Monsieur le Président, je suis heureux de partager mon temps de parole cet après-midi avec ma collègue de Vancouver-Est qui, je sais, tiendra des propos très éclairants.
Avant que mon collègue de Thunder Bay ne parte, j'aimerais mentionner que j'ai tenu des consultations avec la communauté des gens d'affaires de Smithers et de Terrace et que j'ai reçu une grande quantité de lettres et de courriels au sujet de l'approche malavisée et maladroite du gouvernement à l'égard des petites entreprises. Si l'on revient à l'origine de cette affaire, le député se souviendra que le premier ministre, en campagne électorale, a déclaré que de nombreuses PME ne sont créées que pour éviter de payer des impôts. Je me rappelle avoir entendu cela et avoir pensé que c'était très insultant. J'ai compris par la suite ce qui faisait croire cela au premier ministre et, peut-être, au ministre des Finances. C'est parce que les gens avec qui ils s'associent utilisent le régime fiscal des petites entreprises exactement à cette fin. Or, quand je pense aux PME que je représente dans le Nord-Ouest de la Colombie-Britannique, je pense à ces entrepreneurs qui prennent le risque, qui se lancent sur le marché, et qui tentent de faire un peu d'argent pour nourrir leur famille et employer d'autres Canadiens.
Je comprends que, pour les libéraux, il est difficile de réaliser que c'est ce que font les petites entreprises. Pour certains de nos collègues libéraux, ceux qui ont peut-être plus de privilèges que les autres, le concept de petite entreprise est fort différent. Si on suit leur raisonnement, alors leur régime fiscal pour les petites entreprises est tout à fait logique, jusqu'à ce qu'on l'applique à la réalité et que l'on constate que les changements proposés empêcheraient les agriculteurs de léguer leur ferme à leurs enfants et les pêcheurs de léguer leur entreprise, et la même chose pour les entreprises forestières. Tous des petits entrepreneurs que je représente. Ce n'est qu'une fois plongés dans les scandales et la controverse, par leurs propres agissements, que les libéraux ont enfin eu l'humilité de commencer à entendre raison. Ils ont fini par dire que, peut-être, leur plan fiscal relatif aux petites entreprises n'était pas convenable.
Examinons donc le projet de loi à l'étude. Il comprend quelque 300 pages concernant le budget et modifierait 20 lois du Canada, la plupart liées au régime fiscal. Nous pouvons affirmer qu'il s'agit d'un « projet de loi omnibus », j'imagine, encore que, dans ces 300 quelques pages, il manque certaines choses.
Je vais commencer par les bonnes mesures qu'ils contient parce que la liste est plus courte. En ce qui a trait au Code canadien du travail, il prévoit un assouplissement des conditions d'emploi pour permettre aux travailleurs de prendre un congé pour des raisons personnelles. En 2017, dans une économie moderne, cette mesure est la bienvenue. Comme nous le savons et comme ma collègue de Vancouver-Est le sait, il y a toute une controverse autour du site C. Nous savons que, quand les gouvernements élaborent de mauvaises politiques énergétiques, d'autres bonnes options énergétiques tombent soudainement dans l'oubli. Un secteur géothermique un peu plus développé au Canada et en Colombie-Britannique serait une bonne chose.
Passons à ce que la majeure partie de ce projet de loi ferait et ne ferait pas. Dans le contexte économique actuel du Canada, nous avons vu un repli inattendu de 0,1 % du PIB dans le dernier rapport trimestriel. Cela a quelque peu pris tout le monde par surprise. Les libéraux vont devoir modifier certaines de leurs notes d'allocution sur la vigueur de l'économie. Sur quoi se fonde actuellement l'économie? Les Canadiens sont toujours les plus endettés parmi les pays du G7, à 167 % du revenu disponible. C'est énorme. C'est pire que c'était aux États-Unis durant la crise financière de 2008, pour situer l'endettement personnel des Canadiens en ce moment. Nous ne voyons rien dans ce projet de loi qui permettrait de corriger la situation.
