Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec l'excellent député de Central Okanagan—Similkameen—Nicola.
Étant le parti qui a obtenu le plus de votes aux dernières élections, le Parti conservateur s'efforce de prendre des initiatives constructives dans cette situation de gouvernement minoritaire et d'utiliser son poids accru pour mener des discussions sur de grands problèmes auxquels le pays fait face et proposer des solutions. Les relations sino-canadiennes en sont un exemple. Comme les comités permanents actuels ont souvent un programme chargé, qu'ils concentrent leurs travaux dans un domaine bien précis et qu'ils n'amorceront probablement pas ces travaux avant plusieurs semaines encore, nous pensons qu'il faut mettre sur pied sans délai un comité spécial chargé d'examiner tous les aspects des relations sino-canadiennes, et ce, de manière continue. Je m'intéresse particulièrement à ce que le Canada peut faire pour mieux défendre les droits de la personne sur la scène internationale et contrer les efforts du gouvernement chinois pour imposer son modèle politique répressif ailleurs dans le monde.
Le modèle politique chinois actuel est tiré tout droit du roman 1984 de George Orwell. Dans ce système de crédits sociaux, l'État surveille les moindres gestes de tout un chacun, et la capacité de faire une activité de base est assujettie à une note sociale attribuée par le parti. Toutes les activités, tous les investissements, tous les discours, toutes les opinions et tout le reste ne peuvent échapper à la férule de l'État. L'État ne reconnaît pas les limites de la loi ni ses engagements, dont ceux qu'il prend envers d'autres pays.
Le premier ministre a exprimé son admiration pour la dictature chinoise, et l'ambassadeur qu'il a lui-même choisi a dirigé une entreprise qui dépendait fortement de contrats conclus avec des sociétés d'État chinoises. Je me demande si Dominic Barton et le premier ministre ont lu 1984 pendant leur enfance et pensé qu'il serait formidable de vivre dans un tel pays.
Le régime politique répressif chinois n'est pas celui que souhaitent les Chinois. Ce n'est pas ce que souhaitent les citoyens d'autres pays asiatiques et africains, mais ils doivent composer de plus en plus souvent avec des responsables appuyés par la Chine. Les Canadiens ne souhaitent pas vivre sous un régime inspiré de l'autoritarisme orwellien. Presque tout le monde rejette un tel système. Par conséquent, nous devons nous serrer les coudes contre ce modèle politique oppressif. Le Parti conservateur appuie sans réserve l'avancement de la liberté, de la démocratie, des droits de la personne et de la primauté du droit. Une telle attitude est dans notre intérêt et elle reflète les valeurs canadiennes.
J'aimerais souligner certains des problèmes importants dont nous sommes témoins aujourd'hui et qui nécessitent que le Parlement agisse en créant ce comité spécial. Je m'attarderai sur la situation des Ouïghours, des Tibétains, des chrétiens, des Hongkongais, des étudiants, des adeptes du Falun Gong taïwanais et des habitants des pays voisins et de la région.
Le gouvernement chinois détient des musulmans ouïghours dans des camps de concentration. Cette mesure s'ajoute aux efforts qui sont déployés depuis longtemps pour détruire la culture et la foi des Ouïghours. Chaque ramadan, les musulmans ouïghours font face à la répression de leur droit de jeûner qui vise à contrer cette importante expression de piété personnelle.
Or, sous le gouvernement libéral, l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada a injecté plus de 48 millions de dollars canadiens dans Hikvision et Dahua, deux sociétés qui travaillent en étroite collaboration avec l'armée chinoise et qui jouent un rôle important dans l'emprisonnement des Ouïghours. Lorsque mon collègue de Calgary Shepard a soulevé ce point durant la période des questions plus tôt cette année, le gouvernement a déclaré que l'Office d'investissement du RPC a pour mandat de se concentrer sur le rendement du capital investi, mais à mon avis, il devrait l'obliger à respecter les normes de base en matière de moralité.
En tant que petit-fils d'une survivante de l'Holocauste, je ne puis accepter l'attitude blasée du gouvernement devant la participation de notre régime de pension à la construction de centres de détention de masse et de camps de concentration à l'époque où nous vivons. C'est précisément le genre d'islamophobie dont le gouvernement devrait s'occuper.
