Monsieur le Président, je tiens à remercier mon amie et collègue de Lakeland d'avoir présenté cette motion d'initiative parlementaire. La motion M-167 demande au comité de la sécurité publique et nationale d'entreprendre une étude sur la question pressante de la criminalité en milieu rural au Canada.
Selon Statistique Canada, en 2015, l'Indice de gravité de la criminalité du Canada a augmenté pour la première fois en 12 ans, et l'Ouest canadien a connu la hausse la plus marquée. La même année, l’Indice de gravité des crimes sans violence national a augmenté notamment en raison d'une hausse des crimes contre les biens.
En 2016, l'indice a augmenté pour une deuxième année consécutive: il y a eu environ 27 700 crimes de plus signalés à la police. Toujours en 2016, l'Indice de gravité de la criminalité a connu une hausse de 2 % par rapport à 2015, à l'échelle nationale.
L'augmentation de la criminalité en milieu rural est un problème qui sévit partout au Canada. Aujourd'hui, je me concentrerai sur les défis que ma province, la Saskatchewan, doit affronter.
La Saskatchewan est une vaste province. Sa population de 1 100 000 personnes s'étale sur un territoire de 651 900 kilomètres carrés. Les collectivités sont éloignées les unes des autres, ce qui complique la tâche des policiers. Depuis 2011, la province a enregistré une hausse de 4,2 % du nombre de crimes contre les biens qui sont signalés.
Pour faire en sorte que mon discours en faveur de la motion M-167 sur l’étude à entreprendre sur la criminalité en milieu rural soit exact et pertinent, j’ai invité la députée de Lakeland à participer à une table ronde dans la circonscription de Yorkton—Melville, que je représente. J’avais beaucoup entendu parler de cet enjeu lors de mes déplacements dans la circonscription, mais je savais que j’allais en être largement informée et sous tous ses angles par tous ceux qui avaient répondu à l’invitation.
Des représentants de 10 villages, municipalités rurales et villes ont dressé un état des lieux des infractions contre les biens et des vols d’automobiles dans la circonscription.
Des familles d’agriculteurs qui ont vécu pendant des années sans presque aucune menace et en ayant un sentiment de sécurité s’inquiètent depuis quelques années pour la sécurité de leurs enfants qui jouent dehors en plein jour. Elles ont peur d’être réveillées la nuit par un intrus. Les pertes constantes d’équipements et de fournitures qu’elles subissent leur causent tellement de stress que beaucoup en arrivent à penser que le mode de vie rural qu’elles aimaient tant n’est plus possible.
Outre la sécurité personnelle, les collectivités rurales s’inquiètent du maintien des entreprises, dont beaucoup ont été victimes de crimes multiples. La perte des entreprises et des emplois dans les collectivités ne fera qu’aggraver les problèmes de criminalité en milieu rural. Les soucis de sécurité s’aggravent au gré des infractions qui se multiplient et qui sont de plus en plus éhontées.
Les commerces et les familles en milieu rural ne signalent pas les crimes parce qu'ils ont abandonné tout espoir que quelque chose soit fait. Par conséquent, le problème ne fait que s'accentuer. Les crimes ne sont pas signalés, ce qui fait que les statistiques sur les crimes en milieu rural sont erronées. C'est inquiétant, puisque le nombre d'agents de la GRC affecté à une région est établi en fonction des statistiques sur la criminalité.
Les statistiques doivent donner une idée juste de la situation. Nous devons nous pencher sur les ressources dont dispose la GRC pour protéger efficacement nos collectivités et nous devons veiller à ce qu'elle dispose de l'effectif nécessaire. Les agents pourront ainsi répondre plus rapidement aux appels, pourront mener des enquêtes sur les crimes et n'auront pas à accomplir ce travail éprouvant pendant d'aussi longues heures pour pallier les pénuries de main-d'oeuvre.
Les résidants de ma circonscription s'inquiètent de la sécurité des agents de la GRC et de la sécurité des collectivités dans lesquelles les agents travaillent. À l'échelle nationale, plus d'un poste sur 10 à la GRC est actuellement vacant. Du nombre de postes vacants, 6,6 % n'ont pas été dotés, 3,9 % sont vacants parce que l'agent est en congé de maladie de longue durée et 1,6 % des postes sont vacants parce que l'agent est en congé de maternité ou de paternité.
En Saskatchewan, la GRC compte environ 925 agents qui travaillent dans 87 détachements ruraux au titre d'une entente relative aux services de police communautaire. Il y a 250 autres agents qui travaillent dans des détachements municipaux de plus grande taille, et 33 agents sont visés par des ententes sur les services de police communautaires tripartites conclues avec les Premières Nations de la Saskatchewan.
Lors de notre table ronde dans Yorkton—Melville, la GRC était bien représentée par Curtis Zablocki, commandant divisionnaire de la division F, Devin Pugh, sergent d'état-major du district du Sud, et Travis Adams, sergent au sein du détachement rural de Yorkton. Ce fut un honneur de les voir se joindre à nous. Ils ont écouté attentivement et ont participé au débat.
