Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec la députée de Churchill—Keewatinook Aski.
Avant la création du régime d'assurance-maladie, on voyait nos concitoyens souffrir parce que ceux-ci n'avaient pas les moyens de recevoir les soins de santé dont ils avaient besoin. Des gens perdaient leur maison, leur ferme et leur entreprise parce qu'ils devaient payer leurs frais médicaux. La maladie décimait des familles entières. Aujourd'hui, des décennies plus tard, on peut constater que, partout au pays, certains de nos concitoyens souffrent parce que les soins de santé sont encore inaccessibles et inabordables.
Des millions de familles n'ont pas les moyens de se payer les médicaments dont elles ont besoin faute d'avoir un régime d'assurance-médicaments offert par l'employeur. Le nombre de personnes sans assurance qui sont obligées de se passer de médicaments augmente parce que de plus en plus de gens travaillent comme contractuels, sont travailleurs autonomes ou n'ont tout simplement pas accès à un régime de soins de santé dans le cadre de leur emploi. Un trop grand nombre de personnes âgées mettent leur santé en péril parce qu'elles n'ont pas de régime d'assurance-médicaments et qu'elles n'ont pas les moyens de payer les médicaments de leur poche. Un Canadien sur cinq n'a pas du tout d'assurance-médicaments ou ne possède pas une assurance adéquate pour ses besoins en médication. Cela représente 7,5 millions de personnes.
Dans ma circonscription, London—Fanshawe, j'ai rencontré un homme qui m'a vraiment fait réaliser l'ampleur du problème. Il a eu un accident de travail. Heureusement, comme il avait une assurance au travail, il a reçu des prestations pendant son rétablissement. Cependant, il voulait et devait retourner au travail même s'il n'était pas totalement rétabli, car les prestations d'assurance allaient bientôt cesser. Il devait faire le choix difficile entre retourner au travail, risquant ainsi de compromettre davantage sa santé et celle des autres, ou poursuivre sa convalescence à ses propres frais alors qu'il n'en avait tout simplement pas les moyens ce qui le mettrait dans une situation financière encore plus précaire.
Malheureusement, cette histoire n'est pas unique. Voilà pourquoi, dès les années 1940, plusieurs commissions, comités et conseils consultatifs ont recommandé, pour des raisons cliniques, éthiques et économiques, l'instauration d'un régime public universel d'assurance-médicaments. Les spécialistes des politiques en matière de santé ont été clairs: une approche privée et fragmentée à l'américaine coûtera plus cher et limitera l'accès aux médicaments sur ordonnance.
Voilà pourquoi les néo-démocrates ont toujours compris que les soins de santé doivent être traités comme un droit au Canada, et non comme un privilège. Depuis notre congrès de fondation en 1961, nous réclamons un régime public universel d'assurance-médicaments.
Aujourd'hui, le Canada est le seul pays riche au monde doté d'un système de santé universel non assorti d'un régime universel d'assurance-médicaments. Il est au troisième rang des pays où les médicaments coûtent le plus cher. Les Canadiens sont pris avec un amalgame hétéroclite de programmes et de régimes d'assurance qui sont loin de profiter à tout le monde.
Au lieu de s'attaquer aux coûts croissants de la couverture des médicaments, les conservateurs ont aggravé le problème pendant dix ans en réduisant le financement des soins de santé aux provinces et en sapant les efforts visant à mettre en place une approche nationale pour la fixation du prix des médicaments. Maintenant, le gouvernement libéral temporise depuis quatre ans: il promet de réduire le coût des médicaments, mais retarde les choses et maintient en place le même système disparate qui ne répond pas aux besoins des Canadiens et qui nous coûte plus cher.
Nous constatons le coût direct de cette inaction dans nos hôpitaux et nos communautés. Les gens qui ne peuvent pas se payer les médicaments dont ils ont besoin se tournent vers les urgences hospitalières. Plus leur état de santé se détériore, plus ils font appel aux systèmes de santé provinciaux et territoriaux. En 2016, quelque 303 000 Canadiens ont dû consulter leur médecin plus souvent, quelque 93 000 ont demandé des soins d'urgence et 26 000 ont été admis à l'hôpital après avoir été contraints de renoncer à des médicaments sur ordonnance en raison de leur coût.
SoinsSantéCAN, le porte-parole national des organisations de soins de santé et des hôpitaux, estime qu'entre 5,4 % et 6,5 % des admissions à l'hôpital au Canada sont attribuables au fait que les gens n'ont pas les moyens de se procurer les médicaments qui leur ont été prescrits, ce qui entraîne des coûts d'environ 1,6 milliard de dollars par an.
Un ménage canadien sur cinq indique qu'un membre de la famille s'est privé d'un médicament qui lui avait été prescrit en raison de son coût au cours de la dernière année. Chaque année, presque trois millions de Canadiens n'ont pas les moyens d'acheter un ou plusieurs de leurs médicaments sur ordonnance. Comme les soins de santé mentale manquent encore, il y a des gens qui finissent dans la rue et dans les établissements correctionnels alors qu'ils ont simplement besoin d'aide.
L'Hôpital Victoria, du Centre des sciences de la santé de London, connaît un important problème de capacité, ayant eu plus de patients avec des problèmes de santé mentale qu'il n'a de lits pendant 179 des 181 derniers jours. Son taux d'occupation moyen ces soirs-là se situait autour de 111 %.