Nous assistons à l'intensification de la persécution des Tibétains, y compris la poursuite d'une politique de répression de longue date des libertés religieuses, culturelles et linguistiques. L'une des dernières idées du gouvernement chinois est de contrôler la lignée du dalaï-lama. Essentiellement, le gouvernement athée, matérialiste et marxiste prétend pouvoir savoir qui sera la réincarnation du dalaï-lama actuel. Ce serait drôle si ce n'était pas une question de vie ou de mort. En effet, c'est ce qui est arrivé lorsque le garçon ayant été identifié comme la réincarnation du panchen-lama a disparu et que le gouvernement chinois a présenté son propre candidat. C'est l'une des nombreuses violations graves de la liberté de religion au Tibet.
Nous ne devons pas négliger la persécution de plus en plus dévastatrice des chrétiens en Chine. Les violations de la liberté de religion peuvent prendre deux formes prédominantes. L'une d'elles est l'ancienne façon maoïste d'essayer d'éradiquer ouvertement la religion. Le modèle actuel le plus courant est celui où les mouvements religieux sont autorisés à maintenir les aspects cérémoniels externes de la religion, mais leurs enseignements doivent toujours être conformes à la doctrine de l'État. En d'autres mots, il est acceptable d'être chrétien tant que les enseignements et les attributs de Xi Jinping passent avant les enseignements et les attributs du Christ. Les mouvements chrétiens qui refusent cette approche conformiste sont confrontés à la répression.
Nous assistons à la répression des croyants ainsi qu'à la destruction violente d'églises, comme l'église Golden Lampstand, de même qu'à la destruction de lieux de culte appartenant à d'autres groupes confessionnels. Les efforts déployés pour contrôler ou éradiquer la religion constituent une violation grave des droits fondamentaux de la personne. Cette attitude est inacceptable en Chine, au Canada et partout ailleurs. La défense de la liberté de religion doit toujours prendre en compte les libertés des chrétiens, un aspect souvent négligé.
Examinons la situation à Hong Kong. Hong Kong a adopté la formule « un pays, deux systèmes » en 1997. Le gouvernement chinois a bafoué cet accord à maintes reprises et de nombreuses façons, affaiblissant ainsi l'autonomie de Hong Kong. Des Hongkongais m'ont fait remarquer à quel point la police de Hong Kong semble avoir adopté les caractéristiques de la police militaire continentale plutôt que celles de la propre force de police distincte de Hong Kong.
Les manifestants à Hong Kong craignent que le cadre « un pays, deux systèmes » ne soit pas respecté et ils ont cinq revendications précises: l'annulation du projet de loi sur l'extradition, l'abandon de l'étiquette d'émeutiers pour qualifier les manifestants, le retrait des accusations portées contre les manifestants, la tenue d'une enquête indépendante sur le comportement des policiers et la mise en place d'un véritable suffrage universel pour l'élection des membres du conseil législatif et du chef de l'exécutif. Nous appuyons ces objectifs et nous souhaitons en particulier souligner l'importance d'un véritable suffrage universel.
Un grand nombre de législateurs de Hong Kong sont élus au moyen d'un système de circonscriptions prétendument fonctionnelles, où quelques entreprises bien placées peuvent essentiellement faire leurs choix. De ce côté-ci de la Chambre, nous sommes solidaires de la population de Hong Kong et nous appuyons le concept de suffrage universel. À deux reprises aujourd'hui, j'ai demandé à la ministre si elle appuyait la mise en place d'un suffrage universel et d'un véritable régime démocratique à Hong Kong. Elle a parlé du droit de manifester, mais elle a refusé — les deux fois — de répondre à ma question sur le suffrage universel.
Je suis grandement préoccupé par les freins à la liberté d'expression dans les universités canadiennes, mais la situation est bien pire quand des gouvernements étrangers cherchent à limiter cette liberté dans les campus du pays. Beaucoup d'universités dépendent des revenus tirés des étudiants étrangers, et les universitaires étudiant la Chine sont tributaires de visas pour s'y rendre. Ce sont là de grandes vulnérabilités.