La criminalité en milieu rural au Canada a monopolisé les forums de discussion sur Facebook, les sites de clavardage en ligne et les médias locaux partout au pays. Par ailleurs, j'ai été chanceuse parce que le créateur du groupe Farmers Against Rural Crime a participé à nos tables rondes sur la criminalité en milieu rural. Ce groupe Facebook fermé a attiré plus de 17 000 membres d'un bout à l'autre du pays, et ce, très rapidement. Le site est bien géré par son créateur, Nick, un jeune agriculteur de la Saskatchewan ayant une jeune famille, qui considère la criminalité en milieu rural comme un problème très grave et qui veut donner aux gens touchés par ce problème un endroit où ils peuvent raconter leurs histoires et avoir des conversations sérieuses et honnêtes sur la manière dont le gouvernement, la GRC, les collectivités et les particuliers peuvent travailler ensemble pour mieux lutter contre la criminalité en milieu rural au Canada et l'éradiquer. Nick m'a montré une pile de courriels, qui ne représentent qu'une partie de ceux publiés sur le site, décrivant les crimes actuels ayant causé des problèmes physiques, financiers et émotionnels excessifs aux Canadiens des régions rurales et à leur famille. J'espère que Nick et des membres du groupe Farmers Against Rural Crime seront appelés à témoigner quand cette motion sera adoptée et que les travaux du comité commenceront.
La motion M-167 est un outil multidimensionnel qui aiderait grandement le gouvernement fédéral à répondre aux demandes des citoyens des régions rurales, des localités rurales, de la GRC et des gendarmes communautaires, dont les expériences et les recommandations sont essentielles afin de pouvoir mettre fin à cette crise de la criminalité en milieu rural.
Je pense qu'il importe de mentionner ici que, partout dans ma circonscription, je constate qu'on apprécie énormément les policiers et les premiers répondants qui servent les régions rurales du pays. Il faut que les citadins qui sortent des villes pour voyager, rendre visite à leur famille et à leurs amis ou aller en vacances dans le magnifique milieu naturel de la campagne canadienne comprennent qu'il est nécessaire que le gouvernement investisse dans les infrastructures rurales et qu'ils exercent des pressions à cette fin. Ils doivent, eux aussi, reconnaître la grande importance du travail des forces de police et des intervenants de première ligne ruraux, comme le service STARS, qui est coûteux, mais qui a joué un rôle crucial lors du terrible accident dont ont été victimes les Broncos de Humboldt et qui a coûté la vie à tant de personnes.
Je le répète, on s'inquiète énormément pour les agents de la GRC, qui n'ont tout simplement pas les moyens et les ressources nécessaires pour trouver les criminels dans les régions rurales et veiller à ce qu'ils soient traduits en justice. Ils sont en sous-effectif et débordés. On s'inquiète beaucoup pour leur sécurité, leur bien-être physique et mental, de même que pour leur famille.
L'élément criminel est en outre bien au fait du manque de policiers, qui joue un rôle dans l'augmentation de la violence de la criminalité en milieu rural. La hausse du taux de criminalité en milieu rural a coïncidé avec l'escalade de la crise des opiacés au Canada. Depuis la première saisie importante, qui remonte à avril 2013, les corps policiers du pays ont fermé 20 laboratoires de production de fentanyl, exploités pour la plupart par le crime organisé. Les plus grandes rafles ont eu lieu en Colombie-Britannique, en Alberta et en Saskatchewan.
De nombreuses communautés des Premières Nations ont déclaré l'état d'urgence en réponse à l'augmentation du nombre de surdoses d'opioïdes, période au cours de laquelle le taux de criminalité a commencé à monter en flèche. De nombreux participants ont dit à la députée de Lakeland et à moi que les ressources policières limitées et les longs délais d'intervention ont fait des collectivités et des propriétés rurales les cibles idéales du vol et du vandalisme, du gangstérisme et des activités et de l'expansion du crime organisé. Les réserves des Premières Nations sont aussi moins sécuritaires et moins bien protégées et elles sont aux prises avec une hausse de la criminalité à cause de la diminution des services de police dans les collectivités rurales et autochtones.
J'ai pris connaissance d'un rapport encourageant sur la coopération entre deux collectivités voisines, l'une étant une localité rurale et l'autre une réserve des Premières Nations, qui souhaitent qu'on ait recours aux cercles de guérison lorsque des jeunes d'à peine 11 ans commettent des crimes menés par des jeunes de 13 ou 14 ans, qui savent qu'ils ne subiront pas vraiment de conséquences. Ces jeunes devraient se présenter devant leurs aînés pour répondre de leurs actes, et ils devraient aussi entendre le point de vue des entrepreneurs ou des propriétaires fonciers qu'ils ont volé pour découvrir quelles sont les répercussions négatives successives que les victimes de la criminalité en milieu rural subissent.
L'association des municipalités rurales de la Saskatchewan a aussi grandement contribué à la table ronde sur la criminalité en milieu rural et elle ne ménage pas ses efforts pour aider les forces policières.
La motion M-167 est précisément ce dont les collectivités ont besoin, et je crois que le gouvernement doit participer à la lutte contre la criminalité en milieu rural. Il faut mener une étude qui examine les vrais chiffres afin d'obtenir des statistiques précises pour que nous puissions fonder nos recommandations sur la réalité à laquelle sont confrontées les collectivités.
Je suis ravie d'entendre qu'il s'agit d'une question non partisane. Nous convenons tous que l'escalade doit cesser. Nous devons réunir les collectivités. Nous devons trouver des solutions globales, en déterminant exactement la gravité du problème et ce dont la GRC a besoin, ainsi que les principales causes qui sous-tendent la criminalité en milieu rural.
C'est exactement l'objectif de la motion M-167, et c'est pourquoi je l'appuie aujourd'hui au nom de ma circonscription rurale et de tous les Canadiens des régions rurales.