Nous avons besoin d'un régime d'assurance-médicaments national, universel et à payeur unique. Ce besoin est criant. Je pense que mes collègues d'en face sont du même avis. Je suis très heureuse de savoir qu'ils vont appuyer notre motion.
Pourquoi les libéraux promettraient-ils d'instaurer un régime d'assurance-médicaments national depuis 23 ans? Pourquoi proposeraient-ils des études, des commissions, des comités consultatifs à répétition s'ils ne voyaient pas la nécessité d'un tel régime? À moins qu'ils n'étudient constamment cette possibilité pour donner l'impression qu'ils l'envisagent sans avoir vraiment l'intention de la concrétiser. C'est ma grande crainte.
Les libéraux promettent d'établir un régime d'assurance-médicaments depuis 1997, mais je me demande depuis combien de temps ils promettent aux grandes sociétés pharmaceutiques et compagnies d'assurance de protéger leurs profits, qui ne cessent de monter en flèche. Nous savons que les coûts des médicaments ont augmenté chaque année depuis l'arrivée des libéraux au pouvoir, en 2015. Au cours de la même période, les libéraux ont rencontré plus de 875 fois des représentants de l'industrie pharmaceutique et du secteur de l'assurance.
Les néo-démocrates ont un plan bien défini sur la façon d'instaurer un régime d'assurance-médicaments. En fait, notre plan est décrit dans le rapport Hoskins, qui a été commandé par les libéraux eux-mêmes. Le NPD est tellement déterminé à concrétiser cette idée que, tout de suite après les dernières élections, il a commencé à élaborer un cadre visant à mettre en place un régime public, universel et complet d'assurance-médicaments. C'est le premier projet de loi d'initiative parlementaire que mon collègue le député de New Westminster—Burnaby a présenté, et je le remercie vivement de son excellent travail. Je tiens aussi à remercier mon collègue le député de Vancouver Kingsway de son travail remarquable dans ce dossier. Il a présenté cette motion aujourd'hui et il a fait de l'excellent travail au sein du comité de la santé au cours de la dernière législature.
Le projet de loi du NPD visant à instaurer un régime national d'assurance-médicaments est calqué sur la Loi canadienne sur la santé. Il s'agit de nouveau d'une recommandation figurant dans le rapport de l'ancien ministre libéral de la Santé de l'Ontario, Eric Hoskins. Après toutes les études et les commissions portant sur cette question, on se rend compte maintenant que le rapport Hoskins définit très clairement la voie à suivre pour mettre en place un régime d'assurance-médicaments. Tout plan visant cet objectif devrait être conforme aux principes sur lesquels repose notre système de santé public, à savoir: l'universalité, l'intégralité, l'accessibilité, la transférabilité et la gestion publique.
Ce qui ressort également des innombrables rapports et études en la matière, c'est que, en plus d'améliorer l'état de la santé de la population et de lutter contre la pauvreté, un régime d'assurance-médicaments permettra aux Canadiens et aux entreprises d'économiser de l'argent. Un régime public, universel et complet d'assurance-médicaments réduira de 5 milliards de dollars les dépenses annuelles du système pour l'achat de médicaments sur ordonnance grâce à la négociation d'une réduction des prix des médicaments, à l'utilisation accrue de médicaments génériques, au recours à des médicaments biosimilaires, ainsi qu'à d'autres changements visant la prescription de thérapies moins coûteuses. Toujours selon le rapport Hoskins, un tel régime stimulera notre économie en réduisant de 16,6 milliards de dollars par année les coûts des médicaments sur ordonnance pour les entreprises et les employés et en diminuant de 6,4 milliards de dollars les frais assumés directement par les familles.
Le revenu moyen des ménages dans la circonscription de London—Fanshawe est inférieur à 60 000 $ par an, alors que le revenu individuel tourne autour de 30 000 $ par an, ce qui est bien inférieur à la moyenne en Ontario et au Canada. La mise en place d'un programme national d'assurance-médicaments représente donc un énorme coup de pouce pour les habitants London—Fanshawe. Je pense aux nombreuses personnes âgées que j'ai rencontrées, que ce soit sur le pas de leur porte ou dans mon bureau de circonscription. Ils me racontent comment le coût des articles de la vie quotidienne continue d'augmenter alors que leurs revenus stagnent. Le coût des médicaments continue d'être la dépense qui augmente le plus rapidement, que ce soit pour les personnes seules ou les familles. En effet, le coût moyen des médicaments augmente de 4 % chaque année. En moyenne, les ménages canadiens dépensent 450 $ par an en médicaments sur ordonnance, et 550 $ pour les primes des régimes de santé privés, soit une moyenne combinée de 1 000 $. Les primes des régimes privés ont augmenté rapidement ces dernières années, en grande partie à cause de la hausse vertigineuse des prix des médicaments, et elles prennent une part de plus en plus importante du revenu net des travailleurs.
Après des décennies de retard, le contexte minoritaire actuel pourrait bien être l'occasion d'enfin agir pour le bien des Canadiens. Nous pouvons unir nos efforts et améliorer concrètement l'état de santé de toute la population. Il est temps que le Parlement ait le courage de mettre en place ce programme, qui vise à renforcer à la fois notre système de santé, notre économie et nos collectivités.