Quand Chemi Lhamo, une étudiante tibétaine bien connue, a été élue présidente de l'association des étudiants de l'Université de Toronto à Scarborough, elle a été la cible d'une campagne de harcèlement bien orchestrée. Quand un groupe d'étudiants de l'Université McMaster, les Musulmans pour la paix et la justice, ont organisé un événement pour mettre en lumière le sort réservé aux Ouïghours, des trouble-fête ont cherché à nuire au bon déroulement de l'événement. Le consulat chinois de Toronto a salué ces perturbations en ces termes: « Nous appuyons sans réserve les gestes justes et patriotiques posés par les étudiants chinois. » Le Canada n'a pas réagi, alors que le consulat avait porté atteinte à la souveraineté de notre pays.
Plus récemment, alors qu'ils se préparaient à visiter l'ambassade de Chine à Ottawa, les membres de la société des relations internationales de Carleton ont reçu pour consigne d'éviter les sujets qui prêtent à controverse.
Les étudiants universitaires doivent jouer le rôle de provocateurs réfléchis en quête de justice, un rôle traditionnellement occupé par des étudiants. On peut penser, par exemple, aux voyageurs de la liberté pendant le mouvement pour la défense des droits civiques, ou aux étudiants qui se sont dressés devant des chars d'assaut à la place Tiananmen pendant les manifestations pro-démocratie de 1989.
Les campus universitaires et la présence de nombreux étudiants internationaux venus de Chine devraient créer l'occasion d'un dialogue libre et ouvert, dialogue qui, s'il est vraiment libre et ouvert, favorisera la liberté et la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit. Or, ce dialogue ne peut survenir si les universités et les groupes d'étudiants subissent des pressions et de la manipulation de l'étranger. La protection de l'intégrité des institutions académiques canadiennes constitue un intérêt national pressant et j'espère que ce comité spécial pourrait étudier en particulier la situation qui touche les étudiants canadiens et étrangers dans les universités du pays.
Taïwan, une démocratie chinoise, est une lueur d'espoir pour toute la région. C'est l'exemple de ce que pourrait être la Chine, une société libre et ouverte qui protège et célèbre le patrimoine de la belle et ancienne civilisation chinoise. Malheureusement, de plus en plus, le gouvernement chinois cherche à s'ingérer dans les affaires intérieures de Taïwan. L'année dernière, Air Canada a fini par plier face à la demande de la Chine d'inscrire Taïwan comme faisant partie du territoire chinois, sans que le Canada réagisse.
J'ai souvent parlé de la persécution que subissent les adeptes du Falun Gong en Chine et plus particulièrement du problème du prélèvement et du trafic d'organes, une situation qui requiert une intervention immédiate.
Enfin, la politique coloniale du gouvernement chinois dans les pays d'Afrique et d'Asie est un problème urgent pour nombre d'habitants de ces pays et de Canadiens de divers horizons. Il est ironique de constater que le gouvernement de la Chine utilise aujourd'hui une approche similaire à celle que les puissances coloniales européennes ont utilisée en Chine dans le passé. Le gouvernement chinois impose des baux sur les infrastructures essentielles qui s'échelonnent sur des décennies, ce qui lui donne un moyen de pression sur les affaires internes des pays.
Le gouvernement libéral, en versant des centaines de millions de dollars à la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures sous contrôle chinois, ne s'oppose pas à ce programme; il le finance en fait activement. Le gouvernement répond à notre proposition de mettre sur pied un comité transversal qui se concentrerait uniquement sur ce problème en disant que la Chambre ou les parlementaires ne sont pas aptes à régler ce problème. Je crois que c'est le gouvernement qui n'est pas apte à le régler, et c'est pourquoi la surveillance des parlementaires s'impose.
Nous refusons toute forme d'admiration de la dictature, et nous croyons au principe du contrôle parlementaire du pouvoir exécutif. Fort heureusement, dans un Parlement où le gouvernement est minoritaire et n'a recueilli qu'un tiers des votes, l'opposition a le pouvoir de faire respecter le principe de la souveraineté du Parlement, et nous nous y emploierons.