Monsieur le Président, c'est un privilège de prendre la parole après le député de Scarborough—Guildwood, qui compte à son actif des millions de minutes à la Chambre. Cela dit, je peine à trouver un contenu substantiel dans toutes ces minutes, malgré toute l'affection que j'ai pour le député. Comme son aide a été très utile pour certains projets concernant les vétérans, peut-être pourra-t-il faire quelque chose pour que le monument commémoratif de la guerre en Afghanistan soit enfin construit.
Comme beaucoup d'autres députés qui sont intervenus aujourd'hui, je suis contrarié par le moment choisi pour présenter ce projet de loi. Les députés éprouvent tous un immense respect, je crois, pour les professionnels qui portent l'uniforme de la GRC ou de l'Agence des services frontaliers du Canada et qui seraient touchés par ce projet de loi. Pour montrer qu'une mesure n'a vraiment rien d'une priorité, rien de mieux que de la présenter quand on commence à voir des tulipes à Ottawa, un moment qui annonce déjà la fin de la session parlementaire. Les libéraux ont attendu les dernières semaines de leur quatrième année de mandat pour agir, montrant ainsi qu'ils se moquent des enjeux qui sous-tendent ce projet de loi.
Le député de Scarborough—Guildwood suggère que les partis devraient s'en tenir à leurs discours partisans. Il se lamente du fait que nous dénoncions le manque de consultation de la part du gouvernement et l'absence de priorités. Les libéraux ne nous laissent pas d'autre choix. Au rythme où vont les choses, nous doutons même que le projet de loi fasse l'objet d'une étude substantielle en comité, bien que le député ait gentiment offert de recueillir les numéros de téléphone des syndiqués, lesquels ont été ignorés durant l'élaboration du projet de loi. Nous n'aurons même pas le temps de les entendre. Il y quelque chose qui ne va pas, car la tâche de l'opposition officielle consiste à exiger des comptes du gouvernement, à formuler des critiques et à faire pression pour qu'on fasse mieux. Je rappelle au leader parlementaire adjoint des libéraux qu'il est toujours possible de faire mieux et c'est le cas ici.
Le projet de loi a été présenté le 7 mai 2019, soit à quelques semaines de la fin de la session, tout comme le projet de loi C-93, qui touche aussi la sécurité publique. Il a été présenté au cours du même mois. Ce qui est étonnant, c'est que les libéraux parlent de ces questions depuis les premières semaines de leur mandat. En fait, la promesse concernant la marijuana est probablement la seule que le premier ministre ait concrétisée en quatre ans au pouvoir, mais les libéraux ont présenté le projet de loi sur la suspension des casiers judiciaires pour possession de cannabis en fin de session. Qui ont-ils omis de consulter dans ce dossier? Les forces de l'ordre, ce qui est pour le moins ahurissant.
Les Canadiens se souviennent peut-être que, au cours de ses premiers mois de mandat, en 2015-2016, le gouvernement libéral aimait beaucoup les consultations. Je pense que ma collègue de Sarnia—Lambton et d'autres en ont parlé. D'ailleurs, le gouvernement avait produit des capsules où il promettait qu'il allait consulter la population. J'en déduis que les libéraux ont complètement arrêté de le faire.
Ce qui me préoccupe vraiment à propos des projets de loi concernant la sécurité publique, c'est que les personnes touchées ne sont pas consultées. Dans le cas du projet de loi C-98, des éléments concernent l'Agence des services frontaliers du Canada, mais ses 14 000 employés, dont près de 7 000 sont en uniforme et travaillent à 1 200 emplacements au pays, n'ont pas été consultés. D'ailleurs, le Syndicat des douanes et de l'immigration exige d'être consulté. Il aurait dû l'être avant la rédaction du projet de loi et non à l'étape de l'étude en comité en juin, quelques jours avant que la session parlementaire prenne fin en vue des élections. Voilà ce qui me préoccupe vraiment.
La même chose se produit dans le cas du projet de loi sur la suspension du casier judiciaire des personnes condamnées pour possession simple de cannabis, un autre projet de loi en matière de sécurité publique ajouté à la dernière minute. L'Association canadienne des policiers n'a pas été consultée. Voici ce que le président, Tom Stamatakis, avait à dire à ce sujet:
Nous a-t-on consultés directement? Pas de façon poussée. Il y a eu certains échanges, mais il n'y a pas eu de consultation précise relativement au projet de loi.
Maintenant, c'est la même chose pour le projet de loi C-98. Les personnes concernées, dont les membres du Syndicat des douanes et de l'immigration, n'ont pas été consultés au sujet du projet de loi.
