferme, parce qu'il n'est pas question de nous faire reculer de 40 ans, pour satisfaire l'appétit insatiable de leurs amis de Bay Street. C'est hors de question.
Même si le gouvernement fait de beaux discours au sujet de nos producteurs laitiers et de tous nos agriculteurs qui sont réglementés par la gestion de l'offre, il continue de les brader dans les accords commerciaux. Par exemple, dans le nouvel Accord de partenariat transpacifique, le gouvernement n'a même pas renégocié les quotas. Les libéraux ont choisi de céder la même part de marché que dans l'accord précédent, alors que les États-Unis ne font plus partie de l'Accord. Cela va directement à l'encontre de la volonté de l'Assemblée nationale, de la motion unanime qu'on a fait voter ici et même à l'encontre de la déclaration du premier ministre. C'est inacceptable. Cela n'annonce rien de bon dans les renégociations de l'ALENA. Pendant ce temps, il n'y a aucune compensation pour nos agriculteurs. Le budget les a oubliés.
Avec les engagements environnementaux relatifs à la COP21, on s'attendait à avoir des mesures pour encourager l'électrification des transports, comme des primes à l'achat pour les véhicules électriques ou encore des fonds pour développer le réseau des bornes de recharge. Malheureusement, il n'y a rien à cet effet dans le budget.
En conclusion, même si le budget porte une attention particulière aux femmes, aux Autochtones et aux autres minorités — c'est très bien, sauf que cela reste surtout au niveau du discours — dans ses mesures concrètes, il ne parle pas du tout aux Québécois. Il ne s'adresse pas à eux. Il ne répond pas à leurs besoins. Le Québec n'a jamais été aussi faible à Ottawa. C'est clair et net dans le budget. On ne fait même plus semblant de se préoccuper du Québec. On l'ignore complètement. Pour mes collègues du Groupe parlementaire québécois et moi, notre travail est de défendre les intérêts des Québécois. Ce n'est pas compliqué: nous allons toujours faire passer les Québécois et les Québécoises avant tout. Comme le budget les ignore totalement, c'est sûr que nous allons votre contre.