Madame la Présidente, l'opposition officielle aurait volontiers collaboré avec le gouvernement et a fait maintes propositions en vue de faire adopter le projet de loi rapidement, comme l'ont réclamé tous les intervenants et les Canadiens en général, pour que nos relations commerciales avec les États-Unis ne soient plus affectées par l'incertitude.
Conscients de la tenue des élections fédérales en octobre dernier, les conservateurs ont offert d'entreprendre une étude préliminaire du projet de loi initial, le projet de loi C-100, au mois de mai. Ainsi, le gouvernement n'aurait eu qu'à faire l'étude article par article ultérieurement, mais il a refusé. Lorsque l'accord révisé a été signé en décembre, les conservateurs ont offert de revenir plus tôt que prévu après la pause des Fêtes pour travailler sur le projet de loi. Encore une fois, le gouvernement a refusé.
Le comité du commerce international avait reçu environ 200 demandes concernant l'ACEUM et la quantité de travail sur le projet de loi n'avait pas changé. Nous avons continué à suggérer d'entamer le travail plus tôt, mais le gouvernement a refusé.
Les conservateurs ont finalement offert de terminer l'étude article par article au plus tard le 5 mars, en supposant que le gouvernement ne rappellerait pas la Chambre des communes pendant la semaine de relâche. Le gouvernement a encore une fois refusé.
Une motion a été adoptée à l'unanimité au comité du commerce international demandant que le gouvernement rende publique son analyse des répercussions économiques de l'ACEUM. Le gouvernement ne l'a fournie qu'un jour avant que le comité procède à l'examen article par article du projet de loi, et le rapport du gouvernement sur les répercussions économiques comparait l'ACEUM au fait de ne pas avoir d'ALENA du tout.
Ce que cela veut dire, c'est que le gouvernement voulait faire croire aux Canadiens qu'un accord commercial, aussi bancal ou restrictif qu'il soit, serait en fait mieux qu'aucun accord.
Heureusement, l'Institut C.D. Howe a publié, le 21 février, un rapport comparant l'ACEUM à l'ancien ALENA. Il y affirmait que l'ACEUM ferait diminuer le PIB du Canada de 14,2 milliards de dollars et que les exportations du Canada vers les États-Unis diminueraient de 3,2 milliards de dollars pendant que les importations en provenance des États-Unis augmenteraient de 8,6 milliards de dollars. Le rapport de l'Institut C.D. Howe nous éclaire sur les raisons pour lesquelles le gouvernement a déclaré qu'il était important de soutenir l'adoption rapide du nouvel accord puis s'est dérobé à chaque occasion que nous lui avons donnée d'en accélérer l'adoption.
Nous nous retrouvons maintenant à devoir nous occuper de toutes les mauvaises mesures contenues dans cet accord. Sur les deux cents organisations et personnes qui ont voulu témoigner au comité, nous n'avons été en mesure d'en entendre qu'une centaine.
Les Manufacturiers et exportateurs du Canada ont dit, et je cite: « Si nous voulons que le Canada tire pleinement parti de cet accord, le gouvernement doit prendre des mesures pour s'assurer que le niveau de productivité des manufacturiers canadiens est équivalent à celui des autres pays de l'OCDE, afin qu'ils puissent réussir sur les marchés nord-américains et internationaux. »
La Chambre de commerce du Canada a déclaré: « L'ACEUM signé l'automne dernier était imparfait, mais nécessaire afin que les relations du Canada avec son principal partenaire commercial soient plus prévisibles. » La prévisibilité a diminué à un point où les gens disaient que la meilleure chose à faire était simplement de l'adopter.
La semaine dernière, dans ma circonscription, j'ai rencontré la chambre de commerce de ma région et j'ai aussi tenu une assemblée publique en compagnie du ministre du cabinet fantôme pour l'agriculture et de nombreux agriculteurs du coin.
Les producteurs, transformateurs et exportateurs du secteur agricole et agroalimentaire et toutes les petites entreprises qui se greffent au secteur pour offrir des services subissent les graves répercussions de l'incertitude économique créée par le gouvernement: augmentation des coûts et perte de clients en raison des politiques punitives du gouvernement; incertitudes concernant la relation avec notre plus important partenaire commercial; fermeture des voies d'approvisionnement causée par des grèves et par le manque de wagons-citernes, puisque le pétrole au pays doit être acheminé par rail plutôt que par des pipelines sécuritaires; barricades qui ont causé des situations dangereuses et qui empêchaient la libre circulation des marchandises; taxes sur le carbone qui s'appliquent aux systèmes de chauffage et de refroidissement dont a besoin le secteur manufacturier; augmentation des charges sociales et de la bureaucratie.
Les gens ont l'impression que le gouvernement ne tient pas compte de leurs besoins et qu'il s'en prend à eux. Ils comprennent que l'Accord Canada—États-Unis—Mexique est un accord imparfait, mais nécessaire pour améliorer la prévisibilité dans les relations entre le Canada et son plus important partenaire commercial. C'est pour cette raison que nous sommes prêts à appuyer le projet de loi C-4.
Voici ce qu'a déclaré l'Association de l'aluminium du Canada: « Dans le cadre de la collaboration en cours entre le gouvernement du Canada et l'industrie, nous avons l'intention d'entamer des discussions avec le gouvernement pour encourager le Mexique à mettre en œuvre une mesure similaire, ce qui contribuerait à limiter l'arrivée de produits non conformes aux règles de l'accord entre nos trois pays. » L'industrie canadienne de l'aluminium s'inquiète de l'incapacité du gouvernement à obtenir les mêmes protections concernant la production en Amérique du Nord pour l'aluminium que celles obtenues pour l'acier. Le Canada est le plus important producteur d'aluminium en Amérique du Nord.