Il y a un recours abusif aux paradis fiscaux à l'étranger. Les libéraux interviennent sans cesse pour dire qu'ils luttent contre les paradis fiscaux et qu'ils ont embauché davantage de vérificateurs à l'Agence du revenu du Canada pour s'en charger. Ce qui ne tient pas dans leur logique — et ils en sont conscients —, c'est que les vérificateurs de l'Agence se mettent aux trousses des petites entreprises et de simples particuliers, car les paradis fiscaux — ceux-là mêmes dont profitent les libéraux — sont légaux. Ils laissent les Canadiens qui peuvent se le permettre placer leur argent dans des paradis fiscaux en toute légalité. Si on fait partie du 1 % du 1 % le plus riche, on peut se payer des avocats et des comptables hors de prix pour placer sa fortune dans des pays comme les îles Cook. Il est donc passablement curieux que les libéraux aient décidé d'établir une convention fiscale avec un pays comme les îles Cook. Je ne sais pas ce qu'en pensent les autres députés, mais les petites entreprises et la classe moyenne et ceux qui travaillent fort pour en faire partie, c'est-à-dire les gens que je représente, ne peuvent pas et ne veulent pas placer leur argent aux îles Cook. Ce sont peut-être les amis du ministre des Finances qui font ce genre de choses, ou peut-être le premier ministre lui-même. Je n'en suis pas certain, car nous ne savons pas grand-chose sur leurs avoirs, ce qui nous ramène encore une fois au contexte qui entoure le débat d'aujourd'hui.
Il y a également l'échappatoire fiscale des options d'achat d'actions. J'étais propriétaire d'une petite entreprise avant de me lancer en politique et, lorsque je confiais des contrats en sous-traitance, je ne payais pas les gens en leur donnant l'option d'acheter des actions. Lorsque je discute avec mes amis de la classe moyenne et à ceux qui s'efforcent d'en faire partie, ils me disent qu'ils ne sont pas payés en options d'achat d'actions parce que ce n'est pas la façon de procéder habituelle. Au cours de la dernière campagne électorale, nous, les néo-démocrates, avons d'ailleurs rapporté que l'échappatoire coûte au Trésor environ 800 millions de dollars chaque année, d'après les chiffres de Statistique Canada et de Finances Canada. C'est 800 millions de dollars de moins en recettes fiscales.
Nous avons souligné que cela n'apporte pas grand-chose à l'économie canadienne. Je sais qu'il y a plus de ventes de Ferrari. Quelqu'un pourrait peut-être ainsi se payer une autre villa en France. Cette échappatoire, toutefois, ne fait absolument rien pour les travailleurs canadiens. Il faudrait peut-être l'éliminer.
Qui s'est dit d'accord avec le NPD à ce sujet? Les libéraux se sont dits d'accord. C'est incroyable. Ils ont affirmé tout de suite qu'ils appuyaient cette politique de gauche et ils l'ont confirmé auprès des Canadiens. Nous aurions dû nous douter qu'un ministre des Finances comme celui en poste à l'heure actuelle ne ferait absolument rien pour nuire au moindre de ses copains fortunés.
L'échappatoire fiscale des options d'achat d'actions demeure donc. Elle a encore coûté 800 millions de dollars l'an dernier et elle coûtera encore 800 millions de dollars cette année, ainsi que l'année prochaine. Les Canadiens aimeraient bien savoir ce que cela leur apporte, combien d'autres enfants on pourra sortir de la pauvreté et combien d'autres aînés on pourra aider. Est-ce que cela aide l'innovation? Non, cette échappatoire ne favorise pas l'innovation. Il existe une façon d'éliminer cette échappatoire qui permettrait aux véritables innovateurs dans les secteurs de la technologie et des produits pharmaceutiques de démarrer comme il convient de nouvelles entreprises, en utilisant des options d'achat d'actions. Elle ne doit pas être utilisée par les gens de Bay Street, qui n'ont tout simplement pas besoin d'une troisième villa ou d'une cinquième Maserati.
Il y a tout lieu de demander au gouvernement s'il croit vraiment à la moindre de ses promesses électorales. Les libéraux sont au pouvoir depuis deux ans. Ils sont à mi-chemin de leur mandat. On sait ce qu'ils ont fait avec la réforme électorale. C'était clair comme de l'eau de roche. Lorsqu'est venu le moment de passer véritablement à l'action, le premier ministre a fait preuve d'une arrogance sans pareil. Il a dit que la décision lui appartenait et qu'il avait choisi de la prendre. C'est fascinant. Je ne suis pas habitué à cette nouvelle structure de gouvernement. Les Canadiens élisent des députés, puis un parti forme le gouvernement. Tout à coup, le premier ministre s'arroge d'immenses pouvoirs, dont celui de remplir ou non les promesses électorales à sa guise. C'est ce que l'on peut constater dans le dossier de la lutte contre la pauvreté et à l'égard d'autres enjeux.
