Madame la Présidente, je remercie mon cher collègue de Rimouski-Neigette—Témiscouata—Les Basques.
Je remercie mon collègue de partager son temps de parole avec moi.
Je veux prendre un instant pour remercier également les électeurs de Skeena—Bulkley Valley de m'avoir réélu à la Chambre des communes. C'est toujours un honneur et un exercice d'humilité que de prendre la parole en cette enceinte au nom des gens du Nord-Ouest de la Colombie-Britannique. Quiconque a déjà mis les pieds là-bas convient que c'est un endroit magnifique. La population y est diverse et fièrement canadienne.
Je suis heureux de participer au débat d'aujourd'hui parce que les gens de la Colombie-Britannique savent sans doute plus que les autres Canadiens à quel point le processus d'évaluation des projets énergétiques s'est détérioré au Canada. Nous avons été aux premières loges des discussions entourant le controversé projet d'oléoduc Northern Gateway, qui n'a pas encore été abandonné. Nous le qualifions de projet zombie parce que même s'il accumule les rapports défavorables à son endroit et les défaites face à l'opposition des Premières Nations, des groupes environnementaux, des entreprises et des gouvernements provinciaux, il arrive à rester en vie, comme animé d'une énergie surnaturelle.
Ce projet nous a révélé à quel point la gouvernance peut se dégrader. L'ancien gouvernement conservateur avait décidé qu'il tenterait, de sa façon maladroite et inintelligente, de « réformer » le système énergétique canadien. Il s'y est pris en vidant de leur substance à peu près toutes les lois touchant l'environnement et les pêches dans le but d'imposer la construction de pipelines à travers le pays, conformément aux aspirations de l'ancien premier ministre. Voilà qui soulève des doutes quant à la sincérité et aux compétences de l'ancien gouvernement. La définition de la folie n'est-elle pas de refaire toujours la même chose en s'attendant chaque fois à un résultat différent?
Chez nous, dans le Nord de la Colombie-Britannique, le gouvernement a tenté de nous intimider et de porter atteinte aux droits civiques les plus fondamentaux que nous avons en commun avec tous les Canadiens, c'est-à-dire exprimer nos réserves et se faire entendre dans n'importe quel processus public.
D'après les lettres envoyées par le Cabinet de l'ancien premier ministre pendant le processus, nous savons que quiconque avait des questions ou osait exprimer des inquiétudes au sujet d'un énorme pipeline pour le transport de bitume brut traversant 1 100 cours d'eau et franchissant deux chaînes de montagnes, ainsi que de superpétroliers quittant le port de Kitimat pour se rendre en Chine, était qualifié d'ennemi de l'État et d'extrémiste financé par l'étranger. C'est ainsi que le Cabinet du premier ministre conservateur appelait les gens qui avaient l'audace d'émettre des réserves à l'égard de ces projets. Je ne paraphrase même pas. Ce sont les propres mots du gouvernement.
Et — surprise, surprise — le gouvernement conservateur a porté les mêmes accusations contre certains de ses partisans. Les gens dans le Nord qui aiment chasser et pêcher redoutaient eux aussi les répercussions que pourrait avoir le déversement de bitume dans les majestueux cours d'eau du Nord-Ouest de la Colombie-Britannique. Ils redoutaient les répercussions d'un tel déversement sur l'industrie de la pêche de la côte Nord, qui assure notre subsistance depuis des milliers d'années.
Le gouvernement conservateur a râlé et il a dit que nous étions soit avec lui, soit contre lui. Il a affirmé que si nous nous opposions aux pipelines, cela voulait dire que nous nous opposions au Canada. Comment cette approche a-t-elle fonctionné pour ce parti? Pas très bien. Il a réussi ni à prouver le bien-fondé des projets qu'il proposait ni à se faire réélire. Ses grognements, ses tactiques d'intimidation et ses cajoleries ont échoué.
Dans la motion d'aujourd'hui, les conservateurs emploient la même démagogie: « avec nous ou contre nous ». Nous avons cherché à amender la motion en ajoutant quelques mots hautement controversés pour demander à la Chambre des communes de faire savoir que, à son avis, l'examen des projets d'oléoducs doit être crédible, exhaustif, ouvert et libre de toute ingérence politique. Bon sang, qui pourrait bien s'opposer à une telle motion?
L'ignorance du Parti conservateur quant à l'opinion des Canadiens sur les projets énergétiques est incommensurable. Les conservateurs ont rejeté notre amendement à la motion d'aujourd'hui car ils ne veulent manifestement pas d'un examen crédible, exhaustif, ouvert et libre de toute ingérence politique. Ils veulent se prononcer sur ce qui arrivera avec le projet Énergie Est avant même qu'il atteigne l'étape des audiences. Ils veulent dire si le projet est bon ou mauvais. Ils veulent dire aux Canadiens ce qu'il en est et comment les choses devraient se dérouler, puis ils ont l'audace de prendre la parole à la Chambre, comme certains députés conservateurs l'ont fait aujourd'hui, et soutenir que nous devons appuyer ces projets pour éviter que les emplois partent pour l'étranger. Ils parlent d'un projet d'exportation de bitume brut, que la Chambre de commerce de l'Alberta a étudié. Elle a indiqué que lorsque nous n'ajoutons aucune valeur à ces projets, nous exportons trois fois plus d'emplois que nous pourrions en créer ici au Canada.