Bien que la règle d'origine de 70 % incluse dans l'accord semble avantageuse sur papier, en réalité, si l'accord ne comprend pas l'exigence voulant que l'acier doive être fondu et coulé en Amérique du Nord, comme le demande l'industrie au Mexique, l'industrie nord-américaine deviendra vulnérable au dumping en provenance de l'étranger, et en particulier du Mexique.
Le gouvernement doit aussi présenter un rapport sur ce qu'il est advenu des 2 milliards de dollars de recettes tarifaires perçues à ce jour. Nous devons nous assurer que cet argent a réellement servi à soutenir les entreprises canadiennes qui ont été touchées par l'imposition de ces droits. Lorsque les fabricants de ma circonscription ont fait face à des fermetures, ils étaient très découragés par l'attitude du gouvernement, qui a, entre autres, suggéré de les aider en accordant davantage de prestations d'assurance-emploi à leurs employés. Les entreprises ne veulent pas plus d'assurance-emploi. Ils veulent conserver leurs travailleurs.
De plus, il y a un besoin urgent d'élaborer une stratégie pour commercialiser l'aluminium canadien comme étant le plus écologique de la planète, ce qui permettra de renforcer notre compétitivité sur les marchés existants et émergents. Cela s'inscrit dans le cadre du plan environnemental conservateur. Ce plan vise à vanter auprès du monde entier les mesures que nous avons déjà prises pour lutter contre les changements climatiques et à exposer la façon dont nous pouvons aider à ce chapitre d'autres pays qui n'ont pas des normes aussi strictes que le Canada en matière d'environnement.
Il y a aussi nos producteurs laitiers.
Le secteur laitier du Canada est le principal groupe que le gouvernement a laissé en plan pendant les négociations. Le gouvernement a réussi à la fois à réduire les débouchés pour les producteurs et les transformateurs laitiers canadiens et à limiter leur capacité de croissance grâce à l'exportation.
Le Canada a accepté l’inclusion, dans l’Accord Canada—États-Unis—Mexique, d’un plafond pour les exportations de certains des produits laitiers canadiens dans le monde, ce qui est sans précédent dans le contexte d’accords commerciaux régionaux. Étant donné que la prospérité de notre pays dépend d’un accès fiable aux marchés mondiaux, surtout en ce qui concerne les produits laitiers, le Canada ne doit pas consentir à ce genre de disposition dans tout accord commercial futur. Pourquoi le gouvernement accepterait-il d'accorder aux États-Unis un tel pouvoir sur notre souveraineté et notre capacité de commercer comme bon nous semble avec d'autres pays?
Cette concession est un affront à notre souveraineté, et il n'existe aucune excuse ni aucun argument valable pour expliquer cette capitulation et le fait que nous devrons maintenant demander humblement aux États-Unis la permission d'exporter nos produits laitiers vers les pays avec lesquels nous souhaitons avoir des échanges commerciaux.
Il y a vraiment beaucoup de choses qui clochent dans cet accord, comme l'ont souligné au comité des parties intéressées. Nous avons été en mesure d'émettre des recommandations à l'intention du gouvernement afin qu'il en corrige un grand nombre.
En ce qui concerne les marchés publics, aucun chapitre ne prévoit, pour le Canada, un accès garanti au marché américain.
En ce qui concerne le secteur de l'automobile, la valeur des exportations canadiennes de véhicules vers les États-Unis diminuera de 1,5 milliard de dollars par rapport à ce qu'elle est sous le régime commercial actuel prévu dans l'ALENA, et la valeur des importations baissera de 1,2 milliard de dollars. Compte tenu des difficultés auxquelles doit faire face le secteur ontarien de l'automobile — difficultés qui ont été exacerbées par les mesures gouvernementales ayant nui à la compétitivité du pays —, le gouvernement doit répondre à la demande du secteur de l'automobile qui souhaite que l'on retarde jusqu'à janvier 2021 l'application de l'ACEUM à ce secteur afin de lui permettre de s'adapter à la nouvelle conjoncture occasionnée par l'accord.
Pour ce qui est du secteur forestier, de nombreuses scieries ont dû fermer leurs portes. Des services de soutien, des petites entreprises et des localités entières sont paralysés en raison de l'indifférence du gouvernement. Ils ne méritent pas une telle attitude de la part du premier ministre. Ils s'attendent plutôt à ce que celui-ci reprenne immédiatement les négociations avec le représentant au commerce des États-Unis pour trouver une solution à ce problème.
En ce qui concerne l'exemption culturelle, le prix à payer pour la protéger dans l'ACEUM a été d'exposer le pays à des représailles tarifaires qui ne se limitent pas à ce secteur. Par exemple, si le Canada décide de mettre en place une taxe sur les services numériques pour une société telle que Netflix, les États-Unis seraient dans leur droit, aux termes de l'ACEUM, d'imposer des droits de douane à effet commercial égal sur toute exportation canadienne.
Ce ne sont là que quelques exemples de points sur lesquels le gouvernement a capitulé devant les États-Unis. La réponse américaine à ce document est un volumineux document consignant tous ses gains. Le nôtre, d'après ce qu'a dit l'ancien ministre du Commerce international de ce côté-ci, avait 72 pages. De toute évidence, le Canada ne s'en est pas sorti de façon particulièrement reluisante, mais, comme certaines parties prenantes l'ont dit, il faut simplement régler cela et passer à autre chose, en espérant que les prochaines ententes seront meilleures.