J'aimerais revenir au projet de loi non pas omnibus, mais bien quasi omnibus. C'est le ministre des Finances qui a parrainé cette mesure législative. Nous lui avons demandé à maintes reprises de nous dire quelque chose de simple, afin d'éviter toute apparence de conflit d'intérêts — en passant, il s'agit de la norme fixée par le premier ministre lui-même: il faut non seulement éviter les conflits d'intérêts réels, mais aussi toute apparence de conflit d'intérêts.
Nous savons que le ministre des Finances possède au moins cinq sociétés à numéro. Pour les Canadiens qui ne possèdent pas de sociétés à numéro, c'est-à-dire la majorité des Canadiens, une société à numéro permet aux députés de contourner des mécanismes comme la commissaire à l'éthique. Les députés peuvent détenir des actions dans une société, mais il leur est interdit d'en avoir le contrôle si elles sont en leur nom. Cependant, s'ils mettent ces actions dans une société à numéro, ils peuvent en garder le contrôle, et les actions se retrouvent hors de la portée de la commissaire à l'éthique.
C'est fascinant. Le ministre des Finances possède d'autres sociétés à numéro. Puisqu'il refuse de nous dire ce qu'elles renferment, il dispose de deux options. La première option est une mesure que le ministre estime ne pas être obligé de prendre. Le premier ministre a indiqué que les affaires personnelles des ministres doivent pouvoir résister à l'examen public le plus minutieux. Autrement dit, le public devrait être informé des affaires personnelles et financières de tous les membres du Cabinet. Ce n'est toutefois pas le cas.
Avec la deuxième option, en ce qui concerne les sociétés à numéro, si le ministre des Finances respectait bel et bien l'engagement qu'il a pris lui aussi, nous découvririons qu'il y a d'autres conflits d'intérêts. Nous l'avons vu avec toute cette mascarade autour du projet de loi C-27. Nous l'avons vu quand nous avons proposé un vote aux libéraux. Tout le monde s'en souviendra; c'était il n'y a pas longtemps. Nous avons demandé deux choses très simples. Selon nous, le ministre des Finances aurait dû présenter des excuses pour ce désastre sur le plan de l'éthique dans lequel il s'est lui-même embourbé, et les échappatoires aux règles d'éthique à l'origine de cette situation devraient être éliminées.
Qu'ont fait les bons députés libéraux? Ils se sont levés l'un après l'autre et ils ont dit non. En général, d'après mon expérience, les Canadiens sont indulgents. Si une personne se met les pieds dans les plats sans le vouloir et qu'elle dit « Je m'excuse, je ne voulais pas faire cela, voici ce que je vais faire pour remédier à la situation », je pense que la plupart des Canadiens respecteraient cette attitude. C'est une question d'intégrité, de la part de la personne ou du parti.
Ce que nous montre le parti, qu'il s'agisse de renseignements ou d'accès à l'information, et tout le reste, c'est qu'il ne croit pas à ses propres engagements.
Je sais que le député de Winnipeg-Nord sera tenté d'intervenir pour dire que le gouvernement actuel est merveilleux. Cependant, il doit se rappeler que les promesses qu'il a faites aux Canadiens, celles que le premier ministre a faites en donnant tant d'espoir et en faisant miroiter tant de changement, commencent à perdre de leur éclat. En effet, le temps passe, les promesses tombent dans l'oubli et l'argument le plus récent des libéraux est que leur gouvernement est meilleur que celui de Stephen Harper. Je me demande si ce discours aurait fonctionné pendant la campagne. En d'autres mots, le meilleur argument des libéraux est que « Stephen Harper a fait la même chose ».
Si, pour convaincre les électeurs libéraux, le premier ministre s'était levé pour dire qu'il s'engageait à faire plus ou moins ce que Stephen Harper avait fait, je ne suis pas certain que son parti serait au pouvoir aujourd'hui. C'est la réalité des campagnes électorales.
Aujourd'hui, et dans le cadre du projet de loi dont nous sommes saisis, notre travail est de nous assurer que les partis respectent leurs promesses. Les libéraux ont manqué une chance de bien faire les choses.