Il y a d'autres mesures législatives importantes en matière de sécurité publique qui tardent à franchir toutes les étapes du processus législatif. Par exemple, le projet de loi C-83, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, est maintenant au comité. Ce comité est déjà chargé d'étudier d'autres projets de loi présentés lors de la dernière année du gouvernement.
Un grand nombre d'entre nous a aussi un oeil sur le projet de loi C-59, un projet de loi plutôt complet, presque un projet de loi omnibus, en fait, sur la sécurité nationale. Il en est à l'étape de l'étude en comité au Sénat. Je défends ce projet de loi en ce qui concerne la liste des personnes interdites de vol et je soutiens le remarquable travail effectué par les familles des enfants inscrits sur la liste de personnes interdites de vol afin que nous ayons un système permettant de supprimer les faux positifs et de retirer les enfants de cette liste, laquelle devient inefficace en matière de sécurité publique si elle contient quantité de noms erronés et répétitifs.
Il est aussi particulièrement injuste que des Canadiens, surtout de jeunes enfants, subissent des désagréments parce qu'ils se trouvent sur la liste d'interdiction de vol. Il faut établir un mécanisme pour leur permettre de faire retirer leurs noms de cette liste. C'est une des mesures prévues dans le projet de loi C-59. J'exhorte publiquement mes collègues du Sénat à mener un examen en bonne et due forme de la mesure législative, mais à le faire dans les plus brefs délais.
Comme on peut le constater, il y a déjà un certain nombre de projets de loi sur la sécurité publique qui sont en attente d'examen au Parlement, et c'est sans compter les autres mesures législatives présentées en mai.
Je vais m'éloigner quelques instants du dossier de la sécurité publique. Les Canadiens devraient également trouver inquiétant que certains des principaux enjeux pour les Autochtones du pays aient aussi dû attendre les derniers mois du gouvernement. Je pense notamment au projet de loi sur les services à l'enfance, dont j'ai parlé à la Chambre il y a peut-être 10 jours, et au projet de loi sur les langues autochtones, qui a aussi été relégué à la fin de la session, lorsque les fleurs font leur apparition à Ottawa.
C'est un manque de respect. On constate toute l'importance accordée aux discours, aux symboles et aux photos par le premier ministre. Les mesures touchant la sécurité publique et les questions associées à la réconciliation, elles, ont été délaissées. Gouverner ne se résume pas à donner de beaux discours. Il s'agit de respecter les priorités des Canadiens et de répondre à leurs besoins.
Aux fins de l'étude, je voudrais que le comité consacre suffisamment de temps au projet de loi C-98 afin que le Syndicat des douanes et de l'immigration puisse être adéquatement consulté. C'est la même chose pour la GRC. D'ailleurs, j'étais porte-parole en matière de sécurité publique avant de me lancer dans la course à la direction du parti, ce qui exigeait que je parcoure le pays. Nous avions collaboré avec le gouvernement au sujet du projet de loi C-7, le projet de loi sur le syndicat de la GRC. Nous avons tenté de collaborer avec le gouvernement, surtout dans les dossiers qui concernent les personnes en uniforme. Nous avons même demandé des amendements au projet de loi C-7 afin d'éviter qu'une approche disparate soit employée au sujet des indemnités pour accidents du travail des travailleurs de la GRC et de faire en sorte qu'il y ait une norme unique pour toutes les provinces. Ce sont des projets de loi importants et il faut consulter les gens à leur sujet.
J'inviterais également l'ancien président qui a pris la parole, le député de Scarborough—Guildwood, à veiller à ce que suffisamment de temps soit prévu. Même si le gouvernement avait affirmé qu'il ne se servirait jamais de l'attribution de temps ou de projets de loi omnibus, il s'en est servi pratiquement toutes les semaines. La leader du gouvernement à la Chambre semble y avoir pris goût. Mon collègue le leader adjoint à la Chambre voudrait pouvoir faire disparaître tous les discours qu'il a prononcés lorsqu'il était dans l'opposition pour dénoncer le recours à l'attribution de temps et aux projets de loi omnibus, car il fait maintenant partie de l'équipe de la leader du gouvernement à la Chambre sur laquelle le député de Scarborough—Guildwood jette le blâme pour la lenteur de la progression de ces projets de loi, et il utilise maintenant ces mécanismes avec délectation.
Nous devons garantir que le comité aura suffisamment de temps pour étudier les modifications proposées à la Loi sur la GRC et à la Loi sur l'Agence des services frontaliers du Canada afin de vérifier si ces modifications profiteront aux personnes concernées, qu'il s'agisse du traitement des plaintes du public ou d'autres éléments du projet de loi C-98. Il y aurait dû y avoir des consultations préalables, mais, pour bien faire les choses, l'étude du comité ne peut être précipitée. Nous allons collaborer, mais nous voulons que les personnes concernées aient l'occasion de participer aux audiences du comité.