Pourquoi un parti de l'opposition choisit-il sa journée de l'opposition pour parler d'un sujet aussi hypocrite que le processus entourant les projets de pipeline? Après 10 années désastreuses, il n'a pas réussi à convaincre même ses propres alliés que le processus qu'il a conçu et manipulé était le moindrement juste et raisonnable. Les Canadiens ont rejeté la façon de faire et les projets de pipeline des conservateurs. Ils n'ont donc aucun pipeline qui se rend jusqu'aux côtes. Pas un seul kilomètre de pipeline n'a été construit pour acheminer le produit jusqu'aux côtes. Le prix du pétrole s'élève maintenant à 30 $ environ. Nous sommes aux prises avec une crise économique en Alberta et en Saskatchewan qui touche d'autres régions et, au lieu de présenter une solution un tant soit peu intelligible ou exhaustive, les conservateurs râlent encore. Ils demandent si nous sommes avec ou contre eux et disent que si nous ne sommes pas d'accord avec eux, ils enverront des lettres de sollicitation cet après-midi pour essayer de faire de l'argent et de la petite politique avec les pipelines.
À la lumière du projet Northern Gateway, nous savons également que le premier ministre de l'époque a modifié les règles alors qu'on en était à mi-chemin dans le processus d'évaluation. La moitié du travail d'évaluation avait été fait lorsque le premier ministre a daigné nous dire comment les choses aller se passer. Les conservateurs ont en quelque sorte empiré un processus qui laissait déjà à désirer et, maintenant que de nouveaux projets de pipelines pointent à l'horizon, la situation est encore pire. Dans le moment, on en est aux conclusions finales à Burnaby, en Colombie-Britannique, au sujet du controversé projet de TransCanada Pipelines qui devrait passer dans la vallée du bas Fraser. Par surcroît, les Canadiens n'ont pas l'autorisation de demander des comptes à la pétrolière concernée. Il ne leur est pas permis de vérifier les faits avancés. Au Canada, ce serait un affront que de remettre en question les déclarations et les pratiques de cette entreprise.
L'expérience a montré qu'il est bon d'appuyer les bonnes pratiques commerciales, mais qu'il vaut nettement mieux vérifier que de faire confiance. À Kalamazoo, on s'est contenté de faire confiance, et des millions de litres de bitume dilué ont été déversés dans la rivière. Cinq ans plus tard, 1,3 milliard de dollars ont été dépensés pour tenter d'assainir ce cours d'eau. On a littéralement dragué le fond de la rivière pour essayer de récupérer le pétrole, mais en pure perte. Par conséquent, nous savons qu'il est préférable de vérifier plutôt que de simplement faire confiance.
Nous sommes maintenant saisis de cette motion. Le secteur pétrolier et gazier n'a jamais connu de pire ennemi que l'ancien gouvernement conservateur, car, qu'a-t-il semé dans le coeur et l'esprit des Canadiens? Il a semé la méfiance, le conflit et le malentendu à l'égard de chacun de ces projets. De surcroît, il a tenté d'intimider le président des États-Unis. Cette stratégie a-t-elle été fructueuse pour l'ancien premier ministre? Je pense qu'il aurait raison de dire que c'était l'évidence même. C'était tout à fait approprié de prendre la parole à New York et, en gros, de qualifier le président de stupide. Ce genre de commentaire est toujours très utile dans les relations entre le Canada et les États-Unis. Puis, les conservateurs ont été stupéfaits lorsque le président Obama a rejeté le projet parce que, en plus d'avoir eu à essuyer leurs insultes, il s'est rendu compte que la proposition était déficiente. Nous avons bel et bien besoin d'un processus crédible, exhaustif, ouvert et exempt de toute ingérence politique.
Pas plus tard qu'hier, la ministre de l'Environnement et le ministre des Ressources naturelles ont tenté de rafistoler un processus bancal. Nous avons encore quelques interrogations.
Enfin, nous allons pouvoir prononcer les mots « changements climatiques » lorsqu'il sera question des oléoducs. C'est toute une révolution. C'est le début d'une nouvelle ère. Il est consternant que nous puissions réunir ces deux éléments. Cependant, nous ne connaissons pas encore la forme exacte que prendra le processus. Dans quelle mesure les changements climatiques seront-ils pris en compte dans les décisions du Cabinet? En fait, l'ancien premier ministre avait statué là-dessus. Il avait décidé que tous les projets d'exploitation des ressources ne seraient plus examinés par l'Office national de l'énergie, une entité indépendante et quasi judiciaire; il les avait plutôt confiés au Cabinet. Je me souviens du jour où nous avons demandé aux conservateurs pourquoi ils avaient pris une telle décision. L'ancien premier ministre avait déclaré qu'ils souhaitaient dépolitiser le processus et faire en sorte que les politiciens prennent les décisions qui s'imposent, plutôt que l'Office national de l'énergie, car, ce faisant, ils pourraient dépolitiser le processus. Je tiens à dire ceci aux députés conservateurs: ce sont de véritables pince-sans-rire.
Il est remarquable de voir l'audace et l'hypocrisie de la motion présentée aujourd'hui; comme si tenter d'aider les gens qui souffrent d'une crise qui frappe le secteur énergétique en Alberta et en Saskatchewan revient à faire de la politique avec l'enjeu; comme si aider ces familles qui peinent actuellement à joindre les deux bouts revient à laisser entendre que diversifier notre économie, la rendre plus verte et aider à modifier les fluctuations va à l'encontre de leurs intérêts, à l'encontre des intérêts des habitants de l'Alberta, de la Saskatchewan ou de toute autre région du pays.
Nous devons étudier nos projets de pipeline en utilisant les données scientifiques les plus fiables qui soient et en menant les consultations publiques les plus ouvertes et les plus vastes possible.
Les Canadiens n'aiment pas se faire intimider ou insulter. Ils s'attendent à être invités à participer aux conversations portant sur des questions qui les concernent, des questions qu'ils peuvent résoudre mieux que